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Le droit fiscal en 2017: CUP 172 - Questions choisies
Le droit fiscal en 2017: CUP 172 - Questions choisies
Le droit fiscal en 2017: CUP 172 - Questions choisies
Livre électronique670 pages7 heures

Le droit fiscal en 2017: CUP 172 - Questions choisies

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À propos de ce livre électronique

Les Éditions Anthemis vous proposent un outil complet pour comprendre le droit fiscal belge.

Tant du point de vue de ses principes que de sa technique, le droit fiscal belge a connu, ces derniers mois, des évolutions remarquables. Le présent ouvrage, à l’initiative du Tax Institute de l’Université de Liège, commente les plus importantes d’entre elles en se concentrant sur les besoins spécifiques des avocats.

La première partie est consacrée au droit fiscal matériel, à travers trois thématiques choisies en raison de leur intérêt tout particulier ou de leur actualité :
- la délicate conjugaison de la T.V.A. et des droits d’enregistrement en matière de fiscalité immobilière ;
- le régime fiscal des sociétés holding et des plus-values internes (objet d’amendements législatifs récents) ;
- le crowdfding et son intérêt pour les avocats.

La seconde partie se penche sur des questions procédurales proprement dites :
- l’avocat et son secret professionnel face à l’administration fiscale et face à ses obligations déclaratives en matière de blanchiment : comment « bien » faire ?
- « Antigone » et le droit fiscal : quelles évolutions ?
- la régularisation fiscale dite « quater » : coût, incidence, opportunité et imbrication du droit fédéral et des droits régionaux.

Un ouvrage écrit par des professionnels, pour des professionnels.

À PROPOS DES ÉDITIONS ANTHEMIS

Anthemis est une maison d’édition spécialisée dans l’édition professionnelle, soucieuse de mettre à la disposition du plus grand nombre de praticiens des ouvrages de qualité. Elle s’adresse à tous les professionnels qui ont besoin d’une information fiable en droit, en économie ou en médecine.
LangueFrançais
ÉditeurAnthemis
Date de sortie23 août 2017
ISBN9782807204638
Le droit fiscal en 2017: CUP 172 - Questions choisies

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    Aperçu du livre

    Le droit fiscal en 2017 - Marc Bourgeois (dir.)

    Le droit fiscal en 2017Le droit fiscal en 2017

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    sur www.anthemis.be

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Communications s.p.r.l. (Limal) pour le © Anthemis s.a.

    Jurisquare

    La version en ligne de cet ouvrage est disponible sur la bibliothèque digitale ­Jurisquare à l’adresse www.jurisquare.be.

    Réalisé avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles

    Réalisé avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles

    © 2017, Anthemis s.a. – Liège

    Tél. 32 (0)10 42 02 90 – info@anthemis.be – www.anthemis.be

    Toutes reproductions ou adaptations totales ou partielles de ce livre, par quelque procédé que ce soit et notamment par photocopie, réservées pour tous pays.

    Dépot légal : D/2017/10.622/46

    ISBN : 978-2-8072-0463-8

    Mise en page : Communications s.p.r.l.

    ePub : Communications s.p.r.l.

    Couverture : Vincent Steinert

    Sommaire

    1 – La coordination des droits d’enregistrement et de la T.V.A. sur les opérations immobilières

    Vincent Sepulchre, administrateur délégué SOGEF S.C.R.L., professeur à l’E.S.S.F. chargé de cours à l’U.Lg., maître de conférences à l’U.L.B.

    2 – Quand le législateur s’attaque aux plus-­values internes…

    Denis-­Emmanuel Philippe, avocat aux barreaux de Bruxelles et de Luxembourg, maître de conférences à l’U.Lg.

    Damien Nicolas, avocat au barreau de Bruxelles

    3 – La fiscalité du crowdfunding

    Kim Van de Velden, assistante à l’U.C.L.

    Sébastien Wolff, chercheur rattaché à la Chaire PwC de droit fiscal de l’U.C.L., expert fiscalité au Bureau fédéral du Plan

    4 – L’avocat et son secret professionnel face à l’administration fiscale et face à ses obligations déclaratives en matière de blanchiment : comment « bien faire » ?

    Sabrina Scarnà, avocate au barreau de Bruxelles, chargée de conférences à la Solvay Brussels School of Economics and Management de l’U.L.B.

    François Herbecq, avocat au barreau de Bruxelles

    5 – « Antigone » en droit fiscal : quelle évolution ?

    Marc Bourgeois, professeur ordinaire à l’U.Lg., co-­président du Tax Institute de l’U.Lg.

    Céline Verscheure, assistante-­chercheuse à l’U.Lg., co-­responsable de la cellule fiscalité et T.V.A. de l’U.Lg.

    6 – La saga des régularisations des avoirs et revenus non déclarés : DLUquater, stop ou encore ?

    Luc Herve, avocat au barreau de Liège, chargé de cours à l’U.Lg., maître de conférences à l’U.Lg. (Tax Institute), professeur à l’E.S.S.F. et à la C.B.C.E.C. Liège

    1

    La coordination des droits d’enregistrement et de la T.V.A. sur les opérations immobilières

    Vincent Sepulchre¹

    administrateur délégué SOGEF S.C.R.L.

    professeur à l’E.S.S.F.

    chargé de cours à l’U.Lg.

    maître de conférences à l’U.L.B.

    Sommaire

    Introduction

    Section 1

    Les aspects T.V.A. des ventes de biens immeubles

    Section 2

    La coordination avec les droits d’enregistrement

    Section 3

    Quelle coordination entre droits d’enregistrement et T.V.A. en cas de revente à court terme ?

    Introduction

    Les droits immobiliers sont à la croisée des chemins entre deux fiscalités indirectes, à savoir la taxe sur la valeur ajoutée et les droits d’enregistrement.

    En effet,

    – tout d’abord, les droits d’enregistrement constituent l’un des impôts les plus anciens de notre système fiscal belge, directement importés en Belgique depuis la France révolutionnaire de 1795.

    Ces droits sont en principe perçus à l’occasion de l’enregistrement d’un acte ou d’un écrit, c’est-à-dire lors de la formalité qui consiste dans la copie, l’analyse ou la mention de cet acte ou de cet écrit par le receveur de l’enregistrement, dans un registre à ce destiné. Cette formalité donne lieu à la perception d’un impôt dénommé droit d’enregistrement (art. 1er C. enr.).

    De ce fait, soit pour le motif qu’il s’agit d’actes passés devant un notaire belge, soit qu’il s’agisse d’actes translatifs ou déclaratifs de propriété ou d’usufruit d’immeubles situés en Belgique, soit qu’il s’agisse de baux, sous-baux ou cessions de bail, les droits d’enregistrement sont applicables, par nature, à ces actes et c’est cela qui donne à ces droits une connotation immobilière tout à fait particulière dans notre système fiscal ;

    – ensuite, la taxe sur la valeur ajoutée, qui a pour but réel de soumettre à un prélèvement fiscal la consommation des particuliers et des personnes morales y assimilées, frappe toutes les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (art. 2 C.T.V.A.).

    Or, dans cette qualification de « livraison de biens », figurent également toutes les mutations contractuelles de droits réels portant sur des biens immeubles.

    Toutefois, à la différence des droits d’enregistrement, la T.V.A. ne s’applique qu’aux opérations qui sont effectuées à titre onéreux (sauf application des prélèvements de l’article 12 du Code de la T.V.A., tout à fait particuliers ; par contre, les droits d’enregistrement s’appliquent tant aux ventes qu’aux donations de biens immeubles, bien qu’à un tarif différent ; comp. art. 44 et 131 C. enr.), ET qui sont effectuées par un assujetti à la T.V.A. (soit un assujetti exerçant une activité économique et agissant dans le cadre de cette activité économique, soit un assujetti n’exerçant pas d’activité économique indépendante mais pouvant opter, pour certaines opérations particulières, pour la qualité d’assujetti à la T.V.A. ; en revanche, l’obligation de l’enregistrement de l’acte et, partant, les droits d’enregistrement s’appliquent quelle que soit la qualité du vendeur, professionnel ou non).

    Néanmoins, ces deux prélèvements fiscaux distincts peuvent se superposer pour une seule et même opération juridique, moyennant toutefois certaines règles visant à assurer une absence de double imposition. Il convient donc de distinguer précisément ce recoupement pour chacun de ces deux prélèvements et la manière de les articuler dans une seule et même opération juridique, tout en évitant de tomber dans certains pièges en matière d’impôts sur les revenus.

    Section 1

    Les aspects T.V.A. des ventes de biens immeubles

    A. Les conditions d’imposabilité à la T.V.A. pour les ventes de biens et les prestations de services

    En T.V.A., le point de départ du raisonnement est d’analyser dans quelle mesure un producteur de biens et de services se voit appliquer la T.V.A. sur sa production et, partant, quel est son statut T.V.A.

    Sur cette production de biens et de services, l’article 2 du Code de la T.V.A. dispose que

    « Sont soumises à la taxe, lorsqu’elles ont lieu en Belgique, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. »

    Même si le champ d’application de la T.V.A. doit être interprété de manière large², ce champ d’application est donc défini par un certain nombre de conditions que doit réunir une opération.

    Selon l’article 2 du Code de la T.V.A., une opération est imposable à la T.V.A. lorsque :

    – cette opération est effectuée par un assujetti exerçant une activité économique, à savoir une entreprise individuelle (personne physique) ou société (personne morale), quel que soit le lieu d’établissement de cet assujetti (Belgique ou autre État)³ ;

    – cet assujetti agit en tant que tel pour cette opération, à savoir lorsque cet assujetti agit dans le cadre de son activité économique, soit que l’opération constitue une activité économique habituelle ou fasse partie d’un ensemble d’opérations semblables constituant une telle activité économique habituelle, soit que l’opération en soit le prolongement (cession de moyens d’exploitation d’une activité économique) ;

    – cette opération constitue une livraison de biens (opération par laquelle un vendeur transfère à un tiers-­acheteur, la plupart du temps par contrat, le pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire) ou une prestation de services (autre opération qu’une livraison de biens, par laquelle un vendeur s’engage envers un tiers-­acheteur, la plupart du temps par contrat, à effectuer ou à ne pas effectuer quelque chose ayant une utilité pour ce tiers) ;

    – cette livraison de biens ou prestation de services est effectuée à titre onéreux, à savoir que chacune des parties doit être astreinte à donner ou faire quelque chose, à une contrepartie.

    B. L’existence d’un bien fourni à un tiers, requise pour l’imposabilité à la T.V.A.

    1. La définition de la livraison de biens, en T.V.A.

    Pour la T.V.A., une opération est une livraison de biens par nature lorsqu’elle réunit les conditions suivantes, lorsqu’il s’agit d’un bien immeuble.

    1° L’opération a pour objet un bien corporel, au sens du Code de la T.V.A. (art. 9) ;

    est un bien corporel, au sens du Code de la T.V.A., toute chose meuble ou immeuble qui existe et qui est corporelle, et ce, y compris l’électricité, le gaz, la chaleur et le froid ;

    les droits réels, autres que le droit de propriété, donnant à leur titulaire un pouvoir d’utilisation sur les biens immeubles⁴, sont également considérés comme des biens corporels pour la T.V.A. ; sont toutefois exclus de la qualification de biens, pour être considérés comme des services, les droits d’emphytéose constitués ou cédés par une entreprise pratiquant la location-financement de biens immeubles dans le cadre d’un contrat de location-financement d’immeubles au sens de l’article 44, § 3, 2°, b., du Code de la T.V.A.

    2° L’opération a pour but le transfert du pouvoir de disposer de ce bien comme un propriétaire (art. 10 et 11 C.T.V.A.) ;

    le bien doit donc être transféré à un acheteur de telle manière que ce dernier puisse en disposer comme un propriétaire, même si le droit de propriété sur ce bien ne lui est pas formellement transféré ; est donc considéré comme « livraison d’un bien », au sens européen des termes, le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel par une partie qui habilite l’autre partie à en disposer en fait comme si elle était la propriétaire de ce bien, même s’il n’y a pas de transfert de la propriété juridique du bien⁵ ;

    dans la pratique, tous les contrats du droit civil belge, portant sur des droits réels, transfèrent automatiquement à l’acheteur le droit de propriété sur ces droits réels, qu’il s’agisse par exemple d’une vente (volontaire ou publique), d’un échange (même avec soulte) ou même d’un apport en société.

    3° L’opération a la forme d’un contrat mettant ce bien à la disposition d’un tiers ;

    un contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes juridiquement distinctes, en vue de produire des effets juridiques dont l’exécution peut être exigée même en justice ; il faut donc que ce contrat entraîne un avantage pour un tiers, ici la livraison d’un bien immeuble en faveur d’un tiers-­acheteur ;

    bien que non contractuelle, est toutefois considérée comme une livraison de biens la transmission du pouvoir de disposer d’un bien comme un propriétaire en vertu d’une réquisition faite par une autorité publique ou en vertu d’une autre règle légale (loi, décret, expropriation… ; art. 10, § 2, C.T.V.A.).

    2. Le traitement des opérations complexes en T.V.A., qui concernent des biens immeubles

    a) Importance de la distinction entre livraison de biens immeubles, et prestations de services immobiliers

    En examinant cette définition de la livraison de biens, la différence peut être subtile entre livraison d’un bâtiment et prestations de services de construction d’un bâtiment finalement délivré au maître de l’ouvrage.

    Or, la frontière séparant ces deux opérations relevant de la législation en matière de T.V.A., est régulièrement floue dans le secteur immobilier, notamment lorsque le transfert de propriété se réalise durant la phase de construction, la livraison pouvant alors porter, soit sur un bâtiment sur plan, soit sur un bâtiment en cours de construction, soit sur des bâtiments nouvellement construits. Pourtant, les conséquences fiscales découlant d’une livraison de bien, divergent par rapport à celles dégagées par la prestation de services : pour ces dernières, citons notamment l’absence de préfinancement de la taxe grâce au report de perception applicable aux services (art. 20 de l’arrêté royal no 1 ou art. 51, § 2, 5°, C.T.V.A.). À cet égard, il peut être également pertinent de distinguer les taux de T.V.A. applicables sur certains services immobiliers, de ceux qui frappent les livraisons d’immeubles (arrêté royal no 20, du 20 juillet 1970).

    b) Le traitement des opérations complexes en T.V.A.

    Pour assurer un traitement uniforme des opérations principales qui comprennent également des prestations de services ou des livraisons de biens accessoires, livrées ou prestées avec cette opération principale, une jurisprudence constante de la Cour de justice considère que chaque prestation de services et chaque livraison de biens doivent en principe être considérées comme distinctes et indépendantes. Toutefois, il ne faut pas appliquer ce principe au point d’en arriver à décomposer artificiellement certaines livraisons de biens et prestations de services qui, logiquement, forment un tout. De ce fait, il importe en premier lieu de rechercher les éléments caractéristiques de l’opération en cause pour déterminer si l’assujetti livre au consommateur plusieurs prestations principales distinctes ou une prestation unique⁶.

    Il y aura donc une opération unique, pour la T.V.A., dans les deux situations suivantes mises en évidence par la Cour de justice⁷.

    a) Il s’agit d’une opération unique, notamment lorsqu’un ou plusieurs éléments doivent être considérés comme constituant l’opération principale, alors qu’un ou plusieurs autres éléments doivent être regardés comme une ou plusieurs opérations accessoires⁸ ; dans ce cas, l’ensemble des opérations accessoires partagera le sort fiscal de l’opération principale.

    Une opération doit être considérée comme accessoire à une prestation principale lorsqu’elle ne constitue pas pour la clientèle une fin en soi, mais le moyen de bénéficier dans les meilleures conditions du service principal, le fait qu’un prix unique soit facturé n’ayant pas d’importance décisive à cet égard⁹.

    b) En outre, dans certaines circonstances, plusieurs prestations formellement distinctes, qui pourraient être fournies isolément et ainsi donner lieu, séparément, à taxation ou à exonération, doivent être considérées comme une opération unique lorsqu’elles ne sont pas indépendantes¹⁰.

    Lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par un assujetti à un consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, sont si étroitement liés qu’ils forment objectivement, sur un plan économique, un tout dont la dissociation revêtirait un caractère artificiel, l’ensemble de ces éléments ou de ces actes constitue ainsi une prestation unique aux fins de l’application de la T.V.A.¹¹.

    Néanmoins, il n’existe pas de règle absolue quant à la détermination de l’étendue d’une prestation du point de vue de la T.V.A. et il convient dès lors de prendre en considération l’ensemble des circonstances¹², afin de déterminer si l’on se trouve en présence de deux ou de plusieurs prestations distinctes ou d’une prestation unique¹³. À cet égard, peu importe le fait que, dans d’autres circonstances, les éléments en cause peuvent être ou sont fournis isolément étant donné que cette possibilité est inhérente au concept d’opération unique composée¹⁴.

    L’élément prédominant doit donc être déterminé en se fondant sur le point de vue du consommateur moyen et en ayant égard, dans le cadre d’une appréciation d’ensemble, à l’importance qualitative, et non simplement quantitative, des éléments relevant, par exemple, d’une exonération, par rapport à ceux n’en relevant pas¹⁵.

    Dans le cas d’une telle opération unique, il ne faudra alors PAS distinguer et ventiler en fonction des différents biens ou services mais soumettre (ou ne pas soumettre) à la T.V.A. la totalité de la somme due par le client selon le « statut » de l’opération principale, SAUF dans certains cas bien précis où l’administration fiscale n’a pas jugé économiquement juste de respecter ce principe.

    c) Application aux opérations complexes relatives aux biens immeubles

    En appliquant ces principes, la différence peut être subtile entre livraison d’un immeuble et prestations de services liées à cet immeuble.

    1° Dans le cas d’une première affaire soumise à la Cour de justice de l’Union européenne,

    – des époux, de même que d’autres candidats à la construction, avaient chargé une société financière d’acquérir pour eux un terrain à bâtir et d’y édifier un bâtiment à usage d’habitation ; dans l’exécution de ce contrat, ils avaient acquis une part de copropriété sur un terrain non bâti ;

    – l’ensemble des copropriétaires, regroupés dans une société de droit civil, avaient conclu un contrat d’entreprise avec une société de construction aux fins de l’édification du bâtiment ;

    – les époux, quant à eux, avaient conclu un certain nombre de contrats, à savoir un contrat d’assistance à la construction, un contrat de gestion locative, un contrat concernant l’obtention de documents fiscaux, un contrat de cautionnement et un contrat d’intermédiaire en matière de financement.

    Dans un tel schéma, la question se posait donc de savoir si les livraisons de biens et les prestations de services dont il s’agissait et qui visaient à l’édification du bâtiment forment, ensemble avec l’opération portant sur le terrain, une opération immobilière unique pouvant être qualifiée de livraison d’un bâtiment et du sol y attenant, en raison de la connexité économique de l’ensemble des opérations partielles considérées et de leur finalité commune qui est la réalisation du bâtiment sur le terrain acquis.

    La Cour de justice a répondu par la négative. On ne saurait parler d’une telle opération unique, que lorsque les deux catégories de biens livrés, à savoir le bâtiment et le sol, font, au regard du droit de la vente, l’objet d’une seule et même livraison, en ce sens qu’il s’agit de la livraison d’un terrain bâti ; or, la Cour de justice n’a pas considéré que les livraisons de biens et les prestations de services des entrepreneurs et artisans du bâtiment, qui constituaient des opérations juridiquement distinctes de l’opération portant sur le terrain, intervenue avec un autre entrepreneur, formaient, ensemble avec cette dernière opération, une unité susceptible d’être qualifiée de livraison unique d’un bâtiment ou d’une fraction de bâtiment et du sol y attenant.

    Ces livraisons de biens et prestations de services des entrepreneurs et artisans du bâtiment suivent donc leur propre régime d’imposabilité et d’exemption éventuelle, sans être visées par l’exemption de l’article 44, § 3, 1°, du Code de la T.V.A.¹⁶.

    Selon nous, il convient donc de confronter la décision administrative no E.T.120.125 du 13 mai 2015, à cette jurisprudence de la Cour de justice ; en effet, cet arrêt de la Cour contredit clairement l’interprétation de cette décision, lorsqu’elle vise une situation trilatérale vendeur → consommateur et entrepreneur → consommateur. En effet, selon cette décision en ce qui concerne une telle situation trilatérale, « l’administration estime que, outre la possibilité de requalifier l’opération (comp. arrêt Don Bosco), la question de l’existence d’une pratique abusive au sens de l’article 1er, § 10, du Code de la T.V.A., peut être soulevée le cas échéant, en fonction des éléments de fait à examiner au cas par cas. Si les différents éléments ainsi recueillis démontrent que les conventions proposées par les deux assujettis sont liées, il convient alors d’invoquer la disposition précitée ainsi que la jurisprudence Part Services et de considérer que le découpage de l’opération entre deux assujettis a pour but essentiel d’échapper à l’application du taux normal de la taxe. » ; or, il nous semble exister plus qu’une nuance entre la conclusion de l’arrêt Don Bosco (voy. infra 2°), qui requiert des opérations indivisiblement liées entre elles (selon le texte même de cette décision administrative), et des opérations simplement « liées ». Selon nous, seul un tel lien d’opérations indivisiblement liées entre elles, dans le chef des parties, où il existerait, dans la réalité juridique entre les parties, une vente d’immeuble et non des prestations de services immobilières, pourraient éventuellement se voir appliquer cette décision administrative. Les réalités juridiques, telles que la responsabilité juridique différente de la garantie du fournisseur (garantie des vices cachés ou garantie décennale des entrepreneurs ? Obligation civile de délivrance d’un bien vendu ou responsabilité contractuelle de travaux ? Modalités de transfert des risques au client ?) peuvent donc s’opposer aux conclusions hâtives et simplistes de cette décision, dans une telle situation trilatérale, outre le commentaire que nous ferons encore ­ci-après quant à l’arrêt Part Services de la Cour de justice, cité par l’administration fiscale.

    2° Dans une autre affaire plus récente soumise à la Cour,

    – le vendeur a transféré à l’acheteur une parcelle de terrain sur laquelle étaient implantés deux bâtiments vétustes que l’acheteur avait l’intention de démolir afin d’en reconstruire de nouveaux sur le terrain ainsi libéré ;

    – à cette fin, il avait été convenu que le vendeur demanderait un permis de démolition, conclurait un contrat avec une entreprise en vue de la démolition des bâtiments concernés et se ferait facturer les coûts afférents à ­celle-ci qui seraient supportés, in fine, par l’acheteur, ces frais s’ajoutant, alors au prix d’acquisition ;

    – un permis de démolir a alors été délivré au vendeur qui a facturé lesdits travaux à l’acheteur tel que cela avait été convenu.

    Dans ces circonstances, la question s’est posée de savoir si, du point de vue de la T.V.A., la livraison du bien immeuble et la démolition desdits bâtiments doivent être considérées comme deux opérations distinctes et indépendantes devant être appréciées séparément, ou comme une opération complexe unique composée de plusieurs éléments.

    La Cour de justice a jugé que :

    a) lorsqu’une opération est constituée d’un faisceau d’éléments et d’actes, il y a lieu de prendre en considération toutes les circonstances dans lesquelles se déroule l’opération en question, aux fins de déterminer si l’on se trouve en présence de deux ou de plusieurs opérations distinctes ou d’une opération unique. Dans cet objectif, il convient donc, de tenir compte de prestations supplémentaires, telles que celles qui ont été effectuées par le vendeur du bien immeuble, afin de déterminer si l’opération en cause est exonérée de la T.V.A. ;

    b) dans ce cas, force est de constater que les actes accomplis par le vendeur, examinés aux fins de la T.V.A., sont étroitement liés. Les travaux de démolition et la livraison de la parcelle de terrain en soi se sont même chevauchés. Ces actes ont pour objet économique la fourniture d’un terrain prêt à être bâti. À cet égard, il ne saurait être considéré, sans qu’il soit versé dans l’artifice, que l’acheteur a acquis auprès de la même personne, tout d’abord, d’anciens bâtiments avec le sol y attenant, lequel, en l’état, ne présentait aucune utilité aux fins de son activité économique, et, ensuite seulement, les prestations relatives à la démolition des bâtiments, seules propres à conférer une telle utilité au terrain ;

    c) par conséquent, la livraison d’un terrain sur lequel est encore implanté un bâtiment vétuste, qui doit être démoli afin que soit érigée à son emplacement une nouvelle construction et dont la démolition a déjà commencé avant cette livraison, ainsi que la démolition de ce bâtiment, doivent, dans les circonstances prédécrites, être considérées comme formant une opération unique au regard de la T.V.A., ayant, dans son ensemble, pour objet non pas la livraison du bâtiment existant, mais celle d’un terrain non bâti¹⁷.

    Il est donc vrai que cet arrêt de la Cour de justice va dans le même sens que la décision administrative précitée no 120.125 du 13 mai 2014, lorsqu’elle vise une situation bilatérale vendeur/démolisseur/entrepreneur → consommateur, aux conditions que les deux opérations sont liées indissociablement dans une même unité d’intention commune aux parties, et qu’il existe un lien nécessaire entre les deux opérations pour que le client obtienne de son fournisseur le véritable objet de la convention, à savoir la livraison d’un bien immeuble considéré dans son état après l’ensemble des opérations.

    Nous pouvons également faire un parallèle entre les opérations immobilières et deux arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne, certes étrangers aux opérations immobilières.

    1° Dans une affaire Part Services, régulièrement citée par l’administration fiscale belge pour tenter d’appuyer juridiquement sa décision précitée no 120.125 du 13 mai 2014, il s’agissait d’une affaire où une société IFIM concluait avec un utilisateur un contrat ayant pour objet la jouissance d’un véhicule automobile et une option d’achat de ­celui-ci, moyennant le versement de loyers, la constitution d’un dépôt de garantie correspondant au coût du bien non couvert par les loyers ainsi que la fourniture d’un cautionnement illimité. Une deuxième société, faisant partie du même groupe, Italservice concluait avec l’utilisateur un contrat en vertu duquel elle assurait le bien contre des risques autres que la responsabilité civile et garantissait, au moyen du financement du dépôt de garantie et de la fourniture du cautionnement illimité, le respect des engagements pris par ledit utilisateur à l’égard d’IFIM. En contrepartie, l’utilisateur versait par avance à Italservice un montant qui emportait une diminution du total des loyers convenus entre lui et IFIM, jusqu’à réduire ce total, dans la plupart des cas, à un montant à peine supérieur au coût du bien, outre une commission de 1 % versée à un consultant. L’utilisateur chargeait Italservice de verser le montant financé à IFIM, pour son compte, au titre du dépôt de garantie prévu par le contrat de jouissance et Italservice confiait à IFIM l’exécution du contrat avec l’utilisateur, cette dernière société recevant d’Italservice un complément de rémunération en tant qu’intermédiaire et, en cas de défaillance de l’utilisateur, une somme équivalant à celle promise par Italservice à ­celui-ci, à titre de ristourne, en cas de respect de ses obligations de paiement des loyers.

    Dans cette affaire, outre la question des pratiques abusives, la Cour de justice a tout d’abord considéré que chaque prestation doit normalement être considérée comme distincte et indépendante. Toutefois, dans certaines circonstances, plusieurs prestations formellement distinctes, qui pourraient être fournies séparément et ainsi donner lieu, distributivement, à taxation ou à exonération, doivent être considérées comme une opération unique lorsqu’elles ne sont pas indépendantes ; tel est le cas, par exemple, lorsque, au terme d’une analyse même simplement objective, il est constaté qu’une ou plusieurs prestations constituent une prestation principale et que la ou les autres prestations constituent une ou plusieurs prestations accessoires partageant le sort fiscal de la prestation principale. En particulier, une prestation doit être considérée comme accessoire à une prestation principale lorsqu’elle ne constitue pas pour la clientèle une fin en soi, mais le moyen de bénéficier dans les meilleures conditions du service principal du prestataire.

    Selon la Cour, il peut également être considéré que l’on se trouve en présence d’une prestation unique lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par l’assujetti sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule prestation économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel¹⁸.

    2° Toutefois, il faut aussi souligner un arrêt plus récent de la même Cour, qui tempère fortement les ardeurs que l’on pourrait ressentir à la lecture de l’arrêt Part Services. En effet, dans l’affaire BGZ˙ Leasing, la Cour de justice a décidé que, lorsqu’une entreprise donne des objets en crédit-bail, le bailleur peut aussi offrir à ses clients la possibilité de leur fournir une assurance, ce dernier service d’assurance pouvant être exonéré de la T.V.A. au titre d’un service indépendant du crédit-bail¹⁹ ; en effet, même s’il est vrai que ces deux éléments sont susceptibles d’être fournis ensemble, toute opération d’assurance présente, par sa nature, un lien avec le bien qu’elle a pour objet de couvrir et il s’ensuit que le bien donné en crédit-bail et l’assurance de ­celui-ci présentent, nécessairement, un certain lien de connexité entre elles. Néanmoins, un tel lien ne saurait suffire, en ­lui-même, pour déterminer s’il existe ou non une prestation unique complexe aux fins de la T.V.A. Ainsi, selon ce dernier arrêt de la Cour de justice,

    – chaque prestation doit normalement être considérée comme distincte et indépendante et un service de crédit-bail et la fourniture d’une assurance afférente au bien faisant l’objet de ce dernier ne peuvent être considérés comme étant si étroitement liés qu’ils forment une opération unique. En effet, le fait d’apprécier séparément de telles prestations ne saurait constituer, en soi, une décomposition artificielle d’une opération économique unique, susceptible d’altérer la fonctionnalité du système de T.V.A. ;

    – une telle prestation d’assurance, qui constitue une prestation indépendante et une fin en soi pour le preneur, ne saurait pas non plus constituer des frais accessoires à une opération de crédit-bail, devant être pris en compte aux fins du calcul de la base d’imposition de cette dernière opération. En effet, dans de telles circonstances, les frais d’assurance constituent la contrepartie de la prestation d’assurance afférente au bien faisant l’objet du crédit-bail, et non la contrepartie de la prestation de crédit-bail elle-même.

    Ce dernier arrêt BGZ˙ Leasing de la Cour de justice est donc à approuver, selon nous, tout comme l’arrêt Part Services pouvait également être approuvé : en effet, les circonstances sont différentes. Si, dans l’affaire Part Services, le financement est intrinsèquement lié à l’idée de leasing et doit donc faire partie de la base d’imposition à la T.V.A., l’affaire BGZ˙ Leasing est relative à une opération de crédit-bail qui, par nature, ne comprend pas nécessairement une assurance. D’ailleurs, tous les clients du crédit-bail ne recouraient pas à une telle assurance optionnelle et complémentaire²⁰.

    En matière d’opérations complexes immobilières, nous rappelons donc que, selon la Cour de justice, chaque prestation de services et chaque livraison de biens doivent en principe être considérées comme distinctes et indépendantes : il n’existe donc aucune présomption que des opérations distinctes devraient être considérées comme uniques lorsqu’elles sont reprises dans une seule et même convention. Bien au contraire, les arrêts Part Services et BGZ˙ Leasing confirment bien, si besoin en était, que la simple connexité entre différentes opérations ne suffit pas pour en faire une opération unique pour la T.V.A. : comme toute exception à une règle générale, la réunion dans une opération unique de différentes opérations distinctes, doit donc recevoir une interprétation restrictive, comme l’a fait l’arrêt Kerrutt précité de la Cour en matière immobilière. À tout le moins, la position administrative de la décision administrative no 120.125 du 13 mai 2014, précitée, devrait donc être profondément revue pour tenir compte de la nécessité de ce lien indissociable présent entre les parties, au vu des obligations juridiques qui sont réellement assumées par chacune d’entre elles.

    d) Impact des pratiques abusives en T.V.A. sur les opérations complexes relatives aux biens immeubles

    Il faut également confronter les principes européens de la T.V.A. à la nouvelle notion de « pratique abusive » introduite dans le Code de la T.V.A. par la loi-­programme du 20 juillet 2006, après qu’elle a été appliquée en 2006 à la matière de la T.V.A. par la Cour de justice.

    En effet, concernant cette application du principe de l’interdiction des « pratiques abusives » en T.V.A., la Cour de justice a rendu ses arrêts dans les affaires University of Huddersfield Higher Education Corporation c. Commissioners of Customs & Excise, (C-223/03), Halifax plc, Leeds Permanent Development Services Ltd, County Wide Property Investments Ltd c. Commissioners of Customs & Excise (C-255/02), et BUPA Hospitals Ltd, Goldsborough Developments Ltd c. Commissioners of Customs & Excise (C-419/02), en date du 21 février 2006²¹. Cette jurisprudence a été ensuite complétée par l’arrêt Ministerio dell’Economia e delle Finanze c. Part Service Srl (C-425/06) du 21 février 2008²².

    Or, nous soulignons tout d’abord que, selon une jurisprudence constante de la Cour de justice, le principe de base de la T.V.A. est la prise en compte de la réalité économique, qui constitue un critère fondamental pour l’application du système commun de T.V.A.²³ ; en effet, les objectifs ou les résultats de l’activité sont, en tant que tels, sans pertinence pour déterminer le champ d’application de la sixième directive²⁴. De ce fait, selon la Cour de justice, pour faciliter les actes inhérents à l’application de la T.V.A., il faut prendre en considération, sauf dans des cas exceptionnels, la nature objective de l’opération en cause ; un assujetti qui, en vue d’atteindre un but économique déterminé, a le choix entre des opérations exonérées et des opérations taxables doit donc, dans son propre intérêt, régulièrement prendre sa décision en tenant compte du régime objectif de T.V.A., sans que l’assujetti qui a le choix entre des opérations exonérées et des opérations taxables, puisse en choisir une et faire valoir les effets de l’autre.

    De ce fait, pour déterminer le caractère d’une opération taxable, il y a lieu de prendre en considération toutes les circonstances dans lesquelles se déroule l’opération en question pour en rechercher les éléments caractéristiques²⁵. Ainsi, la qualification du contrat en T.V.A. ne dépendra pas non plus de la qualification que lui ont donnée les parties en cause, mais seulement de la nature des prestations réciproques effectivement échangées entre les parties.

    Sont ainsi exonérées des opérations qui visent à céder des actions de sociétés mais qui, en dernière analyse, portent sur des biens immobiliers détenus par ces sociétés et leur transfert (indirect). L’exception à cette exonération qui est prévue au point 5, second tiret, de l’article 13, B., d), de la sixième directive, n’est pas applicable si l’État membre n’a pas fait usage de la possibilité, prévue à l’article 5, paragraphe 3, sous c), de ladite directive, de considérer comme biens corporels les parts d’intérêts et les actions dont la possession assure en droit ou en fait l’attribution en propriété ou en jouissance d’un bien immeuble²⁶.

    Ensuite, quant aux pratiques abusives, nous rappelons qu’elles ne peuvent qu’exceptionnellement, selon la Cour de justice, être opposées au contribuable. Ainsi, pour qu’il existe une telle pratique abusive, la Cour de justice a énoncé les deux conditions cumulatives suivantes (arrêt Halifax, nos 74 et 75) :

    1° d’une part, les opérations en cause, malgré l’application formelle des conditions prévues par les dispositions pertinentes de la sixième directive et de la législation nationale transposant cette directive, doivent avoir pour résultat l’obtention d’un avantage fiscal dont l’octroi serait contraire à l’objectif poursuivi par ces dispositions ;

    ainsi, il résulte de l’objectif de la T.V.A. que permettre à des assujettis de déduire la totalité de la T.V.A. payée en amont alors que, dans le cadre de leurs transactions commerciales normales, aucune opération conforme aux dispositions du régime des déductions de la sixième directive ou de la législation nationale le transposant ne leur aurait permis de déduire ladite T.V.A., ou ne leur aurait permis d’en déduire qu’une partie, serait contraire au principe de neutralité fiscale et, partant, contraire à l’objectif dudit régime (arrêt Halifax, no 80) ;

    de même, il pourra y avoir une pratique abusive, si un ensemble d’opérations a pour résultat de distinguer artificiellement plusieurs opérations économiquement indissociables, ce qui est en contradiction avec l’objectif de la directive T.V.A. de l’imposition de tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir de la part du preneur de l’opération économique²⁷ ;

    2° d’autre part, il doit également résulter d’un ensemble d’éléments objectifs que le but essentiel des opérations en cause est l’obtention d’un avantage fiscal ; en effet, l’interdiction de pratiques abusives n’est pas pertinente lorsque les opérations en cause sont susceptibles d’avoir une justification autre que la simple obtention d’avantages fiscaux ;

    ainsi, on peut prendre en considération le caractère purement artificiel de ces opérations ainsi que les liens de nature juridique, économique et/ou personnelle entre les opérateurs impliqués dans le plan de réduction de la charge fiscale (arrêt Halifax, no 81) ;

    toutefois, postérieurement, la Cour de justice a précisé ce critère dans les sens suivants²⁸ :

    – par but « essentiel » de l’opération visant à la recherche d’un avantage fiscal, il n’est pas indispensable que les opérations en cause aient pour SEUL objectif d’obtenir cet avantage fiscal ; ce mot « essentiel » n’a donc pas pour synonyme le mot « unique » ;

    – l’on peut prendre en considération le caractère purement artificiel des opérations ainsi que les liens de nature juridique, économique et/ou personnelle entre les opérateurs en cause, de tels éléments étant de nature à montrer que l’obtention de l’avantage fiscal constitue le but essentiel poursuivi, nonobstant l’existence éventuelle, par ailleurs, d’objectifs économiques inspirés de considérations, par exemple, de marketing, d’organisation et de garantie.

    De ce fait, pour qu’un mécanisme visant à diminuer la charge fiscale d’un organisme public puisse être qualifié de « pratique abusive », il faut, non seulement une économie d’impôt, mais surtout que cette économie d’impôt soit en contradiction avec le mécanisme de la T.V.A. ­lui-même et que le but essentiel de l’opération soit cette économie.

    De ce fait, ce principe tout à fait légitime ne s’appliquera qu’à des situations manifestes ou limites, sans frapper les cas conformes aux objectifs du droit communautaire de la T.V.A., même en cas de souci des contribuables de limiter leur dette fiscale. « Si d’aucuns voulaient à tort étendre la notion des pratiques abusives à l’extrême en vue de combattre le principe du choix de la voie la moins imposée, le destin de ces pratiques abusives serait de devenir l’épouvantail de la T.V.A. : propre à chasser les oiseaux craintifs mais sans effet sur ceux qui connaissent sa véritable nature. »²⁹

    3. La conséquence pratique de la distinction entre prestation de services et livraison de biens, quant à la date d’exigibilité de la T.V.A.

    Une conséquence du régime applicable aux prestations de services, en T.V.A., est la date d’exigibilité de cette taxe, étalée dans le temps dans ce cas. En effet, en cas de prestations continues,

    1° le fait générateur de la taxe intervient au moment où la prestation de services est effectuée (c’est-à-dire achevée) (art. 22, § 1er, C.T.V.A.) ;

    de plus, les prestations de services, qui donnent lieu à des décomptes ou à des paiements successifs, sont considérées comme effectuées à l’expiration de chaque période à laquelle se rapporte un décompte ou un paiement (art. 22, § 2, al. 1er, C.T.V.A.) ;

    les prestations de services pour lesquelles la taxe est due par le preneur de services en vertu de l’article 51, § 2, alinéa 1er, 1°, du Code de la T.V.A. (report de paiement contractant pour des prestations de services dont le fournisseur est établi dans un autre État membre, hors prestations de services visées à l’article 21, § 3, du Code de la T.V.A.), qui ont lieu de manière continue sur une période supérieure à une année et qui ne donnent pas lieu à des décomptes ou à des paiements durant cette période sont considérées comme effectuées à l’expiration de chaque année civile, jusqu’à ce qu’il soit mis fin à la prestation de services (art. 22, § 2, al. 2, C.T.V.A.) ;

    2° la T.V.A. devient exigible au moment où la prestation de services est effectuée, à savoir au moment déterminé conformément au 1° qui précède (art. 22, § 2, al. 1er, C.T.V.A.) ; par dérogation, lorsque le prix est encaissé, en tout ou en partie, avant ce moment, la taxe devient exigible au moment de l’encaissement, sur la base du montant encaissé (art. 22bis, al. 1er, C.T.V.A.).

    Il en résulte un étalement dans le temps de la T.V.A. tout au long de la

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