No195 - Maladies Neurodégénératives
No195 - Maladies Neurodégénératives
No195 - Maladies Neurodégénératives
Comité scientifique
Aline d’ALBOY
Dr Guy CORNUT
Ghislaine COUTURE
Dominique CRUNELLE
Lya GACHES
Frédéric MARTIN
Pr Marie-Christine MOUREN-SIMEONI
Bernard ROUBEAU
Liliane SPRENGER-CHAROLLES
Monique TOUZIN
Rédacteur en chef
Jacques ROUSTIT
Secrétariat de rédaction
Marie-Dominique LASSERRE
Abonnements
Emilia BENHAMZA
Impression : TORI
141-143, rue de Charenton, 75012 Paris
Commission paritaire : 61699 Téléphone : 01 43 46 92 92
Sommaire Octobre 1998 N° 195
Rééducation Orthophonique, 2, rue des deux gares, 75010 Paris
Ce numéro a été dirigé par Ghislaine Couture, orthophoniste
LES MALADIES
NEURO-DÉGÉNÉRATIVES
1
1. La maladie de Steele-Richardson-Olszewski :
diagnostics différentiels et rééducation orthophonique 69
Isabelle Eyoum et Sidonie Defives-Masson, orthophonistes, Nogent-sur-Marne
2. Un cas particulier de chorée : l’hémiballisme 89
Nancy Cohen, Isabelle Eyoum, orthophonistes, Nogent-sur-Marne
3. Sclérose en plaques : examen de la dysarthrie 95
Ghislaine Couture, orthophoniste, Champigny et Astrid Vermes, orthophoniste, Paris
4. L’orthophonie dans la SLA : un accompagnement ? 103
Sylvie Brihaye, orthophoniste, Paris
131
2
Nous n’avons pas pu dans ce numéro décrire toutes les maladies
dégénératives.
Néanmoins, il nous a paru important de noter que si ces patholo-
gies n’étaient pas rééduquées il y a quelques années, car on ne pouvait
espérer aucun progrès, actuellement le rôle de l’orthophoniste n’est plus
mis en doute.
Comme nous l’a dit une patiente : « Merci d’avoir fait ce bout de
chemin avec moi ».
Ghislaine COUTURE,
Orthophoniste
3
La prise en charge orthophonique
des maladies neurologiques
Frédéric Martin
Résumé
La prise en charge orthophonique des maladies neurologiques est particulière car les
troubles sont souvent multiples et peuvent entraîner simultanément une dysarthrie, une dys-
phonie, des troubles respiratoires et ventilatoires, un dysfonctionnement de l'ensemble du
complexe oro-facial, une dysphagie pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Les premiers
signes sont parfois anodins et le rééducateur doit savoir prévenir l'évolution, trouver des
moyens de compensation et, dans les cas d'atteintes dégénératives, effectuer le travail
nécessaire d'accompagnement jusqu'au dernier stade de la maladie.
Mots clés : maladies neurologiques, diagnostic, rééducation, accompagnement.
Encounter with...
Abstract
Speech therapy with patients suffering from neurological disorders requires a specific type
of approach because the multiple disturbances involved may result in the simultaneous pre-
sence of dysarthria, dysphonia, respiratory symptoms, dysfunction of the bucco-facial struc-
tures and dysphagia which may aggravate the patient's life prognosis. The early signs are
sometimes inconspicuous and the therapist must be able to anticipate the course of the
disease, to find ways of compensating for the limitations and, when confronted with a dege-
nerative disease, to support the patient throughout the last stage of illness.
Key Words : neurological disorders, diagnosis, rehabilitation, support.
5
Frédéric MARTIN
Orthophoniste
4, rue des Saules
94410 Saint-Maurice
Tél. : 01.43.78.08.43
L
orsque l’on utilise le terme maladies neuro-dégénératives, on évoque la
notion d’une évolution inéluctable, qui entraînera le décès à plus ou
moins long terme. Certaines maladies présentent ce caractère, comme les
Scléroses Latérales Amyotrophiques (SLA), mais l’amélioration des traitements
tend à ralentir sinon à stopper l’évolution de nombreuses autres pathologies et
l’on préfère maintenant l’appellation maladies neurologiques.
Elles sont assez nombreuses, pas toujours très connues des rééducateurs,
et entraînent une atteinte motrice générale et plus particulièrement des troubles
de la motricité oro-faciale, de la phonation et de la respiration, associés parfois à
une dysphagie. Elles sont la conséquence de lésions à différents niveaux - péri-
phérique, supranucléaire ou central. On distingue :
- Les maladies de l’épiderme, neuromusculaires ou inflammatoires comme
la neurofibromatose, la sclérodermie, les dermatopolymyosites, les myopathies ;
- Les paralysies périphériques ;
- Les atteintes de la motricité automatique comme les chorées, l’athétose
et la dystonie, les syndromes parkinsoniens ;
- Les atteintes de la motricité volontaire comme les AVC ou les lésions
bulbaires et supra-bulbaires inflammatoires ou dégénératives provoquant la
Sclérose en plaques (SEP) ou la SLA.
L’installation de la plupart de ces maladies est très progressive. Les pre-
miers signes sont anodins et n’inquiètent pas toujours les patients : une jeune
femme ressentait, au cours de ses promenades à vélo, une petite difficulté à frei-
ner de la main gauche. C’était le premier signe d’une SLA dont l’issue fut fatale
après 4 ans d’évolution. Une autre patiente, atteinte de sclérodermie, ressentait,
au début, des douleurs articulaires qu’elle mettait sur le compte d’une pratique
sportive intense. Enfin, un patient qui a développé une chorée de Huntington,
présentait une petite irrégularité de l’écriture pour laquelle le diagnostic de
crampe de l’écrivain avait été émis.
6
En réalité, on se garde de poser un diagnostic trop rapidement et il peut se
dérouler jusqu’à un an entre l’apparition des premiers signes et la confirmation
de la maladie. Durant cette période, le patient et son entourage émettent des
hypothèses, développent souvent une inquiétude légitime pouvant entraîner un
syndrome dépressif. Parfois le diagnostic est erroné et l’on a vu une patiente
atteinte d’aphasie progressive orientée dans un service de long séjour pour
démence et suspicion de maladie d’Alzheimer. Dans d’autres cas, le patient ne
consulte pas et la perte progressive de l’autonomie provoque des troubles psy-
chologiques majeurs - une patiente atteinte de chorée de Huntington ayant déve-
loppé une dépression chronique a été orientée dans un service de psychiatrie - et
n’a par conséquent pas bénéficié de soins de rééducation car l’association des
mouvements incoordonnés, des troubles de la parole et du syndrome dépressif
évoquait une forme de dégénérescence psychiatrique.
Lorsque la maladie est décelée, certains patients refusent le diagnostic, se
séparent généralement du médecin et multiplient les prises en charge et les trai-
tements. L’acceptation est souvent accompagnée d’une phase d’abattement, sur-
tout lorsque les troubles sont invalidants.
L’âge a une importance car des maladies comme certaines formes de
myopathies, la SEP, la SLA, la sclérodermie, peuvent atteindre la personne
jeune et, outre le handicap, peuvent se présenter des problèmes scolaires, pro-
fessionnels et familiaux. On voit, dans la pratique, que ces pathologies ne sont
pas « réservées » à la population âgée.
La prise en charge de ces maladies est longue, nécessite parfois de nom-
breux intervenants, surtout lorsque les troubles ont une conséquence sur l’auto-
nomie et la communication. Des associations animées par des familles et des
chercheurs existent, comme France-Parkinson, France-Huntington, l’A.F.M. qui
lutte contre la myopathie, l’A.R.S. qui concerne la SLA. Ces associations sont
actives, invitent régulièrement les médecins et rééducateurs, des psychologues et
des juristes à réfléchir sur les dernières recherches et sur l’amélioration de la
prise en charge. Il existe ainsi deux groupes de maladies :
- Les maladies profitant de structures organisées où de véritables pro-
grammes de rééducation peuvent être proposés. Par exemple, en de nombreux
endroits, les patients atteints de SLA bénéficient d’une hospitalisation à domi-
cile avec visites d’aides-soignants, d’infirmières, de kinésithérapeutes,
d’orthophonistes, d’ergothérapeutes etc. Le traitement médical et les investiga-
tions cliniques et instrumentales sont réalisés dans des services hospitaliers
spécialisés, des systèmes d’aide à la communication sont proposés par ces
mêmes services.
7
- Les autres maladies sont souvent dites « orphelines ». Elles sont moins
fréquentes, entraînent des troubles parfois isolés ; les malades ne bénéficient pas
d’une prise en charge globale ni de programmes de recherche spécifiques. C’est
le cas des myasthénies, de la dystonie du complexe oro-facial, de la maladie de
Steele & Richardson.
Parfois, la rééducation, associée aux traitements médicaux, va amener une
diminution des troubles, voire leur disparition. Mais, dans la majorité des cas,
celle-ci vise à développer des systèmes de compensation. Le champ d’action du
rééducateur est vaste car il doit travailler sur la dysarthrie, sur l’ensemble de la
motricité oro-faciale, sur le souffle et la voix, sur les troubles dysphagiques en
prévenant les risques d’inhalation. Il doit être familiarisé au matériel de soins
(canule, respirateur, sonde d’aspiration etc.), à la diététique, à un certain nombre
d’examens ou de traitements, comme les électromyographies (EMG) ou les
injections de toxine botulique, aux systèmes d’évaluation instrumentale, aux
appareils d’aide à la communication...
Maintenant, il existe des protocoles d’évaluation des soins, notamment
pour la rééducation des syndromes parkinsoniens. Ils permettent de changer
éventuellement les orientations en cours de traitement. Le travail d’accompa-
gnement reste cependant nécessaire pour les maladies neuro-dégénératives.
Les rééducateurs qui prennent en charge ces malades ont besoin de
confronter leurs observations et leur technique avec d’autres thérapeutes,
d’avoir accès aux centres de traitement spécialisés, car l’évolution des signes
peut être parfois déroutante, particulièrement lorsque des troubles dysphagiques
apparaissent. Il faudra compter, dans l’avenir, sur la généralisation des réseaux
de communication, notamment par voie informatique, pour créer des forum de
discussion, qui permettront aux rééducateurs d’être moins isolés ou démunis et
de transmettre leur expérience.
8
Plasticité du système nerveux :
chance de réhabilitation
Nelson Annunciato
Résumé
La neuroplasticité, inimaginable il y a quelque temps, est prouvée maintenant de façon
objective. C'est un processus de régénération des cellules nerveuses en vue de la survie de
l'organisme. Elle s'observe au cours du développement prénatal et ontogénique de l'individu
aussi bien qu'après une lésion neurologique en vue d'une restauration des fonctions sensi-
tives, motrices et cognitives. Les processus sont complexes : bourgeonnement, neurotrans-
mission, récupération de synapses. La neuroplasticité ne se perd pas avec l'âge même si
elle se modifie. La motivation, le vécu émotionnel et l'environnement du patient sont des
données non négligeables pour offrir les meilleures possibilités de développement à cette
neuroplasticité.
Mots-clés : neuroplasticité, axone, neurotransmetteurs, synapse, hypperinnervation, bour-
geonnement.
Abstract
The process of neuroplasticity which was unthinkable for a long time, has now been demons-
trated in an objective fashion. It is a process of regeneration of the nervous cells aimed at the
survival of the organism. It takes place during the person’s prenatal and ontogenic develop-
ment, as well as after a neurological lesion for restoration of the sensory, motor and cognitive
functions. The processes involved are complex : sprouting, neurotransmission, synaptic reco-
very. Neuroplasticity does not disappear with age but it takes on different forms. To potentialize
the development of such plasticity, the patient’s motivation as well as his emotional functioning
and environment must be taken into account.
Key Words: neuroplasticity, axon, neurotransmitters, synapse, hyperinnervation, sprouting.
9
Nelson F. ANNUNCIATO
Neuro-pathologiste
Gottfried - Böhm-Ring, 21
D - 81369 MUNICH
10
d'imaginer seulement qu'un quelconque traitement d'une lésion ou d'un retard de
développement du système nerveux puisse être possible. Cela peut se com-
prendre, car la « doctrine localisatrice des fonctions » ne laisse aucune chance
de restauration aux fonctions lésées. Les personnes qui croient en cette doctrine
pensent que la perte de tissus nerveux due à des lésions ou à des maladies dégé-
nératives, doit immanquablement mener à la perte permanente des fonctions
sensorielles (l'audition ou la vue), motrices (la marche) ou cognitives (la parole
ou l'écriture).
Ces problèmes sont aggravés par la priorité presqu'exclusive que mettent
de nombreux hôpitaux, en particulier les services d'urgence, à sauver la vie des
patients. Ils négligent de ce fait les étapes critiques qui permettent de protéger et
de maintenir les fonctions normales.
Indépendamment de ces points de vue pessimistes sur les lésions du sys-
tème nerveux et de leurs conséquences, beaucoup de patients s'améliorent sans
traitement spécifique. Il existe de nombreux cas bien documentés de patients qui
présentaient une perte complète de la parole, ou étaient complètement aveugles
ou avaient de gros problèmes de pensée après une lésion, mais qui ont présenté
une récupération presque complète après une rééducation prolongée.
Sans vouloir donner de faux espoirs de récupération à nos patients grave-
ment handicapés, nous croyons et observons chaque jour que le champ des pos-
sibilités de traitement et de rééducations longues s'accroît.
Nouvelles découvertes.
Même si nous n'avons toujours pas toutes les réponses, la recherche est
très dynamique et active. Tous les mois, des centaines d'articles sont publiés
dans des revues spécialisées concernant les nouvelles découvertes des structures
et fonctions du système nerveux. Il existe des découvertes de certaines sub-
stances spécifiques influençant la façon de communiquer des cellules nerveuses,
telles que des protéines déviées du cerveau aident à la réhabilitation neurolo-
gique et pilotent le développement des axones pour que des contacts fonction-
nels entre les cellules nerveuses puissent se reconstituer partiellement ou com-
plètement. Actuellement nous savons que des substances spécifiques aident les
neurones et autres cellules, nommées cellules gliales, dans le système nerveux, à
activer le mécanisme de régénération. Ces substances devraient être stimulées et
déversées à une phase optimale. C'est par ce biais que les chercheurs et méde-
cins ont déchiffré le mécanisme naturel de réhabilitation.
Comme les processus de réhabilitation des activités fonctionnelles du sys-
tème nerveux peuvent être analysés et manipulés en laboratoire, une nouvelle
11
expression apparaît pour expliquer l'adaptabilité du système nerveux par rapport
aux lésions : la neuroplasticité.
12
tion périphérique, puisque toutes les perceptions de notre corps et du milieu
qui nous entoure sont captées et dirigées vers l'axe neuronal par les systèmes
sensoriels.
Mécanismes basiques de la neuroplasticité
Nous savons que le système nerveux peut être considéré du point de vue
microscopique comme un réseau intriqué et complexe dont la fonction est d'in-
terpréter les multiples interconnexions entre les cellules nerveuses.
Nous devons partir du principe que la réorganisation et la réhabilitation
des fonctions neuronales impliquent également et conjointement, une modi-
fication des fonctions neuronales, en particulier des interconnexions.
Nous disposons donc de plusieurs possibilités de réactions de rappel :
a) Récupération de l'activité synaptique,
b) Hyperefficacité synaptique,
c) Hypersensibilité synaptique,
d) Persistance de l'hyperinnervation,
e) Activation des synapses potentielles,
f) Bourgeonnements collatéraux et régénératifs,
g) Modification du comportement (adaptation)
Rétablissement de l'efficacité synaptique (fig.1)
13
A la suite d'un accident vasculaire, d'un traumatisme ou d'une inter-
vention chirurgicale du système nerveux, beaucoup de synapses deviennent
inactives, simplement parce qu'elles sont très proches de la région lésée, compri-
mées par l'œdème. Après une ou deux semaines, là où l'œdème diminue, il
apparaît une récupération considérable des fonctions sensitives, motrices et
cognitives.
Hyperefficacité synaptique (fig. 2)
Lorsqu'on divise un axone en quelque partie que ce soit, toutes les sub-
stances neuro-actives (neuromodulateurs et neuro-transmetteurs) produites
dans le corps cellulaire sont transférées au terminal intact, grâce à quoi la quan-
tité de ces substances augmente.
A titre d'exemple intéressant, on peut citer ce qui se produit quand on
énerve partiellement un muscle strié : les liaisons myoneurales (plaques
motrices) qui survivent, montrent une augmentation prononcée d'acétyl-
choline, et permettent par là une efficacité plus grande des terminaux ner-
veux.
14
Hypersensibilité synaptique (fig.3)
La suppression de connexions synaptiques engendre des récepteurs sup-
plémentaires au niveau de la membrane postsynaptique. Ces nouveaux
récepteurs réagissent aux substances neuro-actives synthétisées par les
connexions voisines.
Un exemple classique est l'augmentation de la sensibilité des neurones de
l'ensemble du corps à la dopamine, qui survient après la mort de certaines cel-
lules dopaminergiques, comme cela survient au cours de la maladie de Parkin-
son.
Fig.3. Hypersensibilité synaptique. A : Deux voies afférentes différentes vers une cellule
cible. B : Augmentation des récepteurs synaptiques. (D'après FITZGERALD, 1985)
15
Fig.4. Persistance de l'hyperinnervation. A : Modèle normal durant le développement
embryonnaire. B : Organisation du système nerveux normal chez l'adulte. C : Désinnerva-
tion partielle, essentiellement pendant l'enfance pour fixer la persistance de l'hyperinnerva-
tion (modèle embryonnaire) (D'après FITZGERALD, 1985).
Un des exemples les plus fascinants de l'exposé ci-dessus est décrit par
Levay et ses collaborateurs (1980), lors d'une expérience réalisée chez des
singes. Le cortex visuel de ces primates se divise en plusieurs colonnes, dont
chacune reçoit en alternance des fibres de chaque œil.
16
Jusqu'à la sixième semaine de vie postnatale, se produit une réelle super-
position des fibres provenant des deux yeux. Après cette période, les colonnes
de dominance oculaire de l'œil gauche et de l'œil droit sont différenciées (fig.5).
Si l’un des yeux est suturé avant la fin de la troisième semaine, les
colonnes dominantes de l'œil non suturé deviennent deux fois plus denses à la
sixième semaine, tandis que les colonnes correspondant à l'œil suturé sont
réduites de moitié.
Cette réalité ne s'explique pas par la croissance de nouvelles fibres, mais
par la persistance de fibres qui autrement auraient dégénéré.
Ce genre d'observation nous fournit des données rationnelles pour le trai-
tement d'enfants qui, entre un et deux ans, possèdent déjà un œil dominant
(pathologie appelée « amblyopie »).
Lors d'une évolution normale, l'image de l'œil non dominant est suppri-
mée. Le traitement classique est donc de couvrir l'œil dominant pour activer le
développement normal des colonnes de l'autre œil.
Evidemment, l'œil dominant devra être découvert à intervalles réguliers
pour que le développement des colonnes parvienne à un équilibre adéquat.
Activation des synapses en sommeil (fig.6)
De nombreuses parties du système nerveux possèdent morphologique-
ment des synapses qui, dans des conditions physiologiques, paraissent
inactives. Ces synapses peuvent exercer leurs activités fonctionnelles dans dif-
férentes conditions. Ainsi deviennent-elles actives lorsqu'elles se situent à la
périphérie d'une zone lésée. La conséquence en est une récupération importante
de la fonction lésée (comme par exemple une paralysie). Si cette zone périphé-
rique devait également être endommagée, il n'y aurait plus de récupération.
17
Nous en concluons que le système nerveux possède des mécanismes qui
permettent de renforcer les connexions synaptiques, qui jusqu'à présent
étaient « peu utilisées » ou qui se « manifestaient très faiblement ».
Bourgeonnements régénératifs et collatéraux
Bourgeonnement (« sprouting ») signifie nouvelle croissance de ramifi-
cations neuronales (dendrites et axones), pouvant être régénérative ou collaté-
rale.
Dans le premier cas (fig.7), quand un axone est blessé le long de son par-
cours ou si sa cible a été détruite, la croissance de courts bourgeons (jusqu'à
environ 100 mm) formera de nouvelles synapses dans cette région.
18
Fig.8 Bourgeonnement collatéral. A : La lésion (cercle) d'une cellule originelle mène à la
désinnervation d'une cellule-cible. B : Bourgeonnement d'un axone non lésé en direction
d'une cellule-cible désinnervée. (d'après FITZGERALD, 1985).
19
Fig.9. Représentation schématique d'une cellule nerveuse du Nucleus ruber (noyau rouge).
A : Cette cellule nerveuse reçoit des fibres du cervelet et du cortex cérébral. B : S'il apparaît
une lésion cérébrale là où les fibres du cervelet sont lésées, la croissance des fibres se fait à
partir du cortex cérébral (flèche).
Des études récentes ont encore augmenté nos connaissances sur la capacité
de réorganisation du système nerveux périphérique. Dans cette expérience, le
nerf sciatique a été totalement sectionné. Un tube a été placé entre les segments
distaux et proximaux, lesquels furent maintenus distants de 4 mm (fig. 10).
Quatre semaines après la section et l'implantation des tubes, des axones
myéliniques étaient présents dans la région médiane des tubes. En même
temps les corps cellulaires localisés dans la moelle épinière étaient colorés de
rouge, à cause du transport inverse d'un neuro-marqueur (« HRP » - « peroxyde
de raifort ») injecté dans le nerf sciatique.
Fig.10. Représentation schématique de l'utilisation d'un tube synthétique dans une dégéné-
rescence nerveuse. Le nerf sciatique a été sectionné et le segment proximal et le segment dis-
tal séparés de 4 mm. Quatre semaines après la séparation et l'introduction du tube, on pou-
vait voir des axones de la moelle épinière au milieu du tube.
20
En général, il intervient, après la lésion, une rapide dégénérescence du
segment nerveux distal, dont le contact a été interrompu avec les noyaux cellu-
laires, alors que la gaine de myiéline et l'enveloppe nerveuse ont été maintenues.
On peut comprendre que ce processus est orienté et guidé dans l'esprit du
rétablissement des fonctions et de la topographie.
Si le nerf n'a pas été complètement comprimé ou distendu, le segment
proximal (axone) pousse avec ses interconnexions dans la gaine de myéline,
pour l'utiliser comme canal guide ; ce qui lui permet de retrouver le muscle
cible ou un organe sensoriel.
Dans le cas d'une section complète du nerf, il peut y avoir des erreurs de
bourgeonnements dans des gaines « incorrectes », de sorte que ces axones
atteignent des organes cibles non désirés. Si cela se produit, le système nerveux
central peut se réorganiser grâce à la plasticité centrale, pour que, finalement,
tout soit à nouveau en bon ordre.
Le processus décrit ci-dessus peut être observé dans la périphérie, même
avec des distances considérables entre les segments proximaux et distaux. Au
niveau central, on observe cependant que dans les diverses structures corticales
et sous-corticales, la croissance de cellules lésées ainsi que leur régénérescence
ne se produisent pas aussi facilement, quand il s'agit de longues distances.
Nous comprenons bien cette dernière affirmation si nous nous souvenons
que, dans la partie centrale du système nerveux, les structures d'orientation (la
gaine de myéline) sont organisées de façon complexe et hétérogène, ce qui peut
provoquer une erreur de contact à de très grandes distances.
Modification du comportement (Adaptation)
Divers procédés peuvent être utilisés pour limiter certains déficits neuro-
logiques. Un exemple simple est ce qui se passe chez les patients présentant une
hémianopsie homonyme par lésion d'un des faisceaux optiques (en arrière du
chiasma optique) affectant les fibres de la rétine temporale d'un œil et les fibres
nasales de l'autre, de ce fait le patient ne perçoit plus que la moitié nasale du
champ visuel d'un œil et la moitié temporale de l'autre (fig.11).
Ces patients peuvent lire normalement, car ils s'adaptent à l'image en
tournant (rotation) un peu la tête pour que la page reste dans les parties du
champ visuel non lésées.
Un autre exemple fréquent est celui des patients présentant une paralysie
du muscle deltoïde et qui réussissent à faire une abduction du bras quand ils font
une rotation de l'omoplate (épaule).
21
Fig.11. Déficit visuel dû à une lésion du tronc optique droit. Comme le tronc optique
contient des fibres des hémirétines correspondantes aux deux yeux (dans cet exemple, fibres
de la rétine temporale droite et nasale gauche), cette sorte de lésion mène à un déficit facial
gauche (hémianopsie homonyme gauche).
22
cations structurelles et chimiques sont ce à quoi nous faisons allusion, lorsque
nous parlons de neuroplasticité. Une lésion est une sorte de « input », qui trans-
forme avec certitude la structure et la capacité du système nerveux à transcoder
les informations.
En résumé, nous pouvons dire que certaines zones corticales ont des
tâches fonctionnelles spécifiques. Ici, dans cet article, nous avons parlé des pro-
cessus de réhabilitation de différents niveaux :
I - Processus régénératifs observés macroscopiquement : transforma-
tion des champs corticaux :
a) Quand une partie seulement du domaine est lésée, la partie fonction-
nelle et homogène qui subsiste peut rétablir la fonction de la partie
perdue ou lésée.
b) D'autres régions peuvent aussi induire une réparation fonctionnelle
surtout quand la fonction impliquée est commune aux deux régions. Ce
qui dément la « doctrine de la localisation fonctionnelle ».
II - Processus microscopiques participant à la plasticité neuronale :
a) Inhibition primaire des connexions immédiate après la lésion comme
mécanisme de protection ;
b) Bourgeonnement local, tant des axones atteints que de leurs voisins,
ce qui conduit à la formation de nouvelles synapses ;
c) Différenciation, stabilisation et activation de synapses fonctionnelles
« correctes » ;
d) Récupération (Réutilisation) de synapses ayant perdu leur activité ;
e) Augmentation de la sensibilité de cellules dénervées et persistance
de l'hyper-innervation.
On déduit des points mentionnés ci-dessus que lors du processus théra-
peutique, tant l'« exercice » que la formation d'une fonction par bourgeonne-
ment sont possibles et peuvent être significatifs.
L'objectif prioritaire consiste à rétablir les fonctions des aires corticales
lésées. Pour cela, il faut fournir au système nerveux des stimuli adéquats et cor-
rects, pour qu'il puisse apprendre (ou réapprendre) à décoder les informations
provenant de la périphérie, à les traiter, à les soupeser, à les emmagasiner, et
surtout à les intégrer aux autres régions nerveuses.
On arrive donc à la conclusion que chaque processus thérapeutique
devrait avoir comme objectif de fournir, au moyen de la stimulation périphé-
rique, les informations d'importance cruciale pour l'organisation des circuits
neuronaux, responsables du contrôle neuro-musculaire d'un individu.
23
On constate que si un déséquilibre ou une dysfonction de ce contrôle
neuro-musculaire sont déjà survenus, par exemple une hypotonie d'un groupe
musculaire ou une modification de la motricité, etc., on devrait provoquer, thé-
rapeutiquement, une réorganisation des éléments afférents, pour que ceux-ci
puissent faire apparaître les mécanismes de la plasticité du système nerveux.
24
Rôle des médicaments
Il n'est pas inhabituel de constater que les patients soient perturbés, agres-
sifs, dépressifs et peu coopérants après une atteinte cérébrale. Il n'est pas inhabi-
tuel non plus que certains de ces patients soient sous sédatifs, parfois même sépa-
rés de leur famille et de l'environnement habituel, pour être « soignés » plus
facilement. L'administration régulière de médicaments comme les Benzodiazé-
pines, les anti-dépresseurs ou les antipsychotiques, semblent donner très souvent
des résultats satisfaisants immédiats. De tels médicaments devraient éviter des
crises d'épilepsie post-traumatiques, contrôler l'agitation et la confusion, baisser
la tension artérielle et rendre le patient plus calme, afin que puissent être menés à
bien les examens indispensables. Mais si le comportement peut être contrôlé et si
un état de détente peut être obtenu rapidement, de tels médicaments et calmants
tels que le Diazepam (Valium) peuvent aggraver les effets de la lésion. Les exa-
mens de laboratoire (expériences animales) l'ont tout à fait prouvé.
Timothy Schallert de l'Université du Texas a réalisé de nombreuses expé-
riences, où le lobe frontal de souris a été lésé. Durant ces recherches, il observa
que certaines souris présentaient une réhabilitation spontanée de leur faculté
d'apprentissage après quelques semaines. Mais quelques souris, à qui l'on avait
administré des calmants, ne récupérèrent jamais leur faculté d'apprentissage et
montrèrent aux examens microscopiques une aire dégénérée plus importante que
les souris qui avaient la même lésion mais n'avaient pas reçu ces tranquillisants.
La question que nous devons nous poser est « quels sont les patients qui
doivent recevoir ces médicaments et ceux qui ne le doivent pas ? ».
Avec ces recherches de Schallert, on voit que la pharmacologie du sys-
tème nerveux lésé et les phénomènes de réhabilitation nous posent des pro-
blèmes encore très éloignés de la pharmacologie classique. Nous devrions par
exemple pouvoir répondre à la question suivante : quel est le meilleur moyen
d'administrer les drogues : oral, intraveineux ou intracrânien ? Doivent-elles être
données tout de suite après la lésion ou quelques jours plus tard ? Doivent-elles
être administrées à des périodes actives ou calmes ? Combien de temps doit
durer le traitement pharmacologique ? Quels effets auraient d'autres drogues
indispensables ? Jusqu'où l'alimentation peut-elle influencer les phénomènes de
réhabilitation ? L'âge des patients mènerait-il à une grande modification des
moyens d'administration et des quantités ?
25
niveau de la qualité ou de la rapidité. Par exemple, quand il est dit à un patient
après un accident cérébral qu'il n'a qu'une petite, voire aucune chance de récupé-
ration, le patient ne pourra pas consacrer autant d'attention et de coopération aux
mesures thérapeutiques et à sa famille. Les raisons pour lesquelles les patients
qui participent de façon active à la rééducation ont une récupération meilleure et
plus rapide que les patients passifs, ne sont pas encore tout à fait comprises.
Rôle de l'environnement
Il y a quelques années, A. Gentile et son équipe de l'Université de Colum-
bia voulaient savoir si des informations sensorielles riches pouvaient aider des
souris, lésées du point de vue moteur, à éliminer les déficits de la marche. Cette
équipe a partagé les souris lésées en trois groupes. Le premier groupe avait peu
de place pour se mouvoir. Son environnement était cependant très bien aménagé
comprenant des objets diversifiés. Le deuxième groupe avait le même environ-
nement riche mais avec beaucoup de place, ainsi les souris pouvaient-elles plus
bouger, courir, sauter et jouer. Le troisième groupe n'avait ni un environnement
riche, ni la possibilité de se mouvoir, en d'autres termes, ce groupe était isolé et
retiré. Le deuxième groupe qui avait l'environnement le plus riche et qui pouvait
se mouvoir était le groupe qui, au niveau moteur, a récupéré le plus vite. Le pre-
mier groupe néanmoins récupéra plus vite et mieux que le troisième où l'amélio-
ration était nettement moindre.
Cette recherche nous montre qu'une activité d'ordre général vaut mieux
que rien. La question posée est : pouvons-nous transposer ces données sur
l'homme ? Il est en effet très compliqué de déterminer chez l'homme quelle
sorte d'environnement pourrait transformer les structures cérébrales, sans pou-
voir examiner directement le cerveau. Une possibilité serait bien sûr d'analyser
les tissus nerveux après la mort. C'est exactement ce que fit un groupe de neu-
roanatomistes d'UCLA aux USA. Ils utilisèrent des techniques spécifiques pour
faire une analyse quantitative d'une aire participant à la parole et au processus
de pensée. Par la suite, cette analyse fut mise en correspondance avec les lignes
individuelles et l'éducation de base. De manière intéressante les femmes ont ten-
dance à avoir des dendrites plus complexes que l'homme. Mais ce qui est très
intéressant, est la découverte que plus l'on est intellectuel, plus est complexe le
développement des cellules nerveuses de l'aire étudiée. Ceci correspond aux
études de laboratoire réalisées dans des environnements enrichis. Cela nous
amène à dire que l'environnement des patients après une intervention chirurgi-
cale peut influencer par lui-même le développement des dendrites et des axones.
Toutes ces constatations sur la richesse de l'environnement peuvent nous
amener à supposer qu'en clinique humaine, des stimuli sensoriels et la mise en
26
place d'un environnement riche et complexe est meilleur pour le rétablissement
qu'un environnement stérile et appauvri.
La question qui se pose à présent est : est-ce un environnement riche qui
mène à une réhabilitation fonctionnelle (et une possibilité d'apprentissage plus
rapide et meilleure pour les animaux sains) ou est-ce l'environnement pauvre
après l'intervention chirurgicale qui la bloque? Ce n'est pas une question banale
car la réponse peut nous aider à mettre en place des structures thérapeutiques
adéquates. Par exemple, combien d'attention particulière devrait être mise en
place dans une partie de l'environnement et du traitement après lésion ou chirur-
gie? Quel rôle joue le soutien familial, les soins, les mots et la sensibilité du per-
sonnel thérapeutique dans la récupération? Si nous y réfléchissons, nous pour-
rions même concevoir que l'absence d'un environnement de qualité dans les
hôpitaux ou dans les salles de rééducation dégrade le processus de récupération.
Nous aurions peut-être besoin de recherches systématiques par rapport à cela,
pour nous donner une réponse plus précise.
Ces directives thérapeutiques, qui considèrent le phénomène intégratif du
système nerveux et du patient comme un tout, sont fondées sur le fait que le
développement sensori-moteur se fait en trois phases concomitantes :
a) une capacité existante « s'exercera » ;
b) une fonction dominante se diversifiera et se développera ;
c) une nouvelle tâche sera entreprise.
Peut-être pourrions-nous citer ici le neurologue chercheur Emerson Pugh : « Si
le cerveau humain était aussi simple que nous soyons à même de le comprendre,
nous serions tellement simplistes que nous ne pourrions pas le comprendre ».
27
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28
Importance des facteurs neurotrophiques
dans la régénération du système nerveux
Nelson Annunciato
Résumé
Le « processus de plasticité cérébrale du système nerveux » est de plus en plus évoqué.
Nous allons pouvoir constater ici que ces manifestations plastiques peuvent être mises en
rapport avec les facteurs trophiques (du grec trophos = nourriture).
Mots clés : système nerveux, cellule nerveuse, lésion, régénération, neurotrophine, facteur
de croissance nerveuse.
Abstract
The « process of cerebral plasticity of the nervous system » is being increasingly referred to.
In this article, we describe the relationships between these plastic manifestations and
trophic factors (from the greek word trophos = food).
Key Words: nervous system, nerve cell, lesions, regeneration, neurotrophin, nerve growth
factor.
29
Nelson F. ANNUNCIATO
Neuro-pathologiste
Gottfried - Böhm-Ring, 21
D - 81369 MUNICH
30
Fig. 1 : A : Représentation schématique de deux cellules pyramidales du cortex cérébral.
B : Lésion expérimentale d’un axone pyramidal dans la substance blanche.
C : L’axone endommagé bourgeonne, régénère et réalise une nouvelle connexion
avec une autre cellule pyramidale.
31
Fig. 2 : Représentation schématique des cellules nerveuses motrices de la moelle épinière
qui innervent les ailes.
A : Représentation des cellules nerveuses motrices chez une poule adulte.
B : Une ablation d'une aile au moment du développement embryonnaire provoque une
réduction du nombre des neurones moteurs.
C : L'implantation d'une aile supplémentaire mène à une hypertrophie des neurones dans la
moelle épinière.
32
Effet du NGF
Déjà à l'époque, les effets suivants du NGF purent être caractérisés :
a) sur des neurones sympathiques,
b) sur des neurones sensitifs dérivés
Quelque temps plus tard, il fut prouvé que le NGF agissait aussi sur cer-
tains neurones du SNC, plus particulièrement :
c) sur des neurones cholinergiques qui sont localisés dans le proencéphale
basal.
Comme on le sait déjà, ces neurones cholinergiques se projettent très loin
jusqu'au cortex cérébral. La réaction au NGF de ces neurones cholinergiques est
des plus intéressantes à cause de son importance pour les fonctions supérieures
du SN (cognition, par exemple) et ses transformations dégénératives consé-
quentes dans la maladie d'Alzheimer.
Quelques années plus tard, le NGF fut cloné et peut être fabriqué de nos
jours à partir des techniques de DNS reconstituée.
Rôle du NGF
Nous constatons donc 3 fonctions essentielles du NGF :
a) la survie de cellules nerveuses ;
33
b) le bourgeonnement axonal et dendritique ;
c) la différenciation des neurones.
Le déplacement du NGF
Le mécanisme de l'action du NGF est en réalité relativement simple. Il est
produit par les cellules cibles, se connecte aux récepteurs d'axones terminaux,
est intériorisé et reconduit vers le noyau de la cellule (fig.4). Lors de la période
embryonnaire, le NGF joue un rôle fondamental, comme il est couplé à la mort
naturelle des cellules des ganglions spinaux.
Nous savons qu'une des caractéristiques du NGF en voie de développe-
ment est qu’environ 60 % de toutes les cellules nerveuses engendrées dégénè-
rent. Le moment de la dégénérescence des neurones sensitifs correspond au
moment où les neurones entrent en contact avec la périphérie. Si les animaux
reçoivent à ce moment-là des injections de NGF, de nombreux neurones des
ganglions spinaux survivront, sinon ils meurent.
Fig. 4 : Reflux (flèche) du NGF. Le facteur de croissance est absorbé à la terminaison de l’axone
et transporté en arrière (grosse flèche) jusqu’au corps cellulaire (d’après Thoenen, 1991).
34
système périphérique (par exemple du muscle) jusqu'au corps cellulaire. En
réalité, ce ne sont pas les cellules nerveuses qui produisent le NGF, mais les
cellules de Schwann (fig.5).
Le premier point culminant de la production de NGF survient quelques
heures après la lésion du nerf, un deuxième point culminant suit le troisième
jour. Si du NGF exogène est administré au nerf sectionné immédiatement après
sa lésion, un grand nombre de nerfs sensitifs survivront.
◆ Le deuxième facteur :
Après la définition du NGF, un groupe allemand sous la direction du
chercheur Hans Thoenen de l'institut de psychiatrie de Munich, réussit à identi-
35
fier une activité trophique dans la partie flottante supérieure de cultures de cel-
lules tumorales gliales.
Par chance, on observa une activité trophique similaire (voire identique) à
la partie supérieure flottante dans des cerveaux de porc. Après huit années de
recherches intenses, ce facteur fut défini et nommé BDNF.
L’action du BDNF
Les neurones qui réagissent au BNDF sont localisés dans :
a) le noyau du tronçon mésencéphalique du trijumeau, responsable de la
proprioception de l'ensemble de la zone oro-faciale ;
b) le ganglion du nerf vague ;
c) la rétine (cellules ganglionnaires) ;
d) le cerveau central (neurones dopaminergiques) ;
e) le proencéphale basique (neurones cholinergiques).
Il est intéressant d'observer que les neurones qui réagissent au BDNF, se
projettent vers le SNC, alors que ceux qui réagissent au NGF (neurones sensitifs
et neurones du ganglion sympathique) gagnent le système périphérique.
On remarque que ce facteur est produit dans le SNC par des cellules
gliales et par des neurones, alors que le NGF est produit par des cellules cibles
dans le système périphérique.
36
La famille des neurotrophines
La molécule du NT-3 montre des analogies avec celle du BDNF et du
NGF, c'est pourquoi celle-ci fut incluse dans la famille des « Neurotrophines ».
A cette famille appartiennent également la NEUROTROPHINE-4 (NT-4), la
NEUROTROPHINE-5 (NT-5) et NEUROTROPHINE-6 (NT-6).
37
Les cellules de Schwann commencent à synthétiser le CNTF après le
14e jour de vie. C’est à partir de ce moment que les neurones deviennent résis-
tants aux lésions axonales.
Le développement du fibroblast (FGF)
D’autres tissus typiques des facteurs de développement sont décrits et
nommés « neurotropiques » puisqu’ils agissent également sur les cellules ner-
veuses. Un exemple en est le FIBROBLAST GROWTH FACTOR-FGF (facteur
développemental du fibroblast).
38
Ainsi se forme, dans les 3 premières phases du développement du SNC,
une enveloppe externe, la membrane « pia-arachnoïdea ».
Par la suite, des réservoirs se forment à l’intérieur de cette membrane et
constituent une membrane pia-gliale délimitatrice dont la fonction est de séparer
le SN du reste de l’organisme.
Tout de suite après l’introduction de réservoirs dans le tissu nerveux, se
constitue une barrière hemato-encéphalique dont le rôle est de séparer le paren-
chyme nerveux du reste du système nerveux.
Les neurones migrent vers leur lieu définitif seulement après la formation de
ces deux barrières, se différencient et forment des synapses (genèse synaptique).
Ceci montre que le rôle premier du SNC depuis le début de sa formation
est d’isoler le tissu du reste de l’organisme. Cette manifestation se répète égale-
ment lors de lésions traumatiques ou vasculaires, au sein desquelles des proces-
sus régénératifs se mettent en place.
Certaines expériences très intéressantes permettent de voir apparaître clai-
rement cette différenciation du processus régénératif. Ainsi, furent réalisées des
lésions par aspiration du cortex occipital chez plusieurs rongeurs. Les ouver-
tures ainsi obtenues ont été remplies avec des éponges chirurgicales imbibées
d’une solution physiologique.
Après des temps de survie postchirurgicaux plus ou moins longs, les
éponges, avec les tissus y adhérant, ont été retirées. De ce matériel, on obtint un
extrait qui fut tout de suite ajouté comme moyen de culture avec différentes
sortes de neurones (par ex. ganglion ciliaire, la chaîne sympathique, le ganglion
embryonnaire de la moelle épinière).
Il est connu que ces neurones dégénèrent en peu d’heures en culture si le
milieu n’est pas enrichi avec des facteurs trophiques. Après rajout des extraits
décrits ci-dessus, on put cependant observer une augmentation progressive du
nombre de neurones survivants en culture.
L’activité trophique maximale de ces extraits se révéla environ
au 10e jour postchirurgical
Ces faits démontrent que lors d’un traumatisme du SNC, il existe un
décalage entre le moment de la lésion initiale et le moment de la production
maximale des facteurs trophiques, qui mène à une dégénérescence neuronale.
Une expérience analogue fut réalisée avec des extraits de matériel prélevé
sur les ouvertures effectuées dans le « palychyme » cérébral. Ces extraits furent
joints aux cultures neuronales du ganglion ciliaire.
39
On observa également que ces extraits n’activaient pas seulement la sur-
vie des neurones, mais provoquaient aussi la production de bourgeonnements
des appendices de ces neurones en culture. Ainsi fut prouvée l’existence de sub-
stances qui permettent la survie de neurones et stimulent la production de pro-
longements (axonaux et dendritiques).
Ces facteurs, aussi bien par leurs fonctions trophiques (santé neuronale)
que tropiques (formation de neurites), ont une influence sur la formation des
voies et des synapses en relation avec le domaine lésé.
Ainsi, si nous comparons les dates du développement physiologique du
SNC avec les dates du processus après un traumatisme, nous remarquons une
suite chronologique tout à fait similaire, ce qui veut dire que la première priorité
des tissus nerveux est d’isoler la zone lésée en formant une membrane pia-
gliale, suivie de la restitution de la barrière hémato-encéphalique. Ce n’est
qu’ultérieurement que se produisent les facteurs trophiques et que se reconsti-
tuent les synapses.
40
Fig. 6 : Représentation schématique de l’utilisation d’un tube synthétique dans la région de
la régénération nerveuse. Le nerf sciatique a été sectionné et les segments proximaux et dis-
taux ont été séparés de 4 mm. Quatre semaines après la section et l’introduction du tube, on
pouvait voir des axones tout à fait visibles au milieu du tube. Des facteurs neurotrophiques
furent injectés pour augmenter la vitesse de régénération.
41
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42
Les maladies neurologiques chroniques
dégénératives et la réadaptation
Claude Hamonet
Résumé
Après avoir précisé les notions de maladie, de diagnostic, de chronicité, d’incurabilité et de
dégénérescence, l’auteur définit la réadaptation en tant que vision positive qui prend en
compte les capacités restantes et les moyens de les potentialiser, instrument indispensable
à la récupération d’un nouvel équilibre entre la personne et les contraintes de vie.
Mots cl é s : maladie évolutive, handicap, communication, réadap t ation, guérison
fonctionnelle et sociale.
43
Claude HAMONET
Professeur des Universités
Spécialiste de Médecine Physique et de
Réadaptation
Expert à l’Organisation Mondiale de la Santé
Docteur en Anthropologie Sociale
Service de Réadaptation Médicale - CHU
Henri Mondor
Université Paris 12. F - 94010 Créteil.
L
’un des débats des sociétés contemporaines parmi les plus importants est
celui de la santé. Il concerne autant les pays riches que les pays pauvres.
L’organisation des systèmes de santé et leur efficacité imposent que
soient très clairement définis ou redéfinis un certain nombre de concepts de base
que sont : la maladie, la santé, le handicap, la guérison et ... la mort.
Aborder la rééducation et la réadaptation des personnes atteintes d’une
maladie chronique, de surcroît « dégénérative », peut apparaître, pour certains,
dans le contexte actuel, à la fois un défi et une provocation. Et pourtant, cette
interrogation permet d’approcher globalement tous les aspects de la santé et de
sa nécessaire articulation avec les aspects humains et sociaux.
44
Le choix de « I’Ordre des botanistes » (1890) a été repris pour les mala-
dies mentales par Jules Falret, Chef de Service à l’hôpital de la Salpêtrière, qui
écrit : « ces principes de classification nous n’avons pas à les rechercher, nous
n’avons qu’à les puiser dans ces sciences plus avancées que les nôtres, dans les
Sciences naturelles, dans la Botanique ». Ceci a abouti, après quelques étapes, à
l’actuelle Classification des Maladies de l’Organisation Mondiale de la Santé.
Le choix de Boissier et de ses successeurs allait être décisif pour la suite de
l’évolution de la Médecine.
D’une part il a « fixé » la notion de maladie en lui donnant un cadre qui
sert de pivot à la notion de diagnostic. D’un autre côté, il a enfermé la Médecine
dans la reconnaissance du pathologique et du « signe positif » c’est à dire un
« manque » ou donc une « anomalie », une notion « négative » pour le patient.
Il convient donc d’utiliser avec prudence le terme de « diagnostic » et de
le réserver à l’acte du médecin qui « reconnaît », à travers la lecture des symp-
tômes et l’interprétation des signes d’examens cliniques ou complémentaires, la
maladie, et lui trouve une place dans la Classification des maladies, c’est à dire
une identité.
C’est donc un abus de langage que de parler de « diagnostic infirmier »,
« kinésithérapique » ou autre pour ce qui est, en fait, de l’évaluation, indispen-
sable certes, mais différente de la notion de diagnostic c’est à dire d’identifica-
tion de la maladie.
45
Le passage à l’état « chronique », comme l’indique son étymologie, est
une question de temps. C’est ainsi que pour le mal de dos, la frontière entre
l’état aigu et l’état chronique se situe à 3 mois pour certains, à 6 mois pour
d’autres. L’organisation hospitalière fournit ainsi des repères dans la durée :
c’est ainsi que le « long séjour » qui est le prototype de l’hôpital de « chro-
niques » se définit par une durée de 6 mois. On a l’impression que le passage à
la chronicité marque la fin d’une évolution possible vers l’amélioration ou la
guérison, qu’il n’y a pas de retour possible vers l’état de santé et que l’on rentre
définitivement et donc jusqu’à la mort dans un état de maladie (en cas d’évolu-
tion continue ou par poussées) ou de séquelles lésionnelles et fonctionnelles.
◆ De la notion d’incurabilité
La guérison est communément définie comme un retour à l’état antérieur
à la survenue de la maladie en sachant qu’ « aucune guérison n’est retour à l’in-
nocence biologique » (G. Canguilhem). La guérison peut aussi être incomplète
et se faire au prix de séquelles (un syndrome hémiplégique par exemple).
Le terme d’incurable évoque l’impossibilité d’arrêter le processus évolu-
tif d’une maladie. Il a souvent signifié que les médecins s’en désintéressaient, et
que la médecine « perdait son temps » avec ce type de malade. Des structures
hospitalières fréquentées par les médecins ont été mises en place sous la forme
d’hospices, l’un d’entre eux s’est même dénommé « Hospice des incurables ».
De fait, s’est établi un clivage entre la Médecine des cas aigus, considérée
comme plus gratifiante et aussi plus respectable et la médecine des
« chroniques », considérés comme irrécupérables et de ce fait exclus des soins
et de la société.
◆ De la notion de dégénératif
Ce terme, qui a aujourd’hui un côté désuet, est pourtant lourd de significa-
tion. La notion de dégénérescence évoque immanquablement celle de déchéance
progressive de l’organisme et des capacités fonctionnelles de la personne. Elle
évoque aussi la notion d’impureté qui pourrait être génétique. Le mot en lui-
même est stigmatisant et négatif. Il est très souhaitable de l’abandonner.
◆ L’apport de la réadaptation
Face à ces visions négatives des concepts de maladies chroniques et évo-
lutives par dégénérescence des tissus nobles, la réadaptation apporte une vision
46
positive qui prend en compte les capacités restantes et les moyens de les poten-
tialiser en agissant sur et avec la personne par la rééducation mais aussi sur l’en-
vironnement et les situations de la vie rencontrées.
La réadaptation peut être définie comme : « l’ensemble des méthodes et des
moyens qui permettent à une personne ayant des limitations fonctionnelles de se
réintégrer ou de s’intégrer dans les diverses activités de la vie sociale (vie cou-
rante, vie familiale, vie de loisirs, vie scolaire ou de formation, vie profession-
nelle, activités de bénévolat) ». Parmi les moyens employés figurent l’orthophonie
et tous les moyens d’améliorer et les fonctions et les situations de communication.
Le lien entre la maladie neurologique et le handicap s’établit de la façon
suivante :
Maladie neurologique évolutive ➞ Lésions ➞ Limitations Fonction-
nelles ➞ Handicap(s).
Un exemple peut être donné pour la maladie de Charcot ➞ lésions du
tronc cérébral et des muscles pharyngés ➞ limitation fonctionnelle de la déglu-
tition ➞ handicap pour s’alimenter.
La notion de handicap est toujours relative à une situation donnée : par
exemple, prendre ses repas.
Elle est la réponse aux situations de handicaps que rencontre la per-
sonne qui a une diminution de ses aptitudes fonctionnelles.
Le fait qu’il y ait évolution vers l’aggravation de l’état fonctionnel n’est
pas une contre-indication à la rééducation mais elle nécessite de s’adapter
constamment et d’avoir une attitude à la fois encourageante et réaliste avec la
personne handicapée et sa famille pour éviter un investissement intensif inutile
et décevant dans une rééducation inappropriée. C’est dire que le rééducateur
doit être capable de beaucoup d’obstination mais aussi d’optimisme de façon à
communiquer l’un et l’autre à la personne réadaptée et à son entourage.
La prise en compte de la communication est un objectif majeur chez ces
personnes qui présentent par ailleurs des limitations motrices souvent considé-
rables. L’apport des nouvelles technologies apparaît, ici, comme un atout pri-
mordial dans le cadre d’une collaboration entre ergothérapeutes et orthopho-
n i s t e s . Le rôle du médecin spécialiste de Médecine Physique et de
Réadaptation coordonnant les actions médico-rééducatives et de réadaptation
est essentiel et encore sous-utilisé.
L’organisation des systèmes de soins avec développement de la réadap-
tation ambulatoire impliquant les interventions dans le cadre de vie du patient
47
est primordiale. L’évolution vers les réseaux de soins en réadaptation fait naître
des espoirs nouveaux pour le type de patients concernés, souvent lourdement
handicapés. Des structures telles que les S.S.E.S.D., G.U.I.D.E., l’A.D.E.P.H.
avec ses assistances respiratoires, offrent déjà concrètement des possibilités
qu’il faut savoir utiliser et connecter.
◆ Au total
A la vieille notion de maladie chronique dégénérative, il convient aujour-
d’hui de substituer celle de maladie évolutive pouvant bénéficier de l’apport de
la réadaptation médicale et sociale.
La notion de « guérison fonctionnelle et sociale » qui est la récupération
d’un nouvel équilibre entre la personne et les contraintes de vie au prix, si
besoin, de dépendances d’aides techniques ou d’aides humaines (voire ani-
males) est très représentative des conceptions actuelles sur la santé. « L’absence
de maladie ou d’infirmités » (Charte de l’O.M.S 1947) n’est plus suffisante, il
faut aussi du « bien-être physique, psychologique et social » comme le précise
cette même charte. C’est là l’objectif de la réadaptation qui apparaît ainsi
comme un instrument indispensable dans la recherche d’un état de santé aussi
bon que possible.
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48
Les troubles de la déglutition
dans la maladie de Parkinson
Bernard Roubeau
Résumé
Les atteintes propres à la maladie de Parkinson peuvent perturber toutes les phases de la
déglutition tant au niveau de l’amplitude, de la durée que de la synchronisation des mouve-
ments mis en jeu. Un des aspects particuliers de la dysphagie parkinsonienne est son
caractère extrêmement fluctuant. Bien que les troubles de la déglutition concernent plus de
50% des patients atteints de maladie de Parkinson, seulement 5% sont pris en charge.
Cette prise en charge doit être très précoce et basée sur les connaissances physiopatholo-
giques de la maladie et son efficacité régulièrement évaluée.
Mots clés : dysphagie, déglutition, maladie de Parkinson, L-Dopa, rééducation.
Abstract
All phases of swallowing and all parameters of the movements involved (range, duration,
synchronization) can be disturbed in Parkinson’s disease. One of the distinguishing features
of this pathology is a marked fluctuation in these swallowing abnormalities. Although more
than 50% of Parkinson’s disease patients suffer from dysphagia, only 5% benefit from spe-
cialized therapy. Therapy must be initiated very early; it should be rooted in the knowledge
we have on the physiopathology of the disease and its effectiveness should be tested on a
regular basis.
Key Words: dysphagia, swallowing, Parkinson’s disease, L-Dopa treatment, rehabilitation.
49
Bernard ROUBEAU
Orthophoniste
Service ORL, Hôpital Tenon,
75 Paris
L
sonnes.
a maladie de Parkinson, maladie neurodégénérative de la voie dopami-
nergique nigro-striatale affecte en Europe plus d’un million de per-
50
L’akinésie est le symptôme le plus important, caractérisé par un retard à
l’initialisation du mouvement, une diminution de sa vitesse et de son amplitude
(Tizon, 1998). Elle peut atteindre tous les mouvements et se traduit au niveau de
la marche, par une marche à petits pas courts et traînants, hésitants au démar-
rage, bras collés au corps.
Le principal traitement consiste à administrer de la dopamine sous forme
de son précurseur, la Lévo-Dopa (L-Dopa) efficace sur l’akinésie, le tremble-
ment et la rigidité. Malheureusement ces traitements n’évitent pas l’évolution de
la maladie et présentent eux-mêmes des effets indésirables tels que l’apparition
de dyskinésies au bout de quelques années.
Le traitement chimique est parfois très long et délicat à mettre en place du
fait de la sensibilité au dosage et de la fréquence des prises de médicament
(Montastruc et al.,1990, Quinn, 1995).
Se développent actuellement de façon très satisfaisante des traitements
chirurgicaux dont le principal est la stimulation chronique électrique - par des
électrodes implantées - du thalamus, du pallidum ou du noyau sous-thalamique
(Cornut, 1998). Cette stimulation qui agit comme un véritable « pacemaker »
neurologique ne peut pas être pratiquée sur toutes les formes de M.P. mais
semble très efficace sur les formes tremblantes résistant à la Dopa, sur certaines
formes akinéto-rigides et sur les dyskinésies sévères consécutives au traitement.
Plus expérimentales sont les greffes de neurones dopaminergiques à partir de
neurones mésencéphaliques embryonnaires.
Au début du traitement par la L-Dopa on observe une disparition quasi
totale des symptômes durant quelques années, période que les neurologues
nomment « lune de miel ». Par la suite, du fait des traitements mais surtout de
l’évolution de la maladie, des troubles moteurs plus tardifs apparaissent (akiné-
sie de fin de dose, akinésie nocturne ou du petit matin, effet « on-off », blocages
moteurs, chutes, dyskinésies faciales...) mais aussi d’autres troubles : du som-
meil, digestifs, sexuels, vésico-sphinctériens, tensionnels et enfin les troubles
touchant les fonctions cognitives (Guillard et al., 1991).
En ce qui concerne les troubles purement moteurs, si le tremblement et la
rigidité des mouvements distaux sont assez bien contrôlés par la dopa-thérapie,
par contre l’akinésie touchant la musculature axiale est, elle, mal contrôlée :
ainsi l’amimie, la dysphonie, la dysarthrie et la dysphagie résistent aux traite-
ments chimiques.
◆ La dysphagie parkinsonienne
Les troubles de la déglutition peuvent recouvrir dans la maladie de Par-
kinson des formes très diverses, allant du problème de bavage à la pneumopa-
51
thie sévère due aux fausses routes répétées en passant par des blocages cervi-
caux avec un retard du déclenchement réflexe, voire une impossibilité totale de
déglutir. Ils peuvent concerner les aliments sous toutes leurs formes sans oublier
les médicaments. Ces troubles modifient donc considérablement la conduite
alimentaire des patients, ainsi que les activités sociales qui s’établissent autour
des repas.
Si les troubles de la déglutition sont fréquents dans la M.P, ils ne survien-
nent pas de façon précoce ; leur précocité doit justement orienter le diagnostic
vers une autre forme de syndrome parkinsonien.
52
Rappelons tout de même que l’interrogatoire du patient doit porter sur les
signes évocateurs de fausses routes silencieuses ou non. D’autre part, l’allonge-
ment des repas, la modification de l’activité sociale du patient autour du repas,
les changements du type d’alimentation, la diminution du plaisir alimentaire, et
les variations pondérales sont autant d’indices de troubles de la déglutition.
Notons que la plainte formulée spontanément par le patient concerne sou-
vent des difficultés à déclencher la phase réflexe, des sensations de blocage cer-
vical voire d’étouffement ou bien plus directement des fausses routes. Mais il
est important de souligner que les fausses routes ne sont pas l’unique expression
des troubles de la déglutition.
L’observation externe de la déglutition d’un aliment semi-liquide permet
d’observer la préhension, la continence buccale, le retard au déclenchement du
temps pharyngé, la qualité de la vidange buccale, l’amplitude de l’ascension
laryngée et enfin la présence d’une éventuelle fausse route marquée par la toux.
La fibroscopie, devenue indispensable, permet d’observer plus précisé-
ment la phase pharyngée et les phénomènes de protection des voies aériennes.
Elle renseigne sur : la mobilité du voile, les propulsion linguale et pharyngée, la
qualité de la vidange pharyngée associée à la présence de stases alimentaires ou
salivaires sur les parois du pharynx ou dans les vallécules, la mobilité de l’épi-
glotte, l’adduction des cordes vocales, ainsi que la durée de chaque étape et
l’amplitude des mouvements. Les fausses routes primaires ou secondaires qui
sont souvent silencieuses pourront être observées.
La ciné-radiographie ou fluorovidéoscopie, bien que d’un maniement
plus lourd permet d’obtenir, grâce à l’ingestion de produits radio-opaques, des
informations complémentaires sur la phase buccale, notamment sur la qualité
de la propulsion linguale, de même que sur la fermeture et l’ascension
laryngée (Bird et al., 1994). L’étanchéité glottique est ainsi beaucoup mieux
observable.
La manométrie permet dans certains cas délicats d’évaluer précisément la
tonicité des contractions pharyngées et oesophagiennes ainsi que d’observer le
fonctionnement des différents sphincters, niveau de relâchement et synchronisa-
tion avec les autres étapes de la déglutition.
Dysphagie et physiopathologie
Selon les études, les troubles de la déglutition atteignent entre 41% et
80% de la population parkinsonienne mais pour la majorité des auteurs ils
concernent 50% des malades (Ali et al., 1994, Hartelius and Svensson, 1994,
Johnston et al., 1995, Lieberman et al., 1980, Robbins et al., 1986).
53
Phase buccale
Cette phase est perturbée dans 92% des cas de dysphagie (Stroudley and
Walsh, 1991) avec une fuite labiale des liquides dans 29% des cas et un défaut
de formation du bolus dans 86%.
Le bavage et les troubles de déglutition de la salive apparaissent dans
78% des cas de dysphagie (Bateson et al., 1973). Il a été démontré que le
bavage n’était pas en rapport avec une hypersialorrhée mais avec, d’une part,
une insuffisance d’occlusion labiale, elle-même associée à un déficit sensitif, et
d’autre part avec l’absence ou le retard du déclenchement automatique de la
déglutition (Bateson et al., 1973).
Les symptômes les plus fréquemment décrits concernant la phase buccale
sont : une réduction des mouvements de la mandibule, une modification de la
mobilité linguale (ralentissement, hésitation, tremblement), des mouvements de
« pompage » de la langue, une modification de la mobilité du voile (ralentisse-
ment de l’ascension, tremblement), un allongement du temps buccal (jusqu’à
plus de 20 secondes) dû à un retard du déclenchement du temps pharyngé, une
régurgitation nasale (rare), une fragmentation du bolus (dans plus de 80 % des
cas) et une stase buccale (sur la langue et le palais, dans les vallécules).
Les principaux aspects moteurs de la maladie de Parkinson (rigidité,
hypokinésie, bradykinésie) sont responsables des anomalies de la phase buccale
(Johnston et al., 1995). Des mouvements ralentis et inappropriés de la langue
résulte le rassemblement incomplet du bolus et sa fragmentation dans le pha-
rynx. Les mouvements d’hésitation de la langue et le retard au déclenchement
de la propulsion pharyngée sont assimilés aux troubles locomoteurs de type aki-
nétique entraînant le piétinement (Wintzen et al., 1994).
Pour certains auteurs (Robbins et al., 1986), ce retard dans le déclenche-
ment du temps pharyngé proviendrait du fait que la langue s’élève suffisamment
pour propulser le bolus mais ne s’abaisse pas assez vite pour lui permettre de
passer.
Enfin, les tremblements peuvent affecter la langue, le voile du palais, la
paroi du pharynx ainsi que l’épiglotte et les cartilages aryténoïdes. Ces tremble-
ments et ceux des membres ne sont pas corrélés, de même que la rigidité géné-
rale et le déficit de mobilité de la paroi du pharynx (Ali et al., 1994) ne sont pas
corrélés non plus.
Phase pharyngée
Les perturbations observées au fibroscope au cours de cette phase ou en
radio-cinéma sont les suivantes : un retard au déclenchement du temps pha-
ryngé, une diminution du péristaltisme pharyngé, une diminution de l’ascension
54
laryngée, la présence de résidus (sur les parois pharyngées, dans les vallécules
laryngées, dans les sinus piriformes) et enfin un déficit dans la protection des
voies aériennes pouvant provoquer une aspiration pendant la déglutition (fausse
route primaire) ou une aspiration au cours de la reprise respiratoire (fausse route
secondaire).
Plus de 40% des aspirations ne sont pas détectées et sont révélées seule-
ment par l’examen fibroscopique ou radio-cinématographique (Stroudley and
Walsh, 1991).
Wintzen et al en 1994 font remarquer fort justement que, malgré le taux par-
ticulièrement élevé d’aspirations décrit dans la littérature et constaté lors de leurs
propres explorations, le taux d’infections pulmonaires est paradoxalement très bas
en regard de celui attendu. Ceci laisserait penser que la pneumopathie n’est pas la
conséquence obligée des dysphagies « parkinsoniennes ». Il est vrai que la « tolé-
rance » aux fausses routes semble dépendre de l’état de santé général du patient.
Phase oesophagienne
Les observations manométriques et la radio-cinématographie permettent
d’explorer la phase oesophagienne (Leopold and Kagel, 1996). Les perturba-
tions fréquemment constatées sont :
- une relaxation incomplète du sphincter supérieur de l’oesophage (SSO),
des contractions synchrones (spasmes), un apéristaltisme, une pression insuffi-
sante des contractions et une relaxation incomplète du sphincter inférieur de
l’oesophage.
Le diamètre du SSO est inférieur à celui de sujets témoins. Il a été montré
que son adaptation au volume du bolus est insuffisante chez les sujets parkinso-
niens. Toutefois il semble que l’insuffisance de cette dilatation n’ait pas de
conséquence majeure sur la déglutition (Ali et al., 1996). La myotomie du crico-
pharyngien permettant la dilatation du SSO n’est d’ailleurs que très rarement
envisagée dans cette pathologie (Born et al., 1994, Lacau St Guily et al., 1995).
La déglutition peut donc être atteinte à tous les niveaux, niveaux qui, ainsi
que la gravité des atteintes, varient d’un sujet à l’autre et de façon importante au
cours du temps pour un même sujet. Cette variabilité caractéristique de la mala-
die de Parkinson rend l’interprétation de l’exploration souvent délicate. Il n’est
pas rare qu’un patient très perturbé à certains moments de la journée, le soit
beaucoup moins au moment de l’examen ou inversement.
Pour plusieurs auteurs il n’existe pas de rapport direct entre l’importance
de la dysphagie et la sévérité de la maladie.
Enfin, dans les causes des troubles de la déglutition doivent être pris en
compte les troubles cognitifs et psychologiques qui peuvent jouer de façon tout
à fait significative sur l’appétit du patient (Johnston et al., 1995).
55
Approches thérapeutiques
Les troubles de la déglutition répondent peu aux traitements anti-Parkin-
soniens. Si les perturbations affectant les phases buccale et pharyngée sont un
peu atténuées par la L.Dopa, la déglutition est loin d’être rétablie dans sa nor-
malité (Bushmann et al., 1989) par cette thérapie.
L’aide la plus précieuse en plus du traitement par anti-Parkinsoniens est
apportée par la rééducation orthophonique.
Signalons qu’à part de très rares indications pour lesquelles la myotomie
du sphincter supérieure de l’œsophage peut être pratiquée, lors de l’échec de ces
différentes approches, la gastrostomie demeure la seule solution.
Conseils alimentaires
Des conseils simples, souvent communs à ceux prodigués dans d’autres
types de dysphagies, doivent porter sur :
• la durée des repas - le fractionnement des repas permet d’éviter la
fatigue et la lassitude ;
• l’environnement - la concentration nécessaire au contrôle de la dégluti-
tion sera facilitée par un environnement acoustique calme, le patient ne devant
pas être trop sollicité par l’entourage pendant les repas ;
56
• la posture - la détente en position assise et la position antéfléchie de la
tête doivent être surveillées afin d’être maintenues constantes ;
• la texture des aliments - en fonction de l’importance du trouble et des
préférences alimentaires du patient, la température mais surtout la texture des
aliments devront être étudiées avec soin. Ainsi les aliments ayant des tempéra-
tures marquées chaudes ou au contraire froides plutôt que tièdes stimulent la
déglutition.
La plupart du temps la texture semi-solide est la plus recommandée. Les
aliments solides ou pouvant s’émietter dans la bouche (biscottes, viande hachée
très cuite, riz...) sont à exclure. Paradoxalement certaines gélatines qui collent
aux parois pharyngées sont à exclure également.
Si les fausses routes sont plus fréquentes lors de la déglutition des
liquides, l’absorption d’eau gazeuse ou de semi-liquides (nectar de fruits) bien
froids réduit les difficultés. Dans le cas où les fausses routes persistent aux
liquides il est possible d’utiliser des gélifiants qui en accroissent la viscosité.
Enfin des compléments caloriques peuvent être apportés, mais suivant
l’avis d’un diététicien.
57
ce contrôle normalement automatique. Le mouvement existe toujours mais se
trouve réduit dans son amplitude, sa vitesse et sa coordination. Le travail ne
consiste donc pas en des renforcements musculaires mais en l’installation de
représentations permettant d’en accroître l’ampleur. Il faut que le patient installe
de nouveaux repères, comme pour la voix et la parole grâce à la sensation
consciemment exagérée qu’il a du mouvement.
Rééducation du premier temps de la déglutition
Au cours de la plupart des rééducations effectuées actuellement, les diffé-
rents niveaux sont pris en compte depuis les lèvres jusqu’au voile du palais. Un
travail de mobilisation passive puis volontaire de tous les éléments de la sphère
oro-pharyngée ainsi qu’un travail de stimulation sensitive sont effectués afin
d’affiner le « schéma corporel » de cette zone pour mieux en assurer le contrôle.
Un contrôle volontaire de la préhension, de la mastication, du rassemble-
ment du bol alimentaire et de sa propulsion par la langue est mis en place. Il est
souhaitable que des consignes globales à ce niveau soient instaurées, telles qu’il
en existe pour la parole (Chevrie-Muller, 1998, Ramig et al., 1995, Yorkston,
1996), afin d’éviter la surcharge d’attention que le patient doit porter à sa déglu-
tition et au « morcellement » de son geste. A ce niveau le rééducateur doit cher-
cher pour chaque patient la consigne principale qui permet de réaliser correcte-
ment l’enchaînement de gestes qui s’y rattachent.
Ainsi comme pour la marche où la parole, il est très important d’aborder
la rééducation de la dysphagie parkinsonienne différemment des pathologies
paralytiques par exemple. Le travail de renforcement musculaire est sans intérêt.
Aussi après les exercices cherchant à renforcer le schéma corporel bucco-facial,
la phase buccale doit être entraînée dans sa finalité. Les mouvements doivent
être conduits devant une glace par exemple afin que le patient perçoive que les
exagérations du mouvement qui lui sont demandées et perçues par lui comme
telles ne conduisent dans la réalité qu’à un mouvement d’amplitude normale. Il
faut donc qu’il modifie ses représentations « internes » du mouvement et effec-
tue un véritable reconditionnement du geste.
Action sur les deuxième et troisième temps
Ces deux phases du processus étant purement réflexes, l’action à leur
niveau ne peut être qu’indirecte.
En ce qui concerne la protection des voies respiratoires, dans les cas où
les fausses routes sont fréquentes, une décomposition grossière du processus
peut être mise en place de façon volontaire : dans un premier temps le patient
doit apprendre à bloquer sa respiration au niveau laryngé en exerçant un serrage
des cordes vocales. Il doit ensuite rétablir l’expiration en débutant par une toux.
58
Une fois ces deux étapes mises en place, elles sont intégrées à la dégluti-
tion : le patient doit bloquer sa respiration volontairement en obturant de façon
tonique la glotte, puis déglutir et ensuite tousser et déglutir à nouveau avant
d’effectuer une reprise de l’inspiration, ceci afin de dégager un éventuel fran-
chissement glottique. Cette technique décrite et évaluée par Bushmann et al en
1989 (Bushmann, 1989) semble plus efficace sur les aspirations que la L.Dopa
elle-même. C’est principalement un travail sur la posture qui va favoriser l’as-
cension laryngée, celle-ci pouvant même être accompagnée manuellement.
Par ailleurs, afin de faciliter la phase pharyngienne, un travail de détente
en position assise pourra être efficace, non pour agir sur la rigidité liée à la
maladie mais sur les crispations qu’engendrent l’appréhension des repas et les
efforts liés à la déglutition. Le rééducateur fera travailler en position assise une
posture antéfléchie de la tête qui, lors de chaque mouvement de déglutition
favorisera l’ascension laryngée.
◆ Conclusion
La prise en charge des troubles de la déglutition dans la maladie de Par-
kinson justifie entièrement son nom de ré-éducation dans la mesure où, comme
pour la locomotion ou l’articulation, toutes les étapes du processus doivent être
« reprises en main » de façon volontaire aussi bien suivant l’aspect qualitatif
que quantitatif. Le malade Parkinsonien est « condamné » à effectuer volontai-
rement des gestes qui normalement sont automatiques afin de ne pas les voir
s’appauvrir au point de l’emprisonner dans son propre corps. Cette rééducation
doit donc être entreprise, comme pour les autres fonctions motrices, le plus tôt
possible et de façon intensive, d’autant plus que la plainte du patient à ce sujet
peut survenir longtemps après l’installation des premiers troubles.
La rééducation bénéficie comme pour la dysarthrie d’un entraînement
intensif avec des séances quotidiennes durant des sessions de 3 à 4 semaines à
raison de 4 à 5 séances par semaine (la séance de rééducation hebdomadaire n’a
guère de sens dans ce type de prise en charge). Les exercices à pratiquer au
domicile sont également indispensables, d’une pratique simple sinon simpliste
afin d’éviter la dispersion et la confusion du patient par le contrôle de trop
d’éléments. Le patient doit pouvoir évaluer seul la progression de sa rééduca-
tion.
Les études sur les techniques rééducatives de la dysphagie par des évalua-
tions objectives font cruellement défaut même dans la littérature anglo-saxonne
pourtant si productive en ce qui concerne d’autres fonctions. Il semble pourtant
que des protocoles de rééducation avec évaluation systématique avant, pendant
59
et après la prise en charge et à distance soient indispensables afin d’adapter au
mieux le traitement à ce type de pathologie ainsi qu’au patient pris en charge.
Comme pour toute prise en charge thérapeutique, l’aspect très « moteur »
de la rééducation du patient parkinsonien n’exclut en rien le rôle fondamental
d’information, d’accompagnement et de soutien psychologique que le rééduca-
teur doit remplir auprès du malade et de son entourage.
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YORKSTON K. M. (1996). Treatment efficacy : dysarthria. JSHR, 39,46-57.
61
Fonctions cognitives et sclérose latérale
amyotrophique (S.L.A.)
Jean Métellus
Résumé
La SLA ou sclérose latérale amyotrophique décrite par Charcot vers 1870 est une maladie
grave d’étiologie inconnue associant un syndrome neurogène périphérique, un syndrome
pyramidal et une paralysie labio-glosso-pharyngée.
On peut observer des formes familiales.
L’étude des fonctions cognitives de ces patients montrerait l’existence d’un déficit des fonc-
tions frontales sans atteindre les critères de démence (DSM III-TR)
Mots clés : SLA, moto neurone, fonctions cognitives.
Abstract
63
Jean METELLUS
Neurologue - Docteur en linguistique
Maître de Conférence au Collège de
Médecine des Hôpitaux de Paris
Centre hospitalier Emile Roux
94456 Limeil-Brévannes
L
a S.L.A. (Sclérose Latérale Amyotrophique) décrite par Charcot vers
1870 comporte l’association d’un syndrome neurogène périphérique,
d’un syndrome pyramidal et d’une paralysie labio-glosso-pharyngée.
Moins rare qu’on ne le pense, il s’agit d’une maladie grave et il faut en informer
le patient. Mais la prédiction de l’évolution est impossible.
Cette maladie atteint l’adulte le plus souvent entre 45 et 60 ans et touche-
rait plus fréquemment le sexe masculin. On a individualisé trois formes cli-
niques : une forme commune débutant par une atteinte des membres, une forme
bulbaire, et la forme pseudo polynévritique de Pierre Marie et coll.
L’étiologie est encore inconnue. L’étude menée par N. Grégoire et G. Ser-
ratrice n’a pas démontré de corrélation significative pour la plupart des facteurs
environnementaux explorés : toxiques, infectieux. Ces résultats négatifs, et le
fait qu’ils ont rencontré dans leur étude comme dans d’autres un pourcentage
notable de formes familiales les portent à reconsidérer le facteur génétique (1).
Mais la mise en évidence déjà vers 1950 de la fréquence de la S.L.A.
chez les Chamoros de l’île de Guam et son association alors à une démence et à
un syndrome parkinsonien a augmenté l’intérêt pour l’exploration des fonctions
supérieures des sujets présentant cette pathologie. Dès 1972, Castaigne et coll.
rapportent 10 cas de S.L.A. à évolution démentielle présentant des lésions corti-
cales s’étendant au delà des régions motrices.
En 1985, Gallasi et coll. étudient, grâce à une batterie de tests psychomé-
triques, les fonctions supérieures de 22 patients atteints de S.L.A. sporadique.
Des tests de fluence verbale, de construction de phrases, d’analyse, le test des
mots de Rey, des tests visuo-spatiaux avec test de mémoire visuelle immédiate
sont pratiqués. Ces 22 patients présentent un indice moyen de performances
plus bas qu’un groupe témoin alors qu’ils ne manifestent préalablement ni
troubles dépressifs ni signes évidents de détérioration mentale. Il y a donc des
troubles légers mais certains des fonctions cognitives chez ces patients atteints
de S.L.A. sporadique.
64
Reprenant deux ans après en 1987 une étude semblable, Gallasi et coll.
confirment l’existence d’un déficit qui semble atteindre préférentiellement les
tests explorant les fonctions dites frontales.
En 1990, Peterson et coll,. au terme d’une étude chez des patients présen-
tant une S.L.A. sporadique, soulignent l’existence d’une altération globale
affectant la mémorisation et l’apprentissage.
lwasaki et collaborateurs en 1990, trouvent aussi une différence significa-
tive entre les sujets atteints et un groupe de témoins pour ce qui concerne la
mémoire immédiate et à long terme.
Des études encore plus récentes comme celles de Massman et coll. (1995)
font état d’un déficit neuropsychologique de type frontal chez 36 % de patients
porteurs de S.L.A.
M. Dary-Auriol, P. Ingrand, V. Bonnaud, P. Dumas, J.P. Neau, R. Gil (2)
étudient 26 patients porteurs de sclérose latérale amyotrophique et les compa-
rent à un groupe témoin sur la base d’une série de tests psychométriques.
Sur les 26 patients, 17 présentent une forme commune, 7 une forme bul-
baire et 2 une forme pseudo-polynévritique. Il s’agit dans tous les cas de formes
sporadiques. Des patients en situation de dépression sévère ou modérée, des
patients présentant des pathologies intercurrentes d’ordre neurologique, cardio-
vasculaire et respiratoire sont exclus de cette étude.
Un groupe témoin de 26 personnes est recruté parmi une population hos-
pitalisée. Les auteurs adoptent envers ce groupe les mêmes critères d’exclusion
que ceux appliqués au groupe de patients.
Il n’existe pas de différence significative d’âge et de niveau culturel entre
ces deux populations.
La durée de passation de la batterie de tests est de deux à trois heures.
Pour éviter des phénomènes de fatigue, cette durée est fractionnée en deux
périodes de 45 minutes mais le même ordre de passation est respecté.
L’exploration neuropsychologique comporte plusieurs épreuves. D’une
part l’Exploration Rapide des Fonctions Cognitives (ERFC) ; Gil et al. (1981)
apprécient de façon rapide les fonctions cognitives ; les sous-tests étudient :
1) l’orientation spatio-temporelle ;
2) l’attention ;
3) la mémoire immédiate et différée ;
4) le calcul mental ;
5) le raisonnement ;
6) le jugement ;
7) la compréhension ;
8) la dénomination ;
65
9) la répétition ;
10) l’exécution d’un ordre écrit ;
11) la fluidité verbale ;
12) les praxies constructives et idéo-motrices ;
13) le décodage visuel et l’écriture.
Dary-Auriol et coll. soumettent leurs patients à de nombreuses autres
épreuves qui assurent un balayage effectif des fonctions supérieures.
« Les performances réalisées par le groupe de patients et le groupe
témoin, ainsi que les résultats des tests initiaux et à 6 mois des patients, ont été
comparés en utilisant le test de Wilcoxon » (3).
Les auteurs de ce mémoire sur la sclérose latérale amyotrophique et les
troubles cognitifs présentent ainsi leurs résultats : dans la S.L.A. « la discrétion
du déficit cognitif » apparaît surtout à l’analyse des tests explorant globalement
le fonctionnement intellectuel ; ainsi en est-il de l’ERFC dont le niveau est de
45,8 chez les patients et de 47,3 chez les sujets témoins, de l’échelle verbale
(94,3 chez des patients et 111 chez les témoins) et de l’échelle de performance
de la Wais (92,7 chez les patients, 103,7 chez les témoins).
On observe une baisse significative des performances à tous les items de
la Wais chez les patients. Les moyennes apparaissent peu élevées et ce, tant
chez les patients que chez les témoins, ce qui s’explique par le fait qu’il s’agit
de notes standard et non de notes pondérées en fonction de l’âge (les notes stan-
dard sont les notes utilisées pour le calcul du Q.I. Verbal et du Q.I. de perfor-
mance)... »
On ajoutera avec les auteurs que le déficit cognitif n’épargne pas non plus
les fonctions cristallisées telles qu’elles sont explorées pour les automatismes
verbaux de Beauregard.
Pour plusieurs tests explorant les fonctions frontières, les auteurs trouvent
une différence significative entre les deux populations ; chez les patients, les
scores sont plus bas pour l’épreuve d’arrangement d’images de la Wais ; de
même que la fluence alternée d’images est significativement plus basse chez les
patients que chez les témoins.
Il y a donc bien un déficit cognitif global et léger, comme le disent les
auteurs (Dary-Auriol et coll.), mais ce déficit est significatif chez les patients.
Ils soulignent dans les commentaires de leur mémoire qu’en aucun cas les
scores des patients atteints de S.L.A. ne sont très bas et ne peuvent laisser pen-
ser aux critères de démence (DSM-111-TR) mais que les associations patholo-
giques qui font l’objet de plusieurs publications sont toujours sous-tendues par
la même interrogation ; et effectivement on peut se demander avec ces auteurs :
« S’agit-il d’une coïncidence avec l’expression de deux pathologies distinctes
66
chez un même individu ou bien existe-t-il un processus physiopathologique
commun ? » (4) C’est ici qu’il convient de rappeler des études japonaises
(Mitsuyama. 1984) qui rapportent des cas où la démence avec troubles mné-
siques comme signes d’alerte a précédé l’apparition des signes moteurs ; c’est
aussi ici qu’il faut rappeler les études de Vercelleto et al. (1995) qui rapportent
trois cas associant troubles de la personnalité avec désinhibition, jovialité et
perte de l’autocritique, troubles du comportement alimentaire avec gloutonnerie
et activités obsessionnelles et stéréotypies avec troubles frontaux.
Assez récemment (1987) Dalakas et al. lors d’une étude par émission de
positrons signalent l’existence pour une population atteinte d’une S.L.A. d’un
hypométabolisme cortical diffusant au delà des régions motrices. En 1992
Ludolph et coll. signalent une diminution modérée du métabolisme cérébral du
glucose en particulier au niveau du cortex frontal mais aussi au niveau des struc-
tures sous-corticales. Il y aurait là corrélation entre cet hypométabolisme et les
signes de dysfonctionnement frontal.
Plus près de nous, Kew et coll. (1993) et Kew et coll. (1994) ont montré
chez des patients atteints de maladie de Charcot non déments, une diminution
du flux sanguin dans le cortex sensori-moteur primaire, le cortex prémoteur, la
partie antérieure du cortex cingulaire et les parties supérieures et inférieures du
cortex pariétal.
Comme on le voit, cette pathologie décrite brillamment sur le plan cli-
nique depuis plus de 130 ans suscite maintenant, à l’ère des neurosciences, de
nouvelles recherches dans des directions, au prime abord, imprévues. Il semble
en être ainsi de toutes les pathologies dégénératives ou considérées comme
telles.
Toujours est-il qu’on était bien loin de penser, au début du siècle, à mettre
en évidence une détérioration cognitive globale dans cette maladie du moto-
neurone.
Mais les chercheurs sont de plus en plus armés pour affronter cette mala-
die qui nécessite une prise en charge active et globale, car la maladie est grave
et la force musculaire perdue ne se récupère pas.
Pour aider le patient, il faut l’amener en consultation tous les quinze jours
et il faut traiter chacun des symptômes par les moyens thérapeutiques
appropriés.
1) la constipation pour avoir un transit de bonne qualité ;
2) les douleurs articulaires par les AINS associés à un cytoprotecteur
gastrique ;
67
3) les douleurs de décubitus par l’administration d’antalgiques adaptés à
leur intensité ;
4) employer la kinésithérapie passive, douce, d’entretien pour lutter
contre la raideur articulaire et détendre le patient ;
5) les crampes par l’Hexaquine ;
6) les fonctions résiduelles par l’orthophonie ;
7) les troubles du sommeil en fonction de leur étiologie, en sachant que
les hypnotiques renforcent les apnées du sommeil et sont donc contre
indiqués ;
8) le syndrome pseudo-bulbaire est difficile à gérer ;
9) les mycoses buccales, vaginales et cutanées fréquentes sont à traiter ;
10) la surinfection bronchique fréquente doit être soupçonnée devant une
toux qui dure, diagnostiquée par la radiographie pulmonaire et traitée.
Savoir que « le décès lié à une fausse route, en rapport avec des troubles
aigus de la déglutition n’est en réalité jamais observé. En fait la mort survient
6 fois sur 10 pendant le sommeil diurne ou nocturne ». (5)
Mais la recherche progresse et des essais thérapeutiques avec le Riluzole
(Rilutek*) un antiglutamate suscite des espoirs.
REFERENCES
1. N. GREGOIRE et G. SERRATRICE. (1997) - Facteurs de risque dans la Sclérose Latérale Amyotro-
phique (Premiers résultats à propos de 35 cas) Revue Neurologique Paris, 17, 11, 706-713
2. M. DARY-AURIOL, P. INGRAND, V. BONNAUD, P. DUMAS, J.P. NEAU, R. GIL. (1997) - Sclérose
Latérale Amyotrophique et troubles cognitifs. Etude neuropsychologique d’une population de 26
patients. Revue Neurologique. Paris; 153 : 4, 244 - 50
3. in op. cit. 2 p.296
4. in op. cit. 2 p.248
5. Dr Emmanuel CUZIN. (12 juin 1998) - Changer l’image négative de la S.L.A. Entretien avec le Pr Vin-
cent MEININGER, Hôpital de la Salpétrière. Impact Médecin Hebdo n° 413.
68
La maladie de Steele-Richardson-Olszewski :
diagnostics différentiels
et rééducation orthophonique
Isabelle Eyoum, Sidonie Defives-Masson
Résumé
La maladie de Steele-Richardson-Olszewski est une pathologie dégénérative encore mal
connue, souvent confondue avec la maladie de Parkinson ou d’autres pathologies voisines.
La présentation de plusieurs diagnostics différentiels et une étude de cas montreront l’inté-
rêt d’un diagnostic précoce et d’une prise en charge orthophonique spécifique.
Mots clés : maladie de Steele-Richardson-Olszewski, paralysie supranucléaire progressive,
diagnostics différentiels, rééducation orthophonique.
69
Isabelle EYOUM
Sidonie DEFIVES-MASSON
Orthophonistes
11, rue de Saint-Quentin
94130 Nogent-sur-Marne
Tél : 01 48 77 04 95
Fax : 01 48 76 87 03
D
ans le cadre de l’étude de démences sous-corticales, nous avons été
amenées à étudier plus précisément la Maladie de Steele-Richardson-
Olszewski ou Paralysie Supra-nucléaire Progressive (PSP).
« C’est une maladie dégénérative du système nerveux central touchant les
noyaux gris centraux et les structures du tronc cérébral impliquées pour la plu-
part dans la motricité » (Broucker 1996).
Sur 100 % des patients, 70 % sont des hommes. L’âge d’apparition de la
maladie se situe en moyenne à 63 ans.
Cette pathologie est si souvent confondue à son début avec la maladie de
Parkinson voire même avec d’autres pathologies dégénératives aboutissant pour
la plupart à des démences, qu’il nous a paru intéressant d’établir quelques dia-
gnostics différentiels pour identifier au plus tôt cette pathologie afin de proposer
la rééducation orthophonique la plus appropriée.
◆ Description de la maladie
Anatomie
Sur le plan anatomique, la proximité des localisations lésionnelles
explique la similitude des troubles notamment au début de la maladie. Les
lésions les plus fréquemment observées sont :
1) Les lésions du tronc cérébral :
- le mésencéphale
- la zone protubérantielle
- la zone bulbaire.
2) Les lésions du diencéphale sont observées de façon constante et
importante.
70
3) On peut noter des lésions non systématiques au niveau :
- du cortex frontal
- de l’hippocampe
- du septum et du putamen
- du thalamus et de l’hypothalamus
- des noyaux rouges et du striatum
- des noyaux III, IV, VI.
4) Enfin, certaines zones ne sont jamais ou qu’exceptionnellement
touchées :
- les pédoncules moyen et inférieur
- les amygdales.
Les motoneurones et les voies périphériques sont intacts dans les lésions
supra-nucléaires.
On peut établir un lien direct entre certaines lésions et certains symp-
tômes observés :
LESIONS CONSEQUENCES
Locus niger Syndrome extrapyramidal
Pallidum Akinésie
Aire prétectale Trouble statique corporel et paralysie
oculomotrice des mouvements verticaux
Calotte protubérantielle Paralysie oculomotrice des mouvements
latéraux
Corps de Luys et noyau dentelé Hyperkinésie volitionnelle
Hémiballisme
Réticulée méso-diencéphalique Syndrome pseudo-démentiel
Circuit fronto-caudo-luysien Comportement compulsif d’allure
obsessionnelle
Hippocampe Trouble mnésique
Cortex frontal Syndrome frontal
Clinique
On peut suivre l’évolution de la maladie, l’analyse des symptômes peut se
scinder en trois phases :
- la phase de début
71
- la phase d’état
- la phase terminale.
1) Phase de début :
Les symptômes sont présentés dans l’ordre d’apparition le plus
fréquent :
MOTRICITE Instabilité à la marche et chutes
Hypertonie axiale
Akinésie (maladresse gestuelle )
VISION Ophtalmoplégie verticale et parfois latérale
Troubles visuels sans anomalie ophtalmique
(vision floue, diplopie, yeux secs...)
Parfois, anomalie de la convergence, trouble de
la motilité palpébrale, blépharospasme.
Atteinte de la commande automatique et/ou réflexe
VOIX Diminution de l’intensité
PAROLE Aprosodie
LANGAGE Palilalie
TROUBLES Modifications de la personnalité, troubles du
PSYCHIQUES comportement : Syndrome dépressif courant,
agressivité possible
Troubles du sommeil (réduction)
Ralentissement psychique, perte de la motivation
Emoussement affectif
TROUBLES Légers troubles mnésiques possibles
INTELLECTUELS Fatigabilité
SIGNES Pseudo-vertiges, crises vertigineuses
NEUROLOGIQUES Parfois, syndrome parkinsonien
Syndrome frontal : comportement de préhension,
d’imitation, grasping
Réflexe naso-palpébral (RNP) inépuisable
Réflexe ostéo-tendineux (ROT) vif
Réflexe oculo-céphalique (ROC) exagéré
ALIMENTATION
72
Les troubles visuels et psychologiques, quand ils sont présents, ce qui
n’est pas systématique, peuvent également faire partie des premiers signes alar-
mants.
2) Phase d’état
Les troubles de la motricité, évoqués plus haut, font souvent penser en
premier lieu à un début de maladie de Parkinson.
Le diagnostic est rarement facile à poser à la phase de début, et il faut
souvent attendre la phase d’état avant de se prononcer en faveur d’une PSP.
MOTRICITE La marche devient impossible
Akinésie majeure, gestes rares et ralentis
Amimie
Hypertonie axiale et des membres
VISION Aggravation des signes de la phase de début
VOIX Dysphonie voire aphonie
Voix monotone
Nasonnement possible
PAROLE Dysarthrie
LANGAGE Palilalie
Apraxie
Diminution de la fluence verbale
TROUBLES PSYCHIQUES Syndrome dépressif
TROUBLES Troubles mnésiques
INTELLECTUELS Troubles de la concentration
et du jugement possibles
Troubles du raisonnement
Evolution vers une démence
SIGNES Syndrome pyramidal
NEUROLOGIQUES Syndrome extrapyramidal
Syndrome pseudo-bulbaire (entraînant
dysarthrie puis dysphagie, labilité
émotionnelle)
Possibilité de désorientation temporo-spatiale
(DTS)
ALIMENTATION Troubles de la déglutition, dysphagie
(abolition du réflexe du voile et dystonie du
muscle crico-pharyngien possible)
73
3) Phase terminale
Les symptômes s’aggravent jusqu’à une détérioration généralisée de
toutes les fonctions.
La marche devient impossible, confinant le patient au fauteuil, puis au lit.
La dysarthrie rend souvent la parole totalement inintelligible. Il n’y a
aucun moyen de pallier ce déficit, l’écriture et l’expression gestuelle étant égale-
ment impossibles, et le patient amimique.
Les patients deviennent parfois incontinents.
Ils ne peuvent plus se nourrir seuls.
La PSP évolue souvent vers une démence de type sous-cortical frontal.
La mort survient en 5 à 6 ans environ.
Etablissement du diagnostic
Les études les plus récentes (Quesney 1995) regroupent les signes d’ap-
pel, le tableau inaugural et les signes de la phase d’état.
1. SIGNES D’APPEL
- troubles de l’équilibre et de la marche, chutes ;
- ralentissement psychomoteur qui évoque un syndrome dépressif (avec
parfois un syndrome dépressif réel) ;
- troubles du comportement, de la personnalité, sans désorientation tem-
poro-spatiale ni troubles mnésiques ;
- difficultés d’élocution et d’écriture ;
- troubles visuels.
2. TABLEAU INAUGURAL
On observe un syndrome akinéto-hypertonique (qui rend le diagnostic
difficile au début, car cela peut évoquer une MP), puis un syndrome oculaire et
un syndrome pseudobulbaire.
3. SIGNES À LA PHASE D’ÉTAT
3.1 Syndrome extrapyramidal
- troubles de la marche, chutes répétitives sans cause apparente ;
- bradykinésie ou akinésie ;
- hypertonie précoce ;
- dystonies ;
- troubles de l’écriture (lenteur, parfois micrographie).
74
3.2 Syndrome oculaire (élément fondamental mais non spécifique de la PSP)
- troubles subjectifs (vision floue, diplopie, photophobie...) ;
- troubles objectifs (paralysie prédominant sur la verticalité, et surtout
vers le bas, limitation des mouvements latéraux).
3.3 Syndrome pseudobulbaire
- dysarthrie ;
- dysphagie ;
- voix sourde ;
- parole monotone, monocorde ;
- fluence verbale limitée, discours pauvre et lent.
3.4 Syndrome pseudodémentiel en rapport avec un syndrome frontal
- troubles thymiques et des fonctions supérieures ;
- troubles de la mémoire ;
- ralentissement psychomoteur et de la pensée ;
- labilité émotionnelle ;
- diminution de la fluence verbale ;
- altération du langage élaboré ;
- pauvreté du raisonnement et de la pensée abstraite ;
- comportement d’imitation, de persévération ;
- troubles de la vigilance.
3.5 Syndrome pyramidal
- ROT vifs, précocément ou tardivement ;
- signe de Babinski uni ou bilatéral ;
- signe d’Hoffmann uni ou bilatéral.
3.6 Autres signes neuropsychiatriques
- signes cérébelleux rares ;
- épilepsie ;
- amyotrophie des membres rare ;
- troubles compulsifs.
3.7 Troubles du sommeil précoces qui s’aggravent
Le diagnostic est possible, probable ou certain selon certains critères
d’après les études de T. De Broucker en 1996 ;
1. DIAGNOSTIC DE PSP POSSIBLE
1.1 Critères de sélection principaux :
- aggravation progressive, début après 40 ans ;
75
- ophtalmoplégie supranucléaire verticale ou ralentissement des saccades
verticales et instabilité posturale avec chutes durant la première année ;
- absence d’une autre cause pouvant expliquer la symptomatologie.
1.2 Critères de sélection secondaires :
- akinésie ou rigidité symétrique plus proximale que distale ;
- posture cervicale anormale ;
- pas d’amélioration du syndrome parkinsonien par la L-Dopa ;
- trouble de la déglutition et dysarthrie ;
- début précoce des troubles cognitifs comprenant au moins deux des élé-
ments suivants : apathie, difficultés de la pensée abstraite, diminution de
la fluence verbale, comportement d’utilisation ou d’imitation, signes
frontaux.
1.3 Critères d’exclusion :
- histoire récente d’encéphalite, syndrome de la main étrangère, déficits
sensoriels corticaux, atrophie focale frontale ou temporopariétale ;
- hallucinations ou illusions indépendantes d’une dopathérapie ;
- démence de type Alzheimer (D.T.A) ;
- symptômes cérébelleux précoces ou prédominants, dysautonomie
précoce non expliquée.
2. DIAGNOSTIC DE PSP PROBABLE
2.1 Critères de sélection principaux :
- aggravation progressive, début après 40 ans ;
- ophtalmoplégie supranucléaire verticale et instabilité posturale avec
chutes durant la première année ;
- absence d’une autre cause pouvant expliquer la symptomatologie.
2.2 Critères d’exclusion :
- signes parkinsoniens sévères et asymétriques ;
- anomalies neuroradiologiques structurelles compatibles avec les
symptômes.
3. DIAGNOSTIC DE PSP CERTAIN
PSP possible ou probable cliniquement et aspect neuropathologique
typique de la PSP.
Les diagnostics différentiels
Les symptômes de la phase de début de la PSP font souvent penser à une
maladie de Parkinson. De plus, un ensemble de signes qualifiés de syndrome
76
Parkinsonien, se retrouve dans cette pathologie. Le diagnostic différentiel prend
donc toute sa valeur ici. Pour d’autres pathologies, le tableau d’analyse sera plus
succinct n’étudiant que les différences patentes.
1. PSP ET MP
Nous notons dans le tableau suivant les signes du syndrome parkinsonien
de la PSP et leurs différences avec ceux de la MP.
MP PSP
Tremblement de repos + Pas ou peu
Symétrie des signes
neurologiques - +
Précocité des chutes
et de l’instabilité posturale - +
Amélioration par
traitement à la L-Dopa + -
Attitude du cou Cou et tronc Cou en hyperextension
en flexion
Déformation des mains + -
Faciès Figé et amimique « expression sévère, à la fois
étonnée et inquiète »
(Chavany et al., 1951*)
Marche Festination, perte Raide, avec élargissement
du balancement du polygone de sustentation,
des membres balancement des membres
supérieurs supérieurs
Hypertonie et/ou akinésie Prédominance Prédominance axiale
dans les membres
Dyskinésies et fluctuations Améliorées Rares. Dopathérapie inutile.
akinétiques par la dopathérapie
Notons enfin trois signes spécifiques de la PSP, qui n’existent pas dans la MP.
MP PSP
Signes pseudo-bulbaires - +
Troubles cognitifs francs - +
Incontinence urinaire - +
77
2. PSP ET ATTEINTE OPHTALMIQUE
Même quand on observe des troubles visuels dans la PSP, il n’existe
jamais d’anomalie ophtalmique.
3. PSP ET MALADIE D’ALZHEIMER (MA)
MA PSP
Siège Cortical DNF cortico-sous-corticale
Troubles mnésiques Apparition précoce Apparition plus tardive
ou pas d’apparition
4. PSP ET SYNDROME EXTRAPYRAMIDAL IATROGÈNE (SEI)
SEI PSP
Troubles oculomoteurs + -
Effet des neuroleptiques Régression du SEI Pas de régression
après arrêt de la PSP après arrêt
des neuroleptiques des neuroleptiques
Traitement par Amélioration du SEI Pas d’amélioration
anticholinergiques de la PSP
5. PSP ET SYNDROME EXTRAPYRAMIDAL POST-ENCÉPHALIQUE (SEPE)
SEPE PSP
Début Précoce Plus tardif
(entre 50 et 70 ans)
Crises oculogyres + -
Amyotrophie des membres + -
Evolution longue 6 ans en moyenne
6. PSP ET HYDROCÉPHALIE À PRESSION NORMALE (HPN)
HPN PSP
Dilatation du système
ventriculaire Marquée Pas ou peu
7. PSP ET MALADIE DE SHY-DRAGER (MSD)
MSD PSP
Hytpotension orthostatique + -
78
8. PSP et dégénérescence striato-nigrique (DSN)
DSN PSP
Sex ratio Touche plus Touche plus
les femmes les hommes
Lésions du striatum + -
9. PSP ET ATROPHIE OLIVO-PONTO-CÉRÉBELLEUSE (AOPC)
AOPC PSP
Syndrome cérébelleux + -
Paralysie oculomotrice
de la verticalité - +
10. PSP ET DÉGÉNERESCENCE CORTICO-BASALE (DCB)
DCB PSP
Signes pariétaux + Rares
Syndrome frontal Rare +
Chutes Rares +
Atteinte neuronale Neurones gonflés DNF
On peut préciser qu’il convient de faire attention car les lésions sous-cor-
ticales sont les mêmes, et il peut exister des lésions corticales dans les deux
pathologies.
11. PSP ET ÉTATS LACUNAIRES
Etat lacunaire PSP
Lésions ischémiques Noyaux gris centraux -
et mésencéphale
Hypométabolisme frontal - +
Etude de cas
M.DG.
Anamnèse
Antécédents :
1989 : Hémiplégie gauche.
1993 : Apparition de troubles du langage.
79
Situation lors du premier bilan :
Né le 26/1/25. 71 ans.
Retraité : ancien menuisier-ébéniste.
Marié, 2 filles, 3 petits-enfants.
Histoire de la maladie
1992-1995
Suivi à la SALPETRIERE pour :
paralysie de la jambe gauche
syndrome extrapyramidal avec troubles frontaux.
Troubles de la parole et du langage.
Diagnostic : Maladie de Steele-Richardson.
Rééducation : kinésithérapie tous les jours.
Juillet 1996
M.DG est adressé pour un bilan orthophonique.
Conclusion du bilan : Importants troubles cognitifs et phasiques, réduc-
tion de la fluence verbale, difficultés d’évocation, atteinte arthrique, troubles du
contrôle moteur.
Le neurologue préconise une rééducation orthophonique pour permettre
une communication minimale de M.DG. avec son entourage et un accompagne-
ment psycho-affectif.
Octobre 1996
Début de la prise en charge orthophonique, 3 fois par semaine.
Axes de la rééducation :
- praxies ;
- articulation ;
- travail neuro-visuel ;
- lecture ;
- graphisme ;
- déglutition (apparition de légers troubles).
Novembre 1996
Evolution de la rééducation :
- amélioration de l’articulation ;
- amélioration du contrôle du souffle ;
80
- lecture bien conservée ;
- déglutition bien conservée, mise en place de moyens de compensation
pour éviter les fausses routes ;
- stratégies du regard encore difficiles à gérer.
Janvier 1997
Evolution de la rééducation :
- léger progrès de la commande volontaire aux niveaux visuel et articula-
toire ;
- répétition possible et compréhensible ;
- mémoire bien conservée en immédiat et à court terme, légers troubles de
la mémoire à long terme ;
- légers progrès de la stratégie visuelle ;
- graphisme toujours très altéré.
Analyse des signes
1) Signes positifs
81
2) Signes négatifs
PRAXIES Mastication impossible sur ordre et en imitation.
BUCCO-FACIALES Peu de réalisations des praxies labiales.
Légère déperdition nasale.
REALISATION Nasalisation.
PHONETIQUE Perte des consonnes p,b,m / ch,j / f,v.
Lecture gênée par le regard.
DEBIT Ralenti et monotone.
INTONATION Voix recto-tonale.
SOUFFLE Manque de souffle.
ET RESPIRATION Pas de contrôle.
VOIX Caverneuse, nasonnée, presque chuchotée.
Temps d’émission médiocre.
Voix conversationnelle difficilement intelligible.
Pas de voix chantée.
Pas de voix projetée.
Fatigable.
MIMIQUE Amimie quasi-totale.
REGARD Ophtalmoplégie très importante.
DEGLUTITION Fausses routes aux liquides.
Légers troubles de déglutition aux solides.
1) Signes subjectifs, conscience des troubles
C’est la femme de M.DG. qui fait état de ses troubles, mais lui-même
semble peu conscient de ses difficultés, hormis sur son état moteur. Sa perte
d’autonomie le handicape physiquement et moralement.
2) Comportement lors du bilan
M.DG. est très coopérant quand on le sollicite, mais ne semble concerné
ni par le discours de sa femme à son sujet, ni par la mise en évidence de ses
troubles.
3) Résultats au bilan
a) Communication orale
Globalement, les praxies sont difficiles pour M.DG., hormis celles de la
langue, rendant ainsi l’articulation problématique.
82
Certains phonèmes ne sont plus réalisables, même isolés.
Le débit est lent, la voix est faible, caverneuse et nasonnée, aprosodique.
La lecture est lente, avec élision de lignes.
b) Mimique faciale
Seul le sourire est encore possible dans toutes les situations. Toutes les
mimiques demandées déclenchent rires et pleurs spasmodiques.
c) Regard
L’ophtalmoplégie est très importante, même avec support, mais M. DG. a
déjà développé de lui-même une assez bonne compensation avec la tête.
d) Alimentation
La déglutition des solides semble encore assez correcte, mais celle des
liquides occasionne de nombreuses fausses routes.
L’anosognosie de M.DG. ne lui permet pas de se rendre compte de la gra-
vité de ses troubles, pourtant très importants, et qui rendent la communication,
l’alimentation et surtout l’utilisation du regard très problématiques.
Analyse de la rééducation
1. Fréquence et lieu de prise en charge
Trois fois par semaine, à domicile (octobre 96).
2. Axes
- Praxies bucco-faciales et bracchiales, mouvements phonatoires ;
- Articulation, notamment sur p/b et f/v ;
- Mimiques (mises en situation : lecture de textes susceptibles de déclen-
cher des émotions, de faits divers, présentation de photos...) - Travail
neuro-visuel d’orientation du regard et de poursuite oculo-motrice (laté-
ralité, verticalité, balayage, stratégie visuelle) ;
- Mémoire (rappel de dates, listes de mots à apprendre) ;
- Graphisme et écriture (sur modèles, pointillés...) ;
- S o u ffle (souffle abdominal, contrôle des pauses respiratoires en
parlant...) ;
- Déglutition pour fausses routes secondaires ;
- Fonctions supérieures (lecture, récit oral, jugement critique) ;
- Stimulations myo-faciales.
3. Evolution
Juillet 96 - Compte-rendu du premier bilan.
83
1) EXPRESSION ORALE
- parole spontanée : dysarthrie caractérisée par un manque de force et de
précision articulatoire ;
manque de fluidité, dysprosodie, syllabation.
manque du mot, manque d’incitation.
- séries automatiques : réussies à 100 %.
- répétition de syllabes simples : bonne
syllabes complexes : simplifications, inversions, élisions.
mots simples : bonne.
mots complexes : persévération, syllabation, avec les mêmes pro-
blèmes arthriques.
phrases simples : bonne, mais avec les mêmes problèmes arthriques.
phrases complexes : difficile.
- dénomination d’images : difficile. Aide par l’ébauche orale.
- description d’images : énumérative, pas d’interprétation, structures syn-
taxiques pauvres.
- définition de mots : difficile quant au vocabulaire abstrait, manque d’in-
citation, structures réduites au maximum.
- antonymes et synonymes : très difficile, manque du mot et difficultés
d’évocation.
- construction de phrases : M.DG refuse l’épreuve.
- fluence verbale : réduite, dissociation automatico-volontaire.
2) COMPRÉHENSION ORALE
Les épreuves de :
- désignation
- choix multiple
- ordres simples
- restitution d’un texte entendu
sont réussies, (même si la restitution du texte est de style télégraphique.)
3) COMPRÉHENSION ÉCRITE
Les épreuves de :
- lecture
- désignation de lettres, groupes de lettres, mots et textes
- correspondance mots/images, textes/actions
- exécution d’ordres écrits
sont réussies, (malgré des phénomènes de persévération à minima et une
restitution de récit lacunaire)
84
4) EXPRESSION ÉCRITE
Très difficile, geste moteur lent et mal contrôlé.
Persévération graphique.
5) EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
- Praxies bucco-faciales : mouvements fins difficiles.
mouvements de déportation de mâchoire
accompagnés de mouvements de tête.
bonne motilité linguale.
impossibilité de froncer les sourcils
et faire un clin d’oeil.
syncinésies de la main.
- Souffle : manque de force et de contrôle.
- Déglutition : bonne.
- Regard : persévération tonique, stratégies du regard très lentes.
Conclusion : Importants troubles cognitifs et phasiques, réduction de la fluence
verbale, difficultés d’évocation, atteinte arthrique, troubles du contrôle moteur.
Octobre 1996
Début de la prise en charge.
Apparition de légers troubles de la déglutition.
Amimie totale.
Novembre 1996
- amélioration de l’articulation, moins floue, compte tenu des efforts
qu’effectue M.DG. notamment sur le rythme respiratoire.
- amélioration du contrôle du souffle.
- lecture bien conservée, améliore l’articulation.
- déglutition bien conservée, mise en place de moyens de compensation
pour éviter les fausses routes. M.DG. peut boire seul à la paille en bais-
sant la tête pour éviter les fausses routes.
- stratégies du regard encore difficiles à gérer. Néanmoins, en aidant le
regard par la motricité de la main droite, M.DG. arrive à exécuter un
puzzle de 25 morceaux, et à s’orienter en haut, en bas, à droite et à
gauche par rapport au modèle.
- amélioration des mimiques en situation.
Janvier 1997
- léger progrès de la commande volontaire aux niveaux visuel et articula-
toire ;
85
- répétition possible et compréhensible ;
- mémoire bien conservée en immédiat et à court terme, légers troubles de
la mémoire à long terme ;
- légers progrès de la stratégie visuelle ;
- graphisme toujours très altéré ;
- respiration volontaire encore difficile, mais en progrès, ce qui améliore
la diction ;
- restauration du sourire en spontané
M.DG. est décédé en juillet 1997.
La rééducation orthophonique lui aura permis de communiquer avec sa
famille jusqu’à la fin.
◆ Conclusion
La prise en charge de la maladie de Steele et Richardson nécessite une
rééducation spécifique d’où l’importance d’un diagnostic différentiel précoce.
Il est très important de retenir que nous ne travaillons pas dans la « répa-
ration » ni dans la récupération (de toute façon impossible) des troubles. L’ob-
jectif de la prise en charge est de conserver au maximum l’autonomie fonction-
nelle du patient. Dans cette optique, il s’agit pour l’orthophoniste de :
- maintenir la communication
- entretenir la déglutition
- informer
- conseiller
- accompagner et soutenir le patient (et l’entourage) jusqu’à la fin de sa
vie s’il le faut.
86
REFERENCES
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87
Un cas particulier de chorée :
l’hémiballisme
Nancy Cohen, Isabelle Eyoum
Résumé
Présentation d’un cas d’hémiballisme. Bilan orthophonique et rééducation de la symptoma-
tologie sur une durée de 2 ans.
Mots clés : Maladie de Huntington, Chorée, Hémiballisme, sémiologie, bilan, rééducation
orthophonique.
Abstract
This article presents a case of hemiballism: speech evaluation and management of symp-
toms over a period of two years.
Key Words: Huntington’s disease, Chorea, hemiballism, semiology, evaluation, speech
therapy.
89
Nancy COHEN
Isabelle EYOUM
Orthophonistes
11, rue de Saint-Quentin
94130 Nogent-sur-Marne
Tél : 0148770495
Fax : 0148768703
L
e gène défectueux à l’origine de la maladie de Huntington (dite autrefois
chorée de Huntington) a été isolé en 1993. Cette découverte permettra
aux chercheurs de trouver des traitements efficaces pour cette pathologie
mais aussi pour une demi-douzaine de maladies ayant le même comportement
génétique défectueux.
En effet, bien que chaque maladie soit liée à un gène différent, chacun de
ces gènes possède la même déficience ; « un bégaiement génétique » insérerait
de 30 à 50 copies de l’acide aminé glutamique à l’intérieur des protéines dont il
commande la synthèse, altérant leurs propriétés et provoquant la maladie.
Dans la maladie de Huntington, les capacités intellectuelles et langagières
sont altérées. Le patient a des difficultés à engager (ou à participer à) une
conversation autant qu’à exprimer sa pensée ; il ne trouve pas ses mots, ne peut
comprendre des renseignements complexes, a du mal à lire et à écrire.
On note une aspontanéité, la perte de la mémoire des faits récents, des
troubles cognitifs (attention et concentration), une baisse de l’aptitude à l’orga-
nisation, au raisonnement et à la résolution de problèmes.
Ces difficultés vont s’accroître au cours de la maladie mais de façon inat-
tendue : ainsi, un patient qui formulera correctement une question à un moment
donné, ne pourra la répéter l’instant suivant.
90
Bilan orthophonique
- agitation motrice et psychique intense et presque incessante ;
- mouvements choréïques des quatre membres avec prédominance du
membre supérieur droit ;
- lors des stimulations, l’agitation devient paroxystique ;
- on note des syncinésies d’entraînement perturbant la réalisation des
gestes volontaires ;
- sur le plan langagier, Monsieur L. est logorrhéique et écholalique. L’ar-
ticulation est gênée par des mouvements anarchiques et de ce fait est
peu compréhensible. Le débit est très accéléré. Le souffle phonatoire est
anarchique avec des pauses involontaires et des reprises d’air bruyantes ;
- à l’écrit, on note une micrographie, les mouvements saccadés rendent le
graphisme incontrôlable ;
- la déglutition est perturbée : fausses routes aux liquides surtout et aux
solides parfois.
Le patient est très difficile à canaliser et ne paraît pas très coopérant.
Une rééducation a cependant été acceptée par Monsieur L. Nous vous en
présentons les grands axes.
1) La première démarche thérapeutique a porté sur la déglutition. Un tra-
vail de rééducation posturale a été entrepris parallèlement à un travail de relaxa-
tion des membres supérieurs, du tronc et de la tête. Ce travail a permis une amé-
lioration au bout de deux mois.
2) Au niveau de la dysarthrie, le travail articulatoire a porté sur :
- la musculation des lèvres pour les occlusives
- de la langue pour les apico-dentales
La répétition de logatomes, mots et phrases a plus particulièrement
privilégié :
- le /l/ (levée de l’apex)
- le /p/ (tonicité labiale et souffle)
- le /fv/ (restauration du point d’articulation dents sur lèvre inférieure)
- le /sz/
- etc.
Les logatomes et les mots ont été choisis par opposition avant / arrière ;
exemple : /pa ka/ = paquet
/ta ga/ = taïga
La production de voyelles /a ou/ /i in/ a été travaillée en association avec
les consonnes travaillées antérieurement.
91
Le souffle abdominal a été difficile à mettre en place. Monsieur L. inver-
sait les consignes « inspirez, expirez » par rapport au mouvement effectué.
Le travail de la relaxation, appris lors de la déglutition, a permis l’obten-
tion de soupirs longs, réguliers et l’émission de souffles courts, forts mais tou-
jours réguliers.
Une détente du visage a également été obtenue par des stimulations oro-
faciales effectuées en début et en fin de chaque séance.
Le patient a pu, par la suite, réaliser des phrases en voix projetée, en ryth-
mant les syllabes avec la main.
Le comptage projeté a pu être obtenu de 1 à 10.
La lecture indirecte a été possible avec des pauses respiratoires marquées
par un geste de la main, mais ce travail a été très difficile à réaliser (problèmes
de coordination motrice).
Un jeu de questions/réponses ouvertes a été par la suite instauré en ryth-
mant toutes les syllabes.
En lecture à haute voix, il a été demandé un allongement systématique
des voyelles et des consonnes : le premier son de la phrase étant systématique-
ment omis, il a fallu mettre en place un conditionnement par émission d’un son
vocalisé juste avant l’articulation du premier mot.
Par la suite :
La répétition a porté sur : - des phrases de plus en plus longues,
- des rythmes à taper sur la table.
Un travail de prise de conscience de moments de détente a permis d’obte-
nir l’immobilité volontaire du bras droit. Pour y parvenir, Monsieur L. bloquait
sa main droite à l’aide de sa main gauche et comptait à haute voix lentement le
nombre de secondes. A la première séance, il a réalisé une immobilité de six
secondes. Deux ans plus tard, il pouvait se maîtriser dix minutes consécutives.
Le graphisme a commencé par des séances de musculation des doigts en
serrant de la pâte à modeler, puis en malaxant des balles de mousse. Par la suite,
un pianotage a permis la dissociation de chaque doigt : chaque doigt devait se
poser alternativement dans une série de ronds dessinés sur une feuille de papier.
Puis une rééducation du graphisme a pu commencer avec des frises à
compléter. Dans un premier temps, il devait repasser sur des modèles en poin-
tillés, puis il a pu compléter des figures inachevées mais sans exécuter plusieurs
tracés superposés : la consigne donnée était : « tracez un trait d’un seul coup /
STOP / / REPOS /. »
Par la suite, il a pu reproduire des lettres capitales, puis des mots en cursive.
Les chiffres ont été travaillés également, de même que la signature. Ainsi,
il a pu refaire des chèques lui-même.
92
A la fin de la prise en charge, il faisait des exercices de copie, pouvait
répondre spontanément à des questions posées par écrit (travail personnel à exé-
cuter entre chaque séance).
◆ Conclusion
La rééducation a été poursuivie au rythme de deux fois par semaine pen-
dant deux ans. Chaque séance durait 3/4 d’heure fractionnés en plage de travail
de 5 à 6 minutes pour chaque exercice en alternant souffle, relaxation, articula-
tion, souffle, relaxation, graphisme, souffle, immobilité volontaire, souffle,
relaxation, etc.
La rééducation a commencé en août 95 et s’est arrêtée au décès de Mon-
sieur L. en juillet 97. Elle lui aura permis de retrouver une certaine autonomie
(repas au restaurant aménagés une fois par semaine), une meilleure communica-
tion au sein de sa famille, notamment la reprise des visites de ses petits enfants.
REFERENCES
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SA Editeur. Paris ; p. 561
GELY-NARGEOT, M.C., ERGIS A.M.- (Avril 98) Neuropsychologie des syndromes démentiels. Le jour-
nal des psychologues. n° 156 ; pp. 48-51
KLASNER Estelle.- (1990) Manuel de soins. Société Huntington du Canada. Québec.
93
Sclérose en plaques :
examen de la dysarthrie
Ghislaine Couture, Astrid Vermes
Résumé
Nous présentons quelques critères diagnostiques de la Sclérose en Plaques puis l’étude
d’un cas : analyse du bilan de dysarthrie.
Mots clés : sclérose en plaques, diagnostic, bilan de dysarthrie.
Abstract
This article describes some of the diagnostic criteria of multiple sclerosis and presents a
case study, with a particular focus on the evaluation of dysarthria.
Key Words: multiple sclerosis, diagnosis, evaluation of dysarthria.
95
Ghislaine COUTURE Astrid VERMES
orthophoniste orthophoniste
5, rue du Lt Ohresser 114, rue de la Roquette
94500 Champigny 75011 Paris
L
a Sclérose en Plaques est une affection démyélinisante du système nerveux
central.
Elle touche actuellement presque 50 000 personnes en France.
Le diagnostic est difficile à établir au début de la maladie. Schumacher et
son équipe ont établi une classification des critères diagnostiques :
- l’examen clinique révèle des signes témoignant d’une atteinte du sys-
tème nerveux central ;
- les antécédents du patient comportent au moins deux atteintes diffé-
rentes du système nerveux central ;
- l’atteinte témoigne d’une atteinte prédominant dans la substance
blanche.
L’évolution de l’atteinte du système nerveux central correspond à une ou
deux des modalités suivantes :
- au moins deux poussées séparées par l’intervalle de plus d’un mois,
chaque poussée durant plus de 24 heures ;
- évolution progressive des symptômes et signes sur une durée d’au moins
un an.
L’âge du patient au début est compris entre 10 et 50 ans.
Les symptômes et les signes ne connaissent pas de meilleure explication.
De nouvelles classifications ont été proposées grâce aux nouvelles tech-
niques d’examens (IRM, LCR ...).
P. Ménage et ses collaborateurs décrivent 4 critères principaux de
diagnostics différentiels :
- dissémination des symptômes et des signes dans l’espace et le temps ;
- âge de survenue compris entre 25 et 40 ans ;
- symptomatologie témoignant de la prédominance des lésions dans la
substance blanche ;
- exclusion des autres diagnostics possibles.
96
Les quatre critères doivent être associés.
La sémiologie décrit une atteinte pyramidale (80% des malades à un stade
avancé de la maladie), des troubles cérébelleux, des troubles liés à une atteinte
du tronc cérébral.
On retrouve aussi des troubles sensitifs, visuels, sphinctériens, cognitifs
et une grande fatigabilité.
Le bilan de dysarthrie est classique :
• examen des praxies bucco-faciales ;
• épreuve de motilité linguale, labiale et vélaire ;
• réalisation phonétique :
- répétition de voyelles ;
- répétition de syllabes, mots simples, complexes, phrases.
• étude de la respiration ;
• étude de la voix, de la prosodie.
Parallèlement un bilan du tonus et de la force musculaire sera réalisé (évi-
tez les mouvements demandant une dépense d’énergie trop importante).
Le bilan sera complété par un examen de la déglutition.
Nous vous présentons l’analyse du bilan de dysarthrie de Mme N.
MME. N.
41 ans
Mariée, deux enfants.
Niveau d’étude : Certificat d’Etude.
A arrêté de travailler en 1992 (ouvrière en montage de matériel électro-
nique).
Sclérose en Plaques ayant débuté en 1985 par des troubles de la marche et
des déséquilibres importants.
◆ Histoire de la maladie
1983 Atteinte du champ visuel (légère hémianopsie)
1985 Diagnostic de la Sclérose en Plaques
L’examen clinique révèle :
- un syndrome pyramidal bilatéral
- un syndrome cérébelleux cinétique et statique
- un syndrome vestibulaire central
- un syndrome dysmorphique (discrète asymétrie faciale à droite)
Mai-juin 1987 Troubles sphinctériens (miction impérieuse... infections
urinaires)
97
Plaques hémisphériques au scanner qui se traduisent en IRM par des hypersi-
gnaux périventriculaires.
Mai 1996 Pas de déficit moteur périphérique
Hémiparésie faciale droite
Syndrome cérébelleux discret.
Juin 1996 Cure d’Endoxan
Marche très difficile mais sans chute
Persistance d’une dysarthrie
Crampes dans les membres.
Avril 1997 Infections urinaires
Signe subjectif : douleurs dans la joue ressenties lors de la
déglutition et allant jusqu’à l’oreille.
Juin 1997 Troubles de la marche et de l’équilibre.
◆ PRAXIES BUCCO-FACIALES
98
◆ REALISATION PHONETIQUE
Signes positifs Signes négatifs
Voyelles - bonne articulation des voyelles antérieures - voyelles orales [o] difficiles à produire en
orales : i - u - a ; isolé (cf motilité vélaire) ;
- voyelles postérieures nasales bien articu- - opposition orale/nasale est difficile surtout
lées. quand les 2 voyelles sont postérieures
(cf motilité du voile).
Syllabes simples - occlusives orales ainsi que les nasales sont
bien articulées ;
- pas de problème non plus pour les constric-
tives orales, la liquide [l] et la vibrante [r].
Syllabes complexes - les constrictives suivies d’une vibrante res- - occlusive sourde remplacée par une autre de
tent bien articulées point d’articulation différent : [tra] ➡ [kra] ;
- substitution d’une occlusive sonore par une
sourde de même point d’articulation (assour-
dissement) ex : [dra] ➡ [tra] ;
- occlusive sonore substituée par une occlu-
sive sourde (de point d’articulation différent)
ex: [dra] ➡ [kra].
Mots simples - toutes les consonnes vues précédemment - forte accentuation sur la première voyelle
sont bien articulées en position initiale ou du mot.
finale ;
- pas de difficulté dans les mots simples.
Mots complexes - consonnes occlusives suivies d’une liquide - substitution d’une occlusive nasale par une
(non vu dans les syllabes complexes) c’est-à- autre occlusive
dire [pl] [bl] sont bien articulées. ex: [vakarm ] ➡ [vakarn ]
Phrases - bonne répétition et articulation des phrases - rythme assez rapide et irrégulier ;
données. - répétition de phrases demande beaucoup
d’efforts, syncinésies apparaissent (mouve-
ments des yeux) ;
- patiente très concentrée ;
- sur la dernière phrase, ajout et élision d’un
phonème.
99
◆ RESPIRATION / VOIX
Signes positifs Signes négatifs
Respiration - bonne dissociation entre respiration - difficulté dans l’enchaînement rapide de
orale/nasale ; mouvements respiratoires.
- souffle correct quand l’épreuve ne requiert
pas une grande puissance (ex : souffler sur
des papiers)
Voix conversationnelle - brutalité dans le passage d’un rythme rapide
à lent ou inversement, ce qui rend le discours
parfois inintelligible
- hauteur normale (voix de femme classique).
Voix projetée - voix projetée impossible par manque d’in-
tensité ;
- mauvaise respiration.
Voix d’appel - Voix d’appel possible. - voix d’appel inefficace par manque d’inten-
sité.
Voix chantée - mauvaise respiration ;
- voix s’éteint presque à la troisième note
chantée ;
- hauteur trop aiguë.
Temps phonatoire - temps maximum phonatoire = 6,5 s
- pathologique par rapport à la normale ;
- intensité faible, timbre éraillé, fatigue à la
phonation (apparition de syncinésies).
◆ DEGLUTITION
100
◆ LA PROSODIE
Lecture de texte Répétition de phrases Langage spontané
très expressives
Intonation grammaticale
➩ Continuative - existe pour marquer l’inter- - existante (essai de marquer - inexistante
rogation mais hausse du ton l’exclamation) ;
s’observe aussi au mauvais
moment ;
➩ Terminative - inexistante - inexistante (pas de baisse du - inexistante
ton en fin de phrase).
Intonation d’attitude - patiente prend un ton enjoué
mais assez enthousiaste pour
exprimer la joie ;
- pas d’intonation appropriée
pour exprimer la tristesse.
Pauses
➩ Attendues / Ponctuation - pas de respect de la ponc-
tuation ;
➩ Inattendues - beaucoup de pauses qui - diffi cil e à éva l u e r, la
donnent une lecture hachée et patiente coupe ses phrases.
saccadée.
Rythme - lent, voire très lent, saccadé - rythme normal. - rythme irrégulier, tout à
(difficulté à lire). coup précipité (bredouille)
puis redevient lent.
Intensité - normale. - normale. - irrégulière.
◆ Commentaire
On observe au niveau des praxies bucco-faciales une extrême lenteur dans
l’exécution des mouvements, une hypotonocité linguale, labiale et un dysfonc-
tionnement du voile par intermittence.
Le phonétisme est complet, mais des erreurs phonologiques sont notables.
La répétition de phrases révèle un comportement d’effort, des syncinésies
apparaissent, le rythme est saccadé.
Au niveau de la respiration, on retrouve une lenteur d’exécution, les mou-
vements respiratoires successifs (demandant une certaine rapidité et capacité
d’enchaînement) sont difficilement réalisables.
La voix conversationnelle est caractérisée par une intensité irrégulière,
une hauteur et un timbre normaux, un rythme saccadé.
La voix chantée est difficile. Mme N est incapable de rester dans une fré-
quence de confort, elle monte trop dans l’aigu.
Le temps maximum phonatoire est de 6,5 secondes. Ce score se révèle
pathologique car la valeur normale se situe entre 15 et 25 secondes.
101
L’étude de la mélodie et de la parole à partir de diverses épreuves a révélé
une dysprosodie.
Une accentuation est observée sur la première syllabe des mots.
Dans le domaine de la déglutition, la patiente éprouve des difficultés à
avaler parfois sa salive, mais ne mentionne aucun problème pour les aliments
liquides ou solides.
L’hypotonicité linguale peut contribuer aux difficultés de déglutition.
◆ Conclusion
On observe des éléments de dysarthrie de type mixte (spastique et céré-
belleuse).
Parfois le bilan de dysarthrie et de déglutition est complété par des
épreuves concernant la dénomination d’images, le langage élaboré (définition
de mots, antonymes, etc. ), la fluence verbale, la lecture, l’écriture.
Quelques cas isolés d’aphasie et d’alexie-agraphie ont été relatés.
REFERENCES
COUTURE G., EYOUM I., MARTIN F. (1997) Evaluation in « Les fonctions de la face » - Ortho Edition
Isbergues, P 197-213.
FONTAINE B., GOUT O., LYON-CAEN O. (1995) - Les traitements de la sclérose en plaques.
Méd. Thér ; oct ,Vol.1, n°6, 571-86
GOUT O., FONTAINE B., LYON-CAEN O. (1995) - Diagnostic de la sclérose en plaques. Méd.Thér.,
octobre, Vol 1, n° 6, 559-70
MENAGE P., LEBIEZ P.E., LYON-CAEN O. (1991) Diagnostic de la sclérose en plaques. Rev. Prat.
1991, 41,20 ,1898-903.
VERMES A. (1996/1997) Sclérose en plaques : examen de la dysarthrie et troubles du langage oral et
écrit à travers quatre patients - Mémoire pour le certificat de capacité d’orthophonie, PARIS VI.
102
L’orthophonie dans la SLA :
un accompagnement ?
Sylvie Brihaye
Résumé
Le domaine de l’orthophonie s’ouvre de plus en plus, et notamment aux pathologies dégéné-
ratives. En effet, les médecins sollicitent de plus en plus les compétences des orthophonistes
mais il est indispensable que ces derniers connaissent les modalités évolutives afin de leur
permettre d’adapter au mieux leur prise en charge. En plus de tout cela, la dimension
humaine et l’accompagnement tout au long de la maladie en font des prises en charge pas-
sionnantes mais très éprouvantes. Les structures hospitalières doivent savoir répondre aux
demandes des orthophonistes en libéral et les conseiller tout au long de leur prise en charge.
Mots clés : Sclérose Latérale Amyotrophique, prise en charge, adaptation, accompagnement.
103
Sylvie BRIHAYE
Orthophoniste
Centre SLA - Service du Pr V. Meininger
Hôpital Salpêtrière
47 Boulevard de l’Hôpital
75013 PARIS
L
a Sclérose Latérale Amyotrophique, maladie dégénérative, tend à être
mieux connue par les orthophonistes, comme par l’ensemble des profes-
sions médicales et paramédicales. La mise sur le marché d’un premier
traitement qui a pour but de ralentir l’évolution de cette maladie a certainement
contribué à cette meilleure connaissance de la maladie et, ainsi, à sa prise en
charge générale.
En effet, maintenant de nombreux intervenants sont présents auprès de
ces malades : tout d’abord le neurologue qui suit régulièrement le patient. Le
relais est assuré, au domicile, par le médecin traitant dont le rôle est essentiel,
notamment sur la coordination de l’ensemble des soins. Le kinésithérapeute est
un intervenant précoce dans cette maladie, ayant pour but de mobiliser le plus
passivement possible le malade pour qui la motricité se réduit. Lorsque l’auto-
nomie physique du patient est restreinte, l’infirmière vient régulièrement afin
d’assurer la toilette quotidienne ainsi que des soins infirmiers si nécessaire.
Enfin, lorsque la symptomatologie comprend une atteinte bulbaire, c’est à dire
une atteinte des muscles de la langue, des joues, des lèvres, du voile du palais et
une hypotonie laryngée, l’orthophonie devient nécessaire, et ce pour prendre en
charge la dysarthrie, la dysphagie et la dysphonie consécutives.
Dès le début de la prise en charge, la connaissance de la maladie pour
l’orthophoniste et le patient est indispensable, tant pour les exercices propre-
ment dits, que pour « l’esprit » de la prise en charge. De la part du patient tout
d’abord : ce dernier doit être informé, par la structure hospitalière qui le prend
en charge du caractère évolutif de sa maladie. Les exercices proposés sont à
reproduire, régulièrement mais l’objectif sera un maintien des fonctions bul-
baires (parole, voix et déglutition). Tant que le thérapeute n’est pas certain que
le patient se situe dans cette perspective, il faut éviter de le laisser travailler
seul à la maison. En effet, les dangers sont que le patient produise trop d’ef-
forts musculaires en faisant ses exercices et qu’il fatigue ses muscles, ce qui
constitue presque une « contre-indication » rééducative. Ensuite, pour le théra-
104
peute, tout exercice mis en place a pour but de maintenir et non de
« remuscler ». Les séries praxiques, par exemple, doivent être brèves, variées et
il ne faut pas hésiter à vérifier avec le patient qu’il ne se fatigue pas. De plus, le
thérapeute doit s’attendre à des dégradations progressives des structures qu’il
tente de préserver. Ainsi, la parole continue à se dégrader, la déglutition
devient laborieuse et la voix de plus en plus nasonnée. En dehors des pro-
blèmes fonctionnels que cela entraîne, la vie sociale ainsi que les rapports avec
l’entourage se modifient. Le patient se retrouve devant une double difficulté :
gérer les problèmes « techniques » (comment faire pour se faire comprendre,
comment adapter ses prises alimentaires) et faire face aux tensions que cela
occasionne.
Le rôle de l’orthophoniste doit répondre à ces deux aspects : tenter de
gérer au mieux les problèmes techniques et aider le patient et l’entourage à
s’adapter aux changements. Cela se passe au décours des séances, puisque la
prise en charge gravite autour des difficultés de communication. Le thérapeute
ne peut se cantonner à son rôle de rééducateur et doit s’impliquer, tout en
sachant doser son implication au sein de la famille par exemple, pour aider le
patient. Il n’existe pas de règle dans ce domaine. L’objectif principal du théra-
peute reste le confort du patient, en n’hésitant pas à se faire aider des structures
hospitalières qui s’occupent de ces patients.
En ce qui concerne plus particulièrement l’orthophoniste qui prend en
charge un patient atteint de SLA, il faut savoir qu’il va s’agir d’une prise en
charge qui peut être longue (parfois plusieurs années), régulière. C’est un peu
un « contrat » que le thérapeute doit passer avec lui-même et avec le patient, à
savoir qu’il ne s’agira pas, sauf si nécessaire, de stopper la prise en charge parce
que la maladie continue d’évoluer. Il arrive, tout au long de l’évolution de la
maladie, que le thérapeute remette en question le bien fondé de sa prise en
charge, parce que le patient a une amyotrophie telle qu’il ne peut plus mobiliser
les muscles buco-pharyngo-laryngés, parce que le patient se décourage et ne
souhaite pas continuer, ne voyant pas d’amélioration.
Lorsque l’amyotrophie est majeure, les conséquences fonctionnelles sont
la perte de la parole, donc plus de communication. L’orthophoniste a, à ce
niveau, un rôle primordial - il doit trouver impérativement un palliatif à la com-
munication. Il existe différents moyens de la préserver, et souvent le patient
passe spontanément au code écrit. Cette solution peut être tout à fait adaptée,
mais il est indispensable de faire connaître au patient d’autres outils qui exis-
tent, plus ou moins sophistiqués. En ce qui concerne la déglutition à cette étape,
le patient ne peut plus s’alimenter per os. Et donc l’équipe hospitalière propose
souvent la mise en place d’une sonde de gastrostomie. Par expérience, les
105
patients ont souvent tendance à la refuser, car cela signe une nouvelle perte de
leur autonomie. L’orthophoniste a alors pour rôle de les rassurer par des argu-
ments importants : la gastrostomie évitera les repas qui sont devenus des « cor-
vées » ; il n’est pas rare, lors de l’interrogatoire, de constater que certains
patients passent deux heures pour avaler une toute petite quantité d’aliments, et
que cela les épuise. L’autre aspect est d’informer le patient que même porteur
d’une sonde de gastrostomie, il pourra continuer à avaler par la bouche, ce qui
lui fait plaisir et quand il le souhaitera. Enfin, on constate souvent que, suite à
une alimentation entérale bien adaptée, le malade reprend du poids ce qui reten-
tit sur son état général car il se sent moins fatigué.
Parallèlement à la prise en charge, l’inquiétude et parfois même l’an-
goisse de la famille pèsent sur le patient. L’orthophoniste peut, lorsqu’une
bonne relation de confiance s’est installée, encourager le dialogue entre le
patient et son entourage. Son rôle de médiateur peut se révéler lorsqu’il aide et
encourage le patient à utiliser un nouveau moyen de communication. Cela
nécessite, de la part du thérapeute, d’être à l’écoute en permanence des besoins
du patient et de son entourage, et de savoir apprécier l’adaptation du code du
communication. Cela est extrêmement variable d’un patient à l’autre, et très
étroitement lié aux possibilités motrices résiduelles du patient.
Les difficultés de la prise en charge orthophonique des patients atteints de
SLA sont très liées au degré d’atteinte. Les adaptations rééducatives sont de
plus en plus difficiles et délicates lorsque la maladie s’aggrave, que le patient se
voit se dégrader et que le thérapeute peut difficilement être encourageant sur des
progrès éventuels. Toute l’énergie du thérapeute et du patient doit être utilisée
pour « investir » des solutions les mieux adaptées possible, notamment en ce qui
concerne le mode de communication. Il arrive aussi, surtout lorsque la maladie
est très évoluée, que l’orthophoniste ait à gérer des situations ne relevant pas
directement d’orthophonie. « L’esprit » de la prise en charge est en permanence
adaptable. Lorsque l’orthophoniste est bien informé des modalités évolutives de
la maladie, il ne doit pas hésiter à « dépasser » l’activité technique pure afin
d’apporter le plus de confort possible au patient.
Je souhaiterais illustrer ces propos par le cas concret d’un patient que j’ai
suivi durant trois ans, jusqu’à sa disparition.
◆ Cas de Monsieur W.
J’ai pris en charge Monsieur W., qui présentait une atteinte bulbaire très
précoce dans la forme de sa maladie. Les séances ont débuté sur un rythme de
trois séances hebdomadaires.
106
La rééducation se composait comme suit :
- par une détente cervicale et scapulaire,
- des praxies bucco-faciales très brèves (séries de 3 à 4 mouvements
maximum, avec des pauses très fréquentes),
- des exercices d’articulation très brefs (travail de points d’articulation sur
des mots courts),
- de la respiration abdominale,
- des exercices de voix (sons tenus, aidés par la respiration),
- travail de la mélodie et de la prosodie,
- une prise en charge de la déglutition avec des essais très réguliers aux
semi-liquides (yaourts, compote) et aux liquides (boissons gazeuses et
parfois eau plate).
Au bout de quelques séances, nous avons débuté le travail de la relaxa-
tion, mais le patient l’a refusé après quelques essais. Il ne souhaitait pas conti-
nuer ce travail à ce moment. J’ai donc accentué la détente et le relâchement par
les soupirs.
Un travail de lecture indirecte a été mis en place, mais en surveillant la
fatigabilité du patient.
Les contacts avec la famille sont devenus très chaleureux et au décours de
discussions, j’ai appris que leur fille, adolescente, refusait la maladie de son père
et repoussait les échanges verbaux, car elle n’arrivait plus à le comprendre. Pro-
gressivement, cette dernière a commencé à prendre part aux discussions lors des
séances. Monsieur W. commençait à être difficilement intelligible, je me propo-
sais de l’aider à « traduire » ses phrases. A ce moment, je lui ai montré l’impor-
tance de préserver un mode de communication qui soit à la portée de son entou-
rage et nous avons commencé à rechercher une aide à la communication. Le
premier appareil que je lui ai présenté était un SYNTHE 4, qu’il a refusé, faisant
trop penser à « un robot ». Monsieur W. souhaitait un code plus « naturel », et
nous nous sommes mis à utiliser un alphabet sur papier carton. Sa motricité
manuelle étant suffisante pour montrer les lettres et former ainsi les mots, les
séances qui ont suivi ont été essentiellement axées sur l’utilisation de cet alpha-
bet en tentant d’accélérer le rythme des phrases ainsi épelées. Le patient a bien
investi ce code écrit, et j’ai tenté le plus longtemps possible de préserver un
temps durant chaque séance, à le faire « parler » avec ses proches par le biais de
cet alphabet. Sur un plan concret, nous en avons fabriqué quatre, afin de les
distribuer partout dans l’appartement pour qu’il en dispose très rapidement.
Puis, progressivement, la déglutition est devenue très laborieuse. Le neu-
rologue a proposé à Monsieur W. une sonde de gastrostomie, qu’il a acceptée
107
trois mois plus tard. Il avait beaucoup maigri et s’était installée une hypersialor-
rhée massive. J’ai tenté d’aborder de nouveau la relaxation qui, cette fois, lui a
été bénéfique. Nous avons associé des stimulations orofaciales (massages pas-
sifs) qui le détendaient beaucoup. Il a repris du poids et la situation s’est stabili-
sée quelques mois. Puis la salive a posé de plus en plus de problèmes et les der-
nières semaines, Monsieur W. ne pouvait plus dormir, à cause de son
hypersialorrhée. Lors de mes venues, il ne sollicitait que le travail de relaxation
et une aide à l’expectoration et à l’aspiration. Cela lui permettait de dormir trois
à quatre heures après avoir été dégagé. Les échanges étaient uniquement centrés
sur ses plaintes et mon but a été de l’aider à les formuler toujours grâce à son
alphabet (ce qu’il continuait à faire avec son entourage) et à l’aider à se dégager
de ses sécrétions afin de lui permettre de dormir quelques heures après mes pas-
sages. Il est décédé au bout de trois ans de prise en charge.
Au bout de plusieurs expériences autour de cette même pathologie, je
pense qu’il est possible de parler d’accompagnement dans le cadre de la prise en
charge orthophonique. Le maître mot de la rééducation est adaptation, indispen-
sable pour aider le patient tout au long de l’évolution de sa maladie. La coordi-
nation entre soignants, notamment avec le kiné, est très importante. Tout doit
converger vers et pour le patient, et l’orthophonie a cette spécificité qu’elle
traite de la parole et donc, de la communication. Mais outre l’aspect « moteur »
de la communication, les relations humaines sont une part majeure dans ce
domaine et on ne peut prendre en charge l’articulation de la parole en ignorant
la dimension morale et psychologique du malade.
108
La communication après l’aphémie
Sylvie Brihaye
Résumé
La Sclérose Latérale Amyotrophique, dans sa forme bulbaire, présente une dysarthrie spas-
tique et paralytique pouvant entraîner une perte de la communication orale. Un des rôles de
l’orthophoniste est de permettre au patient de préserver un mode de communication, quel
qu’il soit. Les outils de communication présentés dans cet article ne sont pas les seuls exis-
tants mais sont ceux qui nous semblent les plus adaptés à nos patients. Nous les avons
« sélectionnés » en fonction de leurs possibilités illimitées de messages transmis. L’ortho-
phoniste doit trouver avec son patient le bon moment pour les introduire, lui apprendre à les
intégrer dans son mode de vie et surtout avec l’entourage et ne pas hésiter à multiplier les
outils si nécessaire.
Mots clés : Sclérose Latérale Amyotrophique, communication, outils, synthèses vocales.
Post-aphemia communication
Abstract
Lateral amiotrophic sclerosis at the bulbar level involves spastic and paralytic dysarthria
which may result in loss of oral communication. The role of the speech and language thera-
pist is to help the patient maintain some type of communication, whatever it may be. In this
article, we present some communication tools which, without being exhaustive, seem most
adapted to our patients. We « selected « them because of their unlimited message transmis-
sion possibilities. The therapist must help his patient find the right moment to introduce
these tools and integrate them in his daily life and social environment. The therapist should
not hesitate to introduce other communication tools if necessary.
Key Words: lateral amyotrophic sclerosis, communication, tools, vocal communication aids.
109
Sylvie BRIHAYE
Orthophoniste
Centre SLA du Professeur Meininger
Hôpital Salpêtrière
47, Boulevard de l’Hôpital
75013 PARIS
L
a dysarthrie chez les patients atteints de Sclérose Latérale Amyotro-
phique est définie comme spastique et paralytique. Elle résulte d’une
part de l’amyotrophie des muscles oropharyngolaryngés et, d’autre part,
de leur paralysie progressive. Les caractéristiques de cette dysarthrie sont un
débit ralenti, une dédifférenciation articulatoire, une sonorisation des consonnes
sourdes, une déperdition nasale par hypotonie du voile et, sur le plan de la voix,
une aprosodie progressive.
Tous ces paramètres sont bien sûr à entretenir par la rééducation ortho-
phonique régulière. Malheureusement, la SLA est une maladie évolutive et toute
cette symptomatologie va s’aggraver progressivement. La dysarthrie va se majo-
rer jusqu’à rendre l’articulation inintelligible. Spontanément, le patient va
rechercher un « palliatif » à sa parole déficiente. Le plus souvent, lorsque les
mains ne sont pas atteintes par la maladie, le malade passe à l’écrit et est en per-
manence muni d’un bloc papier et d’un stylo. Le code de communication
change, passant de l’oral à l’écrit. Mais ce code reste très personnel au patient, il
n’y a pas d’intermédiaire (comme une machine ou un quelconque appareil).
Lorsque ce moyen de communication fonctionne bien et qu’il s’avère suffisant
pour le patient, il est bien évident qu’il est souvent inutile d’en proposer
d’autres. En effet, le patient refuse souvent toute « prothèse » de parole lorsque
l’écrit lui suffit. On peut, par contre, le conseiller sur l’utilisation d’une
« ardoise Velleda » qui s’efface facilement et qui ne nécessite que peu de force
musculaire pour écrire dessus avec un feutre.
Par contre, lorsqu’il est demandeur d’une « voix » ou que l’on constate
que les mains faiblissent et que l’écrit sera bientôt impossible, l’orthophoniste
doit être à l’écoute et présenter les appareils de communication qui paraîtront
les plus adaptés.
Cet article n’a pas pour objectif d’être exhaustif dans la présentation des
appareils de communication existant sur le marché actuel. Les appareils présen-
tés résultent de notre expérience à l’hôpital Salpêtrière auprès de nos patients.
110
Nous ne présentons que ceux qui paraissent adaptés à nos patients. De plus, les
sociétés qui fabriquent ces appareils sont peu nombreuses, réalisant un mono-
pole dans ce domaine. Il est très aisé pour ces organismes de proposer une
gamme de produits parfois inadaptés et il faut être très vigilant. Il faut être éga-
lement sûr que leur maintenance sera effectuée en cas de problème.
111
Appareils nécessitant une motricité manuelle :
LE SYNTHE 4
112
LE SYNTHE 4 E
Cet appareil possède une ergonomie plus accessible lorsque les mains
sont moins mobiles et moins agiles. Les espaces entre les touches sont plus
grands que sur le Synthé 4.
Il possède également un clavier phonétique avec possibilité d’enregistre-
ment de messages sous chaque touche, de la même façon que le précédent.
Son ergonomie est également étudiée pour y adapter un module de défile-
ment lumineux des touches lorsque la motricité des mains est nulle : il s’agit
d’un clavier qui s’adapte dessus et qui est commandé par un contacteur unique.
Ainsi, pour sélectionner une touche du clavier, le patient attend que celle-ci cli-
gnote et déclenche le contacteur en exerçant une pression dessus ; la touche est
ainsi sélectionnée.
Dimensions : Longueur 280 mm x Largeur 215 mm
Poids : 1,8 Kg
Tarif : Q 10 500 Francs TTC
Fabricant et distributeur : Société ELECTREL
Distributeur : Société PROTEOR SERVICE
113
LE LIGHT WRITER SL 35
114
ALPHABET A DESIGNEMENT
Ce mode de communication très simple, sur fiche bristol format A4, per-
met des échanges rapides. Il est peu onéreux et est utilisable par tous. Le prin-
cipe est la désignation avec un doigt des lettres composant le mot.
La case « espace » est prévue pour séparer les mots entre eux. L’intérêt de
cet alphabet étant la rapidité d’exécution, il est convenu avec le patient qu’avec
l’implicite du discours, lorsque l’interlocuteur a deviné la fin du mot, le patient
s’arrête et passe au mot suivant.
115
Appareils utilisables lorsque la motricité manuelle est perdue :
LE SYNTHE 4 E D
116
Systèmes de communication utilisant le regard :
TABLEAU E-TRAN-FRAME
C’est un écran transparent en plexiglass sur lequel sont fixées des lettres
de couleur. L’utilisateur, placé vis-à-vis de son interlocuteur, communique en
désignant par le regard la lettre puis la couleur afin de former un mot.
Ce tableau, simple d’utilisation, ne nécessite pas ou peu d’apprentissage
particulier et ne sollicite que la motricité oculaire, préservée dans la SLA.
Dimensions :
Hauteur 40,64 cm x Largeur 45,72 cm
Fabricant et distributeur :
Clinical Engineering Consultants Limited
Distributeur en France :
Société ELECTREL
117
LE MAINATE
118
LES CONTACTEURS
119
◆ Démarches pour une prise en charge d’un appareil
de communication
D’une façon générale, les appareils ne sont pas inscrits au T.I.P.S (Tarif
Interministériel des Prestations Sanitaires), c’est à dire qu’ils ne sont pas prévus
comme appareillages remboursables par la Sécurité Sociale.
1 - Il faut donc, en premier lieu, faire établir une prescription par le
médecin, ainsi qu’une entente préalable (feuillets bleus) donnant les caracté-
ristiques de l’appareil accompagnées du devis et les adresser au médecin conseil
de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM).
Le centre (CPAM) envoie au patient un refus systématique d’ordre admi-
nistratif.
2 - Il faut alors adresser au service des Prestations Extra-légales et Aide
Financière de la CPAM :
- la prescription
- l’entente préalable
- le refus de la Sécurité Sociale
- un justificatif de ressources et de charges, établi après enquête finan-
cière de la CPAM.
3 - Le dossier est examiné par la commission et le demandeur peut obte-
nir une prise en charge partielle ou totale au vu de ses ressources et du prix de
l’appareil.
4 - Si la commission oppose un nouveau refus, il reste la possibilité de
faire une demande d’aides financières auprès de divers organismes, tels que :
- le Conseil Général,
- les Caisses de Retraite,
- les Mutuelles,
- etc.
Classiquement, ces démarches sont réalisées au Centre où est suivi le
patient, et plus précisément par l’Assistante Sociale du service.
◆ Conclusion
Il est possible d’obtenir plus d’informations sur ces différents appareils
en sollicitant, de la part des fabricants, une documentation plus complète.
Il faut toujours éviter de se précipiter sur tel ou tel type d’appareils et ne
pas hésiter à demander aux équipes qui les utilisent des conseils quant à leur
adaptation.
120
Il ne faut pas négliger le temps d’adaptation du patient face à ces appa-
reils. L’investissement du patient à un autre mode de communication est égale-
ment à prendre en compte, et il est important que l’orthophoniste intègre à son
programme rééducatif l’utilisation de l’appareil. Il ne faut pas hésiter à passer
10 à 15 minutes de chaque séance à communiquer avec la synthèse vocale, ce
qui sera également le moment de constater les difficultés d’apprentissage du
patient face aux aspects techniques de la machine.
121
Aides techniques
Ghislaine Couture, Alain Vetro et Marie Vetro
Résumé
Les aides techniques concernent de nombreux domaines, elles sont indispensables aux
patients handicapés, et permettent souvent une amélioration des soins et le maintien au
domicile des patients.
Mots clés : Aides techniques, lit, repas, lecture, toilette.
Technical aids
Abstract
Technical aids involve many different areas. Handicapped patients cannot function without
these aids; they often contribute to improvement of care and make it possible for the patient
to stay in his home.
Key Words: technical aids, bed, meals, reading, washing.
123
Ghislaine COUTURE Alain VETRO et Marie VETRO
orthophoniste Matériel Médical
5, rue du Lt Ohresser 16, rue de la Maison-Brûlée
94500 Champigny 94100 Saint-Maur-des-Fossés
◆ Le repas
On peut recommander
- des couverts légers,
- des couteaux-fourchettes,
- des couverts à larges poignées permettant une meilleure préhension,
- le rebord d’assiette,
- le verre canard avec poignées spéciales pour faciliter la prise en cas de
difficultés de préhension,
- l’appareil à manger « Neater Eater » (cuillère montée sur un bras com-
pensé par un ressort permettant de porter celle-ci à la bouche sans bou-
ger la tête).
124
◆ Aide à la lecture
- pupitre de lecture avec tablette transparente pouvant se poser sur les
genoux,
- tourne-page électrique actionné par un contacteur manuel ou au souffle.
◆ Aides à l’habillement
- enfile-bas,
- enfile-bouton.
◆ Fauteuils
Fauteuils releveurs pour éviter un surplus de fatigue.
REFERENCES
Catalogue OPALE 1998 - Groupe Invacare, Usine des Roches - 37230 Fondettes Tél. 02.47.62.64.00 Fax.
02.47.62.64.10
Catalogue T.A.C.M. - 30, rue du Commerce 37000 Tours - Tél. 02 47 05 73 29 - 02 47 64 84 40 Fax. 02
47 05 92 31
125
Couverts légers : poignées en mousse qui facilitent la préhension.
Fourchettes et cuillères coudées à droite ou à gauche.
Couteau-fourchette-canif :
longueur plié : 10 cm, longueur déplié : 18 cm
126
Rebord d’assiette :
quand l’utilisateur mange à l’aide d’une seule main, le rebord d’assiette
empêche la nourriture de glisser en dehors. Diamètre d’assiette de 13 à 25 cm.
Neater-Eater version 3 : une cuillère montée sur un bras compensé par un ressort
permet de porter celle-ci à la bouche sans avoir à bouger la tête. Version plus adaptée
aux personnes souffrant de multiples scléroses, munie d’une base ergonomique
et d’une poignée supplémentaire, permettant le départ du mouvement en dessous du niveau
de la table (réf. TACM)
127
Pupitre de lecture : peut-être posé sur les genoux.
Règle-loupe de lecture (réf. TACM).
128
Tourne-page électrique « Turny » : Actionné par un contacteur manuel,
un contacteur au souffle ou une commande infrarouge ; il tourne les pages dans un sens
ou dans l’autre (réf. TACM).
129
◆ Structures de consultations et d’accueil
Centre S.L.A. - Service du Pr. Vincent Meininger - Hôpital Salpêtrière, 47 Boule-
vard de l’Hôpital - 75013 Paris - Tél. 01.42.16.04.03
CHU Henri Mondor - Université Paris 12 - 51, avenue de Lattre de Tassigny -
94010 Créteil - Tél. 01.49.81.21.11
Hôpital Tenon - Service ORL du Pr. Lacau St Guily - 4, rue de Chine - 75020
Paris - Tél. 01.56.01.64.17
◆ Documentaires et matériels
Rôle de l’orthophoniste dans le cadre de la sclérose latérale amyotrophique
(1996) - Anne du Penhoat, Sylvie Brihaye, ARS - 24, rue Lacharrière -
75011 Paris
Catalogue Opale 1998 - Groupe Invacare, Usine des Roches - 37230 Fondettes -
Tél. 02.47.62.64.00 Fax. 02.47.62.64.10
Catalogue T.A.C.M. - (Tout pour l’Aide et le Confort du Malade) 30, rue du
Commerce 37000 Tours - Tél. 02.47.05.73.29 - 02.47.64.84.40 -
Fax. 02.47.05.92.31
◆ Associations
Association pour la Recherche sur la Sclérose latérale amyotrophique -
(A.R.S.) - 24, rue Lacharrière - 75011 Paris - Tél. 01.43.38.99.89 -
01.43.38.46.13 - Fax. 01.43.38.31.59 - e-mail : ars@wanadoo.fr
Association Huntington-France - 42-44, rue du Château des Rentiers - 75013
Paris - Tél. 01.53.60.08.79 - Fax. 01.53.60.08.99
Ligue française contre la sclérose en plaques - 17, boulevard Auguste Blanqui -
75013 Paris - Tél. 01.40.78.69.00 - 01.45.80.47.51
◆ Fabricants et distributeurs
Société Electre l - rue des Deux Pierres - 14112 Biéville Beuville -
Tél. 02.31.44.27.34 - Fax. 02.31.43.57.52
Proteor Service (siège) - 11, rue des Buttes - 21000 Dijon - Tél. 03.80.78.42.42 -
Fax : 03.80.78.42.15
Clinical Engineering Consultants Limited - Holmcroft Nursery - Green Lane -
Shamley Green - SURREY GUS ORD - Tél. 00.44.1483.894568 -
Fax. 00.44.1483.894576 (Numéro pour appeler de France).
EL P I nfo r m a t i q u e - 3, aven ue de Del phes - 13 00 6 Mars eill e -
Tél. 04.91.29.82.29 - Fax. 04.91.29.82.00
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IVe CONGRÈS EUROPÉEN DU CPLOL
APPEL A COMMUNICATIONS
Langage oral :
qualité et efficacité en orthophonie
2, 3 et 4 juin 2000
La Villette - Cité des Sciences et de l’Industrie - Paris
OBJECTIF DU CONGRÈS
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Informations aux auteurs
Les propositions de communication doivent être envoyées en
1 exemplaire, avant le 25 février 1999 impérativement, au :
CPLOL - Congrès 2000 - 2, rue des Deux gares - F-75010 Paris
Tél. : +33 (0)1 40 35 63 75 - Fax : + 33 (0)1 40 37 41 42
E-mail : cplol@wanadoo.fr
Elles consisteront en un résumé explicite (500 mots maximum),
rédigé en français et en anglais, de la communication envisagée. Il est
demandé aux auteurs de joindre leurs coordonnées postales et électro-
niques complètes ainsi que les éléments d’information utiles relatifs à leur
curriculum professionnel.
Les auteurs retenus devront faire parvenir leur texte définitif dans les
délais impartis. Des consignes de présentation seront précisées ultérieure-
ment en vue d’une publication remise aux participants le premier jour du
congrès.
Toute proposition de communication ne respectant pas les
normes ci-dessus ne sera pas prise en considération.
Dates à retenir
- 25 février 1999 : date limite de réception des résumés des communica-
tions en 1 exemplaire.
- Avril 1999 : notification aux auteurs de la décision du Comité Scientifique.
- Janvier 2000 : date limite de réception des textes des communications
sous forme définitive (en français et/ou en anglais), pour publication dans
les Actes du Congrès.
Secrétariat du congrès
CPLOL - Congrès Paris 2000
Pierre Dessailly
2, rue des Deux Gares, F-75010 Paris
Tél. : +33 (0)1 40 35 63 75 - Fax : + 33 (0)1 40 37 41 42
E-mail : cplol@wanadoo.fr
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Aucun article ou résumé publié dans cette revue ne peut être reproduit sous forme d’imprimé, photocopie,
microfilm ou par tout autre procédé sans l’autorisation expresse des auteurs et de l’éditeur.
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NOTES
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DERNIERS NUMÉROS PARUS
N °1 89 : Un essai de la thérapie PACE chez le patient Alzheimer (C. BRUYÈRE - M. ROUSSEAUX). — Place de
l’enfant, histoire familiale et rééducation (J. ZWOBADA-ROSEL). — Grammaire de l’enfant. Pour une gram-
maire de la variation et des interactions (M.-C.POUDER). — Analyse des stratégies interactives autour d’un
livre : une rééducatrice et un enfant retardé mental (G. GREMAUD). — Aptitudes recensées de l’enfant à
l’adulte en langage, lecture et orthographe (A.GIROLAMI-BOULINIER).
N °1 90 : Le Locked-in-Syndrom (Ph. VAN EECKHOUT). — Mécanismes de la récupération neurologique après
accident vasculaire cérébral (AVC) : apports de l’imagerie fonctionnelle cérébrale (J.C. BARON). — L eD P L 3
dépistage et prévention à 3 ans (F. COQUET, B. MAETZ). — La recherche de l’invariant comme outil métho-
dologique dans l’acte de rééducation (A. MENISSIER). — Le jeu symbolique dans la perspective de l’écrit
(F. POUËCH). — Un autre regard sur l’enfant en difficulté (M. DAMOUCHE). — Pour une analyse du
bégaiement ou la dimension « méta » en question (A. BENSALAH). — Linguistique fonctionnelle, évaluation,
rééducation des troubles d’acquisition du langage (J. ZWOBADA-ROSEL).
N °1 91 : Aspects pragmatiques de la modification des rôles discursifs dans une psychothérapie d’enfant (retard de
parole et de langage (M.C.POUDER). — Evaluation du langage spontané de l’enfant (M.MONFORT). —
A propos du niveau de langage de 16 élèves de SEGPA (A. GIROLAMI-BOULINIER, L. GINESY). — Du
préfixe RE comme paradigme du changement (A. MÉNISSIER). — Evolutions du bilan de langage de l’adulte
âgé (Ch. REMOND-BESUCHET) — Evaluation des troubles du langage en phase initiale de l’aphasie
(TRAN THI MAI) — Evaluation et validation de la rééducation en aphasiologie (C. VAILLANDET). —
La main droite de l’hémiplégique âgé et l’écriture (G.ENOS).
N °1 92 : LANGAGE ÉCRIT - Rencontre avec Rémi et Romain (M. TOUZIN). — Données Actuelles : Le cerveau
du dyslexique (M. HABIB) - Apport de la neuropsychologie cognitive à la pratique orthophonique
(S. VALDOIS) - Reconnaissance visuelle de mots et dyslexies de l’enfant (S. CASALIS) - Acquisition de la
lecture (et de l’écriture) dans les systèmes d’écriture alphabétique (L. SPRENGER-CHAROLLES) -
Métaphonologie, acquisition du langage écrit et problèmes connexes (J. ALEGRIA) - Impuissance apprise et
dyslexie (F. NOUGARO, L. VERA) — Examens & Interventions : Influences croisées de la stratégie « phé-
nicienne » induite et des défaillances de la mémoire de travail chez un enfant dyslexique-dysorthographique
(M. PLAZA).- Etude de cas : Yann (S. LARGER) — Perspectives : (E. LEDERLÉ).
N °1 93 : I.M.O.C. - Rencontre ( B .W A H L ) — Données Actuelles : Infirmités Motrices d’Origine Cérébrale -
Généralités ( F .R E V O L ) - Paroles d’enfants IMC (F. DE BARBOT) - L’enfant porteur d’un handicap sévère
et sa famille (M. MARTINET, J.M. BLANC) - Déficits visuo-spatiaux et dyspraxies : une entrave aux appren-
tissages (M. MAZEAU) - Etude du développement intellectuel et du langage chez 34 enfants présentant une
hémiplégie cérébrale congénitale (S. GONZALEZ, F. COMBE, A. RITZ, A.S. EYRAUD, C. EBERHARDT,
C. BERARD) - Evaluation médicale des IMC lourdement handicapés par leur dysarthrie ou leur absence
d’expression orale (pour raison mécanique) (D. TRUSCELLI) - Bilan de langage et diagnostics chez les
enfants infirmes moteurs cérébraux (M.H.MARCHAND) - Les conditions neuromotrices de l’apprentissage
de la parole chez l’IMOC (A. LESPARGOT) - Des moyens différents pour communiquer et développer le lan-
gage (M.H.MARCHAND) — Examens & Interventions : L’évolution des conduites de communication chez
un enfant polyhandicapé (A.TOSCANELLI-ROUAULT) - Les troubles de la motricité bucco-faciale de
l’enfant IMC (D.CRUNELLE) - La rééducation des troubles de la déglutition des enfants et adolescents
I.M.O.C. (C. SENEZ) - Les systèmes de communication alternative chez l’enfant IMC (M.MONFORT,
A. JUAREZ-SÀNCHEZ) — Perspectives : Facilitation à la mise en place de tableaux ou d’aides techniques
de communication (E. CATAIX-NÈGRE) - Etude de cas : Romain - Quel cheminement pour une synthèse
vocale ? (J.CHAILLEY) - O.E.A./A.T.C. (Outil d’Evaluation Adapté) (Téléthèses) - Evaluation préalable à la
mise en place d’une aide technique à la communication (A. D’ALBOY, V. CHATAING).
N °1 94 : LES PATHOLOGIES VOCALES CHEZ L’ENFANT - L’enfant, sa demande et sa motivation -
Rencontre (C.KLEIN-DALLANT) — Données Actuelles : Les dysphonies de l’enfant : aspects cliniques et
thérapeutiques (G. CORNUT, A. TROLLIET-CORNUT) - L’évolution de l’appareil phonatoire et la voix et
l’enfant (V. WOIZARD, J. PERCODANI, E. SERRANO, J.J. PESSEY) - Particularités du travail vocal en
rééducation (B. AMY DE LA BRETÈQUE) - Qualité de voix chez l’enfant et facteurs sociaux / environne-
mentaux (P.H. DEJONCKERE) - Pour une logique dans la démarche rééducative de la dysphonie de l’enfant
(M.C. PFAUWADEL) - Le chant chez l’enfant et ses difficultés (J. SARFATI) - Dysphonie de l’enfant : rela-
tions entre professeur de formation musicale et phoniatre (M. LECOQ) — Examens et interventions :
Expérience clinique de la rééducation vocale de l’enfant (F. MARQUIS) - Le profil vocal et son adaptation
chez l’enfant (F. DEJONG-ESTIENNE) - L’enfant et sa voix. Comment les réconcilier. Le but, les étapes et les
moyens qui font la trame d’une rééducation (F. DEJONG-ESTIENNE) - Relaxer l’enfant ou détendre sa voix ?
(C.KLEIN-DALLANT) - Voix et oralité chez l’enfant dysphonique (C.THIBAULT) - Rééducation vocale de
l’enfant : écoute ce qui est ( P .L U P U ) - Bertrand, l’histoire d’une mue faussée. Utilisation de la méthode des
mouvements minimaux associée à cette rééducaation (M. HABIF) - Apports de la sophrologie en rééducation
vocale de la dysphonie de l’enfant hypertonique (E. DE MONTAUZAN) - Perspectives : Que deviennent les
dysphonies de l’enfant à l’âge adulte ? (D. HEUILLET-MARTIN, C. SEYOT) - Questionnaire (C. KLEIN-
DALLANT) - Questions et réponses (J. ABITBOL).