20-Mirfendereski 2
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20-Mirfendereski 2
Pharmacien inspecteur de
santé publique
Promotion : 2006 - 2007
Date du Jury : Septembre 2007
Rochanak MIRFENDERESKI
Remerciements
Je tiens à remercier :
Ainsi que toutes les personnes appartenant à la sphère institutionnelle (DGS, AFSSAPS)
et associative qui m’ont permis d’enrichir mon mémoire de leurs réflexions.
Introduction .......................................................................................................... 1
4. Discussion ................................................................................................................. 25
III Préconisations................................................................................................ 27
Conclusion .......................................................................................................... 33
La démarche qualité dans les LABM s’inscrit dans un contexte réglementaire depuis
l’entrée en vigueur de la première version du Guide de Bonne Exécution des Analyses
(GBEA)4 en 1994. Cette démarche peut aussi se traduire par l’application volontaire de
normes internationales ISO (International Organization for Standardization) dont le
respect fait l’objet d’une accréditation.
Selon un rapport sur les LABM, publié par l’Inspection Générale des Affaires Sociales
(IGAS) en 2006, les LABM donnent à voir des lacunes en matière de qualité (respect de
GBEA, accréditation ISO, etc.) et de fiabilité des analyses [15].
1
Loi n°75-626 du 11 juillet 1975 modifiée, relativ e aux laboratoires d’analyses de biologie
médicale et à leurs directeurs et directeurs adjoints.
2
Décret n° 76-1004 du 4 novembre 1976 modifié, fix ant les conditions d’autorisation des
laboratoires d’analyses de biologie médicale.
3
Décret n° 94-1049 du 2 décembre 1994 relatif au c ontrôle de qualité des analyses de
biologie médicale prévu par l’article L. 761-14 du Code de la Santé Publique.
4
Abrogée par l’arrêté du 26 novembre 1999, modifié en 2002.
- Les LABM n’auraient pas le personnel qualifié. Les Contrôles de Qualité Interne (CQI),
permettant de contrôler la qualité des résultats des analyses, ne seraient pas ou peu
effectués, et les réactifs seraient périmés ou non utilisés selon les indications du
fabricant ;
- Suite aux résultats du Contrôle National de Qualité (CNQ), les LABM ne mettraient
pas en œuvre les mesures correctives ;
- Le critère principal (voire unique) d’inspection des LABM serait leurs résultats au
CNQ ;
- Les PHISP non biologistes (de formation universitaire), peuvent ne pas s’estimer
suffisamment compétents pour effectuer ces missions, compte-tenu de la technicité du
domaine ;
- Les suites de l’inspection n’inciteraient pas les LABM à mettre en œuvre des mesures
correctives et les sanctions ne seraient pas adaptées à la gravité des
dysfonctionnements.
Afin de tester les hypothèses précitées, trois méthodes de recueil de données ont été
retenues :
1. Approche documentaire
2. Entretiens semi-directifs
Quatre PHISP franciliens non biologistes ont été interviewés. Ils ont été choisis en
fonction de la diversité de leur parcours professionnel initial et leur degré d’expérience en
matière d’inspection. Les entretiens d’une durée de 1h à 1h30 ont été enregistrés et les
informations recueillies ont fait l’objet d’une analyse thématique. Le profil des enquêtés
ainsi que la grille d’entretien sont présentés respectivement en annexes 2 et 3.
3. Contacts
Les personnes et organismes suivants ont été contactés par courriel et / ou téléphone6
(suivi éventuellement d’une rencontre) (cf. annexe 1) :
5
Association créée par les syndicats de biologistes afin d’aider les LABM à mettre en place
les bases d’un SAQ (cf. page 6).
6
L’annexe 4 reprend les informations sollicitées auprès de chacun d’eux.
7
Probioqual®, Asqualab® et le Centre Toulousain pour le Contrôle de qualité en Biologie
clinique (CTCB®).
- L’IRP d’Ile-de-France (IDF) n’était pas en mesure d’effectuer un suivi (à moyen terme)
des structures inspectées et de communiquer des noms de LABM susceptibles d’être
contactés ;
- Selon le COFRAC, aucun LABM en IDF n’était accrédité selon la norme ISO 15189 (à
la date du 27 mars 2007) ;
- Les LABM accrédités selon la norme ISO 17025 étaient susceptibles d’être inspectés
prochainement par l’IRP qui ne souhaitait pas « l’interférence » d’un PHISP stagiaire
afin d’éviter tout risque de confusion.
L’absence de données recueillies auprès des professionnels de terrain constitue donc une
limite de cette étude.
Cependant, les données collectées nous ont permis d’apporter des éléments de réponse
à la question centrale de ce mémoire. Ainsi, nous exposerons dans un premier temps les
référentiels applicables aux LABM avant de nous intéresser plus particulièrement à la
démarche qualité dans les LABM franciliens.
Deux types de référentiels sont présentés dans le cadre de ce mémoire : le GBEA et deux
normes ISO.
Le GBEA est défini comme étant un instrument au service de la qualité dont la mise en
application permet de maîtriser la plupart des événements pré, per et post analytiques. A
ce titre, il consacre un chapitre à l’AQ qu’il définit comme l’ensemble des actions
préétablies et systématiques nécessaires pour qu’un produit ou un service satisfasse aux
exigences de la qualité.
Le GBEA impose la mise en place d’un SAQ, prévoit la mise en œuvre de CQI, la
participation au CNQ et recommande aux laboratoires de participer à d’autres
programmes d’EEQ. Par ailleurs, il prévoit des dispositions particulières pour certaines
analyses telles les analyses en immunohématologie érythrocytaire (permettant
notamment de déterminer les groupes sanguins).
Le GBEA est un référentiel officiel et opposable aux LABM. Sa mise en œuvre est décrite
ci-dessous ainsi qu’un programme destiné à accompagner les laboratoires dans leur
démarche.
Le GBEA bouscule les habitudes des biologistes quant à leur perception de la qualité. En
effet, la qualité analytique ne suffit pas à répondre aux exigences des « clients »
(médecins prescripteurs et patients) et l’introduction d’une politique qualité est
indispensable. Par ailleurs, le respect de ce référentiel implique le passage de la tradition
orale à une communication écrite et à la traçabilité des activités. Ce changement de
« culture » ne doit donc pas être perçu par le personnel comme un moyen de surveillance
et de sanction [45,50].
L’association Bioqualité®, créée en 2002 par les trois syndicats de biologistes8, a pour
objectif de promouvoir et d’évaluer le développement de la démarche qualité en
conformité avec le GBEA, auprès des LABM privés. Pour cela, l’association met à la
disposition de ses adhérents une banque documentaire, un système d’évaluation et un
8
Syndicat des biologistes, Syndicat des Laboratoires de Biologie Clinique et Syndicat
National des Médecins Biologistes.
Bioqualité® souhaiterait être en contact avec les IRP afin de leur présenter l’état de
l’avancement des laboratoires dans la mise en œuvre du GBEA. Il suggère, par ailleurs,
que les LABM membres de Bioqualité® ayant de mauvaises pratiques révélées lors des
inspections, lui soient signalés par l’IRP.
Le GBEA impose au biologiste d’organiser des CQI et de participer au CNQ. Par ailleurs,
il recommande que le LABM participe à des programmes d’EEQ organisés par des
sociétés scientifiques, des groupements de biologistes ou tout autre organisme
présentant les garanties nécessaires.
Les CQI sont indispensables pour déceler les anomalies et les erreurs de mesure et y
remédier immédiatement. Ils sont organisés en interne et comprennent notamment
l’analyse d’échantillons de contrôle dans les mêmes conditions que les échantillons
« patients », en tenant compte des instructions du fabricant. Le GBEA rappelle que ces
échantillons de contrôle ne se substituent pas aux échantillons de calibrage des appareils
et réciproquement.
Le CNQ est institué par l’article L. 6213-3 du Code de la Santé Publique (CSP) et répond
aux dispositions des articles D. 6213-8 à D. 6213-19 du même code. Organisé par
l’AFSSAPS, il a pour objectif de déterminer la valeur des résultats des analyses réalisées
par chaque laboratoire [59]. Il concerne toutes les disciplines de la biologie. Chaque
année, environ 100 analyses font l’objet de contrôle auprès de tous les laboratoires. La
participation au CNQ est obligatoire pour les laboratoires9 qui versent une redevance en
fonction de leur activité annuelle.
Les résultats des laboratoires ayant présenté des anomalies au CNQ sont portés devant
la commission du contrôle de qualité dont le secrétariat est assuré par la DGS. Elle se
prononce sur le caractère de gravité de ces anomalies10 et décide de les signaler (ou non)
à la DGS. Cette dernière réceptionne aussi les signalements effectués directement par
l’AFSSAPS pour non participation ou participation insuffisante (< 50%) au CNQ et
effectue des demandes d’inspection aux IRP concernées. Ce signalement des LABM est
basé sur les résultats du CNQ de l’année N-2 [18].
Ces résultats sont, par ailleurs, utilisés par l’AFSSAPS pour exercer une vigilance sur les
réactifs. A titre d’exemple, l’agence a tenu compte des résultats du CNQ de l’année
200011, dans le cadre du contrôle du marché des réactifs de dépistage et de dosage des
anticorps de l’hépatite B. Ce contrôle a abouti à la mise en place de mesures correctives
9
Est puni de six mois d’emprisonnement et de 6000 € d’amende, le fait de ne pas se
soumettre au CNQ (article L. 6214-5 du CSP). Chaque année, 200 à 500 LABM ne participent pas
au CNQ [15].
10
Les erreurs de groupage sanguin, les résultats faussement négatifs pour le VIH, la
toxoplasmose et l’hépatite C font partie des anomalies graves retenues par la commission.
11
Mise en évidence d’un résultat faussement négatif pour un réactif.
Le CNQ a toutefois des limites. En effet, les échantillons adressés aux LABM sont
connus. Ils ne suivent donc pas obligatoirement le circuit d’un échantillon « patient ». Un
PHISP francilien précise que les LABM savent « qu’un mauvais résultat au CNQ peut
déclencher une inspection, et dans la mesure où les échantillons sont identifiés, ils seront
traités différemment ». En conséquence, un bon résultat au CNQ peut ne pas refléter la
réalité de la pratique du laboratoire. Par ailleurs, les résultats sont rendus avec un
décalage d’un an et les annales du CNQ sont envoyées aux LABM dans les 20 mois [15].
Afin de réduire les délais, l’AFSSAPS prévoit d’envoyer les comptes-rendus individuels
aux LABM dans un délai de 12 semaines et de publier les annales sous format
électronique (e-annales) en 6 mois. En 2008, elle serait en mesure de mettre en place un
système de téléservice afin d’éviter de ressaisir les réponses des LABM, envoyées par
courrier.
12
Intervention de Monsieur Gilles DUMONT (AFSSAPS) à l’ENSP, le 28/03/07.
En conclusion, le CQI et les programmes d’EEQ autres que le CNQ sont utiles au
biologiste pour assurer la qualité des analyses au quotidien. Le CNQ constitue un contrôle
rétrospectif de la qualité des analyses et un critère d’inspection des laboratoires.
Le contrôle de la conformité des LABM au GBEA est prévu par les articles L. 6213-1 et
suivants (et D. 6213-1 et suivants) du CSP. Ces articles désignent notamment les corps
d’inspection compétents, les modalités d’inspection et les dispositions pénales
(uniquement dans la partie législative).
Selon les dispositions de l’article L. 6213-1 du CSP, le contrôle des LABM est assuré par
les PHISP, les Médecins Inspecteurs de Santé Publique (MISP) et par l’IGAS.
Contrairement aux PHISP, les MISP ne bénéficient pas d’enseignements théoriques et
pratiques sur les laboratoires dans le cadre de leur formation initiale. Toutefois, la
formation continue proposée par l’Ecole Nationale de Santé Publique (ENSP)13 dans les
domaines de la biochimie, de l’hématologie et de la microbiologie est ouverte aux PHISP
et MISP [72].
Les PHISP d’IDF, interrogés sur leur vision du métier, mettent en avant la variété du
travail, la transversalité et la pluridisciplinarité du métier ainsi que l’aspect pédagogique
des inspections. Pour C14, le PHISP doit se substituer au patient qui est en droit de
recevoir des prestations de qualité. D souligne qu’à ses débuts, il s’interrogeait sur sa
propre réaction « La première fois que je vais devoir sévir, ce n’est pas agréable de dire,
Monsieur, je vais être obligé de vous envoyer en chambre de discipline ».
13
Désormais appelée Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique.
14
Les lettres A, B, C et D correspondent respectivement aux PHISP A, B, C, et D interviewés
(cf. annexe 2).
Aucun des 4 PHISP interrogés n’est un ancien biologiste (cf. annexe 2). Toutefois, ils ont
tous eu une expérience en laboratoire dans le cadre de leurs études (travail dans un
LABM le samedi, internat, etc.). Ils connaissent donc les dosages et l’organisation
générale d’un laboratoire. C précise en particulier que grâce à son cursus, il connaît « le
minimum nécessaire et suffisant pour inspecter un labo ».
Pour aucun PHISP, il n’est indispensable d’être biologiste pour inspecter des LABM
même s’ils s’accordent à dire qu’un ancien biologiste peut avoir des facilités sur le terrain.
Pour A, en l’absence de précision dans le GBEA, un non biologiste peut ne pas détecter
des anomalies, contrairement à un ancien biologiste.
Il ressort donc des propos des PHISP enquêtés que l’aspect technique lié au LABM rend
moins aisé une telle inspection que celle d’une officine (par ex.) et qu’un PHISP peut ne
pas se sentir totalement à l’aise face à un biologiste techniquement plus compétent.
Deux types d’inspections sont à distinguer : les inspections de routine et les inspections
« signalement » (enquêtes CNQ, plaintes, etc.). Une procédure nationale explicite la
méthodologie d’inspection et inclut un guide d’inspection des laboratoires [9].
15
A noter qu’aucun MISP n’a suivi cette formation.
Un signalement CNQ donne lieu à une enquête afin de vérifier les mesures prises par le
laboratoire. Le bilan des inspections réalisées suite aux CNQ de 2002 à 2005 montre que
sur 147 inspections demandées suite à une erreur grave, 84 ont été diligentées (57%). Ce
chiffre est de 33%, soit 205 inspections sur 622 signalements de non participation au
CNQ. L’inspection montre que fréquemment, les LABM n’ont pas mis en œuvre de
mesures correctives suite au CNQ. Toutefois, dans 1/3 des cas, l’absence de traçabilité
des analyses ne permet pas de se prononcer. La non-participation a pour cause, dans la
moitié des cas, la négligence du laboratoire vis-à-vis du CNQ [18]. Certains LABM
inspectés sont membres de Bioqualité® et, a priori, engagés dans une démarche de mise
en place du GBEA [15].
Le bilan des sanctions, suite à des enquêtes CNQ, montre un faible nombre de
propositions de suites ordinales et/ou pénales (9 sur 289 inspections) et une absence de
sanction dans 60% des cas [18].
En général, l’Ordre des Pharmaciens reçoit 10 à 20 plaintes par an, déposées par les
Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS) à l’encontre des LABM
ce qui lui semble faible. Selon le représentant du ministère chargé de la santé à la section
G du CCOP, le décalage temporel (plusieurs années) entre l’entrée en vigueur de la
première version du GBEA en 1994 et les premières inspections de LABM ne permet pas
à l’administration d’être « sévère » et de fermer les laboratoires « déviants ».
La rareté des sanctions administratives, pénales et ordinales est soulignée par l’IGAS et
peut s’expliquer par une hétérogénéité des pratiques régionales16 [15]. La DGS (bureau
de la qualité des pratiques) a donc souhaité mettre en place un groupe de travail chargé
notamment de proposer de procédures harmonisées en fonction des problèmes
rencontrés et de réviser la grille d’inspection des laboratoires. Ces outils devraient être
utilisés pour des missions d’inspection de LABM ayant commis des erreurs répétées au
CNQ, coordonnées au niveau national par la MAFI17.
16
La comparaison entre les trois premières régions ayant effectué le plus grand nombre
d’inspections de LABM entre 2000 et 2004 montre qu’en IDF, des suites disciplinaires sont
demandées dans 21% des cas contre 11 % en région Rhône-Alpes et 6% en Languedoc-
Roussillon. Les suites pénales demandées sont respectivement de 14%, 3 % et de moins de 1%.
17
Mission d’Animation aux Fonctions d’Inspection.
Contrairement au GBEA, les normes ISO applicables aux LABM (ISO 17025 et ISO
15189) sont de portée internationale18. Elles sont élaborées par ISO puis adoptées au
niveau communautaire et national. Actuellement, elles ne sont pas d’application
obligatoire en France, contrairement à d’autres pays tels que l’Italie [15,24].
La norme ISO 15189, spécifique aux LABM est facilement appréhendable par les
biologistes et couvre la totalité de leur activité. Elle détaille notamment les exigences
techniques concernant la compétence du personnel, les locaux et la qualification des
matériels19. Par ailleurs, ces exigences prennent en compte l’ensemble de l’analyse y
compris les phases pré- et post-analytiques. Elles reprennent celles de la norme ISO
17025 auxquelles s’ajoutent notamment la communication interne, la mesure de la
satisfaction des clients, la surveillance de tous les processus et l’amélioration en continue
de l’efficacité du SMQ (cf. annexe 5) [12,25,46].
18
La norme NF EN ISO 9001 [10] dont l’application garantit l’existence d’un Système de
Management de la Qualité et qui est très généraliste ne sera pas abordée dans le cadre de ce
mémoire.
19
Notamment l’identification du matériel, le nom du fabricant, le nom de la personne à
contacter chez le fabricant et son numéro de téléphone (si nécessaire), la date de réception et date
de mise en service, les instructions du fabricant (si elles sont disponibles), les enregistrements de
la performance du matériel confirmant que le matériel est adapté à l'utilisation, la maintenance
(réalisée et programmée).
Les LABM constatent qu’entre la prise de décision et leur accréditation, leur charge de
travail augmente d’environ 30% sur 2 ans. Toutefois, ils en soulignent les bénéfices en
termes d’amélioration des conditions de travail (gestion des dossiers, relation avec le
personnel et leur implication dans la qualité). Enfin, ils estiment qu’il est indispensable de
faire vivre le système par la planification d’audits internes.
L’accréditation des laboratoires hors de France est inégale selon les pays20. En Italie, elle
est obligatoire et le délai de mise en conformité des laboratoires est de 3 ans [15]. Aux
Pays-Bas, elle a commencé dans les années 90, et entre 1994 et 2001, environ 100
laboratoires ont été accrédités [55]. En revanche, en Chine, un état des lieux conclut à la
nécessité de mise en place d’un système en deux étapes : en premier lieu, des règles
d’application obligatoire édictées par le ministère de la santé pour le fonctionnement des
laboratoires, puis un système d’accréditation pour les laboratoires volontaires [54].
En Suède, les laboratoires estiment que l’accréditation leur permet de structurer leur
activité et d’améliorer leur performance. Ainsi, une centaine de laboratoires est accrédité
selon des normes généralistes dont la totalité du secteur libéral [23,37]. La principale
difficulté, selon eux, réside dans la pérennisation de leur démarche qualité. En Allemagne,
la maîtrise de la phase préanalytique, exigée par la norme ISO 15189, pose des
problèmes dans le secteur privé où, contrairement à la France, les prélèvements sont
effectués par le médecin ou l’infirmier libéral et ne dépendent pas du laboratoire [15,57].
20
Certaines publications ne font pas de distinction entre les laboratoires publics et privés. La
majorité d’entre elles, antérieure à la publication de la norme ISO 15189, fait référence à la norme
ISO 17025 ou à des normes plus généralistes.
L’accréditation d’un LABM selon la norme ISO 15189 ou ISO 17025 est la reconnaissance
formelle de ses compétences techniques et de son SMQ. En France, l’organisme chargé
de l’accréditation des LABM est le COFRAC, créé par les pouvoirs publics en 1994
[64,65a-g].
En 2007, les frais d’accréditation initiale s’élèvent à environ 9000 € TTC pour un LABM
« classique » (analyses de biochimie, d’hématologie et d’immunohématologie). Ils incluent
notamment les frais d’instruction (939 € HT) et d’évaluation (993 € HT par jour par
auditeur). Chaque laboratoire accrédité ou dont l’accréditation est suspendue est
concerné par une redevance annuelle dont le montant hors taxe varie selon l’effectif du
laboratoire et le nombre d’unités techniques. Ce montant est fixé à 747 € HT pour un
laboratoire possédant une unité technique et un effectif < 5 personnes, et à 9184 € HT
pour un laboratoire avec 10 unités techniques [41h]. Une accréditation COFRAC
représente donc un coût non négligeable pour un LABM. C’est une des raisons pour
lesquelles l’Ordre des Pharmaciens ne soutient pas une telle démarche d’accréditation.
Le LABM, accrédité pour 5 ans (renouvelables), est soumis à des visites de surveillance
tous les 18 mois et à une réévaluation quinquennale dont les résultats conditionnent le
maintien, la suspension ou le retrait de son accréditation.
21
Elle se traduit par une liste des analyses choisies par le LABM, décrivant la nature des
échantillons analysés, le type d’analyse ainsi que les principes et références des méthodes
utilisées.
A ce jour, 108 LABM sont accrédités selon la norme ISO [41h,64]. Ce chiffre, bien que
faible comparé au nombre de LABM en France (environ 4500) a progressé depuis
quelques années. En effet, selon une enquête publiée en 2001, seuls 8 LABM étaient
accrédités ISO en 1998/1999 [23].
L’accréditation ISO des LABM est désormais prise en compte par le ministère chargé de
la santé qui, pour la première fois, a cosigné le 22 décembre 2006, la convention cadre
COFRAC-Etat, reconnaissant ainsi le COFRAC comme organisme national
d’accréditation [41i]. Cette initiative était préconisée par l’IGAS qui précisait qu’une telle
convention devrait permettre au COFRAC d’assurer, à l’horizon de 2010, l’accréditation
ISO 15189 des laboratoires [15].
Les principales exigences des deux normes ISO (très similaires) et du GBEA sont
présentées en annexe 5. Le SMQ, la gestion des ressources, la métrologie, la mise en
place et le suivi d’actions correctives sont mentionnés dans les 3 référentiels. Cependant,
les normes ISO (et plus particulièrement la norme ISO 15189) ont des exigences
supplémentaires en matière de qualité qui ne figurent pas dans le GBEA, notamment la
mise en place d’objectifs et d’indicateurs qualité, la communication interne, les audits
internes et l’amélioration continue du SMQ. En revanche, le GBEA comprend des règles
pratiques très précises et spécifiques à la biologie.
Les points communs entre le GBEA et les normes ISO permettent aux laboratoires
respectant le premier référentiel, de se lancer dans l’accréditation et d’approfondir leur
démarche qualité. En d’autres termes, après la phase de mise en conformité
réglementaire, les laboratoires estiment nécessaire de valoriser leur démarche qualité en
l’intégrant dans un processus d’amélioration continue via l’accréditation [31,41,47,50,65e].
Dans ce cadre, il convient toutefois d’être attentif à la notion de « portée d’accréditation »
qui permet à un LABM d’avoir une accréditation très partielle (pour quelques analyses),
susceptible de tromper le client quant à la preuve de ses compétences réelles [41e].
Après avoir présenté les référentiels qualité applicables aux LABM, la deuxième partie de
cette étude s’intéresse à la mise en œuvre de la démarche qualité dans les laboratoires
franciliens.
La démarche qualité dans les LABM d’IDF est étudiée au regard du respect du GBEA et
de l’application des normes ISO. Les conséquences de la « non qualité » en termes de
santé publique sont, par ailleurs, exposées. Enfin, les hypothèses formulées dans la
partie introductive de ce mémoire sont discutées à l’appui des informations recueillies.
Selon les informations communiquées par le COFRAC en date du 27 mars 2007, sur la
centaine de LABM accrédités ISO, 2 sont localisés en IDF [64]. Aucun laboratoire
francilien n’est candidat à l’accréditation ISO 15189, et un seul LABM a déposé une
demande d’accréditation ISO 17025. Le COFRAC précise que les LABM franciliens
accusent un retard dans la mise en œuvre de leur démarche qualité comparés aux LABM
d’autres régions. Toutefois, aucune donnée quantitative n’a été communiquée.
2. Respect du GBEA
Cet item est abordé par le biais des inspections réalisées par l’IRP d’IDF, des données
recueillies lors des entretiens semi-directifs conduits auprès de 4 PHISP franciliens, ainsi
que des informations fournies par Bioqualité® et des associations proposant des
programmes d’EEQ.
En IDF, les inspections de LABM sont diligentées en inopinée, uniquement dans le cadre
de signalements (enquêtes CNQ, plaintes, demandes de l’Ordre des pharmaciens, etc.) et
permettent de contrôler le fonctionnement global de l’établissement. Les outils
d’inspection des PHISP sont une grille et une notule reprenant tous les points à inspecter
[73,74].
Les inspections sont réalisées presque exclusivement par les PHISP en binôme, avec le
référent en biologie ou un autre PHISP non biologiste [14,15,16]. Dans ce dernier cas, le
PHISP référent en biologie apporte son appui technique à la mission d’inspection.
Le bilan des 48 inspections réalisées en 2005/2006 montre que plus de 50% des
enquêtes concernent les LABM ayant présenté des anomalies répétées ou importantes
dans les résultats du CNQ [14,16] :
- Les erreurs au CNQ, considérées comme graves, ne font pas l’objet de mesures
correctives de la part des LABM ;
- Dans 7 cas, le CQI est absent ou partiellement mis en œuvre ;
- Environ 70% des LABM ont un Responsable d’Assurance Qualité (RAQ) au sein de
leur structure ;
- Les mauvaises pratiques persistent malgré les mesures administratives (mise en
demeure d’un mois).
Les suites d’inspections proposées par l’IRP se font en concertation avec le PHISP
biologiste. En effet, comme le souligne D, « A chaque laboratoire, on voit des pratiques
différentes et des organisations très différentes. Pour chacun, on est un peu obligé de se
référer au PHISP biologiste, fouiller dans les textes pour savoir si telle ou telle pratique est
possible, admissible ».
La hiérarchisation des écarts dépend de leur impact en termes de santé publique. A titre
d’exemple, un LABM qui rend un résultat erroné sur une glycémie (suite à une absence
de CQI) ne respecte pas le GBEA mais ne fait pas courir le même risque à un patient
qu’une erreur de groupe sanguin. En tout état de cause, face à une situation complexe, le
PHISP biologiste peut faire appel à des experts dans un domaine technique donné pour
juger de la gravité des écarts et les hiérarchiser.
Selon C, une étude menée en interne avait montré que les LABM ayant une faible activité
(moins de 1 million de B) pouvaient avoir des pratiques dangereuses et que les mises en
demeure concerneraient essentiellement ces laboratoires.
Nombres
Suites (plusieurs suites peuvent concerner un même LABM) (total = 56)
Mise en demeure 6
Suspension 1
Demande de retestage sur sérothèque 2
Information et rappel de patients 4
Information de l’Ordre 2
Plaintes aux Ordres (pharmaciens et médecins) 3
Transmission au Procureur 3
Transmission à la DGS (CNQ) 33
Alerte sanitaire transfusionnelle 2
Quant à l’adaptation des sanctions à la gravité des écarts, les points suivants sont
évoqués par les PHISP :
- S’agissant des sanctions pénales, les tribunaux sont sensibles au fait que des
professionnels ne se soumettent pas à des contrôles organisés par l’Etat qui
permettent d’assurer la qualité des résultats d’analyses. L’absence de fiabilité de ces
résultats peut amener les juges à sanctionner le LABM sur la base du délit de
tromperie ;
- S’agissant des sanctions ordinales, un PHISP pense que l’Ordre des Pharmaciens est
plus sévère pour les officinaux que pour les biologistes et que des sanctions
d’interdictions d’exercer qui toucheraient ainsi le biologiste, sa pratique professionnelle
et ses revenus, sont rares.
Lors des entretiens semi-directifs, il a été demandé aux PHISP d’évoquer une ou des
inspections marquantes. Les missions mentionnées lors des entretiens sont des
inspections signalement (plaintes, demandes de l’Ordre, enquêtes CNQ). Deux LABM
sont contrôlés plusieurs fois afin de vérifier l’effectivité des mesures correctives exigées
par les mises en demeure. Les inspections se déroulent dans de « bonnes conditions ».
Toutefois, le PHISP A mentionne l’agacement d’un biologiste qui estimait que l’inspection
ralentissait l’activité du laboratoire. Les PHISP observent des mauvaises pratiques
essentiellement dans les petits LABM travaillant en sous-effectif, sans SAQ et négligeant
le CNQ.
Les PHISP mentionnent la gestion chronophage des dossiers de LABM. Pour D, certaines
missions nécessitent 16 jours en équivalent temps plein, depuis la préparation de
l’inspection jusqu’à la rédaction du rapport. A précise que le LABM précédemment
mentionné a été inspecté 6 fois et qu’il gère ce dossier depuis 18 mois.
2.1.5. Point de vue des PHISP sur la qualité dans les LABM d’IDF
En général, les LABM font les CQI mais ont tendance à diminuer leur nombre pour
des raisons économiques. Ils participent très peu à des programmes d’EEQ,
essentiellement pour ces mêmes raisons22 ainsi que par manque de temps.
22
Par exemple, un contrôle journalier en biochimie revient à 1439 € par an [60].
Selon C, « le concept de qualité n’est pas ancré chez les biologistes qui ne se posent
pas la question de la fiabilité des résultats rendus et font confiance à la machine».
- Le personnel (directeur inclus) ne se déplace pas (ou très peu) pour assister à des
journées de formation car les LABM travaillent avec un effectif réduit.
Pour un PHISP ayant travaillé en région Centre, les LABM sont en général de taille
importante et les petits LABM « à risques » ayant de mauvaises pratiques sont moins
nombreux. En revanche, un PHISP ayant exercé dans le Nord-Pas-de-Calais trouve des
similitudes avec l’IDF du fait d’une surdensité de LABM. Les inspections qu’il y effectuait
étaient des enquêtes CNQ. La situation est très différente selon la taille de la région car
les mauvaises pratiques sont plus aisément masquées dans les grandes agglomérations,
du fait de l’anonymat qui y règne23. En conclusion, même si selon C, il y a « de moins en
moins de situations catastrophiques », les LABM sont très en retard dans la mise en place
du GBEA. C trouve anormal qu’un LABM inspecté courant mars 2007 commence
actuellement la mise en œuvre du GBEA en adhérant à Bioqualité®.
Sur 950 LABM franciliens, 480 sont adhérents à Bioqualité® à la date du 2 mai 2007.
23
Entre 2000 et 2004, des suites administratives ont été données pour toutes les inspections
effectuées dans le Nord-Pas-de-Calais (dont une fermeture provisoire), sans suites disciplinaires
ou pénales. En région Centre, toutes les inspections n’ont pas eu de suites administratives, 2
dossiers ont été transmis à l’Ordre et aucun au procureur [12].
Il est à noter que Bioqualité® dispose de 13 BQ en IDF ce qui est insuffisant au regard du
nombre d’adhérents24. En effet, les critères de désignation des BQ25 ne sont pas aisés à
remplir dans une région où beaucoup de biologistes exercent seuls dans des LABM de
petite taille et ne peuvent pas se faire remplacer durant leur absence.
En conclusion, il est à noter que peu de LABM d’IDF sont totalement conformes au GBEA
et les LABM inspectés donnent à voir des lacunes en matière de qualité, ce qui n’est pas
sans risques en termes de santé publique.
Les LABM ayant de mauvaises pratiques ne peuvent pas garantir la qualité et la fiabilité
de leurs résultats. La « non qualité », pour des analyses telles que le groupage sanguin,
la recherche du VIH et la toxoplasmose peuvent avoir de graves conséquences en termes
24
Le quota prévu par Bioqualité est de 1 BQ pour 10 LABM.
25
Etre membres de Bioqualité®, suivre la formation et consacrer 6 jours par an à cette
activité.
Un LABM effectue des analyses de détermination de groupe sanguin non conformes aux
dispositions du GBEA. En effet, les CQI ne sont pas exécutés et la saisie des résultats est
effectuée par une seule personne (au lieu de 2).
La fiabilité des résultats de groupage sanguin n’étant donc pas assurée, le LABM est mis
en demeure de cesser ces mauvaises pratiques, de se mettre en conformité et de
contacter tous les patients concernés, soit environ 1000 personnes, pour une nouvelle
analyse à la charge du laboratoire26.
Les dépôts de sang du département sont aussi alertés sur les mauvaises pratiques de ce
laboratoire et la non-fiabilité de ses résultats pour ce type d’analyses. Par ailleurs, l’état
d’avancement de la procédure de rappel de patients est évalué grâce à des inspections
avec le MISP de la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales
(DDASS). Ce dernier en assure le suivi grâce aux bilans d’étape transmis par le LABM,
comportant notamment l’identité des patients et les résultats des retestages.
Les résultats erronés de sérologie VIH (particulièrement les faux négatifs) ont un impact
important en termes de santé publique et nécessitent le retestage voire le rappel de
patients.
Un LABM fait l’objet d’une inspection suite à une non-participation au CNQ. L’inspection
montre que pour la recherche du VIH, le LABM n’effectue aucun CQI et ne respecte pas
la périodicité de la calibration de l’appareil fixée par le fabricant.
26
Il n’existe pas d’échantillothèque pour ces analyses qui se font sur des échantillons de
sang total (non conservable). Un retestage est donc impossible à mettre en œuvre.
Les résultats erronés concernant la toxoplasmose, notamment les faux négatifs, ont des
conséquences chez la femme enceinte avec des risques de malformations fœtales et
nécessitent le retestage voire un rappel de patients.
Une inspection est effectuée dans un LABM suite à des anomalies au CNQ (une erreur
grave et des résultats rendus hors délais). Lors de l’inspection, il est relevé que le
laboratoire fait la recherche de toxoplasmose en l’absence de CQI et ne respecte pas les
spécifications du fabricant concernant la fréquence de calibration de l’automate. Le LABM
est mis en demeure de se mettre en conformité, de faire un retestage des patients à partir
de la sérothèque (132 personnes) et d’adresser un bilan au MISP de la DDASS. Cette
mauvaise pratique étant ciblée sur quelques mois, tous les échantillons sont conservés
dans la sérothèque et le rappel de patients n’est pas nécessaire.
Un PHISP fait remarquer que les mauvaises pratiques des LABM ne font pas l’objet de
communication et de médiatisation. A l’exception des cas graves, « la non qualité est
diluée, les erreurs sont sous-évaluées et les patients ne s’en rendent pas compte ».
Cependant, il constate une volonté de l’administration de faire cesser les mauvaises
pratiques. Selon lui, les erreurs de groupage sanguin qui ont nécessité un rappel de
patients voire la diffusion d’alertes transfusionnelles, ont sensibilisé le directeur de la
DRASS qui a une forte volonté de fermer les laboratoires « déviants ».
27
La durée de conservation des échantillons est d’1 an (annexe C du GBEA).
L’ensemble des informations recueillies dans le cadre de cette étude permet de dresser
un tableau de la mise en œuvre d’une démarche qualité dans les LABM d’IDF.
D’une manière générale, les LABM d’IDF sont très en retard dans la mise en œuvre du
GBEA, douze ans après l’entrée en vigueur de la première version du référentiel.
Une démarche d’accréditation selon la norme ISO 15189 (ou ISO 17025) se traduit par la
nécessité, pour les LABM, de valoriser leur démarche qualité, en l’intégrant dans un
processus d’amélioration continue. Cette initiative est conditionnée par une première
phase de mise en conformité réglementaire (GBEA) au sein du LABM [31,41,47,50,65e].
Le retard accusé par les LABM d’IDF dans la mise en œuvre du GBEA, permettrait
d’expliquer le faible nombre de LABM accrédités ISO ou candidats à l’accréditation.
Les LABM franciliens ayant de mauvaises pratiques sont essentiellement des laboratoires
de petite taille, sans technicien, dirigés par un seul biologiste sans formation continue et
en fin de carrière.
Les LABM « déviants » n’exécutent pas les CQI et les calibrations des appareils
conformément au GBEA et aux instructions des fabricants d’automates, afin de réduire le
coût d’utilisation des réactifs. Cette pratique contribue à un manque de rigueur dans la
qualité des analyses.
La « non qualité » peut aussi être mise en évidence grâce au CNQ, notamment pour des
signalements d’erreurs graves. Les autres anomalies au CNQ (non ou insuffisance de
participation) reflètent pour le moins une mauvaise organisation des LABM (par exemple
la non-désignation d’un responsable de gestion des échantillons du CNQ). Cette situation
permet aussi d’expliquer l’absence de suivi des résultats du CNQ et de mise en œuvre de
mesures correctives de la part du LABM, suite à une anomalie.
Les LABM participent peu à d’autres programmes d’EEQ pour des raisons économiques.
Selon les PHISP, le biologiste estime que ces programmes entraînent un surcoût financier
(et une surcharge de travail) et ce, en l’absence de toute obligation de participation
imposée par le GBEA.
Les LABM n’ont pas de SAQ ou le système est peu développé. En effet, le RAQ est
souvent le directeur du LABM et il n’est pas obligatoirement formé au concept de qualité
et de son management, contrairement à un qualiticien.
En IDF, les inspections de LABM ont pour origine des signalements (CNQ, plaintes, etc.).
Comme le souligne un PHISP « s’il n’existait pas d’obligation réglementaire de faire une
inspection suite au signalement CNQ, les laboratoires ne seraient pas inspectés ».
Ceci a pour conséquence l’absence de suivi, dans le temps, des LABM. Les PHISP
constatent que les mesures correctives mises en œuvre par les laboratoires ne sont pas
pérennes. Cette situation peut aussi s’expliquer par une « culture AQ » insuffisante au
sein du LABM. Ainsi, suite à une inspection, le laboratoire met en place des actions
correctives sans concevoir des mesures préventives permettant l’amélioration en continue
de la qualité, telle qu’exposée dans la norme ISO 15189 [12].
Enfin, s’agissant des sanctions (administratives et/ou disciplinaires et/ou pénales), l’IGAS
estime qu’elles sont rares pour les LABM [15]. En IDF, les PHISP constatent que des
inspections mettant en évidence de mauvaises pratiques (avec des enjeux de santé
publique), ont sensibilisé l’administration au problème des LABM « déviants ». Elle peut
donc être amenée à fermer provisoirement un laboratoire, à porter plainte devant les
ordres professionnels ou au tribunal. Les PHISP observent que les juges pénaux sont en
général sensibles à la qualité des analyses dans les LABM et, en cas d’absence de
fiabilité des résultats, peuvent sanctionner le laboratoire sur la base du délit de tromperie.
A la lumière des résultats mis à jour lors de l’enquête, des préconisations sont formulées
afin d’améliorer la qualité dans les LABM. Elles sont de portée nationale ou spécifiques à
l’IDF.
1.1. Inspection
La perspective d’une intervention des PHISP (et MISP) à l’échelle interrégionale est
étudiée par la Conférence des Pharmaciens Inspecteurs Régionaux et les autorités
compétentes dans le cadre de l’inspection, en 2007/2008, des LABM exerçant des
activités d’Aide Médicale à la Procréation (AMP) et de Diagnostic Prénatal (DPN). Ces
inspections seraient diligentées pour le compte des Agences Régionales de
l’Hospitalisation (ARH) ou de l’Agence de Biomédecine [8,76].
Les normes ISO 17025, ISO 15189 et le GBEA présentent des points communs (SMQ,
gestion des ressources, métrologie, mise en place et suivi d’actions correctives).
Toutefois, la norme ISO 15189 a des exigences supplémentaires en matière de qualité
comparée au GBEA telles que la communication interne, la mise en place d’objectifs et
d’indicateurs qualité, les audits internes et l’amélioration continue du SMQ. En pratique,
après la phase de mise en conformité réglementaire, les LABM approfondissent leur
démarche qualité en optant pour une accréditation ISO.
L’IGAS préconise de rendre obligatoire l’application de la norme ISO 15189 dans un délai
de 5 ans. Il semble incontestable qu’un laboratoire accrédité ISO rentre dans un système
d’amélioration continue de la qualité. De plus, il est audité par le COFRAC tous les 18
mois environ, ce qui lui permet de rester continuellement dans cette démarche.
Il faut rappeler que la mise en œuvre de cette norme implique de la part du LABM une
surcharge de travail d’environ 30% et des frais d’accréditation s’élevant à 9000 € TTC.
Enfin, certains PHISP pensent qu’imposer la norme ISO 15189 à des biologistes qui n’ont
pas la « culture assurance qualité » est voué à l’échec.
Les PHISP rencontrés dans le cadre de cette étude sont favorables à cette proposition
car ils estiment que cela permettrait la fermeture des LABM « déviants ». Toutefois, un
contrôle préalable au renouvellement d’autorisation leur semble important, ce qui
permettrait de renforcer la présence de l’inspection. Il faut néanmoins convenir que le
manque global d’effectifs et le nombre de LABM rendent cette fréquence d’inspection
difficilement applicable, notamment en IDF pour les raisons évoquées précédemment.
L’article R. 6211-14 du CSP30 pourrait être modifié afin d’allonger la durée de suspension
de l’autorisation.
28
Le renouvellement quinquennal des autorisations est prévu pour les LABM réalisant des
activités de DPN et d’AMP (articles L. 2131-1 et L. 2142-1 du CSP).
29
Unité reflétant l’activité du laboratoire.
30
Si l’inspection établit qu’un laboratoire fonctionne dans des conditions dangereuses pour la
santé, son autorisation de fonctionnement peut lui être retirée. Ce retrait ne peut intervenir
Ces recommandations pourraient être étudiées dans le cadre d’une réforme globale de la
biologie médicale, initiée par le ministère chargé de la santé.
1.4. Formation
2.1. Inspection
A défaut d’inspections de routine, et sachant qu’un LABM est inspecté en moyenne une
fois tous les 20 ans [15], une démarche intermédiaire pourrait être mise en œuvre dans
les prochains mois :
Chaque PHISP établirait à partir de son portefeuille, une liste des LABM inspectés depuis
plus de 10 ans et identifierait les laboratoires « à risques », grâce au dossier administratif
des LABM (mentionnant l’activité, le nombre de biologistes et le nombre de techniciens),
qui ne font pas (encore). Ces LABM seraient inspectés sur les points critiques identifiés
qu’après une mise en demeure (délai 1 mois). En cas d’urgence, l’autorisation peut être suspendue
sans procédure préalable, pour une durée maximale de 1 mois.
31
1148 LABM contre 293 laboratoires publics, entre 2000 et 2004 [15].
Afin de permettre aux PHISP de mieux appréhender les inspections de LABM, des fiches
reprenant les principales techniques d’analyses et les différents automates utilisés en
laboratoire peuvent s’avérer utiles. Ce type de support permettrait au PHISP de mieux
évaluer la rigueur du LABM dans l’exécution des analyses, notamment le suivi des
instructions des fabricants fixant le nombre, la fréquence des CQI et la durée de validité
de la calibration des appareils. Ces supports pourraient être réalisés en quelques
semaines, en prenant l’attache du PHISP référent en biologie.
Le volet pédagogique du métier, mentionné par les PHISP d’IDF, pourrait être renforcé
par des actions d’information et de communication envers les biologistes et le grand
public.
Les LABM pourraient être sensibilisés à la démarche d’inspection grâce à des soirées
d’information33 organisées par exemple en collaboration avec l’Ordre des Pharmaciens (et
les syndicats). L’accent pourrait être mis sur le volet pédagogique de l’inspection et les
objectifs d’amélioration de la qualité dans les LABM.
Une telle action avait été initiée en 2001/2002 par la DRASS de Bourgogne et poursuivie
par d’autres initiatives. A titre d’exemple, le bilan des inspections ciblées sur les pratiques
de groupage sanguin avait été communiqué à l’ensemble des LABM et fait l’objet d’une
publication [43,78].
32
Exemple : identification du patient, identification de l’échantillon au LABM et qualification
du personnel.
33
Ce qui permettrait de toucher les LABM ayant un effectif réduit et dont le personnel ne
s’absenterait pas en journée.
La démarche qualité mise en œuvre dans les LABM a pour objectif d’assurer la qualité et
la fiabilité des analyses de biologie médicale. Les référentiels qualité applicables aux
laboratoires, obligatoire (GBEA) ou facultatifs (normes ISO 17025 et 15189) sont des
outils d’aide dans cette démarche.
L’inspection des LABM en IDF montre la persistance des mauvaises pratiques et permet
de dresser le profil des laboratoires « à risques » (petit LABM, sans technicien, dirigé par
un seul biologiste sans formation continue et en fin de carrière). Ces laboratoires
devraient faire l’objet d’inspections ciblées afin de favoriser leur mise en conformité avec
le GBEA ou de faire cesser leur activité (en cas de persistance de mauvaises pratiques).
[1] Loi n°75-626 du 11 juillet 1975 modifiée, relat ive aux laboratoires d’analyses de
biologie médicale et à leurs directeurs et directeurs adjoints.
[2] Décret n° 76-1004 du 4 novembre 1976 modifié, f ixant les conditions d’autorisation des
laboratoires d’analyses de biologie médicale.
[3] Décret n° 94-1049 du 2 décembre 1994 relatif au contrôle de qualité des analyses de
biologie médicale prévu par l’article L.761-14 du Code de la Santé Publique (article
D.6213-8 et suivants du Code de la Santé Publique).
[4] Arrêté du 26 avril 2002 modifiant l’arrêté du 26 novembre 1999 relatif à la bonne
exécution des analyses de biologie médicale (Guide de Bonne Exécution des Analyses
ou GBEA).
[5] Arrêté du 28 avril 2003 fixant les conditions particulières d'évaluation et d'utilisation
des réactifs de dépistage et de confirmation des anticorps anti-VIH 1 et 2 et des
anticorps anti-HTLV I et II.
[6] Circulaire DGS n° 2000-407 du 17 juillet 2000 r elative à l’information des personnes
concernées par un risque d’erreur d’un laboratoire d’analyses de biologie médicale
dans lequel ont été détectées des anomalies susceptibles de remettre en cause la
fiabilité des résultats rendus.
[7] Circulaire N°DGS/SQ3/2000/158 du 23 mars 2000 r elative à la mise en place d’une
procédure de retestage de personnes concernées par la détection d’anomalies
répétées ou importantes pour le dépistage des anticorps anti-VIH au contrôle de
qualité des laboratoires d’analyses de biologie médicale de 1997, jugées graves par la
Commission nationale du contrôle de qualité.
[8] Circulaire N° DGS/DHOS/2B/O4/2007/116 du 28 mar s 2007 relative aux rôles et
missions des services déconcentrés, des Agences régionales de l’hospitalisation, de
l’Agence de la biomédecine dans le domaine de l’Assistance Médicale à la Procréation
(AMP) et du Diagnostic Prénatal (DPN).
[9] Procédure d’inspection d’un laboratoire de biologie médicale (version 1, mars 2003).
[10] Norme internationale ISO 9001:2000. Système de management de la qualité -
Exigences.
[11] Norme internationale ISO/CEI 17025:2005. Exigences générales concernant la
compétence des laboratoires d’étalonnage et d’essais.
Articles de périodiques
[21] Arfi C. Mise en place d'un système d'assurance qualité au LABM. Option Bio, 1998,
vol. 200-201, pp. 4-6.
[22] Bennett J, Cervantes C and Pacheco S. Point-of-care testing: inspection
preparedness. Perfusion, 2000, vol. 15, pp. 137-142.
[23] Blaton V. Accreditation and postgraduate training in European countries : an FESCC
survey. Clin. Chim. Acta, 2001, vol. 309, pp. 115-120.
Sites internet
Autres documents
Annexe 5 Tableau comparatif des principales exigences des normes ISO (17025,
15189) et du GBEA.
Madame Isabelle JAYET, PHISP référent dans le domaine de la biologie à l’IRP d’IDF
PHISP A
• Cursus universitaire
Ancien interne en pharmacie hospitalière, il souhaitait être biologiste.
• Prise de poste
Il est à la DRASSIF depuis 2 ans. A son arrivée, il a mesuré la différence entre une petite DRASS
(où il avait effectué son stage découverte) et une grande région, en termes de gestion d’une
équipe, de l’aspect relationnel, du nombre d’établissements à inspecter, etc. Il a bénéficié d’un
système de tutorat à son arrivée.
PHISP B
• Cursus universitaire
Ancien interne, option Pharmacie Industrielle et Biomédicale (PIBM), il est titulaire d’un DESS
« Droit de la santé ».
• Prise de poste
Il est en poste en IDF depuis 2004. Il a précédemment connu deux autres régions. En IDF, il a
bénéficié d’un système de tutorat et son portefeuille d’établissements à inspecter était identifié.
• Cursus universitaire
Après un cursus de pharmacie option biologie (filière courte), il a passé un DESS « Droit de la
santé ».
• Prise de poste
Il est en poste à la DRASSIF depuis plusieurs années. Il a bénéficié d’un système de tutorat durant
plusieurs mois. Il considère qu’il faut 2 à 3 ans à un PHISP pour gérer ses dossiers et faire des
inspections seul, dans tous les domaines.
PHISP D
• Cursus universitaire
Ancien interne option PIBM, il avait au préalable travaillé dans un laboratoire de biochimie et de
culture cellulaire.
• Prise de poste
Il est à la DRASSIF depuis 2004 (premier poste) et apprécie sa liberté d’organiser son travail,
d’avoir des contacts et d’aller sur le terrain.
A/ Cadre
Dans le cadre de mon mémoire professionnel ayant trait à la qualité dans les Laboratoires
d’Analyses de Biologie Médicale (LABM) en Ile-de-France, j’ai choisi d’effectuer des entretiens
avec des Pharmaciens Inspecteurs de Santé Publique (PHISP) non biologistes. Cet entretien
devrait durer une heure environ et restera anonyme. Je souhaiterais l’enregistrer si cela ne vous
pose pas de problème.
B/ Présentation de l’enquêté
C/ Métier de PHISP
¾ Racontez-moi la première fois que vous avez été en contact avec l’activité de
l’analyse de biologie médicale.
o Quelle image ce contact a-t-il donné de l’ABM ? (surprise, écart avec les représentations) ;
o Formation
9 Formation initiale (contenu, durée, apports, manques),
9 Formation continue (contenu, durée, apports, manques),
9 Connaissance d’une semaine de formation à l’ENSP (la semaine du 26 mars 2007, dans le
cadre de la formation continue) ? Æ montrer le programme
9 Intérêt à suivre la formation,
9 Adéquation de la formation ENSP à l’exigence du terrain,
9 Suivie de formation spécifique dans le domaine des techniques d’analyses de biologie
médicale dans le cadre de la formation continue ;
¾ Si vous deviez exposer à quelqu’un votre vision sur la situation des LABM en
IDF, que diriez-vous ?
o Motif ;
o Solo ou accompagné (par un PHISP biologiste ou non, MISP, pharmacien conseiller de
l’assurance maladie, etc.) ;
o Déroulement de la préparation (et difficulté) : étude de dossier, existence de grille ;
o Déroulement de l’inspection (contact et relation avec l’inspecté, sentiment d’aisance ou pas sur
site, répartition des tâches, etc.) ;
o Rédaction du rapport ;
o Suite de l’inspection ;
o Mise en place de mesures correctives par le LABM, retards, freins ;
o Sanction adaptée.
o Motif ;
o Déroulement de la préparation (et difficulté) : étude de dossier, existence de grille ;
o Déroulement de l’inspection (contact et relation avec l’inspecté, sentiment d’aisance ou pas sur
site, répartition des tâches, etc.) ;
o Rédaction du rapport ;
o Suite de l’inspection ;
o Mise en place de mesures correctives par le LABM, retards, freins ;
o Sanction adaptée.
Relance : inspection marquante, inspection en solo, relation inspecteur/inspecté, suites,
sanctions.
o Motif ;
o Motif ;
o Déroulement de la préparation (et difficulté) : étude de dossier, existence de grille ;
o Déroulement de l’inspection (contact et relation avec l’inspecté, sentiment d’aisance ou pas sur
site, répartition des tâches, etc.) ;
o Rédaction du rapport ;
o Suite de l’inspection ;
o Mise en place de mesures correctives par le LABM, retards, freins ;
o Sanction adaptée.
Relance : première inspection, solo, mesures correctives, retards, freins.
G/ Préconisations
o Freins ressentis ;
o Ce qui manque (doc, formation, temps, etc.), comment le mettre en œuvre ;
o Démarche d’inspection (méthodologie basée sur routine, etc.) ;
o CNQ ;
o Suites, sanctions ;
o Changer la réglementation ;
Relance : freins, formation, critères d’inspection, CNQ, réglementation, outils, mise en
œuvre.
H/ Clôture de l’entretien
PHISP référent en Point de vue sur : le CNQ, la qualité dans les LABM d’IDF et l’évolution de la
biologie en IDF situation, l’adaptation des sanctions à la gravité des écarts. Les différences entre la
situation des LABM d’IDF et la région où il a précédemment exercé, des exemples
de LABM en IDF ayant amélioré la qualité suite à l’inspection, point de vue sur les
recommandations de l’IGAS (rendre obligatoire la norme ISO 15189 et modifier le
régime d’autorisation des LABM).
PHISP siégeant à la Point de vue sur : le CNQ (organisation, améliorations possibles), l’accréditation
section G du CCOP ISO des LABM, les suites d’inspection et les sanctions ordinales.
Bioqualité® Présentation de l’activité, des projets, des différents cycles (et phases) de la
formation et durée, répartition des LABM selon les cycles, frais d’adhésion,
difficultés rencontrées par les LABM pour suivre la formation, nombre d’adhérents
franciliens et leur répartition suivant les phases de la formation.
Asqualab®, Organisation générale, modalités d’envoi des résultats par les LABM, modalités (et
Probioqual® et délai) de renvoi des comptes-rendus pas ces organismes, nombre et liste de LABM
CTCB® franciliens adhérents, fréquence de leur participation (et nature des programmes),
évaluation de la qualité de leurs résultats (et comparaison aux adhérents d’autres
régions).