Géographie Économique de L'afrique Du Nord Selon Les Auteurs Arabes Du IXe Siècle Au Milieu Du XIIe Siècle - Vanacker
Géographie Économique de L'afrique Du Nord Selon Les Auteurs Arabes Du IXe Siècle Au Milieu Du XIIe Siècle - Vanacker
Géographie Économique de L'afrique Du Nord Selon Les Auteurs Arabes Du IXe Siècle Au Milieu Du XIIe Siècle - Vanacker
Gographie
de
conomique
l'Afrique
du
Nord
. VANACKER
des esclaves noirs 9. Il faudrait pour cela prouver la frappe de l'or dans la
ville.
Malgr les difficults que connat l'tat zride au dbut du XIe sicle, ce
n'est que vers 1050 qu'intervient un renversement dcisif de cette situation.
A l'poque almoravide, alors que le trafic de Zawla se ralentit, seules Sidjilmsa et Aghmt 10, qui sert d'entrept et de ville commerante pour Marrakech,
sont encore en relations rgulires avec le Sud. En mme temps, les Almoravides
possdent des cits caravanires Fs et Tlemcen X1 dont l'activit contraste
avec le dclin des centres ifrqiyens asphyxis par les Hilliens 12. Cette volu
tionconomique se poursuit au dbut de l'poque almohade au bnfice de
l'Ouest maghrbin, malgr l'inscurit perptuelle qui y rgne.
La totalit des industries de luxe a t, jusqu'au milieu du XIe sicle,
concentre en Ifrqiya o l'on trouve les seuls marchs palatins importants.
Certaines de ces industries, telles la verrerie et la poterie 13, sont directement
influences par l'Orient, et Kairouan a jou un rle important dans la diffusion
vers la Qal'a 14 de ces influences orientales. Le fer semble destin surtout aux
chantiers navals : ceci pourrait expliquer le silence des auteurs arabes sur
l'exploitation du fer au Maroc puisqu'il n'y a pas de chantier naval dans cette
rgion avant l'poque almohade.
D'autre part, l'Ifrqiya reoit peu de produits fabriqus. Aprs le IXe sicle,
elle importe sans doute beaucoup moins de cramiques qu' l'poque aghlabide.
Par contre, c'est une seule catgorie d'objets fabriqus, les textiles, qui constitue
l'exportation dominante de l'tat zride avant l'invasion des nomades. Les
objets mtalliques, les verres et poteries ne sont gure exports certains
sont-ils nanmoins envoys dans le pays des Noirs ? Seules quelques reliures
sont envoyes en Egypte, peut-tre quelques parchemins et du papier en
Espagne et en Sicile. Etant donn les variations possibles de productions comme
les fruits ou l'huile, et le peu d'importance des minerais envoys en Egypte,
le seul poste srieux pour les exportations est le textile. Cette industrie est
soigneusement organise par Kairouan : construction de rservoirs dans la
principale zone d'levage, au sud de la capitale, appel un arrire-pays, trs
vaste pour les matires premires, rglementation des exportations, etc.
Tout autre est industrie marocaine avant l'poque almoravide : disper
sion
de l'activit artisanale, approvisionnement de marchs locaux 15, spciali
sationde certains centres dans la fabrication d'objets destins tre exports
vers le Sud : c'est le cas, par exemple, de Sidjilmsa qui exporte ses tissus au
moins jusqu' Awdaghost le. Sensiblement en retard sur l'Ifrqiya, le Maroc
n'est dot d'une industrie analogue celle de l'tat zride qu'avec l'tabliss
ement
des Almoravides, peut-tre mme l'poque almohade seulement, alors
9. H. R. Idrs, La Berbrie orientale sous les Zirides, Paris, Maisonneuve, 1959,
P- 5310. Al-Idrs, Edit. Dozy et de Goeje, Leyde, 1864-1866, p. 77.
11. Al-Idrs, pp. 90 et 93.
12. Ibid., p. 129.
13. Cf. G. Pianel, La cramique de Ngrine au ixe sicle , Hespris, t. XXXVIII ;
Fkrrou et Pinard, Fouilles Byrsa , Cahiers de Byrsa, V, 1955 > S- M. Zbiss, Mahdiya
et Sabra-Manouriya , Journal Asiatique, 1956.
14. L. GoLviN, Recherches archologiques la qal'a des Ban Hammd, Paris, Maisonneuve et Larose, 1965.
15. Suq Fenour, par exemple : al-Bakr, p. 294.
16. Al-Bakr, p. 301.
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i.
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19.
o.z
1. ROUTES
MIEL
produit export
produit import
300 km
IXe et Xe
routes au IXe
selon Ibn Khurddhbeh
al-Ya'qb
routes et ports ou Xe
selon Ibn Hauqal
F-
Waddn
Zawla
300 km
@
HUILE
selon al-Bakr
Xle
LAINE
MIEL
GOUDRON
Ba
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Ir Adjdbiya
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^wdjila
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^
.
*-w
Santarya
ers KUWRif
SebabV Tmissa
/
300 km
J-
()
(iTabarqa)
ville en dclin
|CRAL~ES|
produit export
selon al-ldrs
Taswa o ~J
^ Mars
Sousse
(Bougie)- 4 Annaba. ;
d-Dadjdj
/
. Skikda (Bne) Mahdya
) ^ ^ ^^ (Philippeville)
faX % J>
.
du IX
Bizerte
Collo
HunaVrchghDI
port ou mouillage romain rutilis par les musulmans
port ou mouillage romain progressivement abandonn
Gabs
^fondation musulmane
Annaba
(BSne)
XII
: :
6. INDUSTRIES
Tunis
0 IX
selon:lbn Hauqal
les tmoignages archologiques.
selonial-Bakr,
l'auteur du Kitb al-lstibr,
les tmoignages archologiques.
Tripoli
DJ. NAFOSA
Adjdbiya
Tunis
Tripoli
Tunis
selon ; al-idrs
l'auteur du Kitb al-lstibr,
les tmoignages archologiques.
constructions navales
travail du cuivre-
Vj
cramique
verrerie
industrie textile
pparfums
Ssucre
H huile
arqa
travail du cuir
7. ATELIERS MONTAIRES
IDRISSIDES
ateliers
localiss :
V/arzigha.
Ouazakour
Tadjerdjera
Outhith
Ouathl
Yadjerhan
Matghara
OuerghaOudjtah
AGHLABIDES
300 kn
M Sidjilmsa
Tripoli
Ouargla
L'IFRQIYA APRS 1050
Tripoli
Zone cultive
Zone de culture cralire
Zone d'levage
IX et Xe
selon al-Ya'qb
Ibn Hauqal
al-Muqaddas
:
^^\i Tripoli
Baiqa
^
"^
Surt
biya
^*/ V/addn
/ Av^djila
300 km
i
Zawla
) Thert
Zone cultive
Zone de culture cralire
Zone d'levage
/V 0
selon al-Bakr
Bizerte
Alger
Thert
300 km
Xle
^-\_^ Tripoli
Oj. 'w^*'
AFUSk-
Barqa
X^ Surt
Waddan
^\^
v
y/7/ Adjdbiya
/%/Awdjila
Sebab>i^
///
///y Zawla
// Santarya
300 km
(yC,
Zone cultive
Zone de culture cralire
Zone d'levage
Ville et zone en dclin (surtout aprs le passage des Hilliens)
selon
al-ldrs
Madjdjn Xi// *
Meskina( ^ "'
,
Djalla
'y,
KairouarNb
Sabba
Ba rqa__^ ^^^^
300 km
z /'^ Santarya
Zawla
x^/ Awdjila
Waddan
# Zla
^^Adjdbiya
rt
> ^\
^- \ Tripoli
i---^ Lebda
FBV-EPHE
puits
galeries de captage
/i*
Tripoli
Surt
Adjdibya
.
Waddn .
-= Awdjila
_-.=
ala
- - Zawla
A v
300 km
CULTURES SPCIALISES
12. PALMIER- DATTIER
>
Sabraitia
Surt
OAdjdbiya
Waddn
Hu
Tadjjrfei
^ ^n^AL_
j
QAwdjila
OZl
Tajerma
Sebab o
O Zawla
300 km
1,1.1,1
CULTURES SPCIALISES
13. COTON
Ibn Hauqa
selon
al-Bakr
al-ldrs
[2
soie
mrier
CULTURES SPCIALISES
15. CANNE SUCRE ET APICULTURE
16. VIGNE
Barachk
al-Khadra
Banu Wrfan
/ ?
rpiga O '
Sh""^-
Ga.fsa
Q g ,Kerkenn
/O
300 kn
4
JQ S i.djj.lmsa
selon
Ibn Hauqal
Ibn Hauqal ou al-Muqaddas (pour la vigne)
al-Bakr"
al-ldrs
CULTURES SPCIALISES
17.OLIVIER. SESAME
Carthage
^\
^-^~
y~^ al-Ansariyn > ~/~~ Lar bus y
.
*?
Q
carthame
safran
19 .CUMIN . CARVI .HENN
300 km
selon :
|- quoi
Ibn Hauqal ou
al-MuqaddasT (olivier-ssame)
ibn Hauqal
al-Bakr
al-ldrs
Carthage
300 kn
. VANACKER
nications. Selon les indications des gographes, il semble que les tapes aient t
d'une quarantaine de kilomtres, parfois moins, ou plus si la contre traverse
tait dsertique. Sur les itinraires les plus frquents, et plus particulirement
prs des grandes villes, des caravansrails pouvaient accueillir les marchands :
c'est le cas Tbessa ou Madhkd, par exemple.
Le rseau routier nord-africain est avant tout constitu par un ensemble
de voies est-ouest de l'Egypte au Maroc ; relies d'une part aux villes qui,
la limite du dsert, commercent avec le pays des Noirs , d'autre part, au
littoral. Le problme est d'essayer de dterminer, grce une tude dtaille de
ce rseau et de ses variations du IXe au XIIe sicle, dans quelle mesure chacune
des routes principales tait frquente et quelles taient les zones les plus actives
du nord de l'Afrique cette poque. Chemin faisant, nous esquisserons une
comparaison avec le rseau romain.
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. VANACKER
. VANACKER
. VANACKER
Al-Idrs, p. 159.
Mohammed Ibn Yuf, cit par Al-Bakr, pp. 281-282.
Al-Bakr, pp. 289-290.
P. 94.
Al-Idrs, pp. 106, 109, 113, 117.
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. VANACKER
. VANACKER
des oasis du Fezzan. Sauf au Fezzan o les oueds sont rares, tous les villages
et bourgs sont sur des oueds. L'exemple le plus caractristique est celui de la
route menant du Djerd Msla puis Thert. Dans cette rgion, un simple puits
ne peut suffire fixer une population. Aussi, Djz n'est qu'une aiguade
o campent les passants et o il n'y a pas d'habitants 73. Les villages se sont
tablis sur les ruisseaux qui descendent de l'Aurs, du Hodna et de l'Ouarsenis.
Un petit ruisseau comme l'oued Maggara porte sept villages. Pour utiliser
l'eau au maximum, ces villages se sont-ils installs sur les deux rives ? 74
Parfois le sol est irrigu par l'oued en crue : c'est le cas Tobna pour le
Beitham, et, selon Ibn Hauqal, Sidjilmsa. Il est possible que de violents
orages en t fassent dborder les oueds, mais le plus souvent les agriculteurs
dirigent l'eau de ces oueds dans des canaux d'irrigation. Selon al-Bakr, il y a
tant de ruisseaux Nefta que l'eau se distribue sans tre mesure . A Tozeur,
chacun des trois ruisseaux se partage et forme six canaux d'o rayonnent
une quantit de canaux construits en pierre de manire uniforme [...]. Chaque
conduit a deux empans de largeur et un futr de profondeur. Pour avoir rgu
lirement
quatre cades d'eau, on donne un mithql par an 75. Ceci suppose
tout un systme de vannes. Les pluies tant irrgulires, comment l'eau pouvaitelle tre ainsi disponible ? Existait-il une srie de petits barrages rservoirs ?
Les fatwas zrides montrent que les eaux du Djerd faisaient l'objet de trans
actions irrgulires. D'autre part, le loyer des terres irrigues est infrieur au
loyer des terres non irrigues, le cultivateur ayant droit au quint ou au dixime
de la rcolte. En outre, la location d'une terre dont on n'est pas certain que
l'on ne sera pas oblig de l'irriguer ne peut tre pay d'avance 76. Toute
ngligence dans l'entretien du rseau de seguia entrane immdiatement une
dcadence de l'agriculture.
L'oued qui irrigue les cultures peut tre utilis par les habitants d'un
bourg ou d'un village dans un but dfensif c'est le cas de Msla, Biskra et
Tahdh , ou utilitaire. A Aghmt, on introduit l'eau de la rivire dans la
ville certains jours de la semaine ; Fs, les habitants ont tir le maximum de
profit de la rivire.
L'levage et la polyculture
II est difficile de dlimiter des zones vritablement spcialises dans la
culture de telle ou telle plante. Tout au plus peut-on distinguer des nuances
selon les rgions. Il s'agit le plus souvent d'une conomie autoconsommation
o les changes, trs limits, s'effectuent dans le cadre de marchs hebdomada
ires.
Dans la valle du Chlif, Suq Karam, al-Ghuzza, les cultivateurs
changent leurs produits avec ceux des montagnards de l'Ouarsenis et du Dahra.
Les marchs de ce genre sont nombreux en Algrie la limite de la steppe et
au Maroc. Ils ont trs souvent donn naissance des villages o se perptue
la tradition du march et qui portent le nom d'une tribu ou d'un personnage
clbre : Suq al-Huayn, Suq Maghrwa, Suq Kutma... Ont-ils en partie
73.
74.
75.
76.
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moutons de Yerara sont d'une belle race que l'on dit tre celle de Kis, endroit
situ dans le pays de Frs. Leur laine, qui est d'une qualit suprieure, s'emploie
Sidjilmsa pour fabriquer des toffes dont chaque pice se vend un prix
qui dpasse 20 mithqls. 83 L'levage permet aussi l'industrie du cuir Zawla,
Ghadams et Gabs. Seuls les habitants de la cte nord, nous le verrons, lvent
des bovins afin d'exporter des produits laitiers.
Les crales sont trs rpandues mais peu exportes. Trs souvent les auteurs
arabes signalent des moulins sur les bords des oueds et ruisseaux. Au xie sicle
les deux villes de Fs renferment plus de 300 moulins... Chaque habitant du
quartier des Kairouanais a devant sa porte un moulin lui 84.
Les crales sont cultives, non sans difficult, jusque dans les oasis. Au
Djerd, cette culture est insignifiante, mais Waddn, Zawla et Tesswa on
cultive le millet. Dans ces rgions et, d'une faon gnrale, dans le sud de l'Algr
ie
et dans une zone allant du Mzab au Djerd, on ne peut cultiver que des
crales pauvres, la rigueur de l'orge comme Bdis, grce l'irrigation.
Seule Sidjilmsa fait exception et produit beaucoup de bl, fait qui est volon
tairement
exagr par Ibn Hauqal. Elle exporte ses crales Awdaghost o
elles se vendent raison de 6 mithqls le qintr car le bl, plant la houe,
est rare 85.
La principale zone productrice de crales est le Nord de l'Algrie et le
Nord-Ouest de la Tunisie actuelle. Tous les villages traverss par les marchands
allant de Kairouan Msla par Tfch produisent du bl et de l'orge. Il en est
de mme pour ceux qui jalonnent la route par Baghya bien que l'irrigation
soit ncessaire vers l'ouest. Le bas cours de l'oued Mellgue et la valle de la
Medjerda, le Fah Boll (Bulla Regia), la rgion d'al-Anariyy et surtout Bdja
(Bja) surnomme le grenier de lTfrqiya, produisent dubl en abondance.
Tous les jours il arrive de Bja plus de ' 1 000 ' chameaux et autres btes de
somme destins transporter des approvisionnements de grain. 86
Cette zone est la seule qui soit vritablement spcialise dans la production
de crales. Elle bnficie de conditions climatiques plus favorables que le
reste de l'Ifrqiya. Dans l'Antiquit, Y Africa tait, selon Pline, ddie Crs.
Elle expdiait vers Rome une partie des crales destines l'annone. Avec
la conqute musulmane et la fondation de Kairouan a t cr un dbouch
nouveau pour les produits de la valle de la Medjerda. Profitant de conditions
climatiques favorables et d'une longue tradition, les nouveaux souverains ont
vraisemblablement encourag la spcialisation de la valle de la Medjerda dans
la production de bl et d'orge, les autres rgions ne cultivant les crales que
pour la consommation locale.
Au xne sicle, de nombreuses localits autour de Sal, Mekns ainsi que les
ports atlantiques 87 produiront des crales destines au ravitaillement des
grandes villes marocaines, mais aussi l'exportation par mer vers l'Espagne.
L'unification du Maroc, la conqute progressive du littoral ouest, la multipli
cationdes relations entre les deux tronons de l'empire almoravide et la
83. Ibid., p. 281 (route de Fs de Sidjilmsa selon Mohammed Ibn Yuf). A trois
journes de marche de Sidjilmsa, Yerara n'a pu tre localis. Kis : selon de Slane, il
s'agirait de l'le du golfe Persique.
84. Al-Bakr, p. 226.
85. Ibid., p. 300.
86. Ibid., pp. 119-120.
87. Al-Idrs, pp. 88-89, 83-85.
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. VANACKER
. VANACKER
villages entre le djebel Nafsa et Zawla ne sont plus mentionns, et les planta
tionsautour de Waddn commencent disparatre. Le littoral de Tripolitaine,
en particulier les environs de Tripoli et la plaine de Soubijin, est le plus prouv :
Les habitants del campagne ont t obligs de l'abandonner, les plantations
ont t ravages, les cours d'eau arrts. 104
La situation est identique en Ifrqiya. Quelle est la part exacte prise par les
nomades dans la ruine des campagnes ?
Les renseignements manquent pour certaines rgions, en particulier celle
que traversaient les deux routes principales de Kairouan la Qal'a. Gafa,
Taqiys et sans doute tout le Djerd ont t pargns. Parfois les Berbres se
rfugient dans la montagne, abandonnant la plaine aux Arabes : c'est ce qui
se passe dans la rgion de Zaghouan. Parfois aussi, Constantine par exemple,
ils traitent avec les envahisseurs.
Mais le bilan de l'invasion est lourd : tributs imposs par les Arabes, repli
des villes derrire leurs murailles, destructions dans le Sahel et le Qamuda,
la dcadence de ces zones tant acclre par le manque d'entretien du systme
d'irrigation. Pour al-Idrs, il n'y a aucun doute : les responsables de cette situa
tionsont les Hilliens. Mais il est possible, comme le souligne J. Poncet, que le
pays ait eu souffrir des bandes de pillards, gens sans travail et sans terre,
soldats en rupture de ban, profitant de la situation cre par l'arrive des
nomades. En outre, Tamm aurait provoqu des destructions autour de Gabs
et de Sfax lors des siges de 1081 et 1099.
Le dsarroi est total en Ifrqiya o le droit de proprit a subi de graves
atteintes. Certains paysans, obligs de moissonner prmaturment et en hte
l'aide d'une main-d'uvre supplmentaire, demandent en vain la dduction
sur la zakt des frais supplmentaires ainsi occasionns 105. Toute la vie rurale
est perturbe, le nomadisme a sans doute fait des progrs dans la steppe, les
changes interrgionaux, gns par les Arabes et les pillards, diminuent consi
drablement.
Un sicle aprs l'invasion hillienne, la situation n'a pratiquement pas
volu en Ifrqiya. A l'autre extrmit du Maghreb, la mise en valeur du Maroc
se poursuit avec la multiplication des villages autour de Mekns et Sal, le
dveloppement de la culture du coton et de celle des crales sur la cte
atlantique.
*
Malgr leurs lacunes, les textes des auteurs arabes nous permettent de voir
le rle de l'Afrique du Nord dans le monde musulman, les aspects positifs de
la conqute musulmane et l'volution des diffrentes rgions.
C'est surtout Ifrqiya qui a jou un rle dans l'ensemble conomique
musulman. Elle transmet vers l'ouest les influences orientales et redistribue
vers l'Espagne les produits d'Orient. Au xne sicle, elle sert aussi de relais entre
la Chrtient et l'Orient, et ses ports tendent devenir de simples ports de
transit.
Depuis la conqute musulmane, trois modifications essentielles se sont
produites : lTfrqiya n'est plus une province tourne vers la Mditerrane, elle
104. Al-Idrs, p. 142.
105. Fatwa d'al-Mzar, cite par Idrs, op. cit. p. 613.
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