La Bataille de Badr
La Bataille de Badr
La Bataille de Badr
1 - La bataille de Badr
2 - La bataille d'Uhud
3 - Le Siège des Coalisés
4 - Le Siège de Qurayda
5 - La trêve d'Al-Hudaybiya
6 - L'expédition de Khaybar
7 - La campagne de Mu'ta
8 - La prise de La Mecque
9 - La bataille de Hunayn
10 - La campagne de Tabouk
1 - La bataille de Badr
Le Messager de Dieu, Muhammad ibn Abdallah (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) passa à La Mecque, après la
Révélation, treize années durant lesquelles il appelait pacifiquement les gens à embrasser l'Islam. Cependant, ses ennemis
usaient de tous les moyens pour l'amener à renoncer à sa noble mission (brusqueries, moqueries, mensonges, menaces,
tentatives de corruption...) à tel point qu'ils remportèrent, au début, un large succès. En effet, ils réussirent à éloigner les
gens de lui.
A ce propos, voici le témoignage d'Ibn Hicham: "Parmi les choses très dures qu'a supporté le Messager de Dieu (Saluts et
bénédictions d'Allah sur lui), ceci: un jour, alors qu'il était en train de prêcher, on le traita de menteur, et on lui fit beaucoup
de mal partout où il passait. Tout Quraych s'était mis, ce jour-là, contre le Prophète, avec ses esclaves et ses hommes
libres. Il fut alors contraint de rentrer chez lui parce qu'il allait tomber en syncope. Chez lui on le couvra d'une cape. Dieu fit
descendre sur lui la Sourate de l’Enveloppé (Al Mouzammil) : « O toi, l'enveloppé [dans tes vêtements]! Lève-toi [pour
prier], toute la nuit, excepté une petite partie; ..." (Sourate 73, verset 1).
Les actions de propagande nuisible contre le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) ne s'étaient pas limitées dans
la tribu de Quraych mais s'étaient étendues aussi aux autres tribus du pays. Ainsi les Quraychites constituèrent-ils des
délégations qu'ils envoyèrent en mission à ces tribus. Leur mission était de contrecarrer le Messager de Dieu, de le mettre
en échec par le mensonge et la diffamation. Etaient aussi constitués, lors du pèlerinage, des groupes d'hommes qui
nuisaient au Prophète, lequel réussissait par contre, à convaincre à sa juste cause bon nombre de pèlerins.
Voyant son audience s'étendre au-delà de La Mecque, les notables de Quraych se réunirent dans "Dar an-Nadwa" pour se
consulter et prendre de nouvelles décisions car ils voyaient en lui un danger qui menaçait constamment leurs croyances et
un affront pertinent à leurs dieux. Le premier qui prit la parole fut el Walid ibn al-Moughira al-Makhzumy. Une discussion
s'en suivit. En voici la teneur:
"Le pèlerinage est proche, et les pèlerins arabes vont arriver en grand nombre, dit el Walid, ils ont eu écho de ce que dit cet
homme (c.à.d le Prophète). Unissez-vous donc et ayez une position commune.
- C'est toi le Grand des ‘Abd-Chams. Conseille-nous et nous nous exécuterons, lui répondirent-ils.
- C'est vous, plutôt, qui devez parler. J'écoute.
Et là, les orateurs se succédèrent pour donner leurs avis. L'un d'eux dit: "Nous dirons que c'est un devin.
- Non, répliqua al Walid, par Dieu, il n'est pas un devin. Nous connaissons les devins. Ses paroles ne sont pas des
marmonnements de devin.
- Alors, nous colporterons qu'il est fou, proposa un autre.
- Non, répondit encore al Walid, il n'est pas fou. Nous connaissons ce qu'est la folie. Les paroles qu'il prononce ne sont pas
divagations de fou.
- Disons alors que c'est un poète, suggéra un autre notable.
- Non, s'opposa-t-il encore une fois, il n'est pas poète. Nous connaissons toute la poésie. Non, ce qu'il dit n'est pas de la
poésie.
- Nous dirons donc que c'est un sorcier, insista un autre notable.
- Il n'est pas sorcier, leur répondit-il, nous avons vu les sorciers et leurs tours. Ce ne sont pas des paroles de sorcier...
- Alors, qu'est-ce que nous allons dire, O ! Grand des ‘Abd Chams?
- Je jure, leur dit-il en toute franchise, que ce qu'il dit est doux, que sa source est toute différente de ce que nous
connaissons, que ses propos ne sont que fruits succulents à portée de la main. Ce que vous venez de dire est faux.
Cependant, vous pouvez dire de lui, sans le qualifier de sorcier, que c'est un individu qui répand des paroles magiques
provoquant des déchirements et des divisions entre le père et son fils, le frère et son frère, entre le mari et sa femme, et
l'homme et son clan."
Tous les notables acceptèrent alors l'idée d'al Walid, puis passèrent immédiatement à son exécution.
'Ibn Ishaq écrivit: "... (Ils) médirent cela du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) aux pèlerins qu'ils rencontrèrent
mais personne ne prit au sérieux leur calomnie. Et le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) sortit vainqueur devant
tant d'ennemis: on parla désormais de lui et de son Message dans toutes les contrées d'Arabie."
Cette adversité, ces entraves, ces accusations fomentées par Quraych n'entamèrent en rien la conviction du Messager de
Dieu. Au contraire, il persévérait dans sa mission et dans chaque avancée il voyait les rangs des Musulmans qui
grossissaient. La colère et l'angoisse de Quraych grandissaient aussi.
Les succès se succédant, poussèrent les notables Quraychites à opter pour une autre voie dans l'espoir de voir le Prophète
Muhammad abdiquer. Ils envoyèrent, en effet, à Abou Talib, oncle du Prophète, une délégation qui exprima leurs vives
protestations. Abou Talib, doyen des Hachimites et protecteur du Prophète après la mort de son grand-père 'Abd al-Muttalib,
reçut le délégation de "Dar an-Nadwa" dans le "Cercle" des Bani Hachim, et, devant les notables de la famille des Bani 'Abd
Manaf, écouta le chef de la délégation dire: "Ecoute, 'Abou Talib... Tu es considéré et respecté parmi nous. Nous t'avons
déjà demandé de retenir ton neveu, mais tu n'as point fait. Par Dieu, nous ne pouvons supporter davantage. Ton neveu
persiste à insulter nos "pères", à qualifier de stupides nos croyances et à tourner en dérision nos dieux. Nous ne pouvons
tolérer cela. Ordonne-lui d'arrêter, sinon nous le combattrons et toi avec jusqu'à ce que périsse l'un de nous."
Ce violent avertissement provoqua en 'Abou Talib, déjà vieillard, un sentiment d'impuissance. Il convoqua son neveu après
le retrait de la délégation, l'informa de l'avertissement Quraychite puis il lui demanda de cesser de critiquer leurs dieux, de
l'épargner, de ne pas l'accabler encore plus car il ne pourrait supporter davantage.
La réponse du Messager de Dieu ne tarda à venir. Sans hésiter et sans céder aux pressions Quraychites, il dit à son vieil
oncle: "O oncle! Par Dieu, je n'abandonnerai cette mission, même si l'on déposerait le Soleil dans ma main droite et la Lune
dans ma main gauche." Sur ce, il se retira du conseil des Banou Hachim. Abou Talib le rappela aussitôt alors qu'il était déjà
dehors et lui dit sans le moindre regret: "Va, fils de mon frère et dis ce que tu veux. Je ne te livrerai pour rien au monde. Je
le jure." Puis, il convoqua tous les notables des Banou Hachim et des Banou al-Muttalib, les informa de la gravité de la
situation, (parce qu'il savait) ce que serait la réaction de Quraych, et leur demanda enfin d'être à côté de lui et de l'aider à
protéger Muhammad. Tous, idolâtres et musulmans, répondirent positivement à l'appel de leur doyen, sauf Abou Lahab,
oncle du Prophète, qui déclara son hostilité.
Ainsi, un tournant nouveau marqua la lutte entre l'Islam et l'Idolâtrie: Les peurs des Quraychites se multiplièrent après la
position exprimée des Banou Hachim et des Banou al-Muttalib, deux tribus qui pesaient de tout leur poids parmi les tribus
mecquoises tant sur le plan militaire que dans le domaine politique.
Certes, Quraych avait pensé à mener une guerre contre les deux tribus du fait de leur alignement sur la position de Abou
Talib, mais ne pu la déclarer à ce moment-là de peur que cette guerre ne lui soit profitable. Alors, elle opta pour l'astuce du
marchandage, lors d'une assemblée de ses notables tenue à "Dar an-Nadwa."
'Utba ibn Rabi'a fut chargé de proposer le marché au Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Voici ce qui s'était dit
lors de la rencontre:
"Si tu veux être riche par ce que tu inventes, nous te ferons une collecte jusqu'à ce que tu sois le plus riche de nous, et si tu
veux être traité avec tous les égards, tu seras effectivement notre seigneur, et si tu veux un royaume, nous te donnerons
tout. Et si ce qui t'arrive est pure démence dont tu ne peux t'en débarrasser, nous t'apporterons tous les médicaments, nous
dépenserons tout l'argent nécessaire jusqu'à ta guérison du démon qui t'habite."
Quand il finit, le Messager (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) voulut s'assurer s'il avait fini "- Oui, lui répondit-il.
- Ecoute-moi alors.
- Vas-y.
- « Au nom d'Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux. Ha, Mim. [C'est] une Révélation descendue de la
part du Tout Miséricordieux, du Très Miséricordieux. Un Livre dont les versets sont détaillés (et clairement
exposés), un Coran [lecture] arabe pour des gens qui savent, annonciateur [d'une bonne nouvelle] et avertisseur.
Mais la plupart d'entre eux se détournent; c'est qu'ils n'entendent pas. " (Sourate Fousiilat (41) (Les versets détaillés)
1, 2, 3).
Le Prophète de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) continua à réciter les versets de cette Sourate pendant que
'Utba écoutait attentivement. Quand il arriva au verset de la "Prosternation", il s'arrêta de psalmodier pour se prosterner à
Dieu puis dit à 'Utba: "Tu as entendu ce que tu as entendu..." lui signifiant son refus de tout marchandage.
Tout stupéfait d'entendre ces versets, 'Utba sortit sans dire un mot et alla rendre compte aux notables de La Mecque du
résultat de l'entrevue: "Par Dieu, je n'ai jamais entendu de pareil. Par Dieu, ce n'est ni de la poésie, ni de la sorcellerie, ni
non plus des paroles de devin... Laissez cet homme libre avec ce qu'il fait. Abstenez-vous de le contrarier. Je jure que son
discours, dont j'ai entendu une partie, sera un grand événement... et s'il (le Prophète) régnera sur les Arabes, son règne
sera le vôtre, et sa gloire sera aussi la vôtre..."
Mais aucun n'écouta ce conseil judicieux de 'Utba. On lui dit même qu'il avait été ensorcelé. L'échec consommé, les
Quraychites se réunirent encore mais cette fois pour passer à une nouvelle étape de l'affrontement, c-à-d mettre en
application un plan de guerre économique et d'embargo "social" contre les Banou Hachim et les Banou al-Muttalib, leur
colère étant devenue, encore une fois, indescriptible non à cause des succès successifs du Message divin - ceci était
devenu habituel pour Quraych - mais à cause de la reconversion à l'Islam de 'Umar ibn Al Khattab et de Hamza ibn 'Abd al-
Muttalib (qu'Allah soit satisfait d’eux) qui apportèrent aux Musulmans tout leur poids et leurs réputations très estimés à juste
titre dans toutes les tribus mecquoises.
A propos de cet événement, Ibn Ishaq écrivit: "Quand Quraych vit que les Compagnons du Messager de Dieu (Saluts et
bénédictions d'Allah sur lui) avaient trouvé paix et sécurité chez An-Nadjachy, que 'Umar eut déclaré sa conversion à
l'Islam, qu'ils avaient, lui et Hamza ibn 'Abd al-Muttalib, rallié le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et
ses compagnons, que l'Islam se répandait à cette vitesse-là, ses notables se réunirent et signèrent un pacte écrit contre les
Banou Hâchim et les Banou al-Muttalib..."
Ce pacte, qui interdisait tout mariage et tout commerce avec ces deux tribus, fut accroché à l'intérieur de la Ka'ba. Les
Banou Hachim et les Banou al-Muttalib décidèrent aussi à leur tour de défendre le Messager de Dieu. Le seul qui sortit des
rangs des Banou Hachim fut Abou Lahab ('Abd al Uzza ibn 'Abd al-Muttalib) qui rallia Quraych.
Ainsi l'affrontement s'était-il accentué et eut pour conséquence un embargo total qui allait durer trois années. Pendant ces
trois longues années, le Messager de Dieu, ses compagnons, les Banou Hachim et les Banou 'Abd al-Muttalib, qui les
défendaient, endurèrent privations et souffrances dans les collines de La Mecque. Une surveillance des plus implacables fut
imposée tout le long des chemins menant vers les collines où se trouvaient les Musulmans et ceux qui veillaient sur la
sécurité du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Par cet embargo brutal, Quraych voulait faire pression sur les proches du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
afin qu'ils l'abandonnent seul, et qu'ainsi il ne serait plus un danger pour ses croyances et ses dieux. Mais, cela ne changea
rien au courage et à la volonté des hommes. Malgré la faim et la soif, ils tinrent bon, mais grâce aussi au précieux soutien
de quelques commerçants mecquois qui leur passaient en contrebande les victuailles nécessaires à leur survie. Cependant,
cet embargo allait se terminer par la mort de Khadidja Bent Khuwaylid (qu'Allah soit satisfait d’elle), la femme de Messager
de Dieu. En effet, elle mourut des suites de cet embargo à l'âge de 64 ans, c.à.d trois ans avant l'hégire.
Cet embargo, très dur qu'il fut, allait avec le temps provoquer des déchirements dans les rangs quraychites. En effet, cinq
nobles, qui ne pouvaient plus de cette situation, décidèrent de mettre fin à cette ignominie. C'étaient: Hicham ibn 'Amrû ibn
Rabî'a al-Amiry, Zohayr ibn 'abû 'Umaya ibn al-Mughîra al-Makhzoumy, al Moutim ibn 'Uday ibn Nawfal ibn 'Abd Manâf, al-
Bukhtury ibn Hicham, Zouma' ibn al-Açwad ibn al-Muttalib al-'Açdy.
Ces cinq hommes se réunirent secrètement, la nuit, à l'endroit appelé "al-Hadjûn" sur les hauteurs de La Mecque et prirent
la décision de déchirer le pacte qui se trouvait encore à l'intérieur de la Ka'ba -Cela signifiait, chez les Arabes, la fin de
l'embargo inique - et, pour pouvoir concrétiser leur décision, ils élaborèrent un plan qu'ils exécutèrent le lendemain matin.
Ce jour-là donc, chacun regagna le cercle de son "clan" sauf Zohayr ibn 'Abu 'Umaya qui fit d'abord sept fois le tour de la
Ka'ba avant d'appeler à haute voix les cercles Quraychites: "Ohé, Gens de La Mecque! Acceptez-vous de manger et de
vous habiller alors que les Banou Hachim sont en danger mortel? Par Dieu, je ne m'assoirai que lorsque sera déchiré ce
pacte honteux.
- Tu mens. Par Dieu, il ne sera pas déchiré, s'écria Abu Djahl mécontent.
- C'est plutôt toi le menteur, répliqua immédiatement Zum'a ibn al-Aswad, nous n'avons pas accepté ce pacte quand il avait
été écrit.
- Zum'a a raison, enchaîna al-Bukhtury ibn Hichâm, nous n'acceptons pas ce qui est écrit dans ce pacte et nous ne le
reconnaissons pas.
- Vous avez raison tous les deux, et sera menteur celui qui dira autre chose que cela, continua al-Mut'im ibn 'Uday, devant
Dieu, nous sommes innocents de ce pacte et de ce qui y est écrit. Nous ne le reconnaissons pas.
- C'est une machination décidée de nuit, constata amèrement Abu Djahl qui ne pouvait plus s'opposer à la détermination du
groupe de libérer les assiégés, au risque de provoquer une guerre. A ce moment, al Mut'im s'avança pour prendre le pacte,
et à l'instant où il allait le déchirer, on remarqua que le pacte avait été dévoré par les termites et qu'il n'était resté de lui que
l'expression: Au nom de Dieu."
Le pacte étant abrogé, les Musulmans ainsi que les commerçants des Banou Hâchim qui soutenaient ces derniers
rentrèrent chez eux victorieux une nouvelle fois et purent reprendre leurs métiers comme par le passé.
Cette victoire sur les Quraychites marqua définitivement l'impuissance de la politique de l'embargo économique et social,
renforça les Musulmans dans leur foi, et ouvrit de nouveaux horizons pour le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions
d'Allah sur lui). Ce dernier, qui, à l'occasion de chaque pèlerinage, proposait l'Islam aux tribus arabes avait pu, à la fin de
ces années de confrontation, rallier à sa noble cause de nombreux hommes des tribus de Yathrib et pactiser avec elles.
Les premiers que rencontra le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) étaient six jeunes hommes, tous des
Khazradjites. Il les aborda à al-'Akaba, à Mina:
"Qui êtes-vous?
- ... De la tribu des Khazradj...
- N'êtes-vous pas des alliés des Juifs?
- Certes.
- Asseyez-vous, je vous prie: J'ai à vous parler.
- Oui." Et ils prennent place près de lui.
Il leur expliqua ce qu'était réellement de sa mission, les exhorta à prier Dieu, leur proposa l'Islam et leur récita le Coran. Ils
consentirent et y virent une augure favorable. Puis, ils lui déclarèrent leur intention d'aller proposer aux leurs le nouveau
Message tout en espérant aussi que ce Message pourrait, si Dieu le voulait, les unir au Prophète de Dieu. Ils pensèrent
fraterniser, par cette nouvelle Religion, entre la tribu des Khazradj et la tribu des 'Aws que déchirait un conflit ancestral. Ce
fut là la première rencontre entre Muhammad, Prophète de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), et des gens de
Yathrib, trois ans avant l'hégire.
Cette poignée d'hommes étaient: 'As'ad ibn Zarâra, 'Awf ibn al-Hârith ibn Rafâ'a de Banou an-Nadjâr, Râfi' Malik ibn
al-'Adjlân de Banou Zuray, Gutba ibn 'Amir ibn Hadîda de Banou Salma, Uqba ibn 'Amir ibn Nâbî de Banou Harâm ibn Ka'b,
et enfin, Djâbir ibn 'Abdallah ibn Riab de Banou "Ubayd ibn Ganim. C'étaient eux aussi les premiers qui propagèrent l'Islam
dans Yathrib et ses environs.
L'année suivante, à l'occasion du pèlerinage, ils revinrent, mais cette fois-là, accompagnés de six nouveaux musulmans
pour déclarer leur allégeance au Prophète de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Ils jurèrent aussi d'observer les
préceptes de l'Islam. Cette allégeance serait appelée par la suite Allégeance des Nissâ (des Femmes), elle sera aussi
connue sous le nom de "Première Allégeance d'al Aqaba." Toutefois, il faut signaler qu'elle ne mentionna aucun accord
militaire. Car, à ce moment-là, Dieu n'avait pas encore permis à Son Messager de prendre les armes pour se défendre
contre les Impies.
Le pèlerinage terminé, le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) envoya, avec les 12 pèlerins de Yathrib,
le jeune Mus'ab ibn 'Umayr al Abadry afin d'instruire les Musulmans aux préceptes de l'Islam et prêcher la Parole de Dieu
dans les tribus de Yathrib. Il avait réussi en effet à accomplir sa mission dans de larges proportions à tel point que toute une
tribu (celle des Bani ‘Abd-al-Achhal) s'était reconvertie à l'Islam, avec à sa tête son seigneur, Sa'd ibn Mu'âth.
Le jeune Mus'ab retourna à La Mecque neuf mois après son départ et présenta au Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah
sur lui) un compte-rendu détaillé sur sa mission.
Trois mois plus tard, vinrent au Prophète, pendant le pèlerinage, 73 musulmans et 02 musulmanes de Yathrib et de ceux qui
s'étaient convertis. La rencontre décidée après des contacts secrets se tint aussi secrètement la nuit du deuxième jour d'at-
Tachriq dans un col de Mina, près d'al 'Aqaba, à l'endroit "La Première Jamara", "le Grand Satan" comme on l'appelle de
nos jours.
Comme convenu, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) arriva à l'endroit accompagné de son oncle al-'Abbâs
ibn 'Abd al-Muttalib, et, tous les deux reçurent dans l'obscurité de la nuit les 'Ansar qui défilaient devant eux l'un après
l'autre, de peur d'être découverts par les Incroyants mecquois et les Associants médinois. Ce fut al-'Abbâs qui avait ouvert
la réunion par un discours: "...Muhammad, vous le savez déjà, est un de nos membres à part entière, nous l'avons protégé
de notre peuple... Parmi nous, il est chez lui, et avec toute la considération qui sied à son égard, mais il a penché pour vous,
il veut être parmi vous. Si vous voyez que vous allez rester fidèles à votre parole, et que vous assurerez sa protection contre
ses ennemis, faites alors et supportez les épreuves, mais si vous allez l'abandonner en cours de chemin et que par
conséquent vous le livrerez à ses ennemis, alors vous n'avez qu'à le laisser dès maintenant. Il est chez lui, dans sa tribu,
dans son pays et il est considéré parmi nous.
- Nous t'avons entendu, lui répondirent-ils avec détermination puis se tournèrent vers le Prophète (Saluts et bénédictions
d'Allah sur lui) et lui dirent avec assurance: «Parle, ô Messager de Dieu. Pose, pour toi et pour Ton Seigneur, les conditions
que tu veux!"
Effectivement, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) prit la parole, fit sa déclaration et conclut ainsi: "Votre
allégeance sera à la condition de me défendre comme vous défendez vos femmes et vos enfants."
Al-Barâ' ibn Ma'rûr, un 'Ansârite prit alors la main du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et lui dit: "... Oui, au
nom de Celui qui t'a envoyé, nous te défendrons comme nous défendons nos femmes. Reconnais notre allégeance, ô
Messager de Dieu. Nous sommes des gens de guerre et d'armes, je le jure, nous avons acquis cela avec endurance..."
Mais 'Abu al-Haytham ibn al-Tayhân l'interrompit en disant: "O Messager de Dieu, il y a, entre nous et ces gens-là (les Juifs)
des liens que nous allons couper volontiers. Mais si nous le ferons, ne retournerais-tu pas à ton peuple après que Dieu
t'aura donné victoire?"
A ces paroles, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) sourit puis répondit: "... Je prends les armes contre ceux
qui vous font la guerre, et je ferai la paix avec ceux qui la feront avec vous."
Les conditions du pacte étant acceptées, les 'Ansar firent acte d'allégeance au Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur
lui), en lui serrant la main, l'un après l'autre, sauf les deux femmes qui firent signe pour marquer leur approbation, car le
Prophète, durant toute sa vie, n'a serré la main d'aucune femme "avec qui il pouvait se marier" (ajnabia = mahram). Et, à la
fin de la cérémonie, il leur demanda d'élire 12 chefs qui seraient garants des leurs. Ainsi en fut-il. Les 12 chefs s'étaient
avancés à lui et s'étaient engagés à être responsables des leurs dans le respect et l'application du pacte. Le Prophète
(Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) leur dit alors: 'Vous êtes garants des vôtres, comme les Apôtres devant 'Issa ibn
Mariam. Quant à moi, je serai aussi garant des miens." (C-a-d les Musulmans).
La réunion secrète tirait alors à sa fin, mais les deux parties n'ayant pas encore fini de sceller l'alliance qu'un test vint
comme pour mettre à l'épreuve les intentions des 'Ansar. En effet, un espion Quraychite qui les découvrit tardivement, pu
seulement donner l'alerte de loin, du haut d'une colline. Dès qu'ils eurent entendu la voix de l'espion idolâtre, al-'Abbâs ibn
Ubada, un des 12 chefs, dit au Prophète: "Par celui qui t'a envoyé..., si tu veux, nous tomberons demain avec nos épées sur
les gens de Mina."
- Il (Dieu) ne me l'a pas ordonné", leur répondit le Messager de Dieu qui leur demanda par contre de regagner leurs
bivouacs dans l'obscurité de la nuit.
Le lendemain matin, une délégation forte de notables Quraychites protestèrent auprès des notables de Médine. 'Abdallah
ibn Ubay ibn Salûl, chef des Khazradj répondit au nom des siens encore mécréants, mais les rassura que pour un temps.
Plus tard, après le départ des pèlerins, les Incroyants Quraychites s'assurèrent qu'il y eut bien alliance, et quand ils
entamèrent les poursuites pour rattraper les Médinois, ces derniers étaient déjà loin et purent ainsi échapper aux
représailles de Quraych. Seul Sa'd ibn 'Ubada, seigneur des Khazradjites fut capturé et ramené à la Mecque. Mais, plus
tard, il fut libéré.
Voici la liste nominative des 'Awsites et des Khazradjites qui s'étaient alliés les premiers au Prophète.
Du côté de la tribu 'Aws:
1. Des Banou 'Abd-al-Achhal
- 'Usayd ibn Huzayr
- 'Abu al-Haytham ibn at-Tayhân
- Salma ibn Salâma ibn Waqch ibn Zaghba
2. Des Banou Hâritha
- Duhayr ibn Râfi' ibn 'Uday
- 'Abu Barada ibn Nayyâr
- Nihayr ibn al-Haytham
3. Des Banou Amrû ibn 'Awf ibn Mâlik
- Sa'd ibn Khaythama Rifâ'a ibn 'Abd-al-Mundhir
- Mu'in ibn 'Uday ibn al-Djad
- 'Uwayn ibn Sa'ida
Quant aux chefs élus lors du "Deuxième Pacte d'al 'Aqaba", voici leurs noms:
Pour les Khazradjites
- As'ad ibn Zurâra
- Sa'd ibn ar-Rabf
- 'AbdAllah ibn Rawâha
- Râfi' ibn Malik
- Al-Barâ' ibn Ma'rûr
- 'Abd-Allah ibn 'Amrû
- 'Ubâda ibn as-Sâmit
- Sa'd ibn Ubâda
- Al-Mundhir ibn Amrû
Pour les Aws
- Usayd ibn Huzayr
- Rifâ'a ibn 'Abd al-Mundhir
Cette alliance alla insuffler un nouvel élan à la cause de l'Islam. Désormais, les événements allaient s'accélérer. Les
Quraychites, qui découvrirent le secret d'al 'Aqaba, surent dès lors à quel danger virtuel ils devraient faire face si les
capacités guerrières des 'Aws et des Khazradj s'uniraient dans la main du Messager de Dieu.
"Dar an-Nadwa" les accueillit à plusieurs reprises afin qu'ils prennent les mesures qu'ils voyaient nécessaires. Cependant, le
Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), qui avait déjà prévenu de multiples dangers, prit les devants. Il ordonna aux
Musulmans mecquois de partir pour Yathrib où se trouvaient dorénavant des protecteurs puissants qui avaient juré de porter
haut la cause de l'Islam. Ainsi les Musulmans quittèrent la Mecque pour Yathrib, individuellement ou par petits groupes pour
pouvoir échapper aux représailles de Quraych.
Les Incroyants, dans leurs réactions démesurées, ne purent retenir que les plus démunis des Musulmans, qu'ils torturèrent
d'ailleurs sauvagement. Cependant ils furent impuissants d'empêcher les autres de partir pour Yathrib, qui allait devenir le
premier pôle de l'Islam.
Quraych prit enfin une grave décision au début du mois Rabi' premier de l'an 13 après la Révélation. Cette grave décision
consistait à assassiner le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Tous ses notables étaient présents,
mais ceux qui furent les plus en vue étaient:
1 - 'Abu Djahl
2 - Djubayr ibn Mut'im al-Harith ibn 'Amir et Tu'ayma ibn 'Uday
3 - 'Utba ibn Rabî'a, son frère Chayba et 'Abu Sufyân ibn Harb
4 - An-Nazr ibn al-Harith ibn Kilda
5 - 'Abu al-Buktury ibn Hicham, Zum'a ibn al-'Aswad
6 - Nabîh et Munbih, fils d'al-Hadjâdj
7 - 'Umaya ibn Khalaf
Comment devrait être perpétrer cet assassinat-là? Chaque tribu désignerait un jeune homme et ensuite tous les jeunes
hommes, armés d'épées, s'introduiraient de nuit dans la maison du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) pour
commettre leur crime. Le sang du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) se répartirait ainsi entre toutes les tribus
quraychites. Et ainsi les Banou 'Abd Manaf ne pourraient pas mener la guerre contre toutes ces tribus.
Néanmoins, ce plan ne se réalisa qu'en partie. Les incroyants, cette nuit-là, encerclèrent en effet la maison du Prophète
(Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) qui se trouvait encore chez lui mais qui savait déjà ce qui se tramait. ...L'ange Gabriel
(Salut sur lui) descendit au Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), écrit Ibn Ishaq, et lui dit: ... Ne dors pas
cette nuit dans ton lit comme tu en as l'habitude."
Les incroyants surveillèrent la maison en attendant le moment décidé lequel était après minuit, mais la machine du complot
se grippa et le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) réussit à passer le cercle des guetteurs endormis. Il jeta
même sur eux un peu de terre tout en récitant le Verset: « Et Nous mettrons une barrière devant eux et une barrière
derrière eux; Nous les recouvrirons d'un voile: et voilà qu'ils ne pourront rien voir." (Sourate Ya Sin (36), verset 9).
Dieu ne dit-Il pas dans le Saint Coran: « (Et rappelle-toi) le moment où les mécréants complotaient contre toi pour
t'emprisonner ou t'assassiner ou te bannir. Ils complotèrent, mais Allah a fait échouer leur complot, et Allah est le
meilleur en stratagèmes. » (Sourate Al Anfal (8), 30).
Un Quraychite, qui n'était pas présent, vint à réveiller les assaillants de leur sommeil et les sermonna pour avoir laissé
échapper le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Ne le croyant pas sur parole, ils allèrent vérifier et ne
trouvèrent en fin de compte que 'Ali ibn Abi Talib allongé sur la place du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Mais, qu'est-ce qui empêcha les Quraychites de violer la maison du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) ? Cet
événement fut rapporté par as-Sahily dans son livre ar-Raoudh al-Anif: "Les assaillants essayèrent de sauter par le mur...
mais une femme cria, les empêchant ainsi de pénétrer de force. Ils se dirent que cela allait être une honte au cas où les
Arabes entendraient qu'ils avaient fait le mur des maisons des cousines... Cela fit différer l'exécution du meurtre jusqu'à la
sortie du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) de chez lui. Puis, un voile fut mis devant leurs yeux et ils ne le
virent pas sortir."
Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), dès sa sortie, se dirigea sans tarder vers la maison d'Abu Bakr as-
Siddiq, et lui dit que Dieu l'avait donné l'ordre de quitter le pays et d'entamer l'exil (l'hégire = al-Hijra). Puis, ils sortirent
ensemble par derrière la maison, avec quelques bagages. Pendant ce temps-là, les Quraychites encerclaient encore la
maison du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Les deux compagnons s'étaient déjà mis en route bien avant l'aurore, guidés, dans leur pénible voyage, par un éclaireur
qu'Abû Bakr avait payé à cet effet. C'était 'Abdallah ibn Arqat, un commerçant de la tribu des bani ad-Di'al. Pour ne pas être
surpris par les incroyants, ils prirent la route sud qui allait vers le Yémen, évitant intentionnellement ainsi la route nord qui
menait vers Médine. Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) savait déjà aussi que toute la région serait sous une
telle étroite surveillance qu'il leur serait dangereux de faire le voyage. Aussi interrompirent-ils la marche dès le matin de
cette nuit historique et décidèrent-ils d'un commun accord de se cacher momentanément dans une cavité située dans la
montagne Thawr, au sud de La Mecque. Ils y restèrent cachés trois jours durant lesquels les recherches ne s'arrêtèrent pas
à cause de la prime promise ; cent chamelles pour celui qui ramènerait le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
mort ou vif.
Dans leur poursuite, les incroyants s'étaient rapprochés même de la cavité mais n'avaient pas pu voir les deux
compagnons, car ils étaient aveuglés. Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) n'avait-il pas dit à Abu Bakr pris de
panique: "Qu'en dis-tu de deux unis dont Dieu le troisième, ô Abu Bakr?"
Pendant ces jours passés dans la cavité, les deux exilés recevaient la visite de 'Abdallah ibn Abu Bakr et de 'Amir ibn
Fahîra, un esclave affranchi par Abu Bakr, les seuls à connaître leur cache. Ces derniers avaient pour mission, le premier
d'informer le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et son père sur ce qui se passait à La Mecque, le second de
les ravitailler et d'effacer, à l'aide de son troupeau, les traces des pas du fils d’Abû Bakr.
Le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et son compagnon ne reprirent le chemin de l'exil qu'après
s'être assurés que leurs poursuivants avaient relâché leur vigilance. Devant eux, 'Abdallah ibn Arqat ouvrait le chemin, et
avec eux 'Amir ibn Fahira qui s'associa au voyage historique. Pour plus de sécurité, l’éclaireur les emmena plus au sud en
direction du Yémen puis bifurqua vers l'ouest en direction de la mer Rouge. Puis, tous les quatre, ils longèrent la côte en
allant vers le nord, toujours à l'écart des routes habituellement empruntées par les voyageurs, jusqu'à leur arrivée au village
de Qoubâ dans les environs de Médine.
Bien qu'ils laissèrent bien loin derrière eux la zone dangereuse, le Prophète et Abu Bakr étaient constamment en alerte, car
ils savaient que leurs têtes étaient mises à prix. Raison leur fut donnée parce qu'ils furent rattrapés par un cavalier du nom
du Surâqa ibn Malik, un notable de la tribu de Kinâna qui se converti à l'Islam plus tard. Quand il les vit, il se précipita sur
eux, ayant en tête la forte récompense. Mais son cheval se cabra et il fut projeté violemment à terre devant le Prophète. Il
demanda alors "al-amân". Lui qui était venu avec l'intention de nuire au Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), il
repartit sain et sauf avec un "aman" écrit. De retour à La Mecque, il ne dit mot à personne.
Cette menace écartée, plus rien ne s'était mis en travers de leur chemin vers Médine. Ils avaient accompli leur voyage en
onze jours.
Les Médinois informés déjà du départ des deux compagnons, brûlaient d'envie de les voir enfin parmi eux. Ce fut un juif qui
les vit le premier et qui leur donna l'alerte: "Ohé, les Banou Qila (Les 'Ansâr)! Voici votre ami qui arrive!" Et ce fut le
déferlement, la joie! Tout Médine alla à la rencontre de Muhammad ibn Abdallah (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Avant de rentrer dans Médine, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), Abu Bakr, ibn Fahîra et l'éclaireur furent
accueillis dans le village de Qoubâ par les banû 'Amrû ibn 'Awf chez qui ils passèrent quatre jours, Durant ces quelques
jours, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) bâtit une mosquée, appelée désormais mosquée de Qoubâ. Après
quoi, il rentra dans Yathrib. Pendant son trajet vers le centre de Médine, chacun des chefs des tribus l'invitait à aller habiter
dans sa maison. Mais le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) déclinait poliment chaque offre. Ensuite, il se mit
sur le dos de sa chamelle, lâcha la bride pour laisser l'animal libre de ses mouvements. Elle s'en allait entre les rues de la
ville et les Musulmans en liesse lui ouvraient le passage, la suivaient curieux de l'endroit où elle allait s'arrêter. Les Juifs et
les Associants regardaient aussi cette nouvelle vie commencer.
La chamelle s'arrêta à un endroit où elle se mit à terre. Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) descendit alors et
demanda à qui appartenait l'endroit. "A Sahl et Suhayl, fils de 'Amrû. Ce sont deux orphelins, lui avait répondu Mu'âz ibn
Afraa, ils te l'offriront de bon cœur."... Ce fut là où se battirent la mosquée du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur
lui) et sa demeure.
Dorénavant, Médine allait devenir le rempart de la nouvelle communauté et le centre d'où rayonnerait l'Islam. Mais, tout
d'abord le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) s'était attelé à désamorcer une situation explosive caractérisée
par trois types de problèmes:
1 - Le conflit chronique entre les 'Aws et les Khazradj.
2 - Le problème des réfugiés mecquois qui avaient laissé leurs biens, et qui dès lors se retrouvaient pauvres et sans
revenus.
3 - Les éléments juifs de la région, avec leur poids politique, économique et militaire dans la société médinoise.
Et ce fut, en premier, la construction de la mosquée du Prophète, où allaient se pratiquer les rites de la nouvelle religion et
se rencontrer les Musulmans pour discuter des différents problèmes qui avait retenu tous les efforts. Cette mosquée était
d'une extrême simplicité; sa surface étant de cent coudées sur cent autres coudées, couverte de gravier et de sable, ses
piliers étant des troncs de palmiers, son toit de palmes, et ses murs en toub (paille mélangée à de la terre) . Le premier
discours du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) qu'abrita cette mosquée fut rapporté par al-Bayhaqy d'après le
témoignage de 'Abd ar-Rahman ibn ‘Awf: "O gens! Travaillez pour le salut de vos vies. Par Dieu, vous savez bien qu'un jour
l'un de vous sera certainement foudroyé et laissera son troupeau sans berger. Et là, Son Seigneur lui dira avec certitude,
sans intermédiaire et sans voile qui le cache: «Mon Messager ne t'est-il pas venu et t'a informé? Ne t'ai-Je pas donné
richesse et plus? Qu'as-tu fait donc pour ton salut?» Et là, il regardera à droite puis à gauche mais il ne trouvera rien.
Ensuite, il regardera devant lui mais ne trouvera que la Géhenne. Celui qui peut donc sauver sa vie du Feu, même avec un
morceau d'une datte, qu'il le fasse, et celui qui ne peut pas, qu'il le fasse avec un gentil mot. Avec ce mot, un bienfait sera
récompensé de dix bienfaits comparables et plus, jusqu'à sept cents. Et paix sur vous et sur le Messager de Dieu."
Peu après, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) procéda à la fraternisation entre les Muhâdjir et les 'Ansâr,
lors d'une réunion organisée à cet effet. Ce lien de fraternisation sera plus fort et d'une plus grande efficacité que les liens
d'alliance connus auparavant chez les arabes. Les 'Ansâr étaient très heureux car ils avaient vu en cela leur espoir pour
réaliser la paix, la sécurité et la stabilité entre les 'Aws et les Khazradj. Les Muhâdjir y avaient trouvé, eux aussi, aide et
assistance contre la misère qui les frappait suite à l'exil.
Ainsi le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) réussit-il à relever le défi en jetant les bases solides de la nouvelle
communauté. La plus importante d'entre ces bases fut celle de la réalisation de l'union des 'Aws et des Khazradj. Par cette
union, la cause de l'Islam allait se renforcer, particulièrement sur le plan militaire et allait par la suite garantir la paix et la
stabilité dans toute l'Arabie.
Après cela, il organisa les relations de la société musulmane avec les non musulmans (les juifs de Médine), par la signature
d'un accord de coexistence pacifique, de bon voisinage et de défense commune. Cet accord garantissait aussi la liberté
d'opinion, de croyance et le droit des personnes de disposer de leurs biens.
Six mois seulement après la Hijra avaient suffi à Médine pour devenir la véritable capitale de l'Islam. En peu de temps, les
premiers musulmans avaient vu tous les médinois embrasser l'Islam (sauf les juifs).
Les quelques Hypocrites, qui s'y faufilèrent, n'avait pu nuire à la cause du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Les versets qui allaient organiser la communauté des Musulmans, descendirent sur le Messager de Dieu, tels que ceux de
la Zakat, de la permission de prendre les armes contre les ennemis de l'Islam, de l'appel à la prière...
Cependant, les bonnes choses ne venant pas toujours ensemble, les juifs allaient par des manigances ranimer les vieilles
querelles entre les 'Ansâr, essayer de provoquer des désordres dans le but de faire échouer la cause de Muhammad, le
Messager de Dieu. Bien que leurs rabbins s'étaient assurés de la véracité du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur
lui), ils s'étaient laissés envahir de sentiments de jalousie et de haine, à l'instar des deux rabbins Huyay ibn Akhttab, le père
de Sufaya, la Mère des Croyants et son frère Yassir.
Voici le témoignage de Sufaya rapporté par ibn Ishaq: ... Quand le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) est arrivé
à Médine et qu'il s'arrêta à Qouba chez les Banou 'Amrû ibn 'Awf, mon père Huyay ibn Akhttab et mon oncle Yassir ibn
Akhttab sont allés le voir à la fin de la nuit et ne sont revenus qu'au coucher du soleil. J'ai essayé de les égayer comme j'en
avais l'habitude. Par Dieu, aucun n'a fait attention à moi tellement ils étaient affligés... Et j'ai entendu mon oncle Yassir dire à
mon père Huyay ibn Akhttab: «Est-ce lui? Es-tu sûr que c'est lui (c-à-d le Prophète).
- Oui, par Dieu, lui a répondu mon père.
- Le connais-tu? L'as-tu authentifié? -Oui.
- Et qu'as-tu l'intention de faire avec lui?
- Par Dieu, je serai son ennemi tant que je vis!»
'Ibn Ishaq raconte aussi en se basant sur le témoignage de 'Abdallah ibn Salâm (un Israélite qui avait embrassé l'Islam) la
scène suivante: «Je ('Abdallah ibn Salâm) suis allé au Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et je lui ai
dit: "O Messager de Dieu, je sais que les juifs sont des gens de calomnie, et je veux bien que tu me laisses assister à
l'entretien, caché dans une de tes pièces. Puis tu leur demandes ce qu'ils pensent de moi avant qu'ils ne sachent que je suis
musulman. S'ils le sauront, ils me calomnieront et ils me trouveront des défauts". Il a accepté et je me suis caché dans une
pièce. Us sont venus et ont discuté avec lui. Puis il leur demanda qui j'étais. Ils ont répondu: "Notre seigneur et le fils de
notre seigneur, notre rabbin et notre savant!!..." Et quand ils ont terminé de parler, je suis sorti et je leur ai dit: "O juifs!
Craignez Dieu et acceptez ce qu'il vous dit. Par Dieu, vous savez très bien qu'il est un Messager. Vous trouvez ceci écrit
dans la Torah, avec son nom et sa description. Je témoigne qu'il est le Messager de Dieu, je crois en lui et j'ajoute foi en lui.
Je le connais parfaitement". "Tu mens, m'ont-ils répondu", et ils me sont tombés dessus... Alors j'ai dit au Messager de Dieu
(Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) : "Ne t'ai-je pas dit, O Messager de Dieu, qu'ils sont gens de calomnie; gens de
perfidie, de mensonge et d'immoralité?"
Cette animosité des juifs s'était traduite plus tard à maintes reprises contre le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur
lui) et chaque les fois les Musulmans purent déjouer leurs complots, leurs manigances, etc.
Les hypocrites, de leur côté, tentèrent aussi de nuire à la cause de l'Islam mais ne réussirent pas. Pour porter atteinte à
l'union des Musulmans, ils avaient construit une mosquée dans laquelle ils feignaient de faire la prière mais, en vérité, ils se
réunissaient pour comploter. Mais, peu de temps après sa construction, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
fut informé de la véritable intention de ces hypocrites et du dévoiement de la mosquée. Ce qui l'obligea à ordonner sa
destruction. Dieu dit à propos de ces hypocrites: «Ceux qui ont édifié une mosquée pour en faire [un mobile] de
rivalité, d'impiété et de division entre les croyants, qui la préparent pour celui qui auparavant avait combattu Allah
et Son Envoyé et jurent en disant: ‹Nous ne voulions que le bien!› [Ceux-là], Allah atteste qu'ils mentent. » (Sourate
Le Repentir (9), verset 107)
« La construction qu'ils ont édifiée sera toujours une source de doute dans leurs coeurs, jusqu'à ce que leurs
coeurs se déchirent. Et Allah est Omniscient et Sage.»
(Sourate Le Repentir, verset 110).
Les conditions par lesquelles s'était exilé le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) étaient des conditions
de tension militaire (embargo économique et social puis condamnation à mort du Prophète...). Il était donc naturel que les
deux parties (La Mecque et Médine) mènent l'une contre l'autre, des actions tant sur le plan politique, économique que
militaire.
Entre l'exil du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et la bataille de Badr, dix-huit mois s'étaient déjà écoulés.
Pendant cette période, aucun affront sanglant ne fut enregistré, sauf ce qui se passa lors d'une mission de reconnaissance
accomplie par une unité de musulmans sous le commandement de 'Abdallah ibn Djahch, juste avant la bataille.
Les mouvements militaires des Musulmans ressemblaient beaucoup plus à des missions de reconnaissance du terrain
(chemins entourant Médine, sentiers et autres voies menant à La Mecque...). Ils testaient aussi la puissance des tribus de la
région et essayaient de les gagner à leur côté par un pacte d'alliance ou par aménité (au moins). De plus, ils voulaient, par
ces mouvements, impressionner les Associants et les juifs qu'ils étaient une force pouvant anéantir toute attaque.
Les patrouilles menées par les Musulmans peuvent être résumées en ce qui suit:
1 - Une patrouille de combat sous le commandement de Hamza ibn 'Abd al-Muttalib, composée de 30 cavaliers seulement.
Cette patrouille rencontrera une caravane commerciale appartenant à Quraych, qui marchait sous l'escorte de 300 gardes
commandés par 'Abu Djahl ibn Hicham. La rencontre eut lieu dans la région d'al-'Is, sur le littoral, pendant le Ramadhan de
l'an I de l'Hégire. Mais il n'y eut pas de combat à cause de^ l'interposition de Mudjdy ibn 'Amrû al-Djuhany.
2 - Une patrouille, de combat forte de 60 cavaliers sous le commandement de 'Ubayd ibn al-Harith, sortit vers la vallée de
Râbigh, pendant le mois de Chawwâl de l'an I. Son but était de menacer le commerce de Quraych. Cette patrouille
rencontra 200 combattants Quraychites sous le commandement de 'Abu Sufyân. Mais le combat n'eut pas lieu.
Cette incursion vit le ralliement d'al-Muqdâd ibn 'Amrû al-Bahranite et de 'Utba ibn Ghazwân qui étaient déjà musulmans
avant de sortir avec la compagnie mecquoise.
3 - Une patrouille de reconnaissance composée de 8 Muhajir commandés par Sa'd ibn Abu Waqâs, se dirigera jusqu'à al-
Kharrar dans le but de menacer la route commerciale de Quraych, et ce, pendant Dhû al-Qi'da de l'an I. Aucun affrontement
avec l'ennemi.
4 - L'incursion de Wadân menée par le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) jusqu'à la région du même nom,
durant le mois de Safar de l'an II. Son unité de combat se composait de 200 combattants. Ils ne livrèrent pas bataille mais
revinrent à Médine avec un accord de non-agression avec les tribus des banû Zumra ibn Bakr ibn Kinâna.
5 - L'incursion de Buwât: Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) sortit avec 100 combattants dans la région de
Buwât, sur la route menant de la Syrie à La Mecque, et ce durant le mois de Rabi' 1er de l'an II. Le but de la patrouille était
de tendre un piège à une caravane de Quraych. Mais celle-ci s'échappa.
6 - L'incursion d'al-'Achîra: 200 combattants dirigés par le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) allèrent à l'endroit
"al-'Achîra" dans la région Yanbu’ dans le but de menacer le commerce de Quraych. La compagnie revint sans qu'il ait eu
accrochage car la caravane avait pu s'échapper. Cependant, le Prophète réussit, pendant l’incursion, à signer un pacte de
non-agression avec les banû Modladj alliés de banû Zumra, et ce, durant le mois de Djumâda I de l’an II.
7 - La première incursion de Badr. En Djamâda II de l'an II, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) sorti avec une
compagnie forte de 200 combattants pour pourchasser des unités légères des Associants qui avaient pillé quelques
troupeaux, près de Médine. La poursuite s'arrêta à la vallée Safwân, près de Badr sans résultat.
8 - La dernière expédition sera celle dirigée par 'Abdallah ibn Djahch avec mission de mener une opération de
reconnaissance sur les Quraychites. La patrouille composée de 08 Muhajir, arriva à l'endroit "Nakhla", entre La Mecque et
Tâ'if et pu prendre au piège une caravane Quraychite chargée de marchandises.
Lors de l'accrochage, un Associant 'Amrû ibn al-Hazramy fut tué. Et toute la caravane fut ramenée A Médine avec deux
prisonniers. Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) exprima sa désapprobation car tuer et confisquer s'étaient
passés pendant le mois de Radjab, un des mois sacrés (hurum). Mais Dieu conforta son Messager et sauva la patrouille.
Dieu fit descendre le verset suivant : « Ils t'interrogent sur le fait de faire la guerre pendant les mois sacrés. - Dis: ‹Y
combattre est un péché grave, mais plus grave encore auprès d'Allah est de faire obstacle au sentier d'Allah, d'être
impie envers Celui-ci et la Mosquée sacrée, et d'expulser de là ses habitants. L'association est plus grave que le
meurtre. » (Sourate Al Baqarah (2), verset 217).
Avec ce verset, le conflit armé allait être très âpre, les deux parties étant conscientes des enjeux. Les craintes des
incroyants mecquois se réalisèrent, tandis que Médine resta tout le temps en alerte surveillant tout mouvement commercial
des Quraych entre la Mecque et la Syrie.
Au début de l'automne de l'an II, Médine reçu l'information de ses espions disant que 'Abu Sufyân ibn Harb était sorti vers la
Syrie. Le Prophète (qu'Allah soit satisfait de lui) quitta alors Médine, accompagné de 200 combattants pour intercepter la
caravane, et cela dans l'incursion d'al-'Achîra. Mais la caravane avait pu se sauver et regagner la Syrie.
Ce qui les obligea à l'attendre. De plus, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) envoya une patrouille, composée
de Talha ibn 'Ubaydallah et Sa’id ibn Zayd, guetter le retour de la caravane. Ils arrivèrent à al-Hawrâ', une source d'eau
appartenant aux bani Tâ'iy 'au nord-ouest de Médine, et attendirent jusqu'à son retour. Quand 'Abu Sufyân apparut avec les
1000 chameaux, ils retournèrent et informèrent le Prophète.
Ce dernier, avec son armée, s'était alors mis en mouvement pour maîtriser cette fois la caravane quraychite.
Après avoir entendu le rapport, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) avait appelé les Musulmans à participer à
l'expédition sans toutefois les forcer à s'enrôler; il leur avait laissé le choix libre mais leur avait mis en relief l'aspect positif.
«Voilà les chameaux de Quraych chargés de marchandises. Sortez vers la caravane, leur avait-il dit, peut-être que Dieu
vous la donnera comme butin».
Ce fut pour cela que de nombreux Musulmans n'avaient pas participé à l'expédition, d'autant plus que personne ne pensait
qu'il y aurait bataille. Ils pensaient à une simple interception d'une caravane Quraychite gardée par seulement 40 cavaliers,
qui, à la vue de 300 combattants, prendraient la fuite.
Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) ne niera pas cette vérité. En voici la preuve. Quand les Musulmans qui
étaient restés à Médine allèrent à la rencontre du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) après la bataille, 'Usaïd
ibn al-Huzayr dira: "Par Dieu, ô Messager de Dieu, je n'ai pas participé à la bataille non parce que je croyais que tu allais à
la rencontre d'un ennemi mais parce que je croyais que c'était à cause d'une caravane. Si j'ai cru que c'était un ennemi, je
n'aurais pas reculé".
- Tu as raison, lui répondra le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui).
Avant le départ de l'armée pour l'endroit qui allait être le premier champ de bataille de l'Islam, le Prophète (Saluts et
bénédictions d'Allah sur lui) laissa à Médine ibn 'Um Maktûm, et désigna comme émir de la ville 'Abu Labâba, les libérant
ainsi de participer à l'expédition. Puis il donna le drapeau du commandement à Mus'ab ibn 'Umayr al-Quraychy, répartit les
troupes en deux compagnies sur une base tribale; celle des Muhajir sous les ordres de 'Ali ibn 'Abu Talib et celle des 'Ansâr
sous les ordres de Sa'd ibn Mu'âth, le flanc droit étant dirigé par az-Zubayr ibn al-'Awâm, le flanc gauche par al-Miqdâd ibn
'Amru al-Kindy, les seuls cavaliers de l'armée, et l'arrière sous la responsabilité de Qaïs ibn Abu Sa'sa'a.
L'armée de Médine se chiffrait alors à 317 hommes, répartis ainsi: 231 'Ansârites et 86 Muhajir (41 hommes étant des
Quraychites, les 45 restants étant des esclaves affranchis et des alliés). Pour le déplacement des troupes, on avait utilisé 70
chameaux sur lesquels se reposaient les combattants à tour de rôle, et auxquels on avait enlevé les cloches pour garder
secrets les mouvements de l'armée. Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) envoya aussi des hommes de
troupe espionner la caravane d"Abû Sufyân forte de 1000 chameaux.
Pour arriver à Badr, les Musulmans suivirent l'itinéraire suivant:
Le col dans la montagne près de Médine- la vallée d'al-'Aqiq-Dhû al-Halîfa, à 6 miles de Médine - la vallée d"Ûlât et-Jaïch-
la vallée du Turbâne -Malal, un endroit à deux nuits de marche pour une caravane - Ghamîs al-Hamâm, une vallée -
l'endroit as-Sayâla -le défilé d'ar-Rawhâ'.
Quittant le puits d'ar-Rawhâ', ils s'écartèrent à gauche de la route menant vers la Mecque puis bifurquèrent à droite, à côté
d'an-Nâzia et suivirent cet itinéraire: la vallée de Wahqân - la vallée d'es-Safrâ' -la vallée d'Afrân (le Prophète (Saluts et
bénédictions d'Allah sur lui) fut informé, à la sortie de cette vallée, des mouvements de l'armée de Quraych vers Badr) - les
cols d'al-'Asâfir -ad- Daba, une contrée - et enfin al-Hunân, une dune de sable imposante comme une montagne. Là, les
Musulmans s'arrêtèrent et se cachèrent derrière, tout près de Badr.
Badr était un point d'eau très connu des Arabes, ainsi qu'un carrefour de commerce important. Cet endroit fut dénommé
ainsi du nom du premier qui y creusa un puits: Badr ibn Quraych ibn Mukhalid ibn an-Nazr ibn Kinâna. Badr, l'endroit, se
situe au sud-ouest de Médine et au nord de La Mecque. En suivant l'itinéraire des caravanes, il se trouve à 160 mayl des
Médine et à 250 miles (450 Kms) de La Mecque. Mais, aujourd'hui, la distance par route est respectivement de 153 Kms et
35 Kms. Enfin, Badr se trouve à 30 Kms à l'est de la mer Rouge.
Quant à l'autre partie (la caravane), son chef 'Abu Sufyân - il était responsable des 1000 chameaux - était très prudent et en
alerte car il savait que la route vers La Mecque était pleine de dangers. Il envoya ses espions dès l'instant où la caravane
était passée dans le territoire d'al-Hijâz.
La reconnaissance ne tarda pas et on l'informa que Muhammad (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et son armée étaient
sortis à sa rencontre. Il envoya alors immédiatement un émissaire (Zamzam ibn 'Amrû al-ghifari) alerter Quraych.
Toutes les tribus de Quraych participèrent au déploiement rapide d'une armée à laquelle se joignirent tous les notables et
chefs à l'exception d"Abû Lahab qui était malade mais qui envoya un autre à sa place et Safwâne ibn 'Umaya car son père
et son frère étaient partants.
Avant d'entamer la marche, Quraych avait dû régler le conflit armé qui les opposait aux tribus des Banou Bakr de Kinâna. Ils
eurent l'assurance de Surâqa ibn Malik ibn Dja'chim, un noble de Kinâna. Ce qui les fit sortir précipitamment.
Selon Ibn Kathîr dans son livre (al-Bidâya wa an-Nihâya), Dieu fit descendre ces versets: « Et ne soyez pas comme ceux
qui sortirent de leurs demeures pour repousser la vérité et avec ostentation publique, obstruant le chemin d'Allah.
Et Allah cerne ce qu'ils font. Et quand le Diable leur eut embelli leurs actions et dit: ‹Nul parmi les humains ne peut
vous dominer aujourd'hui, et je suis votre soutien.› Mais, lorsque les deux groupes furent en vue l'un de l'autre, il
tourna les deux talons et dit: ‹Je vous désavoue. Je vois ce que vous ne voyez pas; je crains Allah, et Allah est dur
en punition›. » (Sourate Al Anfal (9), versets 47, 48,).
Ayant assuré ses arrières, Quraych lança ses guerriers vers le champ de bataille. En route pour Badr, l'armée qurayshite
avait suivi l'itinéraire suivant: la vallée de 'Usfân, entre La Mecque et Râbigh - Qudayd, près de Tuwâl, - al-Djuhfa, un village
au bord de la vallée de Rabigh, à 6 miles de la mer - al-'Abwâa, un village à 23 miles d'al-Djuhfa - et enfin Badr.
Ses guerriers étaient au nombre de 1300 environ, avec 60 chevaux et 600 boucliers. Quant aux chameaux, leur nombre
n'avait pu être déterminé. Le ravitaillement des troupes était assuré par les notables: 'Abu Djahl, 'Umaya ibn Khalif, Suhaïl
ibn 'Amrû, Chayba ibn Raî'a. Otba ibn Rabfa, Nabîh ibn el-Hadjâdj et Munbih ibn al-Hadjâdj, al-Abbas ibn 'Abd al-Muttalib,
'Abu al-Buhturi ibn Hicham. Chacun de ces notables avait égorgé 10 chameaux à chaque fois que les troupes s'arrêtaient
en cours de chemin.
Pendant ce temps-là, 'Abu Sufyân prenait toutes les précautions pour ne pas tomber entre les mains du Prophète (Saluts et
bénédictions d'Allah sur lui), mais sans changer la direction habituelle empruntée par la caravane. Il fut sauvé quand il
rencontra Mudjdy ibn 'Amrû qui lui dit qu'il avait vu deux chameliers sur une hauteur toute proche. Il alla vérifier à l'endroit où
étaient les deux hommes, observa la bouse des chameaux et fut certain que les deux hommes appartenaient à l'armée du
Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Ce qui l'avait amené à changer la direction de la caravane vers la côte, à
l'ouest.
Et quand il s'assura que les biens qurayshites étaient sauvés, il envoya à Quraych un émissaire les informant de la situation
nouvelle et les conseillant de retourner à La Mecque.
Mais c'en aurait été si ce n'était pas 'Abu Djahl qui avait refusé le conseil d"Abû Sufyân et qui avait insisté à ce que l'armée
arrivât à Badr et à y passer 03 jours entiers à festoyer. Par cette manœuvre militaire, 'Abu Djahl voulait montrer aux Arabes,
et surtout aux tribus des environs, la force de La Mecque. Cependant, il avait enregistré l'opposition d'al-Akhnas ibn Chariq
ibn Wahb qui s'était retiré avec ses 300 guerriers.
Ce retrait n'avait pas pour autant empêché 'Abu Djahl de progresser vers Badr.
Dorénavant, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) et ses Compagnons avaient un nouveau problème auquel ils
devaient faire face. Des troupes ennemies à Badr constituaient un danger pour Médine, et un péril pour l'Islam. Le Prophète
(Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) réunit alors son conseil militaire pour connaître les avis des ses adjoints. Car, au
début, les Musulmans étaient sortis pour intercepter la caravane protégée seulement par 40 guerriers mais avec les
nouvelles données, ils se trouvaient, dès lors dans une situation très critique.
La réunion n'avait pas commencé que les Muhajir déclarèrent leur détermination à s'accrocher avec l'armée des Incroyants.
Mais le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) voulait aussi savoir la position des 'Ansâr car c'étaient eux qui allait
recevoir tout le poids de la bataille à venir, et que l'alliance d'al 'Aqaba ne les obligeait pas à combattre loin de leurs foyers; il
craignait que les 'Ansâr ne voyaient sa victoire que s'il est attaqué à Médine. Cependant ses craintes furent vite dissipées;
leur réponse était très claire, ils étaient déterminés et prêts à croiser le fer avec leurs ennemis.
Sans attendre une minute de plus, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) donna l'ordre à sa petite armée de
continuer le mouvement vers Badr en disant: « En marche! (...) Dieu le Très-Haut m'a promis [la victoire sur] l'une des deux
troupes... Par Dieu, c'est comme si je vois ces gens-là terrassés ». En cours de route, il devança ses troupes pour
reconnaître le terrain et les mouvements des Quraychites. Et après son retour à son poste de commandement, il envoya le
soir même, une patrouille de reconnaissance vers Badr pour de plus amples informations. Cette patrouille revint de sa
mission avec 2 esclaves faits prisonniers qu'elle présenta au Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Celui-ci les
interrogea immédiatement sur le campement des Quraychites et le nombre de leurs forces. Puis il leur demanda quels
nobles de Quraych étaient là pour la bataille.
Le 16 Ramadan 02 Hijri, l'armée musulmane se dirigea rapidement vers les eaux de Badr pour empêcher les guerriers
ennemis de venir se désaltérer. Suivant les conseils d'al-Hubâb ibn al-Mundhir l’Ansârite, les Musulmans se rapprochèrent
du point d'eau le plus proche des troupes de Quraych, détruisirent les sources d'eau, puis se tinrent prêts pour la bataille,
tout près du puits laissé intact.
Quand l'ennemi avait su le changement de la situation par l'intermédiaire de 'Umayr ibn Wahb, un patrouilleur de
reconnaissance, c'était déjà trop tard. Ce dernier les avait même conseillé de décrocher. Ce qui d'ailleurs n'avait pas non
plus empêché l'explosion d'une seconde opposition, plus grande que la première, menée par 'Utba ibn Rabi'a, seigneur des
banû 'Abd Chams, appuyé en cela par Hakim ibn Huzâm. L'idée de cette opposition qui avait éclaté un jour, ou moins d'un
jour avant la bataille était d'éviter l'affrontement avec l'armée de Médine, de l'amadouer (accord par aménité) et de retourner
à la Mecque.
Hakim ibn Hizâm était allé convaincre le grand et respecté seigneur de Quraych 'Utba ibn Rabi'a (le premier à être tué à
Badr). Ce dernier, ayant accepté, avait, à son tour demandé à Hakim de convaincre 'Abu Djahl, puis avait pris son chameau
rouge et avait essayé de raisonner les guerriers quraychites.
Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) qui voyait de loin l'armée Quraychite avait dit que s'il y aurait une bonne
action, c'était de "celui qui montait son chameau rouge" (c-à-d Utba ibn Rabi'a).
Mais quand 'Abu Djahl fut informé de la tentative de 'Utba, il l'accusa de lâcheté et de mauvaise volonté pour sauver son fils
'Abu Hathîfa ibn 'Utba qui était parmi les Musulmans. 'Utba se mit alors en colère et dit donc: "On va connaître qui a peur,
moi ou lui!" Et c'était ainsi qu'avait échoué cette opposition, dans l'emportement.
Dès lors, les deux armées se trouvaient face à face et chacun des deux camps attendait qui le premier lancerait l'attaque.
Ce fut 'Abu Djahl qui, par peur d'une autre opposition, fit précipiter les événements. Il appela 'Amir ibn al-Hazramy et l'excita
à se venger des Musulmans qui avaient tué son frère 'Amrû ibn al-Hazramy lors de la patrouille de reconnaissance
d'Abdallah ibn Djahch.
'Amir avait été l'étincelle qui avait jeté les troupes Quraychites dans la bataille. Il lui avait suffi d'un mot, comme c'était de
tradition, pour les faire monter contre les Musulmans.
De l'autre côté, les Musulmans étaient sur le pied de guerre. Après qu'ils eurent pris position à l'endroit choisi par al-Hubâb
ibn al-Mundhir, on avait aménagé, sur proposition de Sa'd ibn Mu'âth, un poste de commandement pour le Prophète (Saluts
et bénédictions d'Allah sur lui) avec sa garde composée de jeunes 'Ansâr.
Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) avait déjà organisé les premières lignes et avait dit aux Musulmans: «
Par Celui qui détient la vie de Muhammad, ne les combat aujourd'hui que l'homme patient, digne d'estime, qui avance et qui
ne recule pas, jusqu'à l'instant où Dieu l'accueille dans Son Paradis.»
Ses paroles étaient d'une telle force que 'Umayr ibn al-Hamâm, qui tenait dans sa main quelques dattes, les jeta et dit avec
détermination: «Quel honneur! Entre moi et le Paradis, il n'y a que cela!...».
Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) avait aussi recommandé à ses compagnons de ne pas commencer les
premiers la bataille, d'attendre ses ordres et de tirer sur l'ennemi avec les flèches s'ils seraient encerclés. Ensuite, il était
revenu à son poste en compagnie d"Abû Bakr as-Siddiq.
A l'approche des deux années, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) s'était tourné vers Dieu et avait persisté
dans ses prières en disant: «Dieu! Si Tu fais périr ce groupuscule (les Musulmans), Tu ne seras plus adoré sur terre.»
Et l'affrontement se produisit. Le premier à tomber sur le champ de bataille fut un kamikaze Quraychite, al-'Aswad ibn 'Abd
al-'Aswad al-Makhzumy, qui avait juré auparavant de boire du bassin aménagé et gardé par les Musulmans, de le détruire
ou de périr devant lui. Ce fut Hamza ibn 'Abd al-Muttalib qui l'avait empêché de boire en le tuant au bord du bassin.
La mort de ce Makhzumite avait suffi pour déclencher la bataille. En effet, trois cavaliers associateurs sortirent des rangs et
vinrent proposer le duel. C'étaient Chayba ibn Rabi'a, 'Utba ibn Rabi'a et son fils al-Walîd, tous les trois descendants de
'Abd Manâf, l'aïeul du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Se précipitèrent devant eux 3 jeunes ansarites.
C'étaient 'Awf et Mi'wath, fils de 'Afrâ' et 'Abdallah ibn Rawâha. Mais les trois Quraychites refusèrent de se mesurer à eux
car ils voulaient d'un duel interne à Quraych. Alors, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) désigna Hamza ibn
Abd al-Muttalib, ‘Ubayda ibn al-Harith et Ah ibn 'Abu Talib, tous les trois de la même famille (de 'Abd Manaf). Le duel avait
réuni les trois paires suivantes: ‘Ali al Walid, 'Ubayda Chayba, Hamza 'Utba.
L'issue du duel était au profit des Musulmans, 'Ali et Hamza sortirent victorieux, mais 'Ubayda, après avoir tué son vis-à-vis,
mourut entre les mains du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui), suite à la blessure grave qu'il avait reçue
pendant le duel.
Pris de colère, les guerriers associateurs fondirent sur les combattants musulmans qui résistèrent aux assauts répétés en
attendant le signal du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Cette tactique de défense avait entamé la patience
des Quraychites, et leur détermination aussi.
Ce fut le moment idéal pour la contre-attaque qui se déclencha, en effet subitement et avec force. Les rangs musulmans
frappaient des coups durs sur les forces éparpillées de Quraych. Pendant ce temps, le Prophète (Saluts et bénédictions
d'Allah sur lui) suivait attentivement tous les mouvements et remarquait le courage de ses combattants.
Al Boukhari rapporte qu'à mesure que la bataille s'intensifiait, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) disait:
«Dieu! J’en appelle à Ton engagement et à Ta promesse. Mon Dieu! Si Tu veux ne jamais être adoré après ce jour...» Abu
Bakr lui serra la main en lui disant: «Cela suffit, o Messager de Dieu. Tu insistes trop sur Ton Seigneur."
Ibn Ishaq écrit: Le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) s'est assoupi puis s'est réveillé et a dit à 'Abu Bakr:
«Bonne nouvelle ! O 'Abu Bakr. La victoire de Dieu arrive!»
Les anges avaient alors participé dans la bataille pour renforcer le moral des Musulmans. Le Coran ne le signale-t-il pas
dans les versets : « (Et rappelez-vous) le moment où vous imploriez le secours de votre Seigneur et qu'Il vous
exauça aussitôtٍt: ‹Je vais vous aider d'un millier d'Anges déferlant les uns à la suite des autres. Allah ne fit cela
que pour (vous) apporter une bonne nouvelle et pour qu'avec cela vos coeurs se tranquillisent. Il n'y a de victoire
que de la part d'Allah. Allah est Puissant est Sage. » (Sourate Al Anfal (9), versets 9,10).
Après quoi, le Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) se jeta dans le feu de la bataille en disant : « Leur
rassemblement sera bientٍôt mis en déroute, et ils fuiront. L'Heure, plutôt, sera leur rendez-vous, et l'Heure sera
plus terrible et plus amère. » (Sourate La Lune (54), versets 45,46).
Effectivement, la bataille ne dura pas plus longtemps.
'Abu Djahl essayait vainement d'organiser ses troupes mais c’était déjà la défaite qui se rapprochait. Du point de vue
purement militaire, 'Abu Djahl était un homme courageux qui ne craignait pas la mort, mais il était têtu et obstiné. Sa mort
vint des mains de Mu'âth ibn 'Amrû ibn ‘Ali-Djamûh l'Ansarite qui avait réussi à le blesser gravement en lui coupant la jambe
au niveaux du mollet. Son fils 'Ikrima intervenant tardivement coupa la main de Mu'âth. Quant à la troupe des associateurs,
elle s’enfuit.
Quand la bataille se termina, le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) voulut savoir le sort réservé à Abu
Djahl. On entama alors les recherches et ce fut 'AbdAllah ibn Mas'ûd qui le trouva en train de mourir et qui répondit à sa
question (A qui la victoire aujourd'hui?): « A Dieu, à Son Messager et aux Croyants.»
Abu Djahl, lors de sa rencontre avec al-'Akhnas ibn Churayq, à Râbigh, avait répondu en secret à la curiosité de ce dernier:
«Comment ment-il (le Prophète) sur Dieu, alors qu'on l'appelait l'Honnête? Car il n'a jamais menti. Mais qu'est-ce qui nous
reste, si se réunissent chez les 'Abd Manâf as-Siqâya, ar-Rifâda, al-Hidjâba et al-Machûra et puis encore an-Nubuwa?»
Les Musulmans firent de nombreux prisonniers Quraychites qu'ils avaient ramenés à Médine. Parmi eux, il y avait l'oncle du
Prophète al-'Abbâs ibn Abd al-Muttalib. Les banû Hâchim furent épargnés lors de l'affrontement, sur demande du Messager
de Dieu, car il savait qu'ils étaient contraints de participer à la bataille.
Ainsi finit la bataille de Badr par la victoire des Musulmans, qui ne s'étaient pas du tout préparés pour la bataille, sur les
incroyants de Quraych qui perdirent sur le champ de bataille 70 des leurs, parmi eux plus de 20 chefs et seigneurs. Les
Musulmans réussirent à faire prisonniers 70 Quraychites.
Les Musulmans, quant à eux, avaient enregistré la perte de 14 combattants; 06 Muhajir et 08 Ansarites:
Les combattants musulmans à Badr étaient au nombre de 317; 36 Muhâdjir et 231 'Ansarites
Les Muhâdjir:
Des Banou Hâchim ibn 'Abd-Manâf
1 - Le Prophète ((qu'Allah soit satisfait de lui) Muhammad ibn 'Abd-Allah ibn 'Abd al-Muttalib ibn Hâchim ibn 'Abd-Manâf
2 - Hamza ibn 'Abd-al-Muttalib ibn Hâchim
3 - Ali ibn 'Abu Tâlib ibn 'Abd-al-Muttalib ibn Hâchim
4 - Zayd ibn Hâritha ibn Charhabîl, auxiliaire du Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
5 - 'Abu Kabcha al-Fârisy, auxiliaire du Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
6 - Kinâz ibn Hasîn ibn Yarbû', un de leurs alliés (surnommé) 'Abu Murdath
7 - 'Ansa al-Habachy, auxiliaire du Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui)
8 - Murdath ibn 'Abu Murdath (un allié)
Les 'Ansâr
Des Banou des banû al-'Achhal
1 - Sa'd ibn Mu'âth
2 - Al-Hârith ibn 'Aws ibn Mu'âth
3 - Al-Hârith ibn 'Anas ibn Râfi'
4 - Sa'd ibn Zayd ibn Mâlik
5 - Salama ibn Salâma ibn Waqch
6 - 'Abbâd ibn Bichr ibn Waqch
7 - Salama ibn Thâbit ibn Waqch
8 - Râfi' ibn Yazîd ibn Karaz
9 - Al-Hârith Khuzna ibn 'Uday
10 - Muhammad ibn Maslama
11 - Salama ibn 'Aslam ibn Huraych, un allié
12 - 'Abu al-Haythâm ibn at-Tayhân
13 - 'Ubayd ibn at-Tayhân
14 - 'Amrû ibn Mu'âth, ibn an-Nu'mân 15-'Abd-AUahibnSahl
Badr fut une bataille qui transforma les rapports de force tant sur le plan moral, et militaire que social et politique dans toute
l'Arabie.
Sans l'ombre d'un doute, cette bataille fut menée involontairement par les Musulmans. Rien n'indique qu'ils s'y étaient
préparés. Lorsqu'ils sortirent, ce fut pour s'approprier la caravane et ce qu'elle transportait comme marchandises et autres
richesses.
Les Musulmans, surtout les Muhâdjir, avaient une revanche à prendre, eux qui avaient été contraints de quitter leurs foyers
et à qui les bien furent confisqués. Ils visèrent les chameaux mais Dieu voulut autre chose et ils se retrouvèrent face à une
armée imposante, surarmée ne
transportant aucune marchandise mais 1000 sabres qui allaient au devant de l'affrontement.
Ils étaient, par conséquent, obligés de mener la bataille avec un ennemi qui les surclassait en nombre et en armes. C'était
cela que Dieu visait en faisant descendre le verset : (Rappelez-vous), quand Allah vous promettait qu'une des deux
bandes sera à vous. ‹Vous désiriez vous emparer de celle qui était sans armes, alors qu'Allah voulait par Ses
paroles faire triompher la vérité et anéantir les mécréants jusqu'au dernier » (Sourate Al Anfal (9), verset 7).
Sans aucun doute donc, les deux forces en présence étaient en déséquilibre tant sur le plan du nombre et de la disposition
à entamer le combat que sur celui de l'armement et du soutien logistique. Quels furent alors les facteurs ayant amené la
victoire des Musulmans?
Après le soutien divin direct, on peut résumer ces facteurs de la manière suivante :
1 - II n'y eut pas d'enthousiasme dans les rangs Quraychites bien que les guerriers sortirent pour défendre la caravane. Au
départ de La Mecque, ils étaient prêts à se battre pour protéger leurs biens mais leur enthousiasme s'affaibli quand ils
surent que la caravane était sauvée et que des chefs de cette même armée avaient exprimé la nécessité du retour des
troupes sans qu'il y ait collision avec l'armée de Muhammad puisque la cause n'y était plus. (cf. la position d'al-'Akhnas ibn
Charîq et la tentative de 'Utba ibn Rabî'a).
2 - L'agression, la guerre est la plus détestée des choses chez les hommes. C'est pour cela qu'on la nomme depuis
longtemps la "Détestée". De tout temps, les gens raisonnables ne déclarent la guerre qu'à contre cœur (causes
contraignantes), car ils savent très bien que l'agresseur est habituellement le vaincu.
Dans la bataille de Badr, l'agresseur était sans conteste l'armée Quraychite, ou plutôt 'Abu Djahl, le maître obéi qui avait
mené ses troupes à la débâcle.
3 - La foi: ce fut le plus important des facteurs. Les Musulmans étaient en liaison très forte avec Dieu. Chaque musulman,
en entrant au champ de bataille, savait qu'il allait être récompensé soit par la mort pour la cause de Dieu, soit par la victoire.
C'était là un facteur important qui renforce toujours le moral du musulman.
4 – La nouvelle manière de combattre. Les Musulmans appliquèrent un style nouveau dans le champ de bataille jusqu'alors
inconnu des Arabes et qui avait surpris les ennemis du Prophète (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui). Ce style peut être
résumé en deux points:
a - Le commandement : Le Messager de Dieu était le commandant suprême de l'armée et ses guerriers allèrent au champ
de bataille combattre comme les doigts d'une seule main sous un commandement unifié.
La discipline des combattants musulmans étant aussi un élément décisif quant à l'issue de la bataille, ils s'y étaient plies
sans rechigner et sans hésitation par la stricte application des ordres et des directives émanant de leur chef.
Par contre, chez les associateurs il n'y avait pas de commandement unifié car la majorité des seigneurs mecquois faisaient
partie de l'armée quraychite. 'Abu Djahl ibn Hichâm et 'Utba ibn Rabfa étaient les deux seigneurs les plus en vue. L'un
comme l'autre pouvait être le commandant de l'armée si ce n'était la divergence de leurs points de vue.
Cela eu des conséquences fâcheuses sur la marche des opérations, leurs troupes ayant combattu anarchiquement sans un
commandant dirigeant et sans une organisation préalable.
b - La mobilisation : Le Messager de Dieu (Saluts et bénédictions d'Allah sur lui) a appliqué lors du trajet de son armée
vers Badr une nouvelle formation des troupes ne se différenciant pas beaucoup de la mobilisation moderne dans les
guerres du désert. L'armée musulmane avait une avant-garde, le gros des troupes, et des arrières. Cette armée-là profita
aussi des patrouilles de reconnaissance qui rapportèrent de précieuses informations sur le mouvement des troupes
ennemies.
Quant à la bataille proprement dite, les Musulmans l'ont menée en adoptant "la formation en rangs" alors que les
Quraychites avaient opté pour le procédé dit de "la charge et du repli".
La "formation en rangs" eu l’avantage d’assurer l'organisation solide de troupes ainsi qu'une disponibilité d'une réserve en
cas de situation imprévue (attaque frontale de l'ennemi, défense des ailes...). Par contre, la seconde option basée sur
l'attaque avec le gros des troupes puis le repli provoquèrent la désorganisation des troupes et fit perdre à Quraych la
maîtrise de ses rangs.
Militairement parlant, de notre point de vue, ce fut là les quatre principaux facteurs qui précipitèrent à Badr la défaite des
incroyants dont la domination allait par la suite s'effriter pour s'écrouler définitivement avec la chute de La Mecque et qui,
d'autre part réalisa la retentissante victoire des Musulmans.
Suite