« Apostasie dans l'islam » : différence entre les versions
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Le verset 90 crée une exception pour {{Citation|ceux qui se joignent à un groupe avec lequel vous avez conclu une alliance, ou ceux qui viennent chez vous.}} Dans sa traduction commentée du Coran, [[Jean Grosjean|Grosjean]] précise que ce verset fait référence aux combattants musulmans qui auraient quitté Mahomet pendant l’[[Hégire|émigration]] à [[Médine]] pour rejoindre des [[Arabes]] [[Polythéisme|polythéistes]]. À noter que, selon Ibn Kathir, qui se réfère cette fois au maître du [[tafsir]] [[Abdullah ibn Abbas|Ibn Abbas]], l'exception mentionnée par le verset IV, 90 serait « abrogée » par la [[At-Tawba|sourate IX]], 5 : {{Citation|Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez. Capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade.}}
=== Dans les
{{Article connexe|Hudud}}
Les [[hadith]]s sont des propos attribués à Mahomet et rapportés par divers témoins. Deux de ces citations sont notamment considérées par certains théologiens islamiques comme allant dans le sens d'une application de la [[peine de mort]] en cas d'apostasie :<blockquote>{{citation|Le sang d'un musulman, qui accepte qu'il n'y a d'autre Dieu qu'Allah et que je suis Son prophète, ne peut être versé que dans trois conditions : en cas de meurtre, pour une personne mariée qui s'adonne au sexe de manière illégale, et pour celui qui s'éloigne de l'islam et quitte les musulmans<ref name="ReferenceA">Sahih al-Bukhari, vol. 9, livre 83, numéro 17, rapporté par Abdullah.</ref>}}.
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En vertu de la loi islamique traditionnelle, un apostat peut se voir accorder une période d'attente et de réflexion pendant sa détention pour se repentir et accepter à nouveau l'islam. S'il ne le fait pas, l'apostat sera tué sans réserve. Cette conception traditionnelle et millénaire des [[fiqh|''fiqhs'']] islamiques à la fois sunnites et chiites, varie comme suit selon les différents ''madahib''<ref>Frank Griffel (2001), Toleration and exclusion: al-Shafi 'i and al-Ghazali on the treatment of apostates, Bulletin of the School of Oriental and African Studies, 64(03), pp. 348-349</ref>{{,}}<ref name=":24">{{Article|langue=en|auteur1=[[Samuel Marinus Zwemer]]|titre=The Law of Apostasy|périodique=The Muslim World|volume=14|numéro=4|date=1924|issn=0027-4909|pages=41-42, Chapter 2}}.</ref>{{,}}<ref name=":2">David F Forte (2011), [http://www.cepos.eu/pdf/revista%20de%20stiinte%20politice%20nr%2029.pdf Islam’s Trajectory], Revue des Sciences Politiques, No. 29, p. 93, 97-98, 92-101</ref> :
* [[Hanafisme]] : recommande trois jours d'emprisonnement entre le jugement et la mise en application de la peine, bien que ces derniers ne soient pas obligatoires. Le fiqh hanafite préconise l’exécution des apostats de sexe masculin. La peine de l'apostat ne s'applique pas aux femmes (qui doivent être
* [[Malikisme]] : laisse jusqu'à dix jours pour se rétracter. Les apostats, qu'ils soient hommes ou femmes, méritent la peine de mort selon la vision traditionnelle du fiqh sunnite malikite<ref name=":2" />. Le repentir de l'hérétique (''[[Zandaqa|zindiq]]'') est accepté s'il l'annonce avant que son hérésie (''zandaqa'') ne devienne publique<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Abdullah Saeed]]|prénom1=Abdullah|nom1=Saeed|auteur2={{Lien|langue=en|trad=Hassan Saeed|fr=Hassan Saeed}}|prénom2=Hassan|nom2=Saeed|titre=Freedom of Religion, Apostasy and Islam|passage=81|éditeur=[[Routledge]]|date=2017|pages totales=240|isbn=1351935747|isbn2=9781351935746|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=MrhBDgAAQBAJ&pg=PT81}}.</ref>. Dans le cas inverse, son repentir n'est pas accepté et il est exécuté. Le musulman qui utilise un langage grossier à l'égard d'un [[Malaikas|ange]] ou d'un [[Prophètes de l'islam|prophète]] est exécuté indépendamment de son repentir<ref name=":11">{{en}} [https://books.google.fr/books?id=MrhBDgAAQBAJ&pg=PT82 Saeed 2017, p. 82].</ref>.
* [[Chaféisme]] : une période d'attente de trois jours est nécessaire pour permettre à l'apostat musulman de se repentir et de revenir à l'islam. Après ce délai, l'exécution est la sanction traditionnelle recommandée pour les apostats, hommes et femmes<ref name=":2" />. Le repentir de l'hérétique (''zindiq'') est accepté et il n'est pas exécuté. Le repentir de l'apostat multirécidiviste est accepté et il n'est pas exécuté. Le musulman qui utilise un langage grossier à l'égard d'un ange, d'un prophète ou d'[[Allah]] n'est pas exécuté s'il se repent<ref name=":11" />.
* [[Hanbalisme]] : une période d'attente peut-être accordée, mais n'est pas nécessaire. L'exécution est la sanction traditionnelle recommandée pour les apostats des deux sexes<ref name=":2" />. Le repentir de l'hérétique (''zindiq'') n'est pas accepté et il est exécuté. Le musulman qui apostasie et se repent à plusieurs reprises est exécuté. Le musulman qui utilise un langage grossier à l'égard d'un ange, d'un prophète ou d'Allah est exécuté indépendamment de son repentir<ref name=":11" />.
* [[Jafarisme]] : une période d'attente peut
Cependant, selon l'historien du droit {{Lien|langue=en|trad=Sadakat Kadri|fr=Sadakat Kadri}}, alors que l'apostasie était normalement punie de mort, les exécutions étaient rares, car « il était largement admis » que tout accusé apostat qui « se repentait en prononçant la [[chahada]] » ''(lâ illâha illâ-l-lâh'' → "Il n'est point de [[divinité]], si ce n'est [[Allah]]") « devait être pardonné » dans cette [[Dunya (islam)|''dounia'']] et voir sa punition différée au [[Jour du jugement]]. Ce principe a été maintenu « même dans des situations extrêmes », comme lorsqu'un délinquant adopta l’islam "uniquement par crainte de la mort", sur la base d'un hadith dans lequel le prophète Mahomet blâma l'un de ses partisans pour avoir tué un [[Pillage|pilleur]] qui avait attesté sa foi<ref>Muhammad n'a pas été choqué par les affirmations selon lesquelles le défunt n’avait adopté l’islam que pour éviter d'être mis à mort. «Qui vous absous, {{Lien|langue=en|trad=Usama bin Zayd|fr=Usama ibn Zayd|texte=Oussama}}, demanda-t-il à plusieurs reprises au tueur pour avoir ignoré la confession de foi?»</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Riyad as-Salihin / Book 1 / Hadith 393|url=https://quranx.com/hadith/Saliheen/In-Book/Book-1/Hadith-393/|site=[https://quranx.com Quranx.com]|consulté le=16 juin 2019}}.</ref>{{,}}<ref>[http://www.sunnah.org/aqida/forty_hadith_merits_tahlil.htm#_ftnref28 Forty Hadiths on the Merit of Saying La Ilaha Illallah] {{lien brisé|url=https://web.archive.org/web/20150904045814/http://www.sunnah.org/aqida/forty_hadith_merits_tahlil.htm|date=4 septembre 2015}}|Compiled by Dr. G.F. Haddad|(Hadith 26, Narrated by Bukhari, Muslim, Ahmad, Tayalisi, Abu Dawud, Nasa'i, al-`Adni, Abu `Awana, al-Tahawi, al-Hakim, and Bayhaqi.)</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Sadakat|nom1=Kadri|titre=Heaven on Earth : A Journey Through Shari'a Law from the Deserts of Ancient Arabia ..|éditeur=Macmillan|année=2012|pages totales=332|isbn=978-0-09-952327-7|lire en ligne=https://books.google.com/?id=ztCRZOhJ10wC&printsec=frontcover&dq=Heaven+on+Earth:+A+Journey+Through+Shari%27a+Law#v=onepage&q=Heaven%20on%20Earth%3A%20A%20Journey%20Through%20Shari'a%20Law&f=false|passage=239|archiveurl=https://web.archive.org/web/20161202174508/https://books.google.com/books?id=ztCRZOhJ10wC&printsec=frontcover&dq=Heaven+on+Earth:+A+Journey+Through+Shari%27a+Law&hl=en&sa=X&ved=0CC0Q6AEwAWoVChMIob7syrnZxwIVhg6SCh0fYg3Z#v=onepage&q=Heaven%20on%20Earth%3A%20A%20Journey%20Through%20Shari'a%20Law&f=false|archivedate=2 December 2016}}.</ref>.
=== Responsabilités civiles ===
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* les biens de l’apostat sont saisis et distribués à ses parents musulmans ;
* son mariage est annulé (''faskh'') ;
* ses enfants sont soustraits à sa garde et considérés comme
Dans
=== Points de vue alternatifs ===
Plusieurs anciens érudits musulmans n'étaient pas en faveur de la peine de mort ; parmi ces derniers, on peut citer [[Ibrahim al-Nakhai|Ibrahim al-Nakha'i]] (mort en [[715]] / 96 [[Calendrier hégirien|AH]]) et [[Sufyān al-Thawrī]] ainsi que leurs partisans, qui lui ont préféré un emprisonnement à durée indéterminée jusqu'à la repentance. Le ''faqih'' hanafite [[Sarakhsi]] a également appelé à des peines différentes pour l'apostasie religieuse non [[Sédition|séditieuse]] et celle de nature séditieuse et politique, considérée comme de la [[haute trahison]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Abdullah Saeed]]|prénom1=Abdullah|nom1=Saeed|auteur2={{Lien|langue=en|trad=Hassan Saeed|fr=Hassan Saeed}}|prénom2=Hassan|nom2=Saeed|titre=Freedom of Religion, Apostasy and Islam|passage=85|éditeur=Ashgate|date=2004|pages totales=227|isbn=0754630838|isbn2=9780754630838}}.</ref>{{,}}<ref name=":7">{{Ouvrage|langue=en|nom1=Leaman, Oliver, 1950-|titre=The Qurʼan : an encyclopedia|passage=551|éditeur=Routledge|date=2006|isbn=0415326397|isbn2=9780415326391|isbn3=9780415775298|oclc=62918343}}.</ref>.
Les érudits islamiques médiévaux ont également différé sur la punition de la femme apostate : la mort, l'[[Esclavage dans le monde musulman|esclavage]] ou l'emprisonnement à durée indéterminée jusqu'à la repentance. Abou Hanifa et ses partisans ont refusé la première option et soutenu la troisième. Les érudits hanafites soutiennent qu'il ne faut pas tuer la femme apostate, car il était interdit de tuer des femmes sous la charia<ref name=":7" />. En revanche, les érudits malikites, chaféites, hanbalites et mêmes jafarites ont interprété d'autres parties de la charia comme autorisant la peine de mort
Des [[Islam libéral|musulmans réformateurs]] contemporains, tels
[[Mahmoud Mohamed Taha]], exécuté par le gouvernement soudanais, alors que des milliers de manifestants protestaient contre son exécution<ref>{{ouvrage|langue=en|titre=Sacred Rage|nom=Wright|prénom=Robin|pages=203, 4}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|langue=en|url=http://www.iheu.org/node/1307|archive-url=https://web.archive.org/web/20061003184013/http://www.iheu.org/node/1307|dead-url=yes|archive-date=2006-10-03|titre=Apostacy | International Humanist and Ethical Union|éditeur=Iheu.org|consulté le=2013-11-12}}.</ref>, et [[Faraj Fouda]], victime d'extrémistes islamistes arrêtés et emprisonnés pendant 20 ans<ref>{{article|langue=en|nom=Al Sherbini|prénom=Ramadan|titre=Slain Egyptian anti-Islamist writer Faraj Fouda remembered|url=http://gulfnews.com/news/region/egypt/slain-egyptian-anti-islamist-writer-faraj-fouda-remembered-1.1196122|journal=[[Gulf News]]|date=12 juin 2013|archiveurl=https://web.archive.org/web/20140116075841/http://gulfnews.com/news/region/egypt/slain-egyptian-anti-islamist-writer-faraj-fouda-remembered-1.1196122|archivedate=16 January 2014}}.</ref>{{,}}<ref>[http://www.islamonline.net/servlet/Satellite?c=ArticleA_C&cid=1173695096768&pagename=Zone-Arabic-Daawa/DWALayout] {{lien brisé|url=https://web.archive.org/web/20080529031635/http://www.islamonline.net/servlet/Satellite?c=ArticleA_C&cid=1173695096768&pagename=Zone-Arabic-Daawa%2FDWALayout|date=29 mai 2008}}.</ref>, sont des exemples récents d'écrivains et d'activistes tués pour apostasie. Le lauréat égyptien du [[prix Nobel de littérature|prix Nobel de littérature,]] [[Naguib Mahfouz|Naguib Mahfouz,]] a été blessé dans une tentative d'assassinat, paralysant son bras droit<ref>{{Lien web|langue=en|titre=President pays tribute to Mahfouz|url=http://news.bbc.co.uk/2/hi/middle_east/5297470.stm|site=[http://news.bbc.co.uk news.bbc.co.uk]|date=30 août 2006|consulté le=12 juillet 2019 }}.</ref>. Le cas d'[[Abdul Rahman Jawed]], un Afghan qui s'est [[Conversion au christianisme|converti au christianisme]], a suscité un débat sur la question. Bien qu'il ait initialement été condamné à mort, il a finalement été libéré, car il était jugé mentalement inapte à subir un procès<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Afghan convert freed from prison|url=http://news.bbc.co.uk/2/hi/4851666.stm|site=[http://news.bbc.co.uk news.bbc.co.uk]|date=28 mars 2006|consulté le=12 juillet 2019 }}.</ref>. De plus, certains États islamiques, qui n'exécutent pas directement les apostats, facilitent et encouragent parfois indirectement les exécutions extrajudiciaires perpétrées par la famille de l'apostat, surtout si l'apostat s'exprime<ref>{{ouvrage|langue=en|nom1=Miller|prénom1=Duane Alexander|titre=Living among the Breakage: Contextual Theology-Making and Ex-Muslim Christians|éditeur=Ph.D. Thesis, School of Divinity, University of Edingburg|lieu=Edinburg, UK|année=2014}}.</ref>.
[[Sayyed Al-Qimni|Sayyed al-Qimni]] consacre un chapitre de son livre ''Shukran... Bin Laden !'' à la notion d'apostasie. Selon lui, le crime d'apostasie est une invention du premier calife, [[Abou Bakr As-Siddiq|Abu Bakr]], destinée à se débarrasser de ses rivaux<ref name=":26">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=Abdel Rahman Abd Alia Ahmed|titre=Sayyid ai-Qimni and Hans Kung: a comparative study of religious power structure and resistance in sunni islam in Egypt and catholic christianity in Europe|passage=45|éditeur=University of Regina|date=2009|lire en ligne=https://www.collectionscanada.gc.ca/obj/thesescanada/vol2/002/MR55032.PDF}}</ref>.
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Au cours des siècles, un certain nombre de grands [[ouléma]], tels le ''faqih'' malikite {{Lien|langue=en|trad=Abu al-Walid al-Baji|fr=Abu al-Walid al-Baji}} (mort en 1081 / 474 AH) et le ''faqih'' hanbalite [[Ibn Taymiyya]] (mort en 1328 / 728 AH), ont affirmé que l’apostasie n’est pas un ''[[hadd]]'' et qu’elle n’est donc passible que d’une peine laissée à la discrétion du [[cadi]] ([[tazir]])<ref name=":9" />. Certaines autorités plus anciennes, comme [[Ibrahim al-Nakhai|Ibrahim al-Nakha'i]] et [[Sufyān al-Thawrī]], ainsi que le ''faqih'' hanafite [[Sarakhsi]] (mort en 1096 / 490 AH), croyaient qu’il fallait demander à un apostat de se repentir indéfiniment et ne jamais le condamner à mort<ref name=":9" />{{,}}<ref name=":10">Saeed 2004, p. 122.</ref>.
Selon Sarakhsi, l’apostasie de l’islam est un grand crime, mais sa punition est différée au jour du jugement<ref name=":10" />. Le point de vue selon lequel le [[Coran]] ne parle que d'une punition dans l{{'}}''[[akhira]]'' pour l’apostasie a également été retenu par le [[Liste des recteurs de la mosquée al-Azhar|Grand Imam]] d’[[Université al-Azhar|Al-Azhar]] (1958-1963) {{Lien|langue=en|trad=Mahmud Shaltut|fr=Mahmoud Shaltout}}, qui a soutenu que la prescription de la peine de mort pour
L'historien iranien [[Hashem Aghajari]], lui-même condamné à la peine de mort pour apostasie en 2002, affirme que le Coran ne prévoit aucune sanction en cas d'apostasie. Il rappelle le verset L, 45 : « Nous connaissons les discours des infidèles, et toi tu n'es pas chargé de les contraindre . » Si le Prophète lui-même se voit interdire de prononcer un jugement sur ce que les cœurs recèlent, qui pourrait donc prétendre le faire <ref>{{Lien web |langue=en-US |nom=Radio Zamaaneh |titre=There is no Provision for Apostasy in Law: Comments by Professor Hashem Aghajari |url=https://iranpresswatch.org/post/197/there-is-no-provision-for-apostasy-in-law-comments-by-professor-hashem-aghajari/ |site=Iran Press Watch |date=2008-11-24 |consulté le=2023-07-04}}</ref>?
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