Examen de La Philosophie de Bacon PDF
Examen de La Philosophie de Bacon PDF
Examen de La Philosophie de Bacon PDF
philosophie de Bacon :
o l'on traite diffrentes
questions de
philosophie rationnelle
(7e d.) ouvrage [...]
Source gallica.bnf.fr / Bibliothque nationale de France
Maistre, Joseph de (1753-1821). Examen de la philosophie de Bacon : o l'on traite diffrentes questions de philosophie rationnelle (7e d.) ouvrage posthume du Cte Joseph de
Maistre,.... 1864.
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PHILOSOPHIE DE BACON
OUiL'ONTCAtTE
DIFFRENTES QUESTIONS
DE PHILOSOPHIE RATIONNELLE
OCVBAGEtOSTBCME
DU COMTE
J OSEPH BE MAtSTBE
Autenr des Soirfcs do
Sait~P~tersbourj;,
cte.
J . B.
PLAGAUD,
IMPRIMEUR-LIBRAIRE
DE N. S. P. LE PAPE.
LYON,
GRANDE RUE
MERCIRE,
?4.8.
EXAMEN
DELA
SMt\tM tM'HO~.
oO~C*
TOMEI.
~~<B<
PARIS,
0 RUE DE
TOURNON,
K"5.
ISCt.
EXAMEN
DE
LA PHILOSOPHIE
nn nn
fntu
DE BACON.
Tout
exemplaire
non revtu de ma
signa-
ture est
rput
contrefait.
Imprimerie
(te.t.B.P~LAf.mc. t.YO~.
EXAMEN
DB
LA PHILOSOPHIE
DE BACON.
l'
CHAPITRE
PREMIER.
NOVUM OEGANUM, 00 NOUVEL INSTRUMENT.
Induction et
SyMogisme.
BACON lui-mme nous a trac le
plan
d'un
examen de sa
philosophie
car d'abord il a
manifest la
prtention,
renouvele de nos
jours
de
re/eHre
fe~e~e?MeM< humain et de
lui
prsenter
un ?MMt~
MM~'Mne~(l),
fait
())
M.
Lasalle,
traducteur de
Bacon,
avertit
qu'il
a mieux
aimlaisser subsister le
titre latin de~Vouttm
Organum ~ue
TOMB I. 1
KBCCTtOPt 2
pour procurer
au
genre
humain des succs
inaccessibles
l'ancienne
mthode
puis
il a
employ
sous nos
yeux
ce mme
M~rKMe~
afin de nous montrer comment on devait s'en
servir
pour
s'avancer
davantage
dans l'tude
de la nature et
perfectionner
ainsi les sciences
physiques
premier,
ou
plutt unique objet
de toutes ses
spculations.
Il fautdonc d'abord
examiner ce Mom~
m~n<me~,
et montrer en-
suite
l'usage que
Bacon en a fait. En d'antres
termes,
il faut le considrer d'abord comme
lgislateur,
et voir
ensuite
puisqu'il
a eu la
prtention
de donner la fois
l'exemple
et le
prcepte,
de
quelle
manire il a excut ses
propres
lois,
et
jusqu'o
il s'est lev
par
sa
mthode.
L'tat des sciences dans le sicle o il vi-
vait,
tel
qu'il
nous le
reprsente
toutes les
pages
de ses
crits,
n'tait
qu'un
roman de
d'employer
cetui de ~Vout'~
Organe qui
ne russirait
pas
dans
notre
langue.
Il a oub)i une raison dcisive de ne
pas
em-
ployer
cette J ernire
expression;
c'est
qu'elle
n'est nulle-
ment la tradoction de )a
premire.
Mais rien
n'empche
de
dire Nouvel
/r<r!<Men<,
car c'est ce
que
veut dire ~VeetMn
0)~a?))fm.
M tYt.LOGtSME. 3
t~ge
1.
son
imagination;
car les sciences taient alors
dj
trs-avances,
et telles absolu ment qu'elles
devaient tre cette
poque.
L'erreur de Ba-
con sur ce
point
avait deux sources en
pre-
mier Heu
l'ignorance, qui
le rendait tran-
ger
toutes les brandies des sciences natu-
relles et,
de
plus,
ce malheureux
orgueil
cach dans les
replis
du cur
humain
qui
porte
l'homme,
mme sans
qu'il
s'en
aper-
oive,
ddaigner
tout ce
qu'il
ne sait
pas,
tout ce
qu'il'ne comprend pas
tout ce
qu'il
n'aime
pas.
Le seul moine de son
nom,
dont Bacon
parle
assez
lgrement
(1)
avait mis dans ses
crits infiniment
plus
de vrits
que
le chan-
celier
d'Angleterre
n'en connaissait et mme
qu'il
n'en
pouvait comprendre,
s'il et entre-
pris
de les tudier.
Copernic, Tycho, Kep-
pler,
VieUe, Fermat,
Grgoire
de Saint-
Vincent,
Boyle
Kook, Galile Descartes,
(1)
Thtcor)~
0/'France Bacon,
taroM
o/'
Verulam,
vis-
count
Saint-Alban
w ten volumes. London, 1803 t)t-8
<0)?).
tx
Imprlus philos. cap. H p.
308.
C'est t'cdiiion
que je
citerai constamment dans cet ou-
INDUCTION 4-
Grcgory,
Borelli Kircher etc. etc.,
furent
ses
contemporains,
ou le touchrent de
prs.
-Quand
on se
permet
de
compter pour
rien les
travaux de ces
grands
hommes,
et
d'en par-
ler mme avec un extrme
mpris,
il est ais
de calomnier l'tat de la
science
mais ces ca-
lomnies ne
prouvent
rien,
sinon
qu'il'
et
mieux valu tudier leurs
ouvrages que
les
critiquer.
J e ne sais
pourquoi
il
plut
d'Alem-
'bert de nous dire
que
Bacon tait n ~6HM le
sein de MM~la
plus pro/b~e.
Rien n'est
plus
videmment faux. Les beaux-arts et la
littrature avaient t
ports
dans le xvi si-
cle au
plus
haut
point
de
perfection.
Il serait
ais de
prouver,
ou,
pour
mieux
dire
il serait
inutile de
prouver que l'Europe
en savait,
cotte
poque, beaucoup plus que
les Grecs du
sicle de Pricls. Si Bacon
n'aperut pas
la
nouvelle
lumire,
ce fut sa faute. De
grandes
dcouvertes avaient t faites dans les scien-
ces
le mouvement
gnral
tait
donn
rien
ne
pouvait plus
l'arrter,
et certainement il
ne devait rien
Bacon,
absolument inconnu
et sans influence hors de son ile.
Pour dfendre son rve favori de l'abrutis-
sement
gnral,
il
se permet
les
plus tranges
M YLLOCtSME E s
paradoxes
il nous
dira
par exemple, <~ne
les arts
Hteca?M~tMN,
comme
par<!C!p6[m<
la
vie,
7):6crc/te~< en
s'avanant,
tandis
que
la
philo-
sophie,
M'e~M~
~M'~t/ze
s<a<:(e,
!.e
re/~Me
/?o~
~MO!<j'M''o~
roK~ore
(1).
Il serait inutile d'insister sur la fausset de
cette
proposition, qui,
de son
temps
mme,
n'tait
pas
tolrable. On voit ici
Bacon
ds
le
premier pas,
tel
qu'on
le verra dans le cours
entier de cet
ouvrage
rarement il rsiste
l'envie d'tre
pote. L'image
se
prsente
avant
tout son
esprit,
et le contente.
Quant
la.
justesse,
c'est autre
chose.
Les
exemples
se
prsenteront
en foule dans cette
analyse.
Bodley, que.
sa
bibliothque
a
immortalis
et
qui
tait un homme de
beaucoup
de
sens,
crivit
Bacon,
sur sa chimre
fondamentale,
une lettre
qui
se trouve dans les OEuvres de ce.
dernier,
et
qui
est
trs-remarquaMe
Per-
mettez-moi,
lui
dit-l!,
de vous le dire fran-
chment
je
ne
puis comprendre
vos
plaintes.
J amais on ne vit
plus
d'ardeur
pour
les sciences
que
de nos
jours.
Yous.
(<) Opp.
tom,
vu,
de
Augm.
Scient, in
Ptsef. n..
M.
6
INDUCTION.
reprochez
aux hommes de
ngliger
les ex-
<'
priences,
et sur le
giobe
entier on ne fait
que
des
expriences (1).
Cette observa-
tion ne souffre
pas
de
rplique.
L'homme
qui
se
trompait
ainsi sur l'tat
des sciences ne se
trompait pas
moins sur les
moyens
de sortir de ce
prtendu
tat de bar-
barie
qui
n'existait
que
dans son
imagina-
tion malade
d'orgueil.
Le titre mme de son
principal ouvrage
est
une erreur
insigne.
Il
n'y
a
point
de nouvel
or<y<me,ou, pour parler franais,
denoMue~
/?M~M/?!CM<avec
lequel
on
puisse
atteindre ce
qui
tait
inaccessible
nos devanciers. Aris-
tote est le vritable anatomiste
qui
a,
pour
ainsi
dire,
(Mmo~e sous nos
yeux
et dmontr
i!~M~'ttme~/t!(m<MM. On ne doit
que
des rises
celui
qui
vient nous
promettre
un nouvel
homme. Laissons cette
expression l'EvangHc,
L'esprit
humain est ce
qu'il
a
toujours
t.
Possesseur de vrits terncHes
qui
sont lui-
(1)
Ej)ist.
Thom. Bodlaci ad Francise.
Baconum
qu
can-
<)ide
expendit ejus Cogitata
et Visa. Fuiham
,19
febr. 1607.
Kx
angticu
latinam fecit Is. Gruterus.
(Works,
tom.J ~,
~.193-sqq.)
ET SYHOOSME.
mme,
il est
deplus~aro~e
ctac~b/i. Per-
sonne ne
peut
trouver en lui
plus que
lui..
Croire la chose
possible,
c'est la
plus grande
de toutes les
erreurs;
c'est ne
pas
savoir se
regarder.
Si l'homme se sert mal de ses facul-
ts il a
tort,
comme il aurait
tort,
par
exem-
ple,
s'il
employait
un levier
pour
arracher
des laitues dans son
jardin
mais il ne s'en-
suit
pas que
le levier soit
mauvais,
ni surtout
qu'il
faille
employer
un nouveau
/eu!'c~,
puis-
que
le levier de
l'espce
une fois choisie sera
ternellement le
mme,
et
que
tout se rduit
au
plus
et au moins de force
Intrinsque, pr-
cismentcomme
dans
l'esprit
humain. IIs'en-
suit seulement
qu'il
faut
employer
le levier a
propos.
Il
peut y
avoir dans les sciences
particu-.
lires des dcouvertes
qui
sont de vritables
MMC/H'~M
trs-propres
perfectionner
ces
sciences ainsi le
ca/ct<7~'~ere?~'e~
fut utile
aux
mathmatiques
comme
la roue denteler
le fut
l'horlogerie.
Mais
quant
la
phitoso-
phie
rationnelle.
il est visible
qu'il
ne
peut y
avoir de ?!ouue~
!!M~:w!p~,
comme
il
n'y en
a
point pour
le
gnie
des arts
mcaniques
en
gnral.
!XDUCT!ON 8
Bacon ne cesse de nous dire avec une mo-
destie
apparente,
dont il ne faut
point
tre la
dupe, qu'il
serait excessivement difficile de
tracer
un cercle
parfait,
ou
mme
une
ligne
droite,
' l'homme
qui
ne se
servirait
que
de
sa main et de ses
yeux,
en le
supposant
mme
pourvu
des
organes
les
plus parfaits
tandis
que
ces
oprations
ne seront
qu'un jeu pour
celui
qui
s'aidera d'une
rgle
et d'un com-
pas (1),
Toujours
une
image
ou une
comparaison
la
place
du raisonnement C'est la manire
ternelle de Bacon. Il ne
s'agit
point
ici de
l'MM~e
du
compas, qui
est
commun
tous les
hpmmes,
il
s'agit
du
compas
mme. On de-
mande s'il
peut y
avoir un nouveau
compas,
et
c'est ce
que je
nie. L'homme
peut
sans doute
apprendre par
l'exercice
se servir
plus
~ea?-
trement de
son
compas
comme
de son
esprit;
mais le
compas
sera
toujours
le
mme, sauf
toutefois une
plus
ou moins
grande
perfection
dans
l'instrument,
comme il
peut y
avoir
des
esprits plus
ou moins heureusement
ns,
quoi-
(p
yputMK
Organum i.x!)
Opp.
tpm. vm, p. ~7.
9
ET
SYLLOGISME.
1
que
tous soient les mmes dans leur es-
sence.
L'orgueilleuse
mdiocrit de Condillac a
pu
rendre
plus piquant
de nos
jours
le
projet
ri-
dicule de
refaire
l'entendement AmHfHM. Au
fond, nanmoins,
le
projet
et
l'expression
appartiennent
Bacon
(1),
et c'est
purement
2t
simplement un
acte de folie et rien de
plus.
Refaire l'entendement humain
pour
le rendre
plus propre
aux
sciences,
ou refaire le
corps
humain
pour
le rendre
plus propre
la
gym-
nastique,
c'est
prcisment
la mme ide.
J 'honore la
sagesse qui
propose
un nouvel
organe
autant
que
celle
qui proposerait
une
nouvelle
jambe.
Ces
~e~o~M,
ces Instaura-
tions,
ces Nouveaux
organes,
ces
E7<!?MpMo-
sophiques,
etc.
ne sont
que
des mots
qui
ne
doivent
point
tre
pris
la
lettre,
des
jeux
(1) Nos
qui
nec
ignari
fumtt ttec o~t'tt
~Man<um opm
aggrediamur
videlicet ut
faciamus
tn<e~ec<um /mm<tnMn)
rebus
<:<tta<Mf<B
parem.
(Nov.
Org.
t.
vm 19,
p.
109.)
7}M<a< unica salus ac sanitasut
op~
mentis universum n<
<n<e~ro
resumatur.
(Ibid.
in
pr<B~.)
Ainsi Bacon voulait
seulement refaire
l'intelligence humaine,
et refaire tout
ce
qu'e)!e
a
fait
pas
dara!)<o~e~
(
!KDUCT!0!< <0
d'esprit qui peuvent
tout
auplus
servir d'exem-
ples,
mais
jamais
de
moyens.
C'est ainsi
que
r~r<
potique
d'Horace ou celui de Boileau
peuvent
tre utiles un
pote
comme mo-
dles de
posie,
mais
point
du tout comme'
moyens
de crer des
pomes;
car il ne
peut
y
avoir de
moyens
artificiels de crer ou d'in-
venter.
Lorsque
Descartes
part
de son doute uni-
versel,
on
peut
l'couter avec les
gards
dus
un homme tel
que
lui,
et recevoir son doute
comme une
rgle
de fausse
position qui
ne
saurait avoir de
grands
inconvnients. Dans
le
fond, nanmoins,
la
rgle
est
impossible
et
la
supposition chimrique
car il ne
dpend
de
personne
de commencer
par
ce
doute,
et
chaque philosophe
s'lance ncessairement
dans la carrire avec toute la masse de con-
naissances
qu'il
a trouve autour de lui.
Tout novateur invente un mot
qui
sert de
point
de ralliement ses
disciples
s'il doit en
avoir. Bacon avec son
nduclion,
Kant avec sa
fn'~te,
Condillac avec son
f<Ma/y~('(l),
ont
)
Cctui-ci est un vri~b'H
p;)no!))ne
J e notre
Sgc.
A
El SYU.OOSME.
01
enrl la foule. Ils ont fait
secte
c'est--dire
que l'orgueil
national n'a
pas ddaigne de
marcher la suite de
l'orgueil
individuel
qui
s'annonait
comme un
grand
inventeur. Dans
le fait
cependant
ces mots ne sont
que
des
illusions;
car il ne
peut y
avoir de nouvelle
science de
l'intelligence,
ni surtout de nouvelle
mthode
pour
dcouvrir.
L'orgueil peut
seule.
force d'effronterie et de
persvrance
il est
parvenu,
non
pas
croire
(ce qui parait impossible),
mais faire croire
que
son
analyse
tait une science relle et
nouvelle
une
science de
sa
faon, parfaitement
inconnue avant lui. Insen-
siblement il en est venu dire mon
analyse,
mes
anafj~M
comme on dit mon cheval ou ma matson. Tantt il amuse et
tantt il
impatiente,
mais nulle
part je
ne l'ai trouv
plus
ineflahie
que
sur la
question
de i'ame des btes. Les
pMo-
sophes,
dit-il
(
c'est--dire tous les
philosophes jusqu'
lui,
cela
s'entend),se
sont trouvs
fort
e~arras.<M sur cette
ques-
lion
faute
a'aMtt' connu SES ANALYSES.
Quant
lui il
a saisi sisment la vrit avec son nouvel t'n~h'umcnt; et
SES ANALYSES ont rendu sensible
que
les !'e<cs ont une
me
mais
que
cette me est
M/crtcttre
la t)dtM.
(Essai
sur
t'Orig. des
Connaiss.
hum.,
sect.
tl,
ch.
iv, 43.)Von,
certes,
unedes plus prodigieuses
dcouvertes
qui aient jamais
t
faites;
et voi) ce
que
les Franais du xvm* sicle ont
pu
entendre et mme admirer. On serait
que)quefois
tent
de s'crier 0
gentem
ad MrMftftem t)a<atn/ ses charlatans
t'ont domine comme ses
tyrans.-Esprons cependant qu'un
Roi
lgitime
ramnera la fois chez elle
!a pto'tfanee
et les
ides
INNES.
MEUCTION 12
ment donner de nouveaux noms d'anciennes
notions,
et
l'ignorance
et
l'inapplication peu-
vent
prendre
ces noms
pour
des choses.
Il faut
ajouter que
les inventeurs de ces
noms font un
trs-grand
tort la
science
en
ce
qu'ils
la
divisent,
au lieu de la runir. Ils
crent des
sectes,
au lieu de former des reli-
gions
au lieu de renforcer le
grand
faisceau
des
vrits,
ils refusent
d'y prendre place
ils le dlient mme autant
qu'il
est en eux.
Si
Kant,
par exemple,
avait march en
simplicit
de cur la suite de
Platon
de
Descartes,
de
Malebranche, etc.
il ne serait
dj plus question
de Locke dans le
monde,
et la France
peut-tre
serait
~MM~/a<Mee
de
son ridicule et funeste Condillac. Au lieu de
cela,
il a
plu
Kant de se livrer cet
orgueil
aigre
et exclusif
qui
refuse de devoir rien
personne.
Il nous a
parl
comme une
Pytho-
nissenigmatique.
Il n'arien voulu dire comme
les autres
hommes
il a invent une
langue
et,
non content de nous
proposer d'apprendre
l'allemand
(certes,
c'tait bien
assez!)
II &
voulu nous forcer
d'apprendre
encore le A<M!<.
Qu'est-11
arriv? il a excit chez lui une fer-
mentation
passagre,
un enthousiasme
de
ET SYLLOGtSMH. t3
commande,
un frmissement
scolastiquc
tou-
jours born
la rive droite du
Rhin
et lors-
que
ses
(~'0~/TMts
se sont
prsents pour
ex-
pliquer
ces belles choses aux
Franais,
ceux-
ci se sont mis rire.
On a cess de nous
rpter pendant
le
dernier sicle
que
Bacon avait rendu le
plus
grand
service aux sciences en
substituant l'in-
duction au
syllogisme.
Cette assertion
ayant
acquis,
force d'tre
rpte,
une assez
grande
autorit,
il est ncessaire de l'examiner dans
le
plus grand
dtail;
mais
voyons
d'abord bien
prcisment
ce
que
c'est
que
l'induction.
Les bons
crivains franais
emploient quel-
quefois
ce mot comme un
simple synonyme
de conclusion ou
consquence,.
et c'est ainsi
que
Voltaire a dit On se
trompe
encore en <-
/'f(M<des inductions. Pten'e-~e-GrcHM~ abolit 7e
Pa~arcct< ZMHer
ajoute qu'il
se dclara
.Pa~ct~cAe~Mt-meMe des
anecdotes,
pre~en~Mcs
de
.RMM!'e,
vont plus
loin
et disent
gM'~o//<c!'M
pontificalement.
Ainsi.
~'MM
fait
avr on hre
des
conclusions e~'o?tee~
(1).
Ce sens de cott-
(l)Hist. de
l'empire
de Russie sous
Pierre-)e-G)'ant!,
Pt'fnce.Paris,Didot,l803,p.36.
IUDUCTtO~ 14
c/tM!'on
MMp/e
est le
premier que
l'Acadmie
franaise
attribue au mot
m~Mc~'o~;
mais le
second sens est le
plus important
Induction
se dit aussi de
l'numration
de
plusieurs
choses
pour prouver
une
proposition;
et
c'est dans ce sens
qu'on
dit
prouver
MTc
chose
par
mc~tc~oM
(1).
L'Induction tant l'me du raisonnement
humain dans tous ses
objets possibles,
il me
semble
que
Hume en a restreint et
par
cons-
quent
altre
l'ide,
en disant
que
l'induction
est celle
opera~'o~
de r~HC
par ~ne~e
nous
M~ro/s
rM$emMance des
e~e~
de la r~-
seHtMef~ce des causes
(2).
Pourquoi
borner l'induction l'ide seule
de causalit Aristote dit mieux et en moins de
mots
Z'M~uc~oM, dit-il
est le sentier
qui
nous conduit
dMpe[?'<!CMA'er(K<yeMc?'a/(3).Ainsi
lorsqu'on
a
prouv que
la mer
Adriatique
est
sale,
que
la mer
Baltique
est
sale,
que
la
(t)
Dict. de l'Acad.
franaise,
art. 7nduf<t'oK.
(2'
Hume's
Essaya.
(3) EttayMy~
&x} ?a" M6<xm ix! T& ifxM~ou
!j)~of.
Ar!st.
Top.l,
10.
ET tYL1.0C!SUE.
mer Vermeille est
sa!e, etc.
on
peut
con-
clure
lgitimement
donc les eaux de toutes
les mers sont sales
(1).
Un dialecticien
tranger
l'Europe
est un
peu
moins
prcis,
mais
plus lumineux qu'Aris-
tote dont il
adopte
l'Ide
Z'~chtc~oM, dit-il,
est M~
procd qui
recueille des
faits
~)a~Mt-
/!crspo!tr
en tirer une
rgle ~Mcra/e applicable
une c~M'M d'eues
(2).
Ecoutons maintenant Cicron On
appel,
dit-il,
induction cette
analogie qui, ~e/~MMiM'a
points
accords
nous conduit CM elle veut
(3)
et il en
donne tout de suite un
exemple
char-
(1)
Logique
de
Port-Royal.
HI*
part.
ch. 19.
(2)
Extrait du
TEHZEEB-UL-MANTIK,
ou Essence
de ta
logique, ouvrage arabe,
dans les Recherches
asiatiques,
in 4, tomevm, p.
127.
(3)tffBc(simi)itudo)<'a:pfMf!'6ut perMnt'em~'f
eu/t
op-
pellatur Inductio,
~Ma)<y!'<BM K~xyM-ttomt'n(tfur,<<
q!t<t
plurimm
u<M< est in MrmotttBut Socrates.
(Cic.
de Inv.
Rhet.
3), )
On
peut
s'tonner de ce
que
Cicron dit ici
sans
exception
ni
explication que
l'induction se nomme en
grec
M~M- quoique
)e
grand
matre dans ce
genre,
Aristote, la nonune
invariablement
E~it~.fTop.t.tO,
Analyt. prior. )!, 23:
Analyt. poster. t9: 7,
<8, etc.
e:e.
~~T;(.<
My.s,
id,
Me'aph, xm,
4. )
IKbUCTIOK
i6
'mant
qu'on
me saura
gr
de
rapporter
ici
pour
gayer,
sans
prjudice
de
l'instruction,
un
sujet
aride de sa nature.
La clbre
Aspasie,
s'entretenant un
jour
avec
Xnophon
et sa
femme,
commena
par
dire celle-ci:
Dites-moi, je uoMSpn'e.nadoMMe,
M votre voMMe avait des
bijoux plus
beaux
que
les
<;o~'es,
lesquels
aimeriez-vous mieux
pos-
sder,
ceux
qui
vous
oppar~e~MeM~
ou les siens ?
Les
siens,
rpondit
sans hsiter la femme
de
Xnophon.
Et si sa
garde-robe et
sa toi-
lette valaient de mme
beaucoup
MMeMa:
que
les
vtres,
de quel ct placeriez-vous
votre
pr"
/?~eMce?Mme rponse
de la
part
de la
fidle
pouse. -Maintenant, reprit Aspasie,
encore M~e
question, je
vous
prie
Si le mari de
cette
femme
valait mieux
que
le
vtre,
le
pr-
/crene.z-t)ous
~TenqpAoM?Ici
la daine rou-
git
et se tut. Alors
Aspasie,
se tournant du ct
de
l'poux
Dites-moi
lui
dit-elle
si le cheval
de votre voisin valait mieux
que
le
vtre,
M'a-
Mcne~-uotMpctS
mieux
fauor?7<f6n's,
sans
doute
rpondit Xnophon.
Et
s'il s'agissait
de sa terre?- J e la
prfrerais
de mme.
~as si set
femme
tait
suprieure
la
ud<re,
~u'eMdt<es-uo~s?Ici
Xcnophonse
tut son
ET SYU.OC)St!E. )7
four
(1).
Alors
Aspasie reprenant
la
parole
Eh
bien l dit-elle
puisque
vous t)0!M obstinez
l'un et l'autre
garder
le silence sur ce
que je
voulais
principalement
savoir de
vous,
je
me
charge
moi-mme de (~ye votre
pense.
Chacun
de vous dsire ncessairement ce
qu'il y a de plus
par/a<Mm, <~M'~y
aM)*a un meilleur
poux
et une meilleure
femme
dans
l'univers,
vous
ne pourrez
ni l'un ni
l'autre vous
e~pec/ter
~e les
pr frer
ce
que
vous
possdez
dans ce
genre (2).
Ou
peut
donc encore dfinir
l'~Mc~o~,
un
discours
par lequel
on force un nouvel aveu
en vertu des aveux
prcdents
(3)
et
cette
(l)Dex
poux
hbrux
(mais pas
d'autres
dans l'univers).
mis la mme
preuve,
eussent
rpondu
la dialecticienne
Que
nous
par~e~-pott~,
<! belle
aveugle
de ce
qu'il y
a de
mettteMr dans tous les
genres,
et de la
pre/erence force qu'on
lui accorde? Si vous connaissiez notre
loi
vous sauriez
que
ce dsir
qui
vous
parait
invitable
nous est
t~c/cndM
comme
t<?t o'ime.
(2)
Cic. de Invent. Rhct.
1,3t.
f.
(3)
ZTtc
~ttum
rebus non <!t~!t'~ esset
a~~<'t)<Mm /ac<t<t)t
est
propler
si'mtHtttdt'nem ut etiam
illud OMO(!
dubium videba-
fur,
si
quis separatim
~u<Brcre<,
id
pro
cer<o
proptcr
rafto*'
t)<Ht fo~andt cottcc~erfhff.
(CM. tbid.)
TOME 2
J NDUCTION ]3~
dfinition,
compare
celle
d'ristote,
nous
montre les deux faces distinctes de
l'M:~t<c<on;
car tantt elle
part
d'une
proposition
gnrale
pour
en dmontrer une
particulire,
et tantt
<;lle conclut d'une numration de vrits
par-
ticulires la vrit d'une
proposition gnrale.
Ainsi,
par exemple,
on
peut
dire
galement,
en suivant
l'exemple
cit
Vous
prfrez
le
plus
beau
cheval,
la
plus
belle
terre, etc.
en un
mot,
le meilleur dans tous les
genres,
donc vous
prfrez
aussi la femme la
plus
aimable
n
ou bien
Vous
prfrez
le
plus
beau cheval,
la
plus belle
femme etc.
donc
vous prfrerez
constamment le
meilleur
dans
tous les
genres.
)) Mais
toujours il s'agit
d'une
gnralit
car sans
gnralit
il
n'y
a
point
d'induction
(1).
De ces deux
formes,
la
pre-
mire
appartient plus particulirement
l'ar-
gumentation
et la
conviction,
l'autre la
recherche et la
dcouverte.
La
premire
est
plus
naturelle
l'homme
qui parle
un autre
homme, la
seconde l'est
davantage
l'homme
qui
se
parle
lui-mme.
t<)
n
~x'/M~~ ~a jfcMTcM. (Arist. Analyt.
prior.
n, 22.~
ETSYt.LOGtSMB.
2.
Au
fond,
cependant, qu'est-ce que
l'induc-
tion ? Aristote l'a fort bien vu C'e~ MM
syllo-
gisme
sans
moyen
terme
(1).
Toutes les formes
possibles
de
syllogisme
ne
changent
rien la
nature des choses. On ne l'aura
jamais
assez
rpte
le
syllogisme
est l'homme.. Abo-
lir,
altrer l'un ou
l'autre,
c'est la mme
ide.
Qu'importe que je
dise 7b:~ tre
simple
est !~e~uc~'Me de sa nature or mon <NKeest
M tre
simple;
c~oMC, e~c.,
ou bien
que je
dise
immdiatement ~b~ ome est
s:~p/e.;
(~o?:c
elle est <M~~ttc~6~e? C'est
toujours
le
syllo-
gisme qui
est virtuellement dans r~6?Mc~o~
comme il est dans
l'e~eme.
On
peut
dire
mme
que
ces deux dernires formes ou ne
diffrent
nullement,
ou ne diffrent
que par
ce
que
les dialecticiens
appellent
~e
Ke?,
mais
nullement dans leur
essence,
puisque
l'enthy*
mme,
suivant
Aristote,
est ce ~Mo~neme~
qui /o!'ce ~e
consentenient au
tMoyc~
des
propo-
(1)
Eet !t o
TCMSte<
m~).oy<(!{( )! ~~M'y~)
T~
ttjrn'
"~t
~tcou
ttpoTK~M:. ( Aristot.
Anal.
prier,
t!, <2.)
INDUCTION
20
st~'o~M avoues
(1)
dfinition
qui
est
prci-
sment celle de
l'induction,
suivant Cic-
ron
(2).
A
l'appui
de cette observation on
peut
citer
encore l'illustre
Euler,
l'homme du monde
qui
a le mieux connu le mcanisme du
syllo-
gisme
et
qui
l'a
reprsent
aux
yeux.
de la
manire la
plus ingnieuse.
Ce
grand
homme
ne fait nulle
distinction
entre le
syllogisme
et
l'Induction,
lorsqu'il
dit en
gnral que
le
syllo-
gisme
est le seul
moyen
de dcouvrir les vrits
tKCOMKMM,
c~ccgne
vrit devant
toujours
tre
la
conclusion t~'MH
syllogisme
dont les
pre?KtsseS
sont M~M&~ctMemeM~n~es
(3).
Que
peut-on ajouter
enfin au
tmoignage
formel de Bacon lui-mme dclarant en termes
exprs que l'enthymme,
ainsi
que l'exemple
(ou
le raisonnement
par analogie)
ne sont
(t)
EoTt S: Ta
/t~
SstXTM~
~9u~)]/<
o t~
e~o~cyou/t~M'
(td.
Rhet.
23.)
(2)Cic.)oc:cit.
(3) Lettres one Princesse
d'AUcmagne,
tom.
H,
lettre
ttv' 2)
fvrier 176t.
ETSYt-LoGfSiilE; 2~
ctM~'c chose
<<Me
contraction dit
~Mo~Mme
e<
de l'induction
(1).
On
voit
quoi
se rduit toute cette thorie
de l'induction dont on a fait tant de bruit
c'e~ M~
syllogisme
contract,
et rien de
plus.
Ainsi,
lorsqu'on
nous
dit que
Bacon a substitu
l'induction au
syllogisme,
c'est tout comme si
l'on disait
qu'il
a substitu le
syllogisme
au
syllogisme,
ou le raisonnement au raisonne-
ment,
Le
syllogisme, dit Bacon,
se
compose
de
propositions,
les
propositions
de
mots,
et
les mots
sont les
signes
des notions. Si
formes,
rien de ce
que
nous
appuyons
sur
cette base ne
peut
tenir
de manire
qu'il
et ne nous reste d'autre base
qu'une
induction
lgitime (2).
Parodions d'abord ce morceau
pour
en
faire:
sentir le
ridicule..
0)
De
Augm.
Scient, v.
Opp.
tom.
vn, p.
268 Nan.
tK<~)/mema<a
et
<'Mmp!a
illorum dMOt'MM
coml)endia
(anfttt~
tUM<. t,
(2)
Nov.
Org. ]ib. t,
aph.
xiv.
Qpp.
t.
vnt,
p.
3..
INDCCTMN 23
Z'M~tc~ott se
compose
de
propositions,
/M
propositions
de
mots
et les mots sont les
signes
des notions. ltlais si les notions sont
conftises
oit
mal
fondes
tout ce
que
nous
appuyons
&M)'
cette base ne
peut
~eM!'r
de manire
<7M'7
ne
nous ye~e d'autre
&~e~u'MK syllogismelgitime.
C'est
peut-tre
faire
trop
d'honneur cette
tirade
que
de
l'attaquer
autrement. Comment
a-t-on
pu
tre
la dupe
de semblables
puen~es
( ici l'expression
est
juste)
et
permettre qu'on
nous cite comme un oracle l'homme
qui
vient
nous
apprendre <~t'~faut
avoir soin de raison-
ner
juste,
vu
que
tout ce
que
l'on
ap~m'e
sur un
raiso'nnenient
faux
toiiibe de lui-mme? En v.
rctMonMeHteM~
~Ma;
<om&e de ~Mt-MOKe? En v'
rite c'est une belte dcouverte II
y
revient
cependant
dans la suite du mme
ouvrage,
et
il se
rpte
sous une forme diffrente.
jK
est
manifeste,
dit-il,
que
tout ce ?'cM'so?MMM!C/!<
~a~
syllogisme (c'est--dire
ce raisonnement
par
}'6t/MKMeMtCM<)
M'e~
que
l'art d'a~ac/ter icne
conclusion a MM
pr~c~pepa?'
des termes
moye~M~
mais le
principe pris potH'
cet~ct!~ est
~ot~MM'5
mis /t0)'s de
question. (1).
O donc avait-il vu
(<)
~ot'.
0)p.
)ib. v.
cap. iv, p.
2G9.
ET SYLLOGISME. 23-
qu'il
fut
possible
de
juger
autrement? S'il
y
a
quelque
chose d'vident en
mtaphysique
c'est
que
nulle vrit ne
peut
tre dcouverte
par
voie de
raisonnement
qu'en
la
rattachant,.
par
un lien
qu'il s'agit
de
chercher,
une
vrit antrieure admise comme certaine.
La
rgle
est la mme
pour
l'induction et le
syllo-
gisme, puisque
l'un et
l'autre;
comme
nous.
l'avons vu,
ne
diffrent
essentiellement
que
de nom.
Les hommes tant
tromps
chaque
instant
par
les ides fausses
qu'ils attachent
aux
mots,
il est
important
d'insister sur l'observation:
dj
faite
que
ce mot de
syllogisme
ne
signifie
dans la
langue qui
l'a
produit que
raisonne-,
ment. En
grec
le mot de
~Ho~Me,
dans sa
signification primitive
et
gnrale,
n'est
point
technique, pas plus que
celui de raisonnement
parmi
nous. Les dialecticiens seuls
l'emploient
dans le sens restreint
que
nous lui avons attri-
bu aussi les Latins le rendent-ils
presque,
toujours par
celui de ~a~'octHa~'o.
Tout
syllogisme
est une
e~Mf<<oM.
Ce
qui
arrive dans les
mathmatiques
a lieu
dans
toutes les sciences. On cherche
comparer
l'inconnue une
connue
et ds
que l'galit~
IKDUCTtOPt 24
est prouve,
l'inconnue est
nomme,
c'est--dire
coM?!MC.
L'e<7Ma~oM
est ?
moyen ~n~equi
unit
les deux
extrmes,
ou autrement
c'est
l'op-
ration du verbe
qui prsente
l'intelligence
un fruit d'elle et de
lui,
N'est-ce pas la
mme chose de dire
5 +
=
4 0,
ou de dire Tout
no~&re
est
gal
au double de
sa moiti
or,
cinq
est lamoiti de
dix; donc,
C~C.
Une
gloire
immortelle est due l'homme
tonnant
qui
a vu le
syllogisme
dans
l'esprit
humain,
qui
l'a
divis
en
espces, qui
en a
trouv les
lo~is,
qui
l'a
s'il est
permis
de s'ex-
primer
ainsi,
spirituellement
anatomis,
qui
nous
a conduits
enfin
savoir
qu'il n'y
a
que
dix-neuf manires
possibles
de raisonner
lgi-
timement
(1).
Bacon,
qui parle
sans cesse
(!)Condii)ac.
aprs
avoir
jet~un coup
d'it r.sseztnat-
tentif sur la nature du
syjjogisme qu'il
ne se
rappelle .[uo
comme un amusement de
collge, ajoute
solennellement;
Nous ne
faisons
aucun
usage
de <oM<cela
(Logique,
chap.
nu, note); je
le crois. Pour en faire
usage
il faudrait
le
comprendre
et c'est ce
qui
ne lui
est jamais
arriv. t)
vaut
bien mieux insulter la science
que
se donner la
peine
de l'ac-
qurir, s'emparer
de
quelques
ides ou fausses ou triviales;
en tirer des
consquences perte
de
vue,
et nommer
tout
c)a analyse:
alors on reoit les
honneurs de t'nt-!8,
on est
!:T SYLLOGISME.
29
d'Aristote avec un ton de
supriorit
excessi-
vement
dplac,
lui
manque
surtout de deux
manires
principales.
D'abord il
l'appelle
d-
se~en~e
l'exprience (1),
ce
qui
est tout aussi
ridicule
que
si nous
appelions
Bossuet ou
Ptau dserteurs de l'histoire naturelle. Com-
ment
peut-on
dserter un
corps
o l'on n'est
pas
enrl? Aristote n'a
point
dconseill la
physique
exprimentale
il n'en a
point
d-
got l'esprit
humain s'il ne
l'a
point prati-
que,
c'est
parce que
cette science n'tait
pas
ne,
et de
plus, parce qu'elle
ne saurait
appar-
tenir
qu'
des chrtiens. C'est de
quoi
Bacon
se doutait
peu.
Il ne se montre
pas
en second lieu moins
injuste
envers
Aristote,
en ne cessant de le
prsenter
comme l'auteur de la mthode
syllo-
gistique,
ce
qui
est trs-faux. Le
philosophe
grec
a recherch et dmontr
dans ses
~?!c:/?/-
<MMCS
et ailleurs les lois du
syllogisme,
c'cst,-
lu de tous
cts,
et la fouie s'crie: Com'nc il est clair sans
se douter
qu'eHcinsutte.
(l)~VMc'mu~?Mt(!~t6!'M!<ftt<M$))to~tdescrtorf'xpe-
~'ieutia;.
(Descript.
Globi intellect.
Opp.
tom. !x
p.
230.)
INDUCTION
B6
-dire du
r6[~oM/2eH!eM<;
mais
jamais
il n'a em-
ploy
la
mthode
syllogistique.
H a trait la
physique,
l'histoire
naturelle,
la
morale,
la
politique,
la
mtaphysique
l'astronomie,
la
potique,
la
rhtorique;
on ne trouvera
pas
que
dans toutes ses uvres il ait
employ
un
seul
syllogisme,
dans le sens
moderne,
c'est-
-dire dans le sens du raisonnement dcharn
et rduit aux formes
techniques.
Le
reproche
que
lui fait Bacon sur ce
point
tombe donc
absolument faux. Si les
scolastiques
ont in-
troduit
depuis
la forme
syllogistique
dans
l'enseignement
des
sciences
ce n'est
pas
la
faute
d'Aristote,
qui
n'en donna
jamais
ni
l'exemple
ni le
prcepte.
C'est d'ailleurs une
bien
grande question
de savoir si l'on a bien
ou mal fait de bannir cette forme de l'ensei-
gnement public;
il n'en est certainement
pas
de
plus
propre
donner
l'esprit
de la
jus-
tesse et de la subtilit en le
forant
ne jamais
divaguer
c'est ce
que
savent
parfaitement
ceux
qui
ont t exercs dans ce
genre.
Bacon s'est donn de
plus
un
trs grand
tort,
celui de confondre
perptuellement
le
syllogisme
avec la forme
syllogistique,
et,de
l'opposer
l'exprience,
comme si l'un
e\-
ET StLLOGtSME. 27
clua!t l'autre Le
~~M~e,
dit-il
peut
tre
admis dans les sciences
populaires
telles
que
la
morale la
jurisprudence
et autres sciences
de ce
MM?~(1),
mme encore dans la
thologie,
puisqu'il ap~{aD!Ct(
de
s'adapter
la
faiblesse
des
plus simples (2) on peut
mme
l'employer
dans la
philosophie
naturelle par voie
de
simple
raisonnement
qui produit
la
conviction,
l'assen-
timent
<7MO!<jMetoujours
strile
d'cettM'e~
(3);
mais la subtilit de la ptahtre et celle des
opra-
tions ne NCtMt'a!eM(tre cncAaMtCM
par
de se?M-
blables entraves
(4).
Il serait difficile de rencontrer nulle
part
())
J e reviendrai sur l'absurde et
mmecoupable gros-
siret
qui
ose
dsigner par
une
epithete mprisante
les
sciences les
plus importantes pour l'homme,
lesseules mme
rigoureusement ncessaires, puisqu'elles
sont les seules
qui
se
rapportent
safin.
(2) Yea
and
divinity,
because it
pleaselh
God
fo
apply
/)tm~e!
<o (Ae
tapac)<</
c~
<e
~<mp!e!<,
<(<
(
Of th adv. o)
Learn.,
the
capacity
135. )
Bacon craint
ici
d'tre
compris;
Lcarn.
etc. B.
II,
p.
13. )
Bacon craint ici d'tre
compris;
mais bienttnous ferons tomber le voi)edont
i) s'cnve)oppe.
mais bientt nous ferons tomber le voiledont il
s'enveloppe.
(3) ()u<B
assensuin
parit operis ~(a
est.
(!bid.)
(4)
But the
subtility o/'
nature and
operations
to<~ t)o< t<
inchained in those
tot!
etc.
(tbid.)
INDUCTION 28
des ides
plus
fausses.
Qui
jamais
a soutenu
qu'on
et besoin de
syllogismes pour
fondre
des
mtaux,
cristalliser des sels
ou branler
des masses ? Les
mcaniciens,
les
opticiens
et
surtout les nombreux
alchimistes
contempo-
r ains de Bacon,
r aisonnaient-ils donc
<M/br~?
Mais tel est le ridicule ternel de Bacon il
s'enveloppe,
il
prend
le ton d'un oracle
pour
nous dire des choses si
simples qu'elles pour"
raient
s'appeler
niaises;
et la foule n'en croit
pas
moins
que
ces mots
pompeux signifient
quelque
chose. Pour Bacon il
n'y
a
qu'une
science,
la~Me c.Kpen?MCM<6[~
les autres
ne
c sont pas proprement
des
sciences,
vu
qu'elles
ne rsident
que
dans
l'opinion (1).
Ces sciences
sont
toujours
vides (TceMwes
(3),
c'est-.-dire
que
le
thologien,
le
moraliste,
le
mtaphysl-
(i)
~<-<M
populares
et OPINABtLES.
(De Augm.
Scient.
Opp.
tom.
vn,
in distrib.
op. p.
36. )
(2) Operis e~et. (Opp.
tom.
t, p. 35.)
OpcfMM
~cft'tM
et
practic
remolas et
plan quoad par~m
acttfaM scientia-
t'utn,
incompetentes (prcpo~t~onM).
Tom.
YH, toc. cit., p.
36.,
Il est
sr, par exemple, que
la
Thologieexprimentale
n'est
pas
ne
encore, et
c'est un
grand dommage.
ET SYLLOGISME. 29
cicn etc.
ne
pourront jamais
enfermer
une
de leurs dmonstrations dans un
bocal,
la sou-
mettre la
filire
au marteau ou l'alam-
bic, etc.
ainsi la certitude
n'appartient qu'aux
sciences
physiques,
et les sciences morales ne
sont
que
l'amusement de
ropinion (1).
Il faut bien se
garder
de croire
que
ce
sys-
tme ne soit
que
ridicule
il est minemment
dangereux
et tend directement l'avilissement
de l'homme. Les sciences naturelles ont leur
prix
sans
doute;
mais elles ne doivent
point
tre exclusivement
cultives,
ni jamais
mises
la
premire place. Toute
nation
qui
commettra
cette faute tombera bientt au-dessous d'elle-
mme. Cette vrit tait bien loin de
Bacon
mais ce
qu'il ignorait
tout aussi
parfaitement,
c'est
que,
dans les
sciences naturelles
mmes,
toute
exprience
concluante n'est
qu'une pro-
position, partie
ncessaire d'un
syllogisme
in-
terne
autrement elle ne conclurait
pas;
ce
qui prouve
encore videmment l'existence des
(1)
De l vient
apparemment que l'interprte
et l'admi-
rateur de
Bacon
appelle
les sciences
physiques
RELLES
sans
doute
parce
qu'il n'y en
a
pas
d'autres.
INDCCTtON 30
ides
originelles, indpendantes
de toute ex-
prience
car l'homme ne
pouvant
rien me
surer sans une mesure antrieure
laquelle
il se
rapporte, l'exprience
mme lui devient
inutile s'il ne
peut
la
rapporter
un
principe
antrieur
qui
lui sert a
juger
la validit de
l'exprience
et ainsi en remontant on arri-
vera ncessairement un
principe qui
ensei-
gne
et ne
peut
tre
enseign
autrement il
y
aurait
progrs
l'infini,
ce
qui
est absurde.
Toricelli dit:
ce
L'air
estuncorps
comme un
autre
on le
touche,
on le
respire,
on le cor-
rompt,
on le
purifie,
on le voit mme comme
les
poissons
voient l'eau
pourquoi
donc ne
serait-il
pas pesant
comme les autres
corps ?
VoU l'induction ou
l'analogie
c'est--dire
l'affirmation de
l'attribut,
ou de ce
que
l'cole
nomme le
prdicat, transport
d'un
objet
o
il se trouve incontestablement
un autre o
il tait en
question
mais le
syllogisme parfait
existait dans la tte de Toricelli.
Tous les
corps
sont
pesants
or l'air est un
corps;
donc,
etc.
On voit ici
le moyen
terme,
ou le MM"!M
qui
unit les deux vrits c'est l'ide abstraite de
coyM qui
renferme l'air dans le cercle des
ET SYY.t.OGtSMB 31
graves
c'est ce terme
qui compare,
et
par
consquent qui
affirme c'est le fer&e de toute
intelligence.
Que signifient
donc les invectives de Bacon
contre le
syllogisme ?
Il est infiniment
proba-
ble
qu'il
confondait les ides et ne s'entendait
pas
lui-mme
car nulle
part
dans ses
ouvrages
on ne trouve la
preuve qu'il
et
pntr
et la
langue
et les crits des
philosophes grecs;
et
cependant
sans cette connaissance il ne faut
pas
se mler
d'analyse.
Mais ce
qui jetterait
dans le
plus grand
ton-
nement,
si
quelque prjug
du dix-huitime
sicle
pouvait
tonner un observateur
attentif,
c'est
que
cette induction dont on fait tant de
bruit,
et
qui
forme une si
grande partie
de la
rputation
de
Bacon
Bacon lui-mme la re-
jetait
comme tm
moyen yrosstcr
et
~MpM~c (1).
C'est en vain
que
le Crateur a mis dans nos
mains le flambeau de
l'analogie;
Bacon vient
placer
son
teignoir potique
sur cette lu-
t
(1) P~Mt't
et crassa.
(De
Augm.
Scient.,
)ib.
v,
cao. Il.
0;')).tom.vn,p.249.)
t
~DUCTIOM ~N
33
mire divine
(1)
et il lui substitue une induc-
tion de sa
faon, qu'il
honore du titre d'induc-
~'oM
/e<M!e,
et
qui
est
purement ngative;
c'est--dire,
par
exemple, que pour l'explica-
tion d'un
phnomne
il ne faut
point
en cher-
cher
la cause
par analogie
ou
par
induction
vulgaire,
mais commencer
par
carter toutes
les
explications
fausses,
vu
que,
toutes les
causes
imaginaires
tant
exclues,
celle
qui
reste sera la vraie.
On aurait
peine
croire
qu'une
teue ide
ait
pass
dans la tte d'un homme
cibre,
et
qu'une grande rputation
soit fonde en
partie
sur un tel acte de
dlire
rien
cependant
n'est
plus
incontestable,
et l'on voit maintenant de
quel
ct se trouve la
ptcn'~e;
car
jamais
on
n'imagina
rien de
plus
absurde
que
cette ~!e~
(1)
Ceci nedoit
point
tonner la maladiede Bacon tait
de btamer
gnra)ement
tout ce
qu'on
faisait,
tout ce
qu'on
croyait.
I) a
pouss
ceridicule au
point qu'en
donnant en
passant
quelque louange
J 'invention
moderne des tles-
copes,
il conseille
cependant
aux inventeurs de
changer
ces
instruments.
(Superesl
TA1VTU111 ut instrumenla
mulenl:
instruments.
(~perMfTANTUM
ut !'n~<'Mmen<amt<<M<.
Descript. GiobiinteHect. Opp. t. ix, p.
2t0)Change!
d'instruments
pour
observer te ciei!
Ce)-ttrt<.
M SYLK)G!SME. 33
</<o~e
d'Mcc~MMOM
rien de
plus
contraire la
marche de
l'esprit
humain et au
progrs
des
sciences.
Conclure
dit
Bacon,
d'aprs
un certain
Ko~&re
d'ea?pe?'!eMce$,
sans
ea~e~eMee
contraire,
ce n'est
pas
conclure
c'est
conjecturer (1)
comme si l'homme n'tait
pas
condamn
con-
jecturer
sans cesse! comme si l'on
pouvait
faire un
pas
dans les sciences sans
conjecturer
comme si enfin l'art de
conjecturer
n'tait
pas
le caractre le
plus
distinctif de l'homme
de
gnie
dans tous les
genres!
-Bacon d'ailleurs commet ici une
singulire
faute il
prend
la
conjecture
pour quelque
chose
d'absolu,
et il
l'oppose
la certitude
comme
quelque
chose de contraire. Il
ignorait
donc
que
la
conjecture
n'est
qu'une
fraction
de la
certitude,
et
que
cette fraction
toujours
susceptible
d'accroissement
peut s'approcher
enfin de
l'unit,
au
point d'tre prise pour
elle.
())
To conctude
upon
an
enumeration of
particulars
without instance
contraditory
is no conclusion but a
conjec-
ture.
(Of
the Adv. of.
Learn. !t,
p.
134.)
!) se traduit exacte-
ment dans l'dition
latine,
tom.
vfi,
tib.
v, cap. tt, p.
249.
TOME!. 3
INDUCTION S4
Lorsque
dans
plusieurs sujets,
dit-il
quel-
ques
faits se montrent d'un certain
ct,
com-
ment
peut-on
tre sur
qu'un
fait inconnu ne se
trouve
pas
de l'autre ct
(1)?
On aurait fort
embarrass
Bacon,
si on lui avait demand
<yM'e~-ce que
rendre ct? Au
reste,
il tait si
loin d'attacher un sens dtermin
cette ex-
pression, que lorsqu'il
en vient se traduire
lui-mme,
il la
supprime,
et dit
simplement
dans le latin Si l'on ~'oMue
plusieurs
faits
<fM?t
ct
qui
<Mem
prendre
sur lui d'assurer
<~M'<7s
ne sont
pas
CO~~ec!
~<M' quelque
autre
/tt~
MCOtMtM
(2)?
()
For tpfto can
assure,
in
many subjects, upon
those
par-
liculars which
appear
of a
side,
that there are not other en
</te
confrart;
tMe which
appear
not?
( Inid., p. 13~. )
(2) Quis
e)t!Mt in se
recipiet
~um
particularia ~M<equis
ttoftt aut
quorum meminit,
ea; und fatt<Mm
par<e eontpa-
reant,
non delitescere
aliquod quod
omnino
Mpt<g<t<<?
(Ibid.
tom.VH.)
On
peut
observer ici le mot
depar(tcu!aM qu'il
traduit en
tatin
par
celui de
parlicularia.
Plus souvent il
emploie
ce-
lui d'instance,
qu'il
se
permet de traduire
en latin
par le
mot
barbare d'instantia. Tout cela
signifie, fait, M'pen'MM
exemple, argument,
Son
expression
est
toujours vagueeomme
sa
pense.
M SYH.OGtSME. 35
3
On ne saurait mconnatre
plus parfaite-
ment la nature de l'induction. Rien ne
pouvant
tre contraire des vrits
connues,
et l'induc-
tion
partant toujours
de vrits connues et
avoues
il
peut
bien se faire
qu'un fait
nou-
vellement dcouvert ne se
range pas
dans cette
gnralit,
mais il ne
peut
se faire
qu'il
branle
ce
qui
est
tabli; ainsi,
dans
l'exemple
vul-
gaire
cit
d'aprs Port-Royal,
on dira Z'j4-
(h'M~Me
est
sale,
la
Baltique
est
sale; la
C<M-
pienne
est
sale,
etc.;
donc toutes les mers sont
sales. On
objecte
le Baikal
qui
n'est
pas
sal.
Le fait tant
vrin,
on dira Donc toutes les
mers sont
sales,
except
le'Bailcal,
ou bien
Donc le Baikal n'est
pas
une mer. Mais com-
ment ce
fait,
suppos
inconnu,
drange-t-il
en
se montrant les observations
prcdentes,
et
que
veut dire Bacon?
Ce
qui
suit est
exquis.
C'est comme si le
pro-
p/te~e
SotMMe~avait scccrc l'un des
enfants
(fj~cn
~M'OMfit ~anK~e
~'MM
aprs
l'autre devant
lui,
et
qu'il
et
agi
sans <eMM'
compte
de David
qui
lait aux
C/<6[??~. (1).
(t )
P~t'tndc ac tt~amtte!
(tc~titc~ttiet
fn t7tt! Isa
filiis
~uot
INDUCTION 56
Cette
platitude
est
prcieuse
en ce
qu'elle
montre
que
Bacon,
absolument
dpourvu
de
l'esprit d'analyse,
non-seulement ne
savait pas
rsoudre les
questions,
mais ne savait
pas
mme les
poser.
Dans cette
comparaison
ridicule,
chacun
des enfants d'Isa
(le
seul David
except)
re-
prsente
une
proposition
fausse. Samuel disait:
Aucun des
enfants <jfM'o~
me
prsente
ne m'est
dsign par l'esprit qui
MccoM~M~
/<M~
donc
venir David
qui
est aux
champs.
Or,,
c'est tout
le contraire dans
l'induction,
o l'on tire une
conclusion d'un certain nombre de
proposi-
tions donnes et avoues
pour
vraies.
Voi! donc Bacon bien convaincu de ne
s'tre
pas compris
lui-mme
ce
qui
lui ar-
rive trs-souvent. Il faut montrer maintenant
pourquoi
il ne s'est
pas compris
sur ce
point
particulier.
L'homme,
dans l'ordre des
dcouvertes,
ne
peut
rechercher
que
trois choses un
fait,
une
cofam<t(Mt;<0!<!Mebatttt
dotno,e<Mtn:m~q(Mtt)t!Mt
Da-
~idem
qui in a~)'o a&era<.(De Augm.
scient.
tib. v, chap.
videm
gui
in
ag~~o
a5crat.
(De Augm.
Scient. lib.
v, chap.
2
,t.
vn, p. 40.)
ET SYLM01SME. 3~-
cause,
ou une essence. Les eaux de toutes les.
me~ so~-eMes sales? voil un fait
;pourquoi.
les eaux de la mer sont-elles sales? voil une
cause
~M'e~-ce gu
le sel ?
voil une essence.
Or, Bacon,
qui
ne savait
pas
faire cette dis-
tinction,
passait toujours
de l'un l'autre de
ces trois ordres de
vrits,
et
appliquait
l'un
ce
qui
convenait
l'autre. On
voit,
par
exem-
ple, qu'il
fut conduit sa folle mthode d'exclu-
sion
par
ses rflexions confuses sur les
essences.
Il
demandait,
par exemple ~n'es<-ce que,
la
cAa~eur? et
il
voyait
en
gnral qu'il.
fallait
d'abord exclure tout ce
qui n'appartenait pas
essentiellement la
chaleur,
la
lumire,
par
exemple, puisqu'on
la trouve dans les
phos-
phores. Ce<~M?'e~eya, disait-il,/o?~Me~<tK?~
exclu tout ce
qui etppor~cMt a
d'autres
agents,.
sera la cMeMr.
Sans examiner ni la MMfe ni la m~Mr de
ce
raisonnement dans la recherche des essen-
ces,
qu'a-t-il
de commun avec le cas o fin-
duction
(que
Bacon
appelle
si
purilement
pMer~e)
cherche classer des faits
du mme
ordre
par
voie
d'analogie ?
Le docteur
Shaw,
qui
a
publi
en
anglais
et comment en
quelques
endroits les
OEuvres,
INDUCTION S8
de Bacon
(1),
nous fournit une nouvelle
preuve
du
vague qui rgne
dans toute cette thorie si
mal
propos vante par
des hommes
qui
n'en
ont
pas la
moindre ide.
Z'M6?MC~oM
vulgaire,
dit-il,
pour
la
reprc'
senter f~MMemanire
familirc,
est celle CM/'o?!
dit
par exemple
J e vais vous en donner une
preuve.
Alors on cite un
OM~CM?~/a~ qui
~0[We?~<~0!M*la proposition.
Z'm(~MC<M~
logique
e
commune
procde
de la mme
manire;
elle s'at-
tache
quelques faits,
mais sans considrer ceux
qui prouvent
le
coM~M'e;
de sorte
que
cette in-
duction -ne
proMue
rien,
pouvant toujours
e<r<?
renverse
par
un
fait
contraire
(2).
En
premier
Heu,
vaH
la
question
totale-
ment
change.
Tout l'heure il
s'agissait
de
l'induction
connue,
qui part
d'un certain
nombre
de vrits avoues
pour
en tablir
une nouvelle
maintenant on nous
parle
d'une
nouvelle induction o il ne
s'agit plus
d'analo-
gie
c'est celle
qui
tablit une vrit
par
une
(1) London,
<80. 12 vol.
in-l3.
(2)
tbid. tom.
1, p. 7,
note.
33.. ET SYLLOGISME.
quantit
d'antcdents
qui
la
supposent.
La
preuve
qu'on appelle
dans les tribunaux cri-
minels
/~eMUM par
indices est de ce
genre.
Mais si cette
distinction,
quoique
trs-relle,
parattrop
subtile,
tenons-nous-en,
si l'on
vent,
l'ide du commentateur. Il
y
a
donc,
suivant
lui,
deux inductions l'une
vulgaire
et insuf-
fisante,
c'est
l'ancienne l'autre,
lgitime
et
nouvelle. Celle-ci
appartient
Bacon,
et il a
rvl
quoi? <~M'~
ne
faut jamais
s'CM tenir
un
nombre
trop petit
de
faits
et
d'expriences,
ou
en d'autres termes
que
ce
qui
est
insuffisant
ne
su ffit pas.
A
quoi songe-t-on
de nous donner
ces
brillants
aphorismes pour
des nouveauts ?
On dirait
qu'il
fut un
temps
o il tait
pass
en
maxime
qu'il
est
~en~M
de conclure du
parti
culier aM
gnral.
Qu'on
dise devant une femme de bon sens
Un homme tout
esMM/~e
vient de
pn~e!'
. cte-
de
moi;
je
suis SM?'
qu'il
est ~aM~CMr du MeM~rc
commis tout l'heure. Pense-t-on
que
cette
femme,
sans avoir lu le AoMt~
organum,
ne
sera
pas
en tat de dire Vous allez
trop
vite. Ne
d~a~-o!~
pas <~M'~
est
impossible
de coM?' et
d'Ot.'OM' chaud
sans avoir tu MMhomme ?
On
conoit
peine comment
on a
pu
trouver
que!.
!NM!CT<0!<
40
que
chose de nouveau dans toute cette thorie
de
l'induction
qui
n'est autre chose
que
le
bon sens de tous les sicles.
On ne saurait rellement
adjuger
Bacon
en toute
proprit que
sa mthode
~'exc~t~oM,
qui
est une absurdit dans tous les sens ima-
ginables.
D'ailleurs
aucundes
pangyristes
deBacon
ne
parle
de cette mthode d'exclusion
(1)
tous
s'en tiennent l'induction
simple,
tous le f-
licitent
purement
et
simplement
d'avoir sub-
stitu
l'induction
au
syllogisme.
J e
citerai
sur
ce
point
deux textes
anglais
extrmement cu-
rieux.
Le
genre
humain s'tant
fatigu pendant
deux mille ans chercher la vrit l'aide du
syllogisme,
Bacon
proposa
l'induction comme
(!)
J e ne connais d'autre
exception que
celle de M. de Luc.
( Prcis de la
Phiiosophie
de
Bacou, Paris, 1802,
2 vol
in-8.)
Il
s'tonne, dit-il, qu'aucun pht/stoett, parmi
ceux
qui
.tftn6fcttt avoir lu te
oMt)ragMde
Bacon,
ne se soit avis
de cultiver celle mthode.
(tbid. tom.t,
p.
60.) Lui-mme,
par l'usage qu'il
en fait sur des
objets
de ta
ptus
haute :m'.
portance
a fort bien
prouv que
ces
physiciens
avaient
raison.
ET BYLLOGtSMB. 41
un instrument
plus efficace.
Son nouvel instru-
ment donna aux
penses
et aux travaux
des
rechercheurs
un tour
plus remarquable
et
plus
utile
que
ne l'avait fait l'instrument aristotli-
cien,
et l'on
peut
le considrer comme la se-
conde
grande
re des
progrs
de la raison hu-
maine
(i).
Les rviseurs
~Edimbourg,
si
justement
c-
lbres,
ajoutent, aprs
avoir cit ce
texte
des rflexions non moins extraordinaires.
Il
rsulte, disent-ils,
de ce
passage que
si l'on
appelle
une fois
l'o~a~M~
d'Aristote,
on recourra cent fois celui de Bacon. S'il
existait donc un
systme
d'ducation
qui
ft
de ta
logique
d'Aristote son
objet principal,
et
qui ngliget
entirement celle de
Bacon,
on
pourrait
l'accuser
trs-justement
de
pren-
dre l'enfance de la science
pour
sa matu-
rit
(2).
>
On trouverait difficilement une
preuve plus
(1)
D~IMd~
0})a!)/t o/)'t<tote'~ Eo~tc, p.
140.
(2)
J Mtn6tH'gh-Reot'cM,l8t0,
u* 31.
Ony
lit le
passage
du
docteur Reid.
tNDUCTtOK 0
frappante
de la force des
prjugs, puisqu'ils
ont
pu tromper
des hommes de ce mrite.
A
quoi pensait
donc le
docteur Reid,
lorsqu'il
nous dit srieusement
g!<e
le
genre
humain avait
cAercAe la vrit
pendant
deux mille ans avec
le
syllogisme ?
0
puissance incomprhensible
du
prjug
national dans tout son
aveugle-
ment et dans toute sa servitude
Quoi
donc
les astronomes et les mathmaticiens
grecs,
y
Archimde, Euclide,
Pappus, Diophante,
Era-
tosthne,
Hipparque,
Ptolme;
tous ces
phi-
losophes,
etPlaton
surtout;
CicronetSnque
chez les
Latins
les fondateurs de la science
dans les
temps
modernes;
Roger
Bacon en An-
gleterre,
et ce.Gilbert
que
Bacon cite
souvent;
Telesio et son
compatriote Patrizzio, qui
dcou-
vrit le
premier
le sexe des
plantes;
Kircher,
qui expliqua
lemiroir
d'Archimdc
Grgoire
de
Saint-Vincent,
qui
fut si utile
Newton
Cavalieri,
VIte et
Fermat; Gassendi,
Boyle,
Otton de
Guerick, Hook, etc. Aldrovandi
Alpini,
Sanctorius,
les deux
Bartholius;
Co-
pernic, qui
retrouva le vritable
systme
du
monde
Kepler,
le
vraiment
inspir, qui en
dmontra les
lois;
Ticho,
qui
lui en avait four-
ni
les
moyens
Descartes,
qui
eut ce
qui
man*
ET SYLLOGISME. 43
quait
Bacon,
le droit de censurer
Aristote
Galile enfin
qu'il
suffit de nommer tous les
chimistes,
tous les
mcaniciens,
tous les na-
turalistes,
tous
les
physiciens qui dj,
l'-
poque
de
Bacon,
avaient si fort avanc ou
prpar
les dcouvertes dans tous les
genres,
ne s'taient
ctppM~M que
-K(r le
syllogisme
/Mais
dans ce cas c'tait donc un
grand
crime de
briser un instrument consacr
pard'immenses
succs. Le fait est
cependant qu'il
n'a
jamais
t
question
de
syllogisme
dans aucun livre
crit sur les sciences
d'observation,
en remon-
tant
depuis
Bacon
jusqu'
la
plus
haute anti-
quit.
Ce
prtendu
restaurateur de la science
s'est donc battu contre une
ombre,
et ses
pa-
ngyristes
ne veulent
pas
voir
qu'il
est ridicule
de
s'puiser
en raisonnements
pour prouver
rinutillte du
syllogisme
dans la
physique
exp-
rimentale,
qu'il
est la fois
ridicule.et
dange-
reux
d'appeler
cette science LA
VRIT,
comme s'il
n'y
en avait
pas
d'autre,
et
qu'en
supposant
enfin une thorie
physique appuye
sur des
expriences
bien
faites,
ce serait tou-
jours
une
grande question
de savoir
si la forme
.syllogistique
devrait tre bannie de
l'enseigne-
ment
appel
discuter et
prouver publique-
IXDUCTIOK 44
ment cette thorie. Pour moi
je pencherais
permettre toujours
au
syllogisme
de s'exercer
dans l'cole.
IIIB se jactet in auld
~Eo<u<,
et c!at!<o fentot'Mm carcere
f~net ~.).
On a
trop mpris
la mthode des scolasti-
qucs, qui
est
trs-propre
former
l'esprit
on a
trop mpris
mme leurs connaissances.
Plus d'un homme
clbre
tel
que
Leibnitz,
par
exemple,
et de nos
jours
Kant,
ont d
beaucoup
aux
scolastiques.
On ne
pourra
d'ailleurs assez le
rpter
Aristote a dmontr les lois du
syllogisme,
mais
jamais
il n'a
employ
ni conseill
la
forme
syl-
logistique
dans aucune science rationnelle ou
exprimentale.
Toutes les dclamations de
Bacon sur ce
point
tombent
faux,
et de
plus,
(<)
Dans un
appendice
annex a ce
chapitre je
donne un
exemple
dela mthode
sy))ogistiquenppHque
la
physique
moderne. Cette
esquisse
suffira
probablement
tout bon e~
prit qui
n'aurait
pas
une ide decette mthode.
ET SYLLOGISME. 45
ses
ides
taient si confuses
qu'aprs
avoir
per-
verti l'ide de l'induction
pour
se donner l'air
d'un
inventeur,
il la
pervertit
de nouveau
pour
donner l'induction un
avantage imaginaire
sur le
syllogisme, mprisant
ainsi la vritab!e
et
lgitime
induction,
et ne se ressouvenant
plus
bientt
aprs
de la chimre
qu'il
s'tait
avis de lui substituer.
Le
jt'M~eMte~~par
induction dit-il
trouve et
~M~e
ce
<~M~cherche par
:<Mseul ae<e de ~'0~
dement il
M'ewp~e point
de fe~Mes
moyens;
il
saisit
ro~'e~
immdiatement comme il arrive
dans la
sensation;
car les
sens par rapport
aux
o~c~preMters (1), qui
~citr sont
soumis,
/e<
o~e~oM~e~
et les
jugent
m'a~
par
le tMCMte
acte
(2).
(t)
ttt
objectis
suis
prim(triis.
(De
Augm.
Scient, v. 4.
Opp. t.vni,p.2G8.) Qu'est-ce qu'il
veut dire?
Lui-mme,
je crois,
ne lesavait
pas
bien
prcisment.
It
parait cepen-
dant
que
cette
expression d*o6)'cts premiers
se
rapporte
con-
fusment ce
que
Lockea dbit
depuis pingui
Aft'ttenx!,
sur les
qualits premires
et secondes.
(Essai
sur l'Entend.
hum.
U, 18, 9.)
(2)
Objecti speciem arripit
Mmtt!
(sensus)
e(
ejus
veritati
CONSENTIT.
(!bid-, p. 269.) Expression
U-cs-fausse;
car
INDUCTION ~8
Le voil donc maintenant
qui
abandonne
cette machine
complique qu'il
a nomme si
mal
propos
induction
lgitime;
et non-seule-
ment il en revient l'induction
ordinaire,
o
il ne sait
pas
voir le ~en~e
noye~ parce qu'il
n'y
est
pas
exprim,
mais il la confond de
plus
avec l'o~e~o~o~ et avec l'intuition.
Ainsi tantt il altre les ides dans leur es-
sence,
tantt il n'en saisit
qu'une partie,
tan-
tt il se
trompe;
mais souvent
aussi,
si
je
ne
me
trompe
moi-mme
infiniment,
il veut
tromper.
Aprs
avoir
dissip
les
nuages
amoncels
par
la fausse
dialectique
de Bacon,
et montr
la
pense peut
Lien
penser
!) ta
pense,
c'est--dire elle-
mme,
et c'est en cela
qu'elle
est
pense,
ou
substance-pen-
~e
autrement elleserait accident ou
qualit,
ce
qui
est ab-
surde
mais le
sens, quoiqu'il
sente,
nese sent
point,
ce
qui
est bien
diffrent
de manire
que
sans
objet
sensible
agissant
sur les
sens,
il
n'y
a
point
de
perception
sensible.
C'est
l'esprit
envertu desa
mystrieuse
alliance avec les
sens, qui
dit J E SERS. Aristote acertainement dit
quoique
part,
mais
je
ne sais
plus
o 7<
n'y a pas
MMft<tOtt
de sen-
sation,
oux~rh
K~~f; K!jO)]T:M;. C'est
quelque
chose
dj
de
bien
comprendre
ce
mot
mais
que
dirons-nous decelui
qui
l'a
prononc?
ET tYLLOOSME. 4'!
la
parfaite
identit du
syllogisme
et de l'induc-
tion,
il ne sera
pas
inutile de
jeter
un
coup
d'il sur l'essence mme
du.raisonnement ou
du
syllogisme.
Les lois du
syllogisme
dcoulent de la na-
ture de
l'esprit
humain. En s'examinant lui-
mme,
il voit
qu'il
est
intelligence (1) par
les
ides
primitives
et
gnrales qui
le constituent
ce
qu'il
est
!~e?'&eou
raison,
par
la
comparai-
son active de ces ides et
par
le
jugement qui
rapporte chaque
ide
particulire
la notion
primitive
et
substantielle
volont enfin ou
<t)MOMt\
par l'acquiescement
et l'action.
C'est dans l'endroit mme o il nous
apprend
que
nous avons t crs son
image
que
Dieu,
suivant la
sage
observation de saint
Augustin
(1)
Quoique
ce mot
d'intelligence
soit
pris
communment
pour
t'tre
spirituel absolu
nanmoins il
n'y
a
pas
d'incon-
vnient
(et
il suffit d'en
avertir)
de
l'employer pour expri-
mer la
premire puissance
de l'tre
spirituel qui
est la source
des deux autres. J e ne crois
pas
mme
que
la
langue
four-
nisse de terme
plus
commode
pour exprimer
simplement
la
puissance qui apprhende distingue
de la
puissance
qui
"~rme
et de celle
qui
t'cttt.
INDUCTION
4S
nous
enseigne
l'unit de la Trinit et la Trinit
de ~MM~e
(1).
De la nature mme de
l'esprit
nat, le
syllo-
gisme,
dont les termes ne sont
que
les formes
des
puissances
intellectuelles.
EXEMPLE.
1"
ybu<
e<re
sMMp~e
est Mt~e~'uc~Me.
(Ides
gnrales
de
simplicit,
d'essence,
d'indes-
tructibl!!t ides
qui
ne
peuvent
tre
acquises,
puisqu'elles
sont
l'homme,
et
que
demander
(1)
Demonstrante te
.docMet<m.t)!det'e'Trtn!'<at<'nt
unitatis et t<nt<aiem 1'rinitatis.
(August.
Confess.
XIII,
22
2.)
Un autre Pre de
l'Eglise profitant
de cette
langue
qui
les
surpasse
toutes exprime
ainsi cette mme ide J e
m'efforce
de
comprendre l'unit
et
dj
les
rayons
(ematret
resplendissent
autour de
mot
j'essaie
de les
distinguer,
et
dj
ils m'ont
repouss
dans t't<t)tfe.ou
~S~NM ~~o<i<!at,
xat
tt!
Tjafet n:pt)~xo/t!([
ou
yC~M
TK
*~t't<
StSt~t~,
xet! e!{TO
ev
c(~K9i-
po~Kt. (Greg. apud
Henr.
Stephan.
in
MANQ.)
L'unit snou
ayant
crs LEUR
image,
tout ce
qui
est dit du modle
6'apptique parfaitemeut
t'image.
ET BYH.OGISMB. 49
l'origine
de ces
ides,
c'est demander
l'origine
de
l'origine
ou
l'origine
de
l'esprit. )
2
Or,
l'esprit
de l'homme est
simple.
(J uge-
ment de la raison
opration
du verbe
qui
attache cette vrit la notion
originelle.) (1 ).
3 Donc
l'esprit
de l'homme est indestructible.
(Mouvement
ou dtermination de la volont
qui
acquiesce et
forme la
croyance.)
Autre-
ment
l'homme croira bien
qu'il
faut
croire
mais il ne croira
pas.
La
vrit,
comme la
vie,
ne se
propage que
par
l'union. Il faut
que
deux vrits
s'pousent
pour
en
produire
une troisime. Les Grecs
appelrent
donc
simplement logisme (raison-
nement)
une
proposition
Isole
et
~yMo~MtMe
(on
pourrait
dire
c<MTCHS07Nte~e?t<)
cette ru-
nion ou cette trinit de
logismes qui
renferme
les deux vrits manatrices et la conclusion
qui en procde (2).
(1)
Car la
parole
oule verbe est un
agent,
un
tre,
une
eubstance
spare,
une
hypostase
enfin. C'est
pourquoi
il est
crit DIC
VERBO,
et non
pas
DIC VERBUM.
(2)
!i est vrai
que
lescrivains
grecs
confondent
quelque-
fois ces deux
expressions,
mais c'est
par
un abus assez na-
TOHIE 1. 4
INDUCTION
S3
Le
squelette
du raisonnement humain est
revtu de chair dans
l'usage
ordinaire;
mais,
quoiqu'on
ne
l'aperoive pas, cependant
il
soutient tout. L'homme ne
peut
raisonner sans
tirer une conclusion de
deux prmisses prou-
ves. Dans la dissertation
la
plus loigne
des
formes
sco!astiques,
le
syllogisme
est cach
comme le
systme
osseux dans le
corps
ani-
mal.
On ne doit donc absolument rien Bacon
pour
avoir substitu l'induction au
syllo-
gisme (1),
et les
loges qu'on
lui donne cet
turet et
qui
ne
saurait nuire aux deux sens clairs et distincts
qu'ettes prsentent
en elles-mmes
lorsqu'on
les considre
part
avec une
prcision rigoureuse.
(t)"La logique
de
Bacon,
disait
Gassendi, n'emploie
point
le
syitogisme
dont la
logique vulgaire
fait un si
<<grand usage;
au
syllogisme
elle substitue l'induction',
mais une induction exacte et
svre,
qui
ne
prcipite
rien qui
n'oublie
rien
mais surtout Bacon ne
permet
pas que d'aprs
un
petit
nombre
d'expriences
faites en-
core la
hte
etc.
( cit
dans le Prcis de ta Philoso-
pMe
de
BaccM,
tom.
1, p.
33. )
I!
y
aurait bien des r-
nexions faire sur ce
morceau
principalement
sur le
repro-
che fait l'ancienne
logique.
J e me contente d'observer
que
Gassendi ne dit
pas
le mot de la fameuse mthode d'exclu-
sion
en sorte
que
Bacon est constamment lou
non-seu-
ET SYLLOGISME. 51
gard
n'ont
point
de sens.
Lorsque
les savants
ritiques que je
viens de citer nous disent
que,
si ton reCOM~
unefois
l'instrument
d'Aristote,
on
~ecoM?T
cent
fois
celui
deBacon,
ils
sup-
posent
donc
que
ce sont l deux instruments
auxquels
on
peutrecouriren
cas de besoin
pour
diriger
nos travaux et nous
guider
dans la d-
couverte de J a vrit.
Or,
c'est
prcisment
comme s'ils avalent dit
(mais
j'excuse
et mme
j'honore
en eux !e
prjug national) que
Shakespeare,
pour
composer
le
monologue
de
Hamlet
consulta l'Art
potique
d'Horace.
Encore une
fois,
il
n'y
a
point
et il ne
peut
lement
pour
ce
qu'ii
n'a
pas fait,
mais
pour
ce
qu'il
a dclar
faux et puril.
Gassendi futleseulhomme clbre du
grand
sicle
(quoi-
que
non du
premier rang) qui
ait fait
quelque
attention
Ba-
con. Les hommes se
plaisent,
se runissent et
s'applaudissent
mutuellement,
bien
plus pour
leurs dfauts
que pour
leurs
bonnes
qualits.
C'est une
complicit
d'erreurs
qui
rendait
le philosophe anglais
cher au vertueux
prtre
de
Digne
c'est
l'attachement la
philosophie corpusculaire qui
sduisait
Gassendi, et non
l'induction, qui n'appartiendrait
nullement
Bacon,
quand
mme il l'aurait recommande au lieu
de la
tourner en ridicule.
4.
INDUCTION 62
y
avoir de mthode d'inventer. Toutes les
rgles,
tous les
on~M,
toutes les
mthodes,
toutes
les
potiques,
ne sont
que
des
productions
de
l'esprit, qui
vient
aprs
le
gnie,
et
qui
s'amuse
nous dire ce
qu'il
faut faire
d'aprs
ce
que
ce
dernier a fait.
Que
si l'on vient examiner ces sortes d'ou-
vrages
non comme
moyens,
mais comme mo-
dles,
alors il
n'y
a
plus
de doute
l'avantage
est tout du ct
d'Aristote,
et l'on ne
pourra
mieux faire
que
de le consulter cent fois
pour
une fois
que
l'on
daignera
feuilleter le ~Vbuue~
Organe;
car
je
ne crois
pas qu'il
existe ni chez
les
anciens,
ni chez les
modernes,
aucun ou-
vrage
de
philosophie
rationnelle
qui suppose
une force de tte
gale
celle
qu'Aristote
a d-
ploye
dans ses
crits
sur la
mtaphysique,
et
nommment dans ses
.~Ka~HM.
Ils ne
peu-
vent
manquer
de donner une
supriorit
dci-
de tout
jeune
homme
qui
les aura
compris
et mdits. Le
style, toujours
au niveau des
penses,
est tonnant dans la
plus
tonnante
des
langues.
Mais
qu'il
est difficile de com-
prendre
Aristote,
etdans
quel
tat ses ouvra-
ges
nous sont
parvenus
Oublis
longtemps,
enfouis ensuite et en
partie
consums dans la,
ET SYHO&ISME.
53;
terre, retrouvs,
corrigs, interpols, etc.(1),
pouvons-nous
en lire un
chapitre
avec la cer-
titude de lire Aristote
pur?
On le reconnat
cependant
sa
gravit,
ses ides
condenses,
ses formes rationnelles
trangres
aux
sens.
et
l'imagination,
cette
parcimonie
de
pa-
roles
qui
craint
toujours
d'embrasser la
pen-
se,
et
qui
sait allier la clart un laconisme
surprenant.
Dans ses bc aux moments et lors-
qu'il
est certainement
lui-mme
son
style
semble celui de la
pure intelligence.
Il est.le
dsespoir
des
penseurs
et des crivains de son
ordre
(2).
Le
style
de Bacon est tout
diffrent,
et d-
montre
l'vidence
l'incapacit
du
philosophe
anglais
dans les matires
philosophiques.
Son
(1) Strab. lib. xm;
edit.
paris. t620,p.
609. Plut. in
Sylla chap.
53e de la trad. V. Beattie on
Truth, part. m,
ch.2,8''p.396.
(2)
En laissant de cd<e BAVARDAGE d'Aristote,
etc.
(M. LasaUe,
note sur.
Bacon
De l'Accr. et de la
Dign.
des
Sciences,
liv. v. ch. iv.
OEuvres,
tom
n, p.
311. )
Le bav
Mrdage
d'~fttto<e Cette
expression
est un vritable monu-
ment de
l'esprit franais
au xvm
sicle, qui
dure
toujours,
quoi qu'en
disent les almanachs.
54 INDUCTION
style
est,
pour
ainsi
dire,
Mto~erM~ il ne
s'exerce
que
sur les
formes,
sur les
masses
sur les mouvements. Sa
pense
semble,
s'il est
permis
de
s'exprimer
ainsi,
se
corpon'ser
et
s'mcorporer
avec les
objets qui l'occupaient
uniquement.
Toute
expression
abstraite,
tout
verbe de
l'intelligence qui
se
contemple
elle-
mme,
lui
dplat.
tirenvoiel'cole toute ide
qui
nelui
prsente pas
les trois dimensions. H
n'y a pas
dans toutes ses uvres une
ligne,
un
mot
qui
s'adresse
l'esprit
celui de nature
ou
d'essence,
par exemple,
le
choque;
il aime
mieux dire
/brme, parce qu'il
la voit. Lemot
de
prey'M~e
est
trop
subtil
pour
son
oreille
il
dira
idole,
parce qu'une
idole est une statue
de
bois,
de
pierre
ou de
mtal,
qu'elle
a une
forme,
une
couleur,
qu'on
la touche
et
qu'on
peut
la
placer
sur un
pidestal.
Au lieu donc de
dire
~r~'u~M~eM6[<!OM,p~'M~M~e corps,
etc.
il
dira idoles de place publique,
idoles de tribu, etc.;
et
ces
prjugs personnels que
nous tenons
tous
plus
ou moins du caractre et de l'habi-
tude,
il
les
appelle idoles
(~cme~e;
car l'in-
trieur de
l'homme n'est
pour
lui
qu'une
ca-
verne
humide,
et les erreurs
qui
distillent de
la vote y
forment des concrtions toutes sem-
ET SYLLOGISME. 53-
blables ces stalactites
qui pendent
aux ca-
vernes
vulgaires.
S'il trouve sur son chemin
quelque
terme
que l'usage
et le consentement universel aient
tout fait
spiritualis,
il cherche
l'avilir,
le traner dans le cercle
matriel,
le seul o
il
s'exerce, et,
suivant les
plus
tristes
appa-
rences,
le seul
qui
lui
part
rel. C'est ainsi
que
le mot
esprit
l'embarrassant un
peu
comme
un mot
parfaitement
ewoM~,
il tche de Ic~
dgrader
en lui
proposant,
on ne sait
pour-
quoi,
de
droger
au
point
de ne
plus exprimer
quef<HKC5e!Mt<tue (matrielle
suivant ses Ides
mesquines ) (1).
Hume n'a
rendu
qu'une justice partielle
au
style
de
Bacon,
en le
dclarant
empes et p-
~ccM<e~Me(2).
Il
pouvait ajouter,
et rien n'est
(1)
Anima sensibilis sive
6fM(ort<M,p!oKe
~uBsfanh'a
cor*
porea
censenda est. Est autem hcM anima in 6!-M<~ OM'ma
principalis;
in homine aM<ent
organum
<att<MHt,
et
SPIRITUS
polis appellatione ~Mam
attt'nxB
indigitari possit.
(De
Augm.
Scient.
iv,
3.
Opp.
tom.
yn,
p.
232. )
(2)
Stif and
pedantic. Essays;
London, 1758, in-4',
ch.
xv,
p. 59. Le traducteur
franais
de
Bacon,
dont (&
INDUCTION ET SYLLOGISME. 56
plus
vident,
que
ce
style
exclut absolument
le vritable
esprit philosophique.
J e n'entends
point,au
reste,
lui
disputer
le mrite
qui
lui.
appartient
comme
style ingnieux, pitto'
resque
et
potique.
tr~s bon
esprit
n'avait besoin
que
d'un autre
sicle
laisse
chapper
une
prcieuse
navet sur le
style
de son hros.
Bacon avait crit
( De Digu.
et
Augm.
Scient.,
lib.
YUi,
cap. u. )
O se trouvent
beaucoup
de
poro~M,
l se trouve
pres~tte toujours l'indigence.
M.
Lasalle,
dans un moment de
franchise
crit au-dessous L'EXEMPLE N'EST PAS
LOIN.
(tom. n,
p. 282
note
1. )
-Ceci vaut un
peu
mieux
que
le
bavardage d'~in~ofe.
APPENDICE
AU CHAPITRE' PREMIER.
BIEMPLB DE LA
DIALECTIQUE
ANCIENNE
APPUQCB
AUX SCtENCES KOUYELLES.
TThtsc de
fhystqMc
sur
t'Arc-en-tet.
Z'CM'c-en-Me~est
produit par
les
t'ayons
so-
~MM'esett~ecHt ~aHs les
globules
de la
pluie
et
renvoys
Fce~
aprs
deux
r fractions
et une
seule
r flexion
quant.
l'arc
in frieur,
et
aprs
deux
rfractions
et autant de
rflexions ~uc[?(f
(( l'arc
SMpM':CtM'.
58 APPENDICE.
/OPPOSANTo
.<yKM!e~e
ainsi contre votre ~ese
Pour
que
l'arc-en-ciel
pt
tre
produit
de la manire
que-vous l'expliquez,
il fau-
drait
qu'il n'y
et aucunes
gouttes
inter-
poses
entre i'ilet celles
qui,
selon
vous,
produisent
le
phnomne
(majeure).
Or,
il
n'est
pas
seulement
permis
de faire une telle
supposition (MM'~eMre).
Donc votre thse
tombe
(c(MMe~MMMe).t
9
l
LE SOUTENANT.
( Il rpte l'argument puis il repre~ )
Pour que ~arc-eM-c/e~o~M~,
etc. J e nie
la
majeure.
Rien ne
prouve que
l'absence
des
gouttes
intermdiaires soit une condition
in-
dispensable
de
l'apparition
du
phnomne.
Celles
qui
sont la hauteur ncessaire
trans-
mettentles
rayons jusqu'
Fil. Les autres sont
nulles,
quant
au
phnomne.
Donc,
etc.
APPENDICE. 65
L'OPPOSANT.
J e
prouve
la
majeure.
Suivant vos
prm-
cipes
(1)
le
rayon qui
entre dans la
goutte
est
rchiet
rfract sous certains
angles
<'
dtermins qui
le
portent
dansl'il;
mais
la chose est videmment rendue
impossible
par
les
gouttes
intermdiaires amonceles
au hasard et
toujours
en mouvement entre
les
premires
et FH de
l'observateur,
puis-
innombrables accidents
qu'ils prouvent
sur
et
je
dis
(2)
Pour
que
le
rayon
efficace
produise
son
effet,
il faut sans doute
qu'il
arrive directe-
produiraient
de nouveaux arcs-en-ciel a I'm<
fini,
et
par consquent
une confusion
par-
faite; donc,
etc.
LE SOUTENANT.
Vous
argumentez
a!ns!:7~t<?'~Me
le
rayo~
efficace,
etc. J 'accorde la
majeure.
Or, c'est ce
qui
est
impossible, parce
que
etc. J e nie la mi-
neure et la
consquence (1).
En
effet
ds
que
les
rayons
sont diviss
par
la
rfraction,
ils
conservent invariablement leur nature tra-
vers toutes les rfractions
possibles.
Comment
pourrait-il
donc se faire
que
le
rayon rouge,
par exemple,
une fois
spar
et rflchi dans
la
goutte qui
le
renvoie dans notre
ceit,
pro-
duisit
jamais
une
autre sensation
que
celle du
rouge?-
J e rduis donc ainsi mon
argument
la
forme,
et je
dis
Les
rayons, une
fois spars,
~MeMf'e~MM~
(1)
Nego
minorome<
coMf~MXt'atn.
APPEXDICB. c<
<<M'6tMMa travers tous
~Ht~!CM.Kp0~6~.
Or,
les
rayons gM'oM
MOM~e efficaces sont at~Mc~
dans
~prc~Mres ~oMMes precMemeM<
co~Mc
dans
~e~pr~Mes.
Donc
~esa'ottMes
M!<ertMed!'o[tres
S0n< Mt<Ke~
~Ctr ~~)0!~
OM
~AcKO)MC!:C.
L'OPPOSANT.
Or,
en
supposant
mme l'!na!terabttit des
rayons
travers les
gouttes
intermdiaires,
la
formation
uMMe de l'arc-en-ciel serait
impos-
sible
par
le
moyen allgu;
donc ma
difficult
SM6.SM<e
et je prouve
ma
reprise
(1)
Si le
rayon
rflchi n'est
pas
c~ere,
il est
au moins dvi
par chaque
rflexion
or,
les
gouttes
intermdiaires le brisant en mille
manires,
il s'ensuit
qu'il
ne
pourra
arri-
ver l'il
pour y
former une
figure rgu-
lire,
etc.
(l)~~Mt, po<t<o
etiam
~t<Ad,
<<c.
EfgoHM~atotwtt'o.
Probo subsumptum.
APPENDICE. C2
Il serait
superflu
de
pousser plus
loin cette
petite
chicane
imaginaire.
Un
lger
chantil-
lon suffit
pour
donner une ide claire de la
mthode
scolastique,
et
pour
montrer com-
ment elle
pourrait s'adapter
toute
espce
de science et
d'enseignement.
Il faut
ajouter
que
sans cette mthode les discussions
pu-
bliques,
trs-utiles
cependant
sous
plusieurs
rapports,
devront
presque
ncessairement
dgnrer
en conversations
bruyantes
et sou-
vent mme
impolies,
o les deux interlocu-
teurs
divagueront
sans
pouvoir
s'entendre.
Un
moyen
sr de
parera
cet inconvnient
se-
rait sans doute d'astreindre la
dispute
des
formules
rigoureuses.
Toute
personne
qui
voudra s'exercer dans ce
genre s'apercevra
bientt de la
prodigieuse
difficult
qu'on
doit
vaincre
pour
suivre la mme ide sans la
moindre
dviation,
et cette
difficult excessive
prouve
Futilit de la
mthode,
qui
n'a certai-
nement rien
d'ga!, pour
former
l'esprit
en le
rendant la fois
sage
et
pntrant.
J e ne dis
pas que
les sciences
qui reposent
entirement sur
l'exprience
se
prtent
aussi
aisment
que
les sciences
purement
ration-
APPENDICE; G3
nelles la forme.
syllogistique;
mais
je
dis
qu'il n'y
a
pas
de raison d'exclure cette forme
en
gnral,
et
je
crois de
plus que
les
physi-
ciens mme et les
chimistes,
s'ils
essayaient
de s'tendre sur ce lit de
Procuste
pourraient
tre conduits dcouvrir des cts faibles
dans leurs
thories,
ou des
moyens
d'tre
plus
clairs et
plus
convaincants.
D'Alembert accusait les
scolastiques
d'avoir,
nerv les sciences
par
leurs
gMe~<!o?M
Mtntt-
tieuses
(1);
mais comment auraient-ils
pu
nerver ce
qui
n'existait
pas ?
Ils ttonnaient
en attendant le
jour
ils
prparaient l'esprit
humain,
ils le
rendaient
fin dli,
pntrant,
minemment ami de
l'analyse,
de l'ordre dans
les
ides,
et des dfinitions claires. Ce sont
eux,
dans le
vrai,
qui
ont cr un nouvel m-
strument ils taient ce
qu'ils
devaient
tre,
ils
ont fait ce
qu'ils
devaient faire. Bacon
n'y
voyait goutte.
Deux
sophismes
vidents sont la
base de tout ce
qu'il a
dit sur ce
point.
II
sup-
(~
D'Alcmbert
citdans lePrcisdela
Philosophie
deCo-
con,
par
M.
Deluc, tom.
p.
44.
APPENDICE C4
(pose
d'abord
que.le syllogisme
tait la science
(~e
l'cole,
au lieu
qu'il
en tait l'~M~MMeM~.
Cette
physique oprative que
Diderot
appelait,
je
cr ois
la
philosophie
manouvrire,
n'tant
point
ne encore du
temps
de ces vieux doc-
teurs,
ils
pouvaient
sans aucun inconvnient
rduire la forme
syllogistique
tout ce
qu'ils
savaient ou tout ce
qu'ils croyaient
savoir.
S'ils ont trait de cette manire un
grand
nom-
bre de
questions
futiles,
ils
ressemblent,
nous
le
rptons,
un homme
qui emploierait
un
cabestan
pour
arracher les choux de son
jar-
din on aurait sans doute
quelque
raison de
rire de cette
opration,
mais
je
n'y
vois rien
qui puisse
altrer la
rputation
do cabestan.
De savoir ensuite si nos
expriences
mo-
dernes tant
prises
comme des
points d'appui,
l'antique
levier ne
pourrait pas
servir encore
pour
MM/eucr les thormes
physiques
et
pour
en dterminer au moins le vritable
poids,
c'est une
question qui
mriterait d'tre exa-
mine.
Le second
sophisme
de
Bacon,
c'est d'avoir
reproch
au
syllogisme
d'tre inutile aux d-
couvertes,
abandonnant, dit-il
aux sco-
APPENDICE. 65
lastiques
le
syllogisme
dont la
marche,
sup-
posant
des
principes dj
connus ou
vrins,
ne
peut
tre utile MOI
qui
les
cherche,
je
m'en tiendrai
l'induction,
non
pas
cette
purile
induction,
etc.
(1).
Quel
orgueil,
et
quel aveuglement
Il faut
dire de
chaque
science ce
que
Bacon nous
dira bientt et trs-mal
propos
de la
matire,
qu'elle
doit ~'e
pn'M
comme elle est. Tout en-
seignement scientifique
transmet la science
dans l'tat o elle se trouve. Un matre est
excellent,
lorsqu'il
est en tat
d'apprendre'
tout ce
qu'on
sait de son
temps
sur la science
qu'il professe.
Il ne doit ni
promettre
ni tenir
davantage.
Si
quelqu'un
dit
Qu'ai-je
faire
de ces
mthodes, MOI
qui
Meveux
gM'MMe~er?
on ne lui doit
que
des clats de rire. Il
n'y
a
point,
il ne
peut y
avoir de mthode d'inven-
ter. Les inventions dans tous
les
genres
sont
rares.;
elles se succdent lentement avec une
apparente
bizarrerie
qui trompe
nos faibles
(l)OEuvres
de
Bacon,
trad.
par
Lasalle,
tom.
i,prt.
p.vin
tx.
TOME 5
AFPEXDtCR.. Mri
regards.
Les inventions les
plus importantes,
et les
plus
faites
pour
co~Mo~r le
genre
hu-
main,
sont dues ce
qu'on appelle
/e /MMC!r~, 1
et de
plus
elles ont illustre des sicles et des
peuples trs-peu
avancs et des individus
sans
lettres on
peut
citer sur ce
point
la
boussole,
la
poudre
canon,
l'imprimerie
et les lunettes
d'approche.
Est-ce l'M~MC~o~
lgitime
et la
mthod d'e;Kc~M!OM
qui
nous ont donn
le.
quinquina, l'ipcacuana
le
mercure,
la vac-
cine,
etc. ? Il est
superflu
d'observer,
quant
ces dons du
hasard,
qu'ils
ne sauraient
tre
soumis
aucune
rgle il n'y
a
srement pas
de mthode
pour
trouver ce
qu'on
ne cherche
pas.:
et
quant
aux autres dcouvertes
qui sont
le
prix
de
travaux
faits a
pnon,
avec un but
dtermin,
telles
que
les montres
quation,
les
lunettes
achromatiques
et autres
choses
de
ce
genre,
elles
chappent
de mme. toutes
les
mthodes,
parce qu'elles
tiennent
cette
partie
des
arts qui
ne
peut
tre
enseigne.
Un
probtmc
de
mathmatique
une fois mis en
quation,
cde un travail
presque mcanique
qui
ne
suppose que
la
patience,
l'exercice et
une force
d'esprit
ordinaire;
mais l'instinct
qui
conduit
l'quation
ne saurait tre ensci-
AHENDICE. 67
gu
c'est un talent et non une
science. Cet
exemple
fournit une induction
lgitime qui
s'applique
tous les arts et toutes les scien-
ces. Certaines choses sont ueK~MM
l'homme,
et d'autres lui sont
donnes;
si l'on
pouvait
acheter un
doM,
il ne serait
plus
c~M.
DE L'MPMENCB M
CHAPITRE :L
M t.'EXFtEIENCB ETDUG&NIE DESDtCOOVMTES.
Fneton a dit une chose
remarquable
sur
l'attrait
divin.~?tcM~oMucpo!')~,
dit-il,
par
des M!0!<uen!eM~ si
mct~MM ~M'
~o?'~c?~
avec
eux la cer~t~e
qu'ils
sont J tums. Et it
ajoute
qu'on
ne le
possde point, lorsqu'on
se dit
soi-mme Oui c'est
~(u'
moM~e~HM~
que
j'agis (~).
H
y
:<une
grande analogie
entre )a
grce
et
(1) OEuvres
spirit.
ton.
tY,
lettre
ci-xu', p.
t55, <56,
de
'tdit. m-t2.
<t DU C&tB DES DtCOUVBRTES. 69-.
te gnie
car
!e~c?Me
est une
~dce.
Le venta-:
bl
homme de
gnie
est celui
qui agit parmou-.
vement on
par impulsion,
sans
jamais
se con-
templer,
et sans
jamais
se dire OM~/
c'e~par
mouvement
<~Me~'a~M.
Cette
simplicit
si vante comme
le'princi-.
pal
caractre du
gnie
de tous les ordres tient
ce
principe.
Comme il ne
se regarde pas.,
il
marche
ta vrit
sans penser lui mme, e<
son <a~tant
simple,
la lumire le
~eMe~re
c~
<!ere~e~<
(t).
Non-seulement donc le ~VoMue~
O~aMe
est
inutile comme
moyen
d'invention
mais le ta-
lent
qui
a
produit
ce livre exclut toute
espce
de
gnie
dans les
sciences,
parce que
c'est un
talent
qui
se
re~e~e
et
qui
ne saurait
agir par
mouvement ou
par ~'dce.
C'est une loi invariable
que les moyens
d'ar~
river aux
grandes
dcouvertes n'ont
jamais
de
rapports assignables
avec la
dcouverte
mme.
Supposons qu'on
demande
vingt
Archimdo
runis un
moyen pour
renverser les
remparts
(i)Matth.Yt,~
DEL'EXPRIENCE 70
d'une ville sans en
approcher plus prs que
deux ou trois cents toises tous
demeureront
muets, tant
le
problme parait
dRer
toute la
science
et toutes
les forces humaines Il
faut
renoncer la
vigne
au
&e/er,
la~a~&t~MC,
l'lpole
etc. En
possession
d'une
balistique
telle
qu'elle
tait dans les
temps antiques,
ils
chercheront la
perfectionner
mais
comment
s'y prendre?
o sont
les.
ressorts
ncessaires,
et o sont les forces
capables
de les
employer ?
le
problme
parait
insoluble. Alors se
prsente
un moine
obscur,
quidit
Prenez
f!MM[~e~'e;
broyez-le
ouec
du
MM~e e<
f~M
charbon etc,
Le
problme est
rsolu
(1).
A la
place
des
vingt
Archimde,
plaons
vingt
mdecins non moins
fameux,
et.suppo-
sons
qu'on
leur demande un
moyen
d'extirper
la petite vrole.
Leurs ides
se
tpurneratcnt
(<)
Bacon lui-mme a fait cette
observation,
et le ctcbre
Black a
remarqu qu'en
chimie mme la
plupart
des d-
couvertes les
plus avantageuses
aux arts sont dues aux ma-
nipulations
des artistes
habiles,
plutt qu'
ce
qu'on ap-
<<
pelle
science ou
philosophie chimique.
(Lectures
onChe-
mistry, in-4", 1.1, p.
19.~1
ET DU GENIE DM DCOUVERTES.
71
du cot de l'inoculation
vulgaire
ils demande-
raient main-forte
toutes les.
puissances
de
l'univers
pour
faire inoculer le mme
jour
tout
le
genre
humain.
Quel
raisonnement
a~no?T,
quel
nouvel
organe pourrait
leur
apprendre
qu'il
faut s'adresser aux vaches d'Ecosse ?
Il
y
a
plus.
Tout homme
qui
se croit en tat
d'inventer un instrument
pour
inventer d-
montre
qu'il
est
incapable
d'inventer
lui-
mme,
comme tout homme
qui
crit sur la m-
taphysique
d'un art
prouve qu'il
n'a
point
de
talent pour
cet art.
Nulle
exception
cette
rgle
et voil
pourquoi
le sicle des disserta-
tions suit constamment celui. des crations.
Racine
j'en
suis
trs-sr,
n'aurait
pas
su faire
le livre des
synonymes
et
cependant
il em-
ployait
assez bien les mots.
Une foule d'hommes
lgers
ont demand si
le xvn~sicle
peut opposer
en France un livre
comparable
l'J ~M~
des Lois. Sans disserter
sur ce
livre
on
peut
se borner
remarquer
que
le sicle
qui
a
produit
l'ordonnance ci-
vile,
l'ordonnance
criminelle,
l'ordonnance
des eaux et
forts
l'dit sur les
duels,
l'or-
donnance de la
marine,
qui
est devenue la
loi
-R/M~Kten Europe,
etc.,
se
gardait
bien de
DB
I.'EXFMBUCtt 72
disserter sur la
ve~M,
MoMMettr et la c?'a!'?~c.
U avait bien d'autres choses faire.
J 'ai invent un
M)~'MMeM<,
nous dit souvent
Bacon;
(f(K<~M s'en serviront. Folie de l'or-
gueil,
et rien de
plus.
Cet instrument n'est
pas possible,
et Bacon n'a rien invent ni fait
inventer. Aucun homme de
gnie
aucun in-
venteur dans les arts et dans les sciences n'a
fait attention lui. Pour rfuter
Hume,
qui
l'a
jug
assez svrement
(1),
un
critique
de
cet historien s'est
permis
un
singulier
raison-
nement ~VMM
devons avoir; dit-il,
M~e~raMje
ide de
l'importance
des crits de Bacon
pOMr
~e monde
savant, si
):OMS a~meMoM~ ~er~e
~e l'assertion du J oc~e!M'
Beattie,
qui parat
~'M'/bn~ee,
savoir
Que
la science a
fait
plus
de
progrs depuis
Bacon
et par
sa MM-
<AoJ e,
<~t;c
dans les mille ans
<<
/'a~
~'eceJ J
(2).
()) Hist. of England,
in-4";
Edimbourg,
17.~7, vol, 1
p.t9t,192.
(2)
Towers's Observations on M. Hume's Hist. ofEn-
g!and; London, 1777, iu-8", p.
138.
ET DU Ct!'<!E DES DCOUVERTES.
C'est
le sophisme vulgaire,
ce
gMH~KHe
chose en est
~e~e< (i).
Bacon n'a
point
invent
de
mthode,
et n'a dit
que
des mots. C'est une
erreur
d'imaginer
seulement
qu'il
ait influ
d'aucune manire sur les dcouvertes
qui
ont
illustr
l'Europe depuis
le commencement du
xvir' sicle.
On aura beau
rpter
qu'il
a recommand
l'exprience
il suffira d'abord de
rpondre
qu'iU'a
recommande fort
inutilement,
puis-
que
de tout ct on faisait des
expriences
et
que,
la
physique exprimentale
tant
ne,
elle ne
pouvait plus rtrograder.
Il ne sait d'ailleurs ce
que
c'est
que l'exp-
rience
toutes ses ides sur ce
point
sont
fausses et mortelles
pour
la science.
J M~M'~
prsent,
dit-il
l'exprience
tait
vague
e<MesMt-
vait
<jfM'eMe-neMe (2). Absolument tranger
(1)
POST HOC, ERGO PROPTER HOC.
(2)Faa<t
enim
Mpcrten<t'a,e< Mtantmsequens,mera
pa!pa<to est,
et homines
po<t<M ~<upf/<tct< qum
<n/brttta<.
( Nov.
Org. i,
c.
Opp.
t.
vin, p.
52. ) Bacon prend
ici tous
les caractres de
l'inspiration pour
ceux tte t'iHu~ion
il est
infaillible dans t'erreur.
DE L'XPELJ EXCB '74
aux dcouvertes et
l'esprit qui
!cs
produit,
il mconnaissait entirement ce mouvement
intrieur,
ce ttonnement heureux
qui est
!e
vritable caractre
du
gnie. Egar
par
ses
folles
thories,
il en tait venu
appoint
de
croire
que
toute
exprience
devait tre, faite
sur un
plan
arrt
<xpn'or:et~cr ecn<(1). H
se
plaint que jusqu'
lui on avait accord
la
mditation
plus qu'
l'criture. Au lieu
que
les
physiciens jusqu'alors
crivaient ce
qu'ils
avaient
fait,
Bacon veut
gM'asMM~ce qu'ils
ont crit.
L'exprience
a tort de se suivre elle-
?Mme;
elle doit se
prcder
se
prescrire
des
rgles
elle-mme, et
savoir d'avance o elle
va alors seulement
o~~oMr?'( esprer quelque
eliose des sciences
(2).
Reprenant l'analogie
de la
grce
et du
gnie,
qui
est une
grce, je rappellerai le
prcepte qui
nous a t donn de ne
pas
c?'o:re,
comme
lespaens que parler
beau-
(i)
Il
appelle
assez ridiculement en, latin cette
exprience
<Epertett<t<t
Hera<<t.
(Ibid.
n" cj.
)!
(2)
Cm
experientia ~a
cerf<!
procedet,
~ert'ttm et con-
<tft~n<<'r,
de:t'M<tt'<
aliquid
M)c<t't
sperari potril.
ET DU GNIE DES DCOUVERTES. 75
coup
c'66<
beaucoup prier.
H
y
a dans la recher-
che des causes naturelles une erreur toute
semblable,
c'est de croire
que beaucoup
ccr~'c
c'est
eaMcoMp NcmoM',
tandis
que
la
rgularit
technique
de l'criture et l'ordre
didactique
qu'elle Impose n'accompagnent jamais
!e
gnie,
et l'excluent mme de la manire la
plus pr-
cise.
Or,
les
opinions
de Bacon
n'tant,
un
trs-petit
nombre
d'exceptions prs, que
des
contre-vrits
il n'est
pas
tonnant
qu'il
ait
fait de
l'exprience
crite et antrieurement
dispose
la condition
prliminaire
et indis-
pensable
de toute dcouverte. Sans cette con-
~tttOM, dit-il,
on ne saurait ccuoKcer fasMure de
l'intelligence,
ou ~'ceM~re
philosophique
(1),
et
c'est comme si fou tjoM~a~ CMr d tte et re-
tenir dans sa mmoire des
phmrides
sans les
ect~'e
(2).
(1)
Observez
ces
expressions.
faeuere <!<:
t'M<eHye)tce
la
philosophie.uniquc,
c'est ta
physique
tout lereste n'est rien.
Si l'on
pouvait
hair les sciences
naturelles,
ces ridicules
exagrations
les feraient har.
(2)
Nullo modo
~Ct(
ttt<e~M<t ut in !am materiam
oga<~pon<ee(metnor!<er;
non
magis qum
si
gttxcompMta-
DE L'EXPBtENCB ?)! ilb
Cette
comparaison trange
tenait encore
aux fausses thories de Bacon. Au lieu
d'adap
ter ses
systmes
l'homme
!1 invente un.
homme qu'il plie
ses
systmes (1).
Il
divise
l'homme il en voit un
qui
observe et un au-
:re
qui
raisonne il
charge
le
premier
de faire
des
expriences
sans fin sur tous les tres de
la
nature;
et cette foule
d'expriences, il l'ap-
tionem
alicujus fp~onerMt~
Mtemor~er M tenere et
tperofe
pOMe <p<re(. (Nov.
Org.
no
c, ci.)
(1)
Bacon a
igu
ce
grand sophisme
Condillac, qui
n'a
jamais
cess un instant de raisonner
d'aprs
un homme ima-
ginaire. Voyez, par exemple
son
ouvrage
sur la statue.
Qu'arriverait-il
fi une statue recevait
successivement.
~<
cinq ~ens
et
successivement encore toutes les sensations
qui
en
<fepett<fen<
? I! arriverait
que
ce ne serait
pas un
homme.
Ds le
premier
moment de son
existence,
t'homme est en-
vironn
par
toutes les ides
qui appartiennent
sa
nature;
mais l'ordre est tel
qu'elles
se succdent avec une tonnante
ctrite
et
qu'elles
sont d'abord d'une faiblesse
extrme
ne s'levant
que par
nuances insensibles l'tat de
perfec-
tion
qui appartient
chaque
individu d'o il
rsulte
que
la
mmoire ne
pouvant
s'en
reprsenter
aucune comme ant-
rieure ou
postrieure,
toutes sont censes non-seulement
fit~e)*,
mais co-exister et commencer chez lui la
fois
ainsi
il
n'ya point de premire impression,
point de premire
ide,
point
de
premire
exprience,
et tout est simoitan.-r-
!:CCE HOMO
ET DU GtftE DES DCOUVERTES. 71
pelle
tt~e
7'ore<;
car toutes ses
paroles
sont
matrielles.
Quant
lui,
H se donne un
pri-
vilge
en
qualit
de
lgislateur
il
multiplie
la
multitude
il ne se contente
pas
d'une
fort
d'expriences;
il demande une
fort
de
/bre~
et c'est sous ce titre
extravagant qu'il
nous a
donn ce
qu'on appelle
son histoire
Ma<M~e( 1 ).
Cette fort une fois
plante,
il
permettait
FoM~e homme de raisonner et d'en tirer des
consquences.
On
conoit
qu'un
tel
systme
exige
l'criture.
Quel
homme
peut apprendre
une
fort par
cur, ou
ce
qui
est bien au-
trement
difficile,
M~e
fort de forts?
Mais toutes ces
imaginations
sont directe-
ment contraires au vritable
esprit
des scien-
ces.
Quand
on voit Bacon diviser son histoire
naturelle en dix livres contenant chacun cent
expriences (total, mille,
bien
comptes),
on
peut
tre sr d'avance
qu'il n'y en
a
pas
une
seule
qui suppose
le moindre talent. L'auteur
s'adresse tous les tres de la
nature;
mais au-
(1)Sylva sylvarum,
or anatural
history
inten
centuries,
Opp.
tom.
p.
239
Eq't.
DE L'EXPRIENCE 78
cun ne le
reconnat,
et tous sont muets
pour
Im.
Galile en
voyant
osciller la
lampe
d'une
guse,
Newton
en
voyant
tomber une
pomme,
Black en
voyant
une
goutte
d'eau se dtacher
d'un
glaon,
conurent
des ides
qui
devaient
oprer
une
rvolution dans les sciences.
Qu'est-ce
que
Haller n'a
pas
vu dans un
jaune
d'uf? Tous ces
grands
hommes ne
dispos-
rent
pas
d'avance dix fois dix
expriences
let-
tres,
avant de
prendre
la libert de fair la
moindre dcouverte.
Mais Bacon tenait
cette
chimre,
au
point
qu'il
est ai
jusqu'
dire
que
nulle ~ecoMue?'~
ne saurait tre
reue,
si elle ne rsulte d'une
exprience
~ree
(~).
S'il avait dit
simplement qu'aucune expe-
r?'c~ce n'est
valable,
si elle n'est
faite
en ue~M
~t?e
~pos:~oK
aM~eneMre
rdige par crit
ce serait une erreur comme tant d'autres
qu'on
(1)
~tttKM~a
nisi de
scripto
INVENTIO
probanda
est.
(Nov.
Org.
i,
10t.
Opp.
t.
ynt, 52. )
Voil
pourquoi
sans
doute Bacon
n'appro)ttvtt<
ni les
microscopes,
nitesties-
copes,
ni les besicles.
ET DU GNtE DES ECOUYEBTES. ~0
rencontre toutes les
pages
de ses
crits
mais comme il a dit
expressment
~ecoM~e~e,
on ne sait de
quelle expression
se
servir pour
caractriser une telle ide.
Continuellement
gar
d'ailleurs
par
sa chi-
mre favorite des
formes
ou des
essences,
il
tournait toutes ses
expriences vers
ce but
imaginaire.
Il
reproche, par exemple,
aux
hommes la
faute
norme
gM'~
ont
faite
a fe-
~art!
de la
~MMMere,
de
s'occttper
de ses radia-
tions au ~'CMde son
origine,
et d'avoir
plac
rop~gMe parmi
les sciences
mathmatiques
ett sortant
ainsi prmaturment
de la
physique;
ce
qui
les a
ctMp~c/<s
de t'ecA~cAe~ la
/M~te
de
la lumire
(1).
(1) Stupendd quddam tteg!)~ett(t'<t.
fa~attone~
ejus
<Mc<a))(t<r, ori'g'HM mtMtme,
etc.
(De Augm.
Scient.
iv,
3.
Opp. Yui,
p. 240. )
On voit ici un nouvel
exemple
de cette manie
physique
qui
tend retarder la marche de toutes les autres sciences
et celle mme de la
physique.
en
privant
cette dernire
science de
l'appui
des autres. Comment les travaux de
l'op-
ticien
gnent-iis
ceux du
physicien
ou du chimiste ? O Ba-
con avait-il
pris
cette antriorit naturelle de la science des
on'gntM
sur celle des radiations ? Comment
prouve-t-il qu'il
nous est
plus utile,
par exemple,
de connaitre l'action de la
DB I.'EIPR1ENC
80
Nous aurions t bienheureux si
Newton,
docile
cet
avis,
et
employ
toutes les forces
de son
esprit
mditer sur la
forme
de la
lumire,
au lieu de
s'occuper
des rct~o~'oM~
qui
lui ont rvl la
/bnMe
autant
qu'elle peut
tre connue de nous. On trouvera bien
peu
de maximes de Bacon
qui
ne tendent direc-
tement tuer la
science;
les meilleurs sont
inutiles.
Les
partisans
de Bacon
(vrais
ou
apparents),
sentant bien
quel point
il est nul dans les
sciences,
en reviennent
toujours
leur
grand
argument
savoir
yMe.Bacott
M'mvcM~e
pas,
mais
yM'~ apprend
a mue?!<er.
Lui-mme,
averti
par
sa conscience
qu'il
n'avait
pas
le
moindre droit de faire la
leon
au
genre
hu-
main,
tche
dj
de
prvenir l'objection.
Si
quelqu'un,
dit-il,
m'attaque
sur ce
que j'ai
propos,
il ne doit
point ignorer qu'il agit
en
cela contre les lois de la
guerre
car
je
ne suis
qu'un <roMtpe~e qui
vient
porter
des
paroles
lumire comme
agent physique
dans la
vgtation, que
d'a-
voir des
tlescopes ?
Et
quand
cette
plus grande
utilit serait
prouve,
chacun n'est-il
pas oblig
de suivre son
talent sans
entreprendre
ce
qui
en
suppose
un
autre ?
HT DU GNIE DES DCOUVERTES. 81
de
paix je
dois donc tre
reu
favorablement
comme ces hrauts d'Homre
qui
l'on dit
Salut
vous,
hrauts des hommes et des dieux
(1)
Mais toutes ces belles
phrases portent
faux.
Lorsqu'un trompette
se
prsente
en
par-
lementaire,
il est
reu
parce qu'il apporte
la
proposition
d'un
gnral.
S'il se
prsentait
de son
chef. II
serait
renvoy
comme
fou,
ou
pendu
comme
espion
or,
de
quelle
autorit
Bacon
prtendait-il rgenter
le monde
savant?
c'tait un
plaisant
trompette
de la science
qu'un
homme
tranger
toutes les sciences
et dont toutes les ides
fondamentales taient
fausses
jusqu'au
ridicule 1
(1)
Si quis.
ob
aliquod
eorum
gum proposui
aut
deinceps
proponam
impetat
aut vulneret. sciat is se contra morem
et
disciplinam
militio
/aMre.' ego
enim buccinator
(atttMn!,
pugnam
non
inco;
unus
/br<aMe
M iis de
~MtOMt
liomerus
XttfptT:,
K~pUXt;,
At~; t!yy:~<!t )5St
)M[!
Ky~C!
( De
Augm.
Scient. lib.
iv, cap. 1,
in
princ. )
TOME
I. G
DE L'EPR'EKCK ~3
~)
En vain
l'on dira
qu'il
n'tait
pas oblig
de
connatre toutes les sciences dont il a
parle
sans
doute
mais il tait
oblig
de n'en
pas
parler.
Au
reste,
nul ne
peut enseigner que
ce
qu'il
sait,
et non-seulement
~K'y
a
pas,
mais
de
plus, il
ne .yaM!'cH<
y
avoir de mthode d'in-'
venter.
Ainsi,
par exemple,
dans les mathma-
tiques,
dont
la
mtaphysique
fournit
un grand
nombre d'excellentes
rgles gnrales~
l'art
peut
bien fournir des mthodes
pour
manier
une
quation
M)te
fois
<roMuce;
mais l'art de
trouver
l'quation qui
doit rsoudre le
pro-
blme ne saurait tre
enseign.
Que
si l'on veut considrer Bacon comme
un
simple prdicateur
de la
science,
je
n'em-
pche pourvu que
l'on m'accorde
aussi,
ce
qui
est de toute
justice, qu'il prchait
comme
son
glise,
sans mission.
Ajoutons
un mot essentiel. M
n'y
a
peut tre
rien de
plus
intressant
que
d'entendre un
homme
suprieur parler
de ce
qu'il
ne
saitpas.
Il s'avance
lentement,
et
n'appuie gure
le
pied
sans savoir si le terrain est
solide;
il cherche
des
analogies plausibles;
il tche de rattacher
ses ides des
principes suprieurs
et incon-
testables
il a
toujours
le ton de la
recherche,
ET DU GNIE DES
DECOUTEMES. 83
6
jamais
celui de
renseignement;
et souvent il
arrive
que,
mme en se
trompant,
il laisse
une assez
grande
ide
de la droiture de son
esprit.
C'est tout le
contraire de la
part
de
Bacon,
qui parle
constamment,
velut ex
tripode
des
choses dont il
n'avait
pas
la
plus lgre
ide,
et dont le
premier
mot est
toujours
un blas-
phme
contre
quelque
vrit
incontestable,
souvent du
premier
ordre.
On
peut,
ds
prsent,
savoir
quoi
s'en
tenir sur les
rputations.
Bacon est clbr de
toutes
parts pour
avoir substitu l'induction au
syllogisme
et il se trouve
qu'il
a dclar la
vritable induction vaine et
purile,
en lui sub-
stituant,
sous le nom d'MM~Mc~oK
lgitime,
une
autre
opration qu'il
n'a
pas comprise
lui-
mme,
mais
qui
est ~ccMe
et purile
dans tous
les sens.
On le clbre encore
pour
avoir mis
l'exp-
rience en
honneur;
et il se trouve
qu'au temps
de Bacon
l'expricncelgitime
tait en honneur
dans toutes les
parties
de
l'Europe,
et
qu'il
a
fait
reposer
tout son
systme d'expriences
sur
des ides
s! fausses,
si directement contraires
l'avancement des
sciences,
qu'en
lisant ses
DE L'XPBtE-\CS
OEuvres sans
prjugs,
on ne
peut s'empcher
de s'crier
chaque page
Si
Pef~atM
<tM<<!
EYCt'ti
pos~ot<,
etiam /)dc eversa
/t<tMen(.
Black
reproche
Bacon d'avoir retard la
marche de la chimie en la rendant mcani-
que (1 ). Certainement Bacon
se
trompa
sur ce
point
autant
qu'il
est
possible
de se
tromper,
mais
pas plus que
sur les autres
sciences,
qu'il
aurait touSees
par
ses dtestables thories si
elles avaient
pu
l'tre
mais il ne
pouvait
leur
nuire
par
une raison toute
simple,
c'est
qu'il
n'y
a
pas
eu
peut-tre
d'crivain moins connu
et moins consult
que
Bacon
par
tous les
hommes.
qui
se sont illustrs dans les sciences
naturelles. Sa
rputation
est
l'ouvrage
de no-
tre
sicle,
dontil n'estpas
difficile de deviner
le secret sur ce
point.
La
gloire
factice accor-
de Bacon n'est
que
le
loyer
de sa
mtaphy-
sique pestilentielle.
(l)
Lectures on
Chemistry,
iu-4*.
ET DU GttIE DES DCOCVEMM. 85
M. de Luc se cherchant lui-mme des
collgues
admirateurs
pour
encenser
Bacon,
et se
trouvant fort embarrass
par
le
petit
nombre et la
qualit,
n'a
pas ddaign
de des-
cendre
pour grossir
sa
liste
jusqu'
une cole
HornMi'e de
France,
o un homme trs-habile
dans les sciences
naturelles,
comme on va
voir,
lui a fourni le morceau
suivant
Les
<?'oMp~<s
belles
deco:tuc~es de Newton.
sont le
systme
de
fattraction,
l'explication
d:t
/~(.c
et du
?/<a?,
et la ~ccoMue~e du
pn/Ctpc
des co!J eM)'5 dans
/'o6[~e
de la lumire. Eh
bien
Newton,
en (McoMMrcM<ces trois
yraM~
lois de
la
Kft~tre,
M'a
/EK<que
soumettre a ~'e.c-
pc~Hce
et cm calcul ~'oM ~MM de Bacon
(l).
Eh bien il suffit de lire ce morceau
pour
voir
l'vidence
que
le
professeur
l'cole
normale n'avait
jamais
lu
Bacon, n'entendait.
pas
une
ligne
de
Newton, et,
de
plus,
n'avait:
pas
mme salu de loin les
prcmie.rs
rudiments.
des
sciences
naturelles.
Quant
. Bacon, jamais,
(1)
M.
Gart.cit par
M. de
Luc,dans
le Prcis deta~
r~OM~hte
de
Caco)),
t.
t, p.
53.
DEL'EH'BtEXCE 66
il ne s'est dout de
l'attraction n! de
l'analyse
de la lumire
(1), laquelle, par parenthse,
appartient presque
entirement Descartes.
C'est avec cette connaissance de cause
que
Bacon a t lou mille et mille fois.
Quant
aux
vritables
juges qui
ont tenu le mme
langage,
tous
appartiennent
notre
sicle,
et leurs
motifs sont
vidents. Aucun fondateur de la
science ne s'est
appuy
de
Bacon
aucun ne
l'a cit ni
peut-tre
mme connu.
Il
y
a dans les choses un mouvement natu-
rel que
la
moindre observation rend sensible.
Non-seulement la
physique
tait ne au
temps
de
Bacon,
mais elle
florissait,
et rien ne
pou-
vait
plus
en arrter les
progrs.
Les sciences
d'ailleurs
naissent l'une de
l'autre,
par la
seule
(~)M.
de Luc adit lui-mme en
parlant
de l'attraction :Bacon
n'en a~at<
pas
la moindre ide.
(Ibid.)
1) et mieux valu dire
cependant que
Bacon n'avait sur ce
point que
certaines ides
gnrales qui appartiennent
au sens commun de tous les
hommes.
Quant
aux dcouvertes di<<Mc<M de l'attraction
gnrale
ET de la cause des
mares/c'est
comme si l'on di-
sait
que
Buffon a fait l'histoire naturelle de tous les
~adrt<-
RMe~
ET du cheval. J e ne dis rien de la
lumire;
on verra
bientt ce
que
Bacon savait sur ce
point.
LT DU C~tE DES DCOUVERTES. 87
force des choses.
Il estimpossible, par excmplc,
de cultiver
longtemps l'arithmtique
sans avoir
une
algbre quelconque,
et il est
impossible
d'avoir une
algbre
sans arriver un calcul
infinitsimal
quelconque.
Souvent
j'ai
rflchi
sur cette
diagonale que parcourt
un
corps
anim
par
deux forces
plus
ou moins inclines
l'une l'autre. J e
supposais
ces forces alter-
nativement
suspendues
il en rsultait une
suite de
petits triangles
tous
appuys
sur la
diagonale relle,
et dont les cts diminuaient
comme les moments alternatifs de
suspension.
J e les
voyais
donc se
perdre
dans
l'infini
et
je
me disais
Qui
sait si la Ka~e
opre
Mu<?'e-
ment
et si
rellement
<Mt
pied
de la
~?'e
deux
forces peuvent agir
ensemble?
Qui
sait si
cette
diagonale
est autre
cAose ~H'MMe
suite de
triangles semblables
dont les cd~tKnMMuet~aM-
del de toute borne
assignable?
Peut-on seule-
ment ruchir sur la
gnration
des courbes
sans tre conduit
supposer
des
grandeurs
plus petites que
toute
grandeur
finie?
Alors,
comment ne
pas essayer
de les
saisir,
pour
ainsi
dire,
~nr le &o?'ddM
MM<
de connatre
la loi suivant
laquelle
elles
fluent
dans
l'infini,
de
l'exprimer
par
des
signes,
.etc, ?
J 'ignore
DE
L'BXPEtUEKCE
S8
absolument lecalcul
diffrentiel,
mais ce doit
tre
quelque
chose
qui
se
rapporte
ces
Ides;
et,
puisqu'elles
me sont venues s!
souvent,
comment auraient-elles
chapp
aux math-
maticiens de
profession?
C'est donc sans aucune
connaissance de
l'esprit humain qu'on
attribue
telle ou telle collection de
prceptes
un
pro-
grs qui
rsulte d la nature mme des choses
et du mouvement
Imprim
aux
esprits.
IIyavaitd'alHeurs, l'poque
de Bacon,
une
circonstance
importante qu'on
n'a
point,
ce
me
semble,
assez
remarque
circonstance
sans
laquelle
il
n'y
avait
pas moyen
d'avancer
dans les sciences
naturelles,
et avec
laquelle
ondevait
ncessairement y
faire les
plus grands
progrs.
L'homme venait de
conqurir leverre;
il le
connaissait
anciennement,
mais il n'en
tait
pas
le
matre. La nature ne le lui donne
point,
c'est l'homme
qui
le
produit.
Le verre
est l'homme autant
qu'une
chose
peut
tre
lui c'est l'oeuvre de son
gnie,
c'est une
espce
de
cration,
et l'instrument de cette
cration c'est le
feu,
quilul-mmea
a t donn
exclusivement
l'homme,
comme un
apanage
frappant
de sa
suprmatie.
Les alchimistes s'-
taient
empars
de cette
production
merveil-
ET DU GNIE DES DCOUVEBTM.
EP
leuse
ils en firent
l'objet principal
de leurs
travaux
mystrieux
et de
leur.pieuse
scien-
ce
(1).
A
genoux
devant leurs
fourneaux,
et
purifis
d'avance
par
certaines
prparations,
ils
suppliaient
celui dont le feu a
toujours
t
le
plus
brillant emblme chez tous les
peuples
de les rendre matres de cet
agent
actif et de
la masse
qu'il
tenait en fusion
(2).
Enfin ils
nous donnrent le
verre,
c'est--dire
qu'au
lieu d'une raret rebelle ils en firent une sub-
stance
vulgaire,
docilc aux volonts de l'hom-
me. Ds
que
le verre fut
commun,
il devint
impossible
de n'en
pas
connatre les
proprits
les
plus importantes.
La
plus petite
boursouP-
flure accidentelle manifestait une
puissance
amplifiante.
On
essaya
de donner ces acci-
dents une forme
rgulire
la lentille
naquit
(i)
M.
Chaptal
la fin de ses lments de
Chimie,
a
rendu
pleinejustice,
autant
queje puis
m'en
souvenir,
au
caractre des
alchimistes,
et nommment leur
pit.
(2) Quelques
livres
queje
ne
puis plus
atteindre m'avaient
fourni des textes curieux sur ces observances
religieuses
employes pour
la
prparation
du
verre,
surtout en France.
Cestextes m'ontt emevs dans un recueil
considrable
gueje regrette
inutitement.
DE L'EtPMEKCB
90
ou ressuscita
(1).
Avec elle
naquirent
le mi.
croscope
et le
tlescope, qui
est aussi un m!'
croscope, puisque
FeSet commun des deux in-
struments est
d'agrandir
sur la rtine la
petite
image
d'un
petit objet rapproch,
ou celle de
la
petite image
d'un
grand objet loign.
Au
moyen
de ces deux instruments l'homme tou-
cha
pour
ainsi
dire,
aux deux infinis. A l'aide
du
verre,
il
put contempler
songrl'il
du
ciron et l'anneau de Saturne. Possesseur d'une
matire la fois solide et
transparente,
qui
rsistait au feu et aux
plus puissants
corrosifs,
(<)
Le lecteur curieux de savoir ce
que
les anciens ont
connu au
sujet
des verres
caustiques pourra
consulter, outre
le
passage
fameux
d'Aristophane (Nub.
v.
765, 199)
Senec.
Quaest.
nat.
vt,
Lucian.
Quom.
scrib. Hist. c.
51
et la
longue
note de Reitze sur ce
passage
difficile.
(Amsterdam
Wetstein, in-4, 1743,
tom.
II, p. Ct) L'Apuleii pht't.
et adv. rom.
apol. ~Md
se
tpM def. pMH.
de
magid jud.,
cum
comment.
Scip. Gentilis, in-8',
p.
98
CoWt-RMMt,
Let.
lresamr. traf!.
franc.,
Zerext&J 'observerai seulement
ici,
sans aucune
discussion, qu'un
vers
d'Aristophane,
dans
le
passage
cit
( c~T~M
e-T&s
aSt
ttpes
~x
~fo~)
donnerait
plutt l'ide
d'un
caustique par
rflexion.
Cependant
Aris-
tophane
semble
parler
bien clairement du verre. t)
reste
seulement
expliquer
comment cette
pierre transparente se
vendait chez les
apothicaires.
ET DU GtXtE DES
BCOCTERTES. 0)
Il vit ce
que jusqu'alors
il
ne pouvait qu'ima-
giner
il vit
la-rarfaction,
la
condensation
l'expansion
il vit l'amour et la haine des
tres;
il les vit
s'attirer,
se
repousser,
s'embrasser,
se
pntrer, s'pouser
et se
sparer.
Le cris-
tal,
rang
dans ses
laboratoires,
tenait sans
cesse sous ses
yeux
et sous sa main tous les
fluides de la nature. Les
agents
les
plus
actifs,
au lieu de ne lui
montrer,
et mme
imparfai-
tement,
que
de
simples
rsultats,
consenti-
rent lui laisser observer leurs travaux. Com-
ment sa curiosit inne n'aurait-elle
pas
t
excite, anime,
embrase
par
un tel secours?
Matre du verre
par
le
feu,
et
matre
de la
lumire
par
le
verre,
il eut des lentilles et des
miroirs de toute
espce,
des
prismes
des r-
cipients,
des
matras,
des
tubes,
enfin des ba-
romtres et des thermomtres. Mais tout
partit
primitivement
de
la
lentille
astronomique, qui
mit le verre en
honneur,
et la
physique naquit
en
quelque
manire de
l'astronomie,
comme
s'il tait crit
que,
mme dans le sens matriel
et
grossier,
toute science doit descendre du
ciel.
Boerrhaave s'crie
quelque part
avec le laco-
nisme
lgant
de cette
langue qu'il employait
DEL'EXPB!t!NCE 92
si bien Sine vitro
<tM~e?K
cum ~~e~'s? sans
le verre
que
sont les lettres
pour
les vieillards?
11et
pu
dire avec autant de raison Sine vitro
~Md
/MMMM!cum re~Mm ma~M~a? sans le verre
que peut l'homme
dans les sciences naturelles?
C'est
par l'usage
rendu facile de cette admira-
ble
production
et c'est aussi
par
le.mouve-
ment
gnral
des
esprits, qu'il
faut
expliquer
les
progrs
de la
physique exprimentale,
et
non
par
la
mthode de
Bacon,
mthode non-
seulement nulle et
misrable,
mais diamtra-
lement
oppose
la science. En
effet,
qu'est-
ce
que
la
science,
sinon
l'expansibilit
du
principe
intellectuel?
Or,
cette
mthode,
qui
repose uniquement
sur le
pnnq'pe
dit
~o/
est
par
l mme l'ennemie naturelle de l'ex-
pansibili t.
On ne se
tromperait
pas
sur cette vaine
doctrine,
si l'on n'oubliait la
grande preuve
de toutes les
thories,
l'exprience.
Qu'on
cherche dans les OEuvres de Bacon une seule
ligne qui
ait servi la dcouverte d'une vrit
physique
ou
dcider une controverse entre
les
physiciens
on ne la trouvera
pas.
Est-ce Bacon
qui
rassembla Paris Mer-
senne, Descartes, Roberval,
les deux Pas<
ET DU Gf~fB DES DECOUYEnTM. 93
cal, etc.
qui
fondrent l'Acadmie des scien-
ces ? Est-ce Bacon
qui envoya
Paris Hobbes
et
Boyle, par qui
le feu sacr fut
apport
Londres? Lui-mme ne savait
gure
ce
qu'it
l
avait
appris
en
France
mais ce mot me
rap-
pelle
une observation
importante.
En rflchissant sur un
passage remarqua-
ble des OEuvres de
Bacon,
il est
permis
de
croire
qu'il
avait t
initi,
Paris,
dans
j<*
ne sais
quelle
socit secrte
d'hommes,
dont
nos illumins modernes
pourraient
fort bien
tre les successeurs en
ligne
directe
(~).
A la
vrit,
il met l'histoire sur le
compte
d'un
ami;
mais,
pour
moi
je
suis
trs-port
croire
qu'il
parle
de lui-mme sous le nom d'un autre.
Quoi
qu'il
en
soit,
comme il honore d'une
ap-
probation emphatique
toute cette doctrine
franaise,
il
importe peu
de savoir s'il l'avait
reue
sa
source,
ou si elle tait arrive
jus-
qu'
lui
par l'intermde
d'un confident initi.
La scne
que
dcrit Bacon est
Paris,
et
(t)
Namdum
h<ec,tracta)'<'m,
tnterMtttt amicus m<tM
qui-
damex Gallid
rediens ~xem quum <atMtMMM
etc.
(lm-
petus
Philosoph.
etc.
Opp,
tom.
ix, p.
207.)
DE L'EXPRIENCE 9~
les membres de l'assemble talent
peu prs
au nombre de
cinquante,
tous d'un
ge
mur
et (ftt~e socit dlicieuse
(1).
Tous les 7~'erM
taient assis sur des
siges disposs
de ma-
nire montrer
qu'on
attendait un
rcipien-
daire
(2).
Ils se flicitaient mutuellement D'A-
VOIR VU LA LUMIRE
(3).
Parmi eux une
sorte de GRAND-MAITRE avait la
parole (4),
et Bacon nous a transmis un de ses discours
prononc pour
une crmonie de
rception.
On
peut surtout y remarquer
cette
phrase
mmo-
(1)
Tm fefuh'f se ParxtM eoeatMm
quodam
amico
suo,
a<~ue
wtroauctum in consessum virorum
qualem tn~Mt<,
vel lu videre
velles;
nihil en<m in ftM med m!'At
<tcctdt'<j-
cmt~tM~Erant aulem circiter L
viri, neque
ea; tt<
quisquam
adolescens,
sed omnes <B(a<e
provecliores, quique
vullu
ipso
d~tti(a<ent
c'<m
probitate singuli pr<B M/<'n-en( [cela
va sans
dire~.(Ibid.,p. 267.)
(2)
Sedebant
ordotc,
sedilibus
disposilis,
ac ce!u(t adven-
<t<nt
alicujus ej'pec<a!t(M. (Ibid., p. 268.)
(3)
7(a tttttcm inter se
co<!o<jrMe6on<tt)'
Se OMtor eorum
esse
qui
ex locis
opacis
et umbrosis IN LUCEM
apertam
su-
t:<&
exierint
etc.
( Ibid.,
p. 296. )
(4)
Neque
ila
muM
post ingressus
est
ad eos vir
quidam,
a~pecttM
ut ei
otde6atM)-,
admodum
placidi
et
~erettt,
etc.
[eefa
s'entend encore
J . (Ibid., p. 296.)
ET DU GNIE DES D&COUYEBTM. 03
rable Notre sicle mme a
produit quelques
philosophes gMO!<yue
l'attention accorde aux
questions religieuses,
cee
poque du mande,
ait
glac
les ctCM~ et ~euo?'e
gnie (1).
Bacon,
si bien form en France ou
par
la
France,
avait cd l'influence de la
langue
.franaise,
influence aussi ancienne
que
la lan-
gue
mme,
et totalement
indpendante
de
ses
variations,
prodige toujours
subsistant et
jamais expliqu.
Cette
langue puissante
avait
pntr
Bacon,
au
point que
son
latin,
parfai-
tement
exempt
de formes
anglaises,
est
cepen-
dant hriss de
gallicismes
(2).
(4) Neque enim (!<M''<w<ettat)t))0!<r4
tote,
tMno<(ft<,
inquam, frigidis pr<BcordtM at~Me tempore quo
res
reK~to'
nis
ingenia consumpserint, qui,
etc.
(Ibid., p. 280.)
(2)
J 'en citerai
quelques-uns
des
plus remarquables.
Corpora jacilis
ce- Les
corps
cdent
plus J Vot).or~.7/,12.
dunt. facilement.
FacttoquamdeMett-
Il fait descendre l'eau. lbid.
dere.
i~cto comparet)tt<t. Comparution (t. de Pa-
lais.) 76.77,15.
Tenendomanum su- En tenant la main des-
peris.
sus. 76.77,20.
ProMt~mMt
super.
Nous
procderons
main-
tenant,
etc.
76.11,2).
DEL'EXP&UEKCC 99
Il faut avouer au reste
que,
si Bacon fut
gt
par
!a France dans le seizime
sicle,
il le
lui a bien rendu dans le
dix-huitime,
en
prtant
l'autorit
usurpe
de son nom et de
Crat'tffM diaman- La
pesanteur
du dia-
<!<. mant.
Nov. Org.11, 24
CoMi't~ntta. La consistance. 76.
77
25.
7et'mt!)att<r
~u<B~-
La
question
est termi-
tio. ne.
76.77,36.
SMpp(M!'(!'<mM pro
Des
suppositions
au lieu
exemplis.
de
preuves.
76.
77,
3a.
Ictu mallei rebus- Se reboucher sous le
cere. marteau.
76.77,
13.
Attribuere motum Attribuer )e mouvement
planclis.
aux
piantes.
76.
77,
37.
FtcW
/ee!'mM! glo-
J e fis faire un
globe.
bum.
76.77,45.
Cadentia. La cadence
(musique.)
76.77,
27.
j)7aM<B. Les masses.
DMcrip<o6.
M<.F77.
7tt
opus poKerc.
Mettre en oeuvre.
Nov.Org.ll,
15
Vitrum
pulverisa-
Du verre
pulvris.
tum.
767/.23.
Vias <'):M)t)'end! De
pauvres
manires
paupercM~.
d'inventer.
76.77,3t.
Commoditas ca~ct<- Lacommoditducalcul.
lationis.
76.77,36.
7ncontpe<en<M. L'incomptence. 76.77,39.
Se reunire. Se runir.
76.77,48.
J :'sp!neo.
Unepinette.
Ibid.
Bene M~re civita- Le bien tre de la cit.
D~(<~m.5f't'en(.
<
F777.3.
ET DU GttME DES MCOUVBnMS. 97
ses maximes aux thories
fausses, viles
cor-
ruptrices, qui
ont
perverti
ce malheureux
pays,
et
par
lui toute
l'Europe.
PfMMn'tttH. Un
pressoir.
P~antftM.
Un
pdant.
~Mp<M<. Pris(coagu!.)
lnutiliter <M6<t7<-Subtiliser inutHement.
Mr<.
TOME. 7
HM<eM.e<rar.
p.
57.
De Augm. Seienr.
77,3.
Parm. Tel. dem.
Phil.
Hist vent. incit.
vent.
BASE DE LA PHIMSOPHK 33
CHAPITRE III.
.MNTtNCATMN
DCMEME SUJ ET.
Baee de la
PhUosepMe
de Bacon et de aa
mthode
d'exclusion.
Celui
qui
a
dit dans notre
sicle,
qu'il
est
tMt~ossMe
d'avoir une
mtaphysique
saine avant
de possder
une bonne physique,
n'a fait
que
dvelopper
une ide de
Bacon,
qui rapporte
tout la
physique,
et mme la
morale,
de ma-
nire
que
toute science
qui
ne
repose pas
sur
cette base sacre est nulle
(1).
Il est
pntr
(<) 7<<M<M
visum Mt ci hoc ad t))t'fr<MM docfrtnat'um sla-
BB BACON. 99
de
compassion pour
le
genre
humain,
qui
ne
sait
pas
la
physique. Depuis l'origine
des cho-
ses on n'a
pas
fait une seule
exprience pro-
pre
consoler l'homme. A
quoi
nous servent
la
morale,
la
religion
les
mathmatiques,
l'astronomie,
la littrature et les beaux-arts ?
Nous n'en serons
pas
moins de vritables sau-
vages,
tant
que
nous demeurerons en
proie
au
syllogisme,
l'induction
vulgaire
et cent
autres monstres
scolastiques, qui
nous
dgo-
tent de rechercher les
formes par
la mthode
exclusive et l'induction
lgitime.
Mais Bacon est venu
pour
le salut du
monde;
au
moyen
de son nouvel
organe
et de ses ex-
priences prrogatives,
solitaires
migrantes
ostensives clandestines,
parafes,
MMttoeK-
qttes,
dvies
supplmentaires
tranchantes,
jM'op!CM,~o~/c/M'e~M, magiques,
etc.
(1),
il ne
<uM
peWtttere
omnMetttm artct et Mt'extt~ (!&Me ~tu
pe
tum perlinere
omnes enim aut )'tt et scientias <ed M!<
admo-
revulsas,
poliri jortasais
aul in usum
ef~engi
sed nil admo-
dum crescere.
(Cogitata
et
Visa,
t.
n, p.
167.)
Nous
plaons
la
physique
avant la mora)e sa
~~<
(M. Lasatte
Prf.
gn.
t.
p.
LX.)
())
C'est une
portion
de laridicule nomenclature sous
)a-
7..
BASE DE U PHtLOSJ OHit 160
doute
pas
d'avoir sauv le
genre
humain. f,
est persuad dans le fond de
sa conscience d'avoir
dress ttM lit
conjugal
oit
l'esprit
humain
epOM-
sera ~a
MafMre,
Dieu lui-mme dans sa bont
portant
les
~M&eaM.E
et warcAen~ devant les
poux.
Le !;tt
ep~Act~ccm~Me
de Bacon est
que
d'une telle
pouse,
couche
par
l'induction
lgi-
time ct d'un tel
poux, il puisse
natre M~e
race de hros
secourables,
de vritables j~e?'-
cn~es
cop6[6~es
d'e~oM~'r
le
syllogisme
et de nous
cotMo~er
yMsgM'a
MM cer~ctMt
pOM~
<%a~Mnos 6c-
Mt?Me< nos MMeres
(1).
Un si
grand mariage exigeant
des
prpara-
tifs
Immenses,
il faut voir
quels
taient les
quelle
ce
gnie minutieux,
et
scolastique
sans le savoir,>
essayait
de
ranger
toutes les
expriences possibles
en
physi-
que.
Cet inventaire
divertissant,
qu'on peut
lire dansle Nov.
Org. (Lib. n, num.xxn, Opp.
tom.
vm,
p.
H7.
sqq.)me
parat
un des
symptmes
les
plus
dcisifs de mdiocrit et
mme
d'impuissance.
(1) ()ttt6tM explicatis,
(~ta!amtfm nos mentis human/B
et
universi,
pt-ombd
dtM')t~
6oxtfa<e
p!att~
coK~tttxme
con fi-
dt'mu~.
Ep:th<t!a)K~
aMfeMt
))o<t<m st( < ea:eo co)t)tu&to aMa:t- h'a hMmaKft, (oM~tMm ~ttrps y!erot<m, exeo neceMt<a<M e<
lia
humana, tanquicm
slirps heroum, quaf
necessilates et
miserias hominum
aliqu
ea;
parle
debellent et
doment, susci.
p)tMr
e<
edMc<t<Mr.
(Imp.
chitos.
Opp.
tom. ix,
p.
265.)
DE BACON.
t&t
moyens
de
Bacon
c'est lui de nous du-&
sous
quel point
de vue'il
envisageait
le
grand
problme,
comment il
croyait qu'on
devait
l'attaquer,
et d'o lui venait surtout cette
confiance victorieuse manifeste d'une ma-
nire si
burlesque.
Rappelons
d'abord
que,
dans son
Idiome, ce
que
nous
appelons
essence se nomme
forme
en sorte
que
la forme est la chose mme
(1)
KCtfMre,
au
contraire,
ne
signifie que qualit
ou
effet
rsultant d'une cause
quelconque (2).
Or,
toute la
pM<MopAte,
ou toute la
science,
ou toute
la
physique (tous
ces termes sont
synonymes.
pour
Bacon)
ne consiste
qu'en
deux
mots.M-
voir et
poM~o~,
ce
qui
est
trs-vrai
mais rien
n'est
plus
faux
que l'explication qu'il
donne
de ces
deux mots
CotMm~re, dit-Il,
la
caM.y<?
())
Formarei
ipsissitna
t'M
est; Hc~ue dt/~rt
res
(ormtt
<tKter<jfM<Mtt<M/e)'un< apparens
et
ea;t!<enj,
etc.
(Nov. Org.
n,xtn.Opp.tom.YM!,p.95.)
(2) Effectus
M!nafura.
(Imp. phil.
sive Inst. sec. de!in.
et
argum. Opp.
t.
jx, p.
262. ) Causas
alicujus
natnra;,
veluti albedinis aut caloris.
(Ibid. p. 297. )
H ne faut
pas
oublier cette
synonymie
J e nature et de
qualit!
BASE DE LA PHILOSOPHIE loa
d'un effet ou dune
nature,
c'est
fo6ye<
de la
&ce?}ce~pouvoir appliquer
cette nature sur une
base
matrielle
c'est
l'objet
de notre
puis-
sance
(1).
Ainsi donc connatre la cause de la
blancheur serait la
science;
blanchir rbne
serait ta
~:tMMKce.
l
n'y
a rien de si malheureux et de si visi-
blement faux
que
toute
cette
thorie
car si
la science de l'homme n'avait
pour
but
que
la
connaissance des
causes,
elle serait
irrpa-
rablement
nulle,
puisque
nous n'en connais-
sons
pas
une
seule
et
quant
l'application
des
natures,
c'est une folie
qui n'exige pas
de
rfutation.
Pour sentir
combien les ides de Bacon
sont
mesquines,
il suffit de leur
opposer
les
vritables maximes.
La
forme
de l'homme c'est d connatre
et
d'aimer,
suivant les lois divines de son es
(t)
Dati
e~fci~
oe! no<r<B in
quovis subjccto
coMM~
ttOMe,
ttt<eKtto
f ht(matt<B MteotXB
atgtte
rttMM~
super
(fatammft-
terB basin
effectum
<j;od~
sive naturan)
(tn{er
<ermmo<
possibiles ) imponere
vel
~pertttdMMre,
<n<ent<o est h<n<ttt<B
potet)(B. (!bid.
p. 262.)
M BACON. i03
sence
tout ce
qui
s'carte de ces lois est vain
ou criminel. Dans l'ordre de ces
lois,
sa science
n'a
point
de bornes
fixes;
il doit s'avancer
toujours
avec
confiance
sr
qu'il
ne
peut
qu'tre
arrt,
mais jamais s'garer.
Sa
jOMty
sance consiste se
servir
de ses
propres
forces
suivant
l'ordre,
les
perfectionner par
l'exer-
cice,
et tourner son
profit
les forces de la
nature. Pour
employer
ces
forces,
la connais-
sance
prliminaire
des causes ne lui est nul-
lement
ncessaire
il serait bien malheureux
si,
avant de se servir d'un fusil ou d'une
pompe
feu,
il devait connatre l'essence du
salptre
et celle de
l'expansibilit.
Tels sont les
prceptes
vidents du bon
sens. Rduire la science la connaissance
des
causes,
c'est
dcourager
l'homme,
c'est
l'garer,
c'est touffer la science au lieu de
l'accrotre.
Mais
il
faut voir de
plus
comment Bacon
s'y
prenait pour
arriver sa chimre des
causes.
Il
distingue
les
/bnMes coK~ueM,
c'est--
dire le
mariage
des natures
simples qui
se
sont unies
pour
former des
individus,
suivant
BASE DE LA PHILOSOPHIE 104
le cours ordinaire des choses
(1);
les
/b~KM
abstraites,
c'est--dire ces
types platoniques
qui
n'ont rien de commun avec la
matire
enfin
les
formes MM~e~es, auxquelles
il ne
donne aucun nom
propre,
mais
qu'il appelle
par
une
trange
circonlocution les lois del'acte
pur, qui
constituent et o~doMKe/!< une nature
simple (2),
contre
la chaleur, la lumire
le
poids,
etc. Laloi de chaleur et la
~b~/ne
de la
chaleur sont des
expressions synonymes (3).
Or
cette loi de l'acte
pur
est la vritable
forme;
et
par consquent l'objet unique
de la
philosophie
suivant les thories de Bacon.
En
effet,
nous dit-il
gravement, que
vous im~
porte
de savoir ce
que
c'est
qu'un
lion
un
aigle,
une
rose etc.?
Toutes ces choses ne
sont
(1)
PnmA enimde
(ormis copulatis ~M<B
sunt
conjugia
na-
(ttrarMm
simplicium, conjugia
M cwsu commtttuuniversi.
( Nov.
Org.
iT, xvn, p.
106.)
(2) Nos,
quum
de formis
loquimur,
nil a!i'Md
tm<e!HgtmM<
~M&m leges
illas et de<efn:tttattone~ acts
puri qu<B
naturam
aliquam simpliciter
ordinaK< e(
co!t~<t<MMM<,
ut
calorem,
lu-
men, pondus,
e<c.
(!Md. )
(3) Itaque
eadem fM est forma calidi aut forma
luminis,
~<texcattdtttt'e
lex <mtMt.
( Ibid,)
DE BACON. ic5
que
des
formes conjugues
ou des
individus,
et
par consquent
de
simples jeux
de la na-
ture
qui
se c~e~!<
(1).
L'objet
vritable de la
science,
c'est de savoir ce
que
c'est
que le pe-
sant,
le lger
le chaud,
le froid
etc.
(2).
On demeure
muet,
lorsqu'on songe que
cet
homme est le mme
qui
se
moque
d'rIstote,
et
quecethomme
encore estlemme
qui nous
a dit ce
que
ses successeurs nous. ont tant r-
pt, que
la nature
ne
fait que
des ~t)!<~Ms.
Ainsi il ne faut nullement s'embarrasser des
individus,
qui
sont
tout,
et il ne faut recher-
cher
que la
loi de l'acte
pur,
ou ce
qui
est
commun
une foule
d'individus,
sans s'oc-
cuper
des individus
(3).
Le mot de dlire carac-
triserait
mal ces
ides,
puisque
ce mot
n'ex-
(i)
Z.u<tM et lascivia.
(Descript.
Glob. inteHect.
cap.
ni.
Opp. tom. ix,
p.
205.)
(2)
Forma;
copu)at
sunt naturarum
simplicium
conjugia
cx cursu communi universi
(c'est peut-tre
un
abus ) ut
leonis,
agt(t<<B, ro<B,
auri etc.
( Ibid. )
(3) Demptis individuis et f1radibus
rerum.
(tmp.phitot.
tom.
ix,
p. 257.)
o.
BAtB DE LA PHH.OSOPBIB 100
prime qu'une
maladie accidentelle et non l'in-
capacit
radicale de
l'intelligence.
Ailleurs
cependant
Bacon semble se sur-
passer
encore,
en disant
qu'il y
a dans l'u-
nivers des natures
qui produisent
immdia-
tement le froid et le
chaud,
non
point
en les
excitant dans les
corps
o ils sont
cachs,
mais en les
produisant
substantiellement
(1).
Voil donc des
<~tc~t<es qui produisent
des
qualits,
et
qui
les
produisent
sM~~aM~cKe-
)Me~ rien
n'est plus
beau. Heureusement
nous sommes bien
dispenss
de
comprendre
ces belles
choses
puisque
Bacon
va nous
prouver
avec la dernire vidence
qu'il
ne se
comprenait pas
lui-mme.
La
/brme
tant,
selon
lui,
la chose mme
(~M!MMK66
~e~),
pour
dcouvrir cette forme il
n'y
a,
toujours
selon
lui,
qu'un
seul
moyen,
c'est
d'carterpar
la mthode d'exclusion tou-
()) Inveniuntur tta<ur<BKon)tu!<<B
~ttarum
calor et
/t't~m
tuttt
e~ectM.!
<;<
conseculiones, neque
id
ipsum per
M;et<a<t'o-
')ent
pr<Btt)ea:tentt!
aut admotionem caloris
ddt)CHten<M,
Md
pro~ per <B
calor et
/f~u~
in
primo
esse
ipsorum
M<!an-
<t<re<
genercntur. (Parmen.
theol. et Democr.
philos. Opp.
tom.
t,
p. 351.)
w
DE BAC<M. i07
tes les natures
qui
ne sont
pas
essentielles
cette
/brM!e(l).
Aprs
cette
opration,
dit-il,
il
restera la forme
positive
solide
vraie et &!<?7
termine
(2).
Point du tout il restera la
qualit
ou les
qualits
essentielles,
et
ce
n'est
point
encore l'essence. Il le dit lui-mme
express-
ment ~)M~
qualits ~!MpeMueM<
tre absentes
lorsqu'une qualit
donne est
prsente oMpre-
sentes
lorsque
celle-ci est
absente,
M'appar~'eM-
nent
point
la
forme
(3).
Le charlatan est
pris en flagrant
dlit
il change
les <e?~MM.S'il
avait un
peu plus
estim et cultiv la dialec-
tique (quoiqu'elle
soit une science
populaire,
ainsi
que
la
morale,
la
thologie
et la
politi-
(i)
Rejectio
sive exclnsio oatMrarum
singularium </u<B
non
tMt'ent't<t)<t<r in
a~uf!
t'n<<aK<!<~ Mtt'KatMfa data adM<.
(Nov.
Org. n,
Opp. Ym, p. 105
n
xvi.)
(2) ~~t;po~< M/ecft'onem
aut
tte~<!<!onem completam
ma-
net forma e<a/y!rma(tOMMct,M!'<t<:<
bene
lerminala.(Nov.
Org. Ibid.
tom.
Vtn
n"
xvr. ) Atque post rejeclionem
aut
negalionem completam t!tat)en</b)'ma
et
a/~rma<io. (Imp.
philos. Opp.
tom.
ix, p. 298.)
(3)
OmnM na<Mf<B
~M,
aut <fo<<t t)a<urd
pr<B!<n(e
n6<un<,
aut <fa<d ?)<ttMt'd absente
ad~xn(,
ex
/bt'md
non sunl.
(Imp.
phil. Opp.
tom.
ix,
p. 298. )
BASE DE L1 PHILOSOPtUB
108
que),
ce malheur
ne lui serait
pas
arriv.
Il
voulait nous
enseigner
chercher
l'essence
et
il nous
parle
de
qualits.
C'est abuser du lan-
gage
pour
se
tromper
et
pour tromper.
Toute
qualit qui n'appartient pas
ncessairement
une
qualit
donne
M'appar~e~ pas
la
/b?'Me
(ou
n'est
pas
de
F essence). Que
signifie
ce
galimatias?
Bacon aurait bien voulu dire
Toute
qualit <~ M'apparient pas
~e~ence >
mais il auraitdit une
tautologie
ridicule,
c'est-
-dire toute
qualit qui
n'est
pas
de l'essence
n'est
pas
de l'essence. II a donc mieux aim dire:
?b:t<e~K6t~e<~M n'est pas invariablement
atta-
che une
qualit
donne
n'appartient point
l'essence;
ce
qui
est
aM~'c?Me~,
mais non
pas
moins ridicule. Une
qualit
mme essentielle
n'est
point
l'essence.
Quand
il serait
prouv
nar exemple, qu'il n'y
a
point
de feu sans lu-
mire,
on connatrait ce
fait,
mais sans savoir
pour cela
ce
que
c'est
que
le feu. Il
y a plus
non-seulement
aprs
avoir trouv
qu'une
telle
qualit
est
insparable
d'un tel
corps,
on ne
saura rien sur l'essence de ce
corps,
mais il ne
sera
pas
mme
prouv que
cette
qualit, quoi-
que insparable
dans toutes nos
expriences
sans
exception,
soit rellement essentielle au
DE
BACO:t,
t09
corps.
La
gravit,
par exempte,
est bien essen-
tielle la
matire,
autant
que
nous en
pouvons
s
juger, puisque
nous ne trouvons
jamais
la ma-
tire spare
de cette
qualit quel
homme
cependant,
s'il a les moindres notions
phi-
losophiques,
oserait affirmer
que
la mati-
re ne
pourrait
cesser de
peser
sans cesser
d'tre ?
Aprs
avoir montr l'absurdit de cette
thorie,
il est
peut-tre
inutile de la suivre
jusque
dans les dtails de la
pratique cepen-
dant,
comme
j'attaque
des
prjugs
anciens
et
puissants, je
ne crois
pas
devoir
ngliger
rien de ce
qui peut
servir les draciner.
Voici donc la marche
pratique
de Bacon.
Toute ide tant nulle
pour
lui
jusqu'
ce
qu'il
l'ait
matrialise,
il
juge
propos,
on
ne sait
pourquoi,
de
changer
sa
/br<
en
u~nc,
et les
expriences
sont des ~etM/'ns
qu'il s'agit
de
presser pour
en
exprimer
la vrit.
tl
divise ces fruits
prcieux
en trois
classes,
savoir raisins
a/ytr)Ma<
raisins
ngatifs
et
raisins
compeM'a~
c'est--dire
expriences
o la forme se
trouve,
expriences
o elle
ne
BASE DB L PHILOSOPHIB <t0
se trouve
pas, expriences
o elle se trouve
en diffrents
degrs (1).
Dans les
rgles,
il
faudrait,
avant d'affir-
mer,
avoir une connaissance
parfaite
des~c-
turcs
simples,
dont
quelques-unes
sont en-
core
vagues
et mal
circonscrites,
comme
par
exemple la
nature
cleste
la nature lmen-
faire et la nature rare
(2).
Bacon sent la diffi-
cult,
il se
propose
bien de
re faire
l'enten-
detKM~
~MwaN,
pott~
le mettre au M!uec[Mdes
choses et de la nature
(3)
mais il faut avoir
(t)
Nov.
Org. II, nx!, p.
84, xn,
p.
8C xm,
p.
96.
(2)~VonnttfB,fe!M<t
tto<)'Otta<ttt'<B
elcmenlaris, tto<t0tt<t-
<ttr<B
c<B~Mt~,
notio
tenuitatis
sunt MottO!tM
t)C~<B
nec bene
<ermMa<<B.
(Nov.
Org. n, xix,
p. 109. )
En
effet,
il ne serait
pas
ais de trouver la
/bffne
de la
nature
clestepar
voie
(!'ea;ctm<OK;
mais ce
qui
est bien et
affirmativement
dmontr,
c'est
l'ignorance grossire
enfer-
me dans cette
expression
seule de nature cleste.
(3)
7<<t~ue
nos
qui
nec
ignari sumus,
nec oKt<t
quantum
opus aggrediamur
( videlicet
ut
(aciamus
tmte!<ec<m huma-
))ttt)t rebus e<t)<!(t<r<B
parem )
etc.
( !bid. p. 409. ) Bacon,
au
reste,
qui
avait
refait
l'entendement
humain,
n'a
point
em-
pch
Condillac de le
refaire
encore de nos
jours. Qui
sait
quand
on russira? ce
qu'on peut dire,
c'est
que
ceux
qui
croient
l'opration possible
auraient
grand
besoin
qu'elle
le ft.
DE BACOK. lit
quelque
bont
pour
la curiosit
humaine,
il
veut bien nous
permettre quelque
licence.
Lorsque
les trois
tables sont
formes,
on
peut,
par
manire
d'anticipation
citer les
exp-
?*CKCM
comparatre
devant
~M<eK~e~ce (1).
Lorsqu'elles
auront suffisamment
parl pour
et contre devant ce tribunal
auguste,
on
pourra,
sans
tourderic,
conclure
quelque
chose dans le
genre
afnrmatif,
et cette licence
S'appelle
VENDANGE PREMIRE AVEC
LA PERMIS-
siox DE L'INTELLIGENCE
(2).
Molire
n'a rien
d'gal, pas
mme la
rception
du malade ima-
ginaire
mais ce
qui
n'est
pas
moins
exquis
c'est l'avertissement
qu'il daigne
noos
donner,
<~t'~faut
bien se
garder
de
prendre
M?e
nature,
c'est--dire unegua~e gtte~con~ttepoMr
la
forme
cAeycAee,c'es<-a-~e~ot{r
la chose
)Meme(ips!s-
simre),
aMOtM~~ueceMe qualit M'aM~Me~~e
et
(t)
Facienda est
comparentia
ad tttfeHec~um omnium in-
<<ftn<MrM,
etc.
(Voyez pour
les trois
comparutions
rotatives
aux trois
tables,
Nov.
Org.
lib.
n, xi, p.
84; xn, p.
86;
xm,p.95.)
(2) Quod genus tentamenti permissionem
intet)ectus.
sive
Y!NDEM!AT!ONEM PMMAM
appc.'fore
fOMxeM'MMi.
tbid.
ix, p.
110.
BASE DE L~ PHU.OSOPHIB
112
ne dnMMMe MuarMMeMM~ et
proportionnelle-
ment avec la
nature
(ou
la
MCtH~e)
c~ercAce
(1).
Il
y
a dans cette assertion une telle confu-
sion
d'ides,
une telle faiblesse de
concep-
tion,
un tel oubli des
rgles
les
plus vulgaires
du
raisonnement,
qu'elle
est
unique peut-
tre dans les vastes annales de la draison.
Ce
qu'il y
a d'excessivement
plaisant,
c'est
que,
toutes ces ides tant fausses et
confuses,
il lui
arrive,
mme sur ce
point
fondamental,
d'oublier dans un de ses
ouvrages principaux
ce
qu'il
a dit dans
l'autre,
et d'avancer tout le
contraire. Il nous
dit,
par exemple,
au livre
de la
Dignit
et de r~ccro!sseMe~< des sciences
P<M'<oM<o il a
pas d'exprience
contra-
(~otre,
conclusion est vicieuse
(2) par
o
(1)
OrnnMo
r~t<fn<Mf
u()K))t
t'M)'pta<t<r<t!~t<aMa<ttrap)'o
fo'd
/brm~, M!'<tperptua
<!ecrMca<
~anao
ratura
ipsa
verd
('ormd,
nisi
perpetud
decrescal
quando
natura
ipsa
dect'MC!'<,
et
~!mttt<erperpe<u& augeatur quando
natura
ipsa
aMgteatttf. ( Ibid. xiu, p. 95.)
Celui
qui
crit
ceci,
et tant
d'autres belles choses dece
genre,
avait ses raisons
pour
harla
mtaphysique
son instinct lalui faisait craindre.
(2)
Ubi non invenitur instantia
<:ott<radtc<ofM,
ctttM~
eoKc!Mdt<Mr.
( DeAugm.
Scient, lib.
v, cap.
Il.
Opp.
tom.
Yn, p. 249. )
MBACO~r. !<!
l'on
voit
que
t'exprience
contradictoire est
prise
ici
pour
une
exprience
de
simple
vrifi-
cation,
confirmative de la
conclusion
(1).
Mais
dans le Nouvel
Organe
il oublie la maxime
pr-
cdente,
et il nous dit
yM'MMe
seule
exprience
contradictoire dtruit
mani festement
toute <Aeo-
ne sur la
forme (2).
Dans le
premier
cas,
il
prend
le mot
contradictoire
dans le
sens
pro-
pre
et
judiciaire
il s'en sert
pour dsigner
une
exprience qui comparat par
devant ~M<e~-
gence,
aux
fins
de
s'opposer
la
conclusion,
et
ceUe-ci n'est sre d'elte-mme
que.lorsqu'elle
a fait ~e&oM~'
l'exprience (3);
dans le second
() (?!<
enim in M
recipiet, quum parlicularia ~O! ~t't
novit aut
quorum
meminit ex un tantm
parte compareant,
non <feH<eMere
aliquid quod
omnino
repugnet ? ( Ibid. )
On
s'aperoit,
en lisant ses
OEuvres,
que
le barreau avait
fourni
ptusieurs expressions
son
argot philosophique.
(2) .M<mt/M<t<m
est enim. omnem instantiam contradicto-
r~am~MtrMere
opinabile de (ormd.
(Nov.
Org.n,
tvin.
Opp.
tom.
vjn, p. 107.)
(3) Car,
puisqu'il
nous dit
qu'on
n'est
jamais
sur d'une
conclusion tant
qu'il n'y
a
point d'exprience contradictoire,
il s'ensuit manifestement
que l'exprience
contradictoire
pet<<
au moins certifier la conclusion.
TOME 1.
3
BASE DE LA PHILOSOPHtB 114
cas,
au
contraire,
il
prend
le mot co~mc~otrc
pour
un
synonyme d'exclusif,
dans le sens le
plus
absolu,
et il entend
qu'elle
dtruit tou-
jours
la conclusion. On ne saurait s'tonner
que
l'homme
qui
n'a aucune ide claire n'en
ait aucune de
fixe,
et
qu'il
se serve successive-
ment de la mme
expression pour
rendre des
notions toutes diffrentes.
Voyons
maintenant comment Bacon se ser-
vait de sa mthode
d'e~c~MMM,
puisqu'il
a
pris
la
peine
de nous en informer lui-mme.
Il se demande
quelle
est la
forme
ou l'es-
sence de la chaleur? Et voici ses
arguments
exclusifs.
Par les
r<K/<MM
du
soleil
rejetez
la Matre
e~emeM<c[!'re
(1).
(t)
C'est--dire
Puisque
les
rayons
du MMt sont
e~aufft,
donc le
feu
n'est
pas
un lment. On
pourra
se demander
pourquoi
il ne citait
pas plutt
le feu ordinaire. H
y
a ici un
grand mystre.
Bacon tait furieux contre les
scolastiques,
qui regardaient
le feu du soleil comme
quelque
chose de dif-
frent en essence de celui
qui
faisait cuire leur
soupe.
Par-
tout il soutient le
contraire
atm
que
les
expriences qu'il
faisait dans sa euisiue lui servissent deviner les secrets du
soleil. Telle est la raison cache de ce
profond atgume&t.
C'est une malice dite au soleil.
DE BACOK. <i5
PecrVe
feu
commun,
et surtout
parle feu
sou-
~erm!M
rejetez
la nature cleste
(1 ).
Par
~'ec/M!K~etMCM<
possible
de <o!M les
corps
rsultant du contact du
feu
ou d'un
CO~ dj
chauff, rejetez
toute varit dans les
co?~
et
toute contexture
plus
subtile des
corps (2).
Par les mtaux
cActM~M, qui chauffent
<f<[!<-
<rM
corps
sans rien
perdre
de leur
poids ni
de
leur
substance
r~e.z
ride' d'une substance
par~M~ere qui s'e~'oM~
et se mle au
corps
chauff (3).
(1)
Bacon
croyait que
le ciel
commenait
la
tune
et tou-
jours
il
appelle
les
plantes
les choses c~M<e~.
D'aprs
ces
ides
grossires,
il dcide
que
le feu n'est
pas
cleste, puis-
qu'il
se trouve sur la terre,
et mme dans la
terre,
o il est
fort loign
et M'tre'mement
spar
des
rayons
clestes.
(!bid.)
Qu'est-ce qu'loign? qu'est-ce que
rayons
clestes? enfin
qu'est-ce que
le ciel ? On n'aurait
pas parl
autrement dans
une cole de
village.
(2)
!)
y
a ici une bvue
comique.
Bacon
confond l'essence
des
corps
chauffs avec celle du
principe
chauffant. S'il
avait examin la forme du fluide
lectrique,
il n'aurait
pas
manqu
de dire: Par le
verre, par
la soie et
parles
rsines,
qui
sont
impermables
l'lectricit, fe)etM
la
naturevitre,
la nature
soyeuse
et la nature rsineuse.
(3)
On voit ici
que,
l'ide d'un fluide
impondrable
ne se
prsentait pas
seulement sa <errMfre
intelligence.
SERPIT
8.
BASE DB LA KHLOSOPHtE lt6
Par les mtaux
qui ~ec/~M~e~, quoiqu'ils
soient
trs-denses,
rejetez
la raret
(1).
Par ces
MtcMtes Mc~OMa?
qui ~'aM~en~~ pas
visiblement
de volume
./orsgM%
sont
ecAaM~,
?'e~e~
toute ide de mouvement local ou
expansi f
dans la masse
(2).
Par
foKa~o~e
des
effets
du chaud et du
froid,
,'ejetez
~OM~
mouvement de dilatation ou de con-
~'ac~oM dans le tout
(3).
HUMI
si l'on
pouvait ajouter
tutus
nimim,
il aurait au
moins le mrite de la
modestie
mais
pas
dutout: il est aussi
tmraire dans ses
conceptions que
nul dans ses
moyens.
Cette
quatrime
exclusion le couvre de ridicule.
(1) Cet axiome n'est
que la rptition
du
premier;
mais
probablement
Bacon ne s'en
apercevait pas.
(2)
On voit
par
cet
exemple.
et l'on
peut
voir
par
mille
autres, l'infaillibilit de Bacon
pour
rencontrer le faux dans
tous les
sujets.
Ici
j'insiste
seulement sur l'un de ses carac-
tres les
plus distinctifs;
c'est
l'incroyable
faiblesse de son
intelligence qui
ne
sait jamais
s'elever au-dessus des sens.
Non-seulement il ne
souponne pas
une
augmentation
de
volume
par
la chaleur
(la
chose du monde la
plus
aise
vrifier,
et
visiblement dmontre d'ailleurs
par
l'effet du
froid )
mais il ne croira
pas
mme cette
augmentation
opf!~
il faut
qu'il
la voie
s'oprer.
Afat)e<~<ra eam~m
dtmetMMMentYlSIBiLEM. Plaisant restaurateur de la
phy-
sique
1
(3)
!t admet
cependant
ce mouvement dans les
parties.
M BACO~. H7~
Par la cAc~eM?'
qui
rsulte t~M
/ro~eMCM~
e.ec/Me.?danatare
principale; 72 appel Maho'e
principale
celle
qui
existe
positivement
dans la
nature,
et
qui
n'est
pas simplement fe~e<
<fwM
?tcc<Mreantcdente
(1).
J e
passe
d'autres
expriences pour abrger.
Toutes ensemble
(au
nombre de
quatorze)
forment la
vendange p~eM/e~e,
de
laquelle
le
docte chancelier se croit en droit
d'exprimer
Ainsi toutes les
parties
se
remuent,
mais le tout ne remue
pas.
A la vrit
quelques-unes
de ses
expressions pourraient.
faire croire
qu'il
admettait une dilatation
relle;
mais selon
d'autres textes
plus dcisifs,
tout se
bornait,
suivant
lui,
un
simple
effort.
(<)
~Va<uram
pttnctpa!em
coe<t<n<X
Mt~t~BpoifMpafe-
peritur
in
naturd
nec causagur MatMfd
pr~cedeM<e.
( Ibid.
tib.n, xvm, p.
i09.)
Ainsi
il
y
a des natures
qui
sont dans.)a
nature
et d'au-
tres
qui n'y
sont
pas,
et il
y
a des natures
qui
en
produisent
d'autres
c'est--dire
que
les essences
produisent
des essen.
ces,
ou
que
les
qualits produisent
des
qualits,
ou
peut,
tre mme des
essences
et il
y
a des natures ascendantes
et
des natures
descendantes, comme dans tes gnaiogies
hu-
maines,
sans
que, par
malheur,
Bacon nous ait dit
quel
degr
commence la strilit
il serait
cependant bien
utilq
de savoir
si une nature
qui
a une fille
peut
avoir
une
petite.
Ctie.
BASE Dt LA PHILOSOPHIB Ii8
la vrit suivante LA NATURE LIMITE
PAR LA CHALEUR EST UN MOUVE-
MENT
(t).
Il
faut
donc bien se
garder
de croire
que
la
chaleur
produit
le
mouvement,
ou
que
le
mouvement
produise toujours
la chaleur la
vrit est
que
la chaleur
eMe-Me~e,
ou f essence
de la
chaleur,
est MMtMOMceM!eM<et ne~ de
plus (2).
Et l'on ne doit
point
confondre la commu-
nication de la chaleur avec la
chaleur
car
autre chose- est la
chaleur,
autre chose la
cause
de la
chaleur
puisque
nous
voyons que
le frottement
produit
la
chaleur sans aucune
(1)
Mais, parce que
le feu ou le
calorique
n'est
pas
une
substance, comme Bacon vient de le dire
( en
se rservant k-
droit de dire bientt tout te
contraire)
et
qu'il
n'existe
pas
dans la nature
principalement
et
positivement,
il s'ensuit
que
l'essence
qui
n'existe
pas,
mais
qui
est limite
par
la chaleur
qui
n'est
gM'MHmouvement,
K'e~<
qu'un
mouvement.
Dicite io Paean et io bis dicite Pan
(2) Natura,
cM;u<!tmt<a<o
est
calor,
videtur
esse tnot<
intelligatur
hoc.
non qud
calor
generet
motum
aut
~M
mot!<t~c?tere<
calorem.
~s~t<6dipsissimusca<or.<!<
t90<t<<e<non aliud.
(tbid. , xx, p. 110.)
Du BACOtt.
tt9.
chaleur
prcdente,
ce
qui
exclut J e
prMM!~e
de la chaleur de feMe/!ce de la chaleur
(1).
Charmant
Le mouvement est donc ce
~oM'e
ou cette.
nature
suprieure
dont il est
parl plus
haut,
et
qui
renferme sous elle une
espce qui
est la
chaleur.
Il ne
s'agit
donc
plus que d'assigner
les ca-
ractres
qui
diffrencient ce mouvement de
tous les
autres,
et c'est
quoi
Bacon
procde
avec
le mme
gnie
et la mme
profondeur.
J e
ne
rappellerai que
les
principales
diffrences.
(<) Neque
cer~ communicatio caloris.
con/MH~t
debet eum
forma
caH~t
aliud enim est
calidum
aliud
calefactivum
Mam
per
motum attritionis inducitur calor
absque
alio caMdo
pro'cedett<e Mttde
<'jec!wdt<r
cafe/acfMunt
/bt'm<t
ca!Mt,
(!bid.,p.Hl.)
Que
si un
corps
chauff en
chauffe
un autre
par
le
contact
c'est l'effet d'une nature
plus
leve et
plus
gn-
rate
que
celle de la
chaleur;
c'est--dire la na<t<T'ede !'<tMt*
milation ou de la
multiplication
de soi. Si donc la chaleur
s'empare
d'un
corps par
communication
c'est
uniquement
parce qu'elle aime
se
multiplier elle-mme. Ainsi, !or~Me
la chaleur se
communique,
ce n'est
jamais
en vertu de sa na-
<Mre,
mais
seulement
parce que
sa nature la
porte
A se cont-
muniquer;
ce
qui
est clair. Mt cattdm
e~ct<wt' per
BABB D LA PHILOSOPHIB ~20
La
premire
est
que
ce mouvement
qu'on
appelle
cMeMr est un mouvement
expansif,
en vertu
duquel
tout
corps
tend se dilater
lui-mme dans tous les
sens,
de manire
occuper
un
plus grand espace (1).
Une autre
diffrence,
qui
est une limitation
de la
limitation,
c'est
que
ce mouvement
ex-
pansif, quoiqu'il
se fasse
toujours
vers la cir'
confrence,
se
fait
en mme
temps
vers le
haut
(2)
car il
n'est pas
douteux,
ajoute
ma-
gistralement
Bacon,
qu'il y
a des mouvements
composs:
Il est savant
Mais la diffrence la
plus caractristique,
c'est
que
ce
mouvement
nomm
chaleur
n'est
<H)pr<M;Mtta<t<Mtemcalidi hoc
ipsum
non
/:<
M
formd
coMt,
<<c.(Ibid.)
(i)
Le
corps
tend se dilater. I) ne dit
point qu'il
se
dilate
en effet,
dit mme
prcisment te
contraire la
page
114.
(!bid.)O~ndt~re~aM in ttt
corporibus ~o
<Mn<tam dura
compagis,
ut
cate/ooto
aut
ignita
non tK<M-
tne<Mt)( aM<<tt<a(ett<r
mo!e,
t
/erfm <yHt<m
ttt
~o
ca~or
meacant aut dilatenlur
mole, son exempte en in quo calor
est
acerrimus.ll a bien trouv son
exemple
en choisissant le
fer!
(2)
Bac
lege
<<tmen ut un
/<'ra(r corpu,
<wr<Mm
<<<,
{tbid.,p.H3.)
DE BACOH. <2)
point expansif dans
/e
tout
mais seulement
dans les
par~cM/cs
intgrantes;
de manire
que
le mouvement des
parties
se trouve
sans cesse
rprim, rpouss
et
n~er~'e;
trpidation
continuelle et un effort irrit
par
la rsistance. DE
LA VIENT,
ajoute
Bacon,
LA RAGE DU FEU
(1)!
En
effet,
qui
ne
perdrait patience
en se
voyant
continuel-
lement contredit et soumis
un.
mouvement
continuel,
continuellement rverbr
par
un
repos
continuel ?
Voici donc la science dcoulant de la vc/t*
dange preM/ere presse
avec
/(~cnM!OM
de
l'intelligence
1 La chaleur est un mouvement
expansif
rprim
et faisant effort
par
ses
particules.
2
Ce mouvement
expansif, quoiqu'il agisse
en tous
sens,
incline
cependant
tant soit
peu
vers le haut
(2).
(t) Coh<H(tM,
et
fepu~u~,
et
reverberatus;
adeo
ut induat
tHOtt<m<t!(enta(tt)Mme(perpe<u6(rep)'dan<<nt,
e<
lentantem,
et
nitenlem,
et M
repercussione
trt-a<t<m
UNDE FUROR
ILLE tGNIS et ca!or!'< o)'<Mm habet.
(Ibid., p.
n3.)
(2) Expandendo
in
amM<t<m,
nonnihil (amen
INCLINAT
BASE DE LA PHILOSOPHIE 123
3
L'effort,
ou le
nisus par parties,
n'est
pas
tout
fait paresseux
mais actif et dou d'un
certain lan
(4).
Aprs
la science vient la
jMMSMMce, qui
est
sa fille. Voici donc comment l'homme est de-
venu
plus puissant
en vertu de la
vendange
preM~e.
Toutes les fois
que
vous
pourrez
exciter
dans un
corps
naturel
(2)
un mouvement de
dilatation ou
d'expansion,
et en mme
temps
rprimer
ce mouvement et le tourner contre
lui-mme,
de
manire
que
la dilatation ne soit
point uniforme,
mais en
partie agissante et
en
MMw
Minora.
(!bid.,p.lt5.)
Ainsi un boulet
rouge
tombe vers le bas en vertu de la
gravit
tandis
qu'il
incline
vers le haut en vertu de la chaleur.
(t)
Non omnino
segnis,
sed incitatus et cum
t'mpe<
non-
nullo.
(Ibid.) Bacon,
n'tant
point
du tout d'accord avec lui-
mme sur la force
expansive,
et ne sachant si elle tait vive
)u morte
( pour
se servir des termes invents
depuis )
em-
ploie
des
expressions vagues
et
potiques qui
ne
puissent
le
compromettre.
C'est une
prcaution que
ne
manque jamais
de
prendre
ce
grand
comdien de la science.
(2)
Si )e
corps
tait
surnturel,
la mme
rgle
n'aurait
plus
lieu,
du moins
je l'imagine.
BB BACOX.
123
partie repousse,
VOUS AUREZ CERTAINE-
MENT PRODUIT LA CHALEUR
(1).
C'est--dire que
nous
aMro?M/a!<dM /eH
mais
pour
cela II ne faut
qu'une
allumette;
on n'a
que
faire de la mthode d'exclusion. En vrit
on ne sait ce
que
l'on doit admirer le
plus,
ou
de l'effronterie
qui
dbite avec
prtention
de
pareilles
billeveses,
ou de la
patience qui
les
tolre. J 'aime mieux croire
qu'on
ne les lit
pas.
On ne cessera de s'tonner de l'audace no-
logique qui
se
permit
de donner le nom d'in-
duction
lgitim
une vaine
opration
directe-
ment
oppose
la vritable M!c~c<!OM
lgitime,
puisque
celle-ci assemble des vrits connues
pour
en dcouvrir une nouvelle
qu'on
cherche,
tandis
que
l'autre
prtend
dcouvrir une cs-
(1)
Procul dubio
generabis
calorem.
(tbid., p.
<16.)
Un
mouvement ne
peut
tre
repouss
ou
rpercut,
dit ici le tra-
ducteur ce
qui peut t'tre,
ce sont
tout au plus les particules
mises en mouvement. Afa)~
quand
le mcanisme
qu'on
veut
dcrire
n'est pas
nettement
conu,
le <erme
propre chappe,
et
de
physicien
on devient fhe<ct<r.
( tom.
v de la trad.,
p.
201.)
C'est la
vrit,
maisnon toute lavrit6
toujours
Bacon est
rhteur,
et
jamais
il n'est
physicien.
BASE DE Li Pt!tLOSOPn)B DB BACO~. t24
sence en excluant tout ce
qui
n'est
pas
elle
deux choses
qui
n'ont videmment rien de
commun. J amais il
n'y
eut un tel abs de
mots,
et
jamais
cet abus ne fut
plus insupportable
que
dans les crits d'un auteur
qui
n'a
cess
de. s'en
plaindre.
Bacon transmit ce ridicule et ce crime
logi-
que
son
joe~
Condillac,
qui
n'a
pas
man-
qu
aussi de
re faire
la
langue ~a~caMe pour
refaire
l'entendement ~M~M!'?t.
Afin de mettre entirement dcouvert le
nant de cette mthode
d'exclusion,
il est n-
cessaire
d'ajouter
un mot
sur les essences et
sur les
dnnitions
en
gnral.
CM MNMCtS tT DB LEUM D&rtKITKMtS. 1M
CHAPITRE IV.
DES ESSENCES ET DE LEUES OEFtNtTIOKS.
L'essence,
oaceque'pacon appelle la forme
d'une-
chose
c'est sa
(M/M/<!0)t.
Tantt la dfinition
est
employe par
celui
qui
veut
expliquer
sa
pense,
et tantt elle est
demande par
celui
qui
veut
connatre la
pen-
se
d'autrui
mais dans l'un et l'autre cas la
dfinition n'est
qu'unec<~(a<!OK,
et c'estla vraie
dfinition de la
dfinition.
On demande ce
que c'est que
rAoTMMe;
je
r-
ponds par
la dfinition
vulgaire, qui
suffit ici:
c'est un OKMMC~raisonnable.
Soit donc l'homme
=
H;
row~tt~c
ou la
DES ESSENCES
t2a
vie
=
A;
l'intelligence
enfin ou la raison
=
R;
nous aurons H
=
A+
R.
C'est une
quation pure
et
simple,
o l'on
reconnat au
premier
coup
d'il une loi l-
mentaire des
quations algbriques;
c'est--
dire
~M'oMpe!
sans altrer
l'quation
trans-
por~?'
les
quantits
d'un membre l'autre en
changeant
les
signes.
En effet H R
=
A,
et
H A
=
R,
c'est--dire
l'ange
ou
l'intelligence
pure.
La vie et
la
raison sont mises en
pendant
ou
en
quation
avec l'ide d'homme.
Mais,
comme
le docte Huet l'a
remarqu
avec
beaucoup
de
justesse,
toutes ces dfinitions
par
genres
et
par
diffrences ne
signifient
rien,
moins
qu'on
ne connaisse antrieurement et le
~eK~e
et la diffrence
.(1).
Ainsi,
lorsque j'ai
dit
que
l'homme est MM
CMmc~ ~MOMttaMe,
je
n'ai rien
(1) Huetius,
de
7tt)&ectM. J MeM<.
hMm. lib.
ni,
art. 4. C'est
ce
qu'enseigne
la raison.
Condillac,
en soutenant sans dis-
tinction ni limitation l'inutilit de ces
dCnitions,
a soutenu
une
grande
erreur.
(Essai
sur
l'Orig.
des Conn.
ht<m:,
sect.
ni.)
On ne saurait se
passer
de ces
dfinitions, qui
sont aussi
naturelles
que
les
langues
mmes. t) suffit de ne
pas
leur
demander ce
qu'elles
ne
promettent point.
M DE LEURS DEMMTIOKS.
<27
dit,
moins
qu'on
ne
reoive
comme
dj
con-
nues l'ide de la vie ou de la
sensibilit,
et
celte de
l'intelligence..
En se
rappelant
cette observation
qu'il
ne
faut
jamais perdre
de
vue,
il demeure
toujours
vrai
qu'en
toutes sortes de dfinitions on trou-
vera d'un ct le nom de la chose
dfinir,
considre comme substance ou essence
quel-
conque,
et de l'autre les noms de certains l-
ments ou modes dont l'ensemble est cens re-
prsenter
la chose.
Le
plus simple
bon sens
enseigne qu'
l'-
gard
de ces lments ou de ces
qualits
il est
d'une
rigoureuse importance
de
distinguer
ce
qui
est accidentel de ce
qui
est essentiel
la
chose
c'est sur cette observation
vulgaire que
Bacon abati son enfantine et
&oMt&(M~Metho-
rie des ~cc~rea et des
formes
et sa mthode
d'exclusion.
1
Si une
nature, dit-il,
ou une
qualit
ne se
trouve
pas
toujours jointe
une essence ou
une forme
(tp~MSMMa
res)
il
faut l'exclure,
parce
qu'elle n'appartient pas
cette essence.
Belle
dcouverte
vraiment Mais ce
que
Bacon
n'a
pas
vu
parce qu'il
ne
voyait
rien,
c'est
qu'il
est
impossible
de savoir ni mme
de
DES ESSENCES
t39
demander si une certaine
qualit appartient
t
ncessairement une essence sans conna!-
tre
auparavant
cette
e~se~e,
l'affirmation
ou la demande ne
pouvant
se
rapporter qu'~
une ide
prexistante.
Nul homme ne
peut
demander ce
que
c'est
qu'une
chose dont il n'a
point
d'ide car,
puisque
dans ce cas il ne saurait
mme y
pen-
ser,
comment
pourrait-il
demander ce
<~t'e~e
est?
Qui
jamais
a
pu
dire
Qu'est-ce
que
le
quin-
quina ? qu'est-ce <~t'MMalligator? qu'est-ce que
l'or blanc? avant
que toutes
ces choses fussent
connues
et
qu'elles
eussent un nom? Celui
donc
qui
demande ce
que
c'est
que
le
feu
de-
mande ce
qu'il
sait,
et l'on est en droit de lui
rpondre
Dites-le
vous-mme
personne, je
crois,
n'ayant jamais
dit:
~M'e~-cc
~Me~eM?
Les noms
reprsentent
les
Ides
et sont
toujours
aussi clairs
qu'elles;
ils ne
peuvent
l'tre
ni
plus
ni
moins,
puisqu'ils
ne sont dans
levralque~M~ce~cM'/ee~.
Dieu n'a
pas voulu
que
nous eussions de toutes les choses
qui
se
prsentent
notre
intelligence
des ides
gale-
ment claires,
ou adeg!(a~,
comme dit l'cole;
mais les mots destins
reprsenter
ces Ides
n'ont
jamais
<o~;
ils
sont aussi
clairs
qu'ils
ET DR LEURS DFINITIONS.
9
doivent l'tre
<c'est--dire
aussi clairs
que
la
pense,
et mme ils ne sont
que
la
pense
de manire
qu'il n'y
a d'autres
moyens
de
perfectionner, une langue que
celui de
per-
fectionner la
pense.
Les mots ne
sont point
faits
pour exprimer
ou dfinir les
choses,
mais
seulement les
ides
que
nous en
avons;
autrement nous ne
pourrions parler.
Les modernes
que je
con-
tredis ici de
front,
voudraient-ils
par
hasard
condamner
l'espce
humaine au silence
jus-
qu'
ce
que
les essences lui soient connues?
Nous connaissons tous les
objets
de notre
cercle comme et autant
que
nous devons les
connatre. La
perfectibilit
humaine vient-elle
en se
dployant
suivant des lois caches
nous faire
prsent
d'Ides nouvelles tout de
suite des mots
nouveaux se
prsentent pour
les
exprimer;
ou bien des mots
dj reus
dans la
langue
revtissent,
sans
qu'on puisse
dire
comment,
des
acceptions
nouvelles
(1).
(1)
Maiscesderniers mots sont
p!us lgitimes, parcequ'ils
sont
plus
naturels. La
rgfe
suivante ne souffre
point
d'ex-
cpption
P/tM !M
mot<sont
e<f<tn<y<'r~
toute<f~tMra<'on
TOME F.
CES HSSEKCES fSO
Les mots THEOS ou
DEUS,
avant l'tablis-
sement du
CI)rist!anisme,
signifiaient
UN
DIEU ou LE DIEU
depuis
cette
poque
ils
ont
signifi
DIEU,
ce
qui
est bien diffrent.
La nouvelle
religion ayant
amen ride de
l'M/c
c/~me,
parfaitement
circonscrite et
exclusive
le mot s'teva et devint incommu-
nicable
comme
ride
(~).
fumante,
et
plus
ils font VRAIS.* La
proposition
inverse
n'est pas moins certaine.
Bacon n'a
pas manqu
de demander" ce
que
sont les
mots,
sinon les
images
des choses.
Quid
aliud ~w)t<t'er&a
guant
'wa~tHM rerum? ( De
Augm.
Scient. lib.
i, p.
75. )
U
n'y
a
pas
d'erreur
plus grossire,
et il
n'y
en a
pas
dont la
phito-
sophie
moderne ait tir
plus grand parti.
(t)
Cette
considration
excuse,
jusqu'
un
point qu'il
n'est
pas
ais de
fixer
le
potythisme
des anciens. Ils
o o)/a!'en<,
dit-on
communment,
la
pluralit
des DIEUX. Sans
doute,
c'est--dire
la
pluralit
des tres
suprieurs
<t
l'homme;
car le mot de DIEU
signifiait
dans
l'antiquit
M)'<
nature
suprieure,
et rien de
plus (
meHor
natura. )
Dans ce
sens nous sommes
encore
polythistes
et cette
croyance
est
juste
ou
peut t'tre
puisqu'elle
n'exclut
point
la
suprio-
rit de l'un de ces tres sur tous )es
autres
le Christianisme.
en
prononant
sa manire les mots de crateur et de cra-
ture,
ne laissa
plus
de doute ni
d'quivoque.
Il dit une se-
conde
fois,
FIAT
LUX et tous les mots de la
langue spiri-
tuel se
rgularisrent
comme te" ~es.
ET DB LEUM DFINITIONS. 131
Les mots de
p!e<e,
de
cAar~e, d'humilit
de?MMe~co~e
(~)
etc.
prsentent
des
exemples
semblables. De nouvelles
vertus,
produisant
de nouvelles
ides,
demandaient de
nouveaux noms. Le
gnie
des
langues
choisit
ces noms en silence avec son infaillibilit or-
dinaire. Les vertus humaines
qu'ils expriment
ayant
t
divinises,
leurs
noms,
qui
sont
elles-mmes,
durent
partager
cet honneur.
En un
mot,
il
n'y
a
point
de nom
qui
ne
reprsente
une
ide,
et
qui
ne soit dans son
principe
aussi
juste
et aussi vrai
que
l'ide,
puisque
la
pense
et la
parole
ne dnrent nul-
lement en
essence,
ces deux mots ne
repr-
sentant
que
le mme acte de
l'esprit parlant
lui-mme ou d'autres.
Condillac a dit: Un AonMMe
qui
demande ce
que
c'est
qu'un
tel
corps
cn)~
~eMoc~erp~M
qu'un
MOM
et celui
qui
lui
rpond
C'est du
fer,
cro!< aussi lui
repo~'e quelque
chose de
plus (t).
(1)
Essai sur
l'origine
des Connaissances humaines (
c'est-
-dire
sur l'origine des
trajet
ttMj'<tm6e~)
sect. v, i3.
9.
DES ESSENCES 132
Condillac est un sot.
De tout ce
qui
a t dit sur les
de/MM<!OMS,
il
rsulte l'vidence
que
les essences sont in-
dfinissables,
c'est--dire inconnaissables
par
vole de
dfinition
car
pour expliquer
de cette
manire ce
qu'elles
sont,
il faudrait
pouvoir
les mettre en
quation.
Or,
une essence ne
pouvant tre compare qu'
elle-mme
il de-
meure dmontr
qu'elle
ne
peut
tre connue
en essence
que par
intuition, ou,
ce
qui
re-
vient au
mme,
par
son NOM.
L'homme,
en se
fatiguant
toute sa vie dire:
(~e~-ce<j'!(e
cela ?
et comment s'appelle
cela ?
et~Ke
veut dire cela? est un
grand spectacle.
pour
lui-mme s'il veut ouvrir les
yeux.
Tous
ses
lans naturels tenant la
vrit,
il necesse
de chercher des noms
M~M;
il a le sentiment
Dans la
sect. m il avait dit Les
philosophes qui prcd-
rent Locke ne savaient
pas
discerner les
idesqu'il fallait
de-
finir de celles
qui
tts devaient
pas
l'tre.
Qui
l'a
jamais
vu
qui
l'a
jamais
mieux
exprim qu'Aristote ?
Tant d'audace et
tant
d'ignorance
runies
impatientent
l'homme le
plus
calme;
et
cependant
ce
qui
suit sur tes cartsiens
est encore
pire.
ET DE LEUES DEFMITtOM.
133.
d'une
langue
antrieure
Babel
et mme a
Eden.
Dieu lui-mme n'a-t-H
pas dit
J e
m'ap-
pelle
MOI,
c'est--dire J E SUIS? Met l'exis-
tence
cre,
en cela surtout semblable
lui,
a-t-elle un autre nom et
peut-elle
se dfinir
autrement? De l
l'antique
thorie des
NOMS,
lesquels exprimant
les essences et
n'ayant par
consquent
rien
d'arbitraire,
taient dans
cette
supposition
les seules dfinitions
qu'on
pt
donner des tres.
Car c'est absolument la mme chose de de-
mander la
dfinition,
l'essence ou le nom d'une
chose.
De l vient
que
l'Orient,
qui
nous a trans
mis tant d'ides
primitives,
attachait aux
noms une
importance que
nous
comprenons
peu,
si nous ne sommes familiariss avec ces
notions
antiques. Si mes Pres
disait
Mose,
me demandent
quel
est votre nom ?
<~e
leur
repOM~'a~e?
Alors fut rendue cette
rponse
fameuse
qui
dfinit Dieu
par
le nom le
plus
prs
du vrai
nom,
ce dernier ne
pouvant
tre
connu
que
de celui
qui
le
porte.
Et
plusieurs
sicles
aprs,
le roi Ezcehias
DES ESSENCES i3't
votant effacer chez lui
jusqu'aux
dernires
traces de
l'idoltrie,
et sachant
que
son
peu-
ple
avait donn un encens
coupable
au ser-
peH<
d'airain,
non-seulement il se crut
permis
de briser cette
relique insigne,
mais de
plus
il
crut devoir en abolir le nom tandis
que
ce
nom
subsistait,
il tait cens
reprsenter
un
tre,
une
puissance
surnaturelle,
dont le
nom
exprimait
la
nature;
erreur
particuli-
rement
dangereuse
cause des ides
myst'
rieuses
que
l'antiquit
attachait au
serpent
(1),
Ezcblas ordonna
donc,
pour
abolir toute ide
de
puissance
et
d'individualit,
que
le
serpent
d'airain ne
s'appellerait plus que
bronze
(2)
ce
qui
est
trs-remarquable.
Pour se mettre sur la route de ces ides anti-
ques,
il
faut observer
que
tout tre
qui
connat t
(<)
Voyez
la
dissertation
intitule
deCu!<u
SerpftXum
apud
veteres.
( In Thesauro
Martiniano. )
(2)
Focaett~e
nomette~
NEHUSTAN.
(
!V.
Reg.
xnn
4. ) Cette ordonnance du roi dclarait formellementle Mr-
peK<d'airain FAUX
DIEU,
en dclarant
qu'il
n'avait
point
de
nom, mme comme
reprsentation,
et
qu'il
ne
s'appelait
(]ue
mc<a/.
ET DE LEUM CEriMTMM. t33
ne
peut
connatre dans lui-mme
que
lui-
mme
et dans les autres
que
ce
qu'Us ont
de commun avec lui-mme. L'animal ne
peut
sentirou connatre sa manire l'homme
que
comme il connat lui-mme et les autres ani-
maux
l'homme son tour ne connat l'animal
qu'en
le
comparant
l'cMK~a~c de
l'homme;
il ne
connat
de mme la matire
que parce
qu'il
est lul-mcmc n~'M'e en vertu du lien
incomprhensible qui
unit les deux substan-
ces. Il
reconnat
dans la matire brute l'ten-
due,
l'Impntrabilit,
le
poids,
la
couleur
la
mobilit, etc.,
parce que
tout cela se trouve
dans son
corps qui
est aussi
LUI,
on ne sait
comment;
ainsi il ne connat encore dans la
matire
que
lui-mme.
Dans une source o l'en ne s'avise
gure
de
puiser, je
trouve nanmoins des ides
qui
valent la
peine
de trouver
place
ici.
Dieu ne
porte point
un nom
que
nous
puissions
connatre,
puisque
son cMe?ceest
M?mont,
et
que
~oKMont est so?t essence.
Or,
comme nous ne
pouvons
avoir aucune con-
naissance
de
son
essence,
puisque
nous Me
pOMmo/M
connatre sans tre semblable a
DES tSSMCBS
i:6
~Mf(t),
nous ne
pouvons pas
mieux connai-
par lesquels
nous le
dsignons n'expriment
que
des attributs. Mais
parce que
le Ttra-
telligence
et
que
d'ailleurs tous les autres
noms divins dcoulent de
celui-l,
on l'a
fcsse~ce.
Telle est sa
t)c?!~<m<ye~~e~ere, qui
donne
peu
d'envie d'obtenir la seconde.
Le moindre
physicien
aurait
pu
lui dire
commencez vous
comprendre
vous-mme.
Que voulez-vous,
et
que
cherchez-vous ?
Demandez-vous ce
que c'est que
la
c~a~C!/r,
ou le
feu, qui
en est la cause? Dans !e
pre-
f<
mier
cas,
vous
trouverez,
aprs avoirexctu
tout ce
qui
n'est
pas
cAa~r,
que
la chaleur
que
lui-mme a dit
aHteurs
que par
ce mot de nature
Bacr-n entend une
s'Ma<t<e,
une manire
d'e~e,
un
mode,
ou
plus gnralement (o<
ce
qu'on pettt a/~rmer
d'tt e<re rec/
ou
po!6/e..
( tom. n
p.
36. )
Que signifie
donc ~MM~M
d'une
tta<(e,
et cette
oprat!on
merveilleuse
par laquelle
on exclut de l'essence d'une
~<!<t<e
<OM<M les
~xaHt~ qui
ne
<tettnen<p<M<H'eMencede
cee~MoH(e?
En
vrit.
Bacon
s'it revenait au monde
pourrait
tre
jaloux.
ET DE LEUBS DEFIMTMXS.
n M<la sensation
que
nous
fait (~rot~er
le
feu,
c'est--dire
que la
chaleur est la chaleur;
et
dans le
second,
il se trouvera
que
le feu
est ce
qui
nous
fait prouver
la
cAa~cM?',9
c'est--dire encore
que
le
feu
est le
~e!<~
der-
nier et sublime rsultat de la mthode
, exclusive
(1).
Pour couronner
dignement
cet inconceva-
b!e amas de
paralogismes,
de
penses
fausses
et de
conceptions
avortes,
Bacon a soutenu
que
celui
qui
serait assez heureux
pour
con-
natre les essences serait matre de les
pro-
duire volont
(2),
ce
qui
est aussi faux
que
(1) Que
la substance inconnue
qui
nous
procure
la sensa-
tion de la chaleur
s'appelle feu, pMo~Mtt'~Me,
calorique,
ou
autrement,
rien n'est
plus
indiffrent. En bouleversant
un
dictionnaire on ne rvle ni causes ni essences. Servons-nous,
disait )e clbre
B)ack,
de la K0t<t)~~e
nomenclature
mais
toutefois
sans
croire que
nous en sachions mieux
qu'aupara-
t'ant ce
~uc
c'est
que
le
feu.
Nous connaissons le
feu,
comme
toute autre
chose,
parcequ'il
a de commun avec nous,
c'est-
-dire
toujours
dans noM). Pour le connatre
parfaitement
il
faudrait tre feu.
(2)
Le Nouvel
Organe,
nous dit M. Lasalle,
t'M<'
la Mf-
thode inductive e<
ona~h'~Me (analytique!) qu'on
doit suivre
j'om-
dcouvrir ce
~M'M<
en lui-mme
<'f~e< pt'odmre;
ro))-
DES ESSENCES ET DE LEURS DFINITIONS. m
tout ce
qu'on peut imaginer
de
plus
faux
car
si
par exemple, quelque mtaphysicien
tait assez heureux
pour
savoir avec une cer-
titude
d'intuition
et
pour
tre en tat mme
de dmontrer au
plus grossier
et au
plus
obstin
disciple
de Locke et de
Condillac,
que
l'essence de fa?Me est la
pense
on ne voit
pas
bien clairement
qu'il
en rsultat
pour
lui la
possibilit
de crer des
esprits
volont et dans
tous les
cas possibles.
~a~, dira-t-on,
vous
calomniez Bacon,
dont
la
jpropo~<'oM
ne sort
pas
du ce?'c~e
physique.
A cela
je rponds qu~Il n'y
a
point
et
qu'il
ne saurait
y
avoir d'essences
physiques.
Et comme cette dernire
proposition
est,
sans
contredit,
le comble de l'absurdit sui-
vant toutes les ides de
Bacon,
il
s'ensuit que
rien n'est
plus
vrai.
7
oa!M<Hte6
qui
nous tncttratt mme de le
produire
volont,
dans lous
<Me<xpoMt6tM.(tom.
ix;
prf., p.
xv. )
On dirait
qu'un effet
est une
substance,
puisqu'on
nous
n~ite chercher ce
qu'il
estenlui-mme.
COSMOGONtE
ET SYSTME DU MO~fDB.
CHAPITRE
V.
COSHOCOMB ET SYSTME DU MONDE
(1).
La nature adivis la matire en deux
gran-
des
classes,
le
pneumatique
et le
tangible.
La
premire
va
toujours
en se raffinant
jusqu'aux
extrmits du
ciel,
et la
seconde,
au con-
traire,
s~paissit graduellement jusqu'au
cen-
tre de la terre. Cette distinction est
primaire
et
primordiale;
elle embrasse le
systme
en-
(l) Bacon,
dit M.
Lassalle,
n'avait
gure
observd le ciel
que
de son !t<.
(tom. v, p. 349, note. )
J e commence
par
cet
loge
un
peu burlesque,
mais
parfaitement
fond,
et
qui
sera
amplement justifi par
tout ce
qu'on
va lire.
TOME l.
10
COSMOOOMB ~B
tier de
l'univers; d'ailleurs,
elle est la
plus
simple
de toutes
,puisqu'elle n'est prise que dans
le
plus
et le moins
(1).
Le
pneumatique
de notre
globe
se rduit
l'air et la
flamme,
qui
sont l'ther et au feu
sidral ce
que
l'eau est l'huile dans les r-
glons
infrieures,
et
plus
bas encore ce
que
le mercure est au soufre. C'est ici o Bacon
verse des torrents de ~MMMe~esur ses o~cMr~
Masp/MttM~etM~
on est rellement bloui
par
toute celle
qui jaillit
de ces
superbes
analo-
gies.
Mais continuons.
La manire dont l'air et le feu se sont divis
l'univers,
c'est--dire
l'espace.
entier
depuis
le centre de la terre
jusqu'au
faite du ciel
(2),
le
partage
naturellement en trois
tapes
ou
p~mc/tM~ (3),
savoir la
rgion
de la
flamme
teinte,
la
rgion
de la
flamme
condense,
et
la
rgion
de la
flamme disperse.
(1)
Deser. Globi intell. Thema coeli.
Opp.
tom.
ix, p.
241.
(2)
A <erfd
ad Fastigia
cti.
(Ibid., p. 243. )
J e suis tonn
qu'it
n'ait
pas
dit
jusqu'aux girouettes.
(3) Tria
tanquam
<a6ttfa(a.
(tbitt.)
ET SYST&MB DU MONDB. 447
Pour
comprendre parfaitement
cette
divi-
sion,
il faut savoir
que
le
feu,
dont la
patrie
vritable est le
ciel,
s'affaiblit en
descendant
jusqu'
nous,
au
point que
le feu
terrestre
tel
que
nous le connaissons dans nos cuisines
et dans nos
laboratoires,
n'est
qu'un
mauvais
~6M.sctH<,
une
espce
d'histrion ou de
singe ('!),
qui
contrefait comme il
peut
le feu
cleste,
mais tout fait
gauchement;
et de l est venue
la fable
antique ~MeYuIcain,
cM~OM&a~MM*
terre,
en ~CMMwa boiteux
(2).
Cela
pos
il
faut savoir de
plus que
la
flamme vers
la
terre
n'a dans l'ir
qu'une
vie
momentane et
prit
bientt tout fait
(3).
Mais
lorsque
l'air en
s'loignant
de la terre
commence se dcrasser un
peu
la flamme
son tour fait
quelques
essais
pour
se fixer
dans
l'air,
et
quelquefois
elle
parvient
se
procurer
une certaine
dure,
non pas cepen-
(t) Descript.
Globi intell.
cap.
vu.
Ibid. p.
235. MA-
LUM MIMUM.
Parm.
etc.
Phit.,
tom
n, p. 340.
(2)
EMo</<
and Councils
o/
Vulcan.
(3) ~~)M pen<. (!bid.,
p. 2M.)
10.
COSMOGOMB t~S
dant
par
~MCceM'o?~ comme
parmi
MO!M,
mais
pctr~eM<~e (1).
C'est ce
que
nous
voyons
arri-
ver dans certaines comtes les
plus rappro-
ches de la
terre,
et
qu'on peut regarder
comme des
moyennes proportionnelles
entre
la flamme successive et la flamme consis-
tante.
La nature
flamboyante
ne
peut cependant
se
figer
et
prendre
de la
consistance avant
d'tre arrive au cercle de la lune. L elle
commence se
dpouiller
de ce
qu'elle
avait
d'extinguible, et
se
dfend
comme
elle peut (2);
cependant
elle est
faible,
elle a
peu
d'irradia-
tion,
vu
qu'elle
n'est ni vive
par
elle-mme,
ni excite
par
aucune nature
ennemie,
et
qu'elle
est d'ailleurs mle et barbouille de
matire thre
(3).
r
Il est sr
cependant que
la lune n'est
point
(1)
Non a:
successione,
ut
apud nos,
sed
in identitate.
( Ibij., p.
242. ) Ceci est de la
plus grande
force.
(2)
Et se
<cMm~t<e
(M~f.
( Ibid. p. 242.)
(3)
Rc
compositione
cMm~!t6!<antt<! <B<here< maculosa et
interpolata. (Ibid. )
On
pourrait cependant
tre
plus
sale.
ET SYSTME DU MONDE.
t~
un
corps
solide ni mme
aqueux,
mais une.
vritable
flamme
quoique
lente et
nerve
c'est--dire
qu'elle
est le
premier
rudiment et:
le dernier sdiment de la
flamme
cleste
(1).
La
flamme,
parvenue
la hauteur de Mer-
cure,
ne
s'y
trouve
pas
encore
trop
son
aise
puisqu'elle n'y possde
encore
que
la force
ncessaire
pour
se former en
petite jp~aHe~
ayant plutt
fa/r <fMM
feu follet que
d'un astre
de
quelque
considration
(2).
Arrive dans la
rgion
de
Vnus,
la flamme
prend courage;
elle
y
a
plus
de
force,
plus
de
clart,
et
dj
elle forme une boule
pas-
sable. Cet astre
cependant
n'est encore
qu'MM,
(1)
Eenta e<
enervis; primum
tcilicet fudtmett<t<m et sedi-
mentMm ultimum
/!amm<B
c<B<M<t<.
( Ibid. p.
244. ) C'est-
-dire
que
la lune est la flamme
prise
dans le lieu o elle
cesse d'tre <erre<re et o elle commence devenir
cleste
ce
qui
est clair. Souvent on ne
comprend pas
bien Bacon au
premier coup d'it
mais
lorsqu'on y
est
parvenu enfin on
est bien
rcompens
(2)
Parvum <att<unMnodo
planelam. tanquam ignem /a-
luum <<t6orat)fem.
cott/ico'e polis
sit.
(lbid.)- ~~e
in
t'~tone
~t-cKrn admodum
/e!c!<ef
eollocala est.
(Ibid.)
COSMOGONIE iSo
vritable
laquais
du
soleil,
qui
~'e~&/e de s'e-
loigner
de son Ma~re
(1).
Mais c'est dans le soleil
que
le feu est v-
ritablement chez lui. L il tient le milieu en-
tre toutes les flammes des
plantes
il est
mme
plus
vif et
plus
tincelant
que
celui des
toiles
fixes
raison de son extrme densit
et de la
plus grande antipristase
(2).
Mars se
trouve bien encore en
quelque
d-
pendance
du
soleil,
et sa
rougeur
annonce
toujours
le
voisinage
du
grand
astre
cepen-
dant cette
plante
est
dj mancipe
de ma-
nire
qu'elle
ne
fait pas
difficult
de
~o~Mer
du soleil d'un diamtre entier du ciel
(3).
(t)
FamM~tur
soli,
et a& eo
longis
recedere exhorrel.
( Ibid., p. 342. ) Pourquoi
ne
pas
en convenir? il serait dif-
ficile
d'expliquer
d'une manire
plus
claire et
plus philoso-
phique
la mdiocre
iongation
de Vnus.
(2) Propter majorem antiperislasim
et intensissimam unio-
nem.
(Ibid. ) Car,
autour du
soleil,
il
y
a encore un
peu
de
froid,
ce
qui
contrarie la chaleur et
l'irrite;
les toiles
fixes,
au
contraire,
tant
plus hautes,
le froid
ne
peut
les attein-
dre,
de manire
qu'il n'y
a
plus d'an <tpM't':(<tM.
Ceci saute
aux
yeux
(3)
Flamma in
regione
J tfarHt.
jam <Ut~t<n'<
e<
~(e
ET !YeTNB
DtJ MOKDE. t''( i
Dans
J upiter
la flamme est blanche et tran-
quille,
non
pas
tant
par
sa
propre
nature
que
parce qu'elle
n'est
pas
contrarie
par
les na-
tures contraires
(1).
Mais dans Saturne la nature
flamboyante
recommence
languir
et s'monsser un
peu,
tant
parce qu'elle
se trouve
trop loigne
des
secours du soleil
que parce ~M'eMe
est ct~or&e~
par le
ciel toil
(2).
perinlegrum
fHdi'ametfum se <o!c
disjungi patt'a<uf.
(ibid.,p.243.)
On serait curieux
peut-tre
de savoir
quelle
ide tait dans.
l'esprit
de
cet extravagant, lorsqu'il
disait
que
Mars consent
s'loigner
du soleil d'un diaMetre enlier DU CtEL? Pour
moi, je
crois
qu'il
n'en avait
aucune
pas plus que
le
perro-
quet qui
nous dit son BONJ OUR.
(1)
Non lam ea;
K<t<t<fdpropf!~ (ut
stella T'eneris,
quippe
ardentior)
~edM naturd
ctrcMm/MM
mins tyftia<< e<exas-
pcraM.
(tbid.)C'est--dire que
la nature
froide
ne touchant
point,
ou touchant moins la nature chaude de
J upiter,
celle-
ci n'est
pas
courrouce, ou,
si l'on
veut,
pique
d'honneur
par
l'antiprislase.
Bacon
ajoute
ici
que,
futuant !e~ dcouvertes
de
Galile,
c'est la hauteur de cette
plante que
le ciel
commence s'toiler
(incipit
<<e~Mcere.
quod reperit
Ga-
<t!<BM~
H
s'agit
ici des satellites de
J upiter, que
Bacon dans
son inconcevable
ignorance
prenait pour
des toiles. Voi)
ce
qu'il
savait des dcouvertes de son
sicle,
et voil com-
ment il les
comprenait.
(2) Ulpole
e< Mttt auxiliis
!o))~<~
remola el
cce<o
COSMOGONIE 152
Enfin la nature
flamboyante
et
sidrale,
pleinement
victorieuse de
rther,
nous donne
le ciel toil
(t).
L rtber et la flamme se
partagent l'espace,
comme la mer et
le conti-
nent se
partagent
la terre
(superbe
analogie !).
Au
reste,
la nature
thre,
quoique
admise
dans ces hauts
lieux,
s'y
trouve nanmoins
presque mtamorphose,
au
point qu'elle
ne
dispute plus
rien
la nature sidrale
dont
elle
n'est plus qu'une
trs-humble scruoM<e
(2).
Quant
aux
toiles,
c'est la fine fleur de la
flamme
(3)
II
y
en a de deux sortes car il
y
a un
premier rang
d'toiles,
qui
sont celles
que chaque
belle nuit nous
dcouvre;
mais il
en est d'autres
qu'on peut appeler
le menu
peu-
proximo
<<e!<ato in
proximo
exitausta.
(Ibid., p. 243.)
Ainsi Saturne,
mutil de
deux manires, est,
le bien
pren-
dre,
un
Origne accompli
de tout
point, pat'
deux raisons
d'abord, parce qu'il
est
trop
loin du
soleil, qui
ne
peut
le r-
chauffer,
et
trop prs
des
toiles, qui,
n'tant
que
du
feu,
s'emparent
de tout le sien
par
voie d'affinit.
(1) J E'<heM<BMa<Mr<Bt'tCtfM:,
c(t!t<mDAT
~eHa<MM.(tbid.)
(2)
SMefe<B t)a<ur<B
p)'oMt paient
et ~Mb<a)'Mten<.
(Ibid i
(3)
Flamma
pura
M!mB lenuitalis.
(Ibid., p. 139.)
ET SYSTME DU MONDE. 153
ple
ou les
proltaires
ce~~
(1), que
Galile
a
enregistrs
en assez bon
nombre,
et
qu'il
a
dcouverts non-seulement dans la
voie~acte,
mais encore dans les
!?!<e~a~~e5~a~e<es(2).
Les toiles ne sont donc
que
des flammes
d'une nature
diffrente et plus
rare
que l'ther.
Le
prjug
contraire
(hear!hear!)~M~
a
pris pour
des
corps
n'est
qu'un
rve de ces ~o?K-
mes
qui
tudient les
mathmatiques
au lieu d'-
tudier la
nature,
et qui, stupides
observateurs
des
mouvements,
ne
comprennent rien
auxsub-
s<e[Mees
(3).
Ce
qui
a
tromp les
astronomes sur
ce
point
c'est
qu'ils
n'ont
pas
observ
que
la
flamme est pyramidale
sur la terre
parce qu'elle
y
est
dplace,
au lieu
que
dans le ciel elle est
(1)
Et nova
jam
censasunt
ptebeculse
coelestis
capita
Ga-
M<BO.
(Ibid., p. 239. )
(2)
Nonsolmin t<Mrxrm<!
~uo
Gataxise nomine
tM~-
ttttur,
tx-r~metiaminter stationes
ipsas
et ordines
planeta-
rum.
(Ibid., p. 239.)
Ordo
p~tte<<trt<m,
ID
EST,
attttMdmet.
(Ibid. p. 241.) .)
(3)
Hoc uero evidentissim commentumest eorum
ouf
ma.
themata,
non
naturam, tractant, atOMe mo<t<mcorpO)'MM
tantm
STUPIDMtMetttM,
<u6<<dottarMnt omnino oblivis-
cuntur.
(Ibid. p.
250.)
COSMOGOKIS
i5t
roMc~e
parce qu'elle
est chez elle
(1).
C'est le
eoM<ra~'e de la
fume,
et la raison en est claire
c'c~Mef<Krre~o<
la
~(mee,
au lieu
qu'il
com-
pn~e flamme (2).
Aprs
avoir examin
avec cette tonnante
sagacit
la nature des
corps
clestes
Bacon
passe
l'examen de leurs
mouvements,
et son
gnie s'empare
d'abord d'une ide fondamen-
tale
qui
dtermine et se subordonne toutes les
autres c'est
que
le monde entier est
agit par
un mouvement
gnral
et
COSMIQUE.
Ce mou-
vement,
qui
commence au sommet du ciel et
se termine au
fond
des eaux
(3),
va
toujours
en
diminuant,
il ne
peut pas s'appeler
cleste
(ceci
est de la
plus
haute
importance);
car il
s'tend non-seulement du
fate -du
ciel
jusqu'
la
lune,
o se termine le ciel
par
en
bas
comme chacun
sait,
mais encore
depuis
la
(1)
ln c)o existit
ignis
ver locatus.
(Ibid.. p. 235.)
Flamma cfest~ ~'totter et
placid e.cp~t'cutMr tn~ttam
in
suo.
(lbid.), p.
236. )
(2) Quia aer fumum recipit, /!ammam
comprimit. (tbid.)
(3)
summo c<B!o ad fmot
aquas. (Ibid., p. 147.)
ETSYSTEME DCMONDE.
155
lune
jusqu'au
fond des
eaux,
espace
dit Ba-
con,
beaucoup ~oM~re~Me~reMKe~(l).
Ds
qu'on perd
de vue ce
grand principe,
il est
impossible
d'avoir des ides saines sur
l'astronomie,
et c'est
pour
l'avoir
nglig que
les
plus
savants astronomes ne nous ont d-
bit
que
des romans.
Quelques-uns
d'eux ont
imagin
sottement
que
les
plantes
dcrivaient
des courbes rentrantes dans le mme
plan (2)
ils ont en cela dsobi la
philosophie
et re-
-fus de suivre la
nature,
ce
qui
est aM-~eMOMa
de la c?'e~u~/e mme dit
utt~'cH're (3).
(i)
Tanta <'<e!t
pro/Mt)(ft<<M ~:tn<<t interjicitur
inter cc~MM
<i~a<Mm et
lunam,
quod spalium
mt<!<
majus
est
quam
tun~ ad lerram.
( Ibid. p. 147.)-J e
me fais un
plaisir
de
l'avouer;
Bacon
parle
ici comme un
oracle,
et
personne
n'o-
sera nier
qu'il y
a
plus
loin de la lune au
/at<e
du ciel
que
de nous la lune.
Aprs
cette dclaration
solennelle,
qu'on
ne vienne
point
m'accuser d'avoir des
prjugs
contre
le vicomte de
Saint-Alban,
et de ne
pas
savoir rendre
justice
un
grand~homme qui
a raison.
(2)
Circa
per/ec<os
circulos INEPTI.
( Ibid., p.
2~8.)
(3)
5u&<tH<a<M
caplanles
et
p/n(oopht(B
MMhtm
morigeri
naluram
sequi con<emp~erun<.
Verm t'~ud
sapienlium
ar-
!)!<nuM
imperiosuta
in naturam est
ipsd t)M~t<)Mp<t<;t<ate<<
ttedMtt<a<e de<crt0)'.
(Ibid.
p.
248. )
i56 COSMOGONIE
Quant
l'hypothse
de
Copernic, qui exige
une discussion
particulire,
elle n'a
pu appar-
tenir
qu'
un homme
capable
de tout
imaginer
dans la
nature,
pourvu que
ses calculs
y
trou-
vassent leur
compte (1);
il sduisit d'abord
parce qu'il
ne
rpugne point
aux
phnomnes,
et
parce qu'on
ne
peut
le rfuter
par
des
argu-
mentsastronomiques
il sert faire des
tables,
mais il ne tient
pas
devant les
principes
de la
philosophie
naturelle bien
poss (2).
Le
systme
de
Copernic
entrane
cinq
in-
convnients
qui
auraient d le faire
rejeter
(1) 0tB
ille
sumit, e/M tMttt
txW
qui ~Mtd~M
tt) tta<ura
fingere,
modo ca~t tette
Mdan<, tttAt<tp<e<. (Descr.
Globi
inte)!.0pp.t.ix,p.2t4.)
(2)
Sententia
Copernici
de rotalione <ert'<B
~~u<B
nunc
quo-
que
invaluit), quia p/t<enometm
non
repugnat
et.ab <M<fOt)o'-
micis
prt'nci'ptM
non
polest
revinci naturalis <<tmen
pM-
<OMp/)t<s
principiis,
rM<e
posilis, potest. ( DeDign.
et
Augm.
Scient. lib.1, cap.
iv.
Opp.
t.
vu, p. 207.)
Bacon se montre ici dans tout son
jour.
Le
systme
de Co-
pernic
explique
les
pAenomenM,-
il s'accorde
parfailement
avec les
calculs;
il ne
peut
tre
rful par
aucun
argument
astronomique,
et de toule
par<
on commence
l'adopler.
H
semble
que
c'en est
assez
pour
un
systme astronomique.
Mais
point
du
tout; Bacon,
avecses
principes,
se
moqae
du,'
bon sens et des
mathmatiques.
ET SYSTME DU MONDE.
157
universellement 1" II attribue trois mouve-
ments la
terre,
et c'est un
grand
embarras.
2 Il chasse le soleil du
rang
des
plantes,
avec
lesquelles cependant
il a tant de
qualits
communes. 3" II introduit
trop
de
repos
dans
l'univers,
et il l'attribue surtout aux
corps
les
plus
lumineux,
ce
qui
n'est
pas probable.
4
Il fait de la lune un satellite de la terre
(tandis qu'elle
n'est,
comme nous
l'avons vu,
qu'une
flamme,
ou un feu-follet
concentr ).
5
Enfin,
il
suppose que
les
plantes
accl-
rent leur course
mesure
qu'elles s'appro-
chent de la
~c~reM~moMe,
ce qui est
le com-
ble de l'absurdit
(1).
Plutt
que
d'accorder le mouvement la
terre et de
regarder
le soleil comme le centre
de notre
systme, j'aimerais
mieux,
dit
Bacon,
nier toute
espce
de
systme et
supposer
les
corps
clestes
jets
au hasard dans
l'espace,
(t)
La nature immobile c'est la terre.
Bscepto opinio in
illud absurdum
incidit,
ul
p<<Mtet<B~tt propinquiores
~Mtt<ait
<e!'rom
(quse
est sedes naturse
immobilis)
e& velocis moveri
p.~anfur. (Thema C(p,ti, Opp.
t.
ix p.
246 247.)
158 COSMOGONIE
comme l'ont
pens quelques philosophes
de
l'antiquit (1).
Si
Copernic
avait rnchi sur ces
grandes
analogies,
il n'aurait
pas
invent son
systme,
qui
n'est au fond
qu'un
vritable
libertinage
d'e~on< (2), qui
n'a
pas
le moindre fonde-
ment
raisonnable,
et
qui
nous est dmontr
faux
(3).
Mais
Copernic
tait un de ces hom-
mes
capables
d'imaginer
les
plus grandes
extravagances,
ds
qu'elles
s'accordaient avec
ses
calculs
car ceux
qui
inventent ces sortes
de
systmes
s'embarrassent fort
peu qu'ils
soient
vrais,
pourvu qu'ils
leur servent con-
struire des tables
(4).
(1) QuM~toetttftttOtM~ <en<e, magis consentaneumvidelur
t<(<o~o<t<r omnino
~)/!temae<<par~aK<tt!' globi,
McuttdMWt
eos
~uo~j'am nominavimus, ~Mam
ut co7istituatur tale
sys-
tema
cujus
sit centrum sol.
(Descr.
Gtobi
intell.
cap.
Y.
Opp.
t.
ix, p. 2t4 )
Ceci est une
rage
de
t'ignorance
eni-
Yre
par l'orgueil.
(2)
Salis licenter
excogitatum. (De
Fluxu et Re!
Mar.,
t. ix, p. 147.)
(3).MtM
h<t6en~rmttM(tMt)< quod
nobis cott
/a~M-
Itmum esse.
(De Augm.
Scient.
m, iv.Opp.
t.
vu, p.
180.)
(4) ~Ve~t<6
t!
gui
t<i(t
propotttHt
admodum
placet
hM
ET SYSTME DU
MONDE. 159
L'astronomie
que
nous a donne
Copernic
joue
l'intelligence
humaine le mme tour
que
Promthe
joua jadis
J upiter, lorsqu'il
lui
prsenta pour
victime,
au lieu d'un
buf,
la
peau
d'un buf habilemnt &oM~ree
(1)
de
paille,
d'osiers et de
feuillage.
L'astronomie
de mme nous
prsente
assez bien la
partie
extrieure du
grand objet qui l'occupe, je
veux dire le
nombre,
le
lieu,
les rvolutions
et les
temps priodiques
des
astres;
tout ce) a
n'est,
pour
m'exprimer
ainsi,
que
la
peau
f~M
ciel
(2).
Elle est belle sans doute et trs-ha-
bilement
prpare pour
le
systme;
mais les
em~'CK~M
manquent
c'est--dire les raisons
physiques, qui peuvent
seules tablir une
thorie en
supportant
les
hypothses.
Le gnie
en
peut imaginer plusieurs qui
toutes
cxpli-
~u<B
adducunt
prorsus
vera
M<e,
sedtangummodoad
compu-
tationes et tabulas
conficiendas commod supposita.
(Descr.
Globi intell.
cap.
v.
Opp. tom.
ix,
p.
29.)
Ailleurs il dit
Omnia hase ad labulas mandamus. U n'aimait ni les tables
ni les
calculs,
ni les
observations,
ni surtout lesenscommun.
(1)
&at'etM<ttam.
(2) Tanquam ptent
cc~pMfchraM, etc, (De Augm. Scient.
ni, iv,
p. 179.)
COSMOGONIE t60
quent
les
phnomnes (1). La
bonne astrono-
mie est celle
qui
nous
enseigne
la
substance,
le
?KOMuemeM/
et
l'influence
des
corps
clestes
selon leur vritable essence
(2).
Il faut
donc,
au lieu de s'amuser des cal-
culs
striles,
tudier les
mouvements cosmiques,
les
passions catholiques
et les dsirs de la ma-
cre
tant dans la terre
que
dans le ciel
(3)
alors on saura ce
qui
est et ce
qui peut
tre.
(1)
Cujus generis eomp!t<M< e/~ngt poMMMt ~M<Bph<BKom<-
nis TANTUM
satisfaciant.
(Ibid.
Opp.,
tom.
vu.)
On
peut
d'abord observer ici le- ridicule de ce tan~m~ comme si ce
n'tait
rien qu'une hypothse qui explique
les
phnomnes!
En second
lieu,
on
peut
le
dire,
car rien n'est
plus vrai,
c'est
('ignorance qui
affirme
que
les
diffrents systmes
ex-
p!t~ent e~a<cme)tt
les
phnomnes;
car il ne
s'agit pas
seu-
lement
d'expliquer,
mais
d'expliquer
comment on
explique.
Il
y
a
quelques
diffrences sans doute entre
Ptolme
qui
invente ses
dfrent pour expliquer
les stations et les rtro-
gradations
des
plantes,
et
Copernic, qui
vous fera
voir et,
pour
ainsi
dire
toucher le
phnomne
en faisant
galoper
deux cavaliers autour de deux
grands
cercles
concentriques
d'arbres ou de
pieux
suffisamment
espacs.
(2)
Sed
~M<B
substantiam e<mo<Mmet
influxum
~M<MMn
proutreMra <M!t<,
propoMat. (De Augm.
Scient.
Ibid., p.
179.)
(3)
M<ttert<B
passiones
calholicas. communes
passioneas
desideria ma<ert<B in
utroque g!o6o. ~Descr.
Globi inte)).
cap.
v.
Opp.,
tom.
ix, p. 209.) md
sit et
<jfMtd
esse
possit. (tbid.)
ET SYSTME
pu
MO~DE. 46t
Telle
est l'astronomie
de Bacon.
Quant
la
ntre,
il la trouve assez bien fonde
sur les
phnomnes,
mais
cependant trs-peu
so-
lide
(1)
et mme VILE
(2)
parce qu'elle
s'oc-
cupe
de
distances
de
lieux,
de
temps prio-
diques,
etc.,
et surtout
parce qu'elle
est toute
mathmatique
et
qu'elle
s'amuse faire
des
tables,
au lieu d'tudier les
substances,
les m-
/MC~CM
les mouvements
cosmiques
C<les
pas-
sions
catholiques.
Il ne faut
pas
croire,
au
reste,
que
Bacon
en blmant
les
systmes
d'autrui n'ait
pas
le
sien,
et nous allons voir
comme il
arrange
le
ciel.
Avant
tout,
il carte une erreur
principale
qui
se trouve sur son
chemin,
et
qui
avait,
t
ainsi
que
tant d'autres erreurs
clestes,
nnc
origine mathmatique.
Que
les
astres,
dit-il,
parcourent
des
orbfjs
(<)
Fondai est in
pha:MometH<
non <naM. Mft mttttm~
MMa.
(De
Augm.
Scient.
ni,
iv.
Opp.
tom.
vu, p.
179. )
E~ees<6!ett/bn<fM,
mais
peu
MHde/On ne saurait mieux
dire.
(2)~HUMtL!SM<.(tb:d.)
TOME I. H
COSMOGONtB
C2
circulaires,
et
que
la terre ne soit
qu'un point
insensible
par rapport
au
ciel,
ce sont l des
folies
astronomiques que
nous
relguerons
aux tables et aux
mathmatiques (1).
La vrit
est,
suivant
lui,
que
les
corps
c-
lestes
parcourent
des
spirales
d'un
tropique
l'autre. C'est la
plus grande
vis dont on ait con-
naissance dans le monde
(2).
Mais
pour
bien
comprendre
cette
thorie,
ilfaut
savoir (ceci
est
capital) que
ces
spirales
ne sont
qu'une
pure
dviation du mouvement circulaire
par-
fait,
que
les
plantes
hassent
plus
ou
moins,
mesure
qu'elles
sont
plus
ou moins
loignes
de
~~a~rc immobile
(3).
Ce
dgot
du cercle
(<)Et
ttMjyn!~M))fm tt!Mdte)'ra~!< fMpMtxeoeft
tKstar
puncli,
non instar
quanti,
ad calculos et tabulas re-
legabimus. (Thema
Cce!
Opp.
tom.
ix, p.
245.)
Ce ton de
mpris
est tout fait
amusant;
il n'en aurait
pas
un autre
s'il
disait, rcntOj/c
aux contes de
/'M~/1)
accuse les math-
matiquas
d'avoir souill
t'astronomie,
comme il accuse la to-
gique
d'avoir souill la
philosophie d'Aristote,
et la tholo-
gie
d'avoir MMt~c cette de Platon.
(Opp..tom. ix,
p.
2j0. }
(2) Affirmant spiras.
(3)
MotM
ctrcutarM
per/ect) p!aMe!<t
!Mn(
<mpa(!CM<M.
(Thema
Coeli
toc.
cit,, p. 247~ )
ET SYSTME DU MONDB.
163
diminuant donc chez elles
mesure
qu'elles
s'approchent
du
ciel
qui
est le
sjour
de la
perfection
et du cercle
(1),
il arrive
que
dans
les hautes
rglons
de
J upiter
et de Saturne
les
spirales
sont assez
serres,
mais
qu'
me-
sure
qu'elles
se
rapprochent
de la terre eues
&d!e!<
davantage, dgnrant
ainsi
graduel-
lement de cette fleur de vitesse et de cette
rondeur de mouvement
qui
ne sauraient
gure
avoir lieu
que
dans les combles du
ciel
(2).
Bacon ne se
trompe point comme
les
grands
hommes ceux-ci se
trompent, parce que
l'esprit
humain est born et ne
peut
tout
voir;
parce qu'ils
sont
distraits,
ou
prvenus,
ou
pas-
sionns
parce qu'ils
se trouvent conduits
par
les circonstances
parler
de choses
qu'ils
n'ont
pu approfondir; parce qu'ils
sont hommes
(1)
Pro< enim ~u6<<at)<t'<B
degencrant puritale
et
explica-
<<otM',
)(tt
degenerant
et molus.
(Ibid.)
Ainsi la
spirale
n'est
qu'une dveloppe
du
cercle,
mais d'un
genre
nouveau;
de
plus
le cercle est une
perfection,
et la
spirale
est un
vice;
et
plus
la
spirale s'!argit,et plus elle
est
impure. -Ce qui
est clair.
(2) A flore
illo c~octtatM et
perrect.ione
mo~ ctr<u<ar
(tbid:) Fasligia t.(Sup. p. 85. )
COSMO(iOX!B 164
enfin. Tout en
reconnaissant le tribut
qu'ils
ontt
pay
l'humanit
on sent
que
l'erreur leur
est
trangre
et
qu'elle
ne
peut
tre chez eux
que partielle
et accidentelle. Souvent mme
ils
ont l'art,
je
dis
mal,
~'(H~ n'est
pas
fait
pour
eux
ils n'en ont
pas
besoin,
ils ont le
bonheur de se faire admirer
jusque
dans celles
de leurs ides
qu'on
se croit
oblig
de
rejeter.
J 'avoue
que je
ne me
permettrais point
de
tourner en ridicule une
pense
de Descartes
ou de Malebranche. J 'ai lu d'un bout l'autre
le livre de Newton sur
l'Apocalypse
sans tre
tent de rire une seule fois. J e me suis
plu
au contraire dire
L'ouvrage
~es< ni tout ni
aussi mauvais
g~'o/
le croit co~~t~eMpe~t.
Beaucoup
en ont
pa~e
mais
peu
l'ont bien
connu. Tous ces
grands
hommes ont d'ailleurs
une
simplicit qui
intresse,
jamais
ils ne di-
sent Vous allez
~OM';
jamais
surtout ils n'em-
ploient
de
grands
mots
ils savent
enseigner
l'homme sans
l'insulter,
et le rendre savant
sans lui dire
qu'il
est
ignorant
il est donc
bien
juste qu'on
les
environne
de la bienveil-
lance
qu'ils
mritent.
Bacon,
qui
est leur
op-
pos
en
tout,
inspire
aussi un sentiment tout
oppos
son immense
Incapacit
contraste de
ET SYSTEMS DU MO~DE. K~
la manire'la
plus
choquante
avec
le
mpris
outrageant qu'il
montre et
qu'il
tale mme
pour
tout ce
qui
l'a
prcd.
On
pardonne
celui
qui
chasse l'erreur un
peu brusquement,
s'il sait au moins lui substituer la
vrit;
mais
si c'est
pour
enchrir
encore,
il devient rel-
lement
insupportable. Ponr~o,
demandait-.
on
depuis
des
sicles,
poM~Moz
~eaM Ho~e-
t-elle dans les
ht~/CUM?~MpOKpM aspirantes?
et
depuis
des sicles on
rpondait
C'est /Vto?'-
reur~MM~e. Galile mme ne sut
pas
d'abord
rpondre
autrement.
Voi)
Bacon
qui
arrive
et
qui
nous dit Vous
n'y
entendez
rien
comment ne
concevez-vous
pas que
ce
ph-
nomne n'est
quele
rsultat du mouvement
de suite ou
d'ecKctcAe,
en
vertu
duquel
les
corps qui
aiment se toucher refusent de
se
sparer;
l'cole
qui
Ke voit
gure que
les
effets
et M'e/!<eM~~!c~ aux vritables
causes,,
appelle
ce mouvement HORREUR DU
VIDE. Ttes
stupides
c'est l'AMOUR DU
PISTON
(1)..)
.
()tt~
<o<t(t
/a)tdo
Sibila
compescat
<t)
~ofxs ?)f;.r)t!
per ~!tcmcorpora
nott paft'ttn<r
seex
t<!(A
COSMOGONIE 160
C'est dans l'astronomie
surtout,
et dans
l'astronomie,
c'est surtout le
systme
de Co-
pernic
o Bacon s'est rendu le
plus
ridicule
sous ce
point
de vue. J e terminer ai ce
chapi-
tre
par
la citation de
quelques
textes
qui pas-
sent tout ce
qu'on peut imaginer.
A force de
suppositions extravagantes,
nous dit
Bacon,
les astronomes en sont ve-
nus enfin au mouvement diurne de la
terre,
~OM<l'absurdit nous est i~eMOM~ce
(1 ),
tan-
dis
qu' peine parmi
eux
quelqu'un
s'est
occup
des
origines physiques
et de l'essence
des
corpsclestes,
de la vitesse
ou de la len-
teur
respective
de leurs
mouvements,
de
marche
directe,
stationnaire ou
rtrograde
parle sut
dirimi coniactu allerius
corporis,
ut
~<B
mtt<t<o
Ke.Me<coK(actt<<jfat<de<ttt<ttem
motum
schola
(~M<B
sem-
per /if~
et denominat e<
definit
rea
po~ per effectus
et in-
commoda
~M&Mper
causas
interiores) vocal mo<Mnt Ne detur
vacuum.
( Nov.
Org.
lib.
n
no XLnu.
Opp.
tom.
vm,
p. 131. )
(l) Quod
nobisconstat
(alsissimum
MM.
(DeAugm.
Scient.
m.tv,
tom.
vu, p. 180.)
ET SYSTt~E DU MONDE. t6T
des
plantes
de
l'apoge
et du
prige,
de
l'obliquit
de
rclip tique,
etc.
(1).
J e ne
parle pas
de la
premire question que
j'ai souligne,
et
qu'il pouvait
fort bien en-
voyer
Blant;
mais
qui peut comprendre
qu'un
homme
qui
se donne hautement
pour
le
lgislateur
de la science se
plaigne,
au com-
mencement du xxu
sicle,
<yM'ape:?epon!!
~es<M~o!on!Mg:{e~M'MM
se soit
occupe
de ce
qui
les a tous
occups?
Mais
quoi
bon des
lumires
pour
un
aveugle?
Bacon
mprise
et
compte pour
rien tout ce
qu'il ignore
c'est---
dire tout ce
que
les hommes ont dcouvert
jusqu'
lui. Il semble mme
certain,
en exa-
minant attentivement le
texte,
qu'il regardait
les stations et les
rtrogradations
des
plante&
comme
relles,
et
qu'il
en demandait la cause
physique;
autrement
que signifierait la
cause
~/M/M<~t(e
dune
op~e~e~ce?
Il faudrait en de-
mander la cause
optique, que
tout colier
lui
aurait
explique.
(t)
At vix
quisquam
est
qui inquisivit
causas
physicat..
/m de substantid
ca~Mttum, etc. deque pro~r<to<tt6M<
t
<(a<!0t)t&te<
r<(ro~t'o<<<t<)OM)'6M<,
etc.
( tbid.)
COSMOGONIE 168
Tout ce
qui
est
clair,
tout ce
qui
existe,
tout ce
qui
est
utile,
est nul
pour
Bacon
sa
science tourne sur deux
ples
invariables,
FNM~e et
l'impossible.
Ici,
par exemple
il se
fche srieusement contre les astronomes. Ils
se
/<~MCM<,
dit-il
ils se
font
~Mer sur des ob-
servations et sur des t~eMo?M~C[~0!Mmathma-
tiques
tandis
qu'ils ngligent
de
rechercher,
par exemple, pourquoi
les
ples
du monde
sont
placs
dans telle
partie du
ciel
plutt que
dans une
autre,
pourquoi
le
ple
de r<?M~o
est dans
rOMrse,
aulieu d'tre dans
0?'zo~(l).
Et
que
seraient devenues les
sciences,
si l'on
avait suivi les
prceptes
de cet homme ? Tantt
il
s'attache,
comme
ici,
des
questions
ou
(l)
Mm de
polis fotatMMMm,
CMf
magis
in <!t
parte
B~
<t~tK(~Mem
in
alid?. Hujus, tn~Mam, ~enerM
(beau
genre,
en
vrit !)<K9MMt<to M'a:
<ett<<~
est,
sed in mathe-
maticis tantm observationibus et demonstrationibus in-
sudatur.(tMd.,
p. 180. )
Ailleurs
il
y
revient. Cur vertitur
co'!t<m circa
polos p<Mt(<M
)'ud:<c[
Ursas
(il
croyait,
comme on
voit,
deux ou trois
ples arctiques) priusquam juxta
Ono-
nem,
etc. Ce
qu'iLy
a de
plaisant, c'est qu'il
ne
regardait
point
comme possible
la solution de cette intressante
ques-
tion. At in
na<t<r~,
etc.
(Ibid.
p.
180.) Il
semble
regarder
toujoursces
deux
pd!e<
comme
deua:ptt'ot< (DI.
Lasalle.
Ibid,
tom.v!,p.n9);sansdoute.
ET SYSTME DO MOKD.
t69
folles ou
inutiles,
et tantt il veut nous con-
duire la vrit
par
la route du dlire. C'est
en
vain,
nous
dit-il,
M'OM
se
j~ct~era
d'o6~M!'
la ce~M~e SMr le vritable
systme
du
monde
tant
qu'on
ne sera
pas pa?~e?~M
connatre la
forme
dit M!OMueMe~<de ?'o~oM.
Belle manire sans doute d'avancer l'astro-
nomie Mais s'il ne veut
pas
nous dire son
secret tout
entier
qu'il
nous
indique
au moins
la
route,
et
qu'il
nous
apprenne
comment il
faut
envisager
ce mouvement
mystrieux,
dont la
connaissance
seule
peut
conduire
pno~
la solution dcisive d'un aussi
grand
problme.
Voici donc ce
que
le
rgnrateur
des sciences veut bien nous
apprendre
Le MMMueme~ de
ro~OM,
tel
qu'il
se <?'OMue
en
~eMere~
dans le ciel
(dans
le
ciel !)
M'a
point
de
<er?Me,
et semble n'avoir d'~M~e so~ce
que
l'apptit
~M
corps qui
se meut
Mm~Me/ne?t<
pour se
mouvoir
pour
se suivre et ~'ent~'ecMe!'
~M-meMe,
pour
exciter
so/ ~e~e?'ame?:<
et en
~MM'por~e.Kercce
de sa
propre opration (1).
tt)
Terminum non
leabel,
et videttii, manare ex
appctitu
(i)rermtttumMO)th<!6e<,e<0)<c<tf)' mottoreproprios pelai (o''po<'~MO<!moMtMtummoffou~tnoMat,
e<proprto~pe<a<
COSMOGONIE ETSYSTME DOMONBB. 170
On ne sait si cette
explication part
du ca-
binet d'un
philosophe
ou des trteaux de
poli-
chinelle
et telle est
cependant la
route exclu-
sive
que
nous
indique
Bacon,
si nous vou-
lons enfin dcider sans
appel
ce
grand procs
entre Ptolme et
Copernic.
0 dix-huitime sicle inconcevable sicle
qu'as-tu
donc cru?
qu'as-tu
aim
et
qu'as-tu
vnr ? Tout ce
qu'il
fallait
contredire,
hon-
nir ou dtester.
amplexus,
et naturam <Mam M~t'tet
edque
/fa<Mr,
etc.
( Thema
Cti.
Opp.
tom.
ix,
p.
245. )
Quant
au mouvement en
ligne droite,
c'est une
espce
de
Myagettr qui
a un 6u<et
qui
t'arrte
quand
il est ofrtt;
(Ibid.)
Quel extravagant!
tLUXBT
BEFLUL nt
CHAPITRE VI.
FLUX ET REFLUX.
Bacon
ayant
consacr toutes les forces de
son
esprit
l'explication
de ce
grand phno-
mne,
je prsenterai
une
analyse
exacte de sa
dissertation. On
y
verra la nullit et le ridi-
cule de cette mthode d'induction dont on
s'est
servi
pour
faire ce
philosophe
la re-
nomme la moins mrite
(t).
(t)
De Ftuu etReCuxu maris.
c=
Opp.
tom.
ix, p,
<40.
199.
FLUXETMFUJ X.
472
On demande donc
quelle
est la cause du
flux et du reflux?
Bacon,
pour justifier
sa
mthode,
commence
par
exclure les causes
imaginaires,
et son
premier
mot est remar-
quable.
CoMMte~co/S,
dit-il,
par
ca~Mre
lune
(1).
J e recommande ce dbut aux newto-
niens,
pour leur
faire
gotera
mthode exclu.
sive et r/~Mc~oM
lgitime.
Aprs
les exclusions
convenables,
il envient
la vraie
cause;
et, toutesvendanges faites
avec
~pep~~tOM
de
l'intelligence
il se dtermine
pour
le mouvement
diurne,
vu
que
ce mou-
vement n'est
pas
seulement
cleste,
mais cc~Ao-
(1) fta~ue,
rn~~d
htt~,
etc.
( Ibid. pag. 1,46. )
Ces mmes
philosophes pourront
observer
qu'en
raisonnant sur les co-
mtes.
Bacon dclare
rejeter l'opinion d'Aristote, qui regar-
dait
les comtes comme les satellites d'uu autre astre.
(Nov.
Org.
tib.
u, xxxv.
Opp.
tom.
Yin,
p.
44t. )
Il
oublie
au
reste,
de nous dire dans
quel
endroit de ses cenvres Aris-
tote a soutenu
que
ls comtes taient attaches un
astre
.4i'~attad<ti!<rt<M.
(tbid. ) Aristote,
au
contraire,
a trs-
mal
parl
sur les comtes. On
peut
consulter cet
gard
un
des meilleurs
juges
dans ces sortes de
matires,
B\ Fr.
Theod. Schuberts
Populare
ostronomte.
(Zweit.
Th. n[.
Abschn. V.
cap. 149, sqq. Saint-Ptersbourg,
1810.
in-8",
p.
245
s~q. )
F:.UXET HEFLUX.
~3
~Me (superbe!). Il reprend
d'nccette
grande
observation
qui
lui a servi renverser le
sys-
tme de
Copernic
avec tant de facilit et de
bonheur,
et il
rappelle que
le mouvement
diurne,
en sa
qualit
de
catholique,
commence
aux
toiles,
o il
jouit
d'une vitesse faire
tourner la
tte,
et diminue ensuite
graduelle-
ment dans les
plantes,
dans les comtes su-
prieures,
dans la
lune,
dans les comtes sub-
lunaires
(1),
et enfin dans
l'air,
c'est--dire
depuis
le sommet du ciel
jusqu'au
fond des
eaux
(2).
Nanmoins,
lorsque
ce mouvement
arrive la
terre,
il faut bien
qu'il s'teigne
en
grande partie,
puisque
notre
plante
est,
comme nous l'avons va
plus
haut,
le
sige
du
~os.
Or,
la terre
agit
ici de deux manires
d'abord
par
la comntM/~ca~oM~eM nature et de
sa
uer<M,
qui rcpn?MC
et calme en
pe~e
le MMM-
venient
circulaire,
ce
qui
se
conoit
mer-
(1)
Qn voit ici comment leciel tait
arrang
dans la tte
de Bacon. Les comles
suprieures, puis
la
lune, puis
les co-
mtessublunaires. t) en avait vusans doute
beaucoup
dece
dernier
genre.
(2)
A summo f<B!o ad t'ma~ terras.
( !bid. p. 147. )
ti avait
ludans les
psaumes
summoc<B<o
egressio <')'<.
FLUX BT REFLUX. 174
veille;
et ensuite
par
fz~MMMOM MM~eneMe
des
particules
de sa
substance,
a~t
moyen
des
vapeurs
et ~e.E/M/a~oMs
grossires (1).
Cette
sueur de la terre en se mlant au mouvement
cc~Ao~fMe
le rduit
peu prs
rien;
cepen-
dant il
vitencore,
quoique
faiblement,
et H1
pntre
la
grande
masse de fluide
ocanique,
qui
lui obit
jusqu'
un certain
point.
Les eaux
vont et viennent comme l'eau contenue dans
une cuvette
porte par
une femme de chambre
maladroite,
qui
ne saurait
pas
la tenir hori-
zontalement,
balancerait alternativement
en
sens contraire,
abandonnant tour tour l'un
des cts
pour
s'lever vers l'autre
(2).
Fond sur ces
raisons,
auxquelles
nul bon
esprit
ne saurait se
refuser,
Bacon est
persuad
que
les mares ne sont
qu'une
suite ncessaire
du
mouvement
diurne; et cette thorie, dit-il,
(1)
Terra
agit
non <o~m communicatione t)o<Mr<B et virtu-
<
<tB, gtB
mo<m ciretthrem
repnmt<
et
M~at,
Mdtttom
emissione materxt~
partteufarMnt <M6t<an<t'<B
~u<B
per fa~o-
emissione materiali
particularum
aubstantiat su
per vapo-
res et
haft<McraM(M.
(tbid. p. 148.)
(2)
.MoftM
9aKt
tttMx~ttr in
pelvi que
unum !<t<t<<dfM-
rit
quum
ad <<t(t
oppositum
~fo<o<<Mr.
(tbid. p. 142.)
FLUX ET REFLUX.
i~
s'est
empare
de toutes ses facults intellec.
tuelles au
point qu'elle y rgne
comme une
espce
d'oracle
(1).
Mais comme toutes les
grandes
vrits s'en
chanent mutuellement les unes aux
autres
et
que
le vritable cachet du
gnie
est l'art
de dcouvrir et de dmontrer cet admirable
enchanement,
Bacon se trouve conduit
par
l'examen du flux et du reflux au
plus
ton-
nant rsultat
qui
ait
jamais
illustr
l'esprit
humain. Il a dcouvert et dmontr
que
le
magntisme
et le flux ne sont
que
deux effets
immdiats de la mme cause
savoir,
du mou-
vement diurne
catholique.
On ne voit
pas
d'abord
l'analogie
de ces deux
phnomnes;
mais le
gnie
a su la rendre claire
pour
tous
les
esprits.
Le mouvement diurne tant
cosmique et ca-
tholique,
un mouvement de cette
importance
ne saurait s'arrter
brusquement
la
terre;
il
la
transperce
donc de
part
en
part;
de manire
(i) /<ag!<e
hoc nobis
penttm <ttM<<)'<,
ac
/ef~
inslar eraculi
M(.(Ibid.p.t47.) 2
FLUX h REFLUX.
i7R
qu'aprs
avoir
produit
dans la
grande
cuvette
ce balancement
qu'on appelle
flux et
reflux,
il
s'adresse encore la terre
solide,
et tche d'en
obtenir
quelque
chose. Mais il
y
a
beaucoup
d'embarras cause de la Mettre
fixe (~), qui
rsiste
l'impulsion cosmique
dans cette in-
certitude,
le
fixe, plutt que
de refuser tout
une action
catholique,
s'entend avec
elle;
et
ne
pouvant
tourner sur les
ples,
ce
qui
serait
une
exagration,
il se dtermine tourner ue~
les
ples,
ce
qui s'appelle
verticit,
de manire
que
la direction vers
~e~~, r~dts~
se
trouve tre
prcisment
la mme chose
que
la
rotation MM'les
ples,
in
/ZMM~s(~).
C.
Q.
F. D.
Telle est la vritable
explication
des
mares.
Si les hommes ont cru anciennement
que
~e
soleil et la lune c.xerceM<un
eM~Mre
(suivant
(i).!Vft<Mr(t/M;(t.(!bid.p.t52.)
(2) Postquam per
naturam cotMMfenfem
ligaturvirlus
vol-
Mttff:,
tamen manet
ettn(e)tdt<t<r;
et MUttur virtus illa et
<tppe(t<t<)'dM'~eKdtM,M<
directio
et verticitas ad polos
in
rigidis
sit eadem res cum t'o<t<MK<o<e
super polos
in fluidis.
(Ibid.p.153.)
FLUX ET BBFLUX. 177
l'expression vulgaire)
sur ces
grands
mouve-
ments,
c'est
que
ces sortes
d'imaginations
se
coulent aisment dans
l'esprit
humain,
qui
se
laisse mener
joct~
une certaine vnration
poMr
les
choses clestes
(1). Cependant
une seule ob-
servation dcisive aurait
pu dtromper
les
hommes de ces
fantastiques
influences. Il suf-
fisait d'observer
que
les mares sont les mmes
lorsque
la lune est
pleine,
et
lorsqu'elle
est
nouvelle.
0?',
quelle apparence,
dit fort bien
notre
grand philosophe, que,
la cause
ayant
chang, l'effet soit le
?M!Me
(2)?
Eneffet,
autant
vaudrait soutenir
que
l'aimant attire le fer de
nuit comme de
jour, quum
diversa
pc~a<M?'/
1
Bacon,
au
reste
n'ayant
aucun
principe
aucune ide
fixe,
et n'crivant
que pour
con-
tredire,
s'est trouve conduit soutenir
prci.
(<)Btt/M mod:c0~t<a<<OKM
facil
mentibushominum illa-
6t<ntrOBVENRATtONEMCOELEST!UM.
(Ibid. p.i45.
146.) Ceci est
exquis!
(2)
j!ftrt<m et
novum prorsus /t<eft< obsequiigenus
ut <M<tM
sub noviluniis e<
pleniluniis
eadem
patiantur, ~KMm
luna
patiatur contraria. (Ibid. p.
]46.)
TOME I. n2
FLUX ET REFLUX
H3
sment le
pour
et le contre sur cette mme
question.
On vient de voir ce
qu'il pense
ou ce
qu'il
dit
(ce
n'est
pas
du tout la mme
chose)
sur l'influence des
choses clestes;
mais
s'agit-il
ensuite
d'expliquer
la cause des
vents,
on
n'est
pas
mdiocrement
surpris
de l'entendre
poser
des
principes
diamtralement contraires.
Il serait bien
important,
dit-il,
d'observer ce
que peuvent
sur les vents les
phases
et les
mouvements de la
lune,
d'autant
qu'il
est
dj
DMONTR
<yM's
ont MMe action mr
les eaux
(1). Il
faudrait donc examiner
si,
dans
lesplnilunes
et les
nouiluizes,
lesvents
(1)
0Mttm
LIQUIDO
possint super aquas.
[Nt<<or.
Fent~-
fUttt.CoK/actentt'aad
ventos.
Opp.
tom.
vm, p. 302.)
Cette histoire des vents est intitule L'chelle de l'intelli-
gence,
ou le
fil
du
labyrinthe.
Sous le
rapport
seul du bon
got
ces titres
emphatiques
sont
insupportables
mais,
sous
un
rapport plus profond
? sont un
signe
infaillible de la
nu!)it.
Qu'on y
fasse attention les
ouvrages qui
ont tout
appris
aux hommes
portent
tous des titres modestes. Ce!ui
qui
nous a rvl la loi des astres est intitul De Slelld
Martis. Si Bacon avait crit un livre
semblable,
a ta vrit
prs,
il l'aurait intitul
Apocalypsis
astronomica,
in
qud
septem sigilla
re!era?t(!<)',
aditusque
ad ccium hc
M~u<
avius,
Dune
pervius c/ct<Mt'.
FLUX ET REFLUX.
179
ne sont
pas
un
peu plus
violents
que
dans
les
quadratures,
comme il arrive
<~M
mares. Il est b!en~vra!
que
certaines
gens
t<trouvent commode d'attribuer la lune
l'empire
sur les
eaux,
et de rserver au so-
- leil et aux astres
l'empire
sur les
airs;
mais
il n'en est
pas
moins certain
que
l'eau et
l'air sont des
corps
extrmement
homog-
ns,
et
que
la lune
est,
aprs
le
soleil
l'astre
qui
a le
plus
d'influence sur toutes
mouvement,
tel
que
celui du ressort dans
les
horloges,
celui de l'eau dans la nata-
tion,
etc.
(1).
Ainsi,
c'est en
vertu de
l'lasticit
que
l'eau
reprend
la
place
aban-
donne
par
le
nageur qui
s'avance Certaine-
ment
c'est une dcouverte.
Il serait
superflu
de
pousser
ces dtails
plus
loin
il suffit desavoir
que, d'aprs
l'inventaire
de tous les mouvements
distingus
et classs
par
notre
philosophe,
nous avons enfin un
mouvement
ro~/a~ou politique,
un mouvement
/M/K~Me,
un mouvement
d'antitypie,
de
lutte,
de
grande
et de
petite congrgation,
de
libert,
de
gain, d'Mt~e~ce,
de
fuite,
de
gnration
(t)BM;'t<~mot<t~tn)tMmer<Kn<
exempla,
oehttt.
a~M<B
tMttataxffo. !amt'tt<B in
horo!ogtM. (tMd. p. 18i)
MOUVEMENT. i8f
simple d'organisation
d'~MpreM/oM;
de ca~-
figuration,
de
passage
de rotation
spontane,
de
~ep~a'oM,
et
enfin
LE MOUVEMENT
DE~EPOS(~.
Ce n'est
pas sans
raison
qu'il
te~me
par
cetui-c!,
qui est
certainement le
plus
curieux et
pour lequel je
donnerais tous
les
autres
mme
l'antitypie
sa
parente.
J e renvoie l'examen des
opinions
de Bacon
sur l'essence et
l'origine
du mouvement l'en-
droit o
j'exposerai
la
mtaphysique
de cet
crivain,
et
je
ne
parlerai plus
dans ce
chapi-
tre
que
de ce
qui
concerne cet autre
grand
(1)
Sit motus decimus nonus
e,t postremus,
motus ille c<
ct'a; nomen mols
compe<t<,
et tamen est
p)an
motus
quem
motum
motum deeubits sive motum exhorrentiae motus
occareh'M<.
(Ibid. p. i8i-l97.)
Decubitus est un mot barbare
fabriqu par Bacon d'aprs
decubo,
qui
ne vaut
gure
mieux. 11doit tre
pris
ici
pour
sommeil.
Quoi qu'il en soit,
nous savons
que
cette force
quelconque
en vertu de
laquelle
une masse
quelconque
se
refuse avec horreur toute
espce.
de
mouvement,
est un
vritable mouvement.
Bacon ajoute pour taptus
grandeclart:
C'est en vertu de
ce mouvement
que la
terre demeure immo-
bile dans sa
masse,
tandis
que
ses extrmits se meuvent sur
son
milieu, non point
vers un centre
imaginaire,
max MM'
lement
pour
l'union!
( Ibid.
p.
197. )
MOUVEMENT.
t86
problme
de la co~~M/Hce~o~ du motive-
ment.
Bacon sur cette
question
clbre
dbute,
suivant sa coutume
invariable,
par
insulter le
genre
humain,
dont on ne
MM?'cK<, dit-il,
trop
admirer-la
stupide ngligence sur un point
de
cette
importance (1).
Il insulte ensuite Aristote
et toute son
cole,
qu'il
accuse
d'apprendre
parler
au lieu
d'apprendre
penser
( ceci
est
de
rgle). Aprs
ce modeste
prambule,
il
examine les deux
hypothses imagines pour
expliquer
la communication du mouvement.
D'abord celle de
l'impntrabilit
en
effet,
puisque
deux
corps
ne
peuvent
exister dans le
mme
lieu, il
faut
bien
que le plus
faible
cde
au plus fort.
Bacon ne nie
point qu'il n'y
ait
dans cette
explication
un commencement de
vrit; mais, dit-il,
voil
toujours
le caractre
de cette cole elle
dveloppe
assez bien le
commencement d'un
phnomne
mais elle
ne sait
pas
le suivre
jusqu'
la fin. Le
dplace-
(1)
Mt'ram et
supinam negligentiam
hominum.
(Cogit.
de
Nat. Rer.
vm.
Opp.
tom.
ix,
p. 134.)
MOUVEMENT. <87
ment du
corps frapp
se
trouve passablement
expliqu par l'impntrabilit;
mais il
s'agis-
sait, dit-il
d'expliquer pourquoi
le
corps
d-
plac
continue se
mouvoir
lorsqu'il
n'est
plus
press
par l'impossibilit
de vivre avec
un autre dans le mme lieu.
D'autres
philosophes
considrant la force
immense de
l'air,
capable
de renverser les
ar-
bres et mme les
tours,
pensent que
la conti-
nuation du mouvement vient de ce
que
le
corps
frapp poussant,
en cdant sa
place,
l'air
qui
est devant
lui
cet air se trouve forc de re-
fluer en arrire et de
pousser
son tour le
corps qui
l'a
pouss,
comme un vaisseau
en-
gouffr
est
pouss
vers le fond
par
l'eau
qu'il
dplace
et
qui
revient sur lui
(1).
Rendons
justice,
dit
Bacon,
aux
philoso-
phes qui
ont
imagin
cette
explication.
Ils se
montrent
clairvoyants,
et ils
poussent
la chose
(1) Tanquam
navis in
gurgite aquarum.
(Ibid.
p.
j34. )
Quelle trange analogie quelle ignorance profonde
dela
pesanteur
et des lois du mouvement Onlit
et l'on a
peina
t croire.
MOUVEMENT.
i88
bout
(1); cependant
ils se
trompent,
et
voici le vritable secret de la nature.
Il fautsavoir
que
les
corps
durs ne
peuvent
souffrir la
pression
ils sont faits
ainsi,
et ils
ont,
conformment leur
nature,
le senti-
ment le
plus exquis
de cette
violence
de ma-
nire
que, pour peu qu'ils
soient
presss pour
sortir de leur
place,
ils se mettent fuir de
toutes leurs forces
pour
se rtablir dans leur
premier
tat.
D'aprs
cette
thorie,
qui
ne saurait tre
conteste,
imaginons, par exemple,
une~
paume frappe par
un
coup
de
raquette
vive-
ment
choque
de ce
choc,
la
surface,
presse
par
les cordes de la
raquette., prend
la fuite
pour chapper
une
pression
absolument
in-
supportable pour
elle
mais en
fuyant
elle
presse
la
partie
qui
se trouve immdiatement
devant
elle
celle-ci en
prenant
la fuite son
(1)
Rem non
de~erttttt,
alque confemp/attOtem
ad ea;f<m
perdttct<M<. (Ibid. p. 135. )
Ds
que
Bacon"
penche
pour
une
explication
tenez
pour
sur
que
c'est la
plus
mauvaise.
MOUVEMENT.
189
tour en
presse
une
troisime
et ainsi de suite
jusqu'
la surface
oppose.
Toutes les
par-
ties se
fuyant
donc
successivement,
except
la
premire, qui
ne fuit
que
la
raquette,
la
paume
entire se meut en
ligne
droite;
6
voil ce
qui fait que
le mouvement se commu-
nique (1).
Au
reste, Bacon,
qui
n'est
point
envieux
des dcouvertes
d'autrui,
ne
prtend point
nier
que
l'air
qui pousse pay
derrire me-
sure et autant
qu'il
est
pouss par
devant,
n'entre
pour beaucoup
dans
l'effet
mais la
cause
qu'il
a dcouverte est le
point capital,
et le
genre AMMaM~'MsgM'a
lui ne s'en
tait pas
dout
(2).
Il
n'y
aurait rien au del de ce
ridicule,
si
Bacon
n'ajoutait pas
tout de suite
que
cette
explication
ne saurait tre
aperue que par
(1)
Ibid.
p.
135. Ailleurs il a dit Motus
qui ctt~
oto-
lenti nomine
appe!<a(m'Mthtt
aliud est
quant nixus par-
ttum
corporis
emissi ad M
expediendum
compressione.
( Parm. Theolog.
et
Democr.
philos. Opp.
tom.
ix, p.
355.)
(2) Qui
caput
rei est. t( adhuc laluit.
( Ibid. ~m,
in
fin.
p.
136.)
MOUVEMENT.
)80
cc
un
esprit
scrutateur,
et
gM'e//e peut
tre
cc
regarde
contre la source de toute la mcani-
que pratique
(1).
))
(l)~ecMra<ttMru<an<t.(tbd p. i35.) A lque
Atre.
explicatio
veluli
fons
quidam
prac<i'c<t
M<.
(Ibid., p.
130. )
BtSYCIM NATURELLE ET
PBYS!OCB
GNBALE. 191
CHAPITRE Vni.
HISTOIRE NATURELLE ET
PHYSIQOE
GENERALE.
Le
gnie
de
Bacon,
essentiellement et
per-
ptuellement
brouill avec la
vrit,
le
portait
sans cesse abuser des
principes gnraux
les
plus vulgaires,
de manire
que, simple-
ment inutiles chez les
autres,
ils
deviennent
nuisibles chez lui. Il recommande
par
exem-
ple l'exprience,
mais
pourquoi ? pour
arri-
ver aux
abstractions. L'histoire
naturelle,
dans
l'tat o
elle se trouvait de son
temps,
lui
paraissait
parfaitement
ridicule
(
puisqu'il
ne
l'avait
pas faite)
et nulle
pour
la vritable
phi-
HISTOIRE NATUBELLE
192
losophie
et l'avancement des
sciences,
parce
qu'elle
ne
s'occupait que
des individus.
En
effet, dit-il,
que m'importe
de connatre
un
iris,
une
tulipe,
une
coquille,
un
chien,
un
pervier,
etc.;
ce sont des
jeux
de la
nature,
qui
se divertit
(1).
II concevait
l'histoire naturelle d'une manire bien diff-
rente,
et voici son
plan.
H la divisait en
cinq
parties
1 Histoire de l'ther.
2 Histoire des mtores et de la
rgion
aer~Me
(2)
car
l'espace qui
s'tend
depuis
la
superficie
de la
terre jusqu'
la lune est la
rgion
des
mtores,
parmi lesquels
il faut
placer
les comtes de tout
genre.
3 Histoire de la terre et de la mer consi-
dres comme
parties
du mme
globe
(3).
(t)
Lusus et lascivia.
(Descript.
Glob. intell.
cap. m, Opp.
tom.
)x,
p. 205. )
~2)
Bacon n'abandonnera
jamais
la thorie
antique
des
rgions sublunaires,
et la division
philosophiquede l'espace
entier en ciel et en terre. Il est invariable sur ces
grandes
ides.
(3)
Ceci nous amens aux aventures dela
terre,
etil faut
convenir
que
sur ce
point
notre sicles'est
distingu.
ET
PHYSIQUE GNtRtUE.
t93
J usqu'ici
la division a
procd par rgions
mais les deux dernires sections se forment
par
masses,
qu'il appelle
dans son
nologisme
perptuel grands
et
petits collges.
Ces coll-
ges
sont dans l'univers ce
que
sont dans la
socit civile les tribus et les familles. Nous
aurons donc
4 Histoire des
grands collges
ou des l-
ments
et
par
lments il entend
ici,
non les
principes
des choses,
mais les
grandes
masses
de
substances
homognes.
5
Enfin,
Histoire des
petits
collges
ou des
espces.
Ici l'on ne s'amusera
point,
comme ce
petit
Pline et ses
successeurs,
faire l'histoire
des
individus;
mais nous aurons des vertus
cardinales ou
catholiques,
constituant les es-
pces,
c'est--dire l'histoire du
~eMM,du)'arc,
du
grave
du
lger
du
chaud
du
froid,
du
consistant,
du
fluide,
du
similaire,
du dissimi-
~a!re,
du
&pect~!<e,
de
l'organique,
etc.
(1); et,
(<)
Ft'rtutMm Mr~
t~arum, ~u<BtM
naturd ceM~rt
possint
<an~M<fM
cardinales et
catho)iea3, de~t, rari,
levis, gravis,
calidi,
/r~:dt,
coM<~t<
/!MMt, <))?tt~ar~,dM<'m)<art<,
TOME t. 13
HISTOIRE KATUBELL 1M
puisqu'on
est en
train,
on fera l'liistoire des
mouvements
qui
se lient ces
puissances,
c'est--dire l'histoire de
rc~~a~e
de
l'ct/
nit,
de la
coAe~oM,
de
l'expansion,
etc. On
voit
que
ces abstractions sont tout fait aris-
totliques,
suivant la mthode invariable de
Bacon de faire ce
qu'il
condamne et de con-
damner ce
qu'il
fait,
mais
toujours
sans s'en
douter;
et l'on voit de
plus
que
la tournure
fausse de ses
ides,
jointe
un
orgueil
sans
bornes,
le
portait
directement dtruire les
sciences en
dplaant
leurs limites.
Car,
par
exemple,
le rsultat invitable du
plan que je
viens de
dessiner serait,
si l'on avait la folie de
le
suivre,
d'anantir la
vritable histoire natu-
relle
pour
lui
substituer je
ne sais
quelle physi-
que gnrale digne
des .f~e et une ~Vt(~s.
Heureusement on ne trouvera
pas qu'un
seul homme
distingu
ait march sur ses
traces
mais il est bon de voir ce
qu'il
a tent
~pMt'/M-<t<t,or<jfa)tMt,
et similiu7n,
un cummo~ttu~ ad ilta
~tc)ent<6tf~,
tt
aK<tt</p!a!,
MMw, coilionis, ea;pattMOM<,
e<c.,
o!rtu<ttm et motMtMt historiam <MM traetabimus.
(
Deser.
Globi inteU.
cap.
tv.
Opp.
tom.
ix,
p. 207.)
ET
PHYSIQUE
Gtit~BALE. 195
lui-mme
par
sa
mthode,
et les rsultats aux-
quels
elle l'a conduit. J e commence
par
la
pesanteur, qui
est la
grande
et universelle
loi
du
monde physique,
m'tant
particulirement
t
amus
voir
de
quelle
manire Bacon envi-
sageait
ce
phnomne capital.
Ds
que
les
corps,
dit-il
parviennent
une
certaine
grandeur
et
qu'ils
se
placent
au
rang
des masses
majeures,
ils revtent les
qualits
cosmiques.
Ainsi l'Ocan a un flux et un
reflux,
tandis
que
les lacs et les
tangs
n'en ont
point.
Une
portion
dtache de la terre
tombe,
tandis
que
la terre elle-mme demeure EN L'AIR
(1).
Un homme du
peuple
aurait
pu
concevoir
peut-tre
l'une de ces deux
Ides mais,
pour
les runir dans sa
tte,
il faut tre au-dessous
de
rien,
il faut tre condamn l'erreur comme
un criminel est condamn au
supplice.
Bacon
met ici sur la mme
ligne
une
qualit
et l'ab-
sence d'une
qualit.
Les
masses majeures rev-
tent les
qualits cosmiques;
de l vient
que
(i)
Portio <etT<B
cadit universa PENDET. ( Descr.
Globi
intet).
cap.
vif.
Opp.
tom.
!, p: 235 ligne
20. )
HtSTO!B< NATUREU.B
<?
l'Ocan revt le
flux
et le
?'c/~M.c,qui
est
tranger
aux moindres masses de
l'lment aqueux
PA-
REILLEMENT
(1)
la terre se
dpouille
de la
pe-
santeur
qui a~o~'eM<
it toute
portion
d'elle-
mme. J e ne crois
pas qu'on
ait
jamais port
plus
loin
l'incapacit, l'inintelligence
et l'hor-
reur de la vrit. Mais
l'explication
n'est
pas
termine encore. La
~y~e, dit-il,
demeure
suspendue
comme les
nuages
et la
grle, par
l'air,
qui
est
cependant
M?!e MM~ere molle
(2).
O trouver un
assemblage
d'ides
plus
fausses,
plus grossires, plus
ridicules ? La terre ne
pse pas, puisque
chacune de ses
portions
pse (3).
Elle areufM l'absence d'une
qualit
universelle. Puis il nous la montre couche
sur l'air comme sur de
l'dredon,
sans
que
l'air,
qui
est une matire des
plus
molles,
en
(l)SIMHj!TER,etc.(Ibid.)
(2)
Terra
ipsa
in mcfft'o
aeris,
REI MOLLISSiM~E pen-
silis
Matt,
etc.
(Ibid.
p. 234.)
(3)
Voilencore un deces mots
qu'it emptoie
sans savoir
ce
qu'it
dit.
Que signiCe poWtOH?
Le
tiers,
par exemple,
ou
le
quart de
la terre tomberait-il sur les toiles? il a oubli
de nous le
dire;
mais il
prsente
ce
problme
la
sagacit
humaine.
BT PHYSIQUE
GXBALE.
tM;
soit
cependant
cras,
ce
qui
est merveilleux.-
Cherchant ensuite une
comparaison,
il
trouva
celle de la
grle.
Ainsi la
grle
forme
demeure,
suivant
lui,
suspendue
dans
l'air,
comme la
~Te,
pour
tomber ensuite loisir
par
o
l'on voit
que
les ides les
plus vulgaires
de
l'hydrostatique
et de la
pesanteur spcifique.
des
corps
lui taient
parfaitement trangres.
Quant
la tendance d'un
corps
vers un
centre,
c'est
encore,
suivant lui un reue
wo~
<AeM!a~t<e
(1).
Le
lieu, dit-il,
n'a point de
force..
J amais le
corps
ne se meut
qu'en
vertu de la
tendance
qu'il
a de se
joindre
un
autre
pour
crer une
forme,
mais
jamais pour
se
placer ici
ou
l (2).
Ainsi,
ajoute-t-il,
les
phy~
(<)P/ta!t<<!'aM
!<<!? ma~emo<<MM.
( Ilistor. gravhet
levis,
tom.
ix, p. 63.)
Bacon en veut extrmement cette
maudite science des
mathmatiques, qui
n'entend
presque
rien aux
passions ca<ho~MM.
En cent endroits de ses. OEu-
vres,
il revient la
charge pour
nous tenir en
garde
contre
cette rveuse et contre les causes finales ce sont ses deux
ennemies. H ne
peut
souffrir ni l'ordre ni le nombre.
(2)
Observez eethomme
qui
nie la tendance
vers
cela,
tout
en admettant la tendance
pour
cela. Il est
tout la fois
bie~
crdule et bien incrdule.
H]STO!ttE NATMELLB <98
siciens
p~a/sccM~e~
lorsqu'ils
nous disent
que,
si la terre tait troue de
part
en
part,
les
corps graves
s'arrteraient au centre
(1).
Il
partait,
comme on
voit
de l'axiome
gros-
sier,
que
la matire seule
peut agir
sur la ?t:o~
tire;
erreur
distingue
de toutes les autres
(l) Hippocrate
disait avec
beaucoup
de
justesse
et d't-
gance
Toutes les
parties
de la terre tombent sur le
centre.
comme la
pluie
sur sa
surface (undique
in M cadit ~)cu< in
eam imber.
(Apud
J ust.
Lips. Phys.
stoie.
1,26.)
Tout
corps
tombant
perpendiculairement
sur la surface d'une
sphre
se
dirige
ncessairement vers le
centre,
et n'est arrt
que
par
l'obstacle. Otez
l'obstacle,
il
y parviendra;
et,
la mme
exprience
se
rptant
sur tous les
points
de la
circonfrence,
il est dmontr
que
le dsir de tous les
graves
les
porte
vers
le centre.
Pourquoi
donc ne
s'y
arrteraient-its
pas,
dans
l'hypothse
de la terre
perce
jour,
et
quelle
force les en
carterait?
En
prtant
la terre une force attractionnaire
ou
magntique (ou
comme on voudra
l'appeler) consquence
incontestable du fait incontestable de la chute
perpendicu-
laire des
graves,
le
corps plac
au centre se trouvant
gale-
ment attir dans tous les
sens, t'quiiibre
mutuel de toutes
ces attractions doit le retenir immobile dans le centre. Il
M'y
a donc
pas
d'ide
plus simple, plus naturelle,
il n'en est
pas
que
le bon sens
accepte plus
volontiers
que
celle
que j'exposo
ici.
Pourquoi
donc Bacon
l'envisageait-il
comme une absur-
dit ? J e viens de le dire.
Quant
au thorme
newtonien, qui permet
de considrer
toute l'attraction active d'une
sphre
comme runie dans le
centre,
rien n'tait
plus tranger
Bacon.
ET
PHYSIQUE
GNRALE. :<9!)
par
un caractre
unique puisque
les
organes
de la
parole
rfutent cette erreur en
s'agitant
pour
l'affirmer. Mais ce
qu'il y
a d'extrme-
ment bizarre dans
Bacon,
c'est l'habitude de
se contredire lui-mme
perptuellement
sans.
s'en
apercevoir.
Dans tout ce
qu'il
a si mal-
heureusement crit sur la
physique,
il n'est
question que
des M~MS de la matire,
App,
tit, (~eM~, tendance aversion,
antitypie,
at-
<rac~oM
(1), rep!t~MM,
etc.,
sont des mots
qui
reviennent
chaque page,
comme si
parmi
tous ces mots il
y
en avait un
plus Intelligi-
ble
que
les autres.
Les
philosophes
de nos
jours
se sont rendus
ridicules d'une autre
manire,
en voulant tre
tout la fois attractionnaires et
mcanistes.
Pour se tirer de cette contradiction
palpable,
ils ont Invent
je
ne sais
quel
fluide
imaginaire
( vritable
idole de
c6we?'M6) qu'ils
ont
charg
d'tre la cause
physique
de la
gravitation
et
comme une absurdit ne
peut
tre
explique
et soutenue
que
par
une
autre,
quelques-uns
(<)Altractionis, abactionis,
etc.
(Descr.
G)obi
intell.
cap.
v.0pp.tom.tx,p.209.)
H!STO!BE NATURELLE 200
d'eux ont
imagin
de
placer
ce fluide Ao~
monde,
ce
qui
a
l'avantage
de
poser
les bornes
du dlire. Ils seront
imperturbablement
fous,
s'ils le
jugent
propos;
mais,
au
moins,
on
peut
les dfier de l'tre
davantage.
Quant
aux
principes
des.
choses
la
philo-
sophie corpusculaire
avait enchant Bacon
au
point que
les recherches sur la nature des
atomes lui
paraissaient,
suivant la dclara-
tion
expresse qu'il
nous en a
faite,
le
plus
grand
de tous les
problmes.
Cette
rec/tercAe,
dit-il,
est la
rgle suprme
de tout acte et de
'toute
puissance,
la t)en<aMe wo~erc~ce de
l'esprance
et de fMure
(1).
Il
n'y
a suivant lui
que
deux
questions
sur ce
point
1 Les atomes sont-ils
homognes ?
2
Tout
peut-il
se faire de tout? Bacon se
trompe gravement
dans cette
exposition;
car
on
peut
faire deux
questions
sur les
atomes
(i)
De Sect.
Corp.'Opp.
tom.
ix, p.
123. Ibid.)
~c~b
et
po(ett<t'<Bsuprema regula,
et
~pet
et
operum
vera modera-
trix. Ces
expressions pourront paratre
tout
simplement
ri-
dicuies au
premier aperu,
mais celui
qui
entend
parfaite-
ment
Bacon en
juge
autrement.
ET
PHYSIQUE
C~EALE. 201
aprs
la
premire
1 Tout
peut-il
se faire de
tout en
supposant l'homognit ? 2
Tout
peut-
il se faire de tout en admettant la
disparit
(1 )?
Quoi
qu'il
en
soit,
Bacon se dcide
pour
l'ho-
mognit,
et il croit
que
<oM~eM<t!eue?M?'
tout,
non
pas
la vrit
brusquement,
mais
par
les nuances
requises (2).
La
premire
des
questions qu'il
a
poses
est
purement
spcula-
tive
mais la
seconde, dit-il
est active
(3),
et ce mot est
remarquable.
Dmocrite,
comme
on
peut
aisment
l'imaginer,
tait son hros.
Cependant,
quoiqu'il le
nomme
philosophe p-
~e<re[M<,
excellent anatomiste de la nature
(4),
(t)
Il
y
a bien un e autre
petite
question
prtiminaire
dont
Bacon et d'autres ne se doutent
gure
c'est de savoir s'il
y
a des atomes.
(2)
Per debitos circuitus et mulaliones medias.
(Cogit.
de
Nat. Rer.
Cog. <,
de Sect.
Corp. Opp.
tom.
'x,
p.
~23. )
(3)
Activa autem
yMMtt'o
~M
huic
~pect<!attf<B respoudel,
<<c.(Ibid.)
(4)
Zn
corporum
prtnctpt'M investigandis
ae<M< acwtM-
~tmt<! Mr<
magnus philosophus,
et ai
~)<t'<
a~'M<ex Gr<B
Cttcer~p~tcM~;
eximius na<r<e sector.
(Opp.
tom. YtU,
370
;tx,
123, 217.)
HISTOIRE
NATURELLE,
ETC.
202
il le blme ici de n'tre
pas
all assez
loin.
L'pithte d'~omK<
tombe mme de sa
plume,
lorsqu'il reproche
Dmocrite de n'avoir
pas
su examiner le
mouvement dans ses
prin-
cipes (1 ).
J e
reviendrai
plus
tard sur ce
sujet;
dans ce moment
je
me borne certifier
que,
suivant ma
persuasion
la
plus
intime Bacon,
dans tout ce
qu'il
dit sur les
principes
des
choses,
a
menti,
d'abord lui-mme et en-
suite au monde. J e le
juge
cet
gard comme
ses
collgues, n'ayant jamais pu
croire ni
mme
souponner que, parmi
tous ces
philo-
sophes
mcanistes,
il
y
ait
jamais
en un seul
honnte homme
qui
nous ait
parl
de bonne
foi,
d'aprs
sa conviction et sa conscience. Si
j'ai
tort,
c'est envers tous.
(~)
7n motuum
principiis
examinandis sibi
impar
et
impe-
ritus
deprehendilur quod
eliam vitium
omt)tMmpM<Mopho-
rt<tm/'t'<.(Ibid.)"
Bacon est extrmement
prudent
sur ces sortes de
sujets,
et ne
peut tre expliqu que par )ui-meme mais,
en runis-
sant une foule de
traits, on ne
peut
douter
que
toutes ses
ides ne tendissent
prsenter
le mouvement comme essen-
tiel la matire.
OPTIQUE.PROGRESSION
DE LA H'UtEE. 203
CHAPITRE
IX.
OPTIQUE.
ProgreMton
de ta t~mnttre.
Bacon tait
tranger
toutes les sciences
naturelles;
mais
je
ne crois
pas qu'il
ait rien
ignor
aussi
profondment que l'optique.
Pour
tablir l'vidence
qu'il
ne se formait aucune
ide de
la vision,
un seul texte me suffira c'est
l'endroit o Bacon
parle
des mouvements oit
des vertus dont l'essence
est dagir plus /<M~ctMM~
une moindre
distance
il
nous les montre
OPTIQUE. 204
dans la
balistique
et dans
l'optique.
Il observe
qu'un
boulet de canon a moins de
force,
au
sortir
de
l'embouchure,
qu'il
n'en aura une
certaine
distance et,
par
une de ces analo-
gies qui n'appartiennent
qu'
lui,
il
appuie
de cet
exemple
celui de
l'il,
qui
ne voit
pas
distinctement les
objets placs trop prs
de
lui; mais,
au lieu de s'en tenir
cette com-
paraison
toute
simple,
il affecte le
langage
scientifique,
et voici
comment il
s'exprime
Il est Ao~s de doute
que
les
objets
c~'MKecer-
Mme
o~MM~eMr
ne sont vus directement
que
dans
la
pointe
du cne
par la convergence
des
!YM/o?M'
une ce~fM~e
distance
(1).
n est
impossible
de donner ces mots un
sens raisonnable,
c'est--dire un
sens
qui
s'ac'
(!) Manifestum
est
tn(tjor<K'orp<M-<t
nott bene aut d~<i'KC<e
cerni nisi in
cuspide
coni,
coeMnt'ttt!
fa(!tMo6)ec<ta<!Mon-
nMHom distantiam.
(Nov. Org.
lib.
n, XLY. Opp.
tom.
vni, p.
173.)
Cela
s'appelle exprimer
faussement un
pense
fausse;
car,
pour
dire ce
qu'il
voulait
dire,
il et fallu dire
<~
'tOttn<M <<M<att(t<<,
PROGRESSION DE LA HJ MtM.
205
corde avec la
thorie;
mais il est
trs possi-
ble de savoir ce
que
l'auteur a voulu dire.
Des lectures
superficielles
ou mme la sim-
ple
conversation
portant
l'oreille de Bacon
quelques-uns
de
ces
mots techniques qui ap-
partiennent
chaque
science,
et
qui
se r-
ptent
assez souvent
lorsqu'ils
se rattachent
aux
principes,
Bacon les recevait dans sa m-
moire
bientt son
imagination
active et con.
Hante leur donnait
un sens,
et son
orgueil
ne lui
permettait pas
seulement de douter
qu'il
ft dans
l'erreur;
de manire
que,
lors-
que
l'occasion s'en
prsentait,
il ne
manquait
pas
d'employer
le
mot dans le sens
qu'il
s'tait
fait
lui-mme,
comme cet enfant
qui
de-
mandait
si une SOUPAPE M'e~
pas
un arcAe-
t)e<~te?
Suivant la
thorie,
tout
point
lumineux en-
gendre
deux cnes
opposs parleur
base com-
mune,
qui
est le
plan
du
crystallin.
L'un de
ces
cnes, plus
ou moins mais
presque toujours
excessivement
aigu,
s'tend de la base au
point
lumineux;
l'autre doit
appuyer prcis-
ment sa
pointe
sur la rtine
pour que
la vue
soit distincte.
Quoiqu'il y
ait autant de ces
cnes
que
de
points
clairs
dans
l'objet,
cc-
OPTIQUE. .836
pendant
les
figures
n'en
reprsentent que
trois
savoir,
les deux extrmes et celui du
milieu,
qui
est
toujours
recommand l'atten-
tion des
commenants,
parce qu'il
ne souffre
aucune rfraction dans l'intrieur de l'il.
Bacon entendait donc
parler
de cne lumi-
neux,
et il avait retenu ce
mot,
mais sans le
comprendre.
D'un autre
ct,
il
entendait
parler
de cne
lumineux
propos
de miroirs
ardents,
tant
dioptriques que catoptriques,
et dans ce cas
l'expression
avait un sens assez diSrent.
Enfin il
voyait,
dans toutes les
figures qui
accompagnent
les livres
d'optique,
ces deux
lignes qui
forment
ce qu'on appelle l'angle
vi-
suel,
et
qui
viennent se runir l'il
repr-
sent dans ces mmes
figures.
Bacon confondait toutes ces ides dans sa
tte,
et il entendait
par
cne lumineux un fais-
ceau de
rayons partant
de tous les
points
de
l'objet
et venant se runir l'ouverture de la
pupille.
L s'arrtait sa
science,
et il ne se m-
lait
plus de
ce
qui
se
passait
dans FIntrIeur.
La vision distincte
rsultait,
suivant
lui
des
justes
proportions
de ce cne. Voil
pourquoi
PnGHESS)0?< DELLUM!EM. :<n
il dit
que l'objet
ne
peut tre
vu distincte-
ment
~M'a pointe
du cne
form ~ccr
la co?!-
ue~e~ce~ f(n/o)M
M~e certaine distance
(1),
parce que,
si
l'objet
tait moins
loign,
le cne
et t
trop
obtus
et la vision confuse.
Telle est
l'explication
exacte du texte d
Bacon.
Trs-peu
de
gens comprennent
ce
phi-
losophe, parce que, d'aprs
un
prjug
enra-
cin,
on s'obstine lui
supposer
des connais-
sances
qu'il
n'avait
pas
ds
qu'on
l'a bien
compris,
on volt
qu'il
ne savait rien. Mais ce
n'est
pas
assez il est
encore essentiel de re-
marquer que
Bacon ne se
trompe point
comme
les autres
hommes
chez lui l'erreur n'est
ja-
mais ni
faiblesse,
ni
malheur,
ni
hasard
elle
est
systmatique
et
naturelle,
organis
in
SMccMme<
sanguinem.
Il n'en a
pas
une
qui
n'ait sa racine dans un
principe
faux,
antrieu-
rement
fix, et,
pour
ainsi
dire,
inn dans son
(<)
11aurait d dire. des
rayons
arrivant d'une certaine
distance
mais il
y
avait dans ses ides un
vague
et une con-
fusion
qui
devaient ncessairement se retrouver dans
se&
expressions.
OPTIQUE
~208
esprit.
Comment
s'tonner,
par exemple
qu'un
homme. draisonne sur la lumire
quand
on l'entend
soutenir,
dans un
ouvrage
ddi
l'avancement des
sciences,
un
systme
tel
que
celui-ci ?
On
est frapp
d'tonnement
en voyant que
les
hommes,
quoiqu'ils
se soient extrme-
ment
occups
de la
perspective
(1),
n'aient
cependant
point
donn l'attention ncessaire
la forme
de
la lumire.lls n'ont rien fait
qui
vaille(2)
dans ce
genre, parce qu'ils
se sont
beaucoup occups
des
radiations, mais
point
du tout des
origines
de la lumire. Cette faute
et
beaucoup
d'autres viennent
de ce
qu'on
a
plac
la
perspective (l'optique)
parmi
les
t< sciences
mathmatiques,
et
qu'on
est sorti
trop tt del physique.La superstition
mme
s'en est
mle,
et l'on s'est mis
regarder
la
lumire comme une
espce
de
proportion-
corps
lumineux ont de commun. En
effet,
quelle
norme diffrence
(
si nous les com-
ft
parons par
la
dignit)
entre le soleil et un
morceau de bois
pourri (2)
et
cependant
l'un et l'autre sont lumineux.
(!)
Bacon,
qui
tait dans ce
genre
omnia <<a
<tm~M,
tremble
toujours qu'on
ne lui te sa chre matire. Hors
d'elle,
telle
qu'il la concevait,
il ne concevait rien. M. Schub-
bert,
astronome de l'Acadmie des Sciences de Saint-Pters-
bourg,
dont l'excellent
esprit
et )es vastes connaissances ont
pu
faire d'un
simple
almanach un livre de
bibliothque
au-
rait srement fort
dplu
Bacons'il avait dit du
temps
de ce
dernier
Qu'est-ce
donc
que
cette
mystrieuse
~M6<<attM ?
Est-elle
esprit, matire, ou
ni l'un ni
t'aM<re?(Ueberdas
Licht. Lichtstoff.
J 8,
p.
182.)
Newton avait
dj
dit:
savoir si la lumire est matrielle ou
non
c'est une
ques-
<M)t&
laquelle je ne prtends
du tout
point
<OMcAer. -Nihil
omnino
dxpM<o. (PhH.Nat.princ. Prop.
96, sco).)
Sur
quoi
on nous dit dans
l'Encyclopdie ( art. tMmt~-e)
CM
paroles
ne semblent-elles
pas marquer
un doute si la lumire
est un
corp~?
~aM sielle n'en est
pas
un
qu'est-elle
donc?
Voi), certes,
une
puissante
difucuit!
(2) ~'<en)'m, ~uam
immensa est
corporis
dt~reMtta
(si
e~
dt~nt'<a<e coM!'derett(ur )
inter solem <'<
lignum pMtft'dtfm ?
7
(De
Augm.
Scient.
!v,nr.
Opp.t.YYi',p.24t.)
On doit
TOME t. J i
OPTIQUE.
:t0
Nouvelle
preuve
dmonstrative
que
non-
seulement Bacon n'a
pas
avanc la
science
mais
que,
si
malheureusement il tait
lu,
compris
et
suivi,
il l'aurait tue ou retarde
sans bornes.
Quelle
manie de vouloir
que
l'homme commence ses tudes
par
les causes
et les
essences avant d'examiner les
oprations
et les
effets,
qui
seuls ont t mis sa
porte
Il
me semble
qu'une
lunette
achromatique
est un instrument
comptent qu'on peut
fort
bien
accepter
des mains de l'art clair
par
la
science,
avant mme
qu'on
sache
quoi
s'en
tenir
sur la
forme
de lalumire. C'est d'ailleurs
un
trange sophisme que
celui
d'imaginer qu'il
y
ait
entre les deux sciences une subordination
telle
que
l'une ne
puisse
tre aborde avant
que
l'autre soit
parfaite. Supposons que
la
science
des formes,
au lieu d'tre une extrava-
gance,
soit en effet un
objet plausible
et utile
une
grande
attention ta
parenthse.
Bacon vent bien con-
venir
que la
lumire est
plus noble que le
bois
pourri,
mais
non
pas
moins mof~De! Nous verrons
que,
dans ce
genre,
aucune noblesse ne lui en
impose.
PROGRESSION DE LA LUMIRE. 2H
des efforts de
l'intelligence
humaine eh bien
que
tous les
philosophes /bn)Mt~M
s'avan-
cent et fassent leurs
preuves
dans cette noble
carrire. Rien
n'empche,
en attendant
que
d'humbles
gnies,
tels
que Ga~ee, DMCc~M,
Newton,
G'~on/,
ZMe~,
jK?e~e~~erM,
etc.,
s'amusent
faonner
des miroirs et
des len-
tilles,
qu'ils
raisonnent
mathmatiquement
sur les
foyers,
sur la
puissance
des
milieux t
sur les lois de la rfraction et
delarnexion,
et
qu'ils
en viennent
enfin
avec leur mca-
nisme
grossier, jusqu'
dtruire l'aberration.
En tout
cela,
ils n'ont
point gn la
haute
science,
comme ils n'en ont
point
t
gns
dans leur
sphre
subalterne. Bacon a dcou-
vert
d'emble,
dans sa
prfre t~dc~e
et
par
l'Induction
lgitime, que
la
forme
de la
chaleur est un
mouvement,
e<rien
qu'un
mou-
vement,
mais
toujours
excit et
toujours
r-
prim,
de Mam'e
qu'il
soit
repouss
sr ~Mt-
mme jusqu'
e
gM'~
en devienne ENRAG. Il
peut
mme nous assurer
que
tout
Ap~Mte
qui
sera en tat de
produire
MKmoMuetMCM~de cette
espce,
/Mr/eM.K
dans les moindres
parties
et
HM~dans la
masse,
avec la
prcccn<oM
de le
14.
OPTIQUE.
~M'e
tant soit
p6M
MM~Mer vers le haut
(1), ~!M
cet
AoM!Mte,
dis-je,
est ~Mr
de produire
de la
cAct~ettr. Sur cela
je
m'crie Felix
qui po(uit
?'erMm
cognosc~ecatMC[s/
et si l'on veut accor-
der l'auteur de cette dcouverte un tombeau
et une statue
Westminster,
je
rclame une
place parmi
les
souscripteurs.
Mais
je
ne ces-
serai de le demander En
quoi
les
philoso-
phes
subalternes
gnent-ils
ces hautes
spcu-
lations ? Pour
moi,
je
le dclare solennelle-
nent
Quand
mme ils auraient le malheur
d'inventer la machine
~cepe~r,
sans entrevoir
seulement la
~b~~e
de la
chaleur,
je
suis
prt
!er
pardonner.
J e reviens au
sujet principal
de ce
chapitre.
Il est
prouv
l'vidence
que
Bacon
ignorait
ce
qu'il y a
de
plus
lmentaire dans la thorie
de la
vision
si de l nous
passons
celle des
lentilles,
qui
est la base de
l'optique,
nous le
trouverons au-dessous de l'enfance.
La runion des
rayons
du
soleil,
nous
dit-il,
augmente
la
chaleur,
comme le
prou-
(0 Sup. p.
rMCB~ShtON DE LA t.UM)6t:E.
2)-3;
tMMtcesvers le ?nHeM
que
vers les
bords,
la
M
diffrence des verres de
lunettes,
COMME
J E LE CROIS
(1).
Pour s'en servir on
place
d'abord le verre
brlant,
AUTANT
QUE
J E ME LE
RAPELLE,
entre le soleil
et le
corps que
l'on veut
enflammer;
en
MaM~'esMMpe~Ma~e que,
si le verre brlant
avait d'abord t
plac
la distance o on
le ramenait
ensuite,
il n'aurait
plus
eu la
mme
force;
et
cependant l'angle
M'aM-
(t)
!FM<~ are made tht'ntter in the middle than on the si-
des,
as 1 take
t<,
contrary
to
spectacles.
(Inquisitio
legitima,
de Calore et
Frigore
en
Anglais. Opp. 1.1, p. 79.) Que
di-
rons-nous de cette diffrence entre les verres brlants et !M
verres de lunettes? Probablement il avait vu une fois ou deux
des lunettes de
myope,
et il n'avait t'ide d'aucune
diC-
rence
sur ce
point.
(2) mK'ch,ittstrue,
ma&e<h
the angle of the
cne more
~arper. (tbid.
p.
179.)
Ainsi il
croyait que
les dimen.
sions du cne ne
dpendaient point
de la forme du
verre,
et
que
si on le
rapprochait trop, par exempte,
de
l'objet qu'on
voulait
enflammer,
il en
rsultait,
non un cne
tronqua
mais un cne
plus
obtus.
OPTIQUE. 2t~
~6M<p(Me<(?.)MO!)t~ tK~M
(1).
Ailleurs il
y
revient,
et il nous
rpte
que
si l'on
place
d'abord un miroir ardent la
distance
par exemple,
d'une
palme,
il ne brle
point
autant
que
si,
aprs
l'avoir
plac
une distance moindre de
moiti,
on le ra-
M
menait lentement et
graduellement
la dis
tance convenable. Le cne
cependant
et la
K
convergence
sont les
mmes;
mais c'est le
mouvement
qui augmente la
cAa~c~
(2).
(1)
lt would !)o<have had <aa<
force
and
yel
<ha( had
<)eenaHone<o(/te~arpMeMO~<AeaH~(Ibid.p.
180,
t 1
et
2. )
Tout l'heure il doutait si le verre devait tre
plac J
pour brler,
entre le soleil et
l'objet
(ou derrire,
peut-
tre!)
mais ici il ne doute
plus
il est
persuad que
si le
verre bru)ant est
plac
d'abord ~a distance convenable
il
y
a moins de force
caustique que
s'il
y
avait t
ramen
gra.
duHement.
(2)
Conus <men e<))to radiorum eadctn
<t<n<
~ed
ipsc
mo<M<
auget opefa<<OMem
caloris.
(Kov. Org. toc.
citat
xm.
Opp.
t.
vjn,
p. 101 lignes
32 et
33.)
Ainsi ce ttonnement
qui
cherche le
foyer,
et
qui peut
fort bien
occuper cinq
ou
six Mtor<e!<M
lignes
dans
l'espace
et autant de secondes dans
le
temps, augmente
la
puissance caustique
du miroir. C'ext
le
plus
haut
degr,
c'est le
point cM~utonf
de
l'ignorance.
PMGBESS!ON
CE LA HIMttmE. s~
Enfin
dans -son essai
sur la
/bnMe
de la
cAe~M\
je
trouve une nouvelle
preuve qu'il.
ne savait
pas
j si
un
verre
brlant
devait
tre
concave ou convexe
qu'on prenne
un
miroir
fabriqu
d'une
y
avait rellement
quelque
intervalle e~'e
~6tue?'!<e et
l'apperception (1),
il arriverait
que
les
images
des
astres,
en venant
jus-
qu'
nous,
seraient
interceptes par
les
nuages
ou autres obstacles
semblables,
ce
qui
brouillerait tout le
spectacle
des cieux.H n
J e .ne puis
terminer ce
chapitre
d'une ma-
nire
plus agrable pour
le lecteur
qu'en
lui
montrant comment Bacon a
parl
de
l'o~e,
aprs
avoir si doctement
parl
de la lumire.
Dans le trait o il
expose
les
principes
de
Parmnide,
deDmocnte et de l'italien Te!e-
sio
(2),
il examine
l'importante question
de
(<)7H(efMft<<!<emf( <t<m.
(Nov.
Org.
)ib. it.
46,
p.!77.)
(2)
CeTe)es!ofut
contemporain
del'atrizi et l'un des ret-
OPTIQUE.
2~0
savoir si le soleil et la terre sont deux
p)'Kc~es
opposs.
L'affirmative lui
parat
dure cause
de l'immense
disparit
de
forces
qui
ne lais-
serait
pas
durer le combat une
minute,
soit
que
l'on considre le
~MOK~M~ ( En
c~et,
il
y
a
quelque
diffrence),
soit
que
l'on s'atta-
che la
puissance respective.
M
est incontestable, dit-il
que
l'action
du
soleil arrive
jusqu'
ia terre
mais de savoir
soleil,
c'estcequeje
n'oserais
pas trop
assu-
rer. En
effet,
parmi
toutes les
puissances
(<w~M<M) que
la nature
enfante,
il n'en est
pas qui
s'tende
plus
loin et
qui occupe
un
plus
grand espace que
celle de la lumire
taurateurs de la
philosophie
au commencement du sicle.
Sa haine
pour
Aristote et les erreurs
qu'il
retint de l'anti-
quit
lui valurent cet
loge
de la
part
de Bacon De Telesio
(tu<ent6ene
Mn<tMt<<!(gMa
eum ut majorent
<;eft<a<t'e<
<Ctett<it!
utilem,
e<nonnullorum
placitorum emendalorem,
et
novorum
hominum
primum a~no~cimM~. (De
Princ.
atque
Orig.)
)
( F.Tiraboschi,
Storia della Letter. ital.
Venezia,
1796.
in-&,
tom.Yu, part. j!,
lib..
n, XYt, p. 428.)
FMGMSSION DE LA HJ M~nE. 22t
tt
et de l'ombre
or,
si la terre tait dia-
phane,
la lumire du soleil
pourrait
la
p-
ntrer de
part
en
part,
au lieu
que
foH&re
<t
de ~a <en'e M'an'tue
potM~'MsgM'aM
soleil
(1).
Z'on~'e du
corps
~M~tMe M'argue
point ~M~-
qu' l'illuminant 1 Non, jamais depuis qu'il
fut
dit: FIAT LUX'l'orelUe humaine n'entendit
rien
d'gal.
En vain l'officieux
traducteur s'ef-
(!)
Inter onnM nn'<utM
uM
natura
paril,
illa luci. et
m6f<B
ton~M~tma*
emitlitur, et maximo
spalio
sive orbe cir-
ct<M~ndt<Mr.(Parm.Ttes.
et Democr.
Phitos.Opp.tom.ix,
p.
35t. )
tt
attribuait,
comme on
voit,
l'ombre cette diffu-
sion merveilleuse de la lumire
qui rayonne
d'un centre lu.
mineux quelconque
dans tous les sens. Umbra autem ter-
r<Bettro ~o~em
terminatur
cm lux
solis,
si terra
diaphana
esset
gtohttru
<err<B<<'att!Mr6<'rat'e
possit. ( Ibid.)
Sur ce mot
de
citra,
le traducteur dit dans une note
au-deMt,
car assez
communment l'ombre ne tombe
pas
entre le
corps
lumi-
neux et celui
qui
fait
ombre;
mais il veut dire
que
t'extrt-
mit de l'ombre de la terre se
porte
une distance moin-
dre
que
celle oH le soleil est de cette
plante.
(Tom.
xv
de la trad. desPrinc. et des
Orig. etc., p.
35t, note.)
Au-del
n'explique rien; d'aitteursett~faneveut point dire
aM-<feM.
C'est comme si l'on disait
blanc
c'est--dire noir. Et com-
ment effacer encore
ta
puissance
ou l'activit de l'ombre, et
le doute formel si l'action de la
terre s'lve jusqu'au
soleil ?
P
M. Lasalle
nous
persuadera
difficilemeut
que
en
d<'fa
du <o-
!ct!
signiCe
au-del de la terre.
OPTIQUE.
222
force de donner a cette
proposition
un sens
tolrable. Pour lui rendre toute la
justice
qu'elle
mrite,
la
langue iranaise
'n'a
qu'un
mot,
et,
pour
trouver ce mot dans le Diction-
naire de
l'Acadmie,
il ne faut
pas
s'avancer
jusqu'
la troisime lettre de
l'alphabet.
MTmEXCES
ET BXPUCA'ntMS
Pin-S~UES.
223
ITRE X.
EXPRIENCES ETEXPLICATIONS
FHYS!QBES.
Lorsqu'un
artiste
propose,
et
propose
sur-
tout avec
emphase
un nouvel
instrument,
il
faut d'abord
examiner la machine en elle-
mme,
et voir ensuite
l'usage qu'il
en fait.
Bacon
ayant
t soumis au
premier
exa-
men,
il a t
prouv jusqu'
la dmonstra-
tion
qu'on
n'a
jamais
rien
imagin
de
plus
faux,
de
plus
nul,
de
plus
ridicule sous tous
les
rapports, que
son ~o{(~ H~'MMe~.
EXPRIENCES 224
Et,
quoique
le second examen ait t
dj
entam et mme fort avanc dans les cha-
pitres prcdents, voyons
nanmoins en
par-
ticulier comment il s'est servi de son ~oM~
MM~tHeH~ dans la
physique proprement
dite
(car
ses
plus grandes prtentions
se tour-
naient de ce
ct)
afin
que l'aveugle
mme
qui
s'obstinerait croire l'excellence de
l'instrument demeure convaincu
que
mme
en la
supposant
reie
il
n'y
a nulle liaison
entre le talent du constructeur et celui de
l'oprateur.
J 'ouvre ses OEuvres au
hasard,
et tout de
suite elles me fournissent les citations
qu'on
va lire.
L'air,
de sa
nature,
est-il chaud ou
froid ?
C'est la
question que
se fait
Bacon,
et cette
question
est du nombre de celtes
qui
suffisent
pour juger
un
homme,
puisqu'elle
ne
peut
tre faite
par
celui
qui
aurait une seule
ide
claire dans la tte. La
rponse
une telle
ques-
tion devait ncessairement tre aussi
ridicnle
que
la demande. C'est ce
que
nous allons
voir.
tt U est bien
difficile,
nous dit le restaura-
it
teur de la
science,
de savoir
si l'air est chaud,
BT EXPLICATIONS
PHYSIQUES.
su
K
on froid. En
effet,
si nous l'examinons
une certaine
hauteur,
il sera chauff
par
les
corps
clestes
!?
K'~
a
pas
de doute &!M'
ce
point (1).
Prs de
nous,
il est
peut-tre
refroidi
par
la
transpiration
de la
terre,
et
dans la
moyenne rgion
(c'est--dire,
sui-
ff vaut
la
thorie
de
Bacon,
une
gale
dis-
tance dit ciel et de la
terre)
il est encore
refroidi
par
les
vapeurs
froides et
par
les
neiges, qui
se tiennent
l en rserve
pour
l'hiver. Comment faire donc? Car tant
que
l'air demeurera au
grand
6M?',
jamais
l'on
ne saura
quoi
s'en
tenir, n
La
difficult,
il faut
l'avouer,
est
terrible
cependant
le
gnie
de Bacon saura s'en tirer.
Il
faut, dit-il,
enfermer l'air dans une
matire
qui,
par
sa propre vertu,
ne
puisse
emboire l'air
ni de chaud ni de
froid,
et ne
puisse
mme
que
difficilement recevoir
l'impression
de l'air ex-
()) Recipit
enim o~r calidum MANIFESTO
M
<Mpt<Mton<
t<B~<tMm,
etc.
(Nov.
Org.
xit.
Opp.
tom.
vm, p.
9i.)
Tout homme
qui
a
grimp
une
montagne
ou mont un bal-
lon en sait
quelque
chose.
TOME . 155
EXPtHIEKCES S26
trieur
(1).
Prenez donc une marmite dterre
cuite
remplissez-la
d'un air
qui
ne soit ni
chaud ni
froid,
c'est--dire
qui
n'ait eu aucune
communication ni avec le
ciel,
ni avec
laterre,
ni avec la
moyenne rgion
autrement il serait t
suspect enveloppez
la marmite de
plusieurs
doubles de cuir
pour
la
garder
de l'air ext-
rieur.
Aprs
trois ou
quatre jours
ouvrez-la
par-
dessous
(pourquoi pas par-dessus?)
et vous
verrez ce
qu'il
en est en
y appliquant
un ther-
momtre,
ou mme en
y
mettant la main
(2).
Quelle
est
~'on~e des fontaines?
Rien de
plus simple.
Elles viennent de l'air renferm
dans les cavits de la terre
(des montagnes
surtout)
coagul
et condens
par
le froid
(3).
(()
7M <a!tM.!e et materta
oufz
nec
tpM
imbuat aerem ca-
lido vel
frigido
ex vi
propri,
etc.
(Ibid.)
(2)
Fiat
itaque Mpet'tmetttuw
per
ollam
~M~arem,
etc.
Deprehensio
autem fit
p(M<aperiiottembasis,
vel
per
manum
velpervitrum
graduumordine app~'catttm. (Nov.Org.
xn.
Opp. tom.YjM,
p. 91. )
Ces derniers mots ne
signifient
rien,
mais ce n'est
pas
un inconvnient.
(3)
Hist. Densi et Rari.
(Opp.
tom.
p.
30~
ET EXPLICATIONS
PHYSIQUES.
!Nt
Comment se
~M'MM
le cristal de rocAe ?
Rien de
plus simple
encore.
L'eau,
en circu-
lant au hasard dans les entrailles de la
terre,
arrive
enfin
sans
trop
savoir
pourquoi, jus-
que
dans certaines cavits obscures et
pro-
fondes o elle
gle
misrablement;
la fin
cependant, lorsqu'elle
a demeur
longtemps
dans cet
tat,
sans
espoir
de
chaleur
elle
prend
son
parti
et ne veut
plus dgeler
et
voil ce
qui
fait le cristal de roche
(1).
Ce
que
c'est
que
l'habitude 1
Pourquoi
dans les annes
pestilentielles y
a-t-il
beaucoup
de
mouches,
de
grenouilles
de
sauterelles et autres cratures de cette
espce?
(t)~<~Me
si
p!t!H~con<Mt<e<t<r/ft~M~ttee
(epontM
<n-
<ctTMmpa<t<)' ( <
fit
in
speluncis
et MMrn)'~
pauld pro/undto-
fibus)
vertitur in
cr<<<t~Mnt,
aut materiam
simi)em,
nec
unquam
rMtt<Mt<Mr.
(Nov.0rg.xi.vni. Opp.
tom.
VIII,
p.
)83. flist. Densi et
Rari,
tom.
)x,
p. 5). ))
Quand
on
songe que
ce
grossier
radoteur a t cit dans
notre sicle
par
des
physiciens,
d'aiHeurs
trs-respectables,
comme une autorit en
physique,
on
comprend
ce
que peu-
vent les
prjugs
et
J 'esprit de parti.
Si la
passion
l'avait
Lien
rsotu,
elle mettrait ChanKtt'
~u rang
des SS. Pres
15.
XTmESCES SES
-La raison en est claire
(t).
C'est
parce que
ces animaux tant
engendrs par
la
putrfac-
tion,
ds
que
l'air tourne la
corruption
ils,
foisonnent de toutes
parts.
Pendant la fameuse
peste
de Londres on
vit,
dit
Bacon,
des
crapauds
en
grand
nom-
bre,
qui
avaient des
queues
de deux trois
pouces
de
longueur
au
moins,
quoique
ORDI-
NAIREMENT ces animaux n'en aient
pas (2);
ce
qui prouve
bien la force
gnratrice
de la
putrfaction,
du moins en fait de
queues.
L'air est-il
pe.ya)~ ?
Point du tout car
Bacon
ayant pes
une vessie
soofe,
et
(1)
The cause is
plain. (Nat.
hist. cent.
vin,
n" 737.
Opp.
tom.
t., p.
500.)
-Le mme
pronostic, ajoute
Bacon,
se
tire des vers
qui
se forment dans les noix de
galle.
( Ibid.
p. 500. )
J e ne crois
pas qu'il y
ait dans les trois
rgnes
de
la nature un seul tre sur
lequel
cet homme n'ait
grav
une
sottise.
(2) ~fre~
toads USUALLY have no tails a< ali.
(Ibid.
cent.
vn,
n"
C9l,p. 477.)
Cette
grande
vrit,
que
)e.t
crapauds n'ntpas
de
queue COMMUNMENT,
doit tre re-
marque
car l'on n'en trouvera
pas
d'autre dans tout ce
que
Bacon a crit sur l'histoire nature)!e.
ET tIPUCATIONS
PHYSIQUES.
2~!h
l'ayant pese
-de nouveau
aprs
l'avoir
apla-
tie,
les deux
expriences
faites avec la
plus grande
exactitude lui donnrent le mme
poids (1).
J PoM~uo!
les cAtCMSseuls e~re totts les ani-
?HC[tfa?se))!~e?t~~
prendre plaisir
tcx mc~tuet-
ses o~eur~? La
question
est
impor tante
et
c'est
dommage que
Bacon ne l'ait
point
ac-
compagne
d'une
ugure
en
taille-douce;
mais
la
rponse
est tranchante et
digne
du
sujet
C'est, dit-il,
pctrce
<~7~
a dans ~'o~om< des
chiens
<~<e~te
c/Mse
qiti
~e se ~OKue
pas
dans
celui des a:<M animaux
(2).
On voit briller
ici
l'm~ttc~'o~tne
et ~e[))?c</<o~e
d'exclusion;
car il est bien clair
que
toute autre
explication
du
phnomne
serait fausse.
J e
m'extasiais tout
l'heure
sur
l'importance
(i)D!~cK<er experti
<t<mu<.
(Hist.
Densi et Rari.
Opp.
tom.
tx,
p. t3.)
(2)
IFMc/t ~eM)e</t there t~Mmctoh<jtM<he)rMt)M
o/t)te!t
(!t't't!~ from
</n; ~me~
o/'offter
6ea!<
(Nat.
hist. cent.
ix.
T835.
Opp.
tom.
n, p. 11.)
EXFEBtEKCES 230
de la
question que je
viens de
rappeler
ce-
pendant
celle
qui
suit n'en a
pas
moins,
et la
solution ne laisse rien dsirer.
Pourquoi
les
djections
de <otH les animaux
exhalent-elles une odeur
desa~ea~e?
La
cause en est
MANIFESTE
c'est
parce qu'el-
les ont t
rejetes par
le
corps
animal lui-
mme,
et
plus spcialement
encore
par
les
esprits
vitaux
(1).
Ainsi la
ftidit,
dans
ce
cas,
n'est autre chose
qu'une sorte
de tris-
tesse
physique qui
saisit ces matires au mo-
ment o elles se voient exclues
par le corps
lui-mme En
effet,
cette
espce
de
rlga-
tion est mortifiante.
Le flambeau de
l'analogie
me conduit une
autre
question
du mme ordre c'est celle de
savoir
pourquoi
un
par/Mm, plac prM
~'MMc
fosse
d'aisances,
s'vapore
MtOMMe~co/Merue~o~
odeur
plus
longtemps que
dans tout autre
~eM?
-Ici,
l'induction
lgitime
vient encore notre
fl)
rhe catue is
MAN!FEST;
for that the
body
itself re-
je<;<e(<them;
mt<ch
tnofe
thespirits. (tbid. )
ET EXPLICATIONS
PHYSfQUES.
23t
secours,
et nous
apprend que
le
pctr/M~
se ?'es-
serre
alors
de
peur
de s'encanailler en se m-
lant des miasmes dshonntes
(1).
D'o vient
que lorsque
l'arc-en-ciel semble
toucher la
terre
elle exhale une odeur suave ?
(comme
tout le monde
sa!t).C'est parce
que
la rose douce
qui
tombe de farc-CM-cze~
excite l'mission des odeurs
parmi
tous les
corps
odorifrants
qu'elle
arrose. Une onde
chaude
produirait
peu prs
le mme
effet
mais nulle rose n'est aussi douce
que
celle de
l'arc-en-ciel,
partout
o elle tombe
(2).
Pourquoi
de
simples ~ecAes
de
bois
p6t~~
d'un fusil, eM~eK~eMesphMpro~bnde?Me/~
dans
(1) Quia
recusant
(o<fo<'t/era)
eMfe et conamisceri cum
/<)B(t(fM. (Nov. Org.
lib.
ji,
n XLVIII.
Opp.
tom.
vin,
p. 190.)
(2) Nat.
Hist. loc. cit. cent.
ix,
n 832. Un arc-en-ciel
considr comme une ralit matrieHe la mme
pour
tous
les
spectateurs! pendu
dans le ciel comme un arc est
pendM
un clou! Ce n'est
pas
tout: Un arc-en-ciel
qui
con-
tient et laisse tomber une rose et
par consquent
un arc-
en ciel
perpendiculaire!
Ces Mes
seraient dignes
d'un sau-
vage.
EXPERIENCES 233
le bois
que
si elles taient armes d'M~e
pointe
de fer ?
QUE
LA TERRE SE TAISE ET L'COUTE
PARLER!
C'est cause de
l'affinit qiti ~eg'Me
entre bois
et
bois
quoiqu'elle
soit cache dans cette
sub-
stance
(1).
PoM~MOt
ventouses attirent elles les
chairs?
Le
vulgaire
croit
que
l'air est ra-
tout le
contraire,
il
y
est condens et tient
moins de
place (il
se
range
sans doute
dans un
petit
coin);
alors les chairs
s'lvent
(t)
Nov.
Org.
n
xxv,
p.
t22. C'est !o manie des
p'Mto-
Mphes,
a dit Rousseau dans la Nouvelle
Hlo~e,
de
nt'er ce
qui est,
et
d'expliquer
ce
qui n'est pas.
Mais chez les autres
phi)osophes!a
maladie est
accidentelle,
et chez Bacon
elle
est continue. On ne
surprend pas
cet homme un seul mo-
ment
d'apyrexie. On ne sait,
au reste, o Bacon avait
pris
tant de belles connaissances. Comme
il n'indique jamais,
dit son
traducteur,
o il
puise
toutes M
fables,
on ne
peut y
puiser
d'autres
petits
contes
pour
claircir les siens
(Tom.
vn de la trad.
Sytv. sylv.
no
64S, note.)
ET EXPLICATIONS
PHYSIQUES.
233
de~M<e(1).H
Il
~'M!< est-elle
compressible?
Elle
l'est,
sans
doute,
et mme eUc l'est un
point
considra-
ble. Il faut entendre Bacon nous
expliquer
lui-
mme comment il
opra pour
s'en assurer.
t<
J e fis faire en
plomb
une
sphre
creuse,
cc
que je remplis
d'eau
par
une ouverture
que
nable, dit-il,
pour expliquer
en
apparence
K
les effets dont on
ignore
rellement la
cause,
que
de
supposer
dans l'intrieur des
corps
(<)
Le traducteur a fait
plus
d'une fois cette observation
et tout lecteur
peut
s'en convaincre en feuilletant tes OEuvres
du chancelier. La construction
propose,
dit M. Lasalle
propos
de
navigation,
estsi
grossire e~i'peKf~cyti'e qM'ee
tte mrite
pas
seulement d'tre examine.
( Hist.
Vent. tom.
xi de la trad.
p. 204. )
Ailleurs il a honte et demande formel-
lement
pardon pour
son
auteur,
t'endroito celui-ci nous
dit
gravement qu'il
avait
fort
bien
reprsent
avec des
fils
de
fer
le mouvement de tous les
corps
c<iss EN LIGNES SPI-
RALES.
(Nov.
Org.
tom. vin du
texte,
n 36. tom. v de la
trad.
p. 345.)
I)
y
a
je
ne sais combien d'autres
exemplesde
ce
genre.
EPB)E.CES 236
certains fluides
trs-subtils invisibles
Impalpables,
Fa~ de toute
cn'~Me,
et
dont on ne
peut
dire ni bien ni
mal,
parce
qu'on
ne sait ce
que
c'est
(1).
Au
moyen
de ces
espr~,
il n'est rien
qu'on
n'explique
sans la moindre difficult. On de-
mande,
par exemple, pourquoi
un
serpent
tant
coup
en trois ou
quatre
morceaux,
cha-
cun de ses
tronons peut
encore frtiller assez
longtemps,
tandis
que
l'homme touch dans
une
partie
noble
expire
l'instant. La
rponse
ne se fait
point
attendre C'est
~CM'ceque
les
esprits
tant
fPpcM~tts
f~MM le
serpent
tout le
long (~Mcorps, chaque
<yo?~oMe~
co?Merue assez
pour
re?MMe~;
a!t lieu
que,
dans
f/M~me,
<oMs
les
esprits
tant dans la
tte,
etc.
(2).
On sait
qu'un
effet du chatouillement dans
l'homme,
c'est le
rire;
mais
quelle
est la cause
de ce
rire?
Il
faut
~a~/&Mer l'mission s~
(t)Sylva sytvarum.
Cent.
vin,
tom. ix de la trad.
p.
200.
(2)
tbid.cent.
iv,
no
400, p
143.
ET EXPUCATIOXS
PHYStQUES.
237
bite des
esprits
s:tue de celle de l'air dans les
pOMHtOMS(1).
Le
papier
se dchire
parce qu'il
contient
peu d'esprits,
et le
parchemin
se laisse dtirer
parce qu'il
en contient
beaucoup.
La duret a
pour
cause la disette des M-
prt<.s,
et la
mollesse
au
contraire,
est l'effet
de l'abondance des
esprits (2).
Les
corps
sont fusibles
lorsqu'ils
sont riches
en
esprits trs-expansibles,
ou en
esprits
trs-
resserrs dans
l'intrieur et
qui
semblent
s'y
plaire.
Au
contraire,
la
trop
facile mission des es-
pn'<s s'oppose
la fusibilit
(3).
Nous
voyons
mieux les
objets
avec un il
qu'avec
deux,
parce que, lorsque
nous fer-
mons un
il,
les
esprits
visuels s'accumulent
dans l'autre.
(<)
Ibid. cent.
vin. tom. ix,
no
766,
p.
08.
(2)
Ibid. cent.
ix
n
840.,
843.
(3)tbid.n''839.
MrRKCKS ~3S
Le
myope
a besoin de
peu
de
lumire,
et
il voit mieux les
objets
de
prs, parce que
chez lui les
c~~M.SMe~s
tant moins
denses,
ils sont
dissips par
une
trop grande
lumire
chez le
presbyte,
au
contraire,
les
esprits
vi-
suels ne se runissent
que lorsque l'objet
est
plac
une certaine distance
(1).
La
putrfaction
a
pour
cause l'action des
<M~ (2).
Enfin,
les
e~n~
font tout dans le
corps
de l'homme
(3).
Et
pour
se
procurer
des ides claires sur la
(h'~n6M<!OK des
MpW~,
voici
l'exprience que
propose
Bacon.
())!bid.
~'869-870. M.
LasaUe,
enttaduisant cette
nor-
mit,
se croit
ob)ige
en consciencede nous dire
qu'
celle
~o~ueDMcat'<Me<~<'tc<o?t M'aMK'eM<p<M paru. (Ibid.
tom.
ix
delatrad.
p.
28,
note.
) L'habite
traducteur se
moque
un
peu
de nous.
(2)
Ibid. no
835.
(3)
Histoire dela Vie et de laMort. (Tom.
x delatrad.
p.2)6.)
ET
EXPMCATtOKS PHYSIQUES.
239
Pt'CHe.? MMebouteille de bire
~'tMC/te ~br<<
ment
bouche;
e~~oM~M-~ de c~6[~&o?Mardents
y'MsgM'a
la KCtMMMcedit
col,
et laissez-la ?t e.r-
peneMce pendant
~~OM~
en re?MMuc/c[~< cha-
que jour
les charbons
(1).
Quelquefois,
en lisant ce
que
Bacon a crit
sur la
physique
on est tent de croire
que
sa
tte n'tait
pas toujours saine,
ou
que
la ma-
nie
qu'il
avait d'tre la
fois
crivain et chan-
celier,
et
qui
le rendait la
fois
mauvais cri-
vain et mauvais
chancelier,
que
cette
manie,
dis-je qui disputait
le
temps
aux deux
tats,
le
conduisait
crire en dormant ou sans sa-
voir absolument ce
qu'il
crivait. Autrement
comment
expliquer
ce
qu'on
va lire?
Il faudrait tcher de
rendre le bl
plus oM'aM-
~:te~. Passe encore
pour
cette
premire
folie,
qui
est tout fait
dans son
genre
mais
que
dire de ce
qui
suit? H
rappelle
la maxime
(1)
Selon toutes les
apparences,
la bouteille ~c~tero e<<'r~
fe)'c[ les
yeux
de <'o&~crt)a(ettr.
( Note
de M. Lasalle. Tom.
vin de la traduct. cent.
jv, 9. )
EXPMEXCEi
240
que
tout ce
qui
re~r<~e l'accroissement coM~
&ue la
~Kn~ et
il
part
de l
pour
nous
dire
qu'il M'y
a donc
~n'a jfetM'e
cro~e le bl foM-
&re en fe?!n:?'oMKaM<
(~e.p~M/2cAes
(~)..
leur,
et la
consquence
ncessaire de l'ex-
pulsion
de la chaleur est de laisser froid le
corps
d'o on l'a
expulse (2).
1)
On
pleure
dans
la douleur,
parce que
le
cerveau,
~cht dans' la
convulsion,
laisse
chapper
les larmes
(3).
il faut en
excepter
la
pulmonie,
parce
(t) Sylva Sylvarum.
Ibid. cent. YT.
(2)
Ibid.
n<'74,
p.
208.St<Mi'me<McottMr~/Ij. Lasalle,
ibid.cent.i.)
(3) Sylva sylv.
Cent.
vin.
n" 7<4. Tom. ix de la
trad. p. 20.
Ici,
comme en cent autres
endroits,
le traducteur
perd
patience,
et il
ajoute
comme on
exprime
l'eau d'un
linge:
explication qu'il est juste
de
renvoyer
aux blanchisseuses
don<
elle est
digne. (Ibid., note. )
ET EXPUCATtONS
PHYSIQUES.
241
que
dans cette maladie la sueur ne les
chasse
pas(1).
La nielle a visiblement
pour
cause un air
trop
resserr et
trop stagnant (2).
J I
Pourquoi
la salamandre teint-elle le
<. feu? Parce
qu'elle
est doue dune
facult
extinctive dont
fe~<
naturel est d'teindre
le
feu (3).
B
Pourquoi
les animaux terrestres sont-ils
en
gnral plus gros que
les oiseaux? M
(Belle
question,
comme on
voit,
et tout
fait
semblable celle-ci
PoM~/o;
cAeuotM.z
sont-ils
plus
gros que
les
chiens?)
Bacon re-
(l)IMd.n'7tt.
(2)
Ibid. tom. vm de la trad. cent.
vi.n*
669. C'est fort
bien
cependant j'aimerais
mieux dire un air
trop
nielleux.
(3) Quia
est in ed p!r<M~extinctiva
cujus
est natura
/!am-
mas
sopire.
J e
croyais
fermement
que
Bacon n'avait t lu
d'aucun
grand
homme du
dix-septime sicle;
maintenant
je prsume qu'il
l'a t
par
le seul
auquel
il ait
pu
tre utile.
(
Y. cent.
ix,
n
859,
tom.
ix, p. 265.)
M. Lasalle
ajoute
Comme
notre auteur aurait une
facult MyHcoMce,
< nous
montrait
bien nettement la raison ~e celle-l
(Ibid. )
TOME
I. 16
EXPERIENCES
242
pond
Parce
que,
le
sjour
des animaux ter-
restres dans la malrice tant
plus long que
ce-
lui des oiseaux dans
~'ceM/
cetM-M ont
plus
de
temps pour
se
former (1).
Et
que
dirons-nous de la
proposition
den-
cadre?' les voiles des navires dans
quatre pices
de
bois
comme des tableaux ou des
estampes,
pour
mieux
pincer
le vent
(2) ?
Et de celle d'arrter la
fermentation de la
bire ou le caillement du
lait,
par
la seule
force de
l'imagination, pour prouver cette puis-
sa~ce(3)?
Et de celle de
couper
la
queue
ou la
pte
())
Ibid. n 852.
bene,
bene
fespondere.
(2)
Hist. Vent. tom. xt de la trad. no
9 p.
220. Dieu
vous
garda,
d lecteur (te
faire
route dans un vaisseau dont la
voilure soit de l'invention d'un chancelier de plaider
un
tribunal o sigent
des
marins,
e<en
gnral
d'couter un doc-
teur voulant
parler
de ce
qu'il ignore
et d'imiter un ot!vrier
voulant
faire
un mtier
qu'il ne
sait
pas.
(Note
de M. Lasalle
( Ibid.)
sur les mots cMmcfMfM ex
ligno.
Tom vni du
texte.)
(3) Sylv. sylv.
Cent.
e,
t. ix de la trad. n 998
p.
476
Tom. i du
texte,
n*992.
ET EXPLICATtOAS
PHYStQUES 2~)3
16
d'un animal
pour
voir
si
mesure
que
la
par-
tie
coupe
se
putrfierait,
il se formerait un
apostme
dans la
partie
restante,
et si la
gu-
rison serait
empche (1)?
J e demande de nouveau comment il est
pos-
sible
qu'un
homme
veill,
en
possession
du
bon sens le
plus vulgaire,
dbite de
pareilles
neries ?
Il
y
a mille
preuves
dans ses
ouvrages qu'il
crivait souvent
par
une
pure
habitude m-
canique pour
exercer ses
doigts
et sans savoir.
ce
qu'il
crivait.
Le roi,
dit-il dans l'histoire
de Henri
VII,
assista /e 27 dcembre la ce-
/c~a~'oM des
ftes
de
Nol;
sur
quoi
le traduc-
teur dit en note
Apparemment
le roi
fit
re-
commencer. Cette histoire est toute
re~jo~e
de
petites mprises
de.ce genre (2).
Ailleurs il
dit,
parlant
en
gnral
de toutes les OEuvres du
chancelier J '<K
fait c!Mp(H'<M~e plus
de deux
mille
(~Mt~ogMM
(3).
1
(i)
Ibid. no
991,
p.
479. Tom. i du
texte
no 995.
~2)
Hist. de Henri
VU,
tbm. xfi de la n'ad.
p. 280.
(3) Sylva sylv.
tom. jx de la trad. cent.
x,
n'
95f, p.
439.
EXPt:mEKCES 244
Bacon,
dit encore M.
Lasalle,
donnait
l'tude le
temps
mme
qu'il
devait aux af-
ct faires revtu d'une
grande charge,
il res-
appliqu
sur la
nuque
ou sur le crne
donne de
l'esprit.
Certainement on n'exa-
gre point
en disant
qu'un philosophe
serait
dshonor
par
cette seule
citation,
quand
mme il ne citerait
que pour
rfuter,
parce
qu'il y
a un vritable dshonneur rfuter
certaines choses. Mais
que
dirons-nous de Ba-
con,
qui ajoute tranquillement
PcM~-e~'e le
M?M?' d'un
homme produirait
de
~MS puissants
e~e~
mais
ce moyen serait dsagrable,
moins
que
ce ne
ft dans
ces sectes o l'on
porte
~Mr soi
6!cs ~e~Mes
de saints
(1).
il, /a
toujours
entrer dam sa collection les traditions
popu-
iatfM.
(Hist. des Vents, chap.
des Pronostics des
vents,
u
17
Tom.ixdetatrad.p.22t.)
(l) Quel laquais
du xve
sjcle
et t la fois
.plus
sot et
plus grossier
?
M. Lasalle a l'extrme bont de
traduire,
mais celle horri-
ble recette
rpugne trop
t'/tumant~. Pourquoi prter
ces
paroles d'indignation
Bacon,
qui
dit avec le
plus
beau
sang-froid:
mais cela
serait dsagrable
ou
~o<t<an(?But
that it is
more
against
men's mind to use
it.
(
Sylva Sylv.
ffnt.
x,
n" 978 du
texte;
974 de la trad. tom.
jx,
p. -<62. )
EXPERIENCES S;22
Si Bacon trouve un ancien sur
sa
route, 1*
il le
pille
sans le
nommer
souvent mme il
le
pervertit,
et se sert de son autorit
pour
draisonner. Il avait
lu,
par exemple,
dans
Plutarque
que,
suivant
Aristote
les bles-
facilement
que-celles qui
se font avec
le
fer,
d'autant
que
le cuivre
possde
une
certaine vertu mdicinale
qu'il
laisse dans
la
plaie (1).
Bacon,
qui
croit
tout,
except
peut-tre
ce
qu'il
fallait
croire,
ne balance
pas
un instant sur la vrit du
fait,
et tout
de suite il
part
de l
pour
nous
proposer
de
faire
tous les instruments de
c~M~~e
en
cuivre
(2).
Excellent
conseil,
comme on
voit,
et tout fait utile l'humanit!
Pour
jeter
un
nuage complaisant
sur ce
honteux amas
d'extravagances, l'obligeant
(t)
P)ut.
Propos
de table.
m
tO. Tom. xvni dela trad.
u'Amyot. Cussac, 1801, in-8, p.
166-167.
(2) SylvaSylv.
cent.
vnt,
tom. ix dela trad. n"
78!
ETEXPUCATMSS
PHYStQUES.
253
traducteur nous
reprsente que, pour
excuser
Bacon
il
su/~<
de le voir
e?~OM7'e,
comme il
l'tait
de
scolastiques
et de
~rey'M~M.
Il
~aM<
savoir se dire
que
si l'on et uecM dans le mme
S!ec~,o~se
serait tromp encore p~tM
gue/M!(l)
mais ce
raisonnement,
force d'tre
rpt,
n'en devient
pas
meilleur. Si Bacon tait en-
vironn de
scolastiques
et de
prjugs
c'tait
assurment sa
faute
il ne tenait
qu'
lui de
s'environner de savants et d'excellents livres.
Sans sortir de son
le
deux
contemporains,
je
veux dire l'illustre
religieux
de son nom et
Sacro-Bosco suffisaient
pour
lui
apprendre
que
dans le treizime sicle on tait mille fois
plus avanc que
lui dans les
sciences,
et
qu'il
n'tait
pas
mme en tat de
comprendre
ce
que
ces deux hommes savaient. Il serait
superflu
de
parler
des
grands
hommes dans tous les
genres qui
furent les
prdcesseurs
ou les con-
temporains
de
Bacon
j'ai
trait ailleurs ce
point, je n'y
reviens
plus.
Il suffit d'observer
(1)
Nov.
Org.
tom. v de la trad. n
xxxvT, p.
845.
EXPMEKCES 254
que, pour
l'homme
qui
l'histoire du
quin~
zime et du seizime sicle est bien
connue, 5
et
qui
a rflchi sur
l'espce d'explosion
in-
tellectuelle
qui marque
cette
grande poque
jamais
mmorable de
l'esprit
humain,
il ne
saurait
y
avoir d'ide
plus
folle
que
celle d'at-
tribuer les derniers et les
plus
brillants rsul-
tats de ce mouvement immense un seul
homme,
et surtout un homme tel
que
Bacon.
En vain l'habile traducteur nous dira encore
pour
soutenir une
rputation
factice,
gM'MMoM-
wo~e, quand
mme il ne contiendrait
pas
M~e
seule vrit,
K'ctMrctt~M
~OMMrew/~soM objet,
si cet
objet
n'tait
pas
vritablement la (~ecoM-
verte mme de la
vrit
mais
seulement la m-
<Aodc
n'OK
doit suivre
pour la ~ecoM~r(d).
C'est
toujours
le mme
sophisme auquel
on ne
cessera
d'opposer
la
mme doctrine. J amais
une vrit n'a t dcouverte en ~erht d'une m-
</to~e,
et jamais
homme
tranger
un art ne
(t)
Hist. de la Vie et de la
Mort,
tom. x de latrad.
p. 32,
ttOtC.
ET EXPLICATIONS
THYSJ QUES.
255
donna des
re~/esc~caces~oM~
auMcer~a~M cet
<M'<. Celui
qu!d!sa!t
Vice cotis, e<c.,
tait un
grand
pote
ce
que j'observe
mme sans
avouer qu'on puisse
enseigner
ou
apprendre
faire de beaux vers.
L'esprit
droit et lumineux du
traducteur
ne
pouvait
se faire illusion sur la
nullit abso-
lue de son
auteur;
mais comme il
fallait abso-
lument soutenir son
entreprise,
il
s'y prend
encore d'une autre manire.
Les raisonnements de
Bacon, dit-il,
sont
presque toujours
extrmement faibles
(l'a-
veu est
prcieux)
mais
il fait sans
cesse des
rapprochements (~).
Que
veut donc dire M. Lasalle? Est-ce
que
par
hasard les
rapprochements
ne sont
pas
des
raisonnements? C'est donc
prcisment
comme
s'il avait dit Ses raisonnements sont
~esgMe
toujours
extrmement
faibles;
mais il
fait
sans
cesse des
rapprochements, presque toujours
ex-
~'e!MeMteM<
faibles.
(1)
Hist. des
Vents,
tom. xt de la trad.
p.
2S-20.
EXPEMEXCES 256
Ce
qu'il y
a de
curieux,
c'est
que
Bacon,
toujours
ridicule,
ne l'est
jamais davantage
que
dans les
rapprochements.
En voici
quel-
ques exemples
Comme l'il
aproit
les
objets,
DE
MEME le miroir les
/a~ etperceuoM' (1).
1)
Comme l'oreille
entend,
de mme l'cho
fait
entendre.
en arrire
(2).
Comme dans les
grandes
scheresses,
lorsque
la terre se
fend,
on voit sortir dans
les lieux secs et sablonneux une
grande
quantit
d'eau,
qui
est un
corps pais,
AINSI
(i)
Un miroir ressemble la
prunelle prcisment
comme
un mur ressemble une
/ne<re.
Combien ces deua; ana-
logies, par lesquelles
il se laisse
blouir,
sont
faibles
et su-
per/!et'e!<M/(Note
du
traducteur,
tom. v de la
trad.p.265;
tom.
vn, p. 435. )
(2) Sylva Sytv.
tom.
vn!,
de la trad. cent.
yi,
n699.
ET EXPLM~T!OM
PHYSIQUES.
257
et
plus
forte raison il doit arriver de
mme
l'air,
qui
est un
corps
subtil;
et cet
air
qui s'chappe
de l'intrieur de la terre
fendue
par
la scheresse est une cause
principale
des vents
(1).
levs,
tandis
que
d'autres sortent do sein
de la
terre,
DE MME certains vents se
prcipitent
de la
rgion suprieure
de l'at-
mosphre,
tandis
que
d'autres
transpirent
de l'intrieur du
globe (2).
Et,
si l'on veut
connatre la cause de cette
transpiration
un autre
rapprochement
non
moins lumineux nous la fera se~~r.
Comme le microcosme ou le
petit
monde,
ou l'homme
enfin,
pour parler
tout
simple-
cc
ment,
est
sujet, lorsque
a
mang
des fves
ou d'autres aliments
flatueux,
produire
dans son intrieur des
orages qui s'chappent
(1)
Hist.
Ventorum,
tom. vm du
texte, p. 294.
(2)
Ibid. tom. xt de la frad.
p.
25t.
TOMEI.
17
EXPJ MEXCES '2~8s
avec
fracas,
DE MEME le
grand
monde ou
la
terre,
lorsqu'elle
est mal
dispose,
est
sujette
lcher des
temptes par
les con-
:
duits
souterrains,
ouvrage
de la sche-
resse
et telle est
l'origine
de
l'origine
des
vents
m/rteu~,
c'est-dire de tous ceux
qui
ne
tombent pas
des nues
(1).
n
Voil comment Bacon est heureux en
rap-
pt\)cAeMM<s;
s'il
y
en a de moins
ridicules,
il
n'y en
a
pas
de moins faux.
Aprs
tant
de
belles choses
auxquelles
M. Lasalle ne
peut
refuser,
comme on l'a
vu,
de donner de
temps
en
temps
tous les noms
convenables,
il croit
cependant,
dans sa conscience de
traducteur,
devoir faire un dernier effort en faveur de son
auteur,
et dans cette louable intention il
pro-
duit le raisonnement suivant
(1)
Cettesublime
analogie n'appartient pas
mme Ba-
con:
elle tait
vulgaire
du
temps
de
Snque, qui
dit d'un
ton moiti
srieux
moiti
plaisant
J e ne
puisni
l'admettre
ni la
passer
sous
silence;
il
ajoute
ensuite avec la iihert de
sa
langue
BeneKcbMcMMt
agitur gMMsempef M'<:o~t<
na-
tttra
alioquin
immundius
aliquid
ttmeremM~.
(Nat. qusest.
v.
4.)
Bacon laissede ct la
bouffonnerie,
et il
s'empare
ET EXPUCATMXS
PHYSIQUES.
259
Racine n'a-t-il
pas
fait ces
quatre
vers
dans sa
tragdie
de la 77M6cH~c
L'intrt du
public agit peu
sur son
me,
Et J 'amour du
pays
nouscache une autre
flamme;
J elasais; mais, Cron, j'en
abhorre te
cours,
Et vous feriez bien mieux de lacacher
toujours.
Eh bien ces
quatre
vers sont 'dans une
tragdie
ce
qu'une explication
de notre au-
teur est dans un
ouvrage
de
physique,
et
grands
hommes
(1).
n
Sans doute
que quatre
mauvais
vers,
chap-
ps
la faiblesse
humaine,
n'altrent
point
la
gloire
du
pote
inimitable
qui
en a fait de beaux
et de sublimes
par
milliers
comme ce vers de
J ean-Baptiste Rousseau Vierge
non eMco~ne
del'ide
principale, qu'il
nous donn comme sienne sans
nommer
Snque.
C'tait une vrit decaverne dont il vou-
laitse faire honneur.
(i)
Hist. des
Vents,
tom. M de latrad.
p.
208,
note.
17.
EXpiMENCES
ETC. 230
en qui
tout doit re~ct~re
(vers qu'on
ne
peut
prononcer
sans faire une horrible
grimace )
ne
fait
pas
le moindre tort aux odes ni aux can-
tates de
ce
pote.
clbre;
mais une absurdit
ajoute
cent mille autres les renforce comme
elle en est renforce. Rien ne demande
grce
pour
Bacon
rien ne
peut
l'excuser d'avoir
crit avec
la
prtention
d'un
lgislateur
des
volumes entiers sur des choses dont il n'avait
pas
la moindre ide. J e ne me
plains point,
au
reste,
de ses
en'e~'s,
car ses
erreurs sont
ce
qu'il y
a de mieux chez lui. J e n'en veux
qu'
sa nullit et ses
extravagances.
MTOttOLOGtH.
26t. t~.
CHAPITRE XI.
M&rOMLOGtE.
Bacon
ayant
t extrmement lou sur ses
ides
mtorologiques,
c'est un article
qu'il
faut examiner avec une attention
particulire,
II
part
de l'ide
antique
et triviale de la
transmutation
rciproque
de l'eau en air et
de l'air en
eau.
Il ne dit
cependant
nulle
part
d'une manire
explicite que
l'eau se
change
en
vapeur (je
ne
me souviens
pas,
du
moins,
de l'avoir lu en
termes
exprs);
il dit seulement
qu'elle
envoie
des
vapeurs,
ce
qui
n'est
pas
la mme chose.
MTOROLOGIE. 262
La terre
proprement
dite envoie des
e.c/ta-
~ecMon~,
et
quoique
ce dernier mot soit
pris
communment
pour
un
synonyme
de va-
peurs, cependant
Bacon ne
l'applique qu'aux
fluides mans de la
terre
rservant celui de
vapeurs pour
ceux
qui
manent de l'eau
(1).
L'un et l'autre uldes sont la matire
peu
prs
commune de la
pluie
et des ~ents
(2);
il ne dit
pas
de la
pluie
et de
l'air,
mais de
la
pluie
et des
vents,
ce
qu'il
faut encore re*
marquer.
(t) Bacon
dsigne par
le mot de
vapeurs
les manations
aqueuses,
et
par celui
d'exhalaisons les manations huileuses
ou les manations sches.
( Note
de
M.
Lasalle. Hist. des
Vents
tom.
x<de)atrad.p.
26t.)
(2)
P<MM<tet pentt
/ta6M<m(t<et'!am.~r~
communem.(Hist.
Vent.
Prog.
vent.
Opp.
tom.
vm, p.
330.
Deux pages plus
bas il dit Tam
vapores ~Mam
e~a~~fottM materia vento-
fMMt ~t<n<.
( Ibid.
Imit. Vent.
p,
332.)M.Lasa))e traduit
Lesvapeurs
ainsi
que
les
exhalaisons
peuvent
tre la matire
premire
des
vents.
Pourquoi
cette
inegactitudepeuvent tre,
au lieu de sont?
(Tom.
xi de la trad. la
p. cite. )
Il dit lui-
mme C'est Bacon
qu'on
me demande. Donnez-nous
donq
Pacon tel
qu'il est,
et non comme vous tchez de le refaire.
MTOROLOGIE.
2G~,
Cette matire commune est donc indiff-
rente
devenir vent ou
pluie,
et voici la diu'e-
rence
qui
se trouve dans
l'effet
car sur la.
cause
qui
dtermine l'une ou l'autre transibr-
mation il demeure muet.
La formation du vent
est toujours prcde
par
une condensation de
l'air,
et cette co~
densation a
pOM?'
cause le nouvel air
qui
CM~e
dans l'ancien
(1).
La condensation de l'air
prcde
aussi la
pluie;
mais il se condense encore
davantage
dans la
pluie,
au lieu
que
dans les vents
il
s'accrot
(2).
(i)M. Lasa))e traduit
:Z'<MrMOt<M<!tn<'tt</bt'me
et
ajouta
c[!'<t!)'Freea:~<<tn<. (Ibid.
p.
24.)
Cette traduction n'est
pas.
exacte. Bacon dit Ea; aere t)OM<er
/acto
intra veterem re-
Mp<o (Texte,
tom.
vm,
p.
330),
c'est--dire l'air nouveau
entre e<
s'incorpore
dans t'attetem: autrement il
y
aurait bien.
addition,
mais non condentoiton d'air. Reste savoir com-
mentrair se condense
par
la
simple
cration d'un
nouvel air~
comme s'il
n'y
avait
pas
de
place
dans
t'espace.
(2) Lorsque
Bacon dit:~erco!t<f(!h!tur
in
pluvi
()bid.
p.
330), cela
signifie:
L'air se cot)<!etM en devenant
pluie;
car,
dans sessuMimes
conceptions,
l'eau n'tait
que
de l'ait
MTOROLOGIE. 264
Les exhalaisons ne
forment jamais de pluie;
mais une infinit de vents sont
produits par-
les
vapeurs.
?
Le
vent M'M<
que
de l'air
mu;
et il
parle
avec le dernier
mpris
du
vulgaire ( PLEBEII),
qui
semble
regarder
le vent comme une
espce
particulire de
corps
subsistant
par
lui-mme,
qui,
donnant
l'impulsion
a
l'air,
le chasse de-
vant lui
(1).
paissi
ou condens
jusqu'
un certain
point. !) ajoute
~<t~
dans la
formation
des vents il <e dilate et
augmente
de vo-
<ume
(exerescit ). Ainsi
tout l'heure il nous dira
que
le vent
ft'e~<
que
l'air mis en
mouvement;
maintenant !e vent est de
l'air
dilat,
et il vient de nous dire
que
<e vent est de la va-
peur transforme.
De
plus
comme le Vfnt
n'est que
de l'air
MM
mouvement,
il s'ensuit
que
dans la
formation
des veuts
l'air se
change
en
air; e
qui
est trs-curieux.
(1) Bacon,
suivant sa
coutume,
ne
manque jamais
de don-
ner tte baisse dans le ridicule
qu'il
reproche
aux
autres.
M. Lasalle dit fort bien sur cet article J e connais un
philo-
sophe qui
radote
lui-mme,
ftt
critiquant les philosophes
qui
ta~t<<ten<.
Que ~M~e
ce litre :Du mouvement des vents ?
P
(DeMotuVentorum.Hist.Vent.
Opp.tom,Vt)i,p.309.)
Puisque le vent,
suivant
Bacon
n'est
que
de l'air
mu,
(t!fta)t< valait
intituler le
chapitre
Du mouvement de
MTOROLOG!E. 2G!<
Les vents ont trois
origines
locales
car,
ou
ils sortent de la terre comme les fontaines
($ca<MrtMM<)
ou ils sont
prcipits
d'en
haut,
ou
ilssont forms ICI dans la masse de l'air
(1).
Les
premiers
sont des vents tout
faits,
aux-
quels
il ne
manque
rien
(2).
Les seconds
sont ferms
par
les
nuages
dans
les hautes
rgions (!'M sitMMm)
mais dans ce
cas il
peut
arriver trois choses car tantt le
vent est
produit par
une nue
dj
forme
qui
se
dissipe
entirement,
toute la nue tant
change
en
vent
tantt elle se
divise,
partie
en
pluie
et
partie
en
vent
tantt enfin elle se
tMc/M?'e,
et le vent
s'chappe (par
le
trou)
tomme dans une
tempte (3).
l'air en
mouvement.
(Tom.
xide)atra(!uct.p.i56.)0u
pourrait
citer
plusieurspassages
dece
genre.
(1) HIC in
corpore aeris. ( Loc.
cit.
p. 294.)ICfest
parfait.
(2)
J am
t)e?!<t/b)'ma(t. (Hist.
Vent.
Orig.
loc. Vent. ni6.
Opp, tom. VIII, p.
206)
(3) Scinditur,
e(
ertimpit
ventus < in
pt'oc~M. (Ibid. p.
MTOROLOGIE. 3G6
Les
troisimes,
c'est--dire ceux
d'ICI,
sont
forms
par
les eaux et les
vapeurs
attnues
et rsolues. L'air
qui
en
rsulte,
tant
joint
l'air
prexistant,
ne
peut plus
tre contenu
dans le mme
espace (1); il
s'accrot
donc, il
se
rou~e,
e<
occ!<joe
des
lieux pLus
loigns
(2).
Les vents
qui sont~M
d'e~ Aat~ sont de
deux
espces
car tantt ils sont
prcipits
avant d'avoir t
changs
en
nuages
et tantt
aprs
avoir t forms
par
les
nuages
rarfis
et
dissips
(3).
291.)
Dans
l'immense collection des
non-sens,
on en trouve-
rait difficilement un autre aussi
burlesque.
(~C'est--dire,
en d'autres termes
parfaitement syno-
nymes, qu'il
ne
peut plus
~re contenu dans
l'espace qui
le
contenait.
(2) Sed ea'cfMCt(,e< volvitur,
et ulteriora
!otoccttpat.
(Ibid.
p.
298.)
Il confond constamment les deux ides d'ac-
croissement et de dilatation.
(3)
J 'ai
toujours peur qu'on
rpfuse de me croire sur ma
parole.
Il faut citer encore ie texte de ces inconcevables ab-
surdits.
~M<etttmde;'t<:tMtt<ttr (ex sublimi ) antequm for-
mentur in
nubes,
aut
poste
ea; nubibus
f<M'e/ac<M
et dissi-
palis. (Ibid.
Orig.
toc. Vent.
Opp.
tom.
vm,
p. 29t.)
M~TOBOLOGtE.
2G7
Bacon
ajoute
une rflexion bien
importante
M
Quiconque,
dit-il,
pensera
avec
quelle
faci-
lit la
vapeur
se rsout en
air,
quelle
est
l'immense
quantit
des
vapeurs
et
l'espace
~{'(?cc:fpe
MMe
se!~e
<yoMMe
d'ecm
change
en
vapeur, comprendra
aisment
qu'il
se forme
des vents
depuis
la
superficie
de la terre
jusqu'aux rgions
tes
plus
leves de
l'air
(1).
Telle est la thorie de Bacon sur
l'origine
des vents et sur les autres
points
de mto-
rologie qui s'y rapportent,
thorie dont l'un
de ses
plus grands
admirateurs
a
parl
en ter-
mes
magnifiques.
Bacon, dit-il,
remarquait dj ~!<e
~e~
(1)
Observez
qu'il
confond ici l'eau et la
vapeur;
il
argu-
mente de
l'expansibilit de
l'eau
change
en
vapeur pour
ta-
blir.
J 'expansibilit
de la
vapeur change
en air. Ailleurs il
nous dit
que
la dilatation d'une
goutte
d'eau
change
en air
remporte
de
tMMfoup
~ur ~<! dt7a<<t~'o?t ~e <'<t'r
d<!)ot /brme. l'emporte de beaucoup sur
la dilatation de l'air
dj form.
(Ibid.
Confac, ad
ventos.) Aprs
avoir confondu l'eau et la
vapeur,
il confondencorel'air
etlavapeur.
D'ailleurs, qu'est-
ce
que
la dilatation de !'<t:t'
dj form?
0 n'a
pas
une ide
ftaire.
MtTOROLOG!E.
B68
/'e.s<autre c~oM
que
~a~ lui-mme
lorsqu'il
est en mouvement. Tt: fut le
premier
prin-
mme
temps
assez
varie,
de la formation
des vents
que
la transformation en air des
sont les serviteurs et les suivants de
l'air,
comme Eole le dieu
des
vents,
selon la
Fable, l'tait de J unon
qui reprsente l'air.
(Hist.
Vent.
pi-sef. Opp.
tom.
vin, p. 271.)
(1) A"tos
!cTM
~po; p:c~c<
xai
x'
( Hippocr.
de Flatibus.
cap.
v. tom. i.
Opp. in-8,
dit.
Van-der-Linden,
p. 404. )
Si ventus est
fluens
aer et
flumen
est
/!uem a~ua.
(Sen. iiat.
Quaest. ni, 12.)
Tout ce
que
dit Bacon sur la belle
analogie
des
eaux .et
de l'air est traduit de
Snque
dans son
prcieux
ouvrage
des
Questions
Ka<M'eHM.
(2) Presque toujours
sans le
citer,
et
presque
toujours
MTOBOLOGIE. 270
vapeurs qui
s'lvent constamment de
la
terre dans
l'atmosphre,
et la
dcomposi-
tion d'une
partie
de l'air comme
produi-
sant les
nuages
et la
pluie
et c'est
l
continue le mme
auteur,
la
gnralisa-
tion la
plus profonde qui
ait t faite des
ce phnomnes
ariens
(1).
n
Mais
Snque
a dit en
propres
termes
que
la
terre,
par
une
grande
et continuelle
ce vaporation, poussant
dans
l'atmosphre
n diffrents
principes
dont elle s'tait
charge.,
cette
vapeur
mixte est transforme en
air,
et devient du vent.
par
une
dcomposi-
tion
Imptueuse, qui produit
la rarfaction
K en vertu de
laquelle
la
vapeur
transforme
ce s'efforce
d'occuper
un
plus grand espace.
3
Il
ajoute
et
que
les
nuages dcomposs
for-
c
ment du vent
(2).
encore en le
gtant.
Nous en verrons des
preuves
remar-
quables.
(1) Ibid..p.20.
(2) ()Mt<m
magna
et co<t<M)Mo M?tmo
evaporatio
in (t!(MM
MTOROLOGI. 271
La
~'o/b~de ~eneraKsa~on apparient
donc
Snque,
et l'audace de
Bacon,
qui
letrans-
cr it
presque
mot mot sans le
citer,
rend un
peu
risible
il faut
l'avouer,
l'enthousiasme
qui veut
toute force nous donner levicomte
de ~n~att
pour
le
pre
de la
physique
moderne.
Mais voici encore une observation
M~'eMre
dont le savant
physicien que je
cite cde de
mme tout l'honneur Bacon. C'est la
for-
mation de la
pluie qui procde
du retour de
l'air d'abord en
vapeurs
et en
nuages, puis
en
eau
(1).
Hlas c'est encore
Snque,
et
Snque
agit quo merserat,
ttHMU<attO
ipsa
~a!t< mixti in Mt)<unt
Mf(!<Mr. Bfc his
(ecspo)'at!0)tt6M~) ~rat)t<a<<'m
aeris
firi,
deinde solvi
impetu, ~m ~ua!
densa
sicteraiti,
ut est oe-
cesse,
exlenuala nituntur nt
ampliorem
locum. Faot
ergo
Mtttttm resolula nubes.
( Seu.
Qusest.
nat., v, 4, 5,
13. )
On doit observer la
supriorit
de
Snque
du ct de la
prcision
et de la
justesse
de
l'expression.
Partout on sent
un homme
qui
dit ce
qu'il sait
et
qui
sait ce
qu'il
dit.
(i)
Prcis J eta
philosophie
de
Bacon,
etc. Loc. cit.
METOMLOGtB. 272
mot mot. Les
nuages,
dit-il,
ne sont point de
l'eau,
!M6CM~ ma!~e?~ d'une eau
/M<Mre.
et
la
pluie
n'est
que la vapeur
oue
nuage chang
en eau
(1).
Lors donc
que,
dans un autre
ouvrage,
ce
chaud
partisan
du
philosophe
anglais
nous
dira
que
ces
~aK(~
r&SM~a~,
auxquels
Bacon
fut
conduit
par
sa mthode
(2),
sont un
objet
~'a:M~a<!OM et d'tonnement
(3),
nous
pren-
drons la libert de nous tonner
beaucoup
de
son tonnement et d'admirer
trs-peu
son
admiration.
Le
dogme
de la transmutation
rciproque
de ce
qu'on appelait jadis
les
quatre
lments
appartient
la
plus
haute
antiquit. Pythagore
(<)~am!t0n /ta~M<6M,M<f ma(<r!'am/M<ur<Ba~u<B.
Non est
quM
cam exislimes (ne
coDigi ,'M~
effundi simul
et
/:<
el cadit
pluvia. ( Seo., ibid., 1, 5
II, 2G. )
L'expres-
sion est ici aussi
juste que
la
pense..
(2)
J amais Bacon n'eut de
mthode,
et
jamais
mthode
logique
ne fit rien dcouvrir.
(3)
Introduction la nouvelle
Physique
terrestre, par
M. de
Luc, <803;
2 vol.
in-8*,
tom.
i,seconde part. p.
54.
MTOBOI.OGtE. 273
l'enseignait (1),
et les stociens
l'adoptrent
coutons encore
Snque
terre
produit
de l'air et
de
l'eau. Les
nuages
sont humides et
dj
mme
aqueux.
L'air
paissi
n'est
point
encore de
l'eau,
mais il
tourne feetM. Gardez-vous de
re~M'~er
comme
prexistante
et tenue en rserve fea!t
que
ue~e~~ les
nuages
le mme moment la
voit natre et <oN!6e?'.
La terre contient de
cc
l'eau;
elle s'en
dcharge
elle contient de
l'air
le
froid
tnbreux
des hivers le con-
dense
et en fait de l'eau. La nue dcom-
pose produit
du vent
(3).
(<)
:reM<o<<Mtn<tMnM
Aeraque
humor abit,
etc.
Inde re<r6
redeunt, idemque
fe<ea;t'<r ordo.
( Ovid. Met. xv, 245 sqq.)
!t
n'y
a rien de si intressant
que
cette
exposition
du
sys-
tme
pythagoricien
faite dans le
quinzime
livre des Mta-
morphoses par le
docte et
lgant
Ovide.
w
(2) FtMn<omtt!<te.Bom'tt6t:M<<daer, e-- aere aqua.
omnia in o!nnt<)m ~un< <raMt< aef in humorem. et
ara
TOME.
l8
MTEOROLOCtE. ~74 y
Aprs
cela,
je
ne vois
pas
ce
que
Bacon
nous
apprend
de
nouveau,
en nous disant
que
les
uctpeMt~
et les e.cAc~cM.so~s se co?uer~o~<
CMair. 11 faut en dire autant du
changement
contraire de l'air en eau. M.
Lasalle,
en tra-
duisant un texte de Bacon sur ce
point,
nous
dit dans une note 0;
voit quela possibilit
de la
COHUM'MOM'del'air en eau est ici
a~rMee ~o~t-
et
aquam /aet'<
terra 2Vu&M.
ht<mM<B,
tm& udfB. aer
spissus
ad
gignendam aquam pr<BparatM~
oondum in t~am
mutatus,
sed jam
pronus
et
vergens.
Non est
qud
eam exis-
Hmes tune
coUigi,
sed effundi. simul et fit et cadit.Na-
bel terra
humorem,
haMC
exprimit; habet
aera
Aune Mm6r<t
hiberni
frigoris (frigus opacum) aenM<e</a<'t<
humorem.
Fac!<t)e))<Mm<-Mo!tt<attMbM.(Sen., Qust.
nat.,
ni,4;n,
25,2G;v,l2.)
A ce
Snque, qui exprime
la
pesanteur
absolue et relative
de l'eau avec une
justesse
et une
prcision admirables,
com-
parez
Bacon
qui, quatorze
sicle
aprs Sneque, ayant
le li-
vre des
QtfM~nM
Tm(!(re!7M sous les
yeux
et le
copiant
mot
mot,
nous dit doctement
que
la
pluie
la
neige
et la
grle
enfin
<f<'m~MMtt<
Mt~pendite~
e< toutes
formes
dans les hau-
<cM~ de
<'a<mosp'rc. parce que
la
pessuteur
ne s'tend
pointjusque-i. (Inf., p. 281.)
Prcdemment il avait dit
que
ta
grle (ainsi
que-la terre)
tait
supporte par
l'air.
(Sup.,
p. 197. )
On
peut
choisir entre ces deux
explications.
MIOMt-OGiE. 275
tivement et
directement
(1).
Belle
dcouverte,
vraiment! c'est la doctrine banale de toute
l'antiquit.
Snque
disait tout
l'heure:
?nMj~ aer in /<M!MO)'eH,
c'est donc lui
qu'il
faudrait
admirer,
et non son
copiste
mca-
nique.
Le
prjug
le
plus
violent et le
plus
aveugle
n'a
pu cependant
louer
Bacon
considr
comme
physicien, que
sur la
mtorologie,
cause de
quelques phnomnes susceptibles
d'explications
un
peu vagues
et
qui prtent
la
lettre
suivant
l'expression vulgaire.
On lui
fait
dire,
par exemple, que
les
nuages
et la
p~M!e
sont
produits par
la
dcomposition
de
/'a~
(2).
Or,
je
ne balance
pas
un moment
(1)
Histoire des
Vents,
tom. xi de la
trad., p. 144,
note i.
Le traducteur observe avec
justesse
dans une autre note
que
la conversion de l'cau en air une
(ois
admise
suppose
comme ne
cotMf~ttMce~CMMtre
laconversion
rciproque
de
l'air en eau. (Hist, de la Vie
et de
la Mort,
tom. x de
latrad.,
p. 182, note 1. )
(2) Snp., p.
271.-On M fait dire aussi
que
l'air atmos-
phrique
et l'eau sont une mme substance
dt~remmettt
mo-
difie. (Int., etc, loc.cit., page 58.)
J amais
it n'y
a
pens.
~8.
MTOBOMG'E. 2~6
d'affirmer
que
les mots
d'hypostase
et de
circumincession sont moins
trangers
l'in-
telligence
d'un
villageois que
celui de dcom-
position, pris
dans son
acception chimique
ne l'tait celle de Bacon. J amais il
n'imagina
rien de
semblable
il
croyait
tout
simplement
que
l'air devenait eau en
s'paississant.
Il n'en
savait
pas d'avantage (~),
et lui-mme va nous
le dclarer de la manire la
plus expresse
Les
vents,
dit-il,
sont condenss
(ou
plutt comprims)
en
pluie
de
plusieurs
manires:
d'abord,
par
le
poids
des
vapeurs,
M. de Luc a t
tromp par
le mot consubslantialia
qu'il
avait lu dans i'BMMre de la Vie et de la Mort.
(Can.
xvn.
Opp.
tom.
vin,
p.
439.)
Ce mot
n'exprime que
la
simple
affinit
et c'est fort
propos que
dans la table des matires,
an mot
AER,
l'diteur a
crit,
en
renvoyant
cette
page
439: Aer et
a~M
corpora
vald
homogenea.
On
peut
sans
doute s'en
rapporter
Bacon lui-mme, qui
a dit ailleurs
Oleum est
homognem /!amm<B,
( aer est
homogeneum
ogu<c.
(Hist.
Vit. et
Ne.,
can. xxxn.
Opp.
tom.
vin, p.
ult.
( Di-
ra-t-on sur ce texte
que,
suivant lui,
l'huile et la
/!amme
sont une mme substance
diffremment
mod~ee?
(1)
Et cela mme il le devait
Snque,
comme
nous ve-
nons de le voir.
MMONOLOGtB.
277
lorsqu'elles
sont abondantes au
point
de
<t
surcharger
les
vents;
en second
lieu,
par
l'action des
vents contraires; troisimement,
par
l'obstacle des
montagnes
et des
promon-
toirs
qui,
se trouvant sur la route de
ces
vents,
les arrtent et les <oMrKeM<insensible-
ment sur
eux-mmes; enfin
par
les froids
aigus qui
condensent les vents
(1).
H
(1)
Bacon
croyait
donc
que
les
vapeurs chargeaient
les
vents comme le
cavalier charge
son
cheval que
t'air dans
son tat de libert
peut
tre
comprim par
un autre
fluide,
et
que
cette
pression peut oprer
dans
l'espace
libre ce
que
les plus
violentes
compressions mcaniques
ne
peuvent
ex-
cuter sous nos
yeux
dans un
espace
resserr et rsistant.
Enfin,
aprs
nous avoir dit
que
les
vapeurs
se
changent
en
pluie,
il nous
enseigne
ici
que
les
vapeurs ogtsMttt coMme
simple poids mcanique, changent
les vents en
pluie.
Il
prend
de
plus
constamment le vent
pour
l'air,
et l'on ne sait com-
ment se tirer de ses
expressions
aussi fausses
que
ses
ides,
M. Lasalle a
pris
le
parti
de refaire le morceau en entier
pour
le rendre
peu prs supportable.
H a fait
disparatre
)e
pat~attnt
ttt'M
vertunt
mots
qui signifient positivement
dans le sens
grammatical que
les vents sont insensiblement
changs en montagnes
e(
en promontoires.
I)
supprime
encore
absolument l'article du froid
qui condense
l'air
en pluie,
comme si cette absurdit avait
quelque
chose de
ph)s
rvo)-
tant
que
toutes les autres.
( Fpy.
la trad. t.
xi, p.
143-1~4.)
MTOROLOGIE. 278
Bacon nous a dit
expressment,
ainsi
on
peut
l'en
croire,
qu'il
ne
voyait
dans la
nature,
quant
aux
vaporisations
et
condensations
rien de
plus que
ce
qui
se
passe
dans un alam-
bic.
Le
liquide,
dit-il,
s'lve en
vapeurs
arrives une certaine
hauteur,
elles sont
abandonnes
par
le
feu
opration qui
est
ce
acclre encore
par l'application
de l'eau
cc
froide l'extrieur. Alors elles s'attachent
aux
parois
de
l'alambic,
et se rtablissent
dans leur
premier
tat de
liquide.
C'est une
ce
image
tout.
fait simple
des rodes et de la
pluie
(1).
H
Qu'y
a-t-il donc dans cette
explication qu'on
ne trouve
partout,
et
qui
s'lve un
peu
au-
dessus de la
croyance vulgaire ?
Ce
qu'i! y
a
de
remarquable,
c'est
que
cette
pense
tri-
viale de la conversion immdiate des
vapeurs
en
pluie par
la
rfrigration
est,
si
je
ne me
trompe,
le
premier prjug que
M. de Luc a
trouv sur son chemin et
qu'il
a d
renverser
(1)
N:.:FeM<. toc. cit. n*
4
p.
49 du texte.
METOMLCOE. 379'
en
commenant
ses admirables travaux m-
torologiques.
Bacon,
q!
nous a si bien
expliqu pour-
quoi il pleut,
n'est
pas
moins admirable lors-
qu'il
nous
explique pourquoi
il ne
pleut pas
II ne
pleut pas
en
Egypte,
dit-il,
parce que
l'air de ce
pays,
tant rare et
sec,
est altr
de sa nature
(1),
et boit la
vapeur
avec tant
d'avidit
qu'elle
ne
peut plus
subsister sous
la forme de
vapeur
sensible,
ni
se ramasser
en
gouttes pour
former de la
pluie (2).
Cette
explication
est d'autant
plus prcieuse
qu'elle
fournit une thorie
gnrale.
Tant
<~<e
f(K~o~, MOM~'OMMMMS
du beau
temps;
si,
par
une suite de son
avidit, il
est
oblig d'f~a~cAer
sa
boisson
il
pleut.-
C'est videmment tout
ce
qu'on peut
savoir sur
~~t/e
et /e
beau
temps.
(1)
Pourquoi
le traducteur dit-il une torfe de
M~P
Bacon:
a dit
purement
et
simp)ement<htf~t<i(
il faut le traduire.
(2) Sylva Sylv.
cent.
vm,
no ':6T. T. ix de la
trad. p.
9R.
Opp,
tom.
i,
p.
512.
MTOROLOGIE. 280
Les
nuages jouant
un si
grand
rle dans la
mtorologie, il est bon
de savoir ce
qu'ils
sont
et
comment ils se
forment. Bacon sur ce
point
ne laisse rien dsirer Ce
sont dit-il,
des
condensations
inaparfaites
(1)
mles d'une
partie
de
vapeur aqueuse
et de
beaucoup
plus
d'air. Elles se forment en hiver dans le
moment
o l'on
passe
du
gel
au
dgel,
ou
rciproquement,
dans l't et le
printemps
(il
ne dit rien de
l'automne)
les
nuages
ne
sont
qu'MMe expansion
de la rose
(2). x*
Voil
cependant
ce
qui
est
crit
il
n'y
a
(1)
Des
vapeurs
sont une
condensation! CoM non delta
in
prosa
mai tt~in rima.
(2) B~<. Peut.
tbid.,
n 18. J e citerai encore ce
passage
de Bacon:
Lorsque
les
tjapeMM nepeuvent
ni se runir com-
modment
en pluie ni s'parpiller
en
air pur,
elles
produisent
des
gonflements
dans la masse de
l'air,
et c'est une cause
principale
des vents.
(Hist.
Densi et Rari.
Opp.
tom;
ix,
p. 23. ) Aprs
cela
son habile
pangyriste
mme devrait
tre converti et convenir de bohne foi
que
non-seulement
Bacon u'a
pas
souponn
la thorie
qu'on
lui
prte,
mais
qu'il
a dit
prcisment
le
contraire, suppos cependant qu'il
ait
r))ement dit
quelque chose,
ce
qui
est
fort douteux
pour
moi.
MTOEOLOGJ E. 28 <
pas moyen
de l'effacer. J e ne sais nanmoins
si on ne trouvera
point
Bacon encore
plus
amusant,
lorsqu'il
nous dit
qu'il
arrive
r<Kr,
lorsqu'il
se
change
en
eau
prec:eH!eM~
ce
qui
arrive ccMlait
qui
se caille de manire
~M'u?!e
goutte de pluie
M'e~
qu'un
caillot d'air
(1).
J usqu' prsent
nous n'avons
parl que
de
la
pluie;
maintenant Bacon va nous
enseigner
comment la
neige
et la
grle appartiennent
la mme
thorie,
et comment tout
s'explique
par
le mouvement de
fuite
et
d'antipristase (2).
Il
met,
pour
ainsi
dire,
sous nos
yeux
le mca-
nisme de cette formation.
Le froid du
ciel,
chass
par
les
rayons
di-
rects du
soleil,
rencontre le froid de la terre
chass
par
les
rayons
rnchis.
On peut ju-
ger
du froid
qui
rsulte d'une telle rencon-
tre
qui n'opre pas
moins
qu'une
concentra-
(<)
Aeris
coagulum
et
reeeptus
( Parm.
Teles. et Democr.
Phitos.
Opp.
tom.
ix,
p. 32?.) ~eMptt,
M
prendre.
GatH-
cisme.
?)
Ht'<(. DeH~t et Rari.
tbid.,
tom.
!X,
p.
54-55.
M&TOBOLOGYE. 282
<( tion de la MC[<Mre
froide
(l'enfer
y glerait).
Il
s'y
fait donc de
grandes
condensations.
Les caillots de
pluie,
de
grle
etc.
demeu-
rent
suspendus
dans l'air dont ils sont for-
mes
( pensiles)
et sans
pouvoir
tomber,
vu
M
que
dans la
moyenne rgion,
o ils ont
pris
naissance,
les
corps
ne
psent plus.
Mais si
<-<
par quelque
force
(que
le docte chancelier
c<
ne fait
pas
connatre)
ils viennent tre
~M jusque dans
la
rgion
de la
pesanteur,
qu'
nous
(1).
H
())
Ubi
colligit se et
unit
(autre
gallicisme)
Ma<f(tfrt-
ptdt.
hfBren<
in regionibus
aeris,
et inde
magis dejiciuntur
guftM
descendunt,
attte~uam
t<fr<B vicinitatem
persetitis-
cant.
Ilaque optim
notavit
Gilbertiis
corpora gravia post
longam
ford distantiam motum verss
M/ert'ora paulatim
exuere
etc.
(Descript.
Globi intell.
Opp.
tom.
ix, p. 235. )
On voit ici comment un
esprit
droit use d'une
vrit
et
comment un
esprit
faux en abuse. Gilbert disait
que
la
force
magntique ou
attracliarmaire
(les
mots
n'importent pas)
diminue mesure
que
le
corps
attir
s'loigne
du
corps
atti-
raMt,
et il disait une
grande
vrit dont il ne
s'agissait plus
que
de trouver la loi.
Bacon~
qui croyait
navement tre de
l'avis de ce trs-habile
homme,
dit
que
la
gr~e
toute
forme
MTOROLOGtB. 283
Plein de ces
grandes
ides,
et considrant
combien il serait utile
quel'art pt changer l'air
en eau
(dans
les
incendies,
par exemple),
Ba-
con
proposait aux
savants de
rechercher par des
oprations
dcisives
si cette transsudation
que
nous
apercevons
en certains
temps
sur la sur-
face des
corps
durs et
polis
n'est
purement
et
simplement <~M'MMe
condensation
de l'air re-
pouss par
les
~M'/aees,
ou si
elle participe jus-
qu'
!W certain
point
du suc ou de
fcspn<
~fc
~eMr des
pierres (1).
Enfin son
gnie, prenant
un de ces
lans phi-
losophiques
dont il a fait un
livre,
propose
de
rechercher si l'on ne
poM)'m~ point
h'oMuet'
dans
quelque vgtal
un froid
potentiel
capable
de coM~CM~er l'air en eau
(2).
Aprs
avoir lu ce honteux ramas d'extrava-
demeure
~pendue
dans la
t'~tOH moyenne
de
l'atmosphre,
parce ~M'Acefte
hauteur les
corps ne psent plus;
et il dit
une sottise.
(t)
An
participent
?)onMth~ e.r succo et
pneumatico
<n(nK-
teco
lapidis. ~Hist.
Densi et
Rari
I. c.
p.
50.)
(2)
Digna resco~ttt'fM esset
utrm invenialur in
MoetaM~'
MIOBOLOGIB.
28t
gances,
il faut relire dans les deux
ouvrages
cits
que
les rsultats
auxquels
Bacon
parvint
par
sa mthode sont un
objet
(fe<oMMe~eM~et
<fa~tM!m~oM~
que
c'est la
gnralisation la
plus pro fonde qui
ait t
faite
des
phnomnes
ariens
et
qu'elle
M'a
reu
aucun,
changement
par le progrs
des coMMOMsaMces
RELLES
(1).
Certes,
il
n'y
a
pas
de
sermon
plus
terrible
sur le
danger
des
prjugs
et sur
l'empire
exerc
par
les idoles de
caue~e,
empire
dont
les
aliquo potentiale frigus quod
denset aerem in
a~oM ilaque
fM<jjfent inquiratur. ( Ibid.,
p.
50. )
Bacon
conjecturait de plus que,
suivant les
apparences,
le
froid potence!
devait se trouver
dans la famille des Ro*
seaux
articuls, cannas
genicutatas. (Ibid.)
J e le crois comme
lui;
du moins
je
ne connais aucune
plante qui
ait
plus
de
raisons en sa
faveur.
(t)
Cette
pithte
infiniment
remarquable
et dont il sera
de nouveau
question plus bas,
suppose
manifestement
qu'il.
y
a des
connaissances
qui
ne sont
pas
relles
(
il et t
bien
sage
de les
nommer) ou
pour
mieux
dire, que les
connais-
sances
physiques
seules sont relles. Toute la
philosophie
de
Bacon est dans ce mot.
Voy.
le Prcis de la
Philosophie
de
Bacon,
tom.
n,
p.
20,
et )'/tttro<htc<ton la
Physique
mo'
derne,
tom.
t, p. t54.)
MTOMLOGtE, 285
meilleurs
esprits
mme ne savent
pas toujours
s'affranchir.
Quant
ceux
qui
n'ont
point
de
systme
soutenir,
aprs
avoir souri un instant
sur la destine des livres et des
rputations
ils laisseront l'admiration au savant auteur de
l'Introduction,
ne rservant
pour
eux
que
l'-
tonnement,
qu'on
ne saurait
en effet refuser
quitablement
tout ce
qu'on
vient de lire.
BUTCXSAt.
290
CHAPITRE XII.
BUT GHNRAL DE LA PHILOSOPHIE DE BACON.
Pour terminer le tableau de cette
philoso-
phie
il faut montrer
qu'elle
est encore
plus
folle,
s'il est
possible,
dans son but
que
dans
ses
moyens;
car elle se
dirige
tout entire vers
les chimres de l'alchimie et vers d'autres en-
core non moins
extravagantes.
Bacon avait
l'esprit
minemment
faux
et
d'un
genre
de fausset
qui peut-tre
n'a
ja-
mais
appartenu
qu'
lui. Son
orgueil
le trom-
pait
continuellement de deux manires. L'en-
DE !.i
PiULOSOPtiIB DE BACON. 287
vie
qui
le
possdait
d'ouvrir de nouvelles rou-
tes,
et le
dpit secret.que
lui
inspirait
son
incapacit absolue, essentielle,
radicale dans
toutes les branches des sciences
naturelles,
l'avaient
port
insensiblement
ddaigner,
rabaisser,
insulter mme tout ce
qu'il igno-
rait
et
pour
se consoler
pleinement
il
substi-
tuait aux
ralits,
qui
n'taient
pas
sa
porte,
des chimres
qui
lui
appartenaient
bien
lgi-
timement,
puisqu'il
ne les tenait
que
de lui-
mme. Ce double caractre domine dans tou-
tes les OEuvres de
Bacon,
au
point qu'elles
ne
prsentent
peut-tre pas
une
page
o il ne se
montre d'une manire
frappante.
Ainsi il
voulait tout dtruire dans
l'empire
des sciences et tout refaire sa
guise (1).
tl
(t)
On a
beaucoup rpt
le
reproche qu'i)
fait Aristote
de ressembler aux
princes Ottomans
qui ~or~eK<
<eur<
frres
pour rgner seuls p<M!Memctt<.(Nov. Org. )ib.t,
LXvtt.)Sous
ces formes
potiques
Bacon cache
presque
tou-
jours
des ides fausses. La
comparaison
ne tombe
point
en
particutier
sur
Aristote,
mais sur les
philosophes
en
gn-
ral
qui
sont tous
O~omoM;
mais sans insister sur cette v-
rit, j'observe
seulement la
singulire
maladie de Bacon
BUTGN&HAt 288
chassait la
thologie
des
acadmies,
et la re-
poussait
dans
l'glise.
Absolument
tranger
la
mtaphysique,
il la
supprimait
de sa
pleine
puissance
et autorit
philosophique pour
don-
ner ce nom la recAcrcAe des
formes (1),
dont
il avait fait dans son
plan
la
premire partie
de sa
philosophie
naturelle
de manire
que
la science du monde intellectuel devenait dans
son
systme
la
premire
branche de la science
des
corps,
ce
qui
est tout fait curieux. L'as-
tronomie lui
dplaisait presque
autant
que
la
thologie;
il voulait une astronomie
vive,
au
d'insulter constamment
dans les autres ses dfauts et ses ri-
dicules
propres.
C'estlui
qui
aurait t le vritable 0otnaM;
c'est lui
qui
aurait
tout
gorg,
si l'on et eu la
complaisance
d'obir un
eunuque
noir
qui
voulait
rgner
la
place
des
princes
du
sang.
N'a-t-i)
pas reproch
ce mme Aristote
d'avoir amen de nouveaux termes dans
l'empire
des sciences
( de-Augm.
Scient,
m, 4,
tom.
vn, p.
176)
de montrer
constamment l'ambition de contredire?
etc. (!bid.,
p. n6.)
tandis
que
lui Bacon
porte
ces mmes ridicules l'excs?
(1)
Inquisitio /brmc[rMm ~tB
sunt ratione cer<a et su
lege
<B<ent(Be(
immobiles
constituit
Metaphysicam.
(Nov. Org.
Ibid. x, p. 83.)
DE LA PH!LOSOPntE DE BACON. 289
lieu de la
ntre,
qui
est morte
(1). L'optique,
la
mdecine,
la
chimie,
toutes les sciences en
un mot taient soumises sa
critique
tran-
chante,
et sans cesse rabaisses
par
ses ter-
nels desiderata
(2).
Comme il n'aimait
que
ses
propres
Ides,
les
plus
nobles,
les
plus
utiles
inventions,
celles mme
qui
taient le
plus
vi-
demment faites
pour
consoler l'humanit et
pour
tendre
l'empire
des
sciences
ne
pou-
vaient avoir l'honneur d'obtenir son
approba-
tion. Le vice inn de son
esprit
s'lve sur ce
pointjusqu'au
dlire,
jusou'
la manie. Il loue
assez
lgrement
le
tlescope, qui
venait d'tre
invent de son
temps;
dans les
rgles,
il devait
le
briser,
puisque
toute
decoMt~e~Mt K~~<M
le rsultat d'une
e~eneMM
crite ne doit
pas
tre
reue (3)
il se contente
cependant
de dire
(1)
Astronomia VIVA.
(Nov. Org.
lib. il!.
Opp.
tom.
vu,
ad
calc. )
(2)
7. leliv.
m, chap.
vi de
l'Augm.
Scient.
p.
204 ou il
reproche
entre autres aux
mathmatiques
de n'avoir rien
trouv d'un
peu remarquable depuis l'poque
d'Euclide. (!)
est
habile )
(3)
F.
ci-devant, p.
78.
TOME 1.
19
BUT GXEttAL MO
que
si tout ce
~M'o?~
assure Ctuo!)'
dcouvert
l'aide de cet MM~rMmeM<tait
uren,
on 6tM?'a<
bien dcouvert d'autres choses
depuis (1). Quant
au
microscope,
il le
mprise
bien
davantage,
et,
toujours
en vertu de ce caractre
ternel,
de ce dlire
orgueilleux qui
l'entraine invaria-
blement
dprimer
ce
~Mt
est
pour
exalter ce
qui devait
tre
(suivant
lui)
rejeter
les riches-
ses relles de l'homme
pour
en convoiter d'ima-
ginaires.
Le
microscope
donc a de mme
trs-peu
l'honneur de lui
plaire. Pourquoi?
ParM
gM'~
ne
fait point
voir les
atomes
et
parce
<~M'~
ne
fait point
voir la
fois
de
larges ~M?'/a-
ces
agrandies;
de manire
qu'avec
le micro-
scope
il est
impossible
de
voir,
par exemple
une serviette entire
et tout la
fois,
comme
on verrait
l'il nu les filets d'un
jeu
de
paume.
(i)
Omnia cert inventa
( ~<Bc)
Mo6tH<t
(tout
ce
qu'on
avait
dcouvert
par
le
moyen
du
tlescope )
nobis
Mpee<<t sunt
~xd
in
istis paucis <t<<<!<ur
experimentum neque
alia com-
ptut'a investigari <B~ue digna
edctem f<t<tone inventa sint.
( Nov.
Org.
xxix.
Opp.
tom.
vut,
p.
153. )5
Ce
passage
et mille autres me
paraissent appartenir
une
folie au moins commence.
DE LA PHILOSOPHIE DE BCOtt. 29<
A cause de ces
deux
dfauts rvoltants Bacon
dclare le
microscope
INCOMPTENT
(1)
il ne
pardonne pas
mme aux humbles besi-
cles
(ou lunettes vulgaires)
et sa raison
pour
les
rejeter
est
premptoire
Elles ne ser-
ft
vent,
dit-il
qu'
remdier la faiblesse de
plus.
(Ibid.
tom. vi de la trad.
p.
4,
note
2, )
Mais ce
jugementde
Bacon n'est
point
une erreur
isole
ou acciden-
te))e;e)]edcoa)ede
son caractre et de l'tat habituel d.e
son
esprit.
S'il et assist la dcouverte du
quinquina,
il au
19.
BUTGTNrHAL 292
Il
reproche
l'arithmtique vulgaire
de
manquer
de formules
expditives,
surtout
pour les progressions; qui
sont d'un
grand
usage
dans les
sc!eMce~pAy~Mes(~.
Et
quant
cette
ar~A/Me~Me pythagoricienne
et
myst-
t'M!Me<7M'OM
vient de mettre la mode
( c'est
l'algbre qu'il
veut
dire)
ceM'Mt
qu'une
ABER-
RATION DE LA THORIE
(2).
Ce
jugement
est
prcieux.
Bacon
reproche
l'arithmtique
de n'tre
pas l'algbre,
et
l'algbre
de n'tre
pas l'arithmtique.
Misra-
ble tte combien elle tait inaccessible toute
ide abstraite et
lgitime
Bacon avait
grande-
ment raison de vouloir anantir la
mtaphysi-
rait dit
a
A
quoi
sert cette corce ?
gurir
la
fivre,
et
rien
dep~M<;
D
et il l'aurait dclare INCOMPTENTE, parce
qu'elle n'apprenait point
la
forme
de la fivre.
(1)
In ~ft</tM:C<t'CMnec salis t)(tt'M commoda inventa
sunt
~Mpptt<a<tOKMmcompendia, pr<Bso'<tm
circa
progres-
siones
quarum
in
physicis
usus est non medtocfM.
( DeAug.
Scient.
ni,
6.
Opp.
tom.
vn,
p.
204. )
(2j
EXSPATIATIO SPECULATIONIS.
(De Augm.
Scient.
cit. foc.
p. 204.)
DE LA PJ IfLOSOPmE DE BACON. 293-
que
en lui donnant un but
fantastique;
il vou-
lait
touffer
sa
plus grande
ennemie.
L'espce
d'instinct invincible
qui
l'entrai-
nait dans toutes les routes fausses ne saurait
donc tonner
personne
c'est le mme instinct
qui
l'cartait de toutes les routes vraies.
Il a
pris
la
peine
lui-mme de nous dire ce
qu'il
attendait des sciences naturelles. Sous le
titre
burlesque
de
tKaym~ce~ce
de la nature
~OM?' ftMa~e
de l'homme il a runi les diffrents.
objets
de recherches
que
devait se
proposer.
tout
sage physicien,
et ce
quil
devait tenter
pour ftMc~e
de~Ao~me. Voici
quelques
chan-~
tiHons
de ces
petits
essais
(1).
(<)~<!gtta!MKa<w<eQUOAD
USUS HUMANOS.
Quand
je
n'aurais
appris
le latin
que pour
sentir la force et la sa-
gesse
de ce
QUOAD, je
ne
pourrais regretter
ma
peine.
J e cite
l'original
de cea
ma~ni~eencM,
seulement
pour
la
prati~Me.
The
pro)ongation
of lite the restitution of
youth
in some
degree
the retardation of
age
the
curing
of diseases co-
unted incurable the
mitigation
of
pain
more
easy
and less
loathsome
purgings
the
increasing
of
ability
for suuer tor-
ture or
pain
the
alterings
of
complexions
and fatness an~
BUTGC.\EAL 234
Faire vivre un
AoMMMetrois ox
~Mo~'e
&!c-
cles
?'ottMe?terMMoc~ena:'?'e
l'ge degMaro[M<e
CM
cinquante
ans;
~enre qu'un
homme M'at~
que
vingt
ans
~c?~c[)!<
soixante
a/M;
otter/r l'apo-
plexie, lagoutte, la paralysie,
en
MM?HO/,
toutes
les maladies
rputes
mc~raMe~jT
M~e?t~ des
~M)'MM qui
a!'eM<le
~o!t<
de la
pche
et de
leanness the
altering of
statures the
altering
of features
th
increasing
and
exalting
of intellectual
parts
versions
ofbadies into other bodies
making
of new
species
trans-
planting
of one
species
into another instruments of des-
truction,
of war and
poison
force of the
imagination
either upon
another
body, or upon the body
itself accele-
ration of time in maturation aceeteratiM
of time in clari-
iieations acceleration of
putrfaction :acclration of ger-
inination
turning
crude and
watry
substances into
oi)y
and unetuous substances
drawing
of new foods out of
substances not now in use
making
new thceads for
ap-
parels
natural divinations
greater pleasures
of the
senses
( Ah
monsieur le
chancelier
quoi pensez-vous ? )
artificial minerals and cements.
(A/aynaHS
Mfttr<B la tte de
)'ouvrage
intitul
Sylva
sylvarttm,
ou Histoire naturelle.
Opp.
tom~
i,
p. 237, partie
anglaise. )
J e ne trouve
point
ce
morceau dans la traduction
de M. Lasalle. I! lui a
paru
sans
doute
passer
toutes les bor-
nesdu
ridicule. Ces sortes de
suppressions
sont un service
qu'il
rend de
temps
en
temps
son
auteur,
et hii-meme nous
e'n avertit franchement.
DELAPH!t.SOPHHtDBB~CO~. 235
ftMOMas;
rendre un homme
capable
de
porter
une
pice
de
trente-six; faire qu'on puisse le
tenailler ou lui briser les os sans
qu'il
en
perde
contenance;
engraisser
un homme
maigre
amaigrir
un. /M~me
gras
ou
changer
ses
traits;
changer
un
gant
en
nain,
e<un nain en
<;eetM<
OM
ce reutCM~au
m~e
un sot ey!
un homme
d'esprit; c/MMoer
de la &OMeen cou-
lis
de glinottes,
et un
crapaK~CM rossignol;
crer de nouvelles
espces
d'aMMMCtM.c;
trans-
planter
celle des
loups
dans celle des mou-
tons (1),
inventer de nouveaux ms~nt~eM~s de
mor~ et de
yOMuec[Ma!pOMOMS( toujours
QUOAD
MSMSAumaMos~ transporter
son
co?*ps
oit celui
d'MMautre
par
la seule
~brce
de
l'imagination;
tMMnr des
nfles
en
vingt-quatre
heures;
tirer
d'une CMue
eM/erMteM<a<!o?t
~M
u~Mpar/ctt<e?~eM<
clair
pM~'c~er
un
e~cp/MtM<
en dix
minutes;
produire
une belle moisson de
~'otMe?<
6[:t mois
de
mars;
cActMyer~'eaM~es/bM~wesou/c~Msdes
~)M(seM
huile et en sam-doMa;;
faire
avec des
feuilles
d'arbre une salade
qui
le
dispute
la
(t)
J e nevoudrais
pasrpondrequ'une
assez
grande quan-
tit de
pe(t<<Mpr)<$
ne
comprissent pas
bien cette
opration.
BUT Ct.ttRAL 296
~M7Me
romaine,
et ~(~e ?'ac:e J 'a~'e un ro~
succulent;
MM/~er de nouveaux
/?~J OOM~
les
tailleurs et les
coMfM~ercs,
et des
HoyetMp/~-
ques de
~'fe~aMS
l'avenir;
MM;e~ereM/?M de plus
grands plaisirs poicr les
sens
des Mt/MeraM.r ~r-
tificiels
et des ciments.
En traduisant
trs-fidlement ces extrava-
gances, je
ne fais
pas
d'autre malice Bacon
.que
celle de
dvelopper
ses
ides,
de rduire
ses
gnralits
la
pratique
et
l'individua-
)!t,
de
changer pour
ainsi dire son
algbre
en
arithmtique
ce
qui
est de toute
justice,
9
puisque
toute
algbre
doit tre traduite sous
peine
d'tre inutile.
Telle est
cependant
le
but gnrt
de cette
fameuse
philosophie
de
Bacon,
et tel est nom-
mment le but
particulier
du Novum
Organum
tant et si ridiculement exalt. Z~ &M~Mc~<m-
celier Bacon dans cet
ouvrage,
nous dit son
traducteur
lui-mme,
est exlrmement
lev;
car il
M'a~M'e
r!CM moins
<yM'a
produire
de
MOMMe~M
espces
de
corps
et
~'(MM/br~ey
les
e~ceN~tte~M~~fM (1).
(1) Tom.
vt
de la trad. p.
3<5.
M L PttfLOSOPHiE DE BACOX. 207
En
effet,
l'entreprise
est
~bW
belle,
et
je
ne
crois
pas qu'il
soit
possible
de lui
comparer
rien dans l'histoire de
l'esprit
humain. Ici se
prsente
une
observation
remarquable.
Tant
que
Bacon ne dbite
que
des absurdits mono-
diques
comme dit le
grand
homme,
et
qui
ne
roulent
que
sur des faits
Isols,
son traduc-
teur
prend
assez volontiers la libert de
s'en
moquer impitoyablement, parce qu'il
loi reste
la ressource de le louer sur les ides
gnra-
les
mais
lorsqu'il
en vient ces erreurs ca-
tholiques (1) qui supposent
une absence com-
plte
de
jugement,
il s'arrte et n'ose rire.
Comment convenir
que l'ouvrage
le
plus
fa-
meux de Bacon
(le
~VoMu~
On~e)
n'est dans
son
objet
et dans sa totalit
qu'un long
accs
de dlire? Il
n'y avait pas moyen. Ilaime
donc
mieux dfendre ce
systme,
et du moment
qu'il
a
pris
son
parti,
il faut convenir
qu'il
fait
ce
qu'il peut
d'une aussi mauvaise cause. On
ne
dira
pas
du moins
qu'il manque d'intrpi.
(1)
Au lieu
d'M!tt~e'-M!fM. Autre
expression faYo~te
de
Bacon,
dent il sera fort
question plus
bas.
BCTGXERAL
298
dit
L'homme, dit-il,
qui
aura une fois d-
produire
volont
il
pourrait
faire
rgner
cc
dans un
espace
assez
grand
la chaleur de
espces
faire en
petit
ce
que
la nature fait
en
grand,
et
rciproquement
faire
plus
qu'elle,
autrement et
plus
vite
qu'elle,
etc.;
H
il
ajoute
que
ces
oprations ne paraftront
chi-
cc
me~Mes~M'aMa:pe<~ esprits (2), M espce
de
formule
qui
doit naturellement terminer tout
paradoxe
rvoltant.
H cherche des
arguments
en faveur de la
transmutation dans les
oprations
animales.
Ptt/~Me
le
pain que je mange
devient
cAcM?',
chyle,
sang,
etc.,
c'est pour nous
une nouvelle
~c[Mon
d'esprer.
J e dis de mon ct
Puisque
(<)QueHe
conomie de bois! et si l'on
pouvait rcipro-
quement
amener chez son ennemi une bonne
gele
au mois
(t'aot, quel
immeuse
avantage ~!<oad
tM ~Mmanct.'
(2)
Prface
gnrale
de la trad.
page
xx!.
DE LA PniLOSOPHtE DE BACON. 209
fAe~e dans le
corps
d'une vache se
change
e~
lait,
pourquoi
~'AoM~Me ne
pourrait-il pas
at-
<eM~re le talent dune vache? voil
pour
ce
qui
s'appelle faire
aussi bien
que
la
nature;
pour
ce
qui
est de faire mieux
qu'elle
la chose ne
souQr<~pas
de difHcuIt. La nature
fait-elle des
maisons?
On
peut
donc faire mieux
~Me
nature. Il a
oubli d'ajouter
La nature
fait-elle
du
miel
de
la soie? donc l'abeille et le
ver--soie,
quoiqu'ils
en
sachent notoirement moins
que
nous,
peu-
vent cependant
faire mieux
gMe~a
nature,
ce
qui
doit fort
nous
encourager.
C'est un
trange
so-
phisme que
celui de
regarder
la nature comme
un tre
part
et
spar
des tres
particuliers
dontl'ensemble forme
prcisment
ce
qu'on ap-
pelle
vaguement
yM~'e
(1).
Sans doute
qu'elle
(i)
M. Lasalle observe ailleurs
que
ce mot da nature n'a
pas
moins de
~ua(o)'j!e acceptions
dans notre
tangue
et
qu'il
est au nombre de
ceux qu'il faudrait <t<~prt'me< (Tom.
xvv
de la
trad. p. 376.)
J e serais curieux de savoir
qne)ie
au-
torit on devrait
s'adresser
pour
obtenir cette
proscription.
On
voit,
au
reste,
quele
savant traducteur bat ici la
grande
route de
l'erreur
trace
par
Locke et Condillac. Ils ne ta-
BUT CKnAL 300
ne
fait point
demaisons; maiselle
fait beaucoup
mieux,
puisqu'elle
fait
l'AoMmc,
qui
fait ~MMMM-
sons
comme elle fait l'abeille et le
ver,
qui
font le miel et la
soie.
Mais les efforts les
plus spirituels
du tra-
ducteur ne
sauraient effacer les
~o~~ceMce~
f~e/e[?!a<Mre,
c'est--dire
l'abrg
de la
philoso-
phie
de
Bacon,
qui
roule tout entire sur deux
ples
invariables
le
faux
et
l'MMposMMe.
On
trouverait difficilement dans ses OEuvres en-
tires une
page qui
ne soit
empreinte
de ce ca-
cactre
gnral. Emparez vous
des
formes
pour
tre
tout-puissant.
Il ne sort
pas
de cette
ide,
qui
domine surtout
dans le Novum Orga-
mMM,
o tout se rduit en dernire
analyse
la
rissent
pas
sur les dfauts des
langues
et l'abus des
mots,
et
ne cessent de nous exhorter la rformation directe des si-
gnes
(comme
dit
l'argot moderne).
Ce n'est
pas
ici le lieu
de m'tendre sur ce
sujet j'observerai
seulement
que
si
quelqu'un
de ces
philosophes qui pourrait
me citer le mot de
nature comme un
exemple
des abus du
langage je
m'avisais
de dire
que
c'est Dieu
qui /e)'me
les
p~at'e!, qui fait digrer
l'animal et
cfo~t'e les
plantes e<<
il ne
manquerait pas
de
me
regarder
en
piti
et de me
rappeler
la nature.
DE LA Pmi.OSOP!)!E DE BACON. 30!
transmutation des
corps.
Il se
plaint
sans d-
tour de la timidit de
ces ph ilosophes
qui
ont
regard
comme
impossible
tout ce
qui pas-
que
les
compositions
seules
appartiennent
cc
~otMme,
mais
que
les ue?*:<6tMe~mixtions
M sont
fo~um~e ea;c~!M/c
la nature
(1), ce qui
ne tend rien
moins.
qu'
nous ter
l'esp-
t~ance de
propre
et de
trans former
artifi-
ciellement des
corps
naturels
(2).
A
quoi
l'homme est
expos!
Mais conti.
nuons.
Z'cn~ep~e de faire
de l'or,
nous
ditBacon,
M'M<
pas impossible
CM
e~e-~c~e;
mais les
(t)
Le mot de
mM!<tO)),
oppos
ici celui de
composition
est
trs-remarquabte.
11 ne
croyait pas que
la nature a)tt
plus
loin
que
le vritable
mlange chimique. H
se demandait
donc de
quoi
est
(ait
l'or
pour
faire de
l'or,
ds
qu'il
aurait
connu les
drogues
constituantes;
comme on
dit,
par
exemple,
de
quoi
se
fait
l'encre ou la
<heri'agMe pour
tre en tat de
produire
l'encre et la
thriaque
volont.
(2)
Nov.
Org.t~b. t, cap, l,
n
LXXV.Opp.
tom.vu',p.30.
BUT GtKtRAL 302
moyens proposs ~tM~M'M!
sont illusoires dans
la
pm~'gMC,
et les thories dont on a dduit ces
procds
ne sont
pas
moins
chimriques
le tout
M'es<
qu'un
tissu d'en'eu~oM
cTtMpo~~MreSj.
Pour
MOM,
abandonnant tous ces rves de l'al-
chimie,
nous marcherons dans les voies de la
nature,
dans les seules
qui puissent
we~er ce
~raM~&M~ (1).
Ces voies de la nature ne sont
pas
la
por-
te des
esprits
ordinaires
heureusement
Ba-
con nous les a rvles. Ce
puissant gnie
avait
beaucoup
mdit sur la maturation en
gnral pour
en tirer des axiomes
gnraux en
attendant les
gnralissimes.
Or,
comme il
voyait que
la Masure
(avec
ses
quatorze noms)
transformait des fruits acerbes en comestibles
excellents,
et
que
l'homme mme avec le
temps
et la
paille
tKMn< les
Me/~es (2),
il en
concluait avec une
profonde sagesse qu'en
(l)
SylvaSylv. Cent. iv,
n
377,
tom. i des OEuv. huitime
dela trad.
p.
30.
(2)
Proverbe
italieu fort connu Col
<empo
e co~a
paglia
tKafttratto i
t)Mpo.
DE LA PH)t.OSOPU!E DE BACON. 303
considrant,
par
exemple
l'tain et le cuivre
comme de
l'argent
et de l'or
fe?~,
il suffisait
de les faire
MMtnr,
ce
qui
est d'une vrit
blouissante. Le
principe
une fois
dcouvert,
il
ne
s'agit plus que
de
l'appliquer,
et c'est de
quoi
Bacon
s'acquitte
dans le
plus grand
d-
tail avec un srieux admirable. Ceux
qui
ont
assez de
temps pour
en
perdre peuvent
se
promener
dans la Fort des Forts la suite
du
thaumaturge (1);
ils
y
verront
que
tout t
dpend
d'un
temps
suffisant,
d'une chaleur
douce et d'une
grande lampe
ce n'est
pas
cher
(2).
Nous avons vu Bacon se
moquer
des alchi-
mistes tout en
croyant
l'alchimie sur la
transmutation des
mtaux
il n'est
pas
moins
curieux sur cette autre branche des sciences
(<) Sylva Sylv.
Cent. tv,
tom. vm de ta trad,
p ~32, sqq.
(2)H
approuve,
au
reste, le judicieux
parti qo'ontpri~
les Chinois d'abandonner la confection de l'or
pour
tourner
tous leurs efforts vers
celle de l'argent,
et de s'en
occuper
avec
une assiduit
qui
<n<
cependant
t<t)
peu
de la
folie. (Sylva
Sylv. Ibid. 31. )
MT GX~nAL 304
occultes
qui
a
pour
but la
prolongation
de la
vie humaine. SonHistoire entire de la Vie et de
la Mort n'est au fond
qu'un
trait sur cette ma-
tire intressante. Comme l'art des
rappro-
chements vrais et fconds est le vritable cachet
du
gnie,
les
rapprochements
vains et striles
distinguent
les
esprits
faux. Ainsi
Bacon,
pour
s'lever aux
ides gnrales,
croit devoir nous
entretenir de la
plus longue
vie de tout ce
qui
vit dans l'univers. Nous
apprenons
en cons-
quence
la
plus longue
vie du
fraisier,
de la
violette,
de la
pimprenelle,
de la
primevre,
de
l'oseille,
de la
bourrache,
de la
buglose,
du
thym,
de
la sauge, de la marjolaine,etc. (1).
Au
chapitre
des
hommes,
nous
apprenons
que
le
pape
Paul III,
homme (~OM.Ket
tranquille,
avait vcu quatre.vingt-un
ans,
et que Paul
IV,
homme
pre
et
svre,
en avait vcu
quatre-
MM~oM.
Qu'est-ce
que
cela
prouve,
bon
Dieu Ce
qui distingue
tous les crits de Ba-
con,
et
nommment cette /~o!re de la vie et
(i)
Tom. x de la
trad.
Sylva Sylv.
n*
xiv,
p.
40.
DE LA PHILOSOPHIE DE BACON.
305
de la
mort
c'est l'immensit
d'appareil
et la
nullit des rsultats. On ne
comprend ~as
comment il
est, possible
de
remuer,
de ras-
sembler tant de matriaux sans
pouvoir
btir
une cabane. Bacon se
prosterne
devant tous
les tres de la nature
pour
en obtenir une r-
ponse puis
il se relve
pour
nous
prononcer
une folie.
Il
dbute,
comme il faut
s'y
attendre,
par
se
moquer
de la tourbe des
7MC~ec!Ms(l), qui
ont
embrouill la matire avec leur humide
radical
et leur
chaleur MO[<M~eMe
Tout ce
qu'on
a
ger la
vie,
mrite
peine
de fixer l'atten-
tion
(2).
On ne trouvera ici rien de sembla-
(<)
~MHcot-Mm <urba.
(Sylva Sy)v. Opp.
tom.
Tin, p.
338.)
M. Lasalle traduit le
troupeau
des mdecins.
( Tom.
x,
Ibid.
p. 11.)
Il me
parat
inutile de
prter'
Baconun terme
plus
impertinent que
celui
qu'il
a
emptoy.
(2)
Nous l'avons entendu affirmer tout l'heure
que
jus-
qu'
lui on n'avait rien dit deraisonnable sur les
mo)/e?M
de
faire
de
!'or
mais
que pour
lui il
enseignerait
les voie. de la
nature, Le voil maintenant
qui rpte
la mme formula
TOME
r. 20
MT CiKtHAL SOG
ble,
et nous osons nous flatter
de
marcher
les
plantes qui
doivent tre le
produit
de la
ce
culture,
telles
que
le
froment
forge,
etc.
c<
lorsqu'elles
viennent
dgnrer,
se trans-
ct
forment en
plantes
herbaces d'une autre
espce,
non-seulement diffrente de
l'orge
et du
froment,
mais mme de celles
que
la
terre
produirait spontanment (1),
Bacon
cependant
veut bien convenir
que
ces sortes de transmutations
sont un des
plus
profonds mystres
de la
nature,
et il en
prend
occasion d'insulter cette
philosophie
vulgaire
qui
les
a
dclares
impossibles,
tandis
que
nous
voyons
assez
d'exemples
frappants
de ces transformations
pour
les
croire
possibles
et
pour
rechercher les
()) Sylva Sylv.
cent.
Yt,
n" 525. Tom. vu! de la
trad.
p.
310. AitteursH
d!tque
cette transmutation est
Mnpt'MCtpc
tt)<'oM<M<a}<6 continuellement
~rt~par r~p~ri'eMce. (Ibid.
y 518.)
DE LA PHILOSOPHIE DE BACO. 313
moyens
de les imiter nous-mmes
(1).
Il
est sur
que lorsqu'on
est une fois
parvenu
se
persuader que
le
/roMeM< peut
devenir
foin
on doit tre violemment tent
d'essayer
des miracles du mme
genre
et l'on aurait
mme toutes sortes de raisons de
compter
sur
le
succs,
n'taient deux
petites
difficults
qui
se trouvent sur la route de
l'oprateur
c'est
que jamais
il M'a t
prouv gM'MMeespce quel-
conque
ait t
cAo~oee
en une
em<re,
et
que ~c[-
mais ~OMMKe n'a rien
fait
comme la Ma~M'e.
Mais Bacon n'tait
pas
de cet
avis,
puisque
toute sa
philosophie
n'avait d'autre but
que
cette
chimrique
transmutation.
Les
erreurs
se
prtant
mutuellement le
plus
funeste
appui,
les ides de Bacon sur
la
trans-
mutation des
espces
se
renforaient
encore
par
sa ferme
croyance
aux
gnrations sponta-
nes,
dont il
parle toujours
comme d'un vrita-
ble
dogme qu'il
n'est
pas permis
de mettre en
U)!Md.no525,p.3)0,3n.
BUT GNRAL 3tt
question
Si nous tournons nos
regards,
dit-il,
vers les tres
anims,
nous
voyons
que
ceux
<M
naissent de la
pn~e/ac~oM
se
changent
ensuite en d'autres
espces par
<t
exemple,
les vers en
mouches,
les che
ce
nilles en
papillons,
etc.
et il est assez
c<-
vraisemblable
qu'en gnral
les animaux
qui neproMe~Me?~poM!<
d'u~e semence
peu-
tre
espce,
etc.
Sur les
insectes
il n'a
pas
le moindre
doute
mais il
avertit
que
ce mot n'est
pour
lui
qu'une
manire
d'abrviation,
et
qu'il
en-
tend
comprendre
sous cette
expression
tous
les animaux
qui
naissent de la
putrfaction,
par exemple
les
limaons,
les
grenouilles
les
anguilles,
les
serpents,
etc.
(1).
(t)
Les
anguilles
et les
serpents
tirent
galement
leur ori-
gt'ne de
la
pu<fe/ae<t0!t
car
t'eau
se
pt(<r~e
dans le Hmot
( o&
ils se
forment ),
et
n'y
cotxeree
pas
la nature
qui
lui est
propre.
(Sylva Sylv.
cent. Yi. n" 696. Tom. vin de la trad.
p. 508. j
De l'eau
pourrie qui produit
des
anguilles
et des
serpents
DE LA PHILOSOPHIE DE BACON. 3t5
Cet homme n'avait-il donc
jamais regard
autour de lui? ne s'tait-il
jamais
inclin
sur le bord d'un foss?
y
a-t-il enfin
quel-
que
excuse valable
pour
un tel
degr d'igno-
rance ?
Bacon allait
jusqu'
croire
que
l'insecte
papillon rtrograde
l'tat de ver
pour
re-
descendre ensuite celui de
papillon
(il
ne
parle pas
de l'tat intermdiaire de
larve,
qu'il
ignorait probablement)
et ainsi de
suite
de
manire
que
le mme individu
pouvait
vi-
vre dans le cercle trois ou
quatre
ans au
W:OMM.
Snque
a dit:
P/M~opAorMMcre(~a~c?M~
on
pourrait
dire
peu prs
dans le mme sens:
n'y
a rien de si crdule
que
l'incrdule. Tous
ces
philosophes,
si en
garde
contre
les v-
dans le <ttMOM/ A
chaque page
on s'crie Il
n'y
a rien au-
dell et la
page
suivante Bacon vous dment
toujours.
Y. de
plus sur
les
gnrations spontanes
les
pages
498 et
517 du Yiu vot. et le tom.
ix,
n''889.
BUT GXtRAL 316
rits
qui
les
gnent,
sont,
pour
ainsi
dire,
tout ouverts
l'erreur,
pour peu qu'elle
les ac-
commode. Bacon est un
grand exemple
dans
ce
genre
-il est le modle de sa
postrit;
sa
philosophie presque
entire n'est
que
l'nu-
mration des erreurs
humaines
mais l'erreur
est comme un
brouillard;
on
n'y
voit
que
les
autres. Nous venons d'entendre son traduc-
teur se
plaindre que,
Bacon
K't'M~MCM~'CMMCM'.s
les sources o il
puise
toutes ses
fables,
on ne
peut y puiser
d'autres
petits
contes
poM?~
ec~ct/
cir les siens.
Quant
moi,
je
ne
comprends pas
la ncessit d'claircir des fables de ce
genre
il vaut mieux s'en
moquer,
et c'est ce
que
fait
communment le traducteur sans se
gner
au-
cunement.
Ainsi,
par exemple, lorsque
Bacon
nous dit sans le moindre
signe
d'incrdulit
J 'ai ou dire
que
dans les
Pays-Bas
on s'tait
avis de
<e~'
un
re/'e~oM
de
pommier
SM?'un
~o~MOM
de
chou,
et
qu'on
avait o~e~tf
par
ce
moyen
des pommes trs-grosses
et
<6[~,
etc.
le
traducteur se contente
d'ajouter
en
note,
au bas de la
page
Puis la
~a:'Me
de ces choux
donna des
or~o/ans,
qui
e~~ ~re~
SM?'MMe
AM!<?'e
l'caille
~o~ere?< une
trompette
ma-
rine.
Quand
o)t ~e
~re~e pas ~perte~ce,
DE LA pniLOSOPmE DE
BACON. 317
on
ne cueille
que
des sottises
(1 )
et
lorsque
Bacon,
dans ses sublimes
conceptions, pro-
pose pour
l'amlioration
du
jardinage
d'arro-
s?' des racines avec du
vin
M. Lasalle
ajoute
Par
exemple
arroser des carottes avec du vin
de Tokai
(2).
On ne doit
pas
faire
plus
d'honneur ces
belles
imaginations.
Mais ce
qu'il
est bien im-
portant
d'observer,
c'est la manire dont les
erreurs se
~re~CHen<
dans la tte de Bacon. Il
corrompait
alternativement la thorie
parl'ex.
prience
et
l'exprience par
la thorie. Ses
principes
chimriques
lui rendaient
croyables
les contes
les
plus purils,
et ces contes leur
tour,
pris
pour
des vrits
Incontestables
lui servaient
de base
pour
tablir les
plus
folles thories. Il vous
dira, par exemple
(ToprM
l'exprience
(MtCMMMee<moderne
( ce
sont ses
expressions) que
dans tin
fourneau
de rverbre
qui
tient du CMture en
~Mton
OK
voit s'lever tout d
coup
un insecte ail
qui
(l)
Tom. vm de latrad.
SylvaSylv.
cent.
v
n
453, p.
202,
note 2.
(2)
ibid.
cent. n,
n"
618, p. 410,
note t.
BUTGtXnit. su
tantt mcM'cAecomme s'il
tait
ccM(tc/te aux
pa-
ra~ dit
fourneau,
et d'autres
fois
aussi
;a~:<e
dans le
feu
mme,
mais
qui
meurt subitement
(de
froid sans
doute)
l'instant CM sort de
~/ottrnctMe.
Voil
l'exprience qui
n'excite
pas
le moindre doute dans
l'esprit
de
Bacon
ensuite il
ajoute
Celte noble
<Kcpe~e?cc
est
bien
digne
d'6[~e~<to?t,
car elle
prouve (pour-
quoi
le traducteur dit-il
f<
elle semble
prou-
ver? )
que
le
~cn
le
p~M
violent
peut
tout
aussi bien
que
cette chaleur douce
et
tranquille
qui
anime la
plupart
des tres
or~~MM, op-
rer la
vivi fication lorsqu'il agit
sur une matire
qui
a les
qualits
et les
~t~post~o/M
ncessai-
?'es
(1).
Voil la
thorie,
et c'est
ainsi
que
l'exprience
et le raisonnement se
prtaient
mutuellement un secours
prcieux
dans la
tte de Bacon.
On lui raconte encore
qu'une souche de
htre
produit
un bouleau. Au lieu de
repousser
ce
(t) SylvaSytv.cent.
vn.n'
696. Tom. vm de la trad.
p.
513-514.
Opp.
1.1, p.
446.tbid.
Which is a noble instance,
and
Morthy
<o
&etc~/t<'d; /cr )~htcc<h,
cfc.
DE LA FHtLOSOFNtE DE DACON. 319
conte,
il
appelle
tout de suite la thorie son
secours: Si le
fait
est
vrai, dit-1!,
ce
qui
ne
me semble
pas
tout
fait impossible, ilparat
que
la vieille souche tant
presque
entirement
epMMce,e< M'ayc~ plus
assez de sve
pour jo?'o-
~U!re un Ctr&re de son
espce
ne
laisse pas
d'en
avoir encore
assez pour produire
un arbre d'une
espce m~eneMre (1 ).
Qui
croit tout
explique
tout. De cette ma-
nire
je prouverais
avec la mme aisance
qu'une
barre de fer enfouie
peut
se
changer
en
serpent.
En
effet,
le fer se
rouille
la rouille
est une
espce
de terre
la
terre se
change
no-
toirement en
insectes
les animaux
prennent
naturellement la
forme
de la matire
qui les
produit;
la &a?ye de
fer
est
longue,
etc. C.
Q.
F. D.
Au
fond,
la
production
d\m
animal,
ou ce
qu'on appelle
la
vivification,
n'est
pas quelque
chose de bien merveilleux si l'on remonte eut
(i) Sylva
Syh
cent. vt. 523. Tom. vin de la trad.
p. 308.
Bt;T C&N~RAI. 320
<~oMM~rMtMpe,
comme dit
Bacon. Il ne faut
pour
cette
petite opration que
trois choses
seulement 1 une chaleur
capable
de dilater
les
esprits
du
corps
vivifier;
2 un
esprit
actif et
susceptible
de la
dilatation
3
enfin,
une matire
visqueuse
et tenace
qui puisse
renfermer et retenir ces
esprits
(~).
~rc~e.? donc une chaleur
dilatante,
un es-
prit
dilatable et de la colle
quantm ~M~c:'<;
ajoutez pour plus
de sret un mouvement
/M/<e/
et vous verrez
sur-le-champ
courir
l'animt la vrit ce ne sera ni un
colibri
ni une
araigne,
ni
rien de
semblable
car
pour
cela il faudrait avoir dcouvert la
/brme
du
colibri,
de
l'araigne,
etc.,
ce
qui
n'est
pas
du
tout ais;
mais vous aurez un fort
joli
ani.-
mal
abstrait,
dgag
de toutes les formes in-
dividuelles,
qui
ne
sont,
comme l'a trs-bien
dit le mme
philosophe que
des
~etMe
de la
Me[<Mre
qui
se
DIVERTIT (2).
) tbid.n*696.p. 5t4, 51S.
(2)Sup.p.lb5.
DE LA. PHILOSOPHIE DE BACOK. 32tt
On sera
peut-tre surpris
de
l'espce
d'a-
mour
que
montre Bacon
pour
les
gnrations
spontanes c'est que
la
contemplation
de l'or-
dre dans
l'univers
le
choquait,
comme
il cho-
que encore aujourd'hui
ses
disciples
(1),
et
qu'il
recueillait avec une vritable avidit tout
ce
qui
ressemble ce
qu'on appelle
dsordre ou
hasard. Ils ne voient
pas,
ils ne veulent
pas
voir
que
si la
puissance
cratrice,
qui
se
plait
dans les
nuances,
a voulu tablir vers les der-
niers confins du
rgne
animal
quelque
chose
qui
se
rapproche
de
l'agrgation
minrale,
ce
qu'il
ne
m'appartient
point
de
dcider
c'est
une loi de
plus
au lieu d'une
chance
loi mani-
feste
par
la seule
place qu'elle occupe
entre
toutes les
autres,
et manifeste encore
par
ses
deux caractres
intrinsques,
en ce
quejamai?
(1) Buffon, par exempte, qui
fut sans contredit le
plus
grand physiologiste
de l'Acadmie
franaise
donna tte
baisse dans les
gnrations spontanes qui
s'accordaient
merveilleusement avec ses molcules
or~aHt~ttM,
et avec
toutesles ides
mcaniques
du sicle. Haller
cependant,
Bonnet et
Spalanzani se moqurent
de lui de son
vivant,
e&
attendant la
postrit.
TOME t. 2t
BUT
G&tBAL,
ETC. 322
on ne voit sortir de la
putrfaction que
des
vers et des insectes d'un
genre qui
ne
prsente
l'oeil de l'observateur
que
les
premiers
rudi-
ments de
l'animalit,
et
que jamais
le
mme
foyer
de
putrfaction
ne
produit que
des ani-
maux semblables. Mais c'en est assez sur
une
question
incidente.
LE NOUVEL INSTRUMENT est enfin com-
pltement
~MM(Mt<e. Les moins
clairvoyants
peuvent
l'examiner dans le
plus grand
dtail,
et se convaincre
par
leurs
propres yeux que
jamais
l'histrionisme
philosophique ne prsenta
la
superficielle
crdulit rien la fois de si
fqsCueux
et de si nul.
Les fins intentionnelles de cet instrument si
ridiculement fameux ont t de
plus
mises
dans tout leur
jour,
et le lecteur a
pu
se con-
vaincre
qu'elles
taient,
s'il est
possible,
en-
core
plus
insenses
que
les
moyens
ou l'in-
strument mme. Le reste de cet
ouvrage
sera
employ
montrer les diffrents essais
que
Bacon en a
faits,
tant dans les sciences natu-
relles
que
dans la
philosophie
rationnelle
qu'il
soumettait aussi aux mmes
rgles.
FM DU PREMIER TOMME.
TABLE.
t"Induction et
Syllogisme.
<
APPENDICE AC CHAJ PtTM PREMtEE. Thse de
Physique
sur l'arc-en-ciel. 57
!f. De
l'exprience
et du
gnie
des dcouvertes. (i8
tH. Base de la
philosophie
de Bacon et de sa m-
thode d'exclusion.
98
IV. Des essences et de leurs dfinitions.
)25
V.
Cosmogonie
et
systme
du monde. ~5
VI.Ftux
et reflux.
<7'
Vil.Mouvement.
''80
VHI.Histoire naturelle
et physique gnrale
<9t
)X.
Progression
de la lumire.
203
X.
Expriences et explications physiques.
223
XI.Mtoro)og:e.
261t
XH.But
gnral
de la
philosophie
de Bacon.
28C
FIN DE LA TABLE DU PREMIER YOLUMn.
I
er
- Induction et Syllogisme.
APPENDICE AU CHAPITRE PREMIER. - Thse de physique sur l'arc-en-ciel.
II. - De l'exprience et du gnie des dcouvertes.
III. - Base de la philosophie de Bacon et de sa mthode d'exclusion.
IV. - Des essences et de leurs dfinitions.
V. - Cosmogonie et systme du monde.
VI. - Flux et reflux.
VII. - Mouvement.
VIII. - Histoire naturelle et physique gnrale
IX. - Progression de la lumire.
X. - Expriences et explications physiques.
XI. - Mtorologie.
XII. - But gnral de la philosophie de Bacon.
FIN DE LA TABLE DU PREMIER VOLUME.