Révolution S
Révolution S
Révolution S
Semestre 1, 2017/2018
gferragu@parisnanterre.fr
Plan :
1 - Introduction
2 - Les révolutions atlantiques
3 - Une révolution permanente ? (France 1789/1830)
4 - La révolution industrielle
5 - 1848, une révolution sociale ?
6 - Le printemps des peuples (1848), une révolution romantique ?
7 - Une révolution scientifique : le darwinisme
8 - Les révolutions communistes : l'exemple russe
9 - Des Jeunes Turcs aux printemps arabes, révolution et monde arabo-perse
Bibliographie :
Introduction
"Un tel phénomène, dans l'histoire de l'humanité, ne s'oublie plus, parce qu'il a révélé dans la nature
humaine une disposition, une faculté de progresser telle qu'une politique n'aurait pu, à force de
subtilité la dégager du cours antérieur des événements : seules la nature et la liberté réunies dans
l'espèce humaine suivant les principes internes du droit étaient en mesure de l'annoncer, encore que,
quant au temps, d'une manière indéterminée et comme événement contingent. Mais, même si le but
visé par cet événement n'était pas encore aujourd'hui atteint, quand bien même la révolution ou la
réforme de la constitution d'un peuple aurait finalement échoué, ou bien si, passé un laps de temps,
tout retombait dans l'ornière précédente (comme le prétendent maintenant certains politiques), cette
prophétie philosophique n'en perd rien pour autant de sa force. Car cet événement est trop
important, trop mêlé aux intérêts de l'humanité et d'une influence trop vaste sur toutes les parties du
monde pour ne pas devoir être remis en mémoire aux peuples, à l'occasion de circonstances
favorables et rappelé lors de la reprise de nouvelles tentatives de ce genre."
Emmanuel Kant, Le conflit des facultés, 1798
I - Introduction
Congrès de Vienne et ses suites) ou bien pour la préparer (l'Internationale). Cette révolution
politique continue d'évoluer au cours du XXe siècle, en partie du fait de ce modèle théorique qui
structure l'idéologie socialiste et répond, par ailleurs, à une question devenue lancinante, la question
sociale, celle d'une misère généralisée. Le XXe siècle naissant voit émerger quelques révolutions,
dans l'empire ottoman, , en Chine, au Mexique... mais la grande révolution à venir est celle qui éclate
en 1917 en Russie, révolution majeure en ce qu'elle devient, après la Française, le modèle et le
support d'une idéologie nouvelle et qu'elle renouvelle au passage l'idée même de révolution,
désormais associée à un courant politique. Et cela non sans paradoxes : elle incarne à la fois un
espoir de monde meilleur, et le dévoiement de cette idée, confisquée par une caste politique à des
fins de dictature. En URSS comme dans les autres Etats nés de révolutions ou gagnés à la Révolution,
l'espoir d'un monde égalitaire et d'un homme nouveau est peu à peu noyé dans le système même
qui le revendique : le totalitarisme. A ces révolutions communistes, on peut opposer les révolutions
fascistes et nazis, qui nous ramènent à l'idée que la révolution est un phénomène politique, et non
une idéologie en soi : dans ces deux cas, des Etats nouveaux émergent, qui se considèrent en guerre
permanente, postulent la création d'un homme nouveau et visent, tout comme l'URSS, une fin de
l'Histoire (telle que formulée par le marxisme, à savoir une société sans conflit). On pourrait croire
que les totalitarismes mettent un terme au concept même de révolution. Néanmoins, le schéma
révolutionnaire persiste, notamment aux marges du mouvement communiste (trotskistes,
anarchistes) : il va trouver, en Chine (avec le maoïsme), à Cuba (avec le castrisme) etc. des
applications différentes, en fonction des variations idéologiques. A ce sujet, la religion elle-même,
institution conservatrice, génère ses propres révolutions, telle la révolution islamique d'Iran. Et
surtout, ce phénomène se transforme au XXe siècle : tout d'abord avec la chute du mur de Berlin et
la disparition du modèle communiste - une "fin de l'histoire" (F. Fukuyama) qui ne met pourtant pas
fin au phénomène révolutionnaire. De même, d'autres formes de révolutions émergent, secouant la
tutelle des régimes dits révolutionnaires : les révolutions dites "de velours" relèvent d'une nouvelle
pratique pour un phénomène toujours changeant, au nom d'un objectif persistant, la transformation
du système politique. Phénomène globalisé, qui n'est pas l'apanage des sociétés occidentales , les
révolutions marquent également le début du XXIe siècle, notamment dans le Proche Orient avec le
mouvement des Printemps arabes.
Mais la révolution ne se limite pas à des enjeux politiques, même si ceux-ci semblent récurrents : il
faut ici envisager les révolutions technologiques, c'est à dire la découverte et l'introduction d'une
technologie innovante, qui transforme des modes de production, puis l'ensemble de l'économie
voire la société (exemple de l'industrialisation au XIXe siècle). Les révolutions dans le domaine
artistique et culturel transforment nos représentations et peuvent, par voie de conséquences, avoir
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une influence majeure sur la vie politique par exemple (de la révolution des médias à la révolution
romantique).
Comprendre ces phénomènes sur deux siècles suppose, dans une démarche historique, d'analyser le
contexte, de manière à saisir la dynamique révolutionnaire. A noter que la recherche des causes est
u des g a ds jeu de l histo ie , ais gale e t u e des ses g a des o asio s de d ats. U e
certain nombre de débat voir de conflits historiographiques se sont engagés sur la question des
auses, o etie d a les fle io s sus it s pa l a ti le d'Ernest La ousse Co e t aissent les
olutio s , su les auses o o i ue des olutions de 1789, 1830 et 1848. En effet, souvent
derrière la question historique des causes se profile une autre question, plus idéologique, plus
e gag e, elle des espo sa ilit s! L histo ie est toujou s te t , ou du oi s solli it de d sig e
les espo sa le d u e e t jug gatif, ou d ide tifie au o t ai e les heu eu i itiateu s - et
bénéficiaires - d u e e t positif au d t i e t d aut es! ... La recherche des causes en histoire
est d aut e pa t u e e i e p illeu ou, plus ue ja ais, l histo ie doit fai e atte tio à la
t l ologie : il t a aille telle e t e ega d de l e e t ad e u u il est te t de e li e da s le
pass ue e ui o duit à e e e e t. Il te d à p e d e e u il doit ad e i o e
explication du passé, quand la thode histo i ue est e a te e t à l i e se! Attention donc à la
lecture des révolutions. Cela suppose d'identifier les connexions, les modèles, les inspirations qui
d'une révolution à l'autre, peuvent tisser une généalogie de projets, d'idéologies, de pratiques, de
références. Ce cours envisage à partir de ces divers questionnements de comprendre la dynamique
révolutionnaire dans l'histoire contemporaine.
Problématique : en quoi les expériences politique de l'Angleterre et des Etats Unis ont-elles
contribué à la contestation de l'absolutisme et marqué l'opinion publique française ?
«Qui es-tu?
- Je suis ..., freeholder de Grande-Bretagne.
«De quels privilèges jouis-tu en tant que freeholder de Grande-Bretagne?
- En tant que freeholder de Grande-B etag e, je jouis d’u e e o aissa e ivile plus o sid a le
ue le plus g a d des sujets d’u P i e a it ai e. E effet, je suis gouve pa des lois, au uelles
je donne mon consentement; et ni ma vie, ni ma liberté, ni mes biens ne me sauraient être retirés
contrairement à la loi. Je suis un homme libre.» (Craftsman, 22 septembre 1733).
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Ce texte témoigne d'une certaine conception de la citoyenneté en Angleterre au XVIIIe siècle, une
conception formée par une histoire où les révolutions reviennent périodiquement. Au rebours de
certains stéréotypes nationaux, la France n'invente pas la révolution politique : les premières
révolutions éclatent en Angleterre, au XVIIe siècle. Si elles ne se concluent pas par la fin du système
monarchique, elles débouchent sur une réorganisation de la vie politique et sur ce que certains
juristes assimilent à "une constitution non écrite", intégrée à la Common Law (la loi anglaise) et
particulièrement sensible à la défense des droits de l'Homme. La Glorious Revolution (1688) est, à cet
égard, un événement fondateur, en ce qu'il établit le modèle de monarchie parlementaire, déjà
existant, en institutionnalisant les rapports entre le roi et les Assemblées. Le système britannique est
en effet original, et accorde aux assemblées, depuis l'époque médiévale, un pouvoir réel. Depuis le
XIIIe, il existe en effet en Angleterre un parlement, formé de la chambre des lords, composée de
membres désignés ou héréditaires, qui appartiennent à la grande noblesse ou au clergé; et de la
chambre des communes, dont les membres sont élus au suffrages censitaire, appartenant à la petite
noblesse ou à la bourgeoisie.
Au XVIIe, les rois Stuart veulent lever un nouvel impôt sans consulter le parlement. Une guerre civile
éclate : le roi Charles Ier (1625-1649) est vaincu par les partisans du parlement dirigés par Cromwell,
et est condamné à mort en 1649. C'est une première en Europe, un roi condamné et exécuté par son
peuple... Un nouveau régime émerge, le Commonwealth, ou République (seule expérience
républicaine vécue en Angleterre !), dont Oliver Cromwell, chef du parti hostile au roi devient le lord
protecteur, au nom de principes égalitaires. Toutefois, cette première expérience tourne à l'échec :
Cromwell se mue en dictateur et après sa mort (1658), le pouvoir monarchique est restauré (1660)
par le général Monck, qui rétablie le roi Charles II, héritier du roi Charles Ier, sur le trône. L'un des
résultats les plus manifestes de cette première crise est le vote de la loi d Ha eas Co pus en 1679, loi
qui garantit les libertés individuelles et politiques contre l'arbitraire... Une limite à l'absolutisme
royal. Toutefois, du point de vue des monarques, c'est plutôt le modèle absolutiste français qui fait
rêver, celui d'un régime où le roi tire sa légitimité non des assemblées, mais de la volonté divine, et
qui passe donc par un pouvoir plus ample, limité par les seules coutumes du royaume. C'est le
modèle auquel Jacques II Stuart, fils de Charles Ier et successeur de Charles II en 1685, veut tendre :
il souhaite rétablir le catholicisme et la monarchie absolue. Cela passe par un conflit avec l'Eglise
anglicane et les protestants... Mais cette prétention se heurte à une faction de nobles protestants,
qui sollicitent le prince Guillaume d'Orange, protestant, en 1688, considérant que le prince héritier
est illégitime. Guillaume d'Orange débarque donc à la tête d'une armée, et Jacques II choisit la fuite
plutôt que l'affrontement : rattrapé, il est finalement exilé en France (et accueilli par Louis XIV à Saint
Germain en Laye) tandis que le nouveau souverain (après avoir épousé Anne, la fille du roi Jacques II,
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lequel est considéré comme ayant abdiqué) s'engage alors à respecter le Bill of Rights (1689), qui
impose des limites juridiques au pouvoir du roi d'Angleterre (obligation d'obtenir le consentement du
parlement, liberté de parole du Parlement, etc..). Premier constat, il s'agit d'une révolution au sens
politique ( le Parlement s'impose) et non dynastique (les Stuart demeurent jusqu'à la mort de Anne,
remplacés au XVIIIe siècle par les Hanovre). Deuxième constat, il s'agit d'une révolution sans
violence, le roi ayant fui après avoir jeté son grand sceau dans la Tamise. La "révolution" à cet égard
ne ressemble pas aux révolutions américaine et française, fondées sur l'insurrection civile. Mais il
s'agit d'un bouleversement politique : la Séparation des pouvoirs existe... même de manière limitée
et théorique. Le Roi règne avec le pouvoir de nommer des ministres, promulguer des lois, diriger la
politique étrangère. Le Parlement dispose lui du pouvoir législatif, vote la loi et o se t à l i pôt. Le
Bill of Rights reste toutefois vague sur l'organisation des sessions, et le roi conserve le pouvoir de
dissolution du parlement. Le parlementarisme anglais se construit sur ces prémices, sur la loi comme
sur le rapport de force qui s'établit entre les souverains et les assemblées. La monarchie anglaise
n'est pas absolue, mais parlementaire, elle devient un modèle qui fascine les philosophes des
Lumières, celui d'une monarchie "tempérée". Voltaire et Montesquieu s'inspirent des idées du
philosophe anglais John Locke (1832-1794) qui a justifié la Glorieuse Révolution. Locke justifie
notamment le droit de résistance si un personnage de pouvoir abuse de l'autorité qui lui est
concédée par la loi.
"Chaque fois que les législateurs tentent de saisir et de détruire les biens du peuple, ou de le réduire à
l’es lavage d’u pouvoi a it ai e, ils e t e t e guerre contre lui ; d s lo s, il est dispe s d’o i et il
’a plus u’à se fie au e de ue Dieu a do à tous les ho es o t e la fo e et la viole e". (J.
Locke, Deuxième Traité du Gouvernement civil, 1690, trad. Gilson, Vrin éd., pp. 203-206.)
Les penseurs des Lumières font l'éloge des institutions anglaises qui limitent les pouvoirs du roi et
garantissent les libertés individuelles :
Ex: Voltaire, Lettres philosophiques, 1734 : "la nation anglaise est la seule de la terre qui soit
parvenue à régler le pouvoir des rois en leur résistant, et qui, d'efforts en efforts, ait enfin établi ce
gouve e e t sage où le P i e, tout puissa t pou fai e du ie , a les ai s li es pou fai e le al…"
A cet égard, la Glorieuse révolution est un premier modèle de révolution politique réussie.
Depuis le XVIIe, siècle, les colons européens sont installés sur la côte atlantique de l'Amérique du
Nord. L'Angleterre y a organisé treize colonies. C'est un ensemble dynamique économiquement
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1- par la légitimité de leur assemblée coloniale (reconnues par des chartes et légitimité populaire),
qui elle seules détiennent le pouvoir législatif dans les colonies ;
Les crises successi es esse e t les lie s e t e les olo ies. O passe d u e solida it à u e ita le
union: en témoigne des initiatives diverses pour établir des relations permanente entre les
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différentes colonies, prenant souvent forme création de comités. En 1774, Patrick Henry prononce
les ots fa eu : Nous so es da s l’ tat de Natu e. Virginiens, Pennsylvaniens, Newyorkais,
ha ita ts de la ouvelle A glete e, la disti tio ’e iste plus. Je e suis pas u vi gi ie ais u
américain . Le ot eda i ai gag e e ha ge affe ti e et est de plus e plus utilis .L id e
u e iste u e atio a i ai e, disti te de la atio a glaise fait p og essi e e t so he i et
s i pose. le philosophe Thomas Paine le dit clairement dans son Sens Commun.
On notera aussi que peu à peu se constitue un discours socio-culturel, politique, qui valorise une
sp ifi it a i ai e oppos e à l Angleterre. La société américaine est présentée avec les valeurs de
modestie, de travail, de mérite au talent et au travail, de tempérance, et s oppose à u e so i t
anglaise p se t o e o o pue pa le lu e, e e o aissa t de aleu u à la aissa e et o
au mérite des individus. A la société féodale et vieillissante anglaise, les américains se construisent et
se présentent comme société libre, jeune, moderne. P og essi e e t est au o des d oits
atu els , des d oits de tout ho e u ils p oteste t.
En 1774, des représentant des colons se réunissent en congrès. Ils rejettent l'autorité de la
métropole et deviennent des Insurgents. L'insurrection débute, avec, dans le domaine militaire, une
guerre larvée en forme de guérilla (bataille de Lexington, 1775) puis la guerre tout court. Le 4 juillet
1776, les députés des colons votent la Déclaration d'indépendance, qui revendique les populations
des 13 colonies comme formant une nation et dresse la liste d'une série de griefs adressés au roi
d'Angleterre. La guerre est longue, et du côté américain, bénéficie de la connaissance du terrain
comme du sentiment national né de l'insurrection. Nommé en 1775 général en chef, Georges
Washington obtient, avec l'appui de la France, la victoire en 1783. L'indépendance est reconnue...
mais cela fait-il de cette guerre une révolution ?
Constatons d'abord que la guerre d'indépendance ne mobilise pas tous les Américains et que certains
(qui partent ensuite au Canada) restent fidèles à la couronne d'Angleterre. Mais cette guerre se
poursuit avec un phénomène neuf, la transformation de 13 colonies en une nation, et en un régime
nouveau, doté d'une constitution. Les règles de fonctionnement de la nouvelle fédération sont
définies par une constitution rédigée en 1787 à Philadelphie. Elle institue une république et garantit
la séparation des pouvoirs ainsi que les libertés fondamentales dans un Bill of Rights. La structure du
pouvoir est nouvelle, fondée sur l'équilibre entre les pouvoirs (checks and balances) : le congrès
composé de deux chambres (le Sénat et la chambre des représentant) vote les impôts et les lois, le
président de la république élu pour quatre ans choisit et dirige le gouvernement, la cour suprême
exerce le pouvoir judiciaire.
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Cette révolution est donc politique, et fait émerger un régime considéré jusque là comme utopique.
Mais la révolution n'est pas sociale : l'esclavage persiste, la condition des noirs demeurent
inchangée. De même, les droits des amérindiens, premiers habitants de la terre américaine, sont
bafoués au nom de la colonisation. Enfin, les attentes d'une partie de la population américaine (qui
réclame un blocage des prix, le paiement des soldes militaires, l'annulation des dettes pour les
vétérans, etc.) sont ignorées et les discours égalitaristes (comme ceux des régulateurs" du
Massachussetts) condamnés. La révolution est avant tout nationale et politique, mais elle sert de
modèle. Lors de la guerre d'indépendance américaine, l'opinion publique française prend parti pour
les patriotes américains perçus comme des précurseurs sur l'avenir de la liberté. Des volontaire
comme le Marquis de La Fayette s'engagent aux côtés des insurgents, puis une expédition franco
espagnole les appuie contre l'Angleterre. L'enthousiasme des Français est très grand, et d'autant plus
que la monarchie y voit une manière de se venger des pertes de la guerre de 7 ans. Les philosophes
quant à eux saluent la naissance d'une nation qui incarne les idées politiques des Lumières, et
notamment la séparation des pouvoirs, et le principe de l'égalité politique et civile, fondement des
libertés individuelle. Ce grand enthousiasme ignore cependant les imperfections de ces révolutions :
en Angleterre, la plus grande partie de la population est exclue de la vie politique (et du suffrage).
Aux Etats-Unis, les Noirs sont maintenus en esclavage et les droits des Indiens sont bafoués.
L'idée d'un modèle révolutionnaire domine, qui, dans la foulée des écrits de John Locke, aurait rendu
possible la vague révolutionnaire. En 1955, Jacques Godechot et Robert Palmer, deux historiens,
formulent l'idée d'une révolution atlantique, née dans le monde anglo-saxon et qui se répand sur le
continent et dans les milieux cultivés. Ce schéma, séduisant, ignore toutefois les diverses dynamiques
sociales à l'œu e da s les olutio s eu op e es. Il faut, dans le cas français par exemple, se
pencher sur le contexte initial...
Les règnes de Louis XV et Louis XVI sont marqués par une phase de croissance démographique. Après
une longue période de stagnation, la population passe d'environ 22 millions d'habitants en 1700 à 28
millions en 1789. Un faisceau de facteurs explique cette croissance : les guerres ont lieu hors de
frontières, l'Etat intervient plus efficacement lors des disettes et épidémies, l'état sanitaire du pays
s'améliore. Mais ces améliorations ne touchent ni toutes les provinces, ni tous les groupes sociaux. Le
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XVIIIe est une période de croissance économique maquée par l'augmentation de la production, des
échanges commerciaux, et par la hausse des prix. Entre 1726 et 1789, les prix des céréales augmente
nettement plus que les salaires. En cas de crise de subsistance, les antagonismes sociaux se creusent.
Plus de 80 % des Français vivent à la campagne ou travaillent la terre. Les récoltes rythment
l'économie du Royaume. Le monde paysan, enfin, reste soumis au poids des prélèvements : impôts,
dîme; droits seigneuriaux, fermage ou métayage pour le terres en location. La cible majeure des
révoltes est presque toujours le prélèvement fiscal étatique : les émeutes antifiscales, contre les
agents du roi au XVIIe sont restées dans les mémoires. Au XVIIIe, changement : le recours
procédurier s'impose et on assiste à une multiplication des procès de communautés paysannes
contre les seigneurs.
Parallèlement, la population urbaine est minoritaire (600 000 habitants à Paris, 152 000 à Lyon, 85
000 à Marseille vers 1780), mais elle concentre l'essentiel des pouvoirs et des richesses. Toutefois, la
ville est marquée par de violentes inégalités sociales, le luxe côtoie la misère. A cela s'ajoute
l'opposition entre la bourgeoisie et la noblesse. Des roturiers, lecteurs de philosophes, revendiquent
pour le tiers état l'égalité des droits. Les conflits professionnels se multiplient également entre
compagnons et maîtres autour de l'atelier et du métier. Multiplication des grèves ouvrières; refus
d'accepter le contrôle de l'embauche par les corporations. Au sein des compagnonnages des
confréries, des assemblés de cabaret, les ouvriers citadins sont engagés dans une forme de politique
qui habitue à l'organisation de l'action collective. on assiste à une multiplication des appels devant le
Parlement pour obtenir l'abolition de réglementations.
La question du rôle des Lumières dans la Révolution est un vieux débat : l'idée souvent exprimée est
que ce sont les Lumières qui ont produit la Révolution. Mais ne faut-il pas considérer que c'est la
Révolution qui a inventé les Lumières en voulant enraciner sa légitimité dans un corpus de texte ?
Tocqueville ou Taine estiment que les Français ont fait la révolution parce qu'ils ont été transformés
par les livres. L'idée est discutable, les corpus littéraire étant élaborés par la suite. Ce qui est
important, plus que les idées des textes, ce sont les changements dans les pratiques de lecture, le
processus de désacralisation du pouvoir, que l'on peut critiquer et dont on peut se moquer.
Ainsi, des philosophes critiquent la société au nom des "lumières de la raison". Ils ne sont pas
unanimes sur tous les points, mais tous partagent la même attitude. Inspirés par Descartes et
Newton, ils n'acceptent pour vérité que ce qui peut être vérifié par l'observation ou l'expérience.
Quelques principes fondamentaux dominent : la critique du fanatisme religieux, l'exaltation de la
tolérance, la confiance en l'observation et l'expérience, l'examen critique de toutes les institutions et
coutumes, la définition d'une morale naturelle, la reformulation du lien politique et social à partir de
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l'idée de liberté. Les philosophes sont engagés dans la vie publique. Il contestent les fondements de
l'absolutisme de droit divin et définissent la liberté comme un droit inhérent à la nature humaine. Ils
dénoncent les abus du pouvoir, les superstitions et le dogmatisme religieux. Soumis à la censure, ils
sont parfois emprisonnés. L'Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des
métiers, dirigée par Diderot et D'Alembert , entre 1751 et 1772, est emblématique de cet esprit. Plus
de 120 auteurs y participent, un grand soin est apporté aux planches illustrées qui montrent les
innovations scientifiques et techniques. L'ambition est de faire la somme des connaissances du
temps et de critiquer les institutions politiques et religieuses.
Cette volonté des penseurs à éclairer l'opinion publique fait émerger un espace-public (selon la
formule du philosophe J. Habermas) où l'on peut débattre, qui permet le développement d'une
culture critique qui remet en question l'autorité. Des lieux de rencontre assurent la diffusion des
idées des Lumières : académies, salons, clubs, cafés, loges maçonniques1. La correspondance, la
circulation des textes et de leurs auteurs permettent la formation à l'échelle européenne d'une
"République des Lettres" qui compte un nombre réduit masi influent de membres qui appartiennent
à l'élite urbaine. Le peuple est exclu de ces lieux mais par la presse, les chansons et affiches, certaines
idées des Lumières l'atteignent. Mais la philosophie des Lumières n'est pas une doctrine homogène.
A l'exception de Rousseau, partisan de la démocratie, les philosophes souhaitent conserver un ordre
social dominé par les élites. Montesquieu est favorable à une monarchie modérée dans laquelle la
liberté individuelle serait garantie par la séparation des pouvoirs. Voltaire est un moment séduit par
le despotisme éclairé (Frédéric II de Prusse, Catherine II de Russie, Joseph II d'Autriche. Idée selon
laquelle le roi doit réformer autoritairement l'Etat en s'inspirant de la philosophie des Lumières).
NB Alphabétisation en hausse : 1686 : 29 % des hommes et 14% des femmes; 1786 : 47% des
hommes et 27 % des femmes. Selon l'historien Robert Darnton, la diffusion à grande échelle d'une
littérature critique et dénonciatrice a transformé la représentation de la monarchie, minant les
mythes fondateurs, tournant en dérision ses rituels, présentant l'Etat comme arbitraire et avili.
Et de fait, le pouvoir politique semble fragile. Louis XVI dispose en théorie du pouvoir absolu. Depuis
le XVIIe , les bureaux de Versailles et les intendants dans les provinces ont renforcé la centralisation
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La franc-maçonnerie est un phénomène massif. En 1789; sans doute 50 000 maçons; soit 1 homme sur 20
dans la population citadine susceptible d'être admise dans des loges. On assiste alors à la multiplication des
loges dans tout le royaume. Ces loges soutiennent l'idéal d'une société égalitaire qui découpe un espace neuf
où les individus ne sont pas distingués par leur conditions juridiques. Le tiers-Etat y est largement majoritaire
(80%), et les loges accueillent des catégories sociales absentes des autres lieux de sociabilités (marchands,
boutiquiers, artisans). une pratique de l'égalité qui rassemble, bien au delà de l'aristocratie, mais
essentiellement ceux qui ont de l'argent, de l'éducation et des loisirs ! La franc-maçonnerie est une société qui
se veut gouvernée par la morale et réglée par la liberté de conscience, et qui s'érige alors en juge de la raison
d'Etat.
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administrative. Mais le pouvoir est limité par les lois fondamentales du royaume ainsi que le système
des privilèges dont bénéficient non seulement le clergé et la noblesse, mais aussi les habitants des
villes et de certaines province. Il est également miné par les incohérences et les faiblesses de
l'organisation administrative, fiscale et judiciaire (complexité des réglementations, enchevêtrement
des circonscriptions, vénalité des offices), l'insuffisance des revenus de la couronne, qui s'endette.
A la fin du 18e, le rétablissement de l'équilibre financier de l'Etat devient la priorité politique du règne
de Louis XVI. La ise e œu e d'u e fo e fis ale d'i pose et passe pa la supp essio ou la
limitation des exemption dont bénéficient les privilégiés. Les parlements, s'opposent à toute remise
en cause des privilèges fiscaux. Les parlementaires prétendent défendre les libertés contre le
"despotisme ministériel" : ils se posent en représentants de la nation et sont donc soutenus par
l'opinion publique, alors qu'ils défendent les privilèges de la noblesse ! Ils utilisent le droit de
remontrances pour faire échouer les réformes tentées par Turgot (1774-1776), Necker (1778-1783),
Calonne (1783-1787) et Loménie de Brienne 1787-1788. Faute de réforme fiscale, la crise financière
s'aggrave. Le budget de 1788 creuse le déficit. Dans une contexte de récession économique, et de
mauvaises récoltes de 1787 et 1788 , les prix du pain augmentent très fortement. Dans ce
mouvement de forte tension sociale, les parlementaires demandent au roi de convoquer les états
généraux2 pour faire voter une réforme sur les impôts. Les parlementaires espèrent pouvoir
contrôler ainsi le gouvernement du royaume. Dans l'espoir de mettre fin à cette crise, Louis XVI cède
à la pression en août 1788. Il annonce la convocation des Etats Généraux. Au printemps 1789, 60 000
cahiers de doléances sont rédigés, et les ordres élisent leurs représentants. La rédaction des cahiers
entraîne une politisation des populations.
La Révolution française est un immense sujet en soi : il ne s'agit ici que de poser quelques jalons et
d'o se e la d a i ue à l'œu e da s la p iode. Sans détailler la chronologie des événements, on
peut s'interroger sur leur signification :
Les Etats généraux annoncent la crise : dès le 17 juin 1789, l'Assemblée des trois ordres se
transforme en représentation nationale... l'Ancien régime et la société d'ordres sont menacés. Le
serment du jeu de paume, du 20 juin, atteste de l'ampleur de la volonté de réforme. La Révolution
est alors pacifique. Une majorité de juristes favorise une conception nouvelle de la représentation
politique héritée des Lumières. La naissance d'une nouvelle Assemblée constituante, met en cause
l'e se le de l difi e politi ue et so ial... et les concessions du pouvoir royal sont en complet
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non réunis depuis 1614, il s'agit de l'assemblée des trois ordres qui peut donner des avis ou enregistrer des
décisions royales
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décalage. La révolution des juristes, des élites intellectuelles et bourgeoises contre la monarchie
a solue s a h e toutefois en juillet, sans offrir de réponse aux revendications sociales.
A partir de juillet 1789: c'est le relais des révolutions populaires, d'origine parisienne puis par
extension dans les villes de province, sur le même modèle: création de comités permanents et de
milices communales, qui forment ensuite des gardes nationales. Par cette révolution municipale, les
illes s a ipe t du pou oi e t al. Enfin, Paris, comme troisième force, intervient dans cette
dynamique par la prise de la Bastille du 14 juillet. La Bastille, dépot d'arme, est aussi le symbole de
l'arbitraire royal : l'émeute parisienne s'y transforme en révolution quand les troupes, envoyées pour
mater l'émeute, fraternisent avec les parisiens...
Et cette dynamique s'accélère : dans les campagnes, la grande peur (juillet aout 1789) est une
réplique rurale, et violente des révolutions municipales. Confronté à cette crise, les députés
envisagent la suppression des droits féodaux, mais c'est finalement l'Ancien régime lui même qui est
aboli lors de la nuit du 4 août : les privilèges, qui distinguaient les ordres, disparaissent. C'est la
contrepartie sociale de la rupture politique qu'a été la formation d'une assemblée constituante
(décision du 9 juillet 1789). Dans la foulée, la déclaration des droits de l'Homme (26 aout 1789),
inspirée des modèles américains fonde les nouveaux principes revendiqués par les révolutionnaires.
En parallèle, le travail constitutionnel continue : il s'agit de combler le vide politique et juridique par
le principe d'une assemblée permanente élue détenant le pouvoir législatif ... Une seule chambre car
la souveraineté est indivisible.
Les divers enjeux (citoyenneté et droit de vote, décentralisation, organisation des pouvoirs, du
royaume, justice, impôts, etc.) entrainent une refonte complète du régime. Le 14 juillet 1790, la fête
de la Fédération donne l'illusion d'une réconciliation générale et d'une révolution finalement
contrôlée... mais Louis XVI demeure hostile à certaines politiques (notamment la question de la
constitution civile du clergé). Sa fuite dans la nuit du 20 au 21 juin 1791, et son arrestation à
Varennes, déclenchent une crise immense : la question de la légitimité de la monarchie est posée, la
confiance s'envole, un parti républicain émerge tandis qu'à la Constituante se pose la question d'un
jugement possible.
La Constitution est achevée et acceptée le 13 septembre 1791, qui réorganise le régime, devenu
donc constitutionnel. Les élections à l'assemblée législative (745 députés) donnent la majorité à des
modérés, mais révèlent les divisions (entre monarchistes et républicains), les Jacobins sont en
minorité (136/745) mais ont l'appui des clubs et de la minorité, active des sans culottes. En outre, la
tension entre le roi, qui s'oppose à certaines lois (visant le clergé réfractaire) et l'Assemblée
augmente. Dans ce contexte, la guerre menace - menée par les autres cours européennes, inquiètes
14
De là une tension croissante entre le roi et l'assemblée : le roi est devenu suspect, sa fuite, sa
proposition de déclarer la guerre en avril 1792, son appui à l'Eglise contre la constitution civile du
clergé (12 juillet 1790) est perçue comme une trahison. La tension monte, manifestée dès juin par la
crise du 20 juin 1792 (Pétion maire de Paris prend prétexte de la commémoration du Serment du Jeu
de Pau e pou o dui e la foule à l Asse l e et d pose u e p titio o t e le oi. Puis les Tuile ies
sont investies, le roi doit coiffer le bonnet phrygien, mais refuse de lever son veto au décret
punissant les prêtres réfractaires) : le mois d'aout est la conclusion logique de cette tension. Le 3
août 1792, 47 sections sur 48 à Paris demandent la déchéance de Louis XVI. La tension débouche sur
u e i su e tio le août: Louis XVI a a do e les Tuile ies et se fugie à l Asse l e. La
L gislati e p o o e la suspe sio du oi, le e e se e t de l e utif et de la Co stitutio . U e
Convention nationale élue au suffrage universel devra rédiger une nouvelle constitution. A Paris
règne désormais la Commune insurrectionnelle, jacobine, reconnue par la Législative: Marat,
Robespierre, Hébert,...
Enfin, le 21 septembre 1792, la monarchie constitutionnelle est abolie, la 1ere république proclamée
et la question du procès du roi se pose... qui débouche sur un compromis : la Convention jugera le roi
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en dépit de son inviolabilité. Le 16 janvier, par 387 pour et 334 contre, il est condamné à mort, et
guillotiné le 21 janvier. La révolution se radicalise et d'autant plus fortement qu'elle est confrontée à
une guerre extérieure et intérieure (dans l'Ouest et particulièrement en Vendée), ainsi qu'une crise
économique (la valeur de l'assignat, la monnaie révolutionnaire, baisse, les salaires stagnent alors
que le blé augmente). Les Montagnards prennent progressivement le pouvoir, et imposent des
mesures exceptionnelles (tribunal criminel extraordinaire, puis Comité de salut public en avril 1793,
prix des grains fixé - en vain - le 4 mai, etc.) : la Terreur légale se met en place. Une Constitution
ultra-démocratique est élaborée et votée le 24 juin 1793... mais dans le climat de guerre, elle est
finalement suspendue en aout. Par ailleurs, l' assassinat de Marat le 13 juillet 1793, augmente la
tension et précipite la domination des radicaux. La Convention met en place un gouvernement
révolutionnaire, consacré par le décret du 4 décembre 1793, justifié par Robespierre devant la
Convention le 25 décembre par la lutte contre l'ennemi intérieur et extérieur au nom de l'intérêt
général. La Convention envoie dans les départements des représentants en mission pour imposer la
politique menée par Paris. La Terreur - un ensemble de lois d'exception - se décline dans la politique
financière (lutte contre la spéculation), religieuse (calendrier républicain et culte de l'être suprême,
une contre église révolutionnaire), économique (loi du maximum général - fixation du prix des
denrées nécessaires dont le pain) et surtout politique (loi des suspects, grands procès, etc.). Tandis
que la pression militaire retombe à l'automne 1793, la terreur s'amplifie, et le pouvoir de
Robespierre avec elle. Mais les Montagnards finissent par lasser leur base populaire et la réaction de
juillet 1794 (le mois de Thermidor selon le calendrier révolutionnaire) provoque la chute de
Robespierre et de la Terreur. Les modérés reprennent le pouvoir, effacent la législation issue de la
Terreur et ancrent la révolution libérale. Une dernière tentative des sans culottes de s'attaquer à la
Convention échoue en 1795 (prairial et germinal) : le mouvement sans culotte est écrasé et une
nouvelle constitution, de 1795 est élaborée et votée.
Un bilan ?
La Révolution en débat
Un débat naît quant à l'interprétation même de la Révolution. Alors que les Libéraux veulent arrêter
le temps en 1789, les Républicains font des efforts pour réhabiliter la République de 1792-1794 et sa
connaissance. Les libéraux considèrent que 1793 (« le règne de la multitude ») est une erreur de
parcours due aux circonstances exceptionnelles. Les Républicains, pour beaucoup héritiers du
ja o i is e, o sid e t au o t ai e ue est l a outisse e t de la ‘ olutio pa l a e e t de
l galit ui a o plit le o t at so ial. La monarchie de juillet est une étape importante de la
diffusio du sou e i olutio ai e. D a ie s o e tio els gi ides e ie e t d e il et les
pu li atio s s a l e t. Co ptes- e dus des s a es des asse l es et des lu s da s l Histoire
parlementaire de la Révolution Française publiée par Buchez et Roux. Cabet, dans son Histoire
populaire de la Révolution publie des articles de Robespierre et de Marat. Louis Blanc et Michelet
so te t leu s s th ses su la ‘ olutio , ais le plus g a d su s est l Histoire des Girondins de
Lamartine. Il y réhabilite la Convention.
17
La Révolution française s'achève sur un régime autoritaire, l'Empire, un régime qui veut, déjà,
réconcilier les élites des "deux France" via la création d'une noblesse impériale, et créer même une
élite nouvelle, autour de la Légion d'honneur. Si Napoléon se présente, jusque dans ses mémoires,
comme un continuateur de la révolution (libérateur des nations) et comme celui qui en a préservé les
acquis, celle-ci reste néanmoins, dans l'esprit des militants républicains, comme un souvenir
nostalgique. En outre, la question de la mémoire révolutionnaire se pose déjà : es-ton un partisan de
1789 ou de 1793, la république doit elle être sociale, populaire, modérée ? La fin de l'Empire et
l'avènement d'une Restauration (du pouvoir monarchique, avec le retour sur le trône d'un Bourbon,
frère cadet de Louis XVI, Louis XVIII) pourrait être considéré comme la fin de l'idée républicaine et
révolutionnaire... Certes, il existe des vestiges : ainsi, le 4 juin 1815 Louis XVIII proclame une charte
o stitutio elle à d faut d u e o stitutio ( ui s appa e te ait t op à la olutio ). Le vote
subsiste, mais tronqué : avec ce nouveau régime est promulguée une loi électorale : il faut
dorénavant être âgé de 40 ans pour être éligible et payer un cens de 1000 francs... En 1815, les
français, las des guerres mené par Napoléon et obligés de se soumettre à la Sainte-Alliance,
acceptent la Restauration ; ils ne sont pas hostiles à un retour de la monarchie. Par ailleurs, le retour
des Bou o s au pou oi se le p o ett e u etou à la o ale. D ailleu s sous le g e de Louis
XVIII la France se reconstruira économiquement et saura faire cohabiter plutôt pacifiquement les
libéraux et les ultras. Cependant, les F a çais o t i t g e u a ait de plus a st ait la olutio : le
statut de ito e , les li e t s, l galit o e des aleu s fo da e tales à o se e .
Le siècle des Lumières et la Révolution ont été les instigateurs des interrogations politiques
et de la fo atio de l opi io pu li ue, ais est tout au lo g du XIX e si le ue se o st uit la
pensée politique française. Celle-ci se républicanise, se libéralise et se modernise, parallèlement aux
évolutions économiques et culturelles. Mais de 1815 à 1830, le processus électoral se durcit et les
ito e s e peu e t plus tol e la pe te de leu s a uis olutio ai es. To ue ille pe sait u u e
fois ue l o a ait do le d oit de ote à uel ues u s il fallait toujours finir par le donner à tous
et Hegel situait à la victoire de Napoléon à Iéna le moment de la victoire des idéaux révolutionnaires,
il y ressentait « l’u ive salisatio i i e te d’u État ui alise ait les p i ipes de la li e t et de
l’ galité » malgré la non-a olitio de l es la age, l e lusio de la fe e da s le p o essus le to al
du fait d u e t op g a de se si ilit et de tous eu ui, t op pau es pou pa e le e s, taie t
ito e s ue da s l id e. Le gi e de Louis XVIII tait assez libéral mais après 1824 le pouvoir est
aux mains des ultras menés par Charles X et il devient de plus en plus réactionnaire et autoritaire. En
18
1830 les libéraux, se sentant rejetés de la « sphère du pouvoir » encouragent les parisiens à se
soulever, à se révolter. La révolution reprend...
La révolution de 1830 en France s'inscrit dans un mouvement plus large et européen. Elle manifeste
une résurgence de l'esprit de 1789 et du parti républicain. A l'issue de l'Empire et de l'abdication de
Napoléon Ier (1814), la monarchie avait été restaurée avec Louis XVIII, frère de Louis XVI. Les
premières fo es de la ‘estau atio s e e e t da s plusieu s do ai es, politi ue, du atif,
militaire, judiciaire et préservent certains acquis de la période précédente (par exemple, on ne parle
pas de constitution mais une charte est donnée par le roi ) cela alg l oppositio des ult as
(ultraroyalistes, partisans d'une restauration entière de l'Ancien régime) jus u e , Louis XVIII
leu a o da t epe da t u e tai o es de s oles d apeau la … . À pa ti de ette date,
parvenus au pouvoir les ultras ont réformé le pays dans un sens réactionnaire. Bientôt gouvernés par
un roi selon leur goût (Charles X, dernier frère de Louis XVI), le parti ultraroyaliste prône une
politique de plus en plus autoritaire... et se heurte aux Libéraux, qui progressent à l'Assemblée
depuis 1827. Ainsi, en aout 1829, au lendemain d'une élection parlementaire qui ne donne pas la
majorité conservatrice attendue par le roi, ce dernier confie à un ultra convaincu, Jules de Polignac,
la tâche de constituer un gouvernement. C'est une tension politique qui se superpose à une
succession de mauvaises récoltes et donc fragilise le régime. Mais Charles X n'entend pas céder au
libéralisme et menace de régner par ordonnances lors d'un discours de rentrée parlementaire, en
mars 1830. Cela provoque une motion de défiance – l'adresse des 221 députés. Le conflit est patent
et le roi dissout la Chambre en mai.... Mais aux élections de juin-juillet , l oppositio libérale
passe de 221 à 274 sièges. Pour s'imposer, Polignac et Charles X signent donc les quatre ordonnances
(26 juillet) : dissolution de la nouvelle chambre, modification du régime de la presse et du régime
électoral... ce qui entraîne une réaction de la presse libérale, qui proteste par des articles à paraître
le lendemain. Et lorsque le gouvernement tente de faire saisir les journaux libéraux, le 27, les
premières émeutes éclatent entre la police et les ouvriers imprimeurs. Le milieu des artisans et
ouvriers parisien se mobilise. Bientôt, les républicains se rassemblent et préparent les premières
barricades.
semble proche de tomber : le 29, Charles X accepte le retrait des ordonnances ainsi que la formation
d'une ministère plus libéral... mais il est trop tard et les républicains sont déjà maîtres de Paris. une
commission municipale est installée à l'Hôtel de ville pour administrer provisoirement la situation.
Le 30 juillet, alors que la partie est gagnée par les insurgés, les Orléanistes - partisans de Louis
Philippe duc d'Orléans, cousin du roi et chef du parti libéral - s o ga ise t pou ite u e
république. Le pivot est le marquis de Lafayette, l'ancien "héros des deux mondes", et libéral
convaincu. Les o it s pu li ai s l o t o hef de la Ga de Natio ale (la milice bourgeoise,
organisée par arrondissement et en bataillons, dissoute depuis 1827 pour cause de libéralisme trop
affiché) qui est rétablie. Aussi est-il l ho e lef. Et alo s u il tait o sid o e pu li ai il
se a ge de i e la solutio o l a iste, soute ue pa la p esse d oppositio Le Glo e et le Natio al .
Au matin du 30 on trouve des affiches placardées un peu partout dans Paris, rédigées par deux
journalistes libéraux, Thiers et Mignet : « La ‘ pu li ue ous e pose ait à d aff euses di isio s ; elle
ous ouille ait a e l Eu ope ». Les Chambres (députés et pairs) se rallient à la solution incarnée
par Louis Philippe et une monarchie libérale et votent une résolution dans ce sens, à proposer à
l'intéressé... Louis Philippe est donc proposé le 30 juillet comme Lieutenant-Général du royaume. Et
pou oupe l he e sous le pied des ‘ pu li ai s tout a t s ite : le 31, Louis Philippe publie un
texte où il annonce son accord. Les républicains, furieux, tentent de proclamer un gouvernement
provisoire... mais ils sont pris de court par Louis Philippe, qui, escorté par la Fayette, vient à l'Hôtel de
ville. L'accolade de La Fayette, sur le balcon de l'hôtel de ille, o fi e la a œu e. La olutio
républicaine a échoué...
Les journées de Juillet, bientôt appelées les Trois glorieuses, ont donc vu les élites libérales s'appuyer
sur les révolutionnaires républicains pour conquérir le pouvoir en renversant la Restauration. Louis
Philipe, nommé lieutenant général du royaume, s'empare de la couronne dès le 9 août, après un vote
des députés libéraux, qui révise la charte constitutionnelle et proclame le duc d'Orléans roi "des
Français". La Monarchie de Juillet débute avec Louis Philippe 1er : elle voit un gouvernement où
figure un républicain (Dupo t de l Eu e à la justi e pour calmer les Républicains). L a i e au pou oi
s a o pag e de gages s oli ues do s au li au et au pu li ai s : le retour du drapeau
t i olo e et de Lafa ette pa la e o asio , l pu atio de l ad i ist atio , le laï isatio du
Pa th o ui tait ede e u u e Eglise sous la ‘estau atio . D aut es esu es de e t pe se o t
adoptées au cours des années 1830 : l i augu atio de l a de T io phe e juillet , la atio
au hâteau de Ve sailles d u us e de la ‘ olutio e jui , l e tio de la olo e de juillet
sur la place de la Bastille, en juillet 1840, la réforme du code pénal pour épurer le système carcéral
des suppli es h it s de l A ie ‘ gi e... des mesures symboliques qui montrent qu'une révolution
20
peut être confisquée. En effet, la bourgeoisie libérale, alliée aux monarchistes modérés, s'est
imposée.
ère
L oppositio pu li ai e à ette a œu e est t s i e da s la moitié des années 1830 et de
nombreuses insurrections prennent un caractère républicain (comme la révolte lyonnaise des Canuts
en 1834). Le terrorisme vise particulièrement le roi, considéré comme illégitime, et la presse
républicaine s'amuse du roi "bourgeois". Le régime prend peur et accroît la répression contre les
Républicains, leur interdisant jusqu'à l'appellation de "républicains" : ils deviennent à partir de 1835
les Radicaux, et se renforcent.
Problématique : comment la société industrielle moderne émerge t'elle des transformations induites
par le progrès technique ? Et comment dans cette société naît une "question sociale" qui va inspirer
de nouveau la révolution politique ?
La révolution industrielle se distingue des formes de production artisanale urbaine ou rurale qui la
précèdent, et de la phase (surtout française) de proto-i dust ialisatio il s agit d u e phase
da oisse e t de la p odu tio i dust ielle, ais ato is e illie s de petits atelie s, e hâss s
en milieu rural, sous mécanisée, de faible productivité).
3
Qui alise auta t de de telle e i u u e ou i e e ois…
4
Ta leau de l’ tat ph si ue et o al des ouv ie s e plo s da s les a ufa tu es de oto , de lai e et de soie.
5
Qu’est e ue la p op i t ?
6
Voyage en Icarie.
23
7
Ainsi, Liverpool connaît une expansion importante au XVIIIe et surtout XIXe, de 4000 hts en 1700 à 223 000 en
… et d s , u e e u te le ue plus de pe so es i e t da s des a es, u e o d e
A glete e pou la p iode, et l i di e d u e situation déjà inquiétante.
8
E F a e, ap s , le lo us e p ot ge plus l i dust ie f a çaise, tou h e de plei fouet pa la
concurrence anglaise : les prix industriels baissent, entraînant la baisse des salaires dans les professions
mécanisées, alo s e u o e egist e u e hausse des p i ag i oles : en période de crise, le prix du pain
aug e te pa fois de % o le pai ep se te / des d pe ses… -1840 : le oût de la ie s l e de
% . E fi , la jou e de t a ail s allo ge, e aiso d e ige es de e ta ilit ais aussi g â e au
d eloppe e t de l lai age au gaz. Ne pa lo s pas des i galit s se uelles les fe es tou he t ¼ puis /
du salaire masculin à partir 1825) ni du travail des enfants, réglementé seulement à partir de 1841. En outre,
pas de défense possible : la liberté du travail est un dogme, défendu par la loi Le Chapelier (qui interdit les
coalitions ouvrières).
9
E Alle ag e, l i dust ie d olle ap s et l U io doua i e ou ie s e P usse e s , 900
da s tte l Alle ag e. La P usse s atta ue au t a ail des e fa ts d s
24
Né dans une famille prussienne libérale, Karl Marx a fait des études secondaires au lycée de
Trêves (1830- ,e , il pa t pou l u i e sit de Be li où il e ta e des tudes de
philosophie il suit les ou s de l h g lie E. Ga s , de d oit et d histoi e. E , il
commence sa thèse de docto at de philosophie u il soutie t e , su Différence de la
philosophie de la nature chez Démocrite et Epicure, premier pas vers le matérialisme.
Opposa t politi ue de F d i Guillau e IV, o seule e t il o tie t pas la hai e de
philosophie de Bo u il es o ptait ais e o to e , il doit e uitte la P usse,
a e Je o Westphale , jeu e fe e de l a isto atie p ussie e, u il ie t d pouse .
Il pa t pou Pa is d a o d puis B u elles puis l A glete e où il de eu e.
Après la crise économique très grave de 1846-1848, il se demande pourquoi la société bourgeoise
se raffermit économiquement,. politiquement et i telle tuelle e t plutôt ue de s effo d e .
Ma o pt a e les o eptio s id alistes de l Histoi e h g lie e e pa ti ulier), le moteur de
l histoi e est i Dieu o eptio h tie e de l histoi e , i l i di idu isol philosophie des
Lu i es ais les appo t de p odu tio et les o flits e t e les lasses so iales u il p oduise t.
Marx distingue plusieurs modes de production (=façon de produire): mode de production
communautaire, despotisme asiatique, esclavagisme, féodalisme, capitalisme - le 19ème siècle
serait donc le stade capitaliste - et da s l a e i , le o u is e. Dans chaque mode de
production, on peut distinguer le travailleur, les moyens de production (= instrument du travail:
te e, outils, a hi es , l o jet du t a ail ati e p e i e et e fi le p op i tai e des o e s de
production. La société est issue du mode de production. En effet, le mode de production engendre
des groupes sociaux antagonistes, ceux qui possèdent les moyens de production et ceux qui ne les
possèdent pas : au e, l a tago is e est t s t a h , il e iste aies lasses, p ol ta iat et
bourgeoisie toutes deux issues du développement des forces productives. Cet ensemble
strictement économique et matériel (l'infrastructure) affecte tous les aspects de la vie en société:
le droit, le politique et le social. La classe dominante cherche à dominer le pouvoir politique (=Etat
de classe) pour mieux asseoir son pouvoir économique. Ses valeurs deviennent la pensée
do i a te, pa la p esse, l ole... elle i pose sa o ale, sa eligio . Les id es, la atio
intellectuelle se transforment avec la production matérielle. « les idées dominantes d u e po ue
o t ja ais t ue les id es de la lasse do i a te » (Marx, Manifeste du Parti
Communiste).Mais pour Marx, les modes de production évoluent, produisent des effets sociaux qui
engendrent leur mise en question.
Dans chaque mode de production on trouve deux éléments constitutifs: les « forces productives »
(moyens de production et force de travail) et « les rapports de production » (les rapports sociaux
ui s ta lisse t e t e les ho es au ou s du p o essus p odu tif). Les révolutions bourgeoises
de la fin du XVIIIème siècle seraient dues, dans la théorie marxiste, aux contradictions entre le
développement des forces productives capitalistes et les anciens rapports de production féodaux.
Le o flit a lieu ue lo s ue les o t adi tio s sont à leur point extrême : il entraîne une
révolution qui fait "avancer" la société. Au moment de la révolution française, la bourgeoisie a
26
selon Marx joué un rôle révolutionnaire en bouleversant tous les rapports sociaux. Elle a en
particulier simplifié les luttes : le système féodal impliquait des relations sociales complexes où
se t e laie t des lie s d ho e à ho e, de p ote tio , d ho eu he ale es ue, l e se le
immergé dans la religion. La bourgeoisie établit des relations sans équivoques puisque dorénavant
le seul lie e t e les deu lasses p ol ta iat o t e ou geoisie est l a ge t. Les o t adi tio s
sociales , du fait du système de production capitaliste, e pou a t ue s agg a e et étant
facilement perçues, la révolution devient i lu ta le pa l agg a atio des te sio s et la ise e
place de conditions matérielles permettant de les résoudre. On trouve donc le mouvement
diale ti ue de l Histoi e.
En replaçant Marx dans le temps de la production de ses idées, on peut prendre la mesure de son
caractère novateur et de ses analyses profondément nouvelles par rapport au libéralisme de son
temps: sa vision de l'Histoire, rythmée par la révolution et la lutte entre classes, transforme les
conceptions de la Révolution. C'est toutefois, au milieu du XIXe sicèle, un théoricien encore peu
connu en France, bien que le Manifeste du Parti communiste (1848) y ait été diffusé. Il a peu
d i flue e fa e à P oudho ui jus u au a es est do i a t f. la p e i e Asso iatio
Internationale du Travail (AIT) de 1864 où les trois fondateurs sont Marx, Proudhon et Bakounine).
C est e suite Ma ui l e po te su tous les pe seu s et th o i ie s so ialistes ou o u istes.
Qu est-ce que « la Révolution de 1848 » ? La question peut sembler naïve mais pose un problème de
périodisation : On sait quand elle commence (24 février, insurrection populaire et abdication du roi,
puis proclamatio de la ‘ pu li ue ais il faut d te i e ua d elle s a te : A la fin de
l i su e tio , ua d la ‘ pu li ue est p o la e ? Quand la Constituante est élue, réunie ? Quand
le gouvernement provisoire quitte ses fonctions ? Quand la République réprime les républicains ?
27
Quand la Constitution est adoptée ? Partons d'un principe : il faut comprendre « la Révolution de
1848 » o e alla t du f ie au o e e , de l a di atio du oi Louis-Philippe à la
promulgation de la Constitution de la Seconde République. Il s'agit d'un moment de vide juridique,
de la hute de l o d e l gal la o a hie de juillet à l a e e t de la ou elle l galit . On peut se
demander si la formule de Tocqueville - « Le socialisme restera le caractère essentiel de la
Révolution de 1848 » - est valable et si l'on est effectivement face à une révolution socialiste.
Pou uoi, alo s u e jui les ou ie s so t pi s, et ue d ou he su et la
victoire du pa ti de l O d e, puis su et le “e o d E pi e, pou uoi To ue ille peut-il affirmer
cela ? (Le p o l e, est qu'en 1848 le « socialisme » e d sig e uu e uleuse ague et
imprécise, même si Marx et Engels ont publié quelques semaines auparavant leur Manifeste).
A - Les origines multiples de la Révolution de 1848 : « des causes générales fécondées par des
accidents » (Tocqueville)
Suivant Tocqueville, les raisons profondes de la Révolution de 1848 sont à chercher dans la nature de
la crise ui se oue la F a e d a a t . e e se u gi e, il faut do s i t esse à elui-ci
: La Mo a hie de Juillet est u e o a hie o stitutio elle issue d u e i su e tio populai e les
Trois Glorieuses des 27, 28 et 29 juillet 1830). Or, ce régime souffre de deux faiblesses
fondamentales liées : l a se e de l giti it (Il sulte u i ue e t des ha iles a œu es de
journalistes et du hoi d u e pa tie des d put s, eff a s à la pe spe ti e d u e “e o de
République) et l'absence de soutien solide, de stabilité, de traditions : pas de justification divine, pas
de justification populaire ! Ce qui fait que le régime porte en lui les germes de sa contestation :
comme elle est issue de la Révolution de 1830, une révolution populaire dans le prolongement de
, la Mo a hie de Juillet est o t ai te de apte l h itage olutio ai e. Concrètement, cela
se traduit par le drapeau tricolore, la révision de la Charte, et l'amélioration des moyens de voter. Or,
malgré ces réformes, seulement 250 000 électeurs en 1848 (2,7 % de citoyens actifs, contre 60 %
en 1791).... Le gi e e et à l ho eu des p i ipes de … ais il les li ite et s ou e do à
une contestation démocratique. Cette o testatio est d auta t plus fo te ue la p ati ue politique
est de plus en plus conservatrice. “uite à l atte tat a u de Fies hi, les lois de septe e
remettent en cause les libertés (ex. : interdiction de se proclamer républicain). En conséquence de
ces éléments, on assiste à un essor du républicanisme et le parti républicain constitue alors un
réseau informel à la veille de 1848... un réseau prêt à se soulever. se ait alo s issu de l he de
, et e se ait u u ussi ? Précisons que la crise, le malaise social sont pluriels (ex. :
différence villes/campagnes)... Mais la aie ou eaut est alg tout l e ge e de la uestio
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ouvrière, aux origines du socialisme10. Preuve que cette question ouvrière est de plus en plus perçue,
le très libéral et très peu révolutionnaire Tocqueville affirme devant la Chambre, le 27 janvier
1848 u ois a a t F ie … : « Rega dez e ui se passe au sei des lasses ouv i es … . Ne
voyez-vous pas que leurs passions, de politiques, sont devenues sociales ? u’il se dit e leu sei ue
la division des ie s … est i juste, ue la p op i t epose su des ases ui e so t pas uita les
… et e pe sez-vous pas que lorsque de telles opinions descendent profondément dans les masses,
elles amènent tôt ou tard les révolutions les plus redoutables ? ». Or, malgré la situation ouvrière bien
connue, et malgré ces avertissements, on déplore une quasi absence de législation sociale (la seule
loi sociale est la loi sur le travail des enfants de 1841 ). Aussi le socialisme se développe, comme
réponse, et des émeutes naissent : 1831, à Lyon (les canuts, ouvriers tisserands, se rendent maîtres
de la ville et revendiquent la baisse du temps de travail); 1834, à Paris et à Lyon (soulèvements et
revendications sociales).
De fait, la misère ou i e s agg a e (chômage, prix du pain en hausse et baisse des salaires) de
même que la misère rurale. La question sociale touche les villes comme les campagnes ! Enfin, la
classe moyenne, émergeante, n'est pas satisfaite ets e sent exclue du vote (censitaire : fondé sur
l'impôt).
B - La révolution inattendue
10
, illio s d ou ie s, do t , illio da s des a ufa tu es; T a ail des fe es et des e fa ts (en 1847,
254 000 femmes et 130 000 enfants dans les fabriques de plus de 10 ouvriers); Conditions de vie misérables :
pauvreté permanente, logements insalubres, journées de travail de 12 à 15 heures par jour
29
situation semble être gagnée. Des cortèges sillonnent alors Paris dans la soirée du 23 pour fêter –
mais là un incident entraîne des morts du côté des Parisiens. La situation se radicalise
instantanément et une vraie révolution éclate. Les o ats s a h e t d a o d pa l a di atio du
roi Louis- Philippe en faveur du jeune comte de Paris. Puis sous une pression très large des insurgés
qui pénètrent au Palais – Bourbon le successeur de Louis- Philippe abdique aussi et a lieu un
changement de régime pour une République.
De cette crise émerge non pas 1 mais 2 gouvernements provisoires et tous deux
représentent des milieux politiques et idéologiques différents. Le journal National créa une liste des
i ist es su la uelle se et ou aie t ajo itai e e t des ho es asso i s à l esp it d u
républicanisme modéré (Lamartine, Ledru – Rollin), cependant le journal La Reforme, de convictions
beaucoup plus radicales, veut un gouvernement avec les représentants des socialistes (Louis Blanc,
Al e t . Les deu g oupe e ts se ette t d a o d su les o i atio s et le gou e e e t
provisoire est définitivement mis en place le 24 février dans la soirée. Mais les forces qui y sont
ep se t es o t pas de poids uili . La ajo it est d te ue pa les républicains non –
socialistes dont les plus influents sont les modérés Lamartine et Ledru - Rollin. Les socialistes, qui
jouisse t d u la ge appui populai e, de leu ôt o tie e t seule e t deu postes ui e plus e
so t pas dot s de po tefeuilles i ist iels. Il s agit de Louis Bla , th o i ie so ialiste ui d s lo s
essaiera de donner vie à e tai es de ses id es, et d Al e t, ep se ta t t s a tif des so i t s
secrètes socialistes. Ils o t oi leu s ôles a gi alis s à l i t ieu du gou e e e t. N a oi s
leu p se e au gou e e e t este u p de t e soi a est pou la première fois dans
l histoi e de F a e u u so ialiste est asso i aussi lai e e t au gi e. Mais eu ui d sig e t
la lig e politi ue de l po ue so t ie les od s a e La a ti e e t te, ui s assu e de ga de
le régime dans un flou (notamment en préservant le drapeau tricolore seulement orné d'une rosette
rouge pour évoquer le socialisme). Il ne laisse pas le pays tomber dans un socialisme, ni non plus
da s u o se atis e u il juge tous deu uisi les. Ce i au oi s jus u au le tio s d a il quand
le peuple tranchera la nature finale du régime.
A ces mesures politiques s'ajoutent des mesures sociales : le "droit au travail" est accordé le
26 février. La lutte contre le chômage passe par la création des ateliers nationaux qui, contrairement
aux attentes des socialistes (un atelier "social"), vont finalement consister à rassembler les chômeurs
da s des atelie s où, pou u salai e dio e, ils se aie t i it s à e pli des tâ hes d utilit
secondaire. Malheureusement ils se transforment très vite en ateliers de charité en raison de faute
de travail. Le projet d'un ministère du travail, porté par les ministres socialistes, est par contre écarté.
Une commission étant jugée comme moins « dangereuse », la Commission du gouvernement pour
les travailleurs siégeant au Luxembourg est créée à la place. La commission devient vite un vrai
fo u pou les ou ie s L u des p e ie s a tes ju idi ues ta lis pa la Commission est la loi sur le
temps du travail. Dès lors les ouvriers de Paris peuvent consacrer au travail en maximum 10 heures
et ceux de province 11 heures.
Dans le contexte ambigu de début 1848, où le gouvernement est partagé entre libéraux et
socialistes, les élections seront décisives, or Paris est partagé... Ce sera donc à la province de trancher
pour ou contre la Révolution sociale. Mais à l heu e où u F a çais su deu est illett , o p esse t
ue le ote d u e ajo it i ulte guid pa les ota les e se a pas so ialiste. D où la olonté des
socialistes de repousser les élections prévues le 9 avril, pour que la province ait le temps de
comprendre les enjeux... en vain : les élections se tiennent le 23 avril, et leurs résultats marquent
bien le début de la fin de la Révolution sociale. Les républicains modérés l'emportent sur les
républicains avancés, et les monarchistes reviennent en force : 500 républicains, 300 monarchistes et
60 socialistes... un lourd échec pour les socialistes.
La première étape est la fin du gouvernement provisoire : la République naît dans la légalité, à
l Asse l e et o da s la ue. Elle ne sera pas rouge et sociale, mais tricolore et modérée. Cette
Asse l e s effo e alo s d a te les adi au et les so ialistes du pou oi , puis, seconde étape, a
lieu la journée du 15 mai (invasion de l'assemblée par des militants socialistes, puis une partie des
a ifesta ts se e d à l Hôtel de Ville et o stitue u gou e e e t i su e tio el o pos de
socialistes : Al e t, Louis Bla o t e so g , Le ou , ‘aspail… La garde nationale intervient et
arrête les meneurs. Le mouvement socialiste est décapité. Troisième étape : le décret du 21 juin qui
oblige les chômeurs de oi s de a s à s e gage da s l a e et i ite les aut es à pa ti e
province. Ce décret entraîne les journées de Juin, qui voient, à partir du 23 juin, le Paris ouvrier,
s i su ge o t e la a tio du gou e e e t . La e o u te du e du au jui , et s a h e
avec un bilan extrêmement lourd : plusieurs milliers de morts chez les insurgés, 11 000 arrestations,
4 000 déportations en Algérie. Pour Marx et Engels, 1848 et Juin marquent Les Luttes de classes en
31
France. Les socialistes sont balayés, la li e t d e p ession est limitée; Les avancées sociales sont
remises en cause : le 3 juillet, dissolution des Ateliers nationaux, l'absence du "droit au travail" dans
la Constitution du 21 novembre, le 9 septembre, loi rétablissant la journée de travail à 12 heures...
La Révolution de 1848 est donc une insurrection populaire parisienne, majoritairement ouvrière, qui
la e u e ou e tu e d o ati ue et u e i te e tio de l Etat da s le do ai e so ial afi de
soulage la is e ou i e. Cette ‘ olutio est d a o d soute ue pa la ajeu e pa tie du pa s, e
raison de la crise économique u il su it et du alaise so ial ui le t a e se. La ‘ olutio po te au
pouvoir des républicains majoritairement modérés qui, conscients du caractère social de la
‘ olutio , s effo e t de p e d e des esu es so iales au uelles ils e oie t pas tous. Mais, en
, la F a e est e o e t s ajo itai e e t u ale, est à di e atta h e à la p op i t et à
l o d e, et e o de u al est e g a de pa tie guid pa les ota les lo au , sou e t ou geois ou
nobles très modérés. Face au désordre ouvrier (qui agite aussi certaines villes de provinces), la masse
rurale confie le pouvoir aux conservateurs. Si 1848 est un échec, il constitue néanmoins un
événement structurant du mouvement socialiste, qui entretient une mémoire commune et participe
à la constitutio d u esp it de lasse. O , est et esp it de lasse ui pe ett a pa la suite la
aissa e d u el ou e e t ou ie . est do u u e tape e s la ode it politi ue.
Comme le dit Victor Hugo, à propos des républicains : « Les souvenirs sont nos forces. Quand la nuit
essaie de revenir, il faut allumer les grandes dates, comme on allume les flambeaux".
Pour cette partie, nous allons partir de l'exemple allemand. Issu du latin moderne romanticu (récits
écrits en langue vernaculaire/ latin), le mot anglais romantic définit dès la seconde moitié du XVIIe
si le, u ge e litt ai e ui pa le de l i agi atio . Le se s du ot olue au XIXe si le, il s atta he
à un moment de l'histoire historico-culturel du début de la période. Le romantisme peut se définir
pa appo t au Classi is e et au o e t des Lu i es e s opposa t. Le romantisme est apparu
plus précocement dans les pays Nordiques en réaction aux modèles classiques de pays tels la France
et l Italie. La Grande Bretagne et le monde germanique constituent les deux premiers foyers
romantiques. En Allemagne (l'Allemagne en tant qu'Etat n'existera pas avant 1870 : il s'agit de la
Confédération du Rhin, née au lendemain du Congrès de Vienne - 1815), il exalte la germanité et joue
32
Le nationalisme allemand est alors vigoureu , s a eu a t à deu sou es : une tradition libérale et
une tradition conservatrice "romantique". La première conception revendique l'abolition des
privilèges, la représentation et l'éducation des masses. Le tout dans une perspective d'Etat-nation,
où le sentiment national, de nature politique, fonde la communauté. Dans la seconde conception, la
nation trouve son origine dans une culture ancestrale, une langue et un sang originel commun. La
"germanité" revendiquée ici fonde la "nation de culture". Ces idées se répandent par le biais des
associations (cercles de gymnastiques, de tir, fraternités étudiantes...) et il existe de ce point de vue
une véritable culture associative, autour du cercle et des groupements professionnels. Cela n'est pas
sans inquiéter les souverains les plus conservateurs, qui interviennent. Cela conduit les nationalistes
allemand à idéaliser le Reich médiéval du temps de Frédéric II et donc du kaiser... Paradoxe de ce
mouvement qui est donc à la fois un mouvement libérateur, héritier des lumières, et qui demeure
conservateur, voire réactionnaire.
Dans les divers Etats germaniques, la situation est tendue. La révolution de Vienne, le 13 mars 1848,
fait la preuve de la fragilité des institutions de la Confédération germanique. le chancelier Metternich
est hass du pou oi . A Mu i h, le oi de Ba i e doit a di ue au p ofit d u aut e e e de la
famille des Wittelsbach. Dès les premières semaines, à la suite des insurrections, de nouveaux
gouvernements sont formés, comprenant des éléments libéraux. A Berlin, à partir du 18 mars, des
a i ades se d esse t jus u au a o ds du palais o al ; mais la crise est évitée par les concessions
de Frédéric-Guillaume IV aux revendications de la bourgeoisie libérale : il parcourt symboliquement
les ues de Be li ei t d u e ha pe ouge, oi e et o , et fo e u gou e e e t, e a o ça t
l le tio d u La dtag au suff age u i e sel, da s u e d la atio ad ess e « à son peuple et à la
nation allemande ». Un ministère libéral est ensuite formé.
En outre, les libéraux et radicaux obtiennent la réunion d'une chambre nationale. Le pré-parlement
(vorparlament) de Francfort siège entre fin mars et début avril 1848 et prétend représenter - assez
mal car non élu - la diversité allemande et doit préparer l'élection d'une chambre nationale
représentative. Les ‘h a s do i e t, et la ajo it des e es e isage t pas de e e se
les régimes existants. Ce pré-Pa le e t d te le suff age u i e sel as uli , ais s e e et au
différents Etats pour organiser les élections à venir. Les élections se tiennent à la mi-avril, dans un
contexte de troubles au pays de Bade. 812 députés sont élus, qui représentent plus les intérêts de
o ps i te diai es o e l Eglise ou les u i e sit s ue des pa tis définis. Une fois de plus, la
majorité de cette Assemblée (qui siège dans la cathédrale de Francfort) est très modérée. Mais la
plupa t des lus s a o de su u e tai o e d o je tifs : u i les peuples de l Alle ag e da s u
seul Empire, reposant sur le principe de la souveraineté populaire ; asso ie les Etats pou fai e d u e
Co f d atio d Etats u Etat f d al. Mais le Pa le e t a pas de moyens financier et militaire
autres que ceux des différents Etats, dont les souverains sont libres tenir compte de ses délibérations
ou pas.
évoquée. La rivalité entre Prusse et Autriche (affaiblie à cette époque) ne tarde pas à réapparaître
de i e le eau o d u it , ta dis ue se o stituent des fractions.
Quoique beaucoup des états conservent des constitutions « octroyées », la réaction autocratique
pousse à l e il o e de d o ates et de adi au , o e Ma ou E gels. . pe so es
quittent la Confédération germanique pour les Etats-Unis entre 1851 et 1855).
NB le cas italien
Problématique : en parallèle aux idées politiques, la science accomplit elle aussi ses révolutions au
XIXe siècle, se heurtant à une conception jusque là dominante du monde, la conception religieuse.
Comment s'organise cette révolution ?.
11
La synthèse newtonienne : Les Principia de Ne to do e t du o de la isio d u e ha o ie
mathématique parfaite, censée – da s l esp it de l auteu - renforcer la foi dans un créateur, souverainement
atio el, de l u i e s. Mais Ne to , pas plus ue ses dis iples, a eptaie t les dog es et leu o eptio
de Dieu les porte plus vers la théologie naturelle plutôt que vers la révélation. Cette tendance va jouer un rôle
clef dans le développement du déisme.
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L u e des po ses de l Eglise a gli a e à ette ise de la eligio atu elle fut de p ô e u e
dévotion plus intense et une lecture approfondie de la bible, valorisant le rapport émotionnel à la
religion, faute de pouvoir élaborer un système théologique cohérent. Le fondamentalisme
a g li ue e est la o s ue e. L aut e po se eligieuse possi le doit t e e he h e da s le
ou e e t d O fo d : selon ce ou a t, les it s s ie tifi ues so t d u aut e o d e ue elles de
la religion et les premières ne confortent nullement les secondes. Certes, les deux mouvements
a g lis e et O fo d s oppose t, ais ils ette t tous deu l a e t su u e eligio révélée, en
réaction à la religion naturelle du XVIIIe.
12
Mais Erasmus Darwin maintenait, dans sa Zoonomia, l id e d u ateu .
13
pour les créationnistes, qui prennent la genèse au pied de la lettre, Eve est une créature « dérivée » d Ada
14
le transformisme peut se résumer à deux lois : « la fonctio l o ga e » et l h dit des a a t es
acquis. Lamarck, transformiste, doit être considéré comme un précurseur de Darwin, et ne doit pas lui être
oppos s st ati ue e t. Les deu d eloppe t u e th o ie de l olutio .
15
« J’ai lo gue e t eg ett de ’ t e aplati deva t l’opi io pu li ue et de ’ t e se vi du te e i li ue de
création ; e fait, je voulais pa le d’u e appa itio due à u p o essus totale e t i o u ». (Lettre à J.
Hooker, 1863).
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ses recherches en 1837, élabore divers manuscrits à partir de 1842, publie en 1859 et la théorie se
modifie avec les rééditions successives.
Les découvertes géologiques de la première moitié du XIXe avaient ébranlé un certain nombre de
aleu s eligieuses o sid es aupa a a t o e des a ti les de foi. L Eglise a ait alo s o d à la
s ie e l histoi e de la Te e… Mais les d ou e tes de la s ie e g ologi ue laissaient de côté
l histoi e des t es i a ts. La g ologie a ait e is e uestio l âge de la te e, ais a ait pas
auto it pou d te i e l âge de l appa itio de l ho e. Ai si, fa e à u te ps g ologi ue
immense et scientifique se dressait un temps de l ho e ef, où pou aie t s e e e les p i ipes
fondamentau de la eligio … E e se s, le da i is e ui fute l id e de atio de l ho e et
des êtres vivants est perçu par la religion comme un empiétement. Face au darwinisme, la religion
naturelle recule peu à peu : la paléontologie vient renforcer le darwinisme avec la découverte de
fossiles humains, lesquels posent des problèmes insolubles au antidarwinistes (on considère alors
l ho e de Nea de tal o e u monstre, une anomalie ou un être pri de o s ie e… . Il tait
e fait plus ais de disso ie pa tielle e t les do ai es eligieu et s ie tifi ue, l u ta t de l o d e
de la latio , l aut e du do ai e de la atu e. Le o p o is est possi le et d elopp pa Da i
lui-même : l olutio ph si ue de l ho e est u e hose, la ie i suffl e à la atu e pa le
ateu e ue Da i o de da s so li e de eu e u e it eligieuse. Ai si, l olutio
se ait guid e pa u e ai di i e… Le catholicisme anglais se montre au début intransigeant,
opposant science naturelle et religion sans compromis possible. le cardinal Manning considère ainsi
le darwinisme comme une philosophie « animale ». La réaction anglicane, qui avait hérité de
l a g lis e u e tai a ti-intellectualisme, est encore plus virulente : la remise en cause du texte
biblique est sacrilège, donc condamnable.
au pouvoir en 1879. On accusera par la suite Camille Sée de vouloir donner aux filles une éducation
« toute darwinienne et scientifique ».
Cuvier (1769-1832) tente de concilier les faits (les fossiles, les espèces disparues) et le dogme16 : dans
son Discours préliminaire aux recherches sur les éléments fossiles (1812), il intègre les fossiles au
atio is e et e pli ue les dispa itio s d esp es pa l h poth se atast ophiste… ais u p se
pose au paléontologue : o e t e pli ue alo s l o igi e des esp es actuelles ou disparues ? Si
des atast ophes u i e selles o e le d luge o t aus la dest u tio d esp es, il faut postule à
des atio s su essi es… Cu ie d eloppe alo s l id e de atast ophes pa tielles, ui laisse t u e
faune appauvrie après chaque révolution. On a pu parler à son égard de « système biblique ». Son
empire sur les sciences biologiques est immense. Jusque dans les années 1880, le fixisme de Cuvier
domine en France. Il est finalement remis en question par le transformisme. Dans le même temps, le
moine Gregor Mendel (1824-1882) découvre les lois de la génétique (1865, mais découvert en 1900
seule e t …
On pourrait lier contexte politique et débat scientifique : la p iode de la ‘estau atio , a e l allia e
du t ô e et de l autel, oit ita le e t l allia e de la s ie e, du pou oi et de la eligio : Cuvier
16
Concordisme : te da e d esp it ui o siste vouloir faire coïncider les Ecritures et la théorie (ex
concordisme géologique : rechercher les périodisations géologiques à partir des jours de la création).
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et le fixisme triomphent. Le transformisme connaît une embellie sous les périodes libérales (1830)
avant son grand triomphe en 1880 (retour de la République). A partir de là, les naturalistes français
sont majoritairement lamarckistes, et refusent généralement de reconnaître le rôle essentiel de la
s le tio atu elle ie la th o ie da i iste da s l o igi e des esp es.
Science vs religion...
Dans les années 1880, les théories de Darwin, une fois réinterprétée par les Eglises, sont toutefois
bien implantées dans la société, faisant partie du bagage culturel courant. Mais les Eglises ne surent
p ofite de es o p o is, d auta t plus ue le o p o is a iait a e les di e s ou a ts eligieu …
On a pu faire comparaison entre Galilée et Darwin : l u p o la ait ue la Te e tait pas au e t e
de l u i e s, l aut e affi ait ue l ho e tait pas le e t e d u e uel o ue atio . Bie tôt,
Freud démontre que l'homme - avec son inconscient, ne dispose pas du libre-arbitre. Puis Einstein
remet en question, avec la théorie de la relativité, la physique newtonienne en démontrant que les
règles physiques ne s'appliquent pas partout pareillement. La vision de l'univers formulée par la
religion vacille...
Dès le début du XIXe siècle, on peut parler d'une contamination de l'esprit révolutionnaire français
en Russie : en décembre 1825, une première manifestation contre le despotisme russe s'organise
autour de la révolte des décabristes (jeunes officiers russes en occupation à Paris lors des guerres
napoléoniennes et qui y ont découvert les idéaux de la révolution). Leur leader Pestel est le premier
révolutionnaire russe : il plaide pour un renversement du tsarisme et son remplacement par un
régime républicain et socialiste fondé sur la solidarité des membres de la commune paysanne. Sa
méthode : l li i atio de la fa ille i p iale. L i su e tio est u he . Mais le ou e e t
révolutionnaire russe naît de ce premier pas, d'autant plus important que le constat d'une société
injuste est fait au plus haut niveau. En 1861 en effet, le tsar Alexandre II engage une série de
fo es do t l a olitio du se age est la plus d isi e. N a oi s, al e es les se fs so t
libérés mais sans les moyens de subsister...), mal appliquées ces réformes ont surtout contribué à
alimenter le mouvement révolutionnaire. Ce mouvement est schématiquement constitué de trois
tendances : les anarchistes, les nihilistes et les populistes. Le tournant du règne se situe en 1866 avec
la p e i e te tati e d assassi at du tsar qui le pousse à abandonner les réformes et à renforcer
l appa eil p essif. Pou le ou e e t olutio ai e, est l he des ou e e ts tudia ts de
41
Mais comment déclencher la révolution ? c'est la question qui obsède les partisans révolutionnaires
russes. Certains voient dans le terrorisme un premier pas, l'étincelle qui déclenchera un mouvement
populaire. : à cet égard, la postérité d'un Netchaïev est intéressante.
En mars 1869, Netchaïev arrive à Genève dans le but de préparer la olutio . C est la g a de
rencontre avec le père de l'anarchisme, Bakounine et cette relation intense aboutit à la rédaction du
Catéchisme révolutionnaire (document joint). Pour comprendre, le mythe Netchaïev, il faut imaginer
un Bakounine âgé (55 ans , ui it da s l e il depuis lo gte ps, d çu pa l a se e d a a e
significative dans le mouvement révolutionnaire russe depuis 1861 et qui voit arriver ce jeune
homme de 21 ans qui se dit envoyé par une puissante société secrète : Bakounine dans les discours
e alt s u il tie t su lui e fait de lui u h os, u « personnage révolutionnaire » : Les témoignages
attestent que Netchaïev est en fait un cas pathologique, profondément mythomane, fanatique
calculateur et froid et suscitant fascination et séduction. Le résultat de leur collaboration est le
Cat his e, i p i e ode, e a a t es lati s, sous fo e d u petit fas i ule ue Netchaïev
rapporte à Moscou à son retour en Russie. Le document a été rendu public la première fois lors du
procès des disciples de Netchaïev (1871) car il a été découvert par la police tsariste au lendemain de
l'affaire Netchaïev. Il a provoqué stupeur et curiosité notamment en raison de la forme littéraire
nette et péremptoire des idées. La nouveauté historique du document réside dans cette volonté
d alle jus u au out, da s l e t is e du discours et sa radicalité brutale.
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L'affaire Netchaïev est sordide plus que révolutionnaire : de retour à Moscou à l'automne 1869; il
constitue un groupe révolutionnaire clandestin. Mais l tudia t I a o , e e du g oupe, p e d
conscience du bluff et des mensonges de Netchaïev (qui se présente comme l'émissaire de
Bakounine et d'un hypothétique comité révolutionnaire européen) et veut se retirer. Netchaïev le
dénonce alors à ses camarades comme un mouchard de la police, qui doit être puni par la mort. Le
groupe organise donc un guet-apens dans lequel tombe Ivanov en novembre 1869 : il est assassiné.
Mais, l e u te de la poli e a outit à l a estatio du g oupe la desti d e e 869)... a
l'exception de Netchaïev, en fuite. De Juillet à août 1871 : le procès du groupe de Netchaïev est un
procès très médiatisé où est rendu public le Catéchisme. Il compte 87 inculpés dont 4 avaient assisté
ou pa ti ip au eu t e d I a o . Netchaiev est quant à lui arrêté à Zurich en août 1872 et il est
remis aux autorités russes en octobre 1872. Le 20 janvier 1873 : il est poursuivi pour crime de droit
commun. Le procès est mouvementé car l'accusé crie, parle, vitupère. Il est par deux fois expulsé de
l audie e. Il est condamné à 20 ans de travaux forcés et à la déportation à vie en Sibérie.... mais
finalement enfermé à vie dans la forteresse Pierre et Paul. Il y meurt en novembre 1882.
Le Catéchisme révolutionnaire
passion - La révolution.
2. Au fond de lui-même, non seulement en paroles mais en pratique, il a rompu tout lien avec l'ordre public et avec le
monde civilisé, avec toute loi, toute convention et condition acceptée, ainsi qu'avec toute moralité. En ce qui concerne ce
monde civilisé, il en est un ennemi implacable, et s'il continue à y vivre, c n'est qu'afin de le détruire plus complètement.
3. Le révolutionnaire méprise tout doctrinarisme, il a renoncé à la science pacifique qu'il abandonne aux générations
futures. Il ne connaît qu'une science - celle de la destruction. C'est dans ce but et dans ce but seulement qu'il étudie la
mécanique, la physique, peut-être la médecine, c'est dans ce but qu'il étudie jour et nuit la science vivante des hommes, des
caractères, des situations, et de toutes les modalités de l'ordre social tel qu'il existe dans les différentes classes de
l'humanité. Quant à son but, il n'en a qu'un : la destruction la plus rapide et la plus sûre de cet ordre abject.
4. Il méprise l'opinion publique. Il méprise et hait dans tous ses motifs et toutes ses manifestations la moralité sociale
actuelle. A ses yeux il n'y a de moral que ce qui contribue au triomphe de la Révolution ; tout ce qui l'empêche est immoral.
5. Le révolutionnaire est un homme condamné d'avance. Implacable envers l'État et envers tout ce qui représente la
société, il ne doit s'attendre à aucune pitié de la part de cette société. Entre elle et lui c'est la guerre incessante sans
réconciliation possible, une guerre ouverte ou secrète, mais à mort. Il doit chaque jour être prêt à mourir. Il doit s'habituer à
supporter les tortures.
6. Sévère envers lui-même, il doit l'être envers les autres. Tout sentiment tendre et amollissant de parenté, d'amitié,
d'amour, de gratitude et même d'honneur doit être étouffé en lui par l'unique et froide passion révolutionnaire. Il n'existe
pour lui qu'une seule volupté, une seule consolation, récompense ou satisfaction - le succès de la révolution. Jour et nuit, il
ne doit avoir qu'une pensée, qu'un but - la destruction la plus implacable. Travaillant froidement et sans répit à ce but, il
doit être prêt à périr lui-même, et à faire périr de sa main tout ce qui empêche cet accomplissement.
7. Le caractère du véritable révolutionnaire exclut tout romantisme, toute sensibilité, tout enthousiasme ou élan. Il exclut
même la haine et la vengeance personnelles. La passion révolutionnaire étant devenue sa seconde nature, doit s'appuyer
sur le calcul le plus froid. Partout et toujours, il doit incarner non pas ce à quoi le poussent ses entraînements personnels,
mais ce que lui prescrit l'intérêt de la révolution.
catégorie. Enfin, les femmes qui sont entièrement des nôtres, c'est à dire pleinement initiées et ayant accepté l'ensemble de
notre programme. Celles-ci sont nos camarades, et nous devons les envisager comme notre plus précieux trésor, car nous
ne saurions nous en passer.
ATTITUDE DE LA CONFRÉRIE ENVERS LE PEUPLE
22. La Confrérie n'a pas d'autre but que l'entière libération et le bonheur du peuple - c'est-à-dire des travailleurs. Mais
convaincue que cette libération et ce bonheur ne sont possibles qu'au moyen d'une révolution populaire qui balayerait tout
sur son passage, la Confrérie contribuera de toutes ses forces et de toutes ses ressources au développement et à l'extension
des souffrances qui épuiseront la patience du peuple et le pousseront à un soulèvement général.
23. La Confrérie n'entend pas sous "révolution populaire" un mouvement réglé selon les idées de l'Occident, et qui
s'arrêterait respectueusement devant la propriété et les traditions de l'ordre social, et devant ce qu'on appelle la civilisation
et la moralité. Ce genre de mouvement s'est borné jusqu'ici à renverser une forme politique, afin de la remplacer par une
autre et de créer l'État dit révolutionnaire. Seule peut être salutaire au peuple une révolution qui détruira jusqu'aux racines
de l'État, et supprimera toutes les traditions, les classes et l'ordre même existant en Russie.
24. Aussi, la Confrérie n'a nulle intention d'imposer au peuple une organisation venant d'en haut. La future organisation
sera sans aucun doute élaborée par le mouvement et la vie populaire elle-même - mais c'est là l'affaire des générations
futures. Notre oeuvre à nous est une destruction terrible, entière, générale et implacable.
25. Aussi, en cherchant un rapprochement avec le peuple, nous devons tout d'abord nous joindre aux éléments populaires
qui, depuis la fondation de l'État moscovite, n'ont pas cessé de protester non seulement en paroles, mais en actes, contre
tout ce qui est lié directement et indirectement au pouvoir : la noblesse, les fonctionnaires, les corporations, le commerçant
exploiteur. Joignons-nous aux brigands hardis, qui sont les seuls véritables révolutionnaires de la Russie.
26. Fondre ces bandes en une force invincible qui détruira tout sur son passage - telle sera l'oeuvre de notre organisation,
de notre conspiration, tel sera notre but.
Néanmoins, Netchaïev, et d'autres, voient dans le terrorisme une méthode propre à déclencher la
révolution, en assassinat le tsar. La période du terrorisme organisé débute et culmine avec la mort du
tsar Alexandre II en 1881. Mais, cet assassinat ne provoque pas la révolution populaire espéré et
l o ga isatio olutio ai e ui l'a p o o u , la Narodnaia Volia, disparaît dans la violence de la
répression policière. Il s'agit alors de penser une autre voie pour la révolution : ce sera la stratégie
pensée tant par Lénine dans un essai célèbre, Que faire ?, publié en 1902, que par Trotski peu de
temps après, dans un article publié en 1911 dans la revue autrichienne Kampf, une stratégie fondée
sur la construction d'un parti révolutionnaire...
A la veille de la révolution de 1917, la Russie est une puissance qui semble incontestable... vue
d'ailleurs. Une puissance avant tout militaire, aux structures politiques peu représentatives (la
Douma, assemblée créée lors de la révolution de 1905, ne dispose que d u pou oi li it
d e egist e e t des lois du tsa . Mais ette puissa e a t a l e u e p e i e fois lo s de la
guerre russo-japonaise (1905) : la défaite russe a précipité la première tentative de révolution (1905).
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Il est vrai que le pouvoir tsariste et la société traditionnelle sont contestés depuis le milieu du XIXe
siècle, et l'assassinat du tsar Alexandre II par des terroristes appartenant à la mouvance socialiste-
révolutionnaire fut un premier signe d'un malaise russe. Le XXe siècle a vu cette contestation se
développer.
Pou uoi u e telle o testatio ? Ce pa s de illio s d ha ita ts, esse tielle e t ag i ole,
se le pa ti uli e e t o se ateu oi e a i . L i dust ialisatio est e o e da s ses d uts,
s appu a t su les i estissements extérieurs : des difficultés subsistent, comme le manque de
personnels qualifiés et la faiblesse du tissu industriel. Ces faiblesses sont manifestes durant les
premières années de la Grande Guerre : d s , il appa aît ue l ad i ist atio tsa iste est
d pass e pa la situatio , i apa le de g e effi a e e t l effo t de gue e, ta dis ue les
problèmes de ravitaillement, de transports et de commandement se posent. Aussi les critiques se
multiplient, tant à la Douma que dans la population et dans l a e. Si les villes sont plus sensibles à
la propagande tsariste, dans les campagnes, la population est amère et résignée. Le souvenir de la
défaite de 1905 contre le Japon fait considérer cette guerre comme une sorte de passe-temps de la
haute société, entraînant des révoltes de conscrits et de paysans (dans 49 des 101 provinces russes
selo la poli e , apide e t pi es. Et si da s u p e ie te ps, l a e usse e po te
quelques victoires, très vite, elle se trouve confrontée à des difficultés financière et matérielle
importante, alors même que, militairement, la situation est critique. Dans ce contexte, le moral est
a l et des g es late t, tou ha t plus d u illio de pe so es e , ui o t e
s a plifia t jus u e f ie .
La révolution de février 1917 résulte d eutes o t e les p u ies… C'est la réaction maladroite des
autorités à l'une de ces émeutes, du 23 février 1917, qui lance la machine révolutionnaire. L'armée,
envoyée pour mater l'émeute, fraternise avec les émeutiers : après 5 journées de crise, le
gouvernement et le haut commandement, dépassés, pressent le tsar d'abdiquer... or l a di atio de
Nicolas II su p e d l e se le des a teu s. Aussi le pou oi apparaît-il divisé au lendemain, partagé
e t e le “o iet o seil fo d ou ie s et de soldats et la Dou a où u gou e e e t p o isoi e
s'est formé autour des sociaux démocrates). Le programme de ce nouveau gouvernement est
simple : ai te i l effo t de guerre et préparer les lendemains de paix en réunissant une assemblée
o stitua te. Mais peu à peu, da s l effe es e e olutio ai e, le gou e e e t p o isoi e oit
la situation lui échapper, tandis que les socialistes de diverses tendances (sociaux révolutionnaires,
mencheviks) y font leur entrée. A la fin de l'été, c'est un menchevik (socialiste modéré), Kerenski, qui
prend la tête du gouvernement. Mais cela ne suffit pas, et on oppose le gouvernement aux soviets,
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réputés plus proches du peuple... En effet, dans les campagnes, des comités (soviets) se mettent en
place pour préparer le contrôle et le partage des terres. Da s l i dust ie, les ou ie s s o ga ise t e
comités, porteurs de revendications (journée de huit heures, hausse des salaires, surveillance),
comités qui se heurtent toutefois à un patronat industriel hostile, prêt à fermer les usines. Dans
la e, le pa ifis e gag e la t oupe ta dis ue le gou e e e t p o isoi e pe siste da s la gue e
aux côtés des alliés. Des gardes rouges s'organisent pour défendre la révolution : le discours de lutte
des classes domine. La tension sociale et politique est extrême, et les libéraux comment à appeler à
une dictature, face aux soviets. Face à toutes ces revendications, la politique du gouvernement
provisoire déçoit, et favorise la propagande de groupes radicaux comme les bolcheviques. Ainsi, dans
ses th ses d’Av il, L i e peut la e le ot d o d e « tout le pouvoir aux soviets ».
L u des premiers gestes politiques du gouvernement des Soviets est le décret sur la paix (du 26
octobre) : la paix de Brest Litovsk, le 3 mars 1918, met fin à la guerre côté russe, au prix
d i po ta tes pertes territoriales et économiques. Dans la foulée est adopté un décret sur la terre
abolissant la propriété foncière (et entraînant un partage contrôlé par des comités paysans), un
d et su les atio alit s pou le d oit à l autod te i atio et e fi un décret amenant la
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ogestio da s les usi es. Pa ailleu s, l o o ie e t e sous le o t ôle de l Etat, via le Conseil
sup e de l o o ie atio ale, ta dis ue les a ues so t atio alis es. La bolchevisation
s'effectue également au i eau de l Etat : le Conseil des commissaires du peuple, exclusivement
peupl de ol he i ues, est fo d ta dis ue l Asse l e o stitua te, lue e d e e et
dominée par les socialistes révolutionnaires, est dissoute dès janvier 1918 par les bolcheviques,
Dans ce contexte difficile, la guerre civile va en partie forger les instruments du pouvoir : la police
politique (tcheka), crée en décembre 1917 par Felix Dzerjinski pour devenir le « bras armé du
prolétariat ». U e te eu ouge s a at su le pa s, te eu illégale qui vise les exclus du nouveau
gi e eligieu , o les et ou geois… ai si ue les ad e sai es politi ues et fait pese su la
population une chape de plomb, grâce à des effectifs en augmentation (de 40 à 280 000 agents entre
1917 et 1921). Instrument de cette terreur politique, le goulag, organisé à partir de 1919 sur le
od le des a ps de t a ail tsa iste. Puis l a e ouge confiée à Trotski, commissaire à la guerre.
T otski o ga ise u e a ede i o 000 h., pour lutter contre les armées blanches (tsaristes).
E d pit d u e te eu ouge ie elle, la i toi e appa te ait au Bol he iks au d ut ,a e
des pe tes ui a oisi e t le illio d i di idus. enfin, lors du VIIIe congrès de mars 1918, le parti
bolchevique devient le parti communiste : parti hégémonique à qui la constitution de juillet 1918
att i ue la di e tio de l appa eil d Etat ... alors même que son implantation dans la société demeure
faible (à la mort de Lénine, en 1924, il compte 440.000 membres ! ).
La construction de cet Etat qui se veut révolutionnaire, débouche sur un Etat totalitaire animé d'un
discours universalisant : en mars 1919, Lénine invite 39 partis socialistes à envoyer des délégués à
Mos ou, afi de fo de la IIIe i te atio ale, l i te atio ale communiste, ou Komintern, censée
coordonner les efforts des partis communistes nationaux et préparer la révolution mondiale.
La révolution russe marque l'histoire du XXe siècle, comme la révolution française avait inauguré
l'histoire du XIXe siècle, pesant sur les autres Etats et sur les idéologies, de même que l'Europe
inquiète met en place, contre le danger révolutionnaire, une alliance en 1815 lors du Congrès de
Vienne. Au lendemain de la révolution bolchévique, le spectre révolutionnaire semble se dresser
partout, notamment en Allemagne et en Italie... Et émergent, à la fois en écho et en réponse, des
mouvements nationalistes qui reprennent les dynamiques et les modèles de l'Etat révolutionnaire
pour les adapter à leur propre idéologie. Le totalitarisme, un Etat qui se pense en révolution
permanente, se met en place.
La définition du totalitarisme fait débat : de H. Arendt à R. Aron, on peut s'accorder sur quelques
critères (parti unique et de masse, primat de l'idéologie sur l'économie, politique de
terreur/terroriste articulée autour de camps, contrôle des moyens de communication, de
l'économie)... Le terme est créé dans les premiers temps du fascisme, par un socialiste, Giovanni
Amendola, pour désigner un système électoral où le parti fasciste présente les seules listes pour
élections municipales. Donc système électoral assurant victoire totale / totalitaire. Ce terme
rencontre un certain succès à gauche et dans la presse d'opposition au fascisme. Par défi, il est utilisé
par Mussolini au temps de l'affaire Matteotti, en 1925, lorsqu'il évoque son "inflexible volonté
totalitai e". Il se a pa la suite i lus da s la d fi itio du fas is e do pa l id ologue offi iel du
gi e, Ge tile, pou l e lop die Treccani. Parallèlement, le terme apparaît et se répand en
Allemagne : on parle tout d'abord d'une "guerre totale" (Jünger) pour désigner la Grande Guerre...
mais très vite, il investit le domaine politique et Goebbels, l'idéologue du régime nazi, l'utilise en
1933 pour parler d'un État totalitaire. Après la seconde guerre mondiale, le terme va connaître une
éclipse dans le langage politique, car connoté et trop flou... Il revient toutefois dans l'actualité - et
notamment dans le débat historique - à la suite du rapport Khrouchtchev, du coup de Prague, puis,
en 1974, de la publication de l'Archipel du Goulag (Soljenitsyne). Se pose en effet le cas de l'Union
soviétique, régime totalitaire.
La proclamation de la république populaire chinoise, le 1er octobre 1949, conclut une guerre civile,
épisodique, menée par les communistes contre le Guomindang depuis la fondation du parti
communiste chinois, en 1921. Elle met surtout en lumière, après sa victoire, un parti aux idées
hétérodoxes : e effet, so leade , Mao )edo g s est affi o e le th o i ie du Pa ti
o u iste hi ois, p ô a t d s la essai e adaptatio de l e p ie e a iste à la alit
chinoise (Analyse des classes de la société chinoise , pou a outi , e , à l id e ue le pote tiel
révolutionnaire de la paysannerie chinoise est plus important que celui des ouvriers (0,5 % pop). Ce
o stat est d jà, e te e do t i al, olutio ai e... A e o stat euf d u e « révolution
paysanne », il joint une réflexion stratégique originale autour du thème de la guerre révolutionnaire,
une réflexion qu'il met à exécution entre 1927 et 1934 (formation armée rouge chinoise et naissance
de l ph e pu li ue so i ti ue du Jia g i . C est à ette période que Mao théorise la guerre
révolutionnaire – une guérilla qui doit déboucher sur une guerre civile et qui, se répandant dans les
a pag es, doit a outi à l e e le e t des illes, œu de la do i atio ou geoise.
La lutte contre Tchang-Kaï Chek, la longue marche (1934/6) puis la guerre sino-japonaise vont encore
e fo e le pou oi de Mao, jus u à la p ise du pou oi fi ale selon la stratégie définie par Mao
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Zedong. Le nouveau régime dans un premier temps s'allie à l U‘““ pa u t ait du février 1950
négocié directement par Mao Zedong,. Le tête-à-tête sino-so i ti ue s i pose, et le od le
soviétique est appliqué au parti communiste chinois (à quelques originalités près, comme le titre de
« président du parti » accordé à Mao Zedong, voire la composition même du parti et une doctrine qui
fait la pa t elle au o de pa sa … . Toutefois, la rupture sino-soviétique est également le reflet de
divergences idéologiques sur la révolution et sa continuation...
La révolution n'est pas une spécificité du monde occidental : dès le XIXe siècle, Ottomans, Egyptiens,
Tunisiens se soulèvent à diverses reprises pour revendiquer un régime constitutionnel, selon un
schéma qui trouve des échos dans les révolutions de 2011.
Dans ce climat de tension, un courant " jeune turc " (en opposition aux " vieux turcs" conservateurs)
se forme en 1889, qui demande le rétablissement de la représentation nationale. Sur le modèle des
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Toutefois, les recettes du CUP pour améliorer la situation (en copiant les modèles occidentaux) se
heurtent au conservatisme politique : les conservateurs islamistes (partisan du pouvoir absolu
politico-religieux du Sultan) s'opposent aux réformistes et finissent par les écarter. Aussi les Jeunes
Turcs finissent par passer à l'action de manière militaire : le 24 avril 1909, une "Armée du
mouvement" fait marche contre Istanbul et dépose le sultan Abdülhamid II, le remplaçant par son
frère Mehmed V, bientôt marginalisé par le gouvernement CUP composé de trois pachas (chefs
militaires) : Talaat, Enver et Djemal. Les jeunes turcs lancent alors un important mouvement de
réformes tous azimuts, dans la société, l'économie, l'éducation... Mais le mouvement est très
instable et divisé entre libéraux, partisans d'un empire multiculturel et multiethnique moderne, et
unionistes, portés par le nationalisme turc. Surtout, les projets de ce triumvirat se heurtent à une
menace grandissante de guerre. L'empire ottoman, proche de l'Allemagne, bascule finalement dans
la Grande Guerre en 1914, et le génocide qui frappe la communauté arménienne à partir de 1915 est
aussi le reflet de ce nationalisme chauffé à blanc par la guerre.
Dans les années 60/70, l'Iran du Shah Mohammed Reza est une puissance qui se veut moderne, alliée
aux USA et intégrée à la guerre froide. 50 000 conseillers américains y travaillent, et le pays est
notamment un gros client des industries d'armement américaines. Mais il est fragilisé par la rente
pétrolière et par ses conséquences sociales (inégalités, exode rural, inflation, etc.). Les écarts de
richesse entre une bourgeoisie occidentalisée et des classes pauvres font le lit des idéologies prônant
la révolution, le communisme ou le nationalisme. Le caractère dictatorial du régime, appuyé sur une
police politique, la Savak, connue pour ses arrestations arbitraires et la torture, renforce l'opposition.
Dans les années 60, le clergé n'intervient pas beaucoup dans la vie publique, si ce n'est pour critiquer
le droit de vote aux femmes : les ayatollah eux mêmes sont divisés quant à la politique. Mais une
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tendance islamique et révolutionnaire, propre à séduire une jeunesse sensible aux idéaux de la
gauche, se développe, notamment sous la plume d'Ali Shariati, dont les livres sont autorisés depuis
1977.
Cette opposition s'organise autour de l'ayatollah Khomeiny, exilé en Irak en 1965, puis expulsé en
France en 1978. Sa doctrine est précisée en 1971 dans une série de conférences publiées dans
lesquelles il défend le gouvernement islamique et le pouvoir aux clercs, détenteurs de la
souveraineté. Cette conception est révolutionnaire et s'oppose au quiétisme traditionnel... mais elle
séduit nombre d'Iraniens, tant par ses aspects égalitaires que nationalistes.
En novembre 1977, une série de grèves de plus en plus fortes annoncent la révolution à venir : ces
grèves tournent en manifestation l'année suivante, demandant le rétablissement de la constitution
de 1906, ainsi que l'abdication du Shah. L'Etat réagit en imposant la loi martiale, mais les
manifestants répondent en utilisant les rituels chiites de deuil pour scander leurs slogans... dans ce
contexte, le cancer du Shah l'affaiblit : en janvier 1979, il confie l'Iran à un gouvernement civil de
front national, dirigé par Chapour Bakhtiar, et quitte l'Iran. Il meurt en exil en Egypte l'année
suivante.
Le 1er février 1979, l'ayatollah Khomeiny débarque finalement à Téhéran dans une atmosphère
révolutionnaire : la révolution se revendique comme tiers mondiste, anti-impérialiste, anti-
américaine. Le 4 novembre 1979, la prise d'otage menée par "des étudiants proches de l'imam"
contre l'ambassade américaine, prise d'otage qui va durer plus d'un an, manifeste cette tendance
révolutionnaire. La nouvelle république islamique se dote d'une constitution largement approuvée
par référendum le 12 décembre 1979 : elle est à la fois démocratique sur le modèle de la constitution
de la Ve république française (prévoyant des assemblées, des élections au suffrage universel, etc.) et
islamique, puisque la légitimité n'appartient qu'à Dieu et, par extension, aux clercs. Toutefois, les
courants "de gauche" de la révolution, notamment des groupes comme les moudjahidin du peuple,
ou encore le parti Toudeh, sont progressivement éliminés pour ne laisser que le courant islamique au
pouvoir. Un nouvel ordre social se met en place, avec des lois religieuses (interdiction de l'alcool,
port du voile, etc.). L'économie est largement nationalisée et réorganisée sous forme de fondations,
comme la Fondation des déshérités et invalides - particulièrement importante au lendemain de la
guerre Iran-Irak et devenue une immense entreprise. Cette politique, ainsi que la guerre, a provoqué
une forte inflation et l'exil des classes moyennes.
Le bilan de cette révolution est intéressant : la république islamique reste, sur certains points (le
nationalisme, l'opposition à la minorité sunnite ou aux mouvements régionalistes comme els kurdes)
dans la lignée du régime précédent. Mais il fait aussi la démonstration d'une révolution islamiste qui
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fonctionne : on peut parler d'un "effet de souffle" (G. Kepel) qui alimente l'islamisme. Par ailleurs,
l'Iran a également commencé à jouer le rôle d'une puissance régionale, exportant sa doctrine dans
un "arc chiite" partant de la Syrie voisine pour toucher la communauté palestinienne (et le Hamas,
pourtant sunnite) ainsi que le Liban (avec la formation du Hezbollah). En fin, si le régime a recueilli les
fruits du mouvements de modernisation enclenché par le Shah (notamment dans l'éducation), il a su
le faire fructifier.
En 2011 éclate, loin des partis et des appareils politiques, un ensemble de mouvements
révolutionnaires portés par "la société d'en bas", les mouvements de jeunesse, d'ouvriers, etc. Ces
révolutions singulières, émanant de la population et surfant sur les réseaux sociaux, se déroulent en
Tunisie et en Egypte (où les syndicats, moteurs traditionnels, sont considérés comme liés au pouvoir)
ainsi qu'en Syrie, Lybie, etc.
L'élément déclencheur est la Tunisie du 17 décembre 2010 : le suicide par le feu d'un vendeur à la
sauvette devant la préfecture de Sidi Bouzid, provoque une réaction des foules, que ni le parti
islamiste En-Nahda (le seul véritable parti d'opposition organisé, fondé en 1981 et interdit depuis
1989 et réfugié à Londres), ni le syndicat UGTT (Union générale tunisienne du Travail) n'ont organisé
(et qui s'y rallient tardivement). Rapidement, la pression populaire devient ingérable et le président
tunisien Ben Ali, sur la suggestion de l'armée, prend la fuite le 14 janvier 2011. Cette révolution
trouve immédiatement des échos en Egypte : dans une société apparemment calme, une
contestation s'est organisée autour de la question de la succession de Hosni Moubarak... qui doit
être, après des élections, assurée par son fils Gamal. L'armée elle-même se montre hostile à cette
succession dynastique. Une manifestation s'organise pour le 25 janvier 2011, sur la place Tahrir, au
Caire. L'occupation de la place dure 18 jours, jusqu'à ce que l'armée lâche le président, qui
démissionne le 11 février.
Ces mouvements ont des prémices anciens : révolution tunisienne de 1861/1864 (avec une
constitution), révolution nationaliste égyptienne du colonel Ahmed Urabi (1879/1882), etc. La
révolution existe déjà dans les mémoires nationales. Ils trouvent leur origine dans le constat,
notamment du point de vue de la jeunesse, d'une société bloquée. En Tunisie comme en Egypte,
l'opposition politique traditionnelle - islamiste ou syndicale - est dépassée : ce mouvement trouve
son origine dans un militantisme nouveau, forgé dans les années 90 dans le cadre des associations de
bienfaisance : très surveillées, apolitiques, elles répondent alors aux insuffisances de l'Etat dans
divers domaines (éducation caritatif, etc.). Les acteurs de ces associations, confrontés au problème
(corruption, prévarication, etc.) des différents Etats, se transforment peu à peu en militants, avec un
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discours politique, tel la Ligue tunisienne des droits de l'homme. En effet, les accusations de
corruption liée au régime et d'arbitraire policier se répandent avec des échos dans les médias
(chaînes satellitaires tel la chaîne qatarie Al Jazeera, qui répercute informations et images dans tout
le monde arabe, cinéma contestataire, etc.) : le rôle des médias, et particulièrement des réseaux
sociaux dans la propagation de l'information comme dans la mobilisation est essentiel, y compris en
Tunisie, alors même que le contrôle des médias est beaucoup plus fort (l'un des premiers gestes du
gouvernement provisoire tunisien est la suppression du ministère de l'information). Certes, les
dynamiques sont différentes, même si elles soulignent le contraste ville/campagne. En Tunisie, la
révolution, partie du Sud rural, gagne le Nord et les classes moyennes. En Egypte, l'épicentre de la
révolution est le Caire, puis le mouvement s'étend. Les conditions économiques sont également
proches. Dans l'Egypte d'Hosni Moubarak, un tournant économique libéral, depuis 1991, puis
renouvelé à partir de 2004, a fragilisé le secteur public, touché par de grandes grèves dès 2007. Elles
venaient en écho aux manifestations d'étudiants de 2003, et plus largement d'une jeunesse qui se
sent écartée. Et lorsque le mouvement du 6 avril naît en 2008 dans le milieu ouvrier industriel (dans
la région du delta du Nil, où se trouve de grandes industries), il est rapidement relayé. Il en va de
même en Tunisie, avec les révoltes de 2008 dans le bassin minier de Gafsa, et leur répression, très
brutale, dans un contexte de crise sociale et économique, avec le constat d'une économie confisquée
par le régime.
Ces révolutions sont dans un premier temps observées avec curiosité et sympathie : on parle des
"printemps arabes" en les comparant avec 1848 (révolution venue "d'en bas" pour un changement
politique et social). Mais les lendemains de la révolution ne sont toutefois pas aussi satisfaisants et
posent la question de la transition (que faire après la révolution ?) : un gouvernement provisoire
tunisien est fondé le 16 janvier, mais sa représentativité est contestée, et ce d'autant plus que
d'anciens membres du régime précédent y figurent. La tension persiste dans la rue, en dépit des
efforts du gouvernement provisoire pour favoriser l'apaisement par des mesures symboliques
(amnistie, saisie des avoirs du clan Ben Ali, etc.), tandis que l'armée se pose en garante de la
révolution... De nouvelles émeutes éclatent à diverses reprises, jusqu'aux élections à l'assemblée
constituante, en octobre, dans un climat encore tendu, et d'ailleurs, le syndicat majoritaire (l'UGTT)
est largement représenté dans ces réactions. En Egypte, la situation est différente : le pouvoir revient
à l'armée, qui va le conserver durant un an et demi, en suspendant la constitution ainsi que le
Parlement, pour assurer la transition. Une commission en charge de la réforme de la Constitution est
mise en place, qui rend son rapport, soumis à un referendum le 19 mars. L'armée annonce alors le
transfert des pouvoirs législatifs, puis présidentiels, à l'issue des élections ad-hoc. Si la contestation
politique persiste sur la place Tahrir, elle se déplace peu à peu dans le domaine social et sous la
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forme de grèves. Mais dans le contexte de l'après Moubarak, les tensions communautaires, en germe
dans la période précédente, explosent, les mouvements salafistes organisent des émeutes qui
tournent au pogrom contre la communauté copte (chrétienne)
L'aboutissement des élections surprend les observateurs occidentaux : En Tunisie, c'est le parti
islamiste En-Nahda de Rachid Ghannouchi qui sort vainqueur des élections du 23 octobre 2011, un
parti proche des frères musulmans comme de l'AKP turque. Il en va de même en Egypte avec
l'élection de Mohamed Morsi, un membre de la confrérie des frères musulmans, au pouvoir le 24 juin
2012. Dans les deux cas, le parti islamiste a joué le jeu de la transition et soutenu le processus. Mais
dans le cas égyptien, l'armée reprend la main dans un coup d'état le 3 juillet 2013, dans un contexte
de tension sociale provoqué par la dérive autoritaire du gouvernement Morsi. Quant à la Tunisie, les
lendemains de révolution et l'avènement d'En-Nahda n'ont pas fait disparaître les tensions entre
libéraux et islamistes. Au final, les révolutions débouchent dans ces deux pays sur une
reconfiguration des rapports entre l'Islam politique et la nation, non sans complexités.
Conclusion
Des révolutions du XVIIe siècle à celles du XXIe siècle, on voit que la notion même de révolution est
floue, qu'elle peut se faire sans (trop) de violence, et affecter de manière diverses les sociétés. Du
point de vue historique, on constate qu'il existe, entre les révolutions, des parallélismes et des
éléments communs, ainsi qu'une généalogie. Chaque révolution sert de modèle à la suivante, et se
définit par rapport à elle ou contre elle, tant le principe même de révolution suppose un discours de
la méthode. En outre, la révolution est un phénomène qui peut s'exporter, se théoriser voire devenir
l'élément d'une lecture de l'Histoire, ou bien une stratégie politique en soi. Les révolutions ont de fait
des ambitions amples, à commencer par la volonté de créer une société meilleure, mais entre les
espoirs et la réalité, on voit qu'il existe des abîmes qui engloutissent nombre de révolutionnaires. Le
principe de la terreur employée pour sauver la révolution est récurrent et légitime bien des
dictatures. Ce qui fait que la révolution a aussi une mémoire, qu'il faut interroger, selon le type de
sociétés qu'elle promeut : elle définit des camps, des courants, des partis qui se revendiquent de tel
ou tel aspect. A cet égard, la révolution est également l'une des matrices de l'identité politique au
XIXe puis XXe siècle, une identité qui persiste.