Que Valent Les Écoles Alternatives
Que Valent Les Écoles Alternatives
Que Valent Les Écoles Alternatives
Avec 98 000 non uand Mira Clairefond a appris tives. Celles-ci se réclament de différentes pé-
Q
diplômés (décrocheurs), qu’une école alternative ouvrait dagogies, comme Montessori (169 établisse-
l’école ne remplit pas ses portes à quelques kilomètres ments), Steiner-Waldorf (22 écoles) ou Freinet,
toujours sa mission. de son domicile, dans la campagne sans oublier les écoles démocratiques, passées
d’Arles, elle n’a pas hésité une se- de 0 à 15 en trois ans, et les établissements
Pour 52 % des parents, conde. « Je suis finlandaise et j’ai connu un sans étiquette ! Chacune a ses spécificités. Mais
l’école n’est pas adaptée à système scolaire différent. En France, j’avais « ces écoles travaillent toutes à partir des ques-
la génération actuelle. Et le sentiment qu’on mettait une pression aux tionnements des élèves et respectent le rythme
92 % estiment qu’il faut enfants dès l’âge de 3 ans », explique-t-elle. de l’enfant », précise la spécialiste de l’éduca-
tenir compte du talent de Depuis deux ans, Kirakuu et Shaïna fréquen- tion Marie-Laure Viaud (lire encadré). Moins
tent l’école du Domaine du Possible, créée en cadrée que la pédagogie traditionnelle (qui
tous. (OpinionWay/APEL) 2015 par les dirigeants des éditions Actes Sud, s’appuie sur des programmes à suivre), la pé-
En 2016, 93 nouveaux Françoise Nyssen, l’actuelle ministre de la dagogie active compte sur la curiosité natu-
établissements hors Culture, et son mari. « Ici, on respecte chaque relle de l’enfant pour apprendre.
enfant comme il est, il y a une forte connexion
contrat ont ouvert, soit avec l’agriculture, l’école est située dans une
trois fois plus qu’en 2011. DES ÉLÈVES PLUS CRÉATIFS
72 % se revendiquent
ferme ! » se réjouit Mira Clairefond. Une for-
mule qui suscite l’engouement des parents 1 ET AUTONOMES
Montessori et autres puisque la liste d’attente compte plusieurs di-
pédagogies alternatives. zaines de noms. En France, 30 000 enfants Qu’ont en commun Larry Page et Sergey Brin,
(Fondation pour l’école) suivent leur scolarité dans des écoles alterna- les fondateurs de Google, Jeff Bezos, créateur
d’Amazon, ou encore George Clooney ? Ces
célébrités sont allées dans une école Montes-
NOTRE EXPERT sori (cette pédagogie donne une place primor-
diale à la liberté et l’autodiscipline, lire notre
Marie-Laure Viaud « Complément d’enquête », p. 68). Au-delà de
Agrégée d’histoire, docteur en sciences de l’éducation et ces stars qui attribuent une partie de leur suc-
maître de conférences à l’université d’Artois, elle s’intéresse cès à la formation suivie, difficile de savoir si
à l’innovation à tous les niveaux de l’enseignement. Elle a ainsi les enfants Montessori, Steiner ou Freinet s’en
enquêté dans de nombreux établissements tirent mieux que les autres. Il n’existe, en effet,
– écoles, collèges et lycées – de France, afin aucune enquête globale. Toutefois, Marie-
de comprendre les avantages et les limites Laure Viaud relève « qu’en ce qui concerne les
des pédagogies alternatives. acquis scolaires, les études montrent que les
Montessori, Freinet, Steiner… Une école différente pour
élèves réussissent au moins aussi bien que dans
mon enfant ?, éd. Nathan.
les écoles standard ». Par exemple, en 2006,
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Un remède à l’échec
L’école du Domaine du Possible, près
d’Arles, accueille une centaine d’enfants,
de la maternelle au lycée, dont un tiers
était en échec scolaire dans le système
standard. Outre les matières classiques,
on y aborde le chant, les langues,
le jardinage ou l’expression corporelle.
0,26 %
des élèves est scolarisé
dans une école alterna-
tive. Parmi les 11,4 mil-
lions d’élèves français
(école, collège, lycée hors
professionnel), 83 % sont
dans le public, 17 % dans
le privé, dont 0,4 % dans
des écoles hors contrat.
expérimentale qui lutte contre l’échec scolaire La réussite dans ces établissements est par-
58 % 27 %
Écoles Écoles
en valorisant l’autonomie), affichait un taux fois attribuée à leurs moyens plus élevés, leurs non confes- catholiques/
de réussite aux évaluations en CE2 de 76,1 % plus faibles effectifs (entre 15 et 20 chez Mon- sionnelles protestantes
en mathématiques et de 75,6 % en français, tessori, contre 28 dans une classe standard) ou
contre 68,4 % et 70 % au niveau national. Côté au milieu plus favorisé des élèves. Mais en
Montessori, une enquête d’Angeline Lillard, 2001, des enseignants formés à la pédagogie 7%
professeur de psychologie à l’Université de
Virginie (États-Unis), conclut que les élèves
Freinet ont prouvé le contraire dans le groupe
scolaire Concorde de Mons-en-Barœul (Nord),
Répartition
des écoles
4 4 Écoles
juives
hors contrat Écoles
sortant de maternelle sont « nettement mieux touché par la violence et l’échec scolaire. Ce Autres musulmanes
préparés à l’école élémentaire en lecture et en mouvement créé par l’instituteur Célestin Frei-
mathématiques » et qu’ils sont « significative- net dans les années 1930, pour transformer
DE 42 À
ment plus créatifs » que ceux du système tradi- l’école publique en s’adressant aux enfants des
tionnel. Même enthousiasme de Céline Al- milieux populaires, privilégie le travail entre
varez, qui a appliqué cette pédagogie pendant pairs et l’apprentissage via des expériences
700 €
trois ans dans une maternelle publique de concrètes comme la tenue d’un journal. Alors
Gennevilliers (Hauts-de-Seine). Résultat, se- qu’ils obtenaient des notes inférieures de 10 %
lon l’équipe du CNRS l’ayant suivie, 90 % des à la moyenne nationale, aux évaluations de
élèves de moyenne section et 100 % de ceux français à l’entrée en sixième, les élèves ont
de grande section savaient lire, soit douze à rattrapé le niveau en cinq ans, en s’illustrant c’est le tarif par mois
dix-huit mois avant les autres. À l’inverse, dans notamment à l’oral. « J’ai été très surpris par des écoles privées
les écoles Steiner – du nom du philosophe au- les résultats, tous positifs, tant en terme d’ap-
trichien Rudolf Steiner –, les élèves n’appren- prentissage que de construction des valeurs », hors contrat.
nent à lire qu’à partir de 7 ans et se consacrent souligne Yves Reuter, directeur de Théodile-
d’abord aux activités manuelles et à l’art. À tel Cirel, un laboratoire de l’université de Lille-III,
point qu’en France 23 % des anciens élèves qui a suivi l’expérience. Aujourd’hui, le groupe
Steiner s’orientent vers un métier de l’art. En scolaire Concorde refuse des élèves !
revanche, dans un mémoire universitaire, une Autre critique sur ces écoles : il serait diffi-
étudiante en psychologie a relevé des lacunes cile de réintégrer le cursus classique. Car si la
en orthographe et en sciences à l’issue de leur France compte 300 écoles primaires alterna- Sources : ministère de l’Éducation
scolarité, chez 40 % des ex-Steiner. tives, il n’existe qu’une dizaine de collèges - Fondation pour l’école
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contre 34,9 % des élèves du même secteur.
Yves Reuter remarque aussi que « les actes
de violence ont régressé rapidement », contri-
buant à créer un climat bienveillant.
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68 LE COMPLÉMENT D’ENQUÊTE
BIENVENUE DANS
Les meubles se trouvent à hauteur
d’enfant, y compris le tableau et
l’évier. Les petits peuvent ainsi attraper
et ranger le matériel sans aide
“L
’enfant n’est pas un
vase que l’on remplit,
mais une source que 2
l’on laisse jaillir. »
Voilà la philosophie éduca-
tive de l’Italienne Maria
Montessori, médecin, qui Grâce aux
ouvre en 1907 la première Le coin bibliothèque formes à dessin,
Maison des enfants. Ainsi les invite à s’intéresser l’enfant trace
naît sa pédagogie : un en- aux livres. La méthode les courbes
Montessori privilégie nécessaires à
fant, placé dans un environ- les histoires où l’élève l’apprentissage
nement propice et accom- peut s’identifier de l’écriture.
pagné par un éducateur qui aux personnages.
s’adapte à lui, apprend par
Les barres numériques
lui-même et à son rythme. permettent à l’enfant
À la maternelle, la majeure de 3 ans et demi de
p a r t i e d e l a journée commencer à compter.
(2 heures le matin, 2 heures
l’après-midi) est consacrée
au travail individuel. Cha-
cun choisit une activité et y
passe le temps qu’il désire
4
avant d’en changer ou d’al-
ler observer un camarade.
Les élèves peuvent se dé-
placer librement dans la
classe et parler à voix basse
tant que l’ambiance de tra-
vail est respectée. L’édu-
cateur présente le matériel
à l’élève avant la première
utilisation, puis le laisse tâ- Les élèves, de 3 à 6 ans, sont
tonner afin qu’il puisse pro- mélangés pour favoriser
gresser seul. Il n’intervient émulation et entraide. Les petits
qu’en cas de besoin. apprennent des grands, lesquels,
ainsi valorisés, consolident
également leurs connaissances.
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Les activités sont présentées sur des plateaux
avec tout le matériel. L’enfant n’a ainsi pas
besoin de l’éducateur pour se lancer. Les plateaux
sont rangés par ordre croissant de difficulté. Les murs ne sont pas couverts de
dessins afin que les élèves ne soient
pas déconcentrés. Mais une frise
numérotée de 0 à 200 leur permet Les activités artistiques
d’avoir les nombres sous les yeux. sont regroupées dans
un coin avec quelques
tables et un chevalet.
3
Les tables, peu nombreuses,
sont dispersées, seules ou
par deux. Pour travailler,
chacun peut s’y installer ou
dérouler un tapis par terre.
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