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1935 T.77 3e - 4e Trimestres

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REVUE AFRICAINE

PUBLIEE PAR LA

SOCIT HISTORIQUE ALGRIENNE


*307

AU SIGE DE LA SOCIT HISTORIQUE ALGRIENNE

12, rue Emile-Maupas.


Alger

1935
N"
LXXVI1 -
364-365 3
et 4e Trimestres 1935

Liste des Membres de la Socit

Prsident d'honneur .

M. le Gouverneur Gnral de l'Algrie.

Vice- Prsident d'honneur :

M. Georges Hardy, recteur de l'Acadmie d'Alger.

d'
Membres Honneur

Clermont-
MM. A. Audollent, doyen de la Facult des Lettres de
Ferrand.
Charles Bmont, membre de l'Institut, directeur de la Reue
Historique.
Bosch y Gimpera, professeur l'Universit de Barcelone.
Americo Castro, professeur au Centro de Estudios historicos
de Madrid.
Abb Chabot, membre de l'Institut.
AlfredCoville, membre de l'Institut.
Halvdan Koht, professeur l'Universit d'Oslo.
Marcel Marion, membre de l'Institut.
Hugo Obermaier, professeur a l'Universit de Madrid.
Comte Pellati, inspecteur gnral des Antiquits Rome.
Puig y Cadafalch, directeur de l'Institut d'tudes catalanes,
a Barcelone.
Georges Smets, professeur l'Universit de Bruxelles.
G. P.Stbvens, directeur de l'Acadmie amricaine de Rome.
G. Susta, professeur l'Universit de Prague.
V. Ussani, professeur l'Universit de Borne.
Th. Wiegand, directeur du Muse archologique de Berlin.

Membres honoraires :

MM. E. Albertini, professeur au Collge de France, 4, rue de


Louvois, Paris (n').
J. Carcopino, membre *de l'Institut, 13, rue Mari-Davy,
Paris (xiv).
H. Mass,
ie, professeur a
prolei l'Ecole des langues orientales, 19, ave-

nue du
lu Parc, Sceaux (Seine).
-
6 -

BUREAU

Praident M. Gustave Mercier, dlgu financier.


l MM. G. Yver, professeur 6 la Facult des Lettres
\ d'Alger.
Vice-prsidents
j
'
Q MaraiSi directeur du Muse des
ts algriennes.
Antiqui-

Secrtaire gnral : M. G. Esquer, administrateur de la Bibliothque


Nationale d'Alger, archiviste-bibliothcaire du Gouvernement
gnral.

Secrtaire : M. Brunschvig, charg de cours la Facult des Lettres


d'Alger.
Trsorier : M. Berque, administrateur principal de commune mixte,
dtach a la direction gnrale des Affaires Indignes.
MM. Chevreux, directeur du Cabinet 'iu Gouverneur
/
Gnral de l'Algrie.
Gnral Meynier, directeur honoraire au Gouver
nement gnral.
Beaux-
Alazard, directeur du Muse National des
Arts d'Alger.
Lesps. docteur es lettres, professeur honoraire
au Lyce d'Alger.

Larnaude, charg de cours la Facult des Lettres


d'Alger.
Membres ( matre de la Facult des
Canard, confrences
Lettres d'Alger.

Leschi, directeur des Antiquits de l'Algrie.


Viard, professeur la Facult de Droit d'Alger.
A. Basset, professeur la Facult des Lettres
d'Alger.
Th. Fayolle, receveur des Postes et Tlgraphes
I en retraite.
>
Ibnou Zekri, professeur la Mdersa d'Alger.

Membre correspondant : M. Martial Dooel, inspecteur gnral des


Finances.

MEMBRES A VIE

MM. Le Gnral Azan, 37, Gnral-Foy, Paris (vur).


rue

Boulogne, conseiller de Gouvernement honoraire, 14, rue du


Gnral-Foy, Paris (vin1).
Herber (D'j, 10, rue des Postes. Ste (Hrault).
Joleaud (L.), professeur la Facult des Sciences de l'Univer
sit de Paris, 75, rue Denfert-Rochereau, Paris (xve).

Monchicourt (Ch.|, docteur es lettres, boulevard Front de Mer,


La Goulette (Tunisie).
Pallary (Paul), instituteur honoraire, Eckmhl (Oran).
Poinssot, directeur des Antiquits Tunisiennes, 75, rue de
l'Eglise, Tunis.
Ricard (Robert), professeur a l'Institut des Hautes Etudes
Marocaines, Babat (Marocj.
Sergent (Docteur Edmond), directeur de l'Institut Pasteur,
Jardin-d'Essui, Alger.
Serres (Jean), Consul de France, Ttouan (Maroc Espagnol).
MEMBRES

MM. Abd El Wahab, cad de Mahdia (Tunisie).


Aboudou, chez Janmamode Hacham, Dij;o-Suarez (Madagascar) .

Alazard (Jeani, directeur du Muse des Beaux-Arts, professeur


la Facult des Lettres, au Muse (Jardin-d'Essai), Alger. Membre
du bureau.
Alcocer (R. P. Bernardo, Madrid (Espagne).
Raphal), 81, rue
M11"
ALLAIS, professeur bu Lyce de Jeunes
Filles, Alger.
MM Amady Soalihy M'koudou, commerant-libraire Tanambao, Uiego-
Suarez (Madagascar).
Andraud, professeur agrg d'anglais au Lyce, Alger.

Archives dpartementales, Constantine.


Archives dpartementales, Oran.
Asher, Buchandlung. W. 8. Bchrenslrasse, 17. Berlin.
Averseng (Pierre), EI-AiTroun (Alger).
Avmard (A.), professeur la Facult des Lettres, Toulouse.
Barbs (L.), contrleur des Contributions directes, 6, rue Lys du Pac,
Alger.
Basset (Andr), professeur la Facult des Lettres, 58, Tlemly,
Alger. Membre du bureau.

Bataillon (Marcel), matre de confrences la Facult des Lettres,


47, avenue Eugne-Etienne, Alger.
Baudouin (Kobert), administrateur adjoint, M'Sila (Constantine).
Becker administrateur principal de commune mixte la Prfecture
d'Alger.
Bel (Alfred), correspondant de l'Institut, directeur houoraire de la
Mdersa, Tlemcen (Oran).

Bel (Georges), commerant, avenue de la Rpublique, Batna (Cons


tantine).

Berge iA.), directeur d'Ecole, li ter, rue Kocbambeau, Alger.

Bernard (Augustin), professeur honoraire a l'Universit de Paris.


10, rue Decamps, Paris ixvi').

Berque (Augustin), administrateur principal de commune mixte,


dtach au Gouvernement Gnral de l'Algrie, 10, rue Lacpde,
Algor, Trsorier.
Berthier (Andr), archiviste dpartemental, conservateur du Muse,
Constantine.
Bertrand (Ren), professeur agrg d'histoire au Lyce d'Alger, rue

Hoche, Alger.
Bessire ( Lucien), professeur agrg d'histoire et de gographie au

Lyce d'Alger.
Bibliothque populaire, An-M'lila, Constantine.
Bibliothque de la Socit des Anciens Elves des Ecoles Laques.
An-Temouchent (Oran).
-
8

Bibliothque municipale, rue Gnral Boissonnet, Alger.

Bibliothque Nationale, rue Emile Maupas, Alger.


Bibliothque de l'Universit, rue Michelet, Alger.
Bibliothque des Assembles Algriennes, rue de la Libert, Alger.

Bibliothque de la Ligue de l'Enseignement, Aumale (Alger).


Bibliothque publique, Beni-Saf (Oran).
Bibliothque populaire, Blida (Alger).
Bibliothque municipale, Bne (Constantine).
Bibliothque pdagogique, Bne (Constantine).
Bibliothque publique, Boufarik (Alger).

Bibliothque de la Ligue de l'Enseignement, Bougie (Constantine)


Bibliothque publique,;Bou-Sfer (Oran).

Bibliothque populaire, Burdeau (Alger).


Bibliothque publique, Canrobert (Constantine).

Bibliothque publique, Chateaudun-du-Rhummel (Constantine).


Bibliothque publique, Cola (Alger).
Bibliothque populaire du Belezma, Corneille (Constantine).

Bibliothque populaire, Damiette (Alger).


Bibliothque populaire, Descartes (Alger).
Bibliothque publique, Douera (Alger).
Bibliothque municipale, Duperr (Alger).
Bibliothque populaire, El-Biar (Alger).
Bibliothque publique, El-Milia (Constantine).
Bibliothque populaire, Fontaine du Gnie (Alger).
Bibliothque publique, Fort-de-1'Eau (Alger).
Bibliothque municipale, Fort-National (Alger).

Bibliothque populaire, Frenda (Oran).


Bibliothque publique, Guelma (Constantine).
Bibliothque populaire, Hammam-bou-Hadjar (Oran|.
Bibliothque publique, Inkermann (Oran).
Bibliothque publique, Khenchela (Constantine).
Bibliothque publique, Lapasset (Oran).

Bibliothque populaire, LaveysHire (Oran).


Bibliothque publique, Lourmel (Oran).
Bibliothque populaire, Malherbe (Oran).
Bibliothque populaire, Marengo (Alger).
Bibliothque pdagogique, Mascara (Oran).

Bibliothque publique, Mnerville (Alger).


Bibliothque publique du Djurdjura, Michelet (Alger).
Bibliothque municipale, Miliana (Alger).
Bibliothque publique, Mouzaaville (Alger).
Bibliothque de la Ligue du Chliff, Orlansville (Alger)
Bibliothque publique, Palikao (Oran).

0

Bibliothque publique, Perrgaux (Oran).


Bibliothque publique, Prudhon (Oran).
Bibliothque municipale, Rabelais (Alger).
Bibliothque municipale, Rivoli (Oran).
Bibliothque populaire, Robertville (Constantine).
Bibliothque populaire, Sada (Oran).
Bibliothque publique, Saint-Cloud (Oran).
Bibliothque populaire, Saint-Leu (Oran).
BIBLIOTHEQUE de la Socit Populaire de Lecture, Stif (Constantinel
Bibliothque pdagogique, Sidi-bel-Abbs (Oran).
BIBLIOTHQUE de l'Universit Populaire, Sidi-bel-Abbs (Oran).
Bibliothque publique, Staouli (Alger).
Bibliothque populaire, Tabia (Oran).
Bibliothque populaire, Taher (Constantine).
Bibliothque publique, Le Tlagh (Oran).
Bibliothque de la Ligue de l'Enseignement, Tns (Alger).
Bibliothque publique, Tniet-el-Had (Alger).
Bibliothque municipale, Tlemcen (Oran).
Bibliothque pdagogique, Tlemcen (Oran).
Bibliothque publique, Touggourt (Constantine).
Bibliothque publique, Trumelet(Oran).
Bibliothque publique, Uzs-le-Duc (Oran).

Bibliothque publique, Vale (Constantine)


Bibliothque de l'Ecole des Langues orientales vivantes, 2, rue de
Lille, Paris (vu').

Bibliothque de l'Eoole Normale Suprieure, 65, rue d'Ulm, Paris (v).


Bibliothque de Sorbonne, rue des Ecoles, Paris (v).
l'Universit, La
Bibliothque de l'Ecole des Hautes Etudes Marocaines, Rabat (Maroc).
Bibliothque gnrale du Protectorat, Rabat (Maroc).
BIBLIOTHQUE de la Rsidence gnrale de France, Tunis.
Bibliothque municipale, Arles (Bouches-du-Rhne).

MM. Bobrither, professeurCollge, Blida (Alger).


au

Bossoutrot, interprte judiciaire, 28, rue d'Italie, Tunis.


Boudeville (A.) ingnieur, 47, rue Daguerre, Alger.

Boujol, administrateur-adjoint de la commune mixte, Aflou (Oran).

Boulamena (Mohammed), instituteur, le Kef, prs Loverdo (Alger).


Bourlon (Henri), chef de gare, La Mare-d'Eau (Oran).
Bouzar (Mohamed), interprte judiciaire, Orlansville (Alger).

Braudel, professeur l'Universit de Sao Paulo (Brsil).


Brentano's, libraire, 37, avenue de l'Opra, Paris (vin').

Bricaut, 14, rue de Constantine, Alger,


British Musum, Londres (Angleterre).

Brunot (L.), chef de bureau a la direction de l'Enseignement, Rabat.


-
10 -

MM. Brunschvig, de la Faoult des


charg cours Lettres, 20, rue
Auber, Alger. Secrtaire.
Bureau des Affaires civiles de la Rgion de Fez i Maroc).
15'
Bryre, capitaine au rgiment de Tirailleurs Algriens. Fez (Maroc).
Cabinet civil du Rsident Gnral de France, Rabat (Maroc/.
R.P Callens (Maurice), des Pres Blancs, Ouadbias (Alger|.
MM. Canard (M), maitre de confrences la Facult des Lettres, 104,
Boulevard Saint-Suens, Alger. Membre du bureau.
Carbonel (Jules), imprimeur-diteur, 8, rue Victor Hugo, St-Eugne
lAlger).

Cardonne (P.), ingnieur agronome. Tlemcen (Oran!.


Cassard (Dr), 35 bis, rue Es-Sadikia, Tunis.
Cathrin, 14, rue Lamoricire, Hussein-Dey, Alger.
Cauro, administrateur de commune mixte, Port-Gueydon (Alger).
Cauvet, Chef de Bataillon en retraite, villa du Bois, Birmandres
(Alger!
Cavazza (Conte professore Filippo), direttore di colonizatione, Tripoli.
Cazenave (Jean), professeur agrg d'espagnol au Lyce d'Alger.
1, avenue de la Bouzara, Alger.

Cecgaldi (Charles), ingnieur du corps de l'Aronautique, 32, rue


Charles- Floquet. Paris (vu').

Cercle militaire, Fort-National (Alger).


Chambre de Commerce de Marseille (Bouches-du Rhne).
Champion (Edouard), diteur, 5, quai Malaquais, Paris ;vi'|.
Charles (Haymond), substitut du Procureur de la Rpublique, Sidi
bel-Abbs (Oran).
Charltit (Sbastien), recteur de l'Acadmie de Paris.
Chef du Service Sociologique des Affaires indignes, Sali (Maroc).
Chef du Service des Affaires Indignes la Rsidence gnrale
de Fiance, Tunis.

Chemoul, professeur au Collge, Oudjda (Maroc).


Chevreux, directeur du Cabinet du Gouverneur Gnral, Palais d'Et,
Alger. Membre du bureau.
Christofle (Marcel), architecte en chef des monuments historiques,
Palais d'Hiver, Alger.
M1"
Clerre, libraire, 37, rue Michelet. Alger.
MM. Cobb (Humphrey M.), Vaverley place, New York City (U. S. A.)
Cochain (Lucien), 41, rue de Paris, Joinville-le-Pont (Seine).
Cockenpot, inspecteur d'Acadmie, Cahors (Lot).
Coco (J.), 23, rue Duc des Cars, Alger-

Cognard, 4, place des Vosges, Paris (iv'i.


M""
Cohen-Bacrie (Blanche), 4, rue Contencin, Constantine.
Colle, professeur au lyce de Jeunes Filles, ^Alger.
Collge de garons, Blida (Alger).
Collge de garons, Bne (Constantine).
Collge de jeunes lilles, Bne (Coustantine).
-

Collge de garons, Mostaganem (Oran).


Collge de garons, Philippeville (Constantine).
Collge de garons, Stif (CoDstnntine)
Collge de garons, Sidi-bel-Abbs (Oran).
Collge franco-musulman Moula Idriss, Fez (Maroc)
Commune d'EI-Biar (Alger).
Commune d'Er-Rahel (Oran).
Commune mixte d'Aflou Oran).
COMMUNE mixte d'An-Bessem (Alger) .

Commune mixte d'An-el-Ksar, El-Mahder (Constantine).


Commune mixte d'An-M'lila (Constantine).
COMMUNE mixte d'Aumale (Alger).
COMMUNE mixte de l'Aurs, Arris Constantine).
Commune mixte du Blezma, Corneille (Constantine).
Commune mixte de Beni-Mansour, Maillot (Alger).
Commune mixte des Bibans, La Medjana (Constantine).
Commune mixte du Chliff, Orlansville (Alger)
Commune mixte du Djurdjura, Michelet (Alger).
Commune mixte de l'Edough, Bne (Constantine).
COMMUNE mixte des Eulma, St Arnaud iConstantine).
COMMUNE MIXTE de Fedj-Medzala (Constantine).
Commune mixte de Fort-National (Alger).
Commune mixte de Gryville (Oran).
Commune mixte de Guergour (Constantine).
Commune mixte de La Calle (Constantine).
Commune mixte de La Mina (Oran).
COMMUNE mixte des Maadids, Bordj-bou-Arrridj (Constantine).
Commune mixte de Morsott, Tbessa (Constantine).
Commune mixte de Ndroma (Oran).
Commune mixte de l'Oued-Cherf (Constantine).
Commune mixte de l'Oued-Marsa (Constantine).
Commune mixte d'Oum-el-Bouaghi (Constantine).
COMMUNE mixte de Palestro (Alger).
Commune mixte de Sebdou (Oran).
Commune mixte de Sedrata (Constantine).
Commune mixte de Sidi-Assa (Alger).
Commune mixte de Tbessa (Constantine).

Consul gnral de Grande-Bretagne, boulevard Carnot, Alger

M. Contencin, juge au Tribunal mixte, 4 bis, rue Bou Chnack (Tunis)


Contrle civil de Bja (Tunisie).
Contrle civil de Bizerte (Tunisie,

Contrle civil de Djerba (Tunisie)


Contrle civil de Gabs (Tunisie).
12

Contrle civil de Gafsa (Tunisie).


Contrle civil de Grombalia (Tunisiel.
Contrle civil de Kairouan (Tunisie).
Contrle civil Le Kef (Tunisie).
Contrle civil de Medjez-el-Bab (Tunisie).

Contrle civil de Mactar (Tunisie).


Contrle civil de Sfax (Tunisie).
Contrle civil de Souk-el-Arba (Tunisie).
Contrle civil de Sousse (Tunisie).
Contrle civil de Tabarka (Tunisie).
Contrle civil de Teboursouk (Tunisie!.
Contrle civil de Thala (Tunisie).
Contrle civil de Tozeur (Tunisie).
Contrle civil de Tunis (Tunisie).
Contrle civil de Zaghouan (Tunisie).
MM. Counilhon, professeur agrg, 18, rue Danton, Alger.
Cour, docteur es lettres, place Ngrier, Constantine.
Cours secondaire djeunes filles, Blida (Alger).
Cours secondaire de jeunes filles, Philippeville (Constantine).
M"'
Cuvelier, tudiante la Facult des Lettres, 22, rue Mogador,
Alger.
.MM.
Dalet, professeur d'arabe au Lyce, place Bab-el-Oued, Alger.

Architecte du Gouvernement Elie de Beau-


Darbda, Gnral, 18, rue

mont, Alger.
Darimont, 15, rue des Saints-Pres, Paris (vi'|.

Dblmer (R. P.), des Pres Blancs, Beni-Yenni (Alger).


Deny (G.), professeur l'Ecole des langues orientales, 88, boulevard
S'-Michel, Paris (vi'j.
Derendinger (Colonel), 20, quai de Passy, Paris (xvi*).
Desparmet (J.), professeur agrg d'arabe au Lyce, 14, rue Berthe
lot, Alger.
Despois, docteur es lettres, professeur au Lyce Carnot, 24, rue de
Cronstadt, Tunis.
Dessus-Lamare. conservateur au Muse des Antiquits algriennes,
rue Fontaine-Bleue, Alger.

Destaing, professeur a l'Ecole des Langues orientales, 61, rue de


Cbalons, L'Hay-les-Roses iSeine).
Di Luccio, professeur a l'Ecole Normale, 27, rue Emile-Alaux, Alger.
Directeur de La Quinzaine Coloniale, 17, rue d'Anjou, Paris (Tir).
Dolcemascolo (Docteur), Kala-Djerda (Tunisie).
Douel (Martial), inspecteur gnral des Finances, 14, rue Wilhelm,
Paris ixvi"). Membre correspondant.
Dournon (A), directeur de la Mdersa, Constantine.
Dournon (R), secrtaire de la Kdaction de La Presse Libre, 9. rue
Trollier, Alger.
Droit, administrateur de commune mixte, Chateaudun-du-Khummel
(Constantine).
13

MM. Dubosq (Abb), cur de Tipaza (Alger).


Dumas (Charles), inspecteur d'Acadmie, Constantine.
Durget, ingnieur-conseil, 1, boulevard Victor-Hugo, Alger.

Ecole mnagre, Jardin d'Essai, Alger.


Ecole normale, Bouzara (Alger).
Ecole normale de jeunbs filles, Constantine.
Ecole normale de jeunes fille3, Miliana.
Ecole normale d'iNSTiTUTEURS, Oran.
Ecole normale de jeunes filles, Oran.
Ecole rgionale berbre, Azrou (Maroc).
Eisenbeth, grand rabbin, 9, rue Enfantin, Alger.
Esquer (Gabriel), administrateur de la Bibliothque Nationale, archi
viste-bibliothcaire du Gouvernement Gnral. 12, rue Emile Maupas,
Alger. Secrtaire gnral.

Essemiani (Mohammed), instituteur, Tniet-el-Had (Alger).


Fabregoule, Directeur des Services Economiques an Gouvernement
Gnral.
Fabry (de), inspecteur gnral des Finances, au Trsor, Alger.

Favreau, professeur agrg d'histoire au Lyce, place Bab-el-Oued,


Alger.
Fayollb (Th.), receveur des Postes en retraite rue Ernest-Feydeau,
Alger. Membre du bureau.

Franc (J.), docteur es lettres, professeur au Lyce, 9. rue Enfantin,


Alger.
Froger (Amde), dlgu financier, 108, rue Michelet, Alger.

Garoby, professeur agrg au Lyce, 29, rue Auber, Alger.


Garteiser (Commandant), 113, quai d'Orsay, Paris (vu').
Gasser (Docteur), conseiller gnral, Saint-Denis-du-Sig (Oran).

Gaudefroy-Demombynes, professeur l'Ecole des Langues orientales,


9, rue Joseph Barra, Paris (vi'|.
Gaudissart, 39, rue Pierre-Gurin, Paris (xvi').
M*'
Gaudry-Boaglio. avocat la Cour d'Appel, 43, boulevard Saint-
Sans, Alger.
MM. Gauthier (Docteur), 39, rue d'Isly, Alger.

Gauthier, administrateur adjoint, Sada, Oran.


Gautier (E.-F. ) professeur honoraire a la Facult des Lettres, Insti
tut de Gographie, Alger.

Gerbier, administrateur principal de la commune mixte, Cherchell


(Alger).

Gernet, doyen de la Facult des Lettres, 5, rue Edouard-Cat, Alger.


Giacobetti (R P.), des Pres Blancs, Saint-Cyprien (Alger
Glnat (Jean), Muse des Alger-Mustapha-
conservateur au Antiquits,
Suprieur.
M1"
Graf, professeur au Lyce de Jeunes Filles. Constantine.
MM. Grandchamp (Pierre), chef de service honoraire la Rsidence
Gnrale, 20, Garros, Tunis.
avenue

Grellet (Ch.), propritaire, 9, rue Edmond-Adam, Alger.


14

de au Lyce, Alger.
MM. Grenier, professeur agrg philosophie

Massassuchets (U. S. A.).


Harvard Collge library, Cambridge,
de a la Facult des Lettres, villa Henri.
Heurgon, charg cours
chemin Beaurepaire, Alger.

Hilbert, vtrinaire, 4, rue de l'Artillerie, Oran.


3*
rgiment de Spahis, Batna (Cons
Hoonon, Lieutenant-Colonel au
tantine).
de Michelel, Alger.
Horluc, vice-recteur l'Acadmie, rue

IIouel, chef des services municipaux, Casablanca (Maroc).


Howard (E. L.), Htel Beausjour. Alger.
Ibnou Zekri, professeur la Mdersa d'Alger. Membre du bureau.

[mmarigeon, proviseur du Lyce Gouraud, Rabat (Maroo).

Institut Franais iVAuchologie Palais Azom, Damas (Syrie).

Jogerst, antiquaire, 91, rue Michelet, Alger.

Julien (Ch. -Andr), professeur agrg d'histoire nu Lyce Montaigne.


1, square de Port Royal, Paris (xin").
Kehl. avocat, 10, rue Plissier. Oran
Kest (Docteur), 12, rue Richelieu, Alger.

Kongelige bibliothek, Copenhague (Danemark).


Kntz, capitaine de Zouaves, Fort- National (Alger).
Labande, archiviste dpartemental k la Prfecture, Alger.

Lacoste, administrateur en chef |de l'Inscription maritime, a l'Ami


raut, Alger.
Ladreit de Lacharrire (Jacques), professeur a l'Ecole Coloniale et

l'Ecole des Sciences Politiques, 20, rue Vaneau, Paris (vu').

Laherre, professeur agrg des lettres au Lyce, Alger.


R. P. Lapeyre, directeur du Muse Lavigerie, Saint-Louis de Carthage
(Tunisie).
MM. Larnaude (Marcel), professeur la Facult des Lettres, 123, rue

Michelet, Alger. Membre du bureau.


Laurens (Docteur), An-Bessem, Alger.
Lebar (S.), 23, rue Bab-Azoun, Alger.

Lehocq. administrateur de la commune mixte, Cassaigne (Oran).

Lemoine, Conseiller de Gouvernement honoraire, 121, rue Michelet,


Alger.
Leschi (L.), Directeur des Antiquits de l'Algrie, 87, boulevard
Saint-Sans, Alger. Membre du bureau.
Lesps (Ren), docteur es lettres, 15, boulevard Laferrire, Alger.
Membre du bureau.
Bordj-bou-
Lestrade-Carbonbl, administrateur de commune mixte,
Arrridj (Constantine).
Lev (Gnral), 21, rue Cassette, Paris (vi).
Lvi-Provenal (E.), professeur a la Facult les Lettres, rue Miche
let, Alger.
Mgr Leynaud, archevque d'Alger.
MM. Liaras (docteur), 20, boulevard Bugeaud, Alger.
Llabador (Franois), docteur en pharmacie, Nemours (Oran).
Lorion, 5, rue de Constantine, Alger.
15

MM. Lovichi, prfet honoraire, ^, rue Altairac, Alger.


Lung (Frdric), conseiller du commerce extrieur, 1, rue du Laurier,
Alger.
Luthbrf.au, officier interprte, Tiznit, par Agadir (Maroc)
Lyce de garons, Alger.
Lyce de garons, Constantine.
Lyce de garons, Oran.
Lyce de jeunes filles, Alger.
Lyce de jeunes filles, Constantine.
Lyce de jeunes filles, Oran.
Maglione et Strini, libraires, t'8, via due Macelli, Rome.

Mahdi Sadok, interprte judiciaire, Fedj M'Zala (Constantine,.


Marais (Georges), directeur du Muse des Antiquits algriennes,
professeur A la Facult des Lettres, Alger. Vice-Prsident.
Marais (William;, membre de l'Institut, professeur au Collge de
France, 99, boulevard Preire, Paris (xvii'j.
Marguet (Gaston), rdacteur en chef du Smaphore Algrien, 137, rue
de Constantine, Alger.

Martin, professeur au Lyce, Constantine.


Martino (Pierre), recteur de l'Acadmie, Poitiers (Vienne).
Massira, principal du Collge, Stif (Constantine.

Massignon. professeur an Collge de France, 21, rue Monsieur,


Paris (vu').
Massoutier (Jacques), 111, rue Michelet, Alger

Mathieu, professeur agrg des Lettres au Lyce, place Bab-el-Oued,


Alger.
Maury (E.), directeur des Contributions diverses, adjoint au contr
leur des dpenses engages du Gouvernement Gnral, Alger.

Maury (F.), conseiller de Gouvernement honoraire, 3, rue Berlioz, Alger.

Mgnin (Dr), mdecin de colonisation, Sidi-Assa (Alger).


Mercier (Gustave), avocat la Cour d'Appel, vice-prsident du
Conseil Suprieur, dlgu financier iparc Gatlif, Alger). Prsident.
Merlin (Alfred), conservateur des Antiquits grecques et romaines
au Muse du Louvre, Paris.

Mersiol, professeur agrg d'allemand au Lyce, place Bab-el-Oued,


Alger.
Meunier (Wladimir), inspecteur gnral honoraire de l'Assistance
publique, 1, rue Tirman, Alger.
Meynier (gnral), directeur honoraire au Gouvernement Gnral.
Dar el Sadji, Miramar, Saint-Eugne (Alger).

Michal, contrleur civil Moktar iTunisie).

Migon, secrtaire de commune mixte dtach au Gouvernement


gnral, Alger.
Mirante (J.), directeur honoraire au Gouvernement Gnral, Alger.

Montaland (Charles), architecte du Gouvernement gnral, 10. rue

Michelet, Alger.
Muse Demaeght, Oran.
-

16 -

Muse des Antiquits algriennes, rue Michelet, Alger.


Muse des Beaux-Arts, Jardin d'Essai, Alger,
MM. Nessler, boulevard de l'Industrie, Oran.
Nick, administrateur de commune mixte, Sous-Prfecture, Bne
(Constantine).
M"*
Olivier, Haouch el Bey, Rouba (Alger).
MM. Oppetit, sous-prfet, Orlans ville (Alger).
Parker (J.), libraire, 27, Broad Street, Oxford (Angleterre).

Pres Blancs de l'Institut des Belles-Lettres Arabes, 12, rue Djmaa


El Haoua, Tnnis.
Prs, charg de cours a la Facult des Lettres, 175, Tlemly, Alger.
Perrin. avocat la Cour d'appel, 77,
rue Michelet, Alger.

Philippar, directeurdu Crdit Foncier d'Algrie etde Tunisie, 43, rue


Cambon, Paris (i").
Pignon, professeur au Lyce Carnot, rue du Capitaine Guynemer,
Tunis.

Pitaud, fabricant de tapis, Tlemceu (Oran)


Poullet, contrleur civil, Gabs (Tunisie).
Publ. bibl. Ka. SSS. R. W. I. Lnine, Mochawaja, 3, Moscou
(U.R.S.).
2' Champ-
Rahmani Slimane, instituteur, groupe H. B. M., lettre J,
de-Maneeuvre, Alger.
Rattier, architecte en chef des Monuments historiques, 72, avenue

Victor-Hugo, Paris (xvi').

Ravenet, Djenan es Skina, chemin Buknal, El-Biar (Alger).

Rmy, huissier, An-M'lila (Constantine).


Le Rsidentgnral de la Rpublique Franaise, Rabat (Maroc).

Rey (Rodolphe), ancien btonnier de l'Ordre des Avocats, 16, bou


levard Bugeaud, Alger.
Reygasse (Maurice), directeur du Muse d'Ethnographie, le Bardo,
rue Michelet, Alger.
Ricome (Jules), ngociant, 11, boulevard Carnot, Alger.
Roda (O.), ngociant, faubourg de la Gare, Bordj-bou-Arrridj
(Constantine).
Roffo (Docteur), rue de Polignac, Le Ruisseau (Alger).

Rohrbacher, administrateur de commune mixte, Sous-Prfecture


d'Orlansville, (Alger).
Rolland (Edouard), avocat, 66. avenue Derb-Zemmouri, Mekns
(Maroc).
Rols (Denys), attach au Cabinet du Gouverneur Gnral, Alger.
(Dr
Romanelli Prof. Pietro), 2, Viole Tito Lisio, Rome (Italie).
Roussier-Thaux, agrg la Facult de Droit, I, rue Elise Reclus,
Alger.
Rouvier (Paul), professeur la Mdersa, Tlemcen (Oran).
Rozis (A.),^Maire d'Alger.
Sabatier (J.), secrtaire gnral du Crdit municipal, 16, rue des
Blancs Manteaux, Paris (IV).
Sagot (Franois), docteur es lettres, juge au tribunal de la Haute-
Sane (Vesoul).
17

MM. SaInt-Calbre (Charles), directeur honoraire de Mdersa, 4. traverse


Cas, Blancarde, Marseille.
Salenc, ancien directeur du Collge musulman de Fs, 44, rue Duma-

noir, Oran.
Samboeuf (Louis de), avocat a la Cour d'Appel, 11, rue de Constan
tine, Alger.

Saurel (Jules), avou, conseiller gnral, 1, rue de Belleville, Oran.


Schveitzer, professeur agrg d'histoire au Lyce, place Bab-el-Oued,
Alger.

Section historique du Maroc, 4, rue de Lille Paris (vu').


Service des affaires indignes et du personnel militaire, Gou
vernement gnral, Alger.

Simon, professeur au Lyce, 107, boulevard Saint-Saens, Alger.

Simoni (L.), drogman la Rsidence gnrale, Tunis.

Slaouti, directeur d'Ecole, Saint-Arnaud (Constantine).


Gnraux-
Socit des Beaux-Arts, Sciences et Lettres, 4, rue

Morris, Alger.

Soualah(M.), docteur es lettres, professeur d'arabe au Lyce, place

Bab-el-Oued, Alger.
Steckert, libraire, 16, rue de Cond, Paris (vi'J.

Suprieur de la Socit des Missionnaires d'Afrique, Maison


Carre, Alger.
Syndicat agricole et viticole, Tlemcen.

Tailliart (Charles), recteur de l'Acadmie, Montpellier (Hrault).


M"' Alger.
Teboul (Henriette), 2, rue Sainte,
MM. Teissier, trsorier payeur gnral, Basse-Terre (Guadeloupe).
Torki (gnral), chef adjoint du protocole de S. A. R. le Bey de Tunis.
Torrs Balbas, directeur de l'Alhambra, Grenade (Espagne).
Trouilleur (G.), 4, rue Arago, Alger.

Truillot, secrtaire honoraire de commune mixte, 19, rue du Lieute


nant Navarre, Hussein-Dey (Alger).

Valat (Georges), professeur agrg d'arabe au Lyce, place Bab-el-


Oued, Alger.
Valet (Ren), sous-chef de bureau, Service du contentieux, Gouver
nement gnral, Alger.

Vallois, professeur la Facult des Lettres, Bordeaux (Gironde).

Viallat, conseillera la Cour d'appel, 10, rue de la Merci, Montpellier


(Hrault).

Viard, professeur la Facult de Droit, rue Michelet, Alger. Membre


du bureau.
M*
Vincent, 14, boulevard Sbastopol, Oran.
MM. Vonderheyden (Maurice), docteur es lettres, directeur de la Mdersa,
Tlemcen.
Wender (capitaine), Section d'Etudes, Caserne Charron, rue de
Constantine, Alger.

Yver (Georgesi, professeur la Facult des Lettres, 23, rue Michelet,


Alger. Vice-Prsident.
ASSEMBLEE GENERALE

du 24 Fvrier 193S

La Socit Historique Algrienne a tenu son Assem


ble Gnrale annuelle le dimanche it\ fvrier ig35,
la Bibliothque du Gouvernement Gnral de l'Algrie.
M. Gustave Mercier prsidait, assist des membres

du Bureau. M. le Gouverneur Gnral s'tait excus de


ne pouvoir assister la sance.

M. Gustave Mercier a prononc le discours suivant :


Messieurs, mes chers Confrres,

La Socit Historique Algrienne a poursuivi norma

lement le cours de ses travaux et son dveloppement en

ig34. H est assez remarquable, dans cette priode d'in


certitude dont particuliers et collectivits subissent les
pnibles effets, de pouvoir affirmer cette continuit
paisible dans l'effort, ce cheminement assur dans une

vie exempte de soucis matriels. J'ai ici le devoir troit,


mais bien agrable remplir, d'en remercier tout
d'abord ceux qui nous
ont valu cette scurit : M. le

Gouverneur Gnral Carde, qui, sur la proposition de


son nouveau directeur gnral des Affaires
Indignes,
M. Milliot, a bien -voulu maintenir notre Socit la
subvention annuelle ; et cette autre bonne fe de notre

compagnie, M. le Recteur Hardy, vice-prsident d'hon-


-
19

neur, qui a su intresser le budget de l'Universit la


prosprit d'une Socit qui s'intresse elle-mme, et de
si prs, tout ce qui fait l'objet des proccupations de
l'Universit.
C'est grce eux, et tous nos adhrents dont le
nombre s'accrot rgulirement, que notre compagnie

atteint sans heurts et sans dommages sa quatre-vingti

me anne, ge respectable dans un pays qui n'est gure

plus vieux qu'elle. Mais ce serait la sous-estimer singu

lirement que de la prsenter uniquement sous cet aspect

vnrable. Elle n'a rien de commun avec ces vieilles

dames auxquels des protecteurs puissants s'ingnient


faire une existence dcente. Quatre-vingts ans, c'est la
jeunesse pour les institutions doues de prennit, qui
rpondent la satisfaction d'un besoin d'intrt gn

ral. En est-il de plus noble et de plus digne d'tre satis

fait que cet apptit de l'esprit, avide de mieux connatre

les choses du pass, et aussi de mieux voir les lments


dont est tisse la ralit prsente, souvent tumultueuse,
quelquefois confuse, dans cette Algrie o se heurtent
les traditions, o des races de culture et de mentalits

diverses s'affrontent la recherche d'un ordre nouveau ?


C'est la jeunesse, une condition cependant : c'est
que par leur activit, leurs efforts, leurs productions,
ces institutions montrent qu'en elles, la vie cratrice
de formes nouvelles nta pas cess de s'panouir. Oserai-

je dire qu' gard, la Socit Historique Algrienne


cet

n'a jamais t plus jeune ?


ce Je ne veux pas empiter ici, par l'expos de ses tra

vaux, sur la tche rserve notre excellent Secrtaire


Gnral, M. Esquer. Il me permettra cependant de dire
que c'est grce lui, son activit, son dvouement
si sr et averti, excellemment second d'ailleurs par son

adjoint M. Brunschvig que la vieille Revue Africaine


connat le rajeunissement. Aussi grce tous nos colla

borateurs ; leurs travaux, leurs tudes pntrantes ont


20

permis noire chre revue de reprendre sa priodicit

trimestrielle, enrichie cette fois par le nombre, l'impor

tance et la varit des sujets traits, des chroniques, de


la bibliographie. Je ne prtends point que tout soit par

fait et qu'il n'y ait plus rien amliorer : il nous reste

notamment rendre cette priodicit conforme aux

chances du calendrier. Ceci ne dpend plus seulement

de nos collaborateurs. Il est indispensable que notre

diteur fidle, M. Carbonel, y mette aussi du sien. Je


lui adresse ici un appel qui, j'en ai la confiance, sera

entendu.

k L'activit de la socit ne s'est d'ailleurs pas limite


aux soins donner son enfant premier n. Elle a colla

bor, si je puis dire, d'autres paternits. Il me faut


ce propos rendre un nouvel hommage l'esprit d'initia
tive de M. le Recteur Hardy qui a conu de vastes des
seins auxquels nous nous trouvons associs. L'un est

la cration de l'Institut d'Etudes Orientales dont les


animateurs sont puiss parmi les professeurs de la Facult
des Lettres, qui sont aussi nos collaborateurs les plus

directs. La Revue Africaine est heureuse de donner


l'hospitalit de ses pages au Bulletin du nouvel Institut,
qui, sous la savante direction de M. Georges Marais,
notre Vice-Prsident, est appel jouer un rle essentiel

dans le domaine de l'histoire, de la linguis


quadruple

tique, de la sociologie et de la littrature orientales. Par


lui, l'Universit d'Alger marquera avec dlat le rle
propre qu'elle doit naturellement s'attribuer parmi toutes
les Universits de France, dont elle dispense dj l'en
seignement gnral dans des conditions qui lui assignent

une des premires places. Par lui aussi, l'tude des con

ditions prsentes de la vie musulmane et de son volu


tion sera poursuivie avec une mthode, une comptence

qui assurent ses enqutes une porte, non seulement

scientifique, mais sociale, et je dirai politique. Jamais


plus beau champ d'activit et de recherches s'est-il
21

offert aux investigations touchant le pass comme le


prsent que ces anciennes provinces romaines, Numi
die, Maurtanie, redevenues berbres puis berbro-

arabes, et demeures sous la domination franaise si

intensment marques de l'orientalisme musulman

qu'elles sonl aujourd'hui, par un singulier paradoxe,


les plus traditionalistes des pays d'Islam ?
Ce trsor, offert aux investigations de l'Institut
nouveau, c'est aussi le ntre, el il nous est commun

avec toutes les Socits Savantes de l'Afrique du Nord,


dont chacune fouille quelqu'un de ses abords. Il y avait

l une communaut d'objet et d'intentions qui appelait

un rapprochement, dans l'intrt mme du but attein

dre. Tel est le motif de la Fdration des Socits Sa


vantes d'Afrique, dont vous avez pris l'initiative la
demande du mme M. Hardy, plusieurs fois nomm,
fdration qui s'affermira par un congrs annuel dont le

premier se tiendra, comme il se doit, Alger, lors de la


Pentecte prochaine. Il n est pas douteux que ce rappro

chement amne, avec des relations plus suivies entre

gens qu'animent les mmes gots et les mmes ten

dances, une coordination des efforts, un paulement des


bonnes volonts. La Socit historique sera heureuse
d'avoir pris l'initiative d'une manifestation marquant

avec clat la place qu'occupe depuis longtemps dj


l'Afrique du Nord, dans la vie intellectuelle de la nation.

Je ne voudrais pas terminer cet expos rapide et

bien incomplet sans adresser ceux de nos confrres qui

ont reu au cours de l'anne une distinction honori


fique nos plus cordiales flicitations. Parmi eux, vous

me permettrez de rserver une mention spciale notre

excellent confrre et ami M. Truillot, que j'ai le plaisir

de voir parmi nous. Habitant, depuis plus de 3o ans la


rgion de Tbessa, poste avanc de l'occupation ro

maine et de la colonisation franaise, M. Truillot a su

s'intresser toutes les questions concernant la prhis-



22 -

toire, l'archologie et l'histoire du pays. Il a fait des


dcouvertes remarquables et des communications nom
breuses et apprcies diverses socits savantes. Le
ruban de la Lgion d'Honneur est venu justement r

compenser longue carrire, et ses travaux bnvoles


sa

et d'autant plus mritoires. Je lui exprime ici la satis


faction que nous en avons ressentie, et nos bien ami

cales flicitations .

M. Esquer, Secrtaire Gnral, a donn lecture du


rapport suivant :

Depuis sa dernire Assemble Gnrale, la Socit


Historique Algrienne a perdu plusieurs de ses adhrents.

L'un de ses membres d'honneur, M. Emile Bour


geois, membre de l'Institut, est dcd aprs une lon
gue carrire consacre au haut enseignement, l'Ecole
Normale Suprieure et la Sorbonne ; il avait t aussi
directeur de la Manufacture Nationale de Svres II tait
un de l'histoire, plus particulirement de l'his
matre

toire diplomatique laquelle il tait venu aprs quelques


annes d'tudes mdivales. C'tait un homme bon,
simple et Ses lves, dont il avait form
accueillant.

plusieurs gnrations, taient rests ses amis, et en 1930,

l'un des -cts les plus sympathiques des ftes du cen


tenaire fut certainement le dner intime qui groupa

autour de lui ses anciens lves fixs Alger. M. Emile


Bourgeois avait bien voulu prendre place parmi les
membres d'honneur de la Socit Historique et depuis
il nous avait souvent tmoign l'intrt qu'il portait
nos travaux.
Le R. P Weichmachter, des missionnaires d'Afri
que, qui dirigeait la mission des Pres Blancs Ouazzen,
en Kabylie, est dcd aprs une vie consacre la
charit.

Le lieutenant Mangin, qui portait dignement un

nom illustre, est mort pour la France au Maroc.


23

<( M. Jean Bvia, architecte, avait fait pendant plu

sieurs annes partie du bureau de notre Socit comme

archiviste. Cet homme actif ne considrait pas les


fonctions qu'il acceptait comme purement honorifiques.
Au prix de beaucoup de temps el de soins minutieux,
il a rdig la table gnrale de la Revue Africaine pour

les annes 1882

date laquelle s arrtait la premire

table
1921. 11 a ainsi rendu un grand service aux

travailleurs et mrit leur reconnaissance.

Le baron Arthur Chassriau est mort dans sa


85*
anne, aprs une longue existence consacre aux

affaires, au service des arts, j'ajouterai l'Algrie.


Son grand-pre, gnral de l'Empire, avait t tu
Waterloo, pendant la charge lgendaire des cuiras
siers de Milhaud. Le nom de son pre, Frdric Chass
riau, est li au dveloppement et aux embellissements

de la ville d'Alger dont il fut l'architecte pendant de


longues annes. On lui doit en particulier les plans de
celle uvre capitale qu'est la construction de l'actuel
boulevard de la Rpublique.
Notre collgue tait n Alger en i85o et c'est ici
que se passrent ses annes de jeunesse, dont il devait
garder le souvenir enchant. Jusqu' la fin, sa mmoire,
sur laquelle l'ge n'avait pas eu de prise, se plaisait
voquer avec une fidlit sans dfaillance, l'Alger du
second Empire, les chasses dans le bled, et tous les per
sonnages du temps dont les noms sont insparables de
l'histoire du pays.

Aprs quelques annes passes dans les services de


la Compagnie Algrienne, puis dans ceux de la Com
pagnie inter-ocanienne de Panama, il entra comme

associ dans une charge d'agent de change Paris. Sa


comptence, son activit, sa droiture, la rectitude de son

jugement lui acquirent dans le monde des affaires une

situation de premier plan et une autorit, une influence,


qu'il conserva mme lorsque l'ge et la maladie lui
eurent fait abandonner l'exercice de sa charge
-

24

Ce n est l qu'un des aspects de son activit. La vie

de M. Chassriau a t domine par la ralisation d'un


grand dessein : runir et assurer la conservation des
uvres de son parent, le peintre Thodore Chassriau,
mort trente-sept ans, uvres qui se trouvaient dis
perses dans les collections particulires la suite

d'achats faits par les amateurs ou de dons consentis

par l'artiste ses amis. A force de persvrance, de


sacrifices aussi, il avait russi constituer chez lui un

ensemble unique de tableaux, de dessins, de croquis

dont il aimait faire les honneurs, mme prter les


pices les plus prcieuses aux organisateurs d'exposi
tions. Ainsi le Muse des Beaux-Arts d'Alger put expo

ser en ig3o, pendant quelques semaines, des uvres

matresses de l'artiste.
La runion de cet ensemble unique tendait un but
dsintress. Dans l'esprit de notre collgue, le Muse
du Louvre, qui dj avait reu de nombreux tmoigna
ges de sa gnrosit, en devait tre l'hritier naturel.

Ainsi se trouvera reconstitue, Paris, l'uvre essen


XIXe
tielle de l'un des matres de la peinture au sicle.

<< Les recherches faites par M. Chassriau, les rela

tions qu'il avait noues dans le monde des artistes et

des amateurs, avaient dvelopp en lui des dons natu

rels. II ne tarda pas occuper l aussi une place de


choix. Prsident du Conseil d'Administration du Muse
Rodin, fondateur et vice-prsident de la Socit des
Artistes Orientalistes, membre du Comit des Amis du
Louvre, son influence s'est exerce de faon utile au

profit des arts. N'oublions pas qu'il fut l'un des insti
gateurs de la fondation de la villa Abd-el-Tif Alger.
Cet homme tait la modestie mme. Il fut fait che

valier de la Lgion d'Honneur prs de quatre-

vingts ans.

M. Chassriau avait conserv le souvenir fidle,


nous pourrions mme dire le culte du pays o s'tait
-
25 -

coule sa jeunesse. Il suffisait que l'on s'intresst


un titre quelconque Alger et l'Algrie pour tre
assur de la cordialit de son accueil. Nombreux sont

ceux dont les travaux ont prouv le bienfait d'une obli

geance qui semblait s'excuser de rendre service, et qui

n'oublient pas la sympathie dont il les a honors.

Lors de notre dernire Assemble Gnrale vous

avez donn votre approbation un projet de Fdration


des Socits Savantes de l'Afrique du Nord.
A l'heure actuelle, cette Fdration est chose l'aile.
Elle tiendra son premier Congrs Alger, la Pentecte
prochaine.

Ce Congrs ne se droulera pas, il est peine besoin


de l'indiquer, sous le signe de la prosprit. Le pactole

du Centenaire est tari. Nanmoins vous n'auriez pas

compris qu'on n'et pas prvu, en mme temps qu'un

programme de travail, des excursions divers sites et

monuments, tout au moins dans la rgion d'Alger.



Ainsi, malgr ses soixante-dix-neuf ans sonns, la
Socit Historique Algrienne fait preuve d'une activit

salutaire qui, en lui assignant des buts nouveaux, lui


donne des raisons valables de durer .

M. Berque, Trsorier, prsente son rapport sur la situa

tion financire de la Socit pour l'exercice ig3'i.

RECETTES

Excdent de l'exercice ig33 56.io5 /io


Subvention du Gou\ernement Gnral (exer
cice 193/1) i5.ooo

Subvention de l'Universit d'Alger (exer


cice ig3/0 ."i.000

Cotisations 1 .
267

Tolal des recettes 77-372 /10


26 -

DEPENSES

Frais d'impression de la Revue Africaine. . . . 21.074 65


Dpenses d'administration. Frais d'envoi des
fascicules de la Revue Africaine. Confection
de clichs photographiques. Tirage des
hliogravures 3 .84 1 90

Total des dpenses 24.916 60

Excdent de l'actif : 52.455 fr. 80 du compte chque

postal, auquel 858 fr. 79 dposs au compte


il faut ajouter

caisse, la Caisse d'Epargne, soit : 53.3i4 fr. 59.

Les comptes du Trsorier sont approuvs l'unanimit


el des flicitations lui sont adresses.

11 est ensuite procd au renouvellement du bureau


pour 1935. Sont lus :

Prsident : M. Gustave Mercier.

Vice-Prsidents : MM. G. Yver et G. Marais.


Secrtaire Gnral : M. G. Esquer.

Secrtaire : M. Brunschvig.

Trsorier : M. A. Berque.

Membres
: MM. le Gnral Meymer, J. Alaz\rd,
R. Lesps, M. Lar*aude, M. Canard, L. Leschi, Th
Fayolle, Ibnou Zekri.
Membre correspondant : M. Doul.
A propos d'Inscriptions Libyques

La question du dchiffrement des inscriptions libyques


a t reprise il y a quelques annes par M. C Meinhof (1).
Un rapide examen de son ouvrage suffit rvler au lec
teur le moins rudit le caractre arbitraire de la nouvelle

interprtation propose pour l'alphabet. Qui admettra,


sans preuve vidente, que les quatre cinquimes des mots
conservs dans les inscriptions se terminent par Q ? Le
bon renom que l'auteur s'est acquis dans d'autres bran
ches de l'orientalisme, et le patronage de la Socit
orientale allemande, qui a accueilli cette tude dans sa

collection, semblent donner quelque crdit un ouvrage

qui n'en mrite aucun. Je voudrais justifier cette opinion

par quelques exemples, en me bornant des constatations

matrielles.

C'est surtout dans l'examen des textes latino-libyques


que l'auteur laisse paratre son incomptence en la
matire. Il s'en tient encore, pour l'dition de ces textes,
aux lectures surannes de J. Halvy. Les publications

ultrieures lui sont inconnues. Les textes ont t revus

et plus correctement dits par divers auteurs et, en

(1) Die Hbysnhen Inschrilten. Eine Untersuchung von Cari Meinhof

(Leipzig, 1931, in-8, 46 pages). Vol. XIX, 1, des Abhandlungen fur


n"

die Kunde des Morgenlandes, publies par la Deuts. MorgenlnrJ.


Gesellscbaft.
dernier lieu, par Gsell dans le Recueil des Inscriptions
latines de l'Algrie. M. Meinhof ignore totalement cet

important ouvrage.

Ainsi, pour l'inscription de Sactut (C. I. L., VII, 5220


et 17395 ; Reboud 24 ; Halvy 34 ; Gsell, /. L. A. 147 ;
/{. /. L. 151) (1) , la lecture d'Halvy, peu correcte pour

le latin, est seule mentionne. M. Meinhof ne tient aucun

compte des rectifications de Gsell, et il croit encore


l'existence d'un nom latin Saclulius.
Il en est de mme pour l'inscription de NABDHSEN
(C.l.L. 5218 et 17393; Reboud 8 ; Hai. 74; L.L.A.,
138 ; R. I. L., 145). Ngligeant compltement les
rectifications ultrieures, l'auteur adopte les lectures
d'Halvy, fautives aussi bien dans le latin que dans
le libyque. Il croit le nom nrdds tout fait sr ,
parce qu'il se retrouve encore dans Hai. 55 ( Reb.
30). Or Hai. 55 contient deux erreurs ; premirement, il
omet le N
final, qui se trouve dans Reboud ; secondement,
le Rdoit, d'aprs les estampages, tre corrig en B. A

propos de cette inscription, on peut juger de la hardiesse

des conjectures de l'auteur : La suite (dit-il, p. 27)


parat mal copie : nous devons avoir m au lieu de III
et
au lieu du point ; et comme cela doit rpondre
Coluzanis, il s'ensuit que m a la valeur de t. Par malheur

pour la conjecture, le texte libyque est parfaitement bien


conserv et correctement reproduit. Au reste le m (qui a
la valeur de t dans les inscriptions horizontales de

(1) L'abrviation R. I. L. dsigne le Recueil des Inscriptions libyques


publi aux irais du Gouvernement gnral de l'Algrie. Nous
indiquons les textes qui se trouvent dans la partie dj imprime de
cet ouvrage. Nous esprons le mener promptement a bonne lin, et il
aurait dj vu le jour si l'Imprimerie Nationale avait apport plus
d'activit son excution Le Recueil en est actuellement au 658. n"
29

Dougga) ne se rencontre pas une seule fois dans les 700


inscriptions verticales connues ; il a t cr par l'imagi
nation de M. Meinhof.
Inscription bilingue de Chinidial (C. I. L. 5217 ; I. L. A.
156 ; Reboud 73 et 216 ; Halvy 83), Ici encore,
M. Meinhof s'en tient, pour le latin, la lecture errone

d'Halvy. 11 ignore la seconde copie de Reboud, et la


rectification de Gsell. Cette dernire est tout fait
conforme aux estampages et au moulage que nous poss

dons, sauf pour le nom latin qu'il lit MISICIR, et qui est

5e
en ralit MISIC1T (ou peut-tre MIS1GIT, la lettre tant
un peu confuse). Les noms propres sont ainsi d'accord
dans les deux textes.
Dans la stle dite du Vtran (C. I. L. 5209 ; I. L. A.
137; Reb. 14; Hai. 29; R. I. L.
146) le premier nom
propre libyque, au bas de la colonne de droite, se compose
de trois lettres. A la suite d'Halvy, Meinhof y cherche la
transcription du nom latin Caius. 11 donne comme
38
signe III, et ajoute en note (p. 30) nach R[eboud],
H[alvy] hat =. En ralit, c'est tout l'oppos; Halvy
a III, et Reboud a = conformment la pierre. Mais qu'on

lise III, c'est--dire Q, selon Meinhof, ou qu'on lise =,

c'est--dire Y selon lui, il faut beaucoup d'imagination


pour trouver l'quivalent de la terminaison US dans l'un
ou l'autre signe. On ne verra pas sans surprise que des
sept mots libyques qui composent l'inscription, six se ter
minent par la lettre Qdans la transcription de M. Meinhof.
II est regrettable que l'auteur ait compltement

nglig l'inscription libyco-punique de Chemtou (Reboud


312, R. I. L. 72). Il aurait pu constater que le nom

propre punique pw rpond (comme d'ordinaire)


lettre lettre au nom libyque, avec omission de la lettre
finale = ,
omission inexplicable si cette lettre est la
30

il le prtend, mais pleinement justi


consonne p, comme

fie s'il s'agit d'une voyelle. Ne serait-ce pas pour ce motif

qu'il a oubli de rappeler cette inscription, et aussi la

bilingue latino-libyque du Bardo qui donne un dmenti

non moins formel sa conjecture ?


Dans cette dernire (C. I. L. 17317 ; lt. I. L. 85) le nom

propre latin est Faustus ; dans le libyque, les quatre pre

miers signes sont FUST et le dernier =; le nom serait

donc FUSTQ selon M. Meinhof. Est-ce vraisemblable ?


Une autre inscription bilingue, de Mactar, aujourd'hui

au Bardo (R. I. L. 31), est galement passe sous silence par

M. Meinhof, et vraisemblablement pour la mme raison.

Dans la partie libyque se trouve le mot, trs frquent,


MDITE; dans le punique ce mot est transcrit non pas

prv~D comme le voudrait l'alphabet Meinhof, mais

Nmefn] avec l'article devant le nom.

L'auteur examine cependant (p. 41) l'inscription punico-

libyque de Duvivier, qui n'est pas moins dfavorable ses

conjectures. Il ignore ou feint d'ignorer (t) l'tude que j'ai


consacre cette inscription d'aprs un estampage et

aprs examen de l'original. Il s'en tient la lecture


matrielle, compltement errone, du capitaine Mlix
(Bull, de l'Acad. d'Hippone, t. XXI) et il l'interprte sa

faon. Son commentaire est le plus curieux spcimen de


ses aberrations

Il adopte l'opinion de Mlix qui voit dans 5 barres


terminant la premire ligne libyque ( gauche) une

reprsentation schmatique de la main dresse contre le

(1) M. Meinhof citant (p. 7, n. 1) le dbut de l'article du Journal


asiatique o j'ai trait des inscriptious libyques, il est difficile de
croire qu'il it ignor la suite de cet article, et de ne pas conclure, ou
que ses recherches ont t fort superficielles, ou qu'il laisse volontai
rement de ct ce qui peut contredire le systme imagin par lui.
-
31 -

mauvais il. Or, ces cinq traits ne sont autre chose que
=
les deux lettres T places l'une au-dessus de l'autre.
Mlix ayant lu (fautivement) le dbut du punique pyx,
Meinhof accepte et la lecture et le sens de pierre ; de
plus, il voit dans ce premier mot punique, le correspon

dant du dernier mot libyque, qu'il lit msuq et traduit


Denkstein ; il se flicite d'avoir ainsi dcouvert le sens
d'une expression frquente dans les inscriptions libyques
et jusqu'ici inexplique. Ce n'est qu'un rve. Le premier

mot punique est pvr ; c'est le nom propre du dfunt,


rpondant au premier mot libyque ZNN. On peut juger
par cet exemple, absolument indiscutable, du caractre

arbitraire des dductions de l'auteur. La dernire ligne


(le Denkslein du traducteur) n'est pas transcrite en

punique. Par contre, la troisime, que M. Meinhof transcrit

nmrsq, se lit dans le punique ^DiDjn. Le n initial est

l'article, et le >
final est la transcription du = libyque,
c'est--dire du prtendu p de M. Meinhof. Espre-t-il
trouver un lecteur assez naif pour admettre qu'il faut
assigner la valeur de la consonne Q un signe que le
phnicien omet ou qu'il transcrit par A ou par I, et le
latin par US, selon la voyelle supporte par ce signe

dont la fonction est analogue celle du hmza dans


l'criture arabe ?
L'inscription de Lalla Maghnia (CL L., VIII, 9976 ;
Reboud 140; Halvy 157) est perdue. Elle n'est connue

que par la copie du com. de Caussade, publie en trans


cription dans le Journal asiatique ds 1843. Toutes les
conjectures sont donc permises. L'abb Barges proposa

de lire la ligne libyque de haut en bas. Cela paraissait

indiqu par la position inverse du M et par le fait que

beaucoup de noms libyques commencent par MSI....


Nanmoins, la lecture de haut en bas constituerait un
-
32

exemple unique et anormal. A mon avis, cette anomalie

n'existe pas. Une stle latine a d tre remploye, et

replace inversement ; ds lors la ligne libyque se trouvait

sur le ct gauche de la pierre remploye et se lisait


normalement de bas en haut. La mme chose est arrive

pour une inscription de Duperr, aujourd'hui au Muse


d'Alger (D. Il n'y a aucun rapport entre le libyque et le

latin, et les dductions d'Halvy et de Meinhof, qui lisent


de bas en haut, c'est--dire rebours, sont forcment
errones. Je ne serais pas surpris que la partie disparue
de l'inscription latine ait t efface intentionnelle
ment au moment du remploi. On constate le fait dans
une inscription du Muse de Bne (C. I. L. VIII, 17396 ;

Gsell, I.L.A., 153 ; Reboud 93; Halvy 24 ; 11. 1. L. 147).


En examinant cette pierre, on peut constater que les deux
lignes suprieures du latin, qui contenaient les noms

propres, ont t effaces, non pas accidentellement, mais


trs soigneusement par un grattage intentionnel (2).
L'alphabet constitu par M. Meinhof (p. 32) est bas,

(1) Cette pierre a t dcrite par M. Albertini (Bull. Archol. du


Comit, 1925, p. ccxi). Elle a servi trois fois. Premirement, pour

l'inscription libyque de trois lignes qui occupe la partie suprieure de


la face III; ensuite, pour l'inscription latine qui est au mme niveau

Puis la pierre a t renverse ; la partie inscrite a t fiche en terre,


et sur la partie mergente une nouvelle inscription de quatre lignes
a t grave. Ainsi, le latin tant dans sa position normale, le libyque
suprieur se lit rgulirement de bas en haut, tandis que le libyque

infrieur devrait se lire de haut en bas. 11 faut donc retourner cette

seconde inscription ; la premire ligne qui se trouve a gauche dans la


copie tait & droite, et la ligne qui se trouve sur la face II terminait
l'inscription gauche. Quelle que soit l'opinion qu'on adopte sur

l'antiquit relative du latin et du libyque primitif, il demeure incontes


table qu'il y a sur la pierre deux inscriptions libyques places tte-
bche. La plus ancienne serait celle de trois lignes qni se trouve la
hauteur du latin.

(2) Dans le libyque, a la colonne de droite, Gsell a insr, par erreur,


entre la premire et la seconde lettre, un L qui n'existe pas.
-

33 -

comme nous de le montrer, sur des lectures


venons

matriellement inexactes ; toutes les interprtations


nouvelles proposes par l'auteur sont rejeter.

Les gutturales smitiques


(a, n, n, y) ne sont jamais
transcrites en libyque. Il est donc naturel que l'auteur
n'ait pas trouv de correspondant pour x ni pour y ;
mais il croit avoir trouv l'quivalent du n dans le signe

Illi, et celui du n dans le signe T Je crois avoir montr

que le Mil rpondait au c smitique dans la transcription


de i-ED et de xjdjd, Monlanus, wnBD, Satuminus,
excellents noms africains que M. Meinhof transcrirait
pimu, mnhnq, p;:-inD, Shrnnq. Quant au T des inscrip
tions verticales,
r-
dans les inscriptions horizon
tales, il est transcrit par s dans la bilingue de Dougga,
et il n'y a pas lieu de s'carter de cette transcription
authentique pour y substituer un n = X-

Au smitique correspondrait, selon lui, un signe en

forme de trident renvers semi-circulaire ; ce signe

n'existe pas, et l o M. Meinhof le trouver il y a


croit

un m trs nettement anguleux. Quant au m invent par


l'auteur avec la valeur de to, nous avons dit que ce signe

ne s'tait rencontr dans aucune inscription verticale.

Le UJ que M. Meinhof transcrit par .z est pour nous un v.


S!
Le n qu'il transcrit est un U renvers.

Une des erreurs fondamentales de M. Meinhof est

d'avoir voulu, la suite d'Halvy, distinguer = de III, en

donnant au premier signe la valeur de q et au second

celle de Y* Nous avons montr plus haut quelles

absurdits aboutissait la transcription de = par q. En


ralit ces deux signes ne sont qu'une mme lettre dans
deux positions diffrentes. On trouve le mme mot crit
huit fois MSU EE, et dix fois MSUIII ; on trouve cinq fois

XSF =, et six fois NSFIII N'est-ce pas concluant?

3
-
34 -

D'aprs M. Meinhof, le X se trouve transcrit par le s

dans la forme punique jnynxi


; or, Clermont-Ganneau a
d'
montr jadis (Rec. Archol., t. III, p. 333) que ce nom

doit tre lu jnynD\


La lecture des inscriptions libyques prsente encore des
difficults. Ce n'est pas l'tude de M. Meinhof qui contri

buera les rsoudre. Nous n'avons signal qu'une partie

des erreurs accumules dans son travail ; assez cependant

pour montrer quels ttonnements infructueux s'expose

raient ceux qui voudraient faire usage de son alphabet

fantaisiste.

J. B. CHABOT,
Membre de l'Institut.
PORTUS MAGNUS (ST-LEU)

Spultures Punico-Romaines

INTRODUCTION

(historique, reprise des recherches)

Ds le dbut de l'occupation franaise, les ruines de


Porlus Magnus avaient t signales l'attention des

historiens et des archologues. Les officiers des troupes


de pntration, de Rochemonteix et de Montfort, entre
autres, ont laiss des descriptions de l'tat dans lequel
ils les trouvrent.
Eblouis par cette rencontre inattendue des beaux restes

de la civilisation latine au pays des Barbaresques, ils les


dcrivirent avec enthousiasme.

Les publications de Berbruger dans la Revue Africaine


et dans les Antiquits Algriennes des annes i858 et

1859 nous relatent aussi ce qui se trouvait la surface du


sol cette poque ; et c'tait simplement merveilleux

en comparaison de la dvastation o se trouvent actuel

lement les ruines.

Malgr ces publications et rapports militaires, l'admi


nistration ngligea de prendre soin des richesses docu
mentaires qu'on lui signalait.

C'est ainsi que, lorsqu'on dcida, pour des raisons

d'installation du village de colonisation de Saint-Leu, de


36

dplacer les habitations de la tribu berbre des Bettioua,


on ne trouva pas mieux que de les iixer dans les ruines,
au grand mconlentement du reste des indignes, qui

n'aiment pas habiter dans des ruines, mais s'installent

en gnral ct en utilisant les matriaux anciens pour

la construction de leurs gourbis. C'est ainsi qu'ils avaient


XIV*
fait au sicle, poque de l'arrive des Bettioua
Portus Magnus.

Donc, nouveau et double pillage des ruines jusque


vers 1860 ; village europen et village berbre se cons

truisent avec des matriaux antiques.

Les Bettioua se fixent dfinitivement dans la ville

romaine, enlevant pour l'avenir toute possibilit d'explo


ration mthodique et suivie.

La dcouverte des mosaques en 1802 fait une certaine

impression.
Lors du voyage imprial en Oranie, l'Empereur et sa

suite s'arrtent Saint-Leu, vont voir les mosaques.

L'attention est nouveau attire sur les ruines. Nan


moins, les mosaques restent durant il\ annes exposes

aux intempries et la dmolition par des visiteurs

peu scrupuleux.

Le Commandant Demaeght, qui venait de fonder le


muse d'Oran, s'est occup de son mieux des ruines de
Saint-Leu. C'est lui qu'on doit le transfert des mosa

ques Oran, en 1886, ainsi que la mise l'abri de nom

breux autres documents. Ses travaux et notes sur les


ruines sont consigns dans de nombreuses publications

dans le Bulletin de la Socit de Gographie et d'Archo


logie d'Oran des annes 1886-1899.

Une grande partie des documents provenant de Saint-

Leu sont conservs au muse d'Oran. Le catalogue tenu


jour par M. Doumergue, conservateur du muse, en

donne la liste et une description sommaire.

L'pigraphie y est largement reprsente par vingt-



37 -

6ept pierres inscriptions ; ce qui porte, avec celles que

nous avons eu la chance de trouver, le nombre des ins


criptions provenant de Saint-Leu trente-trois.
L'Atlas archologique de M. Gsell, feuille de Mostaga
21, rsume
n

nem, peu prs tout ce qui tait connu

sur Saint-Leu la date de sa publication (191 1).

Depuis 1899, l'Administration el les Socits Savantes


locales s'taient dsintresses des ruines de Porlus
Magnus.
Par contre des particuliers, chercheurs d'antiquits
dans un but de commerce et d'exportation l'tranger,
des collectionneurs de monnaies, entretenaient des rela
tions suivies et fructueuses avec les Bettioua.
Les ruines fournissaient aussi de la belle pierre toute
taille pour les nouvelles constructions.

Il s'en trouve de remployes dans presque toutes les


caves de viticulteurs, construites tout dernirement, de
mme que dans les nouveaux gourbis des indignes. Un
propritaire de Damesme a dmnag ainsi tout le dal
lage du beau forum, mconnaissable actuellement.

Que sont devenus frises sculptes, fragments de sta


tues, objets de toute sorte qui, aux dires des habitants
du pays, taient emports par ce Monsieur ?
La construction de la nouvelle glise paroissiale a pris

aussi une large part la dmolition de prcieux docu


ments.

Pour occuper les troupes en canlonnemenl Saint-Leu,


pendant la grande guerre et les annes qui la suivirent,
les officiers faisaient fouiller certains terrains des ruines.

II ne reste nulle part, notre connaissance, une rela


tion de ces fouilles ni indication du chemin pris par les
objets trouvs. Or, il est impossible de remuer le sol des
ruines sans rencontrer de nombreux documents :
frag
ments d'architecture, pierres pigraphiques, poteries,

monnaies.
-
38 -

Ces pillages, les uns conscients, les autres inconscients,


sont d'autant plus regrettables qu'ils ont priv le dpar
lement d'Oran d'un beau centre d'tudes anciennes et

d'attraction touristique.
Il rsulte des documents connus et de notre tude per

sonnelle sur place que Portus Magnus, aprs avoir t


un gros centre de commerce maritime carthaginois,
durant plusieurs sicles avant l'arrive des Romains,
tait devenu, aussitt aprs leur installation dans le pays,
une grande ville latine, sorte de capitale conomique et

commerciale de la partie de la Maurtanie csarienne

qui correspondait l'actuel dpartement d'Oran, peu

de choses prs l'actuelle Oranie.


Il serait peut-tre intressant de rechercher si cette

province romaine ne portait pas dans l'antiquit le nom

de Urania ?
Portus Magnus tenait donc dans la province la place

qu'y occupe actuellement Oran.


Sa position gographique, idale pour les conditions

de navigation dans l'antiquit, l'avait prdestin ce

tle.

Une baie immense, abrite des gros remous du large


l'Est par les montagnes du
Darah, l'Ouest par la
chane rocheuse du Djebel Aurouse, s'incurve, entre

Port-aux-Poules et Arzew, doucement, en arc rgulier

dans les terres. Elle offrait aux petites embarcations un


abri sr et des grandes facilits d'atterrissage sur une

belle plage sablonneuse, d'une longueur de plus de


dix kilomtres.
Les ouvrages principaux du port sont encore dcou
vrir ; certains indices nous font supposer leur empla

cement.

La ville, situe deux kilomtres de la mer et du port

suppos, s'levait sur un plateau au-dessus de l'humidit


et des brouillards marins, on ponte naturelle pour les
coulements des gouts.
-

39 -

Elle se trouvait ainsi dans des conditions d'hygine


parfaites.

La voie impriale qui, de Carthage Tanger, reliait


entre elles toutes les possessions de la cte, passait entre
la mer et la ville, avec des bifurcations, sans doute, vers

la ville et vers le port.

Deux voies romaines, encerclant une belle fontaine


monumentale, montaient de la mer au Forum.
Leur trac existe encore de nos jours ainsi que les
vestiges de la fontaine (Voir notre plan croquis
n"

i).

Tout un ensemble de citernes-rservoirs pour ramas

ser el conserver les eaux de pluies existe encore sur les


crtes. Esprons qu'il sera possible un jour de pousser

suffisamment les fouilles pour pouvoir tudier le trs


ingnieux fonctionnement de ces citernes qui, jointes
aux puits trs profonds le plateau,
creuss sur permet

taient aux habitants de braver la scheresse du pays.

Ces travaux, ainsi que ceux d'adduction, de canalisa


tion et de distribution d'eau, tmoignent de l'impor
tance de la cit, de l'initiative, de la sage prvoyance

de son administration et du perfectionnement de la


technique des ingnieurs romains.

Si les ruines avaient pu chapper aux dvastations, si

ds les dbuts de la colonisation franaise elles avaient

t rserves comme proprit domaniale, chose qui ne

devait pas tre difficile cette poque, nous aurions

actuellement Saint-Leu un ensemble de cit ancienne

merveilleux, sorte de Timgad en plus petit, sur un litto


ral Maurtanien.
Le sort ne l'ayant pas voulu, il ne nous reste qu' nous

appliquer sauver au moins ce qui reste, fouiller,


tudier les coins rests encore libres de constructions

modernes, afin que ces ruines, avant de sombrer dfini


tivement dans le pass, nous livrent encore quelques-uns

de leurs secrets.

La marche de cette tude est dsormais assure, car la


40

direction des Antiquits de l'Algrie a pris les ruines de


Portus Magnus sous sa protection claire ; elle coordon

nera les recherches, veillera ce que, suivant la loi,


toute dcouverte archologique reste proprit de l'Etat.

Nous avons pu constater avec plaisir que, depuis que


nous travaillons Saint-Leu, tout un mouvement de
curiosit historique se dessine chez la population tant
europenne qu'indigne.

Les Berbres Bettioua sont particulirement friands de


rcits sur le pass du pays. Ayant compris que c'est en

vue de cette connaissance et pour le compte du Beylik

que nous travaillons, ils nous apportent avec empresse

ment leurs trouvailles. Quelques-uns mettent gracieuse

ment leurs champs notre disposition pour


y effectuer

des fouilles.

Cette sympathie bienveillance est due en partie l'in-


lluence de M. le Docteur de Sidi Bou-
Ledoux, maire, et

Abdeli, marabout vnr des Bettioua. Nous les remer

cions ici de leur prcieuse collaboration.

Nos remerciements vont aussi Mlle Klinger et


M. Bourette, directrice et directeur des Ecoles qui, par
leur aide, assurent le succs des recherches. Mlle Klinger
nous est une collaboratrice inestimable ; trs dvoue
l'archologie, elle exerce sur place, aide de sa famille,
une surveillance vigilante et constante des ruines. Les
documents dcouverts trouvent en sa personne, en atten

dant leur installation au muse d'Oran, un conservateur

jaloux et dvou.

*
* *
Jf.*.

3
ET
O
U
o

a
-
43 -

LES CIMETIERES DE PORTUS MAGNUS

Une ville de cette importance, ayant eu plus de dix


sicles d'existence ininterrompue, devail avoir de vastes

ncropoles.

A couter les habitants, de tous cts on aurait trouve,


en dfrichant et en labourant, des jarres contenant cen

dres et ossements calcins. Il nous a t impossible de


vrifier ces tmoignages : les jarres avaient t emportes

ou casses, les terrains o elles se trouvaient, complan-

ts de vignes ou couverts de constructions.


Nous avons commenc notre fouille par des sondages

destins prciser le plan de la ville. C'est au cours de


ces recherches et en nous basant sur certaines indications
puises dans les publications du commandant Demaeght,
que nous avons eu la chance de dcouvrir successivement

deux cimetires, dont un, le dernier, insouponn jus


qu' ce jour.

L'exploration complte de ces cimetires n'est pas

encore termine, mais nous avons pu fouiller un grand

nombre de spultures, rcolter un mobilier funraire


assez important pour nous permettre des constatations

intressantes et nouvelles concernant l'histoire de la ville

et une partie de ses changes commerciaux.

Nous dsignerons ces cimetires dans notre expos,


d'aprs leur position par rapport la ville ancienne,
sous les appellations de Cimetire Sud-Est et de Cime
tire Nord-Est.
Le cimetire Sud-Est sera divis son tour, en deux
parties : cimetire des Agaves et cimetire des Figuiers
de Barbarie ou Figuiers tout court-

Division artificielle pour la commodit de la descrip


tion, suivant leur position sur le terrain et suivant leur
entourage. En ralit, notre terrain explor est une seule

et mme partie d'une vaste ncropole qu'on pourra peut-


-
44

tre fouiller entirement, plus tard, lorsque les nces

sits de la culture ne
s'y opposeront pas.

Le tude, indique
n"

plan croquis 2, annex cette

ces divisions ; les photographies montrent les phases


successives de notre fouille, et illustrent notre relation

un peu longue. Nous nous en excusons auprs du lecteur,


mais ces longueurs nous semblent ncessaires pour bien
dterminer les emplacements des terrains afin de les
rendre reconnaissables plus tard ; travaillant dans des
terrains qui sont proprit prive nous sommes obligs

de combler les tranches aussitt l'exploration faite.


Le mobilier funraire et les monnaies trouves dans
les tombes el l'extrieur, au cours des recherches,

seront tudis dans un chapitre spcial.

CIMETIERE SUD-EST

Le Commandant Demaeght (Bulletin d'Oran, 1899),


signale au Sud et une distance de trois cents mtres

environ, l'existence d'un mausole dtruit en 1889.

D'autre part, la mme source indique au Sud-Ouest


quelques spultures fouilles par M. Simon. Cette fouille
a donn un certain nombre d'objets : poteries, lampes,
iioles-lacrymaloires conserves au muse d'Oran.
Nous avons pu identifier l'emplacement du mausole

dont quelques vestiges restent encore sur le sol.

La fouille Simon, d'aprs notre enqute, a d avoir

lieu l'Ouest du mausole dans un terrain actuellement

cultiv en partie et en partie servant de dcharge pu

blique. Le mausole se trouvait peu prs au centre


d'un vaste terrain de pacage fournissant, au printemps,
une pauvre nourriture aux troupeaux.

45

Commebeaucoup de terres de la rgion, avant le d-


foncement, celle-ci est couverte d'une mince couche de
roc, sorte de tuf compos d'un mlange de grs sablon

neux et de calcaire. Il apparat dans cette couche, de


place en place, des taches de terre molle, noirtre, o la
vgtation est plus grasse, c'est une sorte d'alternance

de creux naturels forms par les eaux, de terre noire rap


porte et de dpressions rgulires artificielles, conscu

tives au creusement des spultures.

L'exploration de ce terrain, le dpistage des spul

tures est donc rendu difficile par cette alternance de


creux naturels et de dpressions artificielles combles

galement de terre noire. La fouille serait trs longue et

trs coteuse cause de la vaste tendue.

Certains indices nous font supposer que le mausole

se trouvait au bord de la voie qui, au sortir de la ville,


traversait la ncropole, el se dirigeait par les Amyans
sur Tasaccora (Saint-Denis-du-Sig: milliaire signal dans
l'Atlas archologique).

Cette voie tait le prolongement du cardo maximus

que nous avons pu reconnatre l'aide de quelques

sondages.

Partant au Nord, ct de la mer, il traverse une partie


du Forum et aboutit une porte du rempart Sud.

Un amas de matriaux dont les indignes extrayaient

la pierre pour construire, a livr trois inscriptions :

inscriptions funraires encore indites, les stles pigra


phiques sont conserves l'cole de filles.
Ces inscriptions provenaient videmment de la ncro

pole toute proche et avaient t remployes dans la

construction, une poque o elle avait cess de recevoir

de nouvelles spultures.

Pendant que nous explorions cette construction, un

respectable vieillard, un peu marabout, Derkaou Abdel


kader, venait souvent causer avec nous.
4b'

Nous coutions volontiers le chapelet de ses souvenirs

qui nous livrait de temps en temps quelques indices


utiles pour notre tude.
Il nous dit un jour se rappeler avoir vu, tant enfant,
devant la maison de ses parents, des marches qui s'en

fonaient sous terre.

Ds le lendemain nous partmes, sous sa conduite,


la recherche de ces marches.

La maison de notre marabout se trouve en dehors et

presqu'en face de l'angle Sud-Est du rempart de la ville

ancienne.

Elle est presque en ligne droite dans le prolongement,


l'Est, du terrain de pacage, plus d'un kilomtre de

distance des vestiges du mausole.

Les terrains qui l'entourent sont de mme nature que

ceux prcdemment dcrits ; la mme crote rocheuse,


les mmes taches noirtres vgtation plus fournie de
place en place.

Une haie d'agaves et de broussailles pineuses l'Est,


un mur moderne en pierres sches au Nord, la maison

du marabout l'Ouest, dlimitent un enclos qui a d


servir autrefois parquer les bestiaux pendant la nuit,

mais qui actuellement est ouvert tout passant.

C'est cet enclos qui sera notre Cimetire des Agaves.


Disons en passant, que dans le pays on confond gn

ralement agaves et alos. Ainsi, les plantes qui bordent


notre enclos sont appeles par tout le monde alos, mais

sont en ralit des agaves. (Voir plan-croquis


n

2).

Le vieux marabout nous dsigna vers le milieu de


l'enclos un lger flchissement de terre.
Il me sem

ble que les escaliers taient l .

A peine avait-on enlev une couche de terre d'une


paisseur de o m. 3o que des grosses dalles apparurent

encastres dans le roc.


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Plan croquis
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Fig. I

CIMETIERE SUD-EST
Tombe du cimetire des agaves avant l'enlvement des dalles.
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SUD-EST
CIMETIERE
Fig. 3

CIMETIERE NORD-EST
Terrain avant la fouille.
Fig.

Citernes et ruines de la ville ancienne du ct de la mer.

A l'horizon, dans le coin gauche l'emplacement du cimetire Nord-Est.


49

Ce sonl des dalles rectangulaires irrgulires, peine

quarries, coupes dans le roc mme lors de la prpara-

lion de la spulture.

La tombe avait t ferme primitivement par quatre

dalles, trois seulement taient restes en place, une de


celles du milieu manquait, ce qui donnait vaguement

l'impression des marches d'un escalier rudimentaire,


comme on peut le constater sur notre photo de la tombe,
prise, les dalles tant (photos
n"*

en place i el a).

Ces dalles enleves, nous nous sommes trouvs en

prsence d'une fosse remplie de terre sablonneuse, rou-

getre et meuble.

A la profondeur d'un mtre apparaissent quelques

grains de chaux blanche trs fine, quelques tessons de

poterie ordinaire, deux clous grosse tte en fer rong

par la rouille. Encore o m- 25 de terre, et des taches jau


ntres, quelques esquilles d'os annoncent la proximit
du squelette, nous confirment dans l'espoir que la spul

ture n'a pas t viole malgr la disparition de la dalle


du milieu.

Le squelette est compltement dcompos, seuls quel

ques dbris d'ossements mls de la chaux, quelques

os longs des bras et des jambes, de morceaux de crne

permettent de rtablir la position du corps lors de l'en


sevelissement.

Cette position est indique sur notre croquis du Cime


tire des Agaves (tombe
n"

i).

Le corps est couch sur le dos, la tte l'Ouest, par

consquent, regardant l'Orient, dans une fosse rectangu

laire mesurant 2 m. 35 x o m. 92, profondeur : 1 m. 25.

Rien ne permet de supposer un ensevelissement dans un

cercueil ; il est possible, par contre, que le corps envo-

lopp d'un linceuil, ait t recouvert d'une mince couche

de chaux coule.
Le mobilier funraire, qui se trouvait dans la tombe,

4
-
50 -

tait dispos autour du corps, comme l'indique notre

croquis :

i. Un petit plat rond en torre blanchtre de mauvaise

cuisson, le bord lgrement dentel par la marque des


doigts du potier ; il rappelle, en petit, le ladjine

iicluel des indignes.


2. Un beau vase en terre rouge sigille, forme cylin

drique, couvert d'un beau verni rouge brillant. Il sera

tudi plus loin dans le chapitre consacr aux poteries

el lampes dcores.
Ce vase contenait, bien amalgame dans de la terre,
une petite tasse sans anse en argile fine trs cuite, aux

parois si minces et si finement travailles au tour, qu'on

pouvait, avant dcapage, les croire en verre fin.


Une substance alimentaire, sorte de bouillie, jauntre,
adhrait encore aux parois du vase et de la tasse. Elle
devait tre liquide lors de la dposition du vase dans la
tombe, el la petite devait servir, dans la pense
tasse

des parents du mort, pour [miser et boire le liquide.


3. Dix-neuf fioles en verre iris par le temps, du type
lacrymatoire ou fiole de parfum.

Les unes grandes, les autres plus petites, au galbe

lanc, la base arrondie bulbe d'oignon de tulipe,


en

elles sont disposes tout autour de la tte, quelques-unes


poses par dessus. Comme si on avait voulu prserver

h. tte des mauvais gnies ou de la dcomposition par

cette abondance de parfums.

l\. Une fiole semblable aux prcdentes pose dans


la main, ou du moins au niveau de la main. Cela fait en

tout vingt laciymatoires dans une seule tombe.


5. Une petite lampe pose aux pieds du mort. C'est
une trs belle lampe ronde sans anse, en belle poterie

rose un seul bec lgrement allong, dcor d'un


mdaillon reprsentant une chasse au sanglier ; c'est un

modle de lampe ancienne de bonne poque.


-
51 -

Aprs l'exploration de celte tombe, nous avons

retourn tranche par tranche tout l'enclos des agaves

et ses abords immdiats.


De l'autre cl de la bordure des agaves s'tend un

vaste champ qui certainement devait faire partie, dans


l'antiquit, du mme cimetire, mais que, pour des
raisons de culture, nous n'avons pu encore fouiller.
Dans l'enclos mme nous n'avons trouv que deux
tombes ;
noa

autres 2 el 3 du plan.

Elles sont semblables la prcdente. Le n

2 mesure :

t m. 65 x o m. 60, profondeur : 1 m. Le n

3 :

a m. 3o x o m. 60, profondeur : o m. 93.

Les dalles de ces tombes n'taient pas en place mais

bascules, enfonces dans la terre de la fosse. Pas de


mobilier funraire ; les quelques traces d'ossements per

mettaient cependant de dterminer la position des corps

qui est toujours orient Est-Ouest.


Nous avons trouv, dans la terre de dblais, les dbris
d'une belle poterie sigille en pte fonce, noirtre, signe
Severi .

Nos recherches entreprises de l'autre ct du mur de


pierres sches, mur mitoyen entre l'enclos du marabout

et le champ d'un autre propritaire, nous ont donn


des rsultats plus satisfaisants.

C'est un champ dlimit l'Est par une bordure de


figuiers de Barbarie, d'o le nom de Cimetire des
Figuiers.
La terre est cultive, elle produit une maigre rcolle

de pommes de terre et de quelques autres lgumes. Mais


ds qu'on creuse un peu, le rocher apparat ; la couche

cultivable, suivant les endroits, n'a qu'une paisseur de


o m. 4o o m. 60. A l'aide de tranches successives
au nous avons pu explorer
creuses paralllement mur,
tout le champ. Il serait videmment intressant de pous

ser la fouille au del de la bordure des figuiers, mais


-
52

des gourbis indignes et des jardins s'y opposent pour

le moment.

Les deux tombes, les seules que nous ayons trouves


dans le Cimetire des Figuiers, sont parallles au mur
de pierres sches et font suite celles du Cimetire des
Agaves.
La mme faon de creuser la tombe, mme mode d'en
sevelissement, mme position du corps, couch sur le
dos, orient Est-Ouest.
Cependant beaucoup plus de dbris de poteries, de
lampes, de fioles parfums dans la couche de terre qui

recouvre les dalles, c'est--dire sur le sol antique.

Cela indiquerait, peut-tre, soit que les mnes de ces

morts aient reu plus d'offrandes de la part des visiteurs,


soit que le terrain, prserv par la culture superficielle,
ait mieux gard les objets.

Les dimensions de ces tombes sont les suivantes :

Tombe i : 2 m. 10 x o m. 5o, profondeur o m. 62.


Tombe 2 : 1 m. 3o x o m. 5o, profondeur o m. 65.
Elles sont donc plus troites et moins profondes que

celles du Cimetire des Agaves.

Mobilier de la tombe I

1. Une main est replie sur la poitrine, elle tient un

miroir et un lacrymatoire. C'est un petit miroir rond, en

bronze poli, encastr dans un petit manche finement


travaill. Des miroirs semblables se trouvent au muse

de Cherchell ; ils proviennent des spultures puniques


de Gouraya et sont connus comme tant des miroirs
Carthaginois.

2. Au pied du squelette se trouvait une jolie lampe du


mme type que celle trouve dans la tombe n

1 de l'au
tre ct du mur.
53

La tombe n

a ne contenait pas de mobilier funraire.


11 a t trouv tout prs de la bordure des figuiers un

fragment de pierre taille, arrondie comme une borne


lte conique forme par une sorte d'tranglement dans
la pierre.

Il nous semble que c'est une grossire stle funraire.


Non loin de l se trouvaient encore deux morceaux de
pierre travaills : un fragment de support de statue,
sorte d'arbre en pierre bien taille, sur lequel s'appuient

les grandes statues. Ce fragment est en bonne pierre

tendre, d'un bon travail, il a d appartenir un monu


ment important. (Voir les photographies : 3, , 5, 6 et 7

qui illustrent la fouille du Cimetire des Figuiers).


Le milieu du champ nous rservait une surprise ;
mesure que l'on dbarrassait le rocher de la terre, appa

rurent de place en place des petites cavits rectangu


laires, peu profondes, creuses dans la couche rocheuse.

Comme l'paisseur de cette couche ne dpasse pas o m. 70,

aucune des cavits n'atteint cette profondeur.

Nous avons pu dcouvrir et explorer neuf de ces petits

creux, mais il est fort probable qu'il en existe d'autres


en dehors du champ, sous les figuiers ou sous les mai

sons d'habitation en bordure du champ.

Voici les dimensions des cavits par ordre de taille et

plan-croquis, figure
n

suivant notre 2 :

I.
o,65 X 0,/|0

2.
o,5o X 0,2/1

3.
o,/i5 x o,3o

/l.
0,42 x o,i3

5.
o,35 x 0,12

6.

o,36 x 0,20

7-
o,43 X o,3o

8.
o,i5 X 0,12

9-

0,23 X o,i5
54

Elles taient remplies d'un mlange de terre, de cen

dres, d'ossements calcins mls une grosse quantit

de dbris de poteries ordinaires, en ple grise, et fines


de lacry-
en belle terre rouge, de lampes, de morceaux

matoires.

Nous avons pu recueillir un certain nombre d'objets


entiers.

Les uns se trouvaient dans les cavits mmes, les autres

parpills sur le sol, ils taient noircis par la fume,


couverts de cendres et d'un dpt calcaire form par les
eaux.

i. Un joli petit vase en terre rouge trs fine, genre de


petit aryballe panse globulaire, avec une anse orne

de cannelures circulaires.

2. Plusieurs petits cruchons en terre grossire blan

chtre, forme d'Alabastre base arrondie, et base


plate cylindrique, court goulot reli la panse par

une anse.

(Voir dans le chapitre du mobilier funraire, les pro

fils de ces vases).

3. Une srie de toutes petites assiettes, patres, en terre

brune de forte cuisson, d'une jolie forme, de courbe

parfaite, ornes sur le bord retourn d'une ou de plusieurs

Heurs longue tige qui ressemblent aux cornets d'arum


styliss.

Presque chaque petile assielte contenait une lampe


pose sur une pice de monnaie, quelquefois : lampe.
monnaie et un lacrymaloire.
Lampes el lacrymaloires sont presque toujours crass,

briss, aplatis contre l'assiette ; le tout brl, fondu,


noirci de fume. Les monnaies sonl uses, non identi
fiables. Tellement effaces, qu'on peut supposer que la
monnaie dpose dans l'assielte sous la petite lampe tait

dj une pice ancienne n'ayant plus cours.


-
55

4- Fragments de grosses poteries, marmites en

terre blanchtre, contenant, trs tass, un agglomrat de


cendres, d'ossements el de charbon.

11 nous est permis de penser, aprs l'tude de ces

cavits el de leur contenu, que nous sommes en prsence

d'un endroit rserv au dpt de cendres aprs l'incin


ration des corps. Il devait y avoir plusieurs emplacements

pareils dans la vaste ncropole. Les loculi se groupaient

probablement par familles, car l'ensemble que nous

avons dcouvert et tudi est


trop petit pour servir de
dpt communal.

Nous savons que jusqu' l'arrive des Romains dans


le pays, et certainement aprs, les deux modes d'ense
velissement taient en usage chez les Phniciens, et nous
dirions, chez les Africains : ensevelissement dans la fosse
individuelle ou chambre familiale et l'incinration sur

le bcher (i).
11 est probable que plus tard les premiers colons ro

mains continuaient se servir des mmes cimetires et


pratiquer galement les deux modes d'ensevelissement.
Le bcher est le mode d'incinration le plus ancien,
le plus simple et le plus usit.

Point n'tait besoin d'un four crmatoire. On posait le


d'

corps sur un gros amas arbustes rsineux, et de plantes

sches odorifrantes, si abondantes dans l'Afrique du


Nord, tels que : lentisques, romarins, lavandes, cystes cl

bruyre. A ct du corps taient placs lampes et lacry-

matoires remplis d'huile et de parfums. On arrosait le


tout d'essences parfumes et on allumait ce bcher. La
combustion se faisait ainsi rapidement, en plein air, sans

mauvaise odeur.

Les dchets, une fois le bcher refroidi, cendres, osse-

(1) S. Gsell. Histoire ancienne de t'Afnuua du Xard, t. IV, p. 428


et suivantes.
-
56 -

ments calcins, dbris de fioles, d'offrandes de toute


sorte, taient ramasss dans des urnes en terre ou directe
ment dans des loculi comme ceux que nous venons de
dcrire.
L'important tait que chaque mort et sa tombe sur

laquelle on entretenait le culte du souvenir.

On avait coutume, lorsqu'on venait la visiter, d'ap


porter en guise d'offrandes aux disparu, tout
mnes du
comme pour les funrailles, des fleurs, sans doute, le
plus souvent, sur une petite soucoupe une lampe rem

plie d'huile qu on allumait sur la tombe, une pice de


monnaie qui pouvait aider le mort se procurer toute
sorte de faveurs dans l'autre monde.

L'usage de poser des pices de monnaies sur les tom


bes s'est conserv jusqu' nos jours dans certaines pro

vinces russes. On pose la pice sur la croix, les pauvres

qui passent prennent cette pice en rcitant une prire

pour le repos de l'me du dfunt.


Les Africains berbres et espagnols ont conserv aussi

cette coutume trs ancienne d'allumer des petites lu


mires sur les tombes au jour des grands anniversaires.

A la Toussaint et au Jour des Morts les cimetires afri

cains scintillent de lumires, les tombes de certains ma-


labouts de l'Islam africain sont constamment illu
mines.
*
* *

LE CIMETIERE NORD-EST

Ce cimetire est trs important et d'un grand intrt


archologique en juger par son abondant mobilier
funraire qui sera tudi plus lard.
Il se trouve un endroit o rien ne faisait supposer

son existence, et nous pouvons bien dire que c'est le


hasard, dieu des archologues, qui a prsid sa d
couverte.
57 -

Comme nous l'avons dj expliqu dans notre intro


duction, le plateau sur lequel se trouve la plus grande

partie de la ville ancienne, se termine du ct de la mer

par une chute rapide. Autrefois, dans la des temps,


nuit

elle servait peut-tre de berge abrupte la mer dont elle


est distante actuellement de prs de deux kilomtres en

ligne droite.
Son lvation au-dessus du niveau de la mer est d'une
quarantaine de mtres.

Les courants d'eau souterrains qui de l'intrieur du


pays viennent la mer, passent sous le plateau et se

trouvent au pied de la crte une profondeur relative

ment faible. Aussi, nombreux taient sur ce niveau les


ouvrages d'art de toute espce faits par les Romains pour

capter l'eau. Ces travaux de captage, joints aux immen


ses et nombreuses citernes pour ramasser et conserver

les eaux des pluies, permettaient la ville d'avoir de l'eau


douce en abondance, non seulement pour les besoins
d'hygine de mnage, mais encore pour l'entretien
et

des jardins qui, du ct de la mer, entouraient de belles


et nombreuses villas.

Ce sont encore, du reste, les mmes sources qui per

mettent l'arrosage de quelques jardins cultivs par les


indignes, installs dans la partie des ruines qui descen
dent vers la mer.

Ces ruines nous indiquent que des constructions an

ciennes s'tendaient de ce ct bien au del de l'actuelle


route d'Oran Mostaganem ; elles dpassent mme par

endroits, celle d'Arzew Mostaganem.


La fontaine romaine, indique sur notre plan-croquis
i, est un des vestiges le plus important des travaux
n

hydrauliques.
La source qui l'alimentait dans l'antiquit n'est tou

jours pas tarie ; malgr son envasement, elle fournit


encore de l'eau douce en toute saison.

La construction en belle pierre de taille, qui la sur-


58

monte, mritera peut-tre un jour, les honneurs du


classement comme monument historique.
Nous nous permettons de rappeler ces dtails pour

pouvoir prendre la fontaine comme point de dpari


pour le lecteur qui chercherait un jour notre cimetire

Nord-Est sur le terrain, l'aide de notre publication.

Nous esprons qu'elle bravera encore un certain nombre

de sicles, comme elle l'a l'ait jusqu'ici, pour le grand

contentement de l'archologue qui nous succdera.

Si nous nous plaons sur la route de Mostaganem, face


la fontaine, nous voyons deux chemins, deux ancien
nes voies romaines qui, de chaque ct de la fontaine,

droite et gauche, montent sur le plateau.

Suivons celle de gauche qui se dirige vers le Sud-Est.


Elle traverse un terrain rempli de ruines : amas de
pierres de constructions, dbris d'architecture, ctoie

des souterrains profonds, des votes croules.


La petite maison romaine dcrite dans les Monuments
Antiques de Gsell, se voit gauche, en contre-bas de la
voie (i). Arrive sur le plateau, aprs avoir touch le Fo

rum, elle devient sentier moderne, appel sentier des


Crtes. On pourrait aussi bien l'appeler sentier des Citer
nes ou sentier des Tolbas, car sur presque toute sa lon
gueur en direclion Ouest-Est, il se droule au-dessus des
votes des anciennes citernes qui formaient le sous-sol
des maisons du bord du plaleau. Les jeunes tolbas. tu
diants de l'cole coranique de Sidi ben Abdelli, affection

nent particulirement ce chemin des Crtes, car il est

isol, l'air arrivant directement de la mer est frais et pur,


et lorsqu'on est fatigu de rciter pour la centime fois la
mme sentence, il fait bon de s'endormir l'ombre pro-

leclrice de la citerne romaine.

Lorsqu'on a russi subliliser quelques grappes de


rsisin, quelques figues des champs voisins, on ins-
s'y

(I) S. Gsell, Monuments auluiu.es, l 11, p. 17, f. 86.


-
59 -

(all bien commodment pour savourer en paix les fruits


du larcin car le Marabout matre ne viendra pas si loin
pour distribuer ses coups de matraque.

Ce sentier traverse toute la ville, et continue travers


champs el vignobles, dominant toujours la mer, jus
qu'au rservoir d'eau municipalde Saint-Leu aliment
par la conduite d'eau venant de Mazagran. (Nos photos

illustrent des
n08

2 et 3, celte partie ruines).

Le clich 3 est pris d'en bas, proximit de la route

d'Oran Mostaganem, on y dislingue la crte avec ses


citernes caches, on partie, par les arbres. Le sentier
passe en haut de la photo, auprs d'un arbre qui se d
tache sur le ciel.
A droite, en face de l'arbre (il est entendu qu'on se
dirige toujours vers l'Est), se trouvaient l'arrive des
Franais les restes importants d'un beau btiment, la
Grande Maison des Monuments antiques, de M. Gsell (i).
C'est de l que proviennent les mosaques du muse

d'Oran. Nous avons eu beaucoup de mal dterminer


leur, emplacement, car elles ont t enleves sans le
souci de laisser une indication exacte au lieu de leur ori

gine sur le terrain.


Quelques pans de murs anciens restent encore
proximit de cet emplacement. Nous y avons trouv, en

faisant des fouilles, des nombreuses fondations de b-

liments importants.
La seule construction encore debout est une ancienne

citerne englobe dans un vaste ensemble de btiments,


elle leur servait de rservoir d'eau, surlev sans doute,
pour la commodit de la distribution. {Voir notre

photo) .

La porte et la fentre de la citerne, quoique de cons

truction romaine, semblent avoir t ajoutes plus tard.

Aprs l'avoir vide de la terre et des dtritus qui la com-

() S. Gsell, Monuments antiques, t. II, p. 19, f. 87.


-
60 -

blaient moiti, nous y avons install des planches et


d'

elle nous sert de dpt d'outils et de fragments archi

tecture. C'est un peu par drision qu'on lui donne le


nom de Muse Agence de Fouilles .

Mais continuons suivre notre sentier. Nous avons

donc, en allant toujours vers l'Est, notre droite la


citerne-muse, notre gauche, la crte des plateaux

creuss de citernes el un ensemble de murettes, tout un

systme de troits, de canalisations destina-


passages

lion encore inconnue. Quelques mtres plus loin, le

sentier fait une brusque descente dans des champs cul

tivs. Ces champs sont bords de pierres anciennes el

encombrs de place en place par des murs romains

encore debout. L'ensemble des constructions auxquelles

appartiennent ces murs se trouve en dehors du rempart

de la ville.

Cette situation loigne l'Est, en dehors des murs,


nous faisait penser l'existence possible, dans cet endroit,
d'un quartier de basse poque, probablement quartier

chrtien .

Nous entreprmes la fouille du champ dans le but de


vrifier cette supposition.

Ds la premire tranche diagonale, partant du pied

des murs qu'on voit sur la photo


n

i, nous tombions
dans une fosse couverte de dalles semblables celles

que nous avons dj dcrites dans notre relation de la


fouille du Cimetire Sud-Est.
Les dalles se trouvent sous une couche de o m. 60
de terre arable, elles no sont pas en place, mais bascu
les dans la fosse. Rien de rgulier dans la prparation

ni l'ajustage de ces dalles. Ce sont de gros blocs coups

dans le tuf pais de o m. 5o. Une fois la tombe creuse

et l'ensevelissement termin dans la terre molle qui se

trouve sous le roc, les dalles taient remises par dessus


pour boucher la tombe.
11 fallait bien nous rendre l'vidence ; nous tions
-
61

encore une fois dans un cimetire el un cimetire cer

tainement plus ancien puisque des ruines de construc

tions romaines en bon appareil, s'levaient par dessus


les tombes.
On ne souponnait peut-tre dj plus ce cimetire

l'poque o on levait ces constructions ; en tout cas,


il devait tre dclass.
Actuellement, rien, absolument rien n'aurait pu,
l'examen extrieur du champ, faire penser son exis

tence.
Le terrain reprsente un rectangle allong Est-Ouest,
descendant en pente douce vers le Nord, vers la mer.

De plus loin que s'en souviennent les plus anciens

habitants de Retlioua, ce coteau a toujours t labour


et sem tous les deux ans, suivant la coutume indigne

du pays.

La partie Est est coinplante en vignes depuis cinq ans.

Comme cette plantation a t faite par des petits pro

pritaires Bettioua, le sol n'a pas t dfonc profon

dment et les tombes n'ont pu tre dceles.


Notre ; dans le
n"

photo a mon Ire cette vigne coin

droit, en haut de la photo, on voit la partie du cime

tire que nous avons explore, et les vestiges des cons

tructions romaines.

On trouve certes, dans la terre, en labourant mme


avec la charrue rudimentaire des indignes, des dbris

de poteries, une monnaie, une lampe. Mais c'est chose


courante dans tous les champs et jardins parsems des

ruines de l'ancienne ville.

Nous n avons pu fouiller jusqu'ici que la partie sup

rieure de la colline occupe par ce cimetire.

Les 5, 6, 7, 8 indiquent les


nos

photos phases succes

sives de la fouille.
Le lecteur voudra bien les examiner attentivement

mesure qu'il suivra le texte ; il nous dispensera ainsi

d'une longue description et d'un croquis-plan que nous


62 -

donnerons plus lard, lorsque nous aurons pu dterminer


toute l'tendue du cimetire.

Ces photographies permettent de constater que les


tombes sont prpares peu prs de la mme manire

que celles trouves dans le cimetire Sud-Est, et prc

demment dcrites.
On la de- la spulture,
dessinait, lors de prparation

l'aide d'une entaille dans le tuf, un rectangle un peu

plus grand que les dimensions de la fosse creuser. On


enlevait cette sorte de couvercle en le brisant en plu

sieurs morceaux. La couche rocheuse, suivant les


endroits, est d'une paisseur qui varie entre o m. oo et

o m. 75. Sous cette couche se trouve une terre rouge

molle, trs permable aux eaux.

C'est dans cette terre qu on creusait la tombe de la


dimension ncessaire pourl'inhumation du corps, et
la profondeur voulue. On couchait le corps dans le fond
de la fosse, sur le dos, on disposait autour le mobilier

funraire en usage et on ensevelissait le tout sous la terre


molle.

Souvent on tassait la terre de place en place par des


grosses pierres. Le corps tait prserv quelquefois du
contact immdiat de la terre par quelques dalles plates

poses en champ inclin.


Quelques tombes sont remplies de terre et de grosses

dalles accumules les unes par dessus les autres, il a

fallu faire un vritable travail do carrier pour arriver au

fond de la fosse. Les poteries el lacrymatoires qu'elle

contenait, taient crass, dans ce cas, sous le poids des


pierres.

Il semble que c est intentionnellement que ces pierres

auraient t entasses par dessus le corps, comme si on

avait voulu le prserver des voleurs la recherche des


objets qu'on mettait dans la tombe. Il se peut aussi

qu'on ait voulu empcher les btes sauvages : hynes et


63 -

chacals, qui devaient abonder autour des villes el villa

ges, de dterrer les corps.


Nous n'avons trouv jusqu'ici, ni dans l'un ni dans
l'autre des cimetires, aucun monument funraire,
aucune pierre avec inscription en place.

Les inscriptions dc\ aient tre rares cette poque,


mais il existait des monuments frustes pour marquer les
tombes ; tmoins les quatre stles pointues,
anpigra-

phes, trouves de place en place, couches sur le sol

archologique une profondeur variant entre o m. a5

et o m. 5o, et la stle pointue et ronde du cimetire Sud-

Est.
Les quatre premires sonl reproduites, avec indication
des mesures,
nos

sur nos photos 9, 10 et 11.

Chaque tombe devait avoir sa stle, le cimetire devait


en tre couvert ; elles ont disparu au cours des sicles,

remployes dans des constructions.

Il est impossible de savoir de quelle manire elles

surmontaient les tomfces, tant donn que nous les avons

trouves couches et non en place. L'encoche la base


d'une d'elles, photo 10, indiquer cependant
n"

semble

qu'elle devait tre fixe debout, enterre jusqu' la hau

teur de l'encoche ; la base plus large assurait ainsi une


meilleure stabilit.

Tombes dans l'ordre de leur dcouverte, dimensions,


mobilier

1.
Longueur 2 m. ; largeur o m. 4o ; profondeur

1 m. 20.

Mobilier : une belle coupe rouge sigille, couverte d'un


verni rouge brillant ; elle tait place la tte du
squelette.
-
64 -

Une lampe ronde de belle poque, avec mdaillon orn

de trois filets.

2.
Longueur i m. 4o ; largeur o m. 4o ; profon

deur i m. 20.

Mobilier : beau lacrymatoire en verre iris, une petite

lampe.
Le lacrymatoire est pos dans les mains qui devaient
tre croises sur la poitrine, une lampe pose aux pieds.

3.
Longueur 1 m. 10 ; largeur o m. 35 ; profon

deur o m. 95.

Mobilier : nant.

4. Longueur 1 m. 20 ; largeur o m. 45 ; profon


deur 1 m. i5.

Quelques ossements calcins.

Mobilier : petite coupelle en belle poterie rouge conte

nant deux perles en pte de vene^une monnaie brle


trs use.

5.
Longueur 1 m. 79 ; largeur o m. 55 ; profon

deur 1 m. 81.
Mobilier : lampe au niveau des mains, petite coupe
la tte, trois lacrymatoires aux pieds.

6.
Longueur 2 m. 3i ; largeur o m. 90 ; profon

deur 1 m. 92.

Mobilier : lampe en terre blanchtre, fragments de


poterie rouge, deux clous en fer.

7.

Longueur 2 m. 27 ; largeur 1 m. 10 ; profon

deur 2 m. 10.

Mobilier : lampe deux becs, terre brune, queue

triangulaire, dbris de poterie blanchtre.

8.

Longueur 1 m. 45 ; largeur o m. 4o ; profon

deur 1 m. 37.
Fig. 5

CIMETIERE NORD-EST
Terrain en cours de fouilles ; dcouverte des tombes.
Fig. 6

CIMETIERE NORD-EST
Tranche dcouvrant des tombes et leurs dalles de fermeture.
CITERNE ROMAINE SUR LE PLATEAU..
Muse. Agence de fouilles !

Fig. 8

CIMETIERE NORD-EST
Deux stles pointues

A. Hauteur : 0 m. 90 ; largeur base : 0 m. 70 ; paisseur : 0 m. 15.


B. Hauteur I m. ; largeur base 0 m. 50 ; paisseur 0 m. 25.
CIMETIERE NORD-EST CIMETIERE NORD-EST

Stle et dalles de tombes. Stle funraire.


Hauteur : 0 m. 65 ; Largeur : 0 m. 45 ; Hauteur I m. 15; largeur : 0 m. 50; base : 0 m. 60:

paisseur : 0 m. 20. paisseur 0 m. 30.



65 -

Mobilier : jarre en poterie blanchtre goulot troit,


une pice de monnaie.

9.
Longueur 2 m. 3o ; largeur 1 m. 80 ; profon

deur 1 m. 3o.
Mobilier : belle coupe en poterie rouge sigille et ver

nisse qui contenait une tasse en poterie grise trs fine


ment travaille au tour.

10.
Longueur 1 m. o5 ; largeur o m. 4o ; profon

deur o m. g5.

Quelques ossements calcins.

Mobilier : petite assiette avec lampe et monnaie.

11.
Longueur 2 m. 35; largeur 1 m. 60; profon

deur 1 m. 82.
Une trs grosse dalle, mesurant 1 m. 60 x 1 m. 35
se trouvait bascule dans cette tombe.

Mobilier : trois clous, des dbris de plaques de miroir

en mtal, fragments de poterie blancbtre.

12.
Longueur 2 m. ; largeur 1 m. 60 ; profondeur

1 m. 3o.
Mobilier : coquille nacre, teinte d'ocre.

i3,

Longueur 1 m. 5o ; largeur o m. 87 ; profon

deur 1 m. i5.

Mobilier : morceaux de fer trs rouill, une lampe,


un beau lacrymatoire en verre iris.

1/1.

Longueur 1 m. 3o ; largeur o m- 74 ; profon


deur 1 m. 20.

Mobilier : dbris d'anneaux en bronze pouvant former


un bracelet enroul ; dans la couche de terre vgtale,

une lampe.

i5.
Longueur 1 m. 16 ; largeur o m. 48 ; profon

deur 1 m. 4o.
Quelques ossements ; mobilier : nant.

5

66

i6.
Longueur 2 m. 20 ; largeur o m. 74 ; profon

deur 1 m. 73.

crase ossements calcins.


Petite urne contenant

17.

Longueur 1 m. 5o ; largeur o m. 67 ; profon

deur 1 m. 09.

Mobilier : nant.

18.

Longueur 1 m. 90 ; largeur o m. 78 ; profon

deur : 1 m. 19.

Mobilier : masse de morceaux de fer, une plaque de

bronze, un lacrymatoire bris.

Dans la couche de terre vgtale une lampe, une urne

ossements calcins.
brise contenant quelques

19.
Longueur 2 m. 29 ; largeur o m. 66 ; profon

deur 2 m. 08.

Mobilier : lampe, dbris de poteries, une monnaie.

20.
Longueur 1 m. 85 ; largem o m. 37 ; profon

deur 1 m. 10.

Mobilier : nant.

21.
Longueur 1 m. 5o ; largeur o m. 35 ; profon

deur o m. 97.

Mobilier : nant.

22.
Longueur 1 m. 12 ; largeur o m. 60 ; profon

deur o m. 88.

23.
Longueur 1 m. q3 ; largeur o m. 65 ; profon

deur 1 m. 76.

Cette tombe avait cela de particulier que la profondeur

du rocher qu'il avait fallu percer avant d'arriver la


terre molle tait de 1 m. 08. Une dalle de grande dimen
sion tait engage de biais dans la tombe.
La dalle : longueur 1 m. 5o ; largeur o m. 33 ; pais
seur o m. 33.
67

Mobilier : une petite poterie en terre blanche, une

lampe crase, 2 clous.

24.

Longueur >. m. 35 ; largeur 1 m. ; profondeur


2 m. 4o.
Grosse dalle galement : 1 m. 28 x 1 m. o3, toute la
tombe bien remplie de cailloux.

Mobilier : une poterie rouge avec anse.

25.

Longueur 2 m. 37 ; largeur o m. 77 ; profon

deur 2 m. o5.

Trs grosse dalle couvre la tombe : 2 m.


37 x 1 m. 5o.
Mobilier : nant.

26.

Longueur o m. 89 ; largeur o m. 28 ; profon

deur o m. g5.

Mobilier : une lampe.

27.

Longueur o m. 81 ; largeur o m. 44 ; profon


deur o m. 64.
Mobilier : petite coupe et petit vase col et anse briss,
paraissant tre des jouets.

28.
Longueur 1 m.
09 ; largeur o m. 5o ; profon

deur o m. 60.
Mobilier : nant.

29.
Longueur 2 m. 54 ; largeur 1 m. 33 ; profon

deur 1 m. 85.

Mobilier : un lacrymatoire, une lampe, un cruchon,

poterie grossire, une plaque de bronze.

3o.
Longueur o m. 83 ; largeur o m. 38 ; profon

deur o m. 3i.
Mobilier : une coupe rouge plate.

3l
Longueur 1 m. 19 ; largeur o m. 52 ; profon

deur o m. 81.
Mobilier : nant.
-
68 -

32.
Longueur i m. 10 ; largeur o m. 56 : profon

deur o m. 75.

Mobilier : une pice de monnaie, une coquille nacre.

33.

Longueur 2 m. i5 ; largeur 1 m. 21 ; profon

deur 2 m. 5o.
Mobilier : dbris de poteries.

34.

Longueur 1 m. 3o ; largeur o m. 58 ; profon

deur o m. 70.

Mobilier : collier grains fantaisie, petit cruchon po

terie, bris.

35.
Longueur 1 m. 29 ; largeur o m. 79 ; profon

deur o m. 97.

Mobilier : coupe en belle poterie rouge.

36.
Deux petites fosses d'enfant.
Mobilier : deux cruchons poterie grise, une lampe
unie, trois clous de bronze.

37.
Longueur 1 m- 97 ; largeur o m. 5g ; profon

deur 1 m. 93.

Mobilier : poterie rouge brise.

38.

Longueur 1 m. 18 ; largeur o m. 73 ; profon

deur 1 m. 12.

Mobilier : une coupe plate rouge, deux lacrymatoires.

3g. -

Longueur 1 m. 42 ; largeur o m. 60 ; profon

deur 1 m. 27.

Mobilier : deux cruches, une lampe avec un joli des


sin reprsentant un lion.

4o.

Longueur 2 m. 10 ; largeur o m. 82 ; profon

deur 1 m. 60.
Mobilier : une cruche, une coupe plate en poterie

rouge.
69

4i.
Longueur i m. io ; largeur o m. 5o ; profon

deur 2 m. 07.

Mobilier : une lampe intacte, une autre brise, quatre

laerymatoires.

/12.
Longueur : 1 m. 38 ; largeur o m. 55 ; profon

deur 1 m. 75.

Mobilier : nant.

CONCLUSION

Il nous semble que, sans attendre l'tude des poteries

dcores et des monnaies qui sera publie prochainement,


ce compte rendu de la fouille de deux cimetires nous

permet ds maintenant certaines constatations.

Elles seront concluantes pour dterminer approxima

tivement la nature et l'poque de nos cimetires.

Certaines tombes sont toutes petites el ne semblent

avoir contenu qu'une poterie remplie d'ossements cal

cins.

Les deux modes d'ensevelissemenl taient donc en

usage : l'incinration et l'inhumation.


Une fois le corps brl, les cendres mles, les restes

d'ossements taient runis dans une urne, sorte de mar

mite avec couvercle, couverte d'une poterie, sorte de


petite assiette ; on enterrait cette urne et le mobilier

funraire, dispos autour d'elle, dans une fosse qui tait


prpare et comble de la mme faon que celles qui

contenaient les corps non brls.


On remarquera que le plus souvent les fosses sont

troites, ce qui laisserait supposer un ensevelissement

sans cercueil ; les corps devaient tre envelopps dans


un simple linceuil enduit quelquefois d'une mince cou-
70

che de chaux coule. C'est une mode africaine des plus

anciennes constates Carthage (i).


La profondeur de la fosse varie entre i m. et 2 m. 5o.
Les mmes dimensions sont constates par M. Gsell (2).
Les deux modes d'ensevelissement : inhumation et

incinration, se dclent dans nos cimetires. Les osse

ments calcins, les cendres du bcher sont conservs

dans des cavits du rocher ou inhums dans des fosses


pareilles celles qui abritaient les corps, mode usite
IIIe
partir du sicle avant notre re. On la retrouve
Gouraya, Collo, Malte, en Sardaigne; nulle part elle n a
IIIe
l adopte avant le sicle. Voici donc une date
extrme fixe pour l'anciennet de nos cimetires (3).
Le pre Delattre signale des restes calcins enfouis

presqu' la surface du sol (4). A Gouraya on a trouv


une urne d'ossements calcins dans une cavit creuse
IIe
fleur de rocher ; on date ces spultures du au
1er
sicle avant notre re.
Les stles restes dans le cimetire indiquent suffisam

ment quelles taient les marques extrieures des tombes.


C'taient des pierres brutes ou peine tailles en pointe,
des
maccbat, souvenirs parmi les vivants .

Elles retenaient l'me du mort parmi les vivants,


taient considres comme des supports de l'me. Cha
que mort avait son maccbat (5).
Ce genre de stles simples a un caractre des plus

anciens ; en tout cas, antrieur notre re.


Les objets trouvs dans les tombes font tous partie du

d'
(1) Merlinet Drappier. La ncropole punique A rd-el-Kherab
Carthage (Notes et documents publis par la Direction des
antiquits et arts), III, p. 7.

(2) S. Gsell. Histoim ancienne de V-Afrique du Nord, t. IV,


r-h. IV. Les pratiques funraires, <p. 426 et suiv.
(3) S. Gsell. op. cit., p. 450.
(4) P. Delattre. Tombeaux puniques de Cacthage.
(5) Gsell, op. cit., p. 438 et suiv.
-

71

mobilier funraire en usage chez les Phniciens de


l'Afrique du Nord.
Beaux vases sigills, d'importation italienne ou gallo-

romaine, lampes ornes de dessins de bonne poque,


fioles en verre ou en terre cuite de galbe fusiforme,
miroirs, coquillages, clous, clochettes, tte et figurines
en terre cuite, lampe et monnaie poses sur une sou

coupe, sont autant de tmoignages de murs et croyan

ces carthaginoises de la plus haute antiquit.

Un des beaux vases trouvs dans une tombe du cime

tire Nord-Est porte la signature de Marcus Perennius


et de son esclave Saturninus. L'atelier de Marcus Peren
nius est connu comme tant un des plus importants
d'Arezzo vers les annes 3o avant notre re. C'est une

indication chronologique prcieuse.

Il nous semble donc, que nous pouvons d'aprs ce


IIIe
qui prcde, situer nos cimetires entre le sicle et.

Ier
le avant notre re.
C'est--dire en pleine poque punique et punico-ro-

maine de la cit de Portus Magnus.

Malva-Mauhice VINCENT.
Le Thtre Arabe d'Alger

On sait que le genre dramatique est tranger la


littrature arabe et que le thtre arabe contemporain

reprsente un emprunt rcent aux littratures d'Occi


dent, en particulier aux littratures franaise et anglaise.

En Syrie et en Egypte, on trouve, l'origine du th

tre, comme cela s'est produit pour tous les Ihlres,


une priode o les auteurs se contentent de traduire ou

d'adapter les chefs-d'uvre trangers. Peu peu et

l'apprentissage rvolu, Syriens ou Egyptiens se sont mis

chercher des sujets dans leur fonds propre et ont

essay de produire des uvres originales dont le nom

bre, en Egypte par exemple, n'est pas sans importance.


bien que, toutefois, il soit loin d'galer celui des pices
de thtre franaises. Ce mouvement littraire marque
d'un caractre particulier la littrature arabe contempo

raine et l'intrt qu'il a suscit a dj pouss quelques

personnes le signaler et un jeune crivain gyptien


lui consacrer une lude volumineuse et complte (2).

VIIIe
(1) Communication faite au Congrs de l'Institut des Hautes
Etudes Marocaines.
(2] Parmi les tudes rcentes sur le thtre arabe, je signalerai les
essiiis de Franois Bonjean : Egyptienne, dans la re
Une Renaissance
vue Europe, 5, 15 Juin 1923, et 6, 15 Juillet 1923, et les articles ou
0' n"

chapitres de : Nagib Habeiqa dans al-Mariq, II, 1920, 71, pp. 250, 341,

501 ; Muh. t'ard Wagdi, DaHrat al-Ma'arif, II, p. 715 ; Taha Hossayn :
Al-Mogammal fi Trih al-Adab Arabi, Le Caire, 1929, p. 240 ;
al-1

Ahmad ben az-Ziyt : al-Adab al-'Arabi, Le Caire, 1930, p. 365 et


surtout l'uvre magistrale de Muhammd Taymr, Hayalun at-

Tamtiliya, Le Caire, 1924 ; de Abdelkader El-'Arabi ('Abdelkader


Hadj Hamou) : Thtre el Musique Arabe. Une soire Alger, in


\frique, Bulletin de critique et d'ides publi par l'Association des


Ecrivains Algriens, 51, Juin 1929.
n"
-
73 -

Il m'a sembl qu'il


y aurait profit tudier le thtre
Alger, bien que ses origines ne remontent pas long
temps et qu'il ne tienne pas encore dans la vie civile

algroise une place comparable celle du thtre en

Egypte. Ma documentation est en majeure partie orale,


si j'ose dire. La presse arabe locale s'est presque tou
jours montre dsintresse du mouvement dramatique;
quant aux journaux de langue franaise, ee n'est que de
temps autre qu'on
y trouve quelque rapide compte
rendu. T'ai donc d parfois faire appel aux souvenirs de
lettrs algrois et, pour beaucoup, mes propres souve

nirs et mes notes (i).


En 1921, Georges Abiod (>) le promoteur du thtre
en Egypte, entrepril, avec le concours de ses meilleurs

lves, une grande tourne de dcentralisation de l'art


dramatique e! de propagande travers le inonde musul

man et rvla le thtre arabe aux populations nord-

africaines.

Dans la capitale de l'Algrie, o il donna ses repr

sentations au Nouveau-Thtre (ancien Kursaal), il fut


loin de connatre le succs (3). Diffrentes circonstances

furent cause de son chec. Tout d'abord la salle se trou


vait hors du centre de la ville europenne et plus loi
gne encore des agglomrations indignes. Beaucoup
d'indignes ignoraient jusqu' l'existence de ce thtre

et le chemin qu'il fallait prendre pour y parvenir. L'im


prsario eut d'autre part bien de la difficult annoncer

au public l'arrive de la troupe et les reprsentations. Le


secours de la presse arabe, quasi-inexistante alors, lui fit

(1) Toutefois, autant que possible, je ne parlerai que des uvres dont
mention a t faite dans la presse algroise.

(2| Sur G. Abiod, cf. Muhammed Taymr. op. cit., pp. 131-143.

(3) Deux drames furent reprsents ; Salah ad-Din al-Ayyubi et


Taratu-l-'Arab, deux drames de Nagib al-Haddd, le premier tir du
Talisman de W. Scott, cf. G. Zaydn, Trih Adb al-luga al-'Arabiya,
Le Caire. 1911-14, t. IV, p. 248.
74 -

dfaut. En outre, comme les indignes n'avaient pas

l'habitude de s'arrter devant les placards ni de lire les


papiers qu'un camelot leur met presque par force entre

les mains, affiches et prospectus s'avrrent inoprants.

Enfin, le gros publie tait, sinon hostile, du moins in


diffrent une entreprise qui ne lui paraissait pas mar

que au coin d'une honnte orthodoxie. De fait, G.


Abiod connut l'amertume de jouer devant des salles trs

clairsemes, composes de lettrs, tout yeux, tout oreil

les, mais incapables de la moindre raction encoura

geante, et de curieux attentifs aux seuls dshabills des


comdiennes. 11 semblait bien alors que jamais le th
tre n'arriverait s'implanter en Afrique du Nord. Ce
pendant, si les reprsentations de G. Abiod furent infruc
tueuses, elles ne furent pas vaines. Quelques bourgeois
lettrs, des tudiants entreprirent de se grouper pour es

sayer de former le public et de lui inculquer le got du


thtre. Ils fondrent une association al-Muhaddiba dont
la vie fut phmre et les reprsentations rares et inter
mittentes, mais qui constitua une exprience pleine de
suggestions et d'enseignements {i).Les artistes de cette

socit donnrent trois pices dont l'une avant la consti-

d'
lution lgale al-Muhaddiba (2).

L'
(11 Le nom de cette socit Eduna trice est fort caractristique.
Le Prsident tait 'Ali Sarf af-Thar. Voici un extrait du procs-
verbal de l'assemble statutaire qui donne la date de sa fondation :
^i^rU ai.* C^^.il jL;J^3.1\
^i^aJI

J.^jL^.xHj v_jb^r\ a^s.^.

. lin ,i\
V_)-J ^^^i\A.\ z-i -LXi
L'Educatrice, Socit des lettres et du
thtre arabes.
Cette socit a t fonde la date du 5 Avril 1921. 1,

(2) Les uvres reprsentes par cette socit ont toutes pour auteur
'Al arif at-Thar. Ce sont :
1
^U^J\ Jjo .eLiL&Jl, un acte en prose

classique, avec quelques dont le sujet est l'agonie d'un ivrogne


chants,
(1921, Salle des Anciens Elves du Lyce d'Alger); 2 >1i)1 iai>.
trngdie en quatre actes qui apparat comme une amplification de
Aj.^J\ j.jij iU-iJl et fut reprsente en 1923 l'Opra d'Alger :
3
>.->-> , tragdie en trois actes o l'auteur tudie encore
les derniers
jours d'un ivrogne el les mfaits sociaux de l'alcoolisme. Le premier
acte fut jou l'Athne et la pice entire au Nouveau-Thtre

(ex-Kursaal) en 1924.
75

Paralllement aux efforts et aux tentatives d'al-Mu-

haddiba, on constate ceux d'un autre groupement non

organis lgalement qui ne reprsenta qu'une seule

pice dans la salle du Nouveau-Thtre (i). D'autres


amateurs jourent sur la scne, en 1923, une autre

pice en langue classique (2).


Ce furent l les seuls essais d'introduction du thtre
en langue classique. Les causes de son chec furent mul

tiples et les difficults surgirent autant du ct du public

que des acteurs Tout d'abord le public algrois n'tait ni

prpar ni form pour le thtre dont il saisissait trs mal

les principes et le but. 11 lui tait en outre difficile de


comprendre l'arabe classique, soit qu'il l'ignort, ou

que son n'y ft pas accoutume (3). Quant aux


oreille

acteurs, sans parler de leur insuccs moral, sinon finan


cier, de nombreux obstacles arrtrent leur lan. Il ne
suffit pas d'avoir une bonne opinion de ses prdisposi

tions scniques et de la bonne volont pour s'improviser

acteur et, privs de matres, des amateurs ne pouvaient

dpasser les limites d'une exprience. D'autre pari, l'im


possibilit de trouver une actrice qui connt l'arabe clas
sique mettait, chaque fois, dans l'obligation ou d'ex
clure les rles fminins ou de les faire tenir par des

(1) Cette pice ^_y%^ J"^"-*-0 t_s' " t>our 'a Patrie , drame en deux
actes, sans indication d'auteur, fut reprsente le Vendredi 29 Dcem
bre 1922. Cf. Les Nouoelles, quotidien algrois du soir, du 1" Jan n"

vier 1923. Une deuxime reprsentation fut interdite.

12) Cette reprsentation fut donne au profit de l'Amicale des Etu


diants Musulmans de l'Afrique du Nord. Le titre de la pice est

jt-J-o-tal et l'auteur Ahmed Frs. Cf. Annuaire de l'Amicale des


Etudiants Musulmans, Alger, Dcembre 1928 n
1, p. 23.
(3) De jours encore, bien que l'tude de l'arabe classique se soit
nos

tendue dans les milieux indignes d'Algrie (cf. J. Desparmet : La


Raction linguistique en Algrie, dans le Bulletin de la Socit de
1"
Gographie d'Alger, trimestre 1931,
n*

125, pp. 1-34), cette difficult


de saisir sur-le champ tout ce que dit un artiste n'a pas entirement

disparu. Cf. mon article oS^slX*a~ ^^-> <


?<^? J-ta^--*^ dans la
1"
Et-Telmidh , 7-8, Mai-Juin 1932, in fine.
n"
revue anne,
- 76-
.

hommes, pis aller qui ne pouvait durer longtemps (i).


Enfin, il fallait, pour pouvoir donner la comdie, se con
tenter d'une salle de dernire catgorie ou attendre,

soit un jour de relche, soit la fin de la saison thtrale

europenne. Toutes ces circonstances conjugues ame

nrent la mort du thtre arabe ds sa naissance.

Cette disparition du thtre devait durer deux annes,


au bout desquelles il surgit de nouveau, transform,
amlior, rendu viable. Il parut en effet certains Alg
rois que des uvres crites dans le dialecte d'Alger et

dont les thmes seraient emprunts au folklore local


ou aux rcits et aux lgendes populaires de la littrature
arabe seraient srement plus accessibles au public que

des drames historiques tels que Salah ad-Din al-Ayyubi

ou des thses sociales dramatises telles que Bad'. La


premire uvre en langue vulgaire Djeha (>.), comdie

arabe en deux actes et trois tableaux , de MM. 'Allalou et

Dahmoun, fut reprsente le Samedi 12 Avril 1926 sur la


scne du Nouveau-Thtre (ancien Kursaal). Le succs

trs grand qu'elle rencontra auprs du public ordonna

trois nouvelles reprsentations, le Samedi 10, le Mer


credi i4 et le Samedi 17 Mai. Les auteurs avaient trouv
le moyen d'intresser le public, en s'adressant lui dans
la langue qu'il parle, des sujets qui lui sont familiers
(3). Ainsi une nouvelle cole dramatique apparaissait ;

(1) Le des personnages fminins faire voluer sur


problme
scne demeur trs difficile a rsoudre. Ainsi, dans la pice qui
est

nous occupe, il n'y a qu'un rle de


femme, et les organisateurs ont
d le faire tenir par un homme . Les du Lundi ^'Jan
Noueelles, n"

vier 1923, compte rendu de ^y>\ J-^-~> ,_, .

(2) Compterendu dans La Dpche


Algrienne, du 14 Avril 1926. n

13) Ces drames historiques qui obtiennent un grand succs en Egypte


ou cl Tunis ne sonl pas gots du public algrois
pour qui l'histoire
reste une science ferme. C'est ce qui explique l'insuccs de La mon
de Clopdtre (Ahmad Sawq Bey), reprsente a Alger le 2 Mai 1932.
Cf. mon artiole J.-.j.^XJ\ dj cit. Djeha comporte bien des person-
-
77 -

le thtre algrois tait cr et sa vogue allait grandir

sans arrt. La nouvelle cole se distingue de l'ancienne


principalement par l'emploi exclusif du dialecte alg

rois. Ce n'tait pa.s un petit avantage. En effet, dans le


thtre de langue classique, les spectateurs algrois

avaient toute leur attention retenue par un effort cons

tant pour comprendre et ils n'avaient plus le loisir de


rien saisir du sujet, de l'action ou du caractre des per
sonnages. Aussi bien les lettrs tiennent-ils le thtre
pour rien d'autre que le propagateur d'une renaissance

et d'une extension nouvelle de la langue classique (i).


Il semble bien d'ailleurs que, si le corps des 'Ulama alg

rois et la presse arabe n'attachent pour ainsi dire aucune

importance au thtre moderne, ce soit pour cette seule

raison qu'il est crit dans la langue vulgaire, monslre

linguistique qu'ils mprisent et dont ils voudraient

ignorer jusqu' l'existence. Cet ostracisme, dont sont

frappes les uvres populaires en gnral, explique que

les uvres thtrales contemporaines ne soient pas

imprimes. Une autre raison dcoule de la fin mme du


genre qui est reprsentative. Les auteurs crivent leurs
uvres pour qu'elles soient joues et non imprimes.

Il est superflu de dire que les rgles, qui ont si long


temps pes sur le thtre franais, sont totalement igno
res des auteurs algrois, qui, ayant sous les yeux pour

modles des uvres modernes, rarement classiques (2)

nages historiques de l'poque Abbasside, mais Harn ar-Basid devient


Qarn ar-ri, Ga'farle Barmecide : Ga'far al-marhi, Masrr : Masr',
sans qu'aucun emprunt soit fait l'histoire.

(1) Les discours prononcs lors du passage a Alger de la troupe


gyptienne de Fatma Rouchdy sont trs caractristiques ce sujet,
mais la presse algroise ne les a pas reproduits. Ceux qui furent
prononcs Constantine, lors du sjour de la mme actrice dans
teneur identique. Cf. En-Nadjh, 1306, Mer
n
cette ville, ont une

credi 18 Mai 1932.

(2) Je n'ai trouv une imitation d'une comdie classique, imitation


d'ailleurs assez lointaine, que dans la pice Djeha, qui, quelque aber-

78 -

suivent la rgle des auteurs franais actuels, qui est de


n'en avoir point. Qu'il s'agisse de lieu ou de temps, ils
prennent les plus grandes liberts, se contentant de ne

pas trahir les vraisemblances. Je liens pour certaine et

prpondrante l'influence du thtre franais moderne

sur les uvres algroises et, s'il n'existe ni traduction


ni adaptation de drames ou de comdies franaises, c'est

parce que le public les comprendrait trs peu et trs


mal. Cette influence est sensible dans l'action, qui est

gnralement conduite avec habilet et rapidit et sur

tout les dialogues sur les rparties desquels les auteurs

algrois comptent beaucoup pour faire rire les specta

teurs. L'intrigue est ici comme l dpourvue de com

plexit et les caractres peine biuchs.


J'ai dit plus haut que les sujets historiques dplaisent
au public algrois ; je voulais parler des uvres o les
auteurs, se plaant sous l'autorit de l'histoire, accumu

lent des arguments


trop prcis, rels et complexes pour

permettre au spectateur de suivre aisment les volu


tions des personnages. D'incessantes allusions des faits
historiques prcis ou une action taye uniquement sur

un enchanemenl rigoureux d'vnements ncessitant

une attention toujours en veil et une tension soutenue

de l'esprit, a le propre de fatiguer le public et, sans

l'ennuyer, pourrait le trouver indiffrent. Cela ne signi

fie pas l'exclusion de tout emprunt l'histoire, mais

l'histoire laquelle puisent les auteurs algrois est cons

titue de rcits merveilleux et de lgendes dores trans


mises depuis des sicles de bouche en bouche, non par

des textes. Cette particularit tient sans aucun doute au

caractre purement populaire du thtre algrois dont


les auteurs ne sont pas des rudits. Ahmed Sawq Rev,

rant et extraordinaire que cela paraisse, est inspire a la fois du Ma


lade imaginaire et du Mdecin malgr lui. Cf. La Dpche Algrienne,
n"
du Mercredi 14 Avril 1926.
7a

dans son drame Amiral ul-Andalus (i), procde une

reconstitution minutieuse de la dcadence andalouse. Ses


sources d'origine livresque Nujljal-
sont empruntes au

Tib el aux divans des potes d'Espagne. Les person

nages qu'il fait voluer ont rellement exist ou bien ils


sont dessins de telle sorte que leur existence paraisse vrai

semblable. 11 en est de mme d'une autre tragdie gyp


tienne Magnn-Leyla (a) o Ahmad Sawqi Bey accumule

dans un appendice les rfrences historiques et littraires.


Les uvres algroises ne sont jamais des reconstitutions,
car les auteurs puisent toujours leurs sources dans ce

fonds commun que le peuple a constitu de la civilisa-

lion et de l'histoire arabes. Dans la pice de Lunga at-

Andalusiya (3), dont les personnages sont Espagnols ou


Magrebins et dont l'action se droule en Espagne, l'au
teur, Rasid Qsentln, a fait voluer des personnages pure

ment fictifs et bross un tableau de Grenade conforme

seulement aux souvenirs que la tradition populaire a

conservs dans certains rcits et dans un grand nombre

de chansons, de sorte qu' cause mme de l'imprcision


des donnes rien n'y contredit l'histoire, bien que

beaucoup de choses y soient ajoutes (4). Grce une

imagination peu commune, l'auteur algrois se conten

tant d'purer quelques bribes d'histoire pargnes par

l'oubli et les sicles, a pu et su prsenter des personna

ges nullement en contradiction avec l'histoire et des


vnements vraisemblables, s'ils ne sont vrais. Certes,
un examen rigoureux permettrait de relever quelques

anachronismes, mais ces erreurs font partie du patri

moine historique populaire et les rejeter n'avancerait

(1) Ahmad Sawqi Bey Amiral al-Andalw. Le Caire, 1351 1932.

(2) Ahmad Sawqi Bey : Magnn Leyla. Le Caire, 1334/1916.


(3) Comdie en cinq actes de Rasd Qsentln, reprsente l'Opra
d'Alger, le 28 Fvrier 1930.
(4) Corneille Eamen de Cinna .
80

l'auteur rien, puisqu'aussi bien l'art dramatique est

une transposition constante du positif un idal irrel


et potique. Cette libert prise avec l'histoire a permis

d'crire une pice qui rappelle tout instant, mulatis

mulandis. la bouffonnerie aristophanesque. 'Antar .al

Hachachi (i) n est pas l'pope du hros des Ban Abs,


mais l'histoire burlesque d'un pauvre savetier, fumeur

de kif l'imagination romanesque, qui, nouveau Don


Quichotte, part l'aventure et aux msaventures. Bien
que le Roman d'Antar soit rpandu parmi le peuple,
l'auteur a pris la libert de broder sur les exploits du
hros antislamique une action hautement comique, qui

se termine cependant par la mort tragique et non sans

gloire du barbier Antar, en n'empruntant la lgende


que deux faits certains : l'amour du pote pour 'Abla
et sa mort lgendaire. Ainsi, il apparat nettement que

l'histoire est rduite, dans les uvres des auteurs dra


matiques algrois, quelques connaissances vagues et

conventionnelles, qui surgissent et l, de la mme

faon que l'Orientalisme des comdies franaises des


XVIIe XIXe
j
XVIIP et sicles, ou des opras, un ensemble

de traditions en conformit parfois avec la ralit, tou


jours avec ce qui aurait pu tre la ralit. On pourrait
croire, n'tait l'impossibilit du fait, que les auteurs
algrois se plient ces principes noncs par un thori
cien de l'art dramatique classique : C'est une pen

se bien ridicule d'aller au thtre apprendre l'histoire.


La scne ne donne point les choses comme elles ont t,
mais comme elles devraient tre (2).
Les uvres de la veine de Antar al-Hachachi et de
Lunga al-Andalusiya. sont parmi le.s productions ai^c-

(1) Pice hro-comique


sn trois actes de M. 'Allalou, reprsente

l'Alhambra, le Mardi 25 Fvrier 1930. Cf. les articles d'avant-pre


mire dans L'Algrie, du Samedi 22 Fvrier 1930; L'Echo d'Alger,
n

n'
du Lundi 24 Fvrier 1930 et La Presst Libre, du Mardi 25 Fvrier. n"

(2) L'Abb d'Aubignac : Lu Pratique du Thtre, 1. I, ch. I.


roises assez rares. Bien plus grand est le nombre des
comdies qu'il est difficile de classer d'une faon rigou

reuse, puisqu elles vont de la farce la comdie de murs

et que souvent les divers genres comiques sont mls en

une complexit vivante. Le bitl tant de plaire au public,

de l'intresser et de faire rire cette < marmaille d'hom


mes , tous les moyens sonl jugs bons. Un tel principe

a eu pour consquence d'liminer les sujets tragiques et

la comdie sous toutes ses formes, infrieures ou sup

rieures rgne en matresse absolue. C'est peine si, de


temps autre, apparat, comme dans 'Antar al-Hacha'i-

chi, un lment mlodramatique. En ralit, les uvres

tiennent la fois de la comdie proprement dite, de la


comdie lyrique, de la comdie-bouffe, de la farce et de
la sotie sans que, fort souvent, il [misse tre fait une

dmarcation exacte de chacun de ces genres et il n'est

pas rare de voir apparatre, dans une comdie de murs.

un lment farccsque, voire un procd de cirque ou de


grand-guignol (i). L'on retrouve le mme mlange des
genres que dans le drame gyptien de Murd Effendi,
dont Fr. Bonjean a publi une relation dans Europe (2).
Inversement, on retrouvera dans les farces les plus sim

ples, les plus grosses, l'lment tragique par excellence

des Grecs, le Destin, le Maktb.


Mais si la prdestination et le doigt de Dieu sont par

tout prsents, les questions religieuses ne trouvent pas

place au thtre, alors qu'elles font souvent la matire

des chansons satiriques. Cependant des personnages rev

tus d'un pouvoir mi-civil mi-religieux, tels que le mufti

ou le qd voluent parfois sur la scne et sont tourns


en ridicule. A vrai dire, la critique porte le plus souvent

(1) Cf. l'article de V. Barrucand : Essai d'un thtre arabe Alger,


Ze<i 'Aleh ui >: au Municipal, dans La Dpche Algrienne,
vis. du n"

Mercredi 4 Janvier 1933 La pice a pour auteur Rad Qsentni.


i"
(2) Fr. Bonjean Europe, 5, 15 Juin 1923, 95.
n"
: op. cit., partie, p.

6
-
82 -

sur leurs dfauts : ignorance, prsomption, vue courte,


rarement sur leur fonction el leur dignit. Toutefois, on

relve dans Bou-Borma (i), une rminiscence des ancien

nes prrogatives qui leur taient dvolues et le person

nage principal trouve un malin plaisir, par un juste et

providentiel retour du .sort,


rosser le qdl et venger

les malheureux qui, de toute ternit, ont subi la bas


tonnade.

Pour faire ressortir le caractre principal des comdies

algroises, il suffit de dire qu'elles sont, la plupart du


temps, une satire des murs musulmanes ; aussi compor

tent-elles souvent une moralit. Les dfenseurs du thtre


ne manquent pas de souligner cette fin de l'art drama
tique (2). La satire sociale tient de beaucoup la place la
plus large. Les prjugs, les erreurs, les travers, les vices

sont tellement nombreux qu'il suffit de les observer pour

btir une uvre. Chez les auteurs de la nouvelle cole,


comme chez ceux de l'ancienne, se manifeste le souci de
faire toucher du doigt au public les ruines que provoque

l'alcoolisme dans maintes comdies, telle Bou-Borma, ou le


kif comme dans Antar al-Hachachi et Zrireban (3). Les
flches contre l'analphabtisme des femmes indignes et

leur manque d'instruction

ou, au contraire, leur trop


'

rapide europanisation

sont frquemment dcoches


avec violence et il n'est presque pas de pice o ne soit

tal et ridiculis le pharisianisme des dvots. L'intrt


du thtre est par consquent trs grand pour qui tudie

(1) Bou-Borma, comdie en trois actes de Rasd Qsentn, reprsen

te l'Opra le Jeudi 22 Mars 1928. Cf. La Dpche Algrienne et

L'Echo d'Alger,
n"
du Samedi 24 Mars 1928.

(2) Cf. un discours reproduit dans Al-Balg al-G-az'ir,


n'
256,
Vendredi 20 Mai 1932.

(3) Zrireban les deux mangeurs de kachich et le Jils du roi, co


ou

mdie en de Rasid Qsentn, reprsente l'Opra d'Alger, le


3 actes

Vendredi 15 Fvrier 1929. Cf. La Presse Libre, du Dimanche 10 et du n"

Mercredi 13 Fvrier 1929 ; La Dpche Algrienne, du Mercredi n*

20 Fvrier.
-
83

la vie sociale algroise et les ractions du peuple. L'art


dramatique des auteurs algrois semble ainsi devoir se

rattacher au naturalisme, mais ce naturalisme n'appa

rat que sporadiquement, car, pour un esprit oriental,


lout art implique une transposition constante ; il est une

recherche de la vrit idale, non une copie de la


ralit (i).
Ce principe, qui n'est pas propre aux auteurs algrois,

explique, mon sens, l'un de leurs procds les plus cou

rants qui, dans le genre comique, se rvle par l'emploi


de l'exagration, mieux de la dformation burlesque du
d'

Roman Antar par exemple ou des contes des Mille et


Une Nuits (2) et qui fait de la pice de Louis Verneuil Ma
Cousine de Varsovie: Mon Cousin de Stamboul et du film
Un Trou dans le Mur, une amusante et curieuse bouffon
nerie : Un Trou par terre (3).

Le public qui suit avec passion les reprsentations se

recrute surtout dans le peuple, journaliers et ouvriers,


dans la bourgeoisie, les lettrs volus et les tudianls des
coles modernes, car, pour ce qui est des tolba de l'ancien
temps et des 'Ulama enturbanns, ils montrent pour ce
thtre la mme aversion el la mme hostilit que jadis

II' de 15 Juillet
(1) Fr. Bonjean, dans la partie son tude {Europe,
n"
6,
1923, p. 211) note, cependant, le caractre naturaliste du drame de
Murd Effendi et regrette qu'il ne soit d'un bout l'autre " une

tranche de vie .

et le Gnie ou le Roman d'un Prince, comdie lyrique


(2) Le Pcheur
de MM. Dahmn et 'Allal, reprsente a lOpra, le
en quatre actes

Mercredi 16 Mai 1928. Cf. Attakadoum et La Presse Libre, du n"

Samedi 19 Fvrier 1928.


13) Les deux uvres ont pour auteur Rasd Qsentn. La premire

fut reprsente l'Opra, le Vendredi 20 Dcembre 1929. Cf. La Presse

Libre, du Dimanche 22 Dcembre 1929 ; la seconde, l'Alhambra, le


n

Mercredi 18 Fvrier 1931, Cf. les avis dans La Presse Libre, du Diman n"

che 15 Fvrier ; La Dpche Algrienne, du Mardi 17 Fvrier ; La n'

Presse Libre, du Mercredi 18 Fvrier ; les comptes rendus dans Le


n

Courrier Nord- Africain, du Vendredi 20 Fvrier et La Presse Libre,


n'

n"
du Samedi 21 Fvrier.
84

Pascal (i) et Bossuel (2). Ils produisent des griefs identi


ques : le thtre est contraire aux bonnes murs ; il

veille, quoi qu'on en aie, de mauvaises passions et, par

son amoralit, sape la socil musulmane sa base en lui


inoculant un virus mortel. Ces pieux dfenseurs de la
religion et de la morale ne laissent pas de foudroyer de
leurs anathmes les acteurs et, a fortiori, les actrices qui,
non contentes de paratre sans voiles et de rciter des
vers antislamiques -, ont l'impudeur d'taler la nudit

de leur gorge et de leurs mollets (3).


Les reprsentations sont donnes toute poque de

l'anne, mais, de prfrence, pendant le mois de Rama


dan. Il faut, en effet, tenir compte que les indignes n'ont

point l'habitude de sortir aprs dner et qu'ils prfrent


la rue, aux cafs et aux spectacles, la douceur du chez soi

et la quitude de la vie familiale. C'est pourquoi le th


tre ne les attire qu' l'poque du Ramadan pendant lequel
il est d'usage de passer la majeure partie de la nuit hors
du logis et de se rendre l o un dlassement est offert
l'esprit.
N'ayant pas de salle leur disposition, les auteurs sont

rduits faire jouer leurs uvres sur les scnes qu'ils

trouvent libres et russissent louer. D'ordinaire, ils pro

fitent des jours de relche, ou bien, ils attendent la fin de


la saison thtrale franaise, ce qui ne va pas sans alas
de toutes sortes pour le succs de leurs uvres.

Les pices, comme l'poque de Jodelle, sont joues


par leurs auteurs qu'entourent des amateurs. A l'heure
actuelle, l'exception de Rasid Qsentln, il n'existe pas

(1) B. Pascal, Penses. Ed. L. Brunschvig, section I, n*


II.
(2) Bossuet, Maximes et Rflexions sur la comdie, ch. IV.
(3) Cf. Al-Balg al-Gata'iri, n'

256, Vendredi 20 Mai 1932. Cette haine


du thtre et de son monde ne s'est pourtant manifeste qu' l'occa
sion du passage de comdiens gyptiens ; en temps ordinaire, les jour
naux arabes ne consacrent pas une ligne au thtre qu'ils mprisent
et recouvrent de silence et d'oubli.
-
85

encore d'acteurs rguliers. On comprend ds lors la raret

des reprsentations et que quatre reprsentations de suite,


comme cela s'est produit pour Djeha, constituent un v
nement remarquable el un succs extraordinaire. La plu

part des pices ne sonl joues qu'une fois Alger, quelle

que soit leur valeur, quel que soit l'accueil, el les huit soi

res du mois du Ramadan reprsentent huit crations.

La mise en scne est aussi exacte que le permettent les


lessources du thtre lou et les dcors ne trahissent pas

les indications de l'auteur et ses desseins. D'ailleurs leur


simplicit facilite amplement la tche du metteur en scne

et du dcorateur: intrieurs mauresques ou europens, d


serts, jardins, colonnades, rues sont articles courants dans
les thtres. Quant la figuralion, il n'est pas difficile de
recruter tel nombre de figurants que l'on dsire. Les cos

tumes comportent suffisamment de vrit. Le dtail rv

lerait, doute, averti, de lgers


anachronis-
sans un il

mes, mais on veille conserver au magrebin sa gallba,


au bagdadien son qaftn, au guerrier son casque ancien.

Peut-tre relverait-on des fautes plus graves dans le cos

tume fminin, mais le public se contente d'une exactitude

approximative.

Nous avons vu que les personnages fminins, cause

de la raret des comdiennes, sont peu nombreux : il n'y


a gnralement gure plus de deux rles de femmes dans
une pice. Au reste, le fait mme que l'lment fminin
est quasiment exclu du public ne laisse pas d'avoir une

influence sur la nature du thtre en y limitant le rle de


la femme, de sorte que le thtre semble tre un mono

pole masculin.

S. BEN CHENEB.
Mesures de Capacit

de la Tunisie Mdivale

La mtrologie des peuples musulmans, au


moyen-

ge, en dpit des quelques travaux qui lui ont t con

sacrs ID, nous apparat encore aujourd'hui comme si

complexe et si flottante, que l'apport de quelques donnes


claires et prcises sur un point particulier de ce vaste

sujet n'est sans doute pas entirement inutile.


Pour dterminer le systme et l'quivalence des
mesures de capacit (2) dans la Tunisie mdivale, on

dispose d'abord de deux textes bien connus : un passage

de l'Espagnol al-Bakri, valable sans doute pour le


XIe
sicle, mais plus certainement encore pour la fin
du Xe, comme le prouve sa concordance avec les rensei

gnements fournis par le gographe oriental al-Maqdisl

(= al-Muqaddasl), et, dans la premire moiti du


XIV"
sicle, un passage du Syro-Egyptien Ibn Fadlallab
al-'Umarl.

Voici le texte d'al-Bakrl : Le qafiz, Kairouan et

dans les provinces qui en dpendent, est de8waiba<3), la

(1) Cf. principalement Sauvaire, dans le J. Asiat., de 1879 1887;


Decourdemanuhe, Etude numismatique sur les Misqals
rntrologique et

et les Dirhems arabes, Reue Numismatique, 1908 ; du mme, Traite


pratique des poids et mesures des peuples anciens et des Arabes, Paris,

11)09, et divers articles de l'Enc. Islam.


(2) Il ne sera question ici que des mesures de capacit pour matires

sches. Les mesures de capacit pour liquides, dont la principale a

t le matar, feront l'objet d'une tude ailleurs.

(3) Pour plus de commodit, on laissera toujours au singulier, dans


la transcription franaise, les termes techniques arabes.
-
87 -

waiba de 4 tumna, et la tumna de 6 mudd, d'un mudd


plus fort que le mudd du Prophte, la diffrence en plus

tant de 12 mudd pour le qafz entier f1), en sorte que le


qafz kairouanais est de 204 mudd au mudd du Pro
phte l2'.
Et voici ce qu'crit Ibn Fadlallah : Les mesures de
capacit (de l'Ifrqiya) sont le qafiz et la safha ; le qafz

est de 16 waiba ; la waiba est de 12 mudd de Kairouan,


mudd qui est voisin de celui du Prophte ; elle est de 8
mudd la mesure hafside, qui est la mesure qu'ont tablie
les souverains hafsides, anctres du roi actuel I3'. La
safha est de 10 sahfa, et chaque sahfa est de 12 mudd
ht mesure hafside, qui vaut environ 1 1/2 mudd de celle

qu'on a indique plus haut (pour Kairouan) (*).

Il suit de l que, dans les premiers sicles du moyen-

ge, le qafz de Kairouan contenait 8x4x6 192 mudd =

kairouanais, ou 192 + 12 204 mudd du Prophte. Or le


=

mudd du Prophte semble bien avoir t valu en Ber


brie, par une longue tradition qui nous est prouve
XIV0
partir du sicle, mais qui affirme avec vraisem

blance remonter bien au del, 0 1. 733 I5). Si l'on tient

(1) C'est--dire que le qafz de Kairouan contient 12 mudd de plus,


si on le subdivise en mudd du Prophte, que si on le subdivise en

mudd de Kairouan.
(2) Bnkr, Description de V 4 frique septentrionale, d. de Slane, Alger,
1911, pp. 26-27 (j'ai modifi sensiblement la traduction, du mme,
Alger, 1913, p. 61). Al-Maqdisl, qui crit en 375/985, dit plus succinc
tement que le qafz de Kairouan est de 32 tumn, le tumn tant de
6 mudd au mudd du Prophte, BGA. t. III, p 240.
(3) Le texte imprim porte bien le singulier.

(4) IbnFadlallah, MasliU al-absd'-, d. partielle 'Abdalwijhhab,


Tunis, s. d., p. 4, traduction annote par Gaudefroy-Demombynes,
Paris, 1927, pp. 100-101.
(5) Cf. A. Bel, Note sur trois anciens eases de cuinre grac troues

Fs et semant mesurer l'aumne lgale du fitr, Bulletin archolo

gique du Comit, 1917, pp. 359-387, et Dessus Lainare, Note sur un


case en cuiere i/race, employ comme mesure-talon, Reue Aricaine,
l"-2<
trimestres 1929, pp. 162-195.
X*-XIe dans le
ce chiffre pour assur ds les sicles

et

cas contraire, il ne pourrait s'agir que d'une faible


variation
l'ancien qafz de Kairouan quivalait
0 1.733 x 204= 149 1. 532 ; il se subdivisait en 192 mudd

149 1 532
de
0 1. 779 chacun (exactement 0 L 7788).
1 74

Jusqu'ici rien que de trs net et de trs plausible. En


est-il de mme pour les donnes d'Ibn Fadlallah ? Remar
quons tout de suite qu'il ne parat pas liminer le vieux

systme de Kairouan : c'est lui qu'on retrouve, malgr

une division intermdiaire diffrente, dans le qafz valant

16 x 12 =
192 mudd kairouanais. Mais, ct de cette

survivance, notre auteur affirme l'existence d'une mesure

nouvelle, le mudd hafside, valant 1 1/2 mudd kairoua


nais ; et ce mudd hafside, 128e partie du qafz, aurait
son tour des multiples : 1 sahfa valant 12 mudd, et 10
sahfa formant une safha (sic).
Rien de surprenant, en principe, dans la juxtaposition
d'un systme plus rcent, propre aux Hafsides, labor
certainement Tunis, leur capitale, au vieux systme de

Kairouan, capitale des anciens souverains. Mais on ne

peut se dfendre d'un sentiment de suspicion devant le


terme de safha, peu vraisemblable f1) ici, alternant

par simple mtathse avec son sous-multiple, connu par

ailleurs, sahfa I2'. Il y a l un lment de doute grave,


qui autorise formuler des rserves, au moins provisoires,
sur l'ensemble mme des donnes voisines. Il nous faut
consulter de nouveaux textes, si nous dsirons mettre au

point les renseignements transmis par Ibn Fadlallah, en

fixer le degr d'exactitude, et les prciser

(1) Cf. Gaudefroy-Demombynes, loc. cit.


(2) Sur l'ancienne mtathse inverse, cf. Fraenkel, Die aramdisc/ien

Fremdwrler im Arabischen, Leyde, 1886, p 63.


89

Il est un genre de documents auquel les historiens


n'ont gure l'habitude de recourir, et qui est pourtant

susceptible de leur fournir de trs utiles indications :

les textes de nature juridique, commentaires de hadts,


traits de fiqh, recueils de falws. S'agissant de mesures,
de poids, de monnaies, le chapitre de la dme aumnire

fzakl) est toujours y consulter, car la ncessit de d


terminer le minimum imposable (nisb) oblige les auteurs

donner l'quivalence du systme local avec celui dit


du Prophte ou systme lgal (sar'l) .

Quelques recherches dans les uvres des juristes tuni


XIVe XVe
siens des et sicles permettent par exemple

d'clairer d'un jour nouveau la question qui nous occupe,


celle des mesures de capacit dans lTfrqiya des derniers
sicles du moyen-ge.

Ce sera d'abord Ibn Rsid al-Qafs, en 736/1336, con

temporain par consquent d'Ibn Fadlallah. Dans son

Kitb Lubb al-Lubb, dit Tunis W, il rappelle le


systme lgal des mesures de capacit, sur lequel d'ailleurs
sa'

tout le monde est d'accord 1 wasq de 60 sa', chaque


:

tant de 4 mudd du Prophte W (ce qui fait 240 mudd du


Prophte pour le wasq) ; il nonce, aprs d'autres, que le
minimum imposable pour les crales, certains lgumes
et les fruits est de 5 wasq, et il ajoute : Le wasq, la
mesure hafside, est un qafz

Un peu plus explicite, al-Ubbi, dont l'Ikml, crit en

dclare (3) :
Le
823/1420, a t imprim au Caire, ceci

et c'est l
wasq lgal est l'quivalent du qafz tunisien,
une des bonnes oeuvres dues aux Almohades, je veux dire

(1) Ed. Tunis, 1346 h., p. 37.


dsign une charge de bl pour cha
(2) Le wasq passe pour avoir

meau ; le mudd, une jointe (comme la hafna).

(3) Ed. du Caire, '1327 1328 h., t. 111,


p. 108.
-
90 -

qu'ils ont fait le qafz quivalent au wasq, pour faciliter


la dtermination du minimum imposable . Entendons
sans doute
nous y reviendrons tout l'heure
par

Almohades les Hafsides ; les deux textes, cent ans

d'intervalle, sont parfaitement concordants.

Mais il y a mieux : un passage du grand ouvrage indit


de l'imm Abu 1-Qsim al-Burzul (mort en 841/1438),
Jmi'
intitul mas'il al-ahkm mimm nazal min
bi'
al-qady l-mufliyin ivaH-hukkm, ou plus simple

ment Nawzil. En voici la teneur stricte, d'aprs les deux


manuscrits du premier tome des Nawzil, que conserve
la Bibliothque nationale d'Alger,
n

1333 (trs belle


XVe f
du 223 a, 1334, f 103
n

copie sicle), et a :

I
>jJ l
f.* ,J..3 ,~. J.JLHJ ,j.s i si ' -~~*2i. >l~ajL
,.j [i~s

yiuZ .si') __!,] *&*) v*^ 'iUai.9 j.JO'. Ax~, j*. j .-J ,LJo.iJb v^^Jjdl

IM! j.,va j^X*&> lll^s [*')


t'yis] (1) ^-"*. a. U*j; I.lJa^S

(2) jj taj -"-~ta 6W1 taa SJ-*J -ta-^i A.J.I .. ta >^,lc


))

JjiJ .talij
'.> itai. -^.J.''j
-AJj! tA.& U! JLlsJta ^aIjj JJs.

v a' jr* J* ^* -.3 tali ta*,i , UUi.

w^jjJi ^jj '^


^ui_, ^ isy .
-^.~2 ta_$J ,li.U. ta^

tT^' .-*0 a yS . -Nl zis _j*_3


-^-a-n^
io- ,ta^ j^ ^jr^l

Ajl-
^ >LoJI
.Jw
.^ai^ - , .jji

(1) Ms 1334 ajoute ici J^-w^l.

;2) Ms 1334 : J~ Jyi, au lien de


^
: , v*

(3) Les deux mss ont Oj_?^ s^ji corrig par une deuxime main en

Oj>^ <j* *^'r^


sul'
ms 1333.
-
91 -

^.r6 *^' >J-~*

*-x*^ ^~ y^r-JI
w^j_. A^ia. ta>
,,_y

tj

ta?.'-*"8
^
8>x* v_?J

^J {J^J^
>_>taaJI .>
Ais^o

J.i
p^-ys Ita
JjIx AJ
ijXj ^.Jl ^Jlc .jJL .il
j y ytjl ,-!j

Le nisb est 5 wasq, (le wasq) quivaut


et celui-ci

actuellement au qafz tunisien ; il quivaut (le


nisb) en
raisin frais, (pes) au qintr de Tunis, 36 qintr de
raisin frais, qui reviennent 12 qintr de raisin sec, ce

qui fait 5 qafz. Le wasq est de 60


sa'

(calcul) au
sa'

du
Prophte, lequel est de 4 mudd (calcul) au mudd du
Prophte ; celui-ci correspond en poids 1 1/3 ritl, le
ritl est de 12 uqiyya I1), et l'uqiyya de 10 2/3 dirham,
d'aprs la tradition qu'al-'Azaf tenait d'Ibn Ab Zaid,
savoir que le ritl quivaut 128 dirham ; si donc on le
divise (le ritl) en 12 uqiyya, l'uqiyya ressort 10 2/3
(dirham), en sorte que cette uqiyya diffre en poids de
l'uqiyya de la Le du Prophte quivaut 2
sa'

zakt.

hafsides, font 3 kairouanais Tunis


sa'

mudd qui aujour

d'hui. Donc le nisb lgal est 600 mudd hafsides, le qafz

hafside tant de 120 mudd hafsides, ce qui fait le double


(comme nombre) des 60 (calculs) au mudd du Pro
sa'

phte ; il (le qafz) est encore de 10 sahfa, el la sahfa de

12 mudd hafsides, en sorte qu'un ensemble de 50 sahfa

constitue le minimum imposable Tunis. Toutes autres

mesures'de capacit des diverses contres du Magrib et de


l'Ifrqiya s'valuent d'aprs ce systme et s'y ramnent ;

(1) Rijl peut se traduire par livre ; uqiyya, par once >.
92

de mme, les mesures de capacit de tout pays s'valuent

conformment ce que nous venons de rappeler .

Laissons de ct les quivalences donnes avec des


poids M, pour ne retenir que ce qui est mesures de capa

cit. Pour al-Burzul, dont le tmoignage en la matire

est de premier ordre

il a exerc d'importantes fonctions


religieuses Kairouan et Tunis

le qafz tunisien est

bien, comme il nous a dj t affirm, identique au

wasq lgal ; c'est lui, et non l'trange safha d'Ibn


Fadlallah, qui se subdivise en 10 sahfa, de 12 mudd

hafsides chacune, soit 120 mudd hafsides en tout. Le


hafside la du du
sa'

mudd est moiti Prophte, et par

consquent le double du mudd du Prophte.


En quivalence avec nos mesures actuelles, nous

poserons donc, pour les mesures de capacit hafsides :

I mudd =
0 1. 733 x 2 =
1 L 466.
1 sahfa =
1 1. 466 x 12= 17 1. 592.
I qafz =17 1. 592 x 10 =
175 1. 92 *.
Tel tait le systme officiel hafside, usit Tunis
depuis le dbut XIV8
au moins du sicle, probablement

mme depuis le sicle prcdent.

(1) Ces donnes seront reprises dans un autre travail.


(2) Cette valeur du qafz hafside s'accorde, suffisamment, avec
une quivalence donne lui
des mesures chrtiennes du
entre et

moyen ge : d'aprs Pegolotti (La pratica dlia Mercatura, Lisbonne


et Lucques, 1766, pp. 124 et 166), le qafz de Tunis, dans la premire
XIV'
moiti du sicle, quivalait la salma de Manfredonia
IPouille) ou celle de Sicile ; cette dernire correspondait 164 1. i,
l'autre semble avoir t un peu plus faible ; il n'y a donc la qu'une

parit approximative. En 1392, le qafz de Tunis valait, parait-il, trois


n staria de Venise, cf. Mas-Latrie, Traits de paix et de commerce...
Paris, 1866, 243 ; il faudrait voir ce qu'tait le stario ou staio
p.

vnitien de ce temps. Enfin, je ne puis rien tirer de clair des quiva

lences donnes par Di Pasi (Tariffa de i pesi, etc., Venise, 1540,


f"
2i 27) pour le dbut du XVI' sicle ; il semble admettre pour
Tunis un qafz de plus de 18 waiba (?) ; son texte, au surplus, est
trs mal imprim.
-

93 -

Ibn Fadlallah attribue en effet la cration du mudd

hafside aux anctres du sultan qui rgnait son poque,


Abu Yahy Abu Bakr (1318-46), c'esl--dire, selon loute
XIIIe
vraisemblance, l'un des Hafsides du sicle. Qu'al-

Ubb ait dsign les Hafsides par l'appellation d'Almo-

hades, c'tait alors un usage courant, et Ibn Haldn s'y


est bien des fois conform. Si la rforme et remont aux

Almohades proprement dits, les mesures de capacit

qu'on nous signale porteraient difficilement l'pithte de


hafsides . Mais, surtout, si la dcision avait t prise

par les Almohades eux-mmes, le Maroc en aurait bn


fici de bonne heure, et il n'aurait pas d attendre jus
XIIIe
qu' la fin du sicle, pour Marnide,
qu'un Abu
Ya'qb Ysuf, se dcidt, en 693/1294, changer les
mesures de son pays et les faire concorder avec le mudd

du Prophte I1*.
Dans les deux cas, chez les Marnides et chez les

Hafsides, le motif pieux est avr : au Maroc, il s'agissait

de conjurer une disette inquitante, et le soin d'appliquer

la rforme fut confi un personnage religieux connu, le


faqih Abu Fris al-Malzz (2> ; en Ifrqiya, on a voulu

faciliter la dtermination du minimum imposable pour

le versement de la dme aumnire, qui est une des obli

gations religieuses essentielles du musulman.

Nous ignorons lequel des deux pays a prcd l'autre


dans cette mme voie. Toujours est-il que le Maroc est

all plus loin que la Tunisie : il a adopt alors un sys

tme de mesures de capacit entirement identique au

Zar', Raud al-Qirts, d. lilh. Fs, tr. Beaumier,


(I) Cf. Ibn Abi

Paris, 1860, pp. 258 543. Ce passage est cit par A. Bel, op. cit., p. 361,
n. 2
dans Annales de l'Institut d'Etudes
(2) Sur lui, cf. Lvi-Provenal,
orientales d'Alger, t. I. pp. 189-192.
94

systme lgal
; seul, le terme de sahfa s'y trouvait
remplacer celui de wasq, pour dsigner au reste une

mesure strictement quivalente W.

Aprs l'adoption du systme hafside, qu est devenu,


en Ifrqiya, le vieux systme kairouanais ? Tout porte

croire, conformment aux donnes d'Ibn Fadlallah, qu'il

a continu vivre, qu'il a coexist avec son rival officiel

et plus rcent, cantonn sans doute Tunis l2>. Mais il


avait subi au moins une modification dans les mesures

intermdiaires : de la waiba et du tumn d'al-Bakr, seule

subsistait la waiba, devenue la 16 partie du qafz et

gale 12 mudd.

C'est l, au reste, le systme que l'on retrouve dans les


temps modernes, avec la simple substitution du terme
sa'

celui de mudd l3>. Cette substitution elle-mme est

ancienne, puisque l'indication d'al-Burzuli relative au

sa'

de Kairouan (il en faut 3 pour faire 2 mudd hafsides)


recouvre exactement ce que dit Ibn Fadlallah du mudd

kairouanais (le mudd hafside =


1 1/2 mudd kairouanais),
et permet de poser l'identit, pour Kairouan, entre mudd

; le terme supplant, dans


sa' sa'

et a ce systme, celui

XIV8
de mudd, vraisemblablement au cours du sicle, et
pour viter une confusion avec le mudd hafside officiel (*).

(1) Cf. Gaudefroy-Dernombynes, op. cit., p. 101, n. 1, et pp. 173-174,


avec les notes.

(2) Le dpartement actuel de Constantine, ainsi que la Tripolitaine,


tout en faisant partiehabituellement de l'Etat hafside, ont gard, aux
XV'
XIV et sicles, leurs systmes propres de mesures.

(3) Cf. notamment Frank, Tunis, dans l'Univers pittoresque, t. VII,


Paris, 1850, p. 88; Filippi, ap. Monchicourt, Relations indites, Paris,
1929, p. 157; Fleury, Poids et mesures tunisiens, Reue Tunisienne,
1895, pp. 235-245.
(4) Sur l'aire d'emploi du terme mudd dans la Berbrie actuelle,
cf. W. Marais, Textes arabes de 'langer, Paris, 1911, p. 464, avec

rfrences.
-
95 -

Dduisons de l'galit 1 1/2 mudd kairouanais =


1
mudd hafside, l'quivalence en mesure actuelle du mudd

1 L 466
kairouanais : =0 1. 977.

On voit que nous sommes assez loin de la valeur du


mudd du Prophte, qu'Ibn Fadlallah, peut-tre sous

l'influence de la lecture d'al-Bakr, dclarait lui tre voi


sin. Si nous n'avions eu que cet auteur notre disposi

tion, nous aurions t amens penser que le mudd kai


XIVe
rouanais du sicle tait identique celui du XI9, et

nous aurions faussement valu, par rpercussion, le mudd

hafside, que les donnes des juristes tunisiens nous ont

permis de dterminer avec prcision.

Il s'avre donc que le systme kairouanais, immuable


dans le rapport tabli entre sa plus petite et sa plus grande

XIVe
mesure 1/192, nvait pris, ds le sicle, des valeurs
plus fortes que jadis pour ces deux mesures: qafz et mudd

(ou sa'). Le motif de cet accroissement pourrait bien tre


le besoin que l'on aurait prouv d'ajuster approxima

tivement ce systme aux valeurs du systme hafside,


d'tablir tout au moins entre elles et lui des rapports

commodes pour le calcul. Quoi qu'il en soit, le systme

kairouanais devait se prsenter alors de la sorte :

1 mudd (ou sa') =0 1. 977.


1 waiba =0 1. 977 x 12 = 111. 724.
1 qafz = U l. 724 x 16= 187 I. 584.

Le'qafz kairouanais, un peu plus fort que le qafz haf

side, contenait 128 mudd hafsides, au lieu de 120. C'est


ce qafz kairouanais dont traitait Ibn Fadlallah sous le
nom de qafz tout court ; c'est le qafz hafside qu'il appe

lait tort safha.


96

On se demandera, enfin, quel a t le destin de la rfor

me hafside des mesures de capacit. Il semble, d'aprs ce

qui prcde, qu'elle ne s'est gure jamais tendue en de


hors de Tunis, la capitale, peut-tre, l mme,
n'avait-
et
XVe
elle pas triomph : les textes narratifs du sicle,
aussi bien tunisois que kairouanais, ignorent la sahfa, et

de qafz, de de Il
sa'

ne parlent que waiba et est assur,


XIX*
d'autre part, quelle n'a pas survcu jusqu'au sicle.

Tandis que le Maroc officiel conservait intgralement le


systme lgal introduit par les Marinides, la Tunisie
moderne s'est affranchie du systme semi-lgal que les
Hafsides avaient tent d'y implanter. Au sicle dernier, le
qafz tunisien, comme le qafz kairouanais de la fin du

moyen-ge, comprenait 16 waiba de 12 sa'. Mais sa valeur

avait considrablement augment ; elle tait de 528 L,


la 35 1. le 2 1. 75 I1).
sa'

mettant ainsi waiba et

Une nouvelle rforme tait donc intervenue : d'autres


recherches seront ncessaires, si l'on veut essayer de la
dater et de l'expliquer (2).

Robert BRUNSCHVIG.

(1) Pour ces quivalences, cf. Fleury, op. cit.

(2) Il est probable qu'on a encore voulu se rapprocher d'un type


considr comme lgal, partir par exemple d'un sa'
du Prophte a
2 1. 75 A. Bel, op. oit , en a publi prcisment un (marnide) de
cette contenance. D'autre part
est-ce une simple concidence?
le
qafz de 528 1. se trouve tre exactement le triple du qafz hafside, que

nous avons fix 175 1. 92.

Nota.
On pourrait concevoir, la rigueur, que le terme de sa,
(au pluriel : awu'). chez al-Burzul, n'aurait eu que le sens large de
mesure de capacit , ce qui supprimerait l'identit ancienne entre
sa'

et mudd de Kairouan. La rforme postrieure aurait alors consist

a substituer au mudd de
comme base du systme, un
Kairouan,
sa'

de 2 1. 75, considr Prophte , et a lui superposer les


comme du
mmes multiples, dans les mmes rapports, qu'a l'ancien mudd ainsi
limin.
La Politique Franaise

et le Maghreb Mditerranen

(1643-1685)
(Suite et fin) (1)

III.

Le Choix du Roi

Entre Saint Vincent de Paul et Colbert, la France a

choisi. Non que les deux hommes aient exerc leur action

en mme temps ; mais les tendances politiques de Saint


Vincent lui ont survcu, et la fortune de Colbert impli
quait si peu l'abandon de la guerre sainte que la croisade

fut reprise en 1669. Ainsi le choix du roi n'a pas t fait


une fois pour toutes : la France eut sans cesse se pro

noncer, sinon sur le principe, du moins sur les appli

cations. Dans ces hsilations, il se peut que Louis XIV


ait t pour quelque chose : trs raliste, sans scrupule,
se souciant peu de gaspiller ses forces dans des entre

prises o il n'apercevait aucun profit, il tait foncire


ment hostile la croisade ; avec cela, tenant son titre

de roi T. C, immensment orgueilleux, et ne souffrant

pas que des principicules tinssent en chec ses glorieuses

armes. De l des dcisions contradictoires, une entente

avec les pirates supporte de mauvaise grce, des exp-

2e 4 trimestres 1934.
(1) Voir la Revue Africaine, 1er, et
-
98

ditions arrtes avanl qu'elles aient produit leur plein

effet.

Toutefois, le secret de ces fluctuations se trouve moins


dans la personne du roi ou dans les influences successives

qui se sont exerces sur lui,- que dans les conditions g

nrales de la politique europenne cette poque ; et

c'est prcisment parce que la France n'a pas toujours


eu les mains libres qu'il y a de 1645 1683 deux grandes

priodes : l'une pendant laquelle le gouvernement, fai


ble et impuissant, a laiss des particuliers dcider de
nos rapports avec les Barbaresques selon leurs principes

ou selon leurs intrts ; une autre o le gouvernement,


fort et pendant quelque temps dbarrass de tout souci

de guerre trangre, a contenu les initiatives prives et

dcid, seul, de notre politique.

i. Initiatives prives

A) L'anarchie administrative.

Lorsque Mazarin
arriva au pouvoir, nous tions en paix avec les Algriens
depuis deux ans. A Tunis, l'amiti et bonne corres

pondance subsistait toujours en thorie. En fait nos

rapports s'taient borns des changes d'esclaves, ce


qui montre assez que ni l'une ni l'autre des parties

n'observait les traits. Les Tripolitains, encore paisibles

et soumis aux pachas turcs, ne nous avaient pas gns.

La situation n'avait en somme rien d'inquitant, et l'on


pouvait esprer, en entretenant les escadres cres par

Bichelieu, rendre ceux de Barbarie respectueux et

leur faire craindre notre puissance (i), selon les pro

pres paroles du Cardinal mourant. Mazarin n'a ni

mpris ni nglig la marine. Il n'a pas oubli non

plus la Barbarie. Ds le 25 septembre 1643, il demande


au comte d'Alais, gouverneur de Provence, un mmoire

(1) Correspondance de Sourdis, I, VII.


-
99 -

i"

sur les moyens de dlivrer les esclaves el, le fvrier


1647, il promet de rprimer les pirateries.

Malgr lout c'est bien peu que deux mentions seule

ment dans sa correspondace de 1648 1659. Encore si

ces promesses avaient t suivies d'un commencement

d'excution. Mais au mme alors que les Bar-


moment,
baresques multipliaient leurs courses, dbarquant en

Provence, bloquant le port de Marseille, demeure aux


les d'Myres, le ministre laissait quelques capitaines
isols, corsaires d'ailleurs plutt qu'officiers de la ma-

line royale, dfendre nos marchands et sauver les ports

d'une insulte, sans se proccuper de mettre fin, une fois


pour toutes, ces brigandages.
Pouvait-il faire mieux ? 11 faut payer l'arme des
Flandres, il faut payer l'arme d'Alsace, il faut payer

les mercenaires sudois ; le Trsor est vide. La guerre

trane et les gnraux ne peuvent pousser fond leurs


succs, faute d'argent. Il ne reste peu prs rien pour

le budget de la marine, et nos vieux vaisseaux pourris

sent au port. Rien ne donne une ide plus exacte et plus

triste de la lamentable anarchie qui rgnait alors sur

la cte de Provence que la correspondance de l'inten


dant d'Infreville avec Brienne (1), secrtaire d'Etat
charg de la marine du Levant, celui-ci trafiquant des

consulats avec les marchands de Marseille, celui-l

vieilli sous le harnais, aigri par les cabales et par l'incu


rie du ministre. Les ordres n arrivent pas ; on attend

l'argent des mois entiers, et pour lever des quipages,


l'intendant doit engager son propre bien : Je vous

supplie de vouloir nous envoyer de l'argent , tel est le


refrain de ses lettres. Sa famille est dans la misre. Ail
leurs il ajoute avec une simplicit mouvante : Je me

vois vieillir et devenir pauvre aprs 25 ans de service .

Les arsenaux manquent d'agrs, et l'on attend les cor-

B3
(1) A.M. 4.
-
100 -

dages el le goudron de Hollande pour appareiller. La


province entire crie famine (oct. 1647) prsent que

le Bastion ne peut fournir du bl .

Ainsi il serait vain de chercher dans les trs rares

ordres que nous avons de la main de Mazarin avant i65g,


la trace d'une tendance politique quelconque. Une poli

tique suppose un effort continu pour raliser un pro

gramme, une application de l'esprit certains sujets,


ou tout simplement si l'on veut, une vue des vnements
un peu systmatise : encore faut-il que ceux-ci aient
paru dignes d'attention. A lire la correspondance de
bien lui la barba-
Mazarin, on voit que pour piraterie

resque n'existe pas.

Mais, de ce qu'il n'y a pas eu de politique officielle,


ii ne s'ensuit pas que tous les Franais se soient dsin
tresss des affaires de Barbarie. Ils ont essay de
s'accommoder aux circonstances, et nous avons chance

de rencontrer, au milieu de mesures confuses et contra

dictoires, des actes significatifs qui nous rvlent des


aspirations profondes ou des besoins essentiels. Pour
les satisfaire, quelques institutions naissent alors qu'il

faut tudier dans leur jeunesse et dans leur spontanit,


avant qu'un gouvernement fort, soucieux de les unifier

et de les contrler, ait supprim quelques-unes d'entre

elles, et altr, chez les autres, le caractre original.

R) La politique des Marseillais.

Abandonns eux-

mmes, les Marseillais ont tent de s'entendre avec les


Barbaresques pour le rtablissement du commerce ; on

assiste de curieuses entreprises qui, pour suppler


hi carence du pouvoir central, cherchent s'appuyer

sur les organisations municipales des paroisses ou de


Marseille. La Fronde n'tait pas une rvolte de la foda
lit, mais elle a failli amener une dcentralisation, un

morcellement analogues ceux qui avaient prpar l'ta


blissement du rgime fodal. Pour parer au plus prs-

101 -

sant, il fallait dfendre la Provence contre les descentes


de pirates et les rafles d'esclaves, si fructueuses, qu'en

1660 il y avait prs de 1:2.000 Franais dans les bagnes


de Tunis. Le plus sr et t de tenir la mer la flotte
des galres, mais celles-ci appartenaient des capitaines

qui ngligeaient d'exercer leur chiourme. Pour aug


menter le commerce et nettoyer la mer des corsaires ,
un mmoire de 16/18 propose de remettre des parti

culiers l'conomie gnrale des galres ; ceux-ci, des


Marseillais sans doute, auraient rembours les capitaines,
arm jusqu' 3o galres et entretenu un rgiment

d'hommes choisis, connus et aguerris, prt servir en

tous temps et capables de faire des descentes terre .

Programme ambitieux, qui ne visait rien moins qu'

crer ct des services de l'Etat une organisation auto

nome, associe au commerce de Marseille, et par l,


intresse sa prosprit.En effet, ils demandaient le
gouvernement du Bastion de France et le monopole des
mines de l'le d'Elbe. Mazarin jugca-t-il ces propositions

exagres ? En tous cas, l'affaire n'eut pas de suite.

Alors les Marseillais essayrent de s'entendre entre

eux. Le i3 fvrier 1657, un sieur de Nachaise proposait

aux Consuls et aux Dputs de la Chambre de Commerce


de faire un armement considrable pour extirper et

dtruire tous les Corsaires de la Barbarie de faon que

les vaisseaux marseillais puissent aller et revenir en tous


endroits sur mer (1). Il ne demandait point, comme

les auteurs du mmoire prcdenl, des privilges com

merciaux, mais seulement le produit d'un droit de 5 %

lev sur toutes les marchandises. La proposition fut mise

en dlibration ; on discuta pendant deux ans sans arri

ver s'entendre. La ville en fut rduite payer des


capitaines anglais et hollandais pour assurer la libre
entre du port. De mme, sur toute la cte de Provence,

(1) A. Ch. C. M.
BB. 1/270, 316, 527, 528.
-
102

des confrries se forment pour la rdemption des escla

ves (i) ; vritables socits de secours mutuel o chaque

paroisse s'engage racheter ses habitants. Enfin, le


commerce n'est pas nglig. Sans doute, celui du Levant
reste languissant parce que les Echelles sont encore cra
ses sous le poids des dettes. Mais en Barbarie mme,
les Marseillais s'intressent au Bastion et le comptoir

passe de mains en mains la suite de ngociations

obscures auxquelles le roi est toujours tranger. En i658

seulement il se proccupe de faire valoir ses droits sou

verains sur l'tablissement. C'est que le duc de Guise


s'en est rendu matre, et il est dangereux de laisser se

reconstituer ainsi des fiefs d'outre-mer.


Si nous faisons le bilan de cette activit brouillonne,
nous sommes tonns de la mdiocrit des rsultats. En
1660, la cte tait plus que jamais expose aux insultes
des corsaires ; les esclaves ne sortaient point des bagnes
barbaresques, el le commerce du Bastion si florissant au

temps de Sanson Napollon, n'tait plus qu'un brillant


mirage dont quelques aventuriers flattaient les favoris
de la cour pour se mnager leur appui. Ces tentatives
auraient-elles mrit un meilleur sort ? Nous n'oserions

l'affirmer ; Marseille n'avait jamais eu une politique,


mais un systme de petites concessions et de continuelles

dolances. Les mmes qui traiteront un jour l'amiable


avec les Tunisiens se plaindront quelques mois plus tard
du pillage d'une de leurs barques et demanderont justice
la cour. Or, il tait bien difficile de leur donner satis

faction, puisqu'ils ne voulaient aucun prix mconten

ter le Grand Seigneur. Dsordre et ngligence, voil

Marseille cette poque. Sa fameuse Chambre de Com


merce n'tait gure soucieuse des intrts qu'elle avait

la charge de dfendre. La proposition de M. de Nachaisc,

fl) A. F,., Afrique. ?. Rapport d'Arnonl Colhprt. Cf.



Deslan-

dres, L'ordre franais des Trinilaires, I, 347.



103 -

dpose sur le bureau le fvrier i655, n'est pas encore


i3

examine le i avril. A cette date on convoque tous les


ngociants, inutilement d'ailleurs, puisque l'on doit
rimprimer le projet en aot i656. Enfin, l'affaire vient

en dlibration le ta septembre i656 ; prs de 19 mois

avaient t ncessaires pour qu'on arrivt, non pas

mme s'entendre, discuter. Le mal profond qui

s'opposait toute entreprise suivie el qui faisait passer

la politique marseillaise par des alternatives de com

plaisance envers les Barbaresques et d'excessives repr

sailles, c'est la lutte des factions au sein de la cit (ita


Les vieilles rancunes de la ligue reparaissent au premier

tumulte. L'meute est continuelle ; les officiers du roi

sont bafous ; la Fronde prend Marseille l'allure d'une


rvolution. Des gens qui avaient combattu sur la place,

fait le guet aux remparts ou dans les tours de garde,


pouvaient-ils aller s'asseoir ct de leurs ennemis et

discuter les intrts du commerce paisiblement ? Vide


par la peste, ruine par la guerre civile, toujours fi
vreuse el bruyante, Marseille avait quand mme essay

d'assurer ce rle que le roi ngligeait de tenir, d'assurer


le commerce et de rgler nos diffrends avec les Barba

resques ; mais sa politique avait fait faillite.

C) L'uvre des Consuls Lazaristes.


Entre les Mar
seillais et les Lazaristes agissant les uns ct des
autres en Barbarie rgna, au dbut, une parfaite intel
ligence. Saint Vincent de Paul, donnait raison nux

Marseillais contre Jean Le Vacher (2), il flicitait les


consults de leur sollicitude pour remdier aux pirate

ries des Algriens (31 ; une fois, il recommande ses

missionnaires de servir en ce qu'ils pourront un


mar-

Revue des Deux-Mondes, 1908, t. TV, p. 835


(1) Cf. Bebelliau,
Pt sqq.

(2) A. Portail, 22 janvier 1649.

(3) A Get, 29 juin 1657.


104

chand de Tunis (i). De leur ct, les Marseillais font


appel au concours des missionnaires : ils leur confient
leurs biens (2), ct ils pressent le Consul mourant de
nommer un Lazariste la place de l'un d'entre eux.

Peut-tre cette bonne entente tait-elle due surtout aux

qualits personnelles de Saint Vincent ; il eut assez

d'adresse pour persuader aux marchands qu'il se rui

nait pour eux ; en tous cas, les heureux rsultats de


son activit devaient lui mnager tous les concours.

L'uvre religieuse et charitable des Lazaristes servit

sans aucun doute leur influence politique. De plus, ils


montrrent des talents singuliers pour la diplomatie. On
XVIIe
constate en gnral au sicle que ceux des chr

tiens avec lesquels les Turcs s'entendent le mieux, ce

sont les prtres, soit respect pour leur caractre sacr,


soit admiration pour leurs incessantes charits. Le fait
se vrifie Alger comme Tunis. En gnral, nos mis

sionnaires vcurent dans les meilleurs termes avec les


pachas ou mme avec les populations. Cette affirmation

a de quoi surprendre d'autant plus que l'un d'eux mou

rut la bouche d'un canon et que plusieurs subirent

des avanies. Laissons de ct ces avanies qui presque

toutes furent provoques de Barreau,


par la maladresse

et tchons d'chapper l'impression d'horreur que lais


sent les histoires difiantes. On a pu dire que Le Vacher
tait l'ami

l'homme de confiance serait plus exact

du Dey de Tunis ; celui-ci l'avertit de l'arrive d'un


navire charg de marchandises prohibes pour lui per
mettre de le renvoyer en France. Six bateliers italiens
prposs la garde d'une barque franaise ayant t
enlevs par les Algriens, il indique Le Vacher l'en
droit o ils se trouvent. Un mmoire anonvme adress

(1) [Dossier de la Mission]. \. G. Le Vacher, 18 octobre 1658,


(2) A. Cli. Com. M. (AA, 461).

Lettre Ph. Le Vacher n la Cham


bre, 23 septembre 1659.
105

Colbert, en 1670 (1), manant sans doute d'un mar

chand, demande le retour de Jean Le Vacher au consulat

de Tunis : car il est si estim dans ce royaume que

l'on ne pourrait rien lui refuser . Consul Alger,


Le Vacher jouit d'une faveur aussi grande. Comparons
ce personnage tous les laques qui la mme poque
ont reprsent la France en Barbarie : ce Dumolin pr

tentieux et grotesque, qui l'ait son entre Tunis dans


une chaise porteurs et s'enfuit la drobe deini-

mort de peur parce qu'on n'a pas voulu lui rendre les
esclaves ; ce chevalier d'Arvieu\, qui n'a d'esprit que

pour nous raconter ses mrites et dont les airs de Mata


more sonl la rise de ses ennemis ; tous gentilshommes
qui s'en vont, dpits de voir les Barbaresques obstin

ment rebelles aux ordres du roi, courtisans nafs, mais

conseillers dangereux, qui poussent la guerre pour sc

venger de leur insuccs.


On a pourtant accus Le Vacher de ngligence dans
l'exercice des fonctions consulaires : Hayet, commissaire

royal envoy en mission Alger en 1681, se plaint dans


un rapport adress Colbert de n'avoir pas trouv le
registre des esclaves jour ; et aprs lui avoir fait des
eproches en prsence des dputs du Commerce et du
Truchement, vu que sa qualit de consul l'obligeait
en avoir une entire connaissance, je pris les noms des
dits esclaves (2).. La chose n'aurait rien d'impossible
puisque Le Vacher, infirme et puis, demandait son

rappel depuis 3 ans ; mais le mme Hayet, quelques

lignes plus loin, reconnat qu'il tait fort difficile d'avoir


un rle assez fidle et ample . Et comme il est cou

tumier de semblables contradictions (3), on voit le cas

qu'on peut faire de son tmoignage.

(1) A.E., Alger, 12.


(2) A.E. Alger, 1664-1668, 3 juin 1681.

(3) Ibid. Bans sa lettre du 27 fvrier 1681, Hayet loue Le Va


cher pour son zle et pour son obissance. Le 3 juin 1681, il



106

La France, pas plus que Hayet, n'a rendu hommage


Jean Le Vacher. Pourtant sa grande figure domine
cette histoire, et dans le cadre de la Barbarie, ct
de Saint Vincent de Paul et de Colbert, il ne parat pas
dplac. 11 tait parti pour Tunis vingt-huit ans, avec

F inexprience d'un jeune prtre rest quatre ans novice,


maladif d'ailleurs, mais victorieux de sa faible nature,
brlant de rpandre sa foi el de sauver des mes. Et
voici qu' soixante-trois ans, nous le retrouvons Alger,
toujours prt confesser son Dieu, attentif patre le
troupeau dont le salut pouvait dpendre de son zle et

de ses soins. Les grandes ambitions dues l'auraient pu

dgoter de son uvre : l'Islam restait ferm au Christ;


personne dans le conseil, n'avait suivi son apostolat, el

Colbert lui avait fait maintes fois sentir qui si la pit

suffit un missionnaire, le roi demandait autre chose

d'un consul ; disgrce suprme, chass de Tunis par un


consul avide et menteur, il avait vu les mes abandon
nes, l'Eglise dans le dsordre. A la fin, dans les preu
ves mmes, il avait trouv une douceur ; il ddaignait
la voie royale , pour s'attacher une difficile charit:

Si d'un ct je voyais le chemin du ciel ouvert, avec

la permission d'y aller, et celui d'Alger, je prendrais

plutt ce dernier (i).


Mais dans sa villa d'Alger, qui domine la nier, voyez-

le : ce n'est plus seulement l'Eglise d'Afrique qu'il di


rige, c'est la nation franaise. La villa est luxueuse, et

sa magnificence (ta) fait clater le prestige du roi ; dans


le banquet du consulat qu'il offre chaque anne, il veut

taler notre fastueuse puissance. Il parle dans le Divan,

dplore l'tat du divin en Barbarie. La Chambre de Com


culte
merce, qui de prs les faits et gestes du consul, an
surveillait
moment mme de l'ouverture des hostilits, lui fait confiance
(Lettre Buquesne, 3 juillet 1682 [BB 26 1479]).
(1) Gleizes, op. cit., 140.
(2) Saint Vincent de Paul, Lettres. IV, p. 311.

107 -

et sa voix tranquille couvre le tumulte des janissaires.


Par la seule force de son crdit, il retarde deux ans notre

rupture avec Alger.


Maintenant, on veut en faire un saint. Laissons
d'autres le soin de juger sa cause. Pour nous, la saintet

de sa vie tait une arme de plus au service de sa

diplomatie.
Mais comme il n'avait pas d'aptitudes pour le com

merce, Colbert lui refusa tout crdit. De nos jours il


est vrai, on a essay de le dfendre. Les consuls laza
ristes furent, dit-on, les dfenseurs les plus dsintresss
des marchands, toujours prts rclamer contre une

prise injuste, et, bien mieux, obtenant souvent gain de


cause. A cet gard, les termes qu'emploie dans sa corres

pondance la Chambre de Commerce de Marseille sonl

frappants (i) : Nous dfrons beaucoup tout ce qui


vient de votre part ; nous avons mille remerciements

vous faire au nom du commerce pour l'application


infatigable que vous donnez ce qui dpend de votre

emploi ; nous avons tch de rpondre vos soins

pour le bien du commerce , et l'on peut ngliger toutes


les lettres o Saint Vincent de Paul flicite un consul de
son zle, o celui-ci annonce une dmarche pour obte

nir justice d'une nouvelle prise.

Ecartons galement une autre accusation, celle d'avoir


gn le commerce en surveillant trop strictement les
importations de marchandises prohibes. L aussi les
Lazaristes durent se plier aux circonstances. Tant qu'ils

ont t soutenus par le roi, ils ont fait observer exacte

ment la Bulle in cnam domini et les ordonnances

royales. Quand ils comprirent qu'il n'tait plus l'heure


de se poser en champions de la chrtient, ils se turent.

Le prtre jugeait ce commerce infme , le consul ne

pouvait s'y opposer ouvertement. Il est possible qu'ils

(1) A. Ch. Com. M.

BB, 26, en 1680.



108

aient, par des moyens dtourns, entrav ce trafic. La


preuve en reste faire. Aussi bien, en l'absence d'ins
tructions officielles, les anciennes ordonnances du code

Michaut restaient en vigueur. C'tait le ministre, non

l'agent qui juridiquement avait tort : consquence fa


tale de notre duplicit.
D'ailleurs Colbert et les Marseillais se plaignirent seu

lement de ne pas avoir retrouv parmi les Lazaristes un

consul entendu au commerce (i). Dans ces conditions,


si le renvoi des consuls lazaristes tait parfaitement

logique, le maintien du Consulat comme une charge,


e! comme une charge incompatible avec le ngoce, ne

l'tait gure : il nous faudrait, dit Beaufort, en i665,


un habile homme qui et quelque argent distribuer .

C'tait beaucoup de navet que de demander un homme


prt se ruiner. Il fallait choisir entre un marchand

entendu et un lazariste dsintress. Avec eux au moins

on pouvait tre sr que l'intrt gnral ne serait pas

s&crifi des intrts particuliers. Barreau s'tant avis

un jour de faire le commerce des perles, Saint Vincent


le lui reprocha vivement, et il lui donna ordre d'inter

rompre tout trafic. Dubourdieu, fidle la pense du


matre, dira plus tard, en parlant des agents du Bastion :

je n'aurai rien dmler avec eux, leurs affaires

tant d'une autre nature que les miennes ; je m'loi

gnerai toujours de m'embarrasser en aucun de leurs


ngoces (>). C'est prcisment cette situation que Col
bert ne pouvait pas tolrer ; il entendait que les com

merants, et surtout les agents du Bastion, trouvassent


dans le Consul un alli, non un indiffrent. Un homme

(1) Beaufort Colbert, mars 1665 : Il faudrait y avoir un


habile consul qui et quelque argent distribuer... > [B4 2 f 453]
l"-
<\. M.). Beaufort <"i Colbert,

dcembre 1665 : Le poste d>


Tunis aura, besoin pour le commerce d'une personne un peu
plus entendue que le consul qui y est... [B4 2 f
470] (A. M.).
(2) Lettre de Dubourdieu d'Almras (1664) {A. Mis.).
109

qui pouvait son gr offrir ou refuser son concours eu

allguant dans ce dernier cas le caractre sacr dont


il tait revtu ne devait pas rester en charge. Au
fond, Colbert et les Marseillais en ont voulu aux Laza
ristes de leur fausse situation. Cette concentration des
pouvoirs du missionnaire, du rdemptoriste et du consul

dans les mmes mains, leur donnait une comptence

financire mal dfinie, par suite illimite ; ils avaient


l'absolue libert d'oprer comme ils l'entendaient des
virements de fonds, el en cas d'urgence, de lever sur les
marchands de la ville ou sur les barques en partance les
sommes ncessaires. Ainsi le produit des coches servait

au rachat des esclaves ; pour librer des avanies, les


se

consuls avaient recours l'argent destin aux rdemp


tions ou employaient, le pcule des esclaves qui leur
avait t remis en dpt : la fin, bout de ressources,
presss par les Turcs, ils confisquent le chargement des
barques, ruinent le commerce et s'endettent davantage.

Des procds de ce genre, les Marseillais en signalent

constamment et Saint Vincent confirme l'exactitude


des faits en les dplorant (i). Une de ses lettres montre

qu'il avait compris la gravit de ces fautes et qu'il

cherchait en prvenir le retour. Je suis en peine de


ly faute qu'a faite AI. Le Vacher, permettant l'imposi
tion sur les barques de France, pour payer les dettes
d'un particulier. Les marchands de Marseille ont raison

de s'en plaindre. Je vous prie de les voir de ma part et

aprs leur avoir demand pardon, savoir... (2). Bien


tt, Barreau allait s'attirer des rprimandes plus svres;

il se laissait extorquer de l'argent par tous les moyens,

puis, jet en prison, il pensait se tirer d'affaire en

empruntant aux uns et aux autres, toujours endett et

(1) A Barreau7 juillet 1656, 24 novembre 1656, 26 janvier 1657,


9 novembre1657, 31 janvier 1659, 18 avril 1659. A. Get : 14 aot

1656, 4 mars 1657, 9 septembre 1660.


(2) A. Portail, 22 janvier 1649.

110 -

ayant mang par avance les maigres revenus des coches.

Une fois qu'il avait engag ainsi les dpts des esclaves,
les Marseillais se lchrent : Vous me mandez, crit
Saint Vincent de Paul Get, qu'on a commenc crier
voire porte, et de vous reprocher que nous mangeons

les rachats des esclaves. 11 nous faut rsoudre souffrir

de pareilles confusions, il nous en viendra bientt


d'autres, non seulement Marseille, mais ici et partout

ailleurs, par la faute de ce pauvre homme qui a t si

tourdi que de prendre l'argent de ses pauvres captifs et

de l'employer indiscrtement d'autres usages que pour

leur libert (i). Pour dgager son confrre, Jean Le


Vacher donnait le singulier conseil de lever une taxe
sur tous les navires qui iraient Alger. Qu'on s'imagine

la colre des patrons, dj ruins par des droits nor


mes, et obligs de payer les frais de la maladresse d'un
consul. Saint Vincent comprit que si on venait l'effet,
il srail craindre que les marchands s'en remueraient .

Barreau n'en devint pas plus prudent. Cet homme doux,


timide, impressionnable, qui retombait invinciblement
dans la prodigalit, demeura trois ans encore Alger,
bafou des Turcs, raill des Franais, acceptant avec
srnit les consquences de ses folies. Un des premiers

actes du successeur de Saint Vincent de Paul fut de le


rappeler.

Sans doute le cas de Barreau est isol. Tout le monde

dans la Compagnie blmait ses imprudences, et Saint


Vincent le premier lui adressait de vhments reproches;
mais il le laissa i(\ ans son poste, ce qui est peut-tre

excessif pour un homme que rien ne destinait ces fonc


tions dlicates. Les Marseillais qui avaient souffert de son

incurie et de ses taxes arbitraires, gardrent rancune aux

Lazaristes de leur avoir cot si cher.

Il y a plus. Les meilleurs consuls eux-mmes n'ont

(1) A Get, 7 septembre 1657.


-
Ul -

pas russi mettre de l'ordre dans leurs budgets, soit

parce que les coches payaient mal, soit parce que les
revenus ordinaires du Consultai taient insuffisants.
Jean Le Vacher lvera sur les barques des droits exces

sifs dont les marchands se plaindront (i), el il leur fera


supporter les frais des rachats. Ces taxes taient peut-tre

plus justes, mais elles ruinaient le commerce ;


pouvait-

on admettre qu'un homme qui les patrons payaient

cinq reprises une redevance pour l'entretien de la cha

pelle, pour les bagnes des esclaves et pour le casuel du


consul en ft rduit ces expdients ? La mauvaise

humeur tait gnrale et le dsordre de l'Echelle subsis

tait. Le cumul des fonctions tait donc impossible, nnn

que les Lazaristes eussent t incapables de remplir la


tche qu'ils s'taient donne ; mais si le missionnaire

avait adouci le sort des esclaves, si le consul avait apport

dans ses relations avec les Barbaresques un sens politi

que rare, une tolrance imprvue, en confondant leurs


pouvoirs, ils taient devenus odieux au commerce : ia
dualit de leurs fonctions ne pouvait donc subsistei.

Les Marseillais el les Lazaristes, dsormais incapables


de collaborer, taient condamns s'user les uns par

les autres, et se combattre sans fruit, si un pouvoir

fort n'tait apparu cette poque, pour les rconcilier

en les dominant.

2. Initiatives gouvernementales

A) Conditions nouvelles de la politique.

Le mouve

ment religieux dont l'arrive des Lazaristes aux Consulats


n'avait t qu'un pisode, devait s'affirmer avec plus

(1) A. Get, 4 mai 1657, III, 457 ; Quant aux plaintes des mar
chands il ne faut pas s'y arrter, parce que Monsieur le consul
est trop homme de bien pour leur faire tort, et que s'il venait
diminuer ses droits, Ils estimeraient toujours qu'il en lverait
tr0p , a. 3. Le Vacher, 18 avrij 1659, IV, 311.
_
112

d'clat aprs 1060. Le progrs des Turcs, les prparatifs

du pape, la fin des guerres trangres et des guerres

civiles, tout annonait la reprise de la lutte contre l'Infi


dle. La Barbarie prend sa place dans l'assaut que l'Islam
livre la Chrtient. Or, si l'on met part 5 ou 6 ans,
1660-1666, pendant lesquels la France existe et semble

par moments se rallier la croisade, jamais notre diplo


matie ne fut plus affranchie de proccupations spiri

tuelles que pendant cette longue priode. Les Capitula


tions avec la Porte sonl renouveles (1673), la paix est

signe avec les Barbaresques et tous les efforts du gou

vernement franais tendent fa maintenir. L'influence


des consuls lazaristes

bientt il n'y en aura plus qu'un

devient ngligeable. Un rsultat si contraire tout ce

qu'on pouvait attendre de la situation en 1660 a eu sans

doute des causes indpendantes de la France : le roi ne

pouvait pas refuser la main que lui tendaient d'un ct

le Portugal, de l'autre les insurgs de Hongrie. Cette r

serve faite, reconnaissons la part d'initiative qui revient

la politique franaise et cherchons les causes qui l'ont


oriente dans un sens nouveau.

La rorganisation du pouvoir central ne pouvait tre


que dfavorable la Croisade ; du moins la politique

vues troitement religieuses telle que la souhaitait

l'opinion chrtienne. 11 aurait pu la rigueur prendre

en considration le projet de Leibnilz, o les fruits de


l'enlreprise taient doubls par les avantages profanes .

11 ngligera tous ceux qui ne lui assurent pas un profit

immdiat ; non que cette diplomatie ft incapable de


conceptions vastes et d'une immense porte
Louis XIV
a t hant du rve imprial

mais elle ne connat

point ce gnreux dsintressement, cette ferveur d'apos


tolat qui sont la force de certaines poques d'anarchie.
Il n'y avait pas encore d'Etat form quand un immense
enthousiasme souleva tout le monde chrtien et fit affluer

vers la Terre Sainte des troupes de Croiss. Et c'est en


-

113 -

I791 quand le Comit du Salut Public n'avait pas

encore organis la conqute, que l'enthousiasme rvolu

tionnaire fut le plus pur. De tels mouvements sont

gns, touffs, ds qu'ils sont dirigs. Louis XIV et-il


t favorable la Croisade, il lui aurait mis les illres.
Or, il lui rpugna trs vite de s'engager dans cette voie.
Les ncessits de l'quilibre europen imposaient la
France l'alliance avec les Musulmans. Les avantages com

merciaux de cette politique confirmaient en eux cette r

solution. A aucun moment du sicle et de notre histoire,


la France ne fut plus prs de devenir une grande puis

sance commerciale, la matresse de la Mditerrane. Dans


cette renaissance conomique, nous avons marqu la part

de Colbert ; la Chambre de Commerce de Marseille eut

le mrite d'y contribuer.

Presque tous les ports franais taient intresss la


rpression des pirateries, soit que les Barbaresques vins
sent insulter nos ctes de l'Atlantique, soit qu'ils atten
dissent les Malouins dans la Mditerrane au moment

o nos barques allaient vendre leur pche ; seuls les


Marseillais trafiquaient avec la Barbarie. Encore tait-ce
bien moins pour maintenir ce commerce peu impor
tant que pour ne pas compromettre celui du Levant qu'ils

se proccuprent constamment de maintenir la paix

fivec les Barbaresques. Ils avaient bien pris leurs dispo


sitions pour tre couts la cour. Depuis longtemps les
ngociants formaient chez eux un corps distinct de la

communaut, chappant aux querelles et aux riva

lits municipales ; c'est la fameuse Chambre de Com


merce (i) ; nanmoins, il faut attendre 1660 pour la voir

inspirer vraiment notre politique ; pendant la Fronde,


les chevins, nobles, passaient leur temps cabaler

contre Mazarin ; leur disparition rendit toute l'autorit

Histoire du commerce franais dans le Levant


(1) Cf. Masson,
au XVII sicle. Appendice.
S
-
114 -

aux dputs du commerce. A vrai dire, ils ne furent pas

toujours couts ; le roi gardait rancune ces anciens

ligueurs et ces frondeurs invtrs et Colbert s'irritait

de ne pouvoir plier son gr leur gnie dsordonn.


Mais ils lurent toujours consults. L'intendant tait
constamment en rapport avec eux. L'avocat de la Cham
bre, au Conseil des parties, dfendait ses intrts et pro

voquait les arrts dsirs. Les consuls recevaient ses

ordres directement ; ils lui tmoignaient d'autant plus


de dfrence que c'tait elle et non le roi qui devait les
dfrayer de toutes leurs dpenses. Enfin, elle se mle

vraiment notre politique, n'pargnant les avis, ni


ni

les dputations, toujours reprsente dans les ambassa


des ct du roi.

En toute occasion, Colbert demandait aux Marseillais


leur sentiment, el souvent il en tenait compte. L'instruc
tion Hayet (i), de 1680, justifiait ainsi l'envoi d'une
ambassade. Sa Majest estimant important pour le
bien du commerce de ses sujets en gnral, et en parti

culier pour celui de la ville de Marseille de demander au

Dey et Divan d'Alger l'excution des traits...


; l'an
ne suivante Colbert donnait encore la Chambre une

preuve de sa bonne volont ; il lui demandait son

approbation avant d'envoyer aux chefs d'escadre l'ordre


de poursuivre les corsaires tripolitains jusque sous les
forteresses du Grand Seigneur.
Tout le mouvement commercial ne prit son impor
tance qu'aprs 1660, quand le parti des dvots com

menait se dsorganiser. Saint Vincent meurt en 1660 ;


ses successeurs, d'Almeras Jolly, et rests volontaire

ment dans l'obscurit, se consacreront tout entiers la


mission en France, laissant un peu pricliter les uvres
trangres ; sans doute ils n oubliaient pas leurs confr

res de Barbarie, mais rares sont les lettres maintenant

B7
(1) A.M. 205.
115

o le suprieur parle d'eux, et pour lutler contre Col


bert, pour obtenir quelque grce de ce ministre tout
puissant, il aurait fallu Saint Vincent de Paul. On ima
gine mal la rencontre de ce.s deux hommes, qui ne se

sont probablement jamais vus ; Colbert se serait-il

mfi du Pre Vincent qu'il avait espionn jadis


pour le compte de Mazarin (j, en qui il flairait le chef

de celte secte dvote qui cherchait circonvenir l'me


de la Beine. La Compagnie ne perdait pas seulement

lout ce que le crdit personnel de Saint Vincent lui


aurait fait obtenir, elle voyait aussi disparatre ceux qui

l'avaient soutenu, encourag, aid de leurs recomman

dations ou de leurs charits. La duchesse d'Aiguillon,


cette inlassable bienfaitrice des uvres de Barbarie,
ruine, est oblige de mendier une pension la cour.

Gaspart de La Coste est mort depuis Firmin Gel,


i64q.

expert dans les choses de Barbarie, disparat aprs Saint


Vincent. De tous les confrres de l'ge hroque, de
tous ceux qui avaient t forms par Saint Vincent el

qui avaient voulu tablir l'Eglise catholique au milieu

des Infidles, il ne restait plus que les frres Le Vacher ;


eux-mmes allaient quitter la Barbarie : Philippe le
Missionnaire en 1662, Jean le Consul en 1666. La reine

mre enfin, la pieuse Anne d'Autriche, meurt en 1066.


C'tait elle qui avait jadis appel Saint Vincent au
Conseil de Conscience, et par un compromis singulier,

la reine avait toujours tenu la balance gale entre

Mazarin qu'elle aimait et le bon Monsieur Vincent

qu'elle vnrait. Depuis la mort du Cardinal, elle

n'avait plus sans doute aucun pouvoir ; carte des


conseils, elle cabalait dans l'ombre ; mais le roi lui por

tait une affection sincre, et Colbert, si puissant qu'il ft


ds cette poque, aurait eu mauvaise grce froisser
<> la pit d'une reine si religieuse , comme dit un

libelle du temps.

(1) Cf. Lettres et Instructions, de CoLbex, I, p. 183.


-
116

En i06(j, la reine est morte. Les dvots se cachent et

attendent des jours meilleurs. La Compagnie du Saint


Sacrement de Paris disparat en 1666. Celle de Marseille
vivra plus longtemps ; en
1689 elle s'intresse encore
l'expdition de Tourville contre les Algriens, et ne

pouvant faire mieux, elle prie pour son succs (1)...


L'expdition russit, peut-tre pas comme l'auraient
voulu les confrres de Marseille : la France victorieuse

vcut en paix avec les Musulmans. Un jour, auprs du


roi vieilli et ramen la pit, les dvots reparatront.
La France n'en restera pas moins fidle aux principes

ralistes de Colbert. La Barbarie sera le domaine de nos

ngociants ; les Marseillais s'y enrichiront, et les Chr


tiens continueront y abjurer leur foi. La mort de

Saint Vincent ne marque peut-tre pas la fin de la Croi


sade ; elle l'a srement prpare.

B) Croisades el Expditions commerciales (1660-1669).

Mazarin n avait jamais t hostile la reprise de la


guerre sainte. Italien, il sentait plus v ivement qu'un

autre le danger qui menaait sa patrie ; d'autre part, il


avait se concilier le Pape et Venise, mdiateurs au

Congrs de Munster. Aussi prodiguait-il les encourage

ments ceux qui luttaient pour la Chrtient. Mais ces

promesses taient suivies de peu d'effet. Si l'on en juge


par la correspondance de l'intendant d'Infreville, il
envoya Malte en tout et pour tout deux mortiers et

:5o bombes (i6/i5), et Venise, fort tard, 100.000 cus.


Aussi les dvots purent-ils l'accuser de s'entendre avec
le Grand Seigneur, et d'Ormesson relve, non sans com

plaisance, tous les bruits qui circulaient l-dessus.


Pourquoi douter de la sincrit du Cardinal et ne pas

reconnatre que, s'il n'a pas fait plus, c'est qu'il ne

le pouvait pas ? Dans la situation o tait la France

(1) Actes de la Compagnie de Marseille, 17 aot 1689.


-
117 -

cette poque, c'et t folie de s'engager dans une nou

velle entreprise. Mazarin, lidle la promesse qu'il

avait faite au Grand Matre de Malte, s'effora nan

moins de dtourner la Porte d'une agression et mme,


en 16/16, il essaya de parer le coup qui menaait Venise:
la mission de M. de Varenne (1) n'eut pas d'autre but.
Tout au plus peut-on dire que Mazarin pratiqua loyale
ment jusque vers i65g l'alliance turque. Il refuse

d'acheter les esclaves turcs pour les galres (2), parce

que cela est contraire aux Capitulations ; il dissimule


toutes les avanies. Mme en 1608, aprs l'emprisonne
ment du fils de notre ambassadeur, il envoie Blondel
Constantinople pour viter une rupture que l'Empe
reur voyait venir avec joie : Sa Majest dsire, disait
son instruction, que l'alliance qui s'est entretenue

depuis si longtemps entre elle et les empereurs otto

mans demeure ferme, saine et inviolable (3). Le mau

vais fait Blondel


accueil par le grand-vizir fut sans

doute pour quelque chose dans l'orientation nouvelle

de la politique franaise vers


1659 ; mais il serait exa
gr d'y voir l'unique cause du revirement de Mazarin.
En ralit, la situation avait compltement chang : la
paix tait signe avec l'Espagne, notre nouvelle fron
tire de l'Est fortifie par l'alliance des du Bhin;
princes

bien mieux, notre adhsion la Ligue du Bhin entra


nait presque ncessairement la lutte contre les Turcs.
Pour enlever Lopold le peu d'autorit qui lui restait

dans l'Empire, il fallait se substituer lui, se faire le


dfenseur de l'Allemagne contre les Infidles toujours
redouts. Donner Louis XIV le prestige de la victoire

sur les Turcs pour lui mnager la couronne impriale.


telle fut l'ide de Mazarin, et plus tard le grand dessein
de Louis XIV.

(1) A.E., Turquie, 28.


(2) Lettres : A l'vque d'Orange, 17 septembre 1655.

(3) A.E.

Turquie, 28.

118

La vieille inimiti entre Mazarin et Alexandre VII


s'lail apaise. Le cardinal redevenait un fils soumis du
Saint-Sige, et il protestait de son dvouement aux int
rts de la chrtient. Le nonce se montra d'abord m

fiant, non sans raison ; Mazarin s'tonnait que le Pape


refust de se concerter avec lui pour la dfense de la
Chrtient (i), le reproche ne manquait pas d'ironie de
la part de celui qui jusqu' prsent n'avait voulu rien

faire pour la Ligue des Princes, et c'tait montrer bien


gratuitement une attitude agressive envers le Pape quand

on semblait prs de s'entendre avec lui. En effet, les


actes se prcipitent. La rupture avec la Porte semble
imminente ; le chevalier Paul emmne Candie une

arme de secours, dont le propre rgiment de Mazarin


faisait partie (2). Le chevalier de Clerville va reconnatre
les ctes de Barbarie pour choisir un endroit propre un

dbarquement et Paul, de retour de Candie, reoit l'or


dre de paratre Tripoli, Alger et Tunis et d'y
faire tout ce qu'il faudra pour profiter de l'pouvante
o l'on est dans toute la cte de Barbarie (3). Mais
ces instructions ne prvoyaient point une dmon<lra-

fion de grande envergure. Il s'agissait simplement de


renouveler la paix et d'tablir le commerce. Mazarin
se montrait mme
beaucoup plus dispos traiter avec

les Barbaresques qu'avec les Turcs. Le changement de


rgime qui s'tait opr Alger en i65g, substituant le
rgne des Aghas celui des Pachas, pouvait faire
esprer une diminution dans les pirateries. C'est du
moins ce que pensait Barreau, encore consul Alger,
en rapportant navement les promesses des nouveaux

matres tai). En mars 1660, Hugues de Lionne crivait


encore aux Puissances de Tunis une lettre trs amicale

(1) Grin, I, 207.


(2) Cf. I, ip. 220.
.Tal,

C\) Mazarin. Lettres . \u Ch. Paul, avril 1660

('.) A. Ch. C. M.

AA. VA.

119

dont les termes contrastaient trangement avec ceux de


la Gazette, remplie cette poque de dolances sur les
Barbaresques (i). Avec Alger, un trait tait sign pour
le rtablissement du Bastion ; encore le 9 fvrier 1661,
le pacha Ismal assuraitles consuls de Marseille de ses
intentions pacifiques (a). Ainsi, au moment o Maza
rin va disparatre, il s'est ralli au programme du Pape :

ngliger les Musulmans en Barbarie parce que sur ce

point ils n'taient pas menaants ; la moindre croisire

les mettra notre discrtion ; tourner ses efforts contre

les Turcs, qui assigent Candie et envahissent la Hongrie.


Mazarin mourant donna au pape une dernire preuve

de fidlit (3), il lui lgua le secours en argent que jus


qu'alors il lui avait toujours refus. L'ambassadeur
vnitien, rsumant la nouvelle orientation de la politique

de Mazarin, dira plus tard : La Patrie et la Chrtient


ont beaucoup perdu la mort du Cardinal .

Louis XIV parut d'abord dispos suivre la mme

politique que son ancien ministre ; il donna aussitt des


assurances au Pape ; il semblait mme largir le pro

gramme de Mazarin, puisqu'il parlait de faire la guerre


aux Barbaresques et de poursuivre l'Infidle sur terre et
sur mer.

En ralit, la politique de Louis XIV marque ce mo

ment une hsitation : hsitation d'autant plus naturelle

que la situation de l'Europe tait exceptionnelle et invi


tait nos diplomates sortir des voies qu'ils avaient sui-

(1) Plantet, I, 151.


(2) Plantet, I, 57.
(3) Grin, I, 225 :Considrant qu'il n'y a rien de si impor

tant que de fortement aux entreprises du Turc contre


s'opposer

la chrtient... ordonne que... de tous ses effets... il en sera pris


la somme de 600.000 1. tournois,... pour tre employes par les
ordres de Sa Saintet aux prparatifs ncessaires contre un si

puissant ennemi, ou autre chose qui puisse lui tre galement


utile .

120

I"

vies jusqu' ce jour ; le systme de Franois et de


Bichelieu ne convenait plus aux circonstances. On cher

chait. De l le grand nombre de mmoires dats de cette

poque qui nous font pntrer les motifs de notre poli

tique et nous apprennent ce qu'elle cherchait et ce

qu'elle sacrifiait. Parmi ces mmoires, il en est quatre

qui marquent assez bien les diverses possibilits qui

s offraient alors au roi de France : trois recommandent

la guerre aux Barbaresques pour des raisons diverses o

l'intrt religieux tient en gnral peu de place ; aucun

d'eux ne songe rompre avec le Grand Seigneur ; un

seul (j) parle de la Croisade et pousse la rupture avec

la Porte : il est vrai qu'il conseille en mme temps


l'alliance du roi d'Alger, offrant ainsi une conciliation

piquante des intrts religieux et des intrts commer

ciaux. A tous gards ce mmoire est extrmement

curieux ; il nous rvle la pense d'un petit nombre

d'hommes, politiques aviss, qui prtendent avoir t


couts de Mazarin, et qui pourraient bien l'avoir t
en effet, si l'on en juge par l'volution que nous avons
note dans les deux dernires annes de son ministre.

Le grand l'ail qui pour nous claire toute cette priode,


le conflit entre la politique raliste, intresse, commer

ciale qui s'impose au gouvernement, et la croisade que

rclamait une foi encore vive et un enthousiasme que

la renaissance religieuse venait d'exalter, n'a pas chapp


l'auteur de ce mmoire. Son originalit ne rsiderait-

elle que dans ce fait que, seul de tous les contemporains,


il a propos une politique de conciliation, elle ne serait

(1) Mmoire pour savoir s'il est avantageux au Boy faire


alliance pour le commerce avec le roi d'Alger, dcembre 1631 (a)
B' f
(A. M. 49 379)
ta) Deux rails nous permettent de corriger la date :

1. Feu M. le Cardinal persuad par toutes les raisons. Il


ne peut s'agir que de Mazarin, mort en mars 1661.

2. Il est question du sieur de Bominhac, dont la mission en


Barbarie se place entre 1660 et 1661.
-
121

pas moins remarquable. Il y a mieux : il veut reprendre

la croisade avec l'alliance d'un prince musulman (le


roi d'Alger) ; en deux lignes il rfute les partisans de la
guerre : ce sera une guerre faible et qui ne sera pas

capable de conqurir cet Etat n ; mieux vaut se mnager


un appui contre l'Angleterre, et nous assurer les bls,
les chevaux, toutes les ressources de la Barbarie, ct

mme les produits de leurs prises, ee qui souffre quel

que difficult ; mais il y a un temprament prendre l


dessus , ajoute-t-il d'un ton dgag ; notre crois s'en-
lend avec l'Infidle pour piller le Chrtien. Le tour de
force, c'est de faire de cette alliance une uvre pieuse ;

il s'agit de ne point compromettre la dignit du roi

T. C. et de ne pas donner prise quelque mauvaise

interprtation. Le mmoire rsout cette difficult avec

aisance. Le pape et tous les princes chrtiens ne man

queront pas d'tre satisfaits en voyant la Turquie affai

blie par cette rvolte de la Mauritanie. Puis, il sied bien


la pit du roi de retirer les esclaves des bagnes mu
sulmans. Enfin, on obtiendrait aisment du roi d'Alger
quelques forts la cte, des escales sur la
sur route de
l'Orient : l'alliance avec Alger sera un premier pas dans
la conqute de la Terre Sainte. Bien ne montre mieux

que ce mmoire l'irrductible opposition des deux points

de vue religieux et commercial. Si leur conciliation en

Barbarie mme avait t possible, notre auteur sans

nul doute l'et propose, au lieu de la chercher en

dehors de la Barbarie l'van-


; en Barbarie, il renonce
glisation ; en Turquie, l'alliance. Cependant il joi
gnait l'intelligence des vrais intrts de la France un

sens trs fin des ncessits de l'heure et comme une

divination de la puissance de cette opinion chrtienne

qui allait forcer Louis XIV prendre part la Croisade.


A ce titre, et bien qu'il n'ait eu aucune espce d'in
fluence sur notre politique, ce mmoire mritait d'tre
tudi un peu plus longuement.
122

Les trois autres sont loin d'avoir la mme originalit :

le plus complet, le plus ambitieux aussi, est celui du


chevalier Paul (i), c'est le projet d'un soldat qui connat

son affaire, et expose en dtail les multiples combinai

sons qui nous donneront la victoire. Au reste, il ne se


proccupe pas des consquences possibles de la guerre ;

l'entente avec le Grand Seigneur ne lui semble pas

pour cela compromise. Quant au commerce, il n'en

parle que pour l'interdire : ce sont nos ngociants qui

entretiennent la course en portant robes et marchan

dises aux Barbaresques pour accommoder leurs vais

seaux et en achetant leurs prises.


Un autre m

moire revient sur cette ide (2). Mais il la complte

heureusement en demandant au roi d'organiser la r

pression internationale de la piraterie. Le dernier (3),


passerait pour un mmoire de Colbert, tant il est con

forme aux principes de ce ministre, .si l'on ne voyait

qu'il a t rdig par un intendant de la Marine. C'est


d'ailleurs beaucoup moins un mmoire sur un arme

ment contre les Barbaresques qu'un expos trs prcis,


trs dtaill des moyens propres rendre le roi puis

sant sur la Mditerrane . Il faut courir contre les


Barbaresques, afin d'assurer le commerce et de prendre

des esclaves pour renforcer les chiourmes . Tels sont

aussi les deux points essentiels du programme de Col


bert. Plus loin, il parle d'armements pour excuter

< de plus grands desseins (sans doute le dbarquement


qui s'effectua en 166/1), mais l'imprcision de la for
mule ne nous permet point de connatre exactement la
pense du mystrieux conseiller de Colbert.
Un dsir d'en finir avec les pirateries, un extrme

(1) A. E., Alger, 12.


(2) Mmoire
pour la marine, 2. f 125 (A. M.). B1

'3) Mmoire des moyens de rendre le Boi puissant sur la Mdi


terrane (A. M. Bs 1), dat de 1660, mme erreur que pour le
premier (feu Son Excellence).
123

souci de mnager notre commerce une situation pr

pondrante dans la Mditerrane, des requtes respec

tueuses en faveur de la marine, voil ce que nous trou


vons en somme dans ces quatre mmoires. Aucun d'eux
ne recommande la guerre contre les Musulmans. Celui-

l mme qui consent satisfaire l'opinion publique par

une croisade prne l'alliance avec l'infidle, tant il est

vrai que les politiques les plus favorables au Pape ne

pouvaient accepter tous les sacrifices que celui-ci deman


dait dans l'intrt de la Chrtient.
Cependant, Louis XIV parut, dans les premires

semaines de son gouvernement personnel, dispos


faire ces sacrifices. Aussitt aprs la mort de Mazarin,
un pouvoir est adress au Cardinal Antoine Barbe-

rini, reprsentant les intrts franais Rome (i), et le


26 mars on dcide d'envoyer auprs du Saint-Sige un
gentilhomme pour traiter de la coalition contre les
Turcs ; en Allemagne, Gravel est charg de recueillir
les adhsions des Princes et de bter les leves d'hom
mes chez nos allis (2). La France semble prte partir

en campagne ; on cherche un gnral pour l'arme de


la Ligue. Quinze jouis plus tard, tout est chang ; en

croire le nonce et l'ambassadeur vnitien, Louis XIV


n'est plus dispos se dclarer contre les Turcs (2). Il
rduit le subside des Vnitiens, et s'oppose ce que l'on
remette au Pape les 600.000 livres de Mazarin. Pour
tant rien ne nous autorise douter de la bonne foi
de Louis XIV dans ses premires dpches. Cela sied

mme son caractre de se poser aussitt en dfenseur


de la chrtient. Il y avait dans cette attitude quelque

(1) Boislisle, Mmoriaux de 1661, 16 mars 1661, en note :

Dans le dont la chrtient est menace du


ipril prsent ct

de la. Hongrie par l'irruption des Infidles, nous n'avons rien

vu plus digne de notre pil et du titre glorieux que nous por

tons de fils an de l'Eglise, que d'entendre volontiers aux

ouvertures qui nous ont t faites...

(2) Mazarin, Lettres ri Gravel, 7 octobre 1660.



124 -

chose de gnreux et de thtral qui dut plaire au jeune


roi. Seulement, sa dcision tait pour le moins prma

ture. II ne connaissait bien ni les affaires de l'Europe,


ni celles de Barbarie. De tous cts il se renseigne. A
l'intendant de Toulon il demande son avis sur la rponse

faire au Dey de Tunis qui refusait de rendre les escla

ves ; il lit peut-tre les mmoires demands par Maza


rin et remis aprs sa mort ; il coute srement Lionne
et Colbert. Or, ceux-ci ne pouvaient qu'tre frapps de
notre dangereuse situation ; la France se relevait peine

des misres d'une trs longue guerre ; son industrie


tait ruine, son commerce du Levant, source essentielle

de sa richesse, tomb si bas qu'il n'atteignait plus le


dixime de ce qu'il avait t 5o ans auparavant. Et voil

qu'on lui demandait de rompre avec la Porte, c'est--

dire de perdre la dernire chance qu'elle avait de se

relever ; et de dfendre son ennemi au risque de sentir

la premire les effets de sa puissance I


En Barbarie, la situation tait trs diffrente. La
guerre avec les Puissances ne prsentait pas les mmes
dangers que la guerre contre les Turcs : l, point d'Em
pereur secourir, point de commerce sacrifier. En
rprimant la course, on rpondait aux vux de tous les
ngociants (i). Enfin, le danger est pressant. On s'at

tend voir paratre les Barbaresques jusque sur les ctes

de Normandie, le gouverneur de Provence est dbord,


et les habitants de Marseille s'adressent au roi pour lui
exposer leurs alarmes (2). Louis XIV ne pouvait vrai

ment pas se lancer dans une lutte incertaine et au moins

inutile alors qu'il se sentait peine dfendu sur son

(1) Mmoiremanuscrit adress en 1659 au Cardinal Mazarin


sur les raisons de dcadence du commerce de Lyon. Cit par

Forbonnais. Recherches et considrations sur les finances de


France.
(2) uvres Louis XIV, aot 1661. Rponse du roi : 5 septembre
B.N. ms fr 1,5612, f 199.
125

propre territoire. Aussi nous ne nous attarderons pas

aux critiques des historiens ullra-mondains : ils s'indi

gnent de la duplicit de Louis XIV ; entendons bien qu'il


ne pouvait heurter de front cette poque le monde
chrtien ; puis, si le roi a jug la croisade impossible,
funeste pour son peuple, l'homme n'a-t-il pu souhaiter

sincrement le triomphe de sa foi ? Point n'est besoin


d'imaginer lutte intrieure, un conflit cornlien
une

entre deux devoirs. Aussi bien accuser une diplomatie


de duplicit n est-ce pas dire grand chose. C'est peut-tre

en donner un exemple ou une dfinition. Quoi qu'il en

soit, la guerre contre les Barbaresques offrait trop


d'avantages pour qu'il ne s'y rsolt point. Cela n'im

pliquait pas sans doute qu'il dt s'abstenir de prendre

part la croisade, mais Hugues de Lionne esprait bien


s'en tirer peu de frais. De toutes faons, on n'accu
serait pas Louis XIV qui donnait le signal des hostilits

contre les Infidles, de ne point tenir ses promesses.

Ds ce moment, le principe de la politique franaise est

Rome, le roi se donnera pour un prince tout


trouv ;

dvou la Chrtient, respectueux du Pape, prt


faire marcher contre les Turcs les allis protestants de
l'Allemagne, puis, comme il doit prendre part la
Croisade, il fera la guerre en Barbarie.
d'
Tel tait le sens de l'instruction que reut M. Aube-

ville quand il partit pour Borne ; il devait faire conna


tre le zle du roi, amuser les plnipotentiaires pour
retarder la signature du trait ; bref, ne pas engager

le roi dans une Ligue qui serait aussi prjudiciable au

bien de la Chrtient qu'aux intrts de Sa Majest (i).


Or, la France tait si peu dispose en ce moment
rompre avec la Porte qu'elle renonait tirer vengeance

du mauvais traitement fait M. de la Haye et son fils.


Louis XIV crit au Grand Seigneur le i/i juillet 1661

(1) Hanotaux, Recueil des Instructions, . Rome, 1, p. 61 et -qq.


126

dans des termes trs conciliants : Comme nous avons

sujet de croire que V. H. dsire bien continuer cette

amiti et cette bonne intelligence en suite de ce qui a

t crit de sa part el que pour y concourir nous voulons

bien aussi continuer tenir un ambassadeur votre

cxcelse Porte... (i). Les ambassadeurs vnitiens rap


portaient de Paris de bonnes paroles : Discorsi di
pompa e parole di complimente , mais point de
secours; ils ne cachaient mme pas que la Chrtient
n avait rien esprer de Louis XIV (2). Les intrts
de la couronne, crivait l'un d'eux vers 1668, cause
du voisinage des provinces maritimes, comportent la
bonne entente les Turcs d'Afrique, pour pargner
avec

aux sujets les dommages que frquemment leur font les


Barbaresques . Enfin, quand, aprs l'expdition de
Gigeri, le Pape eut pris connaissance de la dpche saisie

par les Algriens, il fut difi sur le beau zle du roi

T. C. Louis XIV ne cessa pas d'ailleurs d'affimer sa

pit el son dvouement au Pape. L'instruction au duc


de Chaulnes, cet gard, est un chef-d'uvre (3) :

<, S. M. est bien rsolue de se faire remarquer en toute


occasion pour tre le vrai fils an de l'Eglise par la
rvrence qu'elle aura pour la personne de sa Saintet
et par les soins qu'elle prendra de procurer de tout son

pouvoir le maintien et l'accroissement de notre sainte

religion .

El voici les actes mritoires de notre pieux monar

que : l dessus, le dit sieur duc pourra toucher ce que

S. M. a fait et continue tous les jours de faire pour

l'extirpation de ces Infidles pirates qui endommagent

si notablement le commerce de la Mditerrane ; ce que

ses armes ont opr en Hongrie... ce qu'elle a fait et

(1) Cit par Boislisle, p. 127.


(2) Relnzioni, p. 196.
(3) Hanotaux, op. cit., p. 167 ; 10 mai 1666.
127

continue de faire pour abattre la secte du jansnisme... .

Quand on lit cette benote profession de foi, date de


mai 1666, en se rappelant qu' cette date la paix tait
signe avec Alger et Tunis, el que Louis XIV, au mme

moment, recherchait l'alliance du Dey d'Alger, on a

jug une fois pour toutes la diplomatie de Lionne envers

le Saint-Sige, et l'on se demande si jamais le mot de


croisade eut pour lui un sens.

3. Limitation des eintrepiuses prives

A) Le renvoi des consuls Lazaristes.

Les traits
signs en i665-6 avec Tunis et Alger ne comportaient

point de clauses religieuses, si ce n'est dans l'article,


d'ailleurs renouvel de l'ancienne disposition, qui accor
dait au consul le droit de faire dire la messe dans sa
chapelle. Mais que le gouvernement ait song aux

besoins spirituels des esclaves, qu'il ait voulu reprendre

son compte l'uvre de Saint Vincent de Paul, ou loul


simplement tablir la Mission dans un pays o elle pou
vait servir la fois les intrts de la France et ceux de
la Chrtient, il n'y en a pas la moindre trace. On ne

peut pas souhaiter dclaration plus catgorique que

celle-ci (1) : le sieur Dumolin doit savoir que tout le


fruit et l'avantage que S. M. peut retirer de ce trait

consiste bien tablir tout ce qui peut bonifier le com

merce de ses sujets >. A cet effet, chacun des traits,


tait jointe une convention renouvelant les privilges de
la Compagnie.
Dans quelle mesure cette paix satisfaisait les Lazaristes,
nous l'ignorons. D'ailleurs il est douteux qu'ils aient

pris une pari active aux ngociations : Dubourdieu


Alger fut tenu l'cart des pourparlers de paix et Jean Le

(1) Instruction Dumolin ds Plantet, I, 198.


128

Vacher Tunis fut destitu au moment de la signature

du Trait. Le public n'a probablement pas connu cette

destitution : rien d'tonnant ce que les contemporains

ne nous en parlent pas. Mais voil qui est plus trange :

les documents officiels sont muets sur ce fait, et la Con


grgation elle-mme en parle avec une discrtion qui

touche au mystre. 11 y a bien une lettre du nonce, le


Cardinal Robert, le 11 fvrier 1667

un an aprs

l'vnement

o il dit que jusqu'ici les P P de la


Mission n'ont rien pu obtenir, puis il faut aller jusqu en

i67/i pour trouver mention de ce fait dans une circulaire

du suprieur
Jolly : Nous voyons aussi quelque dis
position pour recouvrer le consulat de Tunis qu'on

nous avait l par surprise (1). Ds lors, plus rien,


1 affaire est oublie. A ce silence de la Compagnie, il

n'y a qu'une explication possible, la toute-puissance de


Colbert, Colbert dont le crdit est plus grand qu'il n'a

jamais t, qui est le matre , crit d'Ormesson en

mars 166O. Les dvots taient vaincus. Les crivains


postrieurs qui n avaient pas pour le mnager les m

mes raisons que les Lazaristes en 1666, sont unanimes

lui enlever la responsabilit de cette rvocation. Un


des biographes les plus srieux de Jean Le Vacher (2)
escamote le rle de Colbert dans toute cette affaire ;
il rple, d'aprs le Chevalier d'Arvieux, que les pro

visions du nouveau consul, au lieu d'tre dlivres par

la Cour et signes par le Roi, venaient seulement du


Gouverneur de Provence, qui on les avait surprises, et

il croit un
coup mont entre Dumolin et d'Oppde et

les ngocianls marseillais. Que Dumolin ait donn


cette rvocation un ton brutal que ne comportaient pas

ses instructions,- c'est plausible. Cela concorde mme

(1) Recueil des .principales circulaires des Suprieurs Gn


raux, I, 162.
(2) Gleizes, op. cit., p. 123-4.
129

assez bien avec le caractre du personnage. Mais juste


ment, parce que c'tait un grotesque et un imbcile, il
nous semble inadmissible qu'il ait outrepass ses ins
tructions. Colbert ne lui dsignait pas le nouveau consul,
mais il marquait on ne peut plus nettement l'intention
de remplacer l'ancien. Ce passage de l'Instruction est

un de ceux o l'on reconnat le mieux sa pense et sa

manire. L'intention n'est pas douteuse. Il faut rempla

cer quiconque n'a pas de talent pour le commerce, car

dvelopper le commerce doit tre le but essentiel


plus

haut il dit unique


de notre politique. Quant
l'histoire des provisions du consul surprises au Gou
verneur de Provence, elle est en contradiction avec la
lettre de Dumolin au duc de Beaufort, du 3 juillet 1666 :
<i
J'ai, suivant les ordres de S. M., tabli un nouveau

consul. Je trouve le choix qu'en a fait M. le premier

Prsident fort judicieux . L'abus de pouvoir, si tant est


qu'il
y en ait un, viendrait de d'Oppde, non de Dumo
lin. Cette dernire hypothse elle-mme est inadmissible
parce qu'en l'absence du duc de Vendme, d'Oppde
avait le gouvernement de la Provence et qu'il put ce

titre, runir la Chambre de Commerce, ou, si l'on veut,


consulter individuellement ses principaux membres avant

de nommer le consul. Enfin, s'il fallait une preuve dci


sive de plus, nous dirons que Dumolin fut son retour
en France l'objet d'une enqute, mais nul ne songea

lui reprocher d'avoir outrepass les instructions roya


les. De cette discussion rsultent deux faits qui nous

paraissent avoir un intrt gnral pour la politique

franaise : ce sont les Marseillais qui, par l'interm


diaire de d'Oppde ou du duc de Beaufort, ont dcid
Colbert remplacer le consul lazariste par un des leurs,
la politique franaise en est arrive un point o elle

prend fait et cause pour les marchands contre les


religieux. Ainsi se marque sa nouvelle orientation pen

dant la deuxime priode de cette histoire.


9
130

11 est bien difficile aprs cela d'accepter sans rserve

les loges que certains crivains du temps donnent la


politique de Louis XIV en Orient. Dans les Capitulations
accordes Nointel (1673), ils relvent les articles qui

garantissent le libre exercice du culte aux religieux du


rite latin, el Lacroix, secrtaire interprte du roi, prend
soin de nous dire dans sa relation que la religion

trouve par ce trait une protection aussi forte que sp

ciale nom de Sa Majest . Il y eut mme, d'aprs


au

le de d'Arvieux, une publicit organise par le


rcit

gouvernement pour faire connatre ce succs de notre

politique. On mit ce grand vnement dans les gazettes.

On fit crier par les colporteurs des relations imprimes


qui avaient pour titre : Le renouvellement de la Nou
velle Alliance du Grand Seigneur avec le Roi et le rta

blissement de la foi catholique dans l'Empire otto

man (1). La dernire partie corrigeait heureusement


ce que la premire pouvait avoir de choquant pour les
Chrtiens.
Avec les Barbaresques, on n'avait pas la mme res
source ; il tait trop manifeste que le Gouvernement se
dsintressait de nos privilges religieux dans ces pro

vinces pour qu'on pt sans scandale faire crier notre

alliance avec le Dey d'Alger. Jusque dans ses Mmoi


res (2), Louis XIV se dfend d'avoir accept les propo

sitions des Algriens qui lui offraient de servir contre

l'Angleterre. Mais les documents officiels subsistent, et

la preuve est faite que Louis XIV a non seulement

accept, mais sollicit l'alliance. Voyons le grand roi

demander l'aide des pirates : Comme la prudence veut

que le roi ayant la guerre avec les Anglais prenne ses

avantages contre de toutes manires, S. M. dsire


eux

que ledit sieur Trubert presse le Pacha et Divan d'Alger

(1) D'Arvieux, V, 54.


(2) P. 159.
-
131

par toutes les raisons qui leur tomberont dans l'esprit,


de rompre la paix qu'ils firent dernirement avec les
Anglais, et de chasser le consul de cette nation (i).
Ce n'est pas encore si l'on veut une alliance formelle,
mais cela y ressemble fort. La lettre du mars 1668

est encore plus explicite : Vous assurerez de ma part

ledit Pacha, la le Divan, non seulement que


milice et

je ferai excuter ponctuellement le trait fait avec eux,


mais mme que je permettrai mes sujets de leur porter

toutes les marchandises qui leur pourront tre nces

saires pour l'armement de leurs vaisseaux ; et sur ces

assurances vous tcherez, s'il est possible, de les porter

rompre avec toutes les autres nations (2). Il y a l


plus qu'une alliance contre une puissance dtermine ;
c'est une flonie envers le monde chrtien. On tait all

ainsi du premier coup, jusqu aux dernires consquences

du principe d'indiffrence religieuse auquel Louis XIV


venait de se rallier. Pourtant le saut avait t trop brus
que de la Croisade avorte de 1660 l'alliance antichr

tienne de 1668. Une raction tait fatale. Elle se produi

sit la suite des vnements de Candie en 1669.

B) Retour momentan la politique de croisade.

Cette intervention de la France, si contraire toute sa

politique antrieure, a de quoi nous surprendre. Cepen


dant, il faut bien dire que les circonstances taient
extrmement favorables.
Le nouveau pape, Clment IX, tait du parti franais,
el Louis XIV ne pouvait refuser un ami une marque

de bonne volont. Les Vnitiens nos allis, montraient

l'imminence du pril et Candie aux abois. Sans doute


aussi, le mouvement d'opinion se faisait plus pressant :

l'hrosme de Morosini, sa fermet ne pas dsesprer,

(B7
(1) Instruction Trubert 49 f 270), septembre 1666.
(2) La proposition de Louis XIV fut officiellement accepte
(Plantet, I, 65).

132 -

mme abandonn de tous, lui avait gagn tous les curs


chrtiens. Comme en 1660, des gentilshommes franais

partent spontanment au secours des assigs sous le


commandement du duc de la Feuillade, et l'arme
vnitienne compte maintenant 5o.ooo Franais dans ses

rangs. Mais ce qui dcida Louis XIV, ce furent les dif


ficults que mettait La Porte au renouvellement des
Capitulations. D'ailleurs, il intervenait moins pour

secourir des chrtiens que pour intimider les Turcs, et

il prenait grand soin de ne pas consommer la rupture. Le


corps de 6.000 hommes qu'il envoie, est enrl sous la
bannire du Pape, et notre ambassadeur doit laisser
Constantinople un reprsentant, prt couter les pro
positions ventuelles du Sultan. Bref, c'est beaucoup
moins la guerre que souhaiteraient le Pape et le Clerg
franais que l'expectative prte se changer, suivant les
circonstances, en guerre officielle ou en alliance plus

troite.
Or, rien n'impliquait dans ces conditions la rupture

avec les Barbaresques. Leurs dispositions bienveillantes


ne se dmentaient point. Vivonne (1), fin politique,
rvle dans ses lettres leur dvouement aux intrts de
la France ; assurment, ce spirituel picurien tait d'hu
meur vivre en bons termes avec de fort honntes
gens qui recherchent l'amiti du roi . Les choses taient
bien changes depuis 1660. La politique franaise sem

blait avoir trouv sa voie, et par un dtour des circons

tances, la situation devenait identique ce qu'elle tait


en 1660 : guerre avec la Turquie, sinon officiellement,
du fait, dispositions favorables des Barbares
moins en

ques. Et, pour la seconde fois, la crise allait se dnouer

par la paix avec la


Turquie, la guerre avec les Barba
resques. La premire de ces dcisions tait si conforme

la tradition franaise qu'on ne saurait s'en tonner :

(1) Lettres Colbert : mars 1669, 23 novembre 1669 (B1


A. M..
3)

133

elle fut d'ailleurs discute et mrie longuement. Le


Sultan ayant fait les premiers pas en envoyant un am

bassadeur, l'honneur tait sauf.

La guerre avec les Barbaresques ne servit pas cette

fois masquer cette retraite dsinvolte ; elle n'eut m

me pas les apparences de but religieux. La rupture de

1669 est due, en partie, aux Barbaresques qui, pour obir

aux ordres du Sultan, arrtrent quelques-unes de nos

barques envoyes Candie, trop heureux de justifier


ainsi leurs habituelles pirateries, mais surtout au roi de
France qui n accepta pas leurs explications, pour une
fois satisfaisantes, et ordonna la guerre outrance. Il
est assez difficile de dire quelles influences il faut attri

buer ce revirement passager de nos influences politi

ques. Prcisment parce qu'il tmoigne d'une tendance

profonde, d'une hostilit invtre contre les pirates,

qui on prtait tous les vices et tous les crimes, on ne

peut distinguer un personnage plutt qu'un autre,


l'initiative duquel ce changement politique aurait l
d. Les marchands l'avaient prpar sans nul doute par

leurs plaintes rptes contre les Corsaires, plaintes

inconsidres s'il faut en croire Colbert qui met en marge

d'une dclaration de ce genre : le roi y a pourvu,

y ayant plus de deux ans que l'on n entend point parler

d'aucune prise de vaisseaux (1). Les Marseillais


n'taient probablement pas bien renseigns sur la natio

nalit du corsaire, et ils accusaient tous les pirates des


mfaits dont seuls ceux de Sal ou de Tripoli taient
responsables. Les plaintes furent alors appuyes la cour

par quelques officiers de marine, parmi lesquels Du-


quesne se signale comme un des plus belliqueux. Est-ce

dans l'espoir d'une croisire plus fructueuse que les


prcdentes, ou par dpit d'homme du mfier, irrit de
voir notre marine impuissante rprimer ces brigan-

B'
(1) 205 (A. M.).
-
134 -

dages ? Il approuve les solutions brutales, il provoque

les plaintes des marchands et les appuie, mme quand

elles sont exagres, car c'est mon avis, ce qui por

tera le conseil de rsoudre d'armer, et non pas les


conseils que vous et d'autres donner, lesquels
pouvez

on tient intresss (i). La France avait d'ailleurs reu


satisfaction ; Vivonne l'indique dans son rapport de

'669 ; cependant, il est croire que le parti de la guerre

n'avait pas dsarm, el, chose plus grave, il avait gagn

Colbert sa cause : comment celui-ci n'aurait-il pas

cout les plaintes du commerce, quand c'tait la Com


pagnie du Levant, son uvre, son espoir, qui les expri

mait ; quand il apprenait de Tunis, qu'en moins d'un


an les pirates de cette ville avaient pris neuf btiments
marchands avec 25o.ooo piastres d'effets et i5o per

sonnes P (2). Ajoutons que l'orgueil royal qui s'enfle

avec le succs, ne peut plus tolrer la moindre incartade


de ces peuples remuants el indociles. Tel est l'ensemble
complexe des motifs qui poussrent la France renon

cer l'alliance bauche en 1666-1668, et recommen

cer une guerre o elle entrait cette fois sans aucune

arrire-pense religieuse.

Le blocus de la cte tunisienne et les croisires devant


Alger de 1670 1672, taient si peu destins procurer

de nouveaux avantages que l'on se contenta de renouve

ler avec chacune de ces villes les traits de paix de 1666.

Le gouvernement franais avait donc obtenu tout ce

qu'il souhaitait, la scurit pour ses convois, l'accord


commercial pour ses comptoirs d'Afrique, et il se dro
bait en mme temps aux engagements plus troits d'une
alliance. Dsormais, c'est d'Alger et non plus de Paris
que viennent les propositions d'entente plus intime.

(1) B*3 (A.M.).


(2) Plantet, I, 249.
135

Par les intermdiaires les plus divers, des marchands,


des agents de la Compagnie du Bastion, le consul, les
Barbaresques nous offrent leur concours. Mme lorsque
les diffrends s'enveniment, lorsque les rclamations se
font d'un ct ou de l'autre plus pressantes, les puis
sances sont d'accord pour vouloir la paix ; non seule

ment elles proclament en toute occasion qu'elles veulent

maintenir les traits avec le roi de France, mais encore

elles lui font part de leurs desseins, elles lui demandent


de s'associer leurs conqutes : le gendre du Dey m'a

particulirement ordonn, crit Le Vacher Colberl (i),


de tmoigner de sa part V. G. qu'il esprait ce prin

temps prochain retourner assiger Oran et mme de


s'en rendre matre, pourvu que le secours qu'on pouvait

donner cette place par mer ft empch. Ledit Sei


gneur souhaiterait que ce ft, s'il se pouvait, par des
vaisseaux du roi, et qu'aprs qu'il aurait conquis cette

place, il la remettrait aux Franais pour en faire un

lieu de commerce comme le Bastion . Mais nos minis

tres ne devaient pas s'y tromper ; les Barbaresques


souhaitaient l'alliance qui pouvait leur tre utile, mais

ils voulaient traiter d'gal gal, non pas rendre hom


mage la puissance du roi de France et recevoir ses

lois. Aussi les ministres de Louis XIV n'ont-ils pas

rpondu. Cependant, il se prparait une crise grave,


laquelle la mauvaise volont systmatique de la France
ne laissait d'autre solution possible qu une guerre achar

ne, guerre blme par les commerants et ruineuse

pour leur Irafic, mais voulue par le roi pour anantir, ou

du moins pour humilier les Barbaresques. Ainsi, rsul

tat paradoxal, la conclusion de i5 ans de politique dont


les fins avaient t exclusivement commerciales, mar

ques par l'abandon en Barbarie de toute ide de Croi


sade, tait une guerre, el une guerre laquelle les cir-

(1) 21 fvrier 1676 (A. E. Afl. relig. d. min. ds les Etats barb.).

136 -

constances allaient redonner l'apparence d'une Guerre


Sainte.

C) L'organisation du commerce.
Si trouble qu'ait

t cette priode par des rclamations incessantes, elle

n'en reste pas moins favorable l'excution du pro

gramme de Colbert. La plupart de ses mesures visent le


commerce du Levant autant que le commerce de Bar
barie qui d'ailleurs tait compris en gnral sous le
premier titre, et il n'est pas sr que Colbert songet

toujours au second quand il prenait des dcisions con

cernant la fois l'un et l'autre. On le vit bien quand en

1670 il accorda la jeune Compagnie du Levant le pri

vilge du commerce au Bastion de France comme une

annexe de son monopole (1). Or, il s'exposait ainsi de


srieux mcomptes. Des mesures bonnes pour nos

chelles de Smyrne ou d'Alexandrie pouvaient tre funes


tes notre commerce de Barbarie. Nous avions au Bastion,
non pas seulement un comptoir, un fondouk o des
marins viennent exposer leur pacotille et acheter les
marchandises du pays, mais un tablissement o l'on
avait d laisser plus de libert aux colons pour rgler au

mieux leurs rapports avec les indignes. On ne pouvait

pas non plus traiter les deys comme les pachas d'Asie,
qu'un commandement du Sultan faisait rentrer dans
l'ordre : ils rclamaient des gards particuliers, ces peu

ples turbulents fiers, et autrement redoutables qu'un

fonctionnaire de la Porte, mme avide et sans foi. Si le


ministre avait t un empiriste, le mal n'et pas t
grand ; la longue il aurait appris faire ces distinc
tions ; mais Colbert entendait transformer la ralit sui

vant ses principes, et quand une rforme n'avait point

tout le succs dsir, il s'irritait contre les Marseillais


parce que tout ce qui tait bon pour le Levant devait tre
bon pour la Barbarie.

B'
(1) A.M.

489, f 367.

137

Il n'avait pas tort de se dfier des Marseillais quand

il s'agissait du Levant. Leur ngligence, la mauvaise


conomie des consulats qu'ils graient, l'irrgularit de

leur trafic, tout justifiait les reproches vhments que

leur adressait Arnould dans sa Correspondance : Ils


se sont tellement abtardis leur bastide, mchant trou
de maison qu'ils ont hors le terroir, qu'ils abandonnent
la meilleure affaire du monde plutt que de perdre un
divertissement de la Bastide : de matres qu'ils taient du
commerce, ils en sont devenus les valets (i).
Mais il n'tait pas juste d'accuser leur ngligence

tant qu'il s'agissait de la Barbarie. Peut-tre parce que

les consuls d'Alger ne sont plus Marseillais cette po


que, la Chambre de Commerce exerce un contrle rigou

reux sur leur gestion ; quant aux consuls de Tunis, elle

ne les soutient pas aveuglment ; quand l'un deux est

l'objet d'une plainte, la Chambre fait une enqute, et,


si elle le juge bon, demande au Secrtaire d'Etat sa
rvocation. Elle lient exactement Colbert au courant des
affaires de Barbarie, ct elle transmet aux consuls les
dcisions du ministre. Lorsqu'elle sentait la rupture

imminente, et les intrts du commerce la merci d'un


vote tumultueux du Divan, elle faisait diligence : On
dcide d'une commune voix qu' l'instant, sans aucun

retardement, on crira Monseigneur Moraut et qu'on

lui enverra les deux copies des lettres du P. Le Vacher


afin qu'il ait la bont d'en crire la cour (a).
La Compagnie du Levant les accusa aussi d'tre trop
complaisants pour les Barbaresques et de ne point saisir

immdiatement le ministre de leurs rclamations (3).


Le fait, que rapportent leurs rivaux lyonnais, car

(1) C.A., III, 403.

(2) Plaintes contre Ambrozin (1069). A. Ch. Com. M., BB. II,
712 (au recto).

(3) B'208.

1670 (A.M.).
-
138 -

c'taient eux les principaux intresss de la Compagnie


du Levant, peut bien avoir t vrai ; nous avons en effet

des lettres o la Chambre tmoigne d'une grande lar


geur d'esprit et de l'indulgence, toujours ncessaire

avec ces pirates incorrigibles. Mais dans ce cas, loin de


voir l ngligence ou timidit, nous admirerons ce tact,
cette intelligence de la politique barbaresque que notre

gouvernement fui loin d'avoir toujours la mme

poque.
Avec plus de raison, Colbert s'indignait de leur trafic
malhonnte des pices de 5 sous. Encore y aurait-il des
rserves faire sur cette condamnalion si gnrale. Les
pices o la quantit de mtal fin tait la plus rduite

avaient t apportes par les Hollandais qui eurent

l'adresse de nous faire passer pour coupables aux yeux

de leurs dupes. Puis, ce trafic ne prit jamais de grandes

proportions en Barbarie, ou du moins les Turcs ne s'en

plaignirent pas, et il tait injuste de faire porter aux

Compagnies du Bastion et du Cap Ngre, le poids d'une


tromperie laquelle elles taient restes trangres.
Mais les plus graves reproches que Colbert ou ses

agents adressent aux Marseillais visent prcisment la


Barbarie. Les Marseillais, d'aprs eux, s'enttent venir
dans les ports avec des barques longues, tandis que leg
Anglais ou les Hollandais, dans leurs gros vaisseaux

londs, emportent le double de marchandises, el avec

moiti moins de frais. Et puis, quel dsordre, quelle


ngligence dans ce commerce I Les navires partent, ds

qu'ils sonl prts, sans s'atlendre. Le dernier arriv vend

ses marchandises bas prix pour enlever au premier

sa clientle. Enfin, les corsaires en viennent bout ais

ment. Le minisire chercha bien organiser le trafic,


imposer la navigation des rgles strictes qui prvien

draient, dans sa pense, les risques de capture. Il a voulu

les obliger former des convois pour traverser la Mdi


terrane. Il a pouss la construction des grands vais-
-
139

seaux contenant eux seuls plus que cinq barques. Ces


convois devaient tre escorts par des vaisseaux de la
marine royale, et une partie des frais retombait sur les
Marseillais. Mettons qu'il
y ait eu quelque routine dans
les procds commerciaux des Marseillais, tait-ce donc
une grande faute que d'envoyer en Barbarie des barques

de faible lonnage mais rapides et capables de suivre les


besoins du march ? Colbert poussait l'imitation des Hol
landais jusqu'au point de comparer un navire qu'en

3 jours un bon vent menait Alger, aux vaisseaux

anglais et hollandais pour qui la traverse tait une lon


gue et prilleuse aventure. S'il tait vrai que la nces

sit de partir avec leur escorte leur tait l'avantage que

l'industrie et les bonnes et sres correspondances pou

vaient donner aux marchands comme le reconnaissait

Colbert (i), on ne saurait tenir rigueur aux Marseillais


d'avoir refus l'escorte. Les Marseillais pensaient que

mieux valait risquer un voyage incertain pour un gain

assur que d'entreprendre un voyage assur pour un bn


fice incertain. Ils ne demandrent des escortes que lorsque
les dangers de la navigation furent devenus trop grands,
aprs la rupture de 1687. Ils n'avaient pas tort sans

doute, puisqu'un des premiers actes de Seignelay, aprs

la mort de son pre, fut de rendre la libert aux Mar


seillais pour leur commerce, en leur recommandant

seulement de prendre quelques prcautions

En somme, nombreux sont les reproches de Colbert,


qui tombent ou qui ne concernent pas le commerce de
Barbarie. Sur un point cependant il avait vu juste, le
dsordre des consulats tait bien une des causes pro

fondes de la mauvaise situation de notre ngoce. Encore


se faisait-il des illusions sur la porte des rformes qu'il

introduisait, au Levant et en Barbarie la fois, car


distinguer l'un de l'autre il ne songeait toujours pas.

(1) Lettres, II2, p. 716.



140

Pourtant, c'est pour des rformes de ce genre surtout,


qu'une distinction tait ncessaire ; Alger et Tunis,
le consul avait rang d'ambassadeur ; sans cesse en rela

tion avec les puissances, oblig le plus souvent de deman


der comme une faveur ce qui nous tait d, il avait
faire preuve de tact el de souplesse ; il lui fallait une

fermet fire et discrte, et surtout l'art de donner.


Aucun consul du Levant n'avait si peu de ressources

et tant de charges ; un de nos agents Smyrne ou Alep


pouvait bien se contenter du cottimo de 2 %, car les
navires franais et trangers venaient nombreux dans
ces ports ; Alger ou Tunis, le consul devait avec ces

mmes ressources
qui jamais ne dpassaient 1.800

piastres Tunis
payer son chancelier, entretenir la
chapelle, assister les esclaves. Or, pour subvenir toutes
ces charges rgulires, sans compter les avanies et les
prsents exceptionnels, il avait en tout et pour tout,
le produit du cottimo , lev sur le produit des 2 ou

3 barques qui arrivaient au port chaque anne. Enfin,


la dernire ressource possible, le
trafic, tait interdit au
consulat. La Chambre de Commerce l'avait exig, obser
vant non sans raison, qu'un consul intress quelque

entreprise ne prsentait plus des garanties d'impartialit.


Bref, tout ce qui pouvait augmenter leurs revenus leur
tait interdit, tout ce qui augmentait leurs dpenses tait
leur charge. On ne leur laissait pas d'autre alterna

tive que le vol ou la ruine (1) ; d'Arvieux rsume cette

situation en expliquant Colbert les motifs de son

refus (2) : Le consulal d'Alger ne me convenait point,


pour cette raison et parce que ce qui n'tait
consulat,

(1)
Ce sont des misrables, crit Dusault Seignelay, en 1684,
qui font dshonneur la nation par les rapines qu'ils font sur
les chrtiens et le pauvre ngociant. Ils sont dans cette malheu
reuse ncessit parce que, n'y ayant que trs peu de commerce,
le casuel ne fournir leur subsistance.
saurait {Af. Relig.

et Miss, ds les Etats Barb.), A.E.


(2) D'Arvieux, V, 73.
-
141 -

d'aucun revenu, engageait ceux qui taient Alger


de grandes dpenses par les frquentes dpenses qu'il
fallait faire aux puissants du pays et par les secours qu'il

fallait donner continuellement aux esclaves qui les


patrons ne donnaient mme pas la nourriture . Colbert,
en arrivant au pouvoir, a trouv les Lazaristes propri

taires des consulats. Au point de vue financier, c'et t


une excellente affaire que de les y laisser. Mais Colbert,
pour des raisons de principes, ne tenait pas donner

ce poste des religieux. Quand il l'a pu, il l'a confi


des laques, des Marseillais. Ce n'tait pas rsoudre

la question, car les Marseillais qui achetaient la charge

de consul, prtendaient trafiquer pour leur propre

compte. Les Lazaristes n'taient pas assez entendus au

rendait pas compte. Nombreux sont les arrts du Conseil


commerce, les Marseillais l'taient trop. Colbert ne s'en

qui visent rprimer les abus dans les consulats du


Levant ; aucun ne concerne spcialement la Barbarie,
bien entendu. Chose plus grave, aucun ne songe pro

curer des ressources aux consuls ; les plaintes se suivent,


identiques, Plaintes d'Ambrozin, de Gra-
monotones.

tian, de Plastrier Tunis ; de d'Arvieux, de Le Vacher


Alger ; aucun ne reoit satisfaction. L'enqute de
Sorhainde en i685 confirma leurs affirmations. Pourtant
il fallut attendre jusqu'en 1691 pour voir Seignelay
accorder aux consuls d'Alger, de Tunis et de Tripoli un

traitement fixe peu prs suffisant pour leur permettre

de remplir leur charge avec dignit. La responsabilit

de cette longue erreur est partage. Colbert se dfia trop


du consul, et ngligea de rgler la question litigieuse
du rachat ; au fond il s'occupa
beaucoup de la Barbarie,
et il ne la connut jamais bien. Cependant, pouvait-il

prter une aveugle crance ces plaintes si elles ne lui


taient pas prsentes par la Chambre ?
Or, pas une seule fois celle-ci n'intervint en faveur
du consul. Voil ce dont elle est inexcusable. Les Mar-
142

seillais eux, savaient dans quelle triste stituation se trou


vaient leurs reprsentants. Mais les haines locales taient
trop fortes pour ne pas faire taire l'intrt gnral devant
l'intrt particulier. Le consul n'tait pas plutt en

charge que des familles rivales cherchaient le compro

mettre, le calomnier, le ruiner (i), bien heureux


encore si son retour il n'tait pas tran en justice et

mis en prison pour dettes.


Le refus de l'alliance barbaresque avait entran la
dfiance rciproque : l'intransigeance et la mauvaise

volont des deux parties, le peu de soin apport rgler

la situation de nos consuls en Barbarie avaient amen

dans l'Echelle, au sein mme de la nation, des discor


des et des abus qui en loignaient les marchands. Le
commerce Levant tait assur, le but essentiel
du de
Colbert tait atteint, mais le commerce de Barbarie res

tait languissant, et les fautes de la France prparaient

une rupture qui pouvait ruiner l'un et l'autre.

k. Le rglement de comptes (i68i-i685)

Depuis 1666 el 1672 Algriens et Tunisiens taient en

paix avec la France et dsiraient y rester. La milice

lis-
n'osait rompre avec nous, de crainte de perdre la

me qui servait de fonds pour sa paye. La France, au

contraire, inclinait la guerre ; le trait de Nimgue lui


laissait toute libert d'employer ses armes et ses flottes
o bon lui semblerait. Or, elle prouvait le besoin
bien naturel, d'accorder ses rapports avec les Barbares
ques ses rapports avec les Turcs. Sans doute la bonne

(1) Les moluments de ce consulat, crit Ambrozin Colbert


en 1674,tant modiques, ne les peuvent supporter. Les mar


chands qui trafiquent en ce pays
n'y ont jamais rien contribu.
J'ai voulu en donner part messieurs les Dputs du commerce
de Marseille, afin qu'ils y eussent gard, mais ils ont t sourds
la reprsentation que je leur ai faite. (Plantet, 286).
-

143 -

intelligence lait loin d'tre rtablie Constantinople.


Nanmoins, les Capitulations de 1673 avaient pos les
principes d'une entente galement profitable aux deux
nations, et que la France comptait bien tendre la
Barbarie comme l'Asie Mineure ou la Syrie. Elle
avait obtenu, outre les garanties contre l'arbitraire
aes pachas et les pirateries des corsaires turcs dans

l'Archipel, des privilges religieux et commerciaux. Les


Capitulations reconnaissaient les droits des religieux

latins et le protectorat qu'exerait sur eux le roi de


Ftaance ; elles abaissaient de 5 3 % les droits de douane
dans les Echelles ; enfin, elles affirmaient une fois de
plus la puissance de la F'rance en accordant la prsance

son ambassadeur el en obligeant les nations trangres


naviguer sous sa bannire. Fn Barbarie, on ne se

proccupa point de faire confirmer tous ces avantages.

Les instructions de Seignelay sont muettes sur le pr >-

tectorat tablir sur les religieux italiens ou espagnols.

Par contre, elles demandent Tunis des tarifs douaniers


plus favorables, Tripoli el Tunis des indemnits pour

les prises des annes prcdentes, Tripoli et Alger


la reddition des esclaves. Toutes stipulent des garanties

nouvelles pour le commerce et la prsance du consul.

Ainsi, l'imitation des traits conclus avec la Turquie est

frappante, sauf cette curieuse diffrence que le roi, en

i685, oublie de faire valoir ses droits au protectorat

religieux des Latins.


Quand on rapproche les traits de i685 des expdi

tions qui les ont prcds, on est tent de conclure un

chec relatif de Louis XIV. Il parait invraisemblable que

la France se soit contente, aprs une victoire, de condi

tions analogues celles de 1666. D'ailleurs, Louis XIV


n'avait-il pas annonc sa volont de dtruire Alger ? :
S. M. serait beaucoup plus touche de la gloire qu'elle

retirerait et du profit que toute la Chrtient recevrait


de la destruction entire de cette ville, que des avanta-
144

ges que l'on pourrait retirer de ces corsaires par un

trait de paix . Dsesprant de rduire les Algriens,


inquiet de l'attitude de Gnes, il aurait envoy Tour-

ville l'ordre de traiter tout prix, pour disposer de sa


Hotte contre de nouveaux ennemis. Bref, la paix de

i684-i685 aurait t dicte par les circonstances, et nous

n aurions aucune chance de retrouver dans les articles

du trait, les principes directeurs auxquels la France


s'tait enfin arrte.

L'objection est d'importance. Elle a pour elle la pres

que unanimit des contemporains ; elle semble mme

confirme par les faits. L'entente de i685 fut si prcaire

qu'il fallut une nouvelle srie de bombardements en

1688 pour mettre Alger et Tripoli la raison. Or, cette

paix de 1688, des contemporains, a pass, elle


aux yeux

aussi, pour une paix honteuse. Spanheim (1), observa


teur fidle et diplomate bien inform, a vu l une paix
qui <( ayant si peu de rapports avec la hauteur et les
traitements dont elle [la France] s'tait servie jusqu'ici
leur endroit, marque assez le besoin qu'elle avait de
mettre tout en uvre pour se soutenir du ct de la mer

et y diminuer le nombre de ses ennemis . Or, cette

paix achete par la France , a dur jusqu'en i83o.

Sans doute les paix boiteuses sont quelquefois les plus

durables. Toutefois, il est vraisemblable que, si la France


avait eu cur d'imposer la Barbarie d'autres condi

tions, elle en aurait trouv le moyen. Jamais elle ne fit


iien de tel : elle s'estimait donc satisfaite du trait de
1688, par suite du trait de i685, dont il avait reproduit

les dispositions essentielles. Les contemporains ont t


frapps par la disproportion entre les buts annoncs
grand fracas el les rsultats obtenus. Aujourd'hui encore,
nous sommes surpris du retentissement qu'eut cette

(1) Spanheim. Relation de la Coul de Fcance, p. 561 (dit. Em.


Bourgeois).

145

expdition en Europe. La publicit prit un dveloppe


ment inou : articles officieux de la Gazette, relations en

franais, en italien, en espagnol, si nombreuses que

l'historien a peine retrouver l'exactitude des faits au

milieu de tant de versions contemporaines. Cette rclame

insolite nous parat suspecte. Sans doute le roi a trs


bien pu se faire illusion sur les forces relles des Barba
resques, commander dans un mouvement de colre ou

de dpit de dtruire leur ville pour se donner la satis

faction d'affirmer sa puissance. Mais il se peut aussi que

Louis XIV ait trs adroitement organis cette rclame,


grossi l'importance de ses prparatifs et affect des airs

courroucs et intraitables, pour dissimuler l'Europe


un fait autrement grave : le refus de marcher contre les
Turcs. Vienne tait assig ; l'Empereur en fuite implo
rait le secours du roi de France, et toute l'Europe, joi
gnant sa voix celle d'Innocent XI, suppliait Louis XIV
d'intervenir. Il ne rpondit qu'en excitant les Turcs
poursuivre leurs conqutes et en cherchant obtenir la
neutralit de la Pologne. Plus tard, la nouvelle de la
victoire de Spbieski, un concert d'acclamations s'leva
dans le monde chrtien ; la France joignit ses actions

de grce celles de tous les Etats, mais le roi T. C.


n'tait plus le roi de France. Pour attnuer l'effet de
cette abstention, qui aux yeux des Croyants passait poux

un reniement, Louis XIV devait combattre ailleurs les


Infidles. Entre 1661 et 1666 l'abandon de la Croisade
avait t marqu par une reprise de la guerre en Bar
barie. De mme en i683, la guerre contre les Barbares
ques servit de prtexte pour se drober aux appels du
Pape. Le Mercure Galant, renouvelant la manuvre du
duc de Lionne, insinue que le roi T. C. avait offert des
secours l'Empereur, mais que l'aveugle haine de
Lopold les avait refuss ; alors, pour servir quand mme

la Chrtient, Louis aurait tourn ses coups vers Tripoli


et Alger. A 20 ans d'intervalle, la situation s'tait trouve
10

146

la mme, et la dcision avait t identique. Toutefois,


la France n'avait plus hsit.
Ceci explique, et les fanfaronnades de Louis XIV et

sa modration dans les traits. Dsireux de rgler une

fois pour toutes une situation mal dfinie et peu sre,


il fait la guerre, non pour dtruire les Barbaresques
a

comme il l'affirmait l'Europe, mais pour vivre dsor

mais en paix avec eux, et pour donner au commerce du


Levant tout son essor. Aussi avons-nous le droit de cher

cher dans ces traits de i685 F expression dfinitive des


principes directeurs de notre politique.

11 est clair enfin, que la France renonce dfinitivement


toute Croisade. On voit maintenant quels dsirs
secrets rpondaient les pieuses dclarations du roi. Si les
dvots peuvent s'y tromper, et prier pour le succs de
l'expdition, le roi en est ravi, c'est tout ce qu'il souhaite.
Les dvots se croient couts, et ils sont dupes. Cepen
dant quelques-uns, tout favorables qu'ils soient
Louis XIV, commencent mettre en doute sa sincrit.

Dans la fameuse apostrophe : Tu cderas ou tu tomberas


sous ce vainqueur, Alger, riche des dpouilles de la
Chrtient (i), d'une posie si image et si nombreuse,

splendide fragment de posie pique

Bossuet
chante le triomphe du roi et le glorifie d'avoir assur la
navigation des deux mers. Mais dans tout le passage

il n'y a pas un mol sur la religion du roi ; l'esprit de


Bossuet tait ailleurs ; il le montre quelques lignes plus

loin (2), l o sous couleur de reprocher la Chrtient

(1) Bossuet, uvres oratoires (Lebarg), VI, 168.


(2) Bossuet, ii., ip. 170 : Pendant, malheur I honte I
juste punition de nos pchs I Pendant, dis-je, qu'elle est rava
ge par les Infidles qui pntrent jusqu' ses
entrailles, que
tarde-t-elle se souvenir et des secours de Candie et de la
fameuse journe du Raab, o Louis renouvela dans le cur des
Infidles l'ancienne opinion .qu'ils ont des armes franaises, fata
les leur tyrannie et par des exploits inous devint le rempart
de l'Autriche dont il avait t la terreur .
147

son ingratitude, il reprsente Louis XIV le souvenir

de la fameuse journe du Raab et l'incite reprendre

son rle de vengeur de la Chrtient. Ce n est pas une

leon ; c'esl moins qu'une prire ; c'est un regard m


lancolique jet vers le pass, avec l'espoir que peut-tre,
se rappelant son ancienne gloire, Louis sera mu ; mais

dj Bossuet a le pressentiment de ce qui va s'accomplir.

Innocent XI eut le triomphe fastueux, presque insolent.


C'tait une faon de marquer Louis XIV que la Chr
tient pourrait bien se passer de lui. Tout au plus a-t-il

sans doute regrett que la France ait pris une revanche

facile en bombardant Alger. C'est un sentiment que

l'ambassadeur vnitien exprime non sans justesse :

ci Pendant que les discussions taient en suspens, on

[la France] ngligea de prendre sa part de gloire, se


contentant d'avoir rduit les Algriens avec l'ardent
llau de la bombarde (i). Quand la France eut trait
avec les Barbaresques, l'irritation des Italiens ne connut
plus de bornes : un secrtaire du futur pape Alexan
dre VIII, en 1689, livre l'excration du monde chrtien

cette alliance des Franais et des Algriens contraire


la nature, la morale, et la religion (2).

Nous avions fait, de 1666 1681, une assez longue


exprience de la paix avec les Barbaresques pour con

natre les charges imposes par l'alliance. Toutefois,


nous n'avions jamais eu jusqu'alors une conscience

nette des charges qu'elle entranait, et, soit par orgueil,

(1) Relazioni, p. 487.


Die Frantzosisch-
(2) Francesco Pianino (1689) : verdammte

Algierische Liederlich-Gott-vergessene die von Compagnie und

den Velt-bekannten ruchlosen Seeraiibevischen Algierern Shrem


Compagnon zum Andencken aufgerichtete Ehrenpyramide mit
Angehengten vielen der neusten Curieusen Begebenheiten he-
rausgegeben von F. P. gewesenem Secretario des jetzigen Pabst

Ottoboni (cit par Playfair, Bibliography of Algeria, suppl. p. 22).


Ce pamphlet trouvait dans la bibliothque d'un particulier
se

arabe, M. Boukris, mort il y a quelques annes. Il a t impos


sible de retrouver ce libelle (Commun, de M. Ren Basset).

148 -

soit par un reste d'intolrance, le roi s'tait refus


egarder comme allis ceux qui effectivement coopraient

ses desseins. La France avait trait les Barbaresques en

parents pauvres. Dsormais, elle pratiqua l'alliance avec

plus de franchise et plus de cordialit. A d'Estres, qui

lui proposait de s'emparer de la Tripolitaine, Seignelay


rpond assez schement : La prise de Tripoli n'tant
pas convenable au service de S. M., il n y a pas lieu
de penser faire aucune tentative sur cette ville (i).
La France tait mme si bien dispose envers les Bar
baresques qu'elle offrait aux Tripolitains d'tablir l'un
d'entre eux comme consul Marseille. Les Tripolitains,
qui se souciaient peu de ngoce, refusrent. Les ngo

ciants marseillais n en avaient pas moins reu satisfac

tion dans tous leurs dsirs. Les traits de i685 vont

tre aussi le point de dpart d'une politique nouvelle

qui fera servir la cause nationale les uvres de cha

rit et d'apostolat. Non que l'initiative en revienne au

gouvernement franais : sur ce point, les instructions


de Seignelay (i), comme celles de la Chambre de Com
merce (,2) taient muettes. A Alger, o l'on se contenta

de transcrire les articles du projet, la France ne fit point

reconnatre son protectorat religieux ; si, Tripoli et


Tunis, ilfut autrement, ce fut bien plutt l'uvre
en

des circonstances que l'effet de la volont du ministre.


D'Estres avait dj conclu le trait, tel que le lui avait
expdi Seignelay, quand il reut une supplique du
mineur observantin italien, prfet apostolique de Tri
poli (3). Aprs s'tre plaint de diverses avanies, le mis

sionnaire, demandait l'amiral de le recommander


M. le Consul qui resterait ici au nom de S. M. le roi T. C.
afin que cette sainte mission, et nous autres religieux

(1) A.E. Afrique, 2.


(2) A. Ch. C. M., BB, III, 788.
(3) A.E. Afrique, 2 (original en italien).
-
149

qui la servons, jouissions de la protection dudit sei

gneur . D'Estres n'avait pas d'ordres ; mais il se sou

vint de l'article des Capitulations d'aprs lequel les


religieux tablis dans les missions des pays de l'obis
sance de S. M. seront traits et considrs comme pro

pres sujets de l'Empereur de France


(i), et il obtint

que ce protectorat thorique ft tendu la rgence de


Tripoli. Le pouvoir du roi n'y gagnait rien, puisque

lout ce qui tait dans cette convention se trouvait dj


dans les Capitulations ; mais celles-ci n'avaient jamais t
reconnues formellement, ni par les Barbaresques, ni par

le Saint-Sige.
La preuve en est dans la difficult qu'avait prouve
le vicaire apostolique franais se faire obir. Le
simple fait de revenir aux conditions primitives de
l'alliance franco-turque tait donc significatif. Puis,
d'Estres laissa au consul une instruction qui ten
dait encore la protection de Louis XIV Le consul

doit secours et assistance, non seulement tous les


religieux, mais mme aux marchands trangers :

Considrant qu'il est consul pour les sujets d'un roi

T. C. et fils ande l'Eglise, qui veut bien tendre sa


protection toutes les nations qui font profession de
mme religion que la sienne... . En deux lignes,
d'Estres avait pos le principe du protectorat religieux

de la France.
Pourtant personne ne s'en douta. Seignelay approu

va, mais sans un mot qui pt faire croire qu'il avait

compris. D'Estres n'en fit pas moins passer le mme

article (2) dans le trait de Tunis. Toutefois, comme il

(1) Le texte cit par d'Estres prsente quelques diffrences


intressantes avec le texte officiel (Nointel) Nous permettons
que tous les vques dpendant de la France et les religieux
francs de quelque nation qu'ils soient... , et la version La
croix ou autres religieux qui sont sujets de la France de
...

quelque sorte qu'ils puissent tre .

(2) Plantet, art. XIX, p. 354,


150

y avait l depuis longtemps un consul en charge, il ne

lui laissa pas cette fois d'instruction spciale.

Le gouvernement franais n'avait rien prpar,


rien voulu. Faut-il donc attribuer au hasard cette inter
vention de d'Estres en faveur des religieux italiens ?
N'oublions pas que son appui avait t sollicit par le
Pre prfet lui-mme, longtemps notre ennemi. Si
ces missionnaires trangers s'taient rallis notre

cause, ce n'tait assurment pas par grande bienveil


lance pour nos consuls laques avec lesquels ils taient
en fort mauvais termes ; mais, rapprochs de nous par

l'uvre catholique des Lazaristes, charms par leur


grand cur et leur foi profonde, confiants enfin dans la
puissance d'un roi auquel les Turcs ne pouvaient rien

refuser, ils venaient se ranger d'eux-mmes sous la


bannire de France. A l'heure o, au dtriment de la
Chrtient, la France renouvelait son alliance avec les
Turcs, les dvots voyaient du moins un de leurs vux

raliss : le consul de France devenait le protecteur

du christianisme parmi les Infidles , comme l'avait


souhait Jean Le Vacher, et comme il en avait lui-mme
donn l'exemple.
-
151 -

CONCLUSION

Dans un mmoire compos pour le Cardinal de Maza


rin, la fin de 1660, le chevalier Paul justifiait ainsi

la ncessit de dtruire les corsaires barbaresques :

L'intrt de notre religion doit nous y obliger, puis

qu'ils sont ses plus grands ennemis, faisant abjurer

Jsus-Christ, par la crainte des tourments, tant de


jeunes gens qu'ils prennent tous les jours, l'intrt de
notre ngoce qu'ils divertissent et qu'ils empchent par

leurs pirateries et l'intrt de tant de misrables escla

ves, qui gmissent sous la tyrannie de ces cruels, el qui

n'ont d'autre esprance de libert qu'aux armes de


S. M. qu'ils souhaitent passionnment de voir employer

la ruine des Infidles.

Ce dernier motif, il est vrai, ne fut jamais trs puis

sant, et dans la pratique, il se confondit avec le souci

de faire clater la gloire du roi. Bapproches ici pour

justifier une dclaration de guerre, ces ncessits expli

quent ce que fut, en gnral, notre politique envers les


Etats barbaresques. A tudier dans le dtail le jeu
compliqu de nos ngociations, et cette histoire, touffue
de ruptures et de rconciliations, on imagine mal

qu'elles drivent de quelques principes simples, entre

lesquels le roi n'a pas longtemps hsit. Mais il est diffi


cile de les reconnatre, car chacun d'eux a pris une appa

rence diffrente, suivant les circonstances ou le temp


rament de ceux qui s'en inspiraient. On a vu Colbert
et Dusault, s'accordant pour subordonner tout la pros

prit du commerce, d'un avis diffrent sur la question

de la paix ou de la guerre ; inversement, des gens dont


les tendances politiques s'opposaient, se rencontraient
152

parfois pour prner les mmes mesures. Colbert rpon

dit aux vux du monde chrtien quand il provoqua la


rupture de 1681. Toutefois, cette confusion accidentelle

ne devait point troubler le choix de la France : elle avait

soigneusement distingu les principes, apprci leurs


consquences, calcul ses divers intrts, elle se dcidait
en connaissance de cause.

Louis XIV renonait la croisade parce que les


guerres saintes avaient pass de mode . Sous cette

forme dsinvolte et presque impertinente, le mot avait

beaucoup de justesse. Le roi, pas plus que les Franais,


n'tait pas fier de ses allis musulmans ; et, s'il avait t
simple gentilhomme, il serait parti en Hongrie, comme

volontaire, car il avait l'humeur fire et noble et se pi

quait de faire son devoir de chrtien. Mais, les princes

ayant depuis longtemps renonc prendre la croix ou

la faire prendre leurs peuples, Louis les imita


pour ne pas tre leur dupe. Cependant, il y avait au

fond des curs chrtiens une foi fervente qui voulait

esprer. On avait dit, pendant des sicles, que des mis


rables souffraient sous le joug des Infidles, et que
beaucoup, tents par le dmon, reniaient leur Sauveur.
Les citadins savaient qu'une arme de Turcs menaait

Vienne, et ceux-l qui n'avaient rien appris que le jubil


lu au
prne, d'une terreur superstitieuse, disaient
saisis

l'Anglus en tremblant (1). Que pouvaient leurs prires


naves,- et cette folie collective ne du rve de quelques

mystiques contre les dcisions longuement tudies des


gens instruits et prudents ? Elles ne furent pas tout
fait inutiles, puisque les guerres barbaresques eurent,
grce elles, un caractre religieux, tranger aux pre

mires intentions de notre gouvernement. Pour se dis-

(1) Originairement l'Anglus tait une prire en faveur des


chrtiens tombs sous la domination ottomane.
-
153 -

penser d'intervenir en Hongrie ou Candie, la France


engagea la lutte avec d'autres musulmans sur un ter
rain qu'elle connaissait mieux et dans des conditions

plus avantageuses pour elle. Devant le blme de l'opi


nion chrtienne, elle cdait, sa manire.

La guerre barbaresque donnait ainsi au besoin d'apos


tolat une pelite satisfaction. Quand la paix eul t signe,
et que les intentions du devinrent claires, le zle
roi

des hommes pieux s'accommoda des conditions nouvelles

qui leur taient faites. Restant ct des esclaves,


s'

puisant pour adoucir leurs souffrances, et ramener en

eux la srnit et la rsignation chrtienne, ils donnaient


un tel exemple d'amour et de foi que les Barbaresques
ne mettaient plus d'obstacle au libre exercice du culte

catholique, et que les trangers, d'eux-mmes, sollici-


laient la protection du roi de France. L'initiative de Saint
Vincent avait substitu la croisade guerrire la croisade

de la charit.

La dfense du monde chrtien tait sacrifie nos

intrts commerciaux. Vu l'incohrence de la politique

turque et l'humeur inconstante des pirates, cette suprme

concession risquait d'tre inutile. Cependant, Louis XIV


finit pas s'accorder avec les Turcs comme avec les Bar

baresques, et dans les guerres difficiles qu'il va bientt


soutenir, il trouvera en eux des allis srs, redoutables

l'Empereur et tous les Etats maritimes. Le commerce

du Levant est rtabli dans son antique splendeur, plus

considrable mme qu'il n'avait jamais t (i). Les


voyageurs des Echelles n'ont plus rien craindre des
Barbaresques ; Alger, Tunis, Tripoli sont des escales

hospitalires o nos marins trouvent de quoi rparer

leurs avaries, en cas de tempte ; des victuailles et des


rafrachissements .

Relation d'un ogage au Levant (1700), p.


(1) Tournefort,
-
154 -

Le commerce de Barbarie n'avait jamais t trs flo


rissant jusqu'alors : quelques barques visitaient ces

chelles peu sres, troubles par les guerres civiles, o

les avanies taient toujours possibles, les confiscations


presque continuelles. L'abaissement des tarifs de douane

rendit confiance nos marchands, et la tranquillit une

fois revenue dans le pays, on voit les Marseillais frquen


ter ces ports, el reprendre un ngoce que les Juifs
avaient jusqu'alors accapar. Mais ce furent surtout les
compagnies du Bastion et du Cap Ngre qui bnfi
cirent du rtablissement de la paix : bientt elles for
meront cette compagnie d'Afrique, dont on a pu dire
sans exagration, qu'elle tait la seule des compagnies

de l'ancien Rgime qui ait eu du succs et qui n'ait

jamais suscit de plaintes (i). Les bls durs de Bar


barie sauveront maintes fois de la famine le Languedoc
et la Provence, le corail pch au Bastion de France
donnera ces colliers et ces bracelets dont tout l'Orient
sera bientt rempli ; les ponges, le chagrin ou les plu

mes, travaills Marseille ou rexports bruts, font de


cette ville le grand entrept mditerranen, le vrai mar

ch de la Barbarie. Enfin, le rve de Dusault est ralis :

les Franais en paix avec les Barbaresques, qu'ils soient

de Sal, d'Alger, de Tunis ou de Tripoli, sont les seuls


dont les navires offrent aux trangers quelques garan-
lies. Les Anglais et les Hollandais sont dans l'alternative,
ou bien d'entretenir de ruineuses escortes, ou bien
d'emprunter les btiments franais pour le transport

de leurs marchandises ; et, de toutes faons, les sujets

du Boi y trouvent des avantages considrables . D'au-


Ire part, comme le roi est alli de la Rpublique de

\enise, les Franais sont les seuls pouvoir faire le


commerce des Turcs sans tre inquits des corsaires

vnitiens el nos navires sont, encore le refuge de tous les

(!) H. Hauser, Reo. Hist., tome 85, p. 352.


155

plerins musulmans. Amis des chrtiens et des Turcs,


nous forcions les uns et les autres s'embarquer dans
nos vaisseaux : nos armateurs avaient chance de deve
nir les voituriers de toutes les nations .

Sans doute les effets de la paix n'apparurent pas tout


de suite : mais le roi avait une satisfaction immdiate,
qui plus que tous les autres avantages, devait sceller sa

rconciliation avec les Barbaresques (i). Il les avait vus

soumis sa volont : ceux qui jamais ne s'taient inclins


devant un prince chrtien lui avaient demand par

don , Louis avait vaincu Charles-Quinl. Tout ce qu'il

accordait aux Barbaresques, c'tait, semblait-il, gnro

sit de la part. Les esclaves turcs qu'il consentait


renvoyer iraient publier sa magnificence et semer dans
le cur de leurs enfants une profonde vnration pour

ses vertus incomparables (2).


Cette fois, l'emphase orientale ne trompait point, el

Louis XIV pouvait couter avec complaisance l'hymne


que les ennemis vaincus entonnaient sa gloire.

A cette heure triomphale, o l'Europe recevait ses lois,


o tout resplendit de sa puissance et clbre la grandeur

du rgne, c'est encore la Mditerrane qui lui offre les


preuves les plus relles de sa force et de son prestige.

Des vaisseaux de haut bord, splendides et bien arms,


croisent en permanence loin des ctes ; des galres,
jouets de luxe, promnent par les temps calmes les

esclaves turcs courbs, haletants, reints, mais dociles


au sifflet du garde-chiourme, vivante image de la toute
puissance du roi.
Moins somptueux, lourds de richesses, les vaisseaux

marchands reviennent des Echelles chargs de lapis,


d'alun ou d'encens. Un grand vent d'esprance et de

(1) Citations extraites passim de la correspondance de Lacroix


avec C. de Croissy et Seignelay (28 mars, 29 juin 1685, B' 210).

;2) Plantet, I, 91.



156 -

prosprit gonfle leurs voiles, et les ramne heureuse-


meint au port. La mer est pacifie, les pirates convain
cus de notre force, les trangers obligs de se rclamer

du Roi (i) pour sortir d'esclavage. La France ct la Bar


barie sont enfin dcides observer les traits. 11 faut
terminer une affaire qui, vraisemblablement sera finie
pendant longtemps, et les Tripolitains font graver ces

mots sur une plaque de marbre : Maudit soit de Dieu


celui qui rompra avec la France (2).
En signant la paix, la France renonait pour toujours
la croisade ; mais elle avait satisfait l'orgueil le plus

exigeant et les consciences les plus scrupuleuses. N'tait-

ce point en somme, la conscration de notre politique

que cette harmonie des intrts enfin ralise, cette pn

tration de tout un monde par la civilisation franaise,


et cet cho d'admiration que trouveront, dsormais, nos

victoires !

Le 21 novembre 1660, Nani, charg par la Rpublique


de Venise, de solliciter la France en faveur de Candie,
et de provoquer une rupture entre le Roi et le Grand

Seigneur, rendait compte de sa mission : Ds la pre

mire audience, que le Cardinal me donna, dit-il, j'ai


pu observer qu'il y avait dans le cur des Franais des
principes assez tablis, qui ne laissent place aucune

esprance. L'ambassadeur de la chrtient ne s'tait

point tromp.
R. CAPOT-BEY

(1) Cf. Dangeau, I, 107 : Les Algriens avaient rendu beau


coup d'esclaves chrtiens de toutes les nations, qui ils donnent
\a libert en considration du roi. Parmi ces esclaves, il
y avait
quelques Anglais, qui souteuaient qu'on ne leur rendait la libert
que par la crainte que les Algriens avaient du roi leur matre.

D'Anfreville, les a fait remettre bord et les Algriens les ont sur
l'heure mis aux galres.
(B7
(2) A. M. 210).
is:

SOURCES

i. Archives du Ministre des Affaires Etrangres (A.E.) :

Afrique, 2,8.

Alger, 1,2.
Turquie, 1,28.
Rome, ai.
Affaires religieuses et Missions dans les Etats
Barbaresques.

2. Archives du Ministre de la Marine (actuellement aux

Archives Nationales) (A. M.) :


B3
Sries (Lettres reues) : 14,4.
B'1

(Campagnes): 2, 3. 4-9-
B5

(Armements) : 1.
B6

(Galres) : 77.
B7

(Commerce et consulats) : 49, 56, 2o5,
208, 210, 5ao.

3. Archives de la Chambre de Commerce de Marseille (copies


dues l'obligeance de MM. Palanque et Wanner) (A. C.
Com. Mars.) :

Sries AA.

BB.

4 Archives de la Congrgation de la Mission (A. Mis.) :

Originaux des lettres des consuls lazaristes et

photographies de celles qui se trouvent la


Maison de Turin.

5. Archives de la Congrgation de la Propagande (copies)


(P.P-):
Sries Acta.

Lettres (Africa).

158

RECUEILS DE DOCUMENTS

i*1

Collection de Documents indits sur l'histoire de France :

Ngociations de la France dans le Char-


Levant, par

rire (i848-i85o), 4.

Lettres du Cardinal Mazarin pendant son ministre,
par Chruel (1872-1890), 4 ; par d'Avenel (i8g3-
4
i894),

Correspondance administrative sous Louis XIV, par
4
Depping (i85o-i855),
a"

Collections diverses :

Lettres, instructions et mmoires de Colbert, par P. Cl


ment (1868-1871).

Mmoires de Louis XIV (dition Dreyss).



uvres de Louis XIV (dition Wurtz).

Lettres de Saint Vincent de Paul (dition Pillet et Du
moulin), 1880 (1).


Avis et Confrences Spirituelles (dition Pillet et Du
moulin), 1881.


Recueil des Circulaires des Suprieurs Gnraux de la
Mission.

Mmoires de la Congrgation de Ja Mission.



Collectanea constitutionum, decretorum, indultorum ac

instructionum S. S. ad usum operariorum Apostolico-

rum, 1880, 4-

Juris Pontifici De propaganda fide, 1898,
4

Correspondace des deys d'Alger avec la cour de France


8
(Plantet), 1889,

(1) Quelques lettres, retrouves rcemment par M. Coste, bi


bliothcaire de la Maison des Lazaristes, et qui nous ont t bien
aimablement communiques, sont indiques avec le numro
qu'elles porteront dans l'dition prpare ipar M. Coste.
-
159 -

Correspondance des beys de Tunis et des consuls de


France avec la cour (Plantet), i8<j3-4, 8

Relacioni degli Ambascadiori Veneziani (d. Baraillet


8
Berchre). Venise,

Mmoriaux du Conseil de ibtii (Boislisle).

Paris,
8

Recueil des Instructions aux Ambassadeurs de Rome


8
(Hanotaux).

Paris,
Annales de la Compagnie du Saint-Sacrement (Dom
8
Beauchet Filleau). Marseille,

Actes de la Compagnie du Saint-Sacrement de Marseille


8
(R. Allier).

Paris,

LIVRES DE L'POQUE

Recueil historique contenant plusieurs pices curieuses de ce

temps.
12"

Cologne, 1666,

Abelly.
Vie de Saint Vincent de Paul (nouvelle dition).

Paris, 1891, 8.

Arvieux (d').
Mmoires (d. Labat).

Paris, 17^0,
12

Brisacier.
Discours funbre sur la duchesse d Aiguillon.
4

Paris, 1675,

Chardin.

Voyage en Perse et autres lieux de l'Orient.

Paris,
12"

1723,
(2*
Dan.
Histoire des corsaires de Barbarie dition).

Paris,
70

1746,

Dangeau.
Journal (dition Feuillet de Conches.

Paris,
8
i854,

Egreville (P.).
La vive foi.

Paris, i644,
120

Febvre.
L'tat prsent de la Turquie.

Paris, 1673.
<S

4
Thtre de la Turquie.

Paris, 1682,

Forbonnais.
Recherches et considrations sur les finances.

Baie, 1730, 4.
8
Hrault.
Les triomphes de la charit.

Paris, i643,
- 160 -

Leibnitz. uvres (T. V.



: Projet d'expdition d'Egypte)
(d. Foucher de Careil).

Paris, i864, 8.
Lucas.

Voyages.

Rouen, 1724, 120.

Lacroix.
Mmoires.

Paris, 1684,
180

Ormesson (d').
Journal (collection des documents de l'His
toire de France).
8
Patin.
Lettres (d. Rveill Parise).

Paris, 1846,

Svign. Lettres (d. Monmerqu). Paris, 1862, 8.


Thvenot.
Relation des voyages (i655-i688) faits au Levant.
4
Paris, 1664-
1684,

OUVRAGES CONSULTS

Vllier.
La Cabale les dvots. Paris, igo3,

12

(Livre trs riche, intressant, trs ingnieux, parfois

un peu trop).

llcnnassieux.
Les Grandes Compagnies de commerce.

Paris, 1892, 8.
(Trs gnral et forcment superficiel sur les Compa
gnies de Barbarie).

Loutin.
Les traits de paix et de commerce de la France
avec la Barbarie. Paris, 1902, 8.

(Superficiel, ngliger).

( :lment.
Vie et administration de Colbert.

Paris,
8
1846,
(Rsum commode des Lettres et Instructions).
8
Collet.

Vie de Saint Vincent de Paul.

Paris, 1818,
(Plus complet qu'Abelly).

Coste.
Bulletin de Littrature religieuse de Toulouse.

Toulouse, novembre 1917.

(Bonne du livre de M. Allier


rfutation et des arti

cles de M. Rebelliau).
-
161 -

Grin.

Louis XIV et le Saint-Sige.

Paris, 1894, 8.
(Trs ultramontain, mais utile).

Gieizes.

Jean Le Vacher.

Paris, 1914, 8.
(Consciencieux et assez impartial : la partie sur le
consul est un peu terne).

Grammont.
Les relations de la France et de la Rgence
XVIIe
d'Alger au sicle.

Alger, 8.
(Intressant, mais injuste pour les consuls lazaristes).
Helycl.

Histoire des ordres religieux.

Paris, 1714-1721,
S vol., 4.

Jal.
Abraham Duquesne-

Paris, i883, 8.
(Confus, mais trs riche, sr, trs utile consulter).

Rhler.

Die orientalische Politik Ldwigs XIV.

Leipzig,
8
1907,
(Rsum clair et exact).

La Cour Gayet.
La marine militaire de la France sous
8
Louis XIII et Louis XIV.

Paris, 191 1,
(Pas original).

La Roncire.
Histoire de la marine franaise.

Paris,
1908, 8.
(Trs riche en faits ; mais confus).

La Roncire. Le bombardement d'Alger



en i683 (Bulletin
de la Socit de Gographie, 1916).

Martino.
L'Orient dans la littrature franaise.

Paris,
8
1906,
(Faible, au moins pour la partie qui nous intresse).

Masson.
Histoire du commerce franais dans le Levant
XVIIe 8
au sicle.

Paris, 1908,
(Excellent).

Maynard.
Histoire des tablissements franais dans les
8
Etats Barbaresques.

Paris, 1903,
(Trs nourri, mais d'une lecture bien malaise).

Maynard.
Vie de Saint Vincent de Paul.

Paris.
8
Michaud.
Louis XIV et Innocent XI.
Paris, 1882,

(Renferme des documents intressants, mais prsen


ts sous un jour trs dfavorable au pape.

Il
-
162

Misermont.
Jean Le Vacher (Etudes pour le procs de bati
fication).
(A consult les mmes sources que Gleizes et n'arrive

pas, malgr ses prtentions, faire uvre ori

ginale) .

Rbelliau.

Articles de la Revue des Deux-Mondes, igo3

4, 1908 4").

Revue Africaine.
Articles divers de Devoulx, Grammont,
Berbrugger.
(En gnral sans grand intrt).

Simart.

V. plus loin.

Spont.
Les Franais Tunis (Revue des Quest. Hist., jan
vier 1900).

(Superficiel, quelques jugements absurdes sur la


politique franaise, p. ex. page 104). Toutefois a

aperu seul le rle politique des Lazaristes.

Tramond.
Manuel d'Histoire Maritime de la France.

8
Paris, 1916,

Vandal. Compte rendu des sances et travaux de l'Aca


dmie des Sciences Morales et Politiques (t. i3o et i3i,


1888-
1889).

Bien qu'ils lassent d'une histoire gnrale de lu France,


partie

nous ne pouvons dispenser de citer les deux volu


nous

mes de M. Lavisse et 72, dont les chapitres sur Col


71

bert sont dfinitifs. La sret de la mthode et la beaut


simple du style, si vocatrice de cette poque, en font le

chef-d'uvre de l'histoire franaise.

Simanes.

L'uvre de Saint Vincent de Paul Marseille.

8
Marseille, 1911,

Deslandres.

L'ordre franais des Trinitaires.

Toulouse,
igo3, 8.

Deslandres.

L'Eglise el la Rdemption des captifs.

Paris,
120

1901,
(Vulgarisation. Des erreurs manifestes).
163

BIBLIOGRAPHIE

Playfair.
The bibliography of the Barbary Stales. Part
i.

Tripoli and Cyraneca State. Londres, 188g, 8.


Part 2. Algeria from Charles V, 1541-1887.

Londres,
1887, 8, and supplment to i8g5 (8g8).
8"
Ashbee.
A bibliography of Tunisia.

Londres, 188g,

Rouard de Cad.
Bibliographie des ouvrages relatifs la
XVIIe IIIe
Barbarie aux et X I sicles.

Paris, igi3,
120

(Trs incomplet).

**

Cette tude fut prsente en


1919 comme Mmoire
pour le diplme d'tudes suprieures d'histoire et de
gographie. Son auteur ne l'a pas relue depuis. 11 a ac

cept de la publier la demande de son collgue et ami

Ch. A. Julien qui a bien voulu assurer la rvision du


manuscrit, le faisant ainsi bnficier de sa prcieuse

connaissance de l'Afrique.

**

ERRATUM.
La Compagnie de la Nacelle de Sainl-

Pierre fleurdelyse, prsente au cours du travail comme

une Compagnie marseillaise, tait en ralit une Com


pagnie bretonne.
LE CALENDRIER FOLKLORIQUE

Chapitre IX

LE SAMEDI

Mose ayant enjoint aux Banou Isral de rserver un jour


dans la semaine l'adoration d'Allah, ils se refusrent
accepter un autre jour que le samedi : C'est le jour o

Dieu, ayant cess la cration, s'est repos , dirent-ils.


Que la maldiction divine tombe sur eux ! C'est un blas
phme de prter un sentiment de fatigue la Toute-Puis
sance d'Allah. Le mot sebt, qui est le nom du samedi,
ne veut pas dire ici repos de Dieu, d'aprs les musulmans.

(Les journaux, ig3o).

11 se prsente plutt avec le sens de sommeil, comme il


est dit dans le BadaV ezzohour du cheikh Ibn Aias (p. 5o-
5i). Chass du Paradis, Adam descendit sur la terre, et

Dieu lui envoya le sommeil el il dormit. En mme temps,


Dieu envoya le sommeil tout ce qui se trouvait sur la
terre : animaux domestiques et sauvages, oiseaux et

tres dous du souffle. Or, le sommeil tait chose incon


nue jusque-l. C'est pourquoi ce jour fut nomm le jour
du sommeil (ioum essebt).

A ct de cette lgende, rpandue Blida par les lec


tures des veilles du ramadan dans les cafs maures, on en
-

165 -

racontait une autre que nous retrouvons consigne dans


un manuscrit connu dans le pays sous le nom de Ques
tions poses au Prophte par le juif Chemaoul . Le
samedi aurait t appel sebt parce que ce fut ce jour-l
que deux anges furent attachs chaque crature, l'un
sa droite tenant des bonnes actions, l'autre sa
registre

gauche inscrivant les mauvaises . Le Prophte s'en serait


port garant. Les oulmas ont expliqu plus tard
que ces anges se tiennent entre les paules, que leur
calame est la langue de celui qu'ils surveillent, leur encre

sa salive et leur tablette son cur . Ce thme dcoulerait


d'une troisime acception du mol sebt pris comme divi
sion du temps et se raccorderait la croyance, que nous

avons signale dans notre chapitre du Vendredi, d'aprs


laquelle le Prophte passe chaque vendredi la revue des
actions de ses adhrents et clt la semaine en contrlant
leur conduite, de sorte que les secrtaires clestes com

mencent le samedi un nouveau bilan.


Le dictionnaire attribue la racine sebt une autre signi

fication, celle de dcollation, qui .sans doute a donn


lgende, la la
une"

naissance quatrime plus populaire et

plus bizarre. La clbration du sabbat chez les Juifs com

mmorerait l'extermination de leur peuple et sa reconsti

tution miraculeuse. Dans une expdition contre les Isra

lites, Ali ben Abi Taleb, le gendre du Prophte, avait mas

sacr jusqu'au dernier des reprsentants de leur sexe mle.

Le soir venu les femmes des douze tribus vinrent supplier

Mahomet de ne pas tolrer la disparition complte de leur


race. L'envoy d'Allah les prit en piti. Il pria Dieu de
rendre pour quelques heures la vie tous les morts enne

mis et il autorisa leurs femmes se rpandre la nuit durant


sur le champ de bataille.
LTn pome plurisculaire du vieux Bou Letbaq se chan-

t.ail tous les carrefours des villes l'poque des mouve

ments antijuifs sur ce sujet. Leurs femmes, vtues des


grossiers tissus en laine et en poil de chvre avec les-
-
166 -

quels on fait les tentes, vinrent trouver le Matre du


Livre et lui dirent : O la plus parfaite des cratures,

nos hommes s'en sont alls ; il n'en reste pas un pour

souffler le feu du foyer.


Mahomet leur dit : Eloi
gnez-vous de moi ! Que celle qui reconnat son mari

s'approche de lui, du ct gauche ! ... Elles conurent

grce la piti du Pre de Rokia (Mahomet). Elles mirent

au monde cette race de tratres, ces fils de charognes !

Ces vnements s'taient passs le samedi ; c'est pour

cela que les Juifs chment ce jour-l ; et c'est en sou

venir du mme fait lenu pour historique qu'on les


appelle Oulad djifa ou Enfants des cadavres.

Si l'on en croyait Qazouni (Adjaib lmehhlouql)


les Arabes considraient le samedi comme un jour faste,
pour se diffrencier des Isralites et se conformer au

conseil du Prophte qui leur a recommand de vaquer


leurs occupations le samedi, le dclarant mme favorable.
<( Bnie pour mon peuple est l'aube du samedi comme

celle du jeudi ! Cependant cet auteur notait la croyance

qu'un palmier plant le samedi ne portait pas de fruit.


Dans la Mettidja, ce jour est nfaste. Nous avons vu que
la mort du samedi, la mort juive, est redoute. Une
femme n aimerait pas se prtendre fconde dans la
nuit du vendredi au samedi. Des hommes superstitieux

craindraient que l'enfant ne naqut difforme. On vite


avec soin ce jour nfaste pour l'accomplissement des
crmonies principales du mariage : il ne peut tre
choisi pour la fatha ou contrat, ni pour l'entre dans la
chambre nuptiale. A Cherchell, on explique par un

dicton cette interdiction du samedi : La marie du


samedi (la femme qui se rveille nouvelle marie le sa

medi) se colle aux gens comme la poix. On entend

par l qu'elle prend du fait qu'elle commence sa vie de


marie le jour des juifs un caractre chicanier et. irr
ductible, s'enttant dans la discussion el s'acharnanl

contre ses adversaires la faon des Juifs. Les bdouins



167

des environs de Boufarik, les Bni Khalil, raillent les


femmes qui font la lessive un samedi, prtendant que

leurs enfants seront des chenapans ou ahramin, des


coquins comme les Juifs . Dans un rcit en vers de la
conqute d'Alger (Cf. Entre des Franais Alger, Re
vue Africaine, iq3i) un pote de l'poque notait que la
bataille qui a ouvert les portes de celte ville l'tranger
avait eu lieu le samedi, jour nfaste pour les Musul
mans . Enfin, malgr l'orthodoxie qui veut voir dans
le vendredi le premier le dernier jour du monde, un
et

trs grand nombre de Mettidjiens, adoptant le systme


juif, croient que la fin du monde arrivera un samedi :

Alger, notamment, on dfend aux enfants de courir

dans les rues le samedi dans l'aprs-midi parce qu'ils

pourraient rencontrer le Dedjdjal , c'est -dire l'Ant


christ.

Le caractre nfaste du samedi influe sur l'humeur


des gens et non pas seulement sur leurs actions ou le
cours des vnements. Particulirement, il rend lugu
bres ceux qui le clbrent comme leur jour de fte. Les
Juifs ruminent-ils ce jour-l le souvenir macabre de
leur rsurrection ou bien l'amertume de la rprobation

universelle ou bien les remords de leur mcrance ?


Toujours est-il qu'on les prtend plongs dans la tris
tesse. Quand un joyeux compagnon perd soudain son

entrain et montre de la mlancolie, on dit couram

ment : " le samedi est descendu, s'est abattu sur lui !

D'un temprament morose, d'un esprit pessimiste, d'un


maniaque misanthrope on juge qu'il sabbatise tous les

jours : on veut dire que chaque jour de la semaine est

pour lui aussi sombre que le samedi pour les Juifs. Et


toute l'humanit, quelque confession qu'elle appar

tienne, et, pour tre plus exact, la nature entire ressent

l'impression accablante qu'exerce le samedi. On entend

les indignes parlant d'une journe pnible soit cause

de la temprature, soit cause de proccupations mo-


168

raies, la peindre d'un mot : C'est un vrai samedi I

A les en croire, ce jour ramnerait priodiquement une

sorte de mlancolie, d'oppression ou d'inquitude mys

de l'me lkh-
tique qu'ils nomment serrement diq
ler , comparable, dans l'ordre physique, l'angoisse
que les animaux prouvent avant la tempte de sirocco

ou les tremblements de terre.


Pour les femmes, sabbatiser veut dire surtout se

taire ; le silence est le grand chmage et la discrtion


est une qualit juive : quand nous disons d'une per

sonne qu'elle est le tombeau des secrets, elles disent :

C'est l'arche du tabernacle d'Isral qui ne laisse rien

s'parpiller de ce qu'on lui confie ! Le samedi sera le


jour du mutisme. La sorcellerie masculine a d'ailleurs
accueilli cette superstition. Voulez- nouer les
vous

langues, autrement dit empcher une msaventure de


s'bruiter ou une mdisance de courir, portez sur vous

un carr magique, dont vous trouverez le modle dans

Ibn Elhadjdj, Chomous lanouar, p. 88, et qui aura

t trac un samedi, l'heure de Saturne . Comme


le dit l'inscription qui l'accompagne, tire du Coran :

Les langues se trouveront enchanes comme l'a t


le ciel pour ne pas qu'il tombe sur la terre. Dans le
gynce, la premire vertu est de savoir garder un

secret On l'enseigne facilement la fille ; mais les


lgendes ne suffisent pas pour l'inculquer au garon ;

il y faut des rites magiques. A l'ge donc o il com


mence parler, quittant les bras de sa nourrice pour les

genoux de son pre, et vivant des deux cts du rideau

qui spare les sexes, il devient un chitan, un dmon :

nous dirions un enfant terrible, dont la parole nave

peut amener des querelles, sinon des drames domes


tiques. C'esl pourquoi, un samedi matin, alors qu'il

dort encore par terre dans son mose, sa mre l'en


jambe trois fois ; elle recommencera l'opration Irois
samedis de suite ; et, chaque fois, elle formule nette-
169

ment dans son esprit, sa volont qu'il ne devienne pas

un rapporteur dvoilant les secrets du harem, ni plus

tard, un dlateur vendant .ses coreligionnaires.

Il est difficile d'tablir les associations d'ides qui

unissent les pratiques de sorcellerie au jour o on les


recommande. Il est probable qu elles varient avec les
individus. Nous rangeons ici quelques oprations notes

Blida, d'aprs le but qu'elles cherchaient, sans essayer

de dmler la convenance temporelle qui les rattachait

au samedi.

Pour deviner l'avenir. Le petit pt de sel Qrii l-

mclh.

Il est ptri par une lille vierge dans la nuit

(veille) du samedi ou celle du mercredi. On l'appelle


aussi le petit pt du bonheur Qrit es'ad, parce que,

grce lui, la jeune lille ou la femme sans mari voienl


en rve leur bonheur, c'est--dire leur futur, ou, loul
au moins, apprennent si leur mariage est proche ou

lointain. L'intresse le ptrit elle-mme sur sa cuisse

droite et le compose d'un peu de farine el de beaucoup


de sel ; elle ne doit pas le passer au feu. Elle le glisse

sous son oreiller en formant le ferme propos de pro

voquer un rve qui lui rvlera son avenir.

De nombreux Blidens ont recours aux caries pour

provoquer des rves qui les renseignent sur un absent.

On emprunte, le vendredi, une cartomancienne de


profession ou tout au moins une femme qui ne laisse
pas chmer ses cartes, un jeu usag ; il est bon qu'il

soif entran et tenu en forme par l'exercice. Les plus

estims sentent l'alcool et sont dforms et gondols


force d'avoir t saouls d'anisette, car on croit que les
cartes parlent d'autant mieux qu'elle? ont t plus

gnreusement grises. La nuit venue (nuit du ven-


170

dredi au samedi), on les fumige de benjoin et de "oud


el qomari (bois d'alos) ; et le consultant les couche

sous son oreiller, prs de sa tte. 11 faut glisser entre

les cartes un grain de gros sel, faute de quoi, au rveil,

on ne se souviendrait plus de ce que l'on aurait appris

en songe. Le lendemain il est non moins obligatoire de


rendre les cartes avec 6 sous la prteuse. Les vieilles

cartes sont les meilleures parce que, dit-on, elles sont

plus compltement possdes par les gnies . D'au


tres disent que les cartes sont des gnies, d'autres enfin

prtendent que les cartes des cartomanciennes sont

sataniques, c'est--dire en relation intime avec le


dmon. Cette rputation quivoque ne les empche nul

lement d'tre consultes de la faon que nous avons dite


non seulement par de pauvres femmes de tirailleurs,
mais mme par des tolba u porteurs des soixante hizb
(ht Coran , voire des fonctionnaires attachs aux mos

ques qui sont en majorit d'accord pour affirmer que

ce sont les gnies qui parlent celui qui fait coucher

les caries sous sa lle, et que ce.s gnies parlent le samedi

parce qu'ils sont juifs.

Pour attirer un homme qui est absenl du pays ou

qui se drobe, l'amoureuse guette le moment o la pre

mire toile se montre au ciel, la veille du samedi ; elle


brle du poivre et de la coriandre el prononce cette

formulette :
Salut, toile du soir, qui fais un bateau
dans le ciel,

et qui dans la mer fais un carrousel,


allume le cceur d'un Tel fils d'une Telle,

comme le
feu brle le bois. On rple sept fois ces mots en jetant
aillant de fois une pince des aromates susdits dans la
braise.
On emploie de la mme faon le garou (la thymle
de Pline, laurier de Cnide de Linn). Bonne soire,
Elle/.zz (garou). Les gens l'appellent ellezzz, moi je
l'appelle le gnie secoureur (el Djenn elhazzz). Quand
un oiseau verl s'est perch sur loi,

tu as couru
171

aprs lui sans jambes,

tu l'as saisi sans mains,

tu
l'as gorg sans couteau,

tu l'as plum sans ongles,

tu l'as cuit sans feu,

lu l'as mch sans dents,

tu
l'as aval sans langue.

Je veux que tu fasses entrer

l'amour de ma personne dans le cur d'un Tel, fils d'une


Telle.

Tu lui feras tomber la chair, lu lui bri


seras les o,s.

Tu feras entrer l'amour de ma personne

dans son cur comme la mort entre chez les musul

mans.

O mon Dieu, donne-moi de le matriser,

comme ses paupires matrisent ses yeux,


comme ses

lvres matrisent et dominent ses dents,

comme ses

genoux matrisent et dominent ses pieds.

Par la ba
raka (vertu mystique) du samedi, el des bls qui vont

poussant, ee que j'ai dil devant Allah est ratifi. Par


la puissance de Lalla Tekfa,

ce que j'ai dit devant


Allah s'accomplira.

Ligature dans le couteau de poche (ErbaV felmous).

C'est une pratique trs rpandue dans toute l'Afrique


du Nord. Elle y passe pour fort efficace. Quand on ne
l'emploie pas contre un jeune mari, lequel se trouve
par sa situation mme dans un tat de vulnrabilit

particulier, il faut choisir un samedi ou un mercredi.

Telle est, du moins Blida, la thorie. Avant donc la


chute du jour prcdent, aux approches du coucher du
soleil, un adolescent non encore en ge de se marier.

se rend dans une boutique tourne vers le Sud, y


achte un couteau fermant et le paye, sans marchander,

le prix qu'on lui en demande. Il le remet une sorcire

de profession ou l'intresse elle-mme, si elle en sail

la formulette, que voici : Bonjour, couteau,



cou

teau, matre des hommes,


toi que ne peut repous

ser ni la binette ni la pioche,



il s'agit de m'ter ce

souci.

au nom du Prophte, seigneur des hommes.

Rien ne servira contre toi, ni les talebs, ni les bakim.


ni les gardiens.

Elle prononce sept fois ces paroles

sur lui, en ouvrant chaque fois le couteau au dbut


-
172

et en le fermant la fin. Elle nomme l'homme et la


mre de cet homme en refermant le couteau. Cette

nuit-l, celui-ci doit se trouver tout ouvert sous le ma

telas, en travers du
lit, l'endroit o l'homme pose son

liane. Le lendemain, quand l'homme va sortir, elle pro

nonce la formulette et y ajoute : Je t'adjure, Allah,


de glacer sa nefs (sa force gn.sique) pour les autres ,

el elle referme le couteau. Pendant sept nuits, elle opre

de mme. Dans la nuit, veille du samedi (ou veille du


mercredi plus rarement), elle jette le couteau ferm
dans un puits. On assure que cet homme est dsormais
de glace pour les autres amours aussi longtemps que le
couteau reste dans l'eau froide du puits.

Pour teindre un amour violent dans le cur d'un

amoureux ou d'une aman le, on fera chauffer blanc


une hache ou une binette sur lesquelles l'crivain pu

blic aura crit la sourate Iasin, qui se rcite aux enter

rements. On plonge l'instrument dans de l'eau que l'on


fait boire la personne que l'on veut gurir de sa pas

sion en exprimant ce vu : Que son cur se refroi

disse comme ce fer I Il faut choisir un samedi pour que

le charme agisse. Le fer refroidi doit passer la nuit la


belle toile pour que le cur amoureux soit dfinitive
ment teint.
La femme qui trouve son mari trop dur avec elle et

\eut le rendre plus indulgent, coupe la pointe d'un


pain de sucre, l'enveloppe dans un chiffon et lui fait
passer la nuit du vendredi au samedi in pudendis suis.

Le lendemain matin elle le fait absorber dans son caf

au brutal, qui, ainsi sucr, se montrera d'humeur plus

trailable.
Une autre mauresque, dont le mari est trop mfiant
son gr, se lve de bonne heure un samedi pour uriner.

Elle recueille dans une tasse la premire goutte et U,


dernire de sa miction et les serl au jaloux dans son

djeuner du matin ; elle marmotte, pendant qu'il les


-
173 -

boit, l'incantation suivante Je t'ai fait boire la tte


et le fond de l'urine : tu n accueilleras sur moi lavis
ni du fou ni de la folle ! Celle-l est inquite ; elle

est mle quelque intrigue galante : aprs ce traite

ment, l'homme ne prtera l'oreille aucune insinuation


ni dnonciation.
La femme strile cherche un nid de gupes maon

nes, elle l'arrache un samedi, en dlaye l'argile dans sa

boisson et l'absorbe. Si les deux poux peuvent tre


souponns d'impuissance, ils guettent un samedi une

poule noire, prennent l'uf qu'elle pond ce jour-l, le


font cuire et, quand il est dur, l'pluchent et crivent
sur l'albumen ma, l l l l q
: q. Chacun des deux
poux en mange la moiti.

Une jeune fille souffrait depuis longtemps d'un bou


ton qui s'invtrait, de ceux que l'on appelle des
khl'
peurs a. On prit la queue d'une peau de mou

ton provenant de la victime immole le jour de l'Ad ;

on y enveloppa une petite quantit de henn en pte el

on la porta sur la terrasse o elle dut passer la belle


toile la nuit du vendredi au samedi. Le lendemain ma

tin, on assna, sur la nuque de la malade, sept coups

de celte queue manie la faon d'une masse. Le


geste, dit-on, suffisait aprs un premier coup effective

ment donn.
Un homme ayanl eu un saisissement (khol'a) en

garde des palpitations de cur. Pour le soigner, on

achte du fenu-grec avant le lever du soleil un vendredi;

on enferme celte plante dans une tasse en terre vernis

se de couleur verte ; on confie ce vase au muezzin qui


le dissimule sous le tapis de la mosque devant le pre

mier rang des fidles, de manire ee que l'on fasse


sur la plante la prire commune du vendredi. On lui
fait passer la nuit du vendredi au samedi sur la terrasse
et on la fait manger au cardiaque.

L'absinthe, avant la guerre, l'anisette depuis, le kif


-
174 -

autrefois comme aujourd'hui, sont appels des gnies,


ou plutt des dames-gnies. Les mres et les pouses
leur disputent leurs enfants et leurs maris comme elles

le font des matresses dmoralisantes. Pour gurir un

ivrogne fumeur de chanvre, la femme qui s'in


ou un

tresse lui dpose le vendredi soir la tombe de la

nuit, avec la complicit paye du gardien du cime

tire, une bouteille remplie d'eau sur le tombeau d'un


juif. On doit choisir le tombeau d'un homme et non

d'une femme. Avant de la cacher dans la touffe d'herbe


ou de Heurs o elle passera la nuit, on prononce sept

fois la rimette suivante, la bouche prs du goulot :

Nous faisons incuber prs de toi cette bouteille, matre

de tombeau, sachant bien que tu es un homme.


ce

Qu'un Tel, fils d'une Telle, cesse d'user de cette bois


son dfendue ! On doit agir ainsi sept samedis, et le
lendemain de ces sept jours, on fait boire l'ivrogne
chaque fois l'eau qui a pass la nuit au cimetire. On
prtend que tous ceux qui l'on a appliqu ce remde

ont t dbarrasss de leur mauvaise habitude.


Quand une femme apprend que son mari va pouser
une seconde femme, elle se procure un cur de mou

ton ou de bouc ; elle l'enveloppe dans un morceau de


colonnade et le cache sept jours de suite dans le mate

las du lit conjugal. Elle l'en tire le matin et lui adresse

ce discours : Comment vas-tu aujourd'hui, un Tel ?

Elle lui donne le nom de son mari. Ses voisines, qui

sont toujours ses complices, viennent la trouver et

s'informent : Un Tel (nom du mari) est-il mort ou

s'il vit encore ?

Il agonise , rpond-elle. Le sep


time jour, lequel doit tomber un samedi, les voisines

posent la mme question, mais cette fois, elle rpond :

Il est mort. Elles posent alors le cur au milieu de


leur groupe et elles se mettent pleurer et se griffer

la figure en se lamentant. Aprs quoi elles le lavent


comme fait le laveur des morts et l'entourent d'un lin-

175 -

ceul. Elles le portent enfin quelque vieux cimetire et

l'ensevelissent dans un tombeau abandonn en rp

tant : <( Nous n'enterrons pas un cur de bte, mais

celui d'un Tel, iils d'une Telle.

Ici finissent les observations que nous avons pu re

lever au sujet des pratiques magiques du samedi en

vogue dans les gynces de Blida au commencement du


W8
sicle. Elles prsentent un caractre commun : elles

relvent de la magie naturelle ; nous entendons par l


que dans ces pratiques la puissance active laquelle on

a recours est la volont humaine. Rarement, celle-ci fait


appel la magie vocatoire, c'est--dire au concours

des Esprits.

En passant dans le domaine de la magie masculine,


nous entrons dans celui de la magie vocatoire, l'iqqach
fondant son pouvoir sur les gnies que lui fournit la
tradition profane ou sur les anges serviteurs du Coran.
Pour s'assurer la fidlit d'une femme, le taleb se

procure une feuille de papier couleur de plomb el il y


inscrit, avec le gros bout de son calame, un carr ma

gique compos des lettres mim, noun, alif el an brouil


les ; elles signifient : agent de squestration (maria').
L'opration doit avoir lieu un samedi l'heure de Sa
turne ; l'encre esl du goudron. Cela fait, il doit crire
sur le corps de la femme in pudendis mulieris : Je
t'ai noue, X..., pour le mariage. Brlant alors des
drogues ou des matires puantes, de l'ail, du .soufre,
de
l'assa-ftida, il prononce soixante-dix fois les noms

renverss des rois de la lune, en


y intercalant sept fois
cette prcision : Je t'ai noue, une Telle, fille d'une
Telle, pour le mariage ; tu ne te marieras pas avant que

se lvent les gens des spulcres ; tu es chose morte,


comme ils sont morts. On prend ensuite, sous 1-e pied
-

176 -

gauche de la femme, une poigne de terre que l'on plie

dans le carr magique et que l'on va jeter dans le trou


d'un vieux tombeau .sans nom connu.

On compte parmi les dcouvertes merveilleuses de la


science, comme une perle du trsor des oulma an

ciens (voir Ibn Elhadjdj, Chomous el Anouar, p. 90),


une pratique chre aux amanls jaloux et aux gigolos

pour vieilles femmes riches : l'amoureux doit porter

sur lui, un samedi, en tmoignant son ardeur, un talis


man compos avec les mots moqtadir flna matre

d'une Telle (le mot moqtadir est un des 99 noms


d'Allah). Jamais femme n'a trahi un homme qui lui
ait fait sentir la puissance de ce charme, surtout s'il lui
en a fait boire une dcoction.
Le samedi est un jour propice aux malfices ayant

pour but de sparer les amants (tefrq). A cet effet, on

choisit un tesson de poterie mal cuite et facile rduire

en poussire ; on y crit des passages du Coran ayant

trait la il de l'loi-
division, surtout celui o est parl

gnement du ciel et de la terre (Cor. V, 20 ; XXVI, 23,

etc.) ; on brise ce fragment et on le pile. On en jette les


dbris dans la demeure de ceux que l'on veut sparer,
invoquant les le Der-
en dmons, entr'autres rouhani

dial qui, dans ce cas, doit la racine suppose (derder


parsemer) de son nom la fonction de disperseur.
Les malfices sous toutes les formes, colors du nom

de ted.mr eddlem chtiment du coupable, se rangent


sous le signe du samedi volontiers. Le commerant, que
gne la prosprit d'un concurrent dclar dloyal,
choisit neuf fves noires sur lesquelles il crit des signes

cabalistiques que lui enseigne un professionnel ; il les


pile en rcitant la sourate du Tremblement de terre
(Ezzelzla), le dernier samedi d'un mois, et il va en jeter
la farine le mme jour, une heure funeste ( la dou
zime heure d'ordinaire) dans le magasin de son en

nemi, en rcitant la sourate GUI : J'en jure par



177 -

l'aprs-midi, i homme Ira vaille sa perle. 11 le con

damne ainsi la mvente (cf. Ibn Elhadjdj, p. 90).


Quand un samedi tombe le 28 d'un mois arabe,
l'homme ls dans ses droits croit tenir une bonne
occasion d'appeler la vengeance cleste sur son pers

cuteur. Aprs avoir jen ce jour-l, il soupe d'un petit

pain d'orge, et, au milieu de la nuit, quand les tnbres


sont le plus paisses, il se rend dans une campagne soli

taire ou sur la terrasse d'une maison abandonne. 11 y


brle des parfums et rcite sept fois des versets du Co
ran (XIII, 18, et II, 2.5) en ajoutant chaque verset :
k MonDieu, je remets entre tes mains un Tel, fils d'une
Telle, ruine ses plans, enlve-lui la vue, n'assure pas son
pied, fait descendre sur lui ce que tu as fait descendre
sur tous les tyrans endurcis (cf. Eddirabi. Kit. el mod-

jribal, p. 37).
Le mme jour du .samedi,
dernier jour du mois arabe,

est recommand pour l'envotement d'un ennemi par

Ibn Elhadjdj, Chomous el Anouar, p. i36. Au milieu

de la nuit, le plaignant fait une prire avec cent pros

ternations pendant chacune desquelles il rpte trois fois


la du Coran (la fatiha) et la
92"

premire sourate sou

rate dite de la Nuit. Aprs quoi, il rpte le nom d'Allah


Chedid (Terrible) et Qahhar (Contraignant) autant de
fois que l'indiquent leurs lettres transformes en chif

fres soit ioi8 + 3n fois, ajoutant : Prends mon droit


sur un Tel I Si l'on en croit Ibn Elhadjdj, les Esprits
attachs au service des noms d'Allah invoqus et des
sourates rcites apparatront dans les fumes des aro

mates. Anges de la violence et de la terreur, leur


dira-t-on, je vous livre un Tel ! et la fin de l'opra

tion on ajoute : Chargez-vous de frapper son corps de


maladie et de lui enlever l'usage d'un de ses membres.

Mais toute force surnaturelle est ambivalente. Le sa

medi tant malfaisant est aussi capable du contraire. Un


apophthegme dclare que l'tre qui donne le mal le
12
-
178 -

gurit ; un autre que les gnies juifs doivent tre invo


qus ou exorciss le samedi. L'iqqach est trop prudent

pour ne dbiter que des malfices le samedi ; voyons-le

l'uvre dans des oprations moins inquitantes pour

l'opinion et pour la morale.

Les sorciers de profession vers 1900-20, Blida, pour

tout rsidu de l'ancienne astrologie, relative au samedi,


conservaient le souvenir de Zohal, la plante Saturne,
astre funeste appel aussi la Grande malchance Ennah's
lakbar. Un des noms d'Allah tait inscrit dans sa lu
mire ; on ne disait pas lequel. Le plomb tait son min

ral, le noir sa couleur. L'ange prpos au samedi dans


les sphres suprieures portait le nom de Kesfial ; le
roi des gnies qui gouvernait ce jour-l la sphre ter
restre tait Mimoun. Le sigill concentrant en lui les

forces surnaturelles de ce jour et de ses prposs .


9
figurait la lettre ouaou avec une queue redresse, un

ouaou arqu, semblable l'ampoule tubule dont se

servait le phlbotomiste , dit Eddirabi dans son Kitab


elmodjribat, p. 64.
Comme tous les jours de la semaine, le samedi avait

son adjuration l'adresse du roi des gnies rgnant

dans notre sphre. En voici une tire du manuscrit qui

nous a dj fourni les prcdentes :


Mimoun, montre-loi fidle ;

obis-moi, mon

compagnon,

par l'autorit qu'exercent sur toi les


Puissances qui assurent le succs.

Soyez vridiques

dans vos rponses :

rendez-moi le service de me

renseigner sur ceux qui commettent des vols.

Amne-moi tes soldais rellement de tous leurs can

tonnements.

Je veux un serviteur apte la besogne,

(un gnie) que je voie de mes yeux


et qui me
179

serve et qui m'aide et que je puisse livrer lui-mme


pour veiller un lthargique.
Par moi le patient sort de sa catalepsie,

arrach
tous les essais de strangulation (des gnies mauvais)..

Il parle d'une langue dnoue.

Rois (des esprits),


soyez bons :

runissez-vous tous ensemble et mon

trez de la compassion au malheureux (malade).


Il ne vous servira de rien de vous cacher ;

vous ne

trouverez pas de voie pour vous drober.

Celui qui

parmi vous ferait la forle lte

serait brl vif par

mon adjuration :

je vous brlerais vifs l'aide du


nom d'Allah, o que vous vous cachiez.

Je brlerai les rcalcitrants

en prononant le nom

d'Allah, le Tout-Puissant, le seul protecteur qui soil.

Par les seigneurs des rgions suprieures

je l'ad
jure Denhach ; par toi, Dahl ; je te

sollicite,
Mahkl, par le roi Hamr'l. Aidez-moi,

mes auxi

liaires,
obissez-moi serviteurs, sur l'ordre du Matre
Trs-Grand ;

ne regimbez pas, mme un clin d'il, au

nom du roi Djebrl !

Le texte de cette adjuration a consign deux cas typi

ques o on l'emploie :
iu

pour dcouvrir l'auteur d'un


traiter
>."

vol ; pour un malade en syncope.

Le plus souvent on se sert pour dcouvrir un voleur,


un peu comme dans l'opration divinatoire de la bouqala
que nous avons dcrite dans le chapitre VI, d'un vase

au fond duquel on a crit le nom de celui que l'on


souponne, au milieu de citations choisies dans le
Coran. Deux hommes de nature nerveuse (nous dirions
de temprament mdiumnique) se faisant face, tiennent
le vase en suspens entre leurs quatre index croiss. C'est
pendant qu'ils l'immobilisent ainsi, que le taleb qui
prside la crmonie rcite l'adjuration. On assure
que Mimoun intervient et imprime au vase suspendu

un mouvement de rotation perceptible, quand il con

tient le nom de l'auteur du larcin.


-
180 -

Mimoun est en relation avec le commerce comme il


l'est avec le vol. Veut-on attirer l'argent une banque
ou la clientle une boutique, on l'ait dessiner par l'iq-

qach le carr magique contenant l'adjuration, en pro

nonant ces mots : Anges, stimulez Mimoun, qu'il

se charge de telle ou telle besogne. Il fumige le


carr en rcitant 44 fois l'adjuration du samedi et une

fois la srie des adjurations particulires chaque jour.


L'oprateur doit se trouver sur son ablution niatu-

tinale du samedi, dans la premire heure du jour. Le


talisman ainsi prpar .se glisse au milieu des marchan

dises vendre ou se suspend au plafond de la boutique.


Ainsi s'exprime le commentaire qui suit l'adjuration
dans mon manuscrit. On peut voir dans Ibn Elhadjdj,
p. 78, que pour forcer un trsor gard par un gnie, on

doit l'expulser un samedi en brlant des drogues puan

tes et l'aide de fumes mphitiques. En rsum, le


samedi, fte des Juifs, et son roi Mimoun sont troite
ment unis dans la pense des Indignes l'ide de vol,
de trsor et de trafic.
Notre adjuration, dit le commentaire,
encore est

bonne pour le traitement de tous les gnies , mais sur

tout pour les gnies morbifiques, comme l'a signal son

texte. Quand un malade vient te trouver le samedi, re

commande l'auteur, lu le soigneras avec cette adjura

tion. On enfume le consultant avec du benjoin et de


l'encens ; on invoque les puissances angliques, leur de
mandant de forcer Mimoun et ses subordonns plongei

en lthargie le patient. On pose le carr magique du jour


sur la tte de celui-ci et il finit par perdre connaissance :

il reste l'iqqach faire parler le gnie qui, ayant envahi

le patient, cause sa maladie ; puis, l'expulser.


Il arrive souvent que le gnie ainsi interrog rpond :

Je suis Mimoun ou l'un des gens de Mimoun . Mi


moun Lasoued (le Noir) s'installe demeure dans le
corps des jeunes femmes qui aiment la toilette, les par-
181

fums et le voisinage des hommes. Les enfants de Mimoun


el Khettaf (le Bavisseur) font avorter, causent les m-

trorrhagies et ruinent la sant de leurs victimes. Ce


sonl eux galement qui frappent la tte les enfants

de moins de deux ans et arrtent leur dveloppement.


Ils se plaisent aussi porter le trouble dans les matrices

des femmes el des bestiaux. L'adjuration Mimoun el

la journe du samedi sont indiques pour soigner ces

diverses maladies, et d'autres encore qui sont dues


des gnies soumis l'ascendant de Mimoun, comme le
dmon des pizoolies et Boulellis, celui du cauchemar

cl de la nxctolyphlose, que nous avons tudi dans le


chapitre VI.

Le recours Mimoun n'est pas une superstition qui

se cache au fond de l'officine d'un iqqach ou de la


chambre d'un malade : il est rest un culte avou et

public dans la Mettidja ; il y a son temple en plein air,


la mode gtule, mais bien connu et frquent. Quand
le consultant entend le taleb lui diagnostiquer : Tu
rih'

souffres du vent des gnies de Mimoun djann Mi


moun , il se rend en plerinage (ziara) h Boufarik. Il
emporte un gallinac, une poule, s'il s'agit de soigner

un homme, un coq, s'il s'agit d'une femme, rouge ou


jaune ou fleur de pois , comme l'a prcis l'ordon-

nonce orale du sorcier et que l'on a fait tourner sept

fois autour de la tte de l'grotant ds l'achat. Les vieux

colons se souviennent d'une poque o le jour de visite

tait le samedi ; Mimoun alors passait pour juif ; mais


ses fidles, en devenant eux-mmes plus orthodoxes, se
sont choqus de sa mcrance, ils l'ont islamis : les
plus scrupuleux viennent le prier le vendredi et veulent

le tenir pour un saint musulman ; la plupart, mena

gant la transition, le mercredi, qui est,


lui sacrifient

comme nous l'avons vu, le jour des Gnies. \ l'Est de


182

Boufarik, l'oued Chemla qui descend de l'Atlas bliden


s'taledans la plaine formant, mme l't o il est
sec, une flaque d'eau qui prend le nom d'oued Mimoun.
et, auprs, par infiltration sans doute, divaguante au

gr des crues d'hiver, une sourcelette qui porte le nom

de Nanna Acha. Celle-ci est le sanctuaire prfr des


dvotes et l'oued est celui des dvots ; mais le majam ->

de la fille el le maqam du pre font aboutir les


prires la mme dit, en offrant l'avantage de spa

rer les sexes.

Ces lieux saints sont devenus la proprit d'un round

sans perdre de leur prestige religieux. Les plerins

payent un droit d'entre de o,25 c. par personne l'in


fidle pour perptuer, en dpit du sicle incroyant, leur
traditionnel sacrifice aux djinns. Tournant la tte de
la volatile vers l'Orient, le sacrificateur (oukil) l'gorg
rituellement en disant : Allah est plus grand ! J'im
mole cette bte Allah qu'il soit exalt ! l'intention
d'un Tel et en l'honneur de ces Personnes ! Dans les
bonnes conditions, si l'on en croit les croyants, le sang,

au lieu de se dissoudre dans l'eau, se ramasse en boule.


le courant peut l'entraner, le niveau de l'eau monte,
des bulles ptillent de tous cts la surface de l'eau ;

puis, lorsque le sang s'est agglomr en sphre, comme


le fait le bol de couscous dans la main du convive, il
disparat soudain, il est aval. On peroit alors des ion
iou grles qui s'lvent on ne sait d'o. Les gens du
ruisseau (ns el oued) sont satisfaits.

Toutes les parties inutilisables de la victime (les mza-

mez) appartiennent de droit ces gens-l ; elles flottenl


un moment sur l'eau et s'y enfoncent soudain, saisies

au passage, dit-on. Le sacrificateur reoit dix centimes

d'ouada ou salaire consacr. On lui rserve une assiette

de berkoukes (gros couscous) surmont d'une cuisse de


poulet, si la famille passe la journe sur les bords de
l'oued sacr. Elle tend dans ce cas les voiles blancs ou
183

rouges des plerins en mouvants guitouns, l'abri des


quels les femmes cuisinent. L'ail ne doit pas approcher

de la nechra (victime) offerte aux gnies, pour leur per

mettre d'y goter. Voici la thorie de l'oblalion finale,


d'aprs une de ces lgendes initiatiques qui conservent

la tradition dans la mmoire des Mettidjiens.


Elle (la premire prtresse de Mimoun, celle qui

enseigna aux hommes les riles de ces plerinages) iil


arroser de sauce piquante un de couscous
plat et un

morceau de la nechra. Elle conduisit la famille sur le


bord du ruisseau cl commanda : Versez le tout ici

Le pre s'excuta en disant : Au nom d'Allah !

L'eau bouillonna ; puis, engloutit d'un seul


coup la
semoule et la viande. Les femmes poussrent des ulula

tions stridentes auxquelles rpondirent des iouiou qui

semblaient la fois proches et lointains. Cette nuit-l

chacun des plerins vit en songe des personnages habil


ls de rouge, assis sur de hauts siges d'or, autour d'un
plat qui tait d'or aussi et sur lequel il reconnut l'of
frande qui avait t faite aux gnies de l'oued. Les con

vives cdrent la place d'autres, comme dans les repas

communiels des ftes patronales, puis une autre bande


leur succda ; et, quoiqu'il servt de nombreuses ta

bles successives, le plat de couscous ne diminuait pas.

Ce plerinage avait t agr par les Bonnes Personnes.


Les miracles qui ont illustr ces bords enchants.

quoique s'oubliant d'une gnration l'autre, seraient

longs numrer. Mimoun n'exerce pas seulement son

influence sur les maladies que connaissent nos mde

cins comme les pidmies ; mais sur beaucoup d'au


tres dont l'tiologie nous chappe comme celles qui

proviennent du ghechch ou dpit (affections cutanes,

ophtalmies) ou du sekadj, proprement perte de la respi


ration par suite d'un coup (maladies nerveuses). De
plus, il est tout le contraire d'un spcialiste ; comme il

convient un tre surnaturel, il tend son pouvoir non


-
184 -

seulement dans tout le monde physique, mais dans le


monde moral et social, voire mme dans le monde su-

prasensible, sauf cependant dans les parties qui tou


chent de trop prs au credo musulman, car il lui reste

malgr tout quelque chose de son origine impure aux

yeux de la majorit.

D'ordinaire les gnies ne sont gure que des entits

sans vie, des noms sans personnalit : chez Mimoun des


surnoms assez nombreux tmoignent d'un caractre

complexe. Il est le Moul ssekkdj oulli mrid mneltoun

le recours des nvropathes et des pidmiques, autre

ment dit le thrapeute souverain que nous venons de


voir. On l'appelle Malik Mimoun, le roi Mimoun,
cause des sept (mehalla) hordes d'Esprits qu'il com
mande ; Et't'ear l'Ail qui franchit l'espace comme un

oiseau ; Essiaf, le porte-glaive ou le bourreau, dans les


malfices o on le charge d'excuter des vengeances ;

Elkhet't'af, le Bavisseur, parce que dans son palais invi


sible, quelque part dans la rgion de Boufarik, son ha
rem est peupl de beauts humaines qu'il a enleves
leurs familles etd'ailleurs y mnent
qui une vie para

disiaque. Sous le titre de Mimoun la chane ahab

sselsla, il fait figure d'un dieu des voleurs. Dj dans


Ibn Elhadjdj (Chom. el Anouar, p. i3?) on peut lire
une invocation qui force Mimoun voler cent dinars au

profit de celui qui la rcite. De nos jours, les mauvais

garons de Cola et de la Mettidja en gnral, qui sortent

de prison par vasion ou leur peine purge, ne man

quent pas de venir offrir un sacrifice Mimoun libra


teur. On le flatte en lui rappelant le nom de son fils
Noukh et en lui disant : Bou Noukh, Pre de
<c

Noukh ; mais je ne sais rien sur le compte de cet

enfant. On rpte que lui-mme est le fils d'Eghmm,


ia Mimoun ben E/hmm, c'est--dire fils du Brouillard ;
il est mme le Brouillard dans le nom que lui donnenl
le plus souvent les hommes : Mimoun Eghmm, ou les

185 -

femmes qui le dsignent d'ordinaire sous le nom de


Mimoun Eghiam (Mimoun la Brume), ou les lettrs qui
lui accolent l'pithte d'Essahbi, Mimoun le Nbuleux,
qui laisse traner son manteau de vapeur sur le sol, au

tant de qualificatifs emprunts au phnomne mtoro

logique sous lequel il se cache,


le brouillard qui

s'lve de ee fond du marcage boufarikois


et qui

d'ailleurs se confondent avec ceux qu'il doit ses

accointances avec le sombre Saturne


Mimoun Lasoued, :

Le Noir ou Mimoun Lazreg, Mimoun couleur gris de


plomb.

On peut affirmer que les qualificatifs divers des Mi-

mouns que nous venons de nommer ont chacun leur


lgende, parce que, lorsqu'ils n'en rappellent pas, ils
en inspirent. Je donnerai celle de Mimoun Eghiam.
Becueillie sur les lieux, elle prcise, mme abrge,
l'ide que se font les Indignes de la naissance d'un
culte animiste.

A l'poque o la Mettidja tait un maquis marca

geux, un paysan qui gardait ses troupeaux l'endroit


o s'lve aujourd'hui Boufarik, entendit des vagisse

ments dans un fourr. Il le fouilla et se trouva face


face avec une femme d'une grande beaut. O ha
bites-tu ?

Prs de toi. Or il ne se connaissait pas

de voisin. Qui donc es-tu P

Bientt je me ferai
connatre ! Et elle disparut subitement. De ses six en

fants, seule Acha entendit dsormais ces vagissements

qui la conduisirent auprs d'une petite source sur le


bord de laquelle se trouvait une fillette dans des langes
somptueux et couverte de bijoux. Acha ne quitta plus

cet endroit. Son pre voulut l'y surprendre, mais il s'en


vit empch par des lions. Un songe rvla sa mre o

elle passait ses journes. Celle-ci vit un chteau tout en

or o sa fille, superbemenl pare, conversait avec des


demoiselles en toilettes rouges. Elle passa dans un autre

chteau suspendu entre ciel el terre, au-dessous duquel


-
186

s'tendait la d'un lac limpide ; des jeunes filles


surface

encore \ foltraient et nageaient ; quelques-unes le


vaient des cassolellcs d'or au-dessus des eaux ; toutes
taient escortes de feu\ follets se jouant autour d'elles.
A ce spectacle, la mre comprit qu Acha tait devenue
la compagne des gnies de la source. Mille petits faits de
la vie ordinaire la confirmrent dans cette ide par cer-

laius dtails mystrieux o loute mauresque devine


l'influence des esprits.

Un jour le pre tant tomb malade, se trouva couvert


de boutons. Sa fille ^ int le chercher un mercredi.
Ap

porte des aromates et un cierge , dit-elle. Elle les lui


lit jeter dans la sourcelette. Ces Personnes,
dit-elle.
les aiment .mieux froids que brls. C'est un principe

du rituel des eaux. Ensuite elle frotta le dos du malade

et sa poitrine avec de l'eau de la source. Fais tes ablu

tions, tu prire canonique, formule enfin le souhait de


gurir el fais vu d'immoler un bouc si lu guris.

Celle nuit-l mme se.s boutons schrent.

Le jour venu du sacrifice d'action de grce, il vit avec

tonnement sa fille surgir du fond de la sourcelette.

Je viens, lui dit-elle, de souhaiter la bienvenue des


htes nouveaux. Et elle expliqua enfin son pre tout
le mystre. Nanna Acha, la fille du roi, du gnie Mimoun,
tait venue la premire s'tablir, il y avait de longs
mois, dans la sourcelette avec toute une tribu de gnies

L'enfant abandonne en apparence, qui avait vagi sur

les bords de la source, tait la petite fille de Mimoun.


Acha, la petite chevrire, avait eu le bonheur de plaire

sa puissante homonyme qui lui avait rvl les vertus

de la source et les rites qu'on devait y observer. C'est ce

qui lui avait permis de gurir son pre. Mais le miracul

en immolant un bouc avait appel une nouvelle mehaJla

de gnies, car ceux-ci accourent aux sacrifices comme

les mouches auv flaques de sang. Aprs celle seconde

horde, descendra dans ce lieu Mimnun, le chef de celle


-
187 -

arme invisible d'immigrs. Il erre aux alentours avec

le gros de sa smala. Mais il fera .son en lie dans sa nou

velle rsidence un mercredi ct son jour de plerinage

sera le mercredi, comme celui de Nanna Acha. Alors


celle-ci qui a vcu jusqu'ici l'tal secret (mekhfia) se

rvlera en mme temps que son pre tendra sa rpu

tation en faisan! clater ses miracles.

En effet, une nuit veille d'un mercredi, la nature se

couvrit d'un brouillard pais qui cacha les toiles el

jeta la stupeur dans tous les esprils. Le lendemain et

pendant toute la semaine qui suivi!, la mme obscuril

rgna sur toute la contre. La huitime nuit au contraire

une lumire apparut si vive que l'on pouvait compter

les feuilles des arbres. Depuis, on remarque tous les


malins des vapeurs qui s'lvent du bas-fond de l'oued
Chcmla. ("est cette circonstance de sa descente dans
le pays que Mimoun doit d'tre appel Mimoun Eghiam,
Mimoun la Brume.
Quand le plerinage de Mimoun fut en vogue dans le
pays. Acha conduisit un jour ses parents dans le ch

teau merveilleux du Roi des gnies, ouvrit devant eux

des coffres regorgeant d'or et de pierreries et leur dit :

Puisez autant que vous pourrez porter. Aprs quoi.

elle leur fit ses adieux et nul depuis ne l'a vue. On dit
que, possde corps et me par les gnies, elle vil dans
le cortge de INanna Acha ou enferme dans le somp
tueux harem dans lequel Mimoun garde ses femmes de

race adamite.

Si l'on compare cette lgende de Mimoun Eghiam


avec celle que nous avons donne dans le chapitre VII
sur Cheinharouch el l'An el djereub, on remarque une

ressemblance foncire. Dans l'une et dans l'autre un

descend (le terme est consacr dan<


gnie erranl nzel)

un lieu prdestin par la nalure ; il se rvle loul

d'abord un simple campagnard, berger ou cbevriic

qui publie ses bienfaits, enseigne ses rites, fonde son


-
188 -

culte el disparat mystrieusement. Tel est le moule ha


bituel des lgendes animistes, du moins dans la Met
tidja. Dans ce moule viennent se fondre des lments

plus ou moins abondants emprunts l'hagiologie g

nrale, surtout de la catgorie des miracles thrapeu

tiques., et aussi aux contes populaires universels. C'est


ainsi qu'unefille de Mimoun Eghiam, mtamorphose
en jument par le malfice d'un amoureux conduil, joue
le rle du Chat bott dans le conte connu de ce nom ;
laisse par drision pour sa part d'hritage un cadet

dpouill par ses six frres ans, elle lui assure la ri

chesse d'un roi, le marie une djannia et lui passe au

doigt l'anneau magique qui confre la toute-puis.sance.


Adultr par les emprunts qu'il fait aux inventions fol
kloriques voisines, le thme primitif devient de plus en

plus mconnaissable. Seuls les anciens dans la Mettidja


se rappellent que Mimoun est le gnie de Saturne et que

son jour fri tait le samedi. En revanche sa lgende


s'est loffe. De mme que la valle est pleine de son

brouillard, la mmoire de ses dvots tient en suspens

d'abondantes tranes de lgendes. Se trouvera-t-il quel

qu'un pour les condenser et les cristalliser en une com

position crite ? Le peuple fournit la matire des my


thes, mais les potes leur donnent la forme. Il est
craindre que jamais Mimoun ne trouve son mytho-

graphe ; car, dans ce sicle, l'Islam appelle ailleurs

l'attention de ses adeptes et il n'a jamais t aussi svre

pour les superstitions populaires que depuis qu'il se

sent ou se croit observ et sous le regard narquois de la


critique europenne.

De plus en plus nettement, depuis notre venue dans


le pays, l'animisme a cd devant l'hagiolatrie. Un dic
ton courant en fait foi : Notre sicle est celui des
saints, comme le sicle de Salomon tait celui des g-
-
189 -

nies. Si quelques tolba invoquent encore Mimoun


dans leurs oprations magiques du samedi, lous les Uli
dens considrent ce jour comme consacr au patron de
leur ville. Sidi Ahmed elkbir a dit : Aie visiter qua

rante samedis vaut autant que de faire une fois le ple

rinage de La Mecque. Celui qui m'aura fait quarante

visites le samedi et qui n'aura pas obtenu ce qu'il sou

haitait aura le droit de m'en demander compte au jour


du Jugement. Dans toute la Mettidja, et non pas seu

lement dans ses parties o le samedi est vou au saint

local, le samedi esl le jour o les Saints tiennent leur


assemble. On entend les campagnards et les citadins

jurer communment par les vertus de celte nuit, nuit

du samedi, la nuit du Divan des Saints !

La croyance que les Saints tiennent une sorte de par

lement o ils discutent des affaires de ce monde paral

profondment enracine dans les esprits, si l'on en croit

les histoires anecdotiques que j'ai recueillies.

A l'poque du muphti Rouizar (i833), un mendiant

aveugle qui portait ses conomies dans les haillons de


son burnous, avait l'habitude de coucher dans la mos

que Sa'doun. Blida. Des tolba complotrent de le d


pouiller. Une nuit de samedi ils tinrent un divan dans
les tribunes de la mosque en observant tout le cr

monial consacr par la tradition. L'ordre du jour

puis, le prsident de l'assemble, Sidi Abdelcader


l Djilani, ordonna de faire comparatre le men

diant qui avait assist au divan, ce qui lui donnait


droit une faveur de la divinit, comme le veut la cou

tume . L'aveugle forma le souhait d'tre transport en

terre d'Islam, en Egypte, et de recouvrer la vue. Bien


de plus facile ! rpondit le Sultan des Saints. Et il
demanda un ouali de bonne volont. Sidi Ahmed ben
Yousef mais, aprs avoir pris sur ses
se prsenta ;
paules le mendiant, il dclara : 11 est trop lourd !

Plusieurs essayrent, sans succs. Je ne veux pas


-
190

quitter un lil ! protestait l'homme. Enfin Sidi Ahmed


el kebir se chargea de lui. il le prit sur son dos et,
quelques instants aprs,

les amis d'Allah savent

plier la terre sous leurs pas,


il le dposa en dehors
des murs de Blida, en lui disant : Te voil aux portes

du Caire.
El, comme il exultait et ne savait comment

exprimer sa reconnaissance, une voix grave l'interrom


Qu'est-ce ? demanda-t-il. C'est mon anctre, le

pit.

Prophte de Dieu, rpondit Ahmed el kebir, qui te dit


de lui offrir tou burnous en manire de remerciement.

Comment ne donnerais-je pas et mes biens et ma vie

au Prophte, que Dieu le bnisse et le salue ! Il lui


offrit aussitl ses prcieux haillons. Quand le jour se

leva il interpella les paysans qui entraient en ville :

<( Nobles fellahs d'Egypte, conduisez-moi, au nom

d'Allah, l'universit d'Elazhar !

Mohammed ben Chaaban, cultivateur octognaire de


Douera, raconte que, dans une des dernires annes du
sicle pass, une il aperut, de
nuit, son gourbi tant.
une lumire qui oscillait dans une de ses terres. Il crut

qu'il avait affaire des maraudeurs. Il prit son fusil et

sortit en disant : Je vais chasser ces sangliers. Il


marcha longtemps, sans voir diminuer la distance.
Quand il eut constat le fait, il se souvint que les Esprits
peuvent allonger la route comme la raccourcir. A ce mo

ment, il rencontra un de ses voisins nomm Abdelcader.


Que fais-lu ici cette heure ? lui demanda celui-ci.

Ne vois-tu pas de la lumire dans mon champ ?


-
Par
les vertus de cette nuit, lui jura l'autre, de cette nuit de
samedi, o les Saints tiennent leur assemble, ce ne

sont pas l des voleurs. L-dessus, son interlocuteur


s'tant vanoui ses yeux d'une faon mystrieuse, il
comprit. Cet Abdelcader n'tait pas son voisin, mais le
Sultan des Saints, qui aime, on le sait, se cacher sous

la figure de ses homonymes. Son champ avait eu l'hon


neur de servir de lieu de runion aux Amis d'Allah : il
-
191 -

se promit de n'en point mettre en vente la rcolte de


peur qu'elle tombt entre les mains de juifs ou de chr

tiens, de faire son oratoire de cet endroit sanctifi et d'y


offrir annuellement un repas aux pauvres (ou'ada) ; ce

qui fut fait jusqu'au jour o cette terre fut achete par

un chrtien.

Le samedi, iG mai igi/|, les cafs de Rlida toujours


pleins de beaux parleurs, ne s'entretenaient que de
l'aventure d'un jeune jardinier de la banlieue que l'on
venait de retirer d'un puits. Il avait racont au commis

saire que, rentrant chez lui la nuil noire, il tait tomb


sur un groupe de sept hommes masqus, comme le sont

toujours les Saints quand ils entrent en contact avec les


hommes. Ces personnages semblaient dlibrer el il
avait eu conscience qu'il tait accueilli comme un indis
cret. L'un d'eux lui montrant un buf, lui avait de
mand : (( N'est-ce pas celui que lu as gorg l'an der
nier la fte patronale de Sidi Ahmed el kebir ?

Oui,
je le reconnais.

H bien ! cramponne-loi ses cor

nes ! Il s'tait alors senti soulev et prcipit dans le


puits et il avait t sauv par deux pierres en saillie sur

lesquelles il s'tait appuy jusqu'au moment o on

l'avait dlivr. Ce rcit, comme on pense bien, n'tait

pas lout fait conforme aux dpositions de la victime

En quelques heures, un vol de bestiaux et une tentative

de meurtre avaient ajout une lgende de plus au cycle

de miracles attribus l'assemble des Saints. Cela ne

prouve-t-il pas combien ce thme est populaire et vivant

dans l'esprit des Indignes ? Et ne doil-on pas conclure

que les Blidens de nos jours sont tout aussi influencs


par lui, dans certains milieux, que l'tait vers 1890

noire bon paysan de Douera prenant pour des Saints les


maraudeurs qui visitaient son champ de pommes de
terre ou en iN.33 le pauvre aveugle qui se dpouillai! de

ses conomies pour payer le voyage miraculeux qu'il

devait aux bons offices du Divan de la mosque Sa'doun ?


--
192

Ce n'est pas par hasard que les trois faits que nous

avons raconts se passent un samedi. Ce jour est celui

qui convient aux divans des Saints. On trouve sans doute


des lgendes qui font exception : pendant la Grande
Guerre l'assemble sigea en permanence, dit-on ; des
vnements pressants motivent des sances extraordi

naires. Mais, en rgle gnrale, les runions du Divan


ont lieu la lin d'une priode dtermine de temps, en

vue de fixer le cours des vnements de la priode sui

vante. On croit que tous les ans les saints de l'univers


entier s'assemblent Bagdad dans le mausole de leur
chef, Sidi Abdelcader Eldjilali, dans la nuit du milieu
de Cha'ban : la raison en est que, dans la tradition mu
sulmane, cette nuit, appele la nuit du destin et de ses

dcisions, est celle o se dresse la liste des dcs pour

l'anne qui vient el o s'tablit le bilan des actions de


l'anne qui finit ; c'est la nuit de la rpartition annuelle

des biens et des maux entre les hommes. Survivance du


premier jour de l'an Persan, le Nirouz, le distributeur
des fortunes , la Mi-Cha'aban assigne de nos jours
chacun des habitants de l'Atlas son lot fatal de joies et

de souffrances. Au cours de la sance de cette nuit, les


Saints y sont instruits de ce qui doit arriver dans
l'anne. De mme, dans les sances hebdomadaires, ils
prennent leurs dispositions pour la semaine suivante.

Quand les conteurs adoptent la semaine musulmane.

dont le jour fri est le vendredi, ils placent ces ru

nions dans la nuit du jeudi au vendredi, c'est ce que

l'on peut voir dans la lgende L'uvre de la France


en Algrie (cf. Bulletin de la Socit de Gographie
d'Alger, trimestre 1910) o les Saints dlibrent sur
2L

l'opportunit de l'entre des Franais en Algrie. Mais,


le plus ordinairement, ils les rattachent celle du ven
dredi au samedi, parce qu'ils suivent la tradition juive
antislamique qui veut que le dernier jour de la semai ie

soit le samedi, la mme au fond qui, chez nous, au


193

moyen-ge, a fail de la nuit du samedi la nuil du sabbat

Les vieilles femmes de Blida qui brlent du benjoin


dans leurs demeures Irois fois par semaine rptent ce

diclon : La nuit du mardi au mercredi tu offres ton


encens aux gnies ; dans la nuit du jeudi au vendredi,
tu l'offres aux gnies el au y saints ; dans celle du ven

dredi au samedi, lu l'offres au Divan des Saints.

11 est rare que les lgendes nous parlent de divans


lenus dans l'intrieur des maisons, quand il ne s'agit

pas de la naissance d'un saint ou d'un vnement d'in


trt particulier. Les lieux o se rassemblent de prf

rence les saints sont les mosques, les maqam, tombeaux


ou pied--terre des oualis, leurs ermitages (kheloua), etc.
Du temps des Romains la chapelle funraire des mar

tyrs s'appelait aussi conciliant. Les fourrs et les bos


quets sacrs, surtout d'oliviers sauvages, sont souvent

illumins par des lampes el des bougies en l'honneur


de leurs htes nocturnes. On dit Blida que les premiers

divans se sont runis au boi.s des Quarante Saints. Les


bergers vous montrent une cavit dans le tronc d'un
vieil arbre ou une niche dans un rocher et vous disent :

C'est le medjma\ le lieu de runion des Saints. La


matire est merveilleusement extensible, dans ce monde

des Esprits, et ceux-ci ne connaissent pas le volume. Les


chercheurs de lieux-dits trouveront dans les montagnes

de l'Atlas bliden un grand nombre d'endroits appels

(lieu de prire) ils


chri'

a (lieu de justice) ou mella :

sont remplis d'horreur sacre, dit-on, ils sont mrououeb

(terrifiants). Les naturels expliquent que, toutes les


fois que, la nuit venue, ils voient des lueurs briller dans
un endroit ou entendent des voix humaines discuter ou

psalmodier les noms sacrs d'Allah ou rciter du Coran,


ils reconnaissent la prsence des Oualis, surtout le
samedi ; ils ont l'habitude dans cette occurrence, d'en
tourer le lieu d'une murette de pierres sches ; ils le

tabouent, le laissent inculte ; il est sacr dsormais : ils


13

194

viennent y faire leurs prires, et souvent tous les gens de


l'endroit s'y runissent annuellement pour un repas

communiel.

Quand ces enceintes sacres portent un nom fminin,


elles dlimitent le lieu de runion du Divan des Saintes.
Les amies (hbbt) d'Allah, l'imitation des Aoulia, ont
aussi leur parlement. A Mda, le nom de Lalla Khira

sert de serment : ou ras lalla khira par la tte de Lalla


Khira ! Il y a trois saintes de ce nom, gardiennes d'au
tant de quartiers. On montre encore la haououta de
celle qui est surnomme Benl ben Imam. On raconte

que la sainte btit de ses mains cette murette autour

d'amandiers avec lesquels elle s'entretenait ds son en

fance et qui lui rpondaient leur faon. C'tait au

fond d'un verger touffu dont elle avait fait son ermi

tage. On y entendait des voix ; on y apercevait des lu


mires la nuit ; priodiquement, on voyait des perdrix

sauter sur la murette et rappeler : Lalla Khira sortait

alors de sa kheloua : Entrez, soyez les bienvenues !

disait-elle. Elle s'accroupissait au centre d'un cercle de


perdrix et toute la nuit il s'levait de cet endroit un

grand bruit o l'on distinguait des paroles articules au

milieu d'un gazouillis qui tait le langage des oiseaux.

On veut dire par l que Lalla Khira prsidait un divan


des Saintes ; car, la plupart du temps, ce divan se tient

dans une kheloua, dans l'ermitage d'une sainte.

A Blida, la conception semble s'largir. Ce n est plus

une sainte locale qui prside le Divan des Saintes, Nos


lgendaires de la Mettidja connaissent une Lalla Elou-

sila qu'ils dcorent du nom de Raset diouan ealihl

la Dame Intercession, prsidente du Conseil des Sainles.


On ajoute ce titre un autre faisant allusion une

lgende inconnue de moi : Celle qui a fait le plerinage

et les circumambulations saintes sous l'il de gens

d'lite et qui a t regarde par les dignitaires et le


Sultan. Fnfin un troisime nom s'explique mieux : on
195

la dsigne sou.s le nom de Sultane du Divan Sollanel

eddiouu, comme Eldjilani est appel de son ct

Soltan ealihin. On ajoute : Celle qui fui la servante

d'Abdelcader Eldjilani et de Bou Medien, le patron de


Tlemcen , ce qui nous fournit la raison de son lva
tion la dignit de Reine des femmes. A ct de cette

autorit d'un caractre universel, se rangent les repr

sentantes des trois principales divisions de l'Afrique du


Nord (le Maroc est part dans l'esprit d'un Bliden) :
Lalla Eddaoua, de Tunis ; la boudalia El alia la dame
dont la parole se ralise , de Tlemcen, et Lalla Nfisa,
fille de Sidi elkebir, de Blida, dont la puissance thau-

maturgique est telle que, d'un mot, elle fait tomber du


ciel l'il de l'oiseau qui passe. Ces quatre person

nages dirigent mystrieusement,

car ils descendent


rarement sur la scne,

la troupe nombreuse des fcou-

dalia, des droucha, des maraboutes de tous genres, qui,


vivanles ou mortes (la mort ne fait que manifester plus

largement leur activit), sont les auxiliaires des Hommes


d'Allah dans les rles que rserve des femmes la loi
de la sparation des sexes. Ils rgnent sur les choses de
femmes dans la vie commune. On voit leurs subordon

nes dans les rcits hagiologiques, accoucher les enfants

prdestins, les allaiter, les ravir leur milieu humain


pour faire leur ducation dans le monde supraterrestre.

C'est dans leur suite, dans les rangs des saintes filles de
leur cour, dont on ne peut dire souvent si elles sont des
saintes ou des gnies, que les oualis trouvent les pouses
que Dieu leur a destines. Elles forment (avec les diver
ses fonctions que remplit cette institution musulmane),
le harem de ces surhommes de conception primitive.

qui se distinguent de leurs fidles non pas par leur spiri

tualit, mais par la supriorit de leur puissance.

(A suivre.) J. DESPARMET.
Bibliographie Algrienne 1934

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Exposition du Sahara 1934. Guide illustr. Introduction par

E. F. Gautier, 16 p., 8 fig.

MUSEE D'ETHNOGRAPHIE, PALAIS DU TROCADERO.


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RISTIQUE (OFALAC). 3e
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16
(janvier) au 21 (juin). n
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nistration, 20, bd Carnot, Alger, in-8).


A cess de paratre aprs le numro de juin, et a t
remplac par la Revue illustre de grand format Algrie .

Il contient de nombreux articles intressant la gographie

conomique, notamment : B. Maire, La dfense du palmier

contre le Bayod et le Belaat.


E. Perrot, Le dattier dans
les oasis de Biskra Laghouat (janvier).
M. Mercier,
La situation des mines de zinc et de plomb algriennes

(fvrier).
Le commerce extrieur de l'Algrie (Expos
de M. le Directeur des Douanes, et discours de M. le Gou
verneur Gnral Carde la Commission des valeurs en

douane) (mars).
P. Bertliault, Rapport gnral prsente
la Journe des techniciens de l'agriculture (Alger,
31 mars 1934) (avril).
G. Trouetle, Possibilit de l'indus
trie laitire en Algrie (mai). P Laumont, La nouvelle

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Expos de quelques-uns des progrs de l'nologie
Fabre,
moderne.

Standardisation et organisation de la produc


Garcia,
tion gnrale.

lsman, L'Alfa.
froid possibles en
Monvoisin, Le et ses applications

Algrie.

Plgri, Le reboisement.
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fruitires en Algrie.
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Perrin, Les lgumes Oranie


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toire Naturelle de l'Afrique dn Nord, Alger,
n
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de l'Algrie au 153, Oran, d. 1934 ; f. s. n.
: f. n

20.000e
Camp de Boghari. B) Plans directeurs au : d'Alger, Mai

son-Blanche, 1 et
n
2 (2 f.), Alger
n
4 (1 f.), Rouiba 3 n n

(1 f.) ; Camp de Boghari (extension Ouest) (1 f.). C) Carte du

Sahara, Reproduction des minutes de levs au 200.000 : feuilles


XG 31, XXI lvSalah, XG 32, N.O. XV Fort-Polignac, NG 32,
N.O. XXI Tadjentourl, NG 32, N.E. XXII Hassi-Bourarhet,
NG 32, N.E. XVI Fort-Tarat, NG 32, S.E. X llireri, NG 32,
S.E. IV Fort Vharle-Dianet, N.G. 32, S.E. V Tin Alkoum, XF

32, N.E. XXI1I-XXIV In Ezzane. Dj Principales routes et pis


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S[OCARD] (T.). La trame des viles. (Chantiers, Alger,


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WAUTHIER (Magdeleine). Connaissance des sables. Du


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Dubreuil, suivi de noies et observations par le Capitaine


Wauthier. Paris, Pion, 1934, in-12, 2 cartes dont 1 h. t.,
23 pi. phot.

M. LARNAUDE.

( suivre)

U

210

Comptes rendus

Chronique de Santa Crus du cap de Gu (Agadir). Texte por


Ckm-
tugais du XVIe sicle, traduit et annot par Pierre de
vaL. Paris, Paul Geuthner, 1934, 170 p. in-8. Publications
de la section historique du Maroc : Documents d'histoire et

de Gographie marocaines.

La Chronique publie par M. de C. d'aprs un manuscrit

de la Bibliothque Nationale de Lisbonne provenant de


l'abbaye d'Aleobasa, et mentionne au catalogue sous le titre
k Origen et comeso e cabo de villa de Santa Cruz de Cabo
de Gue d'Agoa de Narba , est reste semble-t-il, ignore de
tous les historiens de l'occupation portugaise en Afrique.
L'auteur n'a pu en tre identifi, mais parait tre, n'en pas

douter, un chevalier ayant vcu de longues annes Santa


Cruz. Emmen en captivit lors de la prise de la forteresse
par le Chrif Saadien Mohammed Ech Cheikh (1541), rachet

en 1546, il aurait entrepris vers 1560 la rdaction d'une chro

nique destine commmorer les vnements dont Santa Cruz


avait t le thtre et dont le souvenir, mritait, son avis.

d'tre conserv la postrit.

Sur les origines mmes et les dbuts de l'tablissement,


l'auteur se borne reproduire les renseignements qu'il tient
d'hommes ayant particip la fondation de la forteresse, et

de pre, compagnon d'armes du premier gouverneur, don


son

Francisco de Castro (1514-1512) (?). Pour les vnements


postrieurs 1525, il relate ses souvenirs personnels, soit

qu'il raconte les faits dont il a t tmoin lui-mme, soit qu'il

s'en rfre aux informations qui lui ont t lournies par des
tmoins oculaires. Si certaines assertions relatives l'his
toire des Chrifs et obtenues par cette voie sont sujettes
caution, on peut, estime M. de C. faire confiance au chroni

queur pour tout ce qui concerne Santa-Cruz mme. Malgr


l'absence d'indications chronologiques, la sincrit du narra

teur, indiffrent toute proccupation d'ordre littraire, est


211

une garantie de la vracit du rcit. La plupart des noms de


personnages cits dans la Chronique ont pu tre retrouvs

par l'diteur dans les documents originaux ainsi que des allu

sions plus ou moins prcises la plupart des faits raconts

dans ce mme ouvrage. Aussi bien les dtails pittoresques

ou ralistes qui se rencontrent chaque page permettent-ils

au lecteur de reconstituer l'existence mouvemente de la


garnison et des habitants de Santa-Cruz pendant les quinze

dernires annes de la domination portugaise. Celle-ci s'tait

tablie tout d'abord et maintenue sans trop de difficults


grce la supriorit d'armement des chrtiens, grce
l'anarchie o vivaient les tribus du Sos, grce aussi
l'alliance de chefs puissants, tels le cad Ben Melek, qui fut poul
ie gouverneur don Francisco de Castro un auxiliaire prcieux

et loyal. Les chrtiens purent excuter des razzias fructueuses


et contenir tout d'abord les chrifs saadiens qui avaient pris
leur-
la direction de la guerre sainte et s'efforaient d'imposer
autorit aux populations du Sud. Mais les choses changrent

sous les successeurs de Castro et rendirent la situation des


chrtiens de Santa-Cruz de plus en plus prcaire.

Cette priode critique est prcisment celle dont le rcit

occupe la plus grande partie de la Chronique. A partir de


1530, Santa-Cruz est troitement bloque par les forces de
Mohammed ech Cheikh, qui entretient des relations dans la
place et essaye mme de s'en emparer
par-
surprise en 1533.
L'chec de cette tentative ne fait que retarder le dnouement
invitable. Le chrif profite d'une nouvelle trve pour se pro

curer, auprs de ngociants europens, l'artillerie, les armes


feu, les munitions dont il a besoin, puis en 1540 commence
un sige en rgle, dont notre auteur raconte avec de minu

tieux dtails les pripties mouvantes. Le gouvernement de


Lisbonne ngligea d'envoyer temps les secours demands
par le gouverneur d. Guttere de Monroy, si bien que les
dfenseurs de la place purent, malgr leur valeur, triom
ne

pher du nombre et de l'obstination de leurs adversaires. Le


12 mars 1541, ceux-ci s'emparrent de la ville et du chteau.

Bon nombre de chrtiens prirent les armes la main ou se

noyrent en essayant de gagner la nage deux caravelles

mouilles au large ; les survivants, et parmi eux le gouver

neur et l'auteur de la Chronique, durent se rendre et furent


emmens en captivit. Le partage du butin provoqua entre

Mohammed ech Cheikh et son frre an, El Aredj, une guerre


dont le premier sortit victorieux. Les dernires pages de la
-
212 -

Chronique sont consacres au rcit de ces vnements,


d'aprs des renseignements fournis l'auteur par des h che

valiers maures de condition et par des captifs chrtiens, qui

allaient avec les chevaux du chrif ... Ce rcit ne manque pas

d'intrt mais ne concorde pas toujours avec celui que nous

donnent d'autres sources portugaises et les ouvrages de Mur-

mel et de Diego de Torrs. L'auteur insiste enfin sur les


consquences de la perte de Santa-Cruz, qu'il indique en des
termes dont on ne saurait contester la justesse : Aussi
longtemps, crit-il, que Sanla-Cruz appartient aux chrtiens,
comme clef de l'Afrique tait, l'Afrique resta debout,
qu'elle

et quand ce fut la fin du cap de Gu, ce fut la fin de l'Afrique...


Cinq mois prs on abandonna Safi, Azemmour, El Ksar el

Seghir, et cinq ans aprs Arzila et il ne resta plus en Afrique


que Mazagan dans le royaume de Marrakech, et dans celui

de Fs, que Ceula et Tanger... par quoi on voit combien il


est vrai que Je bourg de Santa-Cruz... est la clef de la porte

de l'Afrique .

La Chronique publie par M. de C. mritait tous gards


d'tre tire de l'oubli, et complte utilement les renseigne

ments fragmentaires que nous possdions sur l'histoire de


Sanla-Cruz. L'diteur a d'ailleurs pris soin d'en montrer

l'intrt dans une introduction aussi sobre que prcise ; il


a, d'autre part, enrichi le texte d'une annotation abondante

tire des chroniqueurs contemporains ou des archives du


Portugal, utilisant souvent des pices indites. Il a pu ainsi

rectifier certaines donnes inexactes, identifier les noms de


lieux plus ou moins dfigurs le chroniqueur, enfin, il s'esi
par

efforc de corriger, dans la mesure du possible, les leons


trop souvent fautives du seul manuscrit qu'il et sa dispo
sition. La Chronique dite par ses soins rendra les plus

grands services aux travailleurs s'occupant de l'histoire de


la domination portugaise et a sa place toute marque parmi
les de la Collection de Documents indits
volumes sur l'his
toire du Maroc.
Georges YVER.
213

R. Vadala, Consul de France Samsoun.

Sumsoun, pass,
prsent, avenir, avec 8 pi. hors-texte. Paris, Geuthner,
1934. (Pays et Cits d'Orient, II).

Cet ouvrage est une intressante monographie de l'impor


tante ville turque de la Mer Noire. Aprs avoir fait l'histori
que de Samsoun, l'ancienne Amisos, l'auteur tudie la ville

actuelle, sa population, son port, les ressources de la rgion

dont elle est le dbouch. Puis, aprs un aperu sur le rle de


XIXe
la France Samsoun au cours du sicle, il indique
quelles sont les possibilits de dveloppement de cette cit.

Plusieurs statistiques utiles son! jointes celte tude.


La lecture de ce travail laisse parfois une impression de
confusion. D'autre part, il y aurait beaucoup critiquer dans
l'expos historique, dont la documentation est insuffisante : il
ne semble pas que les articles de l'Encyclopdie de l'Islam
ou de l'Encyclopdie de Pauly-Wissowa y aient t utiliss (1).

M. CANARD.

Album Historique et Artistique des sceaux officiels des Gou


verneurs Gnraux de l'Algrie depuis la conqute jusqu'en
1934.

Alger, Marcel Lon, 1931, in-fol.

Cet album, de format (52x39) et de prix (1.200 francs) ga


lement considrables, ne tient pas les promesses du titre
puisqu'il donne seulement la reproduction de sceaux de
quinze gouverneurs gnraux de l'Algrie, avec la traduction
de leur devise. A part celle de Plissier : Que Dieu lui donne

Samsoun a modifier
(1) L'histoire de est maintenant compltement

pour l'poque seldjoukide depuis la dcouverte du P. de Jerphauion,


expose dans l'article : 2uiJ**v et ApSof, Une cille d dplacer de
neuf cents kilomtres (Orientalia Christana Periodica, 1935, I, p. 257
Samsoun-
et suiv.). Il faut rayer de l'histoire l'ide traditionnelle de

Amisos, enclave grecque dans les possessions seldjoukides au dbut

du XIII* sicle. Samsoun-Amisos tait bien aux Seldjoukides et a t

confondue avec au^wv, ville de Fhrygie. Cf. aussi, Byzantion, X,


1935, p. 67 et suiv.
214

la victoire ! .t, celles qui sont graves sur les sceaux de


Bugeaud et des treize autres gouverneurs civils de 1871
1934, expriment unanimement et de faon pacifique la confiance

des reprsentants de la Rpublique Franaise dans le Dieu


Tout-Puissant.
Ces reproductions sont accompagnes d'un avertissement

de l'diteur, d'une prface autographe de M. Carde, et d'une


notice sur les Sceaux chez les Musulmans, signe Mirante.
Sur la premire page de cet album on lit : Gloire et pros

prit la France et l'Algrie .

G. ESQUER.

Bichr Fars.
L'Honneur chez les Arabes avant l'Islam.
(Etude de sociologie), avec prface de M. Gaudefroy-Demom-

bynes. Paris. Adrien Maisonneuve, 1934. xxiv-226 p., in-8.

Comme l'indique le sous-litre de son ouvrage, M. Bichr


Fars introduit dans l'tude de la civilisation arabe antisla-

mique le point de vue sociologique. Son livre est une analyse

de l'honneur, considr comme une donne sociale, fonde


sur un examen minutieux et approfondi des seules sources

contemporaines, les sources littraires et en particulier les


posies de fakhr de la Jhiliyya .

Dans l'introduction, o M. Bichr Fars expose sa mthode et

fait une critique des sources, il s'est attaqu immdiatement


l'objection invitable de la non-authenticit d'une grande
partie de la posie antislamique, question qui a dj fait
couler beaucoup d'encre en Orient. On n'a pas manqu

d'ailleurs de faire cette objection l'auteur, tort croyons-

nous. Mme apocryphe, cette posie est une base relle, car il
semble difficile que ceux qui l'ont compose aient pu inventer

de toutes pices les coutumes et sentiments des Bdouins de


l'antislam : la tradition sur laquelle ils s'appuyaient ne pou

vait pas tre apocryphe. Ils ont pu exagrer et embellir les


traits des hros de la Jhiliyya >, ils ne les ont pas faits
d'une autre nature.

Le premier chapitre prcise l'objet de la recherche. L'hon-


-
215 -

neur ne s'identifie ni la futuwwa (chevalerie), qui, d'aprs

l'auteur, est postrieure l'anlislam, ni la mur'a (vir-

tus), mot qui n'avait aucune porte morale cette poque-l,


ni au sharaf
moderne, qui, alors, n'tait que la noblesse
des pres. L'honneur, c'est le 'ird >, concrtis extrieurement
par la louange madh el l'outrage dhamm ... Les deux
chapitres qui suivent, Description des lments de l'hon
neur i) et Explication des lments de l'honneur , nous font
pntrer profondment dans la socit antislamique, en tu

diant et analysant toutes les manifestations de la vie des


Arabes de cette poque, qui ont trait l'honneur. Pour cer

tains faits, ainsi pour le "


wa'd (infanticide des filles), l'au
teur apporte une interprtation nouvelle (incapacit guerrire

de la femme) diffrente, et. de l'explication des orientalistes

europens, el de celle des rudits arabes. Ces chapitres, outre

leur importance du point de vue sociologique, sont d'une


inapprciable valeur du point de vue philologico-littraire, car
ils nous permettent souvent de mieux prciser, ou de rectifier,
l'interprtation de nombreux mots arabes reprsentant une

ide complexe, et dont la traduction en une langue trangre


ne rend pas toujours compte de tous les lments qui ont

contribu composer ce concept. Nous avons l un admirable

commentaire des nombreux rcits qui se sont groups autour

de certaines posies de la littrature antislamique.

Le chapitre Fonction de l'honneur tend prouve)'

que,
le rle de la religion, dans l'antislam, tant peu prs nul
pour crer un tat de vie sociale intense, l'honneur se substi

tuait la religion dans cette fonction. L'honneur tait quelque

chose de sacr ; toutes les


y ressortissant avaient un vertus

caractre d'obligation, liant les individus et les groupes, et il

formait ainsi l'armature de la socit antislamique. Cette

socit, ainsi, n'tait ni anarchique, ni matrialiste, ni primi

tive, ni barbare.
Ces affirmations sont peut-tre un peu trop catgoriques. De
mme le concept d'une religion de l'honneur rgissant une so

cit est un peu moderne, et nous doutons qu'il puisse suffire

expliquer tous les aspects de la vie morale et sociale de


l'antislam.
M. Bichr Fars a voulu, dans ce livre, rhabiliter l'ant
islam aux yeux des modernes shu'fbites cl le venger des
apprciations de certains orientalistes europens, pour qui il
n'est pas toujours tendre. Il n russi nous en donner une

image flatteuse et en tout cas beaucoup plus exacte que celle


216

que nous fournissait l'cole orientaliste ancienne ou mo

derne. L'ouvrage de M. Bichr Fars constitue une des


plus importantes contributions l'tude de la socit arabe

ancienne, o l'auteur a montr autant de finesse et de sret


de jugement que d'rudition et de connaissance des mthodes
et des travaux scientifiques modernes.

M. CANARD.

Mohammed Essad Bey.


Mahomet (571-632), traduction fran
aise de J. Marty et G. Lepage (1),328 p. in-8. Paris.
Payot, 1934.

L'auteur de cet ouvrage est un musulman de l'Adherbeid-

jan, connu galement par une Epope du Ptrole . Il semble

avoir originellement crit en russe ; plusieurs faits de graphie

laissent en effet transparatre le russe : p. 58, Monophilites

Monothlites Mouuavara Mounaw-


pour
; p. 39, pour

wara , Agoura Mousda pour Ahoura Mazda , etc. Mais


la prsente traduction a t faite sur la version allemande

parue en 1932, comme le montrent d'autres indices du mme

genre ; ainsi, la transcription allemande dsch pour


dj .

que les traducteurs franais ont maladroitement ramene


dch Moudcbir , Had-
: p. 104, pour Moudjir, p. 39,

chat-el-Asouad (sic), pour cl-Hadjar el-Aswad .., et surtout

p. 74 : d Ne t'ai-je pas trouv sage ? au lieu de Ne t'a-t-il


pas trouv orphelin ? par confusion entre Weise et

Waise (Coran, 93. 6). Il y aurait d'ailleurs beaucoup dire


sur la traduction, ainsi que sur la transcription des mots ara


bes, qui ne s'accorde avec aucun des systmes usuels et rend

mconnaissables les noms les plus lmentaires. Il est peu de


noms propres qui ne soient pas dforms d'une faon inconce
vable (2). Nous n'apprcierons pas davantage l'oeuvre des

(1) Sans autre indication. I.c titre ne di1 pns de quelle langue
l'ouvrage a t traduit.

(2) Mais faut-il attribuer l'auteur ou aux traducteurs la


transformation de Ghassan ides en Sassanidps et dp
Lakbmides en
Arlimnirtes , p. :>5 ?
-
217 -

traducteurs, mais nous ne saurions passer sous silence la


spirituelle prface que M. E.-F. Gautier a crite pour le livre et

o il a finement oppos les prophtes des religions anciennes

aux modernes Prophtes-Dictateurs des religions laques nou

velles. Il n'est pas mutile de faire ressortir cette ide ds


maintenant, car nous verrons que M. Mohammed Essad Bey
aime se reprsenter Mahomet comme un dictateur moderne.

L'ouvrage se compose de quatre parties, une d'introduction :

Le Monde avant le Prophte ; deux d'histoire du Prophte


proprement dite : La Mission el L'Etat de Dieu ; une


de conclusion : Le Monde aprs le Prophte . Il ne vise pas

l'tude historique critique el est crit pour le grand public.

L'auteur s'est fond avant tout sur les donnes traditionnelles


de l'histoire du Prophte, dont il parat avoir une bonne cou-

naissance, probablement par les textes originaux. Les ouvra

ges europens sur la Sra et sur l'Islam en gnral ne

semblent pas avoir exerc la moindre influence sur lui. On


sent bien parfois une pointe d'indulgence incrdule l'gard
des pieuses lgendes qui entourent la Vie du Prophte ...

mais cette incrdulit ne va pas lis loin. Si la conformation

du ciel, telle qu'elle rsulte des rcits sur l'Ascension de


Mahomet, lui semble discutable au point de vue cosmogra

phique, il ne met doute instant l'ascension elle-


pas en un seul

mme. Il en est de mme pour une foule d'autres dtails lgen


daires. On ne s'tonnera pas non plus de trouver dans ce

livre tous les lieux communs des apologistes de l'Islam, sur

l'esprit galilaire et dmocratique de l'Tslam, sur la suprio


rit de la lgislation musulmane l'gard de la femme, sur la
ncessit de la polygamie, sur le harem europen qui ne

diffre pas beaucoup du harem oriental, etc.


Mais si l'auteur suit pas pas et aveuglment la tradition

musulmane, il ne s'est, pas interdit de donner libre cours dans


son livre deux tendances qui font de cette histoire du Pro
phte quelque chose d'un peu spcial et de trs moderne.

D'une part les paysages de l'Arabie, les scnes connues et

simples de la vie du Prophte, les tableaux de la vie des


marchands de la Mekke ou des migrs de Mdine, les exp

ditions de Mahomet sont prsents sous un aspect grandiose

et romantique, et bvpc un luxe de dtails imaginaires peu

conformes la vrit. A entendre l'auteur, on croirait Khlid


ibn al-Walld. le Mural, de l'Tslam .., la tte d'une innom

brable cavalerie. De mme le chapitre intitul Tkra con

d'une sorte de Gotterdmme-


tient une curieuse peinture
-
218 -

rang de l'antislam, o se meut dans un paysage chaotique et

fantastique un Prophte chevel qui s'apparente plus des


hros de la Lgende des Sicles qu'au Prophte de la Sira.
L'autre tendance pourrait tre appele politique. L'auteur

semble-t-il, veut moins nous raconter l'histoire du Prophte


que nous montrer en l'Islam une religion
, claire, politique

sche, sobre, pratique, appele tendre sa domination sur


le monde (I), raliser la synthse de la dictature et de la
dmocratie, faire rgner la paix universelle. La foi du Pro
phte est une croyance positiviste , une foi sche et domi
natrice ... Mahomet lui-mme est un homme pratique exalt
;
le trait le plus remarquable de sa personnalit c'est la jux
taposition paisible en lui de l'extatique et du praticien plein

de sang-froid . Et ce que l'Islam offre de nouveau dans


l'histoire universelle, c'est la ralisation pratique revtue par

une doctrine abstraite . Tout au long de la troisime partie,


L'Etat de Dieu , on sent passer un souffle mystique et rvo

lutionnaire qu'on pourrait croire d'inspiration sovitique ou

hitlrienne. Lin chapitre est intitul La Terreur , le sang


et

ne parait pas faire peur notre auteur. Les Prtoriens du


nouveau Prophte ,
les formations d'assaut de l'Islam sont

des formules qu'affectionne Mohammed Essad Bey.


Dans la dernire partie du livre, l'auteur ne dissimule pas

son admiration pour le Wahhbisme. On dirait mme que


lout l'ouvrage n'a t crit que pour nous faire voir l'Islam
du Prophte sous un angle qui le rapproche de cet aspect

particulier de l'Islam moderne el pour le relier directement


lui, bref, pour faire l'apologie du Wahhbisme et de ses

mthodes. Le livre se termine par une vision qui en dit long


sur les secrets espoirs de l'auteur, par la vision des
Ikhwo d'Ibn Soud se prparant au combat de l'esprit
et du glaive, la guerre sainte de l'Islam , et ceci, sans doute,
pour dominer non seulement l'Orient, mais le monde.

M. CANARD.

l'auteur-
<A) Naturellement, .pense que le Prophte avait dj
Vide de l'universalit de l'Islam, ce qui est discutable.
-
219 -

Revue des Priodiques

L 'Africa Italiana.
Mars-juin IBM.
F. Bguinot : A pro-

posito di Arabi e Berberi dlia Libia.


Janvier-juin 1935.

A. Teruzzi : Politica fascista in Libia.

Afrique Franaise.
Juin I93i.
J. Ladreit de Lacharrire :

Les menes allemandes dans le Sud Marocain.


J. Menaut :

Le problme indigne algrien.


S. Hraut : Les conditions

de l'occupation espagnole Uni.


J.-L.-L. : L'inauguration
du Fs-Oudjda.
L. Mohendis : Aprs la runion de la
Commission des affaires musulmanes.
L'Afrique et l'Espa
gne.
L'Afrique et l'Italie.
G. Fidel : Le Sahara Paris.

Renseignements coloniaux : L'organisation du march du


bl en Tunisie.
E. Mige : La vrit sur les bls du Maroc.

En Tunisie, le Grand Conseil et les fonctionnaires.


Juil
let.
A. Iioffberr et R. Moris : Au Maroc. Le pouvoir d'achat
L'exposition du Sahara Tru-
indigne.
E. F. Gautier : au

cadro.
L'Afrique et l'Italie.
L'Afrique et l'Espagne.

Champ : En Algrie. La session ordinaire des Dlgations Fi


nancires.
Renseignements coloniaux : Au Maroc. Le pro

blme de l'eau.
Aot.
Numro consacr au Marchal
Lyautey.
Renseignements coloniaux Mourgues : Gravures
rupestres chez les Touareg nigriens.
P. Montfert : Essai
sur la proprit paysanne au Maroc.
Cne Lehuraux :

Une belle reconnaissance saharienne.


Septembre.

L. Mohendis : A l'assaut de l'Afrique franaise du Nord. Les


manifestations en Algrie (1933-1934).
L'Afrique et l'Italie.

L'Afrique et l'Espagne.
Octobre.
Libycus : La pousse

italienne vers le centre Afrique.


Novembre.
J. Menaut :

Les Questions algriennes. Les raisons d'un dcret.


S. H
raut : La question d'Ifni.
Libycus : L'Afrique et l'Italie.
-
220 -

Le rglement des questions coloniales avec la France.

A. M. : Quelques critiques espagnoles de la politique franaise


au Maroc.
L. Lehuraux : Regards vers le Sahara oriental.

J. N. G. : Deux colonisations : Djefara Tripolitaine et Tuni


sie du Sud.
Dcembre.

L. Mohendis : A l'assaut de l'Afri


que du Nord.
J. Menaut : Questions algriennes : Affaires
indignes et Territoires du Sud.
R. Delavignette : Autour de
la fondation tunisienne. -
J. N. G. : Deux colonisations :

Djefara Tripolitaine et Tunisie centrale.


Libycus : L'Afri
que et l'Italie. Les confins lybiens.
A. M. : L'Afrique et

l'Espagne.
L'Espagne et le nationalisme marocain.

Renseignements coloniaux : L. Clariond et P. Manchauss :

Le charbon au Maroc.
M. C. : La session extraordinaire

des Assembles Algriennes.


Janvier 193.).
J. Ladreil
de Lacharrire : Les circonstances et les formes des accords

de Rome.
J. Menaut : Questions algriennes. Circonscrip
tions arabes et kabyles aux Dlgations financires.
Fvrier.

J. Menaut : Les lections indignes aux Dlgations finan


cires.
A la Confrence impriale. Les communications trans
sahariennes.
L. Mohendis : A l'assaut de l'Afrique fran
aise du Nord.
J. Desparmet : Le nationalisme l'cole
indigne en Tunisie et en Algrie.
Mars.
R. Vanlande :

Anticipations sur une carte de guerre.


J. Menaut : A propos

du voyage de M. Rgnier en Algrie.


S. Hraut : Les
liaisons dans le Sahara occidental el la convention de Bir
Moghren.
A. Mnard : Le phnomne tangrois.
Avril.

H. Labouret : Spcialisation. L'heureuse initiative de la Mau


rtanie. La pacification du Sahara Oriental et ses consquen
ces.
J. Desparmet : Le nationalisme l'cole indigne en
Algrie et en Tunisie.
Renseignements coloniaux : A. Ber
nard : Le dnouement de la crise algrienne.
L'Algrie au

Snat.
.1. Menaut : En marge de Robert Randau. Dmogra
phie et psychologie algriennes.
L. Mohendis : A l'assaut de
l'Afrique franaise du Nord.
Le problme des rformes alg-

riennnes.

I"
Al-Andalus. fase. 1933. Asin Palacios : Un prcur-

sor hispano-musulman de San Juan de la Cruz. L. Garcia

Cornez : Observaciones sobre la qasida maqsra de


\b-l Hasan Hnzim al-Qarfayanni. M. Aitluna : Una ver

sion arabe compendiada de la Esf.oria de Espana de Alfonso


el Sabio.
A. P. V. : Dos lapidas balladas recientemente en
Alineria.
M. Antuna : Sobre el Mustayad et al-Tanuji .

Fasc. 2.
G. Levi dlia Vida : Il regao di Granata nel 1405-00
nei ricordi di un viaggiatore egiziano.
A. Gonzalez Palemia:
Prcdentes islamicos de la lgenda de Garin.
A. ti. Xykl :

La poesia a ambos lados dei Pirineo hacia el ano 1100.

J. Oliver Asin : Un morisco de Tunez, admirador de Lope.


fasc. I93'i.
E. Garcia Cornez : Don Julian Ribera y
Tarrago.
Asin Palacios : Un codice inexplorado dei Cordobs
Ibn Hazm.
R. Ruiz Orsatti : La guerra de Africa de 1859-

1860 segun un niarroqui de la epoca.


X. Moratal : Un cala-

logo de los fondos arabes primitivos de El Escorial.


E. Gar
cia Gomez : El Parangon entre Malaga y Sal , de Ibn al

Fatib.
I. Kralchkovsky : Une anthologie magribine incon
nue Leningrad.
A. R. Nykl : Una cancion popular marro-

qui.
Fasc. 2.
G. Sut-ton : Oriente y Occidente en la his-

loria de la ciencia. A. Prieto y Vives



: Tesoro de monedas

musulmanas encontrado en Badajoz.


E. Garcia Gomez :

Ibn Mammati, compendiador de la Dajira .


F. de A.
Iniguez, J. Rodriguez Cano, L. Tories Balbas : Cronica arqueo-

logica de la Espana musulmana, t.


4"
fasc. 1935. M. Meyerhof : Esquisse

d'Histoire de la
pharmacologie et botanique chez les Musulmans d'Espagne.

A. Gonzals Palencia : Venta per deudas en Toledo a fines


dei siglo XII.
.1. M. Sans : Abarifes moros aragoneses.

1. Kratchkovsky : lin manuscrito de las Lata'if al-Djira

de Ibn Mammati en Leningrado.


J. A. Sanchez Prez :

Sobre las cifras y Vives : Miscelanea


rumies.
A. Prieto
numismatica. Cronica arqueologica de la Espana musulmana,

II. L. Bouvat : Les noms persans de l'Espagne et du Por


tugal.
El armistieio de la guerra de Africa.
G. Levi dlia
Vida : Ignazio Guidi.
Fasc. 2.
E. Lvi-Provenal : Un
texte arabe indit sur l'Histoire de l'Espagne musulmane dans
XIe
la. seconde moiti du sicle.
M. Asin Palacios : La tesis
de la de la revelacion, en el Islam y en la E'scolas-
necesidad

tjea. Cronica arqueologica de la Espana musulmana, III.



M. Antuna : El codice 280 de El Escorial. n

Annales de Gographie.
15 juillet I93L
R. Musset :

Les forts de l'Algrie.


15 mars 1935.
R. Perret : Le cli

mat du Sahara.
15 novembre.
R. Perret : A travers le
pays Ajjer. Itinraire de Fort-Flatters Djanet.

222

Annales de l'Institut d'Etudes Orientales de la Facult des


Lettres d'Alger. -
Tome 1, annes 193'i-35. G. Hardy: Avant-

propos.
M. Canard : La l'orme arabe Fa'li . A. Bas

set : Autour d'une racine berbre.


J. Cantineau : Nabaten
et arabe.
J. Noiville : Eon, Jrmie et Alexandre.
A. Bel :
XIIe XIIIe
Le sufisme en Occident musulman au et au sicle

de J.-C.
G. Marais : Sur un bas-relief musulman du Mu
se Stphane Gsell.
E. Lambert : De quelques incertitudes
dans l'histoire de la construction de la grande mosque de
Cordoue.
E. Lvi-Provenal : Un historiographe et pote de
cour mrinide : Abu Fris al-Malzzl.

R. Brunschvig : Ibn
s-Samm', historien hafside.
H. Mass : Manoutcheri,
XIe
pote persan du sicle.
H. Prs : Les premires ma

nifestations de la renaissance littraire arabe en Orient au


XIX0 1934-35.
sicle.
Programme de l'anne scolaire

Titres des communications faites aux sances mensuelles de


IT. E. O. en 1934-35.

Annales Universitaires de l'Algrie. Bulletin de la Socit


/re
des Amis de l'Universit d'Alger.
Nouvelle srie, anne,
1-2, janvier*juin 1935. G. E. Al
n"B

Hardy : L'art ngre.

bertini : De la paix romaine la dsagrgation de l'empire.

XVIIIe
E. Leblanc : Un mdecin de combat au sicle. Guy
Patin ou le bourgeois humaniste.
Ch. Killian : Le rle et
l'importance de l'exprimentation cologique pour l'agricul
ture de l'Algrie.
Chronique : Statuts de l'Association des
Amis de l'Universit d'Alger.
Conseil d'administration.

Sance solennelle de rentre des Facults pour l'anne 1934-

1935. Extrait du discours de M. le recteur Hardy.


L'activit
de l'association depuis sa cration. Rsum de la confrence
Hasard-
de M. Rouyer sur le el les probabilits. Concert de
musique ancienne.

Bulletin Archologique du Comit des travaux historiques


et scientifiques.
Novembre 1933.
L. Leschi : Inscriptions
de Zana (Diana Veteranorum).

L. Poinssot : Sculptures et
inscription de Bni-Kraled (Tunisie).
Inscriptions de Mateur
et milliaire de la route de Carthage
Thaveste. Dcembre.

L. Leschi : Inscriptions de Lambse et de


Timgad.

L. Poinssot : Stles de Thuburbo Majus.


Inscriptions d'.\vedd->
et d'Uccnla. Lieut.-Col. Tarrit : Pierres inscrites du

Talidat el des environs d'Alnif (Maroc). C.


Saumagne :

223 -

La Schola de Chemtou (Tunisie).


Janvier 1934.
L. Poins
sot : Inscriptions de Meninx, de Gourine et du Kef.
L.
Leschi : Le cimetire de la portede Lambse, Timgad.

C. Saumagne : La maison du Paon, Carthage. Fvrier

1931.
L. Poinssot : Inscriptions chrtiennes de Haidra.

Mars I93'i.
L. Poinssot : Intailles de Carthage.
E. Alber
tini : Inscriptions de Tiklat (Tubusuctu).
L. Chtelain :

Travaux archologiques au Maroc en 1933.


Mai 1934.

J. Carcopino : Inscription d'un lgat de Numidie.


L. Leschi :

Inscription et travaux hydrauliques de Timgad.


Juin 1934.

L. Chtelain : Inscriptions de Banasa et de Thamusida.

L. Poinssot : Inscription de Kasserino.


Berthier : Mosaque
de Khenehela.
Novembre 1934.
L. Poinssot : Inscriptions
de Putput et de Thaenae.
P. Rodary : Inscriptions libyques
de Ksiha-Mraou.
Dcembre 1934.
L. Poinssot : Milliaire
de la rgion de Haidra. Tuiles estampilles trouves Sousse.
P- Massira : Inscriptions de la rgion stifienne.
P. Ro
dary : Inscriptions libyques de la rgion de Souk-Ahras.

Bulletin de la Socit de Gographie et d'Archologie d'Oran.


/"

trimestre 1934.
R. Tinthoin : Esquisse gographique

du Massif du Tessala oriental.


V. Desjardins : Une colonie
2e
agricole de 1848 : Rivoli.
trimestre I93'i.
L. Voinot. :

Les consquences de la lutte du Makhzen et du Rogui proxi


3" 4e
mit de la frontire algrienne (1903-1905).
el trimestres
1934.
F. Doumergue : Grotte et brche ossifre de Saint-

Roch-sur-Mer (An-el-Turck).
R. Thouvenot : Estampilles
de poteries romaines trouves au Maroc.
P. Courtot : Une
ncropole romaine d'Altava (Lamoricire).
H. Koehler :

Essai de Chronologie sur le rgne de Moulay Ben Abdallah.

M. Bodin : Documents sur l'histoire espagnole d'Oran. Nces


sit de fortifier Oran (1576).
R. Tinthoin : L'Algrie agricole
t"
et la crise conomique.
trimestre 1935.
F. Llabador :

Notice historique sur Nemours et Taount (depuis l'antiquit


jusqu' l'arrive des Franais).
Dr H. Marchand : La grotte

basse du phare au Cap Tns.


F. Doumergue : Dcouverte
d'une stle libyque Bou-Zedjar (Commune de Lourmel, d
2e
partement d'Oran).
trimestre 1935.
L. Voinot : La ten
sion des rapports avec le Maroc et l'occupation d'Oudjda par

les Franais (1906-1907).


Andr Levraux : Le glissement du
plateau des Ozaras prs de Roseville.
30 mars 1933.

Pierre Laff orgue : Le tumulus de Mjebir (Sahara Occidendal).



P. Courtot : Une ddicace en l'honneur des empereurs

Constance et Constant, trouve Altava (Lamoricire).

F. Doumergue : Muse Municipal Demaeght.

Carnet de la Sabretache.
1934.
Gai. Zd : Souvenirs
de ma vie (1837-1908).

Juillet-aot.
Lieut.-Col. Libras :

La reconstitution de dtachements de l'ancienne arme d'Afri


que en 1930.
Mai-juin 1935.
J. Brunon : Un portrait

d'officier de chasseurs d'Afrique.

Christus.
20 dcembre 193'i.
J. Vignal : Un Berbre
martyr au XVIe sicle. La merveilleuse histoire de Grome
l'empis.

Etudes.
20 aot 1934 et 20 janvier 1935.
L. Jalabert :

L'inquitude nord-africaine.
20 mars 1935.
L. Jalabert :

La fermentation algrienne.

Gazette des Beaux-Arts.


Novembre 1934.
J. Alazard :

Les villes modernes au Maroc.

La Gographie.
Fvrier 1934.
M. Roblin : Les Juifs
d'Algrie.
Mai-juin.
A. Berthier : Les richesses achologi-

que de la province de Constantine.


M. Raineau : Chez les
Musulmanes non voiles de la Kabylie.
Juillet-aot.
Lieu
tenant-Colonel Bernard : Les oprations de pacification de
l'Anti-Atlas.
Novembre-dcembre.
G. Segaud : Choses
de Mauritanie.
Mars 1935.
M. Snones et O. de Puigau-

dan,: Nomadisation en Mauritanie.


Mai-juin.
De Lye
de Belleau : Oasis de Lybic. Cyrnaque.
Octobre.

E. Dubuc : Le pays de Tazenaghl et la boucle de l'Oued Draa.

2''-i
Hespris.
trimestres 1934 (Tome XIX, fasc. 1, 2).

J. Clerier : Les conditions gographiques du dveloppement


de Fs.
J. Dresch : Remarques sur le cours de l'Oued
Sebou dans la rgion de Fs.
P. de Cenival : Ren de Cha
teaubriand, comte de Guazana, au royaume de Fs, 1493.

R. Ricard : Les deux voyages de P Fernando et Contreras


Fs.
R. Le Tourneau : Notes sur les lettres latines de Nico
las Clnard relatant son sjour dans le royaume de Fs.

1. de las Cogigas : Un trait de paix entre le roi Pierre IV


225 -

d'Aragon et le sultan de Tunis Abu Ishak II.


Y. D. S-

mach : Une chronique juive de Fs : Le Yahas Fs de


Ribbi Abner Hassarfaty.
G. Marais : Les changes artis
tiques entre l'Egypte et les pays musulmans occidentaux.

F. de la Chapelle : L'expdition de Suetonius Paulinus dans le


sud-est du Maroc.

R. Ricard : Encore sur l'ambassade de


Jorge Juan au Maroc.
R. Thouvenot : Note sur les monnaies
VIIe
antiques trouves Chella.
Actes du Congrs de l'Ins
titut des Etudes Marocaines (Rabat-Fs, 13-20 avril 1933).
2e-4e
trimestres 1935 (Tome XXI, fasc. 1, 2). L'arabe

Salamanque au temps de la Renaissance.
P. de Cenival et
F. de la Chapelle : Possessions espagnoles sur la Cte occiden

tale d'Afrique : Sanla-Cruz de Mar Pequena et Ifni.


R. Ri
card : Recherches sur les relations des Iles Canaries et de
XVIe
la Berbrie au sicle.
R. Thouvenot : Notes sur deux
inscriptions chrtiennes de Volubilis.
A. Ruhlmann : Moules
bijoux d'origine musulmane.
J. Jouin : Les thmes dco
ratifs des broderies marocaines. Leur caractre et leurs ori
2e L.
gines (suite du trimestre 1932).
R. Le Tourneau et

Pays : La corporation des tanneurs et l'industrie de la tanne


rie Fs.
R. Ricard : Les relations de l'ambassade de
Jorge Juan au Maroc (1767).

L'Information de la Quinzaine.
3 avril 1934.
L'occupa
tion du sud-marocain.
IS avril.
La dernire tape de la
conqute du sud-marocain et le territoire espagnol d'Ifni.

Journal Asiatique.
Juillet-septembre 1933.
W. Mar

ais et Jellouli Fars : Trois textes arabes d'El Hamma de

Gabs.
E. Tejan : L'ide dynastique clans le gouvernement

de l'Islam.

Mlanges d'Archologie et d'Histoire de l'Ecole de Rome.


0)34. Le monastre d'An-Tamda et les origines de l'archi


William Ses-
tecture monastique dans l'Afrique du Nord, par

ton (7 Une basilique donatiste de Numidie, par


gravures).

Pierre Cayrel (2 pi., 1 grav.). Fouilles dans la basilique de

Henchir-el-Ateuch (Algrie), par M. Simon (2 pi., 1 grav.).

Mercure de France.

15 avril. 1935.
W. Drabovitch :

Les Etats barbaresques et les dictatures modernes.

15

226

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16 juin 1935.
Lieut.-Col. de

Saint-Rmy : Le voyage du P. de Foucault au Maroc.

I"

La Nature.
dcembre 1934.
V. Forbin : L'indus
1"
trie vinicole en Algrie.
janvier 1935.
L. Joleau :

Palontologie du Sahara tripolitain.

Oriente moderno.
Mars 1934.
A. Bertola : Confessione
religiosa e statuto personale dei cittadini italiani nell'Egeo e

libici.

N"
Questions nord-africaines.

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P. E. Viard : Notre programme. Avis au lecteur.


J. Franc :

Les grandes tapes de l'Histoire de l'Afrique du Nord jus


qu'en 1830.
O. Dupond : Les Assembles Algriennes.

H. Fontanille : Le drame de conscience du musulman nord-

africain propos d'un livre rcent.


Varits et chroniques :

Notes sur la presse indigne. La chronique tunisienne de


l'Oriente Moderno.
Le ministre de la France d'Outre-Mer
dans le cabinet Daladier du 30 janvier 1934.
Les vnements
de Constantine du 5 aot 1934. La commission des rformes
N
indignes. Comptes rendus.

2, mars 1935.
Ch. Mon
chicourt : Le statut des Italiens en Tunisie.
M. Schweitzer :

Le peuplement europen de l'Algrie.


R. P. Sallam : Lan
gue et littrature arabes.
P. E. Viard : Le sucre et le th
dans le budget algrien de 1935.
Varits : Un livre d'ner
gie, par C. J. Le centenaire d'une Tunisienne, par Paul

Marty. Statistiques.

Chroniques : Rorganisation de la

Haute Administration Algrienne. Les nouvelles frontires

de la Lybie.
La cration d'un Haut Comit Mditerranen
et de l'Afrique du Nord.

Malaise en Algrie.
La chronique

tunisienne de l'Oriente N"


Moderno.

3, juin 4935.
G.
Yver : L'Algrie de 1830 nos jours.

H. Bruno : La rorga

nisation de la Justice sculire au Maroc.


G. Rectcnwald :

Notre politique en Tunisie.


H. Fontanille : Le nouveau

statut viticole et la viticulture algrienne.


A. G. : L'union
douanire de la France et de la Tunisie.
Chroniques : Le
voyage du ministre de l'Intrieur en Algrie.
L'interpella
tion Violette au Snat.

Premires dcisions gouvernemen

tales.
227

Recueil des Notices et Mmoires de la Socit Archologique


de Constantine. 1934 (vol. LXII, fasc. i).

S. Rahmani :

Notes ethnographiques et sociologiques sur les Bni- Ahmed


du Cap Aokas et les Beni-Amrous.
R. Le D : Une station

capsienne.L'escargotire d'An-Bahir. H. Marchand : Les

documents humains de l'Escargotire d'An-Bahir. H. Mar

chand : Poteries anciennes de quelques grottes du dparte


ment d'Alger.
Fasc. 2.
A. Truillot : Autour de la basilique
de Tbessa.

Revue Bleue.
7 juillet 1931.
R. Celli : Treize potes

algriens.

Revue des Deux-Mondes.


l't juin 1934.
L. Bertrand :
/"
L'Alger que j'ai connu.
octobre.
A. Demaison : En
1"
Tunisie. La revanche de Carthage.
fvrier 1935.
E.
Henriot Feuillets XXX L'Algrie
/"

: algriens.
mai.
:

et ses problmes.
75 aot.
H. Bordeaux : L'pope maro
I"
caine. H. de Bournazel (suile octobre).

Revue Economique Franaise.


Mars 1934.
Gnral
Brissaud-Desmaillet : Les grands chiffres du dveloppement
de l'Algrie.

/"
Revue de France.
dcembre 1934.
R. David :

1 'alarme nord-africaine.

Revue Hebdomadaire.
12 octobre 1935.
M. A. de Bovet:
La grande piti du Sahara.

Revue d'Histoire de la Guerre Mondiale.


Octobre 1934.

J.-B. Manger : Notes sur la crise marocaine de 1905.

Revue d'Histoire des Missions.


Septembre 1935.
P.
Lesourd : Aperus historiques sur les missions des Pres
Blancs du cardinal Lavigerie.

Revue militaire franaise.


Avril 1934.
Lieul.-Col. Lan

on : Les dernires tapes de la pacification dans le Grand

Atlas marocain (suite en septembre, novembre et dcembre).


228 -

Septembre.
Cne Lageix : La bataille de Zama.

Novembre.
Cne de La Chapelle : Les possessions espa

gnoles du sud du Maroc.


Dcembre.
Lieut.-Col. Juin :

L'achvement de la pacification marocaine. Mthodes et pro

grammes.

I"

Revue de Paris.
septembre 193L
E. F. Gautier :
1"
Menaces sur l'Afrique.
dcembre 1934.
G. Bouthoul :

Les problmes tunisiens.

2e
Revue Tunisienne.
Irimestre 1934.
F. Icard : Sceaux
et plombs marqus trouvs Carthage.
H. Hugon : Numis
matique beylicale. Les pices d'or de 1272-1274.
M. S. Mzali
et J. Pignon : Documents sur Khrdine. A mes enfants. M
Mme Dubouloz-Laf-
moires de ma vie prive et politique.

fin : Croyances relatives aux maladies dues aux jnoun.

3e 4e L'habitation dans le
et trimestres 1934.
J. Despois :

Djebel Nefousa.
H. Prs : Le Kitab Al-Imama Wa's-Siysa
et la rception des potes par le Khalife Omeyyade Umar
Ibn Abd Al-Aziz d'aprs Ibn-Qutaiba.
A. Bel : Survivance
d'une fte du printemps Tunis.
M. S. Mzali et J. Pignon :

Documents sur Khrdine. A mes enfants. Mmoires de ma

vie prive et politique (suite).


Notes et 'documents : L.
Feuille : Notes sur Sidi-bou-Sad.
Le P. Lapeyre : Additions
l'Atlas archologique de la Tunisie.
E. de Agostini : La
cartographie dans les colonies libyques (trad. P. Grandchamp).
/"

trimestre 1935.
R. P. Lapeyre : Autour des grands
sarcophages puniques du Muse Lavigerie.
Farrugia de Can
dia : Monnaies husseinites. Monnaies frappes de l'anne
1117 l'anne 1196 hg. (1705 1782).
S. Zmerli : Une
figure oublie. Youssef Saheb Et-Tabaa.
M. S. Mzali et J.
Pignon : Documents sur Khrdine. Mon programme. Notes

et documents : M. Sicart et L. Poinssot : Survivances en


Tunisie du culte du serpent.
Corrado Massi : Chronique de
l'ancien temps (1815-1859) (trad. P. Grandchamp).
H. Hugon:
Ordres fantaisistes tunisiens. 2e
Irimestre 1935.
F. Icard :

Marques cramiques
carthaginoises, grecques et romaines
trouves Carthage. R. Rrunschvig : A propos d'un topo

nyme tunisien du Moyen-Age. Nha-Nhiya. C. Bgue : La

pense de Maimonide.
Farrugia de Candia : Dnraux en

verre arabes. P. Marty : Historique de la mission militaire


franaise en Tunisie (1827-1882). M. S. Mzali et J. Pignon :



229 -

Documents sur Khrdine.


IV. Le problme tunisien vu

travers la question d'Orient.


Noies et Documents : La
chute d'Alger (1830), d'aprs une relation du consul sarde,
par P. Grandchamp.
Antiquits puniques dcouvertes la
4e
Rabta, par L. Poinssot.
et trimestres 1935.
A. Gteau:
La conqute de l'Afrique du Nord et de l'Espagne, par Ibn
A.bd Al-Hakam (traduction, fin).
Farrugia de Candia : Mon
naies aghlabites du Muse du Bardo.
M. S. Mzali et J. Pi
gnon. Documents sur Khrdine. Le problme tunisien vu
travers la question d'Orient (suite).
Paul Marty : Historique
de la mission militaire franaise en Tunisie (1827-1882) (fin).

J. Despois : La fixation des bdouins dans les steppes de

la Tunisie orientale.

Notes et Documents Numismatique.


La pice tunisienne de 2 P. de 1281 (1864), par Hugon.
La
fin de la Senoussya d'aprs les sources italiennes par P.
Grandchamp.

T"
Revue Universelle.
dcembre 4934.
H. Duquaire :

Dans le Nord marocain. Aux foyers d'agitation musulmane.


-
230

CHRONIQUE

L'ARCHEOLOGIE ALGERIENNE EN 193b. (Rapport


adress M. le Gouverneur Gnral de l'Algrie
par le Directeur des Antiquits).

MM. Gautier et Reygasse, au cours d'une mission dans


le Tassili des Ajjers, ont recueilli et photographi des
documents de la plus haute importance. Ce sont des gra

vures rupestres et des peintures l'ocre de la valle de


l'oued Djerat qui jettent un jour nouveau sur les habi
tants et sur la faune de cette rgion du Sahara, une

poque antrieure aux Touaregs : chars garamantiques

attels de chevaux, combats de fantassins arms de sa

gaies, animaux de la faune tropicale et quatoriale,


girafes,
6 rhinocros, hippopotames. Ces dcouvertes
ouvrent des perspectives nouvelles sur le pass prhisto

rique de l'Afrique.
Les antiquits libyques ont reu de leur ct un nota

ble enrichissement grce la dcouverte, au cours de


l'anne iq3/i, de 108 textes pigraphiques nouveaux

dans la rgion de Souk-Ahras. Ces trouvailles, con

cidant avec la prparation du Corpus des Inscriptions


libyques, confie M. l'abb Chabot, membre de l'Ins
titut, sont appeles fournir une matire plus riche et, il
faut l'esprer, fconde en rsultats positifs, aux recher

ches sur la langue et la civilisation libyque.

Les collections archologiques d'Oran sont dsormais


installes dans le nouveau Muse : les grandes mosaques
231

de Saint-Leu, jusqu'ici peu accessibles au public, sont

bien prsentes. Ces collections ont reu un enrichisse

ment remarquable grce aux dcouvertes de Mme Vin


cent Saint-Leu galement : vases figurines et mo
Ier
tifs vgtaux de fabrication italienne du sicle avant

notre re.
A Cherchell, outre un certain nombre d'inscriptions
d'intrts divers, une belle mosaque a t exhume : au

milieu de riches motifs dcoratifs un tableau reprsente

un personnage du cycle dionysiaque debout sur un char

tran par deux tigres.


Le travail de consolidation et de prsentation des Ther
mes de Tipasa a t men bonne fin. Le Tombeau de la

Chrtienne, o sans cesse des menaces d'boulement se

manifestent, a continu tre consolid et restaur.

Dans la rgion de Stif, des recherches conduites par

M. Massira, conservateur du Mu$e de cette ville, ont

amen la dcouverte d'antiquits Tocqueville, o des


Thermes avec mosaques ont t amnags, et dans la
rgion du Hodna, Tarmount, d'une enceinte fortifie
de l'poque de Septime Svre, bien conserve avec por
tes, tours d'angle et bastions.
Les travaux de fouilles Djemila ont permis de dga
ger compltement le grand difice mosaques, au Sud
des Thermes. La partie Ouest du quartier chrtien est en

bonne voie de dblaiement: des maisons onl t exhumes

et sont consolides au fur et mesure.

A Timgad, o la construction du Muse est acheve,

on va procder l'installation des collections. Les tra


vaux de fouilles ont procur, avec un certain nombre

d'inscriptions nouvelles, une ncropole chrtienne, plu

sieurs maisons en bordure de la route de Lambse et un

grand difice encore indtermin.

Le travail de dgagement du fortin byzantin et de


l'arc de triomphe de Zana est achev. Les prochaines
-
232 -

campagnes porteront sur les maisons qui avoisinent le


Forum.
A Khmissa, les grands bassins de la source de la
Medjerda ont t nettoys et des travaux de consolidation

ont t effectus au Thtre.


Le chantier de Bne a obtenu des rsultats remarqua

bles. Au cours des dernires semaines de iq34 a t


l'extrmit"

exhume d'une place dalle de marbre, en

toure de salles richement dcores et qui pourrait tre


le Forum d'Hippone. Deux fragments de statues colos

sales, une inscription de l'an t\i aprs J.-C, des dbris


d'architecture laissent esprer que l'on a atteint un point

capital de la ville antique.

Dans la rgion de Souk-Ahras, grce l'activit de la


Socit Archologique de Thagaste, des fouilles fruc
tueuses ont t opres dans le fort byzantin de Thagora
(Gambetta) et Ksiba, prs de la frontire tunisienne.
Dans cette dernire localit de trs nombreuses inscrip
tions ont t exhumes, ainsi que des stles consacres
Saturne, trs intressantes par les reliefs qu'elles pr

sentent.

Deux membres de l'Ecole de Rome ont obtenu des


bourses de voyage et d'tude du Gouvernement Gnral.
M. Brard, Cherchell, a tudi les remparts et les aque

ducs antiques et ses travaux ajouteront notre connais


sance de Csare. M. Aymard, Port-Gueydon, a eu la
bonne fortune de trouver un magnifique sarcophage en
marbre du IT sicle reprsentant la lgende de Bellro-

phon et qui est dsormais


reconstitu au Muse d'Alger.
Les fouilles des boursiers de iq33 ont donn lieu
deux publications dans les Mlanges de l'Ecole de
Rome . M. Simon a publi : Fouilles dans la basilique
de Henchir el Ateuch et M. Cayrel : Une
basilique do
natiste de Numidie. M. Leston, qui fut jadis boursier
du Gouvernement Gnral, a publi galement dans
-
233 -

les Mlanges : Le monastre d'An-Tamda et les ori

gines de l'architecture monastique en Afrique du Nord.


VIe
Un curieux reliquaire chrtien du sicle, dcou
vert An-Liuigba, prs d'Ampre ct entr au Muse de

Constantine, a t l'objet d'une communication du
Directeur des Antiquits l'Acadmie des Inscriptions
el Belles-Lettres, au mois d'aot io3/i.

L'intrt de la collection de Vulpillires El-Kantara


n est pa.s puis. M. Albertini a tudi nouveau certains

des documents qu'elle renferme dans un article : .4 pro

pos des Numeri Syriens de Numidie, paru dans la Revue


(ier
Africaine trimestre io,3/i).

L. LESCHI.
TABLE DES MATIRES

DU

SOIXANTE-DIX-SEPTIME VOLUME DE LA REVUE AFRICAINE

(1935)

S. Ben Cheneb.

Le Thtre arabe d'Alger 72

R. Brunschvig.

Mesures de capacit de la Tunisie


mdivale 86

R. Capot-Rey.

La politique franaise et le Maghreb


mditerranen f suite et fin) 97

J.-B. Chabot (Abbi.


A propos d'inscriptions libyques.. 27

J. Dksparmet.
Ethnographie traditionnelle de la Mettidja :
'

Le Calendrier folklorique [suite)... 164

M. Larnaude
Bibliographie Algrienne (1934). Gographie. 196

M. -M. Vincent (M"'). Portus Magnus (Sl-Leu) : Spultures


Punico-
Romaines [avec 2 plans et 40 illustrations) 35

Compte-rendus.

Album historique et artistique des sceaux

officiels des Gouverneurs Gnraux de l'Algrie depuis la, conqute

jusqu'en 1934 (G. Esquer), p. 213. Chronique de Santa Cruz


du cap de Gu (Agadir). Texte portugais du XVI' sicle, traduit


et annot par Pierre de Cenival (G. Yver), p. 210.
R. Vadala :

Samsoun, pass, prsent, avenir (M. Canard), p. 213.


Bichr
Fars : L'honneur chez les Arabes avant, l'Islam (Etude de socio

logie) (M. Canard), p. 214. Mohammed Kssad Bey



: Mahomet
(571-632) (M. Canard), p. 216.

Revue des Priodiques . 219

Chronique.
L'Archologie algrienne en 1934 (Rapport
de M. Leschi, directeur des Antiquits) 230

Assemble Gnrale du 24 Fvrier 1935 ... 18

Liste des Membres de la Socit Historique 5

Le Grant : J. Carbonel.
Alger.
Imprimeries La Typo-Litho *?t Jules Carbonel runie-
s

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