Myélopathies Cervicales
Myélopathies Cervicales
Myélopathies Cervicales
Mylopathies cervicales
J. Brunon, C. Nuti, R. Duthel, M.-J. Fotso, B. Dumas
La mylopathie cervicale est un syndrome clinique en relation avec la diminution des dimensions du canal rachidien ; cest la plus frquente des mylopathies aprs 50 ans. La cervicarthrose est ltiologie principale, mais de nombreuses autres pathologies peuvent entraner une rduction signicative du diamtre du canal rachidien et une souffrance mdullaire. Les stnoses congnitales peuvent donner une mylopathie, mais le plus souvent elles ne constituent quun facteur favorisant. Sa physiopathologie est controverse et associe la compression mcanique, les microtraumatismes et des perturbations de la microcirculation ainsi que plus rarement une instabilit vertbrale. Les signes cliniques associent un syndrome mtamrique avec des signes radiculaires et/ou une atteinte du motoneurone et un syndrome sous-lsionnel avec des signes pyramidaux, spinothalamiques et cordonaux postrieurs. Son volution est responsable dun handicap progressif. Les radiographies simples et limagerie par rsonance magntique suffisent habituellement au diagnostic, mais parfois le scanner et le myloscanner sont ncessaires. La neurophysiologie est utile pour faire le diagnostic diffrentiel et peut-tre aussi le pronostic. Si dans quelques cas les formes bnignes et peu volutives peuvent tre traites mdicalement, le traitement chirurgical est ncessaire dans la majorit des cas. Le choix de la voie dabord, antrieure ou postrieure, est guid par les signes cliniques et les donnes de la radiologie. En Europe, la majorit des patients sont traits par voie antrieure. Le pronostic postopratoire est meilleur quand le traitement chirurgical est ralis prcocement ; les complications postopratoires sont trs rares.
2005 Elsevier SAS. Tous droits rservs.
Mots cls : Mylopathie cervicale ; Arthrose cervicale ; Rachis cervical ; Moelle cervicale ; Abord antrieur ; Laminectomie ; Laminoplastie
Plan
Introduction tiologies Stnoses constitutionnelles Cervicarthrose Ossication du ligament longitudinal postrieur Formes post-traumatiques tardives Autres tiologies Physiopathologie Compression mcanique Microtraumatismes Phnomnes vasculaires tude clinique Modes de dbut Donnes de lexamen neurologique Formes cliniques volution Examens complmentaires Imagerie Neurophysiologie Traitement mdical Traitement chirurgical Dcompression mdullaire par voie antrieure Dcompression mdullaire par voie postrieure Interventions combines
Neurologie
1 1 2 2 2 2 2 2 2 2 3 3 3 3 4 4 4 4 8 9 9 9 10 11
Indications Indications des abords antrieurs Indications des abords postrieurs Indications des abords mixtes Rsultats - Complications du traitement chirurgical Rsultats du traitement mdical Rsultats du traitement chirurgical Complications du traitement chirurgical
11 12 12 12 12 12 12 13
Introduction
Le terme de mylopathie rassemble toutes les souffrances chroniques de la moelle pinire quelles quen soient les tiologies : vasculaires, inflammatoires, carentielles, postradiques etc. mais le terme de mylopathie cervicale est plus restrictif et doit tre rserv aux souffrances chroniques de la moelle en relation avec la diminution des dimensions du canal rachidien cervical dont ltiologie principale est la cervicarthrose, qui reprsente elle seule 55 % des mylopathies chez ladulte de plus de 50 ans. [1]
tiologies
Laffection sobserve aprs 50 ans, plus souvent chez lhomme que chez la femme ; sa frquence augmente avec lge ; elle est une des premires causes de handicap fonctionnel chez le sujet g.
Stnoses constitutionnelles
Isoles, elles ne donnent quexceptionnellement des mylopathies cervicales, en dehors de cas extrmes reprsents par des stnoses svres comme au cours de lachondroplasie. Le plus souvent elles ne constituent quun lment favorisant.
Cervicarthrose
Les lsions dgnratives du rachis qui dbutent de faon relativement prcoce, ds lge de 20 ans, reprsentent ltiologie principale des mylopathies cervicales. Elles paraissent favorises par le nombre de sollicitations du rachis dans certaines professions, les traumatismes antrieurs (joueurs de rugby) et sont plus prcoces et plus frquentes chez les patients prsentant des mouvements anormaux (torticolis spasmodique, maladie de Gilles de La Tourette, choroathtose{). On peut en rapprocher les dcompensations des blocs cervicaux congnitaux qui entranent une dgnrescence prcoce des articulations adjacentes surmenes . La lsion initiale intresse le disque et correspond une diminution de lhydratation du nucleus pulposus, une augmentation du collagne, une diminution de la teneur en mucopolysaccharides et sulfate de chondrotine. Sur le plan anatomique, il se produit des fissures au niveau de lannulus dans lesquelles sengagent des fragments du nucleus. Ces modifications anatomiques altrent les proprits mcaniques du disque qui sont lorigine de la dgnrescence, dans des proportions variables, de lensemble des lments constitutifs des articulations intervertbrales. Les lsions intressent successivement le disque (hernies discales molles , discopathies dgnratives, hernies calcifies dures ), les articulations uncovertbrales (uncarthrose), les articulations postrieures (arthrose interapophysaire), lappareil ligamentaire qui shypertrophie, perd ses proprits mcaniques, spaissit et se calcifie. Toutes ces lsions, aggraves par une ostophytose ractionnelle, rduisent les dimensions du canal rachidien cervical et sont dautant plus pathognes que ce canal est constitutionnellement troit. Les lsions peuvent parfois tre limites un ou deux tages adjacents, au niveau des segments les plus mobiles du rachis cervical infrieur (C5/C6 et C6/C7), mais sont parfois tendues la totalit du rachis cervical infrieur (C3 C7). Les lsions dgnratives peuvent aussi tre lorigine de troubles de la statique vertbrale (perte de la lordose physiologique, parfois cyphose ou plus rarement scoliose dgnrative), dinstabilits chroniques, voire de spondylolisthsis dgnratifs par modification de lorientation des surfaces articulaires. Lors des mouvements de flexion-extension, les ligaments qui ont perdu leur lasticit peuvent venir saillir dans la lumire du canal rachidien et participer la souffrance mdullaire.
Sur le plan clinique, les obses et les patients prsentant une intolrance au glucose seraient plus frquemment atteints. Il nexiste pas de perturbations biologiques significatives de cette maladie : les antignes leucocytaires human leukocyte antigen HLA-BW40 et HLA-SA5 seraient plus souvent rencontrs que dans la population gnrale. Lvolution clinique est imprvisible, 80 % des patients suivis sur une priode de plus de 10 ans restent asymptomatiques malgr la prsence de lsions anatomiques importantes, 20 % vont prsenter des signes neurologiques et devoir bnficier dun traitement chirurgical. [3] La pathognie de cette affection demeure incertaine : il se produirait une ostogense partir du ligament hypertrophi et hypervascularis lorsquil est dcoll de la face postrieure de la vertbre par les protrusions discales.
Autres tiologies
Les localisations cervicales de la polyarthrite rhumatode qui intressent surtout le rachis cervical suprieur (luxation atlodoaxodienne) et un moindre degr le rachis cervical infrieur peuvent se rvler par un tableau clinique de mylopathie cervicale. On peut en rapprocher les rares complications neurologiques de la spondylarthrite ankylosante, de la goutte par formation de tophus partir des articulations postrieures, de lhyperostose vertbrale ankylosante (maladie de Forestier) ou de la maladie de Paget qui peuvent entraner un rtrcissement du diamtre du canal cervical. Des mylopathies ont t observes chez des patients dialyss au long cours en relation avec des calcifications pidurales.
Physiopathologie
Compression mcanique
La mylopathie cervicale nest pas proprement parler une compression mdullaire, mais la rduction des dimensions du canal cervical est retrouve dans tous les cas. Il a t possible de raliser, chez le chien [4] et chez le rat, [5] des mylopathies retardes par compression chronique de la moelle cervicale. On observe une diminution de la densit neuronale de 20 % partir de la 9 e semaine et de plus de 35 % au-del de la 25e semaine, alors quaucune lsion significative nest observe avant la 3e semaine. En dessous du sige de la compression, on constate une perte axonale. Des phnomnes de cavitation de la substance grise apparaissent ds que la perte neuronale est significative ; la substance blanche est longtemps pargne.
Microtraumatismes
Chaque heure, lextrmit cphalique effectue plusieurs centaines de mouvements associant dans des proportions variables une rotation et une flexion-extension. Il a t montr que lors de la flexion maximale du cou, la paroi postrieure du canal rachidien sallongeait de 5 cm et la paroi antrieure de 1,5 cm, il se produit donc un tirement de ltui dural et de la
Neurologie
moelle elle-mme. Lors des flexions-extensions se produit une diminution des diamtres du canal rachidien aggrave lors de lextension par un bombement en avant du ligament jaune. Lors de chaque mouvement se produisent des microtraumatismes au contact des lments compressifs. Lvolution de la mylopathie est corrle au nombre de ces mouvements : elle peut tre ralentie par une immobilisation cervicale. Les lsions dgnratives de lappareil discoligamentaire sont lorigine dune instabilit chronique, objective par les clichs dynamiques, qui imposent, en plus, la moelle des mouvements de cisaillement.
Phnomnes vasculaires
La stase veineuse en relation avec la stnose canalaire parat avoir un rle physiopathologique important, entranant une ischmie chronique et un dme mdullaire. Il y a quelques annes, sous limpulsion dAboulker, [6] il tait propos de rechercher systmatiquement une pathologie du systme azygos suprieur dans lequel se jettent les veines pidurales cervicales. Cest par ce mcanisme que sont expliqus les signes neurologiques des fistules artrioveineuses durales. Le rle des artres parat plus modeste en raison de la richesse du systme anastomotique au niveau cervical, mais il nest pas impossible denvisager une compression des artres radiculomdullaires, de la spinale antrieure, voire des artres vertbrales elles-mmes, en se souvenant que lge de larthrose est aussi celui de lathrome. Les lsions anatomiques constates lors des autopsies de patients ayant prsent une mylopathie cervicale suggrent un mcanisme ischmique. [7]
Latteinte des membres suprieurs peut tre un autre mode dentre dans la maladie. Il sagit alors le plus souvent de douleurs ou de paresthsies plus ou moins systmatises dans un territoire radiculaire accompagnes dune sensation subjective de maladresse ou dimpotence fonctionnelle rendant de plus en plus difficile la ralisation des gestes fins. Une amyotrophie peut tre le symptme rvlateur. La dcompensation aigu dune forme latente loccasion dun traumatisme cervical relativement mineur est un mode de rvlation frquent : le tableau clinique est alors celui dune contusion centromdullaire (syndrome de Schneider) ralisant une ttraplgie incomplte prdominant aux membres suprieurs, au maximum une diplgie brachiale.
tude clinique
Modes de dbut
Laffection est deux fois plus frquente chez lhomme que chez la femme et dbute entre 50 et 60 ans. Latteinte neurologique est souvent prcde pendant plusieurs mois ou plusieurs annes de douleurs cervicales mcaniques, mal systmatises, dpisodes de torticolis, voire de vritables nvralgies cervicobrachiales. On retrouve souvent la notion de microtraumatismes rpts, de surmenage rachidien professionnel ou sportif, plus rarement dun traumatisme cervical sans lsion radiologique vidente, tiquet entorse cervicale , dont on ne peut pas apporter la preuve sil na pas t pratiqu de clichs dynamiques. Il est toutefois possible quun tel traumatisme ait entran des lsions discales et/ou ligamentaires lorigine des lsions dgnratives. Le plus souvent on est dans le contexte banal de douleurs mcaniques rapportes larthrose cervicale. Les troubles de la marche sont habituellement le symptme inaugural sous la forme dune fatigabilit, de tendance la chute, de rduction du primtre de marche pouvant correspondre une vritable claudication intermittente neurologique, parfois dpisodes de drobement des membres infrieurs. Les difficults de la marche peuvent aussi tre en relation avec des difficults de coordination (ataxie sensorielle), des troubles de lquilibre, une mauvaise perception du sol, voire des douleurs ou des paresthsies apparaissant pour des distances de plus en plus courtes. En pratique, ces troubles sont assez faciles distinguer de lapraxie de la marche (astasie-abasie) observe dans lhydrocphalie chronique de ladulte et de la claudication intermittente des stnoses du canal lombaire tout en sachant que ces pathologies, frquentes dans cette tranche dge, peuvent tre associes.
Neurologie
[9]
Atteinte radiculaire exclusive sans signe mdullaire Signes mdullaires sans retentissement sur la marche Difficults de la marche sans retentissement professionnel ou domestique Difficults de la marche avec retentissement partiel sur lactivit professionnelle Marche avec assistance ou aide Marche impossible, chaise roulante ou grabataire
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peut tre masque en cas dassociation avec une stnose du canal lombaire ou une neuropathie priphrique. Latteinte cordonale postrieure, responsable de troubles subjectifs type de paresthsies, dengourdissement, parfois de douleurs spontanes ou provoques par la flexion du cou (signe de Lhermitte), est mise en vidence par la diminution de la sensibilit vibratoire, une atteinte de larthrokinesthsie et parfois un signe de Romberg. Latteinte spinothalamique est plus rare et plus tardive et se traduit par une hypoesthsie tactile, thermique et douloureuse. Les troubles de la marche prsents par le patient sont sous la dpendance plus de lhypertonie et de lataxie sensorielle que du dficit moteur.
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Troubles sphinctriens
Prsents dans 30 40 % des cas, ils sont souvent sousestims ; ils sont reprsents par une dysurie, une pollakiurie et parfois une incontinence deffort. Ils ne sont pas toujours rattachs leur cause (on voque un prostatisme ou une incontinence lie lge chez la femme) ; ils doivent faire lobjet dune recherche systmatique par mesure du rsidu postmictionnel par chographie vsicale.
volution
Il ny a pas damlioration spontane, mais lvolution est imprvisible : dans prs de 75 % des cas, lvolution se fait sur un mode discontinu par pousses successives sur plusieurs annes ; dans 20 % des cas lvolution est plus ou moins rapidement progressive et dans 5 % des cas on assiste une dcompensation brutale souvent provoque par un traumatisme cervical peu violent. Le stade ultime est reprsent par une incapacit totale de la dambulation et/ou une impotence fonctionnelle svre des membres suprieurs ralisant un handicap majeur.
Formes cliniques
Laffection est en fait trs polymorphe selon la topographie des symptmes, leur gravit et leur volution ; il est ainsi possible dindividualiser plusieurs formes cliniques : la forme ataxospasmodique, la plus frquente, o dominent les troubles de la marche et de lquilibre, latteinte des membres suprieurs tant le plus souvent infraclinique ; tous les diagnostics datteinte mdullaire peuvent tre voqus, en particulier une compression mdullaire lente (il ny a pas de limite suprieure aux troubles sensitifs qui sont plus discrets), ou une sclrose en plaques, (mais il ny a pas de signe de diffusion) ; les formes amyotrophiantes prdominant aux membres suprieurs pouvant simuler au moins au dbut une sclrose latrale amyotrophique mais dont lvolution est plus rapide et plus invalidante ; les formes type de paraparsie spastique, avec peu ou pas de troubles sensitifs ; les formes type de syndrome de Brown-Squard en cas datteinte mdullaire unilatrale prdominante ; les formes voluant par pousses successives faisant suspecter une sclrose en plaques rvlation tardive. La classification de Nurick tablie en 1972 [9] permet dvaluer de faon simple et reproductible le handicap fonctionnel des patients, de suivre leur volution et dapprcier les rsultats des traitements, mais est relativement imprcise (Tableau 1). La classification de lassociation des orthopdistes japonais (JOA), qui sest impose la plupart des auteurs de langue anglaise est la somme de scores fonctionnels ; le score maximal est 17 pour les patients indemnes de toute pathologie neurologique (Tableau 2).
Examens complmentaires
Imagerie
Radiologie simple
Les radiographies standards restent dactualit malgr le dveloppement de limagerie moderne mais pourraient tre prochainement remplaces par la tomodensitomtrie avec reconstruction sagittale (Fig. 1 3). Celles-ci doivent comporter des incidences de face, de profil, de trois quarts et surtout des clichs dynamiques de profil qui ne peuvent tre facilement obtenus avec le scanner et/ou limagerie par rsonance magntique (IRM). Elles permettent une apprciation globale des dimensions du canal rachidien et de dpister lexistence dun canal troit constitutionnel, facteur prdisposant aux mylopathies cervicales : [10] le diamtre antropostrieur du canal rachidien mesur entre le milieu du mur postrieur et le point le plus rapproch de lapophyse pineuse est gal ou infrieur au diamtre antropostrieur du corps vertbral (indice de Pavlov) ; [11]
Neurologie
Figure 1. Lsions dgnratives majeures du rachis cervical : dysharmonie de courbure (cyphose centre sur C5/C6), discopathies tages, arthrose interapophysaire postrieure, brivet des pdicules ; le diamtre antropostrieur du canal rachidien est infrieur celui des corps vertbraux.
Figure 3. Lsions dgnratives majeures, avec stnose extrmement serre en C5/C6, C6/C7 et C7/DI.
pincement du disque intervertbral ; ossifications ligamentaires. Elles objectivent les troubles de la statique vertbrale : perte de la lordose physiologique, inversion de courbure, spondylolisthsis dgnratifs, luxations pathologiques dans les rhumatismes inflammatoires et sur les clichs dynamiques une instabilit le plus souvent en flexion. Elles peuvent mettrent en vidence une pathologie associe, par exemple la squelle dun traumatisme cervical ou des facteurs favorisants comme un bloc cervical congnital. Il tait classique, autrefois, deffectuer sur ces clichs les mensurations du canal rachidien en corrigeant lagrandissement radiologique ; ceci a perdu son intrt aujourdhui, ces mensurations tant effectues sur le scanner.
Tomodensitomtrie
Figure 2. Discopathie svre et stnose du canal cervical au-dessus dun bloc congnital C4/C5.
prsence dune platyspondylie avec largissement du diamtre antropostrieur du corps vertbral ; les massifs articulaires se projettent sur la partie postrieure des corps vertbraux. Elles mettent en vidence les lsions caractristiques de la cervicarthrose prdominant au niveau des disques C5/C6, C6/C7 et C4/C5, et prcisent le nombre dtages impliqus : hypertrophie des massifs articulaires ; ostophytose des articulations postrieures, des plateaux vertbraux et des articulations uncovertbrales ;
Neurologie
Cest lexamen de rfrence pour ltude du canal rachidien. Lacquisition est faite en coupes fines jointives ou en spirale continue aprs injection intraveineuse de produit de contraste. On tudiera les coupes horizontales et les reconstructions sagittales et coronales en fentre osseuse et parties molles . Cest sur cet examen que seront mesures les dimensions du canal rachidien dont les valeurs moyennes ont t tablies depuis de nombreuses annes et qui sont rsumes dans le Tableau 3. On parle de canal troit ou rtrci lorsque le diamtre antropostrieur au niveau des lsions maximales (C5/C6 ou C6/C7) est infrieur 12 mm. Tous les signes radiologiques observs sur les radiographies standards sont ici retrouvs avec plus de prcision (Fig. 4 7) :
Figure 7. Discopathie calcie exubrante comprimant la face antrieure de la moelle mais aussi lespace rtropharyngien. Figure 4. Tomodensitomtrie en coupe horizontale objectivant une discopathie calcie rduisant le diamtre antropostrieur du canal rachidien cervical.
canal troit constitutionnel ; lsions en relation avec la cervicarthrose ; hernies molles ; kystes articulaires, et pathologie associe{ Lossification du ligament longitudinal postrieur est facilement mise en vidence en arrire des corps vertbraux dont elle est le plus souvent spare. Les clichs dynamiques sont de ralisation difficile, mais des coupes peuvent tre ralises en extension ou en flexion en interposant des coussins sous les paules ou sous la tte. Il permet dopposer les stnoses centrales associes une smiologie mdullaire (sous-lsionnelle) prdominante et les stnoses latrales associes une smiologie radiculaire (lsionnelle) prdominante aux membres suprieurs.
Figure 6. Tomodensitomtrie avec reconstruction sagittale mettant en vidence la stnose serre en regard dune double discopathie C5 et C6.
sur les coupes horizontales : les discopathies ( molles ou calcifies), lhypertrophie des massifs articulaires, larthrose interapophysaire postrieure et les calcifications ligamentaires ; sur les reconstructions : les troubles de la statique rachidienne et les spondylolisthsis dgnratifs. Mieux que la radiologie conventionnelle, le scanner apprcie les lments constitutifs de la stnose canalaire :
Cest lexamen de seconde intention aprs les radiographies simples (le scanner nest en effet pas toujours indispensable), qui permet dtudier les parties molles et le retentissement de la stnose sur la moelle elle-mme. Elle peut sous-estimer les lsions ossifies. Elle doit comporter des acquisitions en squences T1 et T2, en coupes sagittale, coronale et horizontale. Il nest pas habituellement ncessaire dinjecter dagent paramagntique (gadolinium) (Fig. 8 12). Comme sur le scanner, il est possible deffectuer les mensurations du canal rachidien. LIRM prcise ltendue de la stnose permettant dopposer les stnoses segmentaires limites un ou deux tages et les stnoses tendues ainsi que le sige des contraintes mcaniques maximales antrieures ou postrieures, ce qui a une incidence sur le choix de la technique chirurgicale. Si une instabilit a t observe sur les clichs simples, il est possible de raliser des squences dans les positions o se produit linstabilit. La frquence des atteintes dgnratives varie selon le niveau : C2/C3 : 25 %, C3/C4 : 14 %, C4/C5 : 25 %, C5/C6 : 56 %, C6/C7 : 44 %. Les squences T1 apprcient la morphologie de la moelle qui apparat le plus souvent dforme et atrophique en regard des saillies disco-ostophytiques ou de lhypertrophie du ligament jaune. Les espaces sous-arachnodiens en hyposignal sont difficiles analyser car confondus avec les structures ligamentaires elles aussi en hyposignal ; les calcifications discales et ligamentaires ainsi que les ostophytes peuvent tre lorigine dartefacts exagrant les hyposignaux. Lossification du ligament longitudinal postrieur apparat comme un hyposignal plus ou moins pais et tendu la face postrieure des corps vertbraux en avant de la moelle. Les squences T2 sont les plus utiles en permettant ltude du liquide crbrospinal qui apparat en hypersignal. Il est habituel dobserver un amincissement, voire une disparition des espaces sous-arachnodiens antrieurs ou postrieurs. Il est frquent dobserver un hypersignal centromdullaire au niveau du sige
Neurologie
Figure 10. Mylopathie cervicale par stnose monosegmentaire en regard dune hernie discale.
Figure 8. Imagerie par rsonance magntique en squence pondre en T2 avec mensurations du canal cervical. En regard de C3/C4 : stnose importante du canal rachidien, disparition de lhypersignal du liquide cphalorachidien en avant et en arrire de la moelle, hypersignal spontan de la moelle.
Figure 11. Stnose du canal cervical et mylopathie en regard par spondylolisthsis dgnratif C5/C6.
cicatrice gliale hypo-intense en T1, ou une cavit syringomylique. Les informations apportes par les squences T2 sont suffisantes pour faire le diagnostic et permettent domettre en toute scurit les squences T1. [13]
Mylographie et myloscanner
Figure 9. Mme patient que sur la Figure 2 ; stnose majeure du canal cervical par discopathie svre au-dessus dun bloc congnital ; hypersignal centromdullaire.
maximal et de la compression et au niveau des mtamres susjacents. La signification de cet hypersignal est mal connue, il sagit probablement dun dme mdullaire en relation avec les microtraumatismes rpts ; il nest pas corrl avec la gravit de latteinte neurologique, il na pas de signification pronostique. Il disparat le plus souvent aprs le traitement chirurgical [12] linverse de ce que lon observe dans les traumatismes mdullaires aigus et svres o cet hypersignal volue, soit vers une
Neurologie
La mylographie et le myloscanner ne sont indiqus que lorsque lIRM est impossible ; ils objectivent le diamtre du canal rachidien, les lments compressifs antrieurs et postrieurs de topographie mdiane ou paramdiane (Fig. 13 15). La compression peut tre suffisante pour entraner une interruption de la colonne opaque au sige maximal de la stnose. Les coupes horizontales permettent dvaluer les dimensions de la moelle qui peut apparatre atrophique ainsi que les modifications de sa forme : face antrieure concave, dformation en V ouvert en avant, refoulement en arrire par les prolifrations ostophytiques qui peuvent sembler sencastrer dans le cordon mdullaire. Les clichs tardifs peuvent opacifier une cavitation intramdullaire pseudosyringomylique.
Figure 12. Imagerie par rsonance magntique squence pondre en T1 : stnose du canal cervical, modications des surfaces de la moelle en relation avec une hyperlordose.
Figure 14. Mylographie iode, canal cervical congnitalement troit (indice de Pavlov < 0,50) et discopathie C4/C5.
Figure 13. Myloscanner en coupe horizontale mettant en vidence lamincissement des espaces sous-arachnodiens et la compression de la face antrieure de la moelle par une discopathie calcie.
La mylographie permet de raliser des clichs dynamiques. La saillie des discopathies est majore en flexion, celle du ligament jaune en extension ; en cas dinstabilit, elle permet dobjectiver laggravation dun spondylolisthsis en flexion et son retentissement sur le diamtre du canal rachidien.
Neurophysiologie
lectromyogramme
Il met en vidence des signes de souffrance neurogne priphrique au niveau des membres suprieurs, non spcifiques de ltiologie, plus de type atteinte radiculaire que de type corne antrieure de topographie relativement diffuse, atteignant plusieurs racines et/ou mtamres et souvent plus tendus que ne le suggre lexamen clinique. Il peut parfois mettre en vidence des fibrillations le plus souvent sans traduction clinique. Il est utile au diagnostic diffrentiel avec la sclrose latrale amyotrophique.
Figure 15. Mylographie iode : lsions dgnratives avec discopathies svres de C3 C6 ; compression mixte de la moelle, en avant par les discopathies et en arrire par lhypertrophie du ligament jaune.
Potentiels voqus
Les potentiels voqus somesthsiques (PES) des membres infrieurs sont perturbs chez la totalit des patients atteints de mylopathie cervicale, ceux du membre suprieur de faon plus inconstante. Mais cette perturbation nest pas spcifique et ne
permet pas le plus souvent de prciser les siges de latteinte mdullaire. Ils sont trs utiles pour le diagnostic diffrentiel avec une sclrose latrale amyotrophique dbutante. Ltude des voies pyramidales par lenregistrement des potentiels voqus moteurs (PEM) peut mettre en vidence une atteinte infraclinique et permet de prciser le niveau lsionnel selon le site denregistrement de la rponse (C2/C3 pour le trapze, C5 pour le deltode, C6 pour le biceps, C7 pour le radial, C8/D1 pour ladducteur du 5e doigt). Lenregistrement des potentiels voqus est utile la fois au diagnostic et au pronostic [14] et devrait tre plus systmatiquement ralis. Les PEM du membre suprieur sont les plus sensibles pour faire le diagnostic ; la perturbation des PES du nerf mdian et du nerf tibial postrieur est proportionnelle la svrit de la maladie ; la normalit des PES du nerf mdian est corrle un bon pronostic postopratoire.
Neurologie
Traitement mdical
Il ne peut tre que symptomatique et peut apporter une amlioration transitoire dans les formes peu volues ou lorsquil existe une contre-indication la chirurgie et associe : des mdicaments antalgiques de classe I ou II et des dcontracturants musculaires pour soulager les cervicalgies et les douleurs radiculaires ; des anti-inflammatoires non strodiens pouvant agir en diminuant ldme des lsions articulaires et ventuellement des gaines radiculaires ; il y a peu de place pour les corticodes qui peuvent toutefois tre prescrits lors de pousses volutives ; les vasodilatateurs qui nont pas fait la preuve de leur efficacit ; de la kinsithrapie centre sur les muscles paravertbraux, les dficits moteurs des membres suprieurs et les troubles de la marche, associe de la physiothrapie ; les cures thermales qui ne paraissent utiles que pour la prise en charge globale du patient au cours de son sjour ; une immobilisation cervicale pouvant tre propose lorsquil existe des signes cliniques ou radiologiques en relation avec une instabilit, tout en sachant que toute immobilisation prolonge va favoriser les enraidissements articulaires, et latrophie des muscles paravertbraux aggravant cette instabilit ; elle ne peut tre que temporaire et associe une rducation des muscles de la nuque ; enfin, il est dconseill deffectuer des occupations risque soumettant le rachis des microtraumatismes rpts et/ou des traumatismes violents.
Figure 16. Contrle postopratoire tardif (2 ans) dune double discectomie avec arthrodse intersomatique par substitut osseux en hydroxyapatite.
Traitement chirurgical
Le choix de la technique sera guid par lanalyse des signes cliniques et de limagerie mdicale propratoire, en fonction de laquelle sera pratique soit une voie antrieure ralise dans prs de 85 % des cas par les neurochirurgiens europens francophones, soit une voie postrieure ralise dans 15 % des cas, soit une voie combine ralise de faon exceptionnelle. [15]
opratoire. Aprs mise en place dun carteur intersomatique, on pratique lablation complte du disque en laissant les plaques cartilagineuses en place. Sil existe un squestre expuls dans lespace extradural travers une brche du ligament longitudinal postrieur, celui-ci peut tre partiellement rsqu pour accder la totalit du fragment expuls. La rsection des ostophytes est ralise la demande avec des rongeurs de taille adapte en saidant ventuellement dune fraise rotative mche diamante sous contrle de lamplificateur de brillance. On peut effectuer dans le mme temps et par la mme voie une uncusectomie par ablation des 5 mm postrieurs de luncus. La rsection est mene de dedans en dehors avec une fraise rotative de 5 mm et en saidant de microcurettes. Le respect des deux tiers antrieurs de luncus met labri dune lsion de lartre vertbrale et dune instabilit postopratoire. Cette discectomie largie peut tre pratique sur plusieurs tages, habituellement un trois. Une greffe intersomatique complmentaire peut tre ralise ; celle-ci a pour objectifs dviter un pincement discal lorigine de la fermeture des trous de conjugaison et de prvenir une ventuelle cyphose postopratoire, toutefois lanalyse des rsultats cliniques ne montre pas de diffrence significative entre les sries avec ou sans greffe. La meilleure greffe est lautogreffe iliaque tricorticale, mais la morbidit lie la prise de greffe conduit lutilisation dallogreffes, de xnogreffes ou de substituts osseux (Fig. 16). En cas dinstabilit, qui peut sobserver pour des lsions dgnratives trs avances, une ostosynthse antrieure complmentaire peut tre associe la greffe intersomatique. La pratique des neurochirurgiens europens francophones est extrmement variable et repose plus sur lhabitude, les convictions personnelles, lcole et la tradition, que sur une diffrence significative des rsultats : [20] prs de 35 % neffectuent pas de greffe, 26 % une greffe sans ostosynthse, 17 % placent la greffe dans une cage pour en amliorer les proprits mcaniques et 15 % ralisent une greffe et une ostosynthse ; dautres techniques sont parfois utilises.
Intervention de Cloward
Une fois la discectomie et labrasion des ostophytes ralises, la largeur du plateau vertbral est mesure laide dune jauge
de profondeur. Une mche de 12 18 mm de diamtre, choisie en fonction de la morphologie du patient (le plus souvent 14 ou 16 mm), munie dune bute rgle la largeur du plateau vertbral, permet de forer un trou circulaire dun diamtre correspondant, cheval sur lespace intervertbral, entamant les plateaux vertbraux adjacents. Le forage de ce trou permet denlever en totalit et sans risque les bords postrieurs des plateaux vertbraux, sige de la prolifration ostophytique. Une trphine dun diamtre lgrement suprieur permet de tailler le greffon iliaque dont le diamtre extrieur est gal au diamtre intrieur du trou intervertbral ; ainsi le greffon sencastre de faon parfaite dans le logement ralis. Toutefois, et cest la principale limite de cette technique, lpaisseur de la crte iliaque, o est prlev le greffon, est souvent infrieure la largeur de lespace intervertbral, le greffon se trouvant ainsi souvent trop court .
Somatotomie mdiane
La voie dabord est classique jusqu la face antrieure des corps vertbraux dont il faut raliser la somatotomie. [21] Deux techniques sont alors possibles : si les disques sont encore prsents, il faut pratiquer un abord intersomatique classique avec rsection des disques aux extrmits de la zone dcomprimer ; si la dgnrescence arthrosique dforme la face antrieure de la colonne, avec des ostophytes antrieurs, parfois asymtriques, le reprage des limites de la tranche cervicale est plus difficile. Gnralement les disques intervertbraux sont compltement affaisss, rendant labord transdiscal impossible. On pratique alors un abord transcorporal mdian la fraise coupante au dbut, puis la fraise diamante jusqu proximit du ligament vertbral commun postrieur. La somatotomie est commence la pince-gouge, puis la fraise mcanique sur une largeur de 10 mm jusqu la corticale postrieure qui est enleve au rongeur de 1 2 mm dpaisseur. Au contact de la dure-mre, la somatotomie est largie jusqu 12 ou 14 mm. Pour obtenir une dcompression mdullaire satisfaisante, lensemble des barres disco-ostophytiques prmdullaires traumatisantes doit tre rsqu, la rsection osseuse doit intresser aussi les plateaux des vertbres adjacentes la tranche osseuse. De mme le ligament longitudinal postrieur est rsqu si possible, mais son adhrence la dure-mre peut rendre ce geste difficile. En fin dintervention, la rexpansion du fourreau dural et de la moelle pinire apparat nettement comme aprs une laminectomie cervicale, la tranche a une forme de queue daronde, plus large en arrire au contact de la moelle pinire quen avant. De part et dautre, la portion latrale des corps vertbraux, au niveau des uncus, est respecte pour maintenir la stabilit rachidienne. Ltendue en hauteur de la somatotomie est choisie en fonction des explorations radiologiques propratoires, essentiellement lIRM. Pour la majorit des auteurs, la tranche osseuse est comble par une autogreffe iliaque ou pronire (ventuellement associe une ostosynthse) qui prvient le risque de cyphose postopratoire (Fig. 17). Comme pour les discectomies, les pratiques sont variables : 18 % des neurochirurgiens europens nutilisent pas de greffe, 16 % utilisent une greffe encastre sans ostosynthse et 66 % une greffe encastre associe une ostosynthse. La greffe ne semble pas ncessaire si lon a pris la prcaution de respecter les uncus et si lon ralise une rducation active des muscles de la nuque (Fig. 18,19).
Figure 17. Radiographie de contrle aprs somatotomie mdiane, greffe intersomatique et ostosynthse antrieure tendue (technique que nous ne recommandons plus !).
Figure 18. Scanner postopratoire aprs somatotomie mdiane longitudinale sans greffe ; noter ltendue de la dcompression myloradiculaire.
Laminectomie
Cest la plus ancienne technique ralise. Dans un premier temps, les apophyses pineuses des vertbres dont on doit effectuer la laminectomie sont sectionnes leur base, au ras de leur insertion sur les lames. La rsection osseuse emporte en bloc toutes les pineuses sectionnes et le ligament interpineux. La laminectomie proprement dite est ralise de proche en proche par morcellement des lames laide de rongeurs fins, voire la fraise mcanique. Elle est conduite aussi loin que possible latralement, intressant parfois la partie interne des massifs articulaires, dont les deux tiers externes doivent tre imprativement respects pour ne pas crer dinstabilit. Le ligament jaune est habituellement fragment en mme temps que la rsection osseuse. Ce temps doit tre conduit avec la plus grande prudence compte tenu de ltroitesse du canal rachidien et de la disparition de lespace pidural postrieur provoque par la maladie et aggrave par la position opratoire. Une laminectomie peut entraner long terme une cyphose ; elle apparat plus la consquence de linsuffisance des muscles de la nuque que de linstabilit osseuse et ligamentaire induite par la chirurgie ; elle peut tre prvenue par une rducation prcoce adapte. Des reprises volutives de la maladie sont
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comme on ouvre un portail doubles vantaux. Il est conseill dinterposer des cales de substitut osseux entre les deux moitis des pineuses pour les maintenir cartes. Laminectomie avec conservation des pineuses Dcrite par Gros au niveau du rachis lombaire, elle consiste naborder quune seule gouttire paravertbrale et par cette voie sectionner les apophyses pineuses au ras de leur insertion sur les lames. Lensemble constitu par les pineuses et le ligament interpineux est refoul au-del de la ligne mdiane, ce qui expose les lames. La laminectomie est alors conduite de faon conventionnelle. Lors de la fermeture des masses musculaires, le ligament interpineux et les pineuses retrouvent naturellement leur place sur la ligne mdiane. Laminectomie alterne ( skip laminectomy ) [25] Elle nintresse quune lame sur deux : pour raliser par exemple une dcompression de C3 C7, seules les lames de C4 et C6 sont rsques et la dcompression est assure par rsection de la face ventrale des lames adjacentes laisses en place. De plus, le ligament interpineux est respect : les lames que lon veut rsquer sont abordes par section de lpineuse sur la ligne mdiane laide dune microfraise rapide ; chaque portion de lpineuse est refoule latralement en conservant linsertion des muscles suprapineux.
Figure 19. Imagerie par rsonance magntique pondre en T1, coupe sagittale : aspect postopratoire aprs somatotomie mdiane longitudinale de C5 sans greffe largie aux disques adjacents, la cicatrice apparat en hypersignal comme le tissu graisseux.
Ostosynthses postrieures
En raison du risque de cyphose, certains auteurs ont propos la ralisation systmatique dune ostosynthse postrieure complmentaire. Celle-ci nous parat devoir tre rserve aux rares cas o la dcompression chirurgicale impose une rsection des massifs articulaires et o il existe une instabilit propratoire. La meilleure technique est lostosynthse par plaques mtalliques visses dans les massifs articulaires associe une greffe postrolatrale.
parfois observes aprs une laminectomie et ont t rapportes la constitution dune fibrose pidurale compressive (membrane postlaminectomie) dont le rle pathogne est trs discutable. [22]
Interventions combines
En cas de stnose svre, un abord double dans le mme temps opratoire ou dans deux temps successifs peut tre ralis : dans ce cas, le risque dinstabilit postopratoire est relativement lev ; la chirurgie dcompressive doit tre accompagne dune greffe et dune ostosynthse antrieure par plaques visses dans les corps vertbraux.
Indications
Les formes frustes et dbutantes chez le sujet g peuvent justifier un traitement mdical dpreuve, sous surveillance clinique rgulire. Le traitement chirurgical ne doit pas tre retard chez les sujets jeunes et devant toute forme volutive : il a t montr que, plus que lge, la svrit de la maladie, le nombre de niveaux oprs et le score propratoire, cest la longueur dvolution des symptmes qui influence le plus les rsultats. Limagerie permet de faire le bilan des lsions : diamtres antropostrieur et transversal du canal rachidien ; aspect global ou segmentaire de la stnose ; nombre dtages atteints ; sige antrieur ou postrieur prdominant de la compression ; compression mdiane ou latrale ; instabilit ventuelle associe la stnose apprcie sur des clichs dynamiques prudents ; tat de la moelle pinire : aspect atrophique, hypersignal centromdullaire{ Les potentiels voqus (somesthsiques et moteurs) peuvent aider au choix de la voie dabord en cas de difficult didentification des lments compressifs responsables : antrieurs ou postrieurs. La voie dabord, antrieure, postrieure ou mixte, ltendue de la dcompression et lindication dune ostosynthse complmentaire seront choisies en fonction des rsultats de ces
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examens, tout en sachant que la voie dabord antrieure sera privilgie en fonction de sa simplicit et de son efficacit.
antrieure ou postrieure ou de rcidive des signes cliniques aprs une phase damlioration. Labord double peut dstabiliser le rachis cervical ; le second temps opratoire doit tre accompagn dune ostosynthse complmentaire. Si un abord double est pratiqu de faon systmatique, lostosynthse avec greffe intersomatique doit tre ralise par voie antrieure, cest l quelle possde les meilleures qualits biomcaniques.
Indications de la discectomie
Une discectomie simple un, deux ou trois tages peut tre utilise, si les lsions sont limites ltage discal, responsables dune stnose canalaire segmentaire, avec lments compressifs proximit de la ligne mdiane. De mme labord antrieur peut tre utilis en complment dune voie postrieure sil persiste des facteurs compressifs antrieurs ou pour combattre une volution cyphosante postlaminectomie. Lutilisation dune greffe intersomatique complmentaire est plus affaire dcoles que de qualit des rsultats radiocliniques long terme ; en rgle gnrale, la greffe diminue limportance des rachialgies postopratoires et la frquence des cyphoses tardives, sans pouvoir les faire disparatre compltement. Une ostosynthse complmentaire nest quexceptionnellement indique en cas dinstabilit propratoire ; une discectomie isole correctement ralise ne dstabilise pas le rachis.
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lhypersignal centromdullaire en T2 sur lIRM comme indiqu plus haut na pas de signification pronostique ; linstabilit propratoire, qui sobserve surtout chez les sujets les plus gs, ne parat pas influencer le pronostic. [30]
Complications gnrales
Communes tous les gestes chirurgicaux, elles sont rares, de lordre de 1 %. Cette chirurgie ne doit pas tre redoute quel que soit lge du patient ds que le handicap fonctionnel la justifie. Il y a peu de contre-indications.
Aggravations neurologiques
On les observe quelle que soit la voie dabord : une complication frquente des dcompressions tendues (mais peu souvent signale dans les publications et les compte rendus dhospitalisation) est la paralysie de la 5e et/ou de la 6e racine cervicale qui sobserverait dans 5 15 % des cas. Son mcanisme physiologique nest pas clair ; il est possible quintervienne linstallation du malade sur la table dopration, une lsion de lartre radiculaire, mais aussi une fragilit particulire de cette racine qui serait tire lorsque la moelle se dplace aprs la dcompression. [33] Elle est habituellement rgressive ; les aggravations de la smiologie clinique sobservent dans 0,5 2,5 % des cas selon les sries. Elles sont le fait dun traumatisme mdullaire qui peut se produire lors de linstallation du patient (tte trop flchie pour les abords postrieurs par exemple) ou lors de la ralisation de la rsection osseuse qui impose dintroduire des instruments fins (curettes, rongeurs ou fraises mcaniques{) dans un canal rachidien trs rtrci. Des phnomnes vasculaires peuvent tre parfois lorigine de ce type de complication. Le geste probablement le plus dangereux est la rsection des calcifications ostodiscales, incluses dans la face antrieure de la dure-mre quil vaut mieux ne pas chercher enlever tout prix, limitant alors le geste la dcompression. Pour cette raison, les interventions par voies postrieures paraissent devoir tre privilgies en cas dossification exubrante du ligament longitudinal postrieur. Lvolution de ce type de complication est imprvisible, elle dpend de la svrit du syndrome neurologique constat au rveil ; certaines ttraplgies peuvent tre dfinitives.
configuration des autogreffes ou dun choix inappropri des substituts osseux. Certains chirurgiens conseillent le port dun collier cervical pendant plusieurs semaines ; il nest pas dmontr que ceci diminue la frquence de cet incident. Les dplacements du matriel dostosynthse utilis en complment dun abord antrieur sobservent dans 3 6 % des cas, ce qui peut entraner une dstabilisation rachidienne et/ou une plaie de la paroi postrieure de lsophage. Ce chiffre diminue avec lexprience du chirurgien et lemploi gnralis de systmes incluant un verrouillage des vis. Ces nouveaux matriels ont annul le dbat qui opposait les partisans dun vissage unicortical ceux du vissage monocortical. De plus, le profil des vis a t beaucoup amlior, au point que tout dbricolage est devenu exceptionnel ou la consquence dune faute technique. Des douleurs squellaires au niveau du site de prlvement des greffons sont observes dans plus de 20 % des cas ; ce chiffre relativement lev incite beaucoup de chirurgiens ne pas utiliser des autogreffes dans le cadre de la pathologie dgnrative, mme sil sagit, et de loin, du meilleur greffon. [34] Une cyphose postopratoire est frquemment observe, tant aprs abord antrieur que postrieur. La ralisation dune greffe et/ou dune ostosynthse diminue ce risque mais ne le supprime pas, tout en alourdissant les gestes opratoires. Cette cyphose parat plus en relation avec linsuffisance des muscles de la nuque (qui pour nous doivent bnficier dune kinsithrapie postopratoire) quavec ltendue de la dcompression. Le port prolong dun collier pourrait favoriser latrophie des muscles paravertbraux et augmenter le risque de cyphose. Enfin, le respect des uncus lors des voies antrieures et de la moiti des articulaires lors des voies postrieures diminue la frquence de ces complications. Cest ainsi quil a t montr quune greffe intersomatique ntait pas indispensable aprs une somatotomie mdiane, [35] ce qui diminue le risque de complication et le cot de lintervention. Les laminoplasties, pour beaucoup dauteurs, diminueraient le risque de cyphose par rapport aux laminectomies, ce qui nest pas dmontr dans la mta-analyse effectue par Ratliff et Cooper en 2003. [23] Aprs une laminectomie se constitue une cicatrice sclreuse (membrane postlaminectomie) qui pourrait tre, selon un grand nombre dauteurs, lorigine de la dgradation tardive du rsultat postopratoire. Cest lune des autres raisons qui ont amen le dveloppement des laminoplasties. En fait, il semblerait que cette cicatrice fibreuse nait aucun rle pathogne. La fusion dun ou plusieurs segments cervicaux entrane une dgnrescence prcoce des tages adjacents, ce qui pourrait tre lorigine dune pathologie nouvelle chez 3 % des patients chaque anne, et au terme de 10 ans, 15 20 % des patients devraient subir une nouvelle intervention. [36] Dans notre exprience, ce chiffre est nettement moins lev et il a t montr que si ces lsions sont frquentes, elles sont le plus souvent asymptomatiques. [37] Il nest pas dmontr ce jour (faute de recul clinique suffisant) que lusage de prothses discales cervicales diminue ce risque de faon significative. Toute intervention sur le rachis cervical (avec ou sans fusion) entrane une limitation de lamplitude des mouvements cervicaux ; celle-ci reste en gnral peu invalidante, bien compense par les tages adjacents, ceci dautant plus quil sagit le plus souvent de patients gs, dont lactivit est diminue et qui prsentent des lsions dgnratives diffuses de lensemble du rachis. Malgr la longue liste de ces complications potentielles qui chacune prise isolment (en dehors des douleurs squellaires du site donneur) sont relativement exceptionnelles, il ne faut pas retarder le moment du traitement chirurgical chez un patient prsentant des signes neurologiques, en relation avec une mylopathie cervicale.
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J. Brunon, Professeur des Universits, praticien hospitalier (jacques.brunon@chu-st-etienne.fr). C. Nuti, Praticien hospitalier. R. Duthel, Praticien hospitalier. M.-J. Fotso, Praticien hospitalier. B. Dumas, Assistant-chef de clinique. Service de neurochirurgie, Hpital de Bellevue, centre hospitalier universitaire de Saint-tienne, 17, boulevard Pasteur, 42055 Saint-tienne cedex 2, France. Toute rfrence cet article doit porter la mention : Brunon J, Nuti C, Duthel R, Fotso M-J, Dumas B. Mylopathies cervicales. EMC (Elsevier SAS, Paris), Neurologie, 17-660-A-10, 2005.
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