Écolâtre
L’écolâtre (du latin scolasticus > scholaster) était, au Moyen Âge, le maître de l’école monastique ou de l’école cathédrale. La fonction était importante et nombreux furent les écolâtres qui devinrent écrivains de renom, théologiens, ou évêques, voire pape (Sylvestre II).
Dans les monastères
modifierLe travail manuel ne manquait pas dans les monastères : les moines fondateurs étaient leurs propres bâtisseurs et défrichaient leurs terres. Au travail manuel fut cependant toujours lié un travail apostolique et intellectuel, compris comme une autre manière de rendre gloire à Dieu (Opus Dei). Les règles monastiques les plus anciennes imposaient des temps de lecture (de textes sacrés), ce qui nécessitait au minimum une alphabétisation des jeunes recrues. Dès le IXe siècle, les monastères plus importants avaient leurs bibliothécaire, scribes, chroniqueur et écolâtre. L’écolâtre était chargé de l’école monastique.
Deux écoles
modifierLes monastères avaient deux écoles, l’extérieure et l’intérieure :
- L’extérieure, réservée aux laïcs donnait une instruction élémentaire, se bornant à la lecture, l’écriture, le catéchisme et le calcul ;
- Dans l’école intérieure, plus développée, les oblats (c’est-à-dire de jeunes garçons offerts par leurs parents au monastère pour qu’ils deviennent moines) débutaient par des classes élémentaires de lecture, calcul, le psautier et un peu de musique.
Curriculum
modifierLes oblats suivaient ensuite un parcours académique appelé le septivium (les sept Arts libéraux), qui n’était pas nécessairement accompli en 7 ans :
- Le trivium (trois premiers sujets) étaient la grammaire (littérature), rhétorique (éloquence) et dialectique (philosophie) ;
- Le quadrivium (quatre sujets) comportait un ensemble de cours plus scientifiques : musique, arithmétique, géométrie et astronomie.
Un théologal s’occupait de la formation religieuse et théologique des jeunes moines.
Moines-écolâtres
modifierQuelques moines écolâtres célèbres[1]:
- Thierry de Leernes, (moine de Lobbes) à Stavelot, Mousson, Fulda et Saint-Hubert.
- Wazon, (moine de Lobbes), à Liège.
- Hériger de Lobbes, (moine de Lobbes), à Lobbes dont il devient abbé.
- Ekkehard Ier, à l’abbaye de Saint-Gall.
- Sigebert de Gembloux, à l’abbaye de Metz.
- Murethach (moine irlandais), à Auxerre.
- Pierre le Vénérable (moine de Sauxillanges), à l’abbaye de Vézelay.
- Alcuin (moine anglais), à la cour de Charlemagne.
- Gerbert d'Aurillac (moine d'Aurillac), philosophe et mathématicien, écolâtre à Reims en 972, puis pape sous le nom de Sylvestre II (de 999 à 1003).
- Othlon de Saint-Emmeran (XIe siècle) à l'abbaye Saint-Emmeran.
Auprès des cathédrales
modifierChrodegang (712-766), évêque de Metz, forma les prêtres de sa cathédrale à vivre en communauté, et écrivit pour eux une règle appelée Regula vitae communis inspirée de celle de saint Benoît. Il y introduit dans la communauté la fonction d’écolâtre : un des chanoines est spécialement chargé d’instruire les jeunes clercs de la cathédrale. Charlemagne demanda l’ouverture de l’école cathédrale aux non-clercs. Au fil des temps l’écolâtre devient également l’inspecteur des maîtres d’écoles du diocèse. Plus tard, le concile du Latran III officialisa la coutume (1179) en spécifiant que l’enseignement sera gratuit.
Cependant, avec l’émergence et l’influence croissante des universités (XIIIe siècle), les écoles cathédrales perdront progressivement leur importance et le rôle de l’écolâtre disparaîtra.
Chanoines-écolâtres
modifierQuelques chanoines écolâtres mieux connus :
- Bruno le Chartreux, à Reims
- Boniface de Bruxelles, à Cologne
- Anselme de Laon, à Laon
- Fulbert de Chartres, à Chartres, dont il devient évêque.
- Odon de Tournai, à Toul puis Tournai
- Egbert de Liège, à Liège
- Conrad de Marbourg, à Mayence.
- Thibaud d'Étampes, à Étampes, puis à Caen, puis à Oxford.
Débat sur le rôle de l'écolâtre
modifierEn 1757, un arrêt du parlement de Flandres sur un débat entre les échevins de Douai et l'écolâtre de la collégiale Saint-Pierre de Douai clarifie la portée du rôle de l'écolâtre dans la ville universitaire[2].
Références
modifier- INRP, « Écolâtres », sur www.inrp.fr : « Ces scholastiques ont été appelés diversement dans les églises, savoir écolâtres ou maîtres-école, comme à Orléans, Amiens, Arras, Soissons et autres lieux, et capischols en Gascogne. Ils ont été aussi nommés chanceliers en quelques églises, principalement aux villes où il y a université. Cette charge d'écolâtre était autrefois comme un degré pour parvenir plus haut, et souvent aux évêchés. Ainsi Alcuin, précepteur de Charlemagne, fut écolâtre, et après abbé de Saint-Martin de Tours ; Gerbert, précepteur d'Othon III, fils d'Othon II, empereur, et encore de Robert, fils de Hugues Capet, roi de France, fut écolâtre, depuis archevêque de Reims, et de Ravenne, et enfin pape sous le nom de Sylvestre II, lequel Gerbert fait voir en ses épîtres qu'il tenait cette qualité d'écolâtre à honneur, se la donnant plusieurs fois en ses épîtres. Saint Bruno, fondateur de l'ordre des chartreux, avait été écolâtre de Reims. Marbod, évêque de Rennes, avait été écolâtre d'Angers. Honoré fut écolâtre et après évêque d'Autun : Adelme, et Vato ou Wazo, de Liège ; Anseaume, de Laon ; Fulbert, de Chartres ; Gilbert, de Poitiers ; et autres en grand nombre. »
- Joseph Nicolas Guyot et Pierre Jean Jacques Guillaume Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et béneficiale : Article écolâtre, Visse (1re éd. 1784) (lire en ligne)
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Édouard de Moreau, Les Abbayes de Belgique (VIIe – XIIe siècles), Bruxelles, La Renaissance du livre, , 164 p.
- Denis Diderot, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers : Article Écolâtre, t. 5 (1re éd. 1751) (lire en ligne)