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Abrégé - Cancérologie Clinique

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00_PDD Page I Vendredi, 31.

janvier 2003 11:56 11

Cancérologie
clinique
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CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

Dans la même collection

Ophtalmologie, par J. FLAMENT. 2003, 400 pages.


Gynécologie, par J.R. GIRAUD, D. ROTTEN, A. BRÉMOND et P. POULAIN. 2002, 360 pages.
Médecine interne, par B. DEVULDER, P.Y. HATRON, É. HACHULLA. 2002, 480 pages.
Pédiatrie, par A. BOURRILLON. 2002, 2e édition, 688 pages.
Pharmacologie, par M. MOULIN, A. COQUEREL. 2002, 2e édition, 856 pages.
Réanimation et urgences, par le CNERM (Collège national des enseignants de réanimation médicale).
2002, 576 pages.
Rhumatologie, par le COFER (Collège français des enseignants en rhumatologie). 2002, 808 pages.
Virologie humaine, par H.J.A. FLEURY. 2002, 4e édition, 264 pages.
Bactériologie médicale, par C. NAUCIEL. 2001, 288 pages.
Économie de la santé, par A. BERESNIAK, G. DURU. 2001, 5e édition, 224 pages.
Épidémiologie, par P. CZERNICHOW, J. CHAPERON, X. LE COUTOUR et coll. 2001, 456 pages.
Hématologie et transfusion, par J.-P. LÉVY, B. VARET, J.-P. CLAUVEL, F. LEFRÈRE, A. BEZAUD, M.-C. GUILLIN. 2001,
400 pages.
Immunologie générale, par P. LETONTURIER. 2001, 7e édition, 192 pages.
Néphrologie et troubles hydroélectrolytiques, par A. KANFER, O. KOURILSKY, M.-N. PERALDI. 2001, 2e édition,
400 pages.
Santé publique, par M. CAZABAN, J. DUFFOUR, P. FABBRO-PERAY, R. JOURDAN, A. LÉVY. 2001, 4e édition,
264 pages.
Sécurité sociale, par L. DALIGAND et coll. 2001, 5e édition, 224 pages.
Dermatologie, par le CEDEF (Collège des enseignants de dermatologie-vénérologie de France). 2000,
336 pages.

Autres ouvrages

Cancérologie générale (module 10). É. CABARROT, J.-L. LAGRANGE et J.-M. ZUCKER. Abrégés modules trans-
versaux. 2002, 240 pages.
Cancérologie et hématologie. B. HŒRNI. Pour le praticien. 2001, 328 pages.
Chimiothérapie anticancéreuse. J. CHAUVERGNE, B. HŒRNI. Abrégés de médecine. 2001, 112 pages.
La prise en charge médico-psychologique du patient cancéreux. D. RAZAVI, N. DELVAUX. Médecine et
psychothérapie. 1998, 272 pages.
Traitements médicaux des cancers. A. THYSS, X. PIVOT. Abrégés de médecine. 1998, 168 pages.
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Cancérologie
clinique

Coordonné par

Nicolas Daly-Schveitzer
professeur de cancérologie à l’université Toulouse-III,
directeur de l’institut Claudius-Regaud.

2e édition
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Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente


pour l’avenir de l’écrit tout particulièrement dans le domaine
universitaire, le développement massif du « photocopillage ».
Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les
établissements d’enseignement, provoque une baisse brutale des
achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs
de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement
est aujourd’hui menacée.
Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans
autorisation, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites.
Les demandes d’autorisation de photocopier doivent être adressées
à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie :
20, rue des Grands-Augustins, 76006 Paris Tél. 01 41 07 47 70.

Maquette intérieure : Christian Blangez

Avertissement
Les DCI sont en caractères droits minuscules.
Les marques déposées sont en caractères italiques, commençant par une majuscule.

Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages
publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une
contrefaçon. Seules sont autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé
du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par
le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4,
L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).

© Masson, Paris, 1998, 2003


ISBN e-PDF : 978-2-294-09106-3

MASSON S.A.S. — 120, bd Saint-Germain, 75280 Paris Cedex 06


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Avant-propos

Cet ouvrage est pour l’essentiel la nouvelle édition actualisée de Cancérologie


clinique parue chez le même éditeur en 1998. Le succès du premier livre a incité les
éditions Masson à demander à son auteur d’assurer la rédaction du second. Mais cette
fois, l’auteur du premier ouvrage, entretemps appelé à de nouvelles fonctions, a sollicité
certains de ses collègues pour mener à bien cette tâche. Qu’ils soient ici remerciés de
leur contribution décisive !
Ce renfort est apparu d’autant plus nécessaire que, depuis 1998, d’une part la
cancérologie a continué sa marche en avant, et que, d’autre part, les études médicales
ont été modifiées de façon sensible notamment pour ce qui est du deuxième cycle,
cible préférentielle de cet ouvrage.
Le programme pédagogique de cette période charnière des études médicales est
devenu superposable au programme de l’internat des hôpitaux, obligeant à une refonte
dans l’esprit et la forme, sans pour autant abandonner l’objectif d’apporter des
connaissances utiles, après ou en dehors des concours…
En effet, comme la première, cette nouvelle édition s’adresse à l’ensemble des
acteurs de soins concernés par la cancérologie et en particulier ceux qui ne sont pas
des oncologues professionnels ou qui ne le sont pas encore.
La sélection des notions qualifiées d’indispensables a été encore plus difficile qu’il
y a quelques années et ce d’autant plus qu’une autre équipe de rédacteurs, amis et
collègues, a fait paraître récemment chez le même éditeur un ouvrage entièrement
consacré à la cancérologie dite générale1. L’objectif de Cancérologie clinique est donc
orienté préférentiellement vers les chapitres consacrés aux différentes pathologies
tumorales, sans en oublier certaines dont l’existence est bien réelle et la connaissance
utile, même si elles n’ont pas été retenues dans le programme de l’internat. Par ailleurs,
afin que l’ouvrage offre une organisation cohérente, certains des éléments généraux
essentiels à la compréhension des chapitres pathologiques ont été maintenus.
Nous serions heureux si ce livre pouvait contribuer, même modestement, bien
entendu, au succès des candidats, mais surtout à la recherche continue de l’amélio-
ration de la prise en charge des patients porteurs de cancer.

Nicolas Daly-Schveitzer

1. Cancérologie générale, É. CABARROT, J.-L. LAGRANGE, J.-M. ZUCKER, collection Abrégés modules transversaux,
module 10, Masson, 2002.
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Liste des auteurs

DALY-SCHVEITZER Nicolas, professeur de cancérologie à l’université Toulouse-III, directeur


de l’institut Claudius-Regaud, Toulouse.
CABARROT Étienne, professeur de cancérologie, université Toulouse-III.
GUIMBAUD Roseline, maître de conférences des universités, cancérologie, CHU et institut
Claudius-Regaud, Toulouse.
MOYAL Élisabet, maître de conférences des universités, praticien hospitalier, cancéro-
logie, institut Claudius-Regaud, Toulouse.

Les auteurs remercient vivement les docteurs Anne LAPRIE-MAZIÈRES, Pascal DEBOVE,
Florence DALENC et Max BUTARELLI, pour leur contribution éminente à la confection de
plusieurs des cas cliniques qui complètent cet ouvrage.
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Avertissement

Objectifs pédagogiques généraux


Les données contenues dans cet ouvrage correspondent aux objectifs pédagogi-
ques définis dans le programme du 2e cycle des études médicales. Cependant, des
notions complémentaires, indispensables à la compréhension globale des chapitres
traitant des diverses pathologies tumorales d’organe ou de système, ont été rassem-
blées au sein du chapitre 1, en rappelant que des notions générales plus détaillées
sont proposées dans l’ouvrage Cancérologie générale de la collection Abrégés
modules transversaux.
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TABLE DES MATIÈRES

Table des matières

Avant-propos ......................................................................................................................................................................................................... V

Liste des auteurs .............................................................................................................................................................................................. VII

Avertissement ........................................................................................................................................................................................................ VIII

Liste des abréviations ............................................................................................................................................................................ XVII

Connaissances

Cancérologie clinique

1 ◗ Principes généraux de diagnostic et d’évaluation


préthérapeutique des cancers ............................................................................................................................... 3
Présentations cliniques caractéristiques ............................................................................................................. 3
Diagnostic clinique précoce .................................................................................................................................................... 3
Moyens du diagnostic ....................................................................................................................................................................... 4
Biopsie (4). Imagerie en oncologie (5).
Classifications cliniques des tumeurs ..................................................................................................................... 6
Catégories T (6). Catégories N (7). Catégories M (7). Stades (8). Classification
postopératoire (8).
Classifications morphologiques des tumeurs ............................................................................................ 8
Marqueurs tumoraux circulants ........................................................................................................................................ 9

2 ◗ Principes généraux de traitement des cancers .................................................................. 11


Données générales ................................................................................................................................................................................. 11
Stratégie décisionnelle ..................................................................................................................................................................... 12
Décision pluridisciplinaire (12). Principes de l’association thérapeutique (13).
Information du patient (14). Réseaux de soins (15).


IX ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE

3 ◗ Tumeurs des voies aérodigestives supérieures ................................................................ 17


Épidémiologie .................................................................................................................................................................................................. 17
Anatomie ................................................................................................................................................................................................................. 18
Anatomie pathologique .................................................................................................................................................................. 18
Histoire naturelle des carcinomes épidermoïdes des VADS ........................................... 19
Tumeur primitive (19). Extension ganglionnaire (19). Extension métastatique
viscérale (20).
Principes communs du diagnostic clinique des carcinomes épidermoïdes
des VADS ................................................................................................................................................................................................................. 20
Circonstances de découverte (20). Examen clinique (21). Exploration
radiologique (21).
Principes thérapeutiques généraux des cancers des VADS .............................................. 22
Bases du traitement (22). Chirurgie et radiothérapie (23).
Moyens thérapeutiques .................................................................................................................................................................. 24
Chirurgie (24). Radiothérapie (24). Chimiothérapie (25). Indications (25).
Cavité buccale ................................................................................................................................................................................................. 26
Lèvres (26). Langue mobile et plancher buccal (28). Oropharynx (30).
Hypopharynx ...................................................................................................................................................................................................... 32
Épidémiologie (32). Diagnostic (33).
Larynx ............................................................................................................................................................................................................................ 34
Épidémiologie (34). Diagnostic (34). Anatomie pathologique (35). Évolution
et classification (35). Principes de traitement (36).
Nasopharynx ...................................................................................................................................................................................................... 37
Épidémiologie et étiologie (37). Diagnostic (37). Évolution et histoire naturelle
(38). Explorations complémentaires et classifications (38).
Sinus de la face et fosses nasales .................................................................................................................................. 39
Épidémiologie et étiologie (39). Diagnostic (40). Diagnostic
anatomopathologique (40). Évolution, classification (40).
Glandes salivaires ...................................................................................................................................................................................... 41
Épidémiologie (41). Anatomie pathologique, histoire naturelle (42).
Diagnostic (42). Principes de traitement (42). Résultats (43).

4 ◗ Cancers de la thyroïde ............................................................................................................................................................. 45


Classification histologique .......................................................................................................................................................... 45
Carcinomes papillaires (45). Carcinomes vésiculaires (ou folliculaires) (45).
Carcinomes indifférenciés ou anaplasiques (45). Carcinomes médullaires (46).
Épidémiologie .................................................................................................................................................................................................. 46
Facteurs de risque (46).
Diagnostic ............................................................................................................................................................................................................... 46
Symptomatologie (46). Examens complémentaires (46).
Traitements .......................................................................................................................................................................................................... 47
Chirurgie thyroïdienne (47). Iode radioactif ou irathérapie (47). Radiothérapie
externe (48). Traitement hormonal substitutif (48). Chimiothérapie (48).
Schémas thérapeutiques .............................................................................................................................................................. 48
Suivi .................................................................................................................................................................................................................................. 49
Résultats .................................................................................................................................................................................................................... 49
Carcinome médullaire de la thyroïde ..................................................................................................................... 50
Formes cliniques (50). Diagnostic (50). Traitement (51). Suivi (51). Résultats (51).

X◗
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TABLE DES MATIÈRES

5 ◗ Tumeurs du système nerveux central .................................................................................................... 53


Données générales communes ........................................................................................................................................ 53
Épidémiologie .................................................................................................................................................................................................. 53
Tumeurs primitives de l’adulte (54). Tumeurs primitives de l’enfant (54).
Tumeurs de la moelle épinière (54). Étiologie (55).
Circonstances du diagnostic ................................................................................................................................................... 55
Hypertension intracrânienne (HTIC) (55). Signes en foyer (56). Histoire
clinique (57). Examen clinique (57).
Procédures diagnostiques complémentaires ............................................................................................. 58
Imagerie (58). LCR (58). Biopsie (59).
Situations d’urgences : diagnostic et prise en charge ................................................................ 60
Hypertension intracrânienne (60). Compression médullaire (61).
Histopathologie (61). Tumeurs intrinsèques (62). Métastases (63).
Évaluation préthérapeutique et classification ........................................................................................... 63
Principes du traitement .................................................................................................................................................................. 65
Chirurgie (65). Radiothérapie (65). Chimiothérapie (66). Résultats et pronostic
(67).
Conclusion ............................................................................................................................................................................................................. 69

6 ◗ Cancers gynécologiques ...................................................................................................................................................... 71


Épidémiologie générale .................................................................................................................................................................. 71
Cancers du col utérin ......................................................................................................................................................................... 71
Épidémiologie (72). Étiologie, histoire naturelle (73). Diagnostic : signes
d’appel (74). Évaluation préthérapeutique (75). Modalités thérapeutiques
(76). Principes de traitement des formes non invasives (79). Schéma
d’indications thérapeutiques pour les formes invasives (79). Effets
secondaires, complications (80).
Cancers du vagin ........................................................................................................................................................................................ 81
Diagnostic clinique (82). Traitements (82). Indications thérapeutiques (82).
Formes particulières (83).
Cancers de la vulve ................................................................................................................................................................................ 83
Épidémiologie (83). Diagnostic clinique (84). Évaluation préthérapeutique
(84). Traitements (84).
Cancers de l’endomètre ................................................................................................................................................................. 85
Épidémiologie (85). Histoire naturelle (85). Diagnostic (86). Modalités
thérapeutiques (88). Hormonothérapie (89). Chimiothérapie (89). Schéma
d’indications thérapeutiques (89).
Sarcomes de l’utérus ........................................................................................................................................................................... 90
Diagnostic clinique (90). Diagnostic histopathologique (90). Évaluation
préthérapeutique (90). Principes de traitement (90). Résultats (91).
Tumeurs de l’ovaire ............................................................................................................................................................................... 91
Épidémiologie (92). Pathologie (92). Évolution naturelle (93). Diagnostic (94).
Classification d’extension (97). Moyens thérapeutiques des cancers de l’ovaire
(97). Indications thérapeutiques (99). Résultats et pronostic (100).

7 ◗ Tumeurs cutanées ............................................................................................................................................................................ 101


Tumeurs cutanées épithéliales .......................................................................................................................................... 101
Épidémiologie (101). Pathologie et aspects cliniques (103). Méthodes de
diagnostic (104). Diagnostics différentiels (105). Bilan et classification (105).
Traitement (105). Suivi (107).

XI ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Mélanomes malins ................................................................................................................................................................................. 108


Épidémiologie (108). Pathologie (109). Diagnostic clinique (111). Méthodes
de diagnostic (112). Diagnostic différentiel (113). Bilan d’extension,
classification (114). Pronostic (114). Traitement (114). Suivi (116).

8 ◗ Tumeurs digestives ........................................................................................................................................................................ 121


Tumeurs du colon et du rectum .................................................................................................................................... 121
Épidémiologie (121). Pathologie (124). Diagnostic (124). Évaluation
préthérapeutique (125). Traitement (127). Surveillance (132).
Tumeurs de l’estomac ...................................................................................................................................................................... 135
Épidémiologie (135). Pathologie (136). Diagnostic (137). Évaluation
préthérapeutique (138). Traitement (140). Surveillance (142).
Tumeurs du foie, primitives ou secondaires .............................................................................................. 144
Épidémiologie (144). Pathologie (145). Diagnostic (146). Évaluation
préthérapeutique (147). Traitement (148). Surveillance (150).
Tumeurs de l’œsophage ............................................................................................................................................................... 151
Épidémiologie (151). Pathologie (153). Diagnostic (153). Évaluation
préthérapeutique (154). Traitement (156). Surveillance (160).
Tumeurs du pancréas ........................................................................................................................................................................ 162
Pathologie (162). Diagnostic (164). Évaluation préthérapeutique (164).
Traitement (166). Surveillance (168).
Cancers du canal anal ....................................................................................................................................................................... 169
Épidémiologie et étiologie (169). Données anatomiques (169). Diagnostic
(170). Principes de traitement et résultats (171). Formes particulières
(172).

9 ◗ Cancers bronchopulmonaires ................................................................................................................................. 173


Épidémiologie et étiologie ........................................................................................................................................................ 173
Diagnostic ............................................................................................................................................................................................................... 174
Diagnostic clinique (174). Diagnostic précoce (174). Procédures
diagnostiques complémentaires (175). Diagnostic histologique (175).
Évaluation préthérapeutique ................................................................................................................................................. 176
Carcinome anaplasique à petites cellules (176). Autres formes histologiques
(176). Classifications (177).
Traitement .............................................................................................................................................................................................................. 178
Moyens de traitement (178). Principes de traitement et résultats (179).

10 ◗ Tumeurs urogénitales ......................................................................................................................................................... 181


Tumeurs de la prostate .............................................................................................................................................................. 181
Épidémiologie (181). Pathologie (183). Dépistage (184). Diagnostic
(184). Bilan d’extension, classifications (185). Pronostic (187).
Traitement (188). Surveillance (190).
Tumeurs du rein ..................................................................................................................................................................................... 193
Épidémiologie (193). Pathologie (194). Diagnostic (195). Pronostic
(197). Traitement des cancers du rein non métastatiques (197).
Traitement des cancers du rein métastatiques (198).
Tumeurs de la vessie ..................................................................................................................................................................... 200
Épidémiologie (200). Diagnostic (200). Traitement (202). Pronostic (203).

XII ◗
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TABLE DES MATIÈRES

Cancers du testicule ......................................................................................................................................................................... 203


Épidémiologie (204). Pathologie (204). Diagnostic (206). Bilan
d’extension (208). Classification (208). Pronostic (209). Traitement
(209). Surveillance (211).

11 ◗ Tumeurs du sein .............................................................................................................................................................................. 213


Épidémiologie ............................................................................................................................................................................................. 213
Incidence (213). Prévalence (213). Âge et sexe (213). Mortalité (214).
Facteurs de risque (214).
Pathologie .......................................................................................................................................................................................................... 215
Types histologiques (215). Évolution naturelle (215).
Dépistage ............................................................................................................................................................................................................ 217
Dépistage individuel (217). Dépistage collectif (217).
Diagnostic .......................................................................................................................................................................................................... 218
Signes et symptômes (218). Méthodes du diagnostic (218). Procédures
diagnostiques (220).
Bilan d’extension, classifications ................................................................................................................................. 224
Examens (224). Classification préthérapeutique (224).
Pronostic .............................................................................................................................................................................................................. 225
Pronostic des cancers localisés (225). Pronostic des cancers métastatiques
(226).
Traitement ......................................................................................................................................................................................................... 227
Prévention (227). Traitement des cancers localisés (227).
Cas particuliers .......................................................................................................................................................................................... 229
Cancer canalaire in situ (CCIS) (229). Chimiothérapie néo-adjuvante
(d’induction ou première) (230). Cancer du sein chez l’homme (230).
Cancer du sein pendant la grossesse (230).
Traitement des cancers métastatiques ............................................................................................................ 230
Principes généraux (230). Hormonothérapie (231). Chimiothérapie
(232). Traitements complémentaires (232).
Suivi des patientes traitées .................................................................................................................................................. 233
Objectifs de la surveillance (233). Examens de surveillance (233).
Complications (233). Récidive intramammaire après chirurgie
conservatrice (233). Récidives pariétothoraciques après mastectomie
(234). Reconstruction du sein (234). Réadaptation (234).

12 ◗ Tumeurs des os et des parties molles .............................................................................................. 237


Sarcomes des parties molles des membres ........................................................................................... 237
Définition (237). Épidémiologie et facteurs de risques (237).
Circonstances du diagnostic (237). Éléments du diagnostic (238).
Diagnostic histopathologique (238). Classification anatomique (240).
Évaluation préthérapeutique (240). Principes du traitement (241).
Résultats et pronostic (242). Variantes anatomocliniques (243).
Tumeurs des os primitives et secondaires ................................................................................................ 244
Schéma diagnostique général (245). Tumeurs osseuses primitives (245).
Tumeurs osseuses bénignes (248). Tumeurs malignes primitives
osseuses (250). Tumeurs secondaires des os (256).

13 ◗ Lymphomes malins ................................................................................................................................................................... 265


Maladie de Hodgkin ou lymphome hodgkinien ............................................................................. 265

XIII ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Définition (265). Épidémiologie (265). Diagnostic (266). Principes de


traitement (268). Indications thérapeutiques en fonction du stade
et facteurs pronostiques (270). Rechutes (271). Résultats (271).
Lymphomes malins non hodgkiniens ............................................................................................................... 272
Définition (272). Épidémiologie, étiologie (272). Anatomopathologie et
classification (272). Diagnostic (273). Bilan d’extension (274). Évolution
et pronostic (274). Lymphomes de haut grade (275). Lymphomes
agressifs ou de grade intermédiaire (275). Lymphomes de bas grade
ou d’évolution lente (275). Autres formes de lymphomes (276). Principes
de traitement (277). Résultats (278). Cas particulier du lymphome
associé au virus HTLV-1 (279).

14 ◗ Myélome multiple ....................................................................................................................................................................... 281


Définition ............................................................................................................................................................................................................ 281
Épidémiologie et étiologie .................................................................................................................................................... 281
Diagnostic .......................................................................................................................................................................................................... 281
Circonstances du diagnostic (281). Arguments du diagnostic (282).
Classification .................................................................................................................................................................................................. 282
Complications ............................................................................................................................................................................................. 283
Principes du traitement .............................................................................................................................................................. 283
Chimiothérapie (283). Radiothérapie (284). Résultats (284).
Plasmocytome solitaire ............................................................................................................................................................... 284

15 ◗ Syndromes paranéoplasiques ........................................................................................................................... 287


Pathogénie ....................................................................................................................................................................................................... 287
Types tumoraux concernés .................................................................................................................................................. 287
Principaux syndromes paranéoplasiques .................................................................................................... 288
Syndromes endocrinométaboliques (288). Syndromes neuromusculaires
(288). Syndromes cutanés (289). Syndromes hématologiques (290).
Syndromes gastro-intestinaux (290). Syndromes uronéphrologiques (290).
Syndromes connectivovasculaires (291). Syndromes cardiovasculaires
(291). Syndromes divers (291).

16 ◗ Urgences cancérologiques ......................................................................................................................................... 293


Urgences cardiovasculaires .................................................................................................................................................. 293
Épanchement péricardique et tamponnade (293). Syndrome cave
supérieur (294).
Urgences hématologiques ..................................................................................................................................................... 294
Coagulation intravasculaire disséminée (294). Leucostase (295).
Thrombocytopénie (296).
Urgences métaboliques ............................................................................................................................................................. 296
Hypercalcémie (296). Syndrome de lyse tumorale (297). Hyperuricémie
(298). Hyponatrémie (298). Acidose lactique (299). Hypoglycémie (299).
Urgences infectieuses .................................................................................................................................................................... 300
Fièvre chez le patient neutropénique (300). Infection fongique
systémique chez le patient immunodéprimé (301). Infections virales
(301). Infections parasitaires (302).
Urgences digestives ........................................................................................................................................................................... 303
Obstruction œsophagienne (303). Occlusion intestinale (303).
Hémorragie digestive (304). Ascite (305).

XIV ◗
01_TDM Page XV Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TABLE DES MATIÈRES

Urgences urologiques .................................................................................................................................................................... 305


Uropathie obstructive (305). Hématurie (306).
Urgences respiratoires .................................................................................................................................................................. 306
Épanchement pleural (306). Obstruction respiratoire haute (307).
Urgences neurologiques ........................................................................................................................................................... 307
Hypertension intracrânienne (307). Compression médullaire (308).
Urgences oculaires .............................................................................................................................................................................. 310
Diagnostic (310). Traitement (310).

17 ◗ Métastases et maladie métastatique ................................................................................................. 311


Épidémiologie et étiologie .................................................................................................................................................... 311
Étapes de l’extension metastatique ...................................................................................................................... 312
Invasion (312). Extension intravasculaire (313). Formation des
métastases (313). Tropisme métastatique (316).
Détection et diagnostic ............................................................................................................................................................... 317
Métastases pulmonaires (318). Métastases osseuses (318). Métastases
hépatiques (320). Métastases cérébrales (320). Métastases
ganglionnaires (320). Métastases sans site tumoral primitif retrouvé
(320). Épanchements malins (321). Compression médullaire
métastatique (321). Métastases cutanées (321). Métastases oculaires
(322). Métastases mammaires, utérines et vaginales (322). Cas
particulier des cancers thyroïdiens différenciés (322). Utilité des
marqueurs tumoraux sériques dans le diagnostic des métastases (322).
Principes de traitement .............................................................................................................................................................. 323
Prise en charge médicale générale (323). Traitement des localisations
spécifiques (323).
Conclusion ........................................................................................................................................................................................................ 325

18 ◗ Recherche clinique, standards, options


et recommandations ............................................................................................................................................................... 327
Essais cliniques ......................................................................................................................................................................................... 328
Les différents types d’essais cliniques (328). Dispositions légales et
réglementaires (328). Déroulement de l’essai (329).
Méta-analyses .............................................................................................................................................................................................. 331
Particularités de la recherche clinique en cancérologie ..................................................... 331
Standards, options et recommandations ..................................................................................................... 332

19 ◗ Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux,


résultats et pronostic ............................................................................................................................................................ 333
Les différentes expressions possibles des résultats en cancérologie .......... 333
Notion de guérison (334). Période de risque (334). Influence
pronostique des faits nouveaux tumoraux (336).
Échecs tumoraux et traitements de deuxième intention ................................................. 336
Échecs au niveau du site primitif (T) (336). Échecs ganglionnaires (N)
(336). Échecs métastatiques (M) (336). Combinaisons T, N et M (337).
Principes généraux du suivi post-thérapeutique ............................................................................ 337
Objectifs généraux (337). Suivi médical (337). Suivi médico-social (340).
Suivi médico-scientifique (342). Suivi médico-économique (342).
Conclusion ........................................................................................................................................................................................................ 342

XV ◗
01_TDM Page XVI Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Pratique
Cancérologie clinique

Cas cliniques ........................................................................................................................................................................................................... 345

Index ...................................................................................................................................................................................................................................... 365


XVI ◗
02_Abrev Page XVII Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Liste des abréviations

5-FU 5-fluoro-uracile
AAP Amputation rectale à double voie abdominopérinéale
ABVD Adriamycine, Bléomycine, Velbé et Déticène
AC Adriamycine, cyclophosphamide
ACE Antigène carcino-embryonnaire
ACVBP Adriamycine, cyclophosphamide, vindésine, bléomycine et predisone
ADH Antidiuretic Hormone, vasopressine
ADN Acide désoxyribonucléique
AFP a-Fœtoprotéine
AJCC American Joint Committee on Cancer
ALM Acral lentiginous melanoma
AMM Autorisation de mise sur le marché
ANAES Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé
APUD Amine Precursor Uptake and Decarboxylation
ATCD Antécédent
ATL Adult T-cell Leukemia/Lymphoma
BCNU Bis-chloroéthylnitroso-urée
BEP Platine, Bléomycine, Étoposide
BES Bilan électrolytique sanguin
BL Lymphome de Burkitt
BRCA Breast cancer (gène)
CA Carbohydrate antigen
CBP Cancer bronchopulmonaire
CCI Cancer canalaire infiltrant
CCIS Cancer canalaire in situ
CCNU Chloréthyl-cyclohexyl-nitroso-urée
CCPPRB Comité consultatif de protection des personnes participant à la recherche
biomédicale
CD Cluster of Differentiation
CHC Carcinome hépatocellulaire
CHOP Cyclophosphamide, Hydroxydoxorubicine, Oncovin, Prednisone
CHR Chirurgie
Ci Curie
CIN Carcinome intraépithélial ou Cervical Intraepithelial Neoplasia
CIVD Coagulation intravasculaire disséminée
CLI Cancer lobulaire infiltrant
CLIS Cancer lobulaire in situ
CMF Cyclophosphamide, méthotrexate, 5-fluoro-uracile
CML Compression médullaire lente
CRP C-reactive protein
CRT Curiethérapie
DCC Deleted in Colorectal Cancer (gène)
DTIC Diméthyl-triazényl-imidazole-carboxamide
EBO Endobrachyœsophage
EBV Epstein-barr virus


XVII ◗
02_Abrev Page XVIII Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ECOG Eastern cooperative oncology group


EFR Explorations fonctionnelles respiratoires
EGFR Epidermal growth factor receptor
EP Étoposide, platine
eV Électron-volt
FAC Fluoro-uracile, adriamycine, cyclophosphamide
FDG Fluorodéoxyglucose
FEC Fluoro-uracile, épi-adriamycine, cyclophosphamide
FIGO Fédération internationale de gynécologie obstétrique
GBq Gigabecquerel
Gy Gray
β-HCG Hormone chorionique gonadotrophique
HER-2 Human Epidermal growth factor Receptor 2
HFM Histiocytome fibreux malin
HNPCC Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer (syndrome)
HP Helicobacter pylori
HPC Hereditary Prostate Cancer (gène)
HPV Human papilloma virus
HTIC Hypertension intracrânienne
HTLV Human t-leukemia virus
IFN Interféron
IL Interleukine
IRM Imagerie par résonance magnétique
IV Intraveineuse
j Jour
LCR Liquide céphalo-rachidien
LDH Lacticodéshydrogénase
LH-RH Luteinizing hormone-releasing hormone
LMNH Lymphomes malins non hodgkiniens
MALT Mucosa-associated lymphoid tissue
MdH Maladie de Hodgkin
MM Mélanomes malins
MOPP Cyclophosphamide, Oncovine, Procarbazine, Prednisolone
MP Méthylprednisolone
MST Maladies sexuellement transmissibles
NCI National cancer institute
NEM Néoplasies endocriniennes multiples
NFS Numération-formule sanguine
NK Natural killer
NM Nodular melanoma
NSE Neuron-specific enolase
OMS Organisation mondiale de la santé
PAF Polypose adénomateuse familiale
Paf Ponction à l’aiguille fine
PBP Ponction biopsie de la prostate
PCV Procarbazine, Cyclophosphamide, Vincristine
PSA Prostate Specific Antigen, antigène spécifique prostatique
PTEN Phosphatase and tensin homolog (gène)
PTH-like Parathormone-like
pTNM Pathologic TNM
PUVA Psoralène-ultraviolets A


XVIII ◗
02_Abrev Page XIX Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LISTE DES ABRÉVIATIONS

Rb Rétinoblastome (gène du)


RCH Recto-colite hémorragique
REAL Revised european-american lymphoma classification
RH Récepteurs hormonaux
RO Récepteurs à l’œstradiol
RP Récepteurs à la progestérone
RTE Radiothérapie externe
SBR Scarff, Bloom et Richardson (grade de)
SIADH Sécrétion inappropriée d’adh
SNC Système nerveux central
SOR Standards, options et recommandations
SPN Syndrome paranéoplasique
SSB Syndrome de Schwartz-Bartter
SSM Superficial spreading melanoma
TAF Tumoral angiogenesis factor
TBI Total body irradiation
TDM Tomodensitométrie
TEP Tomographie par émission de positron
TG Tumeurs germinales
Tg Thyroglobuline
TGNS Tumeurs germinales non séminomateuses
TNI Total nodal irradiation
TNM Tumor-Node-Metastasis (classification)
TNS Tumeurs non séminomateuses
TP Taux de prothrombine
TR Toucher rectal
TS Tumeurs séminomateuses
TSH Thyroid stimulating hormone
UCPO Unité de concertation pluridisciplinaire oncologique
UICC Union internationale contre le cancer
UIV Urographie intraveineuse
UV Ultraviolets
VADS Voies aérodigestives supérieures
VIH Virus de l’immunodéficience humaine


XIX ◗
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03_PARTIE1 Page 1 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Connaissances
Cancérologie
clinique
00_PDD Page VIII Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11
04_Chap1 Page 3 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Principes généraux
de diagnostic
et d’évaluation
1
préthérapeutique des cancers1
N. DALY-SCHVEITZER

◗ PRÉSENTATIONS CLINIQUES CARACTÉRISTIQUES


◗ DIAGNOSTIC CLINIQUE PRÉCOCE
◗ MOYENS DU DIAGNOSTIC
◗ CLASSIFICATIONS CLINIQUES DES TUMEURS
◗ CLASSIFICATIONS MORPHOLOGIQUES DES TUMEURS
◗ MARQUEURS TUMORAUX CIRCULANTS

◗ PRÉSENTATIONS CLINIQUES CARACTÉRISTIQUES


Bien qu’il n’existe pas de symptomatologie clinique pathognomonique de l’exis-
tence d’un cancer, il est cependant possible d’isoler des situations nécessitant
une attention clinique particulière :
– modifications persistantes des fonctions physiologiques normales : ano-
rexie, changement du goût, dysphagie, constipation et/ou diarrhée, amai-
grissement isolé, par exemple ;
– apparition d’une formation nodulaire (sein, thyroïde) ou d’une ulcération
(peau, muqueuse) ;
– hémorragie spontanée quelle qu’en soit l’origine : hémoptysie, métrorra-
gie, hématurie, rectorragie ;
– fièvre inexpliquée avec altération de l’état général, mal contrôlée par une
antibiothérapie, douleurs erratiques sans cause évidente.
Il est à remarquer que l’apparente banalité de ces signes et la crainte de la révé-
lation diagnostique éprouvée par bon nombre de patients se conjuguent pour
retarder éventuellement le moment du diagnostic. Par ailleurs, il est rarissime
qu’une anomalie biologique de constatation fortuite et sans signes cliniques asso-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

ciés soit à l’origine du diagnostic d’un cancer. Enfin, quelle que soit la symptoma-
tologie, il faut se rappeler que l’âge constitue un facteur de risque déterminant
obligeant à une attention médicale particulière dans ce sens au-delà de 40 ans.

◗ DIAGNOSTIC CLINIQUE PRÉCOCE


Le diagnostic clinique précoce, aidé dans certains cas de tests diagnostiques
simples, est d’une importance pronostique capitale dans la mesure où plus le
volume tumoral est petit lors du diagnostic, plus le risque de localisations métas-
tatiques est faible et donc les possibilités de guérison importantes (tableau 1.I).

1. Cf. item n° 140, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson, 2002.

3◗
04_Chap1 Page 4 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Il est important de noter que le diagnostic précoce, sauf exceptions notables,


repose essentiellement sur des éléments cliniques soit d’interrogatoire soit
d’examen physique simple. En effet, bon nombre des cancers fréquents sont
directement accessibles (sein, ORL, peau, gynécologie) et peuvent donc béné-
ficier d’un diagnostic précoce par le seul examen clinique normalement conduit.
Certains d’entre eux (sein, utérus) bénéficient en outre de moyens paracliniques
de dépistage en dehors de toute symptomatologie.
En revanche, certaines affections tumorales, également fréquentes, comme les
cancers bronchopulmonaires et certains cancers digestifs, sont inaccessibles à l’exa-
men clinique simple, ce qui constitue d’ailleurs un handicap pronostique certain.

Tableau 1.I. Recommandations d’utilisation systématique des moyens de diagnostic précoce


Examen Sexe Âge du risque fréquence
Radiographie thoracique M>F > 45 + tabagisme Non recommandée
Cytologie des crachats M>F > 45 + tabagisme Non recommandée
Hémoccult M=F Au-delà de 50 ans Tous les ans
Toucher rectal M=F Au-delà de 40 ans Tous les ans
Sigmoïdoscopie M=F Au-delà de 50 ans Tous les 2 à 3 ans
Frottis vaginaux F 20-65 ans Tous les 2 à 3 ans
Examen gynécologique F 20-40 ans Tous les 2 à 3 ans
Au-delà de 40 ans Tous les ans
Biopsie endo-utérine F Après la ménopause 1 fois
Auto-examen mammaire F À partir de 20 ans Tous les mois
Examen mammaire médical F À partir de 20 ans Tous les 3 ans
Au-delà de 40 ans Tous les ans
Mammographie bilatérale F < 50 ans Un examen de référence
ou sur décision médicale
Mammographie bilatérale F Au-delà de 50 ans et jusqu’à Tous les 2 ans
75 ans

◗ MOYENS DU DIAGNOSTIC
◗ Biopsie
L’obtention de tout ou partie de la tumeur aux fins d’examen anatomopatholo-
gique est une phase indispensable au diagnostic de cancer. Les moyens pour y
parvenir vont de la biopsie simple à la pince jusqu’à l’intervention chirurgicale
sous anesthésie générale en fonction du site tumoral et de son accessibilité.
La réalisation préalable d’un examen cytologique après ponction-aspiration intra-
tumorale à l’aide d’une aiguille fine a une grande valeur d’orientation quand le
résultat en est positif. Cependant, un résultat négatif n’a pas de valeur formelle
et un résultat positif ne dispense en aucun cas du diagnostic de certitude apporté
exclusivement par l’analyse anatomopathologique d’un fragment tissulaire.
La biopsie ou la ponction à l’aiguille ont été autrefois accusées d’être responsa-
bles d’une aggravation de l’évolutivité tumorale voire d’en favoriser la dissémi-
nation. Il est évident qu’il n’en est rien à la condition bien sûr qu’un traitement
soit mis en œuvre dès le diagnostic acquis. Il faut en outre rappeler que rien
n’est plus préjudiciable au patient qu’un retard diagnostique qui peut devenir
important si le seul geste diagnostique proposé est vulnérant comme par exem-
ple une exérèse chirurgicale.

4◗
04_Chap1 Page 5 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRINCIPES GÉNÉRAUX DE DIAGNOSTIC ET D’ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE DES CANCERS 1

◗ Imagerie en oncologie
Le développement des techniques modernes d’imagerie a permis une amélio-
ration considérable de la détection des volumes tumoraux dans les organes pro-
fonds notamment abdominothoraciques ou cérébraux. Cependant, aucun
examen d’imagerie ne permet autre chose que l’interprétation d’images dont
aucune ne dispense d’un examen anatomopathologique avant d’affirmer la pré-
sence d’un cancer.
Toutefois, quand le diagnostic de nature est acquis et uniquement dans ce cas,
l’imagerie joue alors un rôle capital dans la définition de l’extension tumorale
locale, régionale et métastatique, les anomalies retrouvées n’ayant pas besoin
le plus souvent d’être biopsiées pour être alors considérées comme
néoplasiques : lacunes osseuses ou hépatiques, images rondes pulmonaires,
adénopathies lymphographiques ou tomodensitométriques, etc.
En revanche, la survenue d’une anomalie iconographique unique lors du suivi
d’un patient antérieurement traité pour cancer ne doit pas déboucher systéma-
tiquement sur le diagnostic a priori de fait nouveau tumoral et mérite une
preuve anatomopathologique.
D’ailleurs, les techniques d’abord biopsiques ou cytologiques se conjuguent de
plus en plus souvent avec l’imagerie (scanner, échographie, IRM) pour la réali-
sation de prélèvements guidés d’organes profonds dispensant, tout au moins
lors de la phase diagnostique, d’un abord chirurgical.
La performance des différentes techniques d’imagerie est différente suivant la
zone explorée :
– la tomodensitométrie (fig. 1.1) ou scanner constitue l’exploration de
choix de l’encéphale, du thorax et de la région lombo-aortique
ganglionnaire ;
– l’IRM est particulièrement performante pour l’ensemble du système ner-
veux central (fig. 1.2), ainsi que pour les parties molles musculaires et
les régions latéropelviennes ;
– l’échographie est utilisée en première intention dans l’exploration hépa-
tique et abdominopelvienne viscérale ;
– les scintigraphies sont essentielles à l’exploration du squelette à la recher-
che de métastases osseuses ou de la thyroïde à la recherche de troubles
de la fixation de l’iode radioactif. Plus récemment les tomographies par
émission de positons (TEP) ont amélioré la spécificité des scintigraphies
en utilisant du glucose marqué au fluor radioactif.

➤ Fig. 1.1. Coupe tomodensitométrique passant par l’oropharynx (aspect normal). ➤


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


5◗
04_Chap1 Page 6 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 1.2. IRM de l’extrémité céphalique, coupe sagittale (épaississement pathologique du toit et de la
face postérieure du cavum). ➤

◗ CLASSIFICATIONS CLINIQUES DES TUMEURS


La nécessité depuis longtemps perçue d’une expression universellement parta-
gée des situations cliniques et de leurs conséquences pronostiques explique le
développement de classifications cliniques, anatomocliniques et anatomopatho-
logiques. Elles permettent un langage international commun indispensable à la
comparaison des résultats thérapeutiques.
La classification clinique internationale la plus répandue est le système TNM de
l’Union internationale contre le cancer (UICC) :
– T, pour la tumeur primitive ;
– N, pour les adénopathies (nodes) ;
– M, pour les métastases.
Il s’agit d’une classification essentiellement clinique, adaptée aux contraintes
anatomiques topographiques de chaque localisation tumorale.

◗ Catégories T
Deux éléments sont pris en compte pour exprimer dans la classification TNM la
présentation clinique de la tumeur primitive : son extension locale, en particulier
aux structures adjacentes, et sa taille exprimée en centimètres. Ainsi, on décrit
schématiquement des tumeurs classées :
– T0 : il n’a pas été possible de mettre en évidence de formation tumorale
au niveau de l’organe examiné ;
– Tis (in situ) : existence d’un carcinome intraépithélial ou in situ, ce qui
constitue en fait une définition plus microscopique que clinique ;
– T1 : lésion tumorale maligne limitée, mobile, le plus souvent superficielle,
n’altérant pas la fonction de l’organe en cause et le plus souvent infé-
rieure à 2 ou 3 cm de diamètre, sauf circonstances anatomiques parti-
culièrement exiguës (larynx, par exemple) ;
– T2 : lésion localement étendue ne franchissant cependant pas les limites
de la zone anatomique prise pour référence et donc conservant une
mobilité par rapport aux structures adjacentes ; souvent comprise entre
2-3 et 4-5 cm ;

6◗
04_Chap1 Page 7 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRINCIPES GÉNÉRAUX DE DIAGNOSTIC ET D’ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE DES CANCERS 1

– T3 : lésion sortie de la zone anatomique initiale avec fixation aux organes


voisins tels que l’os, le cartilage, les muscles ou les vaisseaux ; en règle
générale, supérieure à 5 cm de diamètre ;
– T4 : tumeur envahissant massivement les structures adjacentes avec
création de communications tumorales entre organes voisins (fistules
vésicovaginale, trachéobronchique, par exemple) ou entraînant une ulcé-
ration tumorale des plans cutanés (sein). Il s’y associe souvent une des-
truction des organes de soutien tels que l’os ou le cartilage.

◗ Catégories N
L’évaluation clinique et/ou radiologique de l’extension métastatique ganglion-
naire est une étape majeure de l’appréciation du volume tumoral et du pronos-
tic. Une des difficultés repose dans la diversité des aires ganglionnaires
susceptibles d’être concernées et donc dans l’expression codée de leur
envahissement :
– N0 : pas d’adénopathie palpable ou décelable ;
– N1 : adénopathie palpable ou décelable unique, mobile et de petit
volume, en règle moins de 2 à 3 cm ;
– N2 : adénopathie(s) mobile(s) dont la taille est comprise entre 3 et 5 cm
et donc très probablement métastatique ; la ou les anomalies ganglion-
naires peuvent être uni- ou bilatérales ;
– N3 : adénopathie fixée aux structures profondes (vaisseaux, muscles, os)
ou ayant un diamètre supérieur à 6 cm ; dans la plupart des cas, la taille
ganglionnaire est l’élément essentiel.
L’examen anatomopathologique des prélèvements ou évidements ganglionnai-
res chirurgicaux permet de classer les ganglions en N+ ou N– selon qu’ils sont
envahis ou pas, et R+ ou R– selon que la capsule ganglionnaire est franchie ou
non. L’existence d’emboles vasculaires est considérée comme ayant la même
signification qu’une rupture capsulaire.

◗ Catégories M
La classification TNM ne prend pas en compte le type et le lieu de l’extension
métastatique mais uniquement son absence ou sa présence, dans la mesure
où cette précision comporte une connotation pronostique fondamentale à elle
seule. Il persiste, en fonction des pathologies concernées, une ambiguïté quant
aux moyens mis en œuvre pour déceler d’éventuelles métastases dont la fré-
quence de constatation peut dépendre de l’ampleur des explorations réalisées.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Il est cependant possible de proposer une sous-classification comme suit :


– M0 : pas d’évidence de métastases ;
– M1 : métastase unique limitée à un seul organe ;
– M2 : métastases multiples confinées à un seul organe ou région anato-
mique avec conséquences fonctionnelles minimes ;
– M3 : envahissement métastatique de plusieurs organes avec conséquen-
ces fonctionnelles modérées ;
– M4 : envahissement de plusieurs organes avec retentissement fonction-
nel sévère ;
– M× : explorations à la recherche de métastases non réalisées ;
– M+ : métastases confirmées par un examen anatomopathologique.
Enfin, il est possible d’affecter à la lettre M un indice anatomique (Mp pour
poumon, Mb pour os…).

7◗
04_Chap1 Page 8 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Stades
L’utilisation d’une classification comme celle présentée précédemment permet
de regrouper les présentations cliniques en fonction de leur curabilité potentielle
et des grandes orientations thérapeutiques qui y correspondent :
– stade I : T1 N0 M0 ; tumeur limitée à l’organe initial, de petit volume
accessible à un traitement local avec éventuellement traitement régional
de principe permettant la guérison dans 70 à 90 % des cas ;
– stade II : T2 et/ou N1 M0 ; tumeur localement étendue pouvant toujours
bénéficier d’un traitement locorégional complet et efficace mais compor-
tant un risque d’échec métastatique faisant que les chances de guérison
définitive sont voisines de 50 % ;
– stade III : T3 et/ou N2 M0 ; tumeur locorégionalement avancée, étendue
aux organes de voisinage dont le contrôle local n’est pas systématique-
ment acquis ; par ailleurs, risque élevé de métastases, l’ensemble
conduisant à une perspective de guérison de l’ordre de 20 % ;
– stade IV : T4 et/ou N3 et/ou M+ ; cumule un contrôle local très aléatoire
et/ou la présence de métastases, ce qui ne permet d’espérer qu’une
guérison tout à fait exceptionnelle dans la plupart des formes tumorales.

◗ Classification postopératoire
Pour tenir compte de l’apport des données postopératoires et anatomopatholo-
giques, la classification TNM clinique peut être complétée par l’expression stan-
dardisée des constats chirurgicaux et/ou microscopiques. On parle alors de
pTNM qui résume parfois le TNM comme, par exemple, dans les cancers de
l’ovaire.
Par ailleurs, le TNM (ou le pTNM) peut être utilisé après traitement pour expri-
mer l’existence ou non d’un résidu tumoral sous la forme suivante :
– R× : tumeur résiduelle non évaluable ;
– R0 : pas de tumeur résiduelle ;
– R1 : tumeur résiduelle microscopique ;
– R2 : tumeur résiduelle macroscopique.

◗ CLASSIFICATIONS MORPHOLOGIQUES DES TUMEURS


Au-delà des classifications cliniques, l’analyse anatomopathologique des
tumeurs utilise également des classifications pour exprimer les éléments mor-
phologiques susceptibles d’aider à la caractérisation tumorale et à la prévision
pronostique.
Tout examen anatomopathologique d’une pièce d’exérèse débute par une des-
cription macroscopique de la tumeur portant notamment sur ses dimensions,
son aspect, son contenu et éventuellement sur ses rapports avec les organes
de voisinage s’ils sont examinables.
Ensuite, la nature de la tumeur, son caractère infiltrant ou superficiel, la profon-
deur de son extension, la participation d’organes de voisinage, l’existence
d’emboles tumoraux intravasculaires, d’un engainement périnerveux, sont tous
des éléments importants reconnus à l’examen microscopique.
Il est habituel d’établir le grade tumoral en exprimant la différenciation relative
de la tumeur par rapport au tissu normal de référence. Ainsi, on retient :
– grade 1 : tumeur bien différenciée, comparable à l’organe normal de
référence et en règle générale d’évolutivité faible ;

8◗
04_Chap1 Page 9 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRINCIPES GÉNÉRAUX DE DIAGNOSTIC ET D’ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE DES CANCERS 1

– grade 2 : tumeur moyennement différenciée ;


– grade 3-4 : tumeur peu différenciée, parfois difficile à rattacher à un tissu
d’origine et généralement de forte évolutivité locale et métastatique.
L’analyse immunohistochimique complémentaire peut apporter des éléments
permettant de préciser la nature dans les situations où la seule observation mor-
phologique ne suffit pas à établir un diagnostic formel. Ces techniques sont
indispensables, par exemple, à la caractérisation des différentes formes de lym-
phomes malins non hodgkiniens, mais sont également fréquemment utilisées
lors de l’examen d’une localisation métastatique inaugurale pour orienter vers la
recherche de la maladie primitive.
Chaque fois que cela est possible, une classification double, clinique et anato-
mopathologique, doit être utilisée, permettant une intercomparaison correcte
entre les différents groupes de patients.

◗ MARQUEURS TUMORAUX CIRCULANTS


Leur utilisation dans le diagnostic précoce et a fortiori dans le dépistage systé-
matique des cancers n’est pas correcte dans la mesure où aucun des marqueurs
sériques connus à l’heure actuelle ne présente une spécificité et une sensibilité
suffisantes pour être réellement utile dans cette perspective.
Ainsi, de nombreux cancers, même avancés, ne s’accompagnent d’aucune élé-
vation des marqueurs et, à l’inverse, le taux de ces substances peut être élevé
dans le sérum d’un patient en raison de l’existence d’une pathologie non tumo-
rale, comme le tabagisme ou l’insuffisance hépatique éthylique pour l’ACE. Seul
le dosage systématique du PSA (antigène spécifique prostatique) peut préten-
dre, sans y parvenir complètement, à constituer un test de « dépistage » chez
l’homme de plus de 50 ans à la condition expresse qu’il ne dispense pas d’un
examen clinique (toucher rectal [TR]) et d’un diagnostic anatomopathologique
le cas échéant.
L’intérêt essentiel des marqueurs tumoraux sériques (tableau 1.II) réside en fait
dans l’aide éventuelle qu’ils apportent lors de l’évaluation de l’efficacité théra-
peutique ou lors du suivi après traitement, quand ils sont initialement à des taux
anormalement élevés.

Tableau 1.II. Recommandations d’utilisation systématique des moyens de diagnostic précoce


Marqueur tumoral Exemple de tumeur Situation non tumorale avec
élévation possible du marqueur
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Hormones
Gonadotrophine chorionique, Choriocarcinome placentaire, Grossesse
sous-unité β (β-HCG) tumeurs gonadiques
Calcitonine Carcinome médullaire de la thyroïde
Catécholamines et leurs Phéochromocytome
métabolites
Antigènes oncofœtaux
α-fœtoprotéine (AFP) Carcinome hépatocellulaire, tumeurs Cirrhose hépatique, hépatite toxique ou
gonadiques infectieuse
Antigène carcino-embryonnaire Adénocarcinomes du sein, du côlon, Pancréatite, colopathie inflammatoire,
(ACE) du pancréas, de l’ovaire cirrhose hépatite, tabagisme


9◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Suite du tableau 1.II. ➤


Marqueur tumoral Exemple de tumeur Situation non tumorale avec
élévation possible du marqueur
Isoenzymes
Phosphatases acides prostatiques Adénocarcinome prostatique Adénome prostatique, prostatite
Neuron Specific Enolase (NSE) Carcinomes pulmonaires à petites
cellules, neuroblastomes
Protéines spécifiques
Antigène prostatique spécifique Adénocarcinome prostatique Prostatite, adénome prostatique
(PSA)
Immunoglobuline monoclonale Myélome multiple Gammapathie monoclonale isolée
CA 15-3 Adénocarcinome mammaire
CA 125 Adénocarcinome ovarien Grossesse, péritonite
CA 19-9 Adénocarcinome pancréatique, Pancréatite, colite ulcérative
colique

Points clés
• Le diagnostic d’une affection maligne nécessite une preuve anatomopathologique.
• Le diagnostic individuel précoce a une influence majeure sur le pronostic global,
améliorant les possibilités de contrôle local et diminuant le risque de métastases
à distance.
• Le dépistage des cancers n’est envisageable en pratique que pour les maladies
fréquentes bénéficiant par ailleurs d’un traitement régulièrement efficace pour les
situations tumorales diagnostiquées de la sorte.
• Le diagnostic des cancers a considérablement bénéficié des progrès de l’imagerie
moderne, notamment pour ce qui est du bilan d’extension préalable à tout
traitement.
• Les classifications cliniques des cancers, notamment la classification TNM, ont pour
but de faciliter la comparaison des résultats thérapeutiques obtenus pour des
groupes homogènes de tumeurs.
• Les marqueurs tumoraux n’ont pas d’intérêt dans le dépistage ou le diagnostic
précoce ; ils peuvent en revanche être utiles lors de l’évaluation de l’efficacité thé-
rapeutique et, dans certains cas, lors du suivi après traitement.


10 ◗
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Principes généraux
de traitement 2
des cancers1
N. DALY-SCHVEITZER

◗ DONNÉES GÉNÉRALES
◗ STRATÉGIE DÉCISIONNELLE

La qualité de l’évaluation tumorale initiale et l’opportunité du premier traitement


sont décisives pour l’avenir du patient. En fait, il existe peu de situations en
médecine où la première décision influence aussi fortement le pronostic vital à
terme. En effet, d’une part, les possibilités de corriger une démarche initiale mal
adaptée sont faibles, et, d’autre part — et surtout —, les chances de guérison
d’une récidive ou d’une métastase par un traitement de deuxième intention sont
considérablement inférieures aux performances d’un traitement initial bien
adapté et correctement réalisé.

◗ DONNÉES GÉNÉRALES Le principe fondamental de toute thérapeutique est de guérir le patient avec le
minimum possible de séquelles fonctionnelles ou anatomiques, immédiates et
à long terme. Plusieurs facteurs concourent au choix thérapeutique initial :
– le volume tumoral ;
– le site lésionnel ;
– l’évolutivité tumorale ;
– l’histoire naturelle connue de la pathologie tumorale en cause ;
– le risque métastatique ;
– la mortalité et la morbidité, aiguës et chroniques, du traitement ;
– les taux de guérison envisageables avec les traitements disponibles ;
– les effets secondaires immédiats et à long terme desdits traitements ;
– l’état clinique général du patient au regard de la faisabilité thérapeutique.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

De façon générale, les traitements conservateurs ne peuvent pas être proposés


pour les tumeurs volumineuses. Ils ne sont possibles que pour les tumeurs de
petite taille et font appel le plus souvent à des associations thérapeutiques,
radiochirurgicales en particulier (sein, ORL, rectum, par exemple). Par ailleurs, le
choix entre les différentes options thérapeutiques repose sur l’expérience per-
sonnelle ou — mieux — partagée mais surtout sur les résultats publiés, fruits de
la recherche clinique indispensable au progrès cancérologique.
Cependant, la faisabilité de la stratégie thérapeutique optimale peut se heurter
à un certain nombre d’obstacles propres au patient, au premier rang desquels
se situe l’état général global. Son évaluation est primordiale et, compte tenu de
la multiplicité des éléments cliniques qui le constituent, il en a été proposé une
expression standardisée sous forme d’échelles dites de performance. La plus

1. Cf. item n° 141, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson, 2002.

11 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ancienne et la plus détaillée est celle de Karnofsky publiée en 1948


(tableau 2.I). Sa relative complexité rend son utilisation quotidienne malaisée et
il lui est souvent préféré l’échelle de performance proposée plus récemment
par l’OMS (tableau 2.II).

Tableau 2.I. Échelle de performance de Karnofsky


Activité normale sans 100 État clinique normal, sans plaintes, pas de signes
nécessité de soins de maladie
particuliers
90 Activité normale possible, mais avec certains signes
ou symptômes de maladie
80 Activité normale possible mais avec effort, présence
de signes ou symptômes de maladie
Incapacité au travail, vie 70 Autonomie pour les besoins personnels ; incapacité
normale à domicile ; à une activité normale y compris professionnelle
aide variable nécessaire
60 Nécessité d’une assistance occasionnelle mais
pour la plupart des
autonomie pour la plupart des besoins personnels
besoins personnels
50 Nécessité d’une assistance importante et de soins
médicaux fréquents
Incapacité aux besoins 40 Incapacité, nécessité d’une assistance et de soins
personnels, nécessité spéciaux
d’une hospitalisation
30 Incapacité sévère, hospitalisation nécessaire, décès
ou équivalent, maladie
non imminent
susceptible de progresser
rapidement 20 Très grande incapacité, hospitalisation indispensable
10 Période terminale, décès à brève échéance
0 Décès

Tableau 2.II. Échelle de performance de l’OMS


État Définition
0 Activité normale
1 Patient symptomatique mais ambulatoire
2 Alitement < 50 % du temps
3 Alitement > 50 % du temps
4 Alitement permanent

◗ STRATÉGIE DÉCISIONNELLE
◗ Décision pluridisciplinaire
En fonction des données précédentes, une stratégie thérapeutique sera élabo-
rée avant d’être proposée au patient. Cette phase de réflexion préthérapeutique
est obligatoirement pluridisciplinaire et concertée entre les différents acteurs de
l’évaluation diagnostique, de la réalisation thérapeutique et de la prise en charge
globale du patient. Cette concertation rassemble au moins :
– au titre de l’évaluation diagnostique : anatomopathologiste, imagier, biolo-
giste ;

12 ◗
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PRINCIPES GÉNÉRAUX DE TRAITEMENT DES CANCERS 2

– pour la réalisation thérapeutique : chirurgien, radiothérapeute, chimiothéra-


peute ;
– dans le souci d’une prise en charge globale : infirmiers, psychologues, tra-
vailleurs sociaux…
Ce groupe de professionnels, sans l’existence opérationnelle duquel il ne peut
y avoir d’orientation stratégique sûre et adaptée, se réunit régulièrement sous la
forme aujourd’hui consacrée par l’usage d’une Unité de concertation pluridisci-
plinaire oncologique (UCPO) avec pour mission de retenir pour chaque patient
une orientation partagée et adaptée. Chaque compte rendu, communiqué au
médecin traitant, figure au dossier médical du patient et constitue un temps clef
de la prise en charge. L’orientation initialement retenue est bien entendu sus-
ceptible d’être revue en cas de fait nouveau, toujours selon la même procédure.

◗ Principes de l’association thérapeutique


La plupart des cancers relèvent d’une approche combinée faisant appel à plu-
sieurs traitements cancérologiques spécifiques, essentiellement la chirurgie, la
radiothérapie et la chimiothérapie.
Cette association thérapeutique a pour but d’utiliser les avantages de chacun de
ces traitements en fonction de l’extension de la maladie (fig. 2.1) et du but
thérapeutique global poursuivi.
Dans les options à visée curative :
– la chirurgie s’adresse préférentiellement aux maladies locales dont l’exé-
rèse est possible et comporte souvent dans le même temps un inven-
taire diagnostique (évidemment ganglionnaire, par exemple) ;
– la radiothérapie apporte le maximum d’efficacité dans le traitement de la
maladie régionale microscopique qu’elle soit avérée (irradiation postopé-
ratoire) ou qu’elle soit éventuelle (irradiation de principe) ;
– la chimiothérapie est le seul traitement adapté à la maladie métastatique
qu’elle soit potentielle (chimiothérapie adjuvante) ou patente (chimio-
thérapie de nécessité).

➤ Fig. 2.1. Schéma d’indications et performances respectives (taux de guérison) de la chirurgie, de la radio-
thérapie et de la chimiothérapie en fonction de l’extension des cancers au moment du traitement initial. ➤

STADE I
T1-T2, NO
100% STADE II
T1-T2, NO
CHIRURGIE
STADE III
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

T1-T2, N2-3
T3 N1-2-3
50%
STADE IV
T4 / M1

RADIOTHÉRAPIE

CHIMIOTHÉRAPIE

Les diverses combinaisons possibles, chaque fois adaptées à la situation anato-


moclinique donnée et au patient qui la présente, ont cependant pour effet
d’entraîner une sommation, parfois une potentialisation, des effets secondaires
liés à chacun des traitements. Il est donc habituel que chacun des traitements
associés soit mis en œuvre selon une procédure et/ou une posologie qui tient

13 ◗
04_Chap2 Page 14 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

compte de sa prescription associée à une autre thérapeutique. C’est ainsi que,


par exemple, lors d’une association radiochirurgicale, la chirurgie d’exérèse n’a
pas la nécessité d’être étendue systématiquement aux régions péritumorales
macroscopiquement normales, la technique et la posologie de la radiothérapie
postopératoire incluant ces régions étant choisies en tenant compte de la chi-
rurgie préalable.
Ceci explique que l’association thérapeutique retenue fasse l’objet d’une propo-
sition pluridisciplinaire initiale globale, fondamentalement différente d’une addi-
tion thérapeutique successive dans laquelle chaque traitement tente de
compenser les insuffisances et/ou les échecs du précédent, le plus souvent
sans succès.
Enfin, il est capital de rappeler que le choix thérapeutique initial est déterminant,
les possibilités de rattraper une orientation initiale mal adaptée étant très rédui-
tes. Ceci souligne l’importance décisive de l’évaluation préthérapeutique initiale
et du choix thérapeutique concerté qui en découle.

◗ Information du patient
L’information du patient, au-delà d’être une obligation éthique et légale, est une
nécessité opérationnelle dans la mesure où il est indispensable que le patient
adhère à la proposition thérapeutique qui lui est faite en connaissance de cause.
Plusieurs éléments doivent être soulignés :
– l’interlocuteur doit être le patient lui-même, accompagné ou non de ses
proches ; une information orientée quasi exclusivement vers la famille,
excluant peu ou prou le patient, est le gage de difficultés relationnelles
à venir ;
– l’information doit être répétée, le patient n’étant pas en mesure de tout
assimiler notamment lors des toutes premières phases où son anxiété
bien naturelle l’empêche d’être complètement attentif et réceptif ;
– l’information doit être délivrée de façon homogène par l’ensemble des
interlocuteurs qu’est susceptible de rencontrer (et de questionner) le
patient ; il s’agit là d’un point important, difficile à obtenir en toutes cir-
constances, largement facilité par les réunions d’unité ou de service au
cours desquelles les membres de l’équipe soignante atteignent le même
niveau d’information. Il est vivement conseillé de mentionner dans le
dossier médical les éléments d’information qui ont été communiqués au
patient ;
– l’information écrite, sous formes diverses (brochures, livrets, feuille
d’information…) est utile mais ne dispense pas de la relation verbale
informative ;
– l’inclusion du patient dans une démarche de recherche clinique avec ou
sans bénéfice direct oblige à l’obtention, préalable à l’inclusion, du
consentement écrit du patient.
Récemment deux dispositions sont venues compléter les éléments précédents :
– la preuve de la réalité de cette information incombe désormais au méde-
cin ainsi qu’à l’établissement de soins le cas échéant, et non plus au
patient comme auparavant qui devait apporter la preuve (difficile) qu’il
n’avait pas été informé complètement ou correctement ;
– la loi du 4 mars 2002 permet à tout patient d’avoir un accès direct à son
dossier médical, de le consulter en présence ou non d’un médecin et
d’en demander une copie.
Ces derniers points ne viennent qu’officialiser une évolution déjà engagée visant
à équilibrer la relation patient-soignant sans pour autant exonérer l’équipe soi-
gnante de ses devoirs d’écoute, de soutien et d’accompagnement.

14 ◗
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PRINCIPES GÉNÉRAUX DE TRAITEMENT DES CANCERS 2

◗ Réseaux de soins
La prise en charge des patients porteurs de cancer concerne habituellement de
multiples intervenants tant dans la phase diagnostique que thérapeutique, mais
aussi lors du suivi. Exceptionnellement ces intervenants peuvent être tous réunis
dans le même lieu mais, habituellement, ils sont répartis dans le tissu sanitaire
qui entoure le domicile du patient.
Dans le souci de préserver une qualité homogène de prise en charge quels que
soient le lieu de domicile du patient et son type d’entrée dans le système sani-
taire, des réseaux de soins cancérologiques ont été développés au cours des
dernières années.
Ces réseaux, le plus souvent de taille régionale, sont construits autour de centres
référents. Dans chaque bassin de population, une concertation pluridisciplinaire
sous la forme d’une UCPO régulière est assurée par les différents acteurs quels
que soient leurs lieux ou modes d’exercice. Ces réseaux supposent, pour être
complètement efficients, de disposer de référentiels partagés de prise en charge
et d’un dossier médical minimum commun.
Ils sont déjà, et seront encore plus dans l’avenir, un levier puissant de l’amélio-
ration continue des soins initiaux mais aussi du suivi des patients.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


15 ◗
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Tumeurs des voies


aérodigestives
supérieures1
3
N. DALY-SCHVEITZER

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ◗ PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES GÉNÉRAUX


◗ ANATOMIE DES CANCERS DES VADS
◗ ANATOMIE PATHOLOGIQUE ◗ MOYENS THÉRAPEUTIQUES
◗ HISTOIRE NATURELLE DES CARCINOMES ◗ CAVITÉ BUCCALE
ÉPIDERMOÏDES DES VADS ◗ HYPOPHARYNX
◗ PRINCIPES COMMUNS DU DIAGNOSTIC ◗ LARYNX
CLINIQUE DES CARCINOMES ÉPIDERMOÏDES ◗ NASOPHARYNX
DES VADS ◗ SINUS DE LA FACE ET FOSSES NASALES
◗ GLANDES SALIVAIRES

Les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) constituent un groupe


anatomiquement hétérogène d’affections tumorales développées essentielle-
ment aux dépens de la muqueuse de recouvrement des conduits aériens et
digestifs et de leurs orifices anatomiques, jusqu’au défilé cervicothoracique.
Leur situation sur les axes fonctionnels majeurs de la respiration et de l’alimen-
tation, leur topographie cervicofaciale au niveau de zones découvertes et à proxi-
mité de nombreux organes des sens, en font des pathologies richement
symptomatiques dont le traitement entraînera fréquemment des conséquences
cosmétiques et fonctionnelles importantes. Enfin, les circonstances favorisantes,
dominées par le tabagisme et l’alcoolisme, expliquent que leur diagnostic soit
fréquemment tardif malgré leur traduction symptomatique souvent précoce.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE Les cancers des VADS sont responsables en France d’environ 9 000 décès
annuels et représentent environ 10 % des cancers chez l’homme et moins de
2 % chez la femme, le sex-ratio étant de l’ordre de 30/1 en faveur des hom-
mes. Il est à noter que le développement des habitudes toxiques
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

alcoolo-tabagiques chez les femmes devrait progressivement corriger cet écart.


Il s’agit là en effet des circonstances favorisantes majeures dans notre pays,
l’intoxication double ayant des effets de potentialisation respective forte. Il est
souvent associé à cette intoxication une mauvaise hygiène bucco-dentaire res-
ponsable d’un état inflammatoire chronique et de difficultés nutritionnelles
aggravées par l’éthylisme.
Pour certaines formes tumorales, les données épidémiologiques sont très
différentes :
– infection par le virus d’Epstein-Barr et cancers « endémiques » du
rhino-pharynx ;
– mastication du bétel et cancers de la muqueuse buccale en Inde ;

1. Item n° 145. Tumeurs de la cavité buccale et des voies aérodigestives supérieures.



17 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– exposition aux poussières de bois et adénocarcinomes ethmoïdaux chez


les professionnels exposés ;
– syndrome de Plummer-Vinson et cancers de la région rétrocrico-aryténoï-
dienne chez la femme ;
– enfin, absence de facteurs favorisants connus pour les tumeurs des glan-
des salivaires ou les sinus de la face autres que l’ethmoïde.
Ce sont des tumeurs graves du fait de la conjonction de plusieurs facteurs :
– agressivité propre de ces cancers qui sont rapidement invasifs et très
lymphophiles ;
– importance fonctionnelle des régions anatomiques dans lesquelles ils se
développent, expliquant le caractère souvent mutilant des chirurgies
radicales ;
– fréquence des cancers multiples, expliquée par le rôle carcinogène de
l’alcool et du tabac exercé sur l’ensemble de la muqueuse des VADS
mais aussi sur celle de l’œsophage et des bronches ;
– retentissement de l’intoxication alcoolo-tabagique sur l’ensemble de
l’organisme, en particulier par le biais de la dénutrition et de l’atteinte des
fonctions hépatiques, respiratoires et vasculaires.

◗ ANATOMIE L’anatomie des VADS est particulièrement complexe en grande partie parce que
sont concentrées dans la zone la plus étroite de l’organisme l’ensemble des
voies de communication entre la tête et le reste du corps. Ainsi, les structures
fonctionnelles sont souvent impactées les unes dans les autres, comme les
conduits pharyngo-œsophagien et laryngotrachéaux.
Le réseau lymphatique, satellite du système veineux, est dans l’ensemble parti-
culièrement dense bien qu’il existe des différences nettes entre les sites anato-
miques (fig. 3.1). Ainsi, le versant digestif, pharyngé, possède un drainage
lymphatique important, richement anastomotique, faisant de l’extension gan-
glionnaire des tumeurs du rhino-, oro- ou hypopharynx une éventualité très fré-
quente. En revanche, le versant aérien (larynx, sinus de la face, cavité nasale)
est moins abondamment vascularisé, expliquant une faiblesse relative du risque
ganglionnaire par rapport aux tumeurs pharyngées.
Par ailleurs, le réseau lymphatique est largement en communication avec le
réseau sanguin veineux, expliquant qu’une extension ganglionnaire constitue en
outre un index de risque métastatique hématogène.

◗ ANATOMIE PATHOLOGIQUE La plupart des cancers des VADS sont développés à partir de l’épithélium mal-
pighien de surface, expliquant que la forme histologique tumorale la plus fré-
quente soit le carcinome épidermoïde plus ou moins différencié, allant de la
forme très orthoplasique dite spinocellulaire ou verruqueuse, aux types indiffé-
renciés plus souvent de topographie oro- ou rhinopharyngée.
Les tumeurs épithéliales non épidermoïdes (10 %) représentent un groupe très
hétérogène, dans lequel on peut individualiser les carcinomes du nasopharynx
(ou cavum) ou les adénocarcinomes des sinus de la face ou des glandes sali-
vaires principales ou accessoires.
Les VADS peuvent donner naissance également à des tumeurs non épithéliales
comme les lymphomes malins, le plus souvent non hodgkiniens, se développant

18 ◗
05_Chap3 Page 19 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

➤ Fig. 3.1. Anatomie schématique des aires ganglionnaires cervicales. ➤

Groupe mastoïdien Groupe prétragien

Ganglion
Chaîne spinale sous-digastrique

Groupe
sous-mentonnier
Chaîne sus-claviculaire
Groupe
sous-maxillaire

Chaîne
jugulocarotidienne

au niveau des amas lymphoïdes les plus importants (oropharynx, rhinopharynx).


Enfin, les muqueuses notamment des fosses nasales peuvent être le siège d’un
mélanome malin, les structures osseuses d’ostéo- ou de chondrosarcomes, les
parties molles de la face et du cou de fibro- ou d’histiocytofibrosarcomes.

◗ HISTOIRE
DES VADS
NATURELLE DES CARCINOMES ÉPIDERMOÏDES

◗ Tumeur primitive
La lésion initiale est muqueuse superficielle, souvent érythémateuse, discrète-
ment surélevée et à ce stade peu symptomatique. Ensuite, surviennent l’exten-
sion en surface et surtout l’infiltration en profondeur dont l’importance sera
variable en fonction des sites anatomiques. En règle, l’infiltration musculaire est
précoce, suivant les faisceaux, ainsi que l’extension périneurale et endovasculaire.
La tumeur peut atteindre le périoste osseux puis l’os médullaire, profitant en
général de toutes les zones de faiblesse anatomique, nombreuses dans la
région : trous de la base du crâne, canal dentaire, etc.
Ceci oblige chaque fois à ne pas limiter l’exploration au seul site initial et ce
d’autant plus qu’il peut exister plusieurs tumeurs simultanées au niveau de
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

l’ensemble de ces muqueuses soumises aux mêmes risques toxiques.

◗ Extension ganglionnaire
L’extension ganglionnaire est habituellement logique, les tumeurs latéralisées
ayant un drainage homolatéral préférentiel. Cependant les nombreuses anasto-
moses lymphatiques et la situation souvent paramédiane des tumeurs primitives
expliquent la fréquence des atteintes ganglionnaires bilatérales. Ce risque de
bilatéralité est bien entendu d’autant plus élevé que l’extension homolatérale
est importante (tableau 3.I). En règle générale, les tumeurs peu différenciées
donnent plus souvent des adénopathies que les formes de faible grade.
Il est par ailleurs possible que l’extension ganglionnaire résume la présentation
clinique, la maladie initiale muqueuse n’étant jamais mise en évidence, soit qu’elle
soit restée infraclinique, soit qu’elle ait été abrasée mécaniquement ou détruite

19 ◗
05_Chap3 Page 20 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

par un phénomène immunologique local. Cette situation d’adénopathie(s) cervi-


cale(s) métastatique(s) d’un carcinome épidermoïde de siège initial non retrouvé
représente globalement 15 à 20 % des présentations cliniques initiales.

Tableau 3.I. Incidence des métastases ganglionnaires en fonction du site


primitif
Pourcentage de positivité
Pourcentage
ganglionnaire en l’absence
Site de ganglions palpables
d’adénopathies palpables lors
lors du diagnostic
du diagnostic
Plancher buccal 30 à 60 40 à 50
Langue mobile 30 à 60 25 à 0
Cavum 90 –
Loge 50 à 80 25
amygdalienne
Base de langue 50 à 70 70
Parois 30 à 50 35
pharyngées
Larynx 50 à 70 35
sus-glottique

Les carcinomes épidermoïdes des VADS sont lymphophiles, en particulier ceux


développés sur les muqueuses à fonction digestive préférentielle (pharynx, par
exemple). Il existe des éléments anatomiques précis permettant de rattacher une
zone ganglionnaire à un site d’origine, en remarquant que l’existence d’une métas-
tase ganglionnaire volumineuse, comme d’ailleurs la chirurgie et/ou l’irradiation,
est susceptible de perturber la circulation lymphatique normale, pouvant conduire
à l’apparition de localisations ganglionnaires hors des sites habituels de drainage.

◗ Extension métastatique viscérale


Le risque métastatique viscéral a été pendant longtemps sous-estimé, en grande
partie masqué par l’évolution plus ou moins bien contrôlée par le traitement de
la maladie primitive cervicale. En fait, soit par voie veineuse directe soit par
l’intermédiaire des multiples communications entre le réseau lymphatique et
veineux, le risque métastatique est important, voisin en moyenne de 30 %. Le
volume de la tumeur primitive, son grade et surtout l’importance de l’extension
ganglionnaire constituent des éléments prédictifs majeurs de ce risque.
Les localisations métastatiques sont essentiellement pulmonaires et osseuses,
dans une moindre mesure hépatiques et cérébrales.

◗ PRINCIPES COMMUNS DU DIAGNOSTIC CLINIQUE


DES CARCINOMES ÉPIDERMOÏDES DES VADS
◗ Circonstances de découverte
Elles varient en fonction de la topographie tumorale :
– cavité buccale : douleur (glossodynie) ou sensation de corps étranger
provoquée par une tuméfaction ou une petite ulcération saignant lors de
traumatismes mineurs ;

20 ◗
05_Chap3 Page 21 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

– oropharynx : douleurs souvent provoquées par la déglutition, irradiant fré-


quemment vers l’oreille (odynophagie) ;
– hypopharynx : gêne mécanique à la déglutition (dysphagie), d’abord
intermittente puis permanente, avec otalgie réflexe fréquente ;
– larynx : modification de la voix (dysphonie), dyspnée laryngée, crachats
sanglants.
Tous ces signes survenant chez un sujet de plus de 45 ans, alcoolo-tabagique,
doivent faire rechercher un cancer des VADS. En fait, ces signes sont souvent
d’apparition tardive ou sont négligés par le patient, ce qui explique que dans
environ un tiers des cas, c’est une tuméfaction cervicale correspondant à un
ganglion métastatique qui amène le patient à consulter.

◗ Examen clinique
L’examen ORL de base doit explorer soigneusement les étages successifs des
VADS :
– cavité buccale et oropharynx sont accessibles à l’inspection simple. Toute
anomalie doit être systématiquement palpée à la recherche des deux
caractéristiques essentielles de ces cancers que sont l’induration et le sai-
gnement au contact ;
– hypopharynx et larynx nécessitent un examen au miroir laryngé (laryngosco-
pie indirecte) avec ou sans anesthésie locale. On recherche une formation
exophytique, une ulcération, une déformation des structures normales ou
une diminution de la mobilité d’une corde vocale. Cet examen initial peut
être complété par une endoscopie directe au fauteuil en utilisant un endos-
cope souple améliorant la visualisation directe des différentes zones anato-
miques sans cependant la possibilité de biopsier d’éventuelles anomalies ;
– examen du cou : la palpation cervicale recherche avec soin des adéno-
pathies accessibles, qui sont présentes dans plus de la moitié des cas.
En cas d’anomalie clinique et/ou endoscopique, l’exploration doit être systéma-
tiquement complétée par une panendoscopie sous anesthésie générale. Cet
examen permet :
– de déterminer avec précision l’extension exacte et l’infiltration en profon-
deur d’une tumeur et de la biopsier aisément ;
– de s’assurer de l’absence d’un autre cancer simultané des VADS, de
l’œsophage, de la trachée ou des bronches.

◗ Exploration radiologique
Outre un cliché thoracique systématique, le bilan radiologique pourra faire appel à :
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– une orthopantomographie pour vérifier l’intégrité de la mandibule et sur-


tout évaluer l’état dentaire ;
– des tomographies du larynx de face ou une pharyngolaryngographie pour
étudier la filière pharyngolaryngée, examens aujourd’hui le plus souvent
remplacés par :
• une tomodensitométrie, particulièrement performante pour apprécier
l’extension en profondeur de certaines tumeurs, en particulier celles
développées au niveau du cavum ou des sinus de la face, ainsi que
l’éventuelle destruction osseuse ou cartilagineuse. Cette exploration
peut être également utilisée pour la recherche d’adénopathies cervi-
cales en particulier quand l’examen clinique est difficile pour des rai-
sons de morphotype,
• une exploration par IRM utile pour l’étude des parties molles notam-
ment au niveau du rhinopharynx et de la base du crâne.

21 ◗
05_Chap3 Page 22 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Au terme de cette évaluation, la tumeur est décrite selon les critères de la clas-
sification TNM, préalable indispensable à toute décision thérapeutique. Cette
classification est particulièrement complexe en raison de la multiplicité des sites
anatomiques concernés. Par ailleurs, elle ne dispense pas d’une description cli-
nique et endoscopique précise améliorée encore par un schéma lésionnel coté.
Toutefois, il existe une seule classification clinique concernant les ganglions cer-
vicaux quel que soit le site de la tumeur primitive (tableau 3.II et fig. 3.2).

Tableau 3.II. Classification clinique des ganglions cervicaux métastatiques


des cancers des VADS
N× Ganglions non évaluables
N0 Pas de ganglions palpables
N1 Ganglion unique, homolatéral à la lésion primitive, ne mesurant pas plus
de 3 cm de diamètre
N2 N2A Ganglion unique, homolatéral, de diamètre entre 3 et 6 cm
N2B Ganglions multiples, homolatéraux, ne dépassant pas 6 cm
N2C Ganglions multiples bilatéraux ou unique controlatéral, ne dépassant pas
6 cm
N3 Ganglion mesurant plus de 6 cm dans son grand diamètre

➤ Fig. 3.2. Schéma de la classification TNM des ganglions. ➤

N1 (< 3 cm) N2a (> 3 < 6 cm) N2b (< 6 cm) N2c (< 6 cm) N3 (> 6 cm)
Unique Unique Multiples Unique
homolatéral homolatéral homolatéraux controlatéral

◗ PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES GÉNÉRAUX


DES CANCERS DES VADS

◗ Bases du traitement
L’objectif prioritaire du traitement est d’obtenir un contrôle locorégional,
c’est-à-dire d’éviter la rechute au niveau de la tumeur primitive ou des chaînes
ganglionnaires cervicales. En effet, plus de 50 % des échecs thérapeutiques
sont dus à des récidives locorégionales, le reste se répartissant de façon à peu
près égale entre les métastases à distance et les deuxièmes cancers.
En raison de la grande lymphophilie des cancers des VADS, le traitement initial
fera pratiquement toujours appel au traitement de la tumeur primitive et des
ganglions, même si ceux-ci ne sont pas initialement cliniquement envahis.
Enfin, compte tenu du terrain particulier sur lequel se développent les carcino-
mes épidermoïdes des VADS, le plan thérapeutique doit impérativement tenir
compte des conditions générales imposées par le patient tant en terme d’état
clinique objectif que parfois au regard de son comportement.

22 ◗
05_Chap3 Page 23 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

◗ Chirurgie et radiothérapie
Ce sont les deux moyens thérapeutiques susceptibles de guérir un cancer des
VADS. La chimiothérapie est à l’heure actuelle testée comme adjuvant aux deux
moyens précédents sans qu’il soit encore possible d’affirmer qu’elle en améliore
sûrement les performances.
De façon schématique, la chirurgie a pour indication essentielle d’enlever la
maladie macroscopique visible, essentiellement locale, la radiothérapie ayant
pour rôle de traiter la maladie microscopique locorégionale, invisible initiale-
ment, mais source des récidives ultérieures. Il existe plusieurs exceptions à ce
schéma fondamental liées à des circonstances anatomiques ou évolutives par-
ticulières qui seront abordées dans les chapitres topographiques suivants.
Cependant, une zone anatomique particulière fait le plus souvent l’objet d’une
approche commune : les aires ganglionnaires cervicales. L’existence d’une adé-
nopathie métastatique cliniquement palpable, constitue le plus souvent une
indication d’évidement ganglionnaire chirurgical. Il existe alors deux techniques :
– l’évidement radical supprimant les fascias supérieurs et profonds, le mus-
cle sternocléidomastoïdien dans la région cervicale latérale, les veines
jugulaires interne et externe, le nerf spinal accessoire et la glande
sous-maxillaire. Les séquelles fonctionnelles cervicoscapulaires sont en
règle importantes ;
– l’évidement radical modifié appelé aussi fonctionnel regroupe une très
large variété de gestes qui ont en commun d’être moins importants que
le précédent. Le plus souvent le muscle sternocléidomastoïdien est
conservé ainsi qu’une jugulaire sur deux.
Pour ce qui est des tumeurs de la cavité buccale et de l’oropharynx, un évide-
ment sous-mento-sous-maxillo-sus-omohyoïdien, dit « triangulaire », permet
d’enlever la totalité des premiers relais ganglionnaires (fig. 3.3).

➤ Fig. 3.3. Schéma de l’évidement dit « triangulaire » du cou.➤

Muscle
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

omo-hyoïdien

Bord antérieur
du SCM

Si le volume de l’adénopathie peut commander le choix technique, l’utilisation


d’une irradiation externe associée permet le plus souvent de réaliser un geste
« fonctionnel » plutôt que systématiquement radical.
Le problème est beaucoup plus complexe quand l’examen clinique ne retrouve pas
d’adénopathies palpables suspectes. Plusieurs attitudes sont alors envisageables :
– l’abstention thérapeutique ganglionnaire, exposant à un risque ultérieur
de survenue d’une adénopathie clinique à partir des métastases infracli-
niques initiales non perceptibles. Ce risque peut être acceptable quand

23 ◗
05_Chap3 Page 24 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

il est au niveau maximum de 10 % (lèvre inférieure, par exemple), mais


devient insupportable quand il atteint 30 %, ce qui correspond au risque
moyen d’envahissement ganglionnaire microscopique quand l’évaluation
clinique est négative (N0) ;
– l’évidement chirurgical de principe est le moyen de vérifier l’existence ou non
de micrométastases. Si la tumeur primitive est une indication chirurgicale, sa
réalisation, au moins du même côté, est alors logique, permettant de modu-
ler l’irradiation associée. En revanche, sa réalisation isolée ou bilatérale sys-
tématique, grève la morbidité sans bénéfice thérapeutique automatique ;
– l’irradiation externe des parois cervicales permet en effet de contrôler
dans 90 % des cas les micrométastases ganglionnaires infracliniques à
condition qu’une dose de 50 Gy en cinq semaines et vingt-cinq séances
quotidiennes soit délivrée. Il est donc possible de proposer comme alter-
native à l’évidement systématique une irradiation de principe des parois
cervicales, en particulier quand le plan thérapeutique de la tumeur primi-
tive ne comporte pas le recours à la chirurgie.
Il n’est pour l’instant pas possible de situer avec certitude l’apport de la chimio-
thérapie par voie générale dans les principes thérapeutiques précédents, les résul-
tats des études contrôlées publiées à ce jour étant dans l’ensemble décevants.

◗ MOYENS THÉRAPEUTIQUES
◗ Chirurgie
Au niveau de la tumeur primitive, l’exérèse doit être complète, si possible avec
des marges de sécurité de plusieurs millimètres dans toutes les directions. Ceci
est relativement simple pour les tumeurs de petit volume, mais ne peut être
obtenu au niveau des tumeurs étendues qu’au prix d’importants délabrements
qui nécessitent une réparation.
Cette réparation fait appel essentiellement à des lambeaux myocutanés, c’est-à-dire
à des palettes de peau et de muscles découpées à la demande dans des territoires
sains. Ces lambeaux qui ont gardé leur vascularisation initiale, sont mobilisés pour
venir combler la perte de substance provenant de l’exérèse de la tumeur. Le plus
connu est le lambeau myocutané du grand pectoral. D’autres lambeaux peuvent
être utilisés : lambeaux dits « libres » avec nécessité de micro-anastomoses vascu-
laires, lambeaux purement cutanés moins fiables que les musculocutanés.
Au niveau de la cavité buccale, l’exérèse peut intéresser une partie de la langue
(glossectomie partielle), le plancher buccal et une partie de la mandibule (pel-
vimandibulectomie).
Au niveau de l’oropharynx, l’intervention la plus couramment réalisée est la buc-
copharyngectomie transmandibulaire, consistant à enlever l’angle de la mâchoire
pour réaliser des exérèses amygdaliennes ou basilinguales.
Au niveau pharyngolaryngé, on peut réaliser des laryngectomies ou des pharyn-
golaryngectomies, partielles ou totales. L’ablation en totalité du larynx se traduit
par le sacrifice de la voix et l’abouchement définitif de la trachée à la peau (tra-
chéostomie).
Sur le plan ganglionnaire, plusieurs types d’évidement peuvent être réalisés :
jugulocarotidien complet, ou sous-mento-maxillaire et sus-omohyoïdien, dit
« triangulaire », uni- ou bilatéral.

◗ Radiothérapie
La radiothérapie peut faire appel à la curiethérapie interstitielle, à l’irradiation
externe ou à l’association des deux.

24 ◗
05_Chap3 Page 25 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

La curiethérapie interstitielle est effectuée par la mise en place sous anesthésie


générale de fils ou de cavaliers d’iridium 192. Elle ne traite qu’un volume lésion-
nel limité, la proximité osseuse mandibulaire en constituant une contre-indica-
tion compte tenu du risque de radionécrose osseuse.
L’irradiation externe ou transcutanée consiste à délivrer une dose prophylactique
de 50 à 55 Gy en cinq à six semaines, en photons de haute énergie, sur toutes
les zones à risque, c’est-à-dire, en règle, sur un volume muqueux qui englobe
largement la tumeur primitive et surtout les aires ganglionnaires cervicales et
sus-claviculaires. Par la suite, des surimpressions seront réalisées sur les zones
initialement largement envahies. Elles peuvent se faire en photons, en électrons,
voire au moyen d’une application de curiethérapie et amèneront en règle la
dose totale aux alentours de 70 Gy en sept semaines.

◗ Chimiothérapie
Contrairement à la chirurgie ou à la radiothérapie qui peuvent être curatives à
elles seules, la chimiothérapie des cancers des VADS ne peut être envisagée
qu’en complément des méthodes précédentes. Bien qu’elle ait fait de grands
progrès ces dernières années, sa place exacte est encore en partie à déterminer
par des essais thérapeutiques. Elle est aujourd’hui fondée essentiellement sur
l’utilisation des sels de platine.

◗ Indications
◗ Traitement associatif radiochirurgical
L’attitude la plus couramment réalisée consiste à effectuer une résection chirur-
gicale de la tumeur primitive associée à un évidement ganglionnaire uni- ou
bilatéral. Une irradiation externe est ensuite effectuée.
L’avantage de cette association est de permettre la modulation de l’irradiation
en fonction de l’extension microscopique de la tumeur. En effet, les comptes
rendus opératoires et surtout anatomopathologiques fournissent une description
très précise de la tumeur : taille, degré d’infiltration, envahissement ou non des
berges de la résection, marges de sécurité, nombre et topographie des gan-
glions métastatiques, rupture capsulaire éventuelle de ces ganglions. À titre indi-
catif, après avoir délivré une dose minimale de 50 Gy en cinq semaines sur un
grand volume muqueux et toutes les chaînes ganglionnaires du cou, des surim-
pressions seront réalisées sur champs réduits amenant la dose totale à 60 Gy,
si les marges de sécurité étaient qualifiées de minimes (1 à 2 mm), à 65-70 Gy
si les berges de la résection étaient envahies ou s’il existait des adénopathies
métastatiques en rupture capsulaire.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Schématiquement, toutes les tumeurs volumineuses initialement classées T3 ou


T4 ainsi que toutes celles accompagnées d’adénopathies métastatiques palpa-
bles sont redevables de cette association thérapeutique.

◗ Traitement par chirurgie ou radiothérapie exclusive


Les petites tumeurs, superficielles, sans adénopathie palpable, peuvent faire l’objet
d’un traitement par une seule des deux modalités thérapeutiques principales :
– chirurgie exclusive : la résection de la tumeur primitive est en règle asso-
ciée à une vérification des premiers relais ganglionnaires. Ces relais sont
prélevés et analysés pendant l’intervention (analyse extemporanée).
Lorsqu’ils sont indemnes, l’intervention est terminée et le patient n’aura
pas d’irradiation complémentaire sous réserve que les marges de sécu-
rité soient suffisantes lors du compte rendu anatomopathologique défi-

25 ◗
05_Chap3 Page 26 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

nitif. Lorsque l’examen anatomopathologique extemporané du premier


relais ganglionnaire est positif, un évidement complet est alors réalisé,
suivi dans tous les cas d’une irradiation externe complémentaire ;
– radiothérapie exclusive : une dose prophylactique de 50 Gy en cinq semai-
nes peut être délivrée par irradiation transcutanée sur les différentes chaînes
ganglionnaires cervicales et sus-claviculaires. Une surimpression par des
champs réduits ou par une curiethérapie permettra ensuite d’amener à 70
ou 72 Gy la dose totale reçue par la tumeur primitive, ce qui est suffisant
pour stériliser les lésions superficielles de moins de 30 mm de diamètre.
Lorsque la tumeur primitive est facilement accessible (langue ou plancher buc-
cal), une curiethérapie interstitielle exclusive peut être effectuée. Les résultats
sont excellents sur le plan local mais cette technique méconnaît le risque gan-
glionnaire qui est de l’ordre de 10 % pour les petites lésions. Une surveillance
ultérieure étroite est donc nécessaire afin de dépister et de traiter précocement
ces récidives ganglionnaires.
Lors de volumineuses lésions techniquement inopérables et quand les patients
sont en bon état général, le traitement peut débuter par une irradiation externe
ou quelques cycles de chimiothérapie pour essayer d’obtenir une régression
tumorale compatible avec une intervention chirurgicale. Chez les patients en mau-
vais état général, un traitement palliatif à visée décompressive et antalgique fait
alors souvent appel à une irradiation concentrée (3 × 5 Gy ou 5 × 4 Gy), éven-
tuellement renouvelée deux à trois semaines plus tard en fonction du résultat.

◗ Résultats
Lorsqu’il n’y a pas d’envahissement ganglionnaire évident, la survie à cinq ans est
de l’ordre de 70 à 90 % pour les lésions débutantes, 50 à 70 % pour les lésions
évoluées. Ces chiffres sont diminués de moitié lorsqu’il existe un envahissement
ganglionnaire initial. Les causes d’échec se répartissent schématiquement en trois
tiers entre les récidives locorégionales non contrôlées, les métastases viscérales et
les seconds cancers en particulier œsophagiens et bronchopulmonaires.

◗ Suivi
Après traitement, les patients doivent faire l’objet d’un suivi médical prolongé
orienté vers :
– la surveillance de la maladie traitée, essentiellement par l’examen clinique
et/ou endoscopique régulier, en y incluant une attention particulière pour
la survenue éventuelle de deuxièmes cancers épidémiologiquement liés ;
– les séquelles éventuelles des traitements et le maintien de leurs mesures
préventives ou thérapeutiques : poursuite indéfinie de la protection den-
taire par gel fluoré, rééducation de la voix après laryngectomie, de la mas-
tication et de la déglutition après chirurgie buccale ou oropharyngée, de
l’épaule après évidement du cou ;
– le suivi socioprofessionnel est important, la survenue et le traitement d’un
carcinome des VADS ayant en règle des conséquences néfastes sur les
possibilités personnelles du patient.

◗ CAVITÉ BUCCALE
◗ Lèvres
Les cancers des lèvres siègent essentiellement au niveau de la lèvre inférieure
et notamment de la jonction cutanéo-muqueuse appelée zone vermillon. Les
cancers de la lèvre supérieure sont essentiellement cutanés.

26 ◗
05_Chap3 Page 27 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

◗ Épidémiologie, histologie, histoire naturelle


Les cancers de la lèvre inférieure sont des maladies masculines (15 hommes
pour une femme) liées à l’exposition solaire et/ou au tabagisme. Il s’agit de
carcinomes épidermoïdes souvent bien différenciés, parfois précédés de leuco-
plasies ou de chéilites actiniques chroniques, siégeant sur la zone vermillon,
jonction cutanéo-muqueuse entre la face et la cavité buccale.
Ces tumeurs ont tendance à s’étendre sur la lèvre et à l’infiltrer en rencontrant
très rapidement le muscle orbiculaire des lèvres.
Le développement latéralisé de ces tumeurs peut entraîner une atteinte com-
missurale avec participation plus ou moins importante de la lèvre supérieure
muqueuse et de la face interne de la joue.
L’extension axiale peut entraîner une extension au revers muqueux labial et/ou
à la face cutanée externe. L’atteinte de la symphyse mentonnière ou de la gen-
cive est exceptionnelle.
L’extension ganglionnaire est rare lors du diagnostic, le risque global étant de
l’ordre de 10 % siégeant dans les régions sous-mentales et sous-mandibulaires
bilatérales. Pour les tumeurs T1, les plus fréquentes, le risque est de l’ordre de
4 %.

◗ Diagnostic
La présentation clinique associe à des degrés divers une ulcération plus ou
moins plane, une infiltration nodulaire dans l’épaisseur de la lèvre sous l’ulcéra-
tion, parfois une simple accumulation croûteuse au niveau de la zone vermillon.
La biopsie après anesthésie locale est de réalisation facile et permet le diagnos-
tic d’un carcinome épidermoïde souvent bien différencié parfois très bien diffé-
rencié portant alors la dénomination de carcinome spinocellulaire par référence
au revêtement cutané normal.
L’évaluation de l’extension tumorale est simple :
– inspection et palpation de l’ensemble de la lèvre en s’attachant à recher-
cher une participation de la musculature orbiculaire labiale ;
– palpation soigneuse des aires ganglionnaires sous-mentales, sous-mandi-
bulaires et jugulocarotidiennes ;
– recherche d’une autre anomalie au niveau des VADS et en particulier au
niveau de la cavité buccale avec panendoscopie sous anesthésie géné-
rale au moindre doute ;
– imagerie mandibulaire (orthopantomographie, scanner) en cas de volu-
mineuse tumeur proche de l’os.
La classification TNM propose une évaluation commune à l’ensemble des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tumeurs de la cavité buccale (tableau 3.III).

Tableau 3.III. Classification TNM des carcinomes de la cavité buccale


T× Tumeur primitive non évaluable
T0 Pas de tumeur primitive décelable
Tis Carcinome in situ
T1 Tumeur de moins de 2 cm dans sa plus grande dimension
T2 Tumeur mesurant entre 2 et 4 cm
T3 Tumeur de plus de 4 cm
T4 Tumeur envahissant les structures de voisinage (os, peau…)


27 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Principes de traitement
Le faible risque ganglionnaire spontané conduit à ne traiter en première inten-
tion que la tumeur primitive et à soumettre les aires ganglionnaires à une sur-
veillance stricte trimestrielle pendant 2 ans, semestrielle ensuite.
Le traitement de la tumeur primitive peut être :
– chirurgical : excision en « V » ou en « W » et suture immédiate, vermillec-
tomie transverse, excision plus large avec réparation par lambeau de voi-
sinage. Les formes très étendues peuvent nécessiter des résections
mandibulaires avec procédés de réparation complexes ;
– radiothérapique : irradiation superficielle dite de contact à l’aide de
rayons X de 50 à 100 keV, ou mieux curiethérapie interstitielle à l’aide
de fils d’iridium 192 mis en place sous anesthésie locale.
Le choix entre ces techniques est largement fonction de l’habitude thérapeuti-
que du consultant, dans la mesure où, pour les tumeurs de moins de 3 cm, de
loin les plus fréquentes, les résultats sont équivalents. Pour les patients âgés, on
privilégiera les méthodes radiothérapiques en particulier curiethérapiques don-
nant de très bons résultats cosmétiques et fonctionnels.

◗ Résultats
En règle, le contrôle initial est obtenu dans près de 90 % des cas, les récidives
locales étant habituellement accessibles au type de traitement non utilisé initiale-
ment. Le seul vrai risque vital est la récidive ganglionnaire, dont il est capital de
faire le diagnostic le plus tôt possible, ce qui oblige à une surveillance rapprochée
pendant au moins 3 ans malgré sa relative faible fréquence (10 % en moyenne).

◗ Langue mobile et plancher buccal


Les localisations tumorales de la langue mobile et du plancher buccal ont en
commun d’être accessibles à l’examen clinique simple et d’être développées
sur une muqueuse fine recouvrant directement un ensemble musculaire com-
plexe dont l’infiltration constitue un mode d’extension majeur (fig. 3.4).
Il est admis que les tumeurs pelviennes sont moins infiltrantes que les tumeurs
linguales mais qu’elles peuvent comporter logiquement un risque d’atteinte gin-
givale pouvant aller jusqu’à l’extension osseuse mandibulaire. Enfin, la proximité
de ces deux zones anatomiques explique la fréquence des formes anatomique-
ment mixtes, pelvilinguales, dont la plus typique est dite en « feuillet de livre »,
centrée par le sillon pelvilingual antérieur ou latéral.

➤ Fig. 3.4. Schéma de la classification T (TNM) des cancers de la langue. ➤

>2 cm >4 cm
<2 cm <4 cm

T1 T2 T3 T4

◗ Diagnostic
Pendant longtemps peu symptomatiques, limités à des zones érythémateuses irré-
gulières ou à une leucoplasie épaisse, les cancers pelvilinguaux sont le plus souvent
révélés par une glossodynie aggravée par l’alimentation avec parfois otalgie réflexe.

28 ◗
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TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

À l’examen, on retrouve alors une ulcération à bords irréguliers siégeant sur le


bord de la langue, au fond du sillon pelvilingual ou purement dans le plancher
buccal. La palpation, temps essentiel, recherche alors une infiltration souvent
difficile à évaluer en raison de la douleur et de la contracture musculaire réflexe,
nécessitant souvent pour être appréciée correctement d’être renouvelée sous
anesthésie générale.
La lésion est mesurée dans les trois plans, topographiée par rapport à la langue,
au plancher buccal, à la proximité gingivale. On distingue les formes :
– latérales : bord latéral de langue mobile, plancher moyen ;
– postérieures : plancher postérieur, tiers postérieur de la langue mobile à
proximité de la zone de jonction avec la base de langue ;
– antérieures : pointe de la langue, plancher antérieur.
L’examen se poursuit par :
– la palpation des aires ganglionnaires sous-mentales, sous-mandibulaires
et jugulocarotidiennes bilatérales, en sachant qu’environ 30 % des
patients présentent des adénopathies métastatiques cliniques lors du
diagnostic ;
– l’examen de l’ensemble des VADS, complété ultérieurement par une
panendoscopie sous anesthésie générale ;
– l’évaluation de l’état dentaire (pantomographie et consultation
spécialisée) ;
– une biopsie locale à la pince après anesthésie locale permettant le dia-
gnostic d’un carcinome épidermoïde plus ou moins différencié.
L’évaluation définitive méritera souvent un examen clinique sous anesthésie
générale permettant de faire la part de l’infiltration tumorale souvent importante
et de la contraction musculaire réflexe lors de l’examen au fauteuil. Il est par
ailleurs fréquent de constater que la formation tumorale principale est entourée
d’une muqueuse dystrophique fréquemment siège de transformations muqueu-
ses dysplasiques prénéoplasiques. Ces anomalies associées devront être décri-
tes et prises en compte dans le choix thérapeutique à venir. Lors de cet examen
une panendoscopie des VADS, de l’axe trachéobronchique et de l’œsophage
sera réalisée.

◗ Principes de traitement
Hormis les rares lésions prénéoplasiques ou intraépithéliales qui peuvent faire
l’objet d’un traitement local a minima (électrocoagulation, cryochirurgie), les for-
mes invasives souvent infiltrantes posent le double problème du traitement de
la tumeur primitive et de la prise en compte du risque ganglionnaire :
– le traitement de la tumeur primitive peut être chirurgical ou radiothéra-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

pique : excision simple par les voies naturelles, pelvectomie simple, pel-
viglossectomie agrandie éventuellement à la mandibule en conservant
une baguette osseuse, glossectomie partielle plus ou moins volumi-
neuse. L’irradiation tumorale peut être réalisée soit par irradiation externe
et curiethérapie soit par curiethérapie interstitielle seule à l’aide de fils
d’iridium 192 ;
– le traitement des aires ganglionnaires peut être chirurgical, à type d’évi-
dement triangulaire sous-mento-sous-maxillaire et sous-digastrique, uni-
ou bilatéral, avec extension jugulocarotidienne si nécessaire. Il peut être
aussi radiothérapique utilisant l’irradiation externe à 50 Gy en cinq semai-
nes au niveau des mêmes aires ganglionnaires.
Les indications tiennent compte du volume tumoral, de sa topographie, de l’exis-
tence ou non d’adénopathies palpables et des conséquences fonctionnelles du
traitement. Schématiquement, on peut retenir que :

29 ◗
05_Chap3 Page 30 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– les tumeurs pelviennes et/ou linguales de moins de 1 cm, N0, peuvent


être traitées soit par exérèse simple soit par curiethérapie interstitielle, en
soumettant les aires ganglionnaires à une surveillance étroite, le taux de
récidive ganglionnaire étant de l’ordre de 15 % ;
– les tumeurs plus volumineuses doivent faire l’objet d’un traitement com-
biné prenant en compte systématiquement le risque ganglionnaire. Ainsi,
la chirurgie de la tumeur primitive comportera un évidement de principe
avec irradiation postopératoire s’il est positif, la radiothérapie fera appel
à une irradiation externe de la tumeur primitive et des aires ganglionnai-
res avant surimpression curiethérapique éventuelle du lit de la tumeur
primitive.
Par ailleurs, il faut se souvenir que :
– les extensions muqueuses gingivales et a fortiori osseuses mandibulaires
sont des indications chirurgicales ;
– la curiethérapie ne peut traiter correctement que des tumeurs au plus
égales à 3 cm en privilégiant les tumeurs pelviennes par rapport aux
tumeurs linguales ;
– les exérèses pelvilinguales étendues doivent faire appel à des procédés de
réparation (lambeaux) visant à ne pas limiter les mouvements linguaux
pour éviter des conséquences alimentaires et phonatoires invalidantes.

◗ Résultats
Les résultats obtenus sont de l’ordre de 90 % de contrôles pour les tumeurs
de stade I, 70 à 80 % pour les tumeurs de stade II, moins de 50 % pour les
stades III. Cependant, les taux de survie à 3 ans et à 5 ans sont nettement infé-
rieurs en raison de la mortalité par pathologies associées, par seconds cancers
et par métastases – au total, environ 30 % des décès.

◗ Oropharynx
L’oropharynx est une région anatomique et fonctionnelle complexe comportant
plusieurs éléments distincts : le pilier antérieur de l’amygdale, la loge amygda-
lienne, le voile et la luette, la base de langue et les parois pharyngées en regard,
latérales et postérieure. Situé au confluent de plusieurs régions anatomiques,
l’oropharynx est richement fonctionnel et d’accès chirurgical malaisé. En outre,
le réseau lymphatique local est très dense expliquant la fréquence des adéno-
pathies métastatiques, parfois premier voire seul symptôme.

◗ Diagnostic
La dysphagie latérale avec otalgie réflexe est le symptôme le plus courant. Dans
les formes évoluées, il peut s’y associer une gêne à la protraction linguale, une
hypersalivation importante, un trismus.
Dans 20 à 30 % des cas, le premier symptôme sera une adénopathie cervicale
habituellement en position sous-digastrique. Dans deux tiers des cas, l’adénopathie
sera rattachée à une anomalie muqueuse accessible, mais dans environ 10 % des
cas la tumeur primitive, probablement oropharyngée, ne sera pas retrouvée.
L’examen clinique recherche, outre les adénopathies cervicales, une gêne à la
protraction linguale avec latérodéviation du côté de la tumeur, un trismus mesu-
rable par l’écart intergingival antérieur. L’oropharynx n’est correctement exploré
qu’à la palpation en particulier au niveau du sillon amygdaloglosse et de la base
de la langue. Cet examen est utilement réalisé sous anesthésie générale, parfois
indispensable pour les biopsies, permettant également une endoscopie com-
plète des VADS à titre systématique.

30 ◗
05_Chap3 Page 31 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

◗ Anatomie pathologique
Plus de 90 % des tumeurs oropharyngées sont des carcinomes épidermoïdes,
souvent peu différenciés, survenant principalement sur un terrain d’alcoolo-taba-
gisme et donc souvent chez l’homme entre 55 et 65 ans. Une variante particu-
lière est représentée par les lympho-épithéliomes qui sont en fait des carcinomes
épidermoïdes infiltrés d’une importante réaction lymphocytaire bénigne.
L’autre type tumoral est représenté par les lymphomes qui surviennent en
dehors de tout terrain particulier.

◗ Extension, classification
Les tumeurs épithéliales de l’oropharynx ont une évolution centrifuge et infiltra-
tive en profondeur :
– les cancers amygdaliens (fig. 3.5) peuvent déborder de la loge vers les
piliers, le voile et surtout le sillon amygdaloglosse, constituant alors un
élément d’incidence thérapeutique et pronostique importante ;
– les cancers de la base de la langue ont une évolution infiltrante dans
l’épaisseur du muscle pouvant aller jusqu’à atteindre en avant les plans
superficiels du cou. Le franchissement du « V » lingual, l’extension basse
à la margelle laryngée voire au pharyngolarynx sont fréquents ;
– les cancers du voile ont tendance à envahir progressivement la totalité
du bord libre avant de gagner les loges amygdaliennes ;
– enfin, les tumeurs des parois pharyngées s’étendent le long de la gout-
tière pharyngée vers le naso- ou surtout l’hypopharynx, et latéralement
vers les axes vasculaires.

➤ Fig. 3.5. Coupe TDM horizontale passant par l’oropharynx (tumeur amygdalienne gauche). ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les tumeurs de l’oropharynx sont responsables d’une extension ganglionnaire


fréquente et précoce, souvent bilatérale pour les tumeurs basilinguales. Cette
extension est présente lors du diagnostic dans environ deux tiers des cas. Les
métastases viscérales, rares initialement, apparaissent cependant dans 20 à
30 % des cas après guérison de la maladie primitive cervicale. Le risque est
d’autant plus important que l’extension ganglionnaire était initialement volumi-
neuse et/ou diffuse.

31 ◗
05_Chap3 Page 32 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Principes de traitement
Compte tenu de la localisation anatomique des tumeurs de l’oropharynx, l’atti-
tude thérapeutique de base consiste à proposer une irradiation exclusive aux
tumeurs superficielles et limitées et une association radiochirurgicale aux
tumeurs infiltrantes et/ou étendues.
Chirurgie
L’abord chirurgical correct d’une tumeur maligne de l’oropharynx ne peut se faire
qu’à travers la mandibule, les exérèses par les voies naturelles ne permettant
que rarement un geste carcinologique complet.
Ainsi, l’intervention de base consiste en une buccopharyngectomie transmandi-
bulaire emportant l’angle de la mâchoire et les tissus oropharyngés en regard.
Cette intervention peut être agrandie vers la langue ou vers le voile et nécessite
parfois le recours à des procédés de réparation tels que l’utilisation de lambeaux
myocutanés, le plus souvent du grand pectoral. Lors d’un abord latéral, la chi-
rurgie ganglionnaire homolatérale dans le même temps est systématique même
s’il n’y a pas d’adénopathies palpables.

Radiothérapie
L’irradiation exclusive est la méthode thérapeutique de choix des carcinomes
oropharyngés classés T1 et T2, surtout quand ils sont peu infiltrants. Les volu-
mes traités incluent les aires ganglionnaires cervicales bilatérales jusqu’à 50 Gy
au minimum. La tumeur primitive doit recevoir une dose entre 65 et 75 Gy
suivant sa taille et son aspect macroscopique. En revanche, les tumeurs éten-
dues à la langue, celles responsables d’une infiltration profonde pré-mandibu-
laire sont des contre-indications à la radiothérapie exclusive. Après chirurgie
d’exérèse, une irradiation externe postopératoire est systématique aussi bien sur
le lit tumoral que sur les aires ganglionnaires.

◗ Résultats
La survie moyenne à 5 ans des carcinomes épidermoïdes de l’oropharynx est
de l’ordre de 33 %, variant entre 70-80 % pour les stades I et 15 % pour les
stades III et IV. Les causes d’échecs sont liées aux récidives locales (un tiers),
aux seconds cancers (un tiers) et aux métastases à distance (un tiers). Pour les
malades guéris, les traitements utilisés sont responsables de séquelles
fréquentes : sécheresse buccale après irradiation, troubles fonctionnels alimen-
taires et phonatoires après chirurgie.

◗ HYPOPHARYNX L’hypopharynx est le segment fonctionnel intermédiaire entre l’oropharynx et


l’œsophage, participant à la continuité anatomique alimentaire. La complexité
de sa structure est liée à l’imbrication du squelette laryngé à sa partie antérieure
délimitant les deux sinus piriformes latéralement, la paroi pharyngée postérieure
en arrière et la région rétrocrico-aryténoïdienne en avant et en bas.
Les cancers de l’hypopharynx sont des maladies très graves de diagnostic tardif
fréquent, hautement métastatiques, tant sur le plan ganglionnaire que viscéral.

◗ Épidémiologie
Les carcinomes épidermoïdes de l’hypopharynx sont des maladies éminem-
ment masculines (sex-ratio 15 à 20/1) fortement liées à une consommation
éthylique très excessive.

32 ◗
05_Chap3 Page 33 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

Chez la femme les tumeurs hypopharyngées essentiellement localisées à la


région rétrocrico-aryténoïdienne peuvent s’intégrer dans le cadre d’un syndrome
de Plummer-Vinson (anémie ferriprive, achlorhydrie gastrique et koïlonychie).

◗ Diagnostic
◗ Diagnostic clinique
La symptomatologie est habituellement résumée par une dysphagie plus ou
moins latéralisée avec otalgie réflexe homolatérale fréquente et parfois inaugu-
rale. La croissance tumorale entraîne ensuite une dysphonie par extension laryn-
gée, puis une dyspnée. La forte lymphophilie des cancers hypopharyngés
explique que dans deux tiers des cas, des adénopathies palpables parfois très
volumineuses soient le premier symptôme avec un minimum de gêne fonction-
nelle pharyngée associée.
Le diagnostic suppose la vision de la filière pharyngolaryngée (fig. 3.6) d’abord
indirecte lors de la consultation puis directe sous anesthésie permettant alors
de réaliser une biopsie montrant dans quasiment tous les cas un carcinome
épidermoïde souvent peu différencié.

➤ Fig. 3.6. Pharynx : vue postérieure de la base du crâne à la bouche œsophagienne. ➤

Temporal (rocher)
Sphénoïde
Rhinopharynx (cavum)
Fosses nasales (choanes)

Voile
Oropharynx Cavité buccale
Base de langue
Épiglotte
Larynx Glotte
Pharynx Sinus piriformes

Œsophage
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Diagnostic d’extension
Les cancers hypopharyngés s’étendent le long du pharynx vers l’oropharynx et
la bouche de l’œsophage. Latéralement et en avant leur extension peut gagner
le larynx et son squelette cartilagineux. L’exploration TDM permet d’apprécier le
degré d’extension au squelette laryngé. L’IRM peut affiner l’évaluation de l’exten-
sion aux parties molles parapharyngées.
L’extension ganglionnaire est très rapide habituellement dans la région sus-omo-
hyoïdienne avec une bilatéralité fréquente.

◗ Principes de traitement
Dans la plupart des cas, le traitement adapté consiste en une association radi-
cale de la chirurgie et de l’irradiation externe, à type de pharyngectomie partielle

33 ◗
05_Chap3 Page 34 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ou totale associée à une laryngectomie totale suivie d’une irradiation postopé-


ratoire. Habituellement le temps chirurgical comporte un évidement ganglion-
naire jugulocarotidien au moins du côté de la tumeur.
Il n’existe que de rares cas, en règle générale petites tumeurs de la face externe
d’un sinus piriforme, où une chirurgie partielle conservatrice du larynx est pos-
sible. De même, de petites lésions exophytiques de la paroi pharyngée posté-
rieure peuvent faire l’objet d’une irradiation exclusive.
Dans la plupart des cas, l’extension laryngée contre-indique tout geste conser-
vateur vocal ; la réalisation d’associations radiochimiothérapiques synchrones
avec chirurgie en cas d’échec est alors la seule possibilité permettant éventuel-
lement une conservation laryngée.

◗ Résultats
Les très rares lésions de petite taille sans adénopathies métastatiques ont une
survie à 5 ans voisine de 70 %. Pour les formes avancées les plus fréquentes
la survie à 5 ans ne dépasse pas 25 %, bien que l’association radiochirurgicale
amène un contrôle tumoral définitif au-dessus des clavicules dans plus de deux
tiers des cas. Les causes de décès sont comme à l’accoutumée représentées
par les décès intercurrents, les deuxièmes localisations tumorales et les métas-
tases.

◗ LARYNX Les cancers laryngés font partie des tumeurs les plus fréquentes au niveau des
VADS et regroupent en fait deux types distincts de lésions :
– les tumeurs glottiques, en règle générale de bon pronostic, posant avant
tout des problèmes de conservation fonctionnelle optimale ;
– les tumeurs extraglottiques, le plus souvent sus-glottiques, dont le contrôle
reste l’objectif dominant.
Dans tous les cas, un choix doit être fait entre la sécurité de l’avenir carcinolo-
gique et l’éventualité de la conservation fonctionnelle vocale.

◗ Épidémiologie
Plus de 90 % des cancers laryngés surviennent chez des patients de sexe mas-
culin présentant une intoxication tabagique ancienne. Deux tiers des tumeurs
surviennent au niveau des cordes vocales, 30 % environ au niveau du larynx
sus-glottique et moins de 5 % au niveau de la région sous-glottique.

◗ Diagnostic
◗ Diagnostic clinique
La dysphonie est le symptôme le plus fréquent, en particulier pour les tumeurs
glottiques. Une dysphagie avec otalgie rapportée n’est retrouvée qu’en cas
d’atteinte sus-glottique et plus particulièrement de la margelle laryngée (bord
libre de l’épiglotte, replis ary-épiglottiques et face postérieure des aryténoïdes)
qui constitue une zone de transition entre les filières laryngée et pharyngée. La
dyspnée ou l’apparition d’une adénopathie cervicale clinique, traduisent une
extension importante.

34 ◗
05_Chap3 Page 35 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

La laryngoscopie indirecte est le temps initial essentiel (fig. 3.7), sachant qu’elle
peut être parfois délicate et ne pas déceler de petites lésions. En fait, seule la
laryngoscopie directe par optique souple et surtout la laryngoscopie en optique
rigide sous anesthésie permettra la visualisation directe des lésions et leur
biopsie.

➤ Fig. 3.7. Laryngoscopie indirecte au miroir laryngé. ➤

Corde vocale
Bande ventriculaire

Épiglotte

Repli
Trachée ary-épiglottique
Aryténoïdes

◗ Diagnostic radiologique
Les examens radiologiques peuvent compléter l’évaluation locale en explorant
l’épaisseur des structures laryngées, ce qui n’est pas possible lors de l’endosco-
pie. Ainsi, les tomographies frontales laryngées et surtout la tomodensitométrie
peuvent mettre en évidence une infiltration tumorale dans l’espace paraglotti-
que latéral et/ou dans la loge hyo-thyro-épiglottique. La tomodensitométrie est
très utile pour évaluer une éventuelle atteinte cartilagineuse.

◗ Anatomie pathologique
Plus de 90 % des cancers laryngés sont des carcinomes épidermoïdes souvent
bien différenciés. Il existe une grande variété de lésions prénéoplasiques qui
peuvent exister seules ou coexister avec un épithélioma invasif authentique. Il
est donc souvent utile de réaliser des biopsies multiples en l’absence de lésion
macroscopique à l’évidence tumorale.
Une forme histologique particulière est représentée par les carcinomes verru-
queux de présentation souvent très exophytique, parfois obstructive.

◗ Évolution et classification
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les cancers sus-glottiques peuvent s’étendre à la glotte mais surtout à la mar-


gelle laryngée vers les sinus piriformes et en avant vers l’espace pré-épiglottique
immédiatement sous les plans cutanéomusculaires antérieurs du cou (loge
hyo-thyro-épiglottique) (fig. 3.8).
Les cancers glottiques ont d’abord une évolution de surface le long de la corde
vocale et peuvent se bilatéraliser en empruntant surtout la commissure anté-
rieure. Leur évolution est également infiltrative essentiellement vers le haut et
en dehors, c’est-à-dire vers les cavités ventriculaires et les ventricules d’une part,
vers l’épaisseur de la corde puis l’espace paralaryngé latéral d’autre part. Par des
mécanismes multiples cette infiltration conduit progressivement à l’immobilité
vocale unilatérale.
Les cancers glottiques purs, même invasifs, comportent un risque faible (< 5 %)
d’extension ganglionnaire cervicale. En revanche, leur extension vers les régions

35 ◗
05_Chap3 Page 36 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 3.8. Anatomie du larynx (vue latérale, section médiane). ➤

Base de langue
Épiglotte
Vallécule

Repli ary- Os hyoïde


épiglottique

Bande ventriculaire
Corde vocale
Cavité ventriculaire

Cartilage thyroïde
Trachée

Cartilage cricoïde

sus-glottiques entraîne un risque ganglionnaire élevé de l’ordre de 40 à 50 %,


siégeant surtout dans les territoires sus-omohyoïdien et sous-digastrique.

◗ Principes de traitement
◗ Cancers glottiques
Les cancers glottiques purs qui n’entraînent pas de fixation complète de la corde
vocale peuvent faire l’objet de traitements locaux, soit chirurgicaux (cordectomie,
hémilaryngectomie verticale) soit radiothérapiques. L’irradiation consiste à déli-
vrer une dose de l’ordre de 65 Gy en six semaines exclusivement à la région
glottique sans irradiation ganglionnaire prophylactique compte tenu du très fai-
ble risque métastatique des formes glottiques pures. Les résultats sont équiva-
lents à ceux de la chirurgie, les échecs pouvant cependant bénéficier d’une
exérèse de deuxième intention souvent encore conservatrice.
Les cancers glottiques fixant la ou les cordes vocales (T3-T4) doivent faire l’objet
d’une chirurgie radicale à type de laryngectomie totale suivie d’irradiation posto-
pératoire, ou de traitements d’essais associant la chimiothérapie et la radiothé-
rapie dans un but de conservation vocale.

◗ Cancers sus-glottiques
Les tumeurs sus-glottiques étendues à la glotte sont des indications de laryn-
gectomie totale suivie d’irradiation postopératoire. Les lésions sus-glottiques
pures à distance du plan glottique peuvent bénéficier de laryngectomies le plus
souvent horizontales sus-glottiques suivies d’irradiation. Ces chirurgies partielles
sont responsables de troubles prolongés de la déglutition en raison de la sup-
pression de l’épiglotte.
Les tumeurs T1 ou T2 à distance du plan glottique peuvent faire l’objet d’une
irradiation externe exclusive, évitant les cordes vocales au-delà de 45 à 50 Gy.
Dans tous les cas le traitement ganglionnaire est indispensable, tous les gestes
chirurgicaux d’exérèse laryngée comportant un évidement cervical au moins
homolatéral, les patients présentant des adénopathies palpables constituant a
priori des indications chirurgicales quelles que soient la taille et la topographie
de la tumeur primitive.

36 ◗
05_Chap3 Page 37 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

Les carcinomes laryngés volumineux font l’objet de multiples démarches de


recherche clinique visant à la conservation vocale complète : associations radio-
chimiothérapiques, irradiation hyperfractionnée, par exemple.

◗ Résultats
Les cancers glottiques T1-T2 N0 sont guéris dans 90 % des cas avec conserva-
tion d’une bonne fonction laryngée dans plus de 80 % des cas surtout après
irradiation exclusive. Si la tumeur fixe une des cordes, les résultats sont moins
bons (50 à 60 % de survie à 5 ans).
Les cancers sus-glottiques ont un moins bon pronostic du fait de leur lymphophi-
lie. Les tumeurs T1-T2 N0 sont guéries dans 70 à 80 % des cas, l’existence d’un
envahissement ganglionnaire abaissant le taux de survie à 5 ans à 40-60 %.
Quand la laryngectomie totale a été inévitable, la réinsertion post-thérapeutique
dépend beaucoup de l’acquisition d’une voix œsophagienne ou du bon fonc-
tionnement d’une prothèse phonatoire mise en place lors du temps chirurgical.

◗ NASOPHARYNX Les cancers du rhinopharynx (ou cavum) échappent aux conditions épidémio-
logiques habituelles des cancers des VADS. En effet, leur survenue est indépen-
dante d’une intoxication alcoolo-tabagique et, en revanche, l’existence d’une
infection antérieure par le virus d’Epstein-Barr (EBV) est fréquemment associée.
Par ailleurs, la présentation clinique des cancers du rhinopharynx est très variée,
obligeant à penser à ce diagnostic dans des circonstances très diverses malgré
la relative rareté de cette affection dans notre pays.

◗ Épidémiologie et étiologie
Alors que les cancers du cavum sont rares dans les populations blanches occi-
dentales (2 % des cancers des VADS), ils sont en revanche particulièrement
fréquents dans l’Asie du Sud-Est, du Sud de la Chine à l’Indonésie, représentant
alors près de 60 % des cancers des VADS et 15 à 20 % de tous les cancers.
Dans ces conditions épidémiologiques particulières, les cancers du cavum sur-
viennent préférentiellement chez les adolescents et les adultes jeunes, essen-
tiellement de sexe masculin.
Cette très haute incidence semble plus liée à des facteurs environnementaux
qu’à des facteurs génétiques, l’infection à EBV étant incriminée comme condi-
tion carcinogénétique ou cocarcinogénétique chez la majorité des patients qui
présentent une fixation préférentielle d’anticorps monoclonaux anti-EBV au
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

niveau des cellules tumorales épithéliales.


En dehors du foyer asiatique, les cancers du cavum sont également fréquents
sur le pourtour méditerranéen, en particulier au Moyen-Orient et dans le
Maghreb.

◗ Diagnostic
◗ Diagnostic clinique
Les signes cliniques d’un cancer du cavum peuvent être très divers :
– le signe le plus fréquent, en particulier dans les zones d’« endémie », est
l’existence d’adénopathies cervicales en règle hautes et postérieures,
souvent très volumineuses et bilatérales ;

37 ◗
05_Chap3 Page 38 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– la proximité de la trompe d’Eustache explique la possibilité d’otalgie, la


sensation d’oreille pleine et d’hypoacousie, l’existence d’une otite
moyenne ;
– la situation rétronasale rend compte de l’obstruction nasale, des épistaxis
ou des écoulements colorés ;
– la topographie sous-basicrânienne du cavum est à l’origine de syndromes
neuro-ophtalmiques parfois complexes : diplopie, ptose oculaire, algie
hémifaciale, céphalées, dysphonie et/ou dysphagie. Ces signes sont dus
à l’atteinte des paires crâniennes voisines et en particulier des nerfs ocu-
lomoteurs (VIe paire surtout) situés à proximité immédiate du cavum
dans le sinus sphénoïdal ;
– l’extension à la fosse ptérygomaxillaire est responsable d’un trismus.
L’examen clinique essentiel est la rhinoscopie antérieure et surtout postérieure,
souvent difficile en raison de l’obstruction et de l’œdème. Il est régulièrement
nécessaire de réaliser cet examen sous anesthésie générale permettant alors
des biopsies dirigées. Dans certains cas, il sera plus aisé d’obtenir un diagnostic
définitif au niveau d’une adénopathie cervicale.

◗ Anatomie pathologique
Plus de 90 % des cancers du cavum sont des carcinomes épidermoïdes le plus
souvent peu ou pas différenciés. Une appellation particulière concerne les lym-
pho-épithéliomes traduisant simplement l’infiltration d’un carcinome épider-
moïde par un infiltrat lymphoïde bénin et non pas par un tissu lymphomateux.
Il existe quelques exceptionnelles tumeurs malignes d’autres types, des adéno-
carcinomes en particulier.

◗ Évolution et histoire naturelle


Spontanément, les cancers du cavum ont une évolution locorégionale centrifuge
et métastatique ganglionnaire rapide. Ainsi, l’extension peut se faire vers les
sinus voisins, les fosses nasales, la base du crâne puis l’encéphale dans la région
temporale, l’orbite, la fosse ptérygomaxillaire avec apparition d’un trismus.
L’extension ganglionnaire précoce des cancers du cavum est une de leurs carac-
téristiques essentielles puisqu’environ 80 % des patients présentent des adéno-
pathies palpables lors du diagnostic initial, la moitié étant bilatérales.
Il est dans ces conditions logique que le risque hématogène métastatique soit
également important atteignant 25 à 30 %, l’organe le plus souvent concerné
étant le squelette en particulier vertébral, puis le poumon.

◗ Explorations complémentaires
et classifications
L’examen d’un cancer du cavum doit comporter :
– un examen neuro-ophtalmologique complet associé à un examen tomo-
densitométrique des sinus de la face, de la base du crâne et de
l’encéphale, utilement complété d’une IRM explorant au mieux les espa-
ces pararhinopharyngés (fig. 3.9) ;
– un examen ORL complet, rhino- et otologique en particulier, avec explo-
ration de toutes les aires ganglionnaires cervicales ;
– la recherche de métastases viscérales par un cliché thoracique, une scin-
tigraphie osseuse et une échographie hépatique. Les taux d’anticorps
sériques anti-EBV ne sont pas étroitement corrélés avec la diffusion de
la maladie.

38 ◗
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TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

➤ Fig. 3.9. Coupe IRM frontale montrant une tumeur rhinopharyngée gauche immédiatement sous la
masse latérale gauche du sphénoïde avec extension endocrânienne minime. ➤

◗ Principes de traitement
La topographie du rhinopharynx et les modes d’extension des cancers qui s’y
développent font de la radiothérapie externe le seul moyen thérapeutique utili-
sable, y compris pour les adénopathies cervicales, le caractère peu différencié
des tumeurs les rendant souvent très radiosensibles. Pour les tumeurs avancées,
la chimiothérapie par voie générale a confirmé son efficacité soit lors d’une pres-
cription préalable soit surtout quand elle est concomitante à l’irradiation.
Certains très gros ganglions peuvent nécessiter l’exérèse chirurgicale de résidus
après irradiation externe.
Les doses à délivrer sont de l’ordre de 65 à 75 Gy en six à huit semaines dans une
zone richement fonctionnelle obligeant à une technique d’une grande précision.

◗ Résultats
La survie moyenne à 5 ans est de l’ordre de 50 %, allant de 60-70 % pour les
T1-T2 N0 à 10-20 % pour les T3-T4 N3. L’existence de ganglions palpables fait
passer la survie à 5 ans en dessous de 50 % dans la mesure où le risque
métastatique viscéral devient alors élevé.
Chez l’enfant ou l’adolescent, la surveillance post-thérapeutique de la fonction
visuelle et des stimulines hypophysaires doit être attentive.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ SINUS DE LA FACE ET FOSSES NASALES


Les cancers des sinus de la face et des fosses nasales se caractérisent par un
début clinique insidieux sans aucune particularité symptomatique expliquant la fré-
quence de leur diagnostic tardif. De plus, l’ensemble anatomique des sinus de la
face constitue une entité cancérologique réelle dans la mesure où les maladies
qui s’y développent ont tendance à passer d’une cavité sinusienne à l’autre.

◗ Épidémiologie et étiologie
La plupart des tumeurs sinusiennes surviennent en dehors de tout contexte épi-
démiologique particulier. Certains corps chimiques comme le nickel ou le formol

39 ◗
05_Chap3 Page 40 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

sont suspectés d’être carcinogénétiques pour les muqueuses sinusiennes. Avant


la survenue des carcinomes sinusiens, un passé prolongé de « sinusite » ou de
« rhinite » est souvent retrouvé, sans que l’on puisse faire nettement la part avec
le début des troubles liés à la tumeur maligne proprement dite.
Une situation épidémiologique particulière mérite d’être soulignée : il s’agit de
celle des travailleurs du bois (menuisiers, ébénistes, scieurs) exposés pendant plu-
sieurs dizaines d’années à la poussière de bois (arbres feuillus caducs essentiel-
lement) et qui peuvent développer une tumeur spécifique, l’adénocarcinome
ethmoïdien. Cette atmosphère épidémiologique particulière confère à cette affec-
tion la qualité de cancer professionnel lorsqu’elle survient chez un travailleur
exposé.

◗ Diagnostic
◗ Diagnostic clinique
Les symptômes les plus fréquents sont ceux que peuvent entraîner des patho-
logies inflammatoires ou infectieuses chroniques des sinus de la face : obstruc-
tion nasale, écoulement muco-purulent, épistaxis, douleurs hémifaciales. Plus
tard, ces symptômes peuvent s’enrichir d’une tuméfaction malaire, d’une anes-
thésie gingivodentaire hémimaxillaire supérieure, de troubles oculaires à type de
diplopie ou d’exophtalmie, d’un trismus.
À l’examen, on recherche une lésion directement accessible à la rhinoscopie
directe ou postérieure, une anomalie tumorale intrabuccale principalement dans
le sillon gingivojugal supérieur, parfois dans le palais dur.

◗ Diagnostic radiologique
Les explorations radiologiques complémentaires ont une place déterminante
dans l’exploration de ces structures d’accès clinique direct difficile. Les clichés
standards et tomographiques sont aujourd’hui remplacés par la tomodensitomé-
trie qui est indispensable en particulier pour l’exploration de la partie haute eth-
moïdosphénoïdale des sinus de la face. Cependant, la différence entre opacité
muqueuse réactionnelle et tumeur muqueuse peut être difficile même avec
produit de contraste, en l’absence de destruction osseuse. Elle peut être utile-
ment complétée par une IRM pour l’étude de l’extension extrasinusienne aux
parties molles.

◗ Diagnostic anatomopathologique
Les biopsies sont parfois directement possibles dans la fosse nasale ou dans la
bouche, mais nécessitent souvent un abord chirurgical par antrotomie maxillaire.
Les tumeurs les plus fréquentes sont les carcinomes épidermoïdes (85 %) de
grades divers. Les adénocarcinomes d’origine salivaire, les mélanomes malins
dans la fosse nasale et les esthésioneuroblastomes dans la fosse nasale et l’eth-
moïde représentent les autres formes.

◗ Évolution, classification
L’évolution tumorale se fait de proche en proche vers les sinus voisins puis les
cavités anatomiques comme l’orbite et la bouche (fig. 3.10). Dans le même
temps, l’extension peut se faire vers la fosse ptérygomaxillaire, la base du crâne
voire le contenu endocrânien, en particulier pour les tumeurs ethmoïdales,
notamment pour celles nées à partir de la placode olfactive (esthésioneuroblas-
tomes).

40 ◗
05_Chap3 Page 41 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

L’extension ganglionnaire est relativement rare (10 à 15 %), sauf quand l’exten-
sion tumorale atteint la cavité buccale, l’oropharynx ou la peau. Il n’existe pas
de classification clinique facilement utilisable, l’essentiel de l’extension étant
apprécié par les examens radiologiques et les données opératoires.

➤ Fig. 3.10. Voies d’extension essentielles des carcinomes du sinus maxillaire.➤

◗ Principes de traitement et résultats


L’essentiel du traitement des tumeurs malignes des sinus de la face est chirur-
gical dans la mesure où le cadre osseux, fréquemment envahi, constitue une
contre-indication a priori à l’irradiation externe exclusive.
En revanche, la plupart des situations font l’objet d’une association radiochirurgi-
cale, l’exérèse chirurgicale pouvant être de grande ampleur (exentération faciale
latérale), nécessitant des procédés de réparation parfois complexes. En règle
générale, l’irradiation externe postopératoire ne concerne que les aires sinusien-
nes à un niveau de dose de l’ordre de 55 à 65 Gy en cinq à six semaines.
Le traitement des aires ganglionnaires n’est pris en compte que quand il existe
des adénopathies métastatiques qui font alors l’objet d’une chirurgie première
suivie d’irradiation.

◗ GLANDES SALIVAIRES
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les tumeurs des glandes salivaires échappent à l’épidémiologie traditionnelle


des carcinomes épidermoïdes des VADS. Elles constituent un groupe très hété-
rogène de lésions pouvant aller de l’évolution « bénigne » à la menace vitale
évidente. Beaucoup d’entre elles sont d’évolution lente, ce qui n’est pas forcé-
ment synonyme de pronostic favorable à terme.

◗ Épidémiologie
Les sites d’origine sont le plus souvent les glandes salivaires majeures (paroti-
des, sous-mandibulaires ou sublinguales) mais parfois les glandes salivaires
accessoires disséminées dans la muqueuse de la totalité des voies aérodigesti-

41 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ves supérieures. Cependant, la plupart des tumeurs parotidiennes sont bénignes


alors que la plupart de celles développées au niveau des glandes sous-mandi-
bulaires sont malignes.
La glande parotide est le site le plus commun avec 75 % de tumeurs bénignes.
L’âge moyen de survenue est entre 40 et 50 ans. Il n’est pas connu de facteur
de risque particulier hormis les antécédents d’irradiation locale.

◗ Anatomie pathologique, histoire naturelle


Il existe plusieurs types de tumeurs malignes des glandes salivaires :
– carcinome muco-épidermoïde (de grade faible ou élevé) ;
– carcinome adénoïde kystique (cylindrome) ;
– carcinome des cellules aciniques ;
– tumeur maligne mixte ;
– adénocarcinome (différenciation variable) ;
– carcinome épidermoïde ;
– tumeurs diverses et rares.
Les cancers muco-épidermoïdes sont les plus fréquents au niveau de la paro-
tide, alors que les cylindromes sont plus fréquents dans les autres localisations.
Les tumeurs de grade faible sont de pronostic local dominé par le risque de
récidive. L’extension métastatique, en particulier des cylindromes, est souvent
très retardée par rapport au diagnostic initial, en moyenne de 5 à 15 ans. Les
sites métastatiques les plus fréquents sont les poumons.

◗ Diagnostic
C’est en général la constatation par le patient lui-même d’une tuméfaction qui
motive la consultation. Il s’agit en général de tuméfactions lisses, sous-cutanées
ou sous-muqueuses, l’existence d’une douleur locale, d’une apparition rapide,
d’une mobilité réduite, de troubles neurologiques (déficit facial surtout lors
d’une localisation parotidienne) devant attirer l’attention vers une éventuelle
malignité.
La ponction à l’aiguille fine pour examen cytologique peut être d’une grande
valeur d’orientation, uniquement quand elle est positive, et évite alors une biop-
sie incisionnelle peu recommandée. Dans bien des cas, seul l’abord chirurgical
permettra un diagnostic de certitude.

◗ Principes de traitement
Les tumeurs des glandes salivaires sont une indication chirurgicale quasi for-
melle, chimiothérapie et radiothérapie n’ayant de rôle que palliatif ou adjuvant
dans certains cas.
La technique de base doit enlever la totalité de la glande avec les éléments
ganglionnaires voisins, un évidement anatomique homolatéral de principe
n’étant retenu que pour les tumeurs de grade élevé. Pour la parotide, la
conservation du nerf facial est un des éléments clefs de l’intervention, l’existence
préopératoire d’un déficit témoignant d’une invasion tumorale obligeant le plus
souvent au sacrifice du nerf. Il existe cependant de nombreuses techniques de
reconstruction nerveuse plus ou moins efficaces.
L’irradiation postopératoire du lit d’exérèse est la règle s’il persiste dans le lit
opératoire des résidus tumoraux, micro- ou macroscopiques, quand il existe un
envahissement ganglionnaire ou quand il s’agit d’une forme peu différenciée.

42 ◗
05_Chap3 Page 43 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES VOIES AÉRODIGESTIVES SUPÉRIEURES 3

◗ Résultats
Les résultats thérapeutiques sont en règle générale bons au cours des premières
années, les cylindromes présentant par exemple des taux de survie sans mala-
die évolutive de l’ordre de 70 à 80 %. Cependant, compte tenu de l’évolution
spontanée lente de la plupart de ces tumeurs, le risque de récidive locale et
surtout de métastases viscérales en particulier pulmonaires persiste pendant
longtemps, même après 10 ans.
Les récidives doivent bénéficier d’une reprise chirurgicale quand elle est possible
et d’une irradiation postopératoire quand elle n’a pas été réalisée initialement.
Les métastases viscérales sont peu accessibles à la chimiothérapie.

Points clés
• Les cancers des VADS représentent un groupe de pathologies liées par un facteur
de risque commun, l’alcoolo-tabagisme, hormis les cancers du cavum, des glandes
salivaires et des sinus de la face.
• Le diagnostic repose sur l’endoscopie indirecte et surtout directe, l’examen des
aires ganglionnaires cervicales et l’imagerie.
• Le traitement est essentiellement chirurgical associé à la radiothérapie. Le souci
de conservation fonctionnelle a fait se développer les techniques chirurgicales con-
servatrices et réparatrices, ainsi que les traitements radiothérapiques ou
radiochimiothérapiques exclusifs.
• Le suivi doit tenir compte du risque élevé de second cancer ORL mais aussi du
risque de cancers bronchiques ou œsophagiens participant du même risque
épidémiologique.
• Les cancers du rhinopharynx sont épidémiologiquement très différents, avec une
répartition géographique contrastée et un lien étroit avec le virus d’Epstein-Barr ;
leur traitement est radiothérapique ou radiochimiothérapique.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


43 ◗
00_PDD Page VIII Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11
06_Chap4 Page 45 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Cancers de la thyroïde
4
N. DALY-SCHVEITZER

◗ CLASSIFICATION HISTOLOGIQUE ◗ SCHÉMAS THÉRAPEUTIQUES


◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ◗ SUIVI
◗ DIAGNOSTIC ◗ RÉSULTATS
◗ TRAITEMENTS ◗ CARCINOME MÉDULLAIRE DE LA THYROÏDE

Maladies relativement rares au sein de pathologies tumorales bénignes fréquen-


tes, les cancers de la thyroïde font appel à des compétences diagnostiques et
thérapeutiques multiples.

◗ CLASSIFICATION HISTOLOGIQUE
Les tumeurs malignes épithéliales sont classées en quatre groupes histologiques :
– carcinomes papillaires ;
– carcinomes vésiculaires ou folliculaires ;
– carcinomes médullaies ;
– carcinomes indifférenciés ou anaplasiques.

◗ Carcinomes papillaires
Ce sont les cancers thyroïdiens les plus fréquents (60 %), concernant essentiel-
lement des sujets jeunes.
Ils sont souvent multifocaux avec une extension lymphatique régionale fré-
quente et longtemps isolée.
Les formes mixtes, vésiculo-papillaires sont rangées avec les formes papillaires
pures.

◗ Carcinomes vésiculaires (ou folliculaires)


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Ils représentent 30 % des cancers thyroïdiens et sont plus ou moins bien diffé-
renciés. Leur risque évolutif est essentiellement hématogène avec un tropisme
métastatique préférentiel pour le squelette et les poumons.
Les formes très bien différenciées posent des problèmes difficiles de diagnostic
avec le tissu thyroïdien normal.

◗ Carcinomes indifférenciés ou anaplasiques


Maladies rares, elles posent des problèmes de distinction anatomopathologique
avec les cancers médullaires et les lymphomes.
Elles peuvent être le stade évolutif ultime des cancers différenciés et constituent
alors des maladies d’une très grande agressivité et de très mauvais pronostic
local et métastatique.

45 ◗
06_Chap4 Page 46 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Carcinomes médullaires
Ces tumeurs sont développées à partir des cellules C ou parafolliculaires. Elles
sécrètent habituellement de la thyrocalcitonine et de l’ACE, et ne fixent pas l’iode.
Il existe des formes sporadiques et des formes familiales.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE Les cancers de la thyroïde sont plus de deux fois plus fréquents chez la femme
que chez l’homme.
Plus fréquents à l’âge adulte, ils peuvent cependant s’observer avant 20 ans (5 %).

◗ Facteurs de risque
Le taux de TSH est un facteur de risque de développement des cancers thyroï-
diens comme l’indique l’augmentation de fréquence des cancers vésiculaires dans
les régions de carence iodée avec goitres endémiques et, à l’inverse, de l’inci-
dence de cancers papillaires lors de surconsommation d’iode (eau, aliments).
L’irradiation de la thyroïde est un facteur de risque bien connu qu’il s’agisse
d’irradiation externe ou d’irradiation métabolique par l’131I.
Même si la latence d’apparition du cancer radio-induit est, comme à l’accoutumée,
de l’ordre de 15 à 20 ans, l’irradiation dans l’enfance raccourcit ce délai comme
l’ont montré les conséquences sanitaires de l’accident nucléaire de Tchernobyl.
La thyroïdite d’Hashimoto serait un facteur de risque de l’apparition de lympho-
mes thyroïdiens.

◗ DIAGNOSTIC
◗ Symptomatologie
Le symptôme le plus fréquent est un nodule thyroïdien isolé, en sachant
qu’environ 5 à 10 % seulement des nodules thyroïdiens sont des cancers.
De topographie cervicale antérieure, médiane ou paramédiane, le nodule, habi-
tuellement ferme sans être pierreux, suit les mouvements de déglutition. L’exa-
men complet de toutes les aires ganglionnaires cervicales est indispensable.
Plus rarement, c’est un goitre anciennement connu dont le volume ou la
consistance se sont transformés qui constitue la symptomatologie d’appel. Ce goi-
tre a pu ainsi devenir compressif entraînant une dyspnée et/ou une dysphagie.
Le premier symptôme peut être lié à une métastase :
– ganglionnaire, sous la forme d’une adénopathie cervicale isolée, habituel-
lement basse mais pouvant être sus-omohyoïdienne voire
sous-digastrique ;
– viscérale, pulmonaire ou osseuse.
Enfin, une symptomatologie générale comme une diarrhée, un flush peuvent
être les premiers symptômes d’un carcinome médullaire intégré dans une
poly-endocrinopathie.

◗ Examens complémentaires
L’échographie thyroïdienne n’a d’intérêt que pour distinguer le contenu liquide
ou non du nodule, en sachant qu’une forme solide est toujours plus en faveur

46 ◗
06_Chap4 Page 47 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS DE LA THYROÏDE 4

de la malignité que de la bénignité et inversement. L’échographie permet en


revanche une mensuration précise de la ou des formation(s) nodulaire(s) dans
l’hypothèse d’un suivi simple.
La ponction à l’aiguille fine peut permettre le diagnostic cytologique d’un épi-
thélioma papillaire, plus difficilement d’un cancer vésiculaire malgré l’aide
d’immunomarquage à la thyroperoxidase. L’immunohistochimie sera en revan-
che précieuse pour distinguer carcinome anaplasique de lymphome.
La scintigraphie thyroïdienne constitue l’examen de référence. Utilisant soit le
technétium 99 m soit l’iode 123, les troubles observés de la fixation doivent
être référencés topographiquement à l’anomalie clinique. Classiquement l’hypo-
fixation et l’isofixation sont plus en faveur de la malignité que l’hyperfixation dont
l’intensité peut aller jusqu’à entraîner l’absence complète de fixation du reste de
la glande.
La tomodensitométrie cervicothoracique est utile dans le cas de volumineuses
tumeurs extracapsulaires notamment avec signe de compression viscérale ou
lors d’un envahissement ganglionnaire cervical massif pouvant s’accompagner
d’une participation médiastinale.

◗ TRAITEMENTS Le traitement des cancers est essentiellement chirurgical avec l’adjonction de


l’131I qui représente une des très rares situations en cancérologie de spécificité
quasi complète du traitement vis-à-vis de la pathologie tumorale.

◗ Chirurgie thyroïdienne
Il existe de très nombreuses variantes de traitement chirurgical des cancers thy-
roïdiens portant autant sur l’étendue de l’exérèse de la glande que de l’attitude
vis-à-vis des chaînes ganglionnaires cervicales.
Au minimum, la chirurgie consiste en une lobectomie agrandie à l’isthme
glandulaire (isthmectomie).
Habituellement, la chirurgie est une thyroïdectomie totale avec repérage et réim-
plantation (cou, avant-bras ou autres) des parathyroïdes.
La thyroïdectomie partielle et surtout totale fait courir le risque d’une hypopara-
thyroïdie définitive et d’une paralysie récurentielle par blessure ou section
nerveuse, complications exceptionnelles pour un opérateur expérimenté.
La chirurgie ganglionnaire va d’un prélèvement des ganglions cervicaux inférieurs
et récurrentiels homolatéraux, jusqu’à l’évidemment complet du cou éventuel-
lement bilatéral.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Iode radioactif ou irathérapie


L’iode est capté préférentiellement par les cellules thyroïdiennes normales et les
cellules malignes quand elles sont restées suffisamment différenciées, qu’elles
soient dans le site thyroïdien ou métastatiques. L’131I est un radio-isotope, de
même distribution que l’iode stable, émettant un rayonnement β (électrons) de
parcours très limité dans la matière conduisant à une irradiation thérapeutique
quasiment « in situ ».
Au-delà de son rôle diagnostique, où l’on préfère cependant avant tout diagnos-
tic de malignité l’123I, l’131I peut jouer plusieurs rôles :
– après thyroïdectomie totale, la scintigraphie cervicale permet de visualiser
et de quantifier les résidus tissulaires, habituellement de parenchyme thy-
roïdien normal, laissés en place ; dans ce cas, l’administration d’une dose

47 ◗
06_Chap4 Page 48 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

de 50 à 100 mCi (2 GBq en moyenne) permet d’obtenir une « carte


blanche » c’est-à-dire la disparition de tout tissu fixant ;
– après l’obtention d’une « carte blanche » cervicale, l’administration dia-
gnostique d’une dose de l’ordre de 5 mCi d’131I permet de réaliser une
scintigraphie « corps entier » à la recherche de tissu fixant extracervical ce
qui traduirait une extension métastatique.
Si tel est le cas, l’administration d’une dose thérapeutique (100 mCi), éventuel-
lement répétée si la fixation persiste, permet d’obtenir une stérilisation complète
de ces foyers métastatiques. Ceci est particulièrement vrai pour les localisations
pulmonaires quand elles se présentent sous la forme de miliaire métastatique.
En effet, les plus gros volumes tumoraux, même s’ils sont améliorés par l’iode
radioactif, sont rarement définitivement stérilisés du fait de la performance phy-
sique du rayonnement β.
Chaque fois que de l’iode radioactif est administré, qu’il s’agisse d’une explora-
tion diagnostique ou thérapeutique, la fixation tissulaire est meilleure en défrei-
nation hypophysaire, c’est-à-dire en l’absence de toute opothérapie thyroïdienne
substitutive permettant une sécrétion maximale de TSH. Cet arrêt du traitement
substitutif au moins un mois avant, souvent mal toléré par les patients, peut être
aujourd’hui évité par l’utilisation de TSH recombinante exogène.

◗ Radiothérapie externe
La radiothérapie externe des régions cervicales peut être indiquée en cas
d’extension extracapsulaire thyroïdienne massive ou lors d’un envahissement
ganglionnaire plurifocal.

◗ Traitement hormonal substitutif


Après suppression complète de tout parenchyme thyroïdien sécrétant, un trai-
tement substitutif est indispensable, habituellement sous la forme de thyroxine
prescrite en posologies croissantes sur plusieurs semaines jusqu’à l’obtention
d’une euthyroïdie clinique et biologique. La TSH doit devenir indétectable dans
le sang circulant. Un relais par la triiodothyronine est réalisé en cas de nécessité
d’exploration et/ou de traitement par iode radioactif.
En cas de thyroïdectomie partielle, le parenchyme résiduel assure le plus sou-
vent par hypertrophie compensatrice une euthyroïdie. Il est cependant possible
qu’il soit nécessaire d’y adjoindre une opothérapie complémentaire.

◗ Chimiothérapie
Il n’existe pas de chimiothérapie réellement efficace pour les cancers thyroïdiens
même indifférenciés.
En cas de nécessité, le médicament le plus usité est la doxorubicine associée
aux sels de platine.

◗ SCHÉMAS THÉRAPEUTIQUES Les cancers papillaires et vésiculaires sont en règle traités par thyroïdectomie
totale avec transplantation des parathyroïdes et vérification ganglionnaire cervi-
cale basse homolatérale, agrandie en évidemment si l’examen extemporané est
positif.
L’extension extrathyroïdienne sera traitée chirurgicalement autant que faire se
peut, ainsi que l’envahissement ganglionnaire médiastinal macroscopique.

48 ◗
06_Chap4 Page 49 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS DE LA THYROÏDE 4

Une irradiation postopératoire peut être retenue s’il existe un risque conséquent
de résidu tumoral cervical.
Les indications sont plus controversées dans la situation (fréquente) d’un
patient jeune (moins de 45 ans) présentant un carcinome papillaire pur ou
mixte sans extension ganglionnaire. Le choix entre lobo-isthmectomie et thy-
roïdectomie totale est difficile chaque attitude ayant des avantages et des
inconvénients : faible morbidité pour la première mais difficultés de
surveillance ; risque parathyroïdien et récurrentiel pour l’autre mais prise en
charge des formes bilatérales microscopiques et facilité de la surveillance. Si,
en revanche, l’isthme est envahi lors d’une lobectomie, la totalisation chirurgi-
cale est nécessaire.
Les formes indifférenciées ou anaplasiques sont traitées par chirurgie quand elle
est possible suivie de radiothérapie et de chimiothérapie.
En cas de métastase inaugurale d’un cancer thyroïdien différencié, la thyroïdec-
tomie totale est nécessaire pour permettre le traitement des localisations secon-
daires par l’iode radioactif sans que la thyroïde en place n’en capte l’essentiel.

◗ SUIVI Les cancers différenciés de la thyroïde sont des maladies d’évolution lente pré-
sentant une longue période de risque de récidive ou de métastases.
L’examen clinique cervical et le dosage de la thyroglobuline (Tg) constituent
l’essentiel de la surveillance après thyroïdectomie totale, au-delà du suivi du trai-
tement substitutif.
La Tg est un marqueur sérique spécifique des thyrocytes dans la mesure où elle
constitue la prohormone des hormones thyroïdiennes. Son dosage est sans inté-
rêt dans le diagnostic initial des cancers thyroïdiens. En revanche, elle est très
utile au suivi des formes différenciées après thyroïdectomie totale à la condition
que soit précisé l’état de stimulation thyroïdienne, la sensibilité et la valeur du
dosage étant optimale en défreination complète ou après administration de TSH
recombinante. Il est par ailleurs indispensable d’accompagner le dosage d’une
mesure de la concentration d’anticorps anti-thyroglobuline compte tenu de la
fréquence des phénomènes auto-immunitaires.
Le dosage de la thyroglobuline sera réalisé tous les six mois pendant deux ans
puis tous les ans à vie, étant donné l’évolution très lente des épithéliomas thy-
roïdiens.
En cas d’élévation du taux de thyroglobuline au cours du suivi, une scintigraphie
« corps entier » à l’iode 131 en défreination est indiquée à la recherche de loca-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

lisations cervicales ou extracervicales fixant l’iode radioactif.


Si le patient a été traité initialement par thyroïdectomie partielle, le schéma de
suivi est le même, mais l’élévation éventuelle du taux de Tg en cas de fait nou-
veau tumoral est moins sensible. Par ailleurs, la scintigraphie « corps entier » à
l’iode radioactif est sans intérêt si une totalisation chirurgicale préalable n’est pas
effectuée.

◗ RÉSULTATS Les cancers différenciés de la thyroïde, notamment les formes papillaires sont
des maladies de bon pronostic, guéris dans plus de 80 % des cas dans leurs
formes initiales cervicales.

49 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Les facteurs détériorant le pronostic sont :


– l’âge, le pronostic étant d’autant meilleur que le patient est jeune ;
– le degré de différenciation, l’apparition d’une dédifférenciation même
partielle étant un élément de mauvais pronostic, les cancers anaplasiques
ayant une survie quasi-nulle à 3 ans ;
– l’extension locorégionale — bien que chez l’enfant, où les cancers thyroï-
diens sont souvent localement évolués, le pronostic reste excellent.

◗ CARCINOME MÉDULLAIRE DE LA THYROÏDE


Le carcinome médullaire de la thyroïde représente environ 5 % des cancers de
la thyroïde. Il est développé aux dépens des cellules C parafolliculaires de la
thyroïde d’origine neurectodermique au sein du système APUD (Amine Precur-
sor Uptake and Decarboxylation). Le carcinome médullaire est ainsi une tumeur
embryologiquement voisine des mélanomes, des phéochromocytomes ou des
neuroblastomes. Les cellules C sécrètent la thyrocalcitonine et souvent de l’ACE.
Les cancers médullaires de la thyroïde sont des maladies à diffusion ganglion-
naire et viscérale rapide et importante.

◗ Formes cliniques
La présentation clinique peut être indistincte de celle des formes différenciées
c’est-à-dire un nodule thyroïdien isolé. C’est le cas de la plupart des formes
sporadiques bien que la fréquence des adénopathies cervicales, souvent révé-
latrices, soit nettement plus élevée que dans les formes différenciées.
Dans les formes héréditaires, l’interrogatoire aura souvent retrouvé des antécé-
dents familiaux d’endocrinopathies diverses ou d’autres manifestations de néo-
plasies endocriniennes multiples 2 (NEM 2). La présentation clinique est alors
souvent celui d’une tumeur bilatérale à extension ganglionnaire importante.
Il est décrit trois formes de carcinome médullaire thyroïdien héréditaire :
– une forme familiale habituellement d’évolution lente ;
– une forme associée à un phéochromocytome et une hyperplasie para-
thyroïdienne (NEM 2A) ;
– enfin, une forme associant au carcinome médullaire un phéochromocy-
tome et des neurinomes muqueux et intestinaux (NEM 2B).
Ces formes héréditaires sont dues à une mutation portant sur le proto-oncogène ret.

◗ Diagnostic
La constatation de taux élevés de thyrocalcitonine sérique permet d’obtenir une
très forte présomption diagnostique qui sera confirmée par l’analyse anatomo-
pathologique de la pièce opératoire.
La possibilité d’endocrinopathies multiples fait rechercher systématiquement un
éventuel phéochromocytome associé dont le traitement chirurgical sera effectué
avant la thyroïdectomie compte tenu des risques hémodynamiques.
La connaissance du déterminisme génétique de certaines formes de carcinome
médullaire a permis de proposer une stratégie de dépistage oncogénétique
dans les groupes familiaux au sein desquels un membre présente l’affection.
C’est ainsi qu’après enquête familiale et établissement d’un arbre généalogique,
il est proposé deux séries de tests :
– un dosage de la thyrocalcitonine de base et sous stimulation par la
pentagastrine ;
– la recherche d’une mutation du proto-oncogène ret.

50 ◗
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CANCERS DE LA THYROÏDE 4

L’existence d’anomalies biologiques et/ou génétiques fait retenir l’indication de


thyroïdectomie totale préventive chez les sujets concernés, y compris en
l’absence de toute anomalie morphologique préopératoire de la glande.

◗ Traitement
Le seul traitement des cancers médullaires est chirurgical sous la forme d’une
thyroïdectomie totale avec évidemment souvent bilatéral, parfois agrandi au
médiastin si nécessaire.
Le caractère complet ou non de la chirurgie sera apprécié par les taux postopé-
ratoires de thyrocalcitonine, qui s’ils restent élevés peuvent témoigner soit de
résidus dans le cou soit d’un syndrome métastatique méconnu.

◗ Suivi
La surveillance post-thérapeutique sera effectuée par l’examen clinique et sur-
tout le dosage de la thyrocalcitonine et de l’ACE. L’élévation forte de ce dernier
est souvent le signe d’une extension métastatique.

◗ Résultats
Les formes localisées sans envahissement ganglionnaire sont guéries dans près
de 90 % des cas, les formes avec extension ganglionnaire dans moins de 50 %.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


51 ◗
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Tumeurs du système
nerveux central1 5
É. MOYAL

◗ DONNÉES GÉNÉRALES COMMUNES ◗ SITUATIONS D’URGENCES : DIAGNOSTIC


◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET PRISE EN CHARGE
◗ ÉTIOLOGIE ◗ HISTOPATHOLOGIE
◗ CIRCONSTANCES DU DIAGNOSTIC ◗ ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE
◗ PROCÉDURES DIAGNOSTIQUES ET CLASSIFICATION
COMPLÉMENTAIRES ◗ PRINCIPES DU TRAITEMENT
◗ CONCLUSION

◗ DONNÉES GÉNÉRALES COMMUNES


Les tumeurs du système nerveux central (SNC) représentent moins de 5 % de
l’ensemble des cancers, 80 % étant localisées au cerveau, 20 % à la moelle
épinière. Elles sont liées à l’âge, avec deux pics de fréquence, l’un dans l’enfance,
l’autre vers 50-70 ans. Elles posent des problèmes thérapeutiques complexes
liés à la richesse fonctionnelle du tissu nerveux avoisinant et à leur caractère
localement invasif, même quand elles sont histologiquement bénignes.
Les tumeurs primitives du SNC sont des maladies tumorales particulières dans
la mesure où elles ne s’étendent qu’exceptionnellement au-delà du SNC. La
plupart de ces tumeurs sont des gliomes et doivent toutes être considérées
comme potentiellement malignes dans la mesure où elles sont localement inva-
sives et infiltrantes, rendant leur exérèse complète quasiment impossible sauf
pour les astrocytomes cérébelleux de l’enfant.
Malgré les progrès réalisés par les techniques chirurgicales et radiothérapiques, les
tumeurs du SNC s’accompagnent d’une mortalité et d’une morbidité élevées. Cer-
taines de ces tumeurs ont en outre une propension à essaimer dans les espaces
sub-arachnoïdiens et dans les ventricules, ce qui constitue la voie métastatique
essentielle à travers les leptoméninges, le long de la moelle épinière.
La place de la chimiothérapie reste discutée dans la mesure où elle n’apporte
pas clairement de gain substantiel en termes de survie des patients, sauf dans
certaines formes particulières de tumeurs du SNC chez l’enfant.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE Chez l’adulte, environ 2 % des décès liés aux cancers sont dus aux tumeurs du
SNC. Elles représentent entre 2 et 5 % de l’ensemble des cancers. Vingt à 40 %
des tumeurs cérébrales sont en fait secondaires à des cancers extracérébraux,
en particulier du poumon, du sein ou du tube digestif.
Chez l’enfant, les tumeurs cérébrales primitives représentent le deuxième plus
fréquent type de cancer après les leucoses. À l’opposé de l’adulte, elles sont le
plus souvent sous-tentorielles, concernant le cervelet, le tronc cérébral, la protu-
bérance ou la moelle.

1. Item n° 146. Tumeurs intracrâniennes.



53 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Tumeurs primitives de l’adulte


Les gliomes représentent 50 % de toutes les tumeurs primitives du SNC, les
astrocytomes de haut grade et les glioblastomes en constituant environ la moi-
tié. Ils sont le plus souvent cérébraux et surviennent entre 40 et 60 ans. L’inci-
dence des gliomes malins est de 7 000 nouveaux cas par million d’habitants
par an et dans le même temps 4 500 décès par million d’habitants par an sont
dus à cette affection.
Les méningiomes sont les plus fréquentes des tumeurs non gliales. Ils survien-
nent le plus souvent vers 50 ans dans la région parasagittale cérébrale et dans
la partie antérieure de la base du crâne. Très rarement, ces tumeurs présentent
une évolution agressive avec croissance rapide et envahissement local.
Les gliomes malins sont plus fréquents chez l’homme (sex-ratio maximal pour
les glioblastomes de 1,6), tandis que les méningiomes sont plus fréquents chez
la femme.
Les adénomes hypophysaires représentent entre 12 et 18 % des tumeurs intra-
crâniennes, la majorité étant chromophobes non sécrétants. Ils ne présentent
jamais de caractéristiques de malignité.
Les neurinomes ou schwannomes sont des maladies uniquement de l’adulte,
strictement bénignes.
Il est à noter une augmentation du nombre de tumeurs cérébrales en particulier
chez l’adulte âgé de plus de 70 ans dans les pays développés. Cette augmen-
tation apparente peut être due à une véritable augmentation de l’incidence, ou
à une meilleure efficacité diagnostique, en particulier due à l’utilisation de l’IRM.
Le nombre des lymphomes cérébraux semble être en réelle augmentation, en
particulier en raison du nombre croissant de sujets immunodéprimés.

◗ Tumeurs primitives de l’enfant


Les médulloblastomes constituent environ 30 % des tumeurs du SNC de
l’enfant, à égalité avec les astrocytomes de faible grade de malignité. Les épen-
dymomes (12 %) siègent souvent dans le IVe ventricule. Environ 60 à 70 % de
ces tumeurs siègent dans la fosse postérieure.
Les gliomes des voies optiques sont habituellement des astrocytomes bien dif-
férenciés s’étendant très progressivement le long des voies optiques. Leur fré-
quence est de 5 % des tumeurs du SNC de l’enfant.
Environ 80 % des craniopharyngiomes surviennent avant 30 ans, pouvant simu-
ler les symptômes d’un adénome hypophysaire non sécrétant.
Les tumeurs pinéales ou tumeurs de l’épiphyse, constituent un groupe particu-
lier des tumeurs du SNC. Elles regroupent des tératomes, des pinéalomes ou
pinéaloblastomes et des germinomes. Les pinéaloblastomes ont un haut pou-
voir métastatique le long des voies épendymaires, les germinomes et tératomes
s’accompagnent habituellement d’un taux élevé de marqueurs (α-fœtoprotéine,
β-HCG) dans le LCR et dans le sang.

◗ Tumeurs de la moelle épinière


La majorité des tumeurs médullaires sont extradurales et d’origine métastatique.
Les tumeurs médullaires primitives sont en revanche intradurales, les plus fré-
quentes étant extramédullaires comme les méningiomes et les neurinomes
(30 % environ). Les gliomes représentent 25 % des tumeurs vraies de la
moelle, deux tiers étant des épendymomes, la moitié d’entre eux naissant dans
le cône terminal ou la queue de cheval. La plupart sont bien différenciés et
surviennent vers 40 ans. D’autres tumeurs comme les kystes dermoïdes, les
hémangioblastomes ou les chordomes sont beaucoup moins fréquentes.

54 ◗
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TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

◗ ÉTIOLOGIE
Aucune cause précise dans l’apparition des tumeurs primitives du SNC n’est
connue. Cependant :
– un certain nombre d’anomalies génétiques sont associées à des tumeurs
du SNC (méningiomes et anomalies du chromosome 22, astrocytome
pilocytique du chiasma et astrocytome du tronc cérébral pour la neurofi-
bromatose de type I, astrocytome sous-épendymaire de la sclérose tubé-
reuse de Bourneville, syndrome des basocellulaires pigmentés multiples
et médulloblastome, polypes intestinaux et tumeur cérébrale dans le syn-
drome de Turcot, etc.) ;
– l’exposition aux nitroso-urées est considérée comme un facteur de ris-
que chez l’homme, éventuellement reconnue comme risque profes-
sionnel ;
– l’irradiation à forte dose, surtout lorsqu’elle a eu lieu dans l’enfance : le
risque relatif le plus élevé est pour les tumeurs des gaines nerveuses et
des méninges et moindre pour les tumeurs gliales ;
– en revanche, le rôle suspecté des ondes électro-magnétiques et des
champs magnétiques n’a pas été confirmé par des études
épidémiologiques ;
– l’immunosuppression chronique comme lors d’une transplantation rénale
ou d’un syndrome VIH s’accompagne d’une augmentation de fréquence
des lymphomes non hodgkiniens primitifs cérébraux.
L’étude caryotypique des cellules tumorales gliales révèle des anomalies multi-
ples dont certaines seraient caractéristiques de l’anomalie tumorale.
Bien que la nature exacte des événements successifs menant à la constitution
d’une tumeur du tissu nerveux central soit inconnue, les études expérimentales
suggèrent qu’une accumulation d’anomalies génétiques puisse mener à l’acqui-
sition d’un phénotype malin via l’activation de certains oncogènes ou de récep-
teurs de facteurs de croissance, et par la perte de certains gènes suppresseurs
de tumeurs. À titre d’exemple, il est retrouvé dans les glioblastomes survenant
chez le patient jeune de moins de 40 ans une fréquente mutation de p53
(deux tiers des cas) qui correspond à la transformation en haut grade d’un astro-
cytome de bas grade, associé à la perte du chromosome 10, stigmate du glio-
blastome, alors que pour les glioblastomes survenant de novo chez le sujet de
60 ans, présentant une perte du chromosome 10, la mutation de p53 est rare-
ment retrouvée.

◗ CIRCONSTANCES DU DIAGNOSTIC
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Le développement d’un syndrome expansif tissulaire intracrânien est susceptible


d’entraîner une symptomatologie très variable selon la topographie, l’âge du
patient et la rapidité de croissance.

◗ Hypertension intracrânienne (HTIC)


Elle accompagne les tumeurs rapidement évolutives et invasives. La tumeur
elle-même, ou l’œdème périphérique qui l’accompagne, entraîne des cépha-
lées, des nausées, des vomissements et une diminution du niveau de
conscience. En revanche, des tumeurs de croissance très lente comme les
méningiomes peuvent atteindre des tailles importantes sans HTIC. Les tumeurs

55 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

localisées sur les voies d’écoulement du LCR (gliomes thalamiques, kystes col-
loïdes du IIIe ventricule, épendymomes, tumeurs cérébelleuses médianes)
entraînent souvent des syndromes aigus d’HTIC par hydrocéphalie.

◗ Signes en foyer
Ils sont caractéristiques de la localisation. Ainsi, une lésion temporale pourra
entraîner une hémianopsie homonyme, une lésion dans la zone de Rolando
des crises irritatives Bravais-Jacksoniennes. L’étude de cette symptomatologie
permet souvent de prévoir avant les explorations complémentaires la zone de
développement tumoral (fig. 5.1, 5.2 et 5.3).

➤ Fig. 5.1. Anatomie schématique du cortex encéphalique avec projection des cavités épendymaires. ➤

V : ventricule Trou de Monro


Scissure de Rolando
Lobe frontal Lobe pariétal

Corne frontale
du IIIe V Corne occipitale
du IIIe V

Corne temporale
du IIIe V Lobe occipital

Aqueduc de Sylvius Scissure calcarine


Scissure de Sylvius Foramen de Magendie

Lobe temporal
IVe ventricule
Récessus latéral

➤ Fig. 5.2. Coupe sagittale médiane de l’encéphale (schématique). ➤

Sillon du corps calleux


Fornix Corps calleux
Septum pellucidum Commissure habénulaire
Trou de Monro
Thalamus
Commissure antérieure

Chiasma optique Cervelet


Hypophyse
Pédoncule cérébral Épiphyse
Protubérance Commissure postérieure
Aqueduc de Sylvius Lame quadrigémilane
IVe ventricule
Moelle cervicale


56 ◗
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TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

➤ Fig. 5.3. Coupe schématique horizontale de l’encéphale (A, B) passant à deux niveaux des noyaux
gris centraux. ➤

A B

Tête du noyau caudé

Capsule interne
Genou du corps Putamen
calleux
Globus pallidus
Ventricule latéral
Noyau lenticulé
Septum pellucidum
e
III ventricule
Insula
Capsule externe
Thalamus
Capsule interne
Plexus chorroïde (partie postérieure)
e
du III ventricule
Queue du noyau caudé
Splenium
du corps calleux Hippocampe
Habénula

Épiphyse

Thalamus
Noyau caudé
corps
tête
Queue du noyau caudé

A
B

Noyau lenticulé
(globus pallidus,
putamen) Corps amygdalien

◗ Histoire clinique
Le début des symptômes est le plus souvent lentement progressif avec des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

périodes d’aggravation plus ou moins brutales. Chez l’adulte, la survenue de


crises épileptiques doit toujours faire craindre l’existence d’une pathologie tumo-
rale cérébrale qui sera retrouvée environ une fois sur trois. Les céphalées sont
souvent homolatérales à la tumeur, les tumeurs de la fosse postérieure s’accom-
pagnant fréquemment d’une raideur de la nuque.

◗ Examen clinique
L’examen physique et neurologique est indispensable chaque fois qu’il existe
des troubles du comportement, une somnolence, une léthargie, une désorien-
tation, de petits signes d’aphasie ou d’apraxie, une asymétrie du fonctionnement
des paires crâniennes, une incoordination, une faiblesse musculaire ou des trou-
bles distaux de la sensibilité.

57 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ PROCÉDURES DIAGNOSTIQUES COMPLÉMENTAIRES


L’examen du fond d’œil doit être un geste de routine, possible le plus souvent
sans l’obtention d’une mydriase médicamenteuse, afin de détecter un éventuel
œdème papillaire, signe d’une HTIC.

◗ Imagerie
◗ Tomodensitométrie
La tomodensitométrie cérébrale (TDM, fig. 5.4 et 5.5) permet la mise en évi-
dence du syndrome expansif, de l’œdème qui l’accompagne, d’une éventuelle
hydrocéphalie. Il doit comporter un temps avec injection de produit de
contraste, l’opacification de la lésion comportant une signification diagnostique
péjorative.

◗ Imagerie par résonance magnétique


L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est la plus récente des méthodes
d’exploration du SNC. Elle est l’examen de choix pour la plupart des tumeurs
du SNC (fig. 5.6). Examen atraumatique, l’IRM permet d’obtenir des explorations
sagittales particulièrement performantes dans l’étude de la moelle épinière et
de la fosse postérieure. Au niveau sus-tentoriel, elle apporte des renseignements
différents de ceux de la tomodensitométrie, particulièrement utiles pour les
tumeurs de bas grade. Les différentes séquences d’exploration, dites en T1 et
T2, l’utilisation de gadolinium, permettent une analyse morphologique très fine
des lésions expansives du SNC.

◗ Explorations vasculaires
L’angiographie cérébrale reste utilisée en raison des renseignements irrempla-
çables qu’elle fournit sur la vascularisation cérébrale normale et tumorale. Elle
permet de préciser les rapports vasculaires de la tumeur et, par ailleurs, elle est
le seul moyen de mettre en évidence des anomalies vasculaires pseudotumo-
rales (malformations artérioveineuses, par exemple).

◗ Tomographie par émission de positrons (TEP)


et spectroscopie
Ces techniques plus récentes peuvent actuellement donner des informations
sur les fonctions et métabolisme cérébraux. Les imageries métaboliques et fonc-
tionnelles peuvent aider à une meilleure compréhension, d’une part, du rapport
entre le volume tumoral et le tissu sain fonctionnel et, d’autre part, de la nature
même de la lésion tumorale.

◗ LCR
L’étude du LCR par ponction lombaire ou atlo-occipitale doit être évitée en cas
d’HTIC patente. Cependant, dans les autres cas, elle peut permettre un examen
cytologique des cellules éventuellement desquamées dans les cavités épendy-
maires ou le dosage de marqueurs tumoraux comme l’α-fœtoprotéine ou la
β-HCG.

58 ◗
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TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

➤ Fig. 5.4. Coupe tomodensitométrique horizontale médioencéphalique. ➤

➤ Fig. 5.5. Coupe tomodensitométrique montrant un gliome malin de haut grade en topographie
encéphalique profonde (cavité nécrotique avec prise de contraste périphérique). ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Biopsie
La biopsie de la plupart des tumeurs du SNC, en particulier intracrânienne, est
importante pour le diagnostic et le choix du traitement. Elle est réalisée lorsque
la chirurgie n’est pas réalisée d’emblée ou est impossible, et qu’un diagnostic
anatomopathologique s’impose. La morbidité de cet acte a beaucoup diminué,
en particulier grâce au développement de la technique de biopsie réalisée en
conditions stéréotaxiques.

59 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 5.6. Coupe horizontale en IRM montrant un gliome de faible grade de topographie frontocalleuse
droite. ➤

◗ SITUATIONS D’URGENCES :
DIAGNOSTIC ET PRISE EN CHARGE

◗ Hypertension intracrânienne
◗ Signes cliniques
L’HTIC fait partie des situations cliniques classiques rencontrées lors du diagnos-
tic d’une tumeur intracrânienne et constitue une urgence diagnostique et théra-
peutique, surtout en raison du risque d’engagement, qui peut être mortel. Elle
associe à des degrés variables :
– les vomissements : faciles, en jet ;
– les céphalées : plutôt matinales et diffuses ;
– les troubles de la conscience : une torpeur s’installe de façon progressive ;
– les troubles visuels associant diminution de l’acuité visuelle due à la
compression du nerf optique et diplopie due à la compression du VI.
L’HTIC peut mener, si elle n’est pas diagnostiquée et traitée, à l’engagement, en
particulier l’engagement trans-tentoriel à travers le foramen de la tente du cer-
velet (ptosis, mydriase unilatérale homolatérale par compression du III, hémiplé-
gie homolatérale par compression du mésencéphale, et rigidité de
décérébration), l’engagement sous-falcique dans les tumeurs du lobe frontal, ou
encore l’engagement des amygdales cérébelleuses dans le trou occipital, dans
le cas des tumeurs de la fosse postérieure, conduisant rapidement à la mort par
troubles neurovégétatifs.
Cette HTIC dans le cas de tumeurs cérébrales est due à l’expansion de la
tumeur intracrânienne, à l’œdème péritumoral classiquement associée aux
tumeurs en particulier de haut grade, ou aux deux combinés, ou encore à une
hydrocéphalie due à un obstacle tumoral sur les voies de drainage du LCR (par
exemple, tumeur de la fosse postérieure créant une obstruction des trous de
Magendie et de Luschka, à l’origine d’une hydrocéphalie).

60 ◗
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TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

◗ Conduite à tenir
Il est nécessaire de réaliser un fond d’œil qui montrera un œdème papillaire, puis
un scanner cérébral en urgence qui sera également diagnostique puisqu’il mon-
trera le processus expansif, l’œdème, et l’engagement s’il est présent.
Le traitement consiste en un premier temps en une corticothérapie (dexamé-
thasone) à visée anti-œdémateuse éventuellement complétée par l’administra-
tion de mannitol, une dérivation du LCR en cas d’hydrocéphalie, et surtout, si
elle est possible, à l’exérèse de la tumeur à l’origine de cette HTIC. Dans le cas
d’une tumeur expansive non résécable (exemple d’une tumeur du tronc), une
irradiation de la tumeur à visée décompressive peut être également proposée
en urgence associée à un traitement anti-œdémateux.

◗ Compression médullaire
En ce qui concerne ce sujet voir chapitre 16, urgences neurologiques (p. 307).

◗ HISTOPATHOLOGIE
La classification des tumeurs du SNC est particulièrement complexe (tableau 5.I).
Cependant son importance est certaine, dans la mesure où les différents types
histopathologiques tumoraux présentent des potentiels évolutifs et pronostiques
très différents.

Tableau 5.I. Classification OMS des tumeurs cérébrales primitives


Tumeurs neuro-épithéliales Tumeurs neurectodermales
Tumeurs astrocytaires primitives (PNETs)
Astrocytome Médulloblastome
Astrocytome anaplasique PNET cérébrale ou spinale
Glioblastome
Tumeurs oligodendrogliales
Oligodendrogliome
Oligodendrogliome anaplasique
Tumeurs épendymaires
Épendymome
Épendymome anaplasique
Tumeurs mixtes
Oligoastrocytome
Oligoastrocytome anaplasique
Tumeurs des nerfs
Schwannome
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Neurinome
Tumeurs des méninges
Méningiome
Tumeurs du plexus choroïde Tumeurs sellaires
Craniopharyngiome
Adénome hypophysaire
Tumeurs neuronales Tumeurs mésenchymateuses
Gangliogliome Chondrosarcome
Gangliogliome anaplasique Rhabdomyosarcome
Neurocytome Histiocytome fibreux malin
Hemangiopéricytome
Tumeurs épiphysaires Lymphomes
Pinéocytomes
Pinéoblastomes


61 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Les tumeurs sont classées en grades différents selon la différenciation cellulaire. G1


à G3 représentent des stades allant du « bien » au « peu différencié ». Le grade 4
est caractérisé par la présence de nécrose, de pléomorphisme et de néoangioge-
nèse. Le grade IV pour les astrocytomes correspondant aux glioblastomes.
Une nouvelle classification en grade des astrocytomes a été décrite par
Daumas-Duport : elle repose sur la présence de quatre critères :
– atypies nucléaires ;
– mitoses ;
– prolifération endothéliale ;
– nécrose.
Les tumeurs n’ayant aucun de ces critères sont de grade 1 ; la présence d’un
critère définit le grade 2 (astrocytome de bas grade), de deux critères le grade 3
(astrocytome anaplasique) et de plus de deux critères le grade 4 (glioblastome).
Elle classifie les oligodendrogliomes selon deux grades A et B, selon l’absence
(grade A) ou la présence (grade B) d’angiogenèse.

◗ Tumeurs intrinsèques
◗ Tumeurs neuro-épithéliales
Astrocytomes
Ils sont représentés pour l’essentiel par les astrocytomes, les autres types étant
les oligodendrogliomes et les épendymomes. Les astrocytomes peuvent être de
grades histocytopathologiques différents, de I à IV (glioblastome), allant des
tumeurs les mieux différenciées aux lésions polymorphes richement cellulaires
et mitotiques s’accompagnant de nécrose et parfois de cellules géantes. Il existe
une différence évolutive marquée entre les grades 1-2 et 3-4, bien que le pro-
nostic vital à terme reste médiocre pour presque toutes les formes. Ces tumeurs
ont une évolution vers l’envahissement très rapide des structures avoisinantes
ce qui les fait considérer comme malignes quel que soit leur grade.

Épendymomes
Les épendymomes constituent, après les astrocytomes et les médulloblasto-
mes, le troisième type de tumeur cérébrale en fréquence. Ils siègent dans la
plupart des cas au niveau du système ventriculaire, en particulier dans la fosse
postérieure, et surtout au niveau du plancher du quatrième ventricule. Ils peu-
vent aussi atteindre le canal médullaire (environ 10 % des cas).
On classe les épendymomes selon quatre grades : les grades I et II sont géné-
ralement reconnus comme « bénins », les grades III et IV « malins » ou
« anaplasiques ».
Cette pathologie est souvent révélée par un syndrome d’HTIC. En raison de
son siège, il n’est pas rare que la tumeur s’accompagne également d’une
extension vers le canal rachidien et/ou d’une dissémination à distance sur les
voies d’écoulement du LCR qu’il convient de rechercher.

Oligodendrogliomes
Ils représentent 10 à 15 % des tumeurs gliales. On les classe actuellement
selon deux grades : stade A (absence d’angiogenèse) et stade B (présence
d’angiogenèse). Une crise comitiale est souvent révélatrice chez le sujet de
35-45 ans. Le scanner cérébral retrouve dans 80 % des cas des calcifica-
tions. En IRM, la lésion est hypo-intense en T1, hyperintense en T2. Il
n’existe pas de prise de contraste pour les grades A.

62 ◗
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TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

◗ Tumeurs neurectodermales primitives (PNETs)


Médulloblastomes
Ce sont des tumeurs neurectodermales primitives survenant essentiellement chez
l’enfant, situées dans la fosse postérieure au niveau du cervelet et des structures
avoisinantes (vermis et pédoncules). De par leur localisation, ces tumeurs sont
souvent révélées par un syndrome d’HTIC associé à un syndrome cérébelleux.
Ces tumeurs sont de croissance rapide, infiltrantes et ont tendance à coloniser les
espaces sub-arachnoïdiens et à disséminer le long des méninges. Il existe peu de
différences histopathologiques entre les différents médulloblastomes.

◗ Tumeurs des structures de soutien


Méningiomes
Ils se développent aux dépens des leptoméninges, en particulier celles de la
base du crâne. Ce sont en général des tumeurs lentement évolutives.

Neurinomes
Ils naissent des cellules de Schwann des nerfs crâniens ou des racines nerveu-
ses. Les plus fréquents concernent la VIIIe paire crânienne, développés dans
l’angle ponto-cérébelleux et responsables d’une surdité progressive puis d’une
atteinte du VII avant envahissement endocérébral.

◗ Tumeurs dysembryonnaires
Elles naissent de cellules qui ont transité ou ont existé dans le SNC lors de la
vie embryonnaire mais qui ne devraient plus s’y trouver à l’âge adulte. Il s’agit
des hémangioblastomes, des kystes dermoïdes, des kystes colloïdes du
IIIe ventricule, des craniopharyngiomes. La malignité de ces lésions est en règle
faible, mais leur gravité fréquente du fait de leur localisation.
Les craniopharyngiomes sont souvent révélés par des signes visuels associés ou
non à des signes endocriniens. Ils sont caractérisés au niveau radiologique par
la présence de calcifications de la région sellaire.

◗ Adénomes hypophysaires
Ils ne constituent pas de vraies tumeurs du SNC, mais ont parfois une présen-
tation clinique voisine en particulier pour les formes non sécrétantes (compres-
sion visuelle, dysfonctionnement hypothalamique, compression temporale).
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Métastases1
Les localisations cérébrales métastatiques constituent les syndromes tumoraux
expansifs intracrâniens les plus fréquents et posent parfois des problèmes de
diagnostic différentiel difficile avec les tumeurs primitives.

◗ ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE ET CLASSIFICATION


L’essentiel de l’évaluation préthérapeutique repose sur l’examen clinique,
l’exploration tomodensitométrique ou l’IRM (tableau 5.II). L’âge du patient,

1. Voir chapitre 17 : Métastases et maladie métastatique.


63 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

l’importance des troubles cliniques et en particulier du déficit moteur, la topo-


graphie et la taille de la tumeur sont les éléments essentiels de la décision thé-
rapeutique et en particulier de l’indication opératoire.

Tableau 5.II. Indications et performances des techniques d’imagerie pour les


tumeurs du SNC
Technique Performance diagnostique Indication
initiale
TDM Meilleur examen diagnostique de première intention Oui
et de suivi des tumeurs cérébrales ; performances
médiocres pour les tumeurs médullaires
IRM Examen de grande qualité pour les astrocytomes Oui
de bas grade, les tumeurs de la fosse postérieure,
de l’angle ponto-cérébelleux, du tronc cérébral
et de la moelle
Scintigraphie Sensibilité diagnostique médiocre. Peut venir Non
cérébrale en complément des autres examens dans la recherche
au gallium d’une présomption d’évolutivité des tumeurs de bas
grade
Angiographie Exploration indispensable pour les tumeurs vasculaires. Non
Contribue à l’élaboration du programme chirurgical
Repérage Indispensable à la réalisation d’un geste biopsique Non
radiologique d’orientation
stéréotaxique

Une difficulté particulière à la neuro-oncologie réside dans l’obtention d’un dia-


gnostic histopathologique avant l’indication thérapeutique. Si les aspects lésion-
nels neuroradiologiques peuvent largement orienter, il arrive souvent que seul
l’examen histologique peropératoire extemporané ou postopératoire permette le
diagnostic définitif de nature. Un intermédiaire diagnostique utile peut être
représenté par la biopsie stéréotaxique initiale.
Les tableaux 5.III et 5.IV présentent respectivement la classification des gliomes
sus-tentoriels et des tumeurs primitives sous-tentorielles.

Tableau 5.III. Classification T des gliomes sus-tentoriels


T1 Diamètre < 5 cm, limité à un hémisphère
T2 Diamètre > 5 cm, limité à un hémisphère
T3 Diamètre pouvant être < 5 cm mais avec envahissement ou compression
du système ventriculaire
T4 Franchissement de la ligne médiane, extension à l’hémisphère controlatéral
et/ou à la fosse postérieure

Tableau 5.IV. Classification T des tumeurs primitives sous-tentorielles


T1 Tumeur < 3 cm, strictement médiane (vermis, toit du IV e ventricule)
ou cérébelleuse hémisphérique
T2 Tumeur > 3 cm, envahissant une structure voisine ou comblant partiellement
le IVe ventricule
T3A Tumeur envahissant deux structures voisines et comblant totalement
le IVe ventricule avec extension à l’aqueduc de Sylvius, au trou de Magendie
ou au foramen de Luschka et avec HTIC marquée


64 ◗
07_Chap5 Page 65 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

Suite du tableau 5.IV. ➤


T3B Tumeur développée à partir du plancher du IV e ventricule ou du tronc cérébral
et comblant le IVe ventricule
T4 Tumeur passée à travers l’aqueduc de Sylvius avec envahissement
du IIIe ventricule ou étendue à la moelle cervicale

◗ PRINCIPES DU TRAITEMENT (tableau 5.V)

◗ Chirurgie
L’exérèse tumorale constitue sauf exception le moyen thérapeutique essentiel.
Cependant, les possibilités d’exérèse sont limitées par l’opérabilité du sujet, la
taille tumorale, sa localisation et son évolution invasive dans le parenchyme
cérébral normal.
Le traitement chirurgical exclusif des tumeurs gliales malignes est rarement cou-
ronné de succès dans la mesure où une exérèse totale est quasi impossible en
raison de l’évolution tumorale infiltrante. Ceci est particulièrement vrai pour les
astrocytomes de grade III et les glioblastomes. Seuls les astrocytomes de faible
grade peuvent être enlevés complètement, ceux survenant chez l’enfant et dans
les hémisphères cérébelleux étant alors régulièrement guéris.

◗ Radiothérapie
La plupart des tumeurs cérébrales sont sensibles à l’irradiation. Cependant, les
performances de la radiothérapie sont limitées par la sensibilité du parenchyme
cérébral normal et de la vascularisation cérébrale.
Une irradiation exclusive est généralement indiquée quand :
– la tumeur est centrale, inextirpable sans risques majeurs (cerveau
médian, troisième ventricule, tronc cérébral) ;
– la tumeur est métastatique ;
– il s’agit d’une tumeur maligne très radiosensible comme un dysgermi-
nome épiphysaire.
L’irradiation postopératoire est en règle générale retenue en cas de :
– astrocytomes de grades III et glioblastome (grade IV) ;
– épendymomes de haut grade ;
– médulloblastomes ;
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– oligodendrogliomes, de grades III et IV ;


– craniopharyngiomes ;
– neurinomes ou méningiomes d’exérèse incomplète.
La dose et le volume d’irradiation dépendent de la localisation, de la forme his-
tologique et de l’importance de l’exérèse tumorale première éventuelle. Habi-
tuellement le niveau de dose est voisin de 55 à 60 Gy, sur un volume
englobant la lésion avec une marge de sécurité variable habituellement de 1 à
2 cm. Chez l’enfant les doses doivent être réduites sans dépasser 40 Gy à
l’ensemble de l’encéphale. Certaines formes histologiques comme les médullo-
blastomes conduisent à proposer des irradiations concomitantes de l’axe spinal
sans franchir 35 à 40 Gy. À l’inverse, certains syndromes expansifs de petite
taille, histologiquement bénins ou de malignité faible, peuvent faire l’objet d’irra-
diations sur des volumes très réduits par radiothérapie stéréotaxique ou radio-
chirurgie.

65 ◗
07_Chap5 Page 66 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

L’irradiation cérébrale peut initialement aggraver l’œdème intracérébral, justifiant


une corticothérapie per-radiothérapique. L’épilation du scalp n’est définitive que
pour les très hautes doses et peut être souvent techniquement évitée. Le risque
tardif essentiel est celui de radionécrose pouvant simuler une récidive tumorale
et de diagnostic différentiel radiologique parfois difficile.

Tableau 5.V. Indications thérapeutiques générales pour les tumeurs primi-


tives les plus fréquentes du SNC
Tumeur Chirurgie Radiothérapie Chimiothérapie
Gliome de faible Exérèse complète Sur résidu, Pas d’indication
grade chaque fois sur récidive
que possible ou sur tumeur
inextirpable
(45 à 55 Gy)
Gliome malin de haut Exérèse Systématique En évaluation
grade décompressive (60 à 80 Gy)
maximale
« raisonnable »
Médulloblastome Exérèse complète Systématique Systématique chez
chaque fois sur l’ensemble l’enfant
que possible du névraxe
(35 à 55 Gy)
Méningiome Exérèse complète Sur résidu, Pas d’indication
chaque fois sur récidive
que possible ou sur tumeur
inextirpable
(50-55 Gy)
Adénome Exérèse complète Systématique Pas d’indication
hypophysaire pour les formes
extrasellaires
(45 à 60 Gy)
Craniopharyngiome Exérèse complète Systématique Pas d’indication
ou, au moins, (45 à 60 Gy)
affaissement
kystique
Tumeur pinéale Éventuelle Systématique Systématique
pour les maladies pour les pour les tumeurs
non germinales dysgerminomes dysembryonnaires
(45 à 55 Gy), sécrétantes,
éventuelle dans éventuelle dans
les autres cas les autres cas
Tumeur gliale Exérèse complète Le plus souvent En évaluation
du tronc cérébral exceptionnellement de nécessité
réalisable (60 Gy)

◗ Chimiothérapie
Aucun protocole chimiothérapique n’a fait à l’heure actuelle la preuve de son
efficacité certaine dans le traitement des tumeurs primitives du SNC de l’adulte.
La barrière hémato-encéphalique située au niveau de l’endothélium capillaire
peut être à l’origine d’une limitation de la diffusion des molécules de chimio-
thérapie au niveau de l’encéphale, bien que dans de nombreuses pathologies,
cette barrière est en fait détruite. Cependant, certains médicaments comme les
nitroso-urées (CCNU, BCNU), les sels de platine, la procarbazine et la vincristine

66 ◗
07_Chap5 Page 67 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

témoignent d’une efficacité réelle (35 à 50 % de réponses) seuls ou en com-


binaison avec d’autres médicaments.
De nombreux essais cliniques sont en cours, portant sur des associations mul-
tiples, ou l’utilisation de nouvelles molécules telles que le témozolomide qui a
fait la preuve d’une efficacité, en particulier sur les astrocytomes anaplasiques
et les oligodendrogliomes de stade B.
L’association avec l’irradiation est susceptible de majorer les réactions immédia-
tes et les complications tardives à type de démyélinisation périvasculaire.
Les corticostéroïdes ont un effet anti-œdémateux irremplaçable et semblent
également avoir un effet antitumoral direct.

◗ Nouvelles molécules
De nombreuses anomalies de protéines appartenant à la signalisation cellulaire
sont impliquées dans la genèse ou l’agressivité de certaines tumeurs cérébrales.
Des molécules ciblant ces protéines ont été isolées et sont en cours d’évaluation
dans le traitement des tumeurs cérébrales Nous citerons en particulier des molé-
cules anti-angiogéniques, des inhibiteurs des métalloprotéinases ou des modu-
lateurs du signal intracellulaire tels que les inhibiteurs de farnésyltansférase.

◗ Résultats et pronostic
Globalement les tumeurs primitives du SNC constituent des maladies graves, un
tiers seulement des patients qui les présentent pouvant bénéficier d’une vie
post-thérapeutique prolongée dans des conditions normales ou subnormales.
Cependant, le pronostic reste variable suivant les formes histologiques, la topo-
graphie et la performance thérapeutique.

◗ Astrocytomes de haut grade (III et IV)


Il n’y a pratiquement pas de survivants à 2 ans porteurs initialement d’un astro-
cytome de grade IV, la moitié décédant dans les 6 mois qui suivent le diagnos-
tic. La survie est légèrement supérieure pour les grades III (20 à 30 %). Les
éléments déterminants du pronostic sont l’âge, l’opérabilité, la qualité macros-
copique de la résection, la dose d’irradiation postopératoire et l’état général
avant tout traitement (Karnofsky). De nombreuses études sont en cours afin de
déterminer des facteurs pronostiques dans ces pathologies. Ainsi, il semble
apparaître qu’au sein des astrocytomes anaplasiques et des glioblastomes,
l’amplification de l’EGFR et la mutation du gène suppresseur de tumeur PTEN
soit des facteurs de mauvais pronostic.

◗ Astrocytomes de grade I et II
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les astrocytomes cérébelleux, en particulier les tumeurs kystiques de l’enfant,


sont guéris dans plus de 90 % des cas par chirurgie seule. De façon plus géné-
rale, les gliomes de l’enfant ont un pronostic meilleur que ceux des adultes
quelle que soit leur topographie (50 % de survie environ à 5 et 10 ans).
Chez l’adulte, la médiane de survie pour les astrocytomes de grade II à partir
du diagnostic se situe entre 5 et 10 ans. Approximativement, 50 % des astro-
cytomes de bas grade de l’adulte se transforment en haut grade lors de la
récidive.

◗ Épendymomes (fig. 5.7)


Les facteurs pronostiques dominants sont l’âge et le grade. En effet, les épen-
dymomes de grade faible de l’enfant ou du jeune adulte sont guéris par asso-

67 ◗
07_Chap5 Page 68 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ciation radiochirurgicale dans 80 % des cas, alors que les épendymoblastomes


ont un pronostic beaucoup plus mauvais (15 %) et sont traités aujourd’hui
comme les médulloblastomes.
➤ Fig. 5.7. IRM sagittale montrant une tumeur de la moelle cervicale correspondant à un épendymome. ➤

◗ Oligodendrogliomes
Ce sont des tumeurs d’évolution lente, capables de récidiver tardivement et
dont les résultats ne peuvent être évalués qu’avec au moins 10 ans de recul.
Ainsi, l’association radiochirurgicale contrôle 80 % des tumeurs à 5 ans, mais
seulement 30 % à 10 ans. Ces tumeurs témoignent d’une chimiosensibilité
nette, en particulier pour les formes de haut grade, pour lesquelles la chimio-
thérapie associant procarbazine, CCNU et vincristine (PCV) a montré des taux
de réponses élevées pour les tumeurs récidivantes. Des essais sont en cours
pour tester l’efficacité de cette chimiothérapie en adjuvant. Au sein de ces
tumeurs, il semble que l’on puisse différencier plusieurs sous-types de popula-
tion plus ou moins sensibles à la chimiothérapie, en fonction de la présence ou
non d’une délétion chromosomique. Ainsi, il apparaît que la présence d’une
délétion du chromosome 1p et du chromosome 19 q est un facteur indépen-
dant de bon pronostic et de chimiosensibilité.

◗ Médulloblastome
La chirurgie initiale, parfois impossible, est systématiquement complétée par une
chimiothérapie par voie générale et une irradiation, classiquement craniospinale.
Une telle association permet d’obtenir plus de deux tiers de guérisons à 5 ans
dans les formes de l’enfant. Cependant, le pronostic dépend de l’âge de l’enfant,
de la qualité de l’exérèse chirurgicale et de la présence ou non de cellules tumo-
rales dans le LCR. De nombreux essais sont en cours afin de déterminer les
meilleures modalités de traitement (diminution de la dose de radiothérapie, déter-
mination de la chimiothérapie à administrer, dans quel cas…).

◗ Tumeurs pinéales et germinomes suprasellaires


Les dysgerminomes purs sont très radiosensibles et hautement curables par
radiothérapie seule. Cependant, il existe toutes les variétés dysembryoplasiques,
y compris celles sécrétant des marqueurs spécifiques comme l’α-fœtoprotéine
ou la β-HCG. Le dosage des marqueurs est indispensable devant toute tumeur
médiane pinéale ou sus-sellaire, dans le sang et dans le LCR. Les protocoles
thérapeutiques actuels associent, après biopsie stéréotaxique, chimiothérapie et

68 ◗
07_Chap5 Page 69 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL 5

irradiation. La chirurgie est réservée aux éventuels résidus tumoraux évolutifs


après traitement.

◗ Adénomes hypophysaires
Les adénomes hypophysaires sont des tumeurs bénignes. Cependant, si les
adénomes sécrétants, de ce fait souvent de diagnostic précoce, peuvent être
traités par chirurgie seule ou moyens médicamenteux exclusifs, les adénomes
non sécrétants sont le plus souvent diagnostiqués au stade de macro-adénome
responsable d’un syndrome compressif. Ils sont alors fréquemment étendus à
la région supra-sellaire, leur exérèse devenant difficile et souvent incomplète.
L’irradiation postopératoire est alors la règle, permettant plus de 80 % de
contrôle définitif avec cependant un risque de panhypopituitarisme (30 à 50 %
des cas).

◗ Craniopharyngiomes
L’extension haute habituelle des craniopharyngiomes rend la chirurgie complète
aléatoire, en particulier pour ce qui est de la composante kystique parfois très
volumineuse de ces tumeurs. La meilleure attitude est certainement la chirurgie
non radicale avec irradiation postopératoire (80 % de contrôle avec survie à
5 ans de plus de 90 %).

◗ Gliomes des voies optiques


L’irradiation techniquement sophistiquée des gliomes des voies optiques (nerfs
et chiasma) permet la restauration visuelle et le contrôle définitif chez 75 % à
100 % des patients.

◗ Méningiomes
Habituellement d’indication chirurgicale exclusive, les méningiomes peuvent
bénéficier d’une irradiation postopératoire en particulier dans les localisations
non corticales (base, sphénoïde). En effet, au niveau de la base du crâne, l’exé-
rèse est rarement totale, et on estime à 50 % le taux de rechute après chirurgie
seule des méningiomes de la base du crâne. Une radiothérapie postopératoire
dans ce cas diminue de moitié ce taux de récidive.

◗ Tumeurs médullaires
La chirurgie va de la biopsie simple à l’exérèse, le plus souvent subtotale, de la
lésion, en fonction de l’existence ou non de plans de clivage. De nombreuses
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tumeurs sont infiltrantes et ne peuvent être enlevées en totalité.


La radiothérapie doit être prudente du fait de la tolérance réputée médiocre de
la moelle à l’irradiation. Elle est le plus souvent effectuée en postopératoire sur
un volume réduit à la tumeur avec une marge de sécurité et à des niveaux de
dose qui ne doivent pas dépasser 50 Gy sur de grands volumes.
La chimiothérapie n’a pas de place déterminée dans le traitement des tumeurs
médullaires.

◗ CONCLUSION La neuro-oncologie mérite encore de multiples efforts diagnostiques et théra-


peutiques, justifiant le grand nombre d’essais en cours portant sur la place de

69 ◗
07_Chap5 Page 70 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

la chimiothérapie, des radiosensibilisants, des faisceaux de particules lourdes, de


la curiethérapie interstitielle, de l’irradiation en conditions stéréotaxiques, entre
autres.

Points clés
• Les tumeurs cérébrales représentent 5 % de l’ensemble des cancers. Il existe deux
pics de fréquence, l’enfance et chez l’adulte la tranche 50-70 ans.
• Chez l’adulte, les astrocytomes sont les tumeurs les plus fréquentes, alors que chez
l’enfant le médulloblastome, l’épendymome et l’astrocytome de bas grade dominent.
• Outre l’examen clinique attentif, les examens complémentaires majeurs sont la
TDM et surtout l’IRM.
• Le diagnostic histologique est apporté par l’examen anatomopathologique de la
pièce opératoire, ou d’une biopsie réalisée en condition stéréotaxique.
• Le traitement associe le plus fréquemment la chirurgie à la radiothérapie, ou la
radiothérapie exclusive lorsque la chirurgie est impossible.
• La place de la chimiothérapie, surtout en adjuvant, n’est pas encore établie et fait
l’objet de nombreux essais cliniques.


70 ◗
08_Chap6 Page 71 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Cancers gynécologiques
6
N. DALY-SCHVEITZER

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE GÉNÉRALE
◗ CANCERS DU COL UTÉRIN
◗ CANCERS DU VAGIN
◗ CANCERS DE LA VULVE
◗ CANCERS DE L’ENDOMÈTRE
◗ SARCOMES DE L’UTÉRUS
◗ TUMEURS DE L’OVAIRE

La plupart des cancers gynécologiques sont curables par l’utilisation harmo-


nieuse des traitements à visée locorégionale que sont la chirurgie et la radiothé-
rapie, dans certains cas renforcées par la chimiothérapie.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE GÉNÉRALE
Jusqu’à la puberté, les cancers gynécologiques sont exceptionnels et restent rares
dans les premières années de la vie génitale. Les lymphomes malins sont les can-
cers gynécologiques les plus fréquents jusqu’à 25 ans, les tumeurs ovariennes non
épithéliales représentant le cinquième cancer le plus fréquent dans ce groupe d’âge.
Ensuite, l’incidence augmente nettement, le cancer utérin, essentiellement cer-
vical, occupant la première place en fréquence à partir de 30 ans, concernant
environ 10 femmes sur 100 000. Après la période de fertilité, l’incidence des
cancers de l’endomètre et de l’ovaire augmente rapidement.
Le développement des techniques de diagnostic précoce pour les cancers du
col utérin explique que, si cette affection était responsable du plus important
nombre de décès par cancer gynécologique en 1930, ces chiffres ont diminué
des deux tiers aujourd’hui et sont devenus proches de ceux liés au cancer de
l’ovaire, dont la fréquence est bien moindre mais pour lequel aucune démarche
de diagnostic précoce n’est encore possible.
Dans le même temps, l’amélioration des moyens thérapeutiques, en particulier
radiothérapiques et chimiothérapiques, a permis d’augmenter le taux de guéri-
son pour un stade évolutif donné tout en diminuant le poids des effets secon-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

daires des traitements.


Il existe huit types différents de cancers gynécologiques qui présentent certaines
similitudes diagnostiques et thérapeutiques mais dont les différences ne per-
mettent pas de les envisager sans les distinguer clairement.

◗ CANCERS DU COL UTÉRIN1


Le cancer du col utérin est le quatrième cancer en fréquence chez la femme
après le cancer mammaire, rectocolique et endométrial. Son incidence a dimi-
nué ces dernières années grâce à la systématisation des frottis cervicovaginaux
ayant permis le dépistage et le traitement des états précancéreux (tableau 6.I).

1. Item n° 147. Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin.



71 ◗
08_Chap6 Page 72 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Tableau 6.I. Rythme chronologique de réalisation de la surveillance cytolo-


gique cervicovaginale de principe
Population Fréquence
> 18 ans ou quel que soit l’âge si activité Frottis initial de référence
sexuelle
Risque élevé : rapports sexuels précoces, Annuel
partenaires multiples
Risque faible : rapports sexuels tardifs, Après deux frottis successifs normaux,
partenaire unique vérification cytologique tous les 3 à 5 ans
Après hystérectomie et ovariectomie Frottis vaginal tous les 3 à 5 ans
bilatérale
Après hystérectomie pour cancer du col Tous les 3 mois pendant 2 ans, puis tous
les 6 mois
En postménopause, vie sexuelle active Tous les ans
En postménopause, pas de vie sexuelle Tous les deux ans

◗ Épidémiologie
Il existe plusieurs formes histologiques de cancers du col utérin (tableau 6.II), le
carcinome épidermoïde représentant plus de 80 % des tumeurs invasives.
L’essentiel des données épidémiologiques suivantes concerne cette forme
pathologique dominante. L’incidence du cancer du col de l’utérus est inverse-
ment fonction du niveau socio-économique de la population, avec un rapport
de l’ordre de 3 entre les niveaux extrêmes.
Le risque de cancer cervical augmente avec la précocité des premiers rapports
sexuels, avec le nombre de partenaires différents, en particulier avant 20 ans.

Tableau 6.II. Formes histologiques des cancers du col utérin


Carcinome épidermoïde 75-85 %
Kératinisant à grandes cellules 22 %
Non kératinisant à grandes cellules 57 %
Non kératinisant à petites cellules 6%
Adénocarcinome 10-15 %
Endocervical
Endométrioïde
À cellules claires
Carcinome mixte, carcinome adénosquameux 2-5 %
Carcinomes neuro-endocrines <1%
Tumeur carcinoïde
Carcinome à petites cellules

Le cancer du col utérin est souvent associé à des antécédents de maladies


sexuellement transmissibles (MST) y compris la blennorragie, la syphilis, l’herpès
simplex, les infections à Trichomonas ou à Chlamydiæ. Les antécédents de
condylomes génitaux augmentent le risque de cancer du col utérin d’un
facteur 3. Les habitudes sexuelles du partenaire influencent également le risque
de cancer du col. Un homme à « haut risque » pouvant être caractérisé par des

72 ◗
08_Chap6 Page 73 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

antécédents de maladie vénérienne, de rapports sexuels antérieurs avec une


femme ayant présenté un cancer du col, un niveau socio-économique bas et
de multiples partenaires sexuels.

◗ Étiologie, histoire naturelle


Les carcinomes épidermoïdes du col utérin naissent au niveau de la zone de
jonction entre les muqueuses endo- et exocervicales. La première est faite de
cellules glandulaires cylindriques produisant du mucus, la seconde est de type
malpighien riche en glycogène. Au cours de la vie génitale, la zone de jonction
est de moins en moins extériorisée et est progressivement remplacée dans sa
topographie cervicale antérieure par une métaplasie épidermoïde. Il s’agit de la
zone cellulairement active de l’épithélium cervicovaginal à partir de laquelle se
fait le remplacement permanent des éléments cellulaires desquamés.
Il est donc logique que les cancers cervicaux se développent initialement à ce
niveau où les divisions cellulaires favorisent les effets carcinogénétiques éven-
tuels d’un certain nombre de virus :
– herpes virus de type 2, très fréquent, en corrélation avec la survenue d’un
épithélioma du col utérin mais sans aucune relation démontrée de cause
à effet ;
– papillomavirus humains, jouant un rôle probablement déterminant dans
la carcinogenèse cervicale. Plus de 45 types ont été caractérisés par leur
séquence d’ADN. Tous les degrés de néoplasies intraépithéliales et de
cancers invasifs ont été associés avec des infections à papillomavirus. Les
types 6 et 11 sont habituellement retrouvés dans les condylomes acu-
minés bénins, les dysplasies de faible grade. Les types 16, 18, 31, 33,
35 et 39 sont associés avec les dysplasies de haut grade et les carcino-
mes, tout ou partie de l’ADN viral ayant été retrouvé dans le génome des
cellules tumorales.
Dans la grande majorité des cas, l’épithélioma invasif est précédé d’une dyspla-
sie sévère ou d’un épithélioma in situ (appelé aujourd’hui CIN pour Cervical
Intraepithelial Neoplasia) apparu parfois plusieurs années auparavant. Une fois
la membrane basale franchie, la profondeur d’invasion va déterminer le risque
d’envahissement ganglionnaire. Quasi nul pour les lésions micro-invasives (inva-
sion < 3 mm), il devient significatif au-delà de 5 mm. Il est ensuite étroitement
lié au volume tumoral (tableau 6.III).
Les premiers relais ganglionnaires concernés sont les ganglions obturateurs
(groupe moyen de la chaîne iliaque externe), les ganglions iliaques externes et
hypogastriques. L’extension peut se faire ensuite vers les groupes ganglionnaires
iliaques primitifs et lombo-aortiques.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Tableau 6.III. Influence de la taille tumorale sur le taux d’envahissement


ganglionnaire pelvien (d’après Kurohara, 1971)
Taille tumorale cervicale Taux d’envahissement ganglionnaire pelvien
< 1 cm 4%
2-3 cm 16 %
4 cm 21 %

La lésion va par ailleurs se développer localement, envahissant de proche en


proche au-delà du massif cervical (stade I), le vagin, les culs-de-sac vaginaux
puis jusqu’au tiers inférieur (stades IIA, IIIA) et les régions latéropelviennes
(paramètres) situées de part et d’autre du col utérin, jusqu’à fixation à la paroi
pelvienne (stades IIB puis IIIB) (fig. 6.1 et 6.2).

73 ◗
08_Chap6 Page 74 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 6.1. Coupe transversale schématique du pelvis féminin.➤

Symphise Vessie
pubienne

Col utérin
Paroi pelvienne
latérale

Rectum

Sacrum

➤ Fig. 6.2. Schéma d’extension de contiguïté des carcinomes du col utérin.➤

Zone de jonction
endicervicale
Extension paramétriale

Extension vaginale

Enfin, pour les tumeurs très évoluées, il ne faut pas mésestimer le risque d’exten-
sion aux organes de proximité : vessie et rectum (stade IVA). Le risque de dissé-
mination métastatique est essentiellement le fait des grosses tumeurs, les sites
d’envahissement les plus fréquents étant le poumon, le foie et le squelette.

◗ Diagnostic : signes d’appel


◗ Formes de début
La fréquence des lésions précancéreuses du col utérin a augmenté de façon
considérable ces dernières années. Leur dénomination a changé dans le temps
puisqu’on les a appelées successivement dysplasies, néoplasies intraépithéliales
et, aujourd’hui, lésions de bas grade ou de haut grade.
Les formes liminaires ou précoces de cancer du col utérin sont peu symptoma-
tiques et sont donc essentiellement mises en évidence lors d’une manœuvre
de diagnostic précoce systématique telle que les frottis cervicovaginaux.
La constatation d’une cytologie cervicovaginale anormale, pendant que l’examen
gynécologique ne montre aucune lésion particulière pouvant faire procéder
d’emblée à une biopsie, doit conduire impérativement à la réalisation d’une col-
poscopie. Celle-ci doit avoir pour objectif principal de visualiser clairement la

74 ◗
08_Chap6 Page 75 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

zone de jonction ce qui peut s’avérer difficile. Des colorations comme le lugol
ou l’acide acétique permettent de visualiser des zones anormales (iodophobes
avec le lugol, blanchâtres avec l’acide acétique) sur lesquelles des biopsies diri-
gées seront alors pratiquées.
Dans le cas où un carcinome in situ (carcinome intraépithélial, CIN) est évoqué
à la lecture anatomopathologique des prélèvements biopsiques, il faut se rap-
peler que sa définition est négative, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un épithélioma qui
ne franchit pas la membrane basale. De ce fait, il faut pouvoir disposer de
l’ensemble de cette membrane, ce qui oblige à la réalisation d’une conisation
diagnostique.
La conisation diagnostique peut être nécessaire quand la colposcopie n’a pu
examiner correctement la zone de jonction.

◗ Formes invasives
Dans les stades invasifs de début, ce sont les métrorragies provoquées qui
constituent le symptôme le plus fréquent. Elles justifient à elles seules un exa-
men gynécologique.
La symptomatologie clinique peut s’enrichir lorsqu’il s’agit d’une tumeur locale-
ment évoluée : métrorragies spontanées abondantes, leucorrhées fétides, dou-
leurs pelviennes, difficultés fonctionnelles vésicales et/ou rectales, voire
névralgie crurale ou sciatique, lymphœdème d’un membre inférieur, signant
alors une extension latéropelvienne importante.

◗ Évaluation préthérapeutique
Les états précancéreux, carcinomes in situ ou micro-invasifs, sont traités et guéris
par des traitements locaux (destruction au laser, conisation, colpohystérectomie
simple) et ne nécessitent pas d’examen complémentaire particulier en dehors
d’un bilan colposcopique précis.
Les formes invasives demandent une évaluation plus complète. L’examen clini-
que, idéalement effectué sous anesthésie générale, permet une bonne appré-
ciation du stade clinique qui apporte l’essentiel des éléments de la décision
thérapeutique et du pronostic. Les examens complémentaires à l’examen clini-
que peuvent être multiples même si leur contribution est généralement moins
décisive que l’examen clinique lui-même :
– lymphographie pédieuse bilatérale à la recherche d’un envahissement
ganglionnaire macroscopique (lacune au sein d’un ganglion, visible sur
les clichés tardifs d’opacification ganglionnaire, non traversée par les
canalicules visualisés sur les clichés précoces), essentiellement au niveau
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

des chaînes iliaques externes, iliaques primitives, plus rarement


lombo-aortiques ; cet examen invasif, de réalisation délicate, est
aujourd’hui le plus souvent remplacé par la tomodensitométrie ;
– urographie intraveineuse pour authentifier un éventuel retentissement de
la lésion sur les voies urinaires : dilatation urétéropyélocalicielle ou rein
muet en relation avec une compression urétérale pelvienne, ou modifi-
cation du trajet urétéral en regard d’une adénomégalie ;
– radiographie thoracique ;
– examen tomodensitométrique, qui ne permet de déceler que l’augmen-
tation de volume d’un ganglion, sans analyse fine de sa structure, pou-
vant nécessiter une biopsie dirigée à l’aiguille. La tomodensitométrie est
de peu d’intérêt dans l’évaluation du volume de la tumeur primitive car
elle détecte peu ou mal les envahissements paramétriaux ;

75 ◗
08_Chap6 Page 76 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– IRM, plus performante que la tomodensitométrie pour évaluer l’extension


pelvienne, faisant progressivement la preuve de son caractère indispen-
sable dans l’évaluation préthérapeutique des cancers du col.
D’autres examens seront demandés en fonction du contexte clinique comme la
cystoscopie et/ou la rectoscopie.
Au terme de cette démarche diagnostique, il est possible de classer le syndrome
tumoral selon la classification internationale. Cette classification est purement
clinique, sauf pour les stades IVa à extension vésicale ou rectale (tableau 6.IV et
fig. 6.3). En particulier, l’extension ganglionnaire, radiologique ou pathologique,
ne modifie pas le stade, tout en influençant fortement le choix thérapeutique et
le pronostic.

Tableau 6.IV. Classification clinique des cancers du col utérin (FIGO, 1994)
Stade Description
I Carcinome limité au col utérin
IA Carcinome identifiable uniquement à l’examen histologique
IA1 Carcinome micro-invasif < 3 mm en profondeur et < 7 mm en étendue
IA2 Carcinome micro-invasif > 3 mm et < 5 mm en profondeur et < 7 mm
en étendue
IB Carcinome invasif limité au col, cliniquement perceptible ou préclinique
> à IA2
IB1 Lésion < 4 cm
IB2 Lésion > 4 cm
II Carcinome étendu au-delà du col mais restant à distance de la paroi
pelvienne et du tiers inférieur du vagin
IIA Pas d’envahissement paramétrial clinique
IIB Extension clinique au paramètre
III Carcinome étendu à la paroi pelvienne et/ou au tiers inférieur du vagin.
La présence d’une hydronéphrose ou d’un rein muet fait classer III toute
tumeur quelle que soit sa taille
IIIA Extension au tiers inférieur vaginal
IIIB Extension au(x) paramètre(s) jusqu’à la paroi pelvienne
IV Carcinome étendu à la vessie ou au rectum ou sorti des limites du pelvis
IVA Extension clinique à la muqueuse de la vessie ou du rectum
IVB Extension métastatique au-delà du pelvis

◗ Modalités thérapeutiques
◗ Chirurgie
Il existe un grand nombre de techniques chirurgicales opposables aux cancers
du col utérin, allant de la conisation pour les formes non invasives à l’hysté-
rectomie élargie avec lymphadénectomie pour les tumeurs invasives. Pour ce
qui est de l’hystérectomie, il en a été décrit plusieurs types selon l’ampleur de
la dissection et de l’exérèse latéropelvienne paramétriale. Dans tous les cas,
compte tenu de la lymphophilie des cancers cervicaux, une chirurgie paramé-
triale est indispensable, éliminant tout geste à type d’hystérectomie extrafas-

76 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

➤ Fig. 6.3. Représentation schématique de la classification clinique des carcinomes du col utérin. ➤

I II III IV

B A B A

IB1 < 4 cm IIA paramètre normal IIIA par. norm., 1/3 vagin IVA vessie et/ou rectum
IB2 > 4 cm IIB paramètre envahi IIIB par. envahi à la paroi envahis (biopsie +)

Col utérin

N0 N1 M1/IVA

ciale simple. Il s’agit donc toujours d’une colpohystérectomie emportant


l’utérus, une collerette vaginale plus ou moins large et l’espace lymphovascu-
laire péricervical.
La chirurgie est destinée essentiellement à traiter la maladie centropelvienne
utérine et immédiatement para-utérine, tout en permettant le diagnostic micros-
copique d’envahissement ganglionnaire par lymphadénectomie d’étendue varia-
ble, du simple évidement sous-veineux iliaque externe bilatéral au grand
évidement pelvien et lombo-aortique.
Plus récemment, des techniques de prélèvement ganglionnaire percœlioscopi-
que, préalables au traitement proprement dit, ont été développées afin de
mieux définir l’extension tumorale ganglionnaire sans pour autant réaliser une
laparotomie, éventuellement pénalisante pour la suite du traitement.
Dans les formes évoluées avec extension vésicale et/ou rectale (stade IVa), des
techniques d’exentération pelvienne ou totale peuvent être proposées.

◗ Radiothérapie externe
Elle est destinée à traiter l’ensemble de l’excavation pelvienne, c’est-à-dire, à la
fois la tumeur cervicale, une partie ou la totalité du vagin, en fonction de l’exten-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

sion basse, et les régions latéropelviennes (paramètres et aires ganglionnaires


iliaques).
Le champ d’irradiation peut éventuellement être étendu aux aires ganglionnaires
lombo-aortiques en fonction de la situation clinique. La dose à délivrer varie de
20 à 50 Gy en fonction du volume tumoral et donc du risque d’envahissement
ganglionnaire qui lui est corrélé, et en fonction de la stratégie thérapeutique
choisie (association radiochirurgicale ou radiothérapie exclusive) (fig. 6.4). L’irra-
diation est délivrée dans tous les cas au moyen de faisceaux de photons de
haute énergie idéalement supérieurs à 15 MeV.

◗ Curiethérapie
Il s’agit le plus souvent d’un traitement endocavitaire (plésiocuriethérapie). Le
matériel radioactif est mis en place au niveau de la cavité utérine, endocervicale

77 ◗
08_Chap6 Page 78 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

et dans les culs-de-sac vaginaux, de façon à englober le volume tumoral cervical


dans l’isodose de référence choisie. Son objectif est de délivrer une très forte
dose d’irradiation au niveau du col et la dose la plus faible possible aux organes
sensibles de proximité (vessie et rectum), du fait de la décroissance rapide de
la dose autour du système, caractéristique de la curiethérapie (fig. 6.5).

➤ Fig. 6.4. Volumes d’irradiation transcutanée pelviens et lombo-aortiques lors du traitement des
cancers du col utérin. ➤

Elle n’est destinée qu’au traitement de la maladie centropelvienne et est donc


généralement associée à une radiothérapie externe préalable, à titre de complé-
ment de dose. Certains traitements curiethérapiques peuvent être effectués par
voie périnéale ou transvaginale selon une technique interstitielle, pour traiter les
régions paramétriales. Ces surimpressions sont plus classiquement effectuées
au moyen de champs réduits par radiothérapie externe.

➤ Fig. 6.5. Curiethérapie utérovaginale : distribution des doses. ➤

10 Gy
20 Gy
30 Gy
40 Gy
50 Gy
60 Gy

◗ Chimiothérapie
Essentiellement à base de sels de platine, elle est encore en cours d’évaluation
dans des études contrôlées, soit à titre adjuvant (préventif du risque métastati-
que), soit per-radiothérapique pour augmenter les effets de l’irradiation.

78 ◗
08_Chap6 Page 79 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

◗ Principes de traitement des formes


non invasives
Les épithéliomas in situ du col utérin sont généralement traités par des métho-
des locales, typiquement chirurgicales.
La conisation est le geste de référence permettant l’ablation de la totalité de la
zone de jonction avec des marges de sécurité de plusieurs centimètres. Seule
la lecture en coupes multiples de la pièce pourra confirmer qu’il s’agit bien en
tout point d’une néoplasie intraépithéliale, la conisation devenant alors le seul
traitement.
S’il s’agit, en fait, d’une forme micro-invasive (jusqu’à 5 mm de profondeur),
une hystérectomie simple est habituellement proposée en complément. L’hys-
térectomie peut par ailleurs être préférée à la conisation dans les formes intraé-
pithéliales vraies quand le souci de grossesse ultérieure n’est plus de mise.
À l’opposé, pour des patientes très jeunes (moins de 30 ans) dont l’avenir gra-
vidique est une préoccupation importante, il peut être proposé des gestes a
minima (électrorésection, vaporisation laser CO2) dont la réalisation suppose
une grande maîtrise technique, une évaluation et une surveillance colposcopi-
que parfaite.

◗ Schéma d’indications thérapeutiques


pour les formes invasives (tableau 6.V)
Dans les formes localement évoluées (IIB, III et IV), la plupart des équipes pro-
posent un traitement radiothérapique exclusif, le volume tumoral et le risque
potentiel ou avéré d’envahissement ganglionnaire contre-indiquant tout geste
chirurgical. Ce traitement comporte idéalement un premier temps d’irradiation
externe, une curiethérapie utérovaginale sur volume réduit et une éventuelle
surimpression latéropelvienne complémentaire par radiothérapie externe en
fonction de la présentation clinique initiale.
La dose nécessaire au contrôle tumoral est de 60 à 70 Gy pour la maladie
macroscopique, 50 Gy pour les lésions infracliniques, chaque fois à raison de
cinq séances hebdomadaires de 2 Gy chacune.
Dans les formes de début (I, IIa), les indications peuvent être radiothérapiques
exclusives, selon un schéma voisin du précédent aux doses respectives de radio-
thérapie externe et de curiethérapie près, ou associatives radiochirurgicales. Les
résultats sont équivalents en terme de contrôle tumoral pour les stades I, régu-
lièrement meilleurs pour la radiothérapie dans les stades II. Le choix entre l’atti-
tude radiothérapique exclusive et radiochirurgicale dépend de nombreux
facteurs :
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– la notion d’une extension ganglionnaire macroscopique est en faveur


d’un traitement non chirurgical ;
– une anatomie cervicovaginale peu favorable à un arrangement géométri-
que optimal des sources de curiethérapie constitue une indication chirur-
gicale associée à l’irradiation externe ;
– l’existence d’une pathologie associée (kyste annexiel, fibrome utérin, par
exemple) fait introduire la chirurgie dans le traitement ;
– l’âge de la patiente inférieur à 45 ans est un élément plaidant en faveur
d’une hystérectomie pour éviter de laisser en place un tractus génital
susceptible de complications très tardives chez des patientes à longue
espérance de vie (cancer corporéal, sténose rétentionnelle endo-utérine,
par exemple). Il faut préciser que dans tous les cas l’hystérectomie ne
remplace que la curiethérapie et ne dispense pas de l’irradiation externe.

79 ◗
08_Chap6 Page 80 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Plus récemment, le développement de techniques d’évidement ganglionnaire


iliaque par cœlioscopie a ouvert le champ d’une prise en charge chirurgicale
exclusive en cas de N– pour des formes invasives limitées au col, évitant notam-
ment chez les femmes jeunes toute irradiation pelvienne.

Tableau 6.V. Schéma d’indications thérapeutiques des cancers du col utérin*


Stade Association radiochirurgicale RT exclusive Survie 5 ans
I CRT + CHIR RTE + CRT 85-95 %
IIA CRT + CHIR RTE + CRT 65-85 %
IIB RTE ± CRT + CHIR RTE + CRT 50-70 %
III RTE ± CRT 35-55 %
IV RTE 20 %
*CHIR : chirurgie, RTE : radiothérapie externe, CRT : curiethérapie.

◗ Effets secondaires, complications


Le traitement d’un cancer invasif est fréquemment à l’origine d’une castration
(chirurgicale ou radiothérapique) qui nécessite d’être compensée chez les fem-
mes jeunes par un traitement hormonal substitutif, ce cancer n’étant pas hor-
monodépendant.
Par ailleurs, un certain nombre de séquelles ou de complications peuvent trou-
bler la période post-thérapeutique :
– complications urinaires, surtout fréquentes quand une chirurgie a été réa-
lisée, sous la forme de dysfonctionnement urétérovésical (atonie urété-
rale, dilatation, pyélonéphrite), beaucoup plus rarement sous la forme
d’une fistule urétérovaginale ou vésicovaginale (< 3 %) justifiant une
réintervention ;
– complications digestives, essentiellement après traitement radiothérapi-
que exclusif, soit rectales (rectite hémorragique le plus souvent transitoire
trois à neuf mois après le traitement, ou plus grave pouvant aller jusqu’à
la fistule rectovaginale, < 2 %, exceptionnelle après un traitement cor-
rect), soit iléales à type d’iléite occlusive et/ou perforative.
Cette dernière complication, de loin la plus grave, voit son incidence augmenter
quand l’irradiation fait suite à une laparotomie quelle qu’en soit la raison : de
l’ordre de 2 % après irradiation exclusive, elle atteint 10 % après une laparoto-
mie et dépasse 30 % quand la patiente présente dans ses antécédents deux
laparotomies ou plus. L’iléite chronique entraîne des épisodes occlusifs à répé-
tition, parfois spontanément résolutifs mais pouvant conduire à une intervention
chirurgicale libératoire inévitable avec le risque de résection iléale étendue et de
la création de nouvelles réactions péritonéales fibreuses pouvant aggraver le
dysfonctionnement de l’intestin restant.


80 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

Points clés
• Les carcinomes épidermoïdes du col utérin sont précédés par une longue période
d’état prénéoplasique dont le diagnostic précoce par la cytologie cervicovaginale
complétée de la colposcopie a permis de réduire de façon importante la fréquence
des formes invasives tout au moins dans les pays développés.
• Le rôle carcinogénétique des infections à papillomavirus est aujourd’hui démontré.
• Pour les formes de début, le traitement doit être définitif tout en tenant compte
de l’avenir obstétrical éventuel de la patiente et de la qualité probable de son suivi
ultérieur.
• Les formes invasives sont évaluées par l’examen clinique, notamment sous anes-
thésie générale, l’imagerie et en particulier l’IRM, la chirurgie — aujourd’hui sous
sa forme de cœliochirurgie d’inventaire ganglionnaire.
• Le traitement des formes invasives fait appel en fonction du stade à la chirurgie,
à la radiothérapie ou à une combinaison des deux. Parmi les techniques radiothé-
rapiques, la curiethérapie endocavitaire tient une place majeure.
• La chimiothérapie reste une thérapeutique complémentaire en évaluation.

◗ CANCERS DU VAGIN Affection rare, le cancer du vagin survient dans un contexte épidémiologique
particulier : âgé élevé, antécédents de port de pessaire ou d’hystérectomie.
Il existe une forme particulière, exceptionnelle, représentée par les adénocarci-
nomes primitifs apparaissant chez la petite fille ou l’adolescente, liée à l’effet
cancérogène du diéthylstilbestrol (Distilbène) reçu par l’enfant pendant sa vie
intra-utérine.
Le cancer du vagin dans sa forme commune est un carcinome épidermoïde. Il
existe des formes dysplasiques qui sont des états précancéreux. L’extension se
fait vers les régions vaginales contiguës au site d’implantation initial et, au-delà
du vagin, vers le tissu cellulaire latéropelvien (tableau 6.VI). Les premiers relais
ganglionnaires intéressés sont les ganglions iliaques externes pour les tumeurs
du tiers supérieur, les ganglions inguinaux pour les lésions bas situées.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Tableau 6.VI. Classification TNM des carcinomes primitifs du vagin


Tis Carcinome in situ
T1 Tumeur localisée au vagin
T2 Tumeur envahissant les régions latérovaginales sans atteindre le paramètre
T3 Tumeur étendue à la paroi pelvienne
T4 Envahissement vésical, rectal ou au-delà du pelvis

Les mêmes circonstances épidémiologiques virodépendantes que pour les can-


cers du col utérin peuvent être retrouvées dans les cancers vaginaux épidermoï-
des, à savoir des inclusions intracellulaires virales de type papillomavirus.

81 ◗
08_Chap6 Page 82 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Diagnostic clinique
Ce sont les métrorragies qui constituent le symptôme essentiel, mais dans près
de la moitié des cas, la tumeur vaginale est découverte lors d’un examen gyné-
cologique de routine. Deux tiers des cancers vaginaux sont situés dans le tiers
supérieur et plus particulièrement au niveau de la face postérieure.
L’examen clinique sous anesthésie générale permet d’évaluer l’extension pel-
vienne des lésions. Il ne faut pas omettre la palpation des aires ganglionnaires
inguinales, en particulier pour les formes tumorales basses. La colposcopie n’est
intéressante que pour le diagnostic et la définition des formes de début en per-
mettant des biopsies dirigées sur des lésions cliniques non caractéristiques.
L’urographie intraveineuse, la lymphographie et l’IRM comme dans les affections
cervicales, sont particulièrement utiles dans le bilan des lésions du tiers supé-
rieur du vagin.

◗ Traitements
◗ Chirurgie
C’est une colpectomie ou colpohystérectomie avec prélèvement ganglionnaire.
La colpectomie totale, bien que techniquement réalisable, est un geste lourd qui
n’est qu’exceptionnellement effectué.
Dans les formes de début, intraépithéliales, la vaporisation muqueuse au laser
CO2 au décours d’une colposcopie aidée de colorations est le traitement de choix.

◗ Radiothérapie externe
Le volume irradié inclut la quasi-totalité de l’excavation pelvienne, l’ensemble de
la muqueuse vaginale jusqu’à la vulve et éventuellement les creux inguinaux
pour les lésions basses. Elle délivre une dose prophylactique de 45 à 50 Gy en
quatre à cinq semaines à l’ensemble du volume.

◗ Curiethérapie
Effectuée à l’aide d’applicateurs endocavitaires ou de moules personnalisés, elle
amène un complément de dose après irradiation externe de l’ordre de 20 à
25 Gy à la tumeur. Les lésions limitées et superficielles peuvent faire l’objet d’un
traitement curiethérapique exclusif. La réalisation de la curiethérapie des lésions
vaginales est techniquement délicate compte tenu de la faible épaisseur des
cloisons rectovaginale et urétrovésicovaginale. Le risque de complications trophi-
ques, pouvant aller jusqu’à l’apparition d’une fistule, doit être limité par une
technique et une dosimétrie de grande qualité.
Les lésions avec extension paravaginale peuvent faire l’objet d’une curiethérapie
mixte, endocavitaire et interstitielle.

◗ Chimiothérapie
La chimiothérapie est le plus souvent utilisée aujourd’hui comme adjuvant du trai-
tement par irradiation et peut être réalisée de façon simultanée. Elle fait essentielle-
ment appel aux sels de platine habituellement associés au 5-fluoro-uracile (5-FU).

◗ Indications thérapeutiques
Association radiochirurgicale ou radiothérapie exclusive pour les lésions du tiers
supérieur par assimilation au traitement des cancers du col utérin.

82 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

Radiothérapie seule (avec curiethérapie) pour les autres lésions. Certaines


lésions débutantes peuvent être traitées par curiethérapie exclusive si le risque
ganglionnaire ne justifie pas d’irradiation prophylactique.

◗ Formes particulières
Les adénocarcinomes vaginaux primitifs de la petite fille ou de l’adolescente
sont des formes à cellules claires liées habituellement à la prise de diéthylstil-
bestrol par la mère au cours de la grossesse. Leur traitement doit prendre en
compte chaque fois que possible l’avenir anatomique et fonctionnel du tractus
génital, par une association de chirurgie et de radiothérapie visant à éviter les
effets secondaires les plus importants de chaque méthode.
Quant aux rhabdomyosarcomes de la petite fille, habituellement de moins de
5 ans, leur aspect macroscopique les a fait dénommer sarcomes botryoïdes,
c’est-à-dire en grappe de raisin. Dans ces formes, la chimiothérapie est très effi-
cace, la radiothérapie venant en complément local, souvent sous forme de
curiethérapie pour limiter la dose au tractus génital et aux ovaires, ces derniers
étant préalablement éloignés par transposition chirurgicale.

◗ CANCERS DE LA VULVE
Le cancer de la vulve est un cancer de la femme âgée. Il peut exister une asso-
ciation à des lésions cervicales et/ou vaginales, suggérant le rôle potentiel de
virus oncogènes comme dans le cancer du col.
Il s’agit le plus souvent de carcinomes épidermoïdes, précédés ou non de la
découverte d’une néoplasie intraépithéliale parfois multifocale. Lorsqu’il évolue,
le cancer vulvaire s’étend aux organes de voisinage : périnée, urètre, canal anal.
Le drainage lymphatique varie suivant la topographie de la lésion : dans la région
antérieure, paraclitoridienne, il est à la fois inguinal et iliaque, partout ailleurs, il
est inguinal préférentiel. La fréquence de cet envahissement est bien corrélée
à la profondeur d’invasion et à la taille tumorale. La classification TNM est pré-
sentée dans le tableau 6.VII.

Tableau 6.VII. Classification TNM des tumeurs vulvaires


T1 Tumeur vulvaire < 2 cm
T2 Tumeur vulvaire > 2 cm
T3 Tumeur envahissant l’urètre, le vagin, le périnée ou l’anus
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

T4 Tumeur envahissant la vessie, la muqueuse rectale ou fixée au cadre osseux

◗ Épidémiologie
Les carcinomes vulvaires sont des maladies peu fréquentes ne représentant que
5 % de l’ensemble des cancers gynécologiques. Classiquement, ils ne concer-
nent que les femmes largement ménopausées, bien que les formes non inva-
sives surviennent chez des femmes plus jeunes souvent non ménopausées. Les
dystrophies vulvaires, fréquentes en postménopause, n’évoluent que rarement
vers l’apparition d’une néoplasie.
En revanche, les antécédents d’infections gynécologiques à répétition, de carci-
nome cervical et surtout d’infection à papillomavirus sont des facteurs d’aug-
mentation nette du risque de cancer vulvaire.

83 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Diagnostic clinique
Simple irrégularité muqueuse prurigineuse ou petite nodosité au début, la lésion
va ensuite s’ulcérer et saigner au contact, et n’est le plus souvent diagnostiquée
qu’à ce stade. La simple inspection peut permettre une biopsie immédiate sous
anesthésie locale faisant le diagnostic.
Dans les formes de début, l’examen peut ne révéler qu’une simple zone éryth-
rosique discrètement desquamative, méritant un complément vulvoscopique
avec l’aide éventuelle de colorants (acide acétique). Un examen gynécologique
complet est toujours indispensable à la recherche d’autres anomalies tumorales,
vaginales ou cervicales en particulier.

◗ Évaluation préthérapeutique
Certains examens complémentaires peuvent être utiles avant la décision
thérapeutique :
– uréthroscopie pour les lésions de topographie antérieure ;
– examen tomodensitométrique pelvien, plutôt qu’une lymphographie
compte tenu du drainage lymphatique inguinal préférentiel initial ;
– radiographie thoracique.

◗ Traitements
◗ Chirurgie
Les formes non invasives ont théoriquement un risque métastatique ganglion-
naire nul. De ce fait, les traitements chirurgicaux exclusifs sont parfaitement indi-
qués et peuvent même, compte tenu de la petite taille tumorale, être
conservateurs, à type de vaporisation par laser CO2 après cartographie lésion-
nelle soigneuse par biopsies multiples. Il en est de même de la maladie de
Paget vulvaire qui est également un carcinome intraépithélial.
Pour les formes invasives de stade I (T1 N0 M0), le traitement de référence est
une hémivulvectomie radicale modifiée ou une vulvectomie totale radicale
modifiée en fonction de la topographie lésionnelle, latéralisée ou paramédiane.
Environ 10 % de ces formes tumorales présentent un envahissement ganglion-
naire infraclinique dans les territoires inguinaux, ce qui peut faire préférer une
surveillance simple mais régulière à une lymphadenectomie de principe surtout
si elle doit être bilatérale en raison d’une topographie lésionnelle médiane ou
paramédiane.
Pour les stades II (T2 N0 M0), la vulvectomie totale radicale modifiée est la
règle avec soit vérification chirurgicale inguinale bilatérale soit irradiation externe
prophylactique des deux creux inguinaux. Le choix peut être orienté par le mor-
photype de la patiente qui, si elle est obèse, peut masquer des adénopathies
non palpables bien que déjà largement envahies. C’est une hémivulvectomie
ou une vulvectomie totale selon la taille et la topographie de la lésion. Un évi-
dement ganglionnaire inguinal est généralement associé, uni- ou bilatéral.

◗ Radiothérapie
Très mal tolérée au niveau de la vulve, elle n’est effectuée qu’en cas de
contre-indication chirurgicale (tumeur très évoluée ou patiente inopérable pour
des raisons d’état général). Elle peut être un complément utile au niveau gan-
glionnaire (irradiation prophylactique ou postopératoire en cas d’envahissement
ganglionnaire histologique).

84 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

◗ CANCERS DE L’ENDOMÈTRE1
Le cancer de l’endomètre est classiquement un cancer de la femme âgée, mais
tend à devenir le cancer génital féminin le plus fréquent dans les pays dévelop-
pés, en grande partie en raison de la diminution relative des formes invasives
de cancers cervico-utérins dans les mêmes pays.
Les adénocarcinomes endométriaux restent les tumeurs les plus fréquentes
(tableau 6.VIII), leur caractère majoritairement bien différenciés et limités à la
cavité utérine expliquant le bon pronostic relatif de ces affections.

Tableau 6.VIII. Formes histologiques des cancers de l’endomètre (incidences


respectives)
Adénocarcinome endométrioïde 80 %
Carcinome épidermoïde 5%
Carcinome mucineux 5%
Carcinome à cellules claires mésonéphroïdes 5%
Carcinome séro-papillaire 5%

◗ Épidémiologie
Le maximum de fréquence s’observe autour de 60 ans, 75 % des cas s’obser-
vant après 50 ans et uniquement 4 % avant 40 ans.
Le cancer de l’endomètre survient généralement sur un terrain particulier dans
lequel on retrouve parfois associés obésité, diabète et hypertension artérielle.
Cependant cette atmosphère épidémiologique classique tend à devenir de
moins en moins fréquente.
Il s’agit en fait le plus souvent d’un terrain hormonal prédisposant lié à un désé-
quilibre œstroprogestatif, endo- ou exogène, en faveur des œstrogènes. L’effet
protecteur des progestatifs ne pouvant se manifester, cette surimprégnation
œstrogénique peut entraîner la séquence : hyperplasie atypique, puis carcinome
in situ, puis cancer invasif. De même, l’administration prolongée d’œstrogènes
seuls constitue un facteur de risque avéré.
Cependant, près de 40 % des cancers de l’endomètre apparaissent sans
aucune relation claire avec la situation hormonale.

◗ Histoire naturelle
Les cancers de l’endomètre sont développés aux dépens de l’épithélium glan-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

dulaire tapissant la cavité utérine. Il s’agit le plus souvent (95 % des cas) d’adé-
nocarcinomes plus ou moins bien différenciés, localisés ou diffus dans la cavité.
Il existe des états pathologiques prétumoraux de la muqueuse utérine essentiel-
lement résumés par l’hyperplasie adénomateuse endométriale. Son degré d’aty-
pie cellulaire est un bon reflet du risque de transformation maligne, dont le taux
se situe entre 20 et 25 % des cas. Il est habituel de considérer qu’une hyper-
plasie adénomateuse de grade 3 correspond en fait à un adénocarcinome
endométrial de stade 0.
L’évolution essentielle des formes invasives se fait par infiltration dans le muscle
utérin (myomètre) sous-jacent à la muqueuse. Le degré d’infiltration dans le
muscle est un facteur de pronostic fondamental car il conditionne en grande
partie le risque d’envahissement ganglionnaire. Il ne peut être déterminé que

1. Item n° 147. Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin.


85 ◗
08_Chap6 Page 86 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

par l’étude anatomopathologique de la pièce opératoire. L’extension peut se


faire également en surface vers l’endocol puis le col utérin, au-delà de l’utérus
vers les paramètres ou dans la cavité péritonéale (greffes ovariennes ou sur le
péritoine).
Les premiers relais ganglionnaires sont iliaques externes mais aussi lombo-aortiques.
Les sites habituels de métastases sont le foie et le poumon.

◗ Diagnostic
◗ Signes d’appel
Même si peu de démarches systématiques de diagnostic précoce voire de
dépistage des cancers endométriaux ont été menées à bien, il est cependant
possible, compte tenu de la connaissance des facteurs de risque, de proposer
une attention particulière dans les groupes d’âge péri- et postménopausiques.
Plusieurs techniques existent pour ce faire : curetage par aspiration, curetage
étagé sous anesthésie, cytolavage endo-utérin de réalisation facile mais peu per-
formant pour le diagnostic des anomalies prétumorales.
La symptomatologie d’appel la plus classique est la survenue de métrorragies
spontanées postménopausiques, puisqu’il s’agit le plus souvent de femmes
ménopausées. Dans cette catégorie d’âge, la survenue d’une métrorragie est en
relation avec une tumeur maligne dans un tiers des cas.
En période pré- ou perménopausique, il pourra être plus difficile d’évoquer le
diagnostic devant des ménométrorragies.
Dans presque tous les cas, l’examen clinique apporte peu de renseignements,
le col et la taille de l’utérus étant le plus souvent normaux.

◗ Bilan préthérapeutique
L’examen clinique juge d’une extension éventuelle au col utérin ou aux régions
paramétriales et évalue la mobilité utérine (classification TNM).
L’hystérographie a fait place à l’hystéroscopie qui permet la visualisation directe
de la tumeur dans la cavité utérine, la topographie, juge de son extension et
guide les prélèvements biopsiques.
L’urographie intraveineuse apprécie le retentissement potentiel de la tumeur sur
les voies urinaires.
La tomodensitométrie abdominopelvienne présente l’intérêt de mettre éven-
tuellement en évidence des anomalies ganglionnaires lombo-aortiques, difficile-
ment interprétables par lymphographie. L’échographie abdominopelvienne
recherche une tumeur ovarienne associée, une ascite, une anomalie hépatique.
La radiographie pulmonaire et un bilan général pour évaluer l’opérabilité de la
patiente complètent le bilan.
On voit donc que l’évaluation préthérapeutique apporte peu d’éléments déter-
minants hormis le stade clinique, plus de 80 % des présentations étant de stade
I. Il faut cependant remarquer que les prélèvements biopsiques obtenus soit par
un curetage aveugle soit par des prises orientées par l’hystéroscopie, permettent
de préciser le grade tumoral avant tout traitement. Enfin, plus récemment, l’IRM
permet d’approcher l’éventuelle extension tumorale dans le myomètre.

◗ Classification
Historiquement, les classifications proposées ne tenaient compte que des élé-
ments cliniques accessibles avant tout traitement et en particulier avant la chi-
rurgie. Il était ainsi distingué :

86 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

– stade I : tumeur limitée au corps utérin ;


– stade II : tumeur étendue au col utérin ;
– stade III : tumeur extra-utérine ;
– stade IV : tumeur envahissant les organes de voisinage ou tumeur métas-
tatique.
Cependant, la forte intrication pronostique des paramètres cliniques avec les
éléments obtenus après lecture anatomopathologique de la pièce d’hystérecto-
mie a fait progressivement évoluer la classification vers une évaluation anato-
moclinique essentiellement postopératoire (fig. 6.6 et 6.7) :
– stade 0 : carcinome in situ ;
– stade I : tumeur limitée au corps utérin :
• IA : limitée à l’endomètre,
• IB : envahissant le myomètre sur la moitié de son épaisseur au maximum,
• IC : envahissant le myomètre sur plus de la moitié de son épaisseur ;
– stade II : tumeur étendue au col utérin sans dépasser l’utérus :
• IIA : envahissement limité aux glandes endocervicales,
• IIB : envahissement du stroma cervical ;
– stade III : tumeur étendue hors de l’utérus :
• IIIA : envahissement du péritoine, d’une annexe ou cytologie périto-
néale positive,
• IIIB : envahissement vaginal (continu ou discontinu),
• IIIC : métastases ganglionnaires pelviennes et/ou lombo-aortiques ;
– stade IV : tumeur étendue aux organes de voisinage :
• IVA : envahissement de la muqueuse vésicale et/ou rectale,
• IVB : métastases ganglionnaires ou viscérales à l’exception des sites
décrits pour les stades IIIB et IIIC.

➤ Fig. 6.6. Représentation schématique de la classification TNM-FIGO des carcinomes de l’endomètre. ➤

I II III IV

Extension au col
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

IIa : non invasive


IIb : invasive

CORPS UTÉRIN

N0 N1 M1


87 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 6.7. Schéma des formes anatomocliniques T1 et T2 des cancers de l’endomètre. ➤

T1b

T1a T1c
T2a T2b

Le tableau 6.IX donne la survie à 5 ans en fonction des différents facteurs pré-
sentés précédemment.

Tableau 6.IX. Synthèse des facteurs pronostiques des carcinomes de


l’endomètre
Différenciation Profondeur d’infiltration
tumorale du myomètre
Stade SV5 (%) Grade Survie Profondeur Survie à 5 ans
à 5 ans
I 75 % I 79-100 % Nulle 80-95 %
II 60 % II 55-90 % Superficielle 75-95 %
III 30 % III 30-75 % Profonde 30-70 %
IV < 10 %

◗ Modalités thérapeutiques

◗ Chirurgie
La chirurgie constitue l’élément thérapeutique déterminant des cancers du corps
utérin.
C’est en règle une hystérectomie avec annexectomie bilatérale, pratiquée par
laparotomie médiane sous-ombilicale. Le type d’hystérectomie pratiquée est le
plus souvent celui d’un geste extrafascial c’est-à-dire sans dissection paramé-
triale. L’hystérectomie est généralement associée à un prélèvement ganglion-
naire iliaque externe et à une exploration de la cavité abdominale. La réalisation
systématique d’un évidement ganglionnaire pelvien bilatéral complet et a fortiori
de son extension lombo-aortique n’est pas recommandée.
Le temps opératoire permet en outre la réalisation d’un cytolavage péritonéal.

◗ Radiothérapie
L’irradiation ne constitue qu’un traitement adjuvant à la chirurgie hormis les rares
cas où elle représente le seul traitement opposable en raison d’une inopérabi-
lité.

88 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

Radiothérapie externe

Elle permet le traitement prophylactique (ou de nécessité) de l’ensemble de


l’excavation pelvienne (régions paramétriales, ganglions iliaques). Elle peut être
étendue si nécessaire aux chaînes ganglionnaires lombo-aortiques, plus rare-
ment à l’ensemble de la cavité abdominale. La dose à l’ensemble du pelvis est
de 40 à 50 Gy avec éventuelle surimpression de nécessité sur des volumes
réduits. Il est habituel de ne pas dépasser 25 à 30 Gy en cas d’irradiation abdo-
minale totale et 40 Gy au niveau lombo-aortique.

Curiethérapie

Elle peut être utérovaginale préopératoire ou vaginale seule pré- ou postopéra-


toire. Son objectif est ici la prévention des récidives tumorales au niveau du
dôme vaginal après chirurgie (10 à 25 % en fonction du stade, du grade et de
la topographie tumorale). Lors d’impossibilités chirurgicales, elle peut être utili-
sée à visée curative en employant des techniques particulières prenant en
compte l’extension tumorale dans l’épaisseur utérine.

◗ Hormonothérapie
À base de progestatifs, elle peut être utilisée dans les stades avancés mais est
le plus souvent réservée aux patientes métastatiques ou en récidive, avec un
taux de réponse rarement complète voisin de 30 %.

◗ Chimiothérapie
Il n’existe pas de prescription chimiothérapique régulièrement efficace sur les
cancers de l’endomètre. Les médicaments les plus performants restent les
anthracyclines et le 5-FU. La prescription d’une chimiothérapie est réservée aux
situations de diffusion métastatique.

◗ Schéma d’indications thérapeutiques


Le traitement chirurgical doit toujours être proposé s’il est techniquement réalisa-
ble (malade opérable, tumeur extirpable). À ce propos, le taux d’inopérabilité pour
raisons générales a considérablement diminué au cours des dernières décennies
et ce malgré l’existence fréquente de facteurs de risque anesthésique et opéra-
toire (obésité, diabète, maladies vasculaires). Les progrès de l’anesthésie et de la
réanimation ont fait pratiquement disparaître ce type de contre-indications, ne lais-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

sant persister que celles liées à l’extension tumorale locorégionale.


La chirurgie est effectuée de façon exclusive pour les petites tumeurs bien dif-
férenciées dont le risque de récidive est très faible (< 10 %). Elle est souvent
précédée ou suivie d’une curiethérapie pour diminuer le risque de récidive sur
le dôme vaginal. S’il existe des facteurs de mauvais pronostic exposant au risque
de récidive locorégionale (envahissement cervical, tumeur indifférenciée, enva-
hissement majeur du myomètre, atteinte ganglionnaire), une irradiation externe
pelvienne complémentaire sera proposée.
Le traitement radiothérapique exclusif (radiothérapie externe + curiethérapie
utérovaginale) doit être réservé aux exceptionnelles contre-indications de la
chirurgie.
Les taux de survie à 5 ans sans maladie évolutive sont de l’ordre de 80 à 85 %
pour les stades I qui représentent plus des trois quarts des patientes, sauf pour
les tumeurs de grade 3 (60 %).

89 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ SARCOMES DE L’UTÉRUS1
Tumeurs rares, elles ne représentent que 3 % des tumeurs de l’utérus. Elles
sont dérivées du tissu mésenchymateux ou d’un mélange de tissus mésenchy-
mateux et épithéliaux présents dans l’utérus.
La plus fréquente des tumeurs mésenchymateuses est en fait bénigne, il s’agit
du léiomyome utérin appelé aussi fibrome.

◗ Diagnostic clinique
Les signes d’appel des sarcomes utérins sont peu caractéristiques, associant
métrorragies, douleurs abdominales, tumeur prolabée à l’orifice cervical, aug-
mentation du volume utérin.
En fait, très souvent, l’examen clinique se résume à la constatation d’un gros utérus :
– à cavité vide, pour les sarcomes musculaires ;
– à cavité tumorale, pour les sarcomes mixtes, mésenchymateux et épithé-
liaux.
Le diagnostic préopératoire de sarcome utérin est en fait obtenu dans moins de
10 % des sarcomes musculaires et dans près de 90 % des sarcomes mixtes,
par simple biopsie endo-utérine.

◗ Diagnostic histopathologique
Les sarcomes utérins concernent soit le myomètre, soit l’endomètre :
– sarcomes myométriaux : ce sont essentiellement les léiomyosarcomes
développés à partir de la musculature lisse utérine dont il est parfois dif-
ficile de les distinguer. La présence de mitoses et d’atypies cellulaires est
l’élément majeur de diagnostic différentiel dans les formes différenciées
avec un léiomyome bénin ;
– sarcomes endométriaux : ils sont issus du stroma endométrial et sont soit
purs, uniquement mésenchymateux (sarcome stromal endométrial), soit
mixtes, associant un adénocarcinome endométrial et un sarcome mésen-
chymateux qui peut être homologue (léiomyosarcome, sarcome stromal
ou hétérologue — fibrosarcome, rhabdomyosarcome).

◗ Évaluation préthérapeutique
L’évaluation clinique des sarcomes utérins est voisine de celles des adénocarci-
nomes endométriaux, la classification en stades identique.
Bon nombre de ces tumeurs étant de diagnostic opératoire, c’est l’exploration
lors de la laparotomie qui constituera l’essentiel de l’évaluation.
Plus de la moitié des sarcomes utérins sont de stade I et II, les léiomyosarcomes
étant en règle de stade plus faible que les sarcomes du stroma. Le risque métas-
tatique ganglionnaire est cependant relativement précoce, 30 % environ des
stades I et II présentant des adénopathies métastatiques, de topographie
lombo-aortique préférentielle.

◗ Principes de traitement
L’essentiel du traitement est chirurgical, sous la forme d’une hystérectomie
totale plus ou moins agrandie en fonction de l’extension tumorale.

1. Item n° 147. Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin.


90 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

Le temps opératoire comporte une exploration soigneuse de la cavité abdomi-


nopelvienne avec lavage péritonéal, biopsies épiploïques et ganglionnaires
lombo-aortiques.
La réalisation d’une irradiation externe pelvienne postopératoire, éventuellement
associée à une curiethérapie vaginale, réduit le risque de récidive pelvienne sans
modifier sensiblement les taux de survie essentiellement liés au risque métas-
tatique viscéral.
La chimiothérapie, extrapolée de celle utilisée dans les sarcomes des parties
molles des membres (doxorubicine), n’a pas clairement démontré son efficacité
en indication adjuvante. Pour les sarcomes du stroma de stades III et IV, il est
le plus souvent proposé une association de cisplatine et de doxorubicine.

◗ Résultats
Le stade tumoral est le facteur pronostique dominant, la survie à 5 ans des
stades I étant de l’ordre de 60 %, tous types histologiques confondus.
Cependant, parmi les stades I, les sarcomes stromaux de faible grade, ainsi que
les léiomyosarcomes de faible grade, présentent des taux de survie à 5 ans
supérieurs à 80 %.

Points clés
• Les cancers de l’endomètre sont des maladies tumorales survenant fréquemment
dans un contexte classique d’hyperœstrogénie postménopausique.
• Ce sont des adénocarcinomes plus ou moins différenciés responsables de métror-
ragies spontanées, diagnostiqués lors d’un curetage biopsique ou de prélèvements
orientés lors d’une hystéroscopie.
• Les facteurs pronostiques sont le stade, le grade et l’extension dans l’épaisseur du
myomètre.
• Le traitement est essentiellement chirurgical sous la forme d’une hystérectomie
totale, habituellement associée à une curiethérapie pré- ou postopératoire.
• Les sarcomes de l’utérus sont des maladies rares, la plus fréquente étant le léio-
myosarcome myométrial. Leur traitement est essentiellement chirurgical.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ TUMEURS DE L’OVAIRE1
Le diagnostic d’une tumeur ovarienne est essentiellement orienté vers le risque
de la présence d’un cancer ovarien. En effet, les cancers de l’ovaire sont des
maladies souvent graves, représentant la première cause de décès par cancer
gynécologique et la quatrième cause de décès par cancer chez la femme, mal-
gré leur fréquence relativement faible.

1. Item n° 153. Tumeurs de l’ovaire.


91 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Les tumeurs de l’ovaire sont des affections fréquentes, notamment les tumeurs kys-
tiques bénignes, au sein desquelles les cancers ont une incidence moyenne faible
de l’ordre de 8 à 10 pour 100 000 femmes. Cette incidence augmente avec l’âge.

◗ Mortalité
La mortalité par cancer ovarien est élevée. Le cancer de l’ovaire
(4 000 nouveaux cas et 3 000 décès par an) représente la première cause de
mortalité par cancer gynécologique, en raison d’un diagnostic survenant fré-
quemment à un stade avancé de la maladie. En effet, environ trois quarts des
cancers ovariens sont diagnostiqués à un stade III ou IV ne laissant espérer
qu’une survie moyenne à 5 ans de 30 %.

◗ Facteurs de risque
Âge
L’incidence des cancers épithéliaux ovariens augmente avec l’âge avec un pic
de fréquence voisin de 60 ans. Les tumeurs ovariennes germinales sont plus
fréquentes chez la femme jeune.
Facteurs génétiques
La notion d’antécédents familiaux de tumeurs de l’ovaire et notamment de cancers,
constitue un élément fort pour suspecter une susceptibilité génétique. Il existe en
effet des syndromes héréditaires de cancer de l’ovaire (5 % des cas) comme les
syndromes sein-ovaire (surincidence liée de cancers du sein et de cancers de
l’ovaire), les syndromes associant des cancers colorectaux et des cancers de l’ovaire.
Dans ces situations, la recherche d’une mutation portant sur le gène BRCA (1 ou 2)
permet d’approcher le risque de cancer ovarien qui peut atteindre dans certains cas
près de 60 % tout au long de la vie de la patiente porteuse de cette anomalie.
Cependant, la rareté de ces situations empêche de proposer une telle approche
dans le cadre d’une stratégie de dépistage.
La consultation d’oncogénétique et le test génétique doivent être proposés en
fonction de l’histoire familiale et de la demande de l’intéressé(e).
Pour les personnes à haut risque, une mammographie annuelle est préconisée
à partir de 30 ans, associée à un dépistage clinique et à une échographie
annuelle pour le dépistage du cancer de l’ovaire à partir de 35 ans.
L’ovariectomie préventive bilatérale peut être préconisée dans certains cas.
Facteurs hormonaux
Les traitements visant à entraîner une hyperstimulation ovarienne dans le cadre
du traitement d’une stérilité ont été accusés de favoriser la survenue de cancers
ovariens sans que la preuve en soit formelle.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Tumeurs germinales (2 à 4 %)
Dysgerminomes (séminomes) : représentent 40 % des tumeurs germinales de
l’ovaire, survenant entre 10 et 30 ans, dans 15 % des cas bilatérales. Ces tumeurs

92 ◗
08_Chap6 Page 93 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

sont lymphophiles, radio- et chimiosensibles, sans marqueurs associés autres que


des LDH souvent élevées.
Il existe par ailleurs des tumeurs non séminomateuses :
– à différenciation embryonnaire :
• tératome kystique bénin, la plus fréquente dans ce groupe,
• tératome malin (AFP–, β-HCG–), mélange de tissus fœtaux matures et
immatures, constituant une tumeur agressive de traitement difficile ;
– à différenciation extra-embryonnaire :
• tumeur du sac vitellin, dite aussi tumeur du sinus endodermique, car-
cinome embryonnaire (AFP+), toutes deux agressives mais chimiosen-
sibles,
• choriocarcinome, rare (β-HCG+).

Tumeurs épithéliales (90 %)


Type :
– séreux (50 %), habituellement kystique (cystadénome ou cystadénocar-
cinome), bilatéral dans un tiers des cas, contenant souvent des calcifica-
tions (psammomes), responsable d’extension péritonéale précoce et
fréquente dans sa forme maligne ;
– mucineux (10 %), moins fréquent que le type précédent, pouvant être
responsable d’une accumulation importante de mucus dans le péritoine
(maladie gélatineuse du péritoine) ;
– endométrioïde, accompagné dans 15 % des cas d’une tumeur endomé-
triale du même type histologique ;
– à cellules claires ;
– mixte ou inclassable.
Différenciation variable :
– bénigne ;
– intermédiaire (tumeur borderline) ;
– maligne (adénocarcinome de grade 1, 2 ou 3) représentant 85 à 90 %
des tumeurs malignes de l’ovaire.

Tumeurs du stroma ovarien (rares)


Stroma spécialisé • Tumeurs des cordons sexuels (5 %) :
– tumeur de la granulosa, thécome, pouvant s’accompagner d’une hyper-
sécrétion d’œstrogènes et/ou d’androgènes et généralement d’évolution
lente ;
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– tumeur de Sertoli-Leydig (rare), capable d’entraîner une virilisation.


Stroma non spécialisé • Tumeur mésodermique mixte, lymphome, léiomyo-
sarcome.

◗ Évolution naturelle
◗ Tumeurs bénignes
Les tumeurs bénignes de l’ovaire ont une évolution habituellement lente mais
qui peut être émaillée de complications :
– mécaniques : torsion de kyste avec parfois rupture intrapéritonéale,
hémorragie intrakystique entraînant une brutale augmentation de volume,
compression des organes de voisinage ;

93 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– infectieuses ;
– dégénératives, en fait rares.

◗ Cancers de l’ovaire
La croissance et l’extension des cancers de l’ovaire se font le plus souvent à bas
bruit. L’absence de symptômes cliniques caractéristiques initiaux explique la fré-
quence élevée des stades évolués.
L’extension se fait par deux mécanismes :
– extension par contiguïté aux organes abdominaux : rectosigmoïde, grêle
et surtout péritoine, notamment sous la forme de nodules multiples avec
ascite fréquente ;
– extension ganglionnaire rétropéritonéale lombo-aortique. Par voie rétro-
grade, il peut alors exister un envahissement ganglionnaire iliaque
externe.
Leur fréquence est en augmentation. Dans deux tiers des cas, le diagnostic est
fait à un stade évolué que la chirurgie seule ne peut guérir. On entend par
stades évolués les tumeurs classées stade III qui sont caractérisées par une
extension tumorale extrapelvienne et les stades IV qui correspondent aux formes
métastatiques.
La survie des malades est corrélée de façon étroite au stade tumoral
(tableau 6.X).

Tableau 6.X. Survie des patientes porteuses de cancers de l’ovaire en


fonction du stade initial
Stade I Stade II Stade III Stade IV
Survie à 5 ans 80 à 90 % 50 à 60 % 35 % < 10 %

Pour les stades évolués, le pronostic d’ensemble ne s’est guère amélioré durant
les dix dernières années, mais une meilleure connaissance de l’histoire naturelle
et des facteurs pronostiques a permis d’élaborer une attitude thérapeutique
multidisciplinaire.
Les cancers de l’ovaire sont un des meilleurs exemples d’association thérapeu-
tique en cancérologie. En effet, chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie ont
chacune leur place dans le projet thérapeutique des formes évoluées.

◗ Diagnostic
◗ Formations ovariennes kystiques pures
Situation fréquente, l’existence d’une tumeur ovarienne kystique est le plus sou-
vent une situation banale sans gravité. Cependant, s’il existe des kystes dits fonc-
tionnels ne justifiant pas d’attitude agressive, il existe également des kystes dits
« organiques » qui peuvent être responsables de complications et parfois de
dégénérescence.

Diagnostic clinique

Les kystes de l’ovaire sont très souvent asymptomatiques, découverts lors d’un
examen échographique systématique. La patiente peut parfois se plaindre d’une
sensation de pesanteur pelvienne, de douleurs, de dysménorrhée, d’une polla-
kiurie.

94 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

L’examen peut retrouver une masse pelvienne lisse, tendue, indolore, mobile
par rapport à l’utérus dont elle est nettement séparée par un sillon.
Plus rarement, la formation kystique réalise un tableau de tumeur abdominopel-
vienne à matité convexe vers le haut sans matité des flancs.

Examens complémentaires
Échographie • Effectuée par voie abdominopelvienne ou, mieux, vaginale, elle
confirme la nature liquidienne et précise les dimensions, l’existence éventuelle
de cloisons ou de végétations endo- et/ou exokystiques.
Radiographie simple de l’abdomen • À la recherche de calcifications lors
d’un kyste dermoïde.
Cœlioscopie • Elle permettra seule un abord direct du kyste et les prélève-
ments de la paroi ou des végétations extrakystiques.

Complications
La torsion du kyste de l’ovaire constitue la complication la plus fréquente res-
ponsable d’un syndrome douloureux abdominopelvien aigu, l’échographie
retrouvant la formation kystique.
L’hémorragie, le plus souvent intrakystique, peut être intrapéritonéale notam-
ment lors d’une rupture du kyste ovarien accompagnant le plus souvent une
torsion.
L’infection, plus ou moins aiguë, associe des signes généraux et la perception
d’une masse pelvienne latéro-utérine douloureuse retrouvée à l’échographie.

◗ Tumeurs ovariennes solides


Diagnostic clinique
Le diagnostic précoce des cancers de l’ovaire est très difficile en raison de
l’absence de signes cliniques de début caractéristiques et de la faible spécificité
de la symptomatologie quand elle apparaît. Ainsi, les tableaux cliniques possi-
bles au début sont multiples :
– absence complète de symptômes et découverte fortuite lors d’un exa-
men gynécologique ;
– troubles abdominaux vagues, le plus souvent initialement attribués à un
dysfonctionnement digestif : dyspepsie, douleurs abdominales mal systé-
matisées, troubles du transit, etc. ;
– signes gynécologiques comme métrorragies, dyspareunie, douleurs pel-
viennes.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Plus tard, des syndromes plus évocateurs peuvent se constituer :


– ascite clinique avec perception clinique et/ou échographique d’un syn-
drome tumoral ;
– altération de l’état général (amaigrissement marqué, asthénie majeure)
avec ascite et épanchement pleural.
L’examen clinique doit associer :
– un examen abdominal : ascite, tumeur palpable, hépatomégalie ;
– un examen pelvien : perception d’une masse latéro-utérine, nodule pal-
pable dans le cul-de-sac vaginal postérieur, augmentation du volume
utérin ;
– un examen général : adénopathie inguinale, sus-claviculaire, épanche-
ment pleural.

95 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Explorations complémentaires
Toute formation ovarienne cliniquement palpable chez une patiente ménopau-
sée doit faire réaliser un complément d’exploration.
L’échographie abdominopelvienne ou surtout transvaginale constitue l’examen
de base (fig. 6.8) :
– confirmant la masse annexielle ;
– précisant sa taille, son contenu, kystique ou non, homogène ou non ;
– montrant la présence éventuelle d’une ascite.

➤ Fig. 6.8. Aspect échographique d’une tumeur ovarienne, multiloculée, hétérogène, à la fois charnue et
kystique, probablement maligne. ➤

La tomodensitométrie (fig. 6.9) ou l’IRM peuvent être utiles pour rechercher une
extension ganglionnaire rétropéritonéale, en revanche elles sont peu performan-
tes pour le diagnostic d’extension péritonéale.

➤ Fig. 6.9. Aspect tomodensitométrique d’une volumineuse tumeur ovarienne droite. ➤

Le dosage du taux sanguin de CA 125 peut avoir une valeur d’orientation initiale
et constitue par ailleurs un élément de référence pour le suivi. En revanche, le
dosage de l’α-fœtoprotéine et de la β-HCG est indispensable si l’on suspecte du
fait de l’âge une tumeur ovarienne germinale.
Le diagnostic histologique est en fait obtenu lors de la laparotomie, le but des
examens précédents étant essentiellement de poser ou non l’indication opéra-
toire.

96 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

◗ Classification d’extension
L’extension des cancers ovariens peut se faire par voie sanguine, lymphatique
et péritonéale. Le drainage lymphatique se fait par la voie lombo-ovarienne
rétropéritonéale qui s’abouche au réseau lymphatique principal au niveau de L2.
L’extension péritonéale peut concerner toute la cavité avec extension épiploïque
fréquente.
L’examen clinique et les explorations radiologiques sont souvent pris en défaut
dans l’évaluation de l’extension réelle des cancers ovariens. De ce fait, la classifica-
tion proposée (tableau 6.XI) est essentiellement obtenue lors d’une laparotomie à
la fois diagnostique et thérapeutique. Ce geste doit obéir à des règles strictes de
réalisation technique si l’on veut que l’inventaire lésionnel soit complet et fiable.

Tableau 6.XI. Classification en stades (FIGO) des cancers de l’ovaire


Stade Description
Stade I Tumeur limitée aux ovaires
Stade IA Un ovaire atteint, capsule intacte
Stade IB Deux ovaires atteints, capsule intacte
Stade C Capsule rompue, cellules néoplasiques dans le liquide d’ascite
ou de lavage péritonéale
Stade II Extension pelvienne
Stade IIA Extension à l’utérus ou à la trompe
Stade IIB Extension aux autres organes pelviens
Stade IIC Extension viscérale pelvienne et cellules néoplasiques dans le liquide
d’ascite ou de lavage péritonéal
Stade III Extension péritonéale hors du pelvis ou métastases ganglionnaires
Stade IIIA Localisations péritonéales microscopiques
Stade IIIB Localisations péritonéales macroscopiques inférieures à 2 cm
Stade IIIC Extension péritonéale > 2 cm ou localisations ganglionnaires
Stade IV Métastases viscérales à distance à l’exclusion des localisations péritonéales

◗ Moyens thérapeutiques des cancers


de l’ovaire
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Chirurgie
La chirurgie est le premier temps thérapeutique. Elle permet également d’affir-
mer le diagnostic. Après une exploration soigneuse de la cavité abdominopel-
vienne, elle précise le degré d’extension tumorale. De façon systématique, il est
réalisé une hystérectomie totale, une ovariectomie bilatérale, une omentectomie
et des prélèvements ganglionnaires lombo-aortiques. La technique opératoire
doit éviter de rompre la tumeur ovarienne, souvent kystique, et doit comporter
un recueil du liquide d’ascite éventuel et, en son absence, un lavage péritonéal
pour examen cytologique.
En fonction de l’extension tumorale, on peut être amené à réaliser une exérèse
partielle de la vessie, du rectum, du sigmoïde ou du grêle. La qualité du geste
chirurgical est primordiale. Son but est de réaliser la réduction maximale du
volume tumoral, idéalement complète, à tout le moins infracentimétrique.

97 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Pour les formes de début (IA), les types histologiques borderline, la chirurgie
peut être le seul traitement. La question posée est alors celle de la conservation
ou non de l’ovaire controlatéral, en particulier chez les femmes jeunes.
La chirurgie peut être également réalisée une deuxième fois après que la pre-
mière intervention ait été suivie d’une chimiothérapie. Cette deuxième chirurgie
peut avoir pour but :
– d’évaluer l’efficacité de la chimiothérapie ;
– de compléter la chirurgie initiale qui pour des raisons d’extension tumo-
rale majeure n’avait pu être complète, après réduction tumorale par la
chimiothérapie.

◗ Chimiothérapie
La chimiothérapie réalisée en postopératoire est d’autant plus efficace que le
résidu tumoral laissé en place par le chirurgien est réduit. La molécule la plus
active est le cisplatine, le plus souvent associé à d’autres médicaments comme
les agents alkylants (cyclophosphamide) et/ou la doxorubicine. Initialement uti-
lisés en « deuxième ligne » les taxanes ont prouvé leur efficacité et sont
aujourd’hui souvent associés au cisplatine en première intention.
Il est habituel de réaliser au minimum trois à quatre cycles de polychimiothéra-
pie à quatre semaines d’intervalle pour obtenir l’efficacité maximale, souvent
appréciée par la décroissance du taux postopératoire de CA 125. L’efficacité
n’est pas augmentée par la prolongation au-delà de six cycles, le maintien d’un
taux élevé et a fortiori la réascencion du taux de CA 125 témoignant dans tous
les cas de la persistance de tissu tumoral actif peu sensible au traitement.
Chez les patientes présentant une maladie résiduelle péritonéale postopératoire
de petit volume, l’administration intrapéritonéale de cisplatine peut être propo-
sée.

◗ Radiothérapie
La radiothérapie a été historiquement le premier traitement adjuvant postopé-
ratoire des cancers de l’ovaire. L’administration intrapéritonéale d’isotopes
radioactifs est utilisée depuis longtemps pour irradier l’ensemble du péritoine.
Actuellement, certaines équipes utilisent toujours cette technique ; le radioélé-
ment choisi est le 32P, émetteur β dont l’action s’exerce sur 2 à 3 mm. Ce pro-
cédé ne convient que pour détruire des cellules isolées ou des agrégats
cellulaires microscopiques.
La radiothérapie externe abdominopelvienne est actuellement la technique la
plus utilisée. Son efficacité a été démontrée dans les années soixante. Plusieurs
essais ont abouti aux conclusions suivantes :
– la radiothérapie pelvienne est insuffisante, car un pourcentage non négli-
geable de malades développe des récidives abdominales. Il est mainte-
nant bien acquis que l’irradiation doit intéresser l’ensemble de la cavité
abdominale et pelvienne ;
– l’irradiation abdominopelvienne est inutile s’il persiste après chirurgie
incomplète, de grosses masses résiduelles ; 1 à 2 cm de diamètre
constitueraient la limite.
La dose délivrée est de l’ordre de 25 à 30 Gy à la cavité abdominopelvienne,
à raison de 1,10 à 1,50 Gy par séance. Le pelvis doit recevoir une dose sup-
plémentaire jusqu’au niveau de 45 Gy.
Le risque thérapeutique essentiel est représenté par les complications digestives
à type d’iléite chronique dont la fréquence est augmentée par les chirurgies
itératives.

98 ◗
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CANCERS GYNÉCOLOGIQUES 6

◗ Indications thérapeutiques
Le traitement des cancers de l’ovaire a fait l’objet d’évolutions importantes au
cours des dernières années notamment pour ce qui est de la chimiothérapie.

◗ Stades précoces I et II
La laparotomie initiale doit comporter un temps d’exploration très soigneuse du
pelvis et de la cavité abdominale avec prélèvements ganglionnaires rétropérito-
néaux lombo-aortiques, 10 % des stades I et près de 25 % des stades II
s’accompagnant en fait d’adénopathies métastatiques, devenant ainsi des
stades III. Ce temps initial est le seul moyen d’être sûr du stade lésionnel et de
choisir le traitement adapté.
Les formes histologiques de malignité frontière ou de très faible grade peuvent
être traitées par chirurgie seule, à la condition que la tumeur soit encapsulée et
que le diamètre tumoral ne soit pas supérieur à 10 cm. Dans les autres cas, la
discussion est ouverte entre une irradiation abdominopelvienne totale et une
chimiothérapie soit par voie générale soit par voie intrapéritonéale.

◗ Stades avancés III et IV


Après réduction maximale des volumes tumoraux lors de la chirurgie initiale,
l’indication d’une chimiothérapie par voie générale est aujourd’hui formelle,
autour de l’association cisplatine-cyclophosphamide ou plus récemment de
l’association cisplatine-taxanes, pour quatre à six cycles.
L’efficacité du traitement est jugée éventuellement sur la décroissance du taux
de CA 125 resté élevé après la chirurgie. L’échographie et la tomodensitométrie
peuvent permettre d’apprécier l’évolution de gros volumes laissés en place,
mais sont riches en faux négatifs pour ce qui est de l’extension péritonéale. La
cœlioscopie permet souvent d’éviter une deuxième laparotomie purement dia-
gnostique, à la condition qu’elle visualise la totalité de la cavité abdominopel-
vienne et qu’elle soit associée à la possibilité de prélèvements tissulaires par
technique de cœliochirurgie.
Si la chimiothérapie permet d’obtenir une rémission complète, clinique, biologi-
que et histologique, le traitement de « consolidation » est l’objet de controverse
entre chimiothérapie intrapéritonéale, irradiation abdominale totale, voire plus
aucun autre traitement. En règle, les stades IV d’emblée échappent à cette dis-
cussion du fait de leur caractère métastatique viscéral, mais le souci d’éviter une
évolution tumorale abdominale invalidante peut faire retenir un complément
intrapéritonéal ou radiothérapique.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Dans les cas où la chimiothérapie n’a pas permis d’obtenir de rémission com-
plète, l’irradiation et la chimiothérapie intrapéritonéale sont illusoires. Seules des
chimiothérapies dites de « deuxième ligne » peuvent être proposées.

◗ Tumeurs germinales
Les dysgerminomes (ou séminomes) de stade IA peuvent être traités par
chirurgie seule (ovarectomie uni- ou bilatérale), suivie ou non d’une chimiothé-
rapie adjuvante de type cisplatine-bléomycine-vincristine réputée peu hypoferti-
lisante pour l’ovaire controlatéral. Les formes plus avancées reçoivent soit une
irradiation abdominale complète soit une chimiothérapie, soit les deux.
Les autres tumeurs germinales malignes sont des indications préférentielles de
chimiothérapie comme les tumeurs testiculaires non séminomateuses. L’effica-
cité en est évaluée sur l’évolution du taux des marqueurs.

99 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Résultats et pronostic
Tumeurs épithéliales
Le pronostic global des tumeurs épithéliales est mauvais, essentiellement du fait
de la grande fréquence des formes avancées. En effet, les facteurs pronostiques
essentiels sont : le stade, le grade, la forme histologique, l’âge. Le taux de survie
à 5 ans sans maladie évolutive va ainsi de 70 à 80 % pour les stades I bien
différenciés, à 30 % pour les stades III ou les stades II peu différenciés.
Parmi les formes histologiques, le pronostic semble meilleur à stade égal pour
les formes mucineuses que pour les formes séreuses, les plus fréquentes.

◗ Tumeurs germinales
Leur grande sensibilité à la chimiothérapie et/ou à l’irradiation fait que les
tumeurs ovariennes germinales ont un meilleur pronostic que les formes épi-
théliales. Ainsi la guérison des stades I est proche de 100 %, avec le plus sou-
vent conservation de la fertilité de l’ovaire controlatéral. Pour les formes plus
évoluées, le taux de guérison reste élevé voisin de 70 à 80 %.

Points clés
• Les cancers de l’ovaire sont des maladies graves essentiellement en raison de leur
diagnostic relativement tardif en l’absence de moyen efficace de diagnostic
précoce.
• L’évaluation préthérapeutique repose sur la clinique, l’échographie, la tomodensi-
tométrie pour les aires ganglionnaires profondes et surtout l’inventaire
peropératoire.
• Leur extension se fait vers la cavité péritonéale et les ganglions abdominopelviens.
• Il s’agit le plus souvent de tumeurs du revêtement ovarien (adénocarcinomes).
• Leur traitement comporte une chirurgie première la plus complète possible suivie
d’une chimiothérapie dont l’efficacité peut être jugée sur l’évolution du marqueur
spécifique de la maladie péritonéale, le CA 125.


100 ◗
09_Chap7 Page 101 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Tumeurs cutanées1
7
É. CABARROT

◗ TUMEURS CUTANÉES ÉPITHÉLIALES


◗ MÉLANOMES MALINS

◗ TUMEURS CUTANÉES ÉPITHÉLIALES


Les cancers épithéliaux de la peau se développent à partir des kératinocytes de
l’épiderme, ce qui exclut les tumeurs des annexes pilo-sébacées et d’autres
tumeurs rares (dermatofibrome, tumeur de Merckel, métastases cutanées). Ce
sont les cancers humains les plus fréquents. Ils surviennent préférentiellement
chez les personnes de plus de 60 ans et sur les zones exposées au soleil, qui
est le principal facteur étiologique. Le traitement des cancers infiltrants est local
par la chirurgie et/ou par radiothérapie. Les métastases sont exceptionnelles et
le pronostic est excellent.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
L’estimation est imprécise par défaut d’enregistrement des cancers basocellulai-
res. Les carcinomes cutanés sont les tumeurs humaines les plus fréquentes
dans la race blanche et pour les phototypes à risque. Les taux les plus élevés
sont en Australie, ou l’incidence cumulative est de 66 %. En Europe et aux
États-Unis, les taux sont deux fois moindres. Ces cancers se localisent sur les
parties découvertes de la tête et du cou, du dos chez l’homme et les membres
inférieurs chez les femmes.

Âge
L’incidence des cancers de la peau augmente avec l’âge, car le risque est cumu-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

latif et proportionnel au nombre des expositions solaires et à leur intensité. Les


habitudes de vie moderne expliquent l’augmentation de la survenue chez les
sujets plus jeunes. L’exposition intense des enfants et les coups de soleil sont
nocifs pour la peau.

Mortalité
La mortalité par cancers épidermoïdes n’excède pas 1 %. Elle se réduit par les
progrès du dépistage et des traitements.

1. Item n° 149. Tumeurs cutanées, épithéliales et mélaniques.



101 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Facteurs de risque
Irradiation solaire

L’irradiation solaire est le facteur essentiel, qui explique la fréquence dans cer-
taines professions (marins, agriculteurs, maçons) et chez les personnes vivant
en montagne ou près de l’équateur.

Phototype

Les phototypes sensibles sont les sujets à peau claire aux yeux bleus ou verts,
ceux ayant des phanères blonds, roux, des éphélides et au maximum les albi-
nos. Le degré de pigmentation et la fréquence des coups de soleil déterminent
le phototype dont il faut tenir compte pour la prévention (tableau 7.I).
Les Méditerranéens sont protégés par la pigmentation naturelle de la peau. Les
cancers épithéliaux sont exceptionnels chez les Noirs, rares chez les Asiatiques.

Tableau 7.I. Caractéristiques des phototypes


Phototype Caractéristiques
I Brûle toujours et ne se pigmente jamais
II Brûle toujours, mais se pigmente légèrement
III Brûle de temps en temps et se pigmente toujours
IV Ne se brûle jamais et se pigmente toujours
V Peau basanée (asiatiques, indiens)
VI Noirs

Autres

Les autres facteurs de risque sont :


– l’exposition aux hydrocarbures aromatiques et aux goudrons de houille :
les professions exposées sont les travailleurs de l’industrie du pétrole, du
charbon et les mécaniciens ;
– l’exposition à l’arsenic, accidentelle ou thérapeutique, et aux dérivés arse-
nicaux organiques retrouvés dans les pesticides, les désherbants, les pro-
duits de tannage. Les cancers sont associés à des taches violettes et à
des kératoses ponctuelles de la paume et de la plante ;
– l’exposition professionnelle ou thérapeutique aux rayons X : les cancers
surviennent après un intervalle libre de 10 à 15 ans et sont précédés par
des lésions de radiodermite chronique. La peau irradiée a un aspect sclé-
reux, blanchâtre ou érythémateux avec des télangiectasies ;
– les plaies chroniques et cicatrices de brûlures peuvent dégénérer tardive-
ment en cancer spinocellulaire ;
– l’immunodépression après greffes d’organes et les patients VIH+. Les can-
cers cutanés se développent de manière plus agressive et atypique, avec
parfois des métastases ;
– certaines génodermatoses constituent des risques majeurs tels l’albi-
nisme, le syndrome des nævi basocellulaires, le xeroderma pigmento-
sum. Le xeroderma pigmentosum est une maladie génétique rare, liée à
un déficit des enzymes de réparation de lésions solaires de l’ADN. Les
patients sont atteints dès le jeune âge par des cancers multiples, souvent
graves et récidivants.

102 ◗
09_Chap7 Page 103 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS CUTANÉES 7

◗ Pathologie et aspects cliniques


Les tumeurs cutanées ont un aspect polymorphe, selon qu’il s’agit de lésions
précancéreuses (kératoses), de cancers intra-épidermiques (maladie de Bowen)
ou infiltrants.

◗ Kératoses actiniques
L’aspect des kératoses est variable.
Ce sont des plaques mal limitées, parfois grises, ou jaunes et kératinisées, par-
fois érythémateuses et micro-ulcérées, recouvertes de squames ou de croûtes.
Les kératoses évoluent lentement, sur les zones photo-exposées, le front, les
tempes, le crâne des chauves, le pavillon des oreilles, le dos des mains et des
bras.
Dix à 25 % des kératoses actiniques se transforment en cancer in situ, puis en
cancer infiltrant. Les signes de malignisation sont une induration, un bourrelet
ou une ulcération, une rougeur excessive ou une kératinisation en corne. Toute
modification d’une kératose impose une biopsie, ou l’exérèse chirurgicale.
Les cornes cutanées sont des formations dures de kératine, plus ou moins suré-
levées, brunes et reposant sur une base érythémateuse. L’exérèse de ces cornes
est toujours indiquée, car l’examen histologique montre une fois sur deux, un
épithélioma spinocellulaire sous-jacent.

◗ Maladie de Bowen
La maladie de Bowen est un cancer intra-épidermique (in situ). L’aspect est une
plaque rouge, irrégulière, recouverte de fines squames. La lésion s’élargit lente-
ment. Les localisations sont multiples dans un tiers des cas. Le risque de trans-
formation en cancer spinocellulaire infiltrant est de 3 à 5 %.
La maladie de Bowen survient le plus souvent au-delà de 60 ans. Les causes
favorisantes sont l’irradiation solaire, l’intoxication aux composés de l’arsenic, le
virus du papillome humain (HPV) dans un contexte d’immunodépression (gref-
fés rénaux). Des localisations muqueuses sont possibles (vulve et gland). Pour
certains, la maladie de Bowen serait le marqueur d’un cancer profond abdomi-
nal ou urogénital ; mais ce fait est contesté.

◗ Carcinome basocellulaire
Le carcinome basocellulaire se développe à partir des cellules de la couche
basale et s’étend progressivement au derme et vers l’épiderme qui s’ulcère.
L’évolution est lente, le pronostic est excellent dans les formes limitées. Les
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tumeurs négligées envahissent les structures musculaires, cartilagineuses et


osseuses sous-jacentes, surtout au niveau de la pyramide nasale et du sillon
rétro-auriculaire. L’envahissement ganglionnaire et les métastases sont excep-
tionnellement possibles dans des formes histologiquement agressives et résis-
tantes aux thérapeutiques.
La lésion typique est un nodule cutané, siégeant sur la face, le cou, le décolleté.
En relief par rapport à la peau avoisinante, le nodule a un aspect translucide,
imitant une perle, avec de fines télangiectasies. Dans les formes ulcérées, le
centre du nodule est recouvert d’une fine croûte et saigne facilement après son
ablation. L’aspect perlé caractéristique est alors retrouvé sur le bourrelet périphé-
rique.
Les variantes cliniques sont multiples :
– le cancer basocellulaire tatoué se présente comme une papule surélevée
et pigmentée par points ;

103 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– la forme sclérodermiforme a un aspect de cicatrice fibreuse indurée, par-


fois blanche et morphéiforme. L’extension profonde est plus importante
que la partie visible ;
– l’ulcus rodens est une ulcération maligne, térébrante, creusant la peau du
nez, du front, des oreilles, des sillons péri-auriculaires.
Devant toute lésion atypique et persistante de la peau, il faut penser à un cancer
et rechercher les signes les plus caractéristiques, comme un aspect perlé, des
télangiectasies, le siège en zone découverte et l’association à des kératoses acti-
niques. En cas de doute, il faut proposer une biopsie (cf. infra).

◗ Carcinome épidermoïde
Les carcinomes épidermoïdes sont quatre fois moins fréquents que les basocel-
lulaires. Ils se développent à partir des kératinocytes. Au plan histologique, la
tumeur est plus ou moins différentiée avec formation de globes cornés carac-
téristiques. La classification de Broders de 1 à 4, est fondée sur le pourcentage
de cellules différenciées, la forme la plus différenciée étant dite spinocellulaire.
Leur évolution est plus rapide, parfois agressive et, dans ce cas, des métastases
ganglionnaires et/ou pulmonaires sont possibles.
Les carcinomes épidermoïdes surviennent après 40 ans sur des lésions de kéra-
toses actiniques, plus rarement en peau saine. Le siège est dans 85 % la tête,
le cou et/ou le dos des mains et des bras. L’aspect est celui d’une tumeur
bourgeonnante, indurée, saignant facilement, avec un centre ulcéré recouvert
de croûtes. Lorsqu’il se développe sur une kératose et/ou une maladie de
Bowen, les carcinomes épidermoïdes sont détectés devant une ulcération, une
surélévation, une induration ou un saignement.

◗ Méthodes de diagnostic
Le diagnostic est fortement suspecté par l’aspect clinique :
– évolution chronique lentement progressive ;
– lésion en général indolore ;
– résistance à l’application de topiques locaux ;
– modification d’une kératose actinique saignant ou ulcérée ou indurée ;
– aspect perlé d’un basocellulaire ;
– lésion ulcéro-bourgeonnante d’un spinocellulaire ;
– saignement spontané ou après grattage.
Les petites lésions doivent être examinées avec une loupe et un bon éclairage
à la recherche d’un aspect perlé, d’une micro-ulcération, voire avec un derma-
toscope.
Le diagnostic est affirmé par l’examen histologique après biopsie :
– la biopsie excisionnelle est l’ablation totale d’une lésion de petite taille et
lorsque la laxité cutanée permet une suture immédiate. L’exérèse est
effectuée sous anesthésie locale, au bistouri à lame, au-delà des limites
macroscopiques. La plaie est suturée par approximation. La biopsie exci-
sionnelle est à la fois une méthode de diagnostic et de traitement. L’exa-
men histologique contrôle que l’excision est passée au-delà des limites
microscopiques de la tumeur ;
– la biopsie incisionnelle est proposée pour les tumeurs trop larges pour
être enlevée par une biopsie excisionnelle. Elle s’effectue avec une pince
à biopsie, ou un bistouri, sur la berge d’une tumeur bourgeonnante ;
– la biopsie au trocart est adaptée à des lésions planes, étendues et aux
kératoses. Le trocart a une extrémité tranchante, qui découpe une mince
rondelle de 3 à 4 mm de peau, jusqu’au derme.

104 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

L’examen histologique confirme la malignité, définit le type histologique et pré-


cise la qualité de la chirurgie.

◗ Diagnostics différentiels
L’anamnèse et l’aspect clinique identifient assez facilement les lésions inflam-
matoires (bourgeon charnu), les tumeurs bénignes (molluscums, adénomes),
les verrues vulgaires et séborrhéiques, les nævi.
Le kérato-acanthome est un nodule cutané surélevé en forme de cratère avec un
bourrelet périphérique entourant une dépression remplie d’un bouchon de kéra-
tine brune. Il se développe rapidement en un à trois mois sur des zones exposées
au soleil et régresse spontanément. Le diagnostic différentiel est difficile avec un
carcinome spinocellulaire et leur exérèse chirurgicale est recommandée.
Les mélanomes achromiques peuvent en imposer pour un cancer spinocellu-
laire bourgeonnant ; À l’inverse, certains basocellulaires sont tatoués. Il ne faut
pas confondre un basocellulaire sclérodermiforme et une cicatrice hypertrophi-
que ou chéloïde. Dans tous les cas douteux, une consultation spécialisée et une
biopsie établissent le diagnostic définitif.

◗ Bilan et classification
L’examen comprend la description de la tumeur, la mesure de la taille tumorale,
la recherche d’une fixation aux structures sous-jacentes, d’adénopathies et
d’autres localisations sur le revêtement cutané. Pour les cancers étendus de la
face ou de type agressif, le bilan peut être complété par un scanner et une
radiographie thoracique.
La classification TNM (tableau 7.II) s’applique seulement aux carcinomes, à
l’exclusion des paupières, de la vulve et du pénis.

Tableau 7.II. Classification TNM des carcinomes cutanés (édition 1997, cor-
rigée 1999)

Tis Carcinome in situ

T1 Tumeur inférieure ou égale à 2 cm dans sa plus grande dimension

T2 Tumeur entre 2 et 5 cm dans sa plus grande dimension

T3 Tumeur supérieure à 5 cm dans sa plus grande dimension

T4 Tumeur envahissant les structures extradermiques (cartilage, squelette, muscle)


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

En cas de tumeurs simultanées multiples, le patient est classé dans la catégorie T la plus forte et
le nombre de tumeurs est indiqué entre parenthèses, par exemple T2 (5).

◗ Traitement
◗ Prévention
Prévention primaire
Elle passe par l’éducation du public sur les risques d’une exposition solaire
excessive. Les recommandations sont les suivantes :
– la protection solaire de la peau pour l’ensemble de la population et
notamment pour les personnes ayant un phototype à risque ;

105 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– une exposition progressive en début de vacances ;


– le port de vêtements légers et de chapeaux ;
– l’application renouvelée de crèmes solaires avec un coefficient de filtra-
tion des rayons UV proportionnel au phototype ;
– la limitation de l’exposition des enfants, plus particulièrement en milieu
de journée et en surface réverbérante (plage, navigation, randonnée et
ski de montagne).

Prévention secondaire
Il s’agit d’un aspect essentiel de la prise en charge des cancers cutanés. Il est
recommandé au patient traité pour un premier cancer, une auto-surveillance et
un examen médical périodique de tout le revêtement cutané. Des photogra-
phies permettent de surveiller les personnes ayant des kératoses ou des lésions
cutanées multiples. Les kératoses doivent être traitées avant leur transformation
en cancers invasifs.

◗ Méthodes thérapeutiques
Cryothérapie et cryochirurgie
Ces méthodes dermatologiques utilisent le froid (produit par l’azote liquide)
pour la destruction des tumeurs cutanées superficielles. Le contrôle histologique
n’étant pas possible, la surveillance post-thérapeutique doit être stricte.

Chirurgie
L’exérèse de la lésion doit se faire en limites saines, avec une marge suffisante
(minimum 5 mm). La perte de substance cutanée est réparée par suture et,
pour les vastes tumeurs, par greffe, par lambeau local ou à distance. La qualité
de l’exérèse est contrôlée par l’examen histologique de la pièce opératoire éven-
tuellement de façon extemporanée. Si elle se révèle insuffisante, une reprise
chirurgicale ou plus rarement une radiothérapie, est justifié.
Pour un cancer de type sclérodermiforme ou pour une récidive, l’exérèse chi-
rurgicale est contrôlée par de multiples prélèvements et examen en extempo-
rané (chirurgie micrographique de Mohs).
Les traitements par électrocoagulation ou par vaporisation laser peuvent être
utilisés dans les kératoses et les carcinomes in situ, mais non dans les cancers
infiltrants par absence de contrôle histologique de la qualité de destruction
tumorale.

Curiethérapie interstitielle
La curiethérapie consiste en une implantation locale de fils d’iridium 192. Ce
traitement nécessite une hospitalisation de quelques jours en secteur radiopro-
tégé.

Radiothérapie externe
L’électronthérapie utilise les électrons émis par un accélérateur de particules,
dont la propriété est d’être rapidement absorbés par les tissus et de réduire
l’irradiation des structures sous-jacentes. L’électron thérapie est indiqué dans les
cancers largement étendus en surface. La dose est de 60 à 70 Gy en six à huit
semaines.
La radiothérapie superficielle (de contact) est moins utilisée depuis l’avènement
de la curiethérapie.

106 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

Les tumeurs négligées ou récidivantes ou les loges de curages ganglionnaires


sont des indications de radiothérapie externe exclusive ou postopératoire.

Chimiothérapie en application locale


Une pommade à base de 5-fluoro-uracile peut être utilisée sur les kératoses
actiniques, sans effets systémiques, mais induisant une forte irritation cutanée.

◗ Indications
Le traitement des kératoses est fondé sur la cryothérapie à l’azote liquide. La
protection solaire (chapeau à large bord, crème filtrante) et la surveillance cuta-
née par le patient lui-même par son médecin ou son dermatologue est indiquée
au minimum une fois par an.
Les cancers basocelllulaires ont une évolution purement locale, toujours lente.
Les atteintes ganglionnaires ou viscérales sont exceptionnelles. L’exérèse chirur-
gicale est le traitement le plus simple et le plus souvent choisi. La curiethérapie
est efficace dans les cancers péri-orificiels, les paupières, l’angle interne de l’œil,
le nez chez les personnes âgées ou en cas de récidive après chirurgie. Le trai-
tement des formes infiltrantes ou étendues, tels que l’ulcus rodens, des cancers
sclérodermiformes, relèvent d’une exérèse chirurgicale large, si nécessaire avec
reconstruction, et parfois avec radiothérapie postopératoire.
Les cancers épidermoïdes évoluent plus rapidement que les basocellulaires. Les
rares métastases ganglionnaires sont cependant plus fréquentes pour les
tumeurs siégeant sur les narines, le pavillon de l’oreille, le conduit auditif
externe, les lèvres. Le risque ganglionnaire ou de métastases pulmonaires
devient réel s’il se produit plusieurs récidives locales. Les options thérapeutiques
sont la chirurgie (tumeurs de toute taille et de toutes localisations avec ou sans
adénopathie), la radiothérapie (tumeurs très invasives ou récidivantes après chi-
rurgie ou si l’option chirurgicale est trop mutilante) ou les deux méthodes asso-
ciées. Un curage ganglionnaire est indiqué en cas d’adénopathie pathologique.

◗ Suivi
◗ Pronostic
Les résultats sont excellents avec plus de 95 % de contrôle définitif. Les récidi-
ves après traitement (5 %), se produisent sur des sites difficiles à traiter (nez,
sillon rétro-auriculaire, commissure labiale) ou en cas de tumeurs de plus de
2 cm.
Les cancers épidermoïdes ont un potentiel plus élevé de récidive locale, ce qui
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

doit inciter à renforcer la surveillance post-thérapeutique.


La fréquence des récidives ganglionnaires est faible, environ 10 %, et seulement
dans les cancers épidermoïdes, mais altérant gravement les chances de guéri-
son (taux de survie : 25 %).
La moitié des patients traités pour un cancer de la peau, présenteront un second
cancer primitif, ce qui impose une longue surveillance. Il en est de même des
patients ayant des lésions de kératose actinique.

◗ Surveillance
L’examen médical comprend :
– l’inspection de la totalité du revêtement cutané, et des muqueuses de la
cavité buccale chez le fumeur et l’alcoolique ;
– l’examen des kératoses à la loupe et avec un bon éclairage ;

107 ◗
09_Chap7 Page 108 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– la palpation des aires ganglionnaires satellites après traitement d’un can-


cer spinocellulaire.

◗ MÉLANOMES MALINS Les mélanomes malins (MM) sont des tumeurs de la peau qui se développent
à partir des mélanocytes de la couche basale. Leur incidence en France, comme
dans la plupart des pays occidentaux, a doublé dans les vingt dernières années.
Le diagnostic précoce par l’information de la population, la sensibilisation des
médecins et la prévention par la protection solaire sont des actions essentielles
dans l’amélioration du pronostic.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Les MM sont assez rares, représentant environ 2 % de l’ensemble des cancers.
Ils sont plus fréquents chez la femme (60 %) que chez l’homme. (40 %).
L’incidence des MM a progressé rapidement entre 1975 et 1985, puis s’est
ralentie comme dans tous les pays occidentaux (fig. 7.1). Les taux en France
sont deux fois moindres qu’au Danemark ou en Suède.

➤ Fig. 7.1. Évolution de l’incidence et de la mortalité des mélanomes malins. ➤


Nombres de cas 4 500
(France estimation)
4 000 4 255
4 040
3 500
3 372
3 000

2 500
2 569 incidence
2 000 mortalité
1 769
1 500

1 000 1 144
1 003
500 674 767
357
0 Années
1975 1980 1985 1990 1995

Âge
Les mélanomes sont exceptionnels chez l’enfant. Le risque apparaît après la
puberté, devient net après 25 ans et augmente régulièrement avec l’âge. Le
maximum est entre 60 et 80 ans. Le pronostic est meilleur pour les femmes
que pour les hommes.

Mortalité
La mortalité induite par les MM a suivi une croissance régulière, mais moins
forte que l’incidence, ce qui suggère l’efficacité du diagnostic précoce.

108 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

Facteurs de risque

Exposition solaire • Elle constitue la cause principale de l’augmentation


d’incidence des mélanomes malins. Les facteurs de risque ont été confirmés
par de nombreuses études épidémiologiques :
– un facteur racial : le mélanome atteint plus souvent les sujets de race
blanche, ayant les cheveux blonds ou roux, les yeux clairs, des éphélides
(phototypes 2 et 3). Les phototypes 4 (méditerranéen), 5 et 6 (métis
ou noirs) développent rarement des mélanomes, sauf au niveau de la
paume et de la plante ;
– un facteur géographique : les mélanomes sont plus fréquents dans les
pays proches de l’équateur, en particulier l’Australie. L’étude des migra-
tions de population a confirmé un risque accru pour les gens de race
blanche, ayant migré dans des zones géographiques de fort
ensoleillement ;
– l’intensité de l’exposition augmente le risque, surtout les coups de soleil
et l’exposition dans l’enfance. Les mélanomes surviennent sur les zones
exposées, particulièrement le dos chez les hommes, les membres chez
les femmes ;
– la répartition anatomique des mélanomes, sur les jambes pour les fem-
mes et le dos pour les hommes, reflète les habitudes vestimentaires des
personnes et les zones particulièrement exposées au soleil.
Nævus dysplasique • Les mélanomes peuvent se développer sur un nævus
préexistant et apparaissent comme un modèle de cancérisation par étapes.
Nævus pigmentaire géant congénital • Le risque de dégénérescence est
évalué à 20 à 30 %.
Mélanome familial • C’est une forme identifiée, mais le risque génétique est
rare (4 %). Le syndrome des nævi dysplasiques est une maladie héréditaire à
transmission dominante, où les personnes présentent des nævi multiples, plats,
irréguliers et minces, de coloration variable. Les formes familiales sont avérées
si deux sujets apparentés au premier degré sont atteints de mélanomes. Dans
ce cas, l’examen de tous les membres de la famille et un dépistage annuel sont
à proposer.

◗ Pathologie

◗ Types histologiques
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Le mélanome est un cancer développé à partir des cellules pigmentées de la


peau, les mélanocytes. Il existe quatre types de mélanomes cutanés.

Mélanome à extension superficielle (Superficial Spreading


Melanoma, SSM)
Le SSM (70 %) présente dans un premier temps une lente extension superfi-
cielle, puis une phase d’extension verticale vers le derme.

Mélanome nodulaire (Nodular Melanoma, ou NM)

Le NM (10 à 15 %) est le mélanome le plus agressif, d’emblée en phase ver-


ticale et envahissant les ganglions lymphatiques régionaux.

109 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Mélanome sur mélanose de Dubreuilh (Lentigo Malignant


Melanoma, LMM)
Cette tumeur (10 à 15 %) se développe chez les personnes âgées, à partir
d’une mélanose, le plus souvent située sur la pommette ou la tempe.

Mélanome lentigineux des extrémités (Acral Lentiginous


Melanoma, ALM)
Cette tumeur se produit sur la plante des pieds et plus rarement sur la paume
des mains. La tumeur est souvent négligée, volontiers agressive et infiltrante vers
les structures sous-cutanées.

Évolution naturelle
Extension en surface et en profondeur
Les mélanomes de type SSM, LMM et ALM s’étendent dans l’épiderme (phase hori-
zontale), puis dans le derme papillaire et réticulaire, enfin à la graisse sous-cutanée
(phase verticale) (fig. 7.2). Les mélanomes nodulaires évoluent d’emblée verticale-
ment. Le pronostic est d’autant plus mauvais que le niveau d’infiltration est élevé.
Le meilleur facteur pronostique, l’index de Breslow, est la mesure au micromètre
(exprimée en millimètres) de l’épaisseur maximale de la tumeur.

➤ Fig. 7.2. Représentation de l’envahissement de la peau selon la classification de Clark. ➤

Épiderme Niveau I

Niveau II
Derme papillaire

Derme réticulaire Niveau III

Hypoderme Niveau IV

Extension lymphatique
Les ganglions régionaux sont envahis dans environ 20 % des mélanomes. Le
risque d’atteinte lymphatique est corrélé avec l’index de Breslow. Il débute pour
des tumeurs d’épaisseur supérieure à 0,75 mm et devient important au-delà de
4 mm. Les nodules en transit sont des métastases cutanées autour de la tumeur
primaire ou sur le trajet des voies lymphatiques (fig. 7.3). Ils se présentent
comme des nodules enchâssés dans le derme.

Métastases
Elles se localisent dans le poumon, le cerveau, le foie et plus rarement le sque-
lette, le péritoine ou la plèvre. Le pronostic des métastases est grave. La
médiane de survie est de sept mois, le taux de survie à un an des patients
métastatiques étant de 25 %.

110 ◗
09_Chap7 Page 111 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS CUTANÉES 7

➤ Fig. 7.3. Extension ganglionnaire des mélanomes. ➤

◗ Diagnostic clinique
Les patients consultent pour une lésion pigmentée de la peau d’apparition
récente ou pour une modification d’un nævus ancien, avec prurit, saignement,
excoriation, extension ou inflammation. Plus rarement, il s’agit d’une adénopa-
thie chronique cervicale, axillaire ou inguinale ou la découverte fortuite d’une
métastase, dont le mélanome primitif n’est pas constamment retrouvé.
Le diagnostic de mélanome est évoqué par l’aspect clinique et confirmé par un
examen pathologique.

◗ Aspects cliniques
Les mélanomes sont à différencier des lésions bénignes pigmentées de la peau,
nævus bénins, nævus dysplasiques, nævus dermique, nævus juvéniles, angio-
mes, cancers basocellulaires tatoués, etc. L’examen à la loupe avec une bonne
lumière est essentiel pour dépister un mélanome, voire à l’aide d’un dermatos-
cope.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les signes évocateurs de mélanome sont résumés dans l’acronyme suivant


(l’« abécédaire ») :
– A pour Asymétrie ;
– B pour Bords irréguliers. Un nævus est arrondi ou ovalaire, à bords nets ;
– C pour Couleur hétérogène marron clair et foncé, bleu noir ou rose bordé
de noir. Les nævi sont en principe monochrome ;
– D pour Diamètre supérieur à 6 mm. Les nævi sont de taille le plus sou-
vent inférieure.
Aucun de ces signes n’est pathognomonique et le diagnostic est parfois difficile
avec des nævi atypiques, qui peuvent être polychromes et irréguliers. En cas de
doute, une biopsie-exérèse est recommandée, de même que pour toute modi-
fication d’un nævus, prurit, saignement, ulcération, changement de couleur ou
de taille.

111 ◗
09_Chap7 Page 112 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Signes particuliers des mélanomes à extension


superficielle (SSM)
Les SSM surviennent le plus souvent sur un nævus préexistant congénital ou
non, récemment modifié. Le SSM s’observe à tout âge, mais il est exceptionnel
avant la puberté. C’est une lésion irrégulière, plane, de couleur beige à brun,
avec parfois des zones dépigmentées « zones de régression ». La surface
devient nodulaire, lorsque la tumeur est en phase verticale.

◗ Signes du mélanome nodulaire (NM)


Le NM se développe rapidement, le plus souvent en peau saine et en zones
non exposées, particulièrement le tronc. Le NM est une lésion saillante, de cou-
leur noire ou brune, parfois ulcérée en surface et saignante, parfois entourée
d’un halo inflammatoire.

◗ Signes du mélanome sur mélanose de Dubreuilh (LMN)


La mélanose survient chez des personnes âgées, de plus de 50 ans, sur la face,
et précède de 5 à 15 ans l’apparition du mélanome. Il s’agit d’une plaque poly-
chrome, beige ou brune, mince, s’étalant progressivement sur la pommette, ou
la tempe. Le mélanome se traduit par un épaississement ou un bourgeonne-
ment.

◗ Signes du mélanome lentigineux acral (ALM)


L’ALM survient sur les plantes, la paume ou la racine des ongles. Le diagnostic
est souvent tardif, devant une pigmentation irrégulière de surface, une indura-
tion plus profonde, un bourgeonnement ou une ulcération.
Le mélanome péri-unguéal est à différencier d’un hématome sous-unguéal ou
d’un panaris péri-unguéal. Il se présente comme une tâche débordant le lit de
l’ongle, vers la matrice où se produit un bourgeon charnu, rosé ou rouge. Un
reflet grisâtre et un débord matriciel brunâtre (signe de Hutchinson) doivent
alerter.

◗ Méthodes de diagnostic
Le diagnostic repose sur les caractères cliniques, la recherche les facteurs de
risque et au moindre doute sur une biopsie et un examen pathologique.

◗ Biopsie excisionnelle
La biopsie excisionnelle est l’exérèse complète de la lésion avec des marges de
5 mm, allant jusqu’à l’hypoderme. L’exérèse est le plus souvent elliptique et
pratiquée au bistouri à lame. La laxité cutanée doit permettre une suture immé-
diate.

◗ Biopsie incisionnelle
Elle est indiquée pour les lésions pigmentées trop larges pour être enlevé par
une biopsie excisionnelle, au scalpel sur la berge de la lésion, ou par trocart
(punch-biopsie). Pour une lésion unguéale ou péri-unguéale, l’ablation de
l’ongle et un prélèvement sur le sillon et la matrice sont souvent nécessaires.
L’examen histologique est toujours effectué en différé, jamais en extemporané.
Il confirme le diagnostic, précise le type histologique, définit les critères du pro-
nostic.

112 ◗
09_Chap7 Page 113 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS CUTANÉES 7

◗ Diagnostic différentiel
Les mélanomes posent le problème des lésions pigmentées de la peau, mais
certains sont achromiques.

◗ Tumeurs non mélanocytaires


Le tableau 7.III montre les caractères cliniques les différenciant des mélanomes
malins.

Tableau 7.III. Caractères cliniques des lésions pigmentées non mélanocy-


taires, bénignes et malignes
Lésions Caractères cliniques

Verrue séborrhéique Verrue plane ou en saillie, brunâtre ou jaunâtre, grasse,


non infiltrée

Fibrome dermique Nodule brun, arrondi ou ovalaire, lisse, ferme ou dur,


enchâssé dans le derme

Adénome apocrine Nodule en dôme, bleuté, translucide, de la région orbitaire

Kératoses actiniques Plaques grises ou jaunes, parfois érythémateuses,


recouvertes de squames et de croûtes, sur les zones
exposées

Cancer basocellulaire Nodules en saillie, pigmentés par points, avec aspect perlé
tatoué

◗ Tumeurs mélanocytaires
Les nævi sont extrêmement fréquents, chez l’adolescent et l’adulte jeune. Leur
reconnaissance est en général aisé par les critères cliniques définis par l’Abécédaire
(cf. supra). Les nævi dysplasiques peuvent être large de 1 à 2 cm avec des bords
irréguliers, mais ils sont en général monochrome plans et sans épaississement ou
ulcération (tableau 7.IV). En cas de doute, une exérèse biopsie est indiquée.

Tableau 7.IV. Caractères cliniques des tumeurs pigmentées mélanocytaires


Lésions Caractères cliniques
mélanocytaires

Nævus dysplasiques Symétrie, bords réguliers, couleur homogène, taille < 6 mm

Folliculite sous-dermique Nævus ancien, présence de poils, halo inflammatoire


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

régression rapide

Nævus juvénile de Spitz Enfant avant 10 ans, papule rose ou rouge,


hyperpigmentée bien circonscrite, lisse

Nævus bleu Sujet jeune, papule bleu foncé, bien circonscrite, lisse

Halo nævus de Sutton Nævus ancien ou congénital, entouré d’un halo dépigmenté

◗ Cas des mélanomes achromiques


Ils peuvent être confondus avec un carcinome épidermoïde, un botryomycome
(granulome sur corps étranger ou suppuration chronique), une tumeur
neuro-endocrine. Un reflet grisâtre ou bleuté doit orienter vers un mélanome.
Dans tous ces cas, une biopsie et une histologie sont indispensables.

113 ◗
09_Chap7 Page 114 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Bilan d’extension, classification


◗ Bilan local
Il comporte la mesure de la tumeur et la recherche d’une ulcération, d’un aspect
inflammatoire, de métastases en transit (nodules de perméation sur le trajet des
voies lymphatiques) d’une adénopathie régionale et l’examen de tout le revê-
tement cutané à la recherche d’une seconde lésion.

◗ Bilan d’extension
Il est particulièrement indiqué en cas d’atteinte ganglionnaire régionale. Il com-
prend la palpation du foie et des creux sus-claviculaires, une échographie hépa-
tique et une radiographie thoracique. Dans les stades évolués, on peut prescrire,
en cas de troubles fonctionnels, une échographie abdominale, un TDM de
l’encéphale ou une scintigraphie osseuse. Il n’y a pas en routine de marqueur
sérique utile.

◗ Classification
La classification de l’AJCC (American Joint Committee on Cancer) est la plus
utilisée :
– stade IA : mélanome localisé d’épaisseur inférieure ou égale à 0,75 mm ;
– stade IB : mélanome localisé épaisseur comprise entre 0,76 et 1,5 mm ;
– stade IIA : mélanome localisé épaisseur comprise entre 1,6 et 4 mm ;
– stade IIB : mélanome localisé épaisseur supérieure à 4 mm ;
– stade III : métastase(s) ganglionnaire(s) dans le territoire de drainage ou
moins de cinq métastases en transit ;
– stade IV : métastase(s) ganglionnaire(s) volumineuse(s), ou fixée(s) à la
peau, ou métastases à distance.

◗ Pronostic
L’épaisseur de la tumeur (index de Breslow) est le paramètre le plus fiable et
indépendant, le seuil de pronostic réservé étant fixé à 1,5 mm.
Les autres facteurs de mauvais pronostic sont les suivants :
– une atteinte du tronc ou de la tête ;
– l’âge supérieur à 40 ans ;
– le sexe masculin ;
– en cas d’atteinte ganglionnaire, un nombre de ganglions positifs supérieur
à cinq (taux de survie 15 %) ;
– en phase métastatique, un nombre élevé de sites (médiane de survie de
deux à sept mois si plus de trois sites).

◗ Traitement
◗ Prévention, dépistage
Prévention primaire
Elle passe par la protection solaire, en évitant les expositions prolongées ou le
bronzage artificiel par les lampes à UV, en protégeant la peau par des vête-
ments, un chapeau, une crème solaire.

114 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

Diagnostic précoce
Il repose sur la recherche par l’inspection de tout le revêtement cutané des
formes localisées et superficielles.

◗ Principes du traitement des mélanomes stade I et IIA


Chirurgie de la tumeur primitive
L’exérèse chirurgicale est le traitement de base. Depuis la conférence de consensus
de 1995, les marges de sécurité autour du mélanome sont définies selon le stade :
– marge de 1 cm pour les tumeurs d’épaisseur inférieure ou égale à 1 mm ;
– marge de 2 cm pour les tumeurs entre 1 et 2 mm ;
– marge de 3 cm pour les tumeurs supérieures à 3 mm.
La fermeture cutanée est obtenue par suture directe, par une greffe de peau,
par un lambeau local, myocutané ou libre.

Curage ganglionnaire
Pour les patients de stade I et II, (absence de ganglions pathologiques ou N0), le
curage de principe est contre-indiqué, car le risque ganglionnaire est faible dans
cette situation, et un essai randomisé n’a pas démontré d’effets sur la survie. Selon
la même étude, le sous-groupe susceptible de bénéficier d’un curage de principe
et d’un traitement adjuvant en cas de N+ microscopique, concerne les malades
dont l’index de Breslow est entre 1,5 et 4 mm (stade IIA).
Par ailleurs, la technique du « ganglion sentinelle » permet de réduire les séquel-
les du curage, grâce au prélèvement sélectif du premier ganglion susceptible
d’être envahi. Si le ganglion sentinelle est indemne, il n’y a pas d’indication à
un curage, s’il est atteint le curage et un traitement adjuvant sont proposés. Le
repérage est effectué par injection de colorant ou de substance radioactive
résorbée par voie lymphatique.

◗ Principes du traitement des patients de stade IIB et III


En cas d’adénopathie régionale, un curage complet est justifié. Le pronostic des
patients avec envahissement ganglionnaire est médiocre, entre 30 et 40 % de
survie globale à 5 ans. Les options de traitement adjuvant sont les suivantes :
– pas de traitement adjuvant ;
– radiothérapie postopératoire sur le lit de curage ganglionnaire ;
– immunothérapie par interféron (IFNα 2b) ;
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– mono- ou polychimiothérapie comportant le DTIC.


Une seule étude randomisée (ECOG, 2000) a montré à ce jour que les patients
ayant un mélanome de stade IIB, (N+ microscopique) et de stade III (N+ clini-
que), ont eu après immunothérapie (IFNα 2b à hautes doses pendant un an)
une amélioration de la survie sans rechute et de la survie globale par rapport
au groupe des patients ayant eu une simple surveillance postopératoire. Les
effets toxiques de l’interféron sont à prendre en considération : asthénie, myé-
lotoxicité, hépatotoxicité. Des études en cours testent des doses faibles d’inter-
féron en traitement adjuvant après chirurgie, avec des résultats encourageants.

◗ Principes du traitement des patients de stade IV


Le traitement a une visée palliative avec plusieurs options. Le pronostic reste
sombre, malgré des progrès thérapeutiques.

115 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Chimiothérapie
Le mélanome malin est modérément chimiosensible. Le médicament le plus
actif est la dacarbazine (Déticène) avec des taux de réponse de l’ordre de 20 %.
Les rémissions complètes sont rares. La fotémustine est un nouveau médica-
ment (nitroso-urée) pouvant constituer une alternative au Déticène.
Les polychimiothérapies combinent la darcabazine et d’autres médicaments, cis-
platine (CDDP), vincristine, fotémustine, avec des taux de réponse objective de
40 et 50 %, sans qu’il soit prouvé en terme de survie globale, une nette supé-
riorité des polychimiothérapies sur la monochimiothérapie.

Immunothérapie
Deux agents biologiques, l’interleukine (IL-2) et l’interféron α (IFNα) ont montré
une certaine efficacité avec des taux de réponse en monothérapie d’environ
20 %. Ces médicaments sont utilisés seuls ou associés à une chimiothérapie.
Leur toxicité est importante. De nombreux protocoles sont utilisés. La chi-
mio-immunothérapie (IL-2/CDDP) semble montrer de meilleurs taux de
réponse et davantage de réponses complètes et prolongées (10 %) que
l’immunothérapie seule.

Chirurgie des métastases


La résection chirurgicale de métastases du foie, du cerveau ou du poumon, est
indiquée devant une localisation unique, de croissance lente et survenant après
un intervalle long.

Place de la radiothérapie
La radiothérapie a un rôle palliatif dans le traitement d’une récidive locale, de
métastases en transit ou de métastases viscérales (os, cerveau).

◗ Suivi
◗ Résultats
Les taux de survie à 5 ans sont corrélés aux stades de la classification AJCC :
– stade I, entre 95 et 100 % ;
– stade II, entre 70 et 80 % ;
– stade III, entre 30 et 40 % ;
– stade IV, inférieurs à 5 %.
Pour une majorité de patients atteints de mélanomes localisés (stade I et II) et,
à un degré moindre, pour ceux en évolution ganglionnaire (stade III), la chirurgie
et un traitement adjuvant approprié peuvent garantir une survie sans rechute
acceptable.
Au stade métastatique, le mélanome malin reste une maladie grave, 90 % des
malades ne survivant pas à 3 ans.

◗ Objectifs de la surveillance
Les objectifs sont :
– dépister une récidive locale ou ganglionnaire accessible à un traitement
chirurgical ;
– dépister un second mélanome malin ;

116 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

– éduquer les membres de la famille du patient atteint, en vue d’une pré-


vention primaire et de la protection solaire ;
– traiter les effets tardifs des traitements, en particulier le lymphœdème des
membres inférieurs, fréquents après curage inguinal.
Le dépistage précoce des métastases reste décevant, en l’absence de thérapie
efficace.

◗ Modalités de la surveillance (tableau 7.V)


L’examen clinique est essentiel ; il doit être complet et répété. L’auto-sur-
veillance doit être enseignée au malade.

Patients de stade I
Surveillance clinique locale, ganglionnaire et de l’ensemble du revêtement
cutané tous les six mois pendant deux ans ; puis tous les ans et à vie (récidives
tardives).

Patients de stade II et III


Surveillance clinique trimestrielle pendant un an, semestrielle pendant deux ans,
puis annuelle.
Les examens complémentaires de surveillance sont prescrits en fonction des
signes d’appel (conférence de consensus de décembre 1999).

Tableau 7.V. Grille de surveillance des patients traités pour mélanome malin
(ANAES et SOR FNCLCC)

1 à 4 ans 5 à 10 ans Le reste


de la vie

Examen clinique :
Indice Breslow < 1,5 mm Tous les 6 mois Tous les 6 mois Tous les ans
Indice Breslow > 1,5 mm Tous les 3 mois Tous les 6 mois Tous les ans
ou niveau IV Clark IV

RP
Échographie abdominale
TDM thoracique ou Selon les symptômes
abdominale ou cérébrale
Scintigraphie osseuse
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


117 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés

Cancers épithéliaux
• Cancers humains les plus fréquents, ils surviennent préférentiellement chez les per-
sonnes de plus de 60 ans et sur les zones exposées au soleil, qui est le principal
facteur étiologique. Le traitement est la chirurgie et/ou la radiothérapie. Les métas-
tases sont exceptionnelles et le pronostic excellent.
• Aspects cliniques :
– carcinome basocellulaire : la lésion typique est un nodule cutané translucide
avec de fines télangiectasies, siégeant sur les régions cutanées découvertes ;
– carcinome épidermoïde : l’aspect est celui d’une tumeur bourgeonnante,
indurée et saignant facilement. Moins fréquent que le précédent, l’évolution
est plus rapide, parfois agressive.
• Diagnostic : le diagnostic est affirmé dans tous les cas par l’examen histologique
après biopsie.
• La prévention : repose sur l’éducation du public vis-à-vis des risques de l’exposition
solaire excessive, sur l’auto-surveillance et sur l’examen médical périodique du
revêtement cutané chez les personnes à risque.
• Traitement : les traitements sont l’exérèse chirurgicale, la curiethérapie, plus rarement
la radiothérapie externe (électrons). Les résultats sont excellents avec plus de 95 %
de contrôle définitif. La moitié des patients traités pour un cancer de la peau, pré-
senteront un second cancer cutané distinct, ce qui impose une longue surveillance.

Mélanomes
• Les mélanomes représentent 5 à 10 % des cancers de la peau. Leur incidence a
doublé dans les vingt dernières années. Le diagnostic précoce par l’information de
la population, la sensibilisation des médecins et la prévention par la protection
solaire, sont des actions essentielles dans l’amélioration du pronostic.
• Il existe quatre types de mélanomes cutanés :
– mélanome à extension superficielle (Superficial Spreading Melanoma, SSM) ;
– mélanome nodulaire (Nodular Melanoma, ou NM) ;
– mélanome sur mélanose de Dubreuilh (Lentigo Malignant Melanoma, LMM) ;
– mélanome lentigineux des extrémités (Acral Lentiginous Melanoma, ALM).
• Diagnostic : les signes évocateurs de mélanome sont résumés dans l’Abécédaire.
Le diagnostic est obtenu par une biopsie et un examen pathologique qui précise
le type histologique et définit les critères du pronostic.
• Bilan d’extension : il comprend la palpation des aires ganglionnaires satellites, du
foie, complétée d’une échographie hépatique et une radiographie pulmonaire.
• Traitement :
– stade I et IIA : exérèse chirurgicale avec des marges définies selon l’index de
Breslow sans évidemment ganglionnaire de principe ;


118 ◗
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TUMEURS CUTANÉES 7

Points clés (suite)


– stade IIB et III : un évidemment ganglionnaire complète l’exérèse de la tumeur
primitive ;
– stade IV : le traitement est alors palliatif (immunothérapie, chimiothérapie,
association).
• Suivi des patients : surveillance clinique locale, ganglionnaire et de l’ensemble du
revêtement cutané. Les examens complémentaires de surveillance ne sont prescrits
qu’en cas de symptômes d’appel.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


119 ◗
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Tumeurs digestives
8
R. GUIMBAUD

◗ TUMEURS DU COLON ET DU RECTUM


◗ TUMEURS DE L’ESTOMAC
◗ TUMEURS DU FOIE, PRIMITIVES OU SECONDAIRES
◗ TUMEURS DE L’ŒSOPHAGE
◗ TUMEURS DU PANCRÉAS
◗ CANCERS DU CANAL ANAL

◗ TUMEURS DU COLON ET DU RECTUM 1


Le cancer colorectal est une maladie fréquente qui pose un problème important
de santé publique. Plus des deux tiers des tumeurs sont localisées dans le
côlon ; le reste dans le rectum. La prise en charge des cancers colorectaux
repose sur la chirurgie mais, au cours de ces dix dernières années, la place de
la radiothérapie et de la chimiothérapie s’est largement affirmée. Le taux de
guérison est voisin de 50 % tous stades confondus. Les progrès viendront de
l’amélioration des moyens thérapeutiques en cours mais aussi, en grande partie,
de l’amélioration du dépistage et du diagnostic précoce.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
L’un des cancers les plus fréquents
L’incidence du cancer colorectal en France est de 33 500 nouveaux cas par an.
Il s’agit d’une incidence très élevée puisqu’il s’agit du premier cancer pour
l’ensemble des deux sexes ; soit le troisième cancer chez l’homme (après le
cancer de la prostate et le cancer du poumon) et le deuxième cancer chez la
femme (après le cancer du sein). Il représente 15 % de l’ensemble des
cancers ; sa prévalence est estimée à 190 400 cas.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Variations géographiques
Dans le monde, le cancer colorectal représente le quatrième cancer le plus fré-
quent et il existe des variations importantes d’incidence suivant les pays, allant
de 3,4/100 000 en Afrique noire à 36/100 000 sur la côte Nord-Ouest des
États-Unis. Ainsi, dans les pays occidentaux développés, une personne sur vingt
présente ou présentera un cancer colorectal au cours de son existence.

1. Item n° 148. Tumeurs du colon et du rectum.



121 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Évolution au cours du temps


Alors que l’incidence du cancer colorectal reste stable, voire en légère augmen-
tation depuis une dizaine d’années, il semble exister une diminution progressive
de fréquence des tumeurs distales au profit de la région colocæcale proximale.
Ainsi moins de 60 % des cancers colorectaux sont accessibles à l’heure actuelle
à une rectosigmoïdoscopie.

◗ Âge, sexe
Il existe une légère prédominance masculine (54 % chez l’homme).
L’âge moyen lors du diagnostic est de 68 à 70 ans ; plus de 90 % des tumeurs
surviennent après 50 ans.

◗ Mortalité
Avec une mortalité de près de 50 %, le cancer colorectal est responsable, en
France, de 16 000 décès par an (deuxième cause de mortalité par cancer après
le cancer du poumon), soit un taux brut de mortalité de 26 à 30/100 000.

◗ Facteurs de risque
Facteurs alimentaires
Bien qu’il ne soit toujours pas possible d’isoler des facteurs carcinogénétiques
indiscutables, l’analyse des données descriptives de l’épidémiologie est très lar-
gement en faveur de la responsabilité prédominante des habitudes
alimentaires : il apparaît que les alimentations riches en graisses et viandes et
pauvres en fibres végétales constituent des facteurs de risque. Plusieurs hypo-
thèses pathogéniques ont été proposées : action de la microflore intestinale et
de ses produits de dégradation, dérivés du cholestérol susceptibles d’être muta-
gènes, produits de la combustion alimentaire comme le benzopyrène, effets des
acides biliaires dont la production augmente avec l’ingestion de matières gras-
ses, insuffisance d’apport alimentaire calcique empêchant la neutralisation des
acides biliaires et enfin hyperalcalinité des selles favorisant l’effet éventuel des
acides biliaires. Quoi qu’il en soit, il reste difficile de proposer des stratégies de
prévention primaire au-delà du respect des règles simples d’équilibre alimen-
taire (lutte contre la sédentarité et la surcharge pondérale, régime riche en légu-
mes verts et moindre en graisses animales).

Facteurs cliniques
En revanche, il existe des éléments cliniques de risque des cancers coliques
permettant une prévention secondaire efficace.
Syndromes de prédisposition héréditaire au cancer colorectal •
La polypose adénomateuse familiale (PAF) et le syndrome de Lynch, dit syn-
drome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) sont des affec-
tions génétiques, héréditaires, de transmission autosomique dominante (le
risque de transmission est donc de 50 % pour chaque enfant), liées à une
mutation germinale d’un gène. Elles se caractérisent par un très haut risque de
développement de cancer colorectal (70 à 100 %) à partir de l’âge de 20 ans
(40 ans en moyenne). Rares, ces syndromes ne sont responsables, au maxi-
mum, que de 5 % de l’ensemble des cancers colorectaux.
La PAF se caractérise par le développement, au cours de la deuxième décennie,
d’au moins cent polypes adénomateux dans le côlon dont la dégénérescence
carcinomateuse est inéluctable. Le seul traitement est la coloproctectomie ou la
colectomie préventive.

122 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

Le syndrome de Gardner en est une variante, associant des tumeurs desmoïdes


et des tumeurs bénignes osseuses.
Le syndrome HNPCC se caractérise, outre le risque majeur de cancer colorectal
(prédominant dans le côlon droit), par un risque accru de cancers extracoliques
de type endomètre, urothélium, grêle…
Antécédents familiaux hors syndromes génétiques • Pour les cancers
colorectaux qui sont de présentation sporadique (et qui représentent la grande
majorité), il existe cependant un doublement du risque chez les apparentés au
premier degré (parents, fratrie, enfants) d’un patient porteur d’une tumeur rec-
tocolique. Ce risque relatif augmente avec le nombre de cas familiaux et la pré-
cocité des cas (risque relatif de 4 si l’âge de survenue du cas familial est
inférieur à 45 ans ou s’il existe deux cas familiaux de cancer colorectal, risque
relatif à peine supérieur à 1 si l’âge de survenue du cas familial est supérieur à
60 ans…).
Maladies intestinales • Plusieurs maladies ou antécédents personnels
pathologiques augmentent le risque de survenue d’un cancer colo-rectal.
RCH et maladie de Crohn • Les maladies intestinales inflammatoires comme
la recto-colite hémorragique (RCH) augmentent d’environ 30 fois le risque nor-
mal de cancer colique. Ainsi, les patients porteurs d’une pancolite depuis plus
de 30 ans ont plus de 35 % de risques de développer un cancer colique, le
risque étant encore plus grand quand la maladie est apparue dans l’enfance. Il
est à remarquer que dans ce cadre étiologique particulier, les tumeurs sont sou-
vent multifocales (20 %) et proximales coliques droites (50 %). De même, la
maladie de Crohn colique augmente le risque tumoral, les tumeurs siégeant
dans les portions atteintes par la colite.
Antécédent personnel de cancer colorectal • L’adénocarcinome intestinal
précessif constitue un facteur de risque net de second cancer colique, trois fois
supérieur à la normale.
Antécédent personnel de polypes • Il s’agit des polypes adénomateux intesti-
naux, le plus souvent tubulaires, parfois villeux. Les premiers sont souvent multi-
ples, les seconds ont un risque de dégénérescence au moins 4 fois supérieur à
celui des polypes adénomateux tubulaires. Il est acquis que plus volumineux est
le polype, plus grand est le risque de survenue d’un cancer et que l’existence
d’un polype augmente 5 fois le risque de cancer par rapport à un intestin normal.
Âge • Enfin, l’âge constitue un facteur de risque évident, la survenue en dehors
de facteurs de risques particuliers d’un cancer colorectal avant 40 ans étant
exceptionnelle (< 3 %).

Groupes à risque
On distingue ainsi, en fonction de ces facteurs de risque, trois groupes d’indivi-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

dus de risque variable, justifiant d’un dépistage adapté (tableau 8.I).

Tableau 8.I. Groupes à risque de cancer colorectal (conférence de consensus


1998)
Groupe à risque moyen Tout sujet de plus de 50 ans (n’appartenant pas aux
deux autres groupes)
Groupe à risque élevé ATCD personnel de polype, de cancer colorectal, de
maladie de Crohn, de rectocolite hémorragique
ATCD familial de cancer colorectal

Groupe à risque très élevé Polypose adénomateuse familiale


Syndrome HNPCC


123 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Macroscopie
La forme macroscopique la plus fréquente est une tumeur ulcérovégétante ; les
formes infiltrantes sont rares. Le développement des tumeurs colorectales à par-
tir d’anomalies polypoïdes explique leur croissance endoluminale souvent
hémorragique, mais leur extension latérale rend compte de la sténose progres-
sive voire de la perforation pariétale.

Microscopie
Le type histologique le plus fréquent est l’adénocarcinome (95 %), développé
aux dépens de l’épithélium des glandes de Lieberkühn. Il existe des formes par-
ticulières comme l’adénocarcinome mucineux ou colloïde (10 %) ou les carci-
nomes indifférenciés, rares.

◗ Évolution naturelle
Extension locale
L’invasion locale des adénocarcinomes coliques se fait de façon à la fois intra-
murale et circonférentielle en particulier en suivant la sous-muqueuse. Dans
l’épaisseur pariétale l’extension se fait à travers la muscularis mucosæ, puis la
sous-muqueuse, la musculeuse, la séreuse et enfin la graisse péricolique et les
organes de voisinage.

Extension lymphatique
Elle débute par les adénopathies péricoliques voisines du site tumoral ; pour le
rectum, elle intéresse en premier les ganglions péri-rectaux présents dans la
graisse du mésorectum le long du pédicule mésentérique inférieur. Ensuite, elle
atteint les ganglions situés le long des collecteurs satellites des vaisseaux san-
guins qui sont envahis de proche en proche, les solutions de continuité étant
rares sauf pour le bas rectum. L’envahissement ganglionnaire est d’autant plus
fréquent que le grade tumoral est élevé.

Extension hématogène
L’extension hématogène est une éventualité précoce dès que la tumeur est
invasive. L’essentiel du côlon et du rectum est de drainage veineux porte à des-
tination hépatique, sauf la moitié distale du rectum qui possède un double drai-
nage, porte et cave, par l’intermédiaire des veines hémorroïdales inférieures et
moyennes à destination pulmonaire. Le site métastatique le plus fréquent est
donc le foie, puis en deuxième position les poumons.

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Les cancers coliques peuvent s’accompagner de douleurs intermittentes, de
nausées ou de vomissements, mais sont le plus souvent révélés par un syn-
drome hémorragique bas ou une complication mécanique à type d’occlusion
ou de perforation. L’obstruction tumorale est classiquement de topographie sig-
moïdienne dans un contexte de constipation d’aggravation progressive. La per-

124 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

foration peut être aiguë ou chronique, dans ce dernier cas avec éventuelle
constitution d’une fistule dans un organe creux de voisinage comme la vessie.
Les cancers rectaux et recto-sigmoïdiens sont plus souvent symptomatiques
que les cancers coliques. La rectorragie de sang rouge est le signe le plus
fréquent, obligeant à un contrôle endoscopique systématique surtout quand
le sang est mêlé aux selles. Il peut s’y associer une constipation avec diarrhée
alternée, une réduction du calibre des selles et, dans les stades évolués, un
ténesme, des épreintes, des troubles urinaires à type de rétention, une dou-
leur périnéale à la station assise, un œdème unilatéral des membres infé-
rieurs.
Les cancers colorectaux peuvent être révélés, dans environ 10 % des cas, par
leur extension métastatique, essentiellement hépatique, de découverte fortuite
le plus souvent.

◗ Biologie
Le syndrome hémorragique peut être patent ou microscopique, révélé par une
anémie sidéropénique parfois profonde, compliquée d’asthénie ou de
défaillance cardiorespiratoire.

◗ Méthodes du diagnostic
Le diagnostic du cancer colorectal repose sur la coloscopie qui permet de visua-
liser la tumeur, de la localiser, de réaliser des biopsies de confirmation
diagnostique ; mais aussi d’en apprécier le caractère sténosant et/ou hémorra-
gique et de rechercher des lésions associées (autre localisation tumorale syn-
chrone ou polype).

◗ Évaluation préthérapeutique
◗ Bilan
L’essentiel de l’évaluation clinique d’un cancer colorectal a pour but, d’une part
de détecter une éventuelle extension métastatique, d’autre part d’évaluer l’opé-
rabilité de la tumeur et du patient. Il est ainsi habituel de pratiquer :
– un examen clinique complet recherchant une masse abdominale palpa-
ble, une hépatomégalie, une ascite, une adénopathie sus-claviculaire.
Une coloscopie totale est indispensable pour éliminer une deuxième
tumeur synchrone ;
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– pour les cancers rectaux bas, le TR, parfois réalisé sous anesthésie géné-
rale, permet de préciser la topographie exacte par rapport à la marge
anale, la mobilité par rapport aux parois pelviennes, l’existence éventuelle
d’adénopathies palpables dans le mésorectum. Dans ce cadre, l’échogra-
phie endorectale peut contribuer à préciser le volume tumoral et son
infiltration pariétale ;
– les examens complémentaires radiologiques comportent un cliché thora-
cique et, pour les cancers rectaux, un examen tomodensitométrique à la
recherche d’adénopathies iliaques et/ou d’une extension aux organes
pelviens de voisinage. La recherche de localisations hépatiques infraclini-
ques est au mieux réalisée par l’échographie ;
– l’exploration biologique se limite aux constantes biologiques hépatiques
et au dosage de l’ACE dont le taux éventuellement élevé avant le traite-
ment peut être utile pour la surveillance post-thérapeutique.

125 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Classification
Compte tenu de la difficulté de l’appréciation clinique des adénocarcinomes rec-
tocoliques, sauf pour les tumeurs basses accessibles au TR, l’essentiel des clas-
sifications est fondé sur les données de l’analyse anatomopathologique de la
pièce opératoire. Plusieurs classifications ont été successivement proposées,
chacune tentant de cerner au mieux le pronostic vital en fonction de l’infiltration
intrapariétale. Il est à remarquer que l’existence d’adénopathies métastatiques,
même situées dans ou au contact proche de la paroi colique, altère profondé-
ment le pronostic vital essentiellement par le biais des métastases à distance.
Même si la classification actuellement recommandée est la classification TNM
(tableau 8.II), en pratique d’autres classifications restent encore souvent utilisées.

Tableau 8.II. Classification TNM des cancers colorectaux


Code Description
Tis Carcinome in situ purement muqueux
T1 Tumeur envahissant la sous-muqueuse
T2 Tumeur envahissant la musculeuse (sans la dépasser)
T3 Tumeur envahissant la sous-séreuse ou l’espace périrectal en zone
sous-péritonéale
T4 Tumeur ayant perforé le péritoine viscéral ou envahissant directement
les organes de voisinage
N0 Pas de localisation ganglionnaire décelée
N1 Métastases dans 1 à 3 ganglions péricoliques ou périrectaux
N2 Métastases dans 4 ou plus des ganglions péricoliques ou périrectaux
M0 Absence de métastase à distance
M1 Métastase(s) à distance

• Classification de Dukes
– Dukes A : T1-T2, N0, M0 (tumeur limitée à la paroi musculeuse) ;
– Dukes B : T3-T4, N0, M0 (tumeur dépassant la paroi musculeuse) ;
– Dukes C : T indifférent, N1-N2, M0 (envahissement ganglionnaire) ;
– Dukes D : T indifférent, N indifférent, M1 (métastases).
Classification d’Aster et Coller • Elle a subdivisé la classification précédente
pour mieux la faire correspondre au TNM, ce qui donne :
– MAC A : T1 N0 M0 ;
– MAC B1 : T2 N0 M0 ;
– MAC B2 : T3 N0 M0 ;
– MAC B3 : T4 N0 M0 ;
– MAC C1 : T2 N1-N2 M0 ;
– MAC C2 : T3-T4 N1-N2 ;
– MAC C3 : T4 N1-N2 M0.

◗ Paramètres du pronostic
Le taux de survie à 5 ans, tous stades confondus, est de 40 à 50 % maximum
(meilleure pour les cancers du côlon que pour ceux du rectum).
Le pronostic est essentiellement dépendant du stade tumoral (tableau 8.III).
Parmi les stades non métastatiques, l’envahissement ganglionnaire est un fac-
teur déterminant.

126 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

De façon plus accessoire d’autres facteurs pronostiques ont été identifiés :


– sur le plan clinique : l’occlusion, la perforation tumorale, la qualité de
l’exérèse chirurgicale… et donc du chirurgien (notamment pour le cancer
du rectum), le sexe masculin, etc. ;
– sur le plan tumoral : le grade de différenciation, l’engainement périner-
veux, la présence d’embols lymphatiques ou veineux, l’aneuploïdie, une
mutation de p53, la perte du gène DCC, etc.

Tableau 8.III. Taux de survie des cancers colorectaux en fonction du stade


tumoral
Stade (fréquence) Survie à 5 ans
Stade I (12 %) 90 à 97 %
Stade II (38 %) 65 à 80 %
Stade III (25 %) 25 à 60 %
Stade IV (20 %) <5%

◗ Traitement

◗ Prévention
La prévention doit être adaptée au niveau de risque (cf. supra).

Groupe à risque moyen (population générale de plus


de 50 ans)
La relative lenteur de croissance des cancers colorectaux explique en grande
partie l’efficacité déterminante du diagnostic précoce facilitée par les moyens
modernes d’endoscopie. Par ailleurs, l’existence fréquente d’une séquence
polype-cancer permet d’interrompre l’évolution du risque avant l’apparition
d’une maladie néoplasique maligne (tableau 8.IV).
Les procédés utilisables dans la perspective d’un diagnostic précoce sont multi-
ples et de performance inégale (tableau 8.V).
La connaissance des facteurs de risque doit moduler le choix des moyens en
sachant que l’âge est le premier élément de décision, le risque de cancer colo-
rectal étant dix fois plus élevé à 60 ans qu’à 40 ans. Pour la population générale,
l’attitude la plus sûre choisie dans notre pays est la réalisation d’un dépistage
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

de masse par Hémoccult (recherche de sang occulte dans les selles) annuel ou
biennal à partir de 45-50 ans. Il faut insister sur le fait que la recherche de sang
occulte dans les selles n’a pas de valeur dans le cadre d’une démarche diagnos-
tique individuelle (trop nombreux faux négatifs) ; elle n’est applicable que dans
le cadre de dépistage de masse (entraînant une réduction de mortalité de 15
à 18 % de la population dépistée).

Tableau 8.IV. Niveaux de risque cumulatif de dégénérescence d’un polype


colique de plus de 1 cm
Risque à 5 ans 2,5 %
Risque à 10 ans 8%
Risque à 20 ans 24 %


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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Tableau 8.V. Performance qualitative des techniques utilisables pour le


dépistage des cancers colorectaux
Technique Sensibilité Sensibilité Coût Inconfort
pour les pour les pour le
cancers polypes patient
TR + – – +
Hémoccult ++ + – –
Sigmoïdoscopie rigide ++ ++ ++ ++
Sigmoïdoscopie souple +++ +++ ++ +
(60-65 cm)
Lavement baryté (LB) ++ + ++ ++
LB en double contraste +++ +++ ++ +++
Coloscopie ++++ ++++ ++++ +++

Groupe à risque élevé (antécédents familiaux ou personnels)


Antécédent familial de cancer colorectal • Début du dépistage à 50 ans
(ou 10 ans avant l’âge du cas familial si celui-ci est survenu avant 55 ans) par
coloscopie tous les cinq ans.
Antécédent personnel de tumeur colique, bénigne (adénome de plus
de 1 cm) ou maligne • Surveillance coloscopique de un à trois ans après le
traitement puis tous les cinq ans.
Recto-colite hémorragique et maladie de Crohn colique évoluant
depuis plus de 10 à 20 ans sous forme de pancolite, même asymp-
tomatique • Coloscopie tous les deux ans, avec biopsies étagées. Les patients
porteurs de recto-colite hémorragique diffuse présentant par ailleurs des signes
histologiques de dysplasie cellulaire sévère doivent également faire l’objet d’une
exérèse préventive.

Groupe à risque très élevé (syndromes génétiques)


Polypose intestinale familiale • Conseil génétique spécialisé et proposition
fréquente d’une proctocolectomie totale. Parfois la conservation du rectum peut
être proposée (colectomie totale sans proctectomie) ; elle impose une sur-
veillance endoscopique régulière et à vie du rectum restant.
Syndrome HNPCC • Conseil génétique spécialisé, coloscopie tous les un à
deux ans dès l’âge de 20 ans, surveillance ovarienne et endomètriale tous les
ans à partir de 30 ans pour les femmes, échograhie rénale et des voies urinaires
tous les un à deux ans si présence d’un cas de cancer urothélial dans la famille,
fibroscopie gastrique tous les un à deux ans si présence d’un cas familial. En
présence d’un cancer colique, une colectomie totale doit être systématiquement
faite ; dans certains cas une colectomie préventive peut être proposée.

◗ Méthodes thérapeutiques
Chirurgie
Chirurgie colique • Elle est bien différente suivant les circonstances diagnos-
tiques.
Formes non compliquées • L’étendue de la résection colique nécessaire et
suffisante est fixée par l’analyse des pièces anatomiques, qui montre que
l’extension tumorale dépasse rarement 1 à 2 cm au-delà de la tumeur macros-
copique. Ainsi, des marges de sécurité de 5 cm sont suffisantes. L’exérèse com-
porte l’ablation des chaînes ganglionnaires juxtapariétales et des collecteurs

128 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

contenus dans les mésos porte-vaisseaux dont l’anatomie de distribution condi-


tionne la technique opératoire. Le type d’intervention dépend donc du siège
tumoral : hémicolectomie (droite ou gauche), sigmoïdectomie éventuellement
étendue au haut rectum. Le rétablissement de la continuité est assuré par une
anastomose le plus souvent termino-terminale.
Formes compliquées • Dans certains cas de formes compliquées, occlusives ou
perforatives, l’intervention est réalisée en plusieurs temps, avec colostomie pre-
mière de décharge. En outre, en cas de fixation, inflammatoire ou tumorale, à
des organes creux de voisinage, des résections à la demande peuvent être réa-
lisées (grêle, vessie). Dans ce cas l’exérèse doit, au mieux, rester « monobloc ».
Chirurgie rectale • Deux interventions radicales sont possibles, le choix
dépendant de la distance à l’anus et de la possibilité de réaliser une anastomose
colorectale ou colo-anale :
– la résection par voie antérieure similaire à la chirurgie colique avec anas-
tomose colorectale, voire colo-anale. Il s’agit de l’intervention de choix
des formes hautes recto-sigmoïdiennes, étendue plus récemment à des
topographies de plus en plus basses ;
– l’amputation rectale à double voie abdominopérinéale (AAP), conduisant
à une exérèse ano-rectale complète avec colostomie définitive. Plus que
la première intervention, cette exérèse entraîne une morbidité importante
à type de dénervation vésicale et surtout d’impuissance sexuelle quasi
totale et définitive chez l’homme. La mortalité est de l’ordre de 2 à 5 %.
La chirurgie du cancer du rectum a cependant beaucoup évolué au cours de
ces dernières années. Les principaux progrès sont :
– la nette diminution du taux d’AAP qui ne reste indiscutable que pour les
tumeurs très bas situées (moins de 4 cm de la marge anale). Ainsi, l’anus
artificiel, qui était inévitable dans environ 80 % des cas, ne l’est plus que
dans 20 % ;
– la réalisation d’une ablation totale du mésorectum (graisse qui entoure
le rectum, elle-même limitée par le fascia recti) qui permet de diminuer
drastiquement le risque de récidive locorégionale. En effet, l’extension
lymphatique reste longtemps localisée au mésorectum et son ablation
totale réduit les récidives pelviennes à moins de 10 %, alors qu’elles
étaient jusqu’à présent de 25 %. De plus, cette technique permet de
préserver l’innervation (contrairement à la chirurgie classique qui ne res-
pectait pas l’innervation pelvienne et provoquait des troubles sexuels, fré-
quents dans plus de 50 % des cas).
Cas particulier : traitements locaux conservateurs • Pour les formes tumo-
rales de petite taille, situées à proximité de la région anale, il a été proposé des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

traitements conservateurs chirurgicaux (résection transanale, résection


trans-sphinctérienne), voire radiothérapiques (irradiation endocavitaire de
contact, curiethérapie) afin d’éviter une amputation abdominopérinéale ou chez
des malades non opérables. Ces traitements ne peuvent concerner que des
tumeurs de taille très réduite (3 cm au maximum), facilement accessibles, peu
infiltrantes (évaluation clinique et échographique endorectale) et sans envahis-
sement ganglionnaire. Dans ces conditions, le contrôle local définitif peut attein-
dre plus de 80 %. En revanche, une lésion moyennement différenciée ou qui
envahit la musculeuse comporte un risque élevé de métastases ganglionnaires,
une proctectomie est alors nécessaire.
Chirurgie des métastases • Il est actuellement bien démontré que la résec-
tion chirurgicale des métastases des cancers colorectaux permet d’atteindre des
taux de survie jamais atteints jusqu’alors dans cette situation avancée (20 % à
30 % à 5 ans) ; elle permet même parfois une guérison. Elle est restreinte aux

129 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

patients en bon état général ayant peu de métastases dans le foie, voire dans
les poumons.
Il s’agit le plus souvent de chirurgie d’exérèse hépatique allant de la simple
résection « métastasectomie » à la chirurgie large (lobectomie droite) en passant
par des bi- ou trisegmentectomies.
Plus récemment encore, des alternatives par destruction in situ sans résection
de parenchyme se sont développées (destruction par radiofréquence ou par
cryothérapie).

Radiothérapie externe
La chirurgie seule des cancers rectaux sous-péritonéaux expose à un taux de
récidives pelviennes, souvent très invalidantes et en règle incurables, allant de
moins de 10 % jusqu’à 50 % chez les patients ayant une extension transmurale
ou des ganglions proximaux métastatiques. Ce risque est par ailleurs d’autant
plus important que la tumeur est distale, siégeant dans la portion sous-périto-
néale du rectum. Le site de récidive le plus fréquent est pelvien postérieur dans
l’espace présacré.
Même si le risque de récidive locorégionale est actuellement réduit par l’amé-
lioration de la technique chirurgicale (exérèse du mésorectum), la radiothérapie
externe complémentaire à la chirurgie garde une indication certaine. En effet,
l’irradiation externe de haute énergie à des doses allant de 45 à 55 Gy en cinq
à six semaines permet de réduire encore le taux de récidives pelviennes. Cepen-
dant, l’influence sur la survie est moins nette dans la mesure où ce traitement
locorégional ne peut qu’influencer faiblement le risque métastatique hémato-
gène hépatique.
Dans le souci, entre autres, de réduire les complications liées à l’irradiation de
l’intestin grêle souvent fixé par une laparotomie préalable, l’irradiation doit être
réalisée à titre préopératoire quand les caractéristiques tumorales (taille, topo-
graphie, échographie endorectale) comportent un risque potentiel élevé de réci-
dive pelvienne (pT3-pT4, ou pN+).

Curiethérapie
Elle a des indications très limitées dans quelques rares cas de traitement local
conservateur de petites tumeurs du bas rectum.

Chimiothérapie
Le médicament de base reste le 5-FU, potentialisé par l’acide folinique. Cepen-
dant, au cours de ces dernières années la chimiothérapie des cancers colorec-
taux a beaucoup évolué avec l’arrivée de nouveaux cytotoxiques (irinotécan,
oxaliplatine…) dont l’association synergique avec le 5-FU et l’acide folinique a
permis d’accroître l’efficacité antitumorale.
Chimiothérapie en situation adjuvante • Une chimiothérapie adjuvante
est formellement indiquée après une exérèse jugée complète des cancers du
côlon de stade III (N1 ou N2). Dans ces cas, elle permet en effet de réduire
d’un tiers environ le taux de récidive métastatique et de mortalité. Le schéma
utilisé reste l’association 5-FU/acide folinique par voie systémique. En revanche,
pour les stades II (atteinte de la séreuse, pas d’adénopathie sur la pièce opéra-
toire), l’utilisation d’une chimiothérapie est une option qui doit être évaluée dans
le cadre d’essais thérapeutiques.
Cas particulier du cancer du rectum • Le bénéfice de la chimiothérapie sys-
témique adjuvante n’est pas démontré comme il l’est pour le cancer du côlon.
Plusieurs essais cliniques associant la chimiothérapie (5-FU) à l’irradiation sem-
blent montrer une amélioration de la survie sans récidive par rapport à l’irradia-
tion pré- ou postopératoire seule.

130 ◗
10_Chap8 Page 131 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Chimiothérapie en situation métastatique • Il est actuellement démontré


que la chimiothérapie à visée palliative permet d’allonger la survie et d’en amé-
liorer la qualité. L’apport des nouvelles associations de chimiothérapie plus effi-
caces a permis d’allonger la survie moyenne des patients métastatiques de
6 mois à près de 2 ans actuellement.
L’efficacité antitumorale, dans certains cas, permet de proposer secondairement
aux malades une résection chirurgicale de leurs métastases.

◗ Stratégie
L’essentiel du traitement des cancers coliques étant chirurgical, les bases pré-
thérapeutiques portent sur l’opérabilité locale et générale. En revanche, les élé-
ments complémentaires apportés par l’évaluation peropératoire et l’analyse de
la pièce d’exérèse sont déterminants pour l’indication d’éventuels traitements
complémentaires.
Cas particulier du cancer du rectum • En ce qui concerne le cancer rectal,
plusieurs éléments concourent à définir la stratégie thérapeutique :
– le rectum est un organe partiellement intrapéritonéal ; le tiers inférieur ou
distal étant dépourvu de séreuse, la transfixion pariétale conduit alors à
une extension tumorale intrapelvienne, source de récidives locales fré-
quentes après chirurgie seule (en moyenne 25 %) ;
– la distance entre le pôle inférieur de la tumeur et l’appareil sphinctérien
anal conditionne les possibilités de conservation fonctionnelle dont les
indications se sont élargies avec les progrès techniques des anastomoses
basses ;
– les traitements adjuvants de la chirurgie comme la radiothérapie avec ou
sans chimiothérapie ont une influence favorable sur le risque de récidive
locorégionale plus nette dans les cancers rectaux que dans les tumeurs
coliques.

Cancers en phase locorégionale


Le traitement est à visée curative. Il repose sur la chirurgie d’exérèse colique ou
rectale ; le type de chirurgie dépend de la localisation et de l’existence ou non
de complications.
Traitements complémentaires • Ils font appel à la chimiothérapie, à la
radiothérapie ou à une combinaison des deux.
Chimiothérapie • En cas d’envahissement ganglionnaire sur la pièce opératoire,
une chimiothérapie adjuvante doit être réalisée pour les cancers du côlon car
elle permet une diminution significative du risque de rechute métastatique. Pour
les cancers rectaux, son efficacité n’a pas été clairement démontrée.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Radiothérapie • De plus, pour les cancers rectaux sous-péritonéaux (bas et


moyen rectum) à risque de récidive locorégionale (avec envahissement pariétal
ou ganglions métastatiques), une radiothérapie pelvienne préopératoire est
recommandée afin de diminuer ce risque.

Cancers métastatiques
Conduite à tenir vis-à-vis de la tumeur primitive • La chirurgie d’exé-
rèse de la tumeur primitive colique ou rectale, même si elle est résécable, n’est
pas systématique ; elle est indiquée si :
– la tumeur est symptomatique : troubles du transit, risques d’occlusion ou
de perforation, saignements répétés avec répercussion générale. La
chirurgie doit autant que possible consister en une résection simple ;
– il y a un projet de résection des métastases.

131 ◗
10_Chap8 Page 132 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Dans les autres cas, la chirurgie doit être discutée en fonction de l’état général
du patient, de l’importance de l’envahissement métastatique, etc.
Si la tumeur n’est pas résécable mais relève en théorie d’une exérèse (risque
occlusif, par exemple), un geste palliatif peut être réalisé (colostomie de
décharge, mise en place d’une endoprothèse, destruction tumorale par laser).
Dans les cadre des tumeurs du bas rectum symptomatiques, une radiothérapie
voire une radiochimiothérapie permet d’améliorer efficacement les symptômes.
Conduite à tenir vis-à-vis de la maladie métastatique • La meilleure
option est la chirurgie d’exérèse des métastases. Elle s’adresse au cas où les
métastases sont confinées au foie (rarement aux poumons), en nombre et taille
limités. Cela ne représente malheureusement que moins de 10 % des malades
métastatiques. Le pronostic est d’autant meilleur que le délai d’apparition des
métastases par rapport à la tumeur primitive est long (au moins supérieur à un
an), que le nombre de métastases est faible, que le taux d’ACE est bas, que la
tumeur primitive ne présentait pas d’envahissement ganglionnaire…
Dans les autres cas, une chimiothérapie palliative, par voie systémique, est indi-
quée si l’état général du patient est correct (OMS ≤ 2). L’efficacité relative des
nouveaux protocoles conduit à proposer parfois plusieurs lignes successives de
chimiothérapie.

◗ Surveillance
◗ Résultats

Tableau 8.VI. Survie à 5 ans (%) des cancers colorectaux


Stade N– N+
Côlon T1 N0 M0 97 –
T2 N0 M0 90 74
T3 N0 M0 80 48
T4 N0 M0 63 38
+
Stade III (N ) – 40
N1 – 56
N2 – 26
Rectum Stade I 90 –
Stade II 75 –
Stade III – 30

◗ Suivi des patients


La surveillance après traitement a trois objectifs essentiels :
– le diagnostic d’une récidive locorégionale ou d’une métastase ;
– la prise en charge des conséquences fonctionnelles du ou des
traitements ;
– le diagnostic précoce d’un deuxième cancer colorectal ou d’une néopla-
sie épidémiologiquement liée aux cancers colorectaux.

Diagnostic des récidives ou des métastases (tableau 8.VII)


Diagnostic des récidives locales • L’objectif majeur est le diagnostic pré-
coce.

132 ◗
10_Chap8 Page 133 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Après traitement conservateur • Le diagnostic précoce d’une récidive locale


après traitement conservateur est certainement la démarche la plus utile pour
le patient. Ceci suppose la surveillance clinique et endoscopique régulière des
anastomoses, des zones de résections endoscopiques ou des lits d’exérèse par
les voies naturelles pour les tumeurs basses. La constatation d’une récidive per-
met alors de proposer une chirurgie de deuxième intention qui garde son poten-
tiel de curabilité.
Après chirurgie d’amputation • En revanche, le diagnostic de récidive pel-
vienne après une chirurgie d’amputation radicale ne débouche qu’exceptionnelle-
ment sur un geste curatif.
Diagnostic des métastases • Quatre-vingts pour-cent des récidives métasta-
tiques surviennent dans les deux premières années ; les métastases sont limi-
tées au foie dans 70 % des cas.
Compte tenu, d’une part, de l’effet démontré de la chimiothérapie sur la qua-
lité et l’allongement de la survie des patients métastatiques et, d’autre part,
de la possibilité de chirurgie à visée curative de métastases limitées en nom-
bre, un diagnostic précoce de récidive métastatique est justifié. Il ne doit
s’appliquer qu’aux patients susceptibles de bénéficier de telles prises en char-
ges.
Il repose sur l’examen clinique, l’échographie abdominale et la radiographie pul-
monaire.

Réhabilitation physique
Les patients colostomisés doivent faire l’objet d’un appareillage adapté et, pour
la plupart, doivent bénéficier de la technique des irrigations coliques permettant
une autonomie de 36 à 48 heures favorisant la vie sociale et professionnelle. Il
n’y a pas de recommandations particulières pour les patients ayant fait l’objet
d’une anastomose interne.
Les possibles conséquences sexuelles masculines et féminines de la chirurgie
rectale doivent faire l’objet d’une information et d’une prise en charge individua-
lisée.

Diagnostic précoce d’un deuxième cancer


Les deuxièmes cancers intestinaux justifient une surveillance endoscopique
régulière avec ablation et analyse d’éventuelles néoformations polypoïdes.

Tableau 8.VII. Recommandations de surveillance des sujets traités à visée


curative d’un cancer colorectal
Type d’examen Rythme
Examen clinique Tous les 3 à 4 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

(+/– dosage de ACE) pendant 3 ans


Échographie hépatique Tous les 3 à 4 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois
pendant 3 ans
Radiographie Tous les ans pendant 5 ans
pulmonaire
Coloscopie Un à 3 ans après l’intervention, puis tous les 5 ans


133 ◗
10_Chap8 Page 134 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés
• Épidémiologie : problème majeur de santé publique, le cancer colorectal est un des
cancers les plus fréquent (33 500 cas par an en France). Sa mortalité reste élevée (un
peu plus d’un cas sur deux). Environ 20 % des malades sont diagnostiqués au stade
d’emblée métastatique et 25 % ont déjà un envahissement ganglionnaire sur la pièce
opératoire.
• Dépistage : le diagnostic précoce et la prévention du cancer colorectal sont possibles par
la détection des polypes, véritables lésions précancéreuses. Le dépistage de masse s’orga-
nise lentement ; il repose actuellement sur la détection de sang occulte dans les selles.
Par ailleurs, l’identification de groupes à risque permet un dépistage ciblé, par coloscopie,
de certaines sous-populations.
• Diagnostic : les symptômes d’appel les plus fréquents sont les rectorragies ou l’anémie,
les troubles du transit, les signes généraux. Le diagnostic repose sur la coloscopie.
• Bilan d’extension : le bilan préthérapeutique comporte au minimum l’examen clinique
(avec TR), une échographie abdominale, une radiographie thoracique, un bilan biologique
(avec dosage de l’ACE). Pour les tumeurs rectales, l’appréciation de l’extension pariétale
et de la distance du pôle inférieur de la tumeur par rapport à la marge anale est un
élément majeur pour la décision thérapeutique, tant en ce qui concerne le type de chi-
rurgie que l’indication de traitements complémentaires à la chirurgie (notamment la
radiothérapie).
• Histologie et pronostic : la forme anatomopathologique du cancer colorectal est l’adéno-
carcinome. Son pronostic est directement corrélé au stade tumoral, au mieux apprécié
par la classification TNM, même si d’autres facteurs pronostiques cliniques ou biologiques
ont pu être identifiés.
• Traitement des formes non métastatiques : le traitement repose sur la chirurgie d’exérèse.
Le type de chirurgie varie en fonction de la topographie et de la présence de complica-
tions (occlusion, perforation…). Des traitements complémentaires sont indiqués dans
certaines situations : chimiothérapie adjuvante postopératoire en cas d’envahissement
ganglionnaire pour les cancers coliques et rectaux intrapéritonéaux, radiothérapie pel-
vienne préopératoire en cas de cancer rectal de localisation basse (situation
extrapéritonéale) avec envahissement pariétal ou ganglionnaire.
• Traitement des formes métastatiques : l’exérèse chirurgicale des métastases est la
meilleure option thérapeutique (survie à 5 ans d’environ 25 à 30 %). Elle n’est cependant
possible que chez 10 % des malades au maximum. Dans les autres cas, une chimiothé-
rapie palliative est indiquée si l’état général du patient est correct. Elle permet en effet
un allongement de la survie (allongement de 6 mois à plus de 20 mois de la médiane
de survie) et une amélioration de la qualité de vie.
• Surveillance : une surveillance doit être proposée pendant les cinq années suivantes
(90 % des récidives survenant au cours des trois premières années). Le but est le dia-
gnostic précoce d’une récidive locale ou métastatique ou d’un deuxième cancer
colorectal. Elle repose sur l’examen clinique et l’échographie abdominale tous les quatre
mois pendant les deux premières années puis tous les six mois les trois années suivantes,
la radiographie thoracique tous les ans pendant cinq ans et la coloscopie un à trois ans
après la chirurgie puis tous les cinq ans.


134 ◗
10_Chap8 Page 135 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

◗ TUMEURS DE L’ESTOMAC1
R. GUIMBAUD

Les adénocarcinomes représentent les tumeurs primitives les plus fréquentes


de l’estomac (97 %), les autres formes étant représentées par les lymphomes
(2 %) et les léiomyosarcomes (1 %). Bien qu’en nette diminution dans les pays
développés, le cancer gastrique reste une maladie très fréquente dans l’ensem-
ble du monde. Son traitement repose sur la chirurgie ; les traitements adjuvants
et notamment la radiochimiothérapie semblent pouvoir en améliorer le pronos-
tic, mais ils restent encore l’objet d’études.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Les cancers de l’estomac sont très fréquents dans les pays sous-développés
mais aussi au Japon, au Chili et en Islande, pays dans lesquels les taux sont trois
à quatre fois supérieurs à la moyenne mondiale.
Au contraire, dans les autres pays développés, la fréquence de ces cancers est
en diminution nette au cours des dernières décennies (diminution plus mar-
quée pour les localisations antro-pyloriques que pour les cancers du cardia).
Ainsi, depuis 40 ans l’incidence dans ces pays a diminué de 75 %.
En France, l’incidence est de 7 000 à 7 500 nouveaux cas par an (soit 3 % de
l’ensemble des cancers).

◗ Âge, sexe
Il existe un sex-ratio à prédominance masculine de l’ordre de 2/1 (près de
65 % d’hommes), l’âge moyen de survenue étant de 50 à 59 ans.

◗ Mortalité
Les cancers de l’estomac représentent environ 7 à 8 % des causes de décès
par cancer en France, soit près de 6 000 décès/an.

◗ Facteurs de risque
Alimentation
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

L’observation de l’incidence des cancers de l’estomac dans des ethnies trans-


plantées comme les Japonais de la côte Ouest des États-Unis montre que la
fréquence baisse avec l’abandon progressif des habitudes alimentaires originel-
les. Il est ainsi suggéré au moins deux explications épidémiologiques :
– le risque de cancer de l’estomac augmente avec le niveau social et éco-
nomique défavorisé conduisant à une alimentation où prédominent les
féculents et où les fruits et légumes frais sont rares (leur forte teneur en
acide ascorbique empêchant l’action carcinogénétique des nitrites et
nitrates alimentaires ?) ;
– l’introduction massive de l’usage du réfrigérateur dans les pays riches a
diminué la consommation de produits alimentaires fumés et salés pour

1. Item n° 150. Tumeurs de l’estomac.


135 ◗
10_Chap8 Page 136 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

la conservation qui constitueraient des facteurs de risque carcinogénéti-


ques gastriques (nitrosamines ?).

Helicobacter pylori
Helicobacter pylori (HP), bactérie colonisant la muqueuse gastrique initialement
identifiée dans la genèse des ulcères gastroduodénaux, est considérée comme
un carcinogène gastrique (vraisemblablement par le biais de la gastrite atrophi-
que qu’elle induit).

Maladies prédisposantes
Gastrite atrophique • La gastrite atrophique semble être le dénominateur
commun de toutes les lésions précancéreuses. Une métaplasie intestinale est
souvent associée.
Autres • Par ailleurs, il existe d’autres causes plus rarement impliquées mais
nécessitant une surveillance spécifique :
– ulcère gastrique non cicatrisé. Bien qu’il s’agisse d’une notion classique,
il est actuellement acquis que la dégénérescence des ulcères gastriques
est une éventualité rare si l’on élimine les formes ulcérées de cancers
qui sont en fait tumorales dès le début de leur évolution ;
– gastrite atrophique auto-immune (dans le cadre de la maladie de
Biermer) ;
– antécédent de gastrectomie partielle (par gastrite atrophique du moignon
restant par reflux duodénogastrique), le risque atteignant environ 7 % en
particulier pour les patients opérés avant 45 ans, le délai d’apparition de
ces cancers étant de l’ordre de 15 à 40 ans ;
– gastrite hypertrophique de Ménétrier (dégénérescence dans plus de
10 % des cas) ;
– polype gastrique adénomateux (contrairement aux polypes hyperplasi-
ques qui représentent la majorité des polypes gastriques et qui ne dégé-
nèrent pas) ; comme pour le côlon, la taille et l’existence d’un contingent
histologique villeux sont des facteurs prédictifs de dégénérescence.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Macroscopie
La forme ulcérée est la plus fréquente avec un bourrelet nodulaire périphérique.
La forme superficielle est rare, souvent étendue largement sur la muqueuse
avec parfois des zones tumorales multiples isolées.
La linite plastique est une tumeur rare responsable d’un épaississement tumoral
nodulaire et fibreux diffus de la paroi gastrique entraînant des zones étendues
de rigidité sur les clichés radiologiques.

Topographie
Plus de 50 % des cancers gastriques sont de topographie antro-pylorique, 25 %
siègent sur la petite courbure, 10 % au niveau du cardia et 10 % envahissent
la quasi-totalité de l’estomac. Seuls 2 à 3 % des cancers surviennent sur la
grande courbure, mais dans la mesure où les ulcères bénins de la grande cour-
bure sont rares, toute ulcération à ce niveau doit être considérée comme sus-
pecte.

136 ◗
10_Chap8 Page 137 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Microscopie
Les adénocarcinomes représentent plus de 90 % des cancers gastriques.
Les autres types histologiques sont représentés par les lymphomes et les
tumeurs stromales, plus rarement les léiomyosarcomes.
Formes particulières
Les linites gastriques • Ce terme définit un aspect macroscopique et corres-
pond histologiquement à des carcinomes à cellules indépendantes avec impor-
tante stroma-réaction fibreuse et infiltration diffuse de la paroi gastrique. Le
pronostic est très sévère.
Les cancers superficiels • Il s’agit de carcinome limité à la muqueuse ou
sous-muqueuse, avec ou sans envahissement ganglionnaire. Le pronostic est
bon.

◗ Évolution naturelle
L’extension des cancers de l’estomac se fait selon plusieurs modalités.

Extension locale et régionale


Extension de contiguïté à travers la paroi gastrique puis vers la séreuse périto-
néale, les mésos et les épiploons. À terme, les organes de voisinage peuvent
être concernés (pancréas, rate, voies biliaires, côlon transverse, rein). L’extension
péritonéale fréquente peut être responsable d’une diffusion à distance dans la
cavité péritonéale, en particulier dans la région péri-ombilicale, prérectale ou
ovarienne.

Extension ganglionnaire
Extension ganglionnaire rapide et facile en raison d’un réseau lymphatique très
riche et largement interconnecté se regroupant en trois axes majeurs de drai-
nage, la chaîne gastrique gauche satellite de la grande courbure, la chaîne splé-
nique et la chaîne hépatique issues préférentiellement de la petite courbure. Sur
le plan pronostique, il est habituel de distinguer les localisations proximales
immédiatement au contact de la paroi gastrique et les localisations régionales
dans les chaînes précédemment décrites. Enfin, les cancers de l’estomac sont
susceptibles d’entraîner des localisations ganglionnaires à distance dont deux
topographies classiques sont sus-claviculaire et axillaire gauches ; ces localisa-
tions sont considérées comme des métastases à distance.

Extension hématogène
Extension hématogène, préférentiellement hépatique par voie porte, mais aussi
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

pulmonaire, osseuse voire cérébrale.

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Les cancers gastriques se présentent habituellement avec une symptomatologie
peu caractéristique, le plus souvent vague et totalement aspécifique :
– inconfort épigastrique vague, avec ou sans anorexie et amaigrissement,
ne s’améliorant pas rapidement sous traitement symptomatique banal ;
– douleur ulcéreuse rebelle au traitement médical, mais il s’agit là d’une
éventualité rare comme d’ailleurs les hémorragies digestives macrosco-
piques ;

137 ◗
10_Chap8 Page 138 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– anémie sidéropénique attirant l’attention vers un saignement occulte


dont l’estomac, comme d’autres organes en particulier digestifs, peut être
à l’origine ;
– métastase révélatrice, hépatique ou ganglionnaire sus-claviculaire (gan-
glion de Troisier), éventualité non exceptionnelle témoignant de la diffi-
culté du diagnostic précoce.

◗ Méthodes du diagnostic
L’endoscopie œsogastrique constitue l’examen complémentaire incontournable
dans l’exploration des symptômes précédents. Elle seule permet la visualisation
directe des lésions et surtout des prélèvements au niveau des zones suspectes.
Classiquement, au moins dix biopsies doivent être réalisées sur la zone suspecte
et en périphérie immédiate.

◗ Évaluation préthérapeutique
◗ Bilan
Examen clinique
L’examen clinique recherche :
– une adénopathie sus-claviculaire le plus souvent gauche (ganglion de
Troisier), une adénopathie axillaire également gauche (ganglion d’Irish),
une hépatomégalie ;
– une ascite avec éventuellement nodules péri-ombilicaux ;
– une tumeur prérectale témoignant d’une localisation péritonéale dans le
cul-de-sac de Douglas accessible au TR ; chez la femme une augmenta-
tion du volume ovarien (tumeur de Krükenberg).

Examens complémentaires
Ils consistent en :
– une échographie ou mieux une tomodensitométrie abdominale permet-
tant en outre la recherche d’adénopathies mésocœliaques ou de locali-
sations péritonéales cliniquement non perceptibles ;
– une radiographie thoracique de face ;
– une évaluation biologique standard comportant le dosage de l’ACE et/ou
du CA 19-9 ;
– éventuellement, en cas de signes d’appel, une scintigraphie osseuse.
Et parfois :
– une exploration radiologique (opacification gastrique en double
contraste) permet, mieux que la fibroscopie, pour le chirurgien, d’appré-
cier la situation anatomique exacte, l’infiltration, l’épaisseur tumorale ;
– une écho-endoscopie peut être recommandée en cas de cancer super-
ficiel dont un traitement local est envisagé (mucosectomie) ou de sus-
picion de linite.

Bilan peropératoire
En fait, une part importante de l’évaluation de l’extension tumorale aura lieu lors de
la laparotomie dont le premier temps consiste toujours en une exploration complète
de la cavité abdominale, expliquant que la classification TNM fasse appel largement
à la classification anatomique chirurgicale, pTNM. Ainsi une cœlioscopie exploratrice
peut parfois faire partie du bilan de grosses tumeurs à l’extirpabilité douteuse.

138 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

◗ Classification (tableau 8.VIII)

Tableau 8.VIII. Classification TNM des cancers de l’estomac (UICC, 1997)


Tis Tumeur intraépithéliale
pT1 Tumeur envahissant la lamina propria ou la sous-muqueuse
pT2 Tumeur envahissant la musculeuse ou la sous-séreuse
pT3 Tumeur envahissant la séreuse (péritoine)
pT4 Tumeur envahissant les structures de voisinage
pN0 Pas d’adénopathie régionale
pN× Ganglions non évalués ou moins de 15 ganglions examinés
pN1 1 à 6 ganglions métastatiques régionaux
pN2 7 à 15 ganglions métastatiques régionaux
pN3 > à 15 ganglions métastatiques régionaux
L’examen d’au moins 15 ganglions est nécessaire à l’évaluation correcte du statut ganglionnaire.

Stades
Le regroupement en stades est le suivant :
– Stade 0 : Tis N0 M0 ;
– Stade IA : T1 N0 M0 ;
– Stade IB : T1 N1 M0, T2 N0 M0 ;
– Stade II : T1 N2 M0, T2 N1 M0, T3 N0 M0 ;
– Stade IIIA : T2 N2 M0, T3 N1 M0, T4 N0 M0 ;
– Stade IIIB : T3 N2 M0 ;
– Stade IV : T4 N1-N2-N3 M0, T1-T2-T3 N3 M0, tout T tout N M1.

◗ Paramètres du pronostic
Stade tumoral
Le paramètre pronostique essentiel est le stade tumoral selon la classification
TNM (tableau 8.IX).

Tableau 8.IX. Survie à 5 ans des carcinomes gastriques en fonction du stade


initial
Survie à 5 ans
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

N0 Muqueuse seule (T1) 85 %


Muqueuse et paroi gastrique (T2) 52 %
Transfixion pariétale (T3) 47 %
N+ N1 17 %
N2 05 %
+
M <3%

Autres
Outre le stade, les facteurs pronostiques sont :
– le type histologique, et notamment le degré de différenciation. Par
ailleurs, la linite gastrique a un pronostic particulièrement péjoratif

139 ◗
10_Chap8 Page 140 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

contrairement au cancer superficiel qui se caractérise par son excellent


pronostique avec une survie à 5 ans de l’ordre de 90 % ;
– la qualité de l’exérèse chirurgicale.

◗ Traitement
◗ Prévention
À l’échelon de la population
La prévention du cancer gastrique passe, au niveau des populations, par l’amé-
lioration des conditions socio-économiques, la diversité alimentaire, la diffusion
des processus de conservation alimentaire par le froid, l’éradication d’Helicobac-
ter pylori… Dans les pays à très forte incidence tels que le Japon, des program-
mes de dépistage de masse sont mis en place.

À l’échelon individuel
En dehors des pays tels que le Japon, une prévention et un dépistage peuvent
être envisagés à l’échelon individuel dans les rares familles où ils existent une
prédisposition héréditaire au cancer gastrique, par éradication d’Helicobacter
pylori et contrôles endoscopiques réguliers. Cette démarche n’a cependant pas
été clairement validée.

◗ Méthodes thérapeutiques
Chirurgie
Gastrectomie • L’exérèse chirurgicale est l’élément thérapeutique majeur des
cancers de l’estomac.
La gastrectomie peut être totale ou partielle :
– gastrectomie totale : habituellement, l’intervention réalisée est une gas-
trectomie totale avec rétablissement de la continuité par anastomose
œso-jéjunale ; l’exérèse enlève l’estomac, le premier duodénum, le
grand épiploon et l’atmosphère cellulaire et ganglionnaire du pédicule
hépaticoduodénal. Elle peut être agrandie vers la rate, le côlon transverse
ou une partie du pancréas ; il est alors nécessaire que l’exérèse reste
« monobloc » sans dissection ni rupture de la pièce.
La mortalité et la morbidité sont élevées, dominées par les fistules anas-
tomotiques et les complications hématologiques de la gastrectomie
totale ;
– gastrectomie partielle : pour les cancers localisés à l’antre, une gastrecto-
mie partielle (gastrectomie distale avec anastomose gastro-jéjunale) peut
être réalisée ; à condition que la marge de sécurité soit d’au moins 4 cm
pour les cancers de type intestinal et 8 cm pour ceux de type histologi-
que diffus (classification de Lauren).
Curage ganglionnaire
Chaînes ganglionnaires • Il est recommandé de faire l’exérèse des ganglions
des deux premiers relais (plan antérieur le long des courbures gastriques, plan
moyen le long des trois axes artériels : coronaire stomachique, hépatique, splé-
nique) tout en conservant la rate. Un curage plus limité est réalisable en cas de
cancer superficiel ou très avancé (stades I et IV) ou chez un patient très âgé.
Splénopancréatectomie • La splénopancréatectomie gauche est recommandée
seulement si des ganglions rétropancréatiques sont macroscopiquement envahis.

140 ◗
10_Chap8 Page 141 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Splénectomie • La splénectomie est indiquée en cas d’adénopathies de l’artère


splénique ou de cancer de la grosse tubérosité atteignant la séreuse.

Radiothérapie externe
Irradiation exclusive • L’irradiation des cancers gastriques en place est con-
sidérée habituellement comme un traitement palliatif, d’efficacité médiocre,
dans la mesure où la topographie gastrique ne permet pas de délivrer des doses
qui pourraient éventuellement permettre un contrôle local prolongé.
Irradiation adjuvante • Cependant après chirurgie seule, les adénocarcino-
mes gastriques localement avancés (II et III) présentent un taux de récidives
locales de l’ordre de 70 à 80 %, rendant logique l’irradiation postopératoire des
résidus microscopiques après exérèse de la maladie macroscopique. Récem-
ment, une large étude randomisée américaine a montré un avantage en survie
en faveur d’une radiothérapie postopératoire (45 Gy avec chimiosensibilisation
par le 5-FU) en terme de survie par rapport à l’absence de traitement postopé-
ratoire. La principale critique de cette étude, outre la toxicité induite par la radio-
chimiothérapie, était la qualité médiocre de la chirurgie d’exérèse, ne permettant
pas de transformer ces conclusions en recommandation thérapeutique systéma-
tique.
Une autre voie d’utilisation de la radiothérapie est représentée par l’irradiation
peropératoire lors de la chirurgie gastrique. Il s’agit d’une technique expérimen-
tale et lourde dont l’efficacité n’est pas encore démontrée.

Chimiothérapie
Les cancers gastriques sont chimiosensibles mais l’efficacité de la chimiothéra-
pie est seulement démontrée en situation métastatique ou d’inextirpabilité : elle
retarde l’apparition des symptômes, améliore la qualité de vie mais le bénéfice
en survie reste faible (allongement médian d’environ 6 mois). En situation adju-
vante (postopératoire), la chimiothérapie n’a jamais fait la preuve de son effica-
cité.
Les principaux protocoles de chimiothérapie des cancers gastriques reposent sur
les associations 5-FU et cisplatine avec ou sans épirubicine, méthotrexate. Le
taux de réponse est globalement de 30 à 50 %.

◗ Stratégie
Cancers en phase locorégionale
Tumeur résécable • Les cancers résécables doivent être opérés d’emblée,
sans traitement néo-adjuvant en dehors d’un essai thérapeutique.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Un traitement adjuvant postopératoire par radiochimiothérapie peut se discuter


surtout s’il existe un envahissement ganglionnaire et/ou si le curage chirurgical
a été insuffisant, et si l’état général du malade est correct.
Tumeur non résécable • En l’absence de métastase et chez un patient opé-
rable par ailleurs, on peut proposer une chimiothérapie première puis une réé-
valuation chirurgicale. Il s’agit cependant d’une attitude non consensuelle dont
la prétention n’est que très rarement curative.

Cancers métastatiques
Chez les malades présentant un état général correct, on peut proposer une chi-
miothérapie palliative dont la poursuite sera guidée par la réponse et l’éventuel
bénéfice thérapeutiques.
L’exérèse de la tumeur primitive n’est pas recommandée sauf si elle est respon-
sable de symptômes invalidants (hémorragie, sténose digestive). Dans ces cas,

141 ◗
10_Chap8 Page 142 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

les alternatives chirurgicales doivent aussi être discutées : électrocoagulation par


laser, endoprothèse, etc.
En conclusion, le traitement des cancers gastriques laisse encore une large place
à la recherche clinique sous formes d’essais thérapeutiques contrôlés.

◗ Surveillance
◗ Résultats
La survie du cancer gastrique est globalement médiocre (tableau 8.X).

Tableau 8.X. Taux de survie à 5 ans des cancers gastriques en fonction du


stade initial (séries cliniques occidentales)
Stades Survie à 5 ans
Stade I 50 %
Stade II 29 %
Stade III 13 %
Stade IV 3%

◗ Suivi des patients


Détection des récidives
Aucune étude ne prouve que la surveillance soit utile.
Les rechutes locales sont le plus souvent associées à une carcinose péritonéale
et souvent inaccessibles à un traitement curatif.
Rarement, le diagnostic de récidive peut déboucher sur une attitude curative
(reprise chirurgicale d’une récidive anastomotique) ou palliative utile. Ainsi, une
surveillance peut être envisagée chez les patients capables de supporter une
réintervention ou une chimiothérapie. Elle reposera sur l’examen clinique et des
examens simples.

Suivi des suites opératoires


Les conséquences thérapeutiques doivent être impérativement prises en
charge :
– si gastrectomie totale : vitamine B12, 1 mg IM tous les 3 mois ;
– si splénectomie :
• vaccination : Pneumo 23 (rappel tous les 5 ans) Haemophilus
influenzae b (Act-Hib ou Hibest) (rappel tous les 3 ans), méningo-
coccique A + C (rappel tous les 3 ans), grippe (rappel tous les ans),
• pénicilline V : Oracilline 1 comprimé à 1 MUI 2 fois/j en 2 prises pendant
au moins 2 ans (à vie si bonne tolérance) en dehors d’une allergie.


142 ◗
10_Chap8 Page 143 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Points clés
• Épidémiologie : le cancer gastrique est un cancer fréquent dans le monde mais
en forte diminution d’incidence dans les pays développés. Il occupe cependant le
deuxième rang des cancers digestifs en France.
• Dépistage : en dehors des pays à très forte incidence tels que le Japon, aucun
dépistage de masse n’est justifié. De plus, il n’a pas été identifié de groupes à
risque susceptibles de bénéficier d’un dépistage ciblé, les facteurs de risques étant
essentiellement des facteurs épidémiologiques.
• Diagnostic : les signes d’appel ne sont pas caractéristiques (asthénie, anémie, dou-
leurs, métastases révélatrices…). Le diagnostic repose sur la fibroscopie gastrique
avec biopsies.
• Bilan d’extension : il comprend l’examen clinique l’échographie et la radiographie
pulmonaire, voire un scanner. Cependant, une extension est assez souvent décou-
verte lors de la laparotomie, si bien que le premier temps opératoire d’exploration
(éventuellement réalisable par cœlioscopie) fait partie intégrante du bilan
d’extension.
• Histologie et pronostic : la forme classique du cancer gastrique est l’adénocarci-
nome (90 %). Plus rarement d’autres types histologiques malins peuvent être
identifiés : lymphome, tumeurs stromales, sarcomes… Leur prise en charge diffère
de celle de l’adénocarcinome. Le pronostic est sévère, la plupart des cas étant dia-
gnostiqués à un stade avancé.
• Traitement des formes non métastatiques. Il repose sur la chirurgie : gastrectomie
totale dans la plupart des cas, gastrectomie partielle parfois, avec curage ganglion-
naire associé. L’étendue du curage ganglionnaire a fait l’objet de grandes
controverses entre Occidentaux et Japonais, il est actuellement relativement bien
codifié. Une radiochimiothérapie complémentaire à la chirurgie (en postopératoire)
doit être discutée dans certains cas.
• Traitement des formes localement avancées ou métastatiques : il repose sur la
prise en charge symptomatique. La gastrectomie ne doit pas être réalisée à titre
systématique. La chimiothérapie, chez les patients demandeurs et en état général
correct, permet d’allonger modérément la survie et d’en améliorer la qualité.
• Surveillance : la surveillance doit surtout s’attacher à prévenir et dépister les
séquelles thérapeutiques. La détection d’une récidive tumorale n’est en général
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

pas bénéfique car elle ne débouche qu’exceptionnellement sur un traitement


utile.


143 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ TUMEURS DU FOIE, PRIMITIVES OU SECONDAIRES 1


R. GUIMBAUD

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) ou hépatocarcinome, prolifération néopla-


sique d’origine hépatocytaire, est la plus fréquente des tumeurs primitives du
foie. Il survient dans plus de 90 % des cas sur une maladie hépatique, cirrhose
ou hépatite chronique virale préexistante, au terme d’une évolution de 20 à
30 ans. À l’échelle mondiale, c’est l’un des cancers les plus fréquents.
Les métastases hépatiques sont les plus fréquentes des tumeurs du foie. Elles
compliquent surtout les cancers drainés par la circulation splanchnique (côlon, pan-
créas, estomac…), mais peuvent se voir dans la quasi-totalité des cancers généra-
lisés (poumon, ovaires, sein, œsophage, rein, tumeurs neuro-endocrines, etc.).
L’ensemble de ce chapitre traite essentiellement du CHC, les autres tumeurs
primitives du foie étant très rares et les tumeurs secondaires (métastases hépa-
tiques) représentant un groupe hétérogène de tumeurs dont le diagnostic et la
prise en charge varient en fonction de l’origine des métastases (voir
chapitre 17).

◗ Épidémiologie
Le CHC représente le quatrième cancer le plus fréquent dans le monde avec
250 000 nouveaux cas par an. L’incidence en France est faible avec environ
2 500 nouveaux cas par an.

◗ Variations géographiques
Il existe une grande disparité dans le monde avec une très forte incidence dans
les pays où l’hépatite virale B est fréquente et précoce (Afrique et Asie, pays à
forte endémie) par rapport aux pays à faible endémie (pays industrialisés tels
que la France).
En Asie et en Afrique, où l’infection par le virus B est contractée à la naissance,
l’hépatocarcinome survient chez l’adulte jeune. En France, le virus C devient, à
côté de l’alcool, une cause importante, essentiellement sur une cirrhose après
l’âge de 50 ans.

◗ Évolution au cours du temps


En France (comme dans les autres pays à faible endémie de virus B), on
constate une augmentation certaine du nombre de CHC liée à la propagation
du virus C.

◗ Âge, sexe
Il existe une nette prédominance masculine (sex-ratio homme/femme de 9).

◗ Facteurs de risque
Cirrhose
En France, la majorité des CHC surviennent sur un foie de cirrhose qu’elle qu’en
soit l’étiologie. L’incidence de dégénérescence de la cirrhose est de l’ordre de

1. Item n° 151. Tumeurs du foie, primitives et secondaires.


144 ◗
10_Chap8 Page 145 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

2 à 5 % par an. Le taux cumulé de survenue d’un CHC sur cirrhose est de
l’ordre de 20 % à 5 ans et 60 % à 15 ans. Les principaux facteurs prédisposants
sont :
– l’hémochromatose (risque relatif de 200). En revanche le CHC compli-
que exceptionnellement la maladie de Wilson et la cirrhose biliaire
primitive ;
– le virus de l’hépatite B ;
– le virus de l’hépatite C ;
– l’alcool.

CHC sur foie sain


Le cancer primitif sur foie sain est exceptionnel. Il peut être favorisé par des
carcinogènes chimiques (par exemple, l’aflatoxine, substance synthétisée par
Aspergillus flavus qui se développe sur les réserves de grains en Afrique). De
même, l’administration prolongée de stéroïdes androgéniques ou anabolisants
peut donner lieu à la formation d’adénomes et de CHC.
En Occident, l’hépatocarcinome sur foie sain est parfois une variété particulière,
dite « fibrolamellaire », de meilleur pronostic.
Le tableau 8.XI propose une synthèse de ces différentes données.

Tableau 8.XI. Présentation clinique et épidémiologique des carcinomes


hépatocellulaires en fonction des aires géographiques d’incidence
Variables Forte incidence Faible incidence
Localisation Asie, Afrique Amérique du Nord,
géographique Europe
Race Asiatiques, Noirs Caucasiens
Âge moyen Asiatiques : 40-50 ans, 50-60 ans
Noirs : 20-30 ans
Symptômes Évolution rapide Souvent absents
Cirrhose 60 à 80 % 60 à 80 %
Incidence sur cirrhose Plus de 50 % 5 à 10 %
Type de cirrhose Rôle majeur de l’HBV Alcool et HBV
Association hépatite B Plus de 80 % < 30 %
Présence Ag hépatite B 70 à 90 % < 30 %
Exposition aflatoxine Haute Peu probable
α-fœtoprotéine
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

70 à 85 % 30 à 65 %
> 400 ng/ml

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Les cancers hépatiques primitifs du foie peuvent se développer à partir de dif-
férents types cellulaires normalement présents dans le foie :
– carcinome hépatocellulaire (CHC) et hépatoblastome, développés à par-
tir des hépatocytes ;
– cholangiocarcinome, développé à partir des cellules des voies biliaires
intrahépatiques ;

145 ◗
10_Chap8 Page 146 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– angiosarcomes et hémangioendothéliomes (maladie professionnelle


reconnue pour les ouvriers de l’industrie du chlorure de vinyle), dévelop-
pés à partir des cellules bordant les sinusoïdes.
Le CHC représente plus de 80 % des tumeurs primitives hépatiques, les cho-
langiocarcinomes 5 à 10 %, les autres tumeurs sont exceptionnelles.

◗ Évolution naturelle
Le CHC se développe à partir d’un foyer initial localisé, envahit les vaisseaux
portes et métastase dans le foie lui-même par l’intermédiaire des branches
portales ; cette notion explique le caractère souvent multiloculaire du cancer,
maladie autométastasiante dans le foie, et la tendance à la thrombose néopla-
sique des branches puis du tronc de la veine porte. L’invasion des veines
sus-hépatiques existe dans 10 % des cas et celle de la lumière des voies biliai-
res dans moins de 5 %.
Si le cancer est symptomatique, son pronostic est très péjoratif, avec une
médiane de survie qui ne dépasse pas quelques mois, voire quelques semai-
nes.
Le CHC croît de façon variable, le délai de passage entre le stade CHC de 1 cm
à 10 cm pourrait s’échelonner de moins de un an à dix ans.

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
L’hépatocarcinome peut compliquer une cirrhose connue ou être la cause
déclenchante d’une décompensation qui révélera la cirrhose, jusqu’alors com-
pensée et non connue :
– aggravation d’une hypertension portale avec hémorragie digestive
révélatrice ;
– apparition ou majoration d’une ascite (qui devient irréductible ou
hémorragique) ;
– apparition ou majoration d’une insuffisance hépatocellulaire (ictère,
encéphalopathie).
Il peut exister des douleurs liées à l’extension ou à la nécrose de la masse tumorale.
Souvent, le carcinome hépatocellulaire est une découverte d’échographie sur ter-
rain à risque (échographie systématique de surveillance chez un sujet cirrhotique).

◗ Imagerie
L’échographie et la tomodensitométrie retrouvent un syndrome tumoral intrahé-
patique souvent volumineux développé sur un foie hétérogène cirrhotique.

◗ Biologie
Biologie hépatique
Les tests hépatiques peuvent être normaux en cas de petite tumeur sur foie
sain ou sur cirrhose non décompensée.
Si la masse est plus volumineuse les deux anomalies les plus fréquentes sont l’aug-
mentation des phosphatases alcalines et l’augmentation de la γGT (cholestase
anictérique en rapport avec la compression des voies biliaires intra-hépatiques).
Enfin, en cas de décompensation de la cirrhose, l’ensemble des tests hépati-
ques peut être perturbé.

146 ◗
10_Chap8 Page 147 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

a-fœtoprotéine (AFP)
Il existe dans 80 % des cas une élévation du taux sérique de l’AFP, globalement
proportionnel à la masse tumorale. Dans 30 % des formes, elle est supérieure
à 500 ng/ml, ce taux étant pathognomonique ; dans les autres cas, les valeurs
intermédiaires se chevauchent avec celles qui sont observées dans l’hépatite
chronique ou la cirrhose. Son élévation progressive sur un mode exponentiel
lors de plusieurs dosages est très caractéristique.

Autre
Dans certains cas il existe des syndromes paranéoplasiques associés responsa-
bles d’hypoglycémie, de polyglobulie par sécrétion anormale d’érythropoïétine,
d’hypercalcémie…

◗ Méthodes du diagnostic
Le seul moyen de certitude diagnostique est la biopsie dirigée sous échographie
ou TDM. Les contre-indications sont : les troubles de l’hémostase, la dilatation
des voies biliaires, l’ascite.
Elle n’est pas indiquée quand le tableau clinicobiologique et/ou radiologique est
typique (par exemple, cirrhose connue ou probable avec masse hépatique et
taux d’AFP > 500 ng/ml) ou si aucun projet thérapeutique n’est envisagé.

◗ Diagnostics différentiels
Ce sont d’une part les autres formes de tumeurs primitives, les tumeurs secon-
daires et enfin les rares tumeurs bénignes. Il existe souvent un faisceau d’argu-
ments cliniques et radiologiques permettant d’orienter le diagnostic. Si un doute
persiste une biopsie est nécessaire.

◗ Évaluation préthérapeutique
◗ Bilan
Le but du bilan préthérapeutique est l’évaluation de :
– l’état clinique général ;
– l’hépatopathie sous-jacente ;
– l’extension tumorale locale (parenchyme hépatique, veine porte…) et à
distance.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Ainsi, outre l’examen clinique et le bilan biologique général (tests hépatiques


complets avec albuminémie et TP, AFP), le bilan comporte :
– échographie hépatique ;
– TDM hépatique ;
– radiographie thoracique ;
– fibroscopie œsogastrique à la recherche de varices œsophagiennes
(témoignant de l’hypertension portale).

◗ Classification
Il existe plusieurs classifications dont, essentiellement, la classification TNM
(tableau 8.XII) et celle d’Okuda (qui classe la tumeur et l’hépatopathie
sous-jacente, tableau 8.XIII).

147 ◗
10_Chap8 Page 148 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Tableau 8.XII. Classification TNM des hépatocarcinomes


T1 Nodule solitaire < 2 cm, sans invasion vasculaire
T2 Nodule solitaire < 2 cm avec invasion vasculaire
Nodules multiples < 2 cm, dans le même lobe, sans invasion vasculaire
Nodule solitaire > 2 cm sans invasion vasculaire
T3 Nodule solitaire > 2 cm avec invasion vasculaire
Nodules multiples > 2 cm dans un lobe
Nodules multiples dans plus d’un lobe
T4 Invasion d’une branche majeure de division du tronc porte ou des veines
sus-hépatiques
N1 Adénopathie(s) régionale(s)

Tableau 8.XIII. Classification d’Okuda


Critères Points
= 0 point = 1 point
Envahissement du foie par la tumeur < 50 % > 50 %
Ascite (–) (+)
Albuminémie > 30 g/l < 30 g/l
Bilirubinémie < 30 µM > 30 µM
Stade I : 0 point ; stade II : 1-2 points ; stade III : 3-4 points.

◗ Paramètres du pronostic
Ils reposent essentiellement sur le stade tumoral et la sévérité de l’hépatopathie
sous-jacente.

◗ Traitement
◗ Prévention
La vaccination contre l’hépatite B est le seul moyen préventif efficace, associée
à la sécurité virologique transfusionnelle et à l’ensemble des dispositions hygié-
niques préventives de l’infection virale B ou C.

Dépistage
Dans les pays tels que la France, il est proposé de diagnostiquer le cancer le
plus tôt possible grâce au dépistage des groupes à risque (cirrhose essentielle-
ment). Le dépistage repose sur la répétition, deux à trois fois par an, de l’écho-
graphie et du dosage de l’AFP.

◗ Méthodes thérapeutiques
Chirurgie
Classiquement seule la chirurgie est considérée comme un traitement curatif
dans le traitement des CHC. Le risque de récidive est cependant élevé car il
existe souvent des foyers multiples soit métastatiques intrahépatiques mécon-
nus au moment de l’opération, soit parce que le foie peut dégénérer en plu-

148 ◗
10_Chap8 Page 149 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

sieurs zones. Dans les faits, la chirurgie n’est pas fréquemment curative… Elle
ne s’adresse qu’aux tumeurs de petite taille, sans extension vasculaire notam-
ment portale, sans métastase et chez des patients opérables. Environ 90 % des
malades sont récusés…
Deux types de chirurgie radicale peuvent être proposés :
– hépatectomie partielle : elle est indiquée pour les tumeurs de taille infé-
rieure à 5 cm. Mais elle est conditionnée par l’insuffisance hépatocellu-
laire (le volume de foie restant doit être suffisant pour assurer la fonction
hépatique malgré la cirrhose) ;
– transplantation hépatique : elle ne doit être proposée que pour les
tumeurs de petite taille et lorsque la résection n’est pas possible compte
tenu des faibles capacités fonctionnelles du foie restant. Elle est limitée
par la pénurie des greffons.
La mortalité opératoire varie de 3 à 12 % en centres spécialisés.
Destruction tumorale sans exérèse (alcoolisation, radiofréquence) •
Il s’agit de méthodes alternatives à la chirurgie et réalisables sans laparotomie
(par voie transpariétale). Elles ne s’adressent, comme la chirurgie, qu’aux
tumeurs limitées : de une à trois au maximum, de 3 cm de diamètre au plus,
sans extension vasculaire ou à distance…
– L’alcoolisation consiste à injecter dans la tumeur une solution d’alcool pur qui
va entraîner une nécrose tumorale. Plusieurs séances sont nécessaires ;
– la radiofréquence consiste à envoyer dans la tumeur un courant alternatif
entraînant une destruction tumorale. Une seule séance suffit.
L’alcoolisation semble donner des résultats équivalents à la chirurgie. L’équiva-
lence avec la radiofréquence n’est pas encore acquise (absence de recul et de
grandes séries).

Moyens médicaux
L’ensemble des moyens médicaux utilisés au cours du CHC sont palliatifs :
– la chimiothérapie n’est pas justifiée car elle n’a démontré aucun bénéfice.
La chimio-embolisation est une technique qui combine l’administration
de chimiothérapie et de particules embolisantes de petite taille dans la
branche de l’artère hépatique qui vascularise la tumeur (les CHC sont
préférentiellement vascularisés par le système artériel hépatique au détri-
ment du système porte). Elle peut parfois entraîner une nécrose tumo-
rale partielle ou complète, mais son bénéfice en terme de survie n’est
pas démontré ;
– de même la radiothérapie n’a pas d’intérêt en dehors du traitement de
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

certains symptômes (hépatiques, par exemple) ;


– il n’y a pas d’hormonothérapie utile.

◗ Stratégie
Cancers en phase locorégionale
Le traitement repose sur la chirurgie (hépatectomie partielle) si la tumeur
mesure moins de 5 cm et ne présente pas d’extension vasculaire ou à distance,
si le malade est opérable et si la quantité de foie restant semble a priori suffi-
sante pour assurer la fonction hépatique après résection. Si ce dernier point
n’est pas possible, on peut discuter une transplantation hépatique.
Dans les autres cas, il n’y a pas de proposition thérapeutique en dehors de la
prise en charge des symptômes.

149 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Surveillance
◗ Résultats
Après traitement à visée curative, la survie est de l’ordre de 45 % à 2 ans et de
20 % à 5 ans (la plupart des malades vivants à 5 ans présentent cependant
une récidive).

◗ Suivi des patients


Le taux de récidive est élevé correspondant soit à une récidive de la tumeur
initiale, soit en raison de l’état précancéreux (parenchyme cirrhotique), à l’appa-
rition d’un nouveau CHC. Un traitement de la récidive peut être utile s’il s’agit
de nouveau d’une récidive limitée. La surveillance est donc justifiée pour détec-
ter précocement une récidive. On peut proposer : surveillance clinique
+ échographie + dosage de l’AFP tous les quatre mois, TDM et RP annuelles…
Outre la récidive tumorale, la surveillance s’efforcera de détecter une complica-
tion de l’hépatopathie sous-jacente.

Points clés
• Épidémiologie : le CHC représente la majorité des tumeurs hépatiques primitives.
Son incidence est très élevée dans le monde ; il est lié à une hépatopathie
sous-jacente (cirrhose, hépatite virale chronique B, etc.). La France a une incidence
faible mais en augmentation.
• Dépistage : le diagnostic précoce repose sur la surveillance des cirrhotiques par
échographie.
• Dans le monde une prévention efficace pourrait être faite notamment par la vac-
cination contre l’hépatite B.
• Diagnostic : les symptômes d’appel sont liés à l’aggravation de la cirrhose ou au
syndrome tumoral (douleur, masse). Souvent, en France, le diagnostic est fait par
échographie de dépistage chez un cirrhotique.
• Bilan d’extension : le bilan préthérapeutique comporte l’évaluation de l’état général
du patient (examen clinique) et de l’hépatopathie (tests hépatiques, TP, albumi-
némie…, fibroscopie à la recherche de varices œsophagiennes) ainsi que le bilan
d’extension tumorale (écho, TDM, RP…).
• Traitement des formes non métastatiques : le traitement repose sur la chirurgie
d’exérèse à condition qu’il s’agisse d’une tumeur de moins de 5 cm, sans enva-
hissement vasculaire ou à distance et qu’il n’y ait pas d’insuffisance hépatique liée
à la cirrhose sous jacente. Seuls moins de 10 % des malades sont opérés et parmi
les malades opérés la majorité rechute dans les 5 ans. Le geste chirurgical peut
être une hépatectomie (de type variable en fonction de la localisation tumorale)
ou, parfois, une transplantation. Des méthodes de destruction in situ (injection
d’alcool ou radiofréquence) réalisables par voie transpariétale représentent une
alternative. Aucun autre traitement n’a d’utilité démontrée.


150 ◗
10_Chap8 Page 151 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

Points clés (suite)


• Traitement des formes métastatiques : il se limite au traitement symptomatique.
• Surveillance : une surveillance peut être proposée. Elle repose sur l’examen cli-
nique et l’échographie, voire la TDM. Le but est la recherche d’une récidive ou d’un
deuxième CHC accessible à un traitement à visée curative d’une part et la détection
de complications de la cirrhose d’autre part.

◗ TUMEURS DE L’ŒSOPHAGE1
R. GUIMBAUD

Le cancer de l’œsophage est classiquement un carcinome épidermoïde sur-


venant chez un homme alcoolo-tabagique ; cependant les formes adénocar-
cinomateuses tendent à se développer. Le symptôme révélateur est une
dysphagie. La gravité de cette pathologie provient certes de la tumeur
elle-même mais aussi de la fréquente comorbidité associée. Le traitement
repose classiquement sur la chirurgie qui reste un geste lourd. Au cours de
ces dernières années, l’association radiochimiothérapie exclusive s’est révélée
efficace et concurrence la chirurgie dans certains stades.

◗ Épidémiologie
La forme la plus fréquente du cancer de l’œsophage est le carcinome épider-
moïde. Dans 10 à 20 % des cas, il s’agit d’adénocarcinome.

◗ Incidence
L’incidence est de 5 000 nouveaux cas par an en France (soit
1,5 pour 100 000). Le cancer de l’œsophage représente environ 1,5 % de tous
les cancers et environ 10 % de tous les cancers digestifs.

Variations géographiques
Il existe de grandes variations d’incidence, liées à des causes connues ou non :
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– les zones géographiques où la consommation éthylique est élevée,


comme la France. Même au sein de la France, il existe de très importantes
disparités géographiques entre le Nord (essentiellement le Nord-Ouest
avec une très forte incidence : 50/100 000 pour un taux moyen français
voisin de 15/100 000) et le Sud (faible incidence, jusqu’à dix fois moin-
dre), ce fort gradient nord-sud est vraisemblablement dû, en partie, aux
différences en quantité et en type de consommation alcoolique. L’inci-
dence de la France est la plus élevée d’Europe (pour l’homme) ;
– d’autres régions du monde présentent des taux d’incidence très élevés
sans que l’explication en soit évidente ou univoque : Chine du Nord,
430/100 000 hommes alors que le taux moyen chinois est de 32/

1. Item n° 152. Tumeurs de l’œsophage.


151 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

100 000 hommes et qu’il n’est que de 1,4/100 000 hommes dans la
Chine du Sud. D’autres régions comme l’Afrique du Sud et le Nord de
l’Iran présentent également des taux très élevés.

Évolution au cours du temps


L’incidence, dans les pays industrialisés, est en nette diminution depuis 20 ans
(surtout dans les régions à forte incidence du fait, vraisemblablement, de la
baisse de la consommation d’alcool), surtout chez l’homme. Cette baisse d’inci-
dence concerne exclusivement les cancers épidermoïdes ; en revanche celle
des adénocarcinomes du bas œsophage est en nette augmentation (ce serait
le cancer dont l’augmentation serait la plus importante aux États-Unis) surtout
chez les 45-65 ans.

◗ Âge, sexe
Il existe une nette prédominance masculine : presque 90 % d’hommes.
L’âge moyen est de 55 à 65 ans pour les carcinomes épidermoïdes, plus élevé
pour les adénocarcinomes.

◗ Mortalité
La mortalité est élevée : 4 500 décès par an en France (soit 3,5 % des décès
par cancer).

◗ Facteurs de risque
Facteurs de risque du carcinome épidermoïde
Alcool, tabac • Les facteurs de risque du cancer de l’œsophage sont dominés
dans les pays occidentaux par la consommation alcoolique excessive souvent
potentialisée par le tabagisme. La preuve a contrario est apportée par les taux
d’incidence très faibles enregistrés dans les communautés interdisant pour des
raisons morales ou religieuses la consommation de tabac et d’alcool (Mormons,
Adventistes).
Autres • Il existe cependant d’autres situations augmentant l’incidence du can-
cer de l’œsophage, leur rôle est cependant modeste :
– achalasie œsophagienne ou hernie hiatale avec œsophagite peptique
(3 % de risque) ;
– syndrome de Plummer-Vinson (ou Paterson-Kelly) associant anémie fer-
riprive, glossite et œsophagite, plus souvent chez la femme, avec un ris-
que de dégénérescence œsophagienne proche de 10 %
essentiellement au niveau du tiers supérieur ;
– tylose palmoplantaire, maladie autosomique dominante, caractérisée par
une hyperkératose palmoplantaire s’accompagnant dans plus d’un tiers
des cas du développement d’un épithélioma épidermoïde œsophagien.
Dans certaines familles ce risque peut atteindre plus de 90 % ;
– facteurs exogènes tels que : radiations ionisantes, irritation thermique
(par boissons brûlantes)… ;
– pour mémoire, diverticule œsophagien, sténose caustique cicatricielle
(dégénérescence tardive, à partir de 20 à 30 ans d’évolution) et masti-
cation du bétel sont des facteurs de risque mineurs.

Facteur de risque de l’adénocarcinome


Endobrachyœsophage (EBO) ou œsophage de Barrett • L’adénocarci-
nome œsophagien complique en général un EBO dans la genèse duquel le rôle

152 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

du RGO acide est prépondérant. Le taux de dégénérescence des EBO est diffi-
cile à déterminer (maximum 10 %). Sur le plan épidémiologique, ces adéno-
carcinomes sur EBO sont associés de façon évidente à la surcharge pondérale
laquelle augmente drastiquement dans tous les pays occidentaux.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Carcinome épidermoïde
Classiquement, les cancers de l’œsophage sont des tumeurs épithéliales à type
de carcinomes épidermoïdes plus ou moins différenciés dans plus de 80 % des
cas, tout au moins en France, siégeant dans 10 % des cas au niveau du tiers
supérieur, 40 % dans le tiers moyen et 50 % dans le tiers inférieur.

Adénocarcinome
Les adénocarcinomes, plus rares, sont localisés dans le tiers inférieur et peuvent
parfois être l’extension œsophagienne d’une tumeur gastrique haute ou cardiale.
Leur incidence est en nette augmentation.

◗ Évolution naturelle
L’extension du cancer œsophagien se fait selon plusieurs modalités.

Extension ganglionnaire
C’est le premier mode d’extension ; elle est très fréquente même dans les can-
cers superficiels. Elle conditionne le pronostic. Elle se fait dans le médiastin puis
dans les régions voisines : cervicales et cœliaques.

Extension locale
Elle intéresse les organes du médiastin et varie en fonction de la topographie
de la tumeur :
– les cancers des deux tiers supérieurs menacent l’axe trachéobronchique
(allant jusqu’à la fistule dans environ 5 % des cas). Ils peuvent égale-
ment atteindre les nerfs récurrents (surtout le gauche), infiltrer l’aorte et
la veine azygos ;
– les cancers du tiers inférieur peuvent s’étendre vers le péricarde, les plè-
vres, le diaphragme, l’aorte descendante.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Extension métastatique
Elle se fait vers le foie principalement, les poumons, les os…

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Dysphagie
La présentation typique est celle d’un homme de 55 à 65 ans, alcoolo-tabagi-
que, se plaignant d’une dysphagie progressive, aux solides puis aux liquides,
responsable d’un amaigrissement parfois important. Il peut s’y associer des
régurgitations, des douleurs thoraciques dorsales…

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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Autres signes
D’autres signes peuvent être retrouvés :
– dysphonie par paralysie vocale, surtout à gauche, témoignant d’un enva-
hissement médiastinal important ;
– toux à la déglutition traduisant soit des fausses routes soit une fistule œso-
trachéale, avec souvent pneumopathie déclive de déglutition surajoutée ;
– hématémèse ou hémoptysie, parfois gravissimes ;
– syndrome de Claude Bernard-Horner par lésion du sympathique cervical,
compression cave ou péricardite… ;
– hypercalcémie dans le cadre d’un syndrome paranéoplasique, anorexie
complète, découverte d’une adénopathie cervicale basse palpable…

◗ Méthodes du diagnostic
Le diagnostic repose sur la fibroscopie avec biopsies. Elle visualise directement
la lésion et permet de topographier son pôle supérieur (par mesure de la dis-
tance la séparant des arcades dentaires ou dans les lésions très haut situées :
par rapport à la bouche de Killian) et, si la sténose est franchissable, sa hauteur.
Elle doit rechercher un ou des nodules de perméation ou un foyer de dysplasie
au voisinage de la tumeur :
– dans les formes évoluées, l’aspect est généralement très caractéristique :
ulcération plus ou moins anfractueuse à fond blanchâtre entourée d’un
bourrelet irrégulier dur au contact de la pince, lésion végétante irrégulière
friable et hémorragique obstruant plus ou moins la lumière ou rétrécis-
sement infranchissable ;
– les lésions limitées sont de diagnostic plus difficile mais doivent être bien
connues car elles permettent le diagnostic au stade de cancer non inva-
sif, seule forme susceptible de guérir. Il peut s’agir d’une plage de
muqueuse discrètement surélevée ou au contraire érodée, d’un simple
dépoli avec changement de coloration et de brillance de la muqueuse,
ou d’un petit nodule.

◗ Diagnostics différentiels
Toute dysphagie doit faire rechercher une lésion organique de l’œsophage et
en premier lieu un cancer œsophagien.
Le diagnostic différentiel peut se discuter avec une œsophagite devant une
forme ulcérée ou avec un exceptionnel autre type de tumeur maligne (méla-
nome, sarcome, tumeur à petites cellules…) ou bénigne (léiomyome).

◗ Évaluation préthérapeutique
◗ Bilan
La recherche de l’extension tumorale se fait :
– vers les aires ganglionnaires médiastinales, cervicales et abdominales ;
– vers les organes médiastinaux de voisinage ;
– vers les sites métastatiques les plus fréquents, à savoir le foie et les pou-
mons.
De ce fait, il est classique de réaliser, au-delà de l’examen clinique général, un
transit œsophagien opaque (avec un produit hydrosoluble en cas de doute sur
une fistule), surtout lorsque la tumeur n’a pas pu être franchie par l’endoscope,

154 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

permettant de bien topographier la tumeur en précisant en particulier sa hauteur


et ses extrémités (utile au chirurgien) (fig. 8.1).
Une endoscopie trachéobronchique et une pharyngo-laryngoscopie (examen
ORL) sont indispensables dans l’éventualité d’une atteinte de voisinage ou
d’une deuxième tumeur concomitante (mêmes facteurs de risque).
Une tomodensitométrie thoracique permet de mettre en évidence d’éventuelles
adénopathies médiastinales (fig. 8.2). Cet examen comporte alors souvent un
temps abdominal supérieur à la recherche de localisations ganglionnaires méso-
cœliaques et/ou de métastases hépatiques. Lors de l’exploration médiastinale,
l’examen s’attache à visualiser la persistance ou l’absence de liseré graisseux
entre la tumeur et les organes de voisinage, la disparition de ces liserés pouvant
témoigner d’une extension tumorale. Si la tomodensitométrie n’est pas réalisée,
le foie sera exploré par échographie.
Parfois, lorsque l’évaluation de l’envahissement pariétal et ganglionnaire doit être
plus précise, une écho-endoscopie est utile.
L’évaluation biologique doit être limitée aux constantes standards, en particulier
hépatiques, sans omettre la calcémie ni l’évaluation de la dénutrition éventuelle.
Enfin, une exploration fonctionnelle respiratoire est nécessaire à l’évaluation
préopératoire.

➤ Fig. 8.1. Transit œsophagien avec produit de contraste hydrosoluble montrant une sténose du tiers
moyen (hauteur 2 vertèbres) avec dilatation sus-jacente. ➤

➤ Fig. 8.2. Coupe tomodensitométrique en regard de la carène bronchique montrant une tumeur œso-
phagienne à extension exoluminale médiastinale notamment du côté gauche. ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Classification (tableau 8.XIV)

Tableau 8.XIV. Classification TNM des cancers de l’œsophage (UICC, 1997)


Tis Carcinome in situ
pT1 Tumeur envahissant la muqueuse ou la sous-muqueuse
pT2 Tumeur envahissant la musculeuse sans la dépasser
pT3 Tumeur envahissant l’adventice
pT4 Tumeur envahissant les structures adjacentes
pN0 Pas d’invasion des ganglions régionaux
pN1 Invasion des ganglions lymphatiques régionaux :
– pour l’œsophage thoracique : GG médiastinaux et périgastriques à
l’exclusion des ganglions cœliaques
– pour l’œsophage cervical : GG cervicaux incluant les ganglions cervicaux (GG
médiatinaux : M1)
pM0 Pas de métastase à distance
pM1 Métastase à distance (y compris adénopathies cœliaques)

◗ Paramètres du pronostic
Classification TNM
Le pronostic repose essentiellement sur le stade tumoral (TNM).
Il faut cependant noter que même les bas stades peuvent être de pronostic
réservé : au sein des tumeurs T1 on distingue celles strictement limitées à la
muqueuse (ne dépassant pas la lamina propria) dont la survie est d’environ 70 %
et celles envahissant la sous-muqueuse dont la survie chute à 50 % (le risque
d’envahissement ganglionnaire étant présent dès l’invasion de la sous-muqueuse).
Outre l’existence de métastases, la présence d’un envahissement ganglionnaire
est un facteur discriminant de mauvais pronostic (globalement 45 % de survie
pour les stades N0 et moins de 20 % pour les N1).

Autres paramètres
La qualité de la résection chirurgicale est un élément majeur (résection com-
plète [R0] versus résection microscopiquement incomplète [dite R1] ou avec
résidus macroscopiques [dite R2]).
Le terrain est aussi un facteur important : il existe de nombreux cas de tumeurs
potentiellement résécables chez des patients non opérables du fait de comor-
bidités.

◗ Traitement
◗ Préambule : données anatomiques
L’œsophage naît en regard de C6, en dessous du cartilage cricoïde et se termine
dans l’estomac entre 23 et 30 cm plus bas. Ceci correspond, à partir des arca-
des dentaires servant de référence endoscopique, à des longueurs allant de 15
à 38-45 cm. Les cinq premiers centimètres sont représentés par l’œsophage
cervical, puis vient l’œsophage thoracique jusqu’au niveau de D10, enfin les
derniers centimètres sont intra-abdominaux (fig. 8.3 et 8.4).
Le trajet œsophagien est médiastinal postérieur, prévertébral, au contact intime
des gros vaisseaux et en avant de la trachée dans sa partie supérieure. L’œso-

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TUMEURS DIGESTIVES 8

phage est dépourvu de séreuse, toute extension transpariétale devenant direc-


tement intramédiastinale.
Le drainage lymphatique œsophagien commence dans la muqueuse pour se
poursuivre par un lacis lymphatique complexe dont les directions de drainage
sont en grande partie aléatoire vers les ganglions médiastinaux, cervicaux et
abdominaux supérieurs. Il n’y a donc pas de systématisation anatomique du
drainage, un cancer bas pouvant donner des ganglions cervicaux et inversement.
De plus, le lacis lymphatique est à l’origine de foyers tumoraux sous-muqueux
parfois sans continuité directe avec la tumeur primitive.

➤ Fig. 8.3. Anatomie schématique de l’œsophage. ➤

Trachée
Œsophage
cervical

Œsophage

Œsophage Vertèbres
thoracique

Diaphragme
Œsophage
abdominal Pédicule
hépatique

➤ Fig. 8.4. Anatomie topographique de l’œsophage. ➤

18 cm Défilé
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

cervico-thoracique

24 cm Bifurcation
trachéale

32 cm

40 cm Jonction
œsogastrique


157 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Prévention
La prévention du carcinome œsophagien passe principalement par l’éviction du
tabac et de l’alcool pour les formes épidermoïdes et par la surveillance des
endobrachyœsophages pour les adénocarcinomes.

◗ Méthodes thérapeutiques
Chirurgie
Il reste généralement admis que la chirurgie réglée est le moyen incontournable
pour obtenir la guérison d’un cancer œsophagien. Cependant une majorité de
malade sera récusée : 40 % en raison du terrain ; 25 % en raison de l’exten-
sion…
Il s’agit d’une chirurgie lourde dont le taux de mortalité, même si il a nettement
baissé au cours de ces quinze dernières années, est de 5 à 10 % avec un taux
de morbidité élevé (complications respiratoires, fistules…). En revanche, les
résultats carcinologiques globaux n’ont pas progressé, l’essentiel du pronostic
des formes « localisées » opérables résidant dans l’extension ganglionnaire.
Exérèse • Elle peut être totale ou subtotale, laissant en place un segment
d’œsophage. Une marge de 5 cm, par rapport à la tumeur, doit être respectée.
L’exérèse se fait par :
– thoracotomie droite (si l’exérèse doit être subtotale) ;
– ou thoracotomie gauche (pour les résections du tiers inférieur) ;
– ou sans thoracotomie, par voie trans-hiatale (pour des exérèses subtota-
les avec thoracotomie contre-indiquée).
Rétablissement de la continuité • Il peut se faire par différents types de
plasties :
– plastie gastrique (estomac tubulisé, ascensionné dans le médiastin, voire
dans le cou) ;
– plastie colique (en général côlon transverse).
Types d’intervention • On compte trois interventions principales :
– opération de Lewis-Santi : thoracotomie droite + voie abdominale, œso-
phagectomie subtotale (anastomose intrathoracique) ;
– opération de Akiyama : thoracotomie droite + voie abdominale, œsopha-
gectomie totale (anastomose cervicale) ;
– exérèse sans thoracotomie : abord abdominal et cervical, stripping de
l’œsophage.

Radiothérapie externe
Les carcinomes épidermoïdes de l’œsophage sont accessibles à l’irradiation
externe en terme de radiosensibilité relative. L’irradiation fait appel aux photons
de haute énergie des accélérateurs linéaires, délivrant une dose minimale de
50 Gy en cinq semaines au volume tumoral plus une marge de sécurité d’envi-
ron 5 cm de part et d’autre. Une surimpression de 10 à 20 Gy est ensuite déli-
vrée sur un volume réduit à la tumeur macroscopique initiale.
L’irradiation a été proposée à titre préopératoire (maximum 40 Gy) ou posto-
pératoire (maximum 45 à 50 Gy) mais n’a jamais démontré de supériorité en
terme de survie par rapport à la chirurgie seule au cours des études randomi-
sées. Elle n’a donc pas d’indication néo-adjuvante ou adjuvante.
Elle permet de pallier efficacement les symptômes (dysphagie, douleurs,
hémorragie) et trouve toute sa place dans le traitement palliatif symptomatique.

158 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

Curiethérapie
La technique endoluminale de curiethérapie à l’aide de sources d’iridium de
haut débit permet d’apporter une dose complémentaire au contact même de
la tumeur et peut être utilisée en indication palliative à titre de désobstruction.

Chimiothérapie
L’association cisplatine/5-FU (en perfusion continue) a permis d’obtenir des taux
de réponses de 30 à 40 % dans les formes localement avancées ou métastati-
ques, cependant sans amélioration nette des taux de guérison. Elle n’est pas clai-
rement indiquée dans le traitement palliatif des formes non chirurgicales.
De même, la chimiothérapie adjuvante ou néo-adjuvante n’a pas fait la preuve
de son efficacité en terme de survie. Elle n’est donc pas indiquée en complé-
ment à la chirurgie.

Traitements combinés : radiochimiothérapie concomitante


ou séquentielle
L’orientation thérapeutique actuelle privilégie les associations radiothérapie-chi-
miothérapie qui s’avèrent nettement supérieures à la radiothérapie seule ou à
la chimiothérapie seule. La combinaison de la chimio- et de la radiothérapie est
le plus souvent de façon « concomitante » (40 à 50 Gy en cinq semaines et
deux cycles de chimiothérapie par 5-FU/cisplatine la première et la dernière
semaine de l’irradiation). La morbidité et la mortalité sont augmentées par rap-
port aux traitements non combinés.
Ce type de traitement permet d’obtenir environ 25 % de pièces opératoires
stérilisées lors de l’intervention au prix d’une augmentation sensible de la mor-
bidité. Les patients « bons répondeurs » présentent alors une survie de l’ordre
de 60 % à 2 ans… Cependant, actuellement ce type de traitement n’a pas
démontré un bénéfice de survie en situation néo-adjuvante (par rapport à la
chirurgie seule) ; des études restent en cours.
Son efficacité relative et les faibles résultats de la chirurgie d’exérèse, surtout
pour les stades avancés, laissent penser que la radiochimiothérapie pourrait être
une alternative à la chirurgie. Dans cette indication aucune étude ne l’a directe-
ment comparée à la chirurgie, mais les taux de survie paraissent similaires. Ainsi,
elle s’est imposée comme une option thérapeutique au moins dans les stades
locorégionaux les plus avancés.
Il faut noter que pour les adénocarcinomes les traitements cytotoxiques sem-
blent avoir la même efficacité que pour les formes épidermoïdes.

◗ Stratégie
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Cancers en phase locorégionale


Tumeurs de petit volume (T1-2, N0-1) • La chirurgie d’exérèse reste le trai-
tement standard, une radiochimiothérapie n’étant proposée qu’en cas non opéra-
bilité du malade (à condition que l’état général reste correct : Karnovsky > 50 %).
Cas particulier des tumeurs localisées sur l’œsophage cervical • Les can-
cers de cette zone se présentent autant comme des maladies cervicales que
thoraciques. Une extension laryngotrachéale est fréquente (35 %), l’intervention
de base consistant en une pharyngo-œsophagectomie circulaire avec laryngec-
tomie totale. Le rétablissement de la continuité peut se faire par divers moyens
techniques. L’application à cette topographie des stratégies thérapeutiques com-
binées (radiochimiothérapie) est tout à fait licite.
Tumeurs volumineuses (T3, N0-1) • Ces tumeurs, bien que résécables,
compte tenu de la médiocrité des résultats de la chirurgie et de l’efficacité relative

159 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

de la radiochimiothérapie, cette dernière peut être préférée. Les deux attitudes


restent cependant des options thérapeutiques possibles. La combinaison des
deux traitements n’est pas justifiée hors essai thérapeutique.
Tumeurs avancées (T4, N0-1) • Pour les tumeurs débordant de l’œsophage
et envahissant un organe de voisinage, on peut évaluer, en fonction du terrain,
l’intérêt d’une radiochimiothérapie qui est cependant un traitement ambitieux
dans ce contexte à très mauvais pronostic. Le traitement symptomatique peut
alors primer. En cas de fistule, une prothèse œsophagienne et/ou trachéale sera
le plus souvent indispensable.

Cancers métastatiques
Le traitement repose sur la prise en charge symptomatique avec au premier
plan la dysphagie (et la dénutrition secondaire à la dysphagie). Les différents
moyens thérapeutiques utiles sont :
– la radiothérapie, voire plus rarement la radiochimiothérapie ;
– les traitements endoscopiques : mise en place de prothèse œsopha-
gienne, destruction locale au laser ;
– la mise en place de gastrostomie ou de jéjunostomie d’alimentation.

◗ Surveillance

◗ Résultats
Les résultats (tableau 8.XV) sont globalement médiocres, même pour les
tumeurs de faibles stades.

Tableau 8.XV. Survie à 5 ans des cancers de l’œsophage en fonction du


stade initial
Stade tumoral Survie à 5 ans
Stade I (Tis ou T1 N0) 70 à 95 %
Stade II (T2 N0 ou T1-2 N0) 15 à 30 %
Stade III (T3 N0 ou T3 N1) 5 à 15 %
Stade IV (M1) 0à3%
Survie globale 5 à 20 %

◗ Suivi des patients


Buts
L’intérêt du suivi des malades est :
– détecter un deuxième cancer épidémiologiquement lié (cancer ORL sur-
tout) et potentiellement curable ;
– corriger l’état nutritionnel.
En revanche, il n’y a pas d’intérêt en terme de survie à rechercher une récidive
tumorale du cancer œsophagien.

Modalités
Le suivi des patients se limite donc a :
– l’examen clinique ;

160 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

– l’examen ORL ;
– l’évaluation nutritionnelle.
Les autres examens paracliniques ne sont pas formellement indiqués, la sur-
veillance restant une option.

Points clés
• Épidémiologie : le cancer de l’œsophage est peu fréquent. Pour sa forme la plus
fréquente (carcinome épidermoïde), il est essentiellement lié à la consommation
alcoolo-tabagique et son incidence est en baisse ; alors que pour sa forme mino-
ritaire (10 à 20 % d’adénocarcinomes), il est lié à l’endobrachyœsophage
(conséquence d’un reflux) et son incidence est en forte hausse.
• Diagnostic : le symptôme d’appel typique et le plus fréquent est la dysphagie
(toute dysphagie doit faire rechercher un cancer œsophagien).
• Bilan d’extension : le bilan préthérapeutique comporte une évaluation clinique et
nutritionnelle. Un cancer ORL doit être systématiquement recherché (associé dans
10 à 15 % des cas de carcinomes épidermoïdes). De même, des explorations res-
piratoires sont indiquées (EFR et fibroscopie trachéobronchique). L’évaluation de
l’extension locorégionale repose sur le scanner thoracique, voire l’écho-endos-
copie. La recherche de métastases peut se limiter à l’échographie hépatique bien
que le scanner soit souvent prolongé par des coupes abdominales.
• Histologie et pronostic : la forme anatomopathologique la plus fréquente est le
carcinome épidermoïde (80 %), localisé principalement dans l’œsophage thora-
cique et cervical. Les adénocarcinomes représentent environ 20 % des cancers
œsophagiens, ils se développent sur un endobrachyœsophage et se situent dans
le tiers inférieur. Le pronostic est globalement mauvais sauf pour les formes très
superficielles sans envahissement ganglionnaire.
• Traitement des formes non métastatiques : le traitement repose soit sur la chirurgie
d’exérèse (qui reste le standard pour les stades limités) soit sur la radiochimiothé-
rapie concomitante. Le type de chirurgie varie en fonction de la topographie sur
l’œsophage et peut nécessiter une thoracotomie ; malgré les progrès, elle reste un
geste morbide. La radiochimiothérapie est aussi source de morbidité. La combi-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

naison « radiochimiothérapie concomitante + chirurgie » n’est pas indiquée en


dehors d’essais thérapeutiques.
• Traitement des formes métastatiques : il repose sur la prise en charge symptoma-
tique et notamment le contrôle de la dysphagie par des moyens endoscopiques
ou par la radiothérapie. La chimiothérapie palliative n’a pas démontré d’effet
bénéfique.
• Surveillance : la surveillance doit rechercher un cancer ORL (même facteurs de ris-
ques) et évaluer l’état nutritionnel des patients. La recherche d’une récidive
tumorale n’est pas utile car son diagnostic précoce ne permet pas d’envisager de
traitement utile susceptible d’améliorer la survie ; seule une prise en charge des
symptômes sera réalisée.


161 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ TUMEURS DU PANCRÉAS1
R. GUIMBAUD

Les cancers pancréatiques constituent l’une des formes les plus graves de can-
cers digestifs, en partie en raison de leur diagnostic régulièrement tardif dans
une zone initialement peu symptomatique et d’accès clinique difficile.

◗ Incidence
L’incidence est voisine de 5 à 10/100 000 avec des variations ethno-géogra-
phiques nettes.
En France, on recense environ 3 500 nouveaux cas par an (soit 1,3 % de
l’ensemble des cancers) ; ce taux est cependant très probablement sous estimé
et se situe vraisemblablement à plus de 5 000 nouveaux cas par an. La fré-
quence globale semble en augmentation modérée.

◗ Âge, sexe
La fréquence du cancer du pancréas augmente avec l’âge, la médiane de sur-
venue étant proche de 70 ans avec une légère prédominance masculine de
l’ordre de 1,5/1.

◗ Mortalité
Rarement curables, les tumeurs pancréatiques sont responsables d’environ
6 300 décès par an (soit 4,5 % des décès par cancer) en France.

◗ Facteurs de risque
Bien que de multiples facteurs alimentaires ou environnementaux aient été
incriminés dans la survenue des cancers pancréatiques (consommation impor-
tante de café, alcoolisme chronique…), les seuls éléments réellement identifiés
comme facteurs de risque (tabac, diabète, pancréatite chronique) n’augmentent
que modérément le risque de cancer du pancréas et ne rendent compte que
d’une faible proportion de l’ensemble des cas.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Forme typique (adénocarcinome)
Les cancers pancréatiques les plus fréquents sont développés à partir du pan-
créas exocrine (95 %) et plus particulièrement de l’épithélium glandulaire des
canaux excréteurs : ce sont des adénocarcinomes. Environ deux tiers de ces
tumeurs canalaires sont situées dans la tête pancréatique.
Certaines formes kystiques proviennent de la dégénérescence de tumeurs béni-
gnes kystiques : les cystadénomes mucineux.

Autres formes
Carcinomes indifférenciés • Il existe également des tumeurs rares, d’origine
neurectodermique, prenant la forme d’épithéliomas anaplasiques à petites cel-

1. Item n° 155. Tumeurs du pancréas.


162 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

lules voisins de ceux rencontrés dans la muqueuse bronchique. Ces formes sont
très évolutives et métastatiques.
Tumeurs endocrines • Les cellules endocrines présentes dans le pancréas
(îlots de Langherans) peuvent aussi être à l’origine de tumeurs. Ces « tumeurs
endocrines » peuvent être bénignes ou malignes. Les critères de malignité ne
sont souvent déterminés que par l’évolution métastatique de ces tumeurs
(métastases ganglionnaires ou viscérales), l’histologie ne permettant pas d’affir-
mer la malignité à elle seule pour tous les cas. Certaines d’entre elles s’intègrent
dans un tableau plus vaste de maladies neuro-endocrines multiples (NEM 1
et 2). Les caractéristiques de ce type de tumeurs sont :
– pour les tumeurs malignes : leur profil évolutif relativement lent (certains mala-
des peuvent vivre plus de 10 ans avec une maladie métastatique, le taux de
survie des patients métastatiques étant cependant de 50 % à 5 ans) ;
– pour les tumeurs malignes ou bénignes : leur capacité à sécréter des
hormones en abondance (type d’hormone en rapport avec le type cel-
lulaire endocrine) responsables de syndromes cliniques pouvant mettre
en jeu le pronostic vital. La forme tumorale la plus fréquente est l’insuli-
nome, mais il existe des gastrinomes (responsables du syndrome de Zol-
linger-Ellison), des glucagonomes, des vipomes responsables d’une
diarrhée aqueuse hypokaliémique achlorhydrique. Les tumeurs endocri-
nes ne sont cependant pas toutes sécrétantes.

◗ Évolution naturelle
La grande richesse du réseau veinolymphatique du pancréas (fig. 8.5) explique
la précocité de l’extension régionale (qui peut également concerner le duodé-
num, l’estomac, le tronc porte) et de l’extension métastatique à distance.

➤ Fig. 8.5. Anatomie schématique du pancréas. ➤

Veine porte
Aorte

Tête
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Queue

Veine mésentrique supérieure Corps

L’extension se fait :
– pour les tumeurs de la tête : vers les ganglions rétroduodénaux-pancréa-
tiques, puis vers les pédicules hépatique, mésentérique et cœliaque ;
– pour les tumeurs du corps et de la queue : vers le plexus cœliaque, le
pédicule splénique et le péritoine.
Les métastases sont fréquentes (présente une fois sur deux au moment du
diagnostic), principalement hépatiques.

163 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Les symptômes initiaux des cancers pancréatiques sont insidieux voire absents,
la maladie pouvant se révéler au stade d’extension métastatique. Il est fréquem-
ment retrouvé un inconfort épigastrique avec altération de l’état général et amai-
grissement rapide et profond.
Les symptômes peuvent varier en fonction de la localisation de la tumeur dans
le pancréas :
– les cancers céphaliques s’accompagnent classiquement d’un ictère obs-
tructif révélateur (obstruction du cholédoque dans sa portion
intrapancréatique) : tableau d’ictère « nu » (sans fièvre, ni douleur…) ;
– les cancers corporéocaudaux s’accompagnent de douleurs splanchniques
à irradiation dorsale habituellement améliorées par la flexion en avant du
tronc (syndrome pancréatico-solaire témoignant de l’invasion du plexus) ;
– les localisations au niveau de l’ampoule de Vater peuvent être révélées
par une hémorragie digestive.
Enfin, certains patients présentent de façon inaugurale une pathologie phlébiti-
que pouvant prendre la forme d’une thrombophlébite migratrice de Trousseau
siégeant souvent aux membres supérieurs. Parfois une aggravation ou l’appari-
tion d’un diabète peut être le signe révélateur.
L’examen physique peut parfois retrouver une masse épigastrique palpable, une
hépatomégalie métastatique ou une adénopathie sus-claviculaire.

◗ Méthodes du diagnostic
Le tableau clinique est souvent très évocateur de cancer du pancréas :
– masse pancréatique avec douleurs splanchniques caractéristiques ;
– ou bien ictère nu en fonction de la localisation de la masse pancréatique ;
– avec une altération plus ou moins prononcée de l’état général.
Le diagnostic sera confirmé par biopsie de la masse pancréatique. Cependant, les
biopsies pancréatiques ne sont pas toujours de réalisation aisée compte tenu de
la situation anatomique du pancréas, de sa proximité avec les gros vaisseaux. Ainsi,
devant un tableau où il existe une tumeur pancréatique résécable chez un malade
opérable, l’exérèse chirurgicale est souvent réalisée sans biopsie préalable et la
nature tumorale est confirmée par l’examen anatomopathologique de la pièce
opératoire. En dehors de cette situation : une biopsie guidée est réalisée sous
échographie ou scanner ou sous écho-endoscopie quand ce dernier examen est
indiqué. Dans le cas où il existe des métastases plus faciles d’accès (localisation
hépatique le plus souvent), ce sont elles qui seront biopsiées.

◗ Évaluation préthérapeutique
◗ Bilan
Le bilan préthérapeutique doit évaluer :
– l’état général du patient : opérabilité, état nutritionnel, symptômes… ;
– la résécabilité de la tumeur.
Outre le bilan clinique, biologique (bilan général dont hépatique, glycémie et
marqueur CA 19-9) et nutritionnel, les examens complémentaires utiles sont
essentiellement radiologiques :

164 ◗
10_Chap8 Page 165 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DIGESTIVES 8

– échographie abdominale : souvent réalisée en première intention devant


les symptômes révélateurs. Elle peut retrouver une masse pancréatique,
une éventuelle dilatation des voies biliaires, des localisations secondaires
hépatiques ;
– tomodensitométrie abdominale : c’est l’examen de référence pour
l’appréciation de la résécabilité. Elle permet notamment d’apprécier les
rapports de la tumeur avec les organes de voisinage et en particulier les
axes vasculaires mésentérique et porte. Elle visualise les éventuelles
métastases ganglionnaires et hépatiques, et peut guider les biopsies ;
– radiographie thoracique : à la recherche de métastases pulmonaires.
Et de façon non systématique :
– l’écho-endoscopie (réalisée sous anesthésie) : elle permet une analyse
détaillée de l’extension tumorale locale et des ganglions péri-pancréati-
ques. Elle peut être justifiée afin de préciser les critères de résécabilité et
permet la réalisation de biopsies guidées ;
– l’endoscopie rétrograde du canal de Wirsung avec cholangio-pancréato-
graphie (sous anesthésie) : elle peut être utile au diagnostic de cancer
ampullaire ou de sténose canalaire. Elle permet la mise en place d’une
endoprothèse biliaire en cas de nécessité de drainage biliaire.
Cependant, malgré la performance des examens préopératoires, la découverte
de métastases, d’une carcinose péritonéale ou d’une extension locorégionale
avancée est fréquente au cours de l’exploration chirurgicale. Ainsi, l’exploration
complète de la cavité abdominale lors du premier temps opératoire fait partie
intégrante de l’évaluation. Une cœlioscopie exploratrice peut faire partie du bilan
préthérapeutique dans le but d’éviter éventuellement une laparotomie inutile.

◗ Classification

Tableau 8.XVI. Classification TNM des cancers pancréatiques


T1 Tumeur limitée au pancréas
T1a < 2 cm
T1b > 2 cm
T2 Tumeur étendue au duodénum, à la voie biliaire principale ou aux tissus
péripancréatiques
T3 Tumeur étendue à l’estomac, à la rate, au côlon ou aux gros vaisseaux
voisins
N0 Pas d’adénopathie régionale
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

N1 Adénopathie(s) régionale(s)

◗ Paramètres du pronostic
Le principal paramètre pronostique est le type histologique : les adénocarcino-
mes pancréatiques sont de très mauvais pronostic alors que les tumeurs endo-
crines du pancréas sont de relativement bon pronostic.
Pour les adénocarcinomes pancréatiques, le pronostic repose essentiellement
sur le stade tumoral. Cependant, même pour les stades de début, le pronostic
est mauvais et la guérison reste exceptionnelle. La médiane de survie des for-
mes métastatiques est de trois à six mois, celle des formes locorégionales avan-
cées non métastatiques est de six à neuf mois, celle des formes limitées est
d’un an environ…

165 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Traitement
Tout cancer du pancréas pose le problème d’une indication opératoire, la chi-
rurgie restant le moyen unique d’obtenir une guérison définitive même s’il s’agit
d’une éventualité rare. Les autres traitements, radiothérapiques et chimiothéra-
piques, ne jouent qu’un rôle mineur, soit adjuvant soit palliatif.

◗ Prévention
En l’absence de facteurs de risque clairement identifiés et de moyen efficace de
diagnostic précoce la prévention du cancer du pancréas et le dépistage ne sont
actuellement pas possibles.

◗ Méthodes thérapeutiques
Préambule : données anatomiques
La situation anatomique du pancréas est particulière : postérieure, rétropérito-
néale, immédiatement en avant des gros axes vasculaires, cave et aortique, et
de leurs branches mésentéricocæliaques. Il possède par ailleurs un riche réseau
de drainage veineux et lymphatique de topographie commune. Enfin, sa vascu-
larisation artérielle conditionne les possibilités de la chirurgie pancréatique, avec
de fréquentes variations anatomiques individuelles.

Chirurgie
Chirurgie curative • Elle n’est possible que chez 10 % à 20 % des malades
au maximum et, même si elle représente le seul traitement à visée curative, ses
résultats sont décevants (cf. infra).
La chirurgie à visée curative consiste en une pancréatectomie dont le type est
adapté à la localisation de la tumeur pancréatique :
– duodénopancréatectomie céphalique pour les tumeurs de la tête et de
l’isthme du pancréas ;
– splénopancréatectomie gauche pour les tumeurs du corps et de la queue
du pancréas ;
– la pancréatectomie totale voire régionale a été abandonnée (du fait des
taux très élevés de complications et des mauvais résultats carcinologiques).
Chirurgie palliative • En cas d’impossibilité de résection en peropératoire, il
est possible de réaliser des interventions palliatives :
– dérivation biliaire par anastomose hépaticojéjunale en cas d’ictère par
obstruction biliaire ;
– dérivation digestive par anastomose gastrojéjunale en cas d’obstruction
duodénale.
Parfois, le geste se limite à la mise en place d’une prothèse biliaire par intuba-
tion transtumorale, à l’alcoolisation du plexus cœliaque à visée antalgique en cas
de syndrome solaire…
Complications • Toutes ces chirurgies, mêmes palliatives, comportent une
morbidité élevée (20 %) et un taux de mortalité non négligeable bien qu’en
forte baisse au cours de ces dernières années (5 %), en partie liés au mauvais
état général initial des patients.

Radiothérapie externe
Adjuvante • Les mauvais résultats de la chirurgie d’exérèse ont conduit à envi-
sager une irradiation plus ou moins combinée à la chimiothérapie postopéra-
toire ou préopératoire (40 à 50 Gy + 5-FU IV). Les résultats ont été

166 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

encourageants chez des petits groupes de malades très sélectionnés. Ces


modalités thérapeutiques ne sont cependant pas validées par des études ran-
domisées et chez un plus grand nombre de patients. Elles ne constituent donc
pas à l’heure actuelle une option thérapeutique en dehors d’essais cliniques.
Peropératoire • Au cours de l’intervention, il a été proposé d’améliorer le
contrôle local des maladies réséquables en réalisant soit une curiethérapie des
bords d’exérèse soit une irradiation peropératoire du lit tumoral. Il semble exister là
aussi une amélioration de la survie pour ces observations privilégiées. Outre le fait
qu’il s’agit d’une technique lourde et très peu diffusée, les mêmes remarques que
précédemment doivent être faites (option thérapeutique non standard).
Palliative • Enfin, l’irradiation externe est proposée à titre antalgique lors des
syndromes compressifs cœliaques. Couplée aux techniques modernes d’algolo-
gie (infiltration cœliaque, cathéter intrathécal et réservoir à morphine), elle per-
met une sédation correcte pendant le temps de la survie.

Chimiothérapie
Le cancer du pancréas est très peu chimiosensible. Les taux de réponse tumo-
rale sont faibles, quelles que soient les associations étudiées, alors que les toxi-
cités peuvent être fréquentes et invalidantes surtout chez ces patients
présentant souvent un état général précaire.
La chimiothérapie adjuvante n’a pas fait la preuve de son efficacité.
À titre palliatif, la chimiothérapie n’a pas démontré d’effet en terme d’améliora-
tion de la survie. En revanche, chez des patients dont l’état général n’est pas
trop altéré, elle peut induire un bénéfice clinique et, par là, une amélioration de
la qualité de vie.

◗ Stratégie
Cancers en phase locorégionale
Cancer résécable • Le traitement repose sur la chirurgie seule. Rappelons
que, malgré les critères de résécabilité préopératoire, il n’est pas rare de
constater une non résécabilité en peropératoire et, même si la tumeur semble
résécable et est réséquée, de constater sur l’analyse de la pièce opératoire que
la résection n’a pas été complète…
Aucun traitement adjuvant pré- ou postopératoire n’a fait la preuve de son effi-
cacité. Des essais étudiant la radiochimiothérapie ou la chimiothérapie seule
sont en cours.
Cancer non résécable • Le traitement est identique à celui des formes métas-
tatiques.
Certains proposent, chez les patients en bon état général, une radiochimiothé-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

rapie focalisée sur l’aire pancréatique. Il s’agit cependant d’un traitement non
curatif.

Cancers métastatiques
Le traitement repose sur la prise en charge des symptômes et l’objectif est la
qualité de vie. Dans ce cadre une monochimiothéraopie peut être indiquée chez
certains patients demandeurs sans altération profonde de l’état général.
La prise en charge des symptômes peut faire appel à :
– l’infiltration ou alcoolisation du plexus solaire, la prescription d’antalgiques
majeurs, la radiothérapie pour le contrôle des douleurs ;
– la mise en place de prothèse ou la chirurgie digestive pour la levée d’obs-
tacles biliaire ou digestif ;
– le soutien psychologique et nutritionnel…

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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Surveillance
◗ Résultats
Les résultats du traitement du cancer du pancréas (pour sa forme classique, l’adé-
nocarcinome) sont mauvais ; même lorsqu’il s’agit des traitements à visée curative.
Tous stades confondus la survie à 5 ans est inférieure à 3 % ; même pour le
petit sous-groupe des malades opérés à visée curative la survie à 5 ans est infé-
rieure à 10 % (de l’ordre de 8 %). Cependant, ce sont ces derniers patients qui
ont la plus longue survie (18 mois à 2 ans en moyenne alors qu’elle n’est que
de 3 à 6 mois pour les formes métastatiques).

◗ Suivi des patients


La recherche d’une récidive tumorale n’a aucune utilité dans le suivi des adé-
nocarcinomes pancréatiques : elle ne débouche sur aucun traitement efficace.
Seule la prise en charge des symptômes importe.
Le suivi des patients doit donc se limiter à la recherche des complications de la
chirurgie (Dumping syndrome, insuffisance pancréatique exocrine, dénutrition)
et à la recherche de symptômes liés à une récidive.

Points clés
• Épidémiologie : la fréquence du cancer pancréatique est très vraisemblablement
largement sous-estimée. Il se situe au quatrième rang des cancers digestifs.
• Diagnostic : le diagnostic est presque toujours tardif. Les formes céphaliques se
révèlent le plus souvent par un ictère nu, les formes corporéocaudéales par des
douleurs souvent intenses et transfixiantes. Une altération de l’état général et un
amaigrissement important sont fréquents.
• Histologie et pronostic : le cancer pancréatique est classiquement un adénocarci-
nome développé à partir des cellules canalaires du pancréas exocrine (95 %). Son
pronostic est mauvais. Parmi les autres types tumoraux, les tumeurs endocrines
développées à partir des cellules du pancréas endocrines sont susceptibles de pro-
voquer des syndromes hormonaux et sont de pronostic bien meilleur que les
adénocarcinomes.
• Bilan d’extension : le bilan préthérapeutique évalue l’état général du patient et son
opérabilité d’une part et le stade de la tumeur et sa résécabilité d’autre part. Outre
l’évaluation clinique, biologique et nutritionnelle, il repose sur l’échographie abdo-
minale et le scanner abdominal, voire l’écho-endoscopie. Malgré cela, l’exploration
peropératoire révèle souvent une extension locale ou générale non visualisée sur
le bilan préopératoire.
• Traitement des formes résécables : il repose sur la chirurgie d’exérèse sans autre
traitement adjuvant. Bien que ce soit le seul traitement à visée curative, l’exérèse
chirurgicale a des résultats décevants. De plus, elle ne s’adresse qu’à environ 10 %
de l’ensemble des malades (les autres étant non opérables ou ayant une tumeur
non résécable ou métastatique) et reste un geste lourd.


168 ◗
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TUMEURS DIGESTIVES 8

Points clés (suite)


• Traitement des formes non résécables ou métastatiques : il repose sur le traite-
ment des symptômes et peut faire appel aux opiacés, aux traitements
endoscopiques… Aucun traitement spécifique n’a clairement fait la preuve d’un
allongement de la survie ; cependant, dans certains cas, la chimiothérapie permet
une amélioration de la qualité de vie.

◗ CANCERS DU CANAL ANAL N. DALY-SCHVEITZER

Les cancers du canal anal, en majorité des carcinomes épidermoïdes, ont fait
l’objet d’une transformation radicale de leur traitement au cours des dernières
décades allant de la résection chirurgicale à type d’amputation anorectale aux
méthodes conservatrices radiothérapiques ou radiochimiothérapiques.

◗ Épidémiologie et étiologie
◗ Épidémiologie
Représentant 3 à 5 % des cancers anorectaux, les carcinomes épidermoïdes du
canal anal surviennent dans 80 % des cas chez des patients de plus de 60 ans
avec un sex-ratio de 2-3/1 en faveur des femmes. Les cancers de la marge
anale sont en revanche plus fréquents chez les hommes.

◗ Étiologie
Il est maintenant admis que les rapports sexuels anaux sont un facteur de ris-
que, au moins chez l’homme. Par ailleurs, les infections à papillomavirus (HPV-6
et 11), l’existence de condylomes acuminés anaux sont des lésions associées
fréquentes dans la population à risque précédente. Les fistules anales chroni-
ques favorisent l’apparition d’adénocarcinomes mucineux anaux.

◗ Données anatomiques
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les cancers du canal anal sont à distinguer des cancers de la marge anale qui sont
en fait des cancers cutanés purs, situés dans une zone anopérinéale allant de la ligne
dentinée à 5 cm en périphérie. Les cancers anaux siègent dans la zone de jonction
cutanéomuqueuse située entre la marge anale et l’anneau anorectal (bord supérieur
du sphincter anal interne) c’est-à-dire sur une longueur d’environ 5 cm (fig. 8.6).
L’épithélium est d’abord malpighien stratifié, puis cuboïdal au regard des colonnes
rectales de Morgagni expliquant la possibilité de développement de carcinomes
transitionnels ou cloacogéniques. Les glandes anales situées profondément dans les
colonnes de Morgagni peuvent être à l’origine de rares adénocarcinomes mucineux.
Le drainage lymphatique de la région anale est particulièrement riche : si la
marge anale est de drainage purement inguinal interne, le canal se draine à la
fois dans les aires inguinales et dans les aires iliaques ou mésentériques infé-
rieures par l’intermédiaire des relais prérectaux puis des chaînes hémorroïdales
inférieure et moyenne.

169 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 8.6. Anatomie schématique du canal anal (coupe frontale). ➤

ÉPITHÉLIUM TRANSITIONNEL

Muscle releveur
de l’anus

Sphincter interne
Canal Ligne pectinée
anal
Sphincter externe

Marge
anale
ÉPITHÉLIUM MALPIGHIEN

L’évolution spontanée des cancers anaux se fait vers l’infiltration locale circonfé-
rentielle et infiltrante avec extension ganglionnaire fréquente ; le risque ganglion-
naire est de l’ordre de 30 % en moyenne, tant au niveau inguinal qu’iliaque,
bien qu’il soit quasi nul pour les petites tumeurs (< 2 cm) non infiltrantes.

◗ Diagnostic
◗ Diagnostic clinique
La symptomatologie des cancers anaux est la même que celle de la pathologie
bénigne locale, en particulier hémorroïdaire, ce qui explique la fréquence des
diagnostics tardifs : saignements, douleurs, sensation de corps étranger
intra-anal, prurit sont les symptômes les plus fréquents.
L’examen local est parfois difficile sans anesthésie et comporte un toucher rec-
tal, une anorectoscopie avec biopsies à la pince. L’examen est complété par la
palpation des creux inguinaux, de la partie basse du mésorectum accessible au
doigt, avec cytoponction en cas d’adénomégalie, d’un cliché thoracique, d’une
échographie hépatique et d’une tomodensitométrie pelvienne.

◗ Diagnostic anatomopathologique
Il existe plusieurs formes histologiques de cancers du canal anal (tableau 8.XVII),
mais la plus fréquente est représentée par les carcinomes épidermoïdes
(75 %) ; le sous-type basaloïde ou cloacogénique atteint 20 %.

Tableau 8.XVII. Formes anatomopathologiques des cancers anaux


Type Fréquence (%)
Carcinome épidermoïde 75
Sous-type basaloïde ou cloacogénique 20
Adénocarcinome 25
Indifférencié rare
Mélanome malin <5


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TUMEURS DIGESTIVES 8

◗ Diagnostic d’extension, classification (tableau 8.XVII)


Il est important de noter, au-delà du volume tumoral, l’étendue en surface par
rapport à la circonférence anale, la hauteur dans le sens craniocaudal et surtout
l’aspect macroscopique exophytique superficiel ou ulcéronodulaire infiltrant.

Tableau 8.XVIII. Classification TNM des carcinomes du canal anal


T1 Tumeur < 2 cm
T2 Tumeur > 2 cm et < 5 cm
T3 Tumeur > 5 cm
T4 Tumeur envahissant les organes de voisinage (urètre, vagin, prostate, vessie)
N0 Pas d’adénopathie régionale palpable
N1 Adénopathie palpable dans la gaine périrectale
N2 Adénopathie(s) métastatique(s) iliaque(s) et/ou inguinale(s) unilatérales
N3 Adénopathie(s) métastatique(s) iliaque(s) et/ou inguinale(s) bilatérales

◗ Principes de traitement et résultats


Pendant longtemps traités chirurgicalement soit par excision locale des petites
lésions soit par amputation anorectale des tumeurs plus volumineuses, les car-
cinomes épidermoïdes du canal anal ont progressivement fait l’objet de traite-
ments conservateurs non chirurgicaux d’abord radiothérapiques avec ou sans
curiethérapie, puis radiochimiothérapiques.
En effet, ces carcinomes témoignent d’une sensibilité particulière aux traite-
ments cytotoxiques, à la fois importante et d’expression clinique retardée (six à
huit semaines en général), leur situation anatomique les rendant accessibles à
une irradiation locale comme le réalise la curiethérapie interstitielle.

◗ Traitement de la tumeur primitive


Les petites lésions (T1 et T2 superficiels) sont traitées au mieux par une irra-
diation externe première (canal anal et aires ganglionnaires inguinopelvien-
nes) suivie six à huit semaines plus tard d’une curiethérapie interstitielle à
l’aide de fils d’iridium 192 traitant la totalité de la zone tumorale initiale ; il est
alors fréquent de constater que lors de la curiethérapie toute maladie macros-
copique clinique a disparu, les biopsies systématiques revenant souvent néga-
tives.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les lésions plus volumineuses (T2 infiltrant, T3) constituent théoriquement


des indications chirurgicales avec ou sans radiothérapie première. L’introduc-
tion d’associations simultanées radiochimiothérapiques (mitomycine ou cispla-
tine et 5-FU concommitants) permet aujourd’hui de proposer une attitude
conservatrice avec chirurgie de deuxième intention en cas d’échec. Les
tumeurs classées T4 sont des indications chirurgicales, souvent à type d’exen-
tération.
Les résultats obtenus avec cette approche thérapeutique sont :
– T1 et T2 superficiels : 70 à 80 % de survie sans maladie évolutive à
5 ans, avec un taux de complications justifiant une chirurgie seconde de
l’ordre de 10 % ;
– T3, 30 : 50 % de survie à 5 ans avec un taux de complications plus
élevé.

171 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Traitement des aires ganglionnaires


Les petites tumeurs N0 ont un risque ganglionnaire faible permettant d’exclure
les aires ganglionnaires du traitement initial à la condition d’un suivi régulier et
prolongé. Pour les tumeurs plus volumineuses, les patients N0 reçoivent une
irradiation prophylactique pelvienne et inguinale interne et moyenne lors de
l’irradiation précuriethérapique. Le taux d’échec est alors inférieur à 10 %.
Les patients présentant des adénopathies inguinales ou pelviennes synchrones
du diagnostic de la tumeur primitive ont en règle un très mauvais pronostic par
diffusion métastatique rapide.

◗ Formes particulières
◗ Carcinomes développés sur fistule anale chronique
Il s’agit alors souvent d’adénocarcinomes parfois mucineux, constituant alors une
indication chirurgicale. Les formes épidermoïdes bénéficient de l’association
radiochirurgicale mais avec un recours à la chirurgie plus fréquent que dans les
formes « spontanées ».

◗ Maladie de Bowen
L’excision locale constitue l’indication la plus fréquente pour les formes restées
superficielles. Si la maladie est infiltrante, elle est traitée comme une forme épi-
dermoïde.

◗ Maladie de Paget
Elle constitue souvent la traduction superficielle d’un adénocarcinome déve-
loppé à partir d’une glande péri-anale. S’il s’agit d’une forme isolée superficielle,
elle est traitée par excision simple.

◗ Mélanome malin
Il s’agit alors d’une indication chirurgicale avec les mêmes règles que celles
appliquées aux mélanomes cutanés (cf. chapitre 7).


172 ◗
11_Chap9 Page 173 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Cancers
bronchopulmonaires1 9
N. DALY-SCHVEITZER

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
◗ DIAGNOSTIC
◗ ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE
◗ TRAITEMENT

Les cancers bronchopulmonaires représentent près de 20 % des cancers mascu-


lins, environ 10 % chez la femme. Ils sont responsables d’un tiers des décès par
cancers chez l’homme (première cause de décès par cancer), de 20 % chez la
femme (troisième cause de décès par cancer), la survie globale restant faible de
l’ordre de 15 % à 5 ans, toutes formes et tous stades confondus. Seuls un tiers
des patients sont éligibles pour une chirurgie d’exérèse au moment du diagnostic.
À l’heure actuelle, les stratégies thérapeutiques adoptées se sont diversifiées en
fonction du type histologique et font appel à une démarche largement pluridis-
ciplinaire.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
Le tabagisme est le facteur de risque largement dominant des cancers broncho-
pulmonaires (CBP) avec une relation directe entre le niveau de risque et l’impor-
tance et l’ancienneté de la consommation de tabac. Au cours des vingt dernières
années, une diminution sensible du tabagisme masculin dans les pays dévelop-
pés a été constatée, même si l’incidence des CBP n’a pas baissé en raison du
délai d’apparition de ces maladies (75-80/100 000 par an). En revanche, dans
le même temps le taux d’intoxication tabagique chez les femmes a nettement
augmenté dans les mêmes pays, s’accompagnant d’une élévation progressive
de l’incidence des CBP dans ce groupe (25-30/100 000 par an).
L’âge moyen de survenue est de 60 ans, moins de 1 % des CBP survenant
avant 35 ans.
D’autres facteurs de risque sont reconnus dans la survenue des CBP :
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– l’asbestose augmente le risque de mésothéliome pleural, mais aussi de


CBP, en particulier en association avec le tabagisme ;
– la pollution atmosphérique est retenue comme facteur de risque comme
le démontrent les enquêtes d’épidémiologie géographique ;
– l’irradiation externe, essentiellement professionnelle (mineurs d’uranium
ou d’or) ;
– l’exposition à des métaux comme le nickel, l’argent, mais aussi le chrome,
le cadmium, le béryllium, le cobalt, le sélénium, a été reconnue carcino-
gène chez l’animal et fait partie des risques professionnels reconnus ;
– certains composés chimiques comme les chlorométhyléthers.

1. Item n° 157. Tumeurs du poumon, primitives et secondaires.


Pour la partie tumeurs secondaires du poumon, voir le chapitre 17 : Métastases et maladie métastasique.

173 ◗
11_Chap9 Page 174 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ DIAGNOSTIC
◗ Diagnostic clinique
Les symptômes initiaux sont extrêmement variés et peu spécifiques à type de
modifications de la symptomatologie bronchopulmonaire habituelle chez un
tabagique chronique : toux, douleurs thoraciques, expectoration colorée ou
hémoptoïque, dyspnée.
La symptomatologie peut être systématisée en fonction des différents modes
d’évolution :
– croissance endobronchique :
• toux,
• hémoptysie,
• wheezing,
• dyspnée,
• pneumopathie ou surinfections à répétition ;
– envahissement de structures périphériques :
• dyspnée « restrictive »,
• douleurs toux et épanchement lors d’une participation pleurale,
• douleur pariétale avec névralgie scapulobrachiale lors de tumeurs api-
cales (syndrome de Pancoast et Tobias) ;
– envahissement de structures médianes (adénopathies ou extension de
contiguïté) :
• dysphagie (œsophage),
• toux, dyspnée et stridor (trachée),
• dysphonie par paralysie récurentielle gauche,
• dyspnée par paralysie phrénique,
• syndrome de Claude Bernard-Horner par atteinte sympathique,
• syndrome cave supérieur,
• toux et dyspnée sévère d’une lymphangite carcinomateuse,
• fibrillation auriculaire, tamponnade lors d’une extension péricardique ;
– manifestations extrathoraciques :
• altération de l’état général : localisation métastatique « premier
symptôme » (squelette, cerveau, foie, surrénales), les cancers bron-
chopulmonaires étant les pourvoyeurs les plus fréquents de syndro-
mes métastatiques inauguraux,
• syndrome paranéoplasique : hippocratisme digital, ostéopathie hyper-
trophiante pneumique, syndrome de Schwartz-Bartter, endocrinopa-
thies diverses, neuropathie périphérique, polymyosite, sclérodermie,
phlébite…

◗ Diagnostic précoce
Les stratégies de diagnostic précoce sont peu performantes y compris dans les
groupes à risque : cytologie des crachats avec fibroscopie si anomalie, cliché
thoracique systématique, fibroscopie régulière avec brossage et lavage bronchi-
que, aucune de ces méthodes n’a permis de mettre en évidence une amélio-
ration pronostique lors de la découverte d’un CBP. De ce fait, la seule stratégie
recevable est celle de la prévention primaire par suppression des facteurs de
risque connus et en particulier du tabagisme.

174 ◗
11_Chap9 Page 175 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS BRONCHOPULMONAIRES 9

◗ Procédures diagnostiques complémentaires


◗ Radiographie thoracique
La réalisation de clichés thoraciques de face et de profil constitue le premier
temps indispensable des explorations complémentaires. Ils peuvent montrer :
– une lésion périphérique ;
– une hypertrophie hilaire de type ganglionnaire ;
– des signes indirects comme une atélectasie, un épanchement pleural.

◗ Endoscopie bronchique
Réalisée avec un fibroscope sous anesthésie locale pharyngolaryngée, elle
constitue l’examen clef permettant la visualisation directe de la tumeur, sa topo-
graphie bronchique exacte et sa biopsie. Elle est systématiquement couplée à
une aspiration bronchique aux fins d’examen cytologique. Dans plus de 80 %
des cas, le diagnostic histologique définitif est obtenu lors de l’endoscopie de
première intention. Quand le diagnostic de certitude n’a pas pu être obtenu par
ce moyen, d’autres explorations restent possibles :
– cytoponction et/ou biopsie transpariétale sous TDM pour les lésions
périphériques ;
– médiastinoscopie pour les formations tumorales médiastinales.

◗ Diagnostic histologique
Il existe quatre grands types histologiques de CBP : carcinome épidermoïde,
adénocarcinome, carcinome anaplasique à petites cellules et carcinome anapla-
sique à grandes cellules.

◗ Carcinome épidermoïde
Il s’agit de la forme classiquement la plus fréquente (25 à 30 %), développée
à partir d’un épithélium bronchique métaplasique et de topographie proximale
dans deux tiers des cas.

◗ Adénocarcinome
Son incidence est en augmentation puisqu’elle est aujourd’hui du même niveau
que celle de la forme épidermoïde voire supérieure (30 à 40 %). La topogra-
phie lésionnelle est souvent périphérique. Il existe une forme particulière d’adé-
nocarcinome, le carcinome bronchio-alvéolaire souvent de présentation diffuse,
parfois bilatérale.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Carcinome anaplasique à petites cellules


Cette forme particulière (20 à 25 %) constitue une entité à part entière compte
tenu de sa très grande évolutivité locale et métastatique, le taux de maladies limi-
tées au thorax lors du diagnostic ne dépassant pas 25 %. L’extension métastati-
que se fait vers les ganglions médiastinaux et abdominaux, le cerveau, l’os et la
moelle osseuse, le foie, les surrénales. Il existe plusieurs formes histologiques dif-
férentes dont celle dite « en grains d’avoine » sans incidence nette sur le pronostic.

◗ Carcinome à grandes cellules


Forme la moins fréquente (10 %), elle présente une évolution voisine de celles
des adénocarcinomes.

175 ◗
11_Chap9 Page 176 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ ÉVALUATION PRÉTHÉRAPEUTIQUE L’évaluation préthérapeutique est différente suivant l’objectif poursuivi et en par-
ticulier la perspective d’une chirurgie d’exérèse. Ainsi, les carcinomes anaplasi-
ques à petites cellules qui constituent a priori une contre-indication opératoire
du fait de leur très grande et précoce diffusion métastatique font l’objet d’une
évaluation différente des autres formes pour lesquelles la discussion chirurgicale
est primordiale.

◗ Carcinome anaplasique à petites cellules


L’évaluation préthérapeutique comporte :
– une tomodensitométrie thoracique qui a une place prépondérante faisant
la part entre tumeur solide et images indirectes (atélectasie, épanche-
ment pleural), recherchant des adénopathies médiastinales ; l’examen
est le plus souvent étendu à la cavité abdominale à la recherche d’adé-
nopathies rétropéritonéales, de localisations surrénaliennes ou hépati-
ques, ainsi qu’à l’encéphale, tant la fréquence des localisations cérébrales
à ce niveau est importante dans cette forme ;
– une scintigraphie osseuse ;
– une biopsie ostéomédullaire à la recherche d’un envahissement métas-
tatique mais permettant par ailleurs de préciser la richesse hématopoïé-
tique avant traitement ;
– l’exploration biologique recherche d’un syndrome paranéoplasique biolo-
gique, ici essentiellement un syndrome de Schwartz-Bartter ou une
hypercalcémie ;
– le dosage des marqueurs tumoraux n’a d’utilité réelle qu’à titre de réfé-
rence permettant de suivre l’évolution de leur taux sous traitement : la
NSE ou Neuron Specific Enolase, iso-enzyme de l’enolase, est le mar-
queur le plus utile dans cette forme, son taux étant élevé dans trois
quarts des cas et dans près de 90 % des formes métastatiques.

◗ Autres formes histologiques


Dans les autres formes histologiques, deux évaluations concomitantes et intri-
quées doivent être réalisées, à savoir le diagnostic d’extension et le diagnostic
d’opérabilité.
Pour ce qui est du diagnostic d’extension, il n’y pas de différence majeure avec
la procédure choisie pour les formes anaplasiques à petites cellules si ce n’est
que le TDM cérébral n’est pas indispensable et que l’exploration abdominale
peut être réduite à une échographie hépatique.
Depuis quelques années, la tomographie en émission de positrons (TEP) utili-
sant comme traceur isotopique le glucose marqué au fluor 18 (FDG) a permis
au décours d’un examen « corps entier » d’améliorer la performance de l’ima-
gerie préthérapeutique, aussi bien en découvrant des anomalies jusque-là
méconnues par les autres techniques d’imagerie qu’en dédouanant des anoma-
lies notamment tomodensitométriques.
Sur le plan biologique, le marqueur le plus utile est alors l’ACE.
Le diagnostic de résécabilité chirurgicale repose sur plusieurs éléments :
– la topographie tumorale, sa situation dans l’arbre bronchique, en particu-
lier par rapport à la carène, sont précisées par la fibroscopie ;
– l’extension pariétale, pleurale et/ou costale est explorée par la TDM éven-
tuellement complétée par l’IRM ;

176 ◗
11_Chap9 Page 177 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CANCERS BRONCHOPULMONAIRES 9

– l’existence d’adénopathies médiastinales est évaluée par la tomodensito-


métrie, utilement complétée par une exploration TEP, et éventuellement
par une médiastinoscopie avec biopsie dans les situations restant dou-
teuses après les explorations précédentes.
D’autres explorations visent à apprécier l’opérabilité du patient :
– exploration fonctionnelle respiratoire ;
– scintigraphie pulmonaire ventilation-perfusion.

◗ Classifications
Pour les carcinomes non anaplasiques à petites cellules, la classification la plus
utilisée est le TNM de l’UICC (tableau 9.I) :
– T1 : tumeur de moins de 3 cm à distance de la plèvre de concernant
pas une bronche plus proximale que lobaire ;
– T2 : tumeur de plus de 3 cm ou envahissant une bronche souche en
restant à plus de 2 cm de la carène, ou envahissant la plèvre viscérale,
ou associée à une atélectasie ou une pneumopathie obstructive ne
concernant pas tout le poumon ;
– T3 : tumeur de taille indifférente envahissant directement une des struc-
tures suivantes : paroi thoracique, diaphragme, plèvre médiastinale, péri-
carde, ou concernant une bronche souche à moins de 2 cm de la carène
sans envahissement carinal, ou associée à une atélectasie ou une pneu-
mopathie obstructive concernant l’ensemble du poumon ;
– T4 : tumeur de taille indifférente envahissant directement une des struc-
tures suivantes : médiastin, cœur, gros vaisseaux, trachée, œsophage,
corps vertébral, carène, ou tumeur avec épanchement pleural
néoplasique ;
– N1 : adénopathie métastatique péribronchique et/ou hilaire homolaté-
rale ;
– N2 : adénopathie métastatique médiastinale homolatérale et/ou
sous-carinale ;
– N3 : adénopathie métastatique médiastinale homolatérale ou hilaire
controlatérale, ou sus-claviculaire.

Tableau 9.I. Classification en stades des carcinomes non anaplasiques à


petites cellules
Cancer occulte T× N0 M0
Stade 0 Tis N0 M0
Stade IA T1 N0 M0
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Stade IB T2 N0 M0
Stade IIA T1 N1 M0
Stade IIB T2 N1 M0
T3 N0 M0
Stade IIIA T1 N2 M0
T2 N2 M0
T3 N1-N2 M0
Stade IIIB Tout T N3 M0
T4 Tout N M0
Stade IV Tout T Tout N M1


177 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Pour les carcinomes anaplasiques à petites cellules, il est habituellement préféré


une classification séparant :
– les formes pulmonaires et/ou pulmonaires et ganglionnaires médiastina-
les (I) ;
– des formes étendues hors du poumon et des ganglions médiastinaux (II).

◗ TRAITEMENT
◗ Moyens de traitement
◗ Chirurgie
Pour les carcinomes non anaplasiques à petites cellules, elle constitue le traite-
ment de choix des stades I et II, le choix de la technique dépendant de l’éten-
due et de la topographie lésionnelle ainsi que de l’état général, en particulier
respiratoire du patient : lobectomie, pneumonectomie, résection atypique. Le
but est de réaliser une exérèse macroscopiquement complète tout en conser-
vant le maximum possible de tissu pulmonaire sain fonctionnel.
Il existe des contre-indications relatives non formelles : extension pariétale loca-
lisée, péricarde, sommet pulmonaire, envahissement phrénique.
L’existence de métastases viscérales, de volumineuses adénopathies médiasti-
nales ou d’un épanchement pleural néoplasique constituent des contre-indica-
tions formelles.

◗ Radiothérapie
L’irradiation des carcinomes non anaplasiques à petites cellules, peut avoir plu-
sieurs buts :
– traitement adjuvant de la chirurgie initiale ;
– traitement exclusif à visée curative ;
– irradiation palliative d’une tumeur thoracique évoluée ;
– irradiation symptomatique d’une localisation métastatique.
Le niveau de dose utile en situation curative est de l’ordre de 60 Gy délivrés en
cinq à six semaines. Un tel niveau de dose suppose des modifications de la
taille des champs en cours d’irradiation et le plus souvent de leur orientation
dans le but d’épargner relativement les organes intrathoraciques critiques :
parenchyme pulmonaire, moelle épinière dorsale.
D’autres schémas de prescription ont été proposés en particulier en situation
palliative : irradiation en deux temps, hyperfractionnement, hypofractionnement.
Pour les carcinomes anaplasiques à petites cellules, la radiothérapie peut être
utilisée dans trois circonstances essentielles :
– irradiation de la lésion médiastinopulmonaire ;
– irradiation de sites fréquemment métastatiques peu accessibles à la chi-
miothérapie comme le cerveau ;
– irradiation symptomatique de localisations métastatiques.

◗ Chimiothérapie
Pour les formes non anaplasiques à petites cellules, la chimiothérapie n’est envi-
sagée que devant des maladies progressives localement évoluées (T4), récidi-
vantes ou métastatiques. Elle peut dans le cadre d’essais cliniques être utilisée

178 ◗
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CANCERS BRONCHOPULMONAIRES 9

à titre néo-adjuvant, c’est-à-dire avant tout traitement locorégional, chirurgical


et/ou radiothérapique.
Elle fait appel essentiellement aux sels de platine associés à d’autres médica-
ments variés : le taux de réponse supérieure à 50 % ou complète est de l’ordre
de 25 % avec une durée moyenne de huit mois pour les formes thoraciques
avancées. Sa prescription à titre adjuvant après traitement thoracique complet
n’est retenue que dans les stades III et dans le cadre d’essais prospectifs.
Pour les carcinomes anaplasiques à petites cellules, la chimiothérapie repré-
sente l’essentiel du traitement quel que soit le stade initial. Il s’agit d’une poly-
chimiothérapie comportant habituellement de la doxorubicine, un alkylant et un
antimétabolite. Le taux de réponses complètes obtenues est de l’ordre de 80 %
pour une durée moyenne de six mois, permettant d’obtenir un taux de survie
à 2 ans de l’ordre de 20 à 25 %.

◗ Principes de traitement et résultats


◗ Carcinomes non anaplasiques à petites cellules
– Stades I et II : la chirurgie d’exérèse complète est l’objectif majeur éven-
tuellement suivie d’une irradiation thoracique postopératoire en cas
d’envahissement ganglionnaire médiastinal (pN2). La survie sans mala-
die évolutive à 5 ans est alors de 60 % pour les stades I et de 30 %
pour les stades II ;
– stades III : quelles que soient les modalités thérapeutiques y compris
avec chirurgie, la survie à 5 ans est de l’ordre de 5 à 15 %.
Schématiquement les stades III résécables et opérables sont traités par chirurgie
suivie d’irradiation. Des essais thérapeutiques sont menés pour évaluer le béné-
fice d’une chimiothérapie associée. Les stades III non résécables et/ou non opé-
rables sont traités par une association chimiothérapie-radiothérapie, cette
dernière n’étant réalisée qu’en l’absence d’épanchement pleural et si la fonction
respiratoire le permet.
Les différentes formes histologiques des carcinomes non anaplasiques à petites
cellules sont sans grande influence sur les résultats précédents.

◗ Carcinomes anaplasiques à petites cellules


Compte tenu de l’évolutivité et de la diffusion de ces formes, la chirurgie d’exé-
rèse est en règle contre-indiquée. Les taux élevés de réponse obtenus par la
chimiothérapie ne se traduisent pas en termes de survie, la médiane restant à
seize mois, mais avec un groupe de longs survivants au-delà de 2 ans de l’ordre
de 10 à 15 %.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Pour les formes médiastinopulmonaires (I), la chimiosensibilité est évaluée sur


trois cycles initiaux. Si une réponse majeure ou complète est obtenue, il est
habituel de proposer une irradiation cérébrale dite « prophylactique » compte
tenu du risque de localisation à ce niveau et du passage médiocre des médica-
ments dans l’encéphale. La suite du traitement consiste en une reprise de chi-
miothérapie pour trois cycles supplémentaires associés à une irradiation externe
thoracique du volume lésionnel résiduel.
Au total, le taux de survie à 5 ans sans maladie évolutive ne dépasse pas 5 %.


179 ◗
11_Chap9 Page 180 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés
• Les cancers bronchopulmonaires représentent la première cause de décès par
cancer chez l’homme et la troisième chez la femme. Ils sont essentiellement dus
au tabagisme.
• Le diagnostic repose sur l’endoscopie bronchique et l’imagerie où la tomodensi-
tométrie joue un rôle majeur.
• La stratégie d’évaluation et de traitement est largement fonction de la forme
histologique.
• Pour les carcinomes anaplasiques à petites cellules, il n’y a pas d’indication chi-
rurgicale, le traitement repose essentiellement sur la chimiothérapie et la
radiothérapie. La survie à 5 ans sans maladie évolutive est inférieure à 5 %.
• Pour les autres formes histologiques (épidermoïdes, adénocarcinomes), l’évalua-
tion porte sur la résécabilité de la tumeur et l’opérabilité du patient. Si la chirurgie
est récusée, le traitement associe chimiothérapie et radiothérapie. La survie à 5 ans
sans maladie évolutive se situe entre 5 et 15 %.


180 ◗
12_Chap10 Page 181 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Tumeurs urogénitales
10
É. CABARROT

◗ TUMEURS DE LA PROSTATE
◗ TUMEURS DU REIN
◗ TUMEURS DE LA VESSIE
◗ CANCERS DU TESTICULE

◗ TUMEURS DE LA PROSTATE1
Alors que l’adénome de développe dans la prostate craniale, le cancer de la
prostate prend naissance dans la partie périphérique de la glande, ou prostate
caudale. Ce cancer est fréquent chez l’homme âgé. En dépit des progrès du
dépistage, le pronostic global de la maladie reste médiocre en raison de la fré-
quence des formes d’emblée métastatique. Les traitements sont la chirurgie et/
ou la radiothérapie pour les stades initiaux et l’hormonothérapie pour les formes
métastatiques.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Le cancer de la prostate est le plus fréquent des cancers de l’homme (26 474
nouveaux cas en France, en 1995). Le risque pour un homme d’avoir un cancer
de la prostate au cours de sa vie a été évalué à 7,8 soit un homme sur treize.
L’incidence a augmenté de manière rapide depuis 1970 et semble se stabiliser
dans les années les plus récentes. Le vieillissement de la population et l’amé-
lioration des techniques de dépistage, expliquent la progression de l’incidence
en Europe et en Amérique du Nord (plus de 180 % entre 1985 et 1995,
fig. 10.1).
De nombreux cancers de la prostate ne sont pas diagnostiqués. Les études
autopsiques d’hommes décédés d’autres causes ont montré que 30 % des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

hommes de moins de 50 ans présentaient un cancer latent de la prostate et


les deux tiers après 80 ans. Les cancers trouvés à l’autopsie étaient petits, bien
différenciés et peu invasifs. Les études cliniques par analyse de pièces de résec-
tion transurétrale de prostate ont confirmé la fréquence des cancers débutants.
Ainsi, le cancer de la prostate est un processus lent et à étapes multiples avec
des pauses entre les événements évolutifs.

1. Item n° 156. Tumeurs de la prostate.



181 ◗
12_Chap10 Page 182 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 10.1. Évolution de l’incidence et de la mortalité des cancers de la prostate en France (INSERM,
1995). ➤
Incidence 30 000
annuelle

26 474
25 000

Incidence
Mortalité 20 687
20 000

15 000 14 080

10 115
10 000
6 768 9 211 9 263
8 035
6 834
5 000 6 020

Année
0
1975 1980 1985 1990 1995

◗ Âge
Rare avant 50 ans, le cancer de la prostate augmente régulièrement avec l’âge
pour atteindre un pic après 80 ans, ou la maladie atteint un homme sur 100.
L’âge moyen de survenue est de 70 ans.

◗ Mortalité
Le cancer de la prostate est la seconde cause de mortalité par cancer chez
l’homme, la première étant le cancer du poumon. Ce cancer entraîne environ
9 000 décès en France. La mortalité est stable depuis 20 ans à un taux annuel
de 30 pour 100 000.

◗ Facteurs de risque
L’étiologie des cancers de la prostate est mal connue. Les facteurs de risque
sont ethniques, environnementaux, génétiques et hormonaux.

Race et âge
Les Noirs sont plus souvent atteints que les Blancs, et la race blanche bien
davantage que les Asiatiques. Le facteur de risque le plus important reste d’être
âgé de plus de 60 ans.

Activité sexuelle
Le rôle des maladies sexuelles et des virus n’a pas été établi. Il paraît exister un
lien potentiel entre le cancer de la prostate et l’activité sexuelle, dont témoigne-
rait à l’inverse la rareté de la maladie chez les prêtres catholiques.

182 ◗
12_Chap10 Page 183 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

Cancers familiaux

L’éventualité d’un risque familial, évalué à environ 10 % des cas, concerne les
familles chez lesquelles deux sujets ont été atteints. Un gène de susceptibilité
peut alors être localisé sur le chromosome 1 (gène HPC-1).

Régime alimentaire

L’alimentation hypercalorique et riche en graisses animales, pourrait expliquer


les fortes incidences en Occident et, par contraste, un régime à base de riz,
de végétaux (soja) et de poisson, la rareté dans les pays asiatiques. L’agent
oncogène et le mécanisme d’action restent mal connus, on évoque la
synthèse d’hormones sexuelles à partir du tissu adipeux. La 5-α réductase,
qui transforme la testostérone en dihydrotestostérone, joue peut-être un rôle
dans la carcinogenèse prostatique. Le rôle des hormones a été démontré
chez l’animal, par l’administration d’androgènes. Chez l’homme, le cancer de
la prostate est hormonodépendant. Les cellules malignes sont dotées de
récepteurs hormonaux et leur croissance est ralentie par des agents
anti-androgéniques.
L’exposition au cadmium et au zinc serait un facteur de risque chez les agricul-
teurs (fertilisants) et les travailleurs de la métallurgie du zinc.

◗ Pathologie

◗ Types histologiques
Le cancer de la prostate est un adénocarcinome dans 95 % des cas. Le
dépistage des cancers de la prostate a permis de révéler l’existence de
lésions précancéreuses (hyperplasies glandulaires atypiques) et de carcino-
mes in situ, dont le diagnostic est parfois difficile avec un cancer infiltrant.
L’aspect histologique est souvent polymorphe avec des plages de différenti-
ation variable. Pour cette raison, le grade histologique de Gleason apprécie
la différentiation tumorale sur deux plages. Un grade élevé correspondant à
un cancer peu différencié, est associé à un risque élevé de récidive locale
et de métastases.

◗ Évolution naturelle

Locale
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Le cancer s’étend progressivement aux deux lobes, (T2b), mais l’étape détermi-
nante est le franchissement de la capsule prostatique (T3a). L’envahissement
des vésicules séminales (T3b), du col vésical (T4) est corrélé avec un risque
élevé de récidive locale et métastatique.

Lymphatique

Les cancers de la prostate sont lymphophiles vers les ganglions iliaques exter-
nes et, ultérieurement, iliaques primitifs et lombo-aortiques. Le risque d’enva-
hissement ganglionnaire augmente avec le stade local (tableau 10.I) et il est
prédictif de l’apparition de métastases viscérales à distance chez 85 % des
patients N+.

183 ◗
12_Chap10 Page 184 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Tableau 10.I. Risque d’envahissement des ganglions pelviens en fonction du


stade TNM et du volume tumoral (mesuré par l’échographie) des cancers
prostatiques
Stade Risque Volume Risque
de N+ pelviens en cm3 de N+ pelviens (%)
T1 <5% < 2,5 5
T2 5 à 25 selon le grade 2,5 à 8 34
T3 20 à 70 selon le grade 8 à 16 72

Métastases
Les métastases osseuses (M1), présentes d’emblée dans 50 % des cas, se
localisent sur le bassin osseux, le rachis et les côtes. Les métastases hépatiques
ou pulmonaires sont rares.

◗ Dépistage
Le dépistage du cancer de la prostate chez un patient asymptomatique est pos-
sible par deux méthodes, le toucher rectal (TR) et le dosage du PSA (Prostate
Specific Antigen).
Le TR devrait faire partie du bilan de santé annuel, mais l’évaluation de son
efficacité est difficile, du fait de sa faible sensibilité.
Le dépistage par le PSA est controversé pour plusieurs raisons. La première est
que le PSA est également augmenté dans des pathologies non cancéreuses
fréquentes comme l’hypertrophie bénigne, les prostatites, et même dans les
suites d’un rapport sexuel ou après un toucher rectal. Ainsi, ces faux positifs
peuvent conduire à des actes non justifiés. Inversement, on connaît la possibi-
lité, dans 20 % des cas, de cancer avec un PSA normal (faux négatifs). Enfin,
plusieurs études n’ont pas démontré de réduction significative de la mortalité
spécifique des populations dépistées par le PSA, particulièrement chez les hom-
mes de plus de 70 ans. En conséquence, le dépistage de masse ou individuel
par le PSA seul n’est pas actuellement recommandé en France (ANAES, 1998).
À l’opposé, il existe des arguments favorables au dépistage. En particulier, on a
observé aux États-Unis, une réduction de la mortalité par cancer de la prostate,
corrélée avec le dépistage extensif par le PSA dans les années quatre-vingt-dix. À
titre individuel, il apparaît licite de proposer un TR et un dosage du PSA, chez un
patient asymptomatique, de plus de 55 ans, clairement informé et consentant.

◗ Diagnostic
◗ Circonstances de découverte
Syndrome prostatique
Les symptômes révélateurs habituels sont des troubles de la miction : une dysu-
rie avec un jet faible, des besoins impérieux, voire une rétention aiguë, rarement
une hémospermie ou une hématurie.

Découverte fortuite
De plus en plus souvent, un cancer est révélé par l’élévation isolée du PSA, chez
un homme asymptomatique, ou lors de l’examen pathologique des copeaux de
résection trans-urétrale d’un adénome de la prostate.

184 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

Troubles non urologiques

Des symptômes non urologiques témoignent de la diffusion de la maladie, un


œdème mou d’une jambe, des douleurs osseuses ou des troubles généraux
(asthénie, anémie, fièvre inexpliquée).

◗ Méthodes du diagnostic

Examen clinique

Il se résume au TR. Le TR fait partie de l’examen clinique de tout homme ayant


un syndrome prostatique. Un cancer se manifeste par un nodule dur et mal
limité, ou par une induration diffuse de la glande. Si tous les nodules ne corres-
pondent pas à un cancer, toute anomalie du TR doit conduire à une prise en
charge complémentaire.

Examens paracliniques

Échographie prostatique • L’échographie est une exploration très sensible et


non invasive. L’examen par voie transrectale, nécessite une préparation par micro-
lavement. L’aspect typique d’un cancer est une image hypoéchogène, irrégulière.
L’échographie a peu de faux négatif (5 %), mais les images ne sont pas spécifi-
ques. Des erreurs sont possibles avec une prostatite granulomateuse ou en cas
d’antécédents de chirurgie prostatique. L’échographie est un examen opéra-
teur-dépendant, dont la fiabilité augmente avec l’expérience de l’examinateur.
Dosage du PSA • Le PSA doit être mesuré avant le TR, avant l’échographie ou
la biopsie. Le taux normal de PSA est variable selon l’âge et la race : le seuil de
normalité est inférieur à 4 ng/ml. Des taux jusqu’à 8-10 ng/ml sont compatibles
avec une hypertrophie bénigne ou une prostatite. En cas de cancer, le taux de
PSA est proportionnel au volume et à l’extension tumorale. La valeur prédictive
positive augmente avec l’élévation du taux : elle est de 80 % pour un PSA
> 10 ng/ml et de 90 % pour un PSA > 20 ng/ml. Si le PSA est normal, il faut
savoir que le test peut être faussement négatif dans 20 % des cancers.
Au total, en cas de PSA > 10 ng/ml, le diagnostic de cancer est évoqué et
une consultation spécialisée est à prévoir, de même qu’une biopsie. Entre 4
et 10 ng/ml, le diagnostic est incertain. Il faut alors, tenir compte de l’âge du
patient, des données du TR, de l’échographie et recourir au rapport PSA libre/
PSA total, qui améliore la discrimination entre cancer et hypertrophie bénigne.
Ponction biopsie de la prostate (PBP) • La PBP est l’examen décisif du
diagnostic. La voie d’abord est transrectale, après lavement évacuateur, ou trans-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

périnéale. Les prélèvements sont effectués par une aiguille à guillotine et un


pistolet à ressort (biopty-gun). Les biopsies sont guidées par l’échographie sur
le nodule tumoral, sur les deux lobes et sur l’apex prostatique. Les cinq à six
prélèvements sont repérés sur un schéma de la glande.

◗ Bilan d’extension, classifications

◗ Investigations
Elles consistent en :
– l’examen clinique avec un TR combiné à la palpation abdominale
(volume et mobilité de la glande), palpation du foie (hépatomégalie)
et des creux sus-claviculaires (adénopathie) ;

185 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– l’échographie endorectale qui évalue le volume tumoral en cm3, une


atteinte multifocale, un dépassement de la capsule ou une extension
aux vésicules séminales ;
– un bilan biologique, comportant NFS, BES, enzymes hépatiques, fonc-
tion rénale et bilan d’hémostase (fibrinolyse et risque de CIVD dans les
formes métastatiques) ;
– un cliché thoracique (métastases pulmonaires) ;
– une scintigraphie osseuse, systématique à partir d’un taux de PSA supé-
rieur à 10 ng/ml. C’est l’examen le plus sensible dans la recherche de
métastases osseuses, mais il manque de spécificité en raison de l’âge
et de la fréquence de la pathologie rhumatismale bénigne. En cas de
fixation anormale, une confrontation radioscintigraphique est requise
par des radiographies centrées et éventuellement un scanner. Les
métastases sont, le plus souvent ostéocondensantes et siègent avec
prédilection sur le bassin et le rachis lombaire ;
– l’imagerie par scanner ou mieux par IRM, si le taux de PSA est supérieur
à 20 ng/ml, pour rechercher une extension pelvienne et/ou ganglion-
naire. Dans les stades initiaux, l’évaluation ganglionnaire est plus sou-
vent confiée à une lymphadénectomie pelvienne, soit par cœlioscopie,
soit en premier temps opératoire d’une prostatectomie. Si l’analyse
extemporanée est négative, l’opération se poursuit par la prostatecto-
mie radicale ;
– un bilan d’opérabilité avec une consultation d’anesthésie.

◗ Classification
La classification clinique des cancers de la prostate utilise le système TNM 1998
(tableau 10.II).
L’analyse histologique la pièce opératoire de prostatectomie, définit le pTNM
(pathologic TNM) et précise l’étendue de la tumeur, un dépassement de la
capsule, l’envahissement de l’urètre, des vésicules séminales ou des ganglions
ilio-pelviens.

Tableau 10.II. Classification TNM des cancers de la prostate


T1 Tumeur non palpable non visible en imagerie
T1a : atteinte de moins de 5 % de copeaux de résection trans-urétrale
T1b : atteinte de plus de 5 % des copeaux de résection trans-urétrale
T1c : cancer trouvé par biopsie transrectale devant une élévation du PSA
T2 Tumeur palpable confinée à la glande
T2a : atteinte d’un lobe
T2b : atteinte des deux lobes
T3 Tumeur étendue au-delà de la capsule
T3a : dépassement simple de la capsule
T3b : atteinte des vésicules séminales
T4 Tumeur étendue du pelvis
Envahissement du col vésical, du sphincter externe, du rectum, des releveurs
de l’anus, de la paroi pelvienne
N0 Pas de métastase ganglionnaire régionale
N1 Métastases ganglionnaires régionales
M0 Pas de métastase à distance
M1 Métastases ganglionnaires non régionales, métastases osseuses ou autres
métastases


186 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

◗ Pronostic
Le pronostic doit être évalué pour chaque patient avant toute décision thérapeu-
tique. Les paramètres essentiels sont le stade clinique, le taux de PSA, le score
de Gleason.

◗ Stade clinique
Les chances de guérison sont corrélées au stade clinique de la maladie
(tableau 10.III). Ainsi, les taux de survie à 5 ans passent de 85 % pour les for-
mes très localisées, à 40 % en cas d’envahissement extracapsulaire pelvien (col
vésical, vésicules séminales). Les cancers métastatiques très sensibles à l’hor-
monothérapie, échappent au traitement en moyenne après 2 ans, et les mala-
des survivent peu ultérieurement.
À chaque stade, le pronostic peut être ajusté en fonction du grade. L’envahisse-
ment ganglionnaire est un paramètre primordial puisque la survie à 5 ans est de
80 % en cas de ganglions pelviens négatifs et seulement de 30 % en cas de N+.

Tableau 10.III. Pronostic des patients traités pour cancer de la prostate en


fonction du stade clinique
Stade TNM Taux de survie à 5 ans
Localisés T1, T2 85 %
Évolué T3a, T3b 60 %
Métastatique Taux de réponse à l’hormonothérapie : 70 à 80 %
Durée médiane de la réponse : 2 ans
Durée de survie médiane après échappement : 8 mois

◗ Score de Gleason
Établi par l’étude histologique des biopsies prostatiques ou sur la pièce de pros-
tatectomie, le grade histologique (1 à 5) apprécie la différenciation cellulaire. En
raison des plages de différentiation variable, le score de Gleason analyse le
grade sur deux plages. Le résultat est obtenu par l’addition des scores des deux
territoires choisis exprimé sur 10 : par exemple, score de 7 (= 3 + 4). Un grade
élevé correspond à un cancer peu différencié et est associé à un risque élevé
de récidive locale et de métastases.
La survie à 10 ans est de l’ordre de 90 % pour les formes bien différenciées et
de 30 à 50 % pour les cancers peu différenciés (tableau 10.IV).
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Tableau 10.IV. Taux de survie et de mortalité spécifique, à 5 et 10 ans, des


malades traités pour cancer prostatique
Grade histologique Taux de survie spécifi- Taux de mortalité spéci-
que à 5 ans fique à 10 ans
Bien différencié 98 % 9%
Moyennement différencié 92 % 24 %
Peu différencié 29 % 48 %

◗ Taux de PSA
Les études cliniques ont montré que, entre 10 et 20 ng/ml, un envahissement
capsulaire est probable, et au-dessus de 30 ng/ml, le risque de métastases gan-
glionnaires ou osseuses est très élevé, de l’ordre de 80 %.

187 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Plusieurs auteurs ont combiné ces trois facteurs et établi des nomogrammes
prédictifs des risques de rechutes après prostatectomie radicale.

◗ Traitement
◗ Prévention
Le régime alimentaire peut expliquer la forte incidence dans les pays occiden-
taux par rapport à l’Asie du Sud-Est (cf. supra). L’enrichissement du régime ali-
mentaire occidental en fruits et légumes d’une part, la réduction calorique et
des graisses animales d’autre part, sont susceptibles de réduire le risque de
cancer de la prostate, comme d’autres cancers (digestifs, endomètre, sein). Pour
la prostate, une des hypothèses est que les phyto-œstrogènes contenus dans
ces aliments, puissent inhiber la 5 α-réductase. Un essai randomisé de préven-
tion par un agent pharmaceutique inhibiteur de la 5 α-réductase, le finastéride,
est en cours.

◗ Bases du traitement
Les cancers de la prostate sont des maladies d’évolution lente, mais dont le
pronostic global reste médiocre. Les patients présentent souvent un stade initial
évolué et des maladies associées (comorbidité), parfois plus graves que le can-
cer lui-même.
Le traitement des formes localisées est à visée curative par chirurgie ou radio-
thérapie.
Le traitement des métastases est palliatif et relève de l’hormonothérapie ou,
plus rarement, de la chimiothérapie. Dans certains cas, un geste local est parfois
plus utile au patient qu’un traitement général.
Le choix du traitement dépend principalement du stade clinique, de l’index de
Gleason et du taux de PSA avant traitement, mais aussi de l’état général et de
l’âge (espérance de vie escomptée).

◗ Stade T1a
Ces cancers sont de découverte fortuite, sur l’analyse de copeaux de résection
transurétrale pour une uropathie obstructive, un adénome ou une hypertrophie
bénigne de la prostate. Dans ce stade, la tumeur occupe moins de 5 % des
prélèvements. Les patients font l’objet d’une simple surveillance basée sur des
examens périodiques.

◗ Stade T1b et T2
Trois options sont possibles, la prostatectomie radicale, la radiothérapie curative
et la surveillance armée.

Prostatectomie radicale
L’intervention débute par un curage ganglionnaire ilio-obturateur, éventuellement
par cœlioscopie, et un examen extemporané. La chirurgie se limite au curage en
cas de biopsie extemporanée positive, car l’envahissement ganglionnaire est le
témoin d’une maladie plus évoluée que prévue et d’un pronostic péjoratif (cf.
supra). Si le curage est négatif, l’intervention se poursuit par une prostatectomie
totale, avec ablation des vésicules séminales et du col vésical. La continuité des
voies urinaires est rétablie par anastomose entre la vessie et l’urètre. Les techniques
actuelles permettent de préserver l’innervation du sphincter externe et des bande-
lettes neurovasculaires contenant les nerfs érecteurs. La chirurgie est plus particu-

188 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

lièrement indiquée pour les hommes en bon état général et ayant une longue
espérance de vie (10 à 15 ans).
Une radiothérapie postopératoire est envisagée si l’étude pathologique révèle
un envahissement capsulaire ou des marges de résection insuffisante (apex
prostatique, atteinte des vésicules séminales ou des ganglions). Des études
récentes confirment la diminution significative du taux de récidive locale grâce
à la radiothérapie postopératoire.

Radiothérapie curative

Les techniques actuelles d’irradiation sont la radiothérapie externe et la curiethérapie.


La radiothérapie externe utilise les photons produits par les accélérateurs linéaires.
La dose à délivrer à une tumeur de type T2 est de l’ordre de 60 à 70 Gy en six
à sept semaines. La technique conformationnelle permet d’adapter le volume
cible à partir des données anatomiques acquises par scanner. Le faisceau est
conformé par un collimateur multilames. Cette technique évite d’irradier les tissus
voisins et réduit les effets secondaires de la radiothérapie.
La curiethérapie utilise l’implantation dans le tissu prostatique de grains radioac-
tifs d’125I. La mise en place est effectuée sous anesthésie générale et avec un
contrôle par sonde échographique endorectale.

Surveillance

Cette option peut se justifier pour les personnes de plus de 70 ans, ayant un
cancer bien différencié. Dans cette indication, plusieurs études n’ont pas montré
d’avantages décisifs au groupe traité à visée curative par rapport au groupe sur-
veillance, sauf pour les patients ayant un score de Gleason supérieur à 5.

◗ Stade T3-T4 M0
Ce sont des cancers localement avancés avec extension extracapsulaire vers
les vésicules séminales, la paroi, pelvienne, la vessie ou le rectum. Le traite-
ment de référence est la radiothérapie externe, mais le risque de récidive
locale et de métastases à distance est élevé. On recherche actuellement
d’améliorer le contrôle de la maladie en associant la radiothérapie à une hor-
monothérapie néo-adjuvante et adjuvante, avec des premiers résultats encou-
rageants.
L’utilisation de l’hormonothérapie exclusive est une option pour les patients
âgés ou ayant une comorbidité importante et lorsque les ganglions pelviens
se révèlent envahis après lymphadenectomie cœlioscopique. Dans ce dernier
cas, la probabilité de métastases à distance donne une visée très palliative au
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

traitement.
La chirurgie d’exérèse a une place limitée dans ces formes évoluées, sauf pour
les patients jeunes, ayant une tumeur de gros volume (T3). La chirurgie est
alors un des éléments d’une prise en charge pluridisciplinaire, qui l’associe
à la radiothérapie externe et à une hormonothérapie adjuvante ou
néo-adjuvante.

◗ Cancers métastatiques
Beaucoup de malades (30 à 50 %) se présentent au stade de maladie dissé-
minée. Le traitement est alors à visée palliative, l’hormonothérapie est la
méthode de référence.
Le traitement hormonal repose sur la dépendance androgénique du tissu pros-
tatique tumoral et vise à supprimer la production des androgènes ou à s’oppo-

189 ◗
12_Chap10 Page 190 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ser à leur action. La suppression androgénique est obtenue par différentes


méthodes :
– la castration chirurgicale par orchidectomie ou pulpectomie (ablation
sous-albuginée de la pulpe testiculaire) ;
– la castration chimique par les agonistes de la LH-RH (leuproreline, gose-
reline). Après une phase initiale de stimulation, l’hypophyse est désensi-
bilisée et on obtient la suppression de la sécrétion de LH et des
androgènes testiculaires en quinze jours. L’élévation initiale des androgè-
nes justifie les premiers jours, la prescription d’un anti-androgène. Ce trai-
tement supprime la spermatogenèse et provoque des bouffées de
chaleur et une impuissance ;
– le blocage androgénique complet est l’association d’une castration chi-
mique et d’un anti-androgène. Les anti-androgènes agissent par blocage
des récepteurs androgéniques des cellules tumorales. Les médicaments
sont des anti-androgènes non stéroïdiens (flutamide, nilutamide, bicalu-
tamide) ou des progestatifs de synthèse (cyprotérone, mégestrol). Les
anti-androgènes stéroïdiens sont hépatotoxiques et requièrent une sur-
veillance biologique.
Dans 80 à 90 % des cas, l’amélioration obtenue par l’hormonothérapie est
rapide, mais limitée dans le temps. L’échappement survient par sélection des
clones non hormonodépendants. Le temps médian à la progression clinique est
de 24 à 36 mois.
Après échappement, une hormonothérapie de deuxième ligne peut encore être
efficace et utilise le kétoconazole qui a un effet anti-androgénique, les anti-aroma-
tases, ou les œstrogènes de synthèse. Les œstrogènes agissent par rétrocontrôle
sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, mais l’emploi du diéthylstilbestrol, même
sans dépasser la dose maximale de 3 mg, est limité par le risque d’accidents vas-
culaires.
La prise en charge des métastases osseuses requiert l’appoint de traitements
locaux et généraux, antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens, diphospho-
nates. La radiothérapie externe et les radio-isotopes (strontium, samarium) sont
efficaces au plan antalgique.
La chimiothérapie se heurte à l’âge avancé des malades et à des réserves héma-
topoïétiques limitées par l’extension métastatique osseuse. Les traitements chi-
miques sont réservés aux cancers en phase d’échappement hormonal.
Divers antimitotiques ont démontré des taux de réponse de 20 à 30 %. Les
agents les plus employés sont la cyclophosphamide, la doxorubicine, la mitoxan-
trone et l’estramustine ainsi que les glucocorticoïdes.
L’association d’un antimitotique et d’une hormone (estramustine ou Estracyte)
est parfois utilisée chez des malades devenus hormonorésistants avec des amé-
liorations dans 30 % des cas.

◗ Surveillance
La surveillance des patients traités pour cancer de la prostate, vise à détecter
précocement une récidive locale curable et à dépister les effets secondaires des
traitements. Le contrôle médical doit être adapté à la situation du malade et
aussi peu contraignant que possible.

◗ Méthodes
La surveillance est clinique et biologique (tableau 10.V).
L’examen médical comprend l’évaluation de l’état général et des fonctions uri-
naires, un TR, la palpation du foie et des creux sus-claviculaires.

190 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

La surveillance biologique est basée sur le taux sérique du PSA. Après prosta-
tectomie radicale, le taux de PSA doit être inférieur à 0,2 ng/ml. Ce chiffre signe
la guérison biologique. En cas d’élévation sur deux dosages ou plus, il s’agit
d’une récidive biologique qui précède la récidive clinique de plusieurs mois et
permet d’envisager une reprise thérapeutique.
Après radiothérapie à visée curative, la prostate est périodiquement contrôlée
par une échographie endorectale.
Ces examens peuvent être répétés tous les six mois pendant deux ans et tous
les ans ultérieurement. Une radiographie thoracique et une scintigraphie
osseuse sont prescrites en cas de signes d’appel.

Tableau 10.V. Grille de surveillance des cancers localisés de la prostate


Examens 1re à 3e année Après 3 ans
Symptomatologie + TR Tous les 6 mois Tous les ans
PSA Tous les 6 mois Tous les ans
Scintigraphie osseuse En cas de douleurs osseuses

◗ Effets secondaires et séquelles


La mortalité opératoire de la prostatectomie radicale varie entre 0,5 et 4 %, du
fait de complications vasculaires et générales. Les complications tardives sont
l’impuissance sexuelle (40 % à 70 % de défaut total ou partiel d’érection) et
l’incontinence urinaire (de 10 % à 30 %).
En cours de radiothérapie externe, les malades peuvent ressentir une pollakiurie
du ténesme, une diarrhée et une dermite interfessière. Ces troubles sont rapi-
dement résolutifs. À distance, les séquelles essentielles sont la rectite, respon-
sable de saignements, et l’impuissance (30 %). La morbidité est plus faible que
celle de la prostatectomie radicale, notamment après curiethérapie interstitielle
pour une tumeur de petit volume.
Les traitements hormonaux réduisent la spermatogenèse et provoquent des
bouffées de chaleur, des troubles de la libido, voire une impuissance ou une
gynécomastie douloureuse. Dans les premiers jours d’une castration chimique,
il se produit une élévation transitoire des androgènes, qui provoque une accen-
tuation des symptômes (douleurs osseuses) et des troubles urinaires, ce qui
justifie une surveillance particulière et la prescription simultanée d’un anti-andro-
gène. Les anti-androgènes stéroïdiens sont hépatotoxiques et requièrent une
surveillance biologique. Le traitement par œstrogènes (diéthylstilbestrol) est
limité par le risque d’accidents vasculaires, même à de faibles doses (maximum
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

de 3 mg).

◗ Récidives
Les récidives locales se révèlent par des douleurs pelviennes, du périnée, par
un œdème des membres inférieurs ou plus précocement par une élévation du
PSA. Une reprise thérapeutique par radiothérapie ou traitement hormonal est en
général possible après chirurgie. Un épisode de rétention aiguë d’urine requiert
un sondage ou la pose d’un cathéter sus-pubien en urgence, et ultérieurement
une résection trans-urétrale.
Les métastases osseuses relèvent de médications spécifiques, de la prescription
de biphosphonates et des antalgiques. Une irradiation externe ou interne par un
radiopharmaceutique (strontium 89), permet d’aider à obtenir un contrôle effi-
cace des douleurs.

191 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés
• Épidémiologie : le cancer de la prostate est le plus fréquent de l’homme en France
du fait du vieillissement de la population et de l’amélioration des techniques de
diagnostic, et représente la seconde cause de mortalité par cancer. L’âge moyen
de survenue est de 70 ans. Environ la moitié des malades se présentent à un stade
métastatique.
• Dépistage : le dépistage de masse par le dosage du PSA n’est pas actuellement
recommandé. Le dépistage individuel des personnes à risque repose sur le toucher
rectal et le dosage de PSA.
• Facteurs de risque : Âge au-delà de 60 ans, la race noire, un ou plusieurs parents
atteint(s) (grand-père, père, fils ou frère).
• Diagnostic : Dysurie, élévation isolée du PSA, troubles généraux, douleurs osseuses
peuvent tous être des signes d’appel. Le diagnostic repose sur le toucher rectal,
le taux de PSA et l’échographie trans-rectale permettant des biopsies multiples.
• Bilan d’extension : il comprend l’examen clinique (palpation du foie, des creux sus
claviculaires), un cliché thoracique, une scintigraphie osseuse (PSA > 10 ng/ml),
un TDM ou une IRM en préopératoire pour les T 2-3 non métastatiques, parfois
remplacée par une lymphadénectomie pelvienne sous cœlioscopie.
• Options thérapeutiques pour les cancers de stade T1b et T2 :
– Prostatectomie radicale,
– Radiothérapie externe ou curiethérapie,
– Prostatectomie suivie de radiothérapie,
– Surveillance simple et traitement si aggravation clinique et/ou biologique.
• Options thérapeutiques pour les cancers de la prostate stade T3 et T4 :
– Radiothérapie externe exclusive ou avec hormonothérapie associée,
– Hormonothérapie seule.
• Traitement des cancers métastatiques : le traitement est à visée palliative, l’hor-
monothérapie étant la méthode de référence. L’amélioration obtenue par
l’hormonothérapie est rapide, mais limitée dans le temps (24 à 36 mois en
moyenne). Quand elle est possible (âge, état général) la chimiothérapie est
réservée aux cancers en phase d’échappement hormonal.
• Suivi des patients : le suivi après traitement vise à détecter précocement une réci-
dive curable et à dépister les effets secondaires des traitements.
La surveillance est clinique et biologique (TR et PSA). Ces examens peuvent être
répétés tous les trois mois la première année, puis tous les six mois pendant deux
ans et tous les ans ultérieurement.


192 ◗
12_Chap10 Page 193 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

◗ TUMEURS DU REIN1
É. CABARROT

La situation profonde du rein et l’évolution silencieuse du cancer rénal expli-


quent, en l’absence de méthode de dépistage, la fréquence des formes locale-
ment avancées et des métastases inaugurales.

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Le cancer du rein, assez rare, représente 2 à 3 % des cancers humains, envi-
ron 5 000 cas en 1995 en France (données du réseau Francim, fig. 10.2).
L’incidence, qui progresse régulièrement de 2,4 % par an depuis 1985, peut
être reliée à l’usage abusif du tabac et à la fréquence des découvertes for-
tuites par échographie ou tomodensitométrie abdominale. La distribution
géographique se superpose à celle du cancer de la vessie, ce qui évoque
des facteurs étiologiques communs.

Âge
Le cancer du rein est plus fréquent chez l’homme (67 %) que chez la femme
et survient entre 50 et 70 ans.

Mortalité
La mortalité croit régulièrement avec l’âge et représente 2,3 % des décès par
cancer en France.

➤ Fig. 10.2. Évolution de l’incidence et de la mortalité des cancers du rein en France (Francim, 1995). ➤

Nombre de cas 6 000


annuels
5 000
4 000
Incidence
3 000
Mortalité
2 000
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

1 000
0 Années
1975 1980 1985 1990 1995

◗ Facteurs de risque
Rôle du tabac
La carcinogenèse rénale est mal connue. Le tabagisme est le principal facteur
de risque identifié pour les cancers à cellules claires. On observe un effet-dose

1. Item n° 158. Tumeurs du rein.


193 ◗
12_Chap10 Page 194 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

en fonction du nombre de paquets par année. Le risque relatif est de 1,6 à 1,9
par rapport aux non-fumeurs.

Autres facteurs
Dans les pays développés, on évoque le régime alimentaire trop calorique, pau-
vre en légumes et fruits frais, des intoxications professionnelles (amiante, cad-
mium, produits de nettoyage à sec).
Les patients en dialyse chronique et les greffés du rein ont un risque multiplié
par 30. Il en est de même de la maladie polykystique des reins et de la maladie
de von Hippel-Lindau.
Les cancers familiaux du rein sont exceptionnels, souvent bilatéraux et touchent
des patients jeunes.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Le cancer du rein à cellules claires est le type histologique prédominant (80 %).
La tumeur se développe à partir des cellules du tube contourné proximal. Les
cancers à cellules claires sont plus ou moins bien différenciés. Le grade histolo-
gique de Fuhrman est un bon indicateur de pronostic.
Les cancers à cellules granuleuses ou sarcomatoïdes sont des flexions morpho-
logiques de plus mauvais pronostic.
Les cancers tubulopapillaires (5 %) naissent du tube contourné distal. Les can-
cers de type oncocytaire (10 %) bénéficient d’un meilleur pronostic que les
autres formes.

◗ Évolution naturelle
Extension locale
Les cancers se développent dans la corticale du rein et se présentent comme une
masse de couleur jaune safran, de structure hétérogène, avec des zones de
nécrose hémorragique. À un stade ultérieur, la tumeur franchit la capsule et enva-
hit la graisse périrénale (plus de 50 % des cas) et au-delà du fascia de Gérota,
les organes voisins (paroi abdominale postérieure, foie, surrénales, coupole
diaphragmatique gauche). Vers le hile, la tumeur se propage à la veine rénale et
dans 10 % des cas à la veine cave inférieure. La classification de Kearney distin-
gue l’extension à la veine cave sous-hépatique, rétro-hépatique et sus-hépatique
du thrombus. Les tumeurs volumineuses sont souvent multifocales (10 % des
cas) et parfois les deux reins sont atteints de manière simultanée (2 %).

Extension lymphatique
Les ganglions du pédicule rénal sont envahis dans 30 à 40 %. Les relais ulté-
rieurs sont les ganglions lombo-aortiques. Le risque d’envahissement lymphati-
que est proportionnel à la taille tumorale.

Métastases
Le potentiel métastatique des cancers du rein est très élevé, 30 % se présentent
d’emblée avec des métastases. Les métastases sont pulmonaires et squeletti-
ques. Les métastases osseuses entraînent des ostéolyses, source de fractures
pathologiques parfois révélatrices.

194 ◗
12_Chap10 Page 195 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Troubles urologiques
Les cancers du rein sont révélés par une hématurie dans 60 % des cas, plus
rarement par des douleurs ou une masse abdominale. La triade séméiologique
est complète dans 10 % des patients, ce qui témoigne le plus souvent d’un
stade avancé.

Troubles non urologiques


Précédant de plusieurs mois le diagnostic, la difficulté est de les rattacher à un
cancer du rein :
– des troubles généraux avec fatigue, anémie, état fébrile prolongé, sueurs
nocturnes, amaigrissement inexpliqué ;
– un œdème du membre inférieur, une varicocèle gauche chez l’homme
ou une protéinurie, qui sont liés à une compression ou à une thrombose
de la veine rénale et/ou de la veine cave inférieure ;
– des douleurs osseuses ou une fracture pathologique d’un os long ;
– une métastase pulmonaire.

Syndromes paranéoplasiques
La polyglobulie est induite par une sécrétion d’érythropoïétine par le paren-
chyme péritumoral.
L’hypercalcémie est due à des métastases osseuses ou à la sécrétion d’un pep-
tide PTH-like.
Le cancer du rein peut être révélé par une amylose ou des perturbations du
bilan hépatique (syndrome de Stauffer).

Découverte fortuite
Depuis les années quatre-vingts, le recours fréquent et pour des causes diver-
ses, à l’échographie ou au scanner abdominal, permet de révéler des cancers
occultes, de plus petite taille et de meilleur pronostic. Cette circonstance repré-
sente actuellement, 30 à 40 % des diagnostics.

◗ Méthodes du diagnostic
Examen clinique
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

L’entretien précise les douleurs, à type colique néphrétique ou de lombalgie, et


le caractère total de l’hématurie. La palpation bimanuelle sur un patient décon-
tracté, en position couchée, retrouve pour les cancers du pôle inférieur, une
masse abdominale donnant un contact lombaire. La plupart des cancers du rein
ne sont palpables qu’à un stade évolué.

Examens complémentaires
L’échographie abdominale est l’examen le plus simple, mettant en évidence une
image de masse pleine, irrégulière et hétérogène intrarénale, ce qui permet de
la différencier d’un kyste. La fiabilité est assez bonne (de 50 à 70 %). Cepen-
dant, de petites tumeurs peuvent passer inaperçues.
Le scanner avec produit de contraste, élément déterminant du diagnostic, donne
une imagerie de haute fiabilité. Les caractéristiques sont l’irrégularité et l’hétéro-

195 ◗
12_Chap10 Page 196 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

généité du processus expansif, une infiltration de la capsule et de la graisse


périrénale, et la présence d’une néovascularisation. En cas de doute, le scanner
rend possible le guidage d’une ponction à l’aiguille fine.
L’IRM apporte une image tridimensionnelle de la tumeur et précise mieux que
le scanner l’envahissement cave.
La biopsie transpariétale à l’aiguille est indiquée dans les diagnostics difficiles.

◗ Diagnostic différentiel
Tumeurs bénignes
L’angiomyolipome est un hamartome, tumeur bénigne le plus souvent asymp-
tomatique et associant des tissus musculaires, vasculaires et graisseux. L’onco-
cytome se présente comme une tumeur dense, bien limitée et encapsulée,
dont le diagnostic est obtenu par l’examen pathologique. Les kystes solitaires
sont des formations avasculaires, anéchogènes, à paroi lisse et fine, avec ren-
forcement postérieur. Les kystes à paroi épaisse, les abcès du rein posent des
problèmes diagnostiques avec un cancer nécrotique (diagnostic par le contexte
clinique, la ponction ou l’exploration chirurgicale).

Tumeurs malignes
Les métastases intrarénales, les localisations rénales des lymphomes ne posent
pas de problèmes en raison du contexte clinique. Dans les cancers volumineux
refoulant les organes voisins, le diagnostic différentiel avec les tumeurs pararé-
nales (sarcomes rétropéritonéaux et tumeurs surrénaliennes) peut n’être obtenu
que par l’intervention chirurgicale.

◗ Évaluation préthérapeutique
Bilan d’extension
Le scanner abdominal, examen clé du bilan, recherche :
– l’envahissement de la graisse périrénale et des organes voisins ;
– un thrombus de la veine rénale ou de la veine cave inférieure ;
– des adénopathies pédiculaires et lombo-aortiques.
Le bilan biologique comprend une NFS, un BES, une calcémie, des tests hépa-
tiques et de la fonction rénale.
La recherche des métastases est évaluée par un scanner thoracique et par une
scintigraphie osseuse.
Une consultation pré-anesthésique est à prévoir pour les patients opérables.
L’urographie intraveineuse garde un intérêt dans l’évaluation fonctionnelle de
l’autre rein.
L’angiographie digitalisée a le plus souvent remplacé l’artériographie sélective,
sauf dans la perspective d’une embolisation préopératoire ou d’une chirurgie
conservatrice.
Il n’y a pas de marqueur sérique utile du cancer du rein.

Classification (tableau 10.VI)

Tableau 10.VI. Classification TNM des cancers du rein (1998)


Tumeur primitive
T1 Tumeur inférieure ou égale à 7 cm, limitée au rein
T2 Tumeur supérieure à 7 cm, limitée au rein


196 ◗
12_Chap10 Page 197 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

Suite du tableau 10.VI. ➤


T3 Tumeur étendue au-delà du rein
T3a : Tumeur envahissant la glande surrénale ou la graisse péri-rénale et
limitée au fascia de Gérota
T3b : Tumeur étendue à la veine rénale ou à la veine cave en dessous du
diaphragme
T3c : Tumeur étendue à la veine cave en dessus du diaphragme
T4 Tumeur envahissant au-delà du fascia de Gérota
Ganglions
N0 Pas de métastase aux ganglions régionaux lymphatiques
N1 Métastase dans un ganglion lymphatique régional
N2 Métastase dans plus d’un ganglion lymphatique régional
Métastases
M0 Pas de métastase à distance
M1 Métastases pulmonaires, osseuses, hépatiques, etc.

◗ Pronostic
Le paramètre prédominant est le stade (tableau 10.VII). Les cancers de stade I et II
ont des taux de survie de 60 à 75 %. Les chances de guérison sont de 40 à 50 %
pour le stade III et de 20 % en cas d’envahissement veineux ou ganglionnaire.
Les cancers métastatiques ont une médiane de survie inférieure à un an, avec
cependant 18 à 20 % de longs survivants à 5 ans. Les facteurs de mauvais
pronostic des cancers métastatiques sont :
– un index de performance OMS > 1 ;
– une perte de poids corporel > 10 % ;
– des métastases multiples ;
– un intervalle libre entre cancer primitif et rechute métastatique < 1 an ;
– une vitesse de sédimentation > 100.
Le cumul des facteurs a un effet additif sur le pronostic.

Tableau 10.VII. Regroupement par stades des cancers du rein


Stade TNM
I T1 N0 M0
II T2 N0 M0
III T3 N0 M0
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

T1-2-3 N1 M0
IV T4 N0-1 M0
Tout T N2 M0
Tout T Tout N M1

◗ Traitement des cancers du rein non métastatiques


◗ Chirurgie
Stades I et II
La néphrectomie radicale avec curage ganglionnaire hilaire, est le traitement
standard. Cette chirurgie implique la ligature première du pédicule rénal et la
résection en bloc du rein avec la graisse périrénale et le fascia de Gérota.

197 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

La chirurgie conservatrice, par néphrectomie partielle, est envisagée pour les


cancers sur rein unique, ou en cas d’insuffisance rénale, ou de cancer bilatéral.
Dans les autres cas, la néphrectomie partielle est controversée en raison de la
multifocalité des cancers du rein et du risque de récidive dans le rein restant.
Les bonnes indications sont des tumeurs inférieures à 3 cm et situées au niveau
d’un pôle.

Stade III
L’exérèse chirurgicale est élargie en fonction des envahissements locaux. Le
curage ganglionnaire lombo-aortique est recommandé dans les tumeurs T3 et
chaque fois qu’un envahissement est suspecté (N1 et N2).
Dans les cancers envahissant la veine rénale ou cave, une thrombectomie après
clampage veineux est indiquée. Pour les thrombus de la veine cave sus-hépati-
que, un by-pass cardiopulmonaire est nécessaire.
Une embolisation préopératoire réduit le saignement en cas de tumeur hyper-
vasculaire.

◗ Traitements adjuvants
Radiothérapie adjuvante
Il n’y a pas d’indication pour les cancers T1 et T2. L’irradiation du lit opératoire
est une option en cas de résection chirurgicale insuffisante, de rupture capsulaire
ou d’envahissement veineux ou lymphatique. L’irradiation postopératoire délivre
45 Gy en cinq semaines. Les organes critiques sont le foie, l’intestin.

Immunothérapie adjuvante
Trois essais randomisés n’ont pas démontré d’efficacité d’un traitement adjuvant
par IFNα par rapport à la chirurgie seule. D’autres essais sont en cours pour les
cancers à haut risque de récidive (pT3b, c, N1, N2 ou marges positives).

◗ Traitement des cancers du rein métastatiques


Les cancers du rein métastatiques ont une médiane de survie d’un an. L’objectif
est palliatif, faire régresser la tumeur, traiter les symptômes gênants, améliorer
la survie, en prenant en compte la qualité de vie du patient et les effets secon-
daires des traitements.

◗ Chimiothérapie
Le cancer du rein à cellules claires est le plus souvent résistant à la chimiothé-
rapie. Les agents les plus actifs sont le 5-FU et son métabolite le 5-FUDR. Les
réponses objectives sont de 10 à 15 %, en général de courte durée. L’associa-
tion de plusieurs médicaments n’améliore pas la survie.

◗ Immunothérapie
Interféron α (IFN)
C’est un immunomodulateur ayant une action antiproliférative. Le traitement par
IFN seul obtient 15 à 20 % de réponses objectives et seulement 2 à 5 % de
réponses complètes et six à dix mois de durée médiane de réponse. Le médi-

198 ◗
12_Chap10 Page 199 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

cament est administré en injection sous-cutanée ou intramusculaire. Les effets


secondaires sont importants, entraînant un syndrome pseudogrippal, des trou-
bles hépatiques et neuropsychiatriques.

Interleukine 2 (IL-2)
Cette molécule agit par activation du système immunitaire, en favorisant la mul-
tiplication des lymphocytes T. Le traitement par IL-2 obtient des réponses dura-
bles dans 15 à 20 % des cas, avec des taux de survie de 5 ans assez faibles.
L’IL-2 est administrée en injection intraveineuse, en hospitalisation dans un ser-
vice spécialisé, comportant une unité de soins continus. L’effet toxique le plus
important est un phénomène de perméabilité, conduisant à un œdème pulmo-
naire ou à un état de choc vasculaire. L’administration en injection sous-cutanée
fait l’objet d’études de phase II, donnant des résultats comparables et des effets
secondaires moindres.

◗ Rôle de la chirurgie des cancers métastatiques


La néphrectomie est discutée chez des patients ayant de bons critères de pro-
nostic (cf. supra), en particulier une métastase unique et, en cas de douleurs,
de fièvre ou d’hématurie persistante.
La néphrectomie ou l’exérèse de métastases est parfois proposée en complé-
ment de l’immunothérapie chez les patients répondeurs.

◗ Place de la radiothérapie
La radiothérapie améliore les douleurs des métastases osseuses, des parties
molles, l’hypertension intracrânienne des métastases cérébrales.
Au total, en raison de leur toxicité et de leur effet limité, les indications de la
chimiothérapie et des cytokines sont modulées en fonction du pronostic de la
maladie et de l’état du patient.

Points clés
• Étiologie, épidémiologie : le cancer du rein représente 2 à 3 % des cancers humains.
La situation profonde du rein et l’évolution silencieuse du cancer expliquent la fré-
quence des formes localement avancées et des métastases inaugurales.
• Histologie : le cancer du rein à cellules claires est le type histologique prédominant
(80 %).
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

• Diagnostic : les symptômes d’appel sont une hématurie, des douleurs, une masse
abdominale (triade complète chez 10 % des patients). Les troubles non urologiques
et les syndromes paranéoplasiques et sont souvent difficiles à rattacher à un cancer
du rein. La découverte fortuite, par une échographie ou un scanner pour des causes
variées, est fréquente.
• Les examens de choix sont l’échographie, le scanner et la résonance magnétique
nucléaire. La biopsie transpariétale à l’aiguille est indiquée dans les diagnostics difficiles
avec un kyste rénal solitaire.
• Bilan d’extension : le bilan d’extension comprend un scanner thoracoabdominal, un
bilan biologique (NFS, BES, calcémie, tests hépatiques, fonction rénale), une scintigra-
phie osseuse.


199 ◗
12_Chap10 Page 200 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés (suite)


• Traitement : pour les cancers de stades I et II, la néphrectomie radicale avec curage
ganglionnaire est le traitement standard. Pour les stades III, l’exérèse chirurgicale est
élargie à la demande. Il n’y a pas d’indication à un traitement adjuvant, en dehors de
la radiothérapie en cas de résection insuffisante.
• Pronostic : les cancers de stade I et II ont des taux de survie de 60 à 75 %. Les chances
de guérison sont de 40 à 50 % pour le stade III et de 20 % en cas d’envahissement
veineux ou ganglionnaire. Les cancers métastatiques ont une médiane de survie infé-
rieure à un an.

◗ TUMEURS DE LA VESSIE N. DALY-SCHVEITZER

◗ Épidémiologie
Les tumeurs de la vessie sont les deuxièmes plus fréquentes tumeurs urologi-
ques après les cancers de la prostate.
L’incidence en France est de l’ordre de 15 pour 100 000 chez l’homme et de
4 pour 100 000 chez la femme, avec un âge moyen de survenue à 70 ans.
Il existe plusieurs facteurs de risque connus :
– le tabagisme, en raison de la présence de substances carcinogènes pour
l’urothélium vésical dans les produits de combustion du tabac et de ses
enveloppes ;
– certains produits industriels comme l’aniline (colorant des textiles), des
hydrocarbures, de multiples composés utilisés dans l’industrie du caout-
chouc ou dans la métallurgie ;
– la bilharziose urinaire, notamment dans les pays d’endémie comme
l’Égypte, responsable de formes particulières de cancers vésicaux de type
le plus souvent épidermoïde.

◗ Diagnostic
◗ Symptomatologie
L’hématurie est le signe inaugural de loin le plus fréquent, présent dans près de
90 % des cas. Elle est habituellement terminale, indolore et intermittente, mais la
survenue d’une hématurie quel que soit son type doit faire penser à une éventuelle
tumeur vésicale notamment chez l’homme présentant des facteurs de risque.
Des signes associés peuvent exister à type de pollakiurie, de dysurie, de mictions
impérieuses.
Enfin, une symptomatologie liée à une extension métastatique est rarement
réellement inaugurale.

200 ◗
12_Chap10 Page 201 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

◗ Moyens du diagnostic
L’examen clinique est peu contributif sauf en cas de maladie très évoluée.
L’examen clé est la cystoscopie qui permet d’examiner l’ensemble du contenu
vésical et de biopsier toute anomalie visible. Elle permet en outre de topogra-
phier la lésion, d’en décrire la forme et de préciser si elle est unique ou multiple.

◗ Diagnostic anatomopathologique
Les carcinomes urothéliaux se développent à partir de l’épithélium urothélial fait
de couches cellulaires superposées (superficielle, intermédiaire et basale) formant
la muqueuse qui repose sur une membrane basale, elle-même séparée de la
couche musculaire périphérique par la lamina propria (ou sous-muqueuse).
Enfin, la vessie est entourée par une adventice et la graisse périvésicale.
Toutes les formes classiques de tumeurs épithéliales développées à partir des
muqueuses peuvent être rencontrées y compris les carcinomes in situ ou intraé-
pithéliaux souvent satellites de tumeurs plus infiltrantes.
Le grade tumoral est exprimé en trois niveaux de « bien différencié » à « peu
différencié ».
La classification TNM (tableau 10.VIII) est plus histologique que clinique dans la
mesure où l’essentiel du diagnostic est endoscopique et biopsique (fig. 10.3).

Tableau 10.VIII. Classification TNM des tumeurs de la vessie


T× T. locale non évaluable
T0 Absence de tumeur décelable
Tis Carcinome intraépitélial
T1 Envahissement du chorion
T2a Envahissement du muscle superficiel (moitié interne)
T2b Envahissement du muscle profond (moitié externe)
T3 Extension aux tissus périvésicaux (a, microscopique ; b,
macroscopique)
T4a Envahissement des organes génitaux voisins
T4b Envahissement de la paroi pelvienne ou abdominale
N× Extension ganglionnaire non évaluable
N0 Absence d’envahissement ganglionnaire
N1 Adénopathie unique < 2 cm
N2 Adénopathie unique entre 2 et 5 cm ou adénopathies toutes < 5 cm
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

N3 Adénopathie(s) > 5 cm

Pour ce qui est des tumeurs classées T1, il est habituel de distinguer les T1a
des T1b en fonction de l’absence ou de la présence d’une extension à la mus-
cularis mucosae.
Les tumeurs peuvent être sessiles mais, le plus souvent, elles sont polypoïdes
ou pédiculées voire exophytiques. Une des caractéristiques essentielles est la
fréquence des tumeurs multiples simultanées et/ou successives.
Le risque de récidive locale et d’extension métastatique est fonction du stade
mais aussi du grade. Ce dernier est plus particulièrement important pour les
tumeurs superficielles dont le risque de récidive intravésicale est fonction éga-
lement de l’existence ou non d’un carcinome in situ associé, de l’envahissement
de la membrane basale, de la multifocalité et du caractère macroscopique ses-
sile de la tumeur.

201 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 10.3. Représentation schématique des tumeurs de la vessie selon la classification T. ➤

1/2

T2 T3a
T1
Ta T3b
Tis 1-Épithélium
T4 T4 1 2-Tissu sous-épithélial
2 3-Muscle
3 4-Graisse périvésicale
4

◗ Explorations complémentaires
L’échographie est plus utile dans le suivi que lors du diagnostic initial.
L’UIV a été remplacée par le scanner.
La cytologie urinaire n’a d’intérêt que pour le diagnostic précoce dans les popu-
lations à risque.
Le scanner pelvien et l’IRM évaluent l’extension dans la paroi vésicale et recher-
chent un envahissement ganglionnaire notamment dans la région obturatrice.
Leurs sensibilité et spécificité ne sont patentes que pour les adénomégalies
supracentimétriques.
La recherche de localisations à distance comporte un cliché thoracique, une
scintigraphie osseuse en cas de signes d’appel, le foie ayant été exploré lors du
scanner abdominopelvien.

◗ Traitement
◗ Formes superficielles
La résection trans-uréthrale est en fait l’acte diagnostique biopsique initial et
peut constituer le premier acte thérapeutique.
Si la tumeur s’avère effectivement superficielle à l’examen de prélèvements lar-
ges ayant concerné nettement la couche musculaire et sans anomalies asso-
ciées (carcinome in situ notamment), le traitement peut s’arrêter là.

◗ Formes invasives
La cystoprostatectomie totale chez l’homme et la pelvectomie antérieure asso-
ciant cystectomie et hystérectomie chez la femme constituent les interventions
de référence pour les formes invasives ou les formes superficielles récidivantes.
Ces interventions comportent habituellement un temps de réparation fonc-
tionnelle par la création d’une néovessie, le plus souvent intestinale (iléale
ou colique) plus ou moins continente, ou nécessitant des sondages évacua-
teurs.

202 ◗
12_Chap10 Page 203 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

Si le remplacement vésical n’est pas possible une dérivation urétérale est réali-
sée, soit externe (urétérostomie cutanée) soit interne dans une anse digestive
non continente (intervention de Bricker) ou continente.
Ces dérivations font courir le risque de troubles métaboliques par réabsorption
urinaire, de complications septiques à type de pyélonéphrites récidivantes et
enfin d’insuffisance rénale à terme.

Alternatives à la chirurgie radicale

La radiothérapie pelvienne seule est un geste palliatif en cas de contre-indication


chirurgicale.
En revanche, son association simultanée à la chimiothérapie (sels de platine
notamment) peut représenter une alternative curative vraie pour les formes
invasives permettant la conservation de l’organe en cas de réponse complète
histologiquement vérifiée.
Pour les formes invasives localisées (T2), une curiethérapie des bords d’une
cystectomie partielle constitue une attitude conservatrice efficace.
La chimiothérapie ou l’immunothérapie intravésicales sont proposées pour les
formes superficielles récidivantes théoriquement redevables d’une cystectomie
totale. Il est possible d’utiliser de nombreux produits chimiothérapiques ainsi
que le BCG en instillations endovésicales répétées et sous contrôle endoscopi-
que étroit.

◗ Schéma thérapeutique
Compte tenu des conséquences fonctionnelles importantes de la chirurgie radi-
cale, l’attitude la plus fréquente est de proposer pour les formes superficielles
des approches conservatrices alliant la résection endoscopique éventuellement
répétée, les instillations endovésicales au long cours. S’il survient des récidives,
le risque est à l’apparition d’une forme invasive.
Pour les formes invasives, la cystectomie reste le traitement de référence même
si les protocoles conservateurs notamment radiochimiothérapiques sont de plus
en plus souvent retenus.

◗ Pronostic
Les cancers de vessie sont des maladies graves puisque la survie sans maladie
évolutive n’est supérieure à 50 % que pour les formes T1-T2.


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

CANCERS DU TESTICULE1
É. CABARROT

Le diagnostic des tumeurs malignes du testicule est dominé par les tumeurs
germinales (TG), qui représentent plus de 95 % des cas. Les tumeurs non ger-
minales sont des sarcomes, des localisations de lymphomes ou de leucémies,
ou dérivent des cellules non gonadiques, (cellules de Leydig et de Sertoli).
Le pronostic des TG a été transformé par l’introduction des sels de platine dans
le traitement. Ils peuvent être guéris, même au stade métastatique.

1. Item n° 160. Tumeurs du testicule.


203 ◗
12_Chap10 Page 204 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Épidémiologie
◗ Incidence
Les cancers du testicule représentent environ 1 à 2 % des cancers de l’homme,
mais constituent le cancer le plus fréquent entre 15 et 35 ans. L’incidence réelle
en France n’est pas connue. Elle a été estimée par le réseau Francim à 1 791
nouveaux cas par an. L’incidence mondiale a doublé en 40 ans. La répartition
est inégale, la maladie étant plus fréquente dans les pays scandinaves et faible
en Asie et en Afrique.

◗ Âge
Ce cancer survient chez l’adulte jeune entre 15 et 40 ans. L’âge moyen est de
25 ans pour les tumeurs non séminomateuses et 35 ans pour les séminomes.

◗ Mortalité
La mortalité observée en France était de 123 décès en 1995.

◗ Facteurs de risque
L’étiologie est inconnue. Un antécédent de cryptorchidie, d’orchite ourlienne ou
d’atrophie testiculaire est retrouvé dans 10 % des cas. En cas de cryptorchidie,
le risque relatif de cancer est majoré de 10 à 40 fois par rapport à la population
normale. La correction chirurgicale de la cryptorchidie ne semble pas diminuer
le risque, mais permet une surveillance plus facile de la glande. Le traumatisme,
souvent invoqué, n’est le plus souvent qu’un événement révélateur. Il existe
quelques cas familiaux.
Le syndrome de féminisation testiculaire et l’hypogonadisme masculin (syn-
drome de Klinefelter) augmentent également le risque de cancer.

◗ Pathologie
◗ Types histologiques
Les cancers du testicule dérivent de la lignée germinale à des étapes différentes
de l’histogenèse (fig. 10.4), expliquant la multiplicité des aspects morphologi-
ques et la fréquence des formes associées.
En pratique, on classe les TG en deux groupes.

Séminomes testiculaires purs (TS)

Ils représentent 35 à 40 % des TG, surviennent le plus souvent chez les hom-
mes entre 30 et 40 ans. Un séminome pur ne contient pas d’autres contingents
histologiques associés.

Tumeurs non séminomateuses (TNS)


Ces formes constituent 60 à 65 % des TG, les TNS s’observent chez les hom-
mes entre 15 et 25 ans. Les TNS comprennent plusieurs types histologiques :
– les carcinomes embryonnaires ;
– les tératomes matures ou immatures ;

204 ◗
12_Chap10 Page 205 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

– les tumeurs du sinus endodermique (du Yolk-sak ou de la vésicule


vitelline) ;
– les choriocarcinomes rares et caractérisés par la fréquence des métasta-
ses hématogènes.

Tumeurs polymorphes ou mixtes


Très fréquentes, elles associent plusieurs types histologiques, ce qui explique le
caractère éventuellement différent du type histologique entre le cancer primitif
et une métastase.

➤ Fig. 10.4. Schéma phylogénique des cancers du testicule. ➤

SÉMINOME CELLULE GERMINALE

Cellule embryonnaire pluripotente

TUMEUR GERMINALE NON SÉMINOMATEUSE

Tissus extra-embryonnaires Tissus embryonnaires

Trophoblaste Sinus endodermique Ectoderme Mésoderme Endoderme

CHORIOCARCINOME TUMEUR VITELLINE CARCINOME EMBRYONNAIRE et TÉRATOME

◗ Évolution naturelle
Le cancer se développe dans le parenchyme testiculaire, augmentant la taille de
la glande. L’albuginée est une membrane très résistante à l’envahissement
tumoral. Les enveloppes du testicule ou le scrotum sont exceptionnellement
envahis sauf en cas de biopsie du testicule par voie trans-scrotale. Le cancer du
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

testicule est en règle unilatéral, mais une seconde tumeur ou des états précan-
céreux peuvent se produire dans l’autre glande (5 % des patients).
L’extension lymphatique est fréquente (fig. 10.5). Les voies lymphatiques sui-
vent les veines spermatiques et atteignent directement les ganglions
lombo-aortiques. À gauche, les premiers relais sont latéro-aortiques, en dessous
du pédicule rénal gauche, au niveau de la deuxième vertèbre lombaire. À droite,
le premier ganglion envahi est situé au niveau de L3, à la face antérieure de la
veine cave inférieure ou en inter-aortico-cave. Les relais ultimes sont les gan-
glions médiastinaux puis sus-claviculaires. Les ganglions inguinaux ne sont pas
un relais normal, leur atteinte résulte d’une invasion du scrotum, à l’occasion le
plus souvent d’une chirurgie trans-scrotale.
Les métastases viscérales surviennent soit par l’intermédiaire du drainage lym-
phatique soit directement par les veines du cordon, expliquant les localisations
pulmonaires préférentielles.

205 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 10.5. Envahissement lymphatique des cancers du testicule. ➤

Premier relais
lombo-aortique



sous-rénal

◗ Diagnostic
◗ Symptômes
Dans deux cas sur trois, les patients consultent pour une gêne, une sensation de
pesanteur, associée à une masse intra-scrotale indolore et progressivement crois-
sante. Les diagnostics différentiels sont les orchites, les orchi-épididymites, une épi-
didymite tuberculeuse, une varicocèle ou une hydrocèle de la vaginale, les tumeurs
non germinales (sarcome, lymphome et leucémie, tumeurs non germinales).
Plus rarement, le problème est celui d’une douleur aiguë, irradiant vers le canal
inguinal, ou d’une masse inguinale (testicule ectopique). Dans un bon nombre
de cas, le cancer se révèle par une masse abdominale (adénopathie lombo-aor-
tique), une adénopathie sus-claviculaire ou une opacité pulmonaire. Une gyné-
comastie inaugurale est due à la production de gonadotrophine chorionique par
les cellules tumorales.

◗ Arguments du diagnostic
Anamnèse
On recherche les facteurs de risque de cancer.

Examen physique
La palpation bimanuelle, geste essentiel, retrouve une masse dure, hétérogène,
non douloureuse à la pression. Le temps capital est la recherche de la tête de
l’épididyme, qui reste séparée de la masse par un sillon. C’est le signe de Che-
vassu, plus difficile à apprécier dans les tumeurs volumineuses ou l’épididyme
est accolé ou englobé dans la tumeur.
À la transillumination, la masse est opaque, à la différence des kystes du cordon
et de l’hydrocèle vaginale qui sont translucides.
Dans les cancers, le cordon spermatique et le testicule opposé sont normaux,
de même que la prostate et les vésicules séminales au TR. Il n’y a pas de signe
infectieux urinaire clinique ou bactériologique (diagnostic différentiel avec les
épididymites).

206 ◗
12_Chap10 Page 207 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS UROGÉNITALES 10

Échographie
L’échographie testiculaire est l’examen de choix qui confirme la nature pleine et
la localisation intra-testiculaire de la masse.

Marqueurs tumoraux (tableau 10.IX)


Le dosage sérique de l’α-fœtoprotéine (AFP), de la fraction β de l’hormone cho-
rionique gonadotrophique (β-HCG), et de la lacticodéshydrogénase (LDH), est
indiqué avant toute thérapeutique, car le taux des marqueurs décroît en quelques
jours après orchidectomie. Plus des trois quarts des patients ayant une TG, ont
une élévation de l’un de ces marqueurs. L’augmentation de l’α-fœtoprotéine indi-
que un contingent de tissu vitellin et celle de la β-HCG un contingent de tissu
trophoblastique. La LDH traduit l’extension et l’évolutivité de la tumeur. Le taux
des marqueurs, corrélé au volume tumoral, constitue un élément du pronostic.
Environ 10 % des séminomes purs peuvent sécréter la β-HCG, mais jamais l’AFP.

Tableau 10.IX. Les marqueurs sériques des cancers du testicule


β-HCG Fraction bêta de l’hormone chorionique gonadotrophique
Sécrétée par le contingent trophoblastique
Demi-vie sérique de 1 jour
AFP Alpha-fœtoprotéine
Sécrétée par le contingent vitellin
Demi-vie sérique de 5 jours
LDH Lacticodéshydrogénase
Non spécifique des TG
Sécrétée essentiellement par les séminomes

◗ Diagnostic différentiel
Masses extratesticulaires
L’examen physique et l’échographie permettent de faire le diagnostic des mas-
ses extratesticulaires :
– une hydrocèle se présente comme une masse oblongue, ferme ou réni-
tente, translucide. Le testicule n’est pas palpable. L’échographie confirme
la nature liquide de l’épanchement ;
– un kyste du cordon est un nodule régulier, séparé du testicule et
translucide ;
– une varicocèle est une masse d’aspect vermiculaire siégeant autour de
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

l’épididyme et du cordon, affaissée en position couchée et tendue à la


toux et en position debout. La thrombose d’une varicocèle est plus diffi-
cile à diagnostiquer ;
– un hématome est évoqué devant un traumatisme net, mais il faut se
méfier d’une hémorragie intratumorale pouvant donner la même symp-
tomatologie. Une torsion du testicule donne un syndrome hyperalgique,
imposant en urgence une exploration chirurgicale ;
– une hernie inguinoscotale se prolonge vers le canal inguinal et est impul-
sive aux efforts de toux ;
– une orchi-épididymite aiguë est accompagnée d’un syndrome doulou-
reux et de signes infectieux cliniques et biologiques ;
– la tuberculose est un nodule froid, localisé sur la tête de l’épididyme,
s’accompagnant d’une déférentite et de signes d’imprégnation tubercu-
leuse.

207 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Masses testiculaires
Tout nodule testiculaire isolé doit être considéré comme un cancer jusqu’à
preuve du contraire et impose une exploration chirurgicale.

◗ Diagnostic pathologique
Le diagnostic de certitude est obtenu par l’orchidectomie réalisé par voie ingui-
nale avec ligature du cordon à l’anneau inguinal profond. L’examen histologique
de la pièce opératoire précise le type histologique et l’envahissement des vais-
seaux du cordon plus rarement des enveloppes testiculaires.

◗ Bilan d’extension
Il comprend :
– le dosage postopératoire des marqueurs tumoraux. Après orchidectomie, la
décroissance du taux des marqueurs est rapide, la demi-vie biologique de
l’AFP étant de cinq jours, celle de la β-HCG de 24 heures. Une décroissance
lente ou un taux résiduel élevé témoignent d’un résidu tumoral au niveau
des ganglions lombo-aortiques ou de métastases viscérales. La β-HCG peut
être élevée chez les patients ayant un séminome ou une tumeur non sémi-
nomateuse. L’AFP est seulement élevée chez les patients ayant une TNS
du testicule. Ainsi, un taux élevé d’AFP chez un patient ayant un séminome
histologiquement pur indique un composant occulte de cancer non sémi-
nomateux. Dans ce cas, le patient doit être traité comme une TNS ;
– une évaluation ganglionnaire et métastatique par scanner abdominothoraci-
que (localisations dans les ganglions iliaques, lombo-aortiques, métastases
hépatiques et pleuropulmonaires). Le scanner a remplacé la lymphographie
pédieuse dans le bilan des adénopathies. Un ganglion est considéré comme
pathologique lorsqu’il mesure plus de 2 cm, sans que cela préjuge formel-
lement d’un envahissement. Une ponction à l’aiguille au cours du scanner
peut permettre d’obtenir une cytologie positive, un résultat négatif n’ayant
pas de valeur formelle. La lymphadénectomie lombo-aortique chirurgicale
par voie transabdominale ou cœlioscopique est, finalement, la méthode la
plus fiable pour détecter des micrométastases. Elle constitue pour certaines
équipes, une aide à la stadification des TNS de stade I, séparant les patients
nécessitant une chimiothérapie en cas d’envahissement microscopique ;
– une TDM cérébrale, en cas de grosse masse abdominale et/ou de
métastases pleuropulmonaires ou médiastinales.

◗ Classification
La classification clinique la plus utilisée est celle du Royal Marsden Hospital de
Londres.
Stade I • Tumeur limitée aux testicules :
– TDM abdominopelvienne normale ;
– TDM thoracique normale ;
– marqueurs normaux ou normalisés après orchidectomie.
Stade II • Métastases ganglionnaires lombo-aortiques exclusivement :
– II A : ganglions de moins de 2 cm ;
– II B : ganglions entre 2 et 5 cm ;
– II C : ganglions de taille supérieure à 5 cm.
Stade III • Métastases ganglionnaires sus-diaphragmatiques.
Stade IV • Toute autre extension métastatique.

208 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

◗ Pronostic
Le pronostic des cancers du testicule a été transformé par l’efficacité de la chi-
miothérapie dans les cancers évolués et l’introduction du cisplatine dans les pro-
tocoles thérapeutiques.
Les paramètres du pronostic sont le type histologique et le stade de la maladie.

◗ Type histologique
Les séminomes sont classiquement de meilleur pronostic que les tumeurs non
séminomateuses ou à composante tissulaire mixte. Les chimiothérapies actuel-
les ont rapproché le pronostic des deux types histologiques ; en dehors des
choriocarcinomes purs qui conservent un pronostic plus défavorable.

◗ Stade de la maladie
Le cancer du testicule est l’un des rares cancers que l’on soit capable de guérir à
un stade métastatique. Cependant, certaines localisations restent péjoratives, en
particulier les métastases hépatiques cérébrales ou osseuses, un volume tumoral
important, particulièrement une masse abdominale palpable ou de plus de 10 cm
et des taux élevés de marqueurs sériques, AFP, β-HCG et LDH (tableau 10.X).

Tableau 10.X. Facteurs de mauvais pronostic des TGNS


AFP > 10 000 ng/ml
β-HCG > 50 000 UI/ml
LDH > 10 fois la normale
Siège des métastases Cerveau, foie, squelette
Siège de la TGNS primitive Médiastin

◗ Traitement
◗ Principes généraux
Le premier temps est l’orchidectomie par voie inguinale avec ligature du cordon
à l’anneau inguinal profond. L’analyse histologique précise le type de la tumeur
et recherche un contingent de carcinome embryonnaire, de tératome ou de
chorio-épithéliome. Il est capital de prélever du sérum avant l’orchidectomie
pour doser les marqueurs sériques et de refaire les dosages après orchidecto-
mie. Avant tout autre traitement, il convient de prévoir une procédure de
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

conservation du sperme et d’adresser les patients à un CECOS.


Les taux élevés de guérison supposent une prise en charge compétente et
adaptée au pronostic. L’objectif du traitement des TG du testicule est de ne pas
surtraiter les formes de bon pronostic afin de minimiser les séquelles et de ne
pas sous-traiter les cas de mauvais pronostic pour obtenir la guérison.

◗ Méthodes
Chirurgie
L’orchidectomie est un acte diagnostic et thérapeutique suffisant sur le cancer
primitif. La lymphadénectomie rétropéritonéale ou curage lombo-aortique
enlève les ganglions latéro-aortiques entre le pédicule rénal et la bifurcation aor-
tique à gauche et à droite, les ganglions pré- et latérocaves. L’intervention tente

209 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

de préserver la chaîne sympathique lombaire, ce qui évite la principale séquelle,


l’éjaculation rétrograde.
Le curage lombo-aortique aide à la décision thérapeutique, en détectant les
micrométastases ganglionnaires et en ciblant les patients susceptibles de béné-
ficier d’une chimiothérapie. Une autre indication de cette opération est l’exérèse
d’un résidu ganglionnaire après chimiothérapie.

Radiothérapie
Les séminomes sont des tumeurs hautement radiosensibles, à des doses assez
faibles de l’ordre de 20 à 30 Gy. Le volume cible sous-diaphragmatique englobe
les chaînes lombo-aortique et iliaque homolatérale. Le traitement fait appel aux
photons X de haute énergie.
La tolérance est en général excellente, compte tenu de la faible dose délivrée,
sans séquelles tardives notables.

Chimiothérapie
Les cancers du testicule sont chimiosensibles. Le médicament le plus efficace
est le cisplatine. Les deux protocoles de référence sont actuellement l’EP (éto-
poside, platine) et le BEP (platine, bléomycine, étoposide). Les cycles sont sépa-
rés de vingt-et-un jours et trois à quatre cycles sont en général suffisants.
D’autres protocoles sont réservés aux formes de plus mauvais pronostic.

◗ Traitement des séminomes


Les séminomes sont radio- et chimiosensibles. Les indications de la radiothéra-
pie tendent à se restreindre au traitement des ganglions lombo-aortiques.

Stades I, IIA et IIB


Le traitement de référence est la radiothérapie lombo-aortique et iliaque homo-
latérale. La dose varie de 25 à 35 Gy selon le volume tumoral. Le taux de gué-
rison est excellent, de l’ordre de 95 à 100 %.

Stades IIC et III


Le traitement de référence est la chimiothérapie : quatre cycles du protocole EP.
Les taux de guérison sont de l’ordre de 80 à 90 %.

◗ Traitement des tumeurs non séminomateuses (TGNS)


Les TGNS étant particulièrement chimiosensibles, le traitement de base est la
chimiothérapie. L’objectif est aujourd’hui de minimiser les séquelles thérapeuti-
ques potentielles compte tenu de la très haute curabilité de ces tumeurs.

TGNS de stade I
Trois options thérapeutiques sont discutées :
– lymphadénectomie rétropéritonéale unilatérale, suivie de chimiothérapie
en cas d’envahissement microscopique (environ 25 à 30 % des cas), ou
simple surveillance en l’absence d’envahissement ganglionnaire ;
– surveillance rapprochée comportant la première année un examen clini-
que, un dosage des marqueurs, une radiographie thoracique tous les
mois et un scanner abdominal tous les trois mois. Les rechutes s’obser-
vent dans 25 % au niveau rétropéritonéal et/ou pulmonaire, qui sont

210 ◗
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TUMEURS UROGÉNITALES 10

rattrapées dans 90 % par la chimiothérapie. Cette attitude évite aux trois


quarts des patients une chimiothérapie ou une intervention chirurgicale ;
– chimiothérapie adjuvante par deux cures de BEP.
Le choix est effectué avec le patient en fonction de ses préférences, de critères
de compliance à une surveillance étroite et par l’évaluation des facteurs de pro-
nostic (pente d’élimination des marqueurs, type histologique, présence d’embo-
lies vasculaires dans la tumeur et le cordon). Les trois options ont des taux de
guérison comparables, de l’ordre de 90 à 100 %..

TGNS de stades II, III, IV

Les chances de guérison sont d’environ 90 % dans le groupe des patients à


bon risque, elles se détériorent chez les patients à mauvais risque, et en parti-
culier lorsqu’il existe des métastases cérébrales, squelettiques, hépatiques, ou
en présence de taux très élevés de marqueurs.
Les patients de bon pronostic sont traités par trois cures de chimiothérapie. Pour
les formes de mauvais pronostic ou avec une grosse masse tumorale, la chi-
miothérapie comporte quatre cycles de BEP, suivis de l’exérèse des masses rési-
duelles. En cas de réponse histologique complète, le traitement peut être arrêté.
S’il persiste un résidu actif, une reprise de la chimiothérapie est envisagée. La
place des intensifications chimiques est à l’étude.

◗ Surveillance
La surveillance est justifiée par la possibilité de guérison des rechutes métasta-
tiques. Elle est essentielle dans les deux premières années où les rechutes sont
les plus fréquentes. Les séminomes purs demandent une surveillance prolon-
gée en raison de rechutes plus tardives ; par ailleurs 5 % des malades dévelop-
peront une tumeur germinale dans le testicule restant. Le pronostic de ces
seconds cancers est en général excellent.
La surveillance comporte :
– un examen clinique ;
– une tomodensitométrie abdomino-pelvienne ;
– une radiographie pulmonaire et/ou un scanner ;
– des dosages de marqueurs sériques ;
– une échographie scrotale du testicule restant.
La fréquence des examens est variable selon le stade initial et le traitement
choisi.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Points clés
• Les tumeurs germinales du testicule sont rares (1 à 2 % des cancers masculins). Ce
sont des cancers de l’adulte jeune, avec un maximum de fréquence entre 15 et 35 ans.
• Les cancers du testicule sont des tumeurs très chimio- et/ou radiosensibles. Le pro-
nostic a été transformé par l’introduction des sels de platine dans le traitement.
• Diagnostic : repose sur la palpation, l’échographie, le dosage des marqueurs tumoraux
(α-fœtoprotéine, β-HCG, LDH) et l’exploration chirurgicale sous la forme d’une orchi-
dectomie par voie haute.


211 ◗
12_Chap10 Page 212 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés (suite)


• Bilan d’extension : dosage postopératoire des marqueurs tumoraux, évaluation gan-
glionnaire et métastatique par scanner abdominothoracique et, dans certains cas, par
lymphadénectomie lombo-aortique, une TDM cérébrale pour les cancers évolués.
• Pronostic : il a été transformé par l’efficacité de la chimiothérapie dans les cancers
évolués ou à haut risque d’échec métastatique. Les paramètres essentiels du pronostic
sont le type histologique, le stade de la maladie, un volume tumoral important, des
taux élevés de marqueurs.
• Traitement : pour les séminomes de faible stade, le traitement fait appel à la radio-
thérapie lombo-aortique (guérison de 95 à 100 %). Pour les stades plus évolués
comme pour les tumeurs non séminomateuses, le traitement de référence est la
chimiothérapie.


212 ◗
13_Chap11 Page 213 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Tumeurs du sein1
11
É. CABARROT

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ◗ PRONOSTIC
◗ PATHOLOGIE ◗ TRAITEMENT
◗ DÉPISTAGE ◗ CAS PARTICULIERS
◗ DIAGNOSTIC ◗ TRAITEMENT DES CANCERS MÉTASTATIQUES
◗ BILAN D’EXTENSION, CLASSIFICATIONS ◗ SUIVI DES PATIENTES TRAITÉES

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE
◗ Incidence
Le cancer du sein représente 28 % des cancers de la femme et concerne envi-
ron 33 000 françaises chaque année (INSERM, 1995). Ainsi, une femme sur
dix ou douze a une probabilité de développer un cancer mammaire au cours
de la vie. L’incidence du cancer du sein a progressé entre 1975 et 1995 de
60 % en France comme dans tous les pays occidentaux (tableau 11.I).

Tableau 11.I. Évolution de l’incidence du cancer du sein en France


entre 1975 et 1995
1975 1985 1995
Nouveaux cas par an 19 253 25 099 33 867
Taux d’incidence pour 100 000 habitants* 66,9 83,7 110,1
* Standard européen.

◗ Prévalence
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

La prévalence (patientes atteintes et survivantes) de cette maladie est considé-


rable, estimée en 1990 à près de 290 000 femmes.

◗ Âge et sexe
Le cancer du sein peut s’observer avant 40 ans, mais le risque est très faible.
La probabilité pour une femme d’avoir un cancer dans les 10 ans qui suivent
est de 0,05 % à 20 ans et de 0,39 % à 30 ans. Après 40 ans, l’incidence croît
rapidement pour atteindre un pic entre 60 et 64 ans.
Les hommes sont atteints dans un ratio d’environ un homme pour 100 fem-
mes.

1. Item n° 159. Tumeurs du sein.



213 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Mortalité
Le cancer du sein constitue une maladie grave (environ 10 000 décès annuels
en France) et la première cause de décès des femmes entre 50 et 69 ans. Au
cours des deux décennies précédentes, la mortalité a augmenté moins vite
(8 %) que l’incidence (60 %), ce qui pourrait témoigner des progrès du dépis-
tage et des traitements.

◗ Facteurs de risque
◗ Risque génétique
Une histoire familiale de cancer du sein est souvent retrouvée. Il peut s’agir
d’une simple prédisposition ou d’un cancer héréditaire du sein. Le risque relatif
est multiplié par deux ou trois, pour une femme ayant une parente atteinte au
premier degré, et s’accroît encore si une parente a été atteinte avant 40 ans, ou
si elle a eu un cancer bilatéral.
Un cancer héréditaire est défini par la présence de trois personnes liées au pre-
mier degré et atteintes par un cancer du sein ou de l’ovaire, sur une ou plusieurs
générations. Un risque génétique est retrouvé dans 5 à 8 % de l’ensemble des
cancers du sein. Les mutations les plus fréquentes portent sur les gènes BRCA 1
du chromosome 17, BRCA 2 du chromosome 13 et dans le syndrome de
Li-Fraumeni sur le gène de la p53.

◗ Terrain hormonal
Une longue exposition aux œstrogènes (fenêtre œstrogénique) ou un déséqui-
libre œstroprogestatif observé au cours de la préménopause (cycles anovulatoi-
res, corps jaune déficient), constituent des états d’hyper-œstrogènie relative qui
expose à un risque majoré. On retrouve ainsi :
– la puberté précoce ;
– la nulliparité ;
– une première grossesse après 40 ans ;
– une ménopause au-delà de 52 ans.
En revanche, de nombreuses études de cas-témoins n’ont pas montré de risque
particulier lié à la contraception hormonale. Pour le traitement substitutif hormo-
nal (TSH) de la ménopause, le risque apparaît très faible, sauf pour une durée
de prise supérieure à 10 ans. Le TSH est cependant contre-indiqué chez les
patientes ayant un antécédent de cancer mammaire. De même, le TSH doit être
arrêté en cas de simple suspicion de cancer du sein.

◗ Régime alimentaire
Un régime riche en graisse et pauvre en végétaux peut expliquer la forte d’inci-
dence des cancers du sein dans les pays occidentaux par rapport au Sud-Est
asiatique ou en Afrique noire. Les agents carcinogènes de l’alimentation n’ont
pas été clairement identifiés. L’hypothèse est qu’un régime hypercalorique et
trop gras facilite une production excessive d’œstrogènes par aromatisation des
stéroïdes dans la graisse corporelle.

◗ Mastopathies bénignes
Les « mastopathies proliférantes » sont caractérisées par une hyperplasie cana-
laire et des dysplasies cellulaires, et constituent une pathologie à risque. Le ris-
que relatif est multiplié par six ou plus selon le type de mastoses et le risque

214 ◗
13_Chap11 Page 215 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SEIN 11

familial. Le diagnostic de « mastopathies proliférantes » est le plus souvent porté


par une biopsie chirurgicale pour des anomalies mammographiques (opacité ou
micro calcifications).

◗ Autres facteurs de risques


Ce sont le tabagisme, la consommation abusive d’alcool, une exposition à des
radiations ionisantes (radiographies itératives pour tuberculose ou pour correc-
tion de scoliose dans l’enfance, radiothérapie pour maladie de Hodgkin).

◗ PATHOLOGIE
◗ Types histologiques
Il existe de nombreux types histologiques de cancer du sein :
– le cancer canalaire infiltrant (CCI) est le plus fréquent (75 % des cas).
Le processus se développe à partir de l’unité ductulolobulaire (canal pré-
lobulaire) et passe le plus souvent par des états d’hyperplasie atypique
et de carcinome in situ1 ;
– le cancer lobulaire infiltrant (CLI) représente 10 % des cancers infiltrants.
Les CLI sont le plus souvent multicentriques et bilatéraux. Leur pronostic
est similaire à celui des CCI ;
– le cancer canalaire in situ (CCIS) s’étend dans les galactophores, sans
franchir la membrane basale. L’aspect clinique le plus courant est le
comédocarcinome, caractérisé par le dépôt dans la lumière des galacto-
phores d’un matériel nécrotique, dont la calcification permet un dépis-
tage précoce par mammographie. Le CCIS évolue vers un cancer infiltrant
en 5 à 10 ans ;
– le cancer lobulaire in situ (CLIS) se développe à partir des lobules mam-
maires. Le diagnostic de CLIS est porté sur un matériel de biopsie du
sein pour microcalcifications. L’évolution vers un carcinome infiltrant (CLI
ou CCI) n’est pas inéluctable, ce qui fait considérer le CLIS, davantage
comme un marqueur de risque que comme un cancer ;
– les types tubulaire, médullaire, mucineux et papillaire sont plus rares et
de pronostic meilleur que les formes communes ;
– la maladie de Paget du sein se développe à partir de l’épithélium des
canaux terminaux et se propage au mamelon par des cellules claires,
décrites par Paget. Le plus souvent, la tumeur est à un stade intracana-
laire et le pronostic est favorable.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Évolution naturelle
◗ Extension locale
Le seuil de détection clinique des cancers du sein, qui est en moyenne de 1 à
2 cm, dépend de la situation de la tumeur dans la glande, de la proximité de
la peau et du volume du sein. Une tumeur infraclinique peut seulement être
détectée par une mammographie de dépistage. À un stade plus évolué, le can-
cer se fixe à la peau, au mamelon et au muscle pectoral.

1. Cf. item n° 138, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson,
2002.


215 ◗
13_Chap11 Page 216 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Envahissement lymphatique
Le drainage principal se fait vers les ganglions axillaires (fig. 11.1). Les ganglions
de la partie basse de l’aisselle (niveau I de Berg) sont envahis les premiers et
successivement les ganglions du niveau II en arrière du muscle petit pectoral et
du niveau III, sous-claviculaires.
Le risque d’envahissement ganglionnaire est nul dans les CCIS et, par la suite,
croît proportionnellement à la taille du cancer primitif. Le nombre des ganglions
envahis reste le meilleur index de pronostic actuel.
Les ganglions de la chaîne mammaire interne et du creux sus-claviculaire sont
concernés dans les localisations internes et centrales. Ces ganglions n’étant pas
aisément évaluables, il est important d’estimer le risque statistique de leur
envahissement : il est de 25 à 30 % en cas de N+ axillaire et à 5 % en cas de
N– axillaires.

➤ Fig. 11.1. Voies d’extension lymphatique des cancers du sein. ➤

◗ Métastases
Le risque métastatique, faible pour des tumeurs de moins de 5 mm, croît pro-
portionnellement avec la taille de la tumeur primitive et le nombre de ganglions
axillaires pathologiques (N+).
Les sites atteints sont par ordre de fréquence (fig. 11.2) :
– le squelette, avec des métastases ostéolytiques, plus rarement
condensantes ;
– l’appareil respiratoire, sous la forme de nodules pulmonaires multiples,
d’une lymphangite carcinomateuse, ou d’un épanchement pleural
sérohémorragique ;
– le foie ;
– le cerveau, les méninges.


216 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

➤ Fig. 11.2. Extension métastatique préférentielle des cancers du sein. ➤

Cerveau-méninges

Poumons
plèvre

Foie

Squelette
axial, fémur,
côtes

◗ DÉPISTAGE
◗ Dépistage individuel
L’interrogatoire permet d’individualiser les femmes à risque et de proposer à ces
patientes un dépistage par un examen médical périodique des seins et une
mammographie tous les deux ans.

◗ Dépistage collectif
La fréquence et la gravité du cancer du sein rendent compte de la nécessité
d’un dépistage de masse. L’objectif est de détecter le cancer à un stade précoce,
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

dans une population de femmes asymptomatiques. Le test de dépistage est la


mammographie qui présente une excellente fiabilité notamment après la méno-
pause. Le dépistage avant 50 ans est plus discutable en raison de la densité
glandulaire importante chez les femmes non ménopausées et d’une valeur pré-
dictive moins bonne de la mammographie à cet âge.
Au plan technique, la mammographie comprend deux incidences de face et
oblique à 45°. Elle est interprétée par deux radiologues indépendants, avec pos-
sibilité d’une troisième lecture en cas d’interprétation difficile. Le test est proposé
tous les deux ans chez les femmes d’âge compris entre 55 et 70 ans.
Des essais randomisés ont démontré que le dépistage collectif par la mammo-
graphie était capable de réduire la mortalité globale par cancer du sein d’environ
30 %. Parallèlement, les cancers dépistés sont plus petits et ont un moindre
taux d’envahissement axillaire. Le problème est, en France, le faible taux de par-
ticipation aux campagnes de dépistage.

217 ◗
13_Chap11 Page 218 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ DIAGNOSTIC
◗ Signes et symptômes
◗ Nodule mammaire
C’est le motif de consultation le plus fréquent en sénologie. Les cancers du sein
palpables sont découverts le plus souvent par la patiente elle-même, souvent
au cours de la toilette et, plus rarement, lors d’un examen médical de routine.
Le nodule est indolore, situé dans 60 % des cas dans le quadrant
supéro-externe du sein.

◗ Examen de dépistage
L’image anormale est, en mammographie, une opacité à contours étoilés ou un
foyer de microcalcifications, plus rarement une image hypoéchogène en écho-
graphie.

◗ Écoulement du mamelon
En cas de cancer, l’écoulement se produit par un pore unique. Il est typique-
ment sérosanglant, spontané, unilatéral, isolé ou associé à une masse du sein.

◗ Maladie de Paget du sein


La maladie de Paget est caractérisée par une plaque rouge, suintante, s’étendant
lentement du mamelon vers l’aréole et persistant malgré l’application de crèmes
aux corticoïdes.

◗ Signes inflammatoires cutanés


Un cancer peut débuter par une rougeur et un œdème, parfois une chaleur
locale ou des douleurs. L’atteinte de tout le sein constitue le tableau de la
« pseudomastite carcinomateuse ».

◗ Adénopathie axillaire, métastase osseuse


Les métastases révélatrices sont rares et témoignent d’un cancer primitif ignoré
et qu’il faut rechercher.

◗ Méthodes du diagnostic
◗ Interrogatoire
L’anamnèse recherche les facteurs de risque de cancer.

◗ Examen physique
Il est capital et doit inclure l’inspection et la palpation des deux glandes mam-
maires, des aisselles et des creux sus-claviculaires.
L’inspection de la patiente en position assise, torse dénudé, bras baissés, puis
levés, recherche une voussure ou un signe du capiton, une rougeur ou une
majoration du volume d’un sein, une anomalie du mamelon (rougeur, déviation,
invagination).

218 ◗
13_Chap11 Page 219 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SEIN 11

La palpation des seins sur une patiente couchée, bras derrière la tête, recherche
un nodule et en précise les caractères orientant vers la malignité : induration,
contours flous et irréguliers, fixation ou épaississement de la peau (signe du pli,
signe de la peau d’orange).
La palpation de l’aisselle et du creux sus-claviculaire recherche une adénopathie,
typiquement indurée dans les cancers.

◗ Mammographie
La mammographie est l’examen essentiel en raison d’une fiabilité élevée (envi-
ron 90 %). Elle est pratiquée sur les deux seins avec deux incidences par sein
et parfois des clichés agrandis. Les images en faveur d’un cancer sont
(fig. 11.3) :
– une opacité de contours flous et irréguliers, typiquement spiculée dans
un cancer ;
– des microcalcifications groupées en foyer et en nombre supérieur à
10 par cm2. La classification de Legal permet d’apprécier l’aspect en
faveur de la malignité. Les calcifications en bâtonnets ou fourches
(type 4 et 5) correspondent à un cancer dans 75 et 100 % des cas.
L’aspect en « grains de sel » (Legal 3) est un signe de cancer dans un
cas sur deux ;
– un épaississement de la peau, un halo d’œdème péritumoral.

➤ Fig. 11.3. Mammographie (cliché de profil) montrant une opacité hétérogène spiculée avec attraction
tégumentaire et microcalcifications correspondant à un adénocarcinome canalaire invasif. ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Échographie
L’échographie complète utilement la mammographie quand celle-ci n’est pas
concluante (10 % des cas), par exemple devant une densité glandulaire exces-
sive (mastose fibreuse), des opacités multiples (mastose kystique), une distor-
sion architecturale, un nodule clinique non visible en mammographie.
L’aspect échographique d’un cancer est une image hypoéchogène, irrégulière et
de structure hétérogène. L’échographie est particulièrement utile dans le dia-

219 ◗
13_Chap11 Page 220 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

gnostic des kystes, avec une image anéchogène arrondie ou ovalaire, de contour
net et de grand axe parallèle à la peau.

◗ Ponction à l’aiguille fine (Paf)


La Paf finalise le diagnostic de lésion kystique, en évacuant un liquide séreux.
En cas de nodule plein, le contenu de l’aiguille est étalé sur une lame, fixé et
adressé au laboratoire pour une étude cytologique (cytoponction et
cytodiagnostic)1 :
– cytologie positive : la présence de cellules malignes est un élément fort
du diagnostic, en raison de la rareté des faux positifs ;
– cytologie négative (cellules glandulaires bénignes) ou non significative
(absence de cellules glandulaires) : un résultat négatif n’exclut pas le dia-
gnostic de cancer. Les faux négatifs de la méthode sont dus à une erreur
technique dans les petits nodules, ou à une difficulté d’identification de
cellules malignes provenant de cancers très différenciés.
La fiabilité de la cytoponction est proportionnelle à l’expérience de l’opérateur
et du cytologiste.

◗ Microbiopsie
La microbiopsie, sous anesthésie locale, ramène des carottes de tissu tumoral.
L’étude histologique des prélèvements détermine le diagnostic, le type histolo-
gique, l’histopronostic et la présence des récepteurs hormonaux. Sa fiabilité est
supérieure au cytodiagnostic.

◗ Biopsie chirurgicale
La tendance actuelle tend à obtenir la preuve préopératoire de la malignité par
le triplé radiocytoclinique ou par une microbiopsie. En cas de résultat non signi-
ficatif de ces examens, il faut toujours recourir à une biopsie chirurgicale et à
l’examen histologique extemporané.

◗ Procédures diagnostiques
◗ Nodule du sein
La survenue d’une masse dans le sein impose, dans un premier temps, un exa-
men clinique minutieux, une mammographie et éventuellement une échogra-
phie (fig. 11.4). Ces examens permettent de décider un complément
d’investigation par cytoponction ou microbiopsie et, dans les cas restant dou-
teux, par biopsie chirurgicale et l’examen anatomo-pathologique extemporané.
L’avantage de la microbiopsie préopératoire sur la chirurgie, est de pouvoir infor-
mer la patiente du diagnostic de malignité avant l’intervention, ce qui permet de
définir avec elle les modalités opératoires.

1. Cf. item n° 140, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson,
2002.


220 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

➤ Fig. 11.4. Algorithme de diagnostic des nodules du sein. ➤

Nodule mammaire

Examen clinique
Mammographie
+/– échographie

Fibro- Cancer ?
Kyste
adénome Noyau de mastose ?

Ponction à l’aiguille fine Cytoponction*


Cytoponction*
Liquide clair ou séreux Ou microbiopsie

Négative**
Stop Surveillance Positive***
Non
Surveillance Exérèse chirurgicale
significative

Biopsie Bilan
chirurgicale d’extension
Traitement

* La cytoponction comprend la ponction à l’aiguille fine et l’étude cytologique de l’étalement.


** Absence de cellules malignes.
*** Présence de cellules malignes.

Les caractères distinctifs des nodules mammaires bénins sont les suivants :
– un kyste de survenue brusque, souvent en période prémenstruelle,
forme un nodule rond, mobile, sensible, de contour net. L’échographie
et la Paf assurent le diagnostic dans une majorité de cas ;
– un fibroadénome, tumeur bénigne de la jeune femme (15-35 ans), a un
aspect clinique et mammographique de masse ovalaire ou polylobée, à
contours nets et à structure homogène. En échographie, l’image hypoé-
chogène a un grand axe parallèle à la peau. Le nodule est indolent, élas-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tique et mobile. L’exérèse chirurgicale ou une microbiopsie en établissent


définitivement le diagnostic ;
– la mastopathie fibrokystique pose les problèmes de diagnostic les plus
difficiles, car la mastose a tendance à former des plages de sclérose indu-
rée et la densité mammographique qui en résulte risque de masquer un
cancer. La biopsie chirurgicale est le recours ultime.

◗ Image mammographique anormale,


sans nodule clinique
Il peut s’agir de microcalcifications ou d’opacités infracliniques :
– les microcalcifications, classées 3, 4 et 5 dans la classification de Legal
(fig. 11.5), doivent être expertisées par biopsie-exérèse chirurgicale, sous

221 ◗
13_Chap11 Page 222 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

anesthésie générale. L’emplacement du foyer est repéré avant l’interven-


tion par l’implantation sous guidage mammographique d’un fil repère
(harpon). Une radiographie de la pièce opératoire confirme l’ablation des
microcalcifications et l’étude histologique différée, en détermine la nature
bénigne ou maligne ;
– les opacités peuvent être explorées par cytoponctions ou microbiopsies
guidées par échographie mais, dans tous les cas douteux, une biopsie
chirurgicale après repérage mammographique est indiquée.
Le diagnostic ambulatoire des images infracliniques est actuellement possible
dans les centres spécialisés par des biopsies guidées par des mammographes
numériques dédiés aux microbiopsies (mammotome).

➤ Fig. 11.5. Algorithme du diagnostic des microcalcifications du sein (voir dans le texte la classification
de Legal). ➤

Microcalcifications du sein

Nodule Absence de nodule

Legal 1 et 2 Legal 3, 4, 5
Algorithme Nodule

Exérèse chirurgicale après


repérage par harpon
Dépistage 2 ans ou
Microbiopsie radioguidée
au mammotome

◗ Écoulement du mamelon
Les écoulements bilatéraux sont le plus souvent d’étiologie bénigne, qu’il
s’agisse d’une mastose, d’une ectasie canalaire ou de cause endocrinienne
(adénome hypophysaire à prolactine). Les écoulements unilatéraux et unica-
nalaires doivent conduire à l’exérèse chirurgicale par galactophorectomie ou
pyramidectomie (fig. 11.6). L’examen histologique révèle la cause de l’écou-
lement avec, par ordre de fréquence, un papillome bénin, une galactophorite
ectasiante et, dans moins de 1 % des cas, un cancer intracanalaire ou infil-
trant.

◗ Maladie de Paget du sein


La maladie de Paget est l’envahissement du mamelon par un carcinome déve-
loppé à partir des canaux galactophores terminaux. Le diagnostic est facilité par
l’association d’une plaque rouge du mamelon et d’une masse sous-jacente. Si

222 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

➤ Fig. 11.6. Algorithme de diagnostic des écoulements du mamelon. ➤

Écoulements du mamelon

Séreux ou laiteux Sanglant


Présence
Multipore Unipore
d’un nodule
Bilatéral Unilatéral

Adénome hypophysaire à prolactine


Organigramme Galactophorectomie
Mastose
Nodule Pyramidectomie
Ectasie galactophorique

la lésion mamelonnaire est isolée, le diagnostic requiert une biopsie du mame-


lon ou de l’aréole. L’examen histologique révèle l’infiltration de la peau par des
cellules carcinomateuses très claires (cellules de Paget).

◗ Cancer inflammatoire
Un aspect inflammatoire du sein a le plus souvent une origine infectieuse :
abcès lactationnel, abcès récidivant péri-aréolaire, mastite subaiguë (galactopho-
rite ectasiante ou rupture d’un kyste). Parfois, il accompagne un cancer évolutif.
Le diagnostic de cancer inflammatoire est facilité par la coexistence de signes
inflammatoires et d’une masse tumorale ou d’adénopathies indurées. La prise
en charge requiert une biopsie cutanée à la recherche d’une lymphangite néo-
plasique du derme, une biopsie d’une masse palpable ou l’exérèse d’un gan-
glion axillaire.

◗ Mastodynies
Les douleurs pariétales, induites par une arthrose chondrocostale ou une névral-
gie intercostale, sont reconnues par l’examen clinique. Les douleurs mammaires
peuvent parfois conduire au diagnostic de cancer, mais la cause la plus fré-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

quente des mastodynies est la congestion prémenstruelle des mastopathies


bénignes (synonymes : mastose sclérokystique, maladie de Reclus). La mastose
associe des lésions multiples de fibrose, d’hyperplasie canalaire (adénose) et
de dilatations kystiques de toute taille. La densité parenchymateuse qui en
résulte est un obstacle au dépistage radiologique. Au maximum de la difficulté,
l’adénose sclérosante ou nodule d’Aschoff, donne une image d’opacité étoilée,
rameuse, très proche d’un cancer. En cas de doute, il faut recourir à des clichés
centrés et agrandis, à l’échographie, à des ponctions guidées et souvent à une
biopsie chirurgicale.


223 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ BILAN D’EXTENSION, CLASSIFICATIONS


◗ Examens

◗ Bilan clinique
La taille tumorale, la fixation à la peau ou à la paroi thoracique, l’association de
signes inflammatoires et les adénopathies axillaires et sus-claviculaires, sont éva-
luées par l’examen clinique, une tumeur multifocale ou bilatérale par la mam-
mographie.

◗ Bilan d’extension
Environ 5 % des patientes ayant un cancer localisé ont en fait des métastases
asymptomatiques. Orienté vers les cibles métastatiques les plus fréquentes, le
bilan comprend systématiquement (sauf pour les cancers intracanalaires et pour
certaines équipes, les tumeurs infracentimétriques) :
– une scintigraphie osseuse du corps entier et des radiographies centrées sur
les éventuels foyers fixant anormalement l’isotope (technétium 99 m) ;
– un cliché thoracique ;
– une échographie hépatique ;
– un bilan biologique avec NFS, BES, enzymes hépatiques, bilan d’hémos-
tase, calcémie. Le dosage du marqueur CA 15-3 est indiqué dans les
cancers T3 etT4 et métastatiques, et à titre de référence pour les autres ;
– une consultation d’anesthésie.

◗ Classification préthérapeutique
La classification internationale TNM (UICC) prend en compte la tumeur primitive
(T), l’état des ganglions axillaires (N) et l’existence de métastases (M).

◗ Classification TNM des cancers du sein (fig. 11.7)


– T0 : tumeur non palpable ;
– T1 : tumeur inférieure ou égale à 2 cm ;
– T2 : tumeur supérieure à 2 cm et inférieure ou égale à 5 cm ;
– T3 : tumeur supérieure à 5 cm ;
– T4 : tumeur étendue à la peau (T4a), à la paroi (T4b), aux deux (T4c)
et tumeurs inflammatoires (T4d) ;
– N0 : absence de signe d’envahissement ganglionnaire axillaire ;
– N1 : ganglions axillaires métastatiques et mobiles ;
– N2 : adénopathies axillaires fixées entre elles ou aux parois de l’aisselle ;
– N3 : envahissement des ganglions mammaires internes ;
– M0 : absence de métastases ;
– M1 : métastases (adénopathies sus-claviculaires incluses).
En l’absence de données suffisantes, les patientes sont cotées T×, N×, M×.
Après une intervention chirurgicale, la classification pathologique est exprimée
en pT, pN (p pour pathological). L’état ganglionnaire est symbolisé par les
notations N– (absence d’envahissement) et N+ (adénopathie(s) métastati-
que(s)).

224 ◗
13_Chap11 Page 225 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SEIN 11

➤ Fig. 11.7. Classification TNM clinique des cancers du sein. ➤

>5 cm
<2 cm >2<5 cm

a,b,c

T1 T2 T3 T4

N0 N1 N2 N3

◗ PRONOSTIC Les cancers du sein ont une évolution longue, difficilement prévisible. L’évaluation
du pronostic cherche à identifier les malades à haut risque de rechute, en vue de
cibler les traitements adjuvants (radiothérapie, chimiothérapie, hormonothérapie).

◗ Pronostic des cancers localisés


Les principaux facteurs du pronostic sont la taille tumorale, le grade histologique, le
nombre de ganglions axillaires pathologiques et l’âge de la patiente. Les paramètres
biologiques (ploïdie, Ki 67, p53) n’ont pas une valeur pronostique indépendante et
sont moins utilisés en pratique. D’autres facteurs, comme les récepteurs hormonaux
ou le récepteur HER-2 (membre de la famille des récepteurs à l’EGF) sont des indi-
cateurs biologiques de la réponse aux thérapies.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Ganglions axillaires
Le nombre de ganglions axillaires envahis (N+) est le meilleur facteur prédictif
de la survie et du risque de « maladie résiduelle ». Le pronostic péjoratif des
patientes N+ a conduit à proposer des traitements adjuvants. Les patientes sans
envahissement ganglionnaire (N–) ont un bon pronostic avec des taux de survie
à 5 ans de 80 % et plus. Pour identifier le groupe des 20 % des patientes N–
à risque de rechute, on recourt à des critères biologiques complémentaires,
comme l’état des récepteurs hormonaux et le grade histologique.

◗ Taille tumorale
Les taux de survie sont étroitement corrélés à la taille de la tumeur mammaire.
Ce paramètre affine le pronostic, quel que soit le statut axillaire (N– et N+). Par

225 ◗
13_Chap11 Page 226 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

exemple, une patiente ayant un cancer d’une taille inférieure à 1 cm, sans enva-
hissement axillaire, a une chance de guérison très élevée, supérieure à 95 %.
À l’opposé, une tumeur T3 est péjorative, même en l’absence d’envahissement
axillaire.

◗ Grade d’histopronostic
Le grade de Scarff, Bloom et Richardson (SBR) est déterminé à partir de trois
critères : le degré de différenciation (aptitude à former des tubules), les anoma-
lies des noyaux (anisocaryose) et l’index mitotique (nombre de mitoses par
champ). Les patientes sont gradées de 1 à 3, le grade 1 indiquant une tumeur
bien différenciée et de bon pronostic. Un grade 3 indique une tumeur peu dif-
férenciée et de pronostic péjoratif. Le grade SBR est utile pour décider les trai-
tements adjuvants dans des tumeurs classées N–.

◗ Âge et ménopause
Les patientes les plus jeunes, en dessous de 35 ans, ont un pronostic plus défa-
vorable. Ce facteur est le plus souvent lié à l’envahissement ganglionnaire et au
grade. On en tient compte en cas de décision incertaine.
Par ailleurs, le statut ménopausique est un élément du choix des traitements
adjuvants, la chimiothérapie apparaissant plus efficace avant la ménopause et
l’hormonothérapie chez les patientes ménopausées.

◗ Récepteurs hormonaux (RH)


Les récepteurs à l’œstradiol (RO) et à la progestérone (RP) sont recherchés en
immunohistochimie sur la tumeur elle-même. Les patientes ayant des taux éle-
vés de RH ont de meilleures chances de guérison que celles ayant des RH
négatifs. De plus, la présence de RH est un test d’hormonodépendance, indi-
quant une probabilité de réponse à l’hormonothérapie.

◗ Autres facteurs biologiques


Ils permettent la caractérisation biologique de la maladie, mais leur place dans
le traitement des cancers localisés n’est pas clairement établie :
– cytométrie de flux (étude de la ploïdie et de la fraction de cellules en
phase S) ;
– cathepsine D (protéase dégradant le stroma et caractérisant l’invasion
tumorale). La détection est faite sur la tumeur en immunohistochimie ;
– amplification de l’oncogène HER-2, qui code un membre de la famille
des récepteurs à l’EGF.

◗ Pronostic des cancers métastatiques


En phase métastatique, la maladie est incurable, la durée médiane de survie
d’environ deux ans, mais des survies longues sont parfois observées. L’évalua-
tion du pronostic est un élément essentiel de la prise en charge de ces malades.
Les paramètres sont essentiellement cliniques :
– l’intervalle libre, qui est l’espace de temps séparant le diagnostic initial et
la survenue des métastases. Plus il est long, meilleur est le pronostic ;
– le siège des métastases, qui est étroitement corrélé avec l’évolution. Les
métastases osseuses sont plus favorables que des métastases viscérales,
en particulier cérébroméningées et hépatiques ;

226 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

– la masse tumorale joue un rôle majeur. Par exemple, une patiente ayant
de multiples localisations encéphaliques a une espérance de vie de six
mois, tandis que des survies longues sont possibles avec une métastase
osseuse, isolée et traitée ;
– le taux des marqueurs tumoraux (CA 15-3, ACE) est également corrélé
à la masse tumorale. L’évolution des marqueurs sériques permet d’éva-
luer la réponse thérapeutique.

◗ TRAITEMENT
◗ Prévention
Le régime alimentaire des pays occidentaux peut expliquer la forte incidence du
cancer du sein en Occident par rapport aux pays d’Asie et d’Afrique. Les recom-
mandations de prévention sont de manger davantage de fruits et légumes et
de réduire la consommation de viande et de graisses animales1. La place des
vitamines A, C, E et des oligo-éléments (sélénium) dans la prévention n’a pas
été confirmée par des résultats cliniques probants.
La chimioprévention par le tamoxifène (anti-œstrogène) a été proposée chez
les patientes à haut risque familial et personnel de cancer du sein (mastopathie
atypique, carcinome lobulaire in situ). Les résultats des essais randomisés sont
contradictoires, très favorables dans l’étude américaine (NCI), non significatifs
dans deux études prospectives européennes. Actuellement, ce mode de pré-
vention n’est pas recommandé en France, en raison des effets secondaires du
tamoxifène, en particulier le risque de cancer de l’endomètre. D’autres essais
testent le raloxifène (anti-œstrogène plus spécifique).

◗ Traitement des cancers localisés


Historiquement, la chirurgie d’exérèse est le traitement initial des cancers loca-
lisés du sein. Depuis les années soixante-dix, la chirurgie est devenue plus
conservatrice et s’intègre dans une approche multidisciplinaire.

◗ Chirurgie
Les modalités sont variables.

Tumorectomie-curage
Au niveau du sein, la tumorectomie (synonymes : segmentectomie, quadrantecto-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

mie, mastectomie partielle) définit l’ablation de la tumeur avec une marge de tissu
sain (en principe 1 cm), par une incision radiaire ou périmamelonnaire. L’indication
typique est une tumeur de taille inférieure à 3 cm, non étendue au mamelon. Une
taille tumorale supérieure est acceptable dans les seins volumineux.
Le curage axillaire est toujours réalisé, sauf pour les CCIS. La technique du
« ganglion sentinelle » est en cours de validation2.

1. Cf. item n° 138, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson,
2002.
2. Cf. item n° 141, Cancérologie générale, collection Abrégés modules transversaux, module 10, Masson,
2002.


227 ◗
13_Chap11 Page 228 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Mastectomie, curage

La mastectomie radicale conservatrice, ou opération de Patey, procède à l’abla-


tion du sein avec son revêtement cutané, de l’aréole, du mamelon et des gan-
glions axillaires. Cette opération est justifiée pour les cancers de taille supérieure
à 3 cm, les tumeurs multifocales ou envahissant le mamelon. Les muscles pec-
toraux sont conservés, sauf en cas d’envahissement du corps musculaire (opé-
ration de Halsted).
L’examen pathologique est une étape essentielle en vue du pronostic (taille
tumorale, grade, RO et RP, état des ganglions axillaires) et de la proposition
éventuelle par une UCPO d’un traitement adjuvant. De plus, l’examen patholo-
gique précise la qualité de l’exérèse après tumorectomie (état des limites et
largeur des marges). En cas de marge(s) insuffisante(s), une totalisation de la
mastectomie est le plus souvent recommandée.

◗ Radiothérapie
La radiothérapie postopératoire a pour objectif principal de réduire le risque
de récidives locales. L’irradiation est réalisée sur la glande mammaire restante
après tumorectomie, ou la paroi thoracique après mastectomie. Pour les can-
cers de localisation centrale ou interne, elle est étendue à la chaîne mammaire
interne et aux ganglions sus-claviculaires. Le traitement distribue une dose de
base de 45 à 50 Gy en quatre à cinq semaines et un complément de 10 à
20 Gy sur la cicatrice de tumorectomie.
Les études cliniques les plus récentes ont confirmé que la radiothérapie posto-
pératoire permettait une réduction des récidives locales et avait aussi un impact
sur la survie des malades.

◗ Traitements adjuvants
La prescription d’un traitement systémique après la chirurgie, en l’absence de
toute maladie métastatique patente constitue un traitement adjuvant.

Chimiothérapie adjuvante

La chimiothérapie est devenue un traitement standard, pour une majorité de


patientes traitées pour cancer du sein :
– en préménopause, la chimiothérapie augmente de manière significa-
tive, la survie des patientes avec ganglions positifs (N+). Dans les N–,
l’indication de la chimiothérapie est retenue lorsque les patientes pré-
sentent des facteurs de mauvais pronostic, comme une taille tumorale
de plus de 3 cm, un grade SBR élevé et/ou l’absence de récepteurs
hormonaux ;
– en postménopause, la chimiothérapie est moins efficace, mais elle
peut être proposée chez les femmes de moins de 70 ans, à haut ris-
que.
Le traitement de référence est une polychimiothérapie avec anthracyclines. De
multiples combinaisons ont été utilisées, incluant le FAC ou FEC (fluoro-uracile,
adriamycine ou épi-adriamycine, cyclophosphamide), AC (adriamycine, cyclo-
phosphamide), AVCF (vincristine en plus). Les études randomisées ont montré
la supériorité des combinaisons avec anthracyclines sur celles sans anthracycli-
nes, comme le CMF (cyclophosphamide, méthotrexate, 5-FU) qui était préco-
nisé antérieurement.

228 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

Ces polychimiothérapies sont administrées par voie intraveineuse (cathéter ou


chambre implantable). Six cycles sont effectués toutes les trois semaines, parfois
retardés ou avec des doses diminuées en cas de neutropénie persistante (con-
cession de dose et/ou temporelle).
Les méta-analyses successives ont démontré que la chimiothérapie adjuvante
obtenait un gain en survie de l’ordre de 10 à 15 % à dix ans, une réduction
de la mortalité annuelle et du risque de survenue de métastases. Ce bénéfice
est plus grand pour les patientes en préménopause et ayant un envahisse-
ment ganglionnaire.

Hormonothérapie adjuvante

Les options du traitement hormonal adjuvant sont représentées par le tamoxifène


et la castration, mais d’autres médicaments sont à l’étude dans cette situation.
Tamoxifène • Le tamoxifène est un anti-œstrogène périphérique, agissant sur
la prolifération cellulaire par blocage des récepteurs hormonaux. Selon les
données issues de la méta-analyse de 1998, la tamoxifène est un traitement
adjuvant efficace pour les patientes ayant des récepteurs hormonaux positifs
(RH+), avec une réduction du risque de métastases (25 %) et de la mortalité
à 10 ans (17 %). L’hormonothérapie par tamoxifène réduit également le ris-
que de cancer du sein controlatéral, d’environ 40 %. Par contre, ce médica-
ment n’apporte pas de bénéfice pour les patientes dont les récepteurs
hormonaux sont négatifs.
Le tamoxifène est prescrit seul ou en association avec une chimiothérapie adju-
vante. Les séquences thérapeutiques sont, après la chirurgie, la chimiothérapie
(six cycles), la radiothérapie et le tamoxifène (dès la fin de la chimiothérapie).
Le tamoxifène est prescrit à la dose de 20 mg/jour et pendant cinq ans (sauf
complications). La tolérance est excellente en dehors de bouffées de chaleur et
de nausées les premiers mois. Ce médicament comporte un risque majoré de
maladie thromboembolique et de cancer de l’endomètre (effet paradoxal de
type estrogen-like).
Castration • La castration chirurgicale ou radique augmente la survie des
patientes non ménopausées en situation adjuvante, comme Beatson l’avait
montré pour les malades métastatiques, il y a cent ans. Une castration médicale
peut être obtenue par l’administration d’un analogue de la LH-RH (gosereline
ou triptoreline). Les études cliniques ont montré un bénéfice pour les femmes
non ménopausées, ayant des RH+. Les analogues de la LH-RH sont donnés en
injection mensuelle ou trimestrielle pendant deux ans.
Inhibiteurs des aromatases • Les anti-aromatases ont démontré leur intérêt
dans le traitement des métastases hormonodépendantes des cancers du sein.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Des premières études sont favorables à l’utilisation des anti-aromatases de troi-


sième génération (anastrazole) en traitement adjuvant.

◗ CAS PARTICULIERS
◗ Cancer canalaire in situ (CCIS)
L’association d’une tumorectomie suivie d’une irradiation mammaire constitue
le traitement de choix des CCIS localisées et réséqués en limites saines. Les
tumeurs étendues ou multifocales relèvent d’une mastectomie avec une recons-
truction immédiate ou différée. Le curage axillaire n’est pas indiqué dans les
CCIS, en l’absence de risque reconnu d’envahissement ganglionnaire.

229 ◗
13_Chap11 Page 230 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Chimiothérapie néo-adjuvante
(d’induction ou première)
Une chimiothérapie d’induction permet le traitement précoce de la maladie sys-
témique et une réduction du volume tumoral avec parfois une réponse com-
plète. Elle est indiquée dans deux situations :
Patiente ayant un cancer de taille supérieure à 3 cm (T2 fort, T3) •
Le but est de réduire le volume tumoral et d’améliorer les chances de chirurgie
conservatrice.
Cancer inflammatoire du sein (stade T4 D) • Les cancers inflammatoires
sont caractérisés par leur tendance évolutive, en particulier un risque élevé de
métastases précoces et un faible taux de survie à 5 ans. Le traitement initial est
une chimiothérapie d’induction, suivie par une mastectomie totale ou une irra-
diation externe. Le taux de réponse à la chimiothérapie d’induction est de 50 à
90 % avec des polychimiothérapies incluant les anthracyclines ou les taxanes.
Une réponse histologique complète a été observée dans 10 à 15 % des cas,
ce qui constitue quand elle est observée, un élément très favorable du pronos-
tic. Chez des patientes jeunes, ayant eu une réponse objective à la chimiothé-
rapie d’induction, des essais sont engagés pour évaluer l’apport d’une
chimiothérapie à hautes doses, avec support médullaire (autogreffe de cellules
souches périphériques). Selon les premiers résultats, la survie des malades n’est
pas clairement améliorée et la toxicité est élevée.

◗ Cancer du sein chez l’homme


Les traitements sont identiques à ceux de la femme. À stade égal, le pronostic
est comparable.

◗ Cancer du sein pendant la grossesse


En période gravidique, les tumeurs volumineuses ou de type inflammatoire sont
plus fréquentes que chez les femmes non enceintes, mais à stade égal, le pro-
nostic est comparable. Les mammographies et la scintigraphie osseuse sont
d’indication discutable dans les premiers mois.
La chirurgie est essentielle pour les cancers opérables. La chimiothérapie est
possible après la fin de l’organogenèse (troisième mois). Le risque tératogène
ou de séquelles irréversibles de l’enfant contre-indique la radiothérapie pendant
toute la grossesse. Il en est de même pour les traitements hormonaux. En cas
de cancer inflammatoire ou de métastases, une interruption de la grossesse ou
un accouchement provoqué est à discuter au cas par cas.

◗ TRAITEMENT DES CANCERS MÉTASTATIQUES


◗ Principes généraux
Le traitement a une visée palliative : il recherche autant la qualité de vie qu’une
prolongation de la survie (fig. 11.8). Le développement de nouveaux agents
d’hormonothérapie et de chimiothérapie a amélioré la prise en charge de ces
malades. L’estimation rigoureuse du pronostic (cf. supra) et de nouveaux para-
mètres biologiques de la réponse thérapeutique (récepteurs cellulaires, onco-
gène HER-2) permettent de mieux sélectionner les traitements.

230 ◗
13_Chap11 Page 231 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SEIN 11

➤ Fig. 11.8. Algorithme du traitement des cancers métastatiques. ➤

CANCERS MÉTASTATIQUES DU SEIN


Unité de concertation pluridisciplinaire

Os et parties molles Foie, poumon, cerveau État général altéré


Intervalle libre long Intervalle libre court Résistance
RH positifs RH négatifs aux traitements

Hormonothérapie Chimiothérapie
de première ligne de première ligne Traitements
ou essai clinique symptomatiques

Ostéosynthèse
Échec Laminectomie
Échec
Échappement Radiothérapie
antalgique
Corticothérapie
Anti-inflammatoires
Hormonothérapie Chimiothérapie Antalgiques
de deuxième de deuxième ligne Psychotropes
ou troisième ligne ou essai clinique Soins palliatifs

Échec Échec
Échappement Échappement

◗ Hormonothérapie (tableau 11.II)


Elle recherche :
– soit une privation des sécrétions ovariennes, temporaire par les inhibi-
teurs de la LH-RH ou définitive par une castration ;
– soit une diminution de la synthèse extra-ovarienne des œstrogènes
(anti-aromatases) ;
– soit un effet anti-œstrogénique par blocage des récepteurs hormonaux
(anti-œstrogènes) ou par des hormones antagonistes (progestatifs).

Tableau 11.II. Principaux agents utilisés en hormonothérapie des cancers du sein


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

DCI Nom commercial Effets secondaires


Agonistes Goséréline Zoladex Troubles
LH-RH Triptoréline Décapeptyl liés à la castration
Leuproréline Enantone

Anti- Létrozole Fémara


aromatases Anastrozole Arimidex
Exémestane Aromasine

Anti- Tamoxifène Nolvadex, Kessar, Phlébites,


œstrogènes Tamofène, cancer de l’endomètre,
Tamoxifène troubles oculaires
Progestatifs Acétate de médroxy- Farlutal, Prodasone Phlébites, prise
progestérone Mégace de poids


231 ◗
13_Chap11 Page 232 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Chez les patientes ménopausées, le traitement de référence est le tamoxifène per


os (20 mg/j). Une réponse objective est obtenue dans 30 %, toutes patientes
confondues, et dans 65 à 70 % des patientes ayant des récepteurs hormonaux
positifs.
L’hormonothérapie est particulièrement indiquée chez les patientes ayant :
– des localisations osseuses et des parties molles (nodules de perméation) ;
– un intervalle libre, entre le primotraitement et la récidive métastatique,
supérieur à un ou deux ans ;
– des récepteurs hormonaux positifs.
Chez les patientes préménopausiques avec RH positifs, le tamoxifène est, en
général, associé à la castration, plus volontiers par un analogue de la LH-RH que
par chirurgie ou par radiothérapie. Des essais cliniques comparent actuellement
les inhibiteurs d’aromatases au tamoxifène en première ligne d’hormonothérapie.
Après échappement au tamoxifène, une deuxième hormonothérapie procure
environ 25 % de réponses objectives durables. Le meilleur agent est alors un
inhibiteur de l’aromatase, plus efficace et mieux toléré que les androgènes ou
l’aminogluthéthimide (anti-aromatase de première génération). Après un nouvel
échappement, une troisième ligne peut se montrer active dans 15 % des cas.

◗ Chimiothérapie
Les cancers du sein métastatiques sont sensibles à la chimiothérapie, obtenant
une réponse objective dans plus de la moitié des cas, mais avec une durée
assez brève (un an en moyenne). Après l’obtention d’une rémission, l’intérêt
d’une chimiothérapie d’entretien n’est pas démontré. La chimiothérapie est logi-
que pour les patientes ayant des métastases viscérales (foie, poumons), des
signes de gravité (intervalle libre court, grade élevé, récepteurs hormonaux néga-
tifs) et pour les malades en échappement d’hormonothérapie.
Le choix du protocole est modulé par l’âge, la notion d’une chimiothérapie adju-
vante, une toxicité limitante. Le traitement est une polychimiothérapie incluant
une anthracycline jusqu’à la dose cumulative de ce produit (AC, FAC, FEC). Chez
les patientes prétraitées aux anthracyclines, ou en deuxième ligne, le docétaxel
(taxoïde), la Navelbine, la capécitabine, en monothérapie ou en combinaison,
sont susceptibles d’obtenir une nouvelle rémission.
L’association séquentielle d’une hormonothérapie et d’une chimiothérapie est
utile chez les femmes ayant une tumeur avec des RH positifs.
L’évaluation périodique de la qualité de vie, des effets thérapeutiques indésira-
bles, du désir des malades, est déterminante pour la poursuite, l’arrêt ou la
modification du traitement.
De nouvelles stratégies thérapeutiques reposent sur la détection d’un oncogène
amplifié, HER-2/neu, codant une protéine (Erb-B2) appartenant à la famille de
l’EGF. Un nouveau médicament, l’Herceptine, est un anticorps monoclonal huma-
nisé actif sur les cellules tumorales mammaires qui expriment cette protéine.
De manière prospective, l’amplification de l’oncogène HER-2 pourrait être utilisée
comme un paramètre prédictif de chimiosensibilité ou de résistance au tamoxifène.

◗ Traitements complémentaires
Les traitements médicaux complémentaires sont :
– la radiothérapie antalgique de métastases osseuses, ou décompressive
dans les localisations cérébrales ;
– une laminectomie pour une compression médullaire métastatique, une
ostéosynthèse pour une fracture pathologique (os longs et vertèbres) ;
– l’administration de biphosphonates (Arédia, Clastoban) dans le traite-
ment des ostéolyses malignes et de l’hypercalcémie sévère.

232 ◗
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TUMEURS DU SEIN 11

◗ SUIVI DES PATIENTES TRAITÉES


◗ Objectifs de la surveillance
La surveillance des patientes traitées pour un cancer du sein a plusieurs
objectifs :
– détecter une récidive locorégionale curable, surtout après chirurgie
conservatrice ;
– faire le diagnostic précoce d’un éventuel cancer controlatéral (risque au
niveau de 10 %) ;
– faciliter la réinsertion sociale et la réadaptation fonctionnelle ;
– traiter les complications iatrogènes.
En revanche, la recherche intensive de métastases est un objectif très discutable,
car les études cliniques sur ce thème n’ont pas confirmé que la détection et le
traitement précoce des métastases étaient susceptibles d’allonger la durée glo-
bale de survie des malades.

◗ Examens de surveillance
Les recommandations actuelles préconisent un examen clinique régulier
(semestriel pendant cinq ans et annuel au-delà) et une mammographie
annuelle. Des bilans sanguins, échographie du foie ou scintigraphie osseuse
sont prescrits selon les symptômes. La surveillance biologique systématique
n’est pas utile, sauf dans des cas particuliers comme un CA 15-3 initialement
élevé ou en cas de haut risque métastatique.

◗ Complications
Dans les jours qui suivent l’intervention, il peut se produire un épanchement
lymphatique de la région axillaire ou lymphocèle (à ponctionner de manière
aseptique) et une ankylose de l’épaule (à rééduquer). Après mastectomie, les
patientes bénéficient d’une prothèse mammaire externe.
La radiothérapie entraîne souvent un état inflammatoire du sein, qui persiste de
six à douze mois. Aux doses utilisées en postopératoire (50 Gy en moyenne),
les séquelles sont rares à type de sclérose de la glande mammaire, de télan-
giectasies cutanées, de pigmentation résiduelle, rarement de nécroses tardives.
La complication essentielle de la chirurgie est le lymphœdème du bras homolaté-
ral. Le risque d’œdème important (supérieur à 3 cm) est de l’ordre de 5 %.
L’œdème du bras est imputable au curage axillaire qui induit une stase lymphati-
que. Le risque est aggravé par les travaux intensifs, un traumatisme ou des épiso-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

des de lymphangite succédant à une plaie ou une brûlure du membre. Le


lymphœdème peut être prévenu par la protection manuelle lors des travaux ména-
gers et de jardinage et la désinfection de toute plaie. Il convient d’éviter les prises
de sang et la mesure de la tension artérielle sur le bras homolatéral. Ils sont traités
par la massothérapie (drainage lymphatique manuel et manchon élastique de
contention) et en cas de lymphangite aiguë par une antibiothérapie à large spectre.

◗ Récidive intramammaire après chirurgie


conservatrice
Après chirurgie conservatrice, le risque de récidive locale de l’ordre de 10 % à
10 ans (1 % par an) et particulièrement dans les situations suivantes :
– marge d’exérèse incertaine, ou envahie lors de la tumorectomie ;

233 ◗
13_Chap11 Page 234 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– présence d’une composante extensive de carcinome in situ ;


– patientes de moins de 35 ans ;
– doses insuffisantes de radiothérapie.
L’objectif de détection précoce d’une récidive locale, potentiellement curable,
impose une surveillance particulière, parfois difficile du fait de la fibrose radique.
Le suivi repose sur l’examen clinique et la mammographie. En cas d’anomalie
à ces examens de base, on fait appel à l’échographie et à l’IRM, voire à des
biopsies.
Le traitement des récidives mammaires isolées comporte une mastectomie
totale, qui donne dans cette situation, des taux de survie à 5 ans de 50 %. Un
certain nombre de patientes (10 %) présentent des métastases contemporai-
nes de la récidive mammaire, ce qui impose un bilan d’extension systématique.
Le traitement est alors celui des cancers métastatiques.

◗ Récidives pariétothoraciques
après mastectomie
Ces récidives se présentent comme des nodules durs, enchâssés dans le derme
au niveau de la cicatrice ou de la peau avoisinante. Des métastases à distance
sont trouvées chez la moitié des patientes. Le traitement de référence est l’exé-
rèse chirurgicale des nodules de perméation et la radiothérapie chez les patien-
tes non irradiées. L’hormonothérapie et la chimiothérapie sont prescrites en
fonction des résultats du bilan d’extension et de la présence de RH.

◗ Reconstruction du sein
La reconstruction chirurgicale du sein améliore l’image corporelle et le confort
des patientes mastectomisées. Les techniques font appel à l’implantation de
prothèses salines ou préremplies de gel de silicone, et à des lambeaux muscu-
locutanés prélevés à distance (lambeau du grand dorsal, lambeau du muscle
droit de l’abdomen). Plusieurs temps opératoires sont à prévoir. La reconstruc-
tion peut être effectuée dans le temps de la mastectomie (reconstruction immé-
diate) ou plusieurs mois ou années après (reconstruction différée).

◗ Réadaptation
◗ Contraception
La contraception féminine est indispensable pendant tout le traitement des
patientes en âge de procréer, en raison du risque de tératogenèse induite par
la chimiothérapie ou la radiothérapie. Dans les années suivantes, elle a pour
objet d’éviter qu’une rechute survienne au moment d’une grossesse. La
méthode de contraception doit être réversible et sans interaction avec la mala-
die ou le traitement (dispositif intra-utérin, progestatifs purs, préservatifs).

◗ Grossesse
Le cancer du sein survenant dans 5 à 10 % des cas chez les femmes de moins
de 40 ans, le souhait d’une grossesse peut exister. L’existence d’un cancer anté-
rieur n’a pas de retentissement particulier sur la grossesse, en particulier il n’y a
pas de risque tératogène, même si le traitement a comporté une chimiothéra-
pie. Pour les patientes qui ont un désir de maternité, une grossesse ultérieure
est envisageable en l’absence de maladie évolutive, car la grossesse n’aggrave
pas le pronostic, ni n’augmente le risque de récidives locorégionales.

234 ◗
13_Chap11 Page 235 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DU SEIN 11

◗ Traitement substitutif hormonal de la ménopause


Chez la femme traitée pour un cancer du sein, le traitement hormonal substitutif
de la ménopause reste déconseillé. Pour améliorer la trophicité des muqueuses
vaginales, le promestriène (Colpotrophine en capsule vaginale ou en crème)
peut être prescrit, en raison d’une activité œstrogénique purement locale. Les
lubrifiants locaux sont toujours possibles.
La prévention de l’ostéoporose fera appel à une prise en charge non
hormonale.

Points clés
• Le cancer du sein est le premier cancer de la femme (28 %). L’incidence du cancer
du sein a progressé en France comme dans tous les pays occidentaux. Le cancer du
sein constitue une maladie grave (environ 10 000 décès annuels en France) et la pre-
mière cause de décès des femmes entre 50 et 69 ans.
• Dépistage : la fréquence et la gravité du cancer du sein rendent nécessaire un dépis-
tage de masse. Le dépistage individuel chez les femmes à risque personnel ou familial,
comprend un examen médical annuel des seins et une mammographie tous les deux
ans. L’interrogatoire permet d’individualiser les femmes à risque et de proposer une
méthode appropriée.
• Diagnostic : les signes d’appel sont un nodule du sein, une anomalie du mamelon,
une image mammographique anormale, plus rarement une douleur ou des signes
inflammatoires. Le diagnostic repose sur le triplé radiocytoclinique, la microbiopsie ou
la biopsie chirurgicale. Devant une image infraclinique, la biopsie est guidée par l’ima-
gerie ou par un repérage préopératoire. Le cancer canalaire infiltrant est le type
histologique le plus fréquent, suivi du cancer lobulaire infiltrant. Les formes histologi-
ques rares ont un pronostic favorable, particulièrement les cancers intracanalaires.
• Bilan d’extension : il comprend la mesure de la taille tumorale, l’appréciation des gan-
glions axillaires et un bilan d’extension (scintigraphie osseuse, cliché thoracique,
échographie hépatique, bilan biologique). Les cancers du sein sont évalués selon la
classification internationale TNM.
• Pronostic : pour les tumeurs localisées, les principaux facteurs du pronostic sont la taille
tumorale, le grade histologique, le nombre de ganglions axillaires pathologiques, l’âge
de la patiente. Au stade métastatique, les paramètres sont l’intervalle libre, le siège
des métastases, la masse tumorale, le taux des marqueurs tumoraux. L’évolution des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

marqueurs sériques permet d’évaluer la réponse thérapeutique.


• Traitement des cancers localisés : l’exérèse chirurgicale est conservatrice (tumorec-
tomie-curage) ou radicale (mastectomie-curage). L’examen pathologique est une
étape essentielle en vue du pronostic et des traitements adjuvants. En cas de marge(s)
insuffisante(s) lors d’une tumorectomie, une totalisation par mastectomie est recom-
mandée. La radiothérapie postopératoire a pour objectif de réduire le risque de
récidive locale. La chimiothérapie adjuvante est un traitement standard pour les
patientes en préménopause et ayant un envahissement ganglionnaire. Elle est envi-
sagée chez les femmes ménopausées à haut risque de métastases. L’hormonothérapie
adjuvante est représentée par le tamoxifène et la castration chimique ou chirurgicale,
mais d’autres médicaments sont à l’étude dans cette situation.


235 ◗
13_Chap11 Page 236 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés (suite)


• Traitement des cancers métastatiques : le traitement recherche autant l’améliora-
tion de la qualité de vie qu’une prolongation de la survie. Le développement de
nouveaux agents d’hormonothérapie et de chimiothérapie a amélioré la prise en
charge des malades.
• Suivi : les objectifs de la surveillance d’un cancer localisé du sein sont de détecter
une récidive intramammaire après chirurgie conservatrice, de faire le diagnostic
précoce d’un cancer du sein controlatéral (10 %), de traiter les complications iatro-
gènes et de faciliter la réinsertion sociale et la réadaptation fonctionnelle de la
patiente.


236 ◗
14_Chap12 Page 237 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Tumeurs des os
et des parties molles 12
◗ SARCOMES DES PARTIES MOLLES DES MEMBRES
◗ TUMEURS DES OS PRIMITIVES ET SECONDAIRES

◗ SARCOMES DES PARTIES MOLLES DES MEMBRES É. MOYAL

◗ Définition
Les sarcomes constituent un groupe de tumeurs rares développées à partir des
tissus conjonctifs. Ces tumeurs peuvent se développer au niveau de n’importe
quel organe ou dans n’importe quel site anatomique.
Bien que rassemblant des tumeurs de natures histologiques fort différentes,
les tumeurs des parties molles ont en commun une présentation clinique et
une évolution suffisamment stéréotypée pour les faire étudier simultanément.

◗ Épidémiologie et facteurs de risques


Il s’agit de maladies rares, représentant moins de 1 % des cancers, les liposar-
comes, rhabdomyosarcomes, histiocytomes fibreux malins et synovialosarcomes
représentant les plus fréquentes.
Hommes et femmes sont atteints de façon égale ; 45 % des cas surviennent
entre 20 et 60 ans, alors que 11 % des cas surviennent avant 20 ans.
Leur étiologie est inconnue pour la plupart, sauf pour ce qui concerne les situa-
tions particulières des sarcomes radio-induits, de la maladie de von Recklinghau-
sen, du syndrome de Li et Fraumeni, des sarcomes sur œdème chronique ou
du syndrome de Werner.

◗ Circonstances du diagnostic
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les signes cliniques locaux sont le plus souvent résumés par une tuméfaction
visible et palpable en général indolore, ne devenant algique que par compres-
sion vasculo-nerveuse ou viscérale lorsque son volume augmente notamment
pour les formes intra-thoraco-abdominales.
Les signes généraux sont en règle absents, mais certains sarcomes peuvent
entraîner des épisodes aigus d’hypoglycémie ou des syndromes fébriles lors de
phénomènes de nécrose intratumorale. En ce qui concerne les tumeurs rétro-
péritonéales, le volume tumoral peut atteindre une taille considérable avant que
la tumeur ne devienne symptomatique.
Il n’y a donc pas de symptomatologie clinique déterminante, en particulier pour
les tumeurs de petite taille, seule l’attention pour toute masse d’apparition
récente en particulier au niveau des membres pouvant éviter des attitudes
superficiellement rassurantes ou des gestes diagnostiques inadaptés.


237 ◗
14_Chap12 Page 238 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Éléments du diagnostic
◗ Examen clinique
L’examen des formes accessibles doit s’attacher à noter :
– la taille dans les trois axes ;
– la mobilité par rapport aux plans profonds et superficiels ;
– la topographie par rapport aux organes majeurs : vaisseaux, nerfs, os et
articulations ;
– l’existence de signes compressifs d’aval ;
– la trophicité tégumentaire en regard.

◗ Examens radiologiques
Les clichés standards peuvent être utiles pour rechercher des calcifications intra-
tumorales ou une exceptionnelle atteinte osseuse. L’échographie est souvent
utile pour éliminer une formation kystique ou enkystée comme un hématome
vieilli en sachant que certaines nécroses intratumorales peuvent simuler une
formation kystique.
La tomodensitométrie est l’examen radiologique d’orientation tant pour les
membres que pour l’espace rétropéritonéal et le thorax. Il permet par ailleurs
des biopsies dirigées à l’aiguille pour les zones d’accès chirurgical difficile en
première intention.
L’imagerie par résonance magnétique est aujourd’hui l’exploration la plus per-
formante, en particulier pour les sarcomes des membres où elle permet une
visualisation précise des loges anatomiques et de la situation tumorale par rap-
port aux fascias qui les séparent.
Les opacifications vasculaires sont parfois nécessaires dans l’évaluation préopé-
ratoire de masses volumineuses.
Une radiographie standard et un scanner thoraciques seront réalisés au moment
du diagnostic en raison du haut risque métastatique (20 % des patients sont
métastatiques au moment du diagnostic), 50 % des métastases survenant au
niveau pulmonaire.

◗ Examen histopathologique
L’obtention d’une preuve histologique est indispensable avant toute décision
thérapeutique y compris chirurgicale. La biopsie à l’aiguille de fort calibre
(tru-cut) est souvent possible. Si un abord chirurgical biopsique est retenu, l’inci-
sion cutanée doit tenir compte de l’éventualité d’une chirurgie réglée complé-
mentaire souvent associée à une irradiation. Ainsi, l’abord biopsique doit être
choisi à proximité de l’emplacement probable de l’abord cutané lors de l’exé-
rèse.

◗ Diagnostic histopathologique
Les sarcomes des parties molles se développent à partir des cellules mésenchy-
mateuses primitives qui possèdent de multiples possibilités de différenciation.
Ceci explique leur grande variété morphologique, bien que des colorations spé-
ciales ou l’utilisation d’anticorps monoclonaux permettent de trouver des carac-
tères communs (production de réticuline, par exemple). On distingue plusieurs
catégories histologiques en fonction du tissu normal d’origine (tableau 12.I) :
– tumeurs du tissu fibreux :
• histiocytome fibreux malin,

238 ◗
14_Chap12 Page 239 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

• tumeur desmoïde,
• fibrosarcome fibroblastique ;
– tumeurs du tissu synovial :
• synovialosarcome mono- ou biphasique,
• sarcome épithélioïde,
• sarcomes à cellules claires ;
– tumeurs du tissu adipeux :
• liposarcome bien différencié,
• liposarcome myxoïde,
• liposarcome lipoblastique ;
– tumeurs du tissu musculaire :
• léiomyosarcome,
• rhabdomyosarcome embryonnaire,
• rhabdomyosarcome alvéolaire ou pléiomorphique ;
– tumeurs des vaisseaux :
• hémangiosarcome,
• hémangiopéricytome,
• sarcome de Kaposi,
• lymphangiosarcome ;
– tumeurs des nerfs périphériques :
• neurosarcome périphérique,
• schwannosarcome ;
– tumeurs squelettogènes extrasquelettiques :
• sarcome ostéogénique,
• sarcome d’Ewing,
• chondrosarcome ;
– tumeurs diverses :
• granulome malin de la face,
• sarcome alvéolaire des parties molles,
• lymphome malin extraganglionnaire,
• plasmocytome, extra-osseux,
• tumeurs inclassables.

Tableau 12.I. Synthèse des formes anatomopathologiques des tumeurs des


parties molles
Tissu Tumeurs Tumeurs bénignes Tumeurs
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

bénignes mais récidivantes malignes


et/ou multifocales
Fibreux Fasciite nodulaire, Fibromatose, Fibrosarcome
fibrome tumeur desmoïde,
angiofibrome
nasopharyngien
Fibrohistiocytaire Histiocytome Histiocytome fibreux Histiocytome fibreux
fibreux, angiomatoïde malin
xanthogranulome
juvénile
Adipeux Lipome Lipomatose Liposarcome
Muscle lisse Léiomyome, Léiomyomatose Léiomyosarcome
myofibroblastome invasive


239 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Suite du tableau 12.I. ➤


Muscle strié Rhabdomyome Rhabdomyosarcome
Vaisseaux Hémangiome, Angiomatose, Angiosarcome
lymphangiome, lymphangiomatose
tumeur glomique
Tissu synovial Tenosynovite à Synovialosarcome
cellules géantes
Mésothélium Mésothélium Mésothéliome malin
fibreux, tumeur
adénomatoïde
(de la vaginale)
Nerfs périphériques Schwannome Neurofibromatose Schwannome malin,
(neurinome), tumeur maligne
neurofibrome, des gaines nerveuses
tumeur à cellules
granuleuses
Neuroectodermique Ganglioneurome, Neuroblastome,
paragangliome, phéochromocytome
phéochromocytome malin

Il existe en outre de nombreuses formes frontières entre la bénignité et la mali-


gnité (bénignité histologique et évolution locale maligne à type de récidive).
Dans tous les cas la précision du grade dominant est impérative. En effet, plus
que la forme histopathologique, c’est le grade tumoral qui est l’élément pronos-
tique majeur. On distingue donc :
– grade 1 : bien différencié ;
– grade 2 : moyennement différencié ;
– grade 3 : peu différencié.

◗ Classification anatomique
Les catégories T du TNM définissent la taille tumorale (T1 < 5 cm, T2 > 5 cm,
T3 envahissement des os et/ou des axes vasculo-nerveux majeurs).
Au-delà du volume tumoral, la situation par rapport aux différents plans anato-
miques a une influence pronostique. Ainsi, au niveau des membres, les formes
sus-aponévrotiques superficielles et donc immédiatement sous-cutanées ont un
meilleur pronostic que celles qui sont sous-aponévrotiques.
L’extension ganglionnaire est exceptionnelle, sauf pour les rhabdomyosarcomes
et les synovialosarcomes où elle reste cependant inférieure à 5 %.
Les métastases viscérales sont essentiellement pulmonaires.

◗ Évaluation préthérapeutique
Le volume de la tumeur doit être apprécié le plus précisément possible (clini-
que, TDM, IRM [fig. 12.1 et 12.2], artériographie parfois) ainsi que son caractère
superficiel ou profond, les rapports avec les axes vasculo-nerveux et les pièces
osseuses.
L’exploration radiologique pulmonaire standard est nécessaire dans tous les cas.
La tomodensitométrie thoracique est recommandée pour les tumeurs de grade
élevé.

240 ◗
14_Chap12 Page 241 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

➤ Fig. 12.1. Liposarcome de la loge des adducteurs de la cuisse gauche (signal T1 IRM hétérogène
mais voisin de celui du tissu graisseux avoisinant). ➤

➤ Fig. 12.2. Synovialosarcome profond de la loge postérieure de la cuisse (hypersignal en IRM T2). ➤

◗ Principes du traitement
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Chirurgie
La résection chirurgicale doit tenir compte de l’extension tumorale suivant les
plans de clivage anatomique et en particulier les aponévroses intermusculaires,
parfois à grande distance de la tumeur primitive. Par ailleurs, la chirurgie doit
être réalisée « sans voir la tumeur » qui ne comporte aucune capsule la sépa-
rant des tissus sains. Il existe parfois un aspect macroscopique de pseudocap-
sule en particulier pour les tumeurs de grade élevé mais cette « capsule » est
constituée essentiellement de tissu tumoral.
Le taux de récidives locales après chirurgie seule est dans les meilleures séries
proche de 50 %, ce qui augmente considérablement le risque de décès y com-
pris par métastase.
Dans certains cas de tumeurs très avancées, l’amputation est la seule solution
préservant les chances de guérison.

241 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Cependant, depuis leur association avec la radiothérapie, les interventions chi-


rurgicales, tout en restant anatomiques, sont devenues moins radicales, permet-
tant une meilleure conservation fonctionnelle. La technique chirurgicale doit
emporter la cicatrice de biopsie et choisir une incision favorable à la réalisation
d’une irradiation postopératoire.

◗ Radiothérapie
Il est maintenant acquis que l’association de la radiothérapie à l’exérèse initiale
diminue considérablement le risque de récidive locale, en particulier pour les
tumeurs de plus de 5 cm et/ou de grade élevé. Par ailleurs, quand la localisation
tumorale est profonde, le risque de récidive augmente, rendant indispensable
l’irradiation postopératoire.
Au niveau des membres, l’irradiation doit être menée de façon non circonféren-
tielle, avec une technique de réductions successives des champs en fonction du
volume tumoral initial, de sa topographie, de son grade et de la qualité de l’exérèse.
Après exérèse complète une dose de l’ordre de 55 à 65 Gy est habituellement
délivrée. Dans certaines conditions, il est possible d’utiliser la curiethérapie pero-
pératoire (membres) ou l’irradiation peropératoire (abdomen, thorax).

◗ Chimiothérapie
À l’heure actuelle, la chimiothérapie des sarcomes des parties molles est basée
sur la prescription d’anthracyclines et permet d’obtenir entre 40 et 50 % de
réponses au niveau des localisations métastatiques pulmonaires, la survie des
patients répondeurs étant meilleure que celle des autres. D’autres molécules
telles que l’ifosfamide et la dacarbazine sont également utilisés dans la chimio-
thérapie de nécessité des sarcomes métastatiques.
Les objectifs de la chimiothérapie adjuvante sont de traiter la maladie micromé-
tastatique et de ce fait d’améliorer la survie sans métastase et la survie globale,
en particulier dans les tumeurs volumineuses et/ou de grade élevé. Son rôle reste
controversé car non clairement prouvé par des essais randomisés, même si une
méta-analyse récente reprenant quatorze essais a montré une amélioration de la
survie sans rechute, qu’elle soit locale ou métastatique avec une chimiothérapie
adjuvante, alors qu’une différence de survie globale n’est pas apparue.

◗ Protocoles associatifs
La chirurgie conservatrice associée à une irradiation postopératoire permet
d’obtenir des résultats cancérologiques équivalents à ceux d’une chirurgie exclu-
sive plus radicale, avec une diminution importante des effets secondaires fonc-
tionnels.
La prescription d’une chimiothérapie première est proposée pour les tumeurs
inopérables, en particulier de haut grade, ou de principe pour toutes les tumeurs
de grade élevé.
La prescription d’une chimiothérapie adjuvante postopératoire n’est retenue que
pour les tumeurs de haut grade et dans le cadre d’essais.

◗ Résultats et pronostic
◗ Chirurgie seule
Le taux moyen de récidive locale est de :
– 100 % après biopsie incisionnelle ;
– 80-100 % après biopsie excisionnelle ;

242 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

– 50 % après excision large ;


– 10-20 % après chirurgie radicale ;
– 5 % après amputation.

◗ Irradiation postopératoire
L’irradiation postopératoire permet d’obtenir après excision large
(« anatomique » ) des taux de contrôles locaux situés entre 80 et 90 % en fonc-
tion de la localisation initiale.

◗ Chimiothérapie combinée à l’association


radiochirurgicale
Cette triple association proposée dans les formes de haut grade permet un taux
de contrôle élevé de l’ordre de 75 % (rhabdomyosarcome et synovialosar-
come).

◗ Variantes anatomocliniques
◗ Fibrosarcomes
Les fibrosarcomes regroupent une grande variété de tumeurs pouvant survenir
dans toutes les zones anatomiques, le plus souvent entre 20 et 50 ans. Leur
pouvoir métastatique est fonction du grade et du volume tumoral, en sachant
que les localisations au niveau des membres sont toujours plus métastatiques
qu’au niveau du tronc.
La forme histologique la plus souvent décrite est celle de l’histiocytome fibreux
malin (HFM) souvent de grade élevé. Certains auteurs en font une entité parti-
culière distincte des fibrosarcomes.
Formes particulières :
– dermatofibrosarcome : fibrosarcome cutané de faible grade ;
– tumeur desmoïde ou fibromatose agressive, radiosensible ;
– fibrosarcome de l’enfant de haute malignité.

◗ Liposarcomes
Tumeurs des parties molles les plus fréquentes après les fibrosarcomes, elles
surviennent rarement sur un lipome préexistant. Sans particularités thérapeuti-
ques, les formes myxoïdes présentent cependant le meilleur pronostic.
Les métastases pulmonaires peuvent être de très faible tonalité et donc de dia-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

gnostic difficile sur les clichés thoraciques standards. Ils constituent les formes
histologiques les plus fréquentes des sarcomes rétro-péritonéaux.

◗ Rhabdomyosarcomes
Le rhabdomyosarcome pléomorphique de l’adulte survient surtout au niveau
des extrémités proximales (quadriceps, adducteurs, semi-membraneux, biceps,
triceps), entre 40 et 70 ans. Il s’agit de tumeurs peu métastatiques de pronostic
essentiellement local.
Le rhabdomyosarcome alvéolaire survient essentiellement chez les enfants et
les jeunes adultes au niveau des extrémités. La chimiothérapie a amélioré
considérablement leur pronostic atteignant aujourd’hui 80 à 90 % de guérison.
Le rhabdomyosarcome embryonnaire de l’enfant se développe au niveau de la
tête et du cou (orbite, cavum) et du tractus génital (utérus, vagin), au cours de

243 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

la première décennie de la vie. Le pronostic malgré la chimiothérapie reste mau-


vais, inférieur à 50 % de guérison définitive.

◗ Léiomyosarcomes
Ce sont le plus souvent des tumeurs d’organes (utérus) mais elles peuvent être
aussi apparemment primitives dans l’espace rétropéritonéal.

◗ Synovialosarcomes
Maladies rares de l’enfant et du jeune adulte développées à proximité des arti-
culations, bien que ne les envahissant que rarement. Elles sont souvent doulou-
reuses, en règle générale très évolutives et de grade toujours élevé.
La survie à 5 ans, malgré la chimiothérapie, reste inférieure à 50 %.

Points clés
• Les sarcomes des parties molles sont des tumeurs rares pouvant se développer à partir
de n’importe quel tissu conjonctif.
• L’IRM est aujourd’hui indispensable au diagnostic de l’extension locale.
• La biopsie comme l’exérèse chirurgicale de la tumeur s’intègrent dans le cadre d’un
traitement pluridisciplinaire réalisé par une équipe expérimentée.
• La chirurgie complète de la tumeur et des zones d’extension immédiates est la base
du traitement.
• Une radiothérapie postopératoire est souvent réalisée en particulier pour les lésions
profondes et/ou de haut grade.
• La chimiothérapie semble indiquée dans les sarcomes de haut grade de malignité.

◗ TUMEURS DES OS PRIMITIVES ET SECONDAIRES 1


N. DALY-SCHVEITZER

Les tumeurs primitives des os peuvent être bénignes ou malignes :


– bénignes, elles sont relativement fréquentes notamment chez l’adulte ;
– malignes, elles sont rares et surviennent essentiellement chez l’enfant et
l’adolescent.
En revanche, les tumeurs osseuses secondaires ou métastases osseuses sont
particulièrement fréquentes dans l’évolution de nombreux cancers et survien-
nent de ce fait essentiellement chez l’adulte. Elles représentent près des trois

1. Item n° 154. Tumeurs des os primitives et secondaires.


244 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

quarts des tumeurs malignes de l’os. Le myélome multiple, autre maladie de


l’adulte à point de départ osseux, est étudié au chapitre XVII.
Toute anomalie osseuse clinique et/ou radiologique pose systématiquement la
question de sa nature, bénigne ou maligne et dans ce dernier cas primitive ou
secondaire.

◗ Schéma diagnostique général


◗ Circonstances cliniques
La symptomatologie clinique des tumeurs osseuses est éminemment variable,
mais on peut retenir de grandes orientations diagnostiques :
– lésion tumorale douloureuse unique d’un membre, près du genou loin
du coude, chez un enfant ou un adolescent : présomption de tumeur
maligne primitive ;
– lésions douloureuses multifocales, essentiellement axiales, chez un
patient adulte ayant des antécédents de néoplasie traitée : forte pré-
somption de syndrome métastatique osseux.
Cette segmentation schématique ne doit pas faire oublier :
– qu’il existe des tumeurs osseuses asymptomatiques ;
– que les lésions osseuses uniques peuvent être bénignes ;
– que tous les syndromes algiques osseux chez un patient traité pour un
cancer ne sont pas liés à un syndrome métastatique ;
– qu’il existe des syndromes métastatiques osseux précessifs du diagnostic
de la maladie primitive.

◗ Tumeurs osseuses primitives


Maladies relativement rares, leur diagnostic est dominé notamment chez
l’enfant, l’adolescent et le jeune adulte par la crainte de l’existence d’une tumeur
maligne. Les signes cliniques et surtout les données de l’imagerie permettront
de poser ou non l’indication d’une vérification histologique par biopsie chirurgi-
cale.

◗ Imagerie
L’imagerie tient une place déterminante dans la démarche diagnostique des
tumeurs osseuses.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Radiologie standard : temps essentiel


Elle est souvent le premier examen réalisé, la constatation d’une anomalie
devant pousser à multiplier les incidences.
Elle doit être de bonne qualité, concernant tout l’os, comparative des deux côtés.

Scintigraphie osseuse « corps entier » aux polyphosphates


marqués au technétium 99 m (fig. 12.3)
Chez l’adulte • Elle précède l’exploration radiologique standard chez un
patient connu porteur d’un cancer.
Elle complète éventuellement la radiologie simple en cas de syndrome osseux
douloureux inaugural.
Chez l’enfant et l’adolescent • Elle participe à l’évaluation préthérapeutique
et au suivi sous traitement d’une tumeur maligne primitive.

245 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 12.3. Scintigraphie « corps entier » aux polyphosphates marqués au technétium 99 m. ➤

Tomodensitométrie
Elle est indispensable pour l’exploration des vertèbres, de la base du crâne, du
bassin.

IRM
Elle est déterminante pour déterminer l’extension locorégionale notamment
endomédullaire osseuse et extra-osseuse ; elle est en outre très utile pour
apprécier la réponse à la chimiothérapie des tumeurs malignes.

◗ Algorythme diagnostique
L’analyse radioclinique repose sur plusieurs éléments :
– la morphologie de la lésion ;
– la topographie ;
– le nombre de lésions ;
– l’âge du patient.

Morphologie de la lésion
Taille • Il est classique de considérer que le risque de malignité augmente avec
la taille, notamment au-delà de 6 cm.
Position • Situation de la lésion par rapport à la corticale (sous-corticale, juxta-
corticale) et à la cavité médullaire.
Réaction de l’os normal • L’absence de réaction de l’os normal se traduit par
une ostéolyse radiologique décrite par Lodwick en trois types, souvent associés :
– géographique (type I de Lodwick), IA avec sclérose marginale, IB sans
sclérose marginale mais à limites nettes, IC à limites floues ;
– mitée (type II) multiples lacunes corticales de plus de 5 mm de
diamètre ;
– ponctuée (type III) multiples lacunes corticales de petite taille.

246 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

La réaction ostéoblastique de l’os normal ou l’ostéoblastose tumorale se tradui-


sent par une ostéocondensation qui peut être péri-ostéolytique (IA) par stimu-
lation ostéoblastique, ou liée à une nécrose osseuse ou à une capacité
ostéogénique tumorale.
La combinaison de réactions lytique et condensante est possible.
État de la corticale • La corticale peut être intacte, lysée, érodée sur sa face
interne ou sur sa face externe.
Réaction du périoste • Elle se traduit par une ostéogenèse réactionnelle :
– appositions périostées spiculaires, perpendiculaires à la corticale ;
– appositions lamellaires parallèles à la corticale.
Ces appositions peuvent être :
– uniques ou multiples, fines ou épaisses ;
– interrompues, réalisant l’éperon de Codman.
Les tumeurs lentement évolutives donnent des appositions uniques, les mala-
dies évolutives des appositions fines, multiples et souvent rompues.
Contenu tumoral • Des calcifications lobulées ou arciformes sont en faveur
de la présence de tissu cartilagineux, des niveaux liquides peuvent être observés
dans un kyste osseux essentiel, un kyste anévrysmal (++), un ostéosarcome
télangiectasique, une tumeur à cellules géantes, un hémangiome osseux, mais
aussi une ostéomyélite…
Parties molles • L’extension dans les parties molles correspond à une marque
d’agressivité comme dans les tumeurs d’Ewing ou les ostéosarcomes.
En revanche, certaines tumeurs bénignes sont de développement extra-osseux
quasi exclusif (ostéochondrome) mais alors sans maladie endo-osseuse.
La conjonction de ces différents éléments iconographiques permet de classer a
priori la lésion dans une des catégories suivantes :
– lésion d’évolution lente probablement de nature bénigne : ostéolyse géo-
graphique de type IA, densification corticale et/ou apposition périostée
unique épaisse ;
– lésion douteuse : ostéolyse type IB, appositions périostées multilamellai-
res fines non rompues ;
– évolution rapide probablement de nature maligne primitive : ostéo-
lyse type IC, II ou III, appositions périostées multiples, rompues ou
spiculaires ; envahissement des parties molles notamment circonfé-
rentiel.

Topographie de la lésion
Siège épiphysaire • Chondroblastome ; tumeur à cellules géantes ; granu-
lome éosinophile ; infection.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Siège métaphysaire • C’est le site le plus fréquent des tumeurs osseuses pri-
mitives notamment malignes comme les ostéosarcomes (« loin du coude, près
du genou »).
Siège diaphysaire • Tumeur d’Ewing ; métastase ; mais processus infectieux
possible.
Os plat • Tumeur d’Ewing ; granulome éosinophile ; chondrome et chondrosar-
come (aile iliaque).
Rachis • Corps vertébral : granulome éosinophile, tumeur d’Ewing, métastase,
angiome ; arc postérieur : ostéoblastome, kyste anévrysmal ; base du crâne et
sacrum : chordome.

Nombre de lésions
Les lésions osseuses primitives multiples sont le plus souvent bénignes : osté-
ochondromes, chondromes, granulome éosinophile.

247 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Elles sont exceptionnellement malignes : tumeur d’Ewing métastatique ou


ostéosarcome multifocal.
La multiplicité est un argument fort en faveur d’un syndrome métastatique.

Âge du patient
Chez l’enfant • Avant l’âge de 5 ans, une lésion agressive est le plus souvent
une métastase de neuroblastome, un granulome éosinophile, plus rarement
une tumeur d’Ewing.
Au-delà de l’âge de 5 ans, une lésion agressive est plutôt une tumeur d’Ewing
ou un ostéosarcome.
Chez l’adolescent ou le jeune adulte • Une anomalie osseuse unique doit
faire évoquer en premier lieu une tumeur osseuse primitive éventuellement
maligne.
Chez l’adulte • Les métastases osseuses sont, et de loin, les éventualités les
plus fréquentes.

Synthèse
Au terme de l’analyse diagnostique, plusieurs situations sont possibles :
– lésion certainement bénigne : biopsie chirurgicale inutile sauf s’il existe
des symptômes gênants ;
– lésion probablement maligne : complément d’exploration locale (notam-
ment IRM) et à distance (scanner thoracique) suivie d’une biopsie
chirurgicale ;
– lésion douteuse : complément d’exploration locale (scanner, IRM, scinti-
graphie) pouvant ramener à la bénignité ou au contraire faire indiquer
une biopsie chirurgicale.

◗ Tumeurs osseuses bénignes


◗ Exostose ostéogénique
C’est la tumeur osseuse bénigne la plus fréquente, siégeant habituellement au
niveau de la métaphyse d’un os long d’un adolescent ou d’un adulte jeune.
En dehors d’une très rare maladie familiale héréditaire (maladie exostosante),
il s’agit d’une anomalie unique dont le risque de dégénérescence est quasi
nul.
Si l’exostose est gênante, elle peut bénéficier d’une exérèse.

◗ Ostéome ostéoïde
Tumeur bénigne douloureuse en particulier la nuit, classiquement sensible à
l’aspirine.
Sur les clichés osseux (fig. 12.4), existence d’une intense hyperostose rendant
difficile la visualisation du nidus central (lacune) à partir duquel se constitue la
lésion.
La scintigraphie montre une fixation unique et très intense par la lacune du
nidus (qui est la lésion). Le diagnostic se fait par la scintigraphie osseuse : hyper-
fixation précoce, intense et localisée.
Les localisations rachidiennes, pelviennes ou juxta-articulaires peuvent bénéficier
du scanner pour visualiser le nidus.
Le traitement consiste en une exérèse le pus souvent percutanée sous contrôle
scanner.

248 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

➤ Fig. 12.4. Ostéome P1 pied droit. La lacune correspond au nidus, entouré d’une réaction hyperosto-
sique intense. ➤

◗ Lacune fibreuse corticale (cortical defect),


fibrome non ossifiant
Il s’agit d’une anomalie fréquente, en règle asymptomatique, constatée lors d’un
cliché réalisé pour toute autre raison.
Lésion métaphysaire corticale sous forme d’une petite ostéolyse nette, avec
osteocondensation périphérique.
La croissance de la lacune fibreuse vers la constitution d’un fibrome non ossi-
fiant peut entraîner l’apparition d’un risque fracturaire au-delà de 3 à 4 cm sui-
vant la topographie. Une intervention chirurgicale de consolidation peut alors
être envisagée.

◗ Ostéochondrome ou exostose
Lésion fréquente de découverte fortuite ou palpée par le patient lui-même, il
s’agit d’une formation ostéocartilagineuse le plus souvent unique ou rarement
multiple dans le cadre d’une maladie exostosante. Elle est faite d’os recouvert
de cartilage et peut siéger sur n’importe quel os au niveau de la métaphyse
pour les os longs.
Sur les clichés, la corticale osseuse se continue dans l’exostose. Le risque de
dégénérescence est faible, quasi uniquement dans le cadre de la maladie exos-
tosante.
Une chirurgie n’est indiquée qu’en cas de symptômes gênants.

◗ Chondrome
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Fait de cartilage, le chondrome donne une lacune radiologique lobulée, le plus


souvent centro-osseuse, cependant capable d’amincir progressivement la corti-
cale sans aucune réaction périostée. Il existe souvent des calcifications en
« flocons » caractéristiques. Le siège habituel est au niveau des os de la main.
Le risque est uniquement fracturaire par érosion progressive de la corticale
osseuse.

◗ Kyste essentiel de l’os


Souvent révélé par une fracture spontanée, le kyste osseux essentiel est respon-
sable d’une lacune ovoïde à contours nets souvent cloisonnée.
Le contenu liquidien est vu au scanner. La lésion est centrométaphysaire au
contact du cartilage de croissance, le plus souvent humérale supérieure (50 %
des cas). Avec la croissance, le kyste migre vers la diaphyse.

249 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Granulome éosinophile
Intégré dans le cadre plus vaste de l’histiocytose X, le granulome éosinophile est
une anomalie bénigne unique se traduisant par une ostéolyse pouvant présen-
ter des caractères radiologiques inquiétants (extension aux parties molles
notamment) conduisant fréquemment à une vérification biopsique.
Les localisations au niveau du crâne, des fémurs, du rachis (vertebra plana) ou
du bassin sont les plus fréquentes.

◗ Kyste anévrysmal
Le kyste anévrysmal est une lésion kystique multiloculaire cloisonnée par des
cloisons et remplie de sang. Elle peut être agressive par son expansion et poser
des problèmes thérapeutiques chirurgicaux complexes au niveau des vertèbres.

◗ Ostéoblastome
Il s’agit en fait d’un gros ostéome ostéoïde siégeant au niveau de l’arc postérieur
des vertèbres. Son contenu ossifiant le distingue du kyste anévrysmal.

◗ Chondroblastome
La caractéristique majeure du chondroblastome est son siège épiphysaire où il
forme une lacune expansive avec calcifications floconneuses typiques. Son évo-
lution menace le fonctionnement articulaire et justifie une exérèse chirurgicale.

◗ Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel peut se poser avec les tumeurs malignes conduisant à
la biopsie chirurgicale au moindre doute. Par ailleurs, il est dans certaines situa-
tions possible de discuter des affections bénignes non tumorales :
– lésions osseuses septiques (ostéomyélite surtout chronique) ;
– lésions séquellaires post-traumatiques (cals exubérants, hématomes
sous-périostés organisés…) ; dans ce cadre, bien qu’un antécédent trau-
matique ne soit pas toujours retrouvé, la myosite ossifiante peut simuler
une tumeur osseuse primitive en réalisant des calcifications des parties
molles juxta-osseuses avec réaction périostée en regard. Le diagnostic
peut être parfois hésitant avec une tumeur d’Ewing ou un ostéosarcome
parostéal.

◗ Tumeurs malignes primitives osseuses


◗ Tumeur d’Ewing
La tumeur d’Ewing osseuse est une affection relativement rare dont le diagnostic
et le traitement ont été transformés au cours des vingt dernières années.
Maladie de l’adolescent et de l’adulte jeune, cette tumeur naît dans la moelle
osseuse expliquant qu’elle siège essentiellement au niveau des os volumineux
riches en moelle : bassin, diaphyse des os longs, côtes.

Épidémiologie
Aucun facteur de risque particulier n’est connu. La tumeur d’Ewing survient entre
5 et 30 ans, avec un sex-ratio de l’ordre de 1,5/1 en faveur des garçons.

250 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

Diagnostic
Circonstances • Elles sont variables, mais associent souvent :
– douleurs persistantes, unilatérales, insomniantes, par déformation pro-
gressive de la corticale osseuse ;
– tuméfaction douloureuse ;
– plus rarement une fracture pathologique ;
– singes généraux associés : fièvre, amaigrissement.
Éléments du diagnostic • Imagerie médicale • Sur les clichés standards on
constate :
– un aspect d’ostéolyse irrégulière, mal limitée à extension exo-osseuse
précoce, accompagnée d’appositions périostées multilamellaires classi-
quement en « bulbe d’oignon » (fig. 12.5) ;
– pour les os plats et le rachis, le scanner est utile en première intention.
L’IRM osseuse est l’examen complémentaire de choix pour apprécier l’extension de
la tumeur dans la moelle osseuse et dans les tissus mous environnants. Elle apporte
des éléments irremplaçables pour prévoir l’étendue de l’acte chirurgical à venir.
La scintigraphie osseuse est utile dans la recherche de localisations à distance
dans la même pièce osseuse, beaucoup plus rarement des localisations métas-
tatiques d’os à os.

➤ Fig. 12.5. Sarcome d’Ewing métaphysaire tibial. Appositions périostées en « bulbe d’oignon ». ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Biopsie • C’est le temps essentiel du diagnostic ; la biopsie est chirurgicale et


doit être réalisée par un opérateur habitué à ce type de geste. Elle doit compor-
ter un prélèvement séparé pour analyse cytogénétique et/ou moléculaire. Dans
certains cas où un doute existe avec une pathologie infectieuse, il est effectué
des prélèvements bactériologiques.
Anatomie pathologique • La tumeur d’Ewing est faite d’une prolifération de
petites cellules tumorales rondes sans aucune production osseuse. Elle s’intègre
dans le cadre plus vaste des tumeurs malignes à cellules rondes (neuroblasto-
mes, rhabdomyosarcomes, lymphomes).

251 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Cytogénétique • La tumeur d’Ewing est caractérisée par une translocation spé-


cifique entre les chromosomes 11 et 22 t (11 ; 22), plus rarement entre les
chromosomes 21 et 22. La connaissance des protéines synthétisées à partir de
cette anomalie chromosomique et responsables de la prolifération cellulaire
laisse envisager des possibilités de thérapie génique spécifique.

Évaluation préthérapeutique
La recherche de localisations pulmonaires sera réalisée par une tomodensito-
métrie thoracique.
La scintigraphie osseuse « corps entier » recherchera de rares localisations
osseuses multiples.
En fonction de la topographie, d’autres examens pourront être nécessaires,
notamment dans les localisations pelviennes ou rachidiennes.

Traitements
Jusqu’aux années soixante-dix, le traitement était essentiellement radiothérapi-
que du fait de la très grande radiosensibilité de cette tumeur, mais l’extension
métastatique rapide ne laissait sans maladie évolutive que 5 à 10 % des
patients.
Depuis, les protocoles de polychimiothérapie associant essentiellement doxoru-
bicine, cyclophosphamide et vincristine sont prescrits en première intention
avant le traitement local chirurgical ou radiochirurgical.
Les facteurs pronostiques tumoraux sont aujourd’hui bien connus :
– taille ou volume de la tumeur ;
– réponse clinique à la chimiothérapie initiale ;
– réponse histologique constatée sur la pièce osseuse.
Ces facteurs permettent d’adapter le traitement en conséquence avec le double
souci de la guérison d’une part et de l’économie fonctionnelle d’autre part.
Classiquement, l’efficacité de la chimiothérapie initiale est appréciée au terme
de trois cycles par l’examen clinique, l’IRM et la scintigraphie osseuse. En cas de
régression suffisante, l’exérèse chirurgicale avec procédé de réparation plus ou
moins complexe est réalisée.
L’intervention est suivie d’une reprise chimiothérapique dont le type est orienté
par la réponse histologique. L’irradiation de la pièce osseuse peut être parfois
utile en cas de limites étroites.
À l’heure actuelle, deux tiers des patients porteurs de tumeur d’Ewing sont
guéris.

◗ Ostéosarcome
L’ostéosarcome est une des maladies néoplasiques dont le pronostic a été le
plus transformé par l’avènement de médicaments chimiothérapiques efficaces.
Régulièrement létal il y trente ans, il est aujourd’hui guéri chez l’enfant dans près
de 80 % des cas.

Épidémiologie
Il existe un certain nombre de facteurs de risque avérés :
– l’exposition chronique à une irradiation comme celle survenue au début
du siècle chez les ouvriers de l’horlogerie peignant les aiguilles de montre
avec une peinture au radium permettant sa fluorescence ; le suçage
répété du pinceau pour l’effiler a entraîné l’apparition de nombreux
ostéosarcomes de la mandibule et de la mâchoire ;

252 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

– le rétinoblastome, tumeur maligne primitive oculaire du nourrisson et du


jeune enfant, est lié à l’existence d’une anomalie génétique (gène Rb)
qui augmente par ailleurs le risque de survenue d’un ostéosarcome ;
– chez l’adulte, la maladie de Paget constitue un risque de survenue d’un
ostéosarcome au niveau des pièces osseuses les plus fréquemment
concernées (membre inférieur, bassin).
Pour les maladies spontanées, le sex-ratio est en faveur du sexe masculin, le
pic de fréquence entre 13 et 25 ans. Les sites les plus fréquents sont au niveau
des os longs, « près du genou, loin du coude ».

Histoire naturelle
L’ostéosarcome est une tumeur osseuse vraie dont l’évolution est en règle
rapide avec une propension importante :
– à l’extension dans la pièce osseuse y compris les articulations ;
– à l’invasion des parties molles péri-osseuses y compris les vaisseaux et
les nerfs ;
– à la diffusion hématogène avec la survenue de métastases essentielle-
ment pulmonaires (80 %), parfois dans d’autres pièces osseuses.

Diagnostic
Signes cliniques • La douleur résume le plus souvent la symptomatologie,
plus ou moins intense, classiquement à renforcement nocturne.
Une déformation osseuse et un œdème local peuvent attirer l’attention. Enfin,
plus rarement, une fracture spontanée peut être inaugurale.
Examen radiologique • Les clichés standards suffisent souvent à une forte
présomption diagnostique : construction osseuse inhomogène, à la fois endo-
et exo-osseuse, rupture corticale fréquente, extension aux parties molles don-
nant une image « en feu d’herbes » (fig. 12.6).
La tomodensitométrie complète l’étude de l’os, l’IRM celle des parties molles et de
la cavité médullaire (fig. 12.7). Une tomodensitométrie thoracique est systématique.

➤ Fig. 12.6. Ostéosarcome ostéogénique du tibia. Volumineuse extension aux parties molles avec
image « en feu d’herbes ». Appositions périostées rompues avec éperons de Codman. ➤
➤ Fig. 12.7. Image IRM d’un ostéosarcome tibial supérieur montrant l’extension aux parties molles
péri-osseuses ainsi que l’extension basse dans la cavité médullaire osseuse. ➤
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

12.6 12.7

253 ◗
14_Chap12 Page 254 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Scintigraphie osseuse • Une scintigraphie osseuse « corps entier » est réali-


sée à la recherche d’éventuels foyers tumoraux multiples.
Biopsie chirurgicale • La biopsie chirurgicale prélève de l’os tumoral et des
fragments de parties molles péri-osseuses.
Biologie • Les taux sériques initiaux de HDL-3 et de phosphatases alcalines
sont utiles au suivi perthérapeutique et à l’évaluation de l’efficacité de la chimio-
thérapie.

Anatomie pathologique
L’ostéosarcome est une tumeur primitive de l’os faite d’une prolifération cellu-
laire le plus souvent hétérogène associant les différentes composantes osseuses
ostéogènes et chondrogènes. Il existe donc des formes ostéogéniques pures et
des formes mixtes à prédominance variée.
Certains de ces sarcomes ont un développement essentiellement cortical et
prennent le nom d’ostéosarcome parostéal.
À côté de ces formes clairement squelettogènes, il existe des formes dites ana-
plasiques ayant perdu leurs caractéristiques initiales osseuses et/ou
cartilagineuses : sarcomes télangiectasiques, à cellules géantes, à cellules fusi-
formes.

Facteurs pronostiques
Il existe plusieurs facteurs pronostiques d’importance diverse :
– âge : la survenue avant 12 ans et après 21 ans constitue un facteur
défavorable ;
– taille tumorale : les tumeurs de plus de 10 cm sont plus graves que les
autres ;
– l’extension articulaire, la localisation axiale constituent des éléments de
mauvais pronostic ;
– la réponse à la chimiothérapie constatée sur la pièce chirurgicale consti-
tue le paramètre pronostique majeur, exprimée en pourcentage de cel-
lules viables, la catégorie « bon répondeur » étant définie par moins de
10 % de cellules viables.

Traitement
Ce n’est que depuis les années soixante-dix que la chimiosensibilité des ostéo-
sarcomes a été démontrée et a transformé le pronostic de ces tumeurs.
Chimiothérapie • La première chimiothérapie utilisée a été le méthotrexate à
très hautes doses avec administration d’acide folinique. D’autres protocoles sont
aujourd’hui utilisés associant le cisplatine, l’adriamycine et l’ifosfamide.
La chimiothérapie est administrée en première intention pour environ trois mois,
la chirurgie devant être pratiquée dans les huit jours suivant la dernière admi-
nistration.
Une chimiothérapie postopératoire est indiquée avec le même protocole qu’ini-
tialement pour les bons répondeurs, avec un protocole différent pour les mau-
vais répondeurs.
Les formes métastatiques peuvent être guéries chez l’enfant dans 5 à 10 % des
cas.
Chirurgie • L’amputation a constitué pendant longtemps la technique de réfé-
rence. Aujourd’hui les procédés de réparation prothétique avec ou sans greffe
osseuse permettent dans la majorité des cas la conservation du membre avec
une fonction satisfaisante dans environ deux tiers des cas. De multiples adapta-
tions sont cependant nécessaires pour assurer la symétrie et pour permettre
une croissance correcte.

254 ◗
14_Chap12 Page 255 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

Dans l’hypothèse, exceptionnelle aujourd’hui, où la tumeur osseuse est inopé-


rable, la radiothérapie, faisant éventuellement appel aux particules lourdes, est
alors la seule solution.

Suivi
L’objectif du suivi est la détection précoce des récidives locales et des métasta-
ses pulmonaires, éventuellement osseuses.
Outre l’examen clinique, on pratique tous les deux à trois mois pendant
cinq ans :
– un cliché thoracique ;
– une tomodensitométrie thoracique ;
– une scintigraphie osseuse ;
– une réévaluation locale (clichés standards, IRM) en cas de symptômes.

◗ Autres tumeurs osseuses primitives malignes


Chondrosarcome
Maladies de l’adulte représentant 10 à 20 % des tumeurs osseuses primitives,
les chondrosarcomes peuvent survenir en os sain ou sur une exostose pré-exis-
tante. Les localisations fréquentes sont le bassin, la ceinture scapulaire, plus rare-
ment les membres (fig. 12.8).
Radiologiquement, il existe une ostéolyse polycyclique refoulant la corticale avec
extension aux parties molles, plus facilement visible en TDM, ou mieux IRM, que
sur les clichés standards.
La malignité est essentiellement locorégionale, le risque métastatique faible.
Le traitement est quasi exclusivement chirurgical, le pronostic fonction du
volume et du grade tumoral.

➤ Fig. 12.8. Chondrosarcome fémoral. ➤


© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


255 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Tumeurs à cellules géantes dites à myélopaxes


Les tumeurs à cellules géantes sont en fait des tumeurs bénignes mais d’évo-
lution agressive et destructrice pouvant déboucher sur une transformation mali-
gne.
Elles réalisent des ostéolyses épiphysométaphysaires classiquement avec des
cloisons de refend nettement radiovisibles, sans réaction périostée. Le traite-
ment en est chirurgical (curetage et consolidation osseuse, ou résection et répa-
ration prothétique).

◗ Tumeurs secondaires des os


Voir également, chapitre 17 « Maladie métastatique, métastases osseuses ».
La caractéristique essentielle de l’évolution d’une tumeur maligne est sa capacité
potentielle à être à l’origine d’une dissémination cellulaire à distance du site
initial.
Le squelette, notamment axial, est un site métastatique privilégié. Il s’agit d’une
pathologie fréquente responsable d’une grande part de la morbidité des can-
cers.

◗ Épidémiologie
Le risque de métastase osseuse, éminemment variable suivant le type, le siège
et le volume des tumeurs primitives, concerne cependant environ 50 % des
patients, soit d’emblée, soit au cours de la période post-thérapeutique.
Les séries autopsiques montrent une répartition anatomique concernant les ver-
tèbres, 69 %, le pelvis, 41 %, le fémur (tête), 25 %, le crâne, 14 %.
Les cancers développés à partir de glandes endocrines (prostate, thyroïde) ou
apparentées (sein, rein) présentent un risque élevé de métastases osseuses.
L’origine des tumeurs donnant des métastases osseuses est par ordre de fré-
quence décroissante : le sein, 70 %, le poumon, 33 %, le rein, 24 %, le rectum,
13 %, le pancréas, 13 %, l’estomac, 11 %, le côlon, 10 %, l’ovaire 9 %.
Le mécanisme d’apparition des métastases osseuses est complexe, mais il sem-
ble acquis que le développement initial des localisations secondaires se fasse
dans la moelle rouge de l’os qui présente un lacis capillaire très riche propice à
l’arrêt et au développement des cellules néoplasiques.

◗ Diagnostic
Symptômes cliniques
La symptomatologie inaugurale des métastases osseuses est diverse, mais le
plus souvent la douleur est le symptôme dominant :
– soit osseuse directe ;
– soit radiculaire (intercostale, sciatique ou crurale).
Une complication peut être révélatrice :
– fracture spontanée ;
– compression médullaire ou syndrome de la queue de cheval ;
– tuméfaction osseuse visible et palpable (côtes, sternum, tibia) ;
– hypercalcémie, altération de l’état général.
Dans tous les cas, l’examen clinique complet est orienté vers :
– la recherche d’une maladie primitive quand elle n’est pas déjà connue ;
– l’examen des organes susceptibles d’être le siège d’autres localisations
secondaires : ganglions périphériques, foie, plèvre.

256 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

Imagerie
Les clichés standards orientés par la clinique ne sont indiqués que quand
aucune notion de néoplasie préalable existe.
En revanche, lors du suivi d’une néoplasie connue, c’est la scintigraphie « corps
entier » aux polyphosphates marqués au technétium 99 m qui est l’examen de
choix, les clichés radiologiques n’étant effectués que sur les sites scintigraphi-
quement anormaux.
La radiographie standard montrera (fig. 12.9) :
– une ostéolyse unique ou multiple avec ou sans déformation osseuse
(tassement fracturaire, rupture corticale…) ;
– une ostéocondensation accentuant la trame osseuse ;
– un mélange des deux aspects.

➤ Fig. 12.9. Métastases osseuses vertébrales mixtes, condensantes et lytiques. ➤

La scintigraphie sera préférée à l’analyse radiologique de l’ensemble des pièces


osseuses à la recherche d’autres anomalies en faveur d’une maladie métastati-
que. Elle est toujours démonstrative sauf dans le cas de métastases purement
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

lytiques sans réaction ostéoblastique capable de fixer le traceur radioactif.


La scintigraphie osseuse aux polyphosphates marqués par le technétium 99 m
constitue la méthode la plus sensible dans la recherche de localisations osseu-
ses métastatiques. Il faut cependant remarquer que l’isotope ne se fixe que sur
les ostéoblastes normaux et pas sur les cellules tumorales métastatiques, seules
les métastases responsables d’une réaction ostéoblastique normale étant capa-
bles de créer une hyperfixation scintigraphique détectable.
Les anomalies scintigraphiques sont en règle générale précessives des anoma-
lies radiologiques (environ six mois). Cependant, de nombreuses pathologiques
osseuses non tumorales sont responsables d’hyperfixations scintigraphiques :
maladies métaboliques, traumatismes, infections et maladies rhumatismales
inflammatoires ou dégénératives bénignes. Ceci entraîne un taux élevé de faux
positifs justifiant un examen initial de référence dans les cancers ostéophiles
(sein, prostate, thyroïde).

257 ◗
14_Chap12 Page 258 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Les radiographies osseuses ne sont alors vraiment utiles que focalisées sur les
anomalies scintigraphiques précédentes. Si les anomalies radiologiques sont
plus tardives que les hyperfixations scintigraphiques, elles sont cependant plus
spécifiques de localisations métastatiques. La confrontation des scintigraphies et
des clichés centrés améliore considérablement la performance diagnostique de
chacune des techniques, éventuellement complétées par la TDM montrant des
modifications tumorales endo-osseuses.
En cas d’anomalie radiologique et scintigraphique unique, la tomodensitométrie
osseuse permet alors de préciser le caractère tumoral en montrant son exten-
sion dans l’os, l’effraction de la corticale et éventuellement l’envahissement des
parties molles adjacentes. Une ponction-biopsie à visée diagnostique sera réali-
sée sous guidage scanner en cas d’anomalie unique inaugurale.
L’exploration par IRM n’est réellement utile que dans l’étude des rapports de
localisations vertébrales avec l’axe neurospinal.

Biopsie osseuse
La biopsie osseuse peut être utile, dirigée sur les anomalies précédentes, réali-
sée soit par méthode transcutanée soit par abord chirurgical. C’est le seul moyen
de trancher entre pathologie tumorale secondaire, pathologie maligne primitive
et maladie bénigne, en particulier en cas d’anomalie osseuse unique.

Biologie
Les examens biologiques utiles se résument à :
– le dosage de la calcémie et de la calciurie ;
– le dosage de marqueurs tumoraux en l’absence de tout autre élément
d’orientation.
Par ailleurs :
– il existe le plus souvent un syndrome inflammatoire avec élévation de la
VS et de la CRP ;
– des anomalies des paramètres phosphocalciques sont possibles avec
hypercalciurie associée ou non à une hypercalcémie.

◗ Complications
Complications métaboliques
Voir également « Hypercalcémie » au chapitre 16 « Urgences cancérologiques ».

Complications fracturaires
En règle générale, la survenue d’une fracture pathologique, parfois inaugurale,
justifie un traitement orthopédique y compris chirurgical, adapté à l’état général
du patient et surtout à son espérance de vie. L’alitement prolongé entraîné par
une fracture non stabilisée d’un os porteur (fémur notamment) va rapidement
dégrader l’état clinique, empêcher toute prise en charge cancérologique spéci-
fique efficace et raccourcir la survie.

Complications compressives
Voir « Compression médullaire lente » au chapitre 16 « Urgences cancérologiques ».

◗ Principes de traitement
Comme dans toute situation palliative, il est nécessaire d’évaluer le bénéfice que
peut retirer le patient d’une thérapeutique au regard de ses effets indésirables.

258 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

De façon générale, la présence d’une symptomatologie clinique franche est un


élément majeur de décision dans la mesure où elle permet :
– de faire accepter au patient un traitement actif ;
– d’évaluer l’efficacité du traitement ;
– de moduler la prescription en fonction de l’objectif soignant.
Plus rarement, une thérapeutique peut être retenue en l’absence de symptômes :
– soit parce qu’il est prévisible qu’ils surviendront à court terme ;
– soit parce qu’il s’agit d’un syndrome paucimétastatique d’évolution lente
rapprochant l’objectif thérapeutique de la « curabilité ».

◗ Irradiation osseuse antalgique


Dans le cas des métastases osseuses, les effets recherchés par l’irradiation pal-
liative sont principalement l’antalgie. La décision d’une irradiation osseuse à
visée antalgique ne modifie cependant en rien la prise en charge algologique
médicamenteuse immédiate, dans la mesure où l’effet bénéfique de l’irradiation
est toujours différé.

Irradiations localisées
L’irradiation transcutanée est le moyen généralement le plus efficace pour obte-
nir une antalgie complète et prolongée.
Le choix des techniques et des faisceaux dépend de la topographie lésionnelle,
avec quelques règles générales :
– il est souvent prudent d’irradier un segment anatomique plutôt que la seule
zone métastatique radiologique ou scintigraphique pour éviter les ré-irra-
diations de proximité avec recoupes géométriques importantes ;
– bien que palliative, l’irradiation doit tenir compte des tissus sains inclus
dans les volumes de traitement en particulier lors de syndromes métasta-
tiques d’évolution lente ; ainsi, la géométrie et la prescription peuvent par-
fois se rapprocher de techniques à visée curative quand l’espérance de vie
laisse largement la place à la survenue d’effets secondaires tardifs invali-
dants (moelle épinière, intestin grêle) ;
– de multiples niveaux de dose et fractionnements ont été proposés et com-
parés avec une efficacité antalgique voisine tant en niveau qu’en durée ;
le volume de tissu sain inclus dans les champs peut faire préférer des frac-
tions inférieures ou égales à 3 Gy pour les grands volumes (type 30 Gy en
deux semaines et dix séances) et des fractions supérieures à 3 Gy pour
les petits volumes (type 20 Gy en une semaine) ;
– les localisations lytiques méritent en règle des doses plus importantes que
les lésions condensantes si l’on veut que la période d’antalgie soit
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

prolongée ;
– l’effet antalgique, lié à la cinétique cellulaire tumorale, est le plus souvent
constaté en fin d’irradiation avec poursuite de l’amélioration après le terme
de l’irradiation ;
– les syndromes métastatiques se résumant à une seule localisation osseuse
d’apparition tardive par rapport au traitement de la tumeur primitive méri-
tent un choix technique et posologique plus ambitieux de type 50-60 Gy
en quatre à six semaines avec une à deux réductions de la taille des
champs.

Irradiations étendues
Les irradiations palliatives étendues peuvent être envisagées lors de l’existence
d’ostéoses secondaires diffuses comme le réalisent parfois les cancers prostati-
ques ou mammaires.

259 ◗
14_Chap12 Page 260 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Il est alors possible de proposer une irradiation hémicorporelle, inférieure ou


supérieure, de l’ordre de 6 à 9 Gy pour l’hémicorps supérieur, en dose unique.
Une telle irradiation amène une sédation rapide, en règle sous 48 heures, dans
environ 70 % des cas. Il est possible de renouveler le même traitement sur
l’autre hémicorps après trois semaines à un mois d’intervalle pour permettre la
récupération hématologique.

Cas particuliers
Os long porteurs • L’irradiation d’une lésion métastatique d’un os long por-
teur est susceptible d’améliorer la douleur mais est incapable avant longtemps
d’assurer la solidité mécanique de l’os. De ce fait, chaque fois qu’un os long
porteur (fémur, tibia) est le siège d’une destruction corticale importante, un
geste chirurgical de consolidation doit être envisagé en premier lieu pour éviter
la survenue d’une fracture pathologique.
S’il n’y a pas de menace fracturaire, l’irradiation peut être réalisée seule en
veillant cependant à ce que les zones mécaniquement critiques soient incluses
dans les champs d’irradiation.
Vertèbres • L’irradiation antalgique vertébrale doit être précédée d’un examen
clinique minutieux à la recherche des signes prodromiques d’une compression
médullaire (radiculalgie impulsive, syndrome sensitif d’étage débutant, petits
troubles sphinctériens) ; en effet, l’irradiation entraîne initialement un œdème
lésionnel qui risque d’aggraver brutalement une compression débutante et
nécessiter un geste chirurgical décompressif en urgence ou un traitement corti-
soné à haute dose associé à la poursuite de l’irradiation si l’on pense que la
radiosensibilité tumorale permet d’espérer une levée rapide de la compression
(lymphomes, carcinomes indifférenciés, plasmocytomes).
En l’absence de signes neurologiques autres que la douleur vertébrale, l’irradia-
tion externe constitue le meilleur moyen antalgique et préventif de complica-
tions neurologiques éventuelles.
Il est habituel de traiter un segment vertébral anatomique dans son entier (cer-
vical, thoracique ou lombaire) et d’y délivrer des doses de l’ordre de 20 Gy en
une semaine et cinq fractions ou 30 Gy en deux semaines et dix fractions.

Irradiation osseuse métabolique


L’utilisation de strontium 89 radioactif a été récemment réintroduite dans la liste
des moyens thérapeutiques depuis qu’il est possible de l’administrer par voie
générale ; son indication essentielle est représentée par les ostéoses diffuses
fixant fortement les analogues calciques radioactifs. Le prix de ces traitements
est un des éléments limitants majeurs.

◗ Traitement de la maladie primitive


Chaque fois que possible et nécessaire, un traitement médical général de la
maladie cancéreuse sera envisagé :
– certainement devant un cancer hormonodépendant : adénocarcinome
de la prostate (castration chirurgicale ou chimique), du sein (anti-œstro-
gènes), de la thyroïde avec pour cette dernière la possibilité particulière
de réaliser une radiothérapie métabolique spécifique dans le cas de for-
mes différenciées (I131) ;
– éventuellement dans les autres cas, sous forme d’une chimiothérapie,
largement fonction du reste de l’extension métastatique et de l’état géné-
ral du patient.
Enfin, l’administration de biphosphonates par voie parentérale améliore la symp-
tomatologie et semble retarder l’évolution spontanée.

260 ◗
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TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

◗ Formes cliniques étiologiques


Adénocarcinome prostatique
Cancer ostéophile, l’adénocarcinome prostatique est révélé par des métastases
osseuses dans un tiers des cas, taux en diminution depuis la diffusion du dosage
systématique du PSA.
Volontiers condensantes, les localisations osseuses sont essentiellement axiales,
pelviennes et rachidiennes. La scintigraphie osseuse est souvent spectaculaire
compte tenu de la très forte réaction ostéoblastique.
Elles constituent une indication d’hormonothérapie suppressive de la sécrétion
d’androgènes (castration chimique et anti-androgènes) souvent associée à une
irradiation antalgique.
Cancer du sein
Les cancers du sein sont fréquemment responsables d’un syndrome métastatique
osseux qui peut parfois résumer pendant longtemps la maladie métastatique
notamment dans les formes des patientes âgées souvent hormonosensibles. La
proposition sera alors une hormonothérapie par anti-œstrogènes avec irradiation
antalgique si nécessaire. Lors de l’échappement, des prescriptions hormonales
dites de deuxième ligne seront possibles (aminogluthétimide, anti-aromatases).
De façon générale, lors du suivi d’un cancer du sein traité, la survenue d’un syn-
drome métastatique, notamment osseux, doit faire poser systématiquement la
question de l’indication d’une hormonothérapie. Celle-ci ne constitue une indica-
tion recevable que si la tumeur primitive présentait une expression significative
des récepteurs hormonaux cellulaires aux œstrogènes et à la progestérone.
Dans d’autre cas, le syndrome osseux s’intègre dans une maladie métastatique
polyviscérale ou les localisations hépatiques, pleuropulmonaires et cérébrales font
l’essentiel du pronostic et constituent alors une indication de chimiothérapie. Les
anthracyclines sont particulièrement efficaces sur les localisations osseuses.
Cancer bronchopulmonaire
Pouvant être révélatrices, les localisations osseuses des cancers bronchopulmonaires
concernent essentiellement les vertèbres, le squelette cervico-scapulaire, le bassin.
Elles sont le plus souvent lytiques ou mixtes, justifiant d’une irradiation antalgi-
que et éventuellement d’une chimiothérapie.
Dans les formes épidermoïdes, une hypercalcémie de lyse osseuse peut aggra-
ver une hypercalcémie paranéoplasique.
Cancer du rein
Les cancers du rein sont également ostéophiles et peuvent donner de volumi-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

neuses métastases osseuses lytiques, très vascularisées parfois même pulsatiles,


rendant alors dangereux tout geste biopsique local.
Le siège peut être crânien, vertébral, sternal.
L’irradiation nécessite en règle des doses élevées.
Dans les formes d’évolution lente, unimétastiques, une résection chirurgicale de
la localisation osseuse doit être envisagée.
Cancer de la thyroïde
Les métastases des cancers thyroïdiens sont surtout lytiques, parfois très volu-
mineuses prédominant sur l’axe pelvis rachidien. Si le tissu métastatique est
resté différencié, la fixation d’iode permettra un traitement par 131I, rarement
suffisant pour les localisations volumineuses.
Les formes d’évolution lente font poser la question d’une chirurgie d’exérèse
dans les situations uni- ou paucimétastatiques.

261 ◗
14_Chap12 Page 262 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Points clés

Tumeurs osseuses primitives


• Les tumeurs osseuses primitives bénignes sont des maladies fréquentes parfois asymp-
tomatiques dont le diagnostic repose essentiellement sur la clinique et l’analyse
radiologique.
• La crainte d’une tumeur maligne et l’existence de situations de doute font compléter
l’exploration par une TDM et/ou une IRM. Si le doute persiste seule une biopsie chi-
rurgicale permettra le diagnostic définitif.
• Les tumeurs osseuses primitives malignes sont des affections tumorales touchant
essentiellement l’enfant, l’adolescent et le jeune adulte.
• La tumeur d’Ewing est une tumeur maligne à cellules rondes liée à une anomalie géné-
tique habituellement t (11 ; 22). Le traitement est d’abord chimiothérapique suivi
d’une chirurgie permettant le plus souvent la conservation du membre avec parfois
procédé complexe de réparation. Le pronostic dépend de façon essentielle de la
qualité de la réponse tumorale à la chimiothérapie jugée sur la pièce de résection
osseuse. Environ deux tiers des patients sont aujourd’hui guéris.
• L’ostéosarcome est une maladie tumorale maligne primitive très agressive à fort poten-
tiel métastatique essentiellement pulmonaire. Le pronostic a été transformé par la
chimiothérapie réalisée en première intention avant la chirurgie d’exérèse. La guérison
est aujourd’hui obtenue dans 80 % des cas.

Métastases osseuses
• Les métastases osseuses constituent une évolution très fréquente des affections
malignes.
• Certains cancers sont plus particulièrement ostéophiles (cancers du sein, de la prostate,
du rein).
• Les métastases osseuses sont les tumeurs osseuses de loin les plus fréquentes chez
l’adulte et siègent préférentiellement sur le squelette axial (vertèbres, bassin).
• La symptomatologie est essentiellement douloureuse mais peut être plus
spectaculaire : compression radiculaire et/ou médullaire, fracture spontanée révéla-
trice, hypercalcémie.
• La scintigraphie osseuse « corps entier » aux diphosphonates marqués au
technétium 99 m constitue l’examen le plus performant pour la recherche de métas-
tases osseuses notamment lors du suivi d’un patient antérieurement traité pour un
cancer.
• L’exploration radiologique complémentaire (clichés standards, TDM) est orientée par
les anomalies scintigraphiques qui peuvent parfois être absentes (ostéolyse pure).
• Le traitement est d’abord celui de la douleur (antalgie médicamenteuse, irradiation
antalgique) parfois celui de la fracture ou de sa menace (os longs porteurs). Si elles
existent, les complications métaboliques sont traitées dans le même temps.


262 ◗
14_Chap12 Page 263 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

TUMEURS DES OS ET DES PARTIES MOLLES 12

Points clés (suite)


• L’existence d’une compression médullaire par métastases vertébrales est une urgence
décompressive.
• Le traitement spécifique de la néoplasie primitive dépend de sa nature, en sachant
que la possibilité d’une hormonothérapie (sein, prostate) constitue une possibilité thé-
rapeutique palliative précieuse.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


263 ◗
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15_Chap13 Page 265 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Lymphomes malins1
13
É. MOYAL

◗ MALADIE DE HODGKIN OU LYMPHOME HODGKINIEN


◗ LYMPHOMES MALINS NON HODGKINIENS

Les lymphomes malins représentent un groupe hétérogène de pathologies


tumorales dont le cadre nosologique n’a cessé d’évoluer au fil du temps et
en particulier récemment avec l’introduction des techniques de biologie molé-
culaire dans les procédures de diagnostic et de classifications. L’approche
médicale des lymphomes malins ne peut être que pluridisciplinaire et consti-
tue un modèle stratégique qui a souvent été extrapolé à d’autres maladies
néoplasiques.

◗ MALADIE DE HODGKIN OU LYMPHOME HODGKINIEN


◗ Définition
La maladie de Hodgkin est une prolifération maligne ganglionnaire caractérisée
par la présence d’une cellule particulière, la cellule de Sternberg dont l’origine
est incertaine, mais qui dans certains cas a pu être démontrée comme étant
lymphocytaire B.

◗ Épidémiologie
La maladie de Hodgkin (MdH) représente 40 % des lymphomes malins avec
une distribution bimodale :
– premier pic de fréquence, à l’âge de l’adolescence et jusqu’à 20 ans ;
– deuxième pic chez l’adulte de plus de 50 ans.
Il a été décrit une surincidence dans certains groupes (communautés, collèges,
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

etc.) sans qu’une quelconque transmissibilité ait pu être mise en évidence.


Les patients porteurs d’ataxie télangiectasique ont un risque élevé de MdH. De
même, une augmentation d’incidence est retrouvée chez les patients présentant
des titres élevés d’anticorps contre le virus d’Epstein-Barr (EBV), ce qui est à
rapprocher de la mise en évidence récente par techniques d’hybridation d’une
prolifération clonale de cellules infectées par l’EBV chez certains patients por-
teurs de MdH d’une part et d’autre part de la présence de fragments génomi-
ques de l’EBV dans les cellules de Sternberg.

1. Item n° 164. Lymphomes malins.



265 ◗
15_Chap13 Page 266 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Diagnostic
◗ Circonstances du diagnostic
Le signe clinique inaugural le plus fréquent est résumé par l’apparition d’une adé-
nopathie indolore, le plus souvent unique et périphérique.
Les premières adénopathies constatées sont en général sus-diaphragmatiques, cer-
vicales basses dans 60 à 80 % des cas. Les présentations initiales axillaires sont
moins fréquentes.
Si le premier symptôme est sous-diaphragmatique, il est en règle générale inguinal.
Les premières adénopathies peuvent être plus rarement profondes : médiastinales
révélées par des signes de compression telles que la toux, un syndrome cave, une
dyspnée.
Dans un tiers des cas, un syndrome général est associé : fièvre, sueurs profuses,
prurit cutané, amaigrissement récent.

◗ Arguments du diagnostic
Biopsie ganglionnaire
Elle est indispensable pour assurer le diagnostic, même si une cytologie préalable a
pu l’évoquer fortement. La biopsie doit être chirurgicale et emporter l’ensemble de
l’adénopathie choisie, le plus souvent au niveau du cou.
La cellule de Sternberg est classiquement indispensable au diagnostic de MdH en
sachant qu’elle peut être très rare dans certaines formes à prédominance lymphoïde
et que la prise d’hydantoïnes peut donner des aspects histologiques similaires, qui
disparaissent cependant à l’arrêt des médicaments en cause. La cellule de Sternberg
est une grande cellule basophile, polynuclée et présentant un halo périnucléaire.
Cette cellule est en général CD30+, CD15+.

Classification histopathologique
Forme à prédominance lymphocytaire • Elle ne concerne que moins de
5 % des cas, où il existe une abondante prolifération de lymphocytes et/ou d’his-
tiocytes d’apparence bénigne, rendant rares les cellules de Sternberg. Cette forme,
qui jusque-là était considérée comme maladie de Hodgkin, est en fait considérée
comme un lymphome B et non plus une maladie de Hodgkin, et est appelée para-
granulome de Poppema.
Forme scléronodulaire • Elle représente près de 80 % des cas, où la proliféra-
tion cellulaire est parcourue par des anneaux de collagène. Les cellules de Sternberg
sont volumineuses.
Forme à cellularité mixte • Constitue 15 à 20 % des cas où cohabitent une
grande diversité de types cellulaires (plasmocytes, leucocytes neutrophiles ou éosi-
nophiles, etc.) et quelques cellules de Sternberg.
Forme en déplétion lymphocytaire • Rare, elle représente environ 4 % des
cas. Elle est constituée de cellules de Sternberg et variantes des cellules de Sternberg,
de quelques lymphocytes. Ce sous-type est à distinguer des lymphomes non hod-
gkinien anaplasiques avec lesquels ils ont été confondus. Ce sous-type atteint en
général les patients plus âgés et est réputé comme étant la forme la plus agressive.

◗ Bilan d’extension
Clinique
Un examen clinique précis répertorie toutes les aires ganglionnaires superficiel-
les atteintes (site, taille, nombre, etc.) et évalue la taille du foie et de la rate.

266 ◗
15_Chap13 Page 267 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

L’examen clinique évalue également des signes cliniques d’évolutivité tels que :
– la fièvre prolongée à plus de 38 °C inexpliquée ;
– des sueurs nocturnes ;
– un amaigrissement de plus de 10 % du poids corporel au cours des six
derniers mois.

Radiologique
Des clichés du thorax de face et profil complétés d’une tomodensitométrie
thoracique : mesure du diamètre médiastinal, recherche d’adénopathies infé-
rieures à 2 cm, étude du parenchyme et de la paroi thoracique dans les formes
médiastinales volumineuses, recherche d’un épanchement pleural et/ou péri-
cardique.
Une tomodensitométrie abdominale recherchant des adénopathies rétropérito-
néales et/ou mésentériques. Cependant, seule l’augmentation de volume peut
être mise en évidence sans préjuger de l’envahissement tumoral. Le même exa-
men explore la structure hépatique et splénique.
La lymphographie n’est plus effectuée. L’utilisation de la tomographie à émission
de positrons (TEP) au 18-FDG est en cours d’évaluation.

Biopsie médullaire
Elle est systématique, évalue la richesse médullaire et recherche une infiltration
tumorale.

Évaluation hématologique
L’étude sanguine périphérique recherche des anomalies d’accompagnement
comme :
– une leucocytose avec souvent anémie normochrome ;
– une anémie hémolytique Coombs négative, rare ;
– un syndrome inflammatoire (augmentation de la VS, de la CRP) ;
– un taux élevé de phosphatases alcalines leucocytaires ;
– des anomalies du profil protéique immuno-électrophorétique.
Il est à noter que la laparotomie n’a pratiquement plus d’indication dans la mala-
die de Hodgkin.
Après avoir réalisé ce bilan d’extension, la classification de la maladie peut alors
être effectuée et guidera le choix de la thérapeutique. Elle repose sur l’extension
anatomique de la maladie, l’existence ou non d’un syndrome inflammatoire, et
l’absence ou la présence de signes d’évolutivité.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Classification selon l’extension


Depuis le début des années soixante-dix, une classification anatomique consen-
suelle est en vigueur (Ann Arbor, 1971).
L’adjonction au stade de :
– la lettre A, signifie qu’il n’y a pas de signes généraux associés ;
– la lettre B, signifie la présence d’un des trois signes d’évolutivité clinique
sus-cités.
Il existe quatre stades :
– stade I : maladie confinée à une seule région ganglionnaire (éventuelle-
ment plusieurs adénopathies) ou à un seul organe ou site extralympha-
tique (IE) ;

267 ◗
15_Chap13 Page 268 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– stade II : maladie étendue à deux ou plus régions ganglionnaires ou


extension localisée à un seul organe ou site extralymphatique (IIE) ;
– stade III : maladie étendue aux deux côtés du diaphragme pouvant
s’accompagner d’une localisation dans un organe extralymphatique (IIIE),
ou d’une localisation splénique (IIIS), ou des deux (IIISE) ;
– stade IV : maladie étendue de façon diffuse à un ou plusieurs organes
extralymphatiques (foie, os, poumon, système nerveux central, peau)
avec ou sans envahissement ganglionnaire.

◗ Principes de traitement
Le traitement de la MdH est éminemment pluridisciplinaire, faisant appel à plu-
sieurs moyens thérapeutiques dont les places respectives ont varié au cours du
temps en fonction des résultats obtenus, des évolutions nosologiques et de la
meilleure connaissance des effets secondaires indésirables.
Ainsi, les premiers traitements de la maladie de Hodgkin ont fait appel à la radio-
thérapie en raison de la grande radiosensibilité de cette maladie, puis avec le
développement des chimiothérapies, le traitement de référence a longtemps
été la polychimiothérapie de type MOPP, combinée à la radiothérapie.
En raison de la démonstration du haut risque leucémogène de cette association,
la pratique de la laparotomie exploratrice associée à la splénectomie a été réa-
lisée pour confirmer ou non l’indication chimiothérapique. A présent abandon-
née, elle a été remplacée par l’utilisation de nouvelles polychimiothérapies peu
leucémogènes (ABVD).
La tendance actuelle est donc à la « désescalade » thérapeutique pour les for-
mes localisées, et au contraire à l’accroissement de l’agressivité thérapeutique
pour les formes de mauvais pronostic.

◗ Chirurgie
La chirurgie participe à la démarche diagnostique lors de la biopsie ganglionnaire
initiale.

◗ Radiothérapie
Modalités
La MdH fait partie des maladies connues les plus radiosensibles, la technique
d’irradiation actuellement utilisée ayant été définie par H. Kaplan dans les
années soixante. La radiosensibilité importante de la MdH autorise des volumes
étendus de traitement sans risque majeur de complications graves : il a ainsi été
défini une technique d’irradiation régionale sus- et/sous-diaphragmatique
(« radiothérapie segmentaire », fig. 13.1) capable de concerner la totalité des
aires ganglionnaires proximales susceptibles d’être envahies.
Cette irradiation est aujourd’hui effectuée avec les photons délivrés par les accé-
lérateurs linéaires jusqu’à des niveaux de dose allant de 30 à 40 Gy en quinze
à vingt séances quotidiennes de 2 Gy.
La dose totale nominale a longtemps été de 40 Gy en quatre semaines et vingt
séances, mais les données les plus récentes montrent que la dose optimale,
nécessaire et suffisante, se situe vers 35 Gy avec éventuellement des surimpres-
sions de l’ordre de 5 Gy au niveau des sites initialement macroscopiquement
envahis.


268 ◗
15_Chap13 Page 269 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

➤ Fig. 13.1. Schéma d’irradiation ganglionnaire segmentaire pour maladie de Hodgkin. ➤

« mantelet »
sus-diaphragmatique

« Y inversé »
sous diaphragmatique

Effets secondaires
Bien que délivré à des doses relativement faibles, ce traitement comporte un
certain nombre de risques d’effets secondaires aigus et subaigus indésirables :
– hypoplasie médullaire dans les volumes traités, en particulier après
chimiothérapie ;
– pneumopathie radique, le plus souvent asymptomatique, prédominant
au niveau des sommets pulmonaires ;
– péricardite, symptomatique dans 5 % des cas ;
– hypothyroïdie clinique rare (10 %), biologique plus fréquente (30 à
50 %), devant être compensée dans tous les cas ;
– azoospermie transitoire dans les irradiations sous-diaphragmatiques, mal-
gré une protection adaptée, réversible en 1 à 5 ans.
À plus long terme, il existe un risque de complications tardives graves comme
l’insuffisance coronaire après irradiation médiastinale (1 à 2 %), ou surtout
l’apparition de seconds cancers, essentiellement après traitement radiochimio-
thérapique, atteignant alors à 15 ans un taux cinq fois plus élevé que dans la
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

population normale.

◗ Chimiothérapie
Depuis les années quarante, il est acquis que les moutardes azotées sont effi-
caces contre la MdH, efficacité confirmée lors de la naissance des polychimio-
thérapies qui les ont conservées.
L’association médicamenteuse de référence, établie à la fin des années soixante,
a été longtemps le protocole MOPP (moutarde azotée, vincristine, procarbazine
et prednisone), de rythme mensuel. Donné pour six mois ou plus, ce traitement
a permis l’obtention d’une réponse complète chez plus de 80 % des patients
atteints de stades III et IV.
Cependant les effets secondaires du MOPP, aigus (nausées, polynévrite, toxicité
médullaire) et chroniques (stérilité, seconds cancers), ont conduit à développer

269 ◗
15_Chap13 Page 270 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

d’autres associations médicamenteuses aussi efficaces mais moins toxiques, en


particulier en termes de seconds cancers, comme l’ABVD (adriamycine, bléomy-
cine, Velbé et Déticène).

◗ Indications thérapeutiques en fonction


du stade et facteurs pronostiques
◗ Facteurs pronostiques
Stade d’extension de la maladie
Il reste le facteur pronostique le plus important, mais, à stade égal, certains élé-
ments influencent le résultat final.

Volume tumoral
La présence d’un envahissement ganglionnaire médiastinal volumineux (bulky)
est définie comme un volume dont le diamètre radiologique transversal dépasse
le tiers de celui du thorax (cliché de face, mesure au niveau de D4). Parmi les
stades IV, le pronostic global dépend en grande partie du nombre de viscères
concernés. L’atteinte de plus de trois aires ganglionnaires, et l’envahissement
médullaire sont également des facteurs de mauvais pronostic.

Symptomatologie B
Globalement la présence d’un syndrome général franc dégrade les résultats thé-
rapeutiques.

Âge et sexe
Les patients âgés porteurs de stade III ou IV ont un moins bon pronostic que
les patients plus jeunes porteurs de stades équivalents.
Le sexe masculin est un facteur de pronostic péjoratif.

Biologie
L’augmentation de la VS, l’anémie, l’hypo-albuminémie, sont des facteurs péjoratifs.

◗ Indications thérapeutiques
Stades I et II
Pour les formes localisées I et II de pronostic favorable, le traitement repose sur
l’association de la chimiothérapie pour trois ou quatre cycles à l’irradiation de
l’ordre de 36 Gy des territoires initialement envahis.

Stades III et IV
Pour les stades IIIA, sans facteurs défavorables, le traitement consiste en une
association de quatre à six cycles de chimiothérapie à la radiothérapie.
Le traitement des stades IIIB et IV consiste en la réalisation de six (IIIB) à huit
cycles (IV) de chimiothérapie, la plupart du temps utilisant une alternance des
protocoles MOPP et ABVD, ou des protocoles hybrides entre les deux schémas
de référence. La radiothérapie est à discuter au cas par cas, en particulier pour
les masses bulky résiduelles.

270 ◗
15_Chap13 Page 271 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

La surveillance se fait par l’examen clinique, la radiographie pulmonaire, la tomo-


densitométrie, ainsi que la scintigraphie au gallium qui est utile lorsqu’il existe
une masse résiduelle afin de faire la part entre une maladie résiduelle ou de la
fibrose.

◗ Rechutes
La plupart des rechutes surviennent dans les cinq ans post-thérapeutiques, mais
les échecs très tardifs ne sont pas exceptionnels.
Les rechutes peuvent survenir en dehors d’un territoire irradié dans les formes
localisées et, dans ce cas, un traitement par polychimiothérapie puis radiothéra-
pie permet de grandes chances de guérison.
Les rechutes en territoires irradiés dans les formes localisées et les rechutes des
formes de stade plus élevé comme les stades IIIB et IV sont de moins bon
pronostic et nécessitent des chimiothérapies de deuxième ligne.

◗ Résultats
Compte tenu du bon pronostic global de la MdH, l’expression des résultats doit
être très précise et comporter chaque fois la survie globale, la survie sans mala-
die évolutive, les procédures d’évaluation initiale, le type et la technique de trai-
tement, la description et la fréquence des effets secondaires indésirables, aigus
et tardifs. Les principales complications sont la sténose coronarienne, le cancer
du sein pour les irradiations en mantelet, la stérilité chez l’homme et la femme
en raison soit de la polychimiothérapie, soit de l’irradiation sous-diaphragma-
tique.
Les taux de survie à 10 ans sans maladie évolutive sont de l’ordre de :
– stades IA, IIA : 80 à 90 % ;
– stades IB, IIB : 65 à 85 % ;
– stades IIIA : 65 à 85 % ;
– stades IIIB, IV : 40 à 60 %.

Points clés
• La maladie de Hodgkin est une hémopathie maligne pour laquelle les résultats
sont meilleurs que pour les autres lymphomes malins.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

• Cependant, ils restent encore insuffisants en raison de deux écueils qui sont les
effets secondaires tardifs du traitement et les échecs thérapeutiques.
• Cette pathologie doit être traitée au sein de centres spécialisés dans le cadre de
protocoles thérapeutique contrôlés.


271 ◗
15_Chap13 Page 272 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ LYMPHOMES MALINS NON HODGKINIENS É. MOYAL

◗ Définition
Les lymphomes malins non hodgkiniens constituent un groupe de maladies bio-
logiquement complexes dont les caractères nosologiques ont considérablement
évolué avec le développement des techniques de biologie moléculaire, d’immu-
nohistochimie et de cytogénétique, appliquées à l’anatomie pathologique. Ces
techniques permettent en effet une classification de plus en plus précise de ces
affections.
Ces lymphomes sont en général d’origine extramédullaire et dépourvus de cel-
lules de Sternberg.

◗ Épidémiologie, étiologie
Les LMNH s’observent à tout âge et tendent à augmenter en fréquence. Les
formes de l’enfant sont toujours agressives, à grandes cellules ou lymphoblasti-
ques.
L’étiologie des LMNH est le plus souvent inconnue, mais de nombreux facteurs
peuvent jouer un rôle :
– les déficits immunitaires génétiques ou acquis ;
– des infections virales ont été retrouvées dans certaines de ces
pathologies : virus d’Epstein-Barr, virus T-lymphocytique humain
(HTLV-1), virus VIH ;
– des anomalies chromosomiques comme celle retrouvée dans les lym-
phomes de Burkitt : une translocation constante de l’oncogène c-MYC a
été mise en évidence dans le gène des immunoglobulines.

◗ Anatomopathologie et classification
Le diagnostic de LMNH nécessite :
– une biopsie chirurgicale d’un élément ganglionnaire représentatif ou d’un
organe atteint, avec immunophénotypage et études enzymatiques et
cytogénétiques ;
– dans certains cas, le diagnostic est obtenu au moyen d’une biopsie
ostéomédullaire.
La description la plus récente des LMNH menant à leur classification se fait selon
des critères anatomopathologique (classification REAL, 1994) et repose sur :
– leur structure nodulaire ou folliculaire ;
– la morphologie cellulaire ;
– l’étude du phénotype B ou T complétée par l’étude d’autres phénotypes ;
– l’existence d’une translocation chromosomique.
Des anomalies cytogénétiques sont retrouvées dans 85 % des LMNH.
Ainsi, certaines anomalies spécifiques sont fortement corrélées à l’histologie, au
phénotype immunologique et au pronostic. Les marqueurs de surface aident
également au diagnostic. Les lymphomes B sont caractérisés par les marqueurs
CD22, CD19 et CD20, alors que les marqueurs pan-T sont CD3, CD2, CD7.
D’autres marqueurs de surface sont plus spécifiques de tel ou tel LMNH. Le
tableau 13.I montre les phénotypes et caractéristiques des principaux lympho-
mes.

272 ◗
15_Chap13 Page 273 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

Les trois lymphomes les plus fréquents sont :


– les lymphomes agressifs à grandes cellules (40 % des LMNH) ;
– les lymphomes indolents folliculaires ;
– le lymphome de Burkitt.

Tableau 13.I. Classification anatomopathologique des lymphomes malins


(REAL classification)

Principales formes Hémopathies lymphoïdes à précurseurs B


de lymphome B Lymphome lymphoblastique B

Hémopathies lymphoïdes matures B


Lymphome lymphocytique
Lymphome lymphoplasmocytaire
Lymphome B de la zone marginale
Extraganglionnaire de type MALT
Ganglionnaire, parfois monocytoïde
Lymphomes folliculaires
Lymphomes à cellules du manteau
Lymphomes diffus à grandes cellules
Variantes :
Centroblastique
Immunoblastique
Riche en cellules T
Type granulomatose lymphomatoïde
Anaplasique
Plasmoblastique
Lymphome de Burkitt
Principales formes Hémopathies lymphoïdes à précurseurs T
de lymphomes T Lymphome lymphoblastique T
Hémopathies lymphoïdes matures T
Lymphome prolymphocytaire T
Lymphome à cellules à grains
Lymphome à cellules NK
Lymphome T de l’adulte (HTLV1+)
Mycosis fongoïde/Syndrome de Sézary
Lymphome extranodal T/NK
Lymphome T avec entéropathie
Lymphome T γ-δ
Lymphome T sous-cutané de type panniculite
Lymphome anaplasique à grandes cellules
Lymphomes T périphériques
Lymphomes T angio-immunoblastiques
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Diagnostic
Il s’agit le plus souvent d’apparition d’adénopathies ou d’une découverte d’une
splénomégalie ou d’une localisation viscérale. Les symptômes généraux (sueurs
nocturnes, fièvre, perte pondérale) très souvent rencontrés dans la MdH ne sont
présents que dans 15 à 20 % des cas dans les LMNH.
Les signes cliniques des LMNH sont peu différents de ceux de la MdH à ceci
près que :
– l’extension par contiguïté n’est pas la règle ;
– l’extension médullaire osseuse et viscérale (tube digestif, anneau de Wal-
deyer, peau, os) est précoce et fréquente ;
– chez l’enfant, un syndrome de masse abdominale est le signe le plus
fréquent ;

273 ◗
15_Chap13 Page 274 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– la transformation leucémique survient dans 10 à 20 % des cas ;


– l’existence d’une anémie auto-immune avec Coombs positif n’est pas
exceptionnelle.

◗ Bilan d’extension
Il comprend :
– examen clinique ; il doit être complet avec notamment un examen ORL ;
– biopsie ostéomédullaire ;
– ponction lombaire ;
– colonoscopie, uniquement en cas de lymphome du manteau ou fibros-
copie gastrique en cas de signes d’appel ;
– examens radiologiques :
• échographie et scanner abdominaux pour préciser la taille des masses
tumorales ;
• radiographie du thorax et scanner thoracique ;
• scanner cérébral ou IRM en cas de signes d’appel ;
– examens biologiques :
• numération-formule sanguine-plaquettes ;
• bilan électrolytique sanguin, fonction rénale ;
• VS, fibrinémie ;
• LDH ;
• électrophorèse du sérum à la recherche d’une hypo-γ-globulinémie,
immunoglobuline monoclonale ;
• recherche d’anticorps anti-érythrocytaires (test de Coombs).

◗ Évolution et pronostic
Plusieurs facteurs pronostiques sont à prendre en compte :
– la classification REAL et donc l’aspect anatomopathologique ;
– l’âge : à stade égal, le pronostic sera moins bon pour des patients plus
âgés ;
– le sexe : les patients de sexe masculin semblent avoir un moins bon
pronostic ;
– l’indice de performance OMS : OMS 0 ou 1 versus 3 ou 4 ;
– les symptômes B : la présence de signes généraux — fièvre, sueurs noc-
turnes et perte de poids — est associée à un moins bon pronostic ;
– le stade Ann Arbor : les stades Ann Arbor élevés III ou IV versus I ou II
sont d’un pronostic plus péjoratif ;
– la présence de masse bulky : la présence d’une masse de plus de 5 à
10 cm est un facteur de mauvais pronostic ;
– le nombre de sites extraganglionnaires : le nombre de sites envahis est
un facteur indépendant de mauvais pronostic quant à la survie globale
et la survie sans récidive ;
– des facteurs biochimiques : l’élévation des LDH témoin de la masse
tumorale est un facteur de mauvais pronostic ;
– l’indice de prolifération : une activité de prolifération tumorale importante
mesurée entre autre par l’antigène Ki-67, l’index mitotique ou le pour-
centage de cellules en phase S (cytométrie en flux), est également un
facteur de mauvais pronostic.
Un index de pronostic international a été défini prenant en compte cinq facteurs
de risques (âge, LDH, indice de performance, stade Ann Arbor et nombre de sites
extraganglionnaires envahis) et permet de classer selon un score les patients en

274 ◗
15_Chap13 Page 275 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

trois groupes à risque faible, intermédiaire et haut. Les taux de survie à 5 ans des
patients appartenant à ces différents groupes sont significativement différents.
On distingue en fonction du pronostic trois grandes catégories de LMNH :
– les lymphomes de haut grade ou malignité très élevée ;
– les lymphomes de grade intermédiaire ou agressifs ;
– les lymphomes de bas grade ou d’évolution lente.

◗ Lymphomes de haut grade


◗ Lymphome de Burkitt (BL)
Ce lymphome a été décrit initialement en Afrique au stade endémique et y est
associé au virus EBV, mais il est retrouvé dans tous les pays sous forme sporadi-
que et est un lymphome très rapidement évolutif. Il est favorisé par l’infection par
le VIH. Le BL se développe plus particulièrement chez l’enfant (40 % de tous les
lymphomes de l’enfant), mais représente 5 % des cas de l’adulte. Le BL se pré-
sente souvent sous forme d’une tumeur abdominale touchant le cæcum et le
mésentère, mais peut apparaître au niveau d’un ganglion périphérique. Il est carac-
térisé par l’existence d’une translocation du gène c-MYC du chromosome 8 vers
la région des chaînes lourdes des immunoglobulines sur le chromosome 14 (t
(8 ; 14)), ou vers la région des chaînes légères sur le chromosome 2 (t (2 ; 8)),
ou le chromosome 22 (t (8 ; 22)), ainsi que de sa surexpression.

◗ Lymphomes lymphoblastiques
Ils sont à rapprocher des leucémies aiguës lymphoblastiques et sont de
phénotype T (CD7+, CD3+). La forme leucémique est fréquente chez les
enfants. Une forme ganglionnaire se voit chez l’adolescent et l’adulte jeune. Ces
lymphomes représentent 40 % de l’ensemble des lymphomes de l’enfant, mais
moins de 5 % des lymphomes de l’adulte. Le tableau le plus fréquent est celui
d’une tumeur médiastinale augmentant très rapidement de volume.

◗ Lymphomes agressifs ou de grade


intermédiaire
◗ Lymphomes B diffus à grandes cellules
Ils sont dans la plupart des cas de présentations ganglionnaires, mais aussi extra-
ganglionnaires augmentant rapidement de volume. Les localisations médiastina-
les et abdominales se présentent fréquemment sous la forme de grosses
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

masses tumorales. Ces lymphomes peuvent être guéris par la chimiothérapie.

◗ Lymphomes T et NK
Ils sont beaucoup plus rares (15 % des LMNH). Les malades se présentent en
général avec une maladie disséminée, avec présence de ganglions, de localisations
cutanées, hépatique et splénique, et dans d’autres territoires extraganglionnaires.

◗ Lymphomes de bas grade


ou d’évolution lente
Ces lymphomes sont de progression lente mais, contrairement aux
lymphomes B à grandes cellules, ne sont pas curables par la chimiothérapie.

275 ◗
15_Chap13 Page 276 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Lymphomes folliculaires
Ils représentent entre 20 à 30 % des LMNH. Cliniquement, il existe une atteinte
des territoires ganglionnaires superficiels et profonds, associée à un envahisse-
ment médullaire dans deux tiers des cas. Dans 90 % des cas, il existe une trans-
location t (14q32 ; 18q21), transférant le gène anti-apoptose BCL-2 du
chromosome 18 vers le chromosome 14, créant ainsi une interférence avec la
sénescence normale et la mort du centre germinatif normal. Il est à noter que
ce type de lymphome peut se transformer en un lymphome de grade intermé-
diaire à grandes cellules. La surexpression de p53 pourrait jouer un rôle dans
cette transformation.

◗ Lymphomes lymphocytiques
Ils sont des lymphomes à évolution longue comparable à celle des LLC.

◗ Autres formes de lymphomes


◗ Lymphomes du manteau
Ils surviennent chez l’adulte et présentent sous une forme disséminée dès le
diagnostic avec notamment envahissement splénique, de la moelle osseuse et
du tractus digestif. Des cellules lymphomateuses circulantes sont souvent retrou-
vées. Est associé un phénotype caractéristique (CD5+, CD10–/+, CD23–) ainsi
qu’une translocation t (11q13 ; 14q32) conduisant à une surexpression de
BCL-1 (cycline D1) impliqué dans la progression de la phase G1 à la phase S
du cycle cellulaire, qui est retrouvée dans plus de 90 % des cas. Ce lymphome
est de mauvais pronostic avec un taux de survie à 5 ans de 25 %.

◗ Lymphomes MALT
Ces lymphomes sont typiquement des lymphome B de bas grade. Ils présentent
une infiltration lymphoépithéliale de l’épithélium glandulaire de la muqueuse
digestive ou pulmonaire. Ces maladies sont souvent associées à une trisomie 3
et, dans certains cas, à une translocation t (11 ; 18). Dans le cas des
lymphomes MALT gastriques, une association avec une infection à Helicobacter
pylori peut être retrouvée et le traitement par antibiotique (amoxicilline, métroni-
dazole) peut entraîner une régression. Comme les lymphomes de type MALT sont
souvent localisés, ces patients sont traités par exérèse chirurgicale ou par radio-
thérapie locale en fonction de la localisation. Une chimiothérapie utilisant le chlo-
rambucil est aussi utilisée, en particulier en cas de dissémination de la maladie.

◗ Lymphomes cérébraux primitifs


La fréquence de ces lymphomes est en augmentation en raison de la survenue
de cette pathologie chez les sujets immunodéprimés, mais aussi pour une rai-
son encore inexpliquée. Ils se manifestent comme d’autres tumeurs du SNC par
des signes généraux neurologiques. L’imagerie par IRM ou scanner oriente le
diagnostic qui est fait sur le résultat de la biopsie stéréotaxique. Le traitement
de ces lymphomes B à grandes cellules consiste en général en une association
d’une chimiothérapie à base de méthotrexate et de radiothérapie.

◗ Mycosis fungoïdes
Ce lymphome est une hématodermie qui se présente dans sa première phase
par l’apparition de plaques érythémateuses et prurigineuses qui peuvent être

276 ◗
15_Chap13 Page 277 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

LYMPHOMES MALINS 13

confondues avec des dermatoses telles que l’eczéma ou le psoriasis. Après cette
longue phase qui peut durer des années, des tumeurs cutanées apparaissent
ainsi que des plaques cutanées typiques du mycosis fungoïdes. Ces plaques ou
tumeurs sont histologiquement constituées d’un infiltrat polymorphe compre-
nant des cellules de Sézary.

Syndrome de Sézary
Ce syndrome est défini par une érythrodermie diffuse et prurigineuse, parfois
associée à des adénopathies. Sur le plan histologique, des cellules mononuclées
présentant un noyau cérébriforme (cellules de Sézary) — qui sont en fait des
lymphocytes T matures — sont retrouvées au niveau cutané et parfois dans le
sang. Ces cellules peuvent être aussi retrouvées dans la rate, les poumons, le
foie et la moelle osseuse. Le diagnostic se fait sur punch-biopsies cutanées,
biopsie ganglionnaire ou biopsie médullaire.
Les malades porteurs de ces maladies lymphomateuses cutanées (mycosis,
Sézary) ont une survie assez longue bien que les thérapeutiques permettent
rarement l’obtention d’une rémission complète. Le traitement de ces maladies
est difficile est fait appel en général à la photothérapie avec psoralène et expo-
sition aux ultraviolets A (PUVA), à l’application cutanée de moutarde à l’azote,
au « bain d’électrons » qui consiste en une irradiation de toute la peau par des
faisceaux d’électrons, ou à la chimiothérapie systémique (chlorambucil,
interféron α ou rétinoïde).

◗ Principes de traitement
Compte tenu de la complexité de présentation clinique et histopathologique des
LMNH, la décision thérapeutique ne peut être que le fruit d’une démarche plu-
ridisciplinaire initiale. Schématiquement, la place de la radiothérapie a progres-
sivement diminué au cours des dernières décennies au fur et à mesure que des
associations chimiothérapiques nouvelles démontraient une efficacité de plus
en plus évidente dans ces maladies souvent diffuses et très évolutives.

◗ Radiothérapie
Elle peut concerner les aires ganglionnaires, allant de l’irradiation symptomatique
décompressive à l’irradiation ganglionnaire segmentaire voisine de celle de la
maladie de Hodgkin. Dans certains cas, l’irradiation peut concerner l’ensemble
des sites ganglionnaires (Total Nodal Irradiation, TNI) voire l’ensemble de l’orga-
nisme (Total Body Irradiation, TBI) et est alors suivie d’une greffe de moelle
osseuse. L’irradiation peut également inclure des sites viscéraux comme par
exemple l’anneau de Waldeyer dans les topographies cervicales exclusives.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

La dose nécessaire est de l’ordre de 35 à 40 Gy pour les formes de faible grade


ou lymphocytiques, mais doit atteindre 45 à 50 Gy quand il existe un contingent
à grandes cellules.
La radiothérapie est en particulier utilisée dans les formes localisées (20 %) des
lymphomes folliculaires, permettant une rémission complète dans plus de 95 %
des cas et une survie sans rechute pour 50 % d’entre eux.

◗ Chimiothérapie
La chimiothérapie est le moyen thérapeutique essentiel des LMNH dans la
mesure où une faible minorité de patients présentent effectivement une mala-
die localisée, en particulier ceux porteurs d’une maladie de faible grade qui
s’avère être de stade IV dans plus de 80 % des cas. Paradoxalement, les formes
de haut grade sont souvent moins étendues mais leur agressivité en fait égale-

277 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

ment une indication chimiothérapique dominante. Enfin, l’existence de signes


généraux, le volume lésionnel important, le nombre élevé de sites atteints sont
tous des arguments en faveur de la prescription chimiothérapique.
Pour les patients ayant un lymphome folliculaire disséminé, le traitement est
proposé en cas de facteurs de mauvais pronostic et, dans le cas contraire, l’abs-
tention peut être discutée. Un traitement n’est alors proposé qu’en cas de mala-
die progressive. Longtemps traités par des thérapeutiques peu agressives
comme le chlorambucil, il est actuellement proposé des chimiothérapies plus
agressives comme le CHOP et l’interferon ou la fludarabine, permettant d’obte-
nir des rémissions complètes.
En ce qui concerne les lymphomes agressifs, le traitement repose dans presque
tous les cas sur une polychimiothérapie, l’association de référence étant le
CHOP : cyclophosphamide, doxorubicine, vincristine et prednisone. Pour les
sujets de plus de 65 ans, une chimiothérapie de type CHOP dont la posologie
est adaptée selon la tolérance hématologique est réalisée dans le but d’obtenir
une rémission complète dès le primotraitement. Pour des sujets plus jeunes
présentant une forme localisée, le traitement consiste alors en trois cycles de
CHOP suivis d’une irradiation localisée. Pour les formes disséminées, huit cycles
de CHOP sont administrés permettant un taux de 60 % de réponse complète.
Dans le cas de résistance au traitement ou de récidive, on propose chez les
patients jeunes une autre chimiothérapie à base de sels de platine et d’aracy-
tine, suivie d’une intensification et d’une autogreffe de cellules souches périphé-
riques ou médullaires. Une autre chimiothérapie est également très utilisée dans
le traitement des lymphomes agressifs, l’ACVBP (adriamycine, cyclophospha-
mide, vindésine, bléomycine et predisone). Ainsi, pour les sujets jeunes porteurs
de lymphome agressif avec facteurs de mauvais pronostic, une chimiothérapie
de type ACVBP associant une phase d’induction de trois mois suivi d’une phase
de consolidation associant une intensification à une autogreffe est proposée.
La plupart des associations médicamenteuses proposées sont hautement myé-
lotoxiques avec près de 20 % d’aplasie médullaire profonde, ce qui justifie
aujourd’hui la prescription fréquente de facteurs de croissance hématopoïéti-
ques.
Enfin, l’antigène CD20 étant une protéine de surface exprimée presque exclu-
sivement sur les lymphocytes B matures, l’effet de l’anticorps monoclonal huma-
nisé tel que le Rituximab qui est un anticorps monoclonal IgG1 anti-CD20 a été
testé et a montré une efficacité certaine puisque cet anticorps a obtenu l’AMM
pour les lymphomes folliculaires réfractaires ou en rechute. Il a d’autre part
récemment fait la preuve de son efficacité associé au CHOP notamment dans
les lymphomes B diffus à grandes cellules du sujet âgé. La place des anticorps
monoclonaux dans le traitement des lymphomes fait l’objet d’essais thérapeuti-
ques.

◗ Résultats
Pour les LMNH faiblement évolutifs (faible grade, formes folliculaires), la survie
des patients est prolongée puisqu’environ 80 % des stades I sont vivants à
7 ans et qu’environ 40 % des stades II, III et IV le sont au même délai. Cepen-
dant, la plupart de ces patients survivants ne sont pas sans maladie évolutive,
ce qui confirme que la plupart de ces formes faiblement évolutives sont en fait
d’emblée diffuses et donc très difficilement curables de façon définitive.
En conséquence, le choix thérapeutique initial doit tenir compte de ces caracté-
ristiques et éviter les protocoles trop toxiques.
Pour les LMNH agressifs, la polychimiothérapie permet d’obtenir une réponse
complète dans environ un cas sur deux, avec une survie sans maladie évolutive
au-delà de 10 ans de l’ordre de 30 %. Contrairement aux formes peu évoluti-

278 ◗
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LYMPHOMES MALINS 13

ves, le stade initial a une influence pronostique déterminante, puisque le pro-


nostic pour les stades I et II est de l’ordre de 80 % de survie à 5 ans sans
maladie évolutive.
De nombreux essais cliniques sont en cours, incluant les caractéristiques histo-
cyto-immunogénétiques des LMNH pour mieux choisir l’attitude thérapeutique
en fonction des critères pronostiques les plus récents.

◗ Cas particulier du lymphome associé


au virus HTLV-1
Dans ces cas de lymphomes dénommés ATL (Adult T-cell Leukemia/lymphoma),
la prolifération est liée à l’infection par le virus HTLV-1. Les cellules expriment les
antigènes associés aux cellules T (CD2, CD3 et CD5) mais sont en général
CD4+ et CD7–. Il existe dans tous les cas une intégration clonale du génome du
virus HTLV-1. La plupart des cas sont observés au Japon, avec également la pré-
sence d’une endémie aux Caraïbes. Les formes cliniques rencontrées sont une
forme leucémique associant hépato-splénomégalie, hypercalcémie et lésions
osseuses, une forme lymphomateuse avec hypertrophie ganglionnaire, et surtout
une forme chronique avec hyperlymphocytose isolée.

Points clés
• Les lymphomes malins non hodgkiniens sont de présentation très polymorphe. Cer-
taines entités peuvent être guéries par traitement conventionnel, d’autres nécessitent
des traitements expérimentaux.
• La décision thérapeutique est fondée sur le diagnostic de l’entité qui se fait le plus
souvent à partir d’une biopsie ganglionnaire qui doit être réalisée dans un centre spé-
cialisé et sur la recherche de facteurs pronostiques péjoratifs.
• La guérison doit être le but recherché lors du premier traitement et peut être obtenue
dans 50 % des cas.
• Le traitement de rattrapage fait souvent appel à une intensification autogreffe. La place
de cette intensification avec autogreffe en particulier lors du primotraitement fait l’objet
de débats.
• Ainsi, les meilleures stratégies thérapeutiques ne sont pas encore déterminées et
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

l’inclusion des patients dans des essais prospectifs au sein de centres spécialisés est
recommandée afin de répondre à ces questions.


279 ◗
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16_Chap14 Page 281 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Myélome multiple1
14
É. MOYAL

◗ DÉFINITION
◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
◗ DIAGNOSTIC
◗ CLASSIFICATION
◗ COMPLICATIONS
◗ PRINCIPES DU TRAITEMENT
◗ PLASMOCYTOME SOLITAIRE

◗ DÉFINITION Le myélome multiple est caractérisé par une prolifération maligne monoclonale
des plasmocytes de la moelle osseuse, responsable de lésions osseuses lyti-
ques et d’une élévation sérique et éventuellement urinaire d’immunoglobulines
monoclonales.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
C’est une affection relativement rare (4 pour 100 000 habitants par an), qui sur-
vient chez l’adulte. La moyenne d’âge au moment du diagnostic est de 70 ans.
La cause est inconnue même si les survivants des explosions atomiques de 1945
montrent une surincidence de myélome multiple après 20 ans de délai.
La connaissance des caractéristiques immunogénétiques des proliférations myé-
lomateuses est en faveur d’une origine lymphoréticulaire de type B, l’anomalie
initiale pouvant concerner des précurseurs beaucoup plus précoces que les
cellules B matures.

◗ DIAGNOSTIC
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ Circonstances du diagnostic
La survenue de douleurs osseuses associées à une anémie et à une altération
de l’état général est souvent le mode de début de la maladie. Une fracture
pathologique peut être inaugurale.

1. Item n° 166. Myélome multiple des os.



281 ◗
16_Chap14 Page 282 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Certains patients peuvent débuter leur maladie par une insuffisance rénale
ou une hypercalcémie due à la résorption osseuse. Plus rarement, des infec-
tions opportunistes à répétition (pneumococcies, méningites) sont possi-
bles.

◗ Arguments du diagnostic
Le diagnostic repose sur la constatation de lésions osseuses lytiques, d’un pic
monoclonal d’immunoglobulines dans le sang et/ou les urines et enfin d’une
infiltration médullaire par une prolifération plasmocytaire supérieure à 10 %.
Ainsi le myélogramme, l’électrophorèse et l’immunoélectrophorèse des protéi-
nes dans le sang et les urines et la radiographie du squelette (crâne, rachis, os
longs) sont les examens indispensables :
– la prolifération plasmocytaire est détectée sur le myélogramme qui se fait
en première intention. Il est en règle retrouvé une plasmocytose de plus
de 10 % avec des plasmocytes anormaux. Si le myélogramme est insuf-
fisant, une biopsie médullaire est alors réalisée ;
– l’immunoélectrophorèse sérique retrouve un pic étroit d’immunoglobu-
line et permet de caractériser le type d’immunoglobuline monoclonale
anormalement sécrétée par les plasmocytes tumoraux : il s’agit d’IgG
dans plus de la moitié des cas, d’IgA (20 %), d’IgD (<1 %) ou d’IgE
(<1 %). Dans les urines, le même examen retrouve les fragments pro-
téiques ultrafiltrables, à savoir les chaînes légères κ ou λ des immunoglo-
bulines sériques (protéine de Bence-Jones) ;
– les signes osseux : dans 80 % des cas existent des lésions radiologiques
au niveau du crâne, du bassin, des os longs, qui sont classiquement soit
des lésions de lacunes à l’emporte-pièce, soit des fractures, ou bien des
images de décalcification diffuses.
Dans certains cas, le diagnostic peut être difficile car :
– les lésions osseuses peuvent faire discuter des localisations métastati-
ques de tumeur solide ;
– la plasmocytose médullaire peut être discrète, compatible avec d’autres
étiologies : toxicité médicamenteuse, collagénoses, cirrhose hépatique,
amyloïdose, etc. ;
– le pic monoclonal peut être faible, faisant discuter un trouble réactionnel
à une néoplasie, en particulier digestive. En outre, il existe des patients
porteurs d’une gammapathie monoclonale (< 2 g/100 ml) sans aucune
autre manifestation pathologique. La plupart de ces anomalies restent
stables, certaines peuvent déboucher sur un myélome.

◗ CLASSIFICATION
La classification du myélome multiple intègre le profil immunoprotéique, le
volume tumoral (étendue des lésions osseuses, pourcentage de plasmocytes
dans la moelle, taux d’hémoglobine, calcémie) et l’état de la fonction rénale
(tableau 14.I).
En plus de ces critères qui font le pronostic de la maladie, on retiendra égale-
ment le taux de β2-microglobuline lors du diagnostic ainsi que certaines anoma-
lies cytogénétiques.

282 ◗
16_Chap14 Page 283 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

MYÉLOME MULTIPLE 14

Tableau 14.I. Classification bioclinique des myélomes multiples


Stade Critères Masse
cellulaire
tumorale
(cellules
1012/m2)
I Tous les critères suivants : < 0,6
Hb > 10 g/100 ml, Ca < 120 mg/l.
Clichés osseux normaux ou lésion lytique unique
Faible taux de protéines myélomateuses :
IgG < 50 g/l
IgA < 30 g/l
Chaînes κ et λ < 4 g/24 heures
II Ni I ni III 0,6-1,2
III Un des éléments suivants : > 1,2
Hb < 8,5 g/100 ml, Ca > 120 mg/l
Plus de trois lésions ostéolytiques
Taux élevé de protéines myélomateuses :
IgG > 70 g/l
IgA > 50 g/l
Chaînes κ et λ > 12 g/24 heures
Sous-classification
A Urée sanguine < 600 mg/l Créatininémie < 20 mg/l
B Urée sanguine > 600 mg/l Créatininémie > 20 mg/l

◗ COMPLICATIONSLes principales complications sont :


– l’anémie qui est présente dans deux tiers des cas ;
– la plasmocytose sanguine qui lorsqu’elle est supérieure à 2 000/mm3 est
de pronostic très grave ;
– l’atteinte rénale par néphropathie tubulo-interstitielle (toxicité des chaînes
légères) ;
– l’amylose, survenant surtout dans les myélomes à chaînes légères ;
– l’hypercalcémie, complication fréquente ;
– le déficit immunitaire à l’origine de complications infectieuses bactériennes ;
– les complications neurologiques, dominées par la compression médullaire
lors de tassements fracturaires vertébraux.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

◗ PRINCIPES DU TRAITEMENT
Dans la mesure où certains patients présentent des maladies d’évolution très
lente, la certitude d’une évolution rapidement symptomatique est nécessaire
avant d’envisager un traitement spécifique actif, et les myélomes asymptomati-
ques ne doivent donc pas être traités.

◗ Chimiothérapie
La survie spontanée des patients porteurs d’une maladie évolutive symptomati-
que est d’environ un an, la chimiothérapie permettant d’atteindre en moyenne
3 à 4 ans.

283 ◗
16_Chap14 Page 284 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Le traitement initial des myélomes est représenté par la chimiothérapie. Elle


consiste principalement en l’association du melphalan utilisé sous la forme de
prises quotidiennes (10 mg/m2/j) pendant quatre jours répétées toutes les qua-
tre à six semaines. Il y est le plus souvent associé une corticothérapie per os, la
prednisone (MP). Le risque toxique majeur est la leucopénie qui peut amener
à choisir un intervalle plus long ou à réduire les doses. Le taux de réponse plus
ou moins complète est de l’ordre de 50 à 60 %. Il est également possible de
choisir le cyclophosphamide en monothérapie en cas de thrombopénie avec le
melphalan.
Un certain nombre de polychimiothérapies ont été proposées dans le traitement
du myélome multiple, sans qu’elles aient apporté la preuve évidente de leur
supériorité par rapport à la monothérapie : elles sont presque toutes constituées
d’une association d’agents alkylants (cyclophosphamide, melphalan) complétée
de nitroso-urées, de vincristine et de corticoïdes. Ces associations sont en règle
réservées aux formes rapidement progressives de l’adulte jeune (< 65 ans).
Pour les formes résistantes à la chimiothérapie, l’interféron (IFNα-2) témoigne
d’une efficacité certaine, ainsi que la thalidomide qui est de plus en plus utilisée.
Certains protocoles de traitement intensif, font appel après réduction première
de la masse tumorale par le traitement conventionnel à une greffe de cellules
souches autologues périphériques après administration de melphalan à fortes
doses et irradiation corporelle totale.

◗ Radiothérapie
La radiothérapie est le plus souvent utilisée comme traitement symptomatique
et palliatif des lésions osseuses algiques ou pour prévenir des fractures patho-
logiques d’os porteurs. Les doses délivrées sont alors de l’ordre de 20 à 30 Gy
en deux à trois semaines. Pour les localisations vertébrales, en particulier com-
pressives, il est nécessaire de réduire la taille des fractions pour délivrer des
doses de l’ordre de 45 Gy en quatre à cinq semaines sous corticothérapie
anti-œdémateuse. Dans certaines situations de douleurs osseuses diffuses, un
effet antalgique net peut être obtenu chez près de 90 % des patients avec des
doses uniques de 8,5 à 9,5 Gy sur l’hémicorps inférieur ou supérieur. Quand la
tolérance hématologique le permet, il est possible d’irradier l’autre hémicorps
quatre à six semaines plus tard.
Enfin, la radiothérapie peut être utilisée sous la forme d’irradiation corporelle
totale après induction chimiothérapique à hautes doses, le tout suivi de greffe
de moelle. Dans ces protocoles en cours d’évaluation, le taux de survie à 2 ans
chez les répondeurs est de l’ordre de 80 à 90 %.

◗ Résultats
Le myélome multiple reste aujourd’hui une maladie habituellement incurable,
même si les formes présentant une faible masse tumorale initiale ont une survie
de plusieurs années. Ainsi, les rares plasmocytomes extra-osseux sont guéris
dans plus de trois quarts des cas.

◗ PLASMOCYTOME SOLITAIRE C’est une tumeur osseuse isolée, plasmocytaire, ostéolytique, souvent révélée
par des douleurs, ou lorsqu’elle est située au niveau du rachis par une compres-
sion médullaire.

284 ◗
16_Chap14 Page 285 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

MYÉLOME MULTIPLE 14

Le traitement consiste en une irradiation qui a un objectif de type « curabilité ».


Le volume lésionnel doit être précisément défini et en particulier son extension
fréquente aux parties molles (TDM, IRM). Les doses délivrées sont de l’ordre de
50 Gy en cinq semaines avec parfois surimpression de 5 à 10 Gy sur champs
réduits.
Les plasmocytomes osseux dits solitaires sont non évolutifs à la dixième année
dans 20 à 30 % des cas.

Points clés
• Le diagnostic repose principalement sur association immunoglobuline monoclonale
sanguine ou urinaire + lésions osseuses lytiques + plasmocytose médullaire.
• Le traitement principal consiste en la chimiothérapie ou, pour le sujet jeune, à l’inten-
sification suivie par autogreffe qui a amélioré le pronostic de façon significative.
• La radiothérapie est en règle utilisée de façon palliative et symptomatique, sauf dans
le cas de l’irradiation corporelle totale dans un projet d’intensification, ou dans le trai-
tement du plasmocytome solitaire.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


285 ◗
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17_Chap15 Page 287 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Syndromes
paranéoplasiques 15
N. DALY-SCHVEITZER

◗ PATHOGÉNIE
◗ TYPES TUMORAUX CONCERNÉS
◗ PRINCIPAUX SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES

Un syndrome paranéoplasique est caractérisé par un effet de la tumeur sur


l’hôte sans relation directe avec les zones où siège la tumeur ou ses métastases.
On peut estimer à environ 75 % le taux de patients porteurs de cancer qui
présentent ou présenteront un syndrome paranéoplasique (SPN).
Un SPN peut être le premier symptôme d’un cancer, peut avoir une incidence
propre sur la mortalité et/ou la morbidité, et constitue souvent un bon reflet de
la sensibilité de la tumeur aux traitements.

◗ PATHOGÉNIE Il existe de nombreux mécanismes possibles à l’origine d’un SPN : substances


physiologiquement actives, produites par les cellules tumorales arrivées à un
stade dédifférencié de leur évolution cellulaire, substances anormalement diffu-
sées dans l’organisme à travers la néovascularisation tumorale siège de multi-
ples ruptures des membranes basales.
D’autres mécanismes comme le développement d’une maladie auto-immune
(tumeurs du rein) peuvent être observés.

◗ TYPES TUMORAUX CONCERNÉS


Certaines tumeurs sont plus régulièrement productrices de SPN :
– tumeurs d’origine tissulaire neurectodermique, la plus agressive étant le
cancer pulmonaire à petites cellules, générant de nombreux SPN
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

endocriniens ;
– tumeurs épidermoïdes ORL, du poumon ou de l’œsophage, associées à
des sécrétions anormales de parathormone aboutissant à une hypercal-
cémie différente des hypercalcémies liées à l’hyperdestruction osseuse
par l’extension métastatique.
Des associations cliniques permettent d’orienter facilement les probabilités dia-
gnostiques tumorales :
– tumeur pulmonaire et hypercalcémie : épithélioma épidermoïde bronchi-
que probable ;
– tumeur pulmonaire et sécrétion inappropriée d’ADH : épithélioma pul-
monaire à petites cellules ;
– tumeur rétropéritonéale et hypertension : phéochromocytome ou tumeur
primitive du rein.

287 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ PRINCIPAUX SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES


◗ Syndromes endocrinométaboliques
Ces syndromes regroupent (tableau 15.I) :
– ceux associés aux tumeurs d’un organe endocrine sécrétant une hor-
mone particulière (par exemple, corticostéroïdes produits par un carci-
nome du cortex surrénalien, ou corticosurrénalome) ;
– ceux survenant chez des patients porteurs de NEM (néoplasies endocri-
niennes multiples), d’origine génétique ;
– ceux associés à des tumeurs dérivées d’organes non endocriniens mais
produisant des hormones ou des substances proches.
En clinique, deux syndromes dominent par leur fréquence et leur gravité potentielle :
– l’hypercalcémie paranéoplasique qui survient dans environ 10 % des
patients porteurs de cancers, pouvant constituer une véritable urgence
oncologique nécessitant au-delà du traitement spécifique de la tumeur
en cause, une réanimation médicale appropriée ;
– l’hyponatrémie du syndrome de Schwartz-Bartter (sécrétion inappropriée
d’ADH) qui entraîne progressivement une confusion mentale puis un
coma létal.

Tableau 15.I. Syndromes paranéoplasiques endocriniens


Hormone Siège tumoral
Parathormone Bronche (épidermoïde), rein, colon, pharyngolarynx, ovaire
Calcitonine Thyroïde (carcinome médullaire), bronche (anaplasique)
ACTH Bronche (anaplasique, carcinoïde), pancréas, estomac, ovaire
ADH Bronche (anaplasique), pancréas
Érythropoïétine Rein, foie, ovaire
Insuline Pancréas, parties molles (sarcomes)
β−HCG Foie, poumon, carcinoïde
STH Poumon, endomètre
Prolactine Rein

◗ Syndromes neuromusculaires
Il est décrit deux types de syndromes (tableau 15.II) :
– dégénératifs centraux : cervelet, moelle épinière, encéphale ;
– spécifiques périphériques neuropathiques ou neuromyopathiques. Dans ce
cadre, les syndromes myasthéniques (maladie de Lambert-Eaton, myasthe-
nia gravis) peuvent être associés à des carcinomes divers ou des thymomes.

Tableau 15.II. Principaux syndromes paranéoplasiques neurologiques


Site Syndrome Clinique Néoplasie
associée
Encéphale Dégénérescence Syndrome cérébelleux Poumon,
cérébelleuse subaiguë déficitaire symétrique avec prostate,
démence et hyper- ovaire
lymphocytose dans le LCR


288 ◗
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SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES 15

Suite du tableau 15.II. ➤


Encéphalite limbique Démence Poumon,
avec dégénérescence Hodgkin
de l’hippocampe
et des noyaux
amygdaliens, lésions
inflammatoires diffuses
sur le névraxe
Leucoencéphalo-pathie Démence, paralysies, Leucémies,
multifocale progressive aphasie ataxie, déficit lymphome
visuel, coma, épilepsie,
décès rapide
Moelle Myélopathie nécrotique Paralysie et troubles Poumon,
sensitifs rapidement rein
ascendants, protéinorachie
Nerfs Neuropathie Hypoesthésie superficielle Poumon,
périphériques sensitivomotrice et profonde progressive digestif,
proximale sein
avec myasthénie, aréflexie
et protéinorachie
Jonction Dermatomyosite Faiblesse, fatigabilité Poumon,
neuromusculaire et polymyosite musculaire proximale, estomac,
syndrome inflammatoire ovaire
et myolytique
Myasthenia gravis Faiblesse musculaire Thymome,
oculaire et faciale, lymphome,
fluctuante, partiellement sein
réversible
avec les médicaments
cholinergiques
Syndrome Faiblesse, fatigabilité Poumon,
myasthénique musculaire proximale, estomac,
(Lambert-Eaton) sécheresse buccale, ovaire
dysphagie, dysarthrie,
paresthésies
périphériques

◗ Syndromes cutanés
De nombreux syndromes cutanés sont associés à des néoplasies : purpuras,
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

phlébites, flush érythèmes, pseudo-urticaires bulleuses, hyperpigmentation, pru-


rit, zona, alopécie mucineuse, pachydermopériostoses, érythème noueux, hyper-
trichose et acanthosis nigricans (tableau 15.III).

Tableau 15.III. Syndromes paranéoplasiques cutanés


Syndrome Description Néoplasie Commentaires
associée
Acanthosis Hyperkératose avec Estomac, À distinguer
nigricans pigmentation prédominant côlon, des formes
au niveau des aisselles, ovaire bénignes
du cou, des plis de flexion congénitales
et du périnée


289 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Suite du tableau 15.III. ➤


Leser-Trelat Apparition rapide Lymphomes, Parfois associé
de volumineuses lésions adénocarcinomes à un acanthosis
séborrhéiques digestifs nigricans
kératosiques
Maladie Érythème Carcinomes ORL, Ne se voit que chez
de Bazex hyperkératosique poumon, digestif les hommes
et prurigineux des paumes
des mains et des plantes
des pieds
Érythème Érythème en plaques Sein, poumon, Quasi-constammen
gyratum repens rondes rapidement divers t associé
évolutives, changeantes, à une néoplasie
desquamatives
et prurigineuses
Flush Épisodes d’érythème Tumeurs Sécrétion
diffus de la face carcinoïdes, cancer de sérotonine,
et du cou médullaire de vasopeptides
de la thyroïde
Dermatite Érythème progressif Lymphomes
exfoliatrice suivi de desquamation cutanés T, autres
lymphomes,
Hodgkin

◗ Syndromes hématologiques
Plusieurs syndromes hématologiques peuvent accompagner les néoplasies et/
ou leurs traitements :
– réaction érythroblastique leucémoïde, myélémie, témoignant d’un enva-
hissement médullaire métastatique massif ;
– raccourcissement de la durée de vie des hématies ou des plaquettes
témoignant d’une destruction cellulaire anormale dans la néovascularisa-
tion tumorale avec parfois syndrome de coagulation intravasculaire le
plus souvent localisé au site tumoral ;
– anémie hémolytique auto-immune lors des lymphomes ou des leucémies ;
– syndrome d’hyperviscosité sanguine lors des myélomes parfois associé à
des cryoglobulines précipitantes.

◗ Syndromes gastro-intestinaux
Il existe de très nombreux syndromes digestifs qualifiés de paranéoplasiques
pouvant concerner tous les segments anatomiques : multiples syndromes de
malabsorption ou de déficit synthétique, syndrome anorexie-cachexie, complexe
et multifactoriel, ulcères multiples et diarrhée des tumeurs pancréatiques lan-
gheransiennes (syndrome de Zollinger-Ellison).

◗ Syndromes uronéphrologiques
Le myélome multiple est susceptible d’entraîner une insuffisance rénale aiguë
par dommage tubuloglomérulaire lié à l’hyperprotidémie anormale, l’hypercalcé-
mie, l’hyperuricémie et les dépôts amyloïdes intraparenchymateux rénaux.
Par ailleurs, le rein est l’organe cible de l’ADH (syndrome de Schwartz-Bartter).
Enfin, des glomérulopathies auto-immunes ont été décrites comme liées au

290 ◗
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SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES 15

conflit immunologique intrarénal initié par des complexes immuns circulants nés
au contact des déterminants antigéniques tumoraux.

◗ Syndromes connectivovasculaires
Dermatomyosites et polymyosites peuvent être associées à de multiples néo-
plasies comme les adénocarcinomes digestifs, pulmonaires ou mammaires. Une
maladie rhumatoïde peut être associée à un lymphome.
Le syndrome de Sjögren, un lupus érythémateux, une arthrite rhumatoïde, une
sarcoïdose, une sclérodermie, toutes maladies auto-immunes ont été décrites
dans l’évolution des thymomes malins. Des dépôts amyloïdes intraviscéraux ont
été mis en évidence lors de la maladie de Hodgkin, du myélome et d’adéno-
carcinome rénal. Enfin, les cancers de l’ovaire peuvent s’accompagner ou parfois
être précédés de signes rhumatologiques à type de polyarthrite ou de fasciite
palmaire algique.

◗ Syndromes cardiovasculaires
Des endocardites verruqueuses non bactériennes peuvent survenir chez des
patients porteurs d’adénocarcinomes de types divers et être responsables de
mort subite ou de syndromes coronariens.
Le syndrome carcinoïde peut être responsable d’une valvulopathie (tricuspide
avec insuffisance cardiaque droite), d’une fibrose endocardique ou d’une mala-
die pulmonaire bronchospastique.

◗ Syndromes divers
La fièvre est un symptôme associé non classable : au-delà des multiples causes
infectieuses surajoutées, un syndrome fébrile peut être uniquement lié à l’exis-
tence tumorale soit par libération de substances pyrogènes (rein), soit par trou-
bles intratumoraux de l’hémostase. Les traitements anti-inflammatoires non
cortisonés sont en règle générale très efficaces.
En conclusion, la connaissance des SPN peut aider au diagnostic, à l’évaluation
de l’efficacité du traitement et au suivi de bon nombre de néoplasies.

Points clés
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

• Un SPN peut être révélateur d’une affection maligne.


• Son existence peut constituer un marqueur de l’évolution, spontanée et sous traite-
ment, de la maladie néoplasique en cause.
• Les tumeurs fréquemment responsables de SPN sont des carcinomes soit indifféren-
ciés d’origine neurectodermique soit épidermoïdes notamment bronchiques.
• Certains SPN comportent par eux-mêmes une gravité qui peut influencer le pronostic
vital.


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Urgences
cancérologiques 16
N. DALY-SCHVEITZER

◗ URGENCES CARDIOVASCULAIRES ◗ URGENCES UROLOGIQUES


◗ URGENCES HÉMATOLOGIQUES ◗ URGENCES RESPIRATOIRES
◗ URGENCES MÉTABOLIQUES ◗ URGENCES NEUROLOGIQUES
◗ URGENCES INFECTIEUSES ◗ URGENCES OCULAIRES
◗ URGENCES DIGESTIVES

Les perturbations anatomiques, métaboliques ou immunologiques entraînées


par le développement d’une néoplasie peuvent créer des situations cliniques
d’urgence vitale pour les patients. Il est alors indispensable de les anticiper, de
les reconnaître précocement et de les traiter en temps utile, qu’il s’agisse d’effets
liés à la maladie ou de ceux découlant des traitements qui y sont opposés.

◗ URGENCES CARDIOVASCULAIRES
◗ Épanchement péricardique et tamponnade
Une tamponnade cardiaque survient quand l’accumulation de liquide dans le
sac péricardique empêche le remplissage diastolique du cœur et de ce fait com-
promet son fonctionnement hémodynamique normal. L’infiltration du péricarde
par un cancer métastatique peut être à l’origine d’une telle situation, en particu-
lier lors des cancers du sein et du poumon en phase avancée.

◗ Diagnostic
Les symptômes de tamponnade associent dyspnée, orthopnée, douleur thora-
cique et confusion. À l’examen, on trouve tachycardie, tachypnée, cyanose,
hypotension, pouls paradoxal, assourdissement des bruits cardiaques et parfois
un frottement péricardique.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Le cliché thoracique montre un cœur globuleux élargi et souvent un épanche-


ment pleural bilatéral. Le tracé électrocardiographique retrouve une tachycardie
sinusale, un bas voltage et une arythmie auriculaire.
L’échocardiographie est l’examen complémentaire de choix montrant l’épanche-
ment péricardique et parfois un collapsus atrio-ventriculaire durant la diastole.

◗ Traitement
En urgence, une ponction péricardique est nécessaire pour soulager la fonction
myocardique, le liquide devant faire l’objet d’une analyse cytologique, bactériologi-
que et biochimique. Dans plus de 85 % des cas, des cellules néoplasiques sont
retrouvées par la cytologie. Pour éviter la récidive de l’épanchement et de la tam-
ponnade, il est nécessaire de réaliser chirurgicalement une fenêtre péricardique ou
de provoquer une sclérose accolant les deux feuillets par injection de tétracycline.

293 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Les patients dont la situation hémodynamique a été stabilisée peuvent bénéfi-


cier d’une chimiothérapie ou d’une irradiation s’ils présentent une tumeur
métastatique sensible comme un cancer du sein ou un lymphome.

◗ Syndrome cave supérieur


L’obstruction de la veine cave supérieure par compression et/ou envahissement
à partir d’une tumeur médiastinale constitue une situation clinique justifiant sou-
vent une attitude d’urgence. Il s’agit le plus souvent d’un cancer bronchopulmo-
naire, en particulier de la forme anaplasique à petites cellules, mais les
lymphomes et les autres formes de cancers bronchiques peuvent également
donner un syndrome cave supérieur. La sévérité immédiate du syndrome est
fonction de l’importance de l’obstruction cave et de la compétence effective du
réseau collatéral de suppléance. Malgré sa présentation initiale souvent specta-
culaire, il est rare que le syndrome cave supérieur entraîne par lui-même une
issue fatale. Cependant, l’atteinte concomitante d’autres structures médiastinales
comme la trachée ou le péricarde peut avoir des conséquences immédiatement
graves.

◗ Diagnostic
Céphalées, nausées, vomissements, troubles visuels et syncope constituent les
symptômes initiaux. La dysphonie, la dyspnée, la dysphagie ou les douleurs dor-
sales témoignent de la participation d’autres structures que le système cave.
À l’examen il est constaté une dilatation du réseau veineux superficiel hémicor-
porel supérieur avec œdème et cyanose.
Le cliché thoracique montre une opacité paratrachéale droite ou un élargisse-
ment médiastinal. La tomodensitométrie thoracique est très utile pour préciser
l’extension tumorale, guider la biopsie transpariétale, distinguer entre compres-
sion et obstruction endovasculaire, et enfin aider au plan d’irradiation.
Dans certains cas, l’obtention d’un fragment biopsique doit être différée au profit
du traitement d’urgence.

◗ Traitement
De façon symptomatique, les diurétiques, les corticostéroïdes, l’oxygénothérapie
sont les plus souvent indispensables, les anticoagulants non systématiques.
L’irradiation médiastinale est le geste d’urgence le plus efficace et permet dans
plus de deux tiers des cas une amélioration symptomatique rapide. Il est recom-
mandé de délivrer au moins au début des doses par séance de l’ordre de 4 Gy,
reconnues nettement plus efficaces que celles plus classiques voisines de 2 Gy.
En général, l’amélioration symptomatique est obtenue en huit jours.
La chimiothérapie peut être efficace, mais uniquement pour les tumeurs très
sensibles comme les lymphomes ou les cancers bronchiques anaplasiques à
petites cellules, ce qui suppose que la preuve histologique ait pu être obtenue.

◗ URGENCES HÉMATOLOGIQUES
◗ Coagulation intravasculaire disséminée
La coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) est un syndrome
thrombo-hémorragique dû à un excès d’activation de la thrombine. Ceci
entraîne une consommation importante et donc une diminution majeure de la

294 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

disponibilité des facteurs circulants de la coagulation avec dans le même temps


précipitation de thrombi fibrinoplaquettaires dans la microcirculation. De ce fait,
la CIVD se manifeste le plus souvent sous la forme d’un syndrome hémorragi-
que avec plusieurs dysfonctionnements organiques associés.
Ce syndrome apparaît le plus souvent au moment du diagnostic ou au décours
du traitement cytoréducteur d’une leucémie aiguë, mais peut également com-
pliquer d’autres leucémies ou tumeurs solides très cellulaires. La CIVD est vrai-
semblablement initiée par les thromboplastines tissulaires, les protéases ou les
interleukines libérées par les cellules leucémiques ou tumorales.

◗ Diagnostic
Des hémorragies graves, souvent multiples, avec risque neuroméningé majeur,
dominent le tableau clinique.
Les données biologiques montrent une thrombocytopénie profonde, un allon-
gement des temps de prothrombine, de thrombine et du temps partiel de
thromboplastine, une hypofibrinogénémie et une élévation du taux circulant des
produits de dégradation de la fibrine. Une fragmentation des hématies peut être
retrouvée sur les frottis sanguins.

◗ Traitement
Les patients leucémiques présentant une CIVD sont traités par héparine IV (5 à
10 U/kg/h) pour inhiber l’activité thrombine. L’administration rapide de plaquet-
tes, de plasma et de cryoprécipités est nécessaire pour restaurer rapidement les
facteurs de la coagulation. La numération des plaquettes doit être maintenue
au-dessus de 50 000/ml et le fibrinogène au-dessus de 1,5 g/ml. Le traitement
transfusionnel et l’héparinothérapie doivent être poursuivis jusqu’à ce que la chi-
miothérapie ait réduit suffisamment le volume tumoral et que le syndrome
hémorragique soit contrôlé.

◗ Leucostase
La leucostase est une complication des leucémies hypercellulaires au cours des-
quelles la microvascularisation peut être obstruée et/ou infiltrée par les cellules
blastiques. Cette complication peut survenir quand la numération leucocytaire
est au-dessus de 100 000/ml. Les conséquences sont le plus souvent un dys-
fonctionnement pulmonaire et neurologique par obstruction et/ou hémorragie
à partir des vaisseaux de petit calibre. Les leucémies myéloïdes aiguës et chro-
niques, les leucémies lymphoblastiques aiguës, beaucoup plus rarement la leu-
cémie lymphoïde chronique, peuvent se compliquer de leucostase. Les patients
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

présentant une variété monocytaire de leucémie aiguë sont particulièrement


exposés à ce risque. Habituellement, la leucostase survient avant tout traitement,
mais elle peut parfois être secondaire à la chimiothérapie ou à une transfusion
sanguine.

◗ Diagnostic
Le diagnostic doit être posé devant tout patient présentant une leucocytose
supérieure à 50 000 et qui se plaint de difficultés neurologiques ou respiratoi-
res. On retrouve alors dyspnée, confusion, ataxie, troubles visuels, avec dans
certains cas un priapisme ou une insuffisance artérielle périphérique.
L’examen physique peut montrer un œdème papillaire, une distension veineuse
rétinienne, des râles pulmonaires diffus avec tachypnée. La gazométrie sanguine
montre alors une hypoxie marquée.

295 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Traitement
La baisse rapide de la leucocytose est indispensable pour éviter les conséquen-
ces graves d’une détresse respiratoire ou d’une hémorragie cérébrale ou ménin-
gée. Une leucophérèse en urgence permet de réduire la leucocytose de 30 à
60 % et de diminuer les effets métaboliques liés à la destruction cellulaire par
la chimiothérapie. L’hydroxurée à la dose de 3 g/m2/j per os pendant deux jours
entraîne une diminution rapide du nombre de leucocytes.
Les deux moyens précédents n’ont que des effets transitoires, et seule l’effica-
cité de la chimiothérapie permettra d’éviter la réapparition d’une hyperleucocy-
tose dangereuse.

◗ Thrombocytopénie
Le plus souvent l’apparition d’une thrombopénie chez un patient porteur d’un
cancer est due à une diminution de la production plaquettaire. Les traitements
myélosuppressifs comme la chimiothérapie ou l’irradiation étendue sont sou-
vent en cause, mais l’infiltration de la moelle osseuse par les cellules tumorales
peut aboutir au même résultat. Au-delà de 50 000 éléments par ml, le risque
d’hémorragie spontanée est faible. En revanche, il augmente très vite au-des-
sous de 20 000 plaquettes par ml, en particulier au niveau des muqueuses
avec un risque méningé ou endocérébral dominant.

◗ Diagnostic
Épistaxis, ecchymoses, purpura, ménométrorragies, hématurie ou hémorragies
digestives peuvent être constatées, le diagnostic étant affirmé par la numération
plaquettaire.

◗ Traitement
Les transfusions plaquettaires sont indiquées lorsqu’un syndrome hémorragique
survient au décours d’une thrombocytopénie sévère, ou comme traitement pré-
ventif du risque hémorragique lors d’une numération plaquettaire inférieure à
20 000/ml. En l’absence d’association avec une fièvre, une infection, une splé-
nomégalie ou une allo-immunisation, une unité plaquettaire pour 10 kg de
poids corporel (5 à 7 U/m2) est une posologie suffisante pour atteindre un
compte plaquettaire efficace. Au cours d’une hémorragie patente la numération
plaquettaire doit être maintenue au-dessus de 50 000/ml. Aucune cause sup-
plémentaire de destruction plaquettaire comme l’aspirine, ne doit être adminis-
trée.

◗ URGENCES MÉTABOLIQUES
◗ Hypercalcémie
L’hypercalcémie est le plus souvent rencontrée lors de l’évolution métastatique
incontrôlée d’une néoplasie et alors associée quasi constamment à des localisa-
tions osseuses. L’hypercalcémie maligne peut se déclarer brutalement et avoir
une évolution rapide, éléments qui la distinguent des autres hypercalcémies
comme lors d’un hyperparathyroïdisme. L’hypercalcémie maligne peut être
entraînée par plusieurs mécanismes souvent associés. Dans certains cas, les cyto-
kines libérées par les cellules tumorales peuvent stimuler l’activité ostéoclastique
et donc augmenter l’hypercalcémie, dans d’autres la tumeur peut produire des

296 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

peptides avec des propriétés voisines de celles de la parathormone, entraînant


une hypercalcémie avec peu ou même pas du tout de localisations osseuses.

◗ Diagnostic
Les symptômes de l’hypercalcémie comportent anorexie, nausées, vomisse-
ments, constipation, polyurie, polydipsie et troubles de la conscience. L’hyper-
calcémie est affirmée sur le dosage du calcium sérique. Un ECG est
indispensable, à la recherche de troubles du rythme, parfois graves (tachycardie
ventriculaire).

◗ Traitement
L’obtention forcée d’une diurèse d’au moins 200 à 250 ml/h doit être provo-
quée par une hyperhydratation parentérale et l’administration de diurétiques,
afin d’inverser la contraction du volume extracellulaire et de favoriser la calciu-
rèse. Cette manœuvre suppose une surveillance étroite des fonctions cardio-pul-
monaires pour prévenir toute surcharge hydrique susceptible de provoquer une
défaillance cardiaque congestive en particulier chez les patients âgés. Les effets
de cette diurèse forcée sont en général perceptibles sur la calcémie après 24 à
48 heures de traitement.
Les corticoïdes sont utiles dans le traitement de l’hypercalcémie secondaire à
un plasmocytome multiple, un lymphome ou un cancer du sein. Leurs effets
positifs s’observent après cinq à dix jours de traitement. Les inhibiteurs de l’acti-
vité ostéoclastique comme le nitrate de gallium ou surtout les diphosphonates
sont souvent indispensables. Leur indication doit être réservée aux échecs des
traitements précédents ou quand ils ne sont pas réalisables. Leur effet est per-
ceptible 48 à 96 heures après la première administration IV.
La mithramycine à la dose de 25 mg/kg IV permet une diminution de la calcé-
mie à partir de 12 heures en inhibant l’activité ostéoclastique, les effets étant
maximaux un à deux jours après l’administration et persistant jusqu’à trois
semaines. Son utilisation est en principe contre-indiquée en cas d’insuffisance
rénale ou de thrombopénie sévère. Enfin, le traitement spécifique de la maladie
néoplasique en cause reste le moyen le plus efficace de réduire l’hypercalcémie
et doit donc être mis en œuvre le plus tôt possible.

◗ Syndrome de lyse tumorale


Le syndrome de lyse tumorale englobe un groupe de désordres métaboliques
venant compliquer le traitement des gros volumes tumoraux rapidement évolu-
tifs. Habituellement il survient lors du traitement d’un lymphome de Burkitt, d’un
lymphome lymphoblastique avec hyperleucocytose ou d’une leucose myéloïde
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

aiguë ou chronique. La très grande sensibilité de ces tumeurs s’accompagne


d’une lyse cellulaire massive libérant une grande quantité de constituants intra-
cellulaires dans la circulation comme les urates, les phosphates et le potassium.
La quantité de ces produits peut brutalement dépasser les capacités d’excrétion
rénale. La précipitation des urates et des phosphates dans le tube rénal peut
entraîner une insuffisance rénale aiguë et aggraver encore les désordres méta-
boliques avec le risque de troubles du rythme cardiaque et d’encéphalopathie.

◗ Diagnostic
La surveillance biologique régulière des patients traités pour les maladies décri-
tes plus haut est le meilleur moyen d’aide à la prévention et au diagnostic.
Le tableau biologique associe hyperkaliémie, hyperphosphatémie, hypocalcé-
mie, hyperuricémie, augmentation des LDH.

297 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Traitement
Des mesures préventives comme celles décrites ci-dessous doivent être mises en
œuvre 48 heures avant la chimiothérapie et poursuivies pendant trois à cinq jours.
Hydratation IV d’environ 3 000 ml/m2/j aidée de diurétiques pour amorcer
l’excrétion d’urates et de phosphates en y associant de l’Uricozyme IV pour
réduire l’hyperuricémie.
Si le taux d’acide urique sanguin dépasse 7 mg/l, une alcalinisation urinaire est
nécessaire avec administration IV de bicarbonate de sodium. Le pH urinaire doit
être maintenu au-delà de 7 tant que l’hyperuricémie persiste.
Une hémodialyse peut être nécessaire dans les syndromes sévères de lyse
tumorale.

◗ Hyperuricémie
Lors du traitement cytotoxique de maladies tumorales très cellulaires comme les
lymphomes, les leucémies ou les myélomes, la lyse cellulaire libère des purines
qui sont catabolisées en acide urique dont l’hyperabondance brutale peut entraî-
ner une précipitation dans les tubules rénaux et dans l’appareil excréteur, faisant
courir le risque d’insuffisance rénale aiguë lithiasique.

◗ Diagnostic
Les premiers symptômes peuvent être ceux d’une insuffisance rénale aiguë,
l’existence d’une hématurie et de douleurs lombaires suggérant une lithiase
associée. L’uricémie dépasse alors 10 mg/l et se situe le plus souvent à la hau-
teur de 20 mg/l. Une oligurie ou une anurie est observée avec ou sans cristaux
uriques. L’urée et la créatinine sanguines sont élevées.

◗ Traitement
L’allopurinol, l’hydratation et l’alcalinisation des urines sont utilisés comme dans
le syndrome de lyse tumorale. L’hémodialyse est rarement nécessaire mais est
alors très efficace.

◗ Hyponatrémie
L’hyponatrémie chez les patients cancéreux est habituellement due à une sécré-
tion ectopique ou inappropriée d’hormone antidiurétique (ADH). Le plus sou-
vent il s’agit d’une production autonome d’ADH par un cancer pulmonaire
anaplasique à petites cellules. D’autres types de tumeurs, habituellement d’ori-
gine neuro-endocrine, peuvent également produire de l’ADH. L’hyponatrémie
liée à une sécrétion inappropriée d’ADH peut précéder le diagnostic de la
tumeur en cause de plusieurs mois, mais le plus souvent la maladie tumorale
est connue lors de la constatation de l’hyponatrémie.
Le syndrome de Schwartz-Bartter (SSB) peut également survenir secondaire-
ment lors de l’apparition de métastases cérébrales ou après traitement par des
cytotoxiques comme le cyclophosphamide ou la vincristine. Dans ce cas, la
cause est un dysfonctionnement de l’axe hypothalamo-hypophysaire.

◗ Diagnostic
Les symptômes ne sont pas étroitement corrélés avec l’importance de l’hypo-
natrémie et dépendent plutôt de sa rapidité d’apparition. Il est retrouvé le plus
souvent anorexie, nausées, vomissements, asthénie et somnolence.

298 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

La natrémie est alors inférieure à 130 mmol/l, les chiffres inférieurs à


115 mmol/l étant généralement associés à des troubles psychiques et/ou
moteurs. D’autres étiologies possibles à l’hyponatrémie doivent être exclues,
comme l’usage des diurétiques, l’hypocorticisme, l’hypothyroïdie, l’insuffisance
rénale, l’existence d’œdèmes ou l’hémodilution.
La mesure simultanée de l’osmolarité sérique et urinaire, montre une hyper-
concentration urinaire paradoxale et affirme le diagnostic de syndrome de sécré-
tion inappropriée d’ADH (SIADH), puisque l’excrétion sodée urinaire n’est pas
diminuée.

◗ Traitement
Une hyponatrémie légère ou modérée liée à un SSB est traitée par restriction
hydrique (500 ml/j).
Pour les formes sévères, en particulier quand il existe des symptômes neurolo-
giques, l’administration prudente et progressive de solutions salées hypertoni-
ques est nécessaire. Le furosémide permet d’améliorer la natrémie et d’éviter
une surcharge cardiovasculaire.
La chimiothérapie est le moyen le plus durable d’amélioration du SSB en rédui-
sant le volume tumoral. De même, l’irradiation des métastases cérébrales et les
corticoïdes sont capables d’améliorer le trouble métabolique.

◗ Acidose lactique
L’acidose lactique est une complication rare en oncologie. Elle n’est constatée
que lors de très gros volumes tumoraux avec infiltration hépatique massive. Le
plus souvent, il s’agit de lymphomes ou de leucémies très cellulaires ; beaucoup
plus rarement, un cancer bronchique anaplasique ou un phéochromocytome
sont en cause. Le catabolisme hépatique du lactate est perturbé alors que sa
production par les cellules tumorales est augmentée, ce qui conduit au tableau
d’acidose lactique.

◗ Diagnostic
Les symptômes à type de nausées, de vomissements, de dyspnée et de
somnolence n’ont aucune spécificité. Le pH artériel est en dessous de 7,35,
le trou anionique est élargi et le taux sérique de lactate est supérieur à
5 mEq/l.

◗ Traitement
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Perfusion de bicarbonate en urgence.


Administration rapide du traitement antinéoplasique.

◗ Hypoglycémie
L’hypoglycémie sévère directement liée à la présence d’une tumeur est une
situation rare en oncologie. Elle est en revanche bien connue dans le cadre
d’une tumeur pancréatique particulière, l’insulinome. L’hypoglycémie est par
ailleurs classiquement décrite avec les volumineuses tumeurs mésenchymateu-
ses comme les mésothéliomes, les fibrosarcomes. Dans ces derniers cas, l’hypo-
glycémie est probablement liée à la sécrétion tumorale d’un facteur de
croissance à activité insuline-like. Les épisodes hypoglycémiques sont habituel-
lement déclenchés par l’effort physique et peuvent conduire à des dégâts céré-
braux graves.

299 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Diagnostic
Les symptômes neurologiques prédominent, associant irritabilité, stupeur,
confusion, agitation, paralysies motrices et troubles visuels. Une glycémie infé-
rieure à 4 mmol/l ou à 3,5 mmol/l en postprandial permet d’évoquer le dia-
gnostic.
Les patients porteurs d’insulinome présentent une insulinémie élevée malgré
l’hypoglycémie.

◗ Traitement
Administration en urgence d’une injection bolus de dextrose à 50 % suivie
d’une perfusion continue de dextrose à 10 %. Exérèse chirurgicale de la tumeur
ou, à défaut, traitement cytotoxique. Administration prolongée de corticoïdes, de
glucagon, quand les traitements précédents sont inefficaces ou irréalisables.

◗ URGENCES INFECTIEUSES
◗ Fièvre chez le patient neutropénique
Une neutropénie plus ou moins sévère est habituelle chez les patients porteurs
de cancers traités par chimiothérapie myélotoxique. Par ailleurs, une neutropé-
nie peut également survenir quand la moelle osseuse est étouffée par une pro-
lifération métastatique ou hématopoïétique maligne. La susceptibilité du patient
neutropénique aux infections peut être augmentée par une immunodépression
comme celle liée à une splénectomie ou une hypogammaglobulinémie.
Aucun délai ne doit être apporté à l’évaluation et au traitement d’un patient
neutropénique fébrile, dans la mesure où le risque d’évolution fatale est majeur.
Toute fièvre chez ce type de patient doit être considérée comme synonyme
d’infection jusqu’à la preuve du contraire. Les infections au cours d’une neutro-
pénie sont en général dues à des bactéries pathogènes mais dans près de la
moitié des cas aucun site infectieux ou aucun germe ne peut être mis en évi-
dence. Par ailleurs, des infections systémiques à levures peuvent survenir en
particulier quand la neutropénie est prolongée.

◗ Diagnostic
Une température au-delà de 38 °C mérite évaluation précise. Un examen géné-
ral est obligatoire avec attention spéciale aux gencives, au pharynx, à la région
périrectale et aux sites d’accès vasculaire. Les signes infectieux locaux peuvent
être souvent très discrets.
Les examens de laboratoire incluent la culture du sang, des urines et éventuel-
lement d’autres sites en fonction de l’examen clinique. Un cliché thoracique est
recommandé.

◗ Traitement
La mise en route rapide d’une antibiothérapie à large spectre est indispensable,
l’association d’un aminoside et d’une bétalactamine étant habituellement
recommandée. Ce traitement peut varier en fonction de risques infectieux par-
ticuliers ou des données cliniques.
Si une infection à bacille Gram– ou une surinfection sur voie veineuse sont sus-
pectées, la vancomycine, agent antistaphyloccocique, est utile.

300 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

La persistance d’une fièvre chez un patient neutropénique traité par une asso-
ciation antibiothérapique correcte doit faire recourir à la prescription empirique
d’amphotéricine B à visée antifongique.

◗ Infection fongique systémique chez


le patient immunodéprimé
La neutropénie et l’immunosuppression sont des facteurs favorisants du déve-
loppement d’une infection fongique locale agressive ou d’emblée systémique.
Par exemple, chez les patients leucémiques en neutropénie prolongée, des
champignons comme Candida, Aspergillus ou Mucor sp. sont fréquemment
retrouvés. L’administration de corticoïdes au long cours, l’hyperalimentation cen-
trale, les mucites, l’antibiothérapie à large spectre ou la présence de cathéters
veineux profonds sont tous des facteurs d’aggravation du risque d’infections fon-
giques. En revanche, les patients porteurs de lymphomes peuvent présenter une
infection à Cryptococcus sp., sans neutropénie, en raison d’une immunodépres-
sion cellulaire.
Les candidoses invasives entraînent souvent des œsophagites, des entérites ou
des pneumonies, avec risque de dissémination cérébrale, hépatique ou oculaire.
Le syndrome de candidose hépatique associe fièvre, douleur abdominale, élé-
vation des phosphatases alcalines, les lésions hépatiques n’apparaissant
qu’après disparition de la neutropénie. Aspergillus et Mucor sp. entraînent volon-
tiers des infections pulmonaires ou sinusiennes, avec le risque, compte tenu des
propriétés angio-invasives de ces germes, de survenue d’infarctus pulmonaire,
de nécrose aiguë des sinus, du palais ou de l’orbite avec dissémination systé-
mique rapide. En revanche, les infections à Cryptococcus sp. sont typiquement
méningées et entraînent céphalées, somnolence, fièvre et confusion.

◗ Diagnostic
L’identification du champignon par prélèvements multiples (y compris le LCR) et
mise en culture est indispensable. Une fungémie est rarement mise en évidence.
Le test séro-immunologique de détection des antigènes cryptococciques est une
technique sensible et spécifique y compris dans le LCR. Les cryptocoques peu-
vent également être mis en évidence dans le LCR par coloration spéciale.

◗ Traitement
L’administration prolongée d’amphotéricine B est indispensable pour les myco-
ses systémiques, la guérison dépendant en grande partie de l’évolution favora-
ble de la neutropénie.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Le drainage chirurgical des foyers fongiques sinusiens est souvent indispensable.


Une fungémie en relation avec un cathéter oblige à son retrait immédiat.

◗ Infections virales
L’infection à herpes virus survenant chez un patient immunodéprimé est en
règle sévère, prolongée et fréquemment diffuse. Elle est retrouvée générale-
ment comme complication des traitements lourdement immunosuppresseurs
des leucémies ou des lymphomes.
La réactivation de l’herpes simplex provoque l’apparition d’une mucite ulcérante
au niveau de la bouche, de l’oropharynx et de l’œsophage, rendant impossible
l’alimentation et facilitant la survenue de surinfections bactériennes ou fongi-
ques. La dissémination virale, quoique rare, peut conduire à des pneumopathies
interstitielles gravissimes, ainsi qu’à des hépatites ou des encéphalites. L’infec-

301 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

tion primaire par le virus de la varicelle peut entraîner un exanthème sévère et


éventuellement une pneumopathie très grave. La recrudescence d’une infection
varicelleuse latente chez l’adulte entraîne l’apparition d’un zona souvent
hyper-algique, éventuellement suivi d’une dissémination systémique.

◗ Diagnostic
La mucite herpétique peut être difficile à différencier de celle entraînée par la
chimiothérapie, l’irradiation ou une candidose. Il est beaucoup plus facile de
reconnaître les signes cliniques de la varicelle ou du zona.
L’étude cytologique du fluide contenu dans les vésicules montre de nombreu-
ses cellules géantes avec des inclusions intranucléaires. Le virus herpétique peut
être mis en culture à partir du contenu vésiculaire ou des dépôts muqueux.

◗ Prophylaxie
L’administration d’immunoglobulines antivaricelle dans les 72 heures qui sui-
vent une exposition diminue le risque de survenue et la gravité de l’infection
varicelleuse primaire.
La prise orale ou IV d’aciclovir diminue le risque d’infection cutanéo-muqueuse à
herpes simplex chez les patients séropositifs recevant un traitement antileucémique.

◗ Traitement
La varicelle chez l’immunodéprimé doit être traitée rapidement par aciclovir IV
à la dose de 500 mg/m2 tous les huit jours.
Les lésions cutanéo-muqueuses à herpes simplex répondent également au traite-
ment par aciclovir, soit sous forme orale soit IV (250 mg/m2 toutes les huit heures).

◗ Infections parasitaires
Les patients traités par chimiothérapie lourde neutropéniante et immunodépres-
sive ou par corticothérapie prolongée peuvent présenter une infection opportu-
niste parasitaire. Les parasites concernés peuvent être des protozoaires comme
Pneumocystis carinii, Toxoplasma gondii, ou des nématodes comme Strongy-
loides stercoralis. Les cibles essentielles de ces parasites sont les poumons, le
système nerveux central et l’intestin.
La pneumonie à pneumocystes se présente classiquement sous la forme de
fièvre avec toux et dyspnée, associées radiologiquement à des infiltrats diffus
interstitiels de type alvéolaire. La toxoplasmose qui peut être une primo-infection
ou une infection ancienne réactivée, peut entraîner une encéphalite, avec syn-
drome pseudotumoral intracérébral retrouvé à la tomodensitométrie, ou une
méningite, les patients présentant alors des déficits neurologiques et souvent
une hypertension intracrânienne. Strongyloides produit un syndrome infectieux
très sévère lié à la prolifération incontrôlable du parasite dans l’intestin. La forme
larvaire filaire de ce parasite passe à travers la muqueuse intestinale et colonise
les poumons, entre autres. La larve transportant de nombreux éléments de la
flore bactérienne, elle permet le développement de pneumonies, de méningites
ou de septicémies, soit bactériennes soit fongiques, soit les deux.

◗ Diagnostic
Le diagnostic de pneumocystose pulmonaire est obtenu par lavage
broncho-alvéolaire et biopsie transbronchique, parfois même par biopsie chirur-
gicale. Le diagnostic de toxoplasmose est apporté par les tests sérologiques
mais, chez le patient très immunodéprimé, une négativité sérologique ne signifie

302 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

pas forcément absence de l’infection, dont le diagnostic peut être alors obtenu
à la lecture microscopique de prélèvements tissulaires. Strongyloides est mis en
évidence par examen du contenu duodénal, des selles ou de prélèvements
effectués à partir de n’importe lequel des organes atteints.

◗ Traitement
La pneumonie à pneumocystes est traitée par le thriméthoprime (Bactrim, par
exemple) (15-20 mg/kg/j) sur deux semaines. L’iséthionate de pentamidine
(Pentacarinat) est également efficace (4 mg/kg/j) bien que plus toxique.
La toxoplasmose cérébroméningée doit être traitée par la pyriméthamine (Malo-
cide, Fansidar) associée à la sulfadiazine (Adiazine, Flammazine) pendant plu-
sieurs semaines après la fin du syndrome infectieux ce qui peut correspondre
à plusieurs mois de traitement. Strongyloides nécessite un traitement par des
antihelminthiques comme le thiabendazole et des antibiotiques pour les surin-
fections bactériennes associées. Enfin, les traitements immunosuppresseurs doi-
vent être arrêtés ou allégés.

◗ URGENCES DIGESTIVES
◗ Obstruction œsophagienne
Le cancer œsophagien est la principale cause d’obstruction néoplasique de
l’œsophage. Il peut arriver que l’obstruction soit liée à une compression extrin-
sèque comme celle liée à un cancer bronchique à extension médiastinale
majeure ou à un lymphome. Les cancers œsophagiens primitifs entraînent une
obstruction progressive responsable d’une dysphagie croissante et d’un amai-
grissement.

◗ Diagnostic
Le transit œsophagien montre la sténose, l’éventuelle dilatation d’amont et les
irrégularités de la muqueuse. L’endoscopie visualise la tumeur et permet la biop-
sie. Les lésions compressives extrinsèques ne sont mises en évidence correcte-
ment que par l’examen tomodensitométrique.

◗ Traitement
Une compensation nutritionnelle par voie digestive (sonde nasogastrique quand
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

elle est possible ou jéjunostomie quand l’obstruction est totale) est souhaitable,
presque toujours préférable à une hyperalimentation parentérale. Seul le traite-
ment spécifique de la maladie en cause, qu’il soit à visée curative ou palliative,
permettra d’améliorer durablement la symptomatologie.

◗ Occlusion intestinale
Le développement d’une néoplasie intra-abdominale peut conduire à une obs-
truction intestinale éventuellement associée à une perforation. L’occlusion
comme la perforation peut être unique ou multiple, comme souvent dans l’évo-
lution d’un adénocarcinome ovarien, digestif ou mammaire métastatique. Une
obstruction colique isolée est en général due à un cancer colique.
En l’absence de néoplasie intra-abdominale évolutive évidente, les autres causes
d’occlusion doivent être envisagées (bride, hernie) y compris iatrogènes (iléus

303 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

paralytique secondaire aux alcaloïdes de la pervenche ou aux sels de platine,


iléite post-radiothérapique à distance du traitement initial).

◗ Diagnostic
Anorexie, nausées, vomissements, douleurs abdominales, arrêt des matières et
des gaz, hyperpéristaltisme abdominal, défense abdominale diffuse, météo-
risme, conduisent à la réalisation d’un cliché sans préparation de l’abdomen
montrant typiquement des niveaux liquides multiples dans des anses dilatées.

◗ Traitement
Après correction des désordres électrolytiques et mise en place d’une sonde
gastrique d’aspiration, la discussion porte sur l’indication opératoire qui est for-
melle pour les obstructions complètes. Cependant, dans le cas de maladies
intra-abdominales très étendues, la chirurgie est souvent peu efficace y compris
sur le ou les obstacles mécaniques. Le traitement symptomatique palliatif de
l’inconfort peut être préférable.
Dans le cas de séquelles thérapeutiques tardives, iléales ou coliques, l’interven-
tion chirurgicale ne doit être pratiquée qu’en dernier recours après un traitement
médical bien conduit.

◗ Hémorragie digestive
Il est rare qu’une néoplasie par elle-même entraîne une hémorragie digestive
suffisamment importante pour constituer une menace vitale immédiate. Le plus
souvent il s’agit d’une pathologie associée, comme un ulcère peptique, une gas-
trite médicamenteuse, une hémorragie en nappe due à une thrombocytopénie,
des varices œsophagiennes. Les hémorragies basses peuvent être liées à des
diverticules coliques, une angiodysplasie ou une colite hémorragique.

◗ Diagnostic
L’endoscopie constitue le meilleur moyen pour mettre en évidence la source
du saignement, bien qu’elle soit parfois difficile à réaliser lors de saignements
profus.
L’angiographie est très utile pour topographier un saignement colique massif en
particulier chez un patient en situation hémodynamique instable pour lequel
une endoscopie pourrait devenir dangereuse.

◗ Traitement
Le traitement d’urgence comporte un remplissage volumique complété de
transfusions. Une coagulopathie associée doit être corrigée si cela est possible.
Les hémorragies gastroduodénales nécessitent un traitement par antagonistes
des récepteurs H2 (cimétidine, ranitidine) et des antiacides. L’électrocoagulation
ou la photocoagulation laser au cours de l’endoscopie peuvent être réalisées en
cas de haut risque de nouveau saignement.
Le traitement des varices œsophagiennes peut faire appel à la compression par
ballon intra-œsophagien et/ou à la sclérose veineuse per endoscopique. L’injec-
tion spécifique d’angiopressine lors d’une artériographie pour hémorragie intes-
tinale peut être efficace, le plus souvent suivie d’une résection segmentaire
chirurgicale. Pour les cancers rectaux évolués, il est possible de proposer soit
une irradiation concentrée quand elle est possible, soit une électrocoagulation
intraluminale.

304 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

◗ Ascite
L’ascite maligne est une situation clinique fréquente qui peut parfois entraîner
un inconfort majeur pour les patients. Habituellement, l’ascite complique l’évo-
lution d’une néoplasie ovarienne, mammaire ou digestive. Deux mécanismes
peuvent concourir à la formation de l’épanchement péritonéal : blocage du
réseau lymphatique sous-diaphragmatique et/ou exsudation directe par les
implants tumoraux séreux. Les symptômes associent anorexie, nausées, incon-
fort abdominal, dyspnée quand l’épanchement est très volumineux.

◗ Diagnostic
L’examen clinique est très souvent suffisant pour affirmer le diagnostic d’ascite,
confirmée facilement par l’échographie voire la tomodensitométrie qui recher-
che en outre un syndrome tumoral intra-abdominal ou hépatique.
Il est parfois nécessaire d’effectuer une ponction avec examen cytologique du
liquide pour confirmer le caractère néoplasique de l’épanchement.

◗ Traitement
Le meilleur traitement de l’ascite néoplasique est représenté par le traitement de
la néoplasie en cause. La ponction décompressive est souvent indispensable, mais
sa répétition entraîne une déperdition protéique importante. Il peut être utile de
prescrire des spironolactones. Un shunt péritonéo-veineux peut être efficace chez
certains patients sélectionnés en l’absence d’insuffisance cardiaque ou rénale.

◗ URGENCES UROLOGIQUES
◗ Uropathie obstructive
La compression ou l’obstruction progressive des voies urinaires par un syn-
drome tumoral entraîne une insuffisance rénale. L’obstruction urétérale est en
général due à des cancers génito-urinaires (col, corps, vessie, prostate). Une
compression urétrale est le plus souvent liée à un cancer prostatique, parfois au
rare cancer urétral primitif. L’insuffisance rénale obstructive se développe à bas
bruit, avec un minimum de signes cliniques pendant longtemps.

◗ Diagnostic
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

L’hydronéphrose est facilement mise en évidence par l’échographie, le site et


l’origine de l’obstruction par l’examen TDM et/ou par la cystoscopie ou la pyé-
lographie rétrograde.
L’hypertrophie prostatique est retrouvée au TR, l’impossibilité du sondage vésical
suggérant une obstruction urétrale.

◗ Traitement
La néphrostomie percutanée soulage l’hyperpression d’amont, peut permettre
une opacification antérograde et éventuellement la mise en place d’une pro-
thèse endo-urétérale. L’obstruction urétrale infranchissable conduit à une cystos-
tomie suprapubienne. La chirurgie d’exérèse tumorale peut libérer les voies
urinaires, mais dans de nombreux cas, seule une chirurgie de dérivation sera
possible.

305 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Hématurie
Des hématuries graves peuvent compliquer l’évolution d’un cancer de la vessie,
du rein ou plus rarement d’une néoplasie pelvienne envahissant la vessie. Par
ailleurs, l’administration de cyclophosphamide (hautes doses) ou d’ifosfamide
peut entraîner l’apparition d’hématuries graves, en raison de la concentration
urinaire de dérivés toxiques pour la muqueuse urothéliale. Enfin, en dehors de
toute évolution néoplasique, l’irradiation pelvienne en particulier associée à la
curiethérapie peut entraîner une cystite hématurique récidivante survenant plu-
sieurs mois après le traitement, rarement très abondante.

◗ Diagnostic
Les patients présentent des douleurs sus-pubiennes, une pollakiurie ou une
rétention urinaire, l’émission de sang avec caillots. Le saignement peut être suf-
fisamment important pour justifier une compensation sanguine. Il est nécessaire
de rechercher une infection associée.

◗ Traitement
Hydratation vigoureuse par voie veineuse, diluant les urines, couplée à un son-
dage vésical lors d’obstruction du méat vésical par des caillots.
Lors d’une tumeur endovésicale hémorragique, électrocoagulation sous endosco-
pie et résection transurétrale permettent le plus souvent d’obtenir l’hémostase. On
peut également réaliser l’instillation endovésicale d’hémostatiques, emboliser les
vaisseaux vésicaux, où réaliser une irradiation pelvienne concentrée hémostatique.
La cystite hémorragique iatrogène due à la chimiothérapie peut être prévenue
par une hyperhydratation suffisante et l’administration de mesna. Quand elle
survient, il est alors utile de recourir à des instillations endovésicales de formol
et à des lavages vésicaux répétés.
La cystite hémorragique postradique bénéficie d’une hyperhydratation per os, d’élec-
trocoagulations endovésicales et dans les formes graves d’embolisation sélective.

◗ URGENCES RESPIRATOIRES
◗ Épanchement pleural
La plupart des épanchements pleuraux survenant au décours de l’évolution
d’une néoplasie sont dus au développement de cellules tumorales au niveau
des feuillets pleuraux eux-mêmes, beaucoup plus rarement en raison d’un blo-
cage tumoral de la circulation lymphatique thoracique. Les cancers du sein, du
poumon et les lymphomes représentent 75 % des étiologies des pleurésies
malignes. Les épanchements de grande abondance entraînent une gêne respi-
ratoire majeure justifiant un soulagement rapide.

◗ Diagnostic
Les symptômes associent dyspnée, toux peu ou pas productive, oppression tho-
racique plus ou moins douloureuse. À l’examen, on retrouve une diminution du
murmure vésiculaire et une matité.
Les épanchements pleuraux ne sont radiologiquement visibles que quand ils ont
une certaine importance, un cliché en décubitus latéral pouvant confirmer la
liberté de la cavité pleurale.

306 ◗
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URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

La ponction pleurale soulage le patient et permet une analyse cytologique


confirmant le diagnostic de malignité dans trois quarts des cas. Quand la cyto-
logie est négative et que l’épanchement a les caractères d’un exsudat (LDH
> 200, rapport épanchement sang > 0,6 pour les LDH et > 0,5 pour les pro-
téines), une biopsie pleurale sous pleuroscopie est nécessaire.

◗ Traitement
La ponction pleurale évacuatrice soulage immédiatement les patients, mais en
l’absence de traitement efficace de la néoplasie, l’épanchement va se reconsti-
tuer en quelques jours.
La création d’une synéchie pleurale par talquage sous pleuroscopie peut empê-
cher le renouvellement de l’épanchement. Le traitement spécifique de la néo-
plasie en cause reste le meilleur moyen pour tarir l’épanchement.

◗ Obstruction respiratoire haute


Une obstruction néoplasique respiratoire haute peut survenir à n’importe quel
endroit de la région sus-glottique à la carène. L’obstruction peut être endoluminale
ou par compression extrinsèque. Les étiologies les plus fréquentes sont les can-
cers bronchiques, les lymphomes, parfois les cancers thyroïdiens ou ORL. L’obs-
truction peut se compliquer à tout moment d’un syndrome asphyxique grave.

◗ Diagnostic
Les patients présentent une dyspnée sévère, un tirage inspiratoire avec whee-
zing. On retrouve le plus souvent une tachypnée avec un creusement inspira-
toire sus-sternal et sus-claviculaire.
Le cliché radiographique du thorax peut montrer une masse médiastinale supé-
rieure avec déviation et compression de la lumière trachéale. La réalisation d’une
TDM est dans ces circonstances peu appropriée. Le diagnostic peut être apporté
par biopsie transpariétale ou bronchoscopie ventilée, mais dans certains cas l’état
clinique est tel qu’un traitement doit être décidé sans preuve anatomopathologique.

◗ Traitement
L’oxygénothérapie et la corticothérapie sont les deux mesures d’urgence. En cas
d’obstacle laryngé isolé une trachéotomie peut être indispensable.
Le traitement spécifique le plus efficace est l’irradiation sous forme de deux à
trois séances de 3 à 4 Gy chacune, suivies d’un protocole classique dépendant
de l’étiologie.
La désobstruction endobronchique peut être complétée par le laser perbron-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

choscopique, la photothérapie dynamique ou la curiethérapie endobronchique


à haut débit de dose.
La chimiothérapie n’est envisageable que s’il s’agit d’une tumeur très chimio-
sensible comme un lymphome, une tumeur dysembryonnaire ou un carcinome
anaplasique à petites cellules.

◗ URGENCES NEUROLOGIQUES
◗ Hypertension intracrânienne
L’élévation de la pression intracrânienne peut compliquer l’évolution d’une
tumeur endocérébrale primitive ou secondaire. Le plus souvent le syndrome

307 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

expansif est intraparenchymateux bien que les méningites carcinomateuses


puissent s’accompagner également d’hypertension intracrânienne (HTIC).
L’hyperpression menace la perfusion sanguine cérébrale et fait courir le risque
d’engagement d’une partie du parenchyme cérébral soit sous la faux cérébrale
soit dans le trou occipital.
Chez l’adulte, les tumeurs cérébrales sont le plus souvent secondaires à un
mélanome, un cancer du poumon, du sein, du rein ou du tube digestif. Les
tumeurs primitives sont essentiellement des gliomes de malignité variable. Les
métastases méningées sont le plus souvent secondaires aux leucémies et aux
lymphomes mais peuvent se voir dans les cancers du sein ou du poumon.

◗ Diagnostic
Les symptômes d’HTIC associent céphalées, vomissements, troubles visuels,
diplopie, confusion et troubles de la vigilance. Les céphalées sont classiquement
plus marquées le matin au réveil, augmentées par la toux et soulagées par les
vomissements. Les signes d’examen sont : l’œdème papillaire bilatéral (50 %
des cas), une rigidité cervicale postérieure en cas de participation méningée.
Des déficits neurologiques focalisés dépendent de l’implantation tumorale. Un
début d’engagement s’accompagne de paralysies des paires crâniennes, d’une
hypertension systémique et d’une bradycardie.
Un examen TDM ou IRM est nécessaire en urgence, montrant souvent une dila-
tation ventriculaire en cas d’obstacle médian, un œdème périventriculaire ou un
syndrome de masse prenant le contraste avec œdème péri-lésionnel. La ponc-
tion lombaire est contre-indiquée dans ces circonstances en raison du risque
d’engagement.
Le diagnostic de méningite carcinomateuse suppose une preuve cytologique avec
les précautions précédemment décrites. L’IRM avec gadolinium est par ailleurs très
performante pour mettre en évidence des localisations méningées tumorales.

◗ Traitement
Les corticostéroïdes doivent être administrés rapidement pour réduire l’œdème
avec une efficacité quasi constante.
Les patients présentant un engagement doivent être intubés pour permettre une
ventilation assistée et doivent recevoir des anti-œdémateux puissants comme le
mannitol (1 à 2 g/kg toutes les 4 à 6 heures).
En cas de dilatation ventriculaire, la pose chirurgicale d’une valve externe, le plus
souvent ventriculopéritonéale, est le geste le plus efficace à moyen terme.
L’irradiation est réalisée pour les métastases cérébrales multiples, la chirurgie,
quand elle est possible, pour les tumeurs primitives ou les métastases uniques
survenant tardivement après le traitement de la tumeur initiale, par ailleurs
elle-même contrôlée. La chirurgie est en règle suivie d’une irradiation.
La chimiothérapie joue un rôle mineur dans ces circonstances bien que les ménin-
gites carcinomateuses soient traitées avec efficacité par injections intrathécales de
médicaments cytotoxiques (méthotrexate, cytosine arabinoside, par exemple).

◗ Compression médullaire
Il est capital de reconnaître les premiers symptômes d’une compression médul-
laire pour éviter la constitution d’un tableau complet qui en quelques heures
deviendra très partiellement réversible malgré la décompression. Le plus sou-
vent la compression médullaire est due à un syndrome métastatique extradural
(sein, poumon, prostate, lymphome, rein, plasmocytome multiple) soit d’origine
vertébrale soit sans participation osseuse. Les tumeurs primitives de la moelle

308 ◗
18_Chap16 Page 309 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

URGENCES CANCÉROLOGIQUES 16

épinière sont des affections rares. Le siège le plus fréquent est dorsal (70 %)
puis lombaire (20 %) et enfin cervical (10 %).

◗ Diagnostic
Le premier signe est quasi constamment la douleur postérieure avec souvent irra-
diation radiculaire. Ensuite surviennent des paresthésies puis des parésies des
membres en particulier inférieurs. Une raideur vertébrale est habituelle, l’élévation
des membres tendus pouvant déclencher la douleur radiculaire (tableau 16.I). La
symptomatologie déficitaire dépend du siège de la compression.
Les clichés standards de la colonne vertébrale montrent souvent une lyse
osseuse ou une déformation en particulier du mur vertébral postérieur. L’exa-
men IRM est d’une grande sensibilité pour explorer la moelle épinière et situer
le siège de la compression ; à défaut, une myélographie sous TDM sera pra-
tiquée. Lors de ces examens un prélèvement du LCR sera effectué pour exa-
men cytologique.

Tableau 16.I. Signes cliniques lors d’une compression médullaire


Signe/déficit Moelle Cône médullaire Queue de cheval
Force musculaire Déficit symétrique Déficit symétrique Déficit asymétrique
profond variable souvent discret
Réflexes Augmentés ou Rotuliens augmentés, Diminués
tendineux absents achilléens diminués
Réflexe plantaire En extension En extension En flexion
Sensibilité Déficitaire symétrique Déficitaire symétrique Asymétrique
au niveau lésionnel en selle de cheval radiculaire
Sphincters Rétentionnels Incontinents Éventuellement
normaux
Évolutivité Rapide Variable Variable

◗ Traitement
Les corticoïdes doivent être administrés à hautes doses pour réduire l’œdème
compressif.
La laminectomie décompressive est une indication d’urgence formelle quand
une preuve histologique doit être obtenue, ou quand la compression survient
en territoire irradié, ou quand la symptomatologie s’aggrave en cours d’irradia-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tion. Par ailleurs, si le patient est porteur d’une tumeur peu radiosensible ou si
l’histoire clinique immédiate est en faveur d’une aggravation rapide des symp-
tômes, une laminectomie sera également réalisée. Enfin, si les explorations
radiologiques montrent une grande destruction osseuse lytique, la chirurgie
décompressive peut être indiquée, alors premier temps d’une consolidation
orthopédique. Chaque fois la chirurgie sera suivie d’irradiation.
Dans les autres cas, l’irradiation est le traitement indiqué : tumeurs radiosen-
sibles (lymphomes, par exemple), lésions situées sous le cône médullaire,
évolution lente des symptômes, contre-indications médicales à la chirurgie. La
chimiothérapie doit être envisagée en cas de tumeur sensible ne pouvant à
l’évidence pas bénéficier de chirurgie et/ou de radiothérapie. Soixante à 70 %
des patients traités avant la constitution d’un tableau neurologique déficitaire
sont ensuite capables de marcher. Seuls 5 % en sont capables s’ils ont été
traités en situation déficitaire constituée.

309 ◗
18_Chap16 Page 310 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ URGENCES OCULAIRES L’orbite peut être le siège de localisations métastatiques (le plus souvent
sein, mélanome ou poumon) ou lymphomateuses. Dans certains cas, il s’agit
de l’envahissement direct à partir d’une tumeur sinusienne ou nasopharyn-
gée. Les tumeurs orbitaires primitives sont rares chez l’adulte. Dans tous les
cas, le risque est la dégradation rétinienne et nerveuse avec cécité secon-
daire.

◗ Diagnostic
Les symptômes habituels associent diplopie, douleur orbitaire, baisse de l’acuité
visuelle et exophtalmie.
L’examen ophtalmologique retrouve un déplacement oculaire et une ophtalmo-
plégie. L’exploration TDM ou IRM confirme le syndrome tumoral endo-orbitaire
et peut guider une biopsie, nécessaire en cas de doute étiologique.

◗ Traitement
Une irradiation en urgence associée aux corticoïdes est indiquée pour éviter la
cécité et diminuer la douleur. La chimiothérapie n’est envisageable que pour les
lymphomes.
Chaque fois que cela est possible, le cristallin doit être épargné, mais le risque
de cataracte ne doit en aucun cas faire discuter l’indication d’irradiation décom-
pressive.


310 ◗
19_Chap17 Page 311 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Métastases et maladie
métastatique1 17
N. DALY-SCHVEITZER

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
◗ ÉTAPES DE L’EXTENSION METASTATIQUE
◗ DÉTECTION ET DIAGNOSTIC
◗ PRINCIPES DE TRAITEMENT
◗ CONCLUSION

La caractéristique essentielle de l’évolution d’une tumeur maligne est sa capacité


potentielle à être à l’origine d’une dissémination cellulaire à distance du site
initial. Cette éventualité, éminemment variable suivant le type, le siège et le
volume des tumeurs, concerne cependant environ 50 % des patients, soit
d’emblée, soit au cours de la période post-thérapeutique initiale.

◗ ÉPIDÉMIOLOGIE ET ÉTIOLOGIE
Les organes sièges de localisations métastatiques sont essentiellement les os,
les poumons, le cerveau et le foie (tableau 17.I).
Chaque pathologie tumorale présente cependant, en fonction de sa nature histo-
logique et de son siège anatomique, un risque métastatique particulier pour tel ou
tel organe « cible ». Ainsi, les cancers développés à partir de glandes endocrines
(prostate, thyroïde) ou apparentées (sein, rein) présentent un risque élevé de
métastases osseuses. Les cancers digestifs ont naturellement un risque prééminent
de localisations secondaires hépatiques. Les cancers du poumon ou du sein sont
responsables de localisations fréquemment osseuses, cérébrales et hépatiques.
Toutefois, les routes vasculaires sanguines et lymphatiques sont largement inter-
connectées, l’atteinte de l’une n’étant pas exclusive de l’autre. Ainsi, l’extension
ganglionnaire peut être considérée comme un indicateur du risque métastatique
hématogène, le prélèvement chirurgical des aires ganglionnaires de drainage
d’une tumeur primitive ayant parfois pour seul but de situer le risque métasta-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

tique en l’absence de signes évidents de métastases (cancer du sein et évide-


ment axillaire par exemple).

Tableau 17.I. Localisations métastatiques les plus fréquentes en fonction du


site tumoral primitif
Tumeur primitive Localisations métastatiques
les plus fréquentes
Adénocarcinome rénal Poumon, os
Adénocarcinomes digestifs Foie, poumon

1. Item n° 157. Tumeurs du poumon, primitives et secondaires.


Item n° 154. Tumeurs des os, primitives et secondaires. Tumeurs du foie.

311 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Suite du tableau 17.I. ➤


Adénocarcinome prostatique Os
Carcinome anaplasique pulmonaire Cerveau, foie, moelle osseuse, surrénale
Mélanome cutané Foie, cerveau, poumon
Neuroblastome Foie
Adénocarcinome mammaire Os, cerveau, poumon, foie, surrénale
Adénocarcinome thyroïdien différencié Os, poumon

◗ ÉTAPES DE L’EXTENSION METASTATIQUE


La constitution d’une extension métastatique, lymphatique ou sanguine, est un
processus biologique complexe faisant appel à une succession d’étapes, toutes
n’étant pas parfaitement connues.

◗ Invasion
La première étape est constituée par l’invasion tumorale, propriété caractéristi-
que des populations néoplasiques malignes qui sont capables d’infiltrer les bar-
rières naturelles et les parois vasculaires (fig. 17.1), essentiellement grâce à
l’action d’enzymes protéolytiques qu’elles sécrètent elles-mêmes ou dont elles
provoquent la sécrétion par le tissu sain environnant (fig. 17.2).
Ces enzymes favorisant l’invasion tumorale sont activées par des médiateurs
chimiques cellulaires et rentrent souvent en jeu dans les mécanismes bio-
logiques de la coagulation sanguine avec laquelle les mécanismes métasta-
tiques entretiennent des rapports étroits, aussi bien lors de l’invasion
tumorale locale que lors de l’arrêt des cellules tumorales dans les organes
cibles.
L’invasion locale est le fruit de plusieurs autres phénomènes expérimentale-
ment bien connus comme l’augmentation de la pression intratumorale,
l’augmentation de la motilité cellulaire avec perte de la cohésion
intercellulaire.

➤ Fig. 17.1. Extension intravasculaire des cellules tumorales. ➤

INVASION TUMORALE

INVASION

Dissolution de la membrane basale

Dissolution du stroma

INTRAVASASION

Invasion vasculaire sanguine Invasion vasculaire lymphatique


312 ◗
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MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

➤ Fig. 17.2. Enzymes protéolytiques sécrétés par les cellules néoplasiques (exemples). ➤

Agrégation plaquettaire

Plasmine Fibrinoctinolyse
Activateur du
plasminogène Fibrinolyse
Plasminogène
Collagénase Collagénolyse
Cathepsine D
Collagénase
inactive
Glycosidases

Protéinases diverses Protéoglycanolyse

Autres activités

◗ Extension intravasculaire
L’extension cellulaire intravasculaire a pu être expérimentalement quantifiée, voi-
sine de 3 à 4 × 104 cellules par gramme de tumeur par 24 heures. Cette perte
cellulaire est en fait très variable suivant les tumeurs (5 à 50 %), pouvant aller
jusqu’à la diminution de volume des tumeurs primitives.
Le passage intravasculaire des cellules tumorales entraîne une très grande perte
cellulaire, mais seule une très faible proportion est susceptible d’entraîner la for-
mation de métastases. Cette destruction cellulaire est d’origine mécanique mais
surtout immunologique, les caractéristiques d’antigénicité tumorale étant déter-
minantes. Ainsi, si une tumeur est fortement antigénique, les possibilités métas-
tatiques restent faibles, même s’il existe une invasion vasculaire. En revanche,
si une tumeur est faiblement antigénique, ses possibilités métastatiques sont
logiquement importantes.
Dans tous les cas, le processus métastatique présente un rendement très fai-
ble. Ainsi, on a pu évaluer à 107 à 109 par jour le nombre de cellules tumo-
rales présentes dans la veine rénale d’un patient porteur d’un adénocarcinome
rénal ou, expérimentalement, à 106 cellules par jour les cellules tumorales
dans la veine efférente d’un carcinome ovarien de la rate. Ces chiffres sont
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

bien supérieurs à la fréquence réelle des localisations métastatiques, montrant


que le processus a un rendement très faible estimé expérimentalement à
moins de 1 % lors de l’injection IV de cellules tumorales autologues chez les
muridés.

◗ Formation des métastases


La phase décisive de la survenue de métastases est représentée par l’arrêt cel-
lulaire dans la vascularisation d’un organe cible. L’essentiel du phénomène est
résumé par la création d’un amalgame entre les cellules tumorales et les élé-
ments constitutifs de l’hémostase (fibrine, plaquettes) avant la migration tran-
sendothéliale des cellules tumorales vers le parenchyme adjacent (fig. 17.3 et
tableau 17.II).

313 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 17.3. Diffusion métastatique vasculaire. ➤

Tumeur primitive Métastases

Extravasation

Invasion
Circulation cellulaire
Intravasation

Tableau 17.II. Étapes et mécanismes probables de la cascade métastatique


Étapes Mécanismes probables
Initiation tumorale Agression carcinogénétique, activation
oncogénique (H-ras, N-myc), réarrangement
chromosomique
Promotion et progression Instabilité génétique, amplification génique,
action des gènes promoteurs associés
et des hormones
Prolifération incontrôlée Facteurs de croissance autocrines, récepteurs
aux hormones de l’hôte (œstrogènes)
Angiogenèse Multiples facteurs angiogénétiques comprenant
des facteurs de croissance connus
Invasion locale des tissus, Attraction chimique sérique, facteurs autocrines
des vaisseaux sanguins de mobilité, récepteurs de liaison, dégradation
et lymphatiques enzymatique
Circulation cellulaire tumorale, arrêt Agrégation homotypique ou hétérotypique
et extravasation des cellules tumorales
Adhérence à l’endothélium Interaction entre les cellules tumorales
et la fibrine, les plaquettes et les facteurs
de la coagulation, adhésion aux récepteurs
de type RGD
Rétraction de l’endothélium Facteurs plaquettaires, facteurs tumoraux
Adhésion à la membrane basale Récepteurs membranaires cellulaires
à la laminine et à la thrombospondine
Dissolution de la membrane basale Protéases, collagénase type IV, héparanase,
cathepsines
Locomotion Facteurs autocrines de motilité, facteurs
de chimiotactisme
Formation de colonies Récepteurs cellulaires pour les facteurs
dans le site secondaire de croissance du tissu hôte, facteurs
d’angiogenèse
Libération des mécanismes Résistance aux macrophages, aux cellules NK
de défense de l’hôte et résistance et T activées, répression de l’expression
au traitement des antigènes tumoraux, amplification
des gènes de la Multi-Drug Resistance (MDR)


314 ◗
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MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

Expérimentalement, les médicaments anticoagulants sont susceptibles de dimi-


nuer la fréquence de la constitution métastatique pour un nombre constant de
cellules tumorales injectées.
Enfin l’installation et la pénétration des cellules tumorales dans le tissu hôte sont
facilitées par les mouvements cellulaires pseudo-amibiens ou actifs et la création
d’une néovascularisation d’emprunt. Bon nombre de cellules tumorales sont
susceptibles de créer alors leur propre réseau vasculaire par la sécrétion d’un
Tumoral Angiogenesis Factor (TAF).
L’ensemble des phénomènes de formation métastatique pose le problème de
l’existence de mécanismes passifs mécaniques et/ou de mécanismes actifs, les
cellules tumorales « choisissant » de façon sélective l’organe siège de la métas-
tase.
Les conséquences du drainage lymphoveineux anatomique sur la topographie
métastatique sont claires et bien connues (fig. 17.4 et 17.5). Il faut cependant
noter que les shunts lymphoveineux sont fort nombreux expliquant que l’exten-
sion ganglionnaire tumorale, bien qu’initiale, soit souvent un index prédictif de
la dissémination hématogène. Par ailleurs, certaines particularités anatomiques,
comme le réseau veineux prévertébral à basse pression, expliquent des topo-
graphies métastatiques électives, les localisations osseuses vertébrales du can-
cer prostatique, par exemple.

➤ Fig. 17.4. Voies vasculaires anatomiques de la dissémination métastatique. ➤

Voie veineuse
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Voie artérielle
Voie cave

Shunt
lympho-veineux
Voie porte
Voie lymphatique


315 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

➤ Fig. 17.5. Exemples d’extension métastatique principale en fonction du site tumoral primitif. ➤

b


Cancer pulmonaire : Cancer testiculaire : voie Cancer colique : voie


drainage lymphoveineux lymphatique préférentielle (a) veineuse porte
pulmonaire avant diffusion avant passage dans la préférentielle, voie
par la voie artérielle circulation sanguine lymphatique
générale générale (b) mésent érique, passage
dans la circulation
générale

◗ Tropisme métastatique
L’hypothèse d’une sélection biologique dans l’apparition des métastases est
hautement probable, fortement suggérée par de multiples données expérimen-
tales. Ainsi, les cellules de métastases pulmonaires de tumeurs expérimentales,
une fois excisées et réinjectées, augmentent leurs capacités à faire naître des
colonies pulmonaires au fil des excisions et des réinjections. Le tropisme orga-
nique de la dissémination métastatique est différent d’un type tumoral à l’autre
et fait à l’heure actuelle l’objet d’hypothèses :
– dissémination homogène dans tous les organes, mais développement
uniquement dans certains sous l’influence de facteurs de croissance ou
d’hormones, présents dans les organes cibles préférentiels ;
– adhésion préférentielle des cellules tumorales circulantes sur la surface
endothéliale de l’organe cible (suppose des déterminants cellulaires spé-
cifiques de l’endothélium en question) ;
– cellules tumorales sensibles à un chimiotactisme exercé par des substan-
ces solubles diffusant hors de l’organe cible et capable de favoriser l’agré-
gation cellulaire et son embolisation dans cet organe cible.
L’étude des différentes populations cellulaires constitutives d’une tumeur mon-
tre qu’il existe des différences génotypiques plus ou moins marquées qui
feraient que seule une partie de la population tumorale a les capacités de deve-

316 ◗
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MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

nir métastatique. Par ailleurs, l’état de réactivité immunologique de l’hôte


influence fortement les possibilités métastatiques, les tumeurs survenant chez
les patients en état de déficit immunitaire étant en règle plus agressives et plus
rapidement métastatiques (sida, par exemple).
Les différents traitements cancérologiques ont tous été suspectés de faciliter la
dissémination métastatique :
– la chirurgie lors de la manipulation tumorale ;
– la radiothérapie par suppression du tissu lymphoïde ;
– la chimiothérapie par immunosuppression chronique.
Il n’a jamais été apporté la preuve de ces hypothèses y compris pour ce qui est
des techniques de cytoponction diagnostique initiale.

◗ DÉTECTION ET DIAGNOSTIC
La connaissance des voies anatomiques de dissémination et des tropismes par-
ticuliers de chaque type tumoral permet de focaliser l’attention diagnostique sur
des organes cibles privilégiés.
La survenue clinique d’une extension métastatique constitue un élément déter-
minant du pronostic d’une affection néoplasique, synonyme de létalité à terme
dans la plupart des cas. Cependant, leur existence biologique est bien antérieure
à leur diagnostic, puisque, hormis celles qui peuvent être nées d’une récidive
locale de la tumeur primitive, elles existent le jour du diagnostic de la maladie
initiale (fig. 17.6).

➤ Fig. 17.6. Chronologie d’apparition des métastases. ➤

ÉVOLUTION TUMORALE
Volume
tumoral
DIAGNOSTIC
TRAITEMENT
MÉTASTASE RÉCIDIVE

SEUIL CLINIQUE

Tumeur
primitive
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Population clonogénique
Population clonogénique résiduelle
migrante
Temps

Toutefois la recherche systématique de métastases occultes accompagnant une


tumeur apparemment isolée constitue un objectif malheureusement rarement
atteint, compte tenu de l’absence de moyens efficaces pour faire le diagnostic
d’agrégats cellulaires métastatiques qui ne deviendront que secondairement
accessibles aux moyens de détection diagnostique. Seules les maladies
s’accompagnant d’une perturbation biologique spécifique (marqueurs tumo-
raux) peuvent faire l’objet d’une évaluation plus performante, en remarquant
cependant qu’il est alors impossible de topographier le lieu de l’extension

317 ◗
19_Chap17 Page 318 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

métastatique et donc de proposer un traitement autre qu’une thérapeutique


générale.
Ainsi, la connaissance du risque métastatique statistique à partir d’une situation
locale ou locorégionale donnée remplacera le plus souvent la mise en évidence
objective des métastases redoutées. Il existe en revanche de nombreux moyens
de mise en évidence des localisations métastatiques patentes.
Dans tous les cas, l’opiniâtreté de la recherche de localisations métastatiques
doit être mise en regard des possibilités thérapeutiques curatives si le syndrome
métastatique est avéré : seules certaines pathologies relativement rares
(tumeurs testiculaires, lymphomes malins, certaines tumeurs de l’enfant, par
exemple) restent curables en phase de dissémination métastatique.

◗ Métastases pulmonaires
Elles sont parmi les éventualités métastatiques les plus fréquentes, peut-être en
partie parce que les poumons sont d’exploration iconographique facile, mais sur-
tout parce qu’ils constituent un filtre capillaire efficace.
Les clichés pulmonaires standards de face et éventuellement de profil peuvent
faire le diagnostic de localisations métastatiques de l’ordre du centimètre à
condition qu’elles soient suffisamment éloignées des régions médiastino-hilaires
où le seuil de perception augmente.
Les tomographies pulmonaires et surtout la tomodensitométrie thoracique avec
produit de contraste et « fenêtres » parenchymateuses limitent le seuil de per-
ception à moins de 0,5 cm. Cependant, plus le seuil de perception radiologique
diminue, plus le nombre de faux positifs augmente obligeant à une grande pru-
dence d’interprétation. L’exploration radiologique fine systématique des plages
pulmonaires est utile dans l’évaluation initiale de maladies à très haut risque de
localisations pulmonaires secondaires : tumeurs testiculaires, sarcomes des os
ou des parties molles, tumeurs du rein, mélanomes.
La bronchoscopie avec aspiration et biopsies systématiques des éperons bron-
chiques permet souvent d’apporter un diagnostic indirect des localisations asso-
ciées aux nodules ronds vus sur les clichés et souvent trop distaux pour être
directement accessibles lors de l’endoscopie.
Le diagnostic de nature d’un nodule pulmonaire isolé peut bénéficier d’une
cytoponction transbronchique ou surtout transpariétale directe à l’aiguille fine
lors d’une tomodensitométrie. Par ailleurs, la réalisation d’une scintigraphie TEP
est aujourd’hui reconnue comme l’examen le plus performant pour prédire la
nature d’un nodule parenchymateux pulmonaire isolé.

◗ Métastases osseuses
Les séries autopsiques montrent environ 30 % de localisations osseuses répar-
ties entre les vertèbres, 69 %, le pelvis, 41 %, le fémur (tête), 25 %, le crâne,
14 % (fig. 17.7).
L’origine des tumeurs donnant des métastases osseuses est par ordre de fré-
quence décroissante : le sein, 70 %, le poumon, 33 %, le rein, 24 %, le rectum,
13 %, le pancréas, 13 %, l’estomac, 11 %, le côlon, 10 %, l’ovaire 9 %.
Le mécanisme d’apparition des métastases osseuses est complexe, mais il sem-
ble acquis que le développement initial des localisations secondaires se fasse
dans la moelle rouge de l’os qui présente un lacis capillaire très riche propice à
l’arrêt et au développement des cellules néoplasiques. D’autres mécanismes fai-
sant appel à des phénomènes de chimiotactisme parfois hormonodépendants
concourent au développement des métastases et à la destruction osseuse
caractéristique.

318 ◗
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MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

➤ Fig. 17.7. Topographie préférentielle des métastases osseuses. ➤

70 %
40 %
25 %
15 %
< 10 %

La scintigraphie osseuse aux polyphosphates marqués par le technétium 99 m,


constitue la méthode la plus sensible dans la recherche de localisations osseu-
ses métastatiques. Il faut cependant remarquer que l’isotope ne se fixe que sur
les ostéoblastes normaux et pas sur les cellules tumorales métastatiques, seules
les métastases responsables d’une réaction ostéoblastique normale étant capa-
bles de créer une hyperfixation scintigraphique détectable.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Les anomalies scintigraphiques sont en règle générale précessives des anoma-


lies radiologiques (environ six mois). Cependant, de nombreuses pathologiques
osseuses non tumorales sont responsables d’hyperfixations scintigraphiques :
maladies métaboliques, traumatismes, infections et maladies rhumatismales
inflammatoires ou dégénératives bénignes. Ceci entraîne un taux élevé de faux
positifs justifiant un examen initial de référence dans les cancers ostéophiles
(sein, prostate, thyroïde).
Les radiographies osseuses ne sont vraiment utiles que focalisées sur les ano-
malies scintigraphiques précédentes. Si les anomalies radiologiques sont plus
tardives que les hyperfixations scintigraphiques, elles sont cependant plus spé-
cifiques de localisations métastatiques. La confrontation des scintigraphies et des
clichés centrés améliore considérablement la performance diagnostique de cha-
cune des techniques, éventuellement complétées par la TDM montrant des
modifications tumorales endo-osseuses.

319 ◗
19_Chap17 Page 320 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

La biopsie osseuse peut être utile, dirigée sur les anomalies précédentes, réali-
sée soit par méthode transcutanée soit par abord chirurgical. C’est le seul moyen
de trancher entre pathologie tumorale et maladie bénigne, en particulier en cas
d’anomalie osseuse unique.

◗ Métastases hépatiques
Les modifications des tests biologiques hépatiques sont tardives, témoignant de
métastases nombreuses et/ou volumineuses (LDH, phosphatases alcalines, gam-
maglutamyltransférase). L’échographie hépatique constitue l’examen d’imagerie
essentiel. En effet, son innocuité et sa sensibilité en font l’exploration de base, ren-
dant inutile la réalisation d’autres examens si elle est normale (tomodensitométrie).
Le seuil de détection est de l’ordre de 2 à 2,5 cm, les diagnostics différentiels
étant représentés essentiellement par les kystes biliaires, les anomalies vascu-
laires et les foies cirrhotiques macronodulaires. Le doute nécessite parfois la
réalisation d’une ponction cytologique ou d’une ponction biopsique sous écho-
graphie ou sous contrôle laparoscopique. Par ailleurs, le scanner et surtout l’IRM
peuvent aider au diagnostic différentiel.

◗ Métastases cérébrales
La tomodensitométrie cérébrale et plus récemment l’IRM, ont remplacé toutes
les autres explorations neuroradiologiques dans ce diagnostic. Quand les ano-
malies nodulaires constatées sont multiples, il y a peu d’ambiguïté diagnostique.
En cas d’anomalie unique, le diagnostic d’abcès, d’accident vasculaire ou de
tumeur primitive, peut justifier une angiographie avec éventuellement abord
biopsique stéréotaxique ou chirurgical.

◗ Métastases ganglionnaires
L’examen clinique, le cliché pulmonaire, la lymphographie, la tomodensitomé-
trie, l’échographie permettent de mettre en évidence les adénopathies métas-
tatiques superficielles et profondes :
– aires superficielles : examen clinique ;
– ganglions médiastinaux : cliché pulmonaire, tomodensitométrie et, plus
récemment, PET scan ;
– ganglions abdominopelviens : lymphographie, tomodensitométrie, IRM.
La cytoponction, soit directe soit sous contrôle radiologique, permet souvent une
orientation diagnostique. La biopsie ganglionnaire excisionnelle (lymphomes) ou
l’évidement chirurgical (carcinomes) peut être nécessaire pour l’obtention d’un
diagnostic anatomopathologique définitif.
La technique du ganglion dit « sentinelle » permet après un repérage préalable
par colorant et/ou produit radioactif injecté dans le site primitif (sein, mélanome,
ORL) de déterminer le ou les ganglions en assurant le drainage préférentiel et
de n’effectuer l’exérèse diagnostique que de ce groupe ganglionnaire, évitant un
évidemment réglé complet pouvant s’avérer négatif.

◗ Métastases sans site tumoral


primitif retrouvé
Il s’agit d’une situation représentant 3 à 5 % des présentations cancérologiques.
Au niveau ganglionnaire cervical haut et moyen, une histologie épidermoïde est
en faveur d’une néoplasie ORL. À la partie inférieure du cou, la même histologie

320 ◗
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MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

est en faveur d’une origine œsophagienne ou bronchique. En revanche, une


histologie d’adénocarcinome dans une adénopathie cervicale basse doit faire
évoquer plusieurs origines : thyroïde, estomac, côlon, pancréas, plus rarement
poumon ou ovaire.
Une présentation fréquente est l’existence d’un syndrome métastatique pauci-
ou pluriviscéral, siège d’un adénocarcinome dont le primitif ne sera retrouvé
que dans 10 à 15 % des cas. La recherche du site tumoral primitif n’a pas
d’intérêt thérapeutique ou pronostique déterminant. Cependant, compte tenu
de la spécificité de leur traitement, une attention particulière doit être portée
sur le sein, la prostate et la thyroïde. L’étude histologique d’une localisation
métastatique à l’aide de techniques immunohistochimiques peut contribuer à
l’orientation.

◗ Épanchements malins
Les épanchements malins peuvent concerner la plèvre, le péricarde, le péritoine
et doivent être distingués des autres causes d’épanchement : la recherche de
cellules malignes dans le liquide est impérative, les caractéristiques de l’épan-
chement étant en règle celles d’un exsudat parfois hémorragique (protéines
épanchement/protéines sériques > 0,5, LDH dans l’épanchement > 200 UI).
L’existence de fréquents faux négatifs, conduit à réaliser pour la plèvre et le
péritoine, des biopsies de séreuse sous contrôle de la vue (pleuroscopie, lapa-
roscopie).

◗ Compression médullaire métastatique


Il s’agit d’une urgence cancérologique véritable, dans la mesure où les possibi-
lités de récupération fonctionnelle de la moelle épinière comprimée ne sont
réelles que si la compression est levée dans les heures qui suivent. En outre, la
compression médullaire lente (CML) est un des tableaux cliniques qui entraîne
le plus d’erreurs diagnostiques initiales, sources de retard thérapeutique.
Le signe inaugural est en général la douleur rachidienne qui, quand elle est
typiquement radiculaire, doit faire systématiquement envisager une CML en
cours de constitution, en particulier chez un patient porteur d’un cancer connu.
Ultérieurement, le tableau se complétera par l’apparition de troubles moteurs,
d’un dysfonctionnement vésical et/ou rectal, de troubles sensitifs. À l’examen,
les signes objectifs peuvent être discrets, une différence de force motrice entre
les membres supérieurs et inférieurs étant un symptôme capital.
La myélographie, éventuellement couplée à la tomodensitométrie, est l’explora-
tion classique majeure, permettant en outre une manométrie et une analyse
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

cytologique du LCR. L’IRM est un examen très performant permettant l’analyse


de l’ensemble de l’axe médullaire.
La compression peut être liée à une atteinte métastatique vertébrale osseuse
s’étendant au canal médullaire ou à une infiltration tumorale épidurale sans
lésion osseuse (lymphomes par exemple). Quand la CML est inaugurale de la
maladie cancérologique et la résume, seule la chirurgie décompressive permet-
tra le diagnostic de nature.

◗ Métastases cutanées
Elles surviennent le plus souvent au niveau du tronc ou du scalp, généralement
à partir de tumeurs du sein, du poumon, du côlon. Les mélanomes et les lym-
phomes peuvent également donner des localisations secondaires cutanées
multiples. Enfin, les abords chirurgicaux ou les lieux de sortie cutanée des drai-

321 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

nages peuvent également être le siège de greffes métastatiques cutanées. Le


diagnostic est le plus souvent apportée par la cytologie à l’aiguille ou la biopsie
exérèse sous anesthésie locale.

◗ Métastases oculaires
Habituellement révélées par un scotome avec ou sans baisse de l’acuité visuelle,
les métastases oculaires sont généralement rétiniennes ou périrétiniennes cho-
roïdiennes. Les grands pourvoyeurs sont les cancers du sein et du poumon.

◗ Métastases mammaires, utérines


et vaginales
Les lymphomes et les mélanomes peuvent donner des localisations secondaires
au niveau de ces trois organes, pouvant parfois simuler une tumeur primitive.
En revanche, les ovaires sont plus souvent concernés par des greffes métasta-
tiques d’origine colique, gastrique, mammaire ou utérine.

◗ Cas particulier des cancers


thyroïdiens différenciés
Les cancers thyroïdiens différenciés fixent le plus souvent l’iode, l’utilisation de
l’131I constituant alors un test diagnostique de grande valeur dans la recherche
de métastases après thyroïdectomie totale. Ainsi la scintigraphie à l’131I constitue
l’examen diagnostique essentiel à la condition qu’il ne persiste aucun tissu thy-
roïdien dans le cou.
Plus récemment, d’autres examens scintigraphiques ont été introduits, en parti-
culier pour les tumeurs présentant des récepteurs cellulaires à la somatostatine
(tumeurs neuro-endocrines). Il est alors possible de réaliser des explorations
scintigraphiques du corps entier susceptibles de mettre en évidence spécifique-
ment des localisations métastatiques jusque-là occultes et même d’envisager un
traitement par la même voie en utilisant une molécule spécifique porteuse d’131I
qui délivrera une irradiation aux seuls sites fixants.

◗ Utilité des marqueurs tumoraux sériques


dans le diagnostic des métastases
Le dosage dans le sang circulant et la recherche dans les fragments biopsiques de
marqueurs tumoraux peuvent avoir une grande valeur d’orientation quand le syn-
drome métastatique est inaugural de la maladie néoplasique ou quand l’anomalie
est isolée et fait discuter son caractère métastatique dans le suivi post-thérapeutique
d’un cancer traité. Certains marqueurs ont une grande valeur d’orientation diagnos-
tique compte tenu de leur relation étroite avec un type tumoral donné :
– sous-unité β de l’HCG, signe la présence de tissu trophoblastique et donc
l’existence de localisations issues d’une tumeur testiculaire, plus rarement
ovarienne ou cérébrale ;
– thyroglobuline dont l’élévation après thyroïdectomie totale et arrêt de la
substitution signifie la persistance de tissu thyroïdien différencié, éven-
tuellement tumoral dans le cas d’une forme initiale orthoplasique ;
– α-fœtoprotéine dont la présence lors d’un syndrome métastatique est en
faveur soit d’un hépatocarcinome, soit d’une tumeur germinale testicu-
laire, plus rarement d’un cancer gastrique ou colique ;
– PSA, dont l’élévation au-delà de 10 ng/ml est suspecte de correspondre
à un cancer prostatique étendu.

322 ◗
19_Chap17 Page 323 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

D’autres marqueurs ont une valeur d’orientation moins forte, même s’ils procu-
rent une indication utile : CA 15-3 et cancer du sein, ACE et cancers coliques,
mammaires ou pulmonaires, CA 19-9 et cancers pancréatiques, gastriques ou
coliques.
De façon générale, l’utilisation des marqueurs dans le diagnostic d’orientation
d’un syndrome métastatique doit être mise en perspective thérapeutique, les
éventualités diagnostiques débouchant sur un traitement régulièrement perfor-
mant devant être privilégiées : prostate, sein, thyroïde, tumeurs dysembryonnai-
res. Enfin, il est possible de rechercher la présence de marqueurs sécrétés dans
les cellules tumorales directement sur les fragments biopsiques lors de l’analyse
anatomopathologique en utilisant des anticorps monoclonaux spécifiques.

◗ PRINCIPES DE TRAITEMENT
L’existence d’une extension métastatique est le témoin d’une évolution létale à
terme dans l’immense majorité des tumeurs solides de l’adulte. Les exceptions à
cette règle sont représentées pour l’essentiel par les tumeurs dysembryonnaires tes-
ticulaires, les lymphomes malins, les formes différenciées paucimétastatiques (pul-
monaires surtout) d’adénocarcinomes thyroïdiens et certains cancers de l’enfant.
Autant le traitement d’une tumeur primitive en phase de curabilité potentielle
doit obéir à des attitudes thérapeutiques codifiées précises, autant l’approche
thérapeutique d’une maladie métastatique est très fréquemment individualisée.
Par ailleurs, le temps écoulé entre le traitement de la maladie primitive, quand
elle est précessive, et l’apparition du syndrome métastatique est d’une appré-
ciation capitale pour le choix thérapeutique ainsi que le caractère diffus ou limité
voire solitaire de l’extension secondaire.

◗ Prise en charge médicale générale


Un certain nombre de symptômes sont communs à la plupart des syndromes
métastatiques en particulier quand ils sont diffus : syndrome douloureux, syn-
drome cachectique, nausées et vomissements, anémie, infection méritent tous
correction symptomatique avant tout traitement spécifique. L’existence de ces
signes traduit souvent une diffusion et une évolutivité importantes de la maladie
métastatique pouvant influencer l’ambition thérapeutique.
En outre, il existe très fréquemment des troubles psychologiques importants à type
d’anxiété, de dépression et d’insomnie, nécessitant un effort relationnel particulier
aidé de prescriptions symptomatiques si besoin. Un élément majeur est repré-
senté par l’incertitude sur l’avenir perçue par le patient et son entourage. Il est
certainement aussi maladroit d’asséner un pronostic fatal que d’entretenir des
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

perspectives irréalistes. Il faut se souvenir que le patient et sa famille procéderont


par étapes, éventuellement asynchrones, dans leur tentative d’adaptation progres-
sive à l’idée d’une issue fatale. Il sera donc nécessaire de répéter les conversations,
idéalement en présence d’un membre de la famille proche pour éviter les discor-
dances informatives. Cependant, il est nécessaire de rappeler que le dialogue le
plus important est avec le malade lui-même et non pas avec son entourage.

◗ Traitement des localisations spécifiques


◗ Métastases cérébrales
La plupart des métastases cérébrales des tumeurs épithéliales (sein, poumon) sont
multiples, bilatérales et rapidement évolutives. Au-delà du traitement de l’œdème
cérébral fréquent, le traitement spécifique de choix est l’irradiation externe de

323 ◗
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CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

l’ensemble de l’encéphale à des doses de l’ordre de 20 Gy en une semaine à


30 Gy en deux semaines et dix fractions, sous couvert d’un traitement anti-œdé-
mateux. La chimiothérapie par voie générale est peu efficace dans cette situation.
Le pronostic dépend en grande partie de l’importance de la diffusion métastatique
extracérébrale, la durée médiane de survie étant de l’ordre de trois à six mois.
Dans certains cas, le syndrome métastatique se résume à une seule localisation
radiovisible. S’il n’existe pas de syndrome métastatique général majeur et si a
fortiori le délai avec le primotraitement est long (plusieurs années), la chirurgie
ou la radiochirurgie, quand elle est techniquement possible, est le traitement de
choix. L’exèrèse chirurgicale doit être suivie d’une irradiation postopératoire du
site tumoral en évitant l’irradiation cérébrale totale. Dans ces conditions particu-
lières, la survie, largement fonction du type de néoplasie, peut atteindre plu-
sieurs années.

◗ Métastases osseuses
La douleur est le syndrome inaugural habituel et doit être calmée par un traite-
ment antalgique adapté et une irradiation localisée à la zone osseuse lésée déli-
vrant des doses allant de 20 Gy en une semaine à 30 Gy en deux semaines.
Si les os porteurs (fémurs en particulier) sont concernés avec menace fracturaire,
une consolidation prothétique doit être le premier geste suivie d’une irradiation large
de la zone opératoire. La même attitude peut être proposée pour des localisations
vertébrales instables. Dans le cas où il s’agirait de la localisation apparemment uni-
que d’une maladie faiblement évolutive, l’exérèse peut être techniquement à visée
« curative » (vertébrectomie, par exemple), suivie d’irradiation. En cas d’ostéose dif-
fuse, elle ne sera que décompressive et consolidatrice simple.
De même, l’irradiation sera limitée et à doses élevées dans le premier cas,
« anatomique » et à doses moyennes dans le deuxième. Chaque fois que possible
un traitement médical général sera envisagé :
– certainement devant un cancer hormonodépendant : adénocarcinome
de la prostate (castration chirurgicale ou chimique), du sein (anti-œstro-
gènes), de la thyroïde avec pour cette dernière la possibilité particulière
de réaliser une radiothérapie métabolique spécifique dans le cas de for-
mes différenciées ;
– éventuellement dans les autres cas, sous forme d’une chimiothérapie,
largement fonction du reste de l’extension métastatique et de l’état géné-
ral du patient.
Enfin, signalons la possibilité récente d’effectuer une radiothérapie métabolique
osseuse aspécifique par l’administration générale de strontium 89.

◗ Métastases pulmonaires
La chirurgie n’est envisageable que pour des localisations peu nombreuses,
idéalement unique, classiquement unilatérales, d’un cancer d’évolution lente et
par ailleurs localement guéri sans autre extension métastatique.
Dans tous les autres cas, la chimiothérapie est souvent proposée associée éven-
tuellement à l’irradiation à visée antalgique et décompressive. Il est très impor-
tant de souligner que les localisations pleuropulmonaires des lymphomes, des
tumeurs germinales ou du choriocarcinome placentaire sont souvent curables
par chimiothérapie, cette fois selon des protocoles intensifs.

◗ Métastases hépatiques
Seule la localisation métastatique isolée (à la rigueur moins de quatre localisa-
tions, mais dans un seul lobe) d’un adénocarcinome colorectal par ailleurs

324 ◗
19_Chap17 Page 325 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

MÉTASTASES ET MALADIE MÉTASTATIQUE 17

contrôlé, survenant plusieurs années après le primotraitement, constitue une


bonne indication de chirurgie hépatique pour localisations secondaires. Dans
tous les autres cas, seule la chimiothérapie pourra être proposée comme traite-
ment spécifique, dont le type sera fonction de la maladie initiale, administrée
éventuellement par voie intra-artérielle.

◗ CONCLUSION L’apparition d’un syndrome métastatique correspond le plus souvent à une


impossibilité de guérison définitive. Il est cependant important de noter que cer-
taines formes tumorales, malheureusement rares, sont encore curables en
phase de dissémination métastatique. Pour les autres types de cancers, aucune
attitude systématique n’est applicable, mais un certain nombre de grandes
règles sont utiles au patient :
– inutilité de la recherche d’un primitif en cas de métastase inaugurale, si
son diagnostic n’influence pas nettement le choix thérapeutique ;
– inutilité du « bilan » exhaustif de l’ensemble des sites métastatiques pos-
sibles quand ils sont asymptomatiques et sans conséquences sur le trai-
tement immédiat ;
– nécessité de confronter le choix thérapeutique à la symptomatologie
actuelle du patient et à l’espérance de vie raisonnable qu’il présente ;
– privilégier le traitement du symptôme à celui de la maladie quand ils sont
différents ;
– accepter de ne pas prescrire de traitement spécifique même devant une
maladie évolutive quand les effets secondaires de ce traitement sont plus
importants que les symptômes actuels de la maladie ;
– intégrer dans la stratégie relationnelle et thérapeutique la notion d’évolu-
tivité de la maladie, en particulier à travers le délai entre primotraitement
et survenue du syndrome métastatique.

Points clés
• Dans la très grande majorité des situations, l’apparition d’un syndrome métastatique,
risque majeur caractéristique des affections malignes, ne débouche que sur une prise
en charge thérapeutique palliative.
• Seules certaines pathologies (tumeurs testiculaires, certaines tumeurs de l’enfant, cho-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

riocarcinome placentaire, cancers bien différenciés de la thyroïde, lymphomes) restent


potentiellement curables en phase métastatique.
• Le diagnostic précoce d’un syndrome métastatique asymptomatique jusque-là n’a
d’intérêt réel que s’il existe un traitement permettant d’obtenir la curabilité définitive.
• Sauf exceptions, le choix thérapeutique doit obéir aux règles générales de la prise en
charge palliative à savoir un juste équilibre entre les symptômes dus à la maladie
elle-même et ceux secondaires aux traitements choisis.
• Le recours à des traitements non spécifiques, notamment algologiques, doit être aussi
argumenté et suivi que la prescription éventuelle de traitements spécifiques.
• La prise en charge diagnostique et thérapeutique d’un syndrome métastatique ne peut
être correcte qu’à travers l’action d’une équipe pluridisciplinaire.


325 ◗
00_PDD Page VIII Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11
20_Chap18 Page 327 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Recherche clinique,
standards, options
et recommandations
18
N. DALY-SCHVEITZER

◗ ESSAIS CLINIQUES
◗ MÉTA-ANALYSES
◗ PARTICULARITÉS DE LA RECHERCHE CLINIQUE EN CANCÉROLOGIE
◗ STANDARDS, OPTIONS ET RECOMMANDATIONS

Il est aujourd’hui communément admis que les stratégies médicales, diagnosti-


ques et thérapeutiques, doivent reposer autant que faire ce peut sur des élé-
ments établis de preuve, démarche appelée médecine « factuelle » ou
evidence-based medicine.
En cancérologie, cette nécessité est particulièrement importante et ce pour plu-
sieurs raisons :
– il persiste de très nombreuses questions non résolues à ce jour en
cancérologie ;
– les choix diagnostiques et thérapeutiques ont en règle générale un
impact majeur sur la survie et la qualité de vie des patients ;
– la formulation de nouvelles hypothèses pathogéniques et/ou thérapeuti-
ques ne peut être faite qu’à partir de données strictement validées ;
– la marge relativement faible constatée le plus souvent entre un traite-
ment standard et un traitement innovant oblige à des procédures de
comparaison parfaitement contrôlées pour éviter les résultats faussement
positifs comme d’ailleurs faussement négatifs ;
– les cancers étant des maladies chroniques présentant souvent une
période de risque longue, l’établissement des conclusions finales quant
au bien fondé ou non d’une nouvelle approche diagnostique et/ou thé-
rapeutique suppose une observation prolongée.
Seule la recherche clinique, et notamment les essais cliniques qui constituent
son mode opérationnel habituel, est en mesure de répondre aux impératifs pré-
cédents. On peut ajouter que les essais cliniques en cancérologie apportent
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

d’autres éléments positifs :


– ils contribuent habituellement à l’amélioration globale de la pratique
médicale notamment lors d’essais de stratégie thérapeutique qui intè-
grent les différentes disciplines médicales concernées ;
– ils permettent aux patients d’accéder à des prises en charge innovantes ;
– ils s’accompagnent de plus en plus souvent d’une mesure de l’efficience
médico-économique tout en permettant l’essor de l’innovation avec ses
conséquences industrielles et sociales éventuelles.
La recherche clinique en oncologie représente environ 20 % de l’ensemble des
essais cliniques initiés chaque année en France, la promotion de ces démarches
étant assurée une fois sur deux par l’industrie, notamment pharmaceutique.
On peut distinguer deux grands types d’études entrant dans la recherche clini-
que, les essais cliniques d’une part et les méta-analyses d’autre part.

327 ◗
20_Chap18 Page 328 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ ESSAIS CLINIQUES
◗ Les différents types d’essais cliniques
Il est admis de classer les études cliniques en plusieurs phases en fonction de
leur objectif.

◗ Phase I : phase préliminaire d’étude de tolérance


et du métabolisme
Cette phase initiale qui constitue le premier temps d’application chez l’homme
d’un principe innovant, établi comme actif lors des études précliniques, a pour
but essentiel d’évaluer et de mesurer la tolérance et/ou la pharmacocinétique
du médicament, avant de passer aux phases suivantes. En cancérologie, les
essais de phase I sont réalisés chez des patients présentant une maladie évo-
lutive pour laquelle il n’existe plus de proposition thérapeutique connue efficace.

◗ Phase II : études thérapeutiques pilotes


Les essais de phase II servent à mesurer l’efficacité du produit, administré en
fonction des paramètres acquis dans la phase précédente, sur une tumeur ou
un groupe donné de tumeurs.
Ces essais portent sur un petit nombre de patients (quelques dizaines) homo-
gènes vis-à-vis de la cible thérapeutique et des limites de prescription établies
lors de la phase I.

◗ Phase III : essais thérapeutiques


C’est la phase centrale de l’analyse au cours de laquelle l’efficacité du produit,
du principe ou de la stratégie est comparée à celle d’une prise en charge stan-
dard servant de référence et pour laquelle le niveau d’efficacité est connu et
largement validé.
L’allocation est alors randomisée entre le traitement innovant et le traitement
standard, la perspective escomptée de différences souvent faibles d’efficacité
obligeant à des échantillons volumineux, habituellement de plusieurs centaines
de patients parfois de plusieurs milliers.
Cet impératif de volume explique la nécessité évidente d’essais de phase III coo-
pératifs multicentriques se déroulant habituellement sur plusieurs années de
recueil et de suivi.

◗ Phase IV
Les études de phase IV concernent des médicaments ou des procédés déjà
commercialisés, c’est-à-dire après l’obtention de l’AMM (Autorisation de mise
sur le marché). Elles ont pour but d’accumuler, à partir d’un très grand nombre
de patients, des informations complémentaires sur la toxicité (notamment les
effets secondaires rares) et sur l’efficacité à grande échelle. Par ailleurs, elles
donnent des informations sur les pratiques médicales dans les différents lieux
de traitement et mettent parfois en lumière des effets thérapeutiques initiale-
ment insoupçonnés sur d’autres pathologies.

◗ Dispositions légales et réglementaires


La recherche clinique chez l’homme a fait l’objet de la promulgation d’un très
grand nombre de textes, nationaux et internationaux, visant tous à protéger les
personnes auxquelles est proposée une prise en charge expérimentale.

328 ◗
20_Chap18 Page 329 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

RECHERCHE CLINIQUE, STANDARDS, OPTIONS ET RECOMMANDATIONS 11

En France, la plus connue est la loi dite Huriet-Sérusclat votée en 1988, com-
plétée depuis de multiples textes visant, au-delà de la protection des personnes,
à veiller au bien fondé et à la qualité des expérimentations conduites.
Par exemple, tout nouvel essai doit faire l’objet d’un avis favorable préalable
d’un Comité consultatif de protection des personnes participant à la recherche
biomédicale (CCPPRB) constitué spécialement à cet effet.
En outre, la réalisation d’essais cliniques suppose l’existence de structures adap-
tées et de professionnels spécialisés assurant chacun une responsabilité claire-
ment définie :
– la promotion, assurée par une personne morale à l’origine de l’essai (éta-
blissement sanitaire, fédération d’établissements, industiel…) qui
endosse la responsabilité légale de la démarche et est tenu de souscrire
une assurance spécifique ;
– la coordination dans le cas (fréquent) d’essai pluricentrique. Souvent
assurée par le promoteur, la coordination centralise la randomisation le
recueil des données, le contrôle de cohérence, l’analyse des résultats ;
– l’essai est placé sous la responsabilité scientifique d’un investigateur prin-
cipal, la réalisation opérationnelle de l’essai lui-même étant effectuée
dans chaque établissement par un praticien investigateur.

◗ Déroulement de l’essai
Un essai clinique est une démarche complexe faisant de plus en plus souvent
appel aux compétences de professionnels spécialisés venant aider les médecins
prescripteurs tout au long de la conception, de la validation, du déroulement et
de l’exploitation de l’essai.
On distingue généralement trois phases essentielles.

◗ Le protocole
Son élaboration est en général collégiale et débouche sur un document écrit
qui sera soumis à l’avis du CCPPRB qui jugera à la fois la qualité scientifique et
le respect des dispositions légales protégeant les personnes soumises à toute
recherche clinique.
Le protocole comporte l’objectif de l’essai, les critères d’inclusion ou d’exclusion
des patients, les différentes circonstances amenant à modifier la posologie, etc.
Il constitue un guide permanent pour les équipes soignantes chargées du trai-
tement en évaluation.

Objectif de l’essai
Il est évidemment différent selon le type d’essai (phase I, II, III ou IV), appuyé
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

sur une étude bibliographique exhaustive.

Critère majeur d’évaluation


C’est en général l’efficacité du traitement qui doit être évaluée par un ou plu-
sieurs critères de jugement en sachant que l’essai doit répondre idéalement à
une seule question. Les critères de jugement peuvent être quantitatifs et mesu-
rables (volume tumoral, index biologique…) ou qualitatifs subjectifs (sympto-
matologie, qualité de vie) ou événementiels (décès, récidive, métastase,
incident de toxicité aiguë ou chronique…).
La survie est souvent le critère de jugement utilisé, en sachant qu’il existe de
nombreuses façons d’exprimer la survie en cancérologie :
– survie globale lorsque l’événement pris en compte est le décès ;
– survie sans progression.

329 ◗
20_Chap18 Page 330 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

La réponse tumorale, exprimée conventionnellement sous les termes de réponse


complète, partielle, mineure, stabilisation ou progression, est de constat rapide
mais d’évaluation hétérogène et de signification pronostique non univoque.

Choix des patients


Les patients susceptibles d’être inclus dans l’essai clinique dépendent de la
pathologie concernée qui influence les critères d’inclusion et d’exclusion dont la
définition précise permet d’homogénéiser les groupes de patients soumis à
l’essai.

Modalités d’administration du traitement


Elles doivent être très clairement précisées ainsi que les types et les limites des
traitements associés. Par ailleurs, certaines modulations posologiques doivent
être explicitées en fonction de critères objectifs d’intolérance ou de toxicité.

Nombre de patients
Les effectifs de patients à inclure dans l’essai doivent être précisés a priori ainsi
que la méthodologie statistique prévue pour l’exploitation des résultats.

Allocation du traitement
Elle peut être connue du médecin et du patient (essai « ouvert ») du seul méde-
cin (simple insu), ni de l’un ni de l’autre (double insu ou double aveugle). La
détermination de l’allocation est en général réalisée par tirage au sort ou rando-
misation. En cancérologie, les effets secondaires habituels des traitements ren-
dent quasi systématique la réalisation d’essais ouverts.

◗ La mise en route ou activation et le suivi


ou monitoring de l’essai
Il s’agit de la phase opérationnelle active d’inclusion des patients et de recueil
des données.
Les inclusions, consentements éclairés, observations et informations recueillis
sont tous rassemblés dans un document prédéfini comportant habituellement :
– l’identification de l’investigateur ;
– l’identification anonymisée du patient permettant cependant de retrouver
le dossier de soins ;
– la possibilité d’une gestion informatisée des informations et des flux
d’inclusion.

L’analyse des résultats


L’interprétation des résultats des essais thérapeutiques doit obéir à une méthodo-
logie rigoureuse afin que la réponse à la question posée soit suffisamment fiable
et pertinente pour pouvoir être prise en compte par l’ensemble de la collectivité
médico-scientifique et proposée à l’ensemble des patients concernés.
La preuve d’un bénéfice suffisant et pertinent, objectif caractéristique des essais
dits pragmatiques, de loin les plus fréquents en cancérologie, suppose une ana-
lyse critique des résultats obtenus portant sur plusieurs aspects distincts
comme :
– la validité interne confirmant ou non un résultat fiable, réel et non biaisé ;
– la validité externe montrant que le résultat est concordant avec l’état des
connaissances sur le thème ;

330 ◗
20_Chap18 Page 331 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

RECHERCHE CLINIQUE, STANDARDS, OPTIONS ET RECOMMANDATIONS 11

– la pertinence clinique, c’est-à-dire l’ampleur du bénéfice obtenu pour les


patients ainsi que la possibilité d’obtenir le même bénéfice ou un béné-
fice du même ordre pour les patients présentant la même situation
pathologique mais hors de l’essai. En d’autres termes : « La généralisation
du protocole démontré le plus performant par l’essai en cause est-elle
possible ? » ou : « Est-ce que les conditions d’inclusion ont fait qu’il ne
s’agit en fait que d’une sous-population minoritaire et marginale pour
laquelle un bénéfice a été démontré ? ».
Au terme de cette succession d’étapes de validation, les résultats de l’essai sont
susceptibles d’être publiés et pris en compte dans les protocoles de soins quo-
tidiens à la condition cependant que d’autres études similaires viennent confir-
mer ces premiers résultats. Ils alimentent ainsi les données validées disponibles
pour la discussion pluridisciplinaire des stratégies de prise en charge lors de la
tenue des UCPO.

◗ MÉTA-ANALYSESLes résultats d’un essai clinique unique, fondés le plus souvent sur une évalua-
tion statistique, n’élimine pas complètement l’éventualité d’une différence liée
au hasard, notamment quand l’écart d’efficacité est faible ce qui est très souvent
le cas en cancérologie.
Il est donc acquis que les résultats d’un premier essai méritent confirmation par
ceux d’un autre avant d’être considérés comme établis. Ces essais fondamentaux,
appelés aussi essais « pivots », sont indispensables à la suite du développement et
notamment à l’obtention d’une AMM pour un nouveau médicament ou dispositif.
Dans les faits, il existe le plus souvent plusieurs essais de problématique iden-
tique ou voisine dont les résultats peuvent être divergents voire contradictoires.
La technique de la méta-analyse est alors utilisée pour mettre éventuellement
en évidence l’efficacité du traitement en augmentant la puissance statistique de
l’analyse en regroupant l’ensemble des effectifs concernés par les essais du
même type mais dont, par exemple, aucun n’a donné de différence statistique-
ment significative.
Par ailleurs, en s’adressant à un grand effectif de patients, la méta-analyse aug-
mente l’hétérogénéité de la population concernée et se rapproche ainsi des
conditions d’utilisation en pratique quotidienne hors essai clinique contrôlé.
L’importance des effectifs cumulés, permet des analyses par sous-groupes
numériquement trop étroits pour être étudiés valablement au sein de chaque
essai pris isolément. Il est cependant nécessaire que les résultats établis à partir
des sous-groupes de la méta-analyse se retrouvent bien dans les mêmes
sous-groupes des essais constitutifs.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Enfin, les résultats d’une méta-analyse peuvent être très utiles en répondant à
une question non posée initialement ou en aidant à la conception de nouveaux
essais débarrassés des biais statistiques éventuellement constatés en regrou-
pant les essais antérieurs.

◗ PARTICULARITÉS
EN CANCÉROLOGIE
DE LA RECHERCHE CLINIQUE

La plupart des essais cliniques menés en cancérologie sont des essais de stra-
tégie avec ou sans introduction d’un nouveau médicament pour lequel l’essen-
tiel de la méthodologie des essais cliniques a été mise au point. En effet,

331 ◗
20_Chap18 Page 332 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

beaucoup d’essais cancérologiques sont multidisciplinaires intégrant notamment


la chirurgie et la radiothérapie dont les actes s’adaptent mal aux procédures
décrites plus haut.
Des organismes fédérateurs, nationaux, européens ou nord-américains jouent
un rôle important dans la promotion et le financement de la recherche clinique
en cancérologie, notamment pour ce qui est des essais concernant les stratégies
plus que les nouvelles molécules médicamenteuses.
En effet, l’obligation de transparence et d’indépendance vis-à-vis du financement
de la recherche clinique est un élément très important pour éviter toute éven-
tuelle interférence entre les résultats obtenus et les intérêts commerciaux natu-
rels de l’industrie.
Il est ainsi nécessaire que les structures de soins cancérologiques soient dotées
d’une organisation et de moyens internes leur permettant de mener à bien des
démarches indépendantes de recherche clinique, le plus souvent au sein de
groupes coopérateurs médico-scientifiques multi-institutionnels.
Enfin, les résultats des essais cliniques ont vocation à être rendu publics, acces-
sibles à l’ensemble des professionnels de santé mais aussi aux usagers.

◗ STANDARDS, OPTIONS ET RECOMMANDATIONS


La nécessité de disposer en pratique quotidienne de données éprouvées pou-
vant servir de base à la discussion pluridisciplinaire préalable à toute proposition
thérapeutique a conduit la Fédération nationale des Centres de lutte contre le
cancer à engager un travail d’analyse critique de la littérature internationale can-
cérologique et notamment des résultats des essais cliniques publiés. Ce travail
a pour but de hiérarchiser les niveaux de preuve concernant aussi bien les pro-
cédures diagnostiques que thérapeutiques afin de classer les différentes attitu-
des possibles en standard, option ou simple recommandation.
Le résultat de ce travail important, et continuellement remis à jour, est connu
sous le nom de SOR et permet de faire bénéficier l’ensemble de la commu-
nauté médicale d’une base incontestable pour l’établissement de protocoles de
prise en charge quotidienne notamment dans le cadre des réseaux de soins
cancérologiques.
L’ensemble de la démarche contribue à homogénéiser la qualité et la perti-
nence des prises en charge des patients porteurs de cancer ainsi qu’à améliorer
le nombre de patients susceptibles de participer à une recherche clinique coo-
pérative.


332 ◗
21_Chap19 Page 333 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Prise en charge
et accompagnement
d’un malade cancéreux,
19
résultats et pronostic1
N. DALY-SCHVEITZER

◗ LES DIFFÉRENTES EXPRESSIONS POSSIBLES DES RÉSULTATS EN CANCÉROLOGIE


◗ ÉCHECS TUMORAUX ET TRAITEMENTS DE DEUXIÈME INTENTION
◗ PRINCIPES GÉNÉRAUX DU SUIVI POST-THÉRAPEUTIQUE
◗ CONCLUSION

Comme pour l’ensemble des maladies chroniques, les cancers posent le pro-
blème majeur de la réalité et de l’appréciation de leur guérison. Aujourd’hui plus
d’un cancer sur deux est guéri après traitement, l’affirmation de cette guérison
ne pouvant être apportée immédiatement après le traitement, à la grande dif-
férence des maladies dites « aiguës ».
Cette difficulté, sur laquelle nous reviendrons, fait de la façon dont sont exprimés
les résultats thérapeutiques en cancérologie un point fondamental.

◗ LES DIFFÉRENTES EXPRESSIONS POSSIBLES


DES RÉSULTATS EN CANCÉROLOGIE
Le manque d’uniformité dans l’expression des résultats en cancérologie peut
être à l’origine d’interprétations discordantes ou de fausses interprétations. Quel-
ques points de repère sont indispensables :
– le point de départ chronologique pour l’expression de la survie doit tou-
jours être le même. En règle, on choisit soit la date du diagnostic anato-
mopathologique, soit la date du premier jour du traitement souvent très
proche de la précédente ;
– la survie à un délai donné peut être exprimée sur l’ensemble du groupe,
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

où uniquement sur le groupe de patients ne présentant pas de maladie


évolutive à ce délai, ce qui conduit bien entendu à un chiffre inférieur au
précédent ;
– l’expression de la survie de l’ensemble des patients y compris ceux per-
dus de vue est dite brute ou absolue. Si le calcul ne porte que sur les
patients suivis et/ou exclut les patients décédés d’autres causes que can-
cérologiques, la survie est dite alors corrigée.
Ceci conduit à l’expression de plusieurs types de taux de survie :
– survie observée : dans ce cas, le calcul porte sur l’ensemble des patients,
ceux qui ont été perdus de vue étant décomptés selon une formulation

1. Item n° 142. Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de la maladie.
Traitements symptomatiques. Modalités de surveillance. Problèmes psychologiques, éthiques et sociaux.

333 ◗
21_Chap19 Page 334 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

mathématique permettant de prendre en compte leur concours à la sur-


vie résultante même si la durée de leur observation est inférieure à celle
du reste du groupe ;
– survie corrigée : exprime la survie du groupe de patients résultant après
exclusion partielle ou totale de ceux décédés d’autres causes que
cancérologiques ;
– survie relative, observée ou corrigée : les taux de survie sont rapportés à
l’évolution prévisible de la mortalité de la population générale de même
sexe et de même âge moyen. Cette valeur exprime alors la perte de
chances de survie liée exclusivement à la survenue de la pathologie
tumorale ;
– survie actuarielle : consiste à prendre en compte la survie des patients
dont le recul est encore inférieur à la médiane du temps de suivi du reste
du groupe. Ceci permet l’expression plus précoce de résultats à la
condition expresse que les effectifs restants à chaque point de calcul
soient au moins supérieurs à dix, pour éviter des taux artificiels avec à
l’intervalle suivant une chute très brutale.
En mélangeant l’ensemble des données précédentes, on peut obtenir une
grande variété d’expression dans les résultats thérapeutiques. Le plus souvent,
ils sont cependant présentés sous la forme de taux de survie brute, de survie
brute corrigée des causes intercurrentes de décès ou de survie actuarielle cor-
rigée.

◗ Notion de guérison
L’objectif de tout traitement cancérologique est d’obtenir la guérison du patient,
c’est-à-dire l’absence complète de fait nouveau en relation avec la maladie ini-
tiale. Cette notion est donc une donnée à la fois négative et rétrospective :
– négative, car elle repose sur la non-constatation d’une évolution locale,
régionale et/ou générale ;
– rétrospective, car sa valeur pronostique est d’autant plus forte que le
temps écoulé depuis le traitement initial est long.
Ainsi, si le diagnostic de récidive ou de métastase procède d’une démarche de
diagnostic positif, l’état de guérison ne peut être qu’une situation individuelle
relative étayée par la connaissance statistique du pronostic global d’une affection
donnée, par l’absence d’éléments objectifs en faveur d’un fait nouveau tumoral
et par l’ampleur du délai post-thérapeutique. On voit par là que si la guérison
des patients traités pour cancers est une réalité d’évidence, l’affirmation de cette
guérison pour un patient donné ne peut être que relative et progressive, obli-
geant à une circonspection prudente dans la relation individuelle.
La relation au temps est une notion fondamentale de la cancérologie et en par-
ticulier lors du suivi d’un patient traité. En effet, la connaissance de la période
de risque, c’est-à-dire du laps de temps pendant lequel le risque de fait nouveau
tumoral reste réel, est indispensable à la bonne organisation du rythme et du
contenu de ce suivi.

◗ Période de risque
Après traitement et obtention d’une rémission complète, c’est-à-dire la dispari-
tion de tout signe perceptible de maladie tumorale qu’il soit clinique, biologique
ou iconographique, l’éventualité de la survenue d’un fait nouveau tumoral est
caractérisée par deux éléments :
– sa fréquence, largement fonction de la nature et du stade initial de la
maladie ;

334 ◗
21_Chap19 Page 335 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRISE EN CHARGE ET ACCOMPAGNEMENT D’UN MALADE CANCÉREUX, RÉSULTATS ET PRONOSTIC 19

– son délai d’apparition dont la répartition statistique définit la période de


risque.
L’étendue de la période de risque dépend fondamentalement de deux facteurs,
l’évolutivité spontanée de la maladie initiale et son stade d’extension lors du
diagnostic et du traitement (tableau 19.I).

Tableau 19.I. Influence de l’évolutivité tumorale et du stade initial sur la lon-


gueur de la période de risque
Évolutivité tumorale Évolutivité tumorale
importante faible
Stade tumoral Période de risque courte Période de risque très longue
de début
Stade tumoral Période de risque très courte Période de risque longue
évolué

◗ Influence de l’évolutivité tumorale


En règle, plus une maladie est rapidement évolutive, plus sa période de
risque est courte, c’est-à-dire que les éventuels échecs après traitement se
révéleront majoritairement au cours d’une période de temps brève. C’est
ainsi que la plupart des maladies tumorales de l’enfant, par définition rapi-
dement évolutives, ont des périodes de risque courtes, permettant généra-
lement d’étayer solidement la guérison au bout de quelques années
post-thérapeutiques sans faits nouveaux tumoraux. À l’inverse, beaucoup de
pathologies tumorales de l’adulte sont spontanément de constitution et
d’évolution lentes ; de ce fait, la période de risque qu’elles ouvrent après
leur traitement est souvent longue pouvant dans certains cas être particuliè-
rement importante. Ainsi, l’exemple des cancers prostatiques dont la réalité
de guérison nécessite des délais post-thérapeutiques régulièrement supé-
rieurs à la dizaine d’années.

◗ Influence du volume tumoral initial


Le deuxième facteur déterminant de l’étendue de la période de risque est repré-
senté par le volume tumoral ou le stade d’extension lors du diagnostic initial. En
effet, il est logique de penser que plus le volume tumoral initial est important,
plus le volume d’un éventuel résidu laissé par le traitement risque d’être
conséquent et donc plus court sera le temps nécessaire pour que ces éléments
tumoraux résiduels redonnent naissance à une tumeur de nouveau perceptible.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

À l’inverse, une maladie initiale de petit volume ne laissera éventuellement


après traitement que très peu d’éléments cellulaires tumoraux viables, rendant
de ce fait le délai nécessaire à la reconstitution d’une tumeur perceptible
d’autant plus long.
En d’autres termes, à évolutivité spontanée égale, la période de risque suivant
le traitement est d’autant plus longue que le volume tumoral initial était peu
important et, inversement, une tumeur initiale volumineuse présente une
période de risque de récidive plus courte que la précédente.
En synthèse, pour un type tumoral donné, les petits stades présentent un ris-
que total d’échecs faible mais susceptible de se révéler sur une période de
temps longue ; à l’inverse, les stades initiaux évolués qui comportent un risque
important de récidives de tous types, verront ces faits nouveaux tumoraux
s’exprimer dans un délai post-thérapeutique plus court que pour les stades de
début.

335 ◗
21_Chap19 Page 336 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗ Influence pronostique des faits nouveaux


tumoraux
De façon générale, les faits nouveaux survenant après le traitement d’une néo-
plasie initiale sont de très mauvais pronostic. Il en est ainsi de toutes les métas-
tases des tumeurs de l’adulte, d’une grande partie des récidives, même locales.
Seules certaines maladies tumorales offrent des chances réelles de guérison
définitive après un nouveau traitement pour récidive ou métastases.

◗ ÉCHECS TUMORAUX ET TRAITEMENTS DE DEUXIÈME


INTENTION

◗ Échecs au niveau du site primitif (T)


Les échecs locaux constituent toujours une cause importante de non-guérison
des patients porteurs de cancers. Cette éventualité est essentiellement le fait
des tumeurs localement avancées classées T3 ou plus, ou de tumeurs plus peti-
tes ayant fait l’objet d’un traitement initial inadapté. Il s’agit parfois du seul mode
d’échec tumoral comme, par exemple, pour les tumeurs primitives du SNC ou
les épithéliomas cutanés en particulier basocellulaires.
La survenue d’un échec local permet cependant, dans certains cas, un nouveau
traitement local à visée curative. Toutefois, la survenue d’une récidive est un
facteur indéniable de risque métastatique accru par rapport à celui existant après
une guérison locale obtenue d’emblée.

◗ Échecs ganglionnaires (N)


La plupart des échecs ganglionnaires surviennent dans les sites de drainage lym-
phatique essentiels de la tumeur primitive : les zones le plus souvent concer-
nées sont cervicales, axillaires, inguinales, abdominopelviennes et médiastinales.
Ce risque doit être pris en compte lors du traitement initial même en l’absence
de toute adénopathie métastatique cliniquement ou radiologiquement décela-
ble. Pour ce faire, il est possible de proposer une chirurgie d’évidement gan-
glionnaire ou surtout une irradiation externe de principe des aires ganglionnaires
cliniquement normales mais suspectes d’être microscopiquement envahies.

◗ Échecs métastatiques (M)


La survenue d’une extension métastatique constitue la cause majeure d’échec
des cancers et en particulier des tumeurs les plus fréquentes comme les can-
cers du sein ou du poumon. Les tumeurs indifférenciées ou anaplasiques sont
particulièrement métastatiques, ainsi que les mélanomes malins, les sarcomes
de l’os ou des parties molles, les choriocarcinomes et les cancers ovariens. Deux
notions sont importantes :
– les métastases arrivent au seuil de détection clinique à partir de localisa-
tions métastatiques, présentes au jour du diagnostic, mais alors
indétectables ;
– même si, lors d’une extension métastatique, le nombre d’organes sus-
ceptibles d’être concernés peut être important, la connaissance du site
le plus souvent atteint peut conditionner une stratégie thérapeutique pré-
ventive de principe.

336 ◗
21_Chap19 Page 337 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRISE EN CHARGE ET ACCOMPAGNEMENT D’UN MALADE CANCÉREUX, RÉSULTATS ET PRONOSTIC 19

La guérison correspond au franchissement de l’axe des abscisses par la courbe


en trait plein simulant l’évolution du volume tumoral Fig 17.6 (p. 317). Cette
situation biologique est cliniquement imperceptible et de ce fait ne peut être
confirmée qu’après une période post-thérapeutique suffisante au cours de
laquelle aucun fait tumoral n’aura été constaté.

◗ Combinaisons T, N et M
La plupart des attitudes thérapeutiques prennent en compte chaque fois que
cela est possible les trois types de risque d’échec précédents. Ainsi, si la chirur-
gie et la radiothérapie s’adressent essentiellement à la tumeur (T) et aux aires
ganglionnaires (N), la chimiothérapie par voie générale est essentiellement diri-
gée contre le risque (M) tout en participant au contrôle du T et du N dans cer-
taines indications. Par ailleurs, après traitement général, la chirurgie et/ou la
radiothérapie peuvent conclure localement le traitement d’une maladie locale-
ment avancée voire métastatique mais chimiosensible.

◗ PRINCIPES GÉNÉRAUX DU SUIVI POST-THÉRAPEUTIQUE


Le suivi des patients traités pour cancer est une évidence médicale pour beau-
coup et en particulier pour les patients eux-mêmes. Cependant, le contenu pré-
cis et les modalités pratiques de ce suivi méritent d’être examinés à la lumière
de leurs objectifs réels et du bénéfice que peuvent effectivement en retirer les
patients concernés.

◗ Objectifs généraux
Si le but premier du suivi post-thérapeutique est médical, essentiellement
orienté vers la surveillance de la maladie néoplasique traitée, cet objectif est loin
de résumer les diverses facettes de la période post-thérapeutique. Le contenu
du suivi post-thérapeutique d’un patient traité pour cancer doit en effet s’inscrire
dans une démarche non exclusivement médicale et répondre à plusieurs
nécessités :
– suivi médical orienté vers l’observation au fil du temps de la maladie
traitée ;
– suivi médico-social prenant en compte la réalité de la réinsertion et de
l’éventuelle réhabilitation de l’individu ;
– suivi médico-scientifique, visant à valoriser les informations diagnostiques
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

et thérapeutiques contenues dans l’observation d’un patient traité pour


cancer afin d’en faire bénéficier les autres patients ;
– suivi médico-économique, tendant à évaluer le bien-fondé de l’affecta-
tion des moyens nécessaires à la prise en charge médicale d’un individu
au sein d’une masse globale de ressources déterminée par la société.
Aucun de ces grands axes n’est exclusif d’un autre, bien au contraire, la qualité
du suivi d’un patient donné étant souvent liée à la prise en compte globale de
ces différents aspects.

◗ Suivi médical
Les données précédentes ont permis de préciser l’histoire naturelle des faits
nouveaux tumoraux qu’il s’agisse soit de récidives locales ou locorégionales soit

337 ◗
21_Chap19 Page 338 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

de métastases. Le suivi médical a parmi plusieurs objectifs celui de faire le dia-


gnostic d’un éventuel fait nouveau tumoral.

◗ Métastases
Il existe peu de maladies néoplasiques curables en phase métastatique. On peut
citer pour l’essentiel :
– les tumeurs germinales testiculaires ou ovariennes, qu’il s’agisse de dys-
germinomes ou de tumeurs dysembryonnaires ;
– le choriocarcinome placentaire ;
– certaines tumeurs de l’enfant comme le néphroblastome, les tumeurs
germinales ;
– les lymphomes malins, pour lesquels le concept métastatique est
particulier ;
– les formes paucimétastatiques, essentiellement ganglionnaires ou pulmo-
naires, de cancers thyroïdiens bien différenciés.
On voit qu’il s’agit de tumeurs relativement rares et, en toute hypothèse, le plus
souvent de nature non épithéliale.
Ce constat pronostique pose alors le problème de l’utilité du suivi orienté prin-
cipalement vers le diagnostic éventuellement précoce d’une situation métasta-
tique peu ou pas curable, en dehors des exceptions précédentes. En effet deux
attitudes s’opposent alors :
– l’attente de la survenue éventuelle d’un symptôme dont l’exploration
débouche sur le diagnostic de métastase de la maladie initiale ;
– la réalisation d’examens complémentaires divers (marqueurs tumoraux
sériques, examens iconographiques, par exemple) dont la pratique en
situation asymptomatique vise à anticiper le diagnostic métastatique et
donc de proposer un traitement le plus tôt possible.
S’il n’est pas possible d’apporter la démonstration définitive de la supériorité de
telle ou telle attitude, on peut cependant remarquer que :
– la plupart des traitements opposables à une maladie métastatique
asymptomatique (chimiothérapie, hormonothérapie) comportent le ris-
que de l’apparition anticipée d’une résistance cellulaire pouvant réduire
l’efficacité thérapeutique en phase de nécessité symptomatique ;
– les traitements spécifiques, en particulier chimiothérapiques, entraînent
des effets secondaires qui peuvent alors résumer les plaintes cliniques
chez un patient initialement asymptomatique ;
– le bénéfice entraîné par un traitement spécifique actif prescrit en phase
asymptomatique ne peut alors être apprécié que sur des arguments
paracliniques, difficiles à maîtriser par le patient lui-même ce qui fragilise
souvent son adhésion au programme thérapeutique ;
– la décision de traitement oblige à l’annonce diagnostique préalable, ce
qui en l’occurrence constitue pour beaucoup de patients la perspective
d’une issue fatale ; l’inconfort psychologique majeur qui en résulte doit
être mis en balance avec le bénéfice thérapeutique réel apporté par le
traitement.
Il faut cependant ajouter qu’il est probable qu’un traitement médicamenteux
spécifique prescrit lors d’une maladie métastatique minimale a plus de chances
d’être efficace que lors d’une maladie avérée symptomatique, ce que tendent
à démontrer les résultats des traitements dits « adjuvants » lors de la phase ini-
tiale de traitement. Encore faut-il préciser que le bénéfice de tels traitements
n’est démontré que dans certaines situations pathologiques précises de cancers
mammaires ou de cancers colorectaux.

338 ◗
21_Chap19 Page 339 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRISE EN CHARGE ET ACCOMPAGNEMENT D’UN MALADE CANCÉREUX, RÉSULTATS ET PRONOSTIC 19

Au total, la recherche systématique d’une extension métastatique infraclinique


pour toute pathologie tumorale maligne traitée chez un patient ne présentant
aucun symptôme, n’est certainement pas une attitude recommandable au cours
du suivi standard d’une pathologie maligne traitée ; elle doit être réservée, et
alors sans ambiguïté, aux maladies curables en phase métastatique et soigneu-
sement réfléchie dans les autres cas, en particulier chez l’adulte.

◗ Récidives
La stratégie est différente pour ce qui est du diagnostic précoce des récidives
locales ou locorégionales. En effet, si nombre d’entre elles s’accompagnent,
simultanément ou de façon différée, d’une maladie métastatique, beaucoup
résument la maladie évolutive et ouvrent donc la voie à un traitement de
deuxième intention définitif.
Cependant, il est nécessaire de distinguer les récidives survenant après traite-
ment initial « radical » et celles survenant après une thérapeutique dite
« conservatrice ». En effet, les premières offrent par définition peu de possibilités
techniques de recours, alors que les secondes permettent d’envisager le traite-
ment radical initialement non réalisé.
De ce fait, le suivi des traitements conservateurs doit être particulièrement atten-
tif, à la recherche de signes précoces de récidive locale. Par exemple :
– cancers mammaires, par l’examen clinique, la mammographie régulière
éventuellement complétée d’une IRM, l’abord cytologique et/ou biopsi-
que au moindre doute ;
– cancers colorectaux, par l’endoscopie régulière et l’examen des
anastomoses ;
– cancers laryngés, cancers vésicaux par l’endoscopie itérative ;
– cancers prostatiques traités de façon initiale conservatrice (radiothérapie
externe, curiethérapie) pouvant éventuellement bénéficier d’une prosta-
tectomie radicale de rattrapage en cas de récidive locale.
En revanche, après traitement initial radical, le diagnostic précoce, en phase
asymptomatique, d’une récidive ne débouche que très rarement sur une pro-
position thérapeutique couronnée de succès. Il en est ainsi de la recherche
d’une récidive pelvienne après amputation abdominopérinéale pour cancer rec-
tal, après cystectomie totale pour cancer vésical ou association radiochirurgicale
pour cancer utérin. De même, les récidives après pharyngo-laryngectomie totale
ou chirurgie oropharyngée large sont de curabilité très aléatoire. Pour ce qui est
des cancers du sein, seules les récidives pariétales après mammectomie com-
plète peuvent être guéries, en sachant que plus d’un tiers d’entre elles s’accom-
pagnent d’une maladie métastatique.
En conclusion, il apparaît que la recherche anticipée des faits nouveaux tumo-
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

raux n’est réellement utile pour le patient que pour les maladies curables en
phase de dissémination pour ce qui est des métastases, et pour les patients
ayant bénéficié initialement d’un traitement conservateur pour ce qui est des
récidives. Dans les autres cas, l’absence de symptômes doit rendre prudente la
démarche diagnostique compte tenu de la difficulté à proposer en cas d’ano-
malie infraclinique une attitude thérapeutique cohérente et certainement effi-
cace.

◗ Survenue de symptômes
L’apparition de symptômes cliniques au décours du suivi d’une néoplasie traitée
fait naturellement redouter, en particulier par le patient, un fait nouveau tumoral.
Il va de soi que tout symptôme mérite attention ne serait-ce que parce qu’il
nécessite d’être amélioré. Si dans beaucoup de cas, les faits symptomatiques

339 ◗
21_Chap19 Page 340 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

sont liés à des faits nouveaux tumoraux, il ne s’agit pas d’une règle intangible.
En effet, la survenue de pathologies intercurrentes, les effets secondaires des
traitements peuvent également participer à la symptomatologie.
La décision de nouveau traitement spécifique ne peut être prise que devant
l’évidence certaine d’une évolution tumorale dont le caractère symptomatique
justifie alors à lui seul la prescription. Cette certitude est parfois difficile à obtenir
pouvant parfois conduire à des gestes diagnostiques invasifs en particulier dans
les syndromes monométastatiques : biopsie dirigée per-radiologique voire biop-
sie chirurgicale, osseuse, pulmonaire, hépatique, parfois cérébrale.

◗ Seconds cancers
Le suivi médical d’un patient traité pour cancer ne doit pas faire abandonner les
règles médicales générales de diagnostic précoce des autres cancers, en parti-
culier si leur risque de survenue est augmenté par l’antécédent néoplasique
lui-même.
Il est donc évident qu’une attitude de bonne pratique clinique comporte le dia-
gnostic précoce :
– des cancers mammaires controlatéraux ;
– des cancers colorectaux successifs ;
– des cancers ORL successifs, mais aussi œsophagiens ou bronchiques ;
– des cancers cutanés multiples.
Il en est de même des associations moins étroites comme les cancers coliques
et les cancers mammaires ou du corps utérin, les cancers thyroïdiens et les
cancers mammaires, par exemple. Il est clair que dans toutes ces situations,
l’antécédent néoplasique constitue un facteur déterminant d’un groupe à risque
qui doit donc bénéficier de la prise en charge diagnostique classique en la
matière.
Dans d’autres circonstances, où il existe un risque génétique avéré de néopla-
sies multiples, le suivi doit être très attentif et serré (syndromes sein-ovaire,
NEM). Par ailleurs, certains traitements anticancéreux entraînent un excès de
risque de second cancer : il en est ainsi du risque global mais faible de second
cancer radio- et/ou chimio-induit ou de la prescription adjuvante d’anti-œstro-
gènes pour les cancers du sein (risque de cancer de l’endomètre).
On peut ajouter que les patients traités pour cancer doivent également bénéfi-
cier, en dehors de tout lien épidémiologique, des conseils et des stratégies de
prévention et de diagnostic précoce habituellement proposés à la population
générale. En d’autres termes, le suivi d’un cancer ORL ne dispense pas d’un TR,
la surveillance d’un adénocarcinome parotidien chez la femme d’une mammo-
graphie régulière.

◗ Suivi médico-social
Les cancers comme beaucoup d’autres pathologies graves entraînent des
conséquences qui dépassent largement le seul cadre médical pour concerner
les conditions mêmes d’existence. Le retentissement peut être personnel, phy-
sique et/ou psychologique, mais aussi familial, professionnel, financier, social.
La nécessaire durée du suivi après traitement devrait faciliter l’approche et la
prise en compte de ces effets secondaires souvent sous-estimés. Cependant,
pour beaucoup d’entre eux, la meilleure attitude est préventive ce qui suppose
une démarche initiale de « diagnostic médico-social ».
Le contenu de ce diagnostic porte sur les deux grands chapitres, souvent intri-
qués, du suivi médico-social, la réhabilitation physique et la réinsertion sociopro-
fessionnelle.

340 ◗
21_Chap19 Page 341 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRISE EN CHARGE ET ACCOMPAGNEMENT D’UN MALADE CANCÉREUX, RÉSULTATS ET PRONOSTIC 19

◗ Réhabilitation
La prévention ou la correction des effets indésirables ou des séquelles liés à la
maladie et à son traitement doivent être intégrées à la prise en charge initiale.
Il en est ainsi de :
– la rééducation scapulobrachiale des opérés du cou ou du sein ;
– la réparation mammaire après chirurgie complète ;
– la rééducation vocale après laryngectomie ;
– la prévention des effets dentaires de l’irradiation salivaire ;
– la rééducation des troubles de la mastication et/ou de la déglutition après
chirurgie buccopharyngée ;
– la conservation de sperme avant traitement stérilisant chez les hommes
jeunes ;
– l’apprentissage des irrigations coliques après colostomie définitive ;
– la prescription d’un traitement hormonal substitutif après castration ou
ménopause induite, sauf contre-indications ;
– la correction des troubles fonctionnels pelviens, y compris sexuels, après
traitement régional ;
– l’écoute attentive et la prise en charge des difficultés psychologiques liées
au diagnostic et/ou aux traitements, parfois aggravées par une ou plu-
sieurs des difficultés précédentes.
Cette liste d’actions, non exhaustive, montre clairement qu’une réhabilitation
précoce et efficace est une démarche largement polydisciplinaire, intimement
liée à l’équipe soignante initiale qui a une responsabilité éminente dans la qua-
lité de vie future du patient dont elle a la charge. Dans ce cadre, les associations
d’anciens malades jouent un rôle majeur qui peut commencer souvent avant
même que le traitement soit réalisé ou achevé. Les consultations de suivi doi-
vent être le lieu privilégié de l’écoute et de la détection des troubles fonctionnels
et/ou psychologiques qui sont susceptibles de dégrader la qualité du résultat
médical proprement dit, en dehors de tout fait nouveau tumoral.
Le recours à l’aide de professionnels spécialisés (oncopsychologues, psychiatres,
stomathérapeutes, stomatologues, diététiciens, kinésithérapeutes…) est alors
souvent utile quand il n’a pas déjà été engagé souvent dès la phase initiale de
prise en charge.

◗ Réinsertion
L’insertion du patient dans son cadre habituel de vie n’est pas toujours mainte-
nue après l’épisode cancérologique :
– soit pour des raisons physiques mal ou insuffisamment compensées par
les techniques de réhabilitation ;
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

– soit pour des raisons psychologiques ;


– soit pour des raisons sociales qui peuvent tenir à la perte de confiance
de l’environnement du patient en son avenir : employeur, services
sociaux, assurances, entre autres.
Spontanément, tout pousse à ce que le patient soit exclu ou s’exclut de
lui-même de la vie socioprofessionnelle : congés prolongés, invalidité, refus
d’assurance ou d’embauche, etc. Dans la majorité des cas, le patient, déjà lar-
gement préoccupé par son état de santé et son avenir personnel, est désarmé
face à la complexité des procédures et des démarches. Seule une attention
maintenue de son environnement soignant, avec l’aide du médecin traitant et
des travailleurs sociaux, pourra lui éviter des déconvenues inutiles :
– arrêt de travail inutilement prolongé pouvant conduire au licenciement ;
– mise en invalidité précipitée ;

341 ◗
21_Chap19 Page 342 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CONNAISSANCES – CANCÉROLOGIE CLINIQUE

– refus d’assurance pour prêt bancaire sans raison médicale explicite ;


– entrave à l’embauche, dans le secteur privé comme dans le secteur
public ;
– etc.
Comme précédemment, le diagnostic médico-social initial et les consultations
de suivi, permettront aux intervenants de proposer au patient une aide à la fois
psychologique et technique souvent déterminante. Il est cependant nécessaire
que l’ensemble des professionnels qui interviennent lors du suivi d’un patient
traité pour cancer ait une connaissance suffisante des éventualités possibles et
des solutions adaptées.
Là aussi, l’intervention de professionnels de la prise en charge psychologique et
parfois psychiatrique est souvent déterminante et ce d’autant plus qu’elle aura
été mise en œuvre précocement.

◗ Suivi médico-scientifique
L’objectif du suivi médico-scientifique est de faire en sorte que les données
issues du diagnostic, du traitement et du suivi de la pathologie tumorale d’un
patient donné puissent enrichir la connaissance générale et ainsi profiter à la
prise en charge des patients à venir. Ce suivi peut être particulièrement codifié
dans le cadre d’essais cliniques contrôlés.
Cependant, ces démarches de recherche clinique ne concernent qu’une mino-
rité de patients et il est donc nécessaire de ne pas perdre les informations issues
des autres observations. Si certaines structures de soins ont une longue habi-
tude de cette observation médico-scientifique prolongée, elle reste encore trop
isolée. Le développement de réseaux coordonnés de soins cancérologiques
avec constitution de dossiers médicaux communs est certainement une voie de
généralisation à tous les patients porteurs de cancers d’un recueil prolongé de
leurs observations.

◗ Suivi médico-économique
La nécessaire évaluation de la performance réelle des moyens engagés pour
la prise en charge des patients porteurs de cancer conduit à la réalisation
d’études médico-économiques qui obligent à une connaissance documentée
de l’avenir des patients ayant fait l’objet de telle ou telle procédure, diagnos-
tique ou thérapeutique, dont on veut approcher la pertinence. Il s’agit là d’un
volet relativement récent du suivi médical en cancérologie mais dont le déve-
loppement est à l’heure actuelle rapide dans la mesure où la nécessité de
choix médico-économiques stratégiques renforce le besoin d’informations de
cette nature.

◗ CONCLUSION On voit bien que le suivi des patients traités pour cancer n’est pas exclusivement
occupé par la surveillance de la seule maladie initiale, même s’il s’agit naturel-
lement de la préoccupation majeure, en particulier pour le patient. En fait, le
suivi ouvre un vaste champ d’attentions et de décisions médicales, mais aussi
sociales, psychologiques, scientifiques et économiques, qui en font une partie
décisive de la prise en charge des patients, y compris pour ceux qui ne présen-
teront plus jamais de faits nouveaux tumoraux parce qu’ils auront été guéris.

342 ◗
21_Chap19 Page 343 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRISE EN CHARGE ET ACCOMPAGNEMENT D’UN MALADE CANCÉREUX, RÉSULTATS ET PRONOSTIC 19

Points clés
• La prise en charge et l’accompagnement d’un patient porteur de cancer doit tenir
compte de l’objectif global poursuivi et de l’histoire naturelle de la maladie en cause.
• Pour un patient en situation de curabilité potentielle, l’information et l’adhésion au
traitement sont les premiers objectifs poursuivis. Lors du suivi, la recherche exclusive
d’un fait nouveau tumoral n’est pas habituellement, l’attitude la plus utile. Il existe en
revanche des situations où le diagnostic précoce d’une rechute, locale voire métasta-
tique, est d’une importance pronostique capitale.
• La guérison d’un patient traité pour un cancer ne peut être affirmée que de façon rela-
tive, rétrospective et négative — à savoir l’absence de faits nouveaux en rapport avec
l’affection traitée à un délai donné depuis la fin du traitement initial. La probabilité
que cette situation corresponde à une guérison effective est fonction des données sta-
tistiques concernant les maladies identiques au même stade initial.
• La période de risque de survenue d’un fait nouveau tumoral est d’autant plus courte
que la maladie néoplasique est évolutive et/ou le volume tumoral initial important, et
inversement.
• La prise en charge d’un patient en phase palliative doit tenir compte d’une part de
l’évolutivité de la maladie néoplasique en cause et d’autre part de la balance entre
bénéfices et effets secondaires des traitements proposés y compris cancérologiques
spécifiques.
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.


343 ◗
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22_Partie2 Page 345 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

Pratique
Cancérologie
clinique

Cas cliniques
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CAS CLINIQUES

Cas clinique 1 Monsieur Marcel L., 65 ans, ancien ouvrier métallurgiste, consulte pour des cépha-
lées évoluant depuis 2 ans, s’accompagnant depuis quelques mois d’une obstruction
nasale gauche et d’une diminution de l’acuité auditive du même côté. Le patient n’a
pas d’antécédents pathologiques notables hormis un tabagisme interrompu il y a
15 ans et une hypertension artérielle peu sévère traitée par β-bloquants.
À l’examen clinique, on note :
– un état général conservé ;
– une hypoacousie gauche importante ;
– l’absence d’adénopathies cervicales palpables ;
– une obstruction nasale complète à gauche, partielle à droite mais infranchis-
sable à la rhinoscopie antérieure ;
– un examen neurologique normal ;
– à la rhinoscopie postérieure indirecte, le rhinopharynx est œdématié, encombré
de sécrétions muqueuses qui laissent cependant apercevoir une formation
tumorale plus volumineuse à gauche qu’à droite.
Un cancer du rhinopharynx est évoqué.

Questions
A Décrivez les types histologiques des carcinomes D Décrivez les symptômes pouvant faire suspecter
du rhinopharynx. un cancer du rhinopharynx.
B Décrivez la fréquence et la répartition géographi- E Décrivez l’examen clinique à la recherche d’une
que des cancers du rhinopharynx. extension loco-régionale locale d’un cancer du
C Quel est le facteur cocarcinogénétique suspecté rhinopharynx.
dans certains cancers du rhinopharynx ? F Quels sont les examens complémentaires utiles
pour compléter le bilan d’extension tumoral ?

Cas clinique 2 Une jeune femme de 32 ans consulte pour une lésion pigmentée de la cuisse gauche
apparue il y a 2 ans au décours d’une grossesse, sous la forme d’une tache brune qui a
progressivement augmenté de taille. La lésion mesurait lors de la consultation initiale
22 mm de diamètre et son aspect s’était modifié depuis quelques mois en devenant plus
rose et siège d’une ulcération superficielle.
Un dermatologue a effectué une biopsie-exérèse et l’examen pathologique a confirmé la
présence d’un mélanome d’extension superficielle (SSM). Il est par ailleurs précisé que
l’épaisseur maximale de la lésion est de 3,4 mm correspondant à un niveau 4 de Clark.
À l’examen ce jour, il existe une cicatrice linéaire de 3 cm de long, de trophicité
correcte, sans anomalie palpable. Le reste de l’examen clinique est normal.

Questions
A Décrivez les voies d’extension des mélanomes Quels sont les principes du traitement d’un méla-
malins et les méthodes pour les rechercher dans nome en phase locale ? Expliquez la technique de
le cas particulier décrit. la recherche d’un « ganglion sentinelle ».
B Détaillez pour cette observation clinique, le stade D Si une adénopathie prélevée lors de l’évidem-
et les éléments pronostiques favorables ou défa- ment ganglionnaire s’avère métastatique, existe-
vorables. t-il un traitement adjuvant utile ? Lequel ? Justi-
fiez votre réponse.
C Le cancérologue consultant propose une reprise
chirurgicale de la cicatrice et la recherche d’un E Si le ganglion sentinelle n’est pas pathologique,
« ganglion sentinelle ». La patiente n’a pas bien quels sont les objectifs et les recommandations
compris la démarche proposée et vous actuelles pour la surveillance de cette patiente et
demande des informations complémentaires. plus généralement des mélanomes malins
localisés ?


347 ◗
24_Cas_Clinique Page 348 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRATIQUE

Cas clinique 3 Une patiente de 50 ans consulte pour une lésion cutanée persistante depuis plusieurs
mois, mesurant 5 mm de diamètre, située au niveau de la tempe droite à 1 cm de
l’angle palpébral externe. Il s’agit d’un nodule en relief dont le centre déprimé pré-
sente une ulcération croûteuse et dont le bourrelet périphérique est translucide avec
de fines télangiectasies. La patiente est une enseignante récemment rentrée de Nou-
velle-Calédonie, où elle a vécu une vingtaine d’années.
Il s’agit d’une personne blonde aux yeux clairs, sportive et bronzée, avec de multiples
éphélides sur le visage, le décolleté et les avant-bras, sans antécédents médicaux par
ailleurs.

Questions
A Quels sont les facteurs de risque de cancers de C Quelles sont les possibilités de traitement ? Pré-
la peau présents et/ou absents dans cette sentez les arguments de choix.
observation ? D Quelles sont les chances de contrôle d’emblée
B Quel est le type de cancer cutané à évoquer et quelle surveillance devra être proposée ?
devant cette lésion ? Sur quels arguments Pourquoi ?
cliniques ? Comment confirmer le diagnostic ?

Cas clinique 4 Monsieur T., né en 1932, soit 68 ans, est agent comptable à la retraite. Il a
pour antécédent une HTA sous Amlor R. Il a fumé depuis l’âge de 19 ans, 10 à
15 cigarettes par jour jusque 24-25 ans, puis un paquet par jour jusqu’à l’âge
de 53 ans, où il a stoppé toute intoxication. Une BPCO est diagnostiquée depuis
1990, avec emphysème. Il est sous bronchodilatateurs (Pulmicort et Combivent).
Depuis un mois et demi, il présente une toux persistante. Il pèse 65 kg pour un
poids habituel de 70 kg (OMS à 1). Il ressent une dyspnée après les deux étages
qu’il montait sans difficulté jusqu’alors pour rentrer chez lui. Il a reçu deux
antibiothérapies successives infructueuses pour cette « bronchite traînante ».
L’examen clinique retrouve une discrète hypoventilation de la base droite, isolée.
Il n’y a pas de douleurs osseuses, ni d’hippocratisme digital.
La radiographie thoracique met en évidence un syndrome tumoral de la base
droite avec atélectasie surajoutée. L’examen tomodensitométrique confirme une
formation tumorale au niveau du tronc intermédiaire, de diamètre d’environ
45 mm autour de la bronche intermédiaire, avec atélectasie lobaire moyenne et
inférieure droite partielle. Un emphysème centrolobulaire des sommets est associé.
Une lame de pleurésie droite est signalée. Il n’y a pas d’adénomégalie médiasti-
nale significative.
La fibroscopie bronchique confirme une formation tumorale du tronc intermé-
diaire droit, la biopsie retrouvant un carcinome épidermoïde moyennement dif-
férencié.

Questions
A Quels sont les trois signes les plus fréquemment chaque méthode et leur intérêt dans le dossier cli-
retrouvés dans les cancers bronchiques tous nique présenté ici.
types et tous stades confondus ? D Appréciez les chances de guérison au stade pré-
B Quels sont les syndromes paranéoplasiques les senté par ce patient, en taux de survie à 5 ans.
plus évocateurs des carcinomes épidermoïdes ? E Quels sont les examens requis par le bilan préopé-
C Quels examens contribuent le mieux au diagnostic ratoire d’un cancer bronchique non à petites
des cancers bronchiques ? Discutez les limites de cellules ?


348 ◗
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CAS CLINIQUES

Cas clinique 5 Chez ce patient de 50 ans sans antécédent médical notable, une tumeur du pôle infé-
rieur du rein droit de 6 cm de diamètre a été détectée par une échographie faite au
décours de l’exploration de douleurs abdominales. Le patient est en excellent état
général et l’examen clinique est normal.
La numération sanguine, l’ionogramme sérique et le dosage de la CRP sont normaux.
Au scanner l’image de la masse tumorale est renforcée par l’injection de produit de
contraste qui ne permet pas par ailleurs d’être sûr de la perméabilité de la veine
rénale. L’écho-Doppler abdominal et l’IRM confirmeront l’existence d’un thrombus
veineux rénal droit. La veine cave inférieure est libre. Le cliché thoracique est
normal.
Une néphrectomie radicale droite est proposée au patient.

Questions
A Quels types histologiques de tumeur rénale C À l’aide de la classification TNM, classez la
peut-on attendre ? Lequel est le plus fréquent ? tumeur sur les données préopératoires.
B Décrivez les modes d’extension des cancers du D Argumentez la proposition de chirurgie radicale.
rein. Appréciez les examens effectués chez ce Définissez et appréciez les risques de la chirurgie
patient lors du bilan d’extension. conservatrice.

Cas clinique 6 Madame Lucienne H., 43 ans, présente une tumeur palpable, mesurée à 1,5 cm
dans le quadrant supéro-externe du sein droit sans adénopathie axillaire perceptible
à l’examen clinique. La mammographie montre en regard de la formation palpée,
une opacité irrégulière, siège de microcalcifications hétérogènes situées dans et hors de
l’opacité. Une ponction à l’aiguille fine a ramené des cellules fortement suspectes
d’être malignes.
La patiente est adressée en consultation dans la perspective d’une chirurgie, mais fait
d’emblée savoir qu’elle est formellement opposée à une mammectomie totale.

Questions
A Quelles sont les modalités chirurgicales possi- C Quel est l’apport de la radiothérapie postopéra-
bles pour un cancer du sein à ce stade ? toire au contrôle de la maladie ?
B Après chirurgie conservatrice, quels sont les D Décrivez les chances de guérison de la patiente
paramètres prédictifs d’une récidive et les paramètres pronostiques découlant de
intramammaire ? cette observation.

Cas clinique 7 Madame Brigitte L., 32 ans, mariée, vient d’achever le traitement d’un cancer du
sein du sein gauche classé T1N0M0. Elle a été traitée par chirurgie conservatrice, sui-
vie d’une chimiothérapie adjuvante et d’une radiothérapie loco-régionale. Après une
période d’aménorrhée, ses règles sont réapparues 4 mois après la fin de la chimiothé-
rapie.
La patiente s’inquiète d’une congestion mammaire et de douleurs persistantes
dans le sein traité. L’examen montre une augmentation de taille du sein avec
un aspect de peau d’orange, une chaleur locale, une pigmentation. Il existe par
ailleurs, un discret œdème au niveau du coude et de l’avant-bras gauches, avec
une différence de circonférence de plus de 2 cm avec le côté droit.
La patiente s’inquiète de ces manifestations et profite de la consultation pour vous
interroger sur les méthodes de contraception adaptées à sa situation ainsi que sur
les possibilités de grossesse car elle n’a que 32 ans et n’a pas eu encore d’enfants.

349 ◗
24_Cas_Clinique Page 350 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRATIQUE

Questions
A La symptomatologie présentée par la patiente est- C Dans quelles conditions une grossesse est-elle
elle en rapport avec une éventuelle récidive du envisageable ?
cancer traité ? D Comment traiter l’œdème du membre supérieur ?
B Quels conseils contraceptifs peut-on donner à E Décrivez et expliquez à la patiente les objectifs
cette patiente ? et les modalités de son suivi post-thérapeutique.

Cas clinique 8 Madame Colette C., 32 ans, nulligeste, se présente pour une consultation gynécologi-
que annuelle systématique. À l’âge de 25 ans, les frottis cervicovaginaux avaient per-
mis de découvrir des lésions condylomateuses, traitées par vaporisation laser.
Les frottis cervicovaginaux réalisés montrent des lésions de type CIN 2-3. Une col-
poscopie est alors pratiquée, permettant une cartographie des zones acidophiles et
iodo-négatives qui sont biopsiées. L’analyse histologique des biopsies retrouve des
lésions cervicales de type CIN 3.
Une conisation est alors proposée qui permet l’exérèse de toutes les zones acidophiles
et iodo-négatives. L’histologie de la pièce opératoire conclut à la présence de lésions
de type CIN 3 avec un foyer invasif de 4 mm de large, franchissant la membrane
basale sur 2 mm de profondeur. Toutes les limites d’exérèse passent en zone saine.

Questions
A Quel est le marqueur tumoral indiqué dans le C Quels examens sont à prévoir pour le bilan d’exten-
diagnostic des cancers du col de l’utérus ? sion d’un cancer du col de l’utérus à ce stade ?
1. CA 125. 1. Scanner pelvien.
2. CA 15.3. 2. Cystoscopie et rectoscopie.
3. SCC. 3. Enzymes hépatiques.
4. α fœtoprotéine. 4. Lymphographie pelvienne.
5. Aucun. 5. Aucun.
B Quel est le stade clinique selon la classification D Quelles sont les chances de survie à 5 ans pour
de la FIGO ? cette patiente ?
1. Stade 0. 1. 100 %.
2. Stade Ia1. 2. 90 %.
3. Stade Ia2. 3. 75 %.
4. Stade Ib1. 4. 65 %.
5. Stade Ib2. 5. 50 %.

Cas clinique 9 Madame R. est une Antillaise de 52 ans. Elle habite la région parisienne depuis sa
petite enfance. Elle a été traitée, il y a 15 ans pour un cancer du sein. Son médecin
de famille la voit régulièrement pour la surveiller et traiter par ailleurs une hyper-
tension artérielle modérée. Elle s’inquiète d’une pesanteur pelvienne persistante et ce
d’autant plus que sa sœur cadette a été opérée récemment d’un « kyste » de l’ovaire.
Dossier médical :
– 3 enfants allaités ;
– contraception orale pendant 5 ans ;
– cancer du sein de stade I traité par tumorectomie, évidemment axillaire et
radiothérapie. Les récepteurs hormonaux étaient positifs ;
– mère décédée d’un cancer du sein et sœur traitée par chimiothérapie pour le
« kyste » de l’ovaire.

350 ◗
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CAS CLINIQUES

Questions
A La patiente s’inquiète d’un risque de cancer de C Cette patiente a-t-elle des facteurs particuliers de
l’ovaire. Décrivez l’épidémiologie des cancers de risque de cancer de l’ovaire ?
l’ovaire en France : incidence, mortalité. D Peut-on proposer une attitude préventive ou une
B Quel est le profil d’âge des différents types de démarche de diagnostic précoce ?
cancers de l’ovaire ?

Cas clinique 10 Monsieur L., âgé de 58 ans, ouvrier maçon, alcoolo-tabagique, présente un carci-
nome épidermoïde bien différencié de l’hypopharynx gauche révélé par une dyspha-
gie avec odynophagie. Un examen endoscopique sous anesthésie générale a mis en
évidence une tumeur développée à partir du sinus piriforme gauche étendue vers
le haut à l’oropharynx, vers le bas à la bouche de l’œsophage et atteignant en
dedans la paroi postérieure de l’hypopharynx. Le larynx est mobile. Le TDM mon-
tre une adénopathie sus-hyoïdienne gauche de 3 cm de diamètre, d’aspect nécroti-
que, cliniquement palpable. La tumeur est classée T3 N2a M0. Un traitement
chirurgical est récusé en première intention du fait de l’extension locale et il est
décidé un traitement médical associatif par radiothérapie externe et chimiothérapie
concomitante par voie générale (cisplatyl hebdomadaire à visée radiosensibili-
sante). Au moment du diagnostic, le patient pesait 55 kg pour 1 m 64 (moins 6 kg
en 3 mois).
Vous le voyez en consultation au début de la quatrième semaine du traitement radio-
chimiothérapique simultané.

Questions
A Quel(s) est (sont) le(s) objectif(s) de votre inter- D Vous le revoyez un mois après la fin du traite-
rogatoire et de votre examen clinique ? Décrivez ment. Vous observez une bonne efficacité thé-
les éléments de votre interrogatoire et de votre rapeutique, la mucite est en bonne voie de
examen clinique. cicatrisation. Il pèse 50 kg. Il fume toujours et
B Le patient présente une mucite sévère doulou- avoue boire encore un litre de vin par jour envi-
reuse. Donnez les grandes lignes des causes et du ron. À la question « Docteur, mon arrêt de tra-
traitement de cette mucite. vail se termine dans deux jours et je ne peux
pas encore reprendre mon travail, d’ailleurs je
C Le patient pèse ce jour 48 kg. Le bilan biologique
ne sais pas si je pourrai reprendre un jour, que
effectué quelques jours auparavant montre un taux
dois-je faire ? », que répondez-vous ?
d’albuminémie à 25 g/l. Quelles sont les données
de l’observation qui vous permettent de dire que E Quels seront vos objectifs de surveillance ultérieure
ce patient présente un état de dénutrition ? Don- (une fois le primotraitement terminé) ?
nez les orientations du traitement que l’on peut lui F Quel(s) examen(s) complémentaires demande-
proposer. rez-vous dans le cadre de cette surveillance ?

Cas clinique 11 Madame D. est âgée de 42 ans. Elle a trois enfants (14, 11 et 8 ans). Son mari est
militaire, souvent en déplacement loin de son domicile. Elle est traitée par hormono-
thérapie (anti-estrogène et agoniste de la LH-RH) pour un cancer du sein en phase
de dissémination osseuse.
Vous ne l’avez pas vu depuis 6 mois. Elle se présente à votre consultation de surveillance
douloureuse (fémur droit, humérus gauche, rachis et grill costal), nauséeuse, un peu
confuse. Elle décrit enfin une polydipsie et une constipation opiniâtre. Ces signes
cliniques se sont installés depuis environ dix jours.

351 ◗
24_Cas_Clinique Page 352 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

PRATIQUE

Questions
A Quels sont les arguments de cette observation néoplasique : la radiographie thoracique et l’échogra-
qui vous permettent d’évoquer le diagnostic phie hépatique sont normales, en revanche la scin-
d’une hypercalcémie ? tigraphie osseuse montre une aggravation confirmée
B Quel(s) est (sont) le(s) diagnostic(s) différentiel(s) par les clichés osseux centrés sur les foyers d’hyper-
à évoquer ? fixation notamment au niveau de la diaphyse du
fémur droit où il existe une lyse osseuse avec rup-
C Quel(s) examen(s) complémentaire(s) réalisez-
ture de la corticale. Donnez les grandes lignes du
vous pour confirmer l’hypercalcémie ?
traitement que vous allez envisager.
D Quels principes thérapeutiques allez-vous mettre
F Après votre traitement, elle va mieux et vous envi-
en place dans l’immédiat pour corriger
sagez un retour à domicile. À sa question « Je ne
l’hypercalcémie ?
peux plus assumer seule le travail à la maison avec
E Après correction de l’hypercalcémie, vous organi- trois enfants, mon mari est souvent absent », com-
sez un nouveau bilan d’extension de la maladie ment pouvez-vous l’aider ?

Cas clinique 12 Un homme de 52 ans termine son traitement pour un adénocarcinome lieberkhü-
nien bien différencié du côlon droit classé stade C de Dukes. Il a été traité par hémi-
colectomie première puis chimiothérapie adjuvante (acide folinique et 5-fluoro-
uracile).
Il n’existe aucun antécédent familial de cancer digestif, notamment colique.

Questions
A Quels seront les objectifs de la surveillance E Deux ans après le primotraitement l’échographie
ultérieure ? hépatique révèle deux localisations secondaires,
B Quel sera votre examen clinique lors de chaque l’ACE est élevé à 50 UI/ml pour une normale
consultation ? < 5 UI/ml. Le bilan biologique hépatique n’est
pas perturbé. Le reste du bilan d’extension est
C Demanderez-vous des examens biologiques
négatif. Il est en bon état général, asymptomati-
complémentaires dans le cadre de ce suivi ? Si
que. Quel(s) type(s) de traitement(s) pourra-t-
oui, lesquels ?
on discuter ?
D emanderez-vous d’autres examens
D
complémentaires ? Si oui, lesquels ?

Cas clinique 13 Madame P., femme de ménage salariée dans une entreprise de nettoyage, est âgée de
48 ans. Le 15 mai 2002, elle a bénéficié d’une tumorectomie + évidement axillaire
gauche pour un T2 N0 M0 du QSE du sein gauche. Le compte rendu histologique
fait état d’un adénocarcinome canalaire infiltrant de grade III, exprimant fortement
les récepteurs hormonaux, mesurant 35 mm, accompagné de 3N + sur 14 ganglions
ramenés par l’évidemment axillaire. Une chimiothérapie adjuvante lui a été propo-
sée. La patiente est très inquiète mais accepte le traitement dont elle reçoit le premier
cycle selon le protocole FEC100, le 15 juin 2001.


352 ◗
24_Cas_Clinique Page 353 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CAS CLINIQUES

Questions
A Quel(s) éléments(s) sont à l’origine de l’indica- latérales. Vous lui prescrivez un traitement hormo-
tion du traitement adjuvant ? nal par tamoxifène (anti-estrogène). Quels seront
B À la question de la patiente : « Docteur, je veux les objectifs de la surveillance ultérieure, une fois le
avoir une perruque. Est-ce que cela me sera primotraitement terminé ?
remboursé ? », que lui répondez-vous ? F Quel(s) examen(s) complémentaire(s) demande-
C Quels sont les principes du traitement anti-éméti- rez-vous dans le cadre de cette surveillance ?
sant prescrit au décours d’une chimiothérapie ? G Vous la revoyez à un an du diagnostic, soit presque
D Médecin de garde, elle vous appelle à son domicile 6 mois après la fin du traitement : elle est en bon
le 25 juin car elle est fébrile. Quel diagnostic envi- état général mais garde un syndrome anxio-
sagez-vous ? Quel sera votre examen clinique et dépressif marqué. Elle est toujours en congé de
quel(s) examen(s) complémentaire(s) allez-vous longue maladie et n’envisage pas de reprendre son
demander ? activité professionnelle en raison d’une gêne fonc-
tionnelle parfois douloureuse au niveau de l’épaule
E À la fin de la chimiothérapie, elle reçoit une radio-
et du bras gauches. Que lui proposez-vous pour
thérapie sur le sein opéré et les aires ganglionnai-
l’aider ?
res mammaires internes et sus-claviculaires homo-

Cas clinique 14 Monsieur T. est âgé de 68 ans. Il est traité depuis 9 mois par hormonothérapie pour
un adénocarcinome de la prostate en phase de dissémination osseuse (métastases fémo-
rales, rachidiennes, crâniennes). Il présente depuis environ un mois une altération
marquée de l’état général (asthénie, anorexie) et une majoration des douleurs osseuses.
Son traitement antalgique est le suivant : paracétamol codéiné 3 g/j.
Vous le voyez à son domicile : il décrit une douleur bien précise de topographie radicu-
laire au niveau du rachis dorsal moyen, des dysesthésies au niveau des membres infé-
rieurs. Il vous dit : « Hier je suis tombé : mes jambes m’ont lâché. » Votre examen
neurologique montre une paraparésie symétrique, une hypoesthésie des membres infé-
rieurs remontant jusqu’à l’ombilic. Les réflexes ostéo-tendineux des membres inférieurs
sont abolis pour certains, très vifs pour d’autres.

Questions
A Quel(s) diagnostic(s) évoquez-vous ? Précisez- C Quel(s) examen(s) complémentaire(s) deman-
en les éléments contenus dans l’observation. dez-vous ?
B Quelle conduite à tenir adoptez-vous ? D Quel(s) traitement(s) instaurez-vous dans
l’urgence ? Décrivez également les grandes
lignes du projet thérapeutique.

Cas clinique 15 Monsieur R. a été traité, il y a 18 mois, pour un adénocarcinome bronchique bien
différencié stade III par chirurgie suivie de radiothérapie externe postopératoire. Il a
présenté il y a 9 mois un syndrome métastatique osseux traité par chimiothérapie (six
cycles de Cisplatyl et Navelbine) terminée il y a 4 mois. Vous êtes appelé en urgence
à son domicile à la suite d’un « malaise ». À votre arrivée, le patient est confus. Son
épouse vous décrit une perte de connaissance précédée de mouvements incontrôlés. Il
a perdu ses urines et s’est mordu la langue.


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PRATIQUE

Questions
A Quel examen clinique doit être réalisé dans le D Une fois plus éveillé, il vous dit qu’il présente des
cadre de la surveillance d’un patient traité pour céphalées depuis plusieurs jours. Précisez votre
un cancer bronchique métastatique ? examen clinique.
B Faut-il dans ce cadre demander des examens com- E Comment confirmer votre diagnostic ? Décrivez
plémentaires. Si oui, le(s) quel(s) ? brièvement ce que vous recherchez.
C Quel diagnostic évoquez-vous à son domicile ? F Quel(s) traitement(s) immédiats prescrivez-vous
(donner les grandes lignes) ?


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CAS CLINIQUES

Réponses

Cas clinique 1 Cancer du rhinopharynx

A Pour les carcinomes, on distingue : transmission, acouphènes, vertiges, otite aiguë


– carcinome malpighien spinocellulaire séreuse.
kératinisant ; Les signes rhinologiques associent une obstruction
– carcinome non kératinisant ; nasale uni- ou bilatérale, des épistaxis, une rhinor-
– carcinome indifférencié. rhée muco-sanglante.
Les carcinomes différenciés sont plutôt rencontrés Les manifestations neurologiques éventuellement
dans les pays à faible risque (Europe), les formes associées peuvent être des céphalées persistantes,
peu différenciées dans les régions d’« endémie ». un trismus, des douleurs hémifaciales, une diplopie.
Les autres tumeurs sont représentées essentielle- E L’examen recherche essentiellement les signes
ment par des lymphomes le plus souvent de haut d’une extension haute vers les structures
grade. neurologiques :
B Les cancers du rhinopharynx sont rares en Europe – atteinte sphénoïdale : recherche d’une diplopie
et en Amérique du Nord où ils représentent 3 % des (VIe paire), exophtalmie, amaurose ;
cancers des VADS. Les régions à très forte incidence – atteinte de l’apex pétreux : anesthésie doulou-
sont l’Asie du Sud-Est, la Chine du Sud, où l’inci- reuse de l’hémiface ;
dence peut atteindre 20 à 30 pour 100 000 habi- – trismus témoignant d’une extension latérale
tants. Le Moyen-Orient, le Maghreb sont des zones vers la fosse ptérygomandibulaire.
à risque intermédiaires. F L’examen clinique permet une description tumorale,
C Le facteur cocarcinogénétique majeur des carcino- un relevé précis d’éventuelles adénopathies cervica-
mes du rhinopharynx est le virus d’Epstein-Barr les et la mise en évidence ou non de signes asso-
(EBV). Une sérologie EBV positive peut être utile ciés, notamment neurologiques. Il est en outre
pour le diagnostic d’adénopathies cervicales révéla- nécessaire de pratiquer :
trices sans maladie muqueuse visible. Il est égale- – une endoscopie sous anesthésie générale avec
ment possible de rechercher le virus EBV par biopsie ;
hybridation in situ sur les prélèvements biopsiques – un TDM ou mieux une IRM explorant le cavum,
tumoraux. la base du crâne, les espaces pharyngés
D Les adénopathies cervicales inaugurales, souvent latéraux ;
postérieures et hautes, constituent un mode de – une radiographie thoracique ;
révélation fréquent (deux tiers des cas). – une échographie hépatique ;
Les signes otologiques sont en rapport avec l’obs- – dans les cancers peu différenciés, une scintigra-
truction tubaire et l’otite séreuse : hypoacousie de phie osseuse initiale de référence.

Cas clinique 2 Mélanome malin

A Les cellules mélaniques envahissent le réseau lym- Les sièges les plus fréquents de métastases viscéra-
phatique du derme et suivent le courant lymphati- les, avec ou sans extension ganglionnaire associée,
que jusqu’aux ganglions régionaux : pour le sont la peau voisine ou le long du trajet lymphatique
membre inférieur, les ganglions inguinaux superfi- (nodules en transit), les poumons, le cerveau, le
ciels et profonds, puis iliaques et rétropéritonéaux foie, plus rarement le squelette, le péritoine ou la
lombo-aortiques. plèvre.
Les ganglions sont envahis dans environ 20 % des Le risque de métastases est faible au stade décrit
mélanomes, ce risque étant significatif pour des dans l’observation présentée, le bilan d’extension se
tumeurs supérieures à 0,75 mm d’épaisseur (indice limitant alors à l’inspection de tout le revêtement
de Breslow), constituant un indicateur de risque cutané, la palpation du membre à la recherche de
d’une extension métastatique viscérale. nodules en transit, la palpation des ganglions ingui-


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PRATIQUE

naux, du foie, des creux sus-claviculaires, un cliché b) L’absence d’adénopathie palpable n’est pas
thoracique, un bilan biologique standard. synonyme de l’absence de tout envahissement qui,
Suivant la symptomatologie associée, il peut être dans le cas particulier, peut atteindre 20 %. La tech-
pratiqué un scanner abdominal (foie, ganglions nique du ganglion sentinelle a pour objectif de repé-
rétropéritonéaux) thoracique ou cérébral. Il n’y a pas rer par méthode isotopique ou colorimétrique le
de marqueur sérique spécifique. premier ganglion satellite de la tumeur, de le préle-
ver et de l’analyser. L’évidemment n’est complété
B La classification internationale se fonde sur les tra- que si l’examen histologique extemporané montre
vaux de Clark et de Breslow en fonction de l’exten- une métastase.
sion en profondeur. La stadification de l’AJCC
(American Joint Committe on Cancer) est plus utili- D En cas d’adénopathie(s) métastatique(s) régio-
nale(s), le taux de guérison se situe entre 30 et
sée que la classification au TNM.
40 %. Il n’y a pas à ce jour de traitement adjuvant
Il s’agit d’un pT3b ( > 3 mm < 4 mm) N0 soit un ayant fait la preuve formelle de son efficacité. Parmi
stade II TNM. les options possibles (radiothérapie de la zone d’évi-
Les stades II présentent des taux de guérison très demment, chimiothérapie, immunothérapie), l’inter-
divers (entre 10 et 80 %) en fonction : féron apporterait les meilleurs résultats en
augmentant le taux de guérison de 10 %.
– du type histologique (le SSM a le meilleur
pronostic) ; E Les objectifs du suivi post-thérapeutique sont les
– du sexe (pronostic meilleur chez la femme que suivants :
chez l’homme) ; – diagnostic précoce d’un second mélanome malin
– de la topographie (pronostic meilleur pour les éventuel par l’examen clinique trimestriel pendant
membres) ; un an puis tous les 6 mois pendant deux ans, et
– de l’extension ganglionnaire possible même en enfin tous les ans ;
l’absence d’adénopathie palpable. – éducation du patient et éventuellement de sa
C a) La reprise chirurgicale de la zone d’exérèse ini- famille à l’auto diagnostic précoce et à la protection
tiale à pour but d’obtenir des marges périlésionnel- solaire ;
les suffisantes qui sont consensuellement fixées à : – diagnostic précoce d’une récidive locale ou gan-
– 1 cm pour les tumeurs inférieures ou égales à glionnaire accessible à un traitement chirurgical ;
1 mm d’épaisseur ; – amélioration des effets iatrogènes en particulier
– 2 cm pour les tumeurs entre 1 et 2 mm ; les lymphœdèmes fréquents après évidement ingui-
– 3 cm pour les tumeurs supérieures à 3 mm. nal complet.
Dans le cas particulier, compte tenu de la taille Le diagnostic précoce des métastases n’apporte pas
lésionnelle initiale, les marges ne sont pas suffisan- d’avantages notables pour le patient en l’absence
tes et justifient la reprise. de traitement efficace de la maladie métastatique.

Cas clinique 3 Carcinome cutané

A La patiente présente un phototype sensible (peau C Les options possibles pour le traitement des carcino-
claire, yeux clairs, phanères blonds). L’irradiation mes cutanés sont multiples :
solaire est ainsi le facteur essentiel, notamment en – cryothérapie,
cas de personne à phototype sensible séjournant – chimiothérapie en application locale,
près de l’équateur, les expositions solaires ayant un – électrocoagulation ou vaporisation laser,
effet cumulatif expliquant l’âge relativement jeune – curiethérapie interstitielle,
de survenue. – radiothérapie externe,
En revanche, les autres facteurs de risque ne sont – chirurgie.
pas présents : hydrocarbures, goudrons, arsenic, Seules la chirurgie et les méthodes radiothérapiques
rayons X, plaies chroniques, immunodépression des ou curiethérapiques sont adaptées au traitement
greffés, génodermatoses comme les nævi basocel- curatif de la lésion décrite.
lulaires ou le xeroderma pigmentosum. Dans le cas particulier, la lésion siège en zone plane,
B Il s’agit d’un carcinome basocellulaire : lésion sié- à distance relative d’une région orificielle. Il pourra
geant en zone découverte, d’évolution lente, présen- donc être proposé soit une chirurgie d’exérèse avec
tant un aspect nodulaire perlé avec ulcération suture simple ou lambeau local soit une curiethéra-
centrale et fines télangiectasies sur le bourrelet péri- pie utilisant des fils d’iridium 192.
phérique. Le diagnostic est affirmé par l’examen his- Dans les deux cas, la guérison est acquise dans plus
tologique après biopsie sous anesthésie locale. de 95 % des cas.


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CAS CLINIQUES

D Les résultats sont excellents avec plus de 95 % de En revanche, plus de 50 % des patients présente-
contrôle définitif. Les récidives après traitement sur- ront un nouveau carcinome cutané dans un autre
viennent après chirurgie trop étroite ou défaut tech- territoire découvert, justifiant une surveillance prolon-
nique lors d’une curiethérapie notamment dans les gée des téguments et une éducation des patients
zones anatomiquement complexes (nez, sillon rétro- (auto-surveillance et protection solaire).
auriculaire, commissure labiale) ou lors de tumeurs Enfin, le risque de mélanome malin est lui aussi
volumineuses de plus de 2 cm. augmenté par l’exposition solaire notamment chez
Le risque de récidive ganglionnaire est nul comme les sujets comme la patiente décrite.
celui de métastase viscérale.

Cas clinique 4 Cancer bronchopulmonaire

A Toux, dyspnée, douleur thoracique et hémoptysie La médiastinoscopie n’a d’intérêt que dans le cas
représentent les manifestations les plus fréquentes. d’adénopathies médiastinales posant le problème
Les signes généraux sont retrouvés dans 50 % des de leur nature notamment devant des adénopa-
cas (asthénie, altération d’état général). Les décou- thies controlatérales suspectes.
vertes systématiques chez des patients asymptoma- La ponction transpariétale permet des prélèvements
tiques représentent moins de 10 % des cas. histologiques au niveau des tumeurs très périphéri-
B Les syndromes paranéoplasiques sont présents en ques inaccessibles à l’endoscopie bronchique. Il
moyenne dans 15 % des cancers bronchiques, existe un risque de pneumothorax dans environ 20
avec en premier lieu l’hippocratisme digital. Il fait à 25 % des cas. Dans ces situations, la thoracoto-
partie de l’ostéoarthropathie hypertrophiante pneu- mie, lorsque le patient est opérable, peut constituer
mique de Pierre-Marie, associé à des arthropathies le temps diagnostique de choix immédiatement
symétriques des poignets, des chevilles et/ou des suivi de l’exérèse carcinologique.
genoux. D Le patient présente une tumeur classée T2 N0 M0,
En l’absence de tout syndrome métastatique la survie moyenne étant de 40 % à 5 ans pour les
osseux, l’hypercalcémie est classiquement liée aux patients ayant bénéficié d’une chirurgie d’exérèse.
carcinomes épidermoïdes, par sécrétion d’un pep- Pour les patients inopérables, la survie est en géné-
tide proche de la PTH. ral sensiblement moins bonne.
Les autres syndromes endocriniens sont plus en Les affections associées peuvent influer le pronostic
relation avec les carcinomes à petites cellules, en par leur évolution propre, notamment une BPCO
particulier le syndrome de Schwarz-Bartter ou le syn- sévère comme dans le cas particulier.
drome de Cushing. Le type histologique épidermoïde est toujours de
Enfin, diverses affections neurologiques peuvent se meilleur pronostic, en particulier par rapport aux
rencontrer : encéphalites paranéoplasiques, syn- adénocarcinomes.
drome de Lambert-Eaton. E En cas de tumeur bronchique potentiellement opé-
C L’endoscopie trachéobronchique est l’examen dia- rable, la recherche d’une localisation secondaire est
gnostique clef même si la rentabilité diagnostique indispensable :
des biopsies bronchiques au cours de cet examen – exploration TDM des surrénales et du foie ;
est faible pour une tumeur périphérique (la visuali- – la scintigraphie osseuse n’est justifiée qu’en cas
sation directe s’arrête aux bronches sous-segmen- de symptomatologie osseuse, couplée à des
taires). clichés centrés.

Cas clinique 5 Cancer du rein

A Les principaux types histologiques sont : B Bilan d’extension


– le cancer à cellules claires (80 %), plus ou • Extension locale
moins bien différenciées. Le grade histologique Les cancers à cellules claires se développent dans
est un bon indicateur pronostique ; la corticale du rein, avec des localisations multi-
– le cancer tubulo-papillaire (5 %) ; ples dans 10 % des cancers de plus de 3 cm.
– le cancer de type oncocytaire (10 %) de Après avoir franchi la capsule, la tumeur envahit
meilleur pronostic que les précédents. la graisse péri-rénale, le fascia de Gérota et peut


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PRATIQUE

se fixer à la paroi abdominale postérieure et/ou ment une scintigraphie osseuse en cas de
aux organes voisins (aux surrénales, à droite au symptômes ;
foie, à gauche au diaphragme). Vers le hile, la – l’urographie intraveineuse qui garde un intérêt
tumeur envahit à la veine rénale, le thrombus dans l’évaluation fonctionnelle de l’autre rein ;
néoplasique s’étendant à la veine cave inférieure – l’angiographie digitalisée qui a le plus souvent
dans 10 % des cas. remplacé l’artériographie sélective, sauf dans le
• Extension lymphatique cas d’une embolisation préopératoire ou d’une
chirurgie conservatrice ;
Les premiers relais sont les ganglions du pédicule
rénal, envahis dans 30 à 40 %, puis les ganglions Enfin, il n’y a pas de marqueur sérique utile du can-
lombo-aortiques. cer du rein.
• Métastases C La classification la plus utilisée en Europe est le TNM
(1998). Dans ce cas, la classification actuelle est
Le potentiel métastatique des cancers du rein est T3b N0 M0. L’état des ganglions sera précisé par
très élevé, 30 % des malades se présentant l’exploration opératoire et l’examen anatomopatho-
d’emblée avec des métastases viscérales, essentiel- logique de la pièce de néphrectomie.
lement pulmonaires, osseuses, cutanées mais aussi
hépatiques et cérébrales. D La néphrectomie radicale avec curage ganglion-
naire hilaire est le traitement standard, enlevant en
• Examens bloc le rein avec la graisse périrénale et le fascia de
Dans l’observation présentée, le patient a bénéficié Gérota.
de l’examen clef à savoir la tomodensitométrie La chirurgie conservatrice, ou néphrectomie par-
abdominale qui permet le diagnostic d’un envahis- tielle, est envisagée pour les cancers sur rein unique,
sement de la graisse périrénale et des organes voi- ou en cas d’insuffisance rénale ou de cancer bilaté-
sins, d’un thrombus de la veine rénale ou de la ral. Dans les autres cas, la néphrectomie partielle est
veine cave inférieure, enfin d’éventuelles adénopa- discutée en raison de la fréquente multifocalité des
thies pédiculaires et lombo-aortiques. L’IRM, comme cancers du rein et du risque de récidive dans le rein
dans le cas particulier, permet de mieux apprécier restant. Les bonnes indications sont des tumeurs
l’extension vasculaire veineuse. inférieures à 3 cm et situées au niveau d’un pôle.
• Au-delà des examens pratiqués, il aurait été utile Au stade III, l’exérèse chirurgicale est élargie à la
de connaître : demande en fonction des envahissements locaux.
– le résultat de la FNS à la recherche d’une poly- Le curage ganglionnaire lombo-aortique est recom-
globulie, d’une anémie ferriprive, un BES pour mandé dans les tumeurs T3 et chaque fois qu’un
la recherche d’une hypercalcémie métastati- envahissement est suspecté (N1 et N2).
que ou para-néoplasique, des tests hépatiques Dans les cancers envahissant la veine rénale ou
(recherche du syndrome de Stauffer) et des cave, une thrombectomie après clampage veineux
tests de la fonction rénale (créatinémie, clai- est indiquée. Pour les thrombus de la veine cave
rance à la créatinine) ; sus-hépatique, un by-pass cardiopulmonaire est
– la recherche de métastases extra-abdominales nécessaire. Une embolisation préopératoire réduit le
par un scanner thoracique et par éventuelle- saignement en cas de tumeur hypervasculaire.

Cas clinique 6 Cancer du sein non métastatique

A La patiente présente un cancer de stade I B La fréquence des récidives intramammaires après


(T1 N0 M0) pour lequel les options chirurgicales chirurgie conservatrice du sein augmente avec :
sont : – des marges insuffisantes autour de la résection
– une tumorectomie associée à un évidement a fortiori des berges envahies ;
axillaire ; – la présence d’une composante intracanalaire
– une mastectomie radicale modifiée avec évi- extensive de type comédocarcinome ;
demment axillaire (opération dite de Patey). – une lésion multifocale.
Le choix entre chirurgie conservatrice du sein et Dans le cas particulier, la taille et le siège de la
mastectomie dépend du volume de la tumeur par tumeur plaident pour une chirurgie conservatrice
rapport à celui du sein et de sa situation par rapport mais l’image mammographique est en faveur d’une
au mamelon. La chirurgie conservatrice est idéale probable composante intracanalaire, peut-être
pour les tumeurs de moins de 2 cm et peut être extensive et multifocale.
étendue à des tumeurs de 3 cm de diamètre quand Il est ainsi capital de déterminer avec précision l’état
le sein est volumineux et que la tumeur est loin de des berges de la tumorectomie par l’examen ana-
la région mammelonaire. tomopathologique de la pièce opératoire.


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CAS CLINIQUES

Si l’examen montre une composante intracanalaire Dans le cas particulier, si la patiente persiste dans
extensive à type de comédocarcinome, et/ou si les son refus de mammectomie totale, après une chirur-
berges sont envahies, et/ou si le cancer est multifo- gie partielle éventuellement insuffisante (cf.
cal, une mastectomie complémentaire est alors indi- réponse C), une irradiation du sein lui sera proposée.
quée. D Quelle que soit l’option chirurgicale, les chances de
C Il est acquis que la radiothérapie mammaire pos- guérison sont très bonnes pour les cancers centimé-
topératoire améliore le contrôle local de la mala- triques. Les taux de survie à 5 ans sont de l’ordre de
die. La radiothérapie diminue les récidives dans le 80 à 90 %. En cas de chirurgie conservatrice suivie
sein conservé après tumorectomie ou dans la d’irradiation, le taux des récidives locales reste infé-
paroi thoracique après mastectomie. La réduction rieur à 10 % à 10 ans. Le pronostic sera cependant
des récidives locales améliore sensiblement le sensiblement influencé par le résultat de l’évidem-
pronostic vital et les taux de survie à 5 et à ment axillaire, la détermination du grade histologi-
10 ans pour une patiente ayant un stade I de la que et la recherche de récepteurs hormonaux dans
maladie. la tumeur primitive.

Cas clinique 7 Suivi d’un cancer du sein traité

A Les manifestations mammaires ne sont probable- ceptible de reprendre normalement dans les mois
ment pas dues à une récidive, mais plutôt aux suivants. Il n’y a pas d’augmentation du risque
effets secondaires subaigus de la radiothérapie d’avortement spontané ou de malformation fœtale.
externe sur le sein opéré dont le drainage normal Une grossesse n’est contre-indiquée que chez les
a été modifié par l’évidemment axillaire. patientes ayant une évolution métastatique. On
Ils associent œdème, érythème, inconfort douloureux conseille habituellement un délai d’attente de deux à
et peuvent s’accompagner d’un léger œdème du trois ans après la fin du traitement et de n’entrepren-
membre supérieur homolatéral. Ces effets secondai- dre la grossesse qu’après réalisation d’un bilan
res, inconstants, surviennent quelques semaines ou d’extension.
mois après l’irradiation. L’allaitement avec le sein non traité est déconseillé
Si la mammographie et l’échographie du sein ne par la plupart des auteurs.
montrent pas d’image anormale, la patiente peut D L’œdème est dû à la stase lymphatique par blo-
être rassurée en lui indiquant que ces troubles peu- cage du flux lymphatique au niveau de l’évide-
vent persister jusqu’à fin de la première année. ment axillaire. Un œdème discret et transitoire est
L’œdème du bras est dû à la stase lymphatique fréquent au sixième mois et peut disparaître par
consécutive à l’évidement axillaire. développement de voies lymphatiques collatéra-
les. Le lymphœdème est traité par drainage
B Une contraception est indiquée pendant et après manuel lymphatique. En cas d’œdème persistant,
le traitement pendant une durée de trois à cinq le port d’un manchon élastique de contention est
ans. Les risques de la contraception hormonale recommandé entre les massages. Les patientes
après cancer du sein ne sont pas clairement éta- sont surveillées régulièrement par mesure com-
blis, la contraception médicamenteuse estropro- parative des circonférences avec le côté opposé.
gestative étant en principe contre-indiquée car les
œstrogènes sont considérés comme des facteurs E La surveillance des patientes traitées pour un
de croissance du tissu mammaire et des cancers cancer du sein a plusieurs objectifs :
expérimentaux. – détecter après chirurgie conservatrice une réci-
dive intramammaire curable par mammecto-
Une contraception mécanique par stérilet est adap-
mie radicale ;
tée et dans le cas particulier (nulliparité et souhait de
– faire le diagnostic précoce d’un éventuel cancer
grossesse) l’utilisation de préservatifs et de spermici-
controlatéral ;
des est encore mieux.
– faciliter la réadaptation fonctionnelle du mem-
Une contraception orale par les progestatifs est envi- bre supérieur et de l’épaule ;
sageable mais sa sécurité est moins bonne que celle – veiller à la réinsertion sociale ;
de la contraception estroprogestative. – traiter les complications iatrogènes.
C Les études cas-témoins n’ont pas mis en évi- En revanche, la recherche intensive et systématique
dence d’effets néfastes des grossesses ultérieures d’éventuelles métastases est un objectif très discuta-
sur le pronostic des patientes traitées pour cancer ble, car les études cliniques sur ce thème n’ont pas
du sein. confirmé que la détection et le traitement précoce
La chimiothérapie a un effet tératogène si elle est des métastases étaient susceptibles d’allonger la
administrée pendant les trois premiers mois de la durée globale de survie des malades.
grossesse, mais elle ne compromet pas ultérieure- Les recommandations actuelles préconisent un exa-
ment l’avenir gravidique. Le fonctionnement des men clinique régulier (semestriel pendant 5 ans et
ovaires, suspendu durant la chimiothérapie, est sus- annuel au-delà) et une mammographie annuelle.


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PRATIQUE

Cas clinique 8 Cancer du col utérin

A La bonne réponse est la 5. Il n’y a en effet aucun B La proposition 2 est exacte : cette patiente pré-
marqueur assez sensible et spécifique pour aider sente un cancer de stade Ia 1. Le stade Ia 1
au diagnostic ou à la surveillance d’un cancer du caractérise un carcinome invasif infraclinique dont
col de l’utérus, notamment dans une forme de la profondeur d’invasion est inférieure à 3 mm et
début. Le marqueur le plus significatif des cancers de moins de 7 mm d’extension en surface.
du col de l’utérus est le SCC, associé aux tumeurs C La réponse correcte est la 5. Le risque d’extension
des épithéliums de surface (VADS, cancer non à métastatique ganglionnaire est à ce stade situé
petites cellules du poumon, col de l’utérus). Il entre 0,2 et 1 % et le risque hématogène est de
n’est utile que pour la surveillance pendant et ce fait exceptionnel. Il n’est pas utile de faire un
après le traitement de patientes présentant des bilan d’extension à distance.
formes avancées de cancers du col utérin et chez D La bonne réponse est la 1. Les cancers micro-
lesquelles le marqueur SCC était à des taux éle- invasifs classés Ia 1 ont le même pronostic que
vés lors de l’évaluation préthérapeutique. Dans les cancers in situ (stade 0). Le risque d’atteinte
tous les autres cas, ce marqueur n’a aucune uti- ganglionnaire est inférieur à 1 % et le risque
lité. métastatique est nul.

Cas clinique 9 Cancer de l’ovaire

A L’incidence des cancers de l’ovaire est faible, esti- La confirmation de cette agrégation familiale par
mée en France à 8 pour 100 000 femmes. Cette l’établissement d’un arbre généalogique le plus ren-
incidence augmente avec l’âge (20 entre 30 et seigné et précis possible doit probablement débou-
50 ans, 50 au-delà de 50 ans). cher sur la recherche d’une mutation germinale
En revanche, le cancer de l’ovaire est une maladie portant sur le gène BRCA 1 ou 2. Le risque cumulé
grave, essentiellement en raison du caractère tardif de cancer de l’ovaire est alors susceptible d’atteindre
du diagnostic. Le cancer de l’ovaire est ainsi la troi- 60 % en cas de mutation patente. S’il n’y a pas de
sième cause de mortalité féminine par cancer en mutation germinale, il s’agit alors peut-être d’un syn-
France, derrière les cancers du sein et du côlon. drome familial simple.
B L’incidence du cancer croît avec l’âge, le pic de En revanche, la contraception semble avoir un effet
fréquence des adénocarcinomes communs étant protectif.
situé entre 60 et 70 ans. Les tumeurs frontières D Il n’y a pas pour la population standard de
(border line) ont un pic de fréquence entre 40 et mesure de prévention ou de diagnostic précoce.
60 ans. Les tumeurs germinales s’observent chez Dans le cas de syndrome familial et a fortiori de
les femmes jeunes entre 15 et 25 ans. mutation germinale avérée, il est alors proposé,
C L’observation clinique de cette patiente est en pour les patientes jeunes avec un projet de gros-
faveur d’un risque familial de cancers multiples sesse, un dosage régulier du CA 125 couplé à
sein-ovaire. En effet : une échographie endovaginale.
– la patiente elle-même a présenté un cancer du Pour ce qui est de la patiente décrite ici, le moindre
sein à l’âge de 37 ans ; doute doit conduire logiquement à une ovariectomie
– sa mère a présenté un cancer du sein ; bilatérale compte tenu de son âge.
– sa sœur est manifestement traitée pour un
cancer de l’ovaire.

Cas clinique 10 Cancer ORL

A – Apprécier la tolérance au traitement en éva- – Évaluer son état nutritionnel, son mode d’ali-
luant les effets secondaires pour les corriger et mentation, la quantité et la qualité des nutri-
permettre d’arriver au terme de la prise en ments ingérés, le poids, un éventuel pli cutané.
charge. – Évaluer la tolérance cutanée : rechercher et
– Évaluer l’état général du patient (échelle OMS). grader une radioépidermite.


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CAS CLINIQUES

– Effectuer un examen endobuccal et oropha- D Engagement d’une procédure de mise en congé


ryngé à la recherche d’une mucite. de longue maladie.
– Corriger par un traitement symptomatique les E • À court terme
effets secondaires.
– Détection précoce d’une poursuite évolutive de
– Évaluer l’efficacité du traitement : absence de la maladie initiale pouvant faire envisager une
majoration du volume tumoral initial, notam- chirurgie de deuxième intention.
ment ganglionnaire. – Restauration d’une alimentation suffisante par
– Répondre aux questions et à l’inquiétude du les voies naturelles permettant le retrait de la
patient. sonde d’alimentation.
– Apprécier la tolérance hématologique au – Appréciation de la qualité muqueuse et tégu-
CDDP, évaluer la fonction rénale, rechercher mentaire.
une éventuelle toxicité neurologique.
• À moyen et à long terme
B – Traitement antalgique pouvant aller jusqu’aux
– Détection précoce d’une récidive locale et/ou
opiacés.
régionale, accessoirement d’une évolution
– Traitement spécifique : bains de bouche à base métastatique.
de bicarbonate, anti-mycosiques éventuelle- – Diagnostic précoce d’un deuxième cancer épi-
ment associés à des anti-viraux. démiologiquement lié.
– Compléments alimentaires hypernutritifs sous – Évaluation et correction des effets secondaires
forme liquide. tardifs (hyposialie, état dentaire, fibrose cervi-
C Données du diagnostic : perte de poids supé- cale, œdème).
rieure à 10 % du poids initial, hypo-albuminémie – Répondre aux questions du patient, à ses
franche. angoisses et inquiétudes et l’aider dans sa réin-
Traitement : mise en place d’une alimentation par sertion socio-professionnelle.
voie entérale (sonde nasogastrique ou gastrosto- – Encourager le patient à envisager une désin-
mie), soins de la mucite, compléments alimentaires toxication alcoolo-tabagique.
par la sonde d’alimentation. F Examen clinique et ORL endoscopique.

Cas clinique 11 Cancer du sein métastatique

A Contexte pathologique : métastases osseuses E – Avis orthopédique en vue d’un enclouage


connues. préventif de la menace de fracture fémo-
Signes cliniques : majoration des douleurs, constipa- rale.
tion, état nauséeux, polydipsie et état confusionnel. – Radiothérapie antalgique et de consolidation
B Métastases cérébrales, autres perturbations sur la diaphyse enclouée et sur les autres sites
métaboliques (hyponatrémie). osseux métastatiques s’ils sont algiques.
C Bilan biologique : dosage du calcium sérique et des – Traitement antalgique aspécifique adapté.
protéines totales (calcul de la calcémie corrigée). – Biphosphonates en perfusion mensuelle.
D Hospitalisation immédiate : –Traitement spécifique de la maladie
– traitement de l’hypercalcémie : hyperhydrata- néoplasique : deuxième ligne hormonale ou
tion, corticoïdes IV, puis biphosphonates IV ; chimiothérapie.
– traitements symptomatiques : antalgiques, F Contact avec les travailleurs sociaux pour obtenir
antinauséeux. une aide à domicile.

Cas clinique 12 Cancer du côlon

A – Être en mesure de faire le diagnostic précoce réinsertion personnelle, familiale et socio-pro-


d’une récidive loco-régionale et/ou métastati- fessionnelle.
que. B Examen clinique :
– Assurer le diagnostic précoce d’une deuxième – interrogatoire à la recherche de symptômes
néoplasie colique, ou mieux, permettre une tels que des modifications du transit ;
prévention secondaire en traitant une anoma- – poids corporel ;
lie prénéoplasique comme un polype intestinal. – recherche d’une hépatomégalie, d’une ascite,
– Répondre aux questions et aux préoccupations d’une pleurésie, d’une adénopathie sus-
du patient et à ses inquiétudes. L’aider dans sa claviculaire ;


361 ◗
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PRATIQUE

– toucher rectal en sachant que seule l’endosco- constitue pas un standard. La réalisation d’une
pie permettra une évaluation correcte de échographie hépatique tous les 6 mois est cepen-
l’anastomose et du reste du conduit recto-coli- dant recommandée dans la perspective du dia-
que. gnostic précoce de localisations secondaires
C Il est fréquent de constater que les patients traités pouvant éventuellement bénéficier d’une chirur-
pour cancer colique font l’objet de dosages régu- gie d’exérèse.
liers de l’ACE au cours de leur suivi, mais la per- En fait, l’examen complémentaire de loin le plus utile
formance de ce dosage est très discutable. En est représenté par la coloscopie susceptible d’appor-
effet : ter le diagnostic de faits nouveaux curables :
– seules les formes tumorales s’accompagnant – récidive sur l’anastomose colo-colique redeva-
avant tout traitement d’une élévation de l’ACE
ble d’une nouvelle chirurgie d’exérèse ;
sont susceptibles de produire une réascension
du taux lors d’une évolution métastatique ; – mise en évidence précoce d’une formation
– le diagnostic précoce d’une récidive anastomo- adénomateuse nouvelle dont la résection stop-
tique échappe aux variations du taux d’ACE, pera l’évolution vers une néoplasie colique
comme d’ailleurs celui d’une deuxième néopla- invasive.
sie colorectale éventuelle. E L’apparition d’un syndrome métastatique hépati-
D La réalisation systématique d’une échographie que multifocal est habituellement une indication
hépatique ou d’une radiographie thoracique ne de chimiothérapie par voie générale. Il est cepen-
peut déboucher que sur le diagnostic d’une mala- dant possible d’envisager une chirurgie d’exérèse
die métastatique dans l’état actuel des choses sous la forme d’une hépatectomie partielle fonc-
sans perspectives réelles de curabilité. De ce fait, tion du nombre et de la topographie des lésions
le diagnostic anticipé d’une telle situation ne explorées par TDM ou mieux IRM hépatique.

Cas clinique 13 Cancer du sein non métastatique

A Plusieurs éléments justifient la prescription d’une – de rechercher un éventuel site infectieux


chimiothérapie adjuvante : clinique : interrogatoire, auscultation cardiopul-
– adénocarcinome de grade III ; monaire, porte d’entrée cutanée, urinaire, sto-
– tumeur de 35 mm (taille mesurée sur la pièce matologique, ORL, examen abdominal ;
opératoire donc probablement inférieure à la – d’évaluer la gravité du syndrome fébrile : TA,
taille de la tumeur palpée) ; pouls, fréquence respiratoire, état de vigilance ;
– plusieurs adénopathies (3) axillaires métastati- – de demander en urgence une numération-for-
ques. mule sanguine comportant la numération des
B L’achat d’une perruque donne lieu à un rembour- plaquettes, à la recherche d’une neutropénie
sement forfaitaire par l’assurance maladie, éven- ou d’une aplasie.
tuellement complété par une assurance mutuelle E Lors du suivi post-thérapeutique plusieurs objec-
personnelle. tifs sont poursuivis :
C Le protocole FEC100 comporte un risque de – diagnostic précoce d’une rechute
mauvaise tolérance digestive et notamment de intramammaire ;
nausées et de vomissements. – diagnostic précoce d’une néoplasie mammaire
Les moyens médicamenteux utilisables sont multi- controlatérale ;
ples, notamment : – diagnostic et correction des effets secondaires
– les corticoïdes associés ou non à des subaigus et chroniques du traitement : sclé-
anxiolytiques ; rœdème mammaire, limitation des mouve-
– les médicaments anti-émétiques vrais : ments de l’épaule, œdème du membre
- Primpéran, Vogalène, supérieur, douleurs pariéto-thoraciques et/ou
- anti-dopaminergiques sérotoninergiques brachiales, complications cardiaques après
(Zophren, Kytril), ces derniers n’étant utilisés administration d’anthracyclines ;
que si l’intolérance digestive a été manifeste – vérification de l’observance du traitement par
lors du premier cycle. anti-estrogènes et appréciation de la
D La survenue 10 jours après l’administration d’une tolérance ;
polychimiothérapie de type FEC100 d’un syn- – prise en charge des préoccupations, inquiétu-
drome fébrile doit faire rechercher systématique- des ou angoisses de la patiente ;
ment l’éventualité d’une neutropénie toxique. Il – aide à la réinsertion personnelle, familiale et
est alors nécessaire : socio-professionnelle.


362 ◗
24_Cas_Clinique Page 363 Vendredi, 31. janvier 2003 11:56 11

CAS CLINIQUES

F Outre l’examen clinique, le suivi repose essentiel- – Prescription de médicaments antidépresseurs


lement sur la réalisation d’une mammographie si nécessaire.
bilatérale annuelle couplée à une échographie. – Contact avec le médecin du travail de l’entre-
Les autres examens complémentaires ne sont uti- prise avec l’accord de la patiente à la recher-
les qu’en cas de symptômes. che d’une éventuelle adaptation du poste de
G – Appel à une évaluation spécialisée pouvant travail.
déboucher sur une prise en charge psychologi- – Si la reprise du travail s’avère effectivement
que personnalisée. impossible dans l’état, procédure de reclasse-
ment professionnel (COTOREP).

Cas clinique 14 Cancer prostatique métastatique

A Le diagnostic le plus probable est celui d’une À défaut une tomodensitométrie avec produit de
compression médullaire de niveau D10 en contraste sera réalisée.
raison : Par ailleurs : ionogramme, NFS-Pq, bilan hémostase.
– du syndrome métastatique osseux connu ; D – Décubitus strict.
– du syndrome radiculaire décrit par le patient ; – Corticoïdes IV à hautes doses.
– des éléments objectifs de l’examen physique – Antalgiques opiacés.
neurologique. – Indication d’une laminectomie décompressive
B Il s’agit d’une urgence justifiant une hospitalisa- en urgence, la récupération fonctionnelle
tion immédiate en transport allongé strict. La mise n’étant possible que si la libération mécanique
en place immédiate au domicile d’un traitement est effectuée dans les premières heures.
anti-œdémateux parentéral à fortes doses (corti- – Irradiation externe du segment vertébral après
coïdes) est recommandée. la laminectomie.
C L’examen le plus performant dans ces circonstan- – Modification de la prise en charge générale par
ces est une IRM vertébro-médullaire permettant une hormonothérapie différente ou une chi-
de confirmer le diagnostic, d’en vérifier la topo- miothérapie éventuelle.
graphie et d’en préciser l’étendue.

Cas clinique 15 Métastases cérébrales

A Le suivi est essentiellement clinique, les examens D – Examen neurologique complet à la recherche
complémentaires n’étant requis qu’en cas de fait d’un déficit sensitivo-moteur, d’un syndrome
nouveau susceptible de déboucher sur une atti- cérébelleux, examen des paires crâniennes.
tude active utile au patient : – Recherche d’une hypertension intracrânienne
– recherche de nouveaux signes fonctionnels (œdème papillaire du fond d’œil).
(dyspnée, douleurs osseuses, céphalées, toux, – Recherche d’autres signes de progression
hémoptysie etc..) relevant d’un traitement tumorale par l’examen clinique (hépatoméga-
symptomatique ; lie, pleurésie, adénopathie sus-claviculaire,
– recherche de troubles psychologiques etc.).
(angoisse, dépression, etc.) ;
– appréciation de l’état général (poids, index E TDM cérébrale sans puis avec produit de
OMS) ; contraste à la recherche d’un syndrome de masse
– recherche d’un syndrome tumoral clinique- unique ou le plus souvent multiple entouré d’un
ment accessible : aires ganglionnaires, abdo- œdème périlésionnel.
men, auscultation cardio-pulmonaire, examen F Hospitalisation nécessaire à la mise en place :
neurologique complet. – d’un traitement symptomatique anti-œdéma-
B Non, sauf s’il existe un fait nouveau clinique teux (corticoïdes +/- Mannitol) ;
entraînant une gêne symptomatique susceptible – d’un traitement antalgique et si besoin d’un
d’être corrigée. traitement anti-épileptique ;
C Crise comitiale en rapport avec une atteinte – d’une radiothérapie encéphalique décompres-
métastatique cérébrale. sive.


363 ◗
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INDEX

Index


A

ACE, 323
◗B

Basocellulaire Voir Carcinome


– et cancer colorectal, 125 Bence-Jones (protéine de –), 282
– et cancer médullaire de la thyroïde, 51 Bêta-HCG, 54, 96, 207, 322
Acide acétique (test à l’–), 75 Biopsie, 4
Acide folinique, 130 – cérébrale stéréotaxique, 59, 320
– cutanée pour mélanome, 112
Adénome hypophysaire, 69
– de la peau, 104
Adénopathie métastatique
– ganglionnaire, 266
– cervicale, 21
– ostéomédullaire, 176, 274
– inguinale, 110 – prostatique, 185
– lombo-aortique, 75, 94, 208 Botryomycome, 113
– médiastinale, 174 Bourneville (sclérose tubéreuse de –), et tumeur
– mésentérique, 124 cérébrale, 55
– pelvienne, 75 Bowen (maladie de –)
ADH (sécrétion inappropriée) Voir Schwartz- – de la peau, 103
Bartter (syndrome de –) BRCA
Aflatoxine et cancers du foie, 145 – et cancer du sein, 214
Alcoolisme – et tumeur de l’ovaire, 92
– et cancers de l’œsophage, 151 Breslow (index de –), 110
– et cancers du foie, 144 Bronches (cancers des –), 173
– et cancers ORL, 17 Buccopharyngectomie transmandibulaire, 32
Alpha-fœtoprotéine, 322 Burkitt (lymphome de –), 272, 275


– et cancer de l’ovaire, 96
– et cancer du foie, 147 C
– et tumeur du testicule, 207
Amputation rectale abdominopérinéale, 129 Cœlioscopie, 77
Amygdale (cancers de l’), 31 CA 125, 96
Anaplasique (carcinome) CA 15-3, 224, 323
– à petites cellules du poumon, 175 CA 19-9, 323
La photocopie non autorisée est un délit.

– de la thyroïde, 45 – et cancer de l’estomac, 138


Androgènes et cancer de la prostate, 183 – et cancer du pancréas, 164
Anthracyclines Canal anal (cancers du –), 169
– et cancers du sein, 228 Capsule péritumorale, 241
– et sarcomes, 242 Carcinoïde, syndrome paranéoplasique, 291
Carcinome
Anti-androgènes, 190
– basocellulaire, 103
Anti-aromatases, 229
– canalaire, 215
Aplasie médullaire, 300
– embryonnaire, 204
APUD (tumeurs du système –), 50 – intraépithélial du col de l’utérus, 73
Ary-épiglottique (repli) Voir Larynx – spinocellulaire, 27
Asbestose, 173 – verruqueux, 18, 35
MASSON.

Ascite, 95, 321 Castration, 190, 231


Aster et Coller (classification d’), 126 Cavité buccale (cancers de la –), 26
©

Astrocytome, 67 Cavum Voir Rhinopharynx


365 ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE

Chevassu (signe de –), 206 Cylindrome, 42


Chimiothérapie Cystadénocarcinome, de l’ovaire, 93
– complications infectieuses, 301 Cystoscopie, 201
– effets secondaires hématologiques, 300 Cytologie
Chlorure de vinyle, et tumeur du foie, 146 – cervicovaginale, 74
Cholangiocarcinome, 145 – mammaire, 220
Chondroblastome, 250 – par aspiration bronchique, 174


Chondrome, 249
Chondrosarcome, 255
Chordome, 54
D
Choriocarcinome
– de l’épiphyse, 68 Dépistage
– de l’ovaire, 93 – des cancers de la prostate, 184
– du testicule, 205 – du cancer colorectal, 123
CIN Voir Carcinome intraépithélial – du cancer du sein, 217
Cisplatine, 210 – utilisation des marqueurs tumoraux, 9
Classification Desmoïde (tumeur –), 243
– clinique TNM, 6 Diagnostic précoce, 3
– d’Aster et Coller, 126 Diéthylstilbestrol
– de Dukes, 126 – et cancer de la prostate, 191
Claude Bernard-Horner (syndrome de –), 154, – et cancer du vagin, 81
174 Dissémination Voir Métastases
Cloacogénique (carcinome –) du canal anal, 169 Douleur et radiothérapie, 324
Coagulation intravasculaire disséminée, 294 Doxorubicine, 179
Codman (éperons de –), 247 – et cancers de l’ovaire, 98
Cœlioscopie, 95, 143 Dubreuilh (mélanose de –), 110
Col de l’utérus (cancers du –), 71 Dukes (classification de –), 126
Colectomie, 128 Duodénopancréatectomie, 166
Côlon (cancers du –), 121 Dysgerminome
Coloscopie, 125 – de l’ovaire, 92
Colostomie – du testicule, 204


– de décharge, 129
– définitive, 129
Colpohystérectomie, 75, 82
E
Colposcopie, 74, 82
Comédocarcinome, 215 EBV Voir Epstein-Barr (virus d’–)
Compression médullaire, 308 Échelle
– métastatique, 61, 321 – de performance de Karnofski, 12
Conisation, 75, 79 Écho-endoscopie, 138, 155
Corde vocale Voir Larynx Échographie, 5
Cordectomie, 36 – abdomino-pelvienne, 95
Corticoïdes, 61, 297, 308 – endorectale, 125
– et HTIC, 60 – hépatique, 146, 320
– et syndrome cave supérieur, 294 – mammaire, 219
Craniopharyngiome, 54 – prostatique, 185
Crohn (maladie de –) et cancer colorectal, 123 – testiculaire, 207
Cryptorchidie, 204 Effets secondaires (second cancer), 340
Curiethérapie Endobrachyœsophage, 152
– de la langue mobile, 29 Endocardite verruqueuse paranéoplasique, 291
– des cancers de la lèvre, 28 Endomètre (cancer de l’–), 85
– des cancers de vessie, 203 Endoscopie
– des cancers du rectum, 129 – bronchique, 174
– des sarcomes, 242 – colorectale, 125
– du canal anal, 171, 172 – œsophagienne, 154
– du plancher buccal, 29 – ORL, 21, 35
– endocavitaire gynécologique, 77, 82, 89 Épendymome, 54, 62, 67
– endoluminale, 159 Épiphyse (tumeurs de l’), 54
– interstitielle en ORL, 25 Epstein-Barr (virus d’–)
– prostatique, 189 – et cancers du rhinopharynx, 17, 18


366 ◗
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INDEX

– et lymphome malin, 272 HER-2/neu, 232


– et maladie d’Hodgkin, 265 Herceptine, 232
Essais cliniques Voir Recherche clinique Histiocytose X Voir Granulome éosinophile
Esthésioneuroblastome, 40 HNPCC (syndrome), 123
Ethmoïde Voir Sinus de la face Hodgkin (maladie de –), 265
Évidement ganglionnaire Hormonothérapie
– axillaire, 227 – des cancers de l’endomètre, 89
– cervical triangulaire, 23, 29 – des cancers de la prostate, 189
– lombo-aortique, 209 – des cancers métastatiques du sein, 231
– pelvien, 76 – et cancer du sein, 229
– pour mélanome cutané, 115 HPV Voir Papillomavirus
Ewing (tumeur d’–), 250 Hyo-thyro-épiglottique (loge) Voir Larynx
Examen cytologique, 4 Hypercalcémie, 282
Exostose ostéogénique, 248 – métastatique osseuse, 296


– paranéoplasique, 288
F Hypertension intracrânienne, 55, 60, 307, 323
Hyperuricémie, 298
Hyponatrémie, 298
Fibroadénome, 221 – paranéoplasique, 288
Fibrome non ossifiant, 249
Hypopharynx (cancers de l’), 32
Fièvre, et neutropénie, 300
Hypophyse adénomes, 54
Fluoro-uracile, 107
Hystérectomie, 77, 88, 90, 97
– et cancer de l’estomac, 141
Hystéroscopie, 86
– et cancers colorectaux, 130


Foie
– tumeurs primitives du, 144 I
– tumeurs secondaires, 146
Fosses nasales (cancers des –), 39 Iléite après radiothérapie, 80, 130


Immunophénotype, 272
G Immunothérapie
– des mélanomes malins, 115
– et cancers du rein, 198
Gammapathie, 282
Information
Ganglion sentinelle (technique du –), 115, 320
– de la famille, 14
Gardner (syndrome de –), 123
– du patient, 14
Gastrectomie, 140
Insulinome, 163
Gastroscopie, 138
Interféron
Glandes salivaires (tumeurs des –), 41
– et cancer du rein, 198
Gleason (score de –), 183
– et lymphome malin, 278
Glioblastome, 54
Gliome, 53 – et mélanome malin, 115
Glossectomie, 29 – et myélome multiple, 284
Glotte Voir Larynx Interleukine
Grade tumoral, 8 – et cancer du rein, 199
La photocopie non autorisée est un délit.

Granulome éosinophile, 250 – et mélanome malin, 116


Granulosa (tumeur de la –), 93 Iode 123, 47
Grossesse Iode 125, 189
– après cancer du sein, 234 Iode 131, 47
– et cancer du sein, 230 – et cancers de la thyroïde, 322
Irish (ganglion d’–), 138


H

HCG, 322
IRM, 5
– cérébrale, 320
– des tumeurs osseuses, 246
– en ORL, 21
Helicobacter pylori et cancer de l’estomac, 136 – et cancers du col utérin, 76
Hémangiopéricytome, 239 – et sarcomes des parties molles, 238
MASSON.

Hémochromatose, et cancers du foie, 145 – et tumeurs du système nerveux central, 58


Hépatectomie, 149 – hépatique, 320
©

Hépatocarcinome, 144 – vertébromédullaire, 321


367 ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE

◗K

Karnofsky (échelle de –), 12



M

MALT (lymphomes), 276


Kérato-acanthome, 105 Mammographie, 219
Kératose cutanée actinique, 103 – de dépistage, 92, 217
Khaler (maladie de –) Voir Myélome multiple Manteau (lymphome du –), 276
Krükenberg (tumeur de –), 138 Marqueurs tumoraux
Kyste – ACE, 176, 227, 323
– anévrysmal de l’os, 250 – alpha-fœtoprotéine, 147, 207, 208, 322
– de l’ovaire, 94 – bêta-HCG, 54, 68, 93, 209, 322
– essentiel de l’os, 249 – CA 15-3, 233, 323
– mammaire, 221 – CA 19-9, 323


– diagnostic précoce, 9
– LDH, 209, 274
L Mastectomie, 228
Mastodynies, 223
Lambeau myocutané, 24 Mastopathie fibrokystique, 221
– de grand pectoral, 32 Mastose, 214
Lambert-Eaton (maladie de –), 288 Médiastinoscopie, 175
Langue Médullaire (carcinome – thyroïdien), 45
– cancers de la, 28 Médulloblastome, 54, 68
– cancers de la base de la, 31 Mélanome malin
Laryngectomie, 36 – des fosses nasales, 40
Laryngoscopie, 35 – du canal anal, 172
Larynx (cancers du –), 34 Ménétrier (maladie de –), 136
Laser Méningiome, 54
– et cancer de la vulve, 84 Méningite
– et cancer du col utérin, 79 – carcinomateuse, 308
LCR – septique, 302
– et compression médullaire, 309 Mésorectum, 129
– et hypertension intracrânienne, 56, 60, 308 Mésothéliome, 173
– et lymphome malin, 274 Méta-analyse, 331
– et marqueurs tumoraux, 54, 68 Métastases, 311
– et tumeurs du système nerveux central, 58 – cérébrales, 63, 307, 320
LDH – compression médullaire métastatique, 321
– et cancer du testicule, 207, 209 – cutanées, 101, 110, 321
– et lymphome malin, 274 – dissémination, 316
– et métastases hépatiques, 320 – en transit, 114
– et myélome multiple, 274 – ganglionnaires, 20, 87, 111, 320
Léiomyosarcome – hépatiques, 129, 320
– de l’estomac, 135 – oculaires, 310, 322
– de l’utérus, 90 – osseuses, 184, 194, 256, 318
– des membres, 239 – péritonéales, 321
Leucostase, 295 – pleurales, 306, 321
Lèvres (cancers des –), 26 – pulmonaires, 318
LH-RH (analogues de la –), 190, 229 – révélatrices, 138
Linite plastique, 136 – sans site tumoral primitif retrouvé, 320
Liposarcome, 239, 243, 244 – seuil de détection, 317
Lodwick (classification de –), 246 – surrénaliennes, 176
Lugol (test au –), 75 Méthotrexate
Lympho-épithéliome, 31, 38 – et cancer du sein, 228
Lymphographie, 75, 320 – et lymphome malin, 276
Lymphome malin – et ostéosarcome, 254
– maladie de Hodgkin, 265 Microcalcifications mammaires, 218
– non hodgkinien, 272 Mucite herpétique, 302
Lynch (syndrome de –), 122 Myasthenie paranéoplasique, 288
Lyse tumorale (syndrome de –), 297 Mycosis fungoïdes, 276


368 ◗
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INDEX

Myélome multiple, 281 – du sein, 215, 222


– et hyperviscosité sanguine, 290 – osseuse, 253
– et insuffisance rénale, 290 Pancréas (cancer du –), 162
Myélopaxes (tumeur à –), 256 Papillomavirus, 73, 83, 169


Patey (intervention de –), 228
Peau
N – mélanomes malins cutanés, 108
– métastases cutanées, 110, 322
Nævus, 109 Pelvectomie (cavité buccale), 29
Nausées, et hypertension intracrânienne, 55 Période de risque, 334
NEM Voir Néoplasies endocriniennes multiples Phototype, 102, 109
Néoplasies endocriniennes multiples, 50, 163, Plancher buccal (cancers du –), 28
288 Plasmocytome
Néphrectomie, 197 – et compression médullaire, 260
Neurinome, 63 – extra-osseux, 239, 284
Neuroblastome, 248 Plasmocytose, 282
Neutropénie après chimiothérapie, 300 Pleurésie néoplasique, 175
NSE, 176 Plummer-Vinson (syndrome de –), 29, 152


Pneumocystose, 303
Polyglobulie paranéoplasique, 195
O Polype intestinal, 123
Ponction
Odynophagie, 21 – pour examen cytologique, 4
Œsophage (cancer de l’–), 151, 303 – lombaire Voir LRC
Œsophagectomie, 158 Poumon (cancers du –), 173
Œstrogènes, 214 Proctectomie, 129
– et cancer de l’endomètre, 85 Professionnels (cancers –), 194
Okuda (classification d’–), 147 – cancers de la vessie, 200
Oligodendrogliome, 62, 68 – chez les travailleurs du bois, 40
Omentectomie, 97 Prostate (cancers de la –), 181
OMS, (échelle de performance de l’–), 12 Prostatectomie, 188
Oncogénétique PSA, 184, 322
– et cancer de l’ovaire, 92 Psammome, 93
– et cancer de la prostate, 183 Ptérygomaxillaire (fosse –), 38, 40
– et cancer du sein, 214 Pulpectomie, 190
– mélanome familial, 109 Pyramidectomie, 222


– polypose colique familiale, 122
Oncopsychologie (soins palliatifs), 323
Orchidectomie, 208 R
ORL (cancers) Voir Les cancers spécifiques
Oropharynx (cancers de l’–), 30 Radiocarcinogénèse, 102
Ortopantomographie, 21 Radiochirurgie cérébrale, 324
Os Radiothérapie
– tumeurs primitives bénignes, 248 – cérébrale palliative, 324
La photocopie non autorisée est un délit.

– tumeurs primitives des, 245 – décompressive médiastinale, 294


– tumeurs primitives malignes, 250 Récepteurs hormonaux, 226, 229
– tumeurs secondaires des, 256, 318 Recherche clinique, 327, 342
Ostéoblastome, 250 Récidive, 336, 339
Ostéochondrome, 249 Reclus (maladie de –), 223
Ostéome ostéoïde, 248 Rectite après radiothérapie, 80
Ostéopathie hypertrophiante pneumique, 174 Recto-colite hémorragique et cancer
Ostéosarcome, 252 colorectal, 123
Ovaire (tumeurs de l’–), 91 Rectum (cancers du –), 121


Réhabilitation, 341
Rein (tumeurs du –), 193
P Réinsertion, 341
MASSON.

Réseaux de soins cancérologiques, 15, 342


Paget (maladie de –) Résection transurétrale, 188
©

– de l’anus, 172 Rétinoblastome, 253


369 ◗
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CANCÉROLOGIE CLINIQUE


Rhabdomyosarcome, 239
– vaginal de l’enfant, 83 T
Rhinopharynx (cancers du –), 37

◗S

Sarcome
Tabagisme, 173
– et cancers du rein, 193
– et cancers ORL, 17, 34
Tamoxifène, 229
– d’Ewing, 251 Taxanes et cancers de l’ovaire, 98
– de l’estomac, 137 TBI (Total Body Irradiation), 277, 284
– de l’os, 252 Technétium Voir Scintigraphie
– de l’utérus, 90
TEP, 5, 318
– des parties molles, 237
– et tumeurs du système nerveux central, 58
– et métastases pulmonaires, 318
Scanner Voir tomodensitométrie Tératome
Schwartz-Bartter (syndrome de –), 174, 176, – de l’ovaire, 93
288, 290, 298 – du testicule, 204
Scintigraphie, 5 Testicule (tumeurs du –), 203
– osseuse, 186, 245, 251, 257, 319 Thécome, 93
– TEP, 318 Thyrocalcitonine, 50
Sclérodermiforme (carcinome cutané), 104 Thyroglobuline, 49, 322
Second cancer, 340 Thyroïdectomie, 47
– après chimiothérapie, 268 TNI (Total Nodal Irradiation), 277
– cutané, 106
Tomodensitométrie, 5
Segmentectomie, 227
– abdominale, 267
Sein (cancers du –), 213
Sein-ovaire (syndrome de risque génétique), 92 – en ORL, 21
Séminome – et tumeurs du système nerveux central, 58
– de l’épiphyse, 54 – osseuse, 246
– de l’ovaire, 92 – rétropéritonéale, 320
– testiculaire, 204 – thoracique, 175, 240, 267
Sertoli-Leydig (tumeur ovarienne de –), 93 Troisier (ganglion de –), 138
Sézary (syndrome de –), 277 Trousseau (phlébite migratrice de –), 164
Sinus Tumoral Angiogenesis Factor, 315
– de la face (cancers des –), 39 Tumorectomie mammaire, 227
– endodermique (tumeur du –), 205
Tylose palmoplantaire, 152
– piriforme, 32

◗◗◗ ◗
Soleil (exposition au –), 101, 109
SOR Voir Standards, options, recommandations U , V , X et Z
Spinocellulaire (carcinome cutané), 104
Stades (regroupement en –), 8
UCPO, 13, 331
Standards, options, recommandations, 332
Utérus
Sternberg (cellule de –), 265
Strontium 89, 191 – cancers de l’endomètre, 85
Suivi, 337 – cancers du col de l’–, 71
Survie – sarcomes de l’–, 90
– actuarielle, 334 Vagin (cancers du –), 81
– modalités d’expression des taux de, 333 Vermillectomie, 28
Syndrome cave supérieur, 294 Vésiculaire (carcinome – de la thyroïde), 47
Syndrome paranéoplasique, 287 Vessie (cancers de la –), 200
– connectivo-vasculaire, 291 Voile du palais (cancers du –), 31
– cutané, 289 Volume tumoral
– endocrinométabolique, 288
– expression selon le TNM, 6
– gastro-intestinal, 290
– influence sur le pronostic, 335
– hématologique, 290
– neuromusculaire, 288 Von Hippel-Lindau (maladie de –), 194
Système nerveux central Vulve (cancer de la –), 83
– lymphomes primitifs, 276 Vulvectomie, 84
– tumeurs, 53 Xeroderma pigmentosum, 102
– tumeurs primitives, 54 Zollinger-Ellison (syndrome de –), 163, 290


370 ◗

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