Arbitrage International
Arbitrage International
Arbitrage International
l’arbitrage interne
& international
Droit et pratique de l‘arbitrage
international au Maroc
2015 - 2016
M. S. MOHAMMED TAMOURO
« L’Université Internationale de Rabat n’entend donner aucune approbation aux opinions
émises dans le travail de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à
son auteur ».
© Mohammed TAMOURO
2
Sommaire :
Introduction :
‘Lecture personnelle de l’impact l’affaire Ynna Holding Vs. Fives FCB sur le positionnement
économique Marocain’
3
Introduction :
De nos jours, nous ressentons avec force cette mondialisation féroce qui a bouleversé le cours
du monde, à plusieurs égards, et notamment au niveau de la scène politique, de la sphère économique
& financière et de la norme juridique & judiciaire des pays formant notre globe.
En effet, ce bouleversement a été mené par un certain nombre d’acteurs qui ont joué un rôle très
important pour son renforcement.
A cet effet, nous pouvons citer le rôle combiné des Firmes Multinationales & de leurs produits et
services ainsi que celui des institutions de Bretton Woods (FMI, Banque Mondiale, OMC, OMPI) et
des Chambres de Commerce Internationales qui ont permis à la mondialisation, par leurs modèles &
leurs équipes, de s’imposer petit à petit jusqu’à devenir aujourd’hui un pouvoir de lobbying
souterrain, intangible en matière économique et invisible en matière politique & juridique au niveau
des pays développés & des pays en voie de développement.
Ainsi, la scène politique de ces pays est dorénavant sous les projecteurs du monde qui n’est devenu
qu’un petit village connecté ou rien ne se cache et où tout est de l’ordre du public eu égard aux
nouvelles technologies de l’information et de la communication.
La sphère économique quant à elle, est majoritairement poussée par l’élan de la mondialisation ce qui
alimente l’activité commerciale & financière (spéculation incluse) et malheureusement pousse à
certains excès que le monde essaye, un tant soit peu, à réguler depuis la crise financière de 2007 et ce
à travers des réformes drastiques des systèmes & des sociétés « too big to fall ».
Pour ce qui est de la norme juridique & judiciaire, nous remarquons aussi plusieurs changements à
l’instar de l’introduction de plusieurs modèles par les Nations Unies à travers ses différentes
conférences et Commissions & par les Chambres de Commerce Internationales dont l’exemple ‘des
modes alternatifs de règlements des conflits & des différends (MARL - MARC) ‘ qui marquent
actuellement la vie quotidienne des personnes et de firmes multinationales eu égard à leur utilisation
accrue dans les procédés contractuels et les TBI1 - TMI2 contemporains.
Certes, les systèmes judiciaires nationaux sont outillés, à une échelle inégale, par des textes juridiques
mis en place via le processus d’accumulation des lois & des règlements ainsi que par les modèles
internationaux « CNUCED » et le droit prétorien ainsi que la doctrine qui en découlent mais cela
n’empêche que l’apport des experts & des arbitres est aussi bien important pour la résolution rapide
En définitive, les pays occidentaux & les pays en voie de développement ont largement adhéré à ces
nouveaux procédés depuis la chute du Mur de Berlin, le 09 Novembre 1989, vu l’immense
opportunité que ces derniers comportent en leur sein et ce afin de fluidifier le monde des affaires et
pour assurer une confidentialité longtemps recherchée au niveau de la justice nationale et qui continue
à faire défaut dans la majorité des cas.
Pour notre cas d’espèce à savoir celui du Royaume chérifien, les MARC ou MARL3 sont apparus bien
avant la ratification du traité de New York de 1958 au niveau du code de procédure civile dans sa
version initiale4 ; Ces derniers faisaient partie intégrante de la vie tribale d’antan, avec l’accord d’un
pouvoir central « exsangue », qui n’avait ni les moyens ni la possibilité d’installer des tribunaux dans
tous les coins reculés du Pays. S’en est suivi un long périple jusqu’à l’adoption de la loi 08-055 qui
tient compte, depuis 2007, de la notion d’arbitrage international & d’autres modes en parallèle à ce
dernier à l’instar de la médiation conventionnelle.
Partant, un long chemin a été parcouru depuis cette époque étant donné que nos diverses juridictions,
à travers leurs différents degrés, ont appliqué les dispositions de la convention de New York de 19586,
ainsi que des dispositions du code de procédure civile de 1974 relatives à l’arbitrage, ce qui a permis
d’accumuler une jurisprudence en la matière, plus ou moins intéressante, ce qui nous permet
d’aborder avec une certaine aisance, notre sujet.
Pour ce faire, nous diviserons notre travail en trois parties. Une première partie traitera de la période
d’avant 1974. Une deuxième Partie traitera de la période marquée par les dispositions légales
apportées par le code de procédure civile dans sa version de 1974. Puis une troisième partie traitera
(1958)
7 Cas traités par le CIRDI, SALINI C/ Maroc, RFCC C/ Maroc
8 L’arbitrage commercial au Maroc – Recueil des Arrêts & Jugements, Ed.de l’Imprimerie Spartel (2014)
5
de la période allant de 2007 jusqu’au jour d’aujourd’hui en matière de droit de l’arbitrage
International au Maroc.
Au cours de ces parties, nous expliquerons & nous commenterons certains arrêts de principe du
CIRDI ainsi que ceux des Cours d’appel & de Cassation Marocaines qui nous semblent importants et
ce afin d’étayer la pratique de l’arbitrage International au Maroc, d’un point de vue expérimental.
Plus tard et en guise de conclusion, nous ferons part de notre propre lecture de l’affaire actuelle qui
oppose un des fleurons de l’économie Marocaine à savoir YNNA HOLDING via sa filiale Ynna
Asment au cabinet de consulting FIVES FCB ainsi que sa répercussion sur la justice et l’économie
Marocaine d’un angle externe. Aussi nous ferons un bref commentaire quant à l’affaire qui a opposé
le Royaume du Maroc à la confédération africaine de football et qui a été tranchée par le tribunal
arbitrale de sport de Lausanne.
In fine, et pour conclure cette étude, nous apporterons notre lot de critiques quant à l’arbitrage
International au Maroc en soulignant les faiblesses du processus actuel ainsi que les contraintes
rencontrées par les sociétés & les individus personnes physiques lors du recours à ce mode alternatif
à la justice conventionnelle interne.
Plusieurs questions se profilent à notre esprit à compter de ce moment et auxquelles nous essayerons
de répondre tout au long de cette étude :
6
Pourquoi adopter un texte spécifique à l’arbitrage international en 2007 ? L’euphorie
économique de l’époque en est-elle la raison ?
Quels sont les impacts de l’adoption de cette loi 08-05 ?
Pourquoi y-a-t-il eu création de la cour Marocaine d’arbitrage par la CCI du Maroc ?
Le Maroc a-t-il les ressources nécessaires qualifiées pour accomplir ce travail ?
Quel est l’impact de l’affaire Ynna Holding Vs. Fives FCB ?
Quelles critiques pourraient être apportées à la loi 08-05 ?
Une kyrielle de questions auxquelles nous essayerons de répondre tout au long de cette étude afin
d’éclairer le lecteur sur cet aspect de l’arbitrage international au Maroc.
7
1. Définition & analyse du contexte et des textes juridiques régissant l’arbitrage
international au Maroc au cours de la Période qui précède le code de procédure civile
de 1974 :
Dans le cadre de ce chapitre, nous allons présenter l’évolution historique connue en matière
d’arbitrage international au Maroc et ce à travers une lecture du contexte d’adoption & de
ratification des Conventions qui ont eu un impact considérable sur l’économie & la justice au sein
de notre pays à savoir celle de New York (1958) & celle de Washington(1965). Ensuite, nous
décrirons la procédure connue en la matière, ainsi que la voie jurisprudentielle adoptée par les
magistrats Marocains en cette époque-ci.
Avant d’aller plus dans le détail de notre analyse, nous avons souhaité présenter au lecteur
l’évolution connue par la notion d’arbitrage international au regard de l’accumulation en matière de
lois au niveau de notre pays & au regard du commerce international. Cet exercice nous permettra
aussi de faire davantage la différence quant à la notion d’arbitrage interne.
En effet, l’arbitrage tant interne qu’international découle de plusieurs sources historiques comme il
est venu plus haut dans notre introduction. Ainsi, nous pouvons citer parmi ces sources les plus
importantes à nos yeux à savoir :
- l’arbitrage opéré par les chefs de tribus à travers les décisions prises pour départager les
membres de la tribu en litige qui porte en lui une certaine estime particulière et aussi un respect
de leurs décisions marquant clairement l’usage de l’arbitrage avant l’arrivée même du
protectorat Français en 1912,
- l’arbitrage s’est plus précisément basé sur « la Lex Mercatoria » qui est en quelque sorte un
recueil des ‘us et coutumes commerciales’ longtemps protégés & imposés par les
commerçants du monde.
Nous pouvons déduire de ces deux sources divers enseignements dont le fait que l’arbitrage peut être
interne à un pays et concerner ses citoyens ou ses sociétés et par l’usage de ses lois & règlements ,
comme il peut être international si un certain nombre de facteurs sont rassemblés comme dispose la
loi 08-05 de 2007 dans son Article ‘327-39’.
En définitive, l’arbitrage interne a pour objet de faire trancher un litige interne par un tribunal arbitral
qui reçoit des parties la mission de juger en vertu d’une convention d’arbitrage alors que l’arbitrage
8
est international s’il met en cause des intérêts du commerce international, et dont l’une des parties au
moins à son domicile ou son siège à l’étranger.
Ces règles ont permis de reconnaitre & d’exécuter un nombre très important de sentences arbitrales
relatives au commerce international par le biais des ordonnances d’exequatur de nos diverses
juridictions nationales - de première instance antérieurement puis de commerce plus tard –.
En effet, le Maroc des années soixante est un jeune pays indépendant sortant d’un protectorat Français
impérialiste et encore amputé d’une partie de ses territoires « sous autorité franquiste » n’avait aucun
besoin personnel direct de ratifier cette convention9 si nous nous rapportons au cadre économique de
cette époque vu que la structure économique du pays était largement primaire et peu d’industries
étaient orientées vers l’international.
Ce qui attise davantage notre stupéfaction est le fait que le Maroc de l’époque était dirigé par des
cadres du parti de l’Istiqlal ayant leurs propres idées politiques conservatrices et aussi par un corps
judiciaire ayant sa propre philosophie de la justice nationale (haute position, indéboulonnable). Mais
n’empêche qu’en concomitance, ce même Maroc affichait un libéralisme fort, sous le haut patronage
du sultan Mohamed V et par l’appui du jeune & dynamique Prince Héritier du nom de Hassan ben
Mohamed ben Youssef, laissant ainsi la possibilité aux pays occidentaux d’imposer ce moyen
alternatif de règlement des différends au Royaume.
Cette convention contient somme toute, un nombre de principes et de règles qui sont opposables aux
acteurs internationaux qui font appel à ce type d’arbitrage, de par le choix qu’ils ont fait dans leurs
contrats de recourir à l’arbitrage via l’insertion de clause compromissoire et aussi au regard de la
ratification de leurs pays respectifs de cette convention multilatérale.
9Un instrument à sens unique ou une réciprocité de traitement illusoire pour le Maroc, Abdellah
BOUDAHRAIN, L’Arbitrage commercial interne & international au regard du Maroc, 1999, Ed. Al Madaris
9
c. La convention de Washington de 1965 instituant le CIRDI:
En effet, le but escompté derrière la mise en place de cet organisme fut d’offrir aux Etats & aux
ressortissants d’autres Etats en la qualité d’investisseurs de recourir à ce centre afin d’y régler tous
les types de différends qui peuvent résulter de leur relation contractuelle ou de la relation qui existe
de facto à travers les TBI ou les TMI passés entre l’Etat recevant l’investissement & l’Etat de
l’investisseur.
En effet, le Royaume du Maroc a voulu donné un coup de pouce aux investissements au cours de
cette période marquant le début du règne de SM Hassan II (1960-1999), eu égard à la structure
économique du pays qui était très rudimentaire et qui nécessitait l’apport des investisseurs pour la
création de la valeur ajoutée et d’un nombre d’emplois directs & indirects.
Par ailleurs, la conclusion de quelques TBI notamment avec la France & avec l’Italie a permis
davantage, à plusieurs entreprises, de venir investir dans les projets structurants lancés par le Maroc
dans les années qui allaient suivre.
Heureusement, cette donne nous a permis à nous les juristes d’avoir une base pour nos recherches à
l’instar des cas qui ont été traités par le CIRDI et qui sont entrés dans les annales internationales.
Nous pouvons citer à ce titre le cas de l’affaire Salini c/ Royaume du Maroc12 qui a permis de donner
naissance à un stress test qui est appelé communément « Salini Test » et qui permet de nos jours de
mesurer le degré d’engagement d’un Etat dans un différend relatif à l’investissement et ce à travers
l’engagement de l’Etat dans la gestion des sociétés publiques nationales dans lequel il siège en tant
qu’actionnaire dans la majorité des cas.
10
Convention pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements entre Etats et Ressortissants
d’autres Etats
11 Centre international de règlement des différends relatifs à l’investissement
12 Salini c/ Autoroutes Du Maroc (et le Royaume du Maroc)
10
Aussi, nous avons le cas de RFCC c/ Royaume du Maroc qui se trouve être une affaire concomitante
à la précédente citée mais qui crée un flou & une contradiction quant à ce que souhaite nous faire
part, les arbitres du CIRDI.
La plupart des revues spécialisées en matière d’arbitrage nous ont fait part de leurs commentaires à
travers plusieurs articles qui traitent de ce même flou13 et aussi bien du cycle haussier en termes de
nombre d’affaires traités par le CIRDI, ce qui alimente le débat lié à la notion d’arbitrage
international.
Nous pouvons nous poser plusieurs questions sur l’esprit prétorien de l’époque mais la
question qui nous taraude l’esprit de prime abord est celle de la primauté de la convention de New
York sur la règle interne Marocaine malgré son inexistence au niveau de la loi suprême du pays ?
En effet, cette primauté a été confirmée en filigrane par la jurisprudence 14 de l’époque précédant de
quelques décennies la décision prise par le législateur Marocain de préciser au niveau du préambule
de la constitution de 2011, la primauté des conventions & traités internationaux sur les lois internes
Marocaines lorsqu’elles sont ratifiés.
Ceci marque une réelle ouverture d’esprit de la part des juges de cette époque et nous amène à
confirmer un réel libéralisme en matière juridique malgré son balbutiement sur d’autres points
davantage plus importants.
Par ailleurs, ces conventions sont pour le moins exhaustives et nous permettent de retenir que la
procédure de traitement des différends via l’arbitrage devrait suivre un cheminement bien spécifique
comme décrit par les éléments ci-après :
1. Etablissement du contrat par les parties et insertion d’une clause compromissoire précisant
l’arbitrage dans ses différents recoins à savoir : son mode, la langue des échanges avec le
tribunal arbitral & la langue retenue pour la sentence arbitrale, la loi applicable et le pays de
l’arbitrage et le cas échéant le lieu d’exécution de l’arbitrage,
13W. Ben Hamida, L'arbitrage Etat-investisseur face à un désordre procédural : la concurrence des
procédures et les conflits de juridictions, Annuaire français de droit international, Volume 51, 2005,pp 564-
602
14 La prise en compte de la prescription de la convention de New York concernant la non obligation de la
Il est entendu que lorsque ces documents sont soumis en temps imparti au juge responsable, ce dernier
se doit de contrôler la réunion des conditions légales pour cette espèce :
Il est à rappeler qu’au cours de cette période les juges étaient précurseurs et acceptaient malgré tout
la primauté de la convention de New York de (1958) et celle de Washington (1965) ce qui est bien
12
sur confirmé par la période qui s’en suivra et ce après l’entrée en vigueur du nouveau code de
procédure civile de 1974 malgré l’inexistence explicite en son sein de la notion d’arbitrage
international.
Nous avons présenté au cours de cette partie l’arbitrage international au regard du Maroc pour la
période allant de 1958 à 1974 en mettant l’accent sur les mouvements historiques qui ont permis son
foisonnement et son imposition. Nous avons ensuite, présenté la procédure appliquée en la matière
au niveau du Royaume du Maroc au cours de cette même époque.
Au cours de cette partie, nous allons présenter notre analyse de l’évolution de l’arbitrage
international au Maroc à la lumière de la version de 1974 du code de procédure civil Marocain par
laquelle le législateur a voulu donner une impulsion particulière à ce mode de règlement des
différends. Aussi, les normes de la CNUDCI & l’arbitrage institutionnel sont d’une immense
importance et ne peuvent être gardées sous silence au cours de cette même étude. Par ailleurs, la
mauvaise passe financière connue par le Maroc au cours des années 1980 & 1990 a poussé le FMI
à imposer certaines restructurations qui s’inscrivent dans le sens du développement des MARL.
a. L’esprit du code de procédure civile de 1974 : L’intérêt croissant pour les MARL :
Le code de procédure civile de 1974 a apporté un lot non négligeable de réformes en matière
de modes alternatifs de règlement des différends.
De prime abord, l’harmonisation par le législateur de la loi relative au code de procédure civile avait
pour objectif d’améliorer le vécu et le recours du citoyen & de l’entreprise notamment en ce qui
concerne la notion d’arbitrage interne.
En effet, l’arbitrage a eu au Maroc un cadre plus élaboré tenant compte des évolutions mondiales en
matière d’investissement se résumant en :
Ainsi, le code de procédure civile de 1974 est venu clarifier, d’un point de vue interne, la notion
d’arbitrage au profit du corps Magistral Marocain ce qui a été ressenti dans les différentes
ordonnances de l’époque.
Malheureusement ce même code a gardé sous silence le cadre international de la notion d’arbitrage
dont les magistrats ont tenu compte religieusement, dans le cadre de leurs différentes ordonnances.
13
Ceci marque une réelle stabilité en matière de jurisprudence relative à la reconnaissance & à
l’exécution des sentences arbitrales internationales au niveau du Royaume du Maroc au cours de cette
longue période allant de 1974 à 2007.
Les règlements d’arbitrage instaurés par la CNUDCI en 1985 ont permis la mise en place d’un
socle légal solide au profit de l’arbitrage international au niveau planétaire.
En effet, ces règlements ont fait l’objet d’une loi-type complète sur l’arbitrage commercial
international qui se trouve être, statutairement, acceptable par tous les Etats et convient aux différents
systèmes juridiques et économiques des pays du monde.
Ce qui implique ainsi que les Etats membres de l’Organisation des Nations Unies contribuant de près
ou de loin à la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International, qui n’est autre
que l’organe juridique du système des nations unies dans le droit commercial international, sont face
au défi de mettre en place une législation interne régissant l’arbitrage international en se basant sur la
loi-type proposée par cette même commission.
Aussi cette commission compte un groupe de travail actif spécialisé en Arbitrage & Conciliation qui
anime des séances de travail et établi des rapports afin de faire part aux pays membres des évolutions
en la matière et aussi afin d’effectuer de la recherche dans ce domaine pour solutionner tous les types
de problèmes qui peuvent se poser mondialement.
Le Maroc en tant que pays membre de l’ONU a tenu compte quelques années plus tard des évolutions
qui étaient avancées par la CNUDCI dans la loi type de 1985, notamment au niveau des évolutions
qui ont été portées par les dispositions de la loi 08-05 de 2007.
14
Aussi, des institutions comme l’organisation mondiale du commerce et comme l’organisation
mondiale de la propriété intellectuelle arrivent à attirer quant à elles des différends ayant trait à des
problématiques plus pointues en matière de droit comme celle de la propriété intellectuelle.
La chambre de commerce de Paris & sa consœur de Londres arrivent à attirer un nombre très
important de commerçants car ces derniers ont pu insérer les clauses compromissoires édictées par
ces dernières ou car elles ont choisi ces mêmes institutions dans le cadre de leur propre clause
compromissoire, pour le règlement des différends qui les lient à leurs clients ou fournisseurs.
En effet, ces institutions ont apporté leurs preuves aujourd’hui quant à la résolution de ces différends
en toute célérité tout en optimisant leurs coûts et en gardant la confidentialité, sacro-sainte notion,
dans le monde des affaires.
Malheureusement, ces avantages sont parfois relatifs car ces institutions tournent à plein régime et
elles ont tendance à devenir une deuxième justice « lourde » dans tous les sens, que ce soit d’un angle
pécuniaire que temporel.
Pour notre espèce à savoir le Maroc, plusieurs acteurs font appel audites Chambres de Commerce à
travers leurs cours respectives d’arbitrages afin de trancher des litiges internationaux et la
jurisprudence des différentes cours d’appel commerciales & de la cour suprême ; la cour de cassation
de Rabat confirme la reconnaissance & l’exécution de ses arbitrages dans la plupart des cas lorsque
le litige ne touche pas à l’ordre public interne Marocain.
Le passage du General agreement for Trade & tarifs à l’Organisation Mondiale de Commerce
à Marrakech en l’an 1994, a permis la mise en place d’un organe international gérant avec des
ressources importantes tout ce qui a relation avec le commerce mondial et notamment le renforcement
du règlement des différends commerciaux « par une procédure qui consacre le règne du droit et
permet de rendre le système commercial plus sûr et plus prévisible »15.
L’équité,
La rapidité,
L’efficacité,
La solution mutuellement acceptable
Ce qui marque une réelle ressemblance vis-à-vis de l’arbitrage institutionnel décrit plus haut au
niveau de la section relative aux Chambres de Commerce Internationales mais pour un sujet bien
précis à savoir l’adoption d’une mesure politique par un Etat et qui est considérée par les autres
membres de l’OMC comme une violation aux accords passées.
Le Maroc en tant que pays membre de l’OMC a la possibilité de recourir à ce procédé de règlement
de différends si à titre d’exemple il fait face à un litige avec les pays avec lesquels il a passé des
accords de libre-échange, venaient à prendre des décisions politiques ou commerciales à l’encontre
de ces mêmes accords.
Il est à noter aussi que le Maroc aujourd’hui n’a jamais été impliqué dans une quelconque affaire
devant l’OMC.
En effet, cette institution de règlement extra-judiciaire des litiges adopte un certain nombre de
procédures à savoir :
La médiation,
L’arbitrage,
L’arbitrage accéléré,
L’expertise.
et ce afin de permettre aux acteurs mondiaux de résoudre les conflits nationaux ou internationaux en
matière de contentieux lié à la propriété intellectuelle.
16
Pour notre cas d’espèce à savoir le Royaume du Maroc, il est à noter que ce pays est membre de
l’OMPI et qu’il y a eu plusieurs procédures engagées auprès de l’OMPI via son centre d’arbitrage et
de médiation à l’encontre d’acteurs Marocains faisant usage illégal de noms de domaine web.
Ceci montre clairement la compétence technique de ce centre et son importante analyse dans ce genre
d’affaires complexes liée en même temps au Web, aux marques et dans la majorité des cas à des noms
commerciaux.
Le Maroc des années 1980 a connu un nombre très important de dysfonctionnements à cause
des chocs qu’il a reçu de l’extérieur ainsi que par la mauvaise gestion de la chose locale et par le
manque de dynamisme économique.
D’ailleurs, la banque mondiale dans son rapport sur l’évaluation du système judiciaire Marocain 17
daté de l’an 2003 - soit quatre années avant l’adoption de la loi 08-05 relative à l’arbitrage et à la
médiation conventionnelle-, souligne l’urgence de procéder à une révision des dispositions du code
de procédure civile de 1974 relative à l’arbitrage.
Par ailleurs cette même institution mondiale, confirme son apport tant financier que technique dans
la rédaction du nouveau code d’arbitrage Marocain de 2007.
16 Bilan du programme d’ajustement structurel, Direction des études et des prévisions financières, Ministère
des Finances, 1995
17 The World Bank, Legal Vice Presidency, Maroc – Evaluation du système juridique & judiciaire
17
i. Cas porté devant le CIRDI par Holiday Inns c/ Maroc :
Nous avons choisi de présenter le premier cas auquel a été confronté le Royaume du Maroc,
devant le CIRDI, à un investisseur de droit privé.
Aussi ce même cas représente le premier différend qu’un tribunal arbitral du CIRDI a eu à trancher
dans son histoire. En effet, en 1972 éclate ce premier cas qui donnera lieu à un arbitrage « World
Bank »18 comme il vient dans l’expression chère au Professeur LAVIVE dans son célèbre article.
Ainsi, le Maroc a décidé en 1966 de créer un joint de venture avec la société Holiday Inns. &
Occidental Petroleum Corporation via un accord et ce afin de réaliser quatre hôtels de luxe dans le
but de développer le tourisme national & international. Ce même accord prévoyait une clause
compromissoire CIRDI.
S’en est suivi plusieurs différends quant à la poursuite de la construction des hôtels ainsi qu’au
remboursement de l’investissement engagé par le consortium cité plus haut et le souhait de récupérer
ledit investissement à travers un accord de transfert de fonds de la part du Royaume du Maroc.
Aussi, le Royaume chérifien a récusé l’implication des filiales créées pour ces quatre hôtels dans
cette affaire, et l’avance par ce dernier que la convention de Washington de 1965 ne s’appliquait pas
aux parties car lui-même ne l’ayant ratifiée qu’en 1967 & la confédération helvétique qu’en 1968 soit
respectivement un an & deux ans après l’accord de joint-venture ; Ainsi l’arbitrage CIRDI ne pouvait
avoir lieu selon le Maroc, pour cette affaire.
En conséquence, le tribunal arbitral CIRDI a refusé le moyen avancé par le Royaume du Maroc au
motif que la date qui fait foi en cette espèce est bien celle du jour de l’apparition du conflit et donc
les deux Etats en 1972 avaient tous les deux ratifiés la convention de Washington de 1965.
En somme le Maroc a préféré régler à l’amiable cette affaire ce qui est confirmé par l’ordonnance de
désistement prononcée par le CIRDI en date du 17 octobre 1978.
In fine, ce cas a poussé le tribunal arbitral CIRDI à rendre quatre décisions à savoir :
18LALIVE (P.), « The first "World Bank" arbitration (Holiday Inns v. Morocco) – Some legal problems » in The
British Year Book of International Law 1980, op. cit., pp.123
18
La décision du 23 septembre 1974 sur l’existence et l’étendue des responsabilités des parties
au regard de leur relation contractuelle.
En effet, cet arrêt confirme que l’exception de ‘non-exécution des sentences arbitrales internationales
pour le fait que cela est contraire à l’ordre public interne du Royaume du Maroc’ doit être clairement
explicitée & argumentée par la demanderesse qui s’est pourvue en cassation.
Mais étant donné que dans notre cas d’espèce, la demanderesse n’a pas justifié comme il se doit,
dans sa réponse au pourvoi, de ladite atteinte à l’ordre public interne Marocain de façon claire &
explicite, la cour suprême Marocaine a refusé ce moyen et par voie de conséquence a refusé le pourvoi
en cassation.
Nous avons présenté au cours de cette partie l’arbitrage international au regard du Maroc pour la
période allant de 1974 à 2007 en mettant l’accent sur le rôle joué par le code de procédure civile de
1974. Nous avons par la suite, présenté l’arbitrage international institutionnel à travers ses
différentes formes. Par ailleurs, nous avons présenté notre propre lecture du bilan du programme
d’ajustement structurel imposé au Maroc en liant cela au rapport de la Banque Mondiale sur
l’évaluation du système judiciaire & juridique du Royaume de 2003.
Et en guise de conclusion pour cette partie, nous avons présenté deux jurisprudences : une première
reprenant un arrêt de la cour suprême Marocaine traitant la question de la justification par la
demanderesse de l’atteinte à l’ordre public national pour enclencher la non-exécution d’une sentence
arbitrale et une deuxième jurisprudence d’arbitrage international tiré des cas soumis au CIRDI et
qui a opposé le Royaume du Maroc à consortium représentée par Holiday Inns.
Le rapport de la banque mondiale de 2003 sur l’évaluation du système juridique & judiciaire
Marocain a annoncé clairement l’apport de cette institution de Bretton Wood dans la rédaction de
la nouvelle loi 08-05 relative à l’arbitrage et à la médiation conventionnelle. Aussi nous souhaitons
à travers cette partie, éclaircir le lecteur quant au contexte d’adoption de la nouvelle loi 08-05 en
tissant des liens avec l’euphorie économique connue par le Royaume durant les deux premiers quarts
des années 2000.
Ensuite, nous noterons l’intérêt d’avoir un texte plus exhaustif en la matière tenant compte de
nouvelles notions comme celle de l’arbitrage international & de la médiation conventionnelle. Plus
tard, nous reviendrons sur les raisons de la création de la cour Marocaine d’arbitrage à Casablanca
sous l’égide de la CCI Maroc.
In fine, nous essayerons de faire part au lecteur de l’orientation actuelle de la cour suprême
Marocaine.
Le Maroc a connu depuis le début des années 2000 un revirement très important dans sa
politique, dans son économie ainsi que dans sa gestion. Ceci a été porteur d’un cycle économique
haussier sur tous les niveaux, alimentant dans son passage, bon nombre d’entreprises par des
ressources & par une conjoncture longtemps escomptée.
En effet, ce cycle vertueux a poussé vers l’introduction à la bourse de Casablanca de plusieurs valeurs
poussant ainsi à une spéculation aveugle sur ces mêmes valeurs créant par voie de conséquence une
nouvelle caste de riches individus ayant pris le risque d’investir leurs rares liquidités dans ces valeurs
mobilières.
Cette liquidité croissante comme atteste les agrégats économiques de Bank Al Maghrib à l’époque a
été alimentée tant bien que mal par des IDE20 ce qui sous-entend bien sur le foisonnement de litiges
commerciaux qui devaient se régler normalement via les MARL.
En définitive cette loi se devait d’être le reflet de cette évolution Marocaine ainsi qu’elle devait de
contenir tout ce qui a été prévu dans le rapport cité plus haut et donc elle était pour le moins plus
exhaustive que celle qui l’a précédé en 1974.
En somme, la loi 08-05 est venue avec une notion essentielle du droit de l’arbitrage à savoir la notion
d’arbitrage international.
L’introduction de la notion d’arbitrage international a trop tardé étant donné la mondialisation que
vivait la société Marocaine. Néanmoins les juges Marocains comme il est venu dans la première partie
de ce travail ont joué un rôle précurseur afin de donner à la jurisprudence Marocaine la stabilité
escomptée en matière de droit d’arbitrage international et ce à travers la bonne compréhension de la
philosophie des conventions multilatérales ratifiées par le Maroc.
L’adoption par le Maroc d’un texte exhaustif en la matière est le reflet de différentes pressions
extérieures reçues par le Maroc au cours de la période allant de 1974 à 2007.
En effet, le Maroc s’est basé en grande partie sur les règlements édictés par la CNUDCI à travers sa
loi-type de 1985, pour la rédaction de la nouvelle loi 08-05 relative à l’arbitrage & à la médiation
conventionnelle modifiant ainsi le code de procédure civile de 1974.
Nonobstant, il ne faut pas nier le rôle joué par les Multinationales & les différents investisseurs pour
l’amélioration du cadre de l’arbitrage à travers un lobbying fort auprès des instances législatives &
parlementaires du Royaume.
Aussi, le rôle joué par les différents centres d’arbitrage Marocains est aussi de mise étant donné que
leurs professionnels sont des spécialistes en la matière qui ont été consultés par la commission
technique ayant rédigée la loi 08-05.
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c. La création de la cour Marocaine d’arbitrage à Casablanca & du centre d’arbitrage
à Casablanca Financial City :
Le but aussi derrière la création de cette cour est aussi d’ordre pécuniaire afin de profiter du gâteau
que se partagent les institutions internationales spécialisées en la matière. Et aussi, la cour d’arbitrage
Marocaine escompte devenir une cour d’arbitrage à dimension régionale afin d’œuvrer aussi bien au
Maghreb Arabe qu’au niveau Africain.
L’annonce de la création du centre d’arbitrage à Casablanca Financial City est venue sonner le glas
étant donné l’importance de la présence d’un tel organisme au niveau de cette place qui n’arrête pas
de gagner des places précieuses dans le classement international des places financières, mais qui
souffrira certainement d’un manque de ressources qualifiées en la matière.
In fine, cette ouverture permettra aussi aux sociétés œuvrant sur le continent ou au niveau de la région
MENA de faire appel aux compétences des arbitres qui vont exercer au niveau de cette institution.
Il est malheureux de souligner que l’ensemble des conventions Arabes 21 & Régionales22 d’arbitrage
n’ont eu aucun effet au cours de ces dernières années sur la jurisprudence Marocaine.
Ainsi, ces conventions n’ont jamais été utilisées comme base d’arbitrage ce qui manque cruellement
à notre jurisprudence nationale.
Sans surprise, la cour suprême Marocaine dans son arrêt N° 1818 du 09/12/2010 dans le cadre du
dossier commercial N° 168/3/1/2009 a confirmé une stabilité de sa jurisprudence en matière de délai
En définitive, la cour suprême a indiqué clairement qu’il n y a pas lieu de respecter le délai de trois
(03) jours pour le dépôt auprès du greffe du tribunal d’appel de commerce de :
étant donné que la convention de New York de 1958, relative à la reconnaissance & à l’exécution des
sentences arbitrales étrangères, ratifiée par le dahir daté du dix-neuf (19) février 1960, ne mentionne
aucunement dans son article 04 de délais pour que ledit dépôt soit accepté par le greffe du tribunal
dont le président statuera sur l’exequatur de la sentence arbitrale internationale.
A contrario, il est précisé que les sentences arbitrales nationales sont soumises au respect des
conditions édictées par l’article 320 du code de procédure civile Marocain et qui souligne bien le
délai de trois jours cité plus haut.
Conclusion :
Le Maroc a connu un nombre très important de cas qui ont été traités en ayant recours aux MARL
dont certains que nous venons de vivre durant ces derniers jours à l’instar de l’affaire :
a. Fives FCB c/ Ynna asment : et qui continue de faire couler l’encre des spécialistes & des
milieux intéressés par les MARL,
b. et celle opposant la CAF c/ Royaume du Maroc : une célèbre affaire dans laquelle le Royaume
du Maroc a demandé le report de la CAF 2015 qu’il organisait pour des raisons liées à la
propagation du virus d’Ébola.
Malheureusement, le traitement de chacune des deux affaires à son propre cours étant donné qu’elles
n’ont pas relevé de la même instance d’arbitrage quoi que ces deux instances aient été rendues au sein
du même pays à savoir la suisse.
En effet et sans rentrer dans les détails de l’affaire, cet imbroglio judiciaire (a) offre un cas d’école
que nous n’avons pas choisi d’analyser au cours de cette conclusion mais auquel nous apporterons
une lecture personnelle.
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Ainsi, il est à noter que ce cas est d’une importance très grande car il offre un signal à la communauté
internationale des investisseurs que le Royaume du Maroc respecte ses engagements à la lettre
notamment ceux qui sont venus à travers la ratification de conventions internationales quitte à laisser
souffrir des pans entiers de son économie.
Toute chose étant égale par ailleurs, ce signal fort aura un impact très important et qui va se faire
ressentir surement lors de la prochaine annonce du chiffre des IDE reçus par le Maroc au cours de
l’année 2015.
Pour le deuxième cas à savoir celui qui a confronté le Maroc à la CAF (b), la sentence arbitrale est
très intéressante à étudier car elle permet de noter que le Royaume du Maroc s’en est sorti indemne
au regard de l’expertise d’un avocat Français chevronné en matière de droit du sport.
Ce dernier a utilisé un point de droit à savoir « la non rétroactivité des dispositions prises par la CAF
après la survenance du litige avec le Maroc pour ce qui est de son règlement » pour retourner la
situation au profit d’un Maroc, sommé initialement par la CAF de régler des pénalités records se
chiffrant en Millions de Dollars.
Il est à noter que la loi 08-05 reste malgré cela abstraite pour la majorité des dirigeants des TPE ainsi
que pour ceux des PME vu que n’ayant pas tous les deux d’importantes ressources pour recourir à ce
procédé couteux dévolu aux riches qui l’usent & l’utilisent pour s’entretuer et garder ainsi leur parts
de marché bien que mal intactes.
En définitive, le Maroc constitue un beau cas d’étude de la notion d’arbitrage international car il a pu
démontrer à travers le temps de sa mutation continue en la matière.
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