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Empire du Djolof

ancien pays

Le Djolof (ou Jolof) était un empire entre les fleuves Sénégal et Gambie, qui prospéra du milieu du XIVe au milieu du XVIe siècle.

Histoire

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Apparition

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L’Empire du Djolof fut l’une des grandes formations politiques qui marqua l’histoire de la Sénégambie, englobant des territoires qui correspondent aujourd’hui au Sénégal et à une partie de la Mauritanie. À son apogée, il comprenait les États du Cayor, du Baol, du Walo, du Sine, du Saloum, ainsi qu’une portion du Fouta-Toro et du Bambouk. Après sa dislocation, ces États prirent leur indépendance et devinrent des royaumes autonomes. Ce vaste espace, connu sous le nom de Sénégambie, fut forgé à partir de la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle par le clan Ndiaye, qui joua un rôle central dans la construction de cet empire. Le Djolof était le résultat d’un processus de regroupement et d’organisation des peuples qui allaient devenir les Wolofs.

Renforcement

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À cette époque, la région du Djolof était peuplée de diverses ethnies : Toucouleurs, Peuls, Sérères, Soninkés, et Maures. Ces groupes, au fil des siècles, tissèrent des liens par leurs échanges et mariages, fusionnant leurs modes de vie, leurs croyances et leurs langues. De cette interaction émergea une culture commune, ainsi qu’une langue unificatrice, celle des Wolofs. Ce processus de brassage ethnique donna naissance au peuple Wa-laf, où “Wa” signifie “ceux de” et “Laf” fait référence à “La Rive”, une métaphore géographique qui désignait les terres riveraines du fleuve et de l’océan, aujourd’hui associées aux régions du Waalo, Cayor, Djolof et Baol.

Sous la direction du légendaire Ndiadiane Ndiaye, cet ensemble ethnique et culturel constitua l’État du Djolof, qui s’imposa comme une puissance régionale. Son expansion, rapide et vigoureuse, permit à l’empire de dominer presque tout le nord et le centre de la Sénégambie, unifiant des territoires divers sous un même règne. L’empire connut une longue période de prospérité et de stabilité, mais cette hégémonie prit fin en 1549, avec la mort du dernier empereur, Lélé Fouli Fak Ndiaye, lors de la bataille de Danki, près de Diourbel, dans l’ancien Baol.

Lélé Fouli Fak Ndiaye fut tué par Amari Ngoné Sobel Fall, le fils de Déthié Fou Ndiogou Fall, alors chef de la région du Cayor. Ce dernier, après avoir vengé une humiliation infligée par Lélé Fouli Fak, devint le premier damel (roi) du Cayor. La cause de leur conflit résidait dans la volonté de l’empereur de punir le Cayor pour son refus de s’acquitter des impôts annuels imposés par le Djolof. Cette bataille fut l’un des facteurs déclencheurs de la chute de l’empire, qui ne put se relever de cette défaite.

Un autre facteur important fut la conquête du royaume vassal de Namandirou par Denianke Koli Tenguella, un redoutable conquérant qui affaiblit considérablement l’autorité du Djolof. Par ailleurs, pendant près d’un siècle, l’empire fut un vassal de l’Empire du Mali, une relation de subordination qui témoigne de la complexité des jeux de pouvoir dans la région. Peu à peu, les États autrefois soumis au Djolof prirent leur indépendance, réduisant cet empire autrefois puissant à une simple royauté dans sa région d’origine, au centre du pays.

Au XIXe siècle, le Djolof, comme les autres royaumes sénégalais, fut confronté à l’expansion coloniale française. Louis Faidherbe, gouverneur colonial, entreprit une politique de conquête systématique, annexant un à un les royaumes du Sénégal. Le Djolof fut le dernier à tomber sous la domination française. Bouna Alboury Ndiaye, le dernier bourba (roi) du Djolof, résista farouchement à l’annexion, mais fut finalement vaincu, marquant ainsi la fin définitive de la souveraineté de l’ancien empire. L’intégration du Djolof dans l’administration coloniale mit un terme à des siècles d’autonomie et de rayonnement politique dans la région.

Après avoir rayonné et englobé la presque totalité du nord et du centre de la Sénégambie, l'empire s'effondra en 1549, avec la mort du dernier empereur du Djolof, Lélé Fouli Fak Ndiaye, qui fut tué lors de la bataille de Danki, qui se déroula près de Diourbel, dans l'ancienne région du Baol. Il fut tué par Amari Ngoné Sobel Fall, le fils du chef de la région du Cayor de l'époque Déthié Fou Ndiogou Fall, qui allait devenir le premier damel (roi) du Cayor après un conflit dû à une offense que lui avait fait subir Lélé Fouli Fak, ce dernier voulant sanctionner la non participation du Cayor aux impôts annuels. Parmi les premières causes de la chute de l'empire, il y a également la conquête du Royaume du Namandirou vassal du Djolof, par le conquérant Denianke Koli Tenguella[réf. nécessaire].

À partir de là, les autres États allaient, tour à tour, prendre leur indépendance jusqu'à réduire le grand empire du Djolof aux dimensions d'une royauté dans la partie centrale du pays. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les colons français annexèrent progressivement tous les royaumes du Sénégal. Le Djolof fut le dernier royaume annexé avec le dernier bourba djolof, Alboury Ndiaye, sous l'impulsion de Louis Faidherbe[réf. nécessaire].

Le Royaume du Fouta-Toro, ancien vassal du Djolof, a pu récupérer ses terres prises par le Djolof grâce au personnage Koli Tenguella, ceci pendant que les autres royaumes prenaient leur indépendance tour à tour. Le Djolof a également après son éclatement dû faire face au djihad toucouleur, surtout pendant le XIXe siècle notamment avec le marabout Toucouleur venant du Saloum à Nioro du Rip, Maba Diakhou Bâ, l'un des descendants de Koli Tenguella, et aussi l'un des disciples de Omar Foutihou Tall, avec Ahmadou Cheikhou, un marabout toroodo du Fouta-Toro, qui réussit à imposer sa domination au Djolof pendant quatre ans, sans compter les raids des Maures. Le royaume a aussi été très souvent au cours des siècles en conflit avec le Cayor. En dernier le Djolof dut longtemps lutter contre les colons français qui réussiront à annexer le Djolof pendant les années 1890. Le dernier bourba, Alboury Ndiaye, a été au même titre que Lat Dior l'un des plus grands rois et résistants contre la colonisation au Sénégal.

Géographie

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Carte des peuplades du Sénégal de l'abbé Boilat (1853)

L'empire du Djolof englobait les États du Cayor, Baol, Waalo, Sine, Saloum, le Tekrour Fouta-Toro, le Niani et le Bambouk. Toutes ces régions correspondent à l'espace sénégambien et englobaient également une partie de la Mauritanie actuelle.

La capitale se trouve à Linguère[1].

Religions

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La religion de l'élite est l'Islam, même si la majorité de la population ordinaire restait proche de ses croyances animistes traditionnelles[2].

Dans l’Empire du Djolof, coexistaient deux systèmes religieux : d’une part, les adeptes de l’islam, et d’autre part, ceux attachés à la religion traditionnelle tiédo/ceddo, qui était la croyance ancestrale des Wolofs, souvent qualifiée de “païenne”. L’islam pénétra très tôt dans le Djolof, dès les débuts de l’empire, porté par des marabouts venus de différentes régions : les Mandingues, les Soninkés, les Toucouleurs (Peuls) et les Maures, qui s’installèrent principalement dans l’État du Kayoor. Ces érudits musulmans jouèrent un rôle clé dans la diffusion de l’islam au sein de l’élite locale et auprès des populations rurales. Le Djolof devint ainsi un carrefour religieux, où les croyances traditionnelles et islamiques cohabitaient, parfois en opposition, mais aussi souvent en fusionnant dans les pratiques quotidiennes[3].

L’islamisation du Djolof connut plusieurs phases. Dès les premiers siècles de l’empire, la confrérie Qadiriyya s’implanta solidement. Elle est aujourd’hui encore majoritaire dans la région, faisant du Djolof un haut lieu de la Qadiriyya, qui est considérée comme la plus ancienne confrérie soufie en Afrique de l’Ouest, voire dans l’ensemble du monde musulman africain. Un point d’ancrage important de cette confrérie se situe dans le village de Ndogandou, proche de la ville de Dahra, un centre économique vital du Djolof. Ndogandou abrite également la plus ancienne communauté d’“ahloul bayti”, littéralement les descendants du Prophète Mahomet, renforçant ainsi l’autorité religieuse de la région.

Cependant, malgré cette présence ancienne de l’islam, la religion traditionnelle tiédo/ceddo demeura profondément ancrée dans la culture wolof pendant des siècles. Les tiédos (ou ceddo), en particulier, étaient des guerriers et des nobles attachés à une forme de résistance culturelle face à l’expansion islamique. Leur mode de vie, imprégné de valeurs telles que l’honneur, la bravoure guerrière et l’attachement aux rites ancestraux, contrastait avec la moralité et l’austérité prônées par les marabouts. Ces divergences ont souvent créé des tensions au sein de la société djolofienne, bien que certaines pratiques païennes aient subsisté parallèlement à l’adoption progressive de l’islam.

L’islamisation totale du Djolof s’accéléra à la fin du XIXe siècle sous l’impulsion de figures majeures telles qu’El Hadj Malick Sy, chef spirituel de la confrérie Tijaniyya, et Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, fondateur de la confrérie Mouride. Ces deux grandes figures de l’islam sénégalais achevèrent le processus d’islamisation de la région, leurs mouvements jouant un rôle clé dans la diffusion de l’islam au-delà des élites pour atteindre les populations paysannes et les couches populaires. Leur influence, facilitée par le zèle missionnaire de leurs délégués et disciples, permit à l’islam de s’imposer comme le système de croyance dominant, remplaçant progressivement les croyances traditionnelles.

Il est intéressant de noter que les premiers convertis à l’islam, comme ceux qui adhérèrent au colonialisme, furent souvent issus des groupes marginalisés ou défavorisés par l’ordre social en place. Pour ces individus, l’islam offrait non seulement une alternative spirituelle, mais aussi une voie d’émancipation sociale et économique, un moyen de s’affranchir de l’ordre hiérarchique imposé par les élites ceddos. Ainsi, l’islamisation du Djolof ne fut pas seulement un processus religieux, mais également un facteur de transformation sociale, favorisant un nouveau rapport de pouvoir au sein de la société djolofienne.

Ethnies et langues

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Du point de vue ethnique, au Djolof, deux ethnies étaient majoritaires, les wolofs et les peuls. Les Wolofs du Djolof portent les noms Ndiaye, Niang, Ndao, Dieng. Les peuls vivent disséminés autour des gros villages qui abritent les points d'eau. Il y a au Djolof une très ancienne cohabitation entre Peuls et Sérères. Le Djolof était considéré par ces groupes d'éleveurs comme la terre par excellence des pâturages de l'hivernage et le Saloum comme celle des pâturages de la sécheresse. Cette conception prévaut de nos jours et explique le caractère ténu des frontières entre les deux terroirs.

De ce point de vue, l'hypothèse du peuplement du djolof à partir du Sud se trouve accréditée.

On remarquera que les différentes langues ont été phagocytées par le wolof et le pulaar, les deux langues prédominantes.Tous les patronymes du nord et du centre du Senegal se retrouvent au Djolof auxquels s'ajoutent d'autres qui lui sont propres comme Lekor, Fleur, Thiebane, Thiongane, Mangane, Coundoul, Lakh, etc. En tout état de cause, le Djolof, carrefour multiethnique et pluriculturel, est bien le noyau de l'actuel Sénégal.

Aujourd'hui, du point de vue linguistique, le wolof du Djolof est influencé par le dialecte pulaar, de la même manière que le sérère du Sine et du Saloum est teinté de sérère et le wolof de la presqu'île du Cap-Vert d'accents lébous.

Des Mandingues, grands commerçants, y vivaient aussi, surtout soce (malinke) et sarakhollé, ainsi que des familles familles maures (babou, sadi, diakhoumpa...) qui pratiquaient, comme au Cayor, l'élevage équin. Ils étaient de grands vendeurs de chevaux et de grands maroquiniers.

Organisation sociale

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La société wolof était hiérarchisée en plusieurs classes distinctes.

L’ethnie wolof, longtemps dominante dans le royaume du Djolof, se caractérise par une organisation sociale très hiérarchisée, divisée en castes aux rôles spécifiques. Au sommet de cette hiérarchie se trouvent les geer (nobles), parmi lesquels les garmi, une aristocratie éligible à la royauté, détenant le pouvoir politique. Juste après viennent les jàmm buur, des hommes libres, souvent riches propriétaires terriens ou commerçants, et les serigne (marabouts), qui détiennent le pouvoir spirituel et jouent un rôle de conseillers auprès de la noblesse. Les marabouts, souvent d’origine sarakhollé ou toucouleur, étaient écoutés par l’élite et contribuaient à l’administration et à la protection mystique du royaume.

Noblesse

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La famille royale est au sommet de la société. La classe des nobles non royaux est composé des enfants des épouses secondaires et des concubines royales[2].

Les jaambuur étaient des vassaux du roi, mais considérés d’égale dignité que les nobles. Souvent issus des ethnies sérères et peules, ils fournissaient les grandes familles matrilinéaires desquelles étaient issus les rois. Les marabouts, à l’origine ceddos (guerriers non islamisés), furent progressivement remplacés par les religieux musulmans à mesure que l’islam s’imposait, notamment au XIXe siècle avec la conversion de la noblesse.

Hommes libres

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Les hommes libres sont divisée en castes en fonction de la profession de l'homme (par exemple les forgerons, les bijoutiers, les tailleurs, les griots ou les musiciens)[2].

La société était ensuite composée des badolo, les paysans qui formaient la masse du peuple, ainsi que des nyenyo (ou gnegno), artisans organisés en métiers. Parmi eux, les tegg(forgerons) étaient très importants, car ils fabriquaient les armes de guerre. On trouvait également les Laobés (artisans du bois), les rabb (tisserands) et les woudés (travailleurs du cuir). Une autre caste, celle des guéweul (griots), occupait une place centrale dans la vie sociale et culturelle. Généalogistes, historiens et chanteurs, ils étaient les gardiens de la tradition orale et entretenaient des relations étroites avec les familles nobles, glorifiant leur histoire en échange de protection et de soutien.

Esclaves

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Les esclaves sont capturés lors des guerres et des razzias dans les territoires voisins. Il existe plusieurs strates, suivant que l'exclave soit qualifié ou pas[2].

Au bas de la hiérarchie sociale se trouvaient les captifs (jaam en wolof), servant les familles nobles. Les captifs étaient divisés en trois catégories : les Jaami juddu, nés au sein des familles nobles et servant comme domestiques ; les Jaami Buur, captifs du roi, jouissant d’un statut particulier et pouvant être intégrés à l’armée royale ; et les Jaami Sayoor, prisonniers de guerre destinés à la vente dans le cadre de la traite. Malgré leur statut de captifs, ils disposaient souvent de terres pour vivre et cultiver, mais restaient sous l’autorité de la famille noble.

Malgré leur statut de captifs, ils disposaient souvent de terres pour vivre et cultiver, mais restaient sous l’autorité de la famille noble. La société wolof pratiquait une forte endogamie, les mariages se faisant strictement à l’intérieur de chaque caste ou catégorie sociale. La vie dans le royaume du Djolof était marquée par plusieurs types de conflits : entre sédentaires wolofs (agriculteurs) et nomades peuls (pasteurs), entre

Organisation politique

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L’Empire du Djolof, organisé en cinq royaumes côtiers du nord au sud, comprenait le Waalo, le Cayor, le Baol, le Sine, et le Saloum. Ces États étaient vassaux de l’État enclavé du Djolof, mais chacun jouissait d’une certaine autonomie interne. Le souverain du Djolof, appelé le Bourba Djolof (ou simplement Bour), régnait depuis la capitale de Linguère. Cependant, les chefs de chaque royaume étaient issus des familles nobles fondatrices de leur État respectif et gouvernaient de manière semi-indépendante.

Les dirigeants des cinq royaumes wolofs étaient sélectionnés par des assemblées de nobles. Le Bourba Djolof, quant à lui, était choisi par un collège d’électeurs composé des souverains des royaumes tributaires et de la noblesse djolofienne. Ce collège d’électeurs comptait notamment le Bour du Waalo, le Damel du Cayor, le Teigne du Baol, ainsi que les Lamanes des royaumes sérères du Sine et du Saloum. Bien que chaque roi conservait une autonomie pratique dans la gestion quotidienne de son État, il devait coopérer avec le Bourba Djolof en matière de défense, de commerce et de collecte des recettes impériales. En retour, le Bourba Djolof leur offrait protection et coordination face aux menaces extérieures.

Le pouvoir au Djolof était très autocratique. Les souverains accumulaient d’immenses richesses et constituaient de puissantes armées, souvent au détriment de valeurs constitutionnelles ou traditionnelles. Cela engendrait un gouvernement parfois instable où les luttes de pouvoir étaient fréquentes, notamment autour de la succession royale.

Il est cependant important de noter que le royaume du Sine, habité majoritairement par des Sérères, n’a jamais accepté l’autorité du Djolof. Selon la tradition sérère, le Sine n’a jamais rendu hommage à Ndiadiane Ndiaye, le fondateur légendaire de l’empire du Djolof, ni à ses descendants. Il est dit que même Ndiadiane Ndiaye lui-même aurait reçu son nom du roi Maysa Wali du Sine, illustrant ainsi l’indépendance et la résistance des Sérères face au Djolof.

Cependant, avec le temps, la structure centralisée du Djolof s’affaiblit, et chacun de ces royaumes finit par se détacher progressivement pour former des entités souveraines. Le déclin de l’empire du Djolof fut accéléré par les luttes internes et les conflits avec les forces extérieures, notamment l’expansion islamique et l’arrivée des colons européens, ce qui affaiblit davantage l’autorité du Bourba Djolof jusqu’à l’effondrement final de l’empire.

Contact avec l’Europe

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Après une période initiale de tensions, des relations commerciales pacifiques se sont établies entre l’Empire du Djolof et le royaume du Portugal au cours du XVe siècle. À cette époque, le Djolof était à l’apogée de sa puissance, avec le Bourba Djolof ayant étendu son autorité sur plusieurs États malinkés situés sur la rive nord de la Gambie, tels que Nyumi, Badibu, Nyani, et Wuli. Cette expansion augmenta l’influence du Djolof dans la région et renforça ses interactions avec les puissances étrangères, notamment les Portugais, qui cherchaient à établir des échanges commerciaux avec les royaumes africains pour accéder à l’or, aux esclaves et aux produits agricoles.

Dans les années 1480, l’empire du Djolof était dirigé par Bur Birao, mais l’administration de l’empire était assurée par son frère, le prince Bemoi (aussi appelé Bemoim par les Portugais). Voyant les opportunités offertes par le commerce portugais, Bemoi tenta de rapprocher l’empire des côtes afin de mieux profiter des échanges économiques avec les Européens. Cette politique visait à stimuler l’économie du Djolof grâce aux nouvelles routes commerciales maritimes que les Portugais avaient ouvertes, notamment pour le commerce de la gomme arabique, des esclaves, de l’or et d’autres marchandises précieuses.

Cependant, cette politique ne fit pas l’unanimité parmi les élites locales. Certains princes et membres influents de la cour voyaient d’un mauvais œil cette ouverture économique et craignaient une perte de contrôle interne. En 1489, ces opposants complotèrent contre le pouvoir de Bemoi et Bur Birao. Ce dernier fut déposé et assassiné, tandis que Bemoi, cherchant à échapper au même sort, s’enfuit et trouva refuge auprès des Portugais.

Bemoi fut emmené au Portugal, où il fut accueilli à la cour du roi Jean II. Lors de son séjour, Bemoi échangea des cadeaux diplomatiques avec le roi et fut baptisé, un geste symbolique qui en faisait un allié potentiel des Portugais dans la région. En faisant de Bemoi un chrétien, Jean II entrevoyait l’opportunité d’influencer l’empire du Djolof et d’y installer un dirigeant favorable à leurs intérêts commerciaux. Le roi espérait également utiliser cette alliance pour consolider les positions portugaises en Afrique de l’Ouest, notamment en construisant un fort stratégique à l’embouchure du fleuve Sénégal.

Avec l’objectif de réinstaller Bemoi sur le trône du Djolof, Jean II envoya une expédition militaire sous le commandement d’un capitaine portugais pour soutenir la revendication de Bemoi. Cependant, l’expédition se heurta rapidement à des problèmes. Une dispute éclata entre Bemoi et le commandant portugais, ce qui conduisit à une escalade des tensions. Accusant Bemoi de trahison, le commandant portugais finit par l’exécuter, mettant ainsi un terme à l’ambitieux projet portugais de placer un allié chrétien sur le trône du Djolof.

Cet épisode illustre non seulement les tensions internes qui régnaient au sein de l’élite dirigeante du Djolof, mais aussi les ambitions des puissances européennes, prêtes à intervenir dans les affaires locales pour renforcer leurs propres intérêts commerciaux et stratégiques. L’assassinat de Bemoi marqua un échec pour le Portugal dans sa tentative d’établir une influence durable sur le Djolof, mais le commerce entre les deux entités continua malgré ces événements, bien que de manière moins politisée.

Les souverains du Djolof (Buur-ba Jolof)

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  • Ndiadiane Ndiaye (1350-1370)
  • Sare Ndiaye (1370-1390)
  • NDiklam Sare Ndiaye (1390-1420)
  • Tioukouli NDiklam Ndiaye (1420-1440)
  • Leeyti Tioukouli Ndiaye (1440-1450)
  • Ndièlene Mbey Leeyti Ndiaye (1450-1465)
  • Birahim Ndieme Eter Ndiaye (1465-1481)
  • Tase Daagulen Ndiaye (1481-1488)
  • Birahim Kuran Kan Ndiaye (1488-1492)
  • Boukaar Biye Sungoule Ndiaye (1492-1527)
  • Birayma Ndieme Kumba Ndiaye (1527-1543)
  • Leelé Fouli Fak Ndiaye (1543-1549)
  • Al Bouri Penda Ndiaye (1549-1566)
  • Laat-Samba Ndiaye (1566-1597)
  • Gireun Bouri Dyelen Ndiaye (1597-1605)
  • Birahim Penda Ndiaye (1605-1649)
  • Birahim Mba Ndiaye (1649-1670)
  • Bakar Penda Ndiaye (1670-1711)
  • Baakane Tam Gane Ndiaye (1711-1721)
  • Al Bouri Diakher Ndiaye (1721-1740)
  • Birayamb Ndiaye (1740-1748)
  • Birawa Keme Ndiaye (1748-1750)
  • Laat Kodou Ndiaye (1750-1755)
  • Baka Tam Bouri Niabou Ndiaye (1755-1763)
  • Mba Kompass Ndiaye (1763-1800)
  • Mba Bouri Niabou Ndiaye(1800-1818)
  • Birayamb Koumba Gueye Ndiaye (1818-1838)
  • Al Bouri Tam Ndiaye (1838-1845)
  • Baka Kodou Ndiaye (1845-1847)
  • Birayamb Arame Ndiaye (1847-1849)
  • Birahima Penda Ndiaye (1849)
  • Mbanyi Paate Ndiaye (1849)
  • Lat-Kodou Ndiaye (1849)

(vacance temporaire du pouvoir)

  • Birayamb Madjiguène Ndiaye (1850-1855)
  • Al Bouri Peya Ndiaye (1855-1856)
  • Baakane Tam Yaago Ndiaye (1856-1858)
  • Taanor Dieng(1858-1863)
  • Baakane Tam Khaari Ndiaye (1863-1871)
  • Amadou Cheikhou Bâ(1871-1875)
  • Alboury Ndiaye (1875-1890)
  • Samba Laobe Penda Ndiaye (1890-1895)

Notes et références

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  1. Fage Roland, p. 484.
  2. a b c et d Mark Cartwright, « Empire Wolof », sur Encyclopédie de l'Histoire du Monde (consulté le )
  3. « Le Royaume du Djolof - Senegaldates.com », sur senegaldates.com (consulté le )

Voir aussi

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Bibliographie

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  • (en) Eunice A. Charles, A History of the Kingdom of Jolof (Senegal), 1800-1890, Boston, 1973, 280 p. (Thèse)
  • (en) Eunice A. Charles, Precolonial Senegal: the Jolof Kingdom 1800 to 1890, Boston, African Studies Center : XII-163 p. African Research Studies, no 12. (Thèse éditée en 1977)
  • (en) Victoria Coifman-Bomba, History of the Wolof State of Jolof until 1860 including comparative data from the Wolof State of Walo, Madison, University of Wisconsin, 1969, 395 p. (Thèse)
  • Patrice Mingou, Le Jolof de 1870 à 1895, Dakar, Université de Dakar, 1977, 111 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • Bara Ndiaye, Le Jolof : de la scission de Keur Lat Samba à l’occupation française (1759-1890) ; mutations sociales, économiques et politiques, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1996, 394 p. (Thèse)
  • Samba Lampsar Sall, Njajaan Njaay. Les mythes de fondation de l’Empire du Djolof, Dakar, Université de Dakar, 1982, 157 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • Mbaye Thiam, Le Djolof et Bouna Ndiaye, Dakar, Université de Dakar, 1976, 110 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • Mbaye Thiam, La chefferie traditionnelle wolof face à la colonisation : les exemples du Jolof et du Kajoor, 1900-1945, Dakar, Université de Dakar, 1986, 387 p. (Thèse de 3e cycle)
  • Michał Tymowski, Europeans and Africans: mutual discoveries and first encounters, Brill, coll. « African History », (ISBN 978-90-04-42850-8 et 978-90-04-42011-3)
  • Jean Boulègue et Jean Boulègue, Les anciens royaumes Wolof (Sénégal). 1: Le Grand Jolof, (XIIIe – XVIe siècle), Ed. Façades, (ISBN 978-2-907233-00-2)
  • From c. 1050 to c. 1600, Cambridge University Press, coll. « The Cambridge history of Africa », (ISBN 978-0-521-20981-6)

Articles connexes

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Liens externes

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