LES PARADOXES DE LA LITTÉRATURE
Ceux qui ont lu À la recherche du temps perdu et ceux qui hésitent encore sur le seuil de la cathédrale, intimidés par ses proportions ou par sa réputation, ont en tête deux livres très différents. Les seconds se figurent un austère entrelacs de phrases labyrinthiques, d’interminables dissections d’aubépines. Les premiers savent d’expérience que le chef-d’œuvre proustien séduit autant par sa drôlerie que par ses morceaux de bravoure ou son exploration des grands fonds de l’âme humaine.
L’humour intervient tôt dans le roman-fleuve, dès les premières pages du premier volume intitulé . Et sous une forme très singulière. Flora et Céline, deux grand-tantes du narrateur, entendent remercier Swann) que Flora lance finement : Dialogues absurdes qui annoncent les échanges entre les Smith et les Martin dans . De même, la famille du petit Marcel se demande chaque fois qui vient de sonner à sa porte, alors même qu’elle ne reçoit jamais d’autre visite que celle de Swann – comique de répétition apparenté au sketch du pompier dans la pièce d’Eugène Ionesco, fin lecteur de Proust par ailleurs.