Etude D'exil
Etude D'exil
Etude D'exil
TENTATIVE D’INTERPRETATION
D’EXIL
La poésie de Saint – John Perse est d’un abord difficile, mais cette
difficulté n’est ni gratuite ni insurmontable ; Saint – John Perse conçoit la
poésie comme une tâche noble qui exige un effort d’exploration d’une
réalité lointaine qu’il faut aller trouver aux confins du senti et du connu.
Cette rencontre et l’investigation qui en résulte, se font dans des conditions
particulières de péril, de souffrance et d’obscurité. Il s’ensuit que
l’expression est obscure sinon inintelligible. Dans le discours de Suède
qu’il prononce quand il reçoit le Prix Nobel, il déclare : « L’obscurité
qu’on lui (à la poésie) reproche ne tient pas à sa nature propre, qui est
d’éclairer, mais à la nuit même qu’elle explore, et qu’elle se doit
d’explorer ; celle de l’âme elle-même et du mystère où baigne l’être
humain. »4
LE CHOIX DE LA MOBILITE
Dans Exil, Saint – John Perse pense que toute existence installée et
ancrée dans un espace et une culture, finit par se trouver à l’étroit ; ce
milieu restreint devient un piège pour cette existence qui s’appauvrit et
dégénère. Saint John Perse pose à nouveau à l’instar d’autres poètes le
problème du rapport à la terre ; comme Hölderlin et comme René Char, il
opte pour une occupation poétique de la terre où l’homme est obligé de
préserver la grandeur et la beauté de la terre. Pour donner à la vie richesse,
variété et capacité créative, il se doit d’adopter un mode de vie poétique
caractérisé par l’ouverture d’esprit, par l’éveil de la conscience et des sens
à toutes les dimensions de la vie sur terre. « Mais plus encore que mode de
Une attitude est librement adoptée, une décision difficile est prise.
L’exil est voulu et assumé au début de ce recueil ; l’allusion à la maison
que l’on quitte pour entrer dans ce désert ou cette mer qu’évoque de façon
métaphorique l’exil et les sables. Dans les deux phrases nominales qui
ouvrent le poème initial d’Exil, le parallélisme syntaxique permet en effet
de rapprocher deux phénomènes distincts, les sables et l’exil.
L’inachèvement des deux phrases s’explique sans doute par le principe de
mobilité et de rapidité qui revient dans l’ensemble de l’œuvre de Saint –
L’ECLIPSE DU DIVIN
Dans, Exil aussi, Saint – John Perse exige cette vigilance surtout
lorsque le bonheur menace d’envoûter le poète pour ensuite le plonger dans
le bourbier de l’aisance et du plaisir ; pour affronter le confort et résister à
« l’aigle équivoque du bonheur, il doit imposer silence à sa sensualité, à sa
sensibilité : « Tais-toi, faiblesse, et toi, parfum d’épouse dans la nuit (…)
Tais-toi, douceur, et toi présence gréée d’ailes à hauteur de ma selle. »13
L’ADVERSITE
LE CHOIX DE L’EXTREME
Nous avons déjà dit que l’exil n’était pas une fatalité que le poète
était obligé d’accepter. L’exil est un acte libre et volontaire. Saint – John
Perse le répète deux fois. « J’élis un lieu flagrant et nul »15 ; et il ajoute
dans le chant suivant : « J’ai fondé sur l’abîme et l’embrun et la fumée des
sables. »16 Mais cet acte constitue pour l’esprit et le corps une gageure et
un scandale ; les sévices qui y sont récoltés, en font une véritable traversée
du désert. Sur le plan intellectuel, cet acte reste inintelligible, presque
dément. Saint – John Perse, pour en souligner la gravité et la radicalité,
recourt à plusieurs reprises à l’oxymore. Quand il affirme qu’il choisit
d’explorer « un lieu flagrant et nul comme l’ossuaire des saisons », la
contradiction est évidente entre le caractère local et ponctuel du mot lieu et
la négation de cette limitation, de cette détermination qui est due à la
seconde épithète nul. Un lieu nul est en effet une contradiction qui
empêche l’intégration du sens du syntagme, sauf si l’on accepte d’atténuer
ou d’effacer l’un des termes de la contradiction. Une autre oxymore est là
encore dans le second poème quand il écrit : « J’ai fondé sur l’abîme et
l’embrun et la fumée des sables. » Fonder, édifier quelque chose sur rien
étant impossible, une contradiction nette oppose le verbe fonder et son
complément circonstanciel sur l’abîme. Le poète avait déjà répété
auparavant son attachement à une gloire qui n’en est pas une : « Ma gloire
est sur les sables ! Ma gloire est sur les sables !... »16 bis La même
contradiction oppose ici encore la gloire qui présuppose célébrité,
LA NUIT / L’INCONNU
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La traversée du désert n’est pas une étape provisoire qui une fois
accomplie, donne au poète le droit de s’établir et de se reposer ; l’exil a un
caractère durable, permanent qui semble transformer la vie réellement
vécue en une traversée du désert. Saint – John Perse le répète tout au long
d’Exil : « L’exil n’est point d’hier ! L’exil n’est point d’hier ! »25
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LA RENCONTRE
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LA JOUTE
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L’INSPIRATION
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LA TRANSFIGURATION
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LE PAYS NATAL
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LE RETOUR DU DIVIN
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DETRESSE ET ABANDON
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DESTINATAIRES DU MESSAGE
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LUCIDITE CORROSIVE
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CONCLUSION
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On peut dire que cette œuvre recèle un sens fort intéressant pour le
lecteur qui a assez se patience et de persévérance pour fournir l’effort
nécessaire qui lui permettrait d’y pénétrer et de le saisir. C’est une œuvre
qui rappelle la piètre situation de l’homme faite de solitude et de
dénuement face à des forces destructrices qui le dépassent ; c’est une
œuvre qui nous incite néanmoins à restaurer et à sauvegarder notre dignité,
à assumer la tâche qui nous incombe et qui consiste à nous tenir
constamment éveillés, à donner à l’âme la primauté sur le corps, à tendre à
l’autodépassement.
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Introduction P.2
Le choix de la mobilité P.4
L’éclipse du divin P.6
L’adversité P.7
Le choix de l’extrême P.8
La nuit / l’inconnu P.9
La traversée du désert P.11
Philosophie de la destruction P.11
La rencontre P.12
La joute P.15
Renversement des valeurs P.16
L’inspiration P.17
La transfiguration P.18
Le pays natal P.19
Le retour du divin P.20
Détresse et abandon P.21
Destinataires du message P.22
Lucidité corrosive P.24
Conclusion P.26
Notes P.28
Bibliographie P.32
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