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Ben Redjeb Tahar. L'Affaire Des Figurines D'amiens: Une Imposture ?

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Les Nouvelles de l'archéologie

L'Affaire des figurines d'Amiens : une imposture ?


Tahar Ben Redjeb

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Ben Redjeb Tahar. L'Affaire des figurines d'Amiens : une imposture ?. In: Les Nouvelles de l'archéologie, n°30, Hiver 87-88
1988. pp. 49-53;

doi : https://doi.org/10.3406/nda.1988.2198

https://www.persee.fr/doc/nda_0242-7702_1988_num_30_1_2198

Fichier pdf généré le 11/09/2018


L'AFFAIRE visage négroïde pour la plupart, le reste représentant des
chiens, des poules* voire... un pingouin et un phoque.
DES STATUETTES
DES EX-VOTO DU BAS-EMPIRE
D'AMIENS :
UNE IMPOSTURE ? Si le premier antiquaire reste réservé, à tel point qu'il a
préféré faire don des statuettes qu'il avait acquises au
Musée de Picardie, il n'en va pas de même du second,
persuadé d'avoir entre les mains une formidable décou¬
par Tahar Ben Redjeb verte d'ex-voto du EDe stède réalisés dans l'officine d'un
tailleur de pierre par une communauté d'immigrés
syriens ou nubiens, esclaves ou mercenaires. Taillées
dans up matériau local, bon marché et facile à travailler,
la craie, ces statuettes auraient été exécutées à la deman¬
de pour représenter une maladie ou un vœu. En effet,
l'un de ses amis médecins a pu diagnostiquer des
maladies congénitales, des malformations ou des défor¬
mations caractéristiques de pathologies précises telles
que
rhumatismes...
prolapsus du rectum, cancer du sein à gros bras,

Une preuve de l'authenticité est., l'absence de pieds


démontrant bien qu'il s'agit d'amulettes jetées sur un lieu
nale.
jour,
profusion
preuves
pour
Finfaire
chronique,
teintée
de
En
"mystérieux",
une quelques
1987
succession
l'archéologie.
avec
Les
d'irrationnel,
l'objet
irréfutables,
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dejournalistes
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1988,
d'à
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affaire"
par
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unoutre
"extraordinaire",
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esprits
ont
presse
comme
aimportante.
découverte
l'emploi
donc
logique
défrayé
etmépris
natio¬
digne
vudes
et
laà
le sanctifié ou plantées en terre, au pied de quelques
divinités. Quant aux représentations animales, il s'agit
de jouets !

Ces "commandes" auraient été enfouies, et par là même


protégées à la suite d'un incendie.✓

Enfin, il n'est pas surprenant que les statuettes aient


LE RAPPEL DES FAITS échappé à la fouille du chantier car dies ressemblaient à
des pommes-de-terre entourées d'une gangue de fene qui
Le 15 mars 1987, une importante fouille de sauvetage les rendaient quasiment invisibles. Cette gangue les a
s'ouvre à proximité immédiate du forum de la ville protégées, les faisant rouler dans les engins de
antique. Dotée d'un budget correct dans le cadre du chargement comme des galets.
chapitre 66/20, elle va mobiliser chaque jour une
trentaine dePrèspersonnes
confirmés. de 2000 m2
dontsurundeux
tiersà trais
d'archéologues
mètres de Void donc établie, une théorie qui sera reprise grâsso
modo
sérieuxparexistent
la pressesuralors
les que
circonstances
des doutes mêmes
pour le de
moins
la
hauteur vont être fouillés finement, des banquettes
périphériques de sept mètres étant excavés à la pelle découverte.
mécanique. 1

Fin juillet, nous fûmes avertis que deux jeunes DE LA MALCHANCE


"prospecteurs amateurs" avaient vendu trois statuettes de DES ARCHEOLOGUES DE TERRAIN
craie à un antiquaire de la place amiénoisé, statuettes
censées provenir des décharges qui accueillent les déblais Responsable du charnier de fouillés des Jacobins durant
provenant du chantier dés Jacobins. Ces "découvertes" six mois, je fus bien évidemment intéressé, sinon
persistèrent jusque fin novembre, soit deux mois après intrigué, par des découvertes susceptibles d'apporter de
l'arrêt des fouilles archéologiques. Environ soixante-dix nouveaux éléments sur l'occupation antique d'un
l'authenticité de ces découvertes. Mes soupçons allèrent serait le comble de la malchance que celtes-d a
grandissant quand je reconnus dans l'un des deux un malin plaisir à ne se trouver qu'en dehors de
inventeurs un personnage surpris quelques mois aupara¬ fouillées de façon à échapper à Tattention d'une
vant en flagrant délit de vol de mobilier archéologique quotidienne de trente personnes à laquelle s'ajou
dans les locaux de la Direction des antiquités. semble du personnel de l'entreprise chargée (tes
de toute
construction
découverte
qui avait
de nature
pouràinstruction
nous intéresser.
de nou
Un soupçon ne pouvant cependant tenir lieu de preuve,
nous avons essayé d'établir une origine pour les objets
apparus hors de tout contexte de nature à leur assigner Ajoutons que le type même de l'occupation de l
une origine chronologique et culturelle. Jacobins nous permet également de mettre en
présence de ces statuettes sur le site même. Les
Ces statuettes étant censées provenir des Jacobins, tous ont permis de mettre en évidence une domus ur
avons donc tenté de vérifier ce point. La conduite d'une quelques maisons en bois et torchis groupées a
fouille archéojtagique obéit à une problématique scienti¬ celles-d. Détruit par un incendie dans les année
quartier fut transformé en terrain vague jusqu
siècle, date à laquelle s'implanta un petit atelie
qui disparût avant la fin du IVe siède. Mis
fiquefait,
disséquée
née
statuettes
De
mais soigneusement.
pas
rigoureuse.
celles-ci
leproviennent
par
moindre
les archéologues
ont
Toute
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exemplaire
des
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donc
zones
plusieurs
fouillée
et
tout
de
effectivement
chaque
statuettes.
àtonnes
fait
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exclu
littéralement
defouillées.
matériel
que
exami¬
ces
quelques puit$ et citernes des XVe-XVIe siècles
ne création
la sera plusd'une
occupé
nouvelle
avantusiné
l'époque
textile.
contempora

On pourrait donc ensuite admettre une provenance issue Or, si ces statuettes sont effectivement du Bas-
des décapages superficiels, effectués à la pelle mécanique il ne peut s'agir que d'ex-voto provenant mm
ou des banquettes périphériques du chantier. Il faut noter lieu de fabrication mais d'un templep dans le
cependant que les terrassements ont été constamment sur¬ auraient été déposés. En effet, si certains ex-v
veillés par l'équipe de fouille qui n'hésitait pas à les in¬ suffisamment stéréotypés pour pouvoir être fabr
terrompre si cela était nécessaire (relevés stratigraphi- série, il n'en est pas de même quand ceux-d d
ques, échantillons de mobilier). une maladie particulière. Fabriqués à la dem
suivant le plus possible un modèle, ces ex-voto
L'un des arguments dés de M. Chauchoy* pour tenter tère prophylactique n'ont pas pour vocation d'êt
d'expliquer que ces statuettes auraient pu échapper à la sés sur un quelconque étalage.

teife entourées (Tune gangue de terre... les rendant Or, l'étude des structures rencontrées aux Jac
quasiment invisibles". Il est regrettable que nous permet en aucun cas de tes rapporter à un que
n'avons pu examiner, malgré planeurs demandes succes¬ édifice cultuel. .
sives, ces (Afférentes statuettes qu'une fois celles-ci
soigneusement brossées. Notre insistance à effectuer un Quant à leur prétendu enfouissement à la su
examen dé ces objets dans les minutes mêmes suivant incendie, on serait cependant bien en peine d'y d
leur découverte sera, pour des raisons difficilement moindre trace de coup de feu. Ainsi, non seulem
compréhensibles, restée vaine. figurines de craie particulièrement fragiles ont m
sement échappé à l'un des trois incendies qui on
On pouvait également imaginer un lot homogène occu¬ le quartier, aux divers remaniements qui ont a
pant un endroit préds du site qu'un ou deux coups de quartier, à l'attention des archéologues, qui, qu
pelle mécanique auraient suffi à faire disparaître. Mais là en dise, ne sont pas des incapables, mais égalem
encore, il est facile d'opposer un argument irréfutablë : opérations de décapage, de transport, de décharg
la dispersion supposée de ces statuettes dans un certain pour ârriver à nous sans la moindre éraflure !
nombre de tas situés dans trois décharges différentes, et
les trouvailles échelonnées dans le temps, impliquent La conjoncttoe de ces différents éléments nou
obligatoirement une dispersion de celles«d sur le site donc à la plus extrême prudence sur l'origine
1
ET SI CETATT DES FAUX ? Cette étude, qui va nécessiter le concours d
spécialistes concernés, va demander de lon
Le fait est pourtant que ces statuettes existent bel et nes, et sera rendu d'autant plus difficile que
bien. Nous avon$ donc essayé d'en savoir un peu {dus posons pas des objets eux-mêmes mais sim
sur leur origine. Dès 1 annonce (te cçs découvertes, nous
nous sommesrenctes dans les différentes décharges jl'où
elles étaient Misées prpvemt. Les circonstances mêmes, En guise de conclusion, je voudrais ins
entre autres la manière dont ces découvertes ont été dernier point révélateur des pratiques régn
effectuées, sont pour le moins curieuses. Si nous-
mêmes avons joué de malchanceen ne trouvant aucune Oucesstatuettes sont de sim
de ces statuettes malgré les milliers de mètres cube cette opération publicitaire menée à bon c
passés au crible, les, inventeurs ont fait preuve d'un flair but purement commercial, ou il s'agit de pi
infaillible pour repérer, parmi la maèse des déblais tiques et, dans ce cas, il est regrettable qu'el
entreposés, les endroits exacts où il fallait chercher. (dace diras la vitrine d'un patrimoine histor
Une chance insolente les a constamment accompagnés, défiivtion, appartient à tous.
notamment quand ils ont pu repérer un buste unique¬
ment grâce au fait que seule sa partie inférieure émer¬
geait de l'étang dans lequel les déblais étaient jetés, et Direction de
lorsqu'ils ont pu retrouver un certain nombre d'exem¬ v
plaires dans l'unique tas de terre provenant des Jacobins,
qui restait dans l'une des décharges. Nous avions
pourtant nous-mêmes effectué, dans ces mêmes déblais
un sondage qui n'avait strictement rien donr.

En fonction des indications portées à notre connaissance,


et des diverses investigations que nous avons essayé de
mener sans a priori, un certain nombre d'incohérences
difficilement admissibles nous a amenés à mettre en
doute l'existencé même de ces statuettes au sein des
différentes dédies conciliées.

L'espoir que ces statuettes aient pu provenir d'un antre


chantier non suivi par les arthéologues s'est donc ame¬
nuisé fortement et nous pendions de plus en plus pour
la thèse d'un canular, voire de la simple mystification
dont serait victime un antiquaire un peu trop crédule.

EN GUISE DE CONCLUSION PROVISOIRE...

Si tout objet sorti de son contexte n'a guère de valeur


scientifique, nous allons pourtant effectuer une critique
4e cet ensemble de statuettes cas par cas. N'étant pas
spécialiste de l'histoire de. l'art, il m'est difficile
d'apprécier leur authenticité en tant qu'objet antique,
d'autant plus que la plupart d'entre elles né ressemblent à
rien de connu, alors que d'autres semblent montrer une
multiplicité d'influences s'échelonnant de la période
néolithique...
semblent dénoter
à l'artdes
nègre.
contradictions
Néanmoins internes,
certaines tel;,
piècesce
conducteur de char muni d'une longbe lance un pen trop
longue pour être une lance romaine et dont le cheval est
muni d'un système d'attelage peu conforme à ce qu'on

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