Kunama (peuple)
Les Kunamas sont une population issue de la vallée du Nil et vivant en Érythrée, en Éthiopie et au Soudan. 80 % des Kunamas vivent en Érythrée, mais ils ne représentent que 2 % de la population de ce pays. La plupart des quelque 100 000 Kunamas vivent dans la région entre les rivières Mareb et Tekezé, près de la frontière avec l'Éthiopie. La guerre a fait fuir environ 4 000 Kunamas en Éthiopie, où ils vivent comme réfugiés.
Érythrée | 225 000 (2007) |
---|---|
Soudan | 21 000 (2007) |
Éthiopie | 5 400 (2007)[1] |
Population totale | 251 400 (2007) |
Langues | Kunama |
---|---|
Religions |
Christianisme orthodoxe, Christianisme protestant, Islam sunnite, Religions traditionnelles africaines |
Langue et religions
modifierLes Kunamas parlent une langue nilo-saharienne, sans rapport avec la langue dominante, en Érythrée et en Éthiopie. La première grammaire et le premier dictionnaire sont établis par des missionnaires en 1873[2].
Bien que certains Kunamas pratiquent encore des croyances traditionnelles, la plupart ont adopté le christianisme (85 %), (Église érythréenne orthodoxe ou protestante) ou l'islam (10 %)[3]. Les conversions à l'Islam d'une partie de la population datent de l'expansion du Sultanat de Sennar, encore nommé Funj, jusqu'au début du XIXe siècle[2]. L'implantation du protestantisme s'explique notamment par des campagnes d'évangélisation dès 1866 par l'Église évangélique éthiopienne Mekane Yesus[4].
Historique
modifierLes Kunamas ont été conduits à se déplacer en fonction des conflits et des prises de possession de terres, dans cette zone géographique sensible. Une hypothèse généralement admise est qu'ils viennent initialement de la vallée du Nil, du pied des monts Nouba au Sud du Soudan. La première mention écrite les mentionnant vient d'un voyageur arabe resté inconnu, qui lors d'une visite près de Khartoum, au Soudan, en 872 avant notre ère, note la présence de groupes Cunamas (Kunamas) vivant dans la zone frontière avec l'Alodie. Une autre mention date du Xe siècle et du géographe arabe Ibn Hawqal. Il signale leur présence dans la vallée du Barka. Il précise qu'ils adorent un Dieu appelé Anna, et sont gouvernés par une communauté d'anciens. Ce peuple est aussi dénommé Baza ou Bazen par les communautés autres qui les côtoient[5],[6].
Avec l'arrivée des Européens dans la région, notamment des Italiens et Britanniques, le peuple kunama doit faire à des raids et des invasions des armées occidentales ou de leurs adversaires dans la Corne de l'Afrique. Parmi les raids les plus violents figure celui mené par le chef de guerre du Tigré, Ras Alula, luttant contre les Italiens[7],[8],[9].
De 1998 à 2000, le peuple kunama souffre particulièrement de la guerre entre l'Érythrée et l'Éthiopie. Certaines familles kunamas fuient l’Érythrée pour éviter l'enrôlement de leurs enfants, et s'installent comme réfugiés en Éthiopie, dans la zone sensible de la frontière avec l’Érythrée et à proximité du village frontalier contestée de Badmé. La plupart des réfugiés kunama s'implantent dans cette zone en l'an 2000, lorsque l'armée éthiopienne se retire de l’Érythrée. Il y a un peu plus de 4 141 réfugiés kunamas en Éthiopie. Ils vivent dans un premier temps en partie dans le camp de Wa'ala Nihibi, à 20 km de la frontière érythréenne, un camp temporaire situé dans une zone de désert aride, et dans la province éthiopienne du Tigré. Un nouveau site, Shimelba, est ensuite mis en place à 60 kilomètres au sud de Wa'ala Nihibi par la route. Le HCR entame également des discussions avec les gouvernements de l'Éthiopie et de l'Érythrée pour un éventuel retour volontaire des Kunamas ainsi réfugiés, vers l'Érythrée. Le gouvernement érythréen s'y dit favorable mais les réfugiés concernés sont sceptiques et peu tentés par cette perspective, privilégiant d'autres pays d'accueil[10]. Lors du recensement éthiopien de 2007 il a été constaté une chute de la population kunama dans la région du Tigré[11].
Les plaines fertiles de la Gash-Barka, région où les Kunamas d’Érythrée vivent, sont parfois désignées comme le «grenier à blé de l’Érythrée». Autrefois nomades, ils deviennent agriculteurs et éleveurs. La politique officielle du gouvernement de l’Érythrée est que la terre est propriété de l'état. Ce gouvernement encourage les grandes exploitations.
Organisation traditionnelle
modifierLe peuple kunama est une communauté à l'organisation matrilinéaire, avec des clans et sous-clans, des assemblées élues et des conseils d'anciens dans les villages[12],[13].
Culture
modifierLa chanteuse Dehab Faytinga, qui a été particulièrement active dans la mise en évidence de la tradition musicale du peuple kunama indique que la musique et les chants accompagnent les travaux dans les champs mais aussi les cérémonies traditionnelles, telle que la grande cérémonie annuelle, Kundura. Durant cette cérémonie, tous les membres de la communauté portent des vêtements et des parures rituels, et parlent et chantent dans une langue des esprits que seuls les anciens comprennent[14].
Notes et références
modifierNotes
modifier- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Kunama people » (voir la liste des auteurs).
Références
modifier- Central Statistical Agency (Ethiopia) 2008, p. 66.
- Favali et Pateman 2003, p. 30-31.
- Kunama in Ethiopia. Religion
- Henze 2000, p. 125.
- Bender 1967, p. 1.
- Pankhurst 1997, p. 28.
- Abbay Asmerom 2000, Visafric.
- Gascon 2006, p. 13-14.
- Favali et Pateman 2003, p. 36.
- LoDolce et Thompson 2004.
- Central Statistical Agency (Ethiopia) 2008, table 5.
- Naty 2000.
- Tesfagiorgis 2010, p. 176-177.
- Bensignor 2000, Hommes & Migrations.
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- (en) Marvin L. Bender, « Analysis of a Barya Word List », Anthropological Linguistics (Anthropology Department, Indiana University), vol. 10, .
- (en) Richard Pankhurst, The Ethiopian Borderlands: Essays in Regional History from Ancient Times to the End of the 18th Century, The Red Sea Press, , 489 p..
- (en) Paul B. Henze, Layers of Time: A History of Ethiopia, C. Hurst & Co. Publishers, , 372 p..
- (en) Alexander Naty, Environment, society and the state in southwestern Eritrea, Chr. Michelsen Institute, (lire en ligne).
- (en) Ghidewon Abbay Asmerom, « Eritrea : "Pride" from repeating a shameful history », Visafric, (lire en ligne).
- François Bensignor, « Nouvelles voix de l'Afrique. Faytinga et l'indépendance de l’Érythrée », Hommes & Migrations, no 1226, , p. 104-105 (lire en ligne)
- (en) Lyda Favali et Roy Pateman, Blood, Land, and Sex: Legal and Political Pluralism in Eritrea, Indiana University Press, , 376 p..
- (en) Emily LoDolce et Larry Thompson, « Forgotten People: The Kunama of Eritrea and Ethiopia », Refugees International; Webpage mirrored at archive.org, (lire en ligne).
- Alain Gascon, Sur les hautes terres comme au ciel : identités et territoires en Éthiopie, Publications de la Sorbonne, , 335 p. (lire en ligne), p. 13-14
- (en) Central Statistical Agency (Ethiopia), « Tabel [sic] 5: Population Size of Regions by Nations/Nationalities (Ethnic Group) and Place of Residence : 2007 », dans Census 2007, Addis Ababa, Central Statistical Agency, (lire en ligne), p. 66.
- (en) Dan Connell et Tom Killion, Historical Dictionary of Eritrea, Scarecrow Press, (lire en ligne), « Kunama », p. 337-338.
- (en) Mussie Tesfagiorgis, Eritrea, ABC-CLIO, (lire en ligne), « The Kunama », p. 176-177.
Articles connexes
modifierLiens externes
modifier- (en) « Kunama in Ethiopia », sur joshuaproject.net.
- (en) « The Kunama People of Eritrea », sur madote.com.