Fraude PDF
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Objectifs pédagogiques
Comprendre l’importance de la fraude dans le monde d’aujourd’hui.
Présenter les différentes définitions de la fraude.
Décrire le « Triangle de la fraude » et comprendre les raisons pour lesquel-
les ses trois éléments doivent coexister pour qu’il y ait fraude.
Définir les types de fraude et les facteurs qui induisent un risque de
fraude.
Définir la gouvernance d'entreprise, le management des risques et le
contrôle dans le contexte de la fraude.
Décrire les techniques de prévention, de dissuasion et de détection de la
fraude.
Comprendre le comportement des fraudeurs.
Décrire les responsabilités des auditeurs internes concernant la lutte
contre la fraude.
Comprendre l’évolution des responsabilités de l’audit interne, notam-
ment le recours à des spécialistes de la lutte contre la fraude.
8-1
ENCADRÉ 8-1 NORMES ET MODALITES PRATIQUES D’APPLICATION
PERTINENTES POUR LE CHAPITRE 8
1210 – Compétence
1220 – Conscience professionnelle
2060 – Rapports à la direction générale et au Conseil
2110 – Gouvernance d'entreprise
2120 – Management des risques
2210 – Objectifs de la mission
Le risque de fraude reste l’un des plus grands risques auxquels les
organisations contemporaines sont confrontées. Qu’il s’agisse d’une
fraude commise par un membre du personnel, de collusion entre
plusieurs membres du personnel ou d’une fraude commise par un
tiers, il est probable que non seulement l’organisation qui en est
victime subira une importante perte financière, mais également que
sa réputation sera fortement entachée. Dans de nombreux cas, la
fraude dans une société cotée entraîne rapidement une nette baisse
du cours de Bourse et de la capitalisation boursière et peut être le
signe avant-coureur de difficultés financières. Il semble effective-
ment exister une corrélation entre la fraude et les difficultés finan-
cières : la fraude peut engendrer des difficultés financières, mais
il est fréquent que celles-ci favorisent la fraude. La fraude ayant
de graves conséquences économiques, la direction et les organes
de direction s’attachent de plus en plus à élaborer des contrôles
et des programmes anti-fraude concernant l’activité principale, la
conformité aux règles et le marché sur lequel opère l’organisation.
Ce recentrage général sur la gouvernance d'entreprise est motivé
par la prise de conscience du fait qu’une information financière
frauduleuse peut rapidement conduire à la disparition d’une orga-
nisation.
8-3
ENCADRÉ 8-2
EXEMPLES DE FRAUDES DANS LE MONDE
Le CBI a affirmé 2 que les deux auditeurs, S. Gopala Krishnan et Srinivas Talluri, entre-temps
suspendus, la division indienne de PricewaterhouseCoopers (PwC), avaient reçu des banques
de Satyam des certificats de dépôt présentant « des écarts considérables par rapport aux chif-
fres fournis par la direction du groupe ». Les auditeurs ont néanmoins certifié les comptes
truqués. MM. Krishnan et Talluri sont aujourd’hui en prison à Hyderabad, ainsi que d’autres
inculpés.
En outre, le CBI affirme que ces auditeurs ont reçu pour les travaux d’audit qu’ils ont effec-
tués pour Satyam une rémunération correspondant à plusieurs fois le prix du marché. Depuis
janvier, un certain nombre d’investisseurs, furieux, exigent de savoir pourquoi les auditeurs
n’ont pas décelé une fraude aussi systématique, qui a ébranlé la confiance dans les autorités de
contrôle indiennes. Il est intéressant de noter qu’en Inde, la presse n’a encore jamais évoqué
l’existence d’un service d’audit interne chez Satyam Computer Services.
En France, la société Générale a annoncé en Janvier 2008, avoir été victime, de la part de l’un
de ses traders Jérôme Kerviel, d’une fraude sur des produits dérivés qui lui a valu une perte de
4,9 milliards d’euros. Le trader sera jugé en 2010 pour abus de confiance, faux et usage de faux,
ainsi qu’introduction frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé.
1
Le groupe Satyam emploie quelque 53 000 personnes et est coté en Bourse à Bombay,
Amsterdam et New York.
2
Les références au rapport du CBI portant sur Satyam ont été supprimées du bulletin d’infor-
mation en ligne envoyé aux membres de l’Institute of Chartered Accountants of India (avril
2009).
8-4
cabinet d’audit PWC réalise régulièrement des enquêtes sur la
fraude en France, en Europe et dans le reste du monde, dont la
dernière édition a été publiée en 2007 (enquête Française) et en
2009 (enquête mondiale).
Corruption
Les principaux enregistrements de ces études sont résumés Acte par lequel un
ci-après. individu exerce
une influence
Types de fraude. Selon l’étude de l’ACFE, les types de fraude indue (pot-de-vin,
les plus courants sont la corruption (27% des cas) et la factura- délit d’initié ou
tion frauduleuse (24%). Ce chapitre décrira plus loin les différen- conflit d’intérêts,
tes formes de fraude. La fraude dans les états financiers est la par exemple), lors
plus coûteuse : elle représente une perte médiane de 2 millions d’une transaction
commerciale,
de dollars.
afin d’en tirer un
Selon PWC (2009), le détournement d’actifs est la première caté- avantage pour
gorie en France (30%), suivi par la contrefaçon (15%). Viennent lui-même ou pour
quelqu’un d’autre,
ensuite les fraudes comptables (10%) et la corruption (3%).
en violation de
ses obligations
Entreprises concernées. Selon l’étude PWC, la fraude touche vis-à-vis de son
toutes les catégories d’entreprises mais plus l’entreprise est employeur ou
grande, plus les risques de fraudes sont importants ? C’est la des droits de
contrepartie inévitable d’une organisation plus complexe, avec quelqu’un d’autre.
des processus et des systèmes interconnectés, où les failles
potentiellement exploitables par des fraudeurs sont naturelle-
ment plus nombreuses.
Aucun secteur n’est épargné par la fraude, bien que certains
secteurs semblent plus exposés que d’autres. Dans le monde
57% des entreprises appartenant aux secteurs de l’assurance et
de la distribution et de la consommation ont déclaré avoir été
victimes de fraudes au cours des deux dernières années contre
seulement 27% dans le secteur pharmaceutiques. C’est égale-
ment la secteur de l’assurance qui supporte le coût des fraudes
aérées le plus élevé, avec un coût total moyen par entreprise sur
les deux dernières années qui s’élève à 3,2 millions d’euros, à
comparer à une moyenne mondiale, tous secteurs.
8-6
selon l’étude mondiale PWC (2009, p.11), le poids des dispositifs Fraude
de contrôle et de prévention (audits inopinés, dispositifs d’alerte Tout acte illégal
éthique, programme de sensibilisation à la fraude, audit interne caractérisé par
ou d’un département d’enquête sur la fraude,…) s’est accru la tromperie, la
puisque, en 2009, ceux-ci permettent de détecter quasiment dissimulation
une fraude sur deux dans le monde (au total 46% contre 34% ou la violation
en 2007). de la confiance.
Les fraudes sont
Il est ici essentiel de souligner qu’aucune organisation n’est à l’abri perpétrées par
des personnes et
de la fraude. Celle-ci peut toucher aussi bien les grandes organi-
des organisations
sations que les petites, et n’importe quel pays et secteur d’activité. afin d’obtenir
Tant que les organisations se composent d’êtres humains avec leurs de l’argent, des
fragilités inhérentes, le risque de fraude est réel. Des études récen- biens ou des
tes montrent par ailleurs que le risque est accru en contexte de crise services, d’éviter
car les facteurs de pression sur les salariés sont plus nombreux et un paiement ou la
les opportunités plus grandes (réductions des effectifs, attention du perte de services
management absorbée sur la survie de l’entreprise,...).1 2 ou de s’assurer
un avantage
personnel ou
DÉFINITIONS DE LA FRAUDE commercial.
ENCADRÉ 8-3
UNE DEFINITION QUI FAIT AUTORITE
La fraude est un terme juridique et nécessite souvent une détermination juridique des faits. La
définition large qu’en donne le Black’s Law Dictionary est donc peut-être la plus pertinente dans
ce contexte :
“[Fraud is] a generic term, embracing all multifarious means which human ingenuity can devise,
and which are resorted to by one individual to get advantage over another by false suggestions or
by suppression of truth, and includes all surprise, trick, cunning, dissembling, and any unfair way by
which another is cheated … Elements of a cause of action for “fraud” include false representation
Anglais
of a present or past fact made by defendant, action in reliance thereupon by plaintiff, and damage
resulting to plaintiff from such misrepresentation.”
8-7
teurs, ainsi que les professionnels de la lutte contre la fraude, ont
cherché à définir la fraude et à délimiter les rôles et les responsabi-
lités de leurs membres respectifs. . En 2008, l’Institute of Internal
Auditors (IIA), l’American Institute of Certified Public Accountants
(AICPA) et l’Association of Certified Fraud Examiners (ACFE) ont
élaboré ensemble une note d’orientation intitulée Business Risk
of Fraud: A Practical Guide (le Fraud Guide). Cette publication
énonce cinq grands principes pour la gestion du risque de fraude
et recommande des méthodes permettant au Conseil, à la direction
générale et aux auditeurs internes de lutter contre la fraude dans
l’entreprise. Elle est le fruit de deux années de travaux d’un groupe
d’action, qui a rassemblé plus de 20 spécialistes de l’identification,
de la réduction et de l’examen des risques de fraude. Cette note
d’orientation contient la définition suivante :
Une fraude est tout acte intentionnel ou toute omission inten-
tionnelle ayant pour but de tromper autrui, et qui entraîne
une perte pour la victime et/ou un avantage pour le frau-
deur 3 .
ENCADRÉ 8-4
DIFFERENTES DEFINITIONS DE LA FRAUDE
8-8
La définition retenue par l’IIA est probablement la plus large :
« Tout acte illégal caractérisé par la tromperie, la dissimula-
tion ou la violation de la confiance ». Cette définition cadre
avec le rôle étendu de l’audit interne au sein d’une organisa-
tion. La définition de l’IIA énumère ensuite les catégories de
fraudeurs et les avantages potentiels que leurs agissements
ENCADRÉ 8-5
LES AUDITEURS EXTERNES ET LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE
AUX ÉTATS-UNIS
Sociétés cotées aux États-Unis – Le Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB)
publie des normes qui contiennent des recommandations pour l’émission d’avis sur les états
financiers des sociétés cotées aux États-Unis. En ce qui concerne la fraude, ces normes indi-
quent que l’auditeur a la responsabilité de planifier et de réaliser l’audit de manière à obtenir
une assurance raisonnable quant à l’absence, dans les états financiers, d’anomalies importan-
tes dues à une erreur ou à une fraude (AU Section 110.02, Responsibilities and Functions of the
Independent Auditor). Les normes du PCAOB traitent plus spécifiquement de la fraude dans l’AU
Section 316, Consideration of Fraud in a Financial Statement Audit, qui se fonde sur la norme
Statement of Auditing Standard (SAS) 99. Voir ci-dessous pour les recommandations spécifi-
ques énoncés dans la norme SAS 99.
Sociétés non cotées aux États-Unis – La compétence du PCAOB se limite aux audits réalisés
pour des sociétés cotées aux États-Unis. Les sociétés non cotées continuent de se conformer
aux normes de l’AICPA. La norme SAS 99, Consideration of Fraud in a Financial Statement Audit,
indique que :
« Les auditeurs [externes] doivent planifier et mener des audits pour obtenir une assu-
rance raisonnable quant à l’absence d’anomalies graves, imputables à une erreur ou à
une fraude, dans les états financiers ». Plus précisément, la norme SAS 99 formule les
recommandations suivantes pour les auditeurs (externes) aux États-Unis :
Se recentrer sur la sensibilisation au problème de la fraude et sur le scepticisme professionnel
Encourager la discussion entre les membres de l’équipe chargée de la mission d’audit
(« brainstorming »)
Collecter les informations nécessaires à l’identification du risque d’anomalies graves impu-
tables à une fraude
Synthétiser les éléments de fraude identifiés et ce que l’auditeur prévoit de faire
Imposer des procédures d’audit empêchant la direction de passer outre les contrôles inter-
nes
Évaluer les résultats de l’audit Présentation
Signaler les cas de fraude à la direction, au comité d’audit et à d’autres intervenants d’états
Sociétés non basées aux États-Unis – L’International Auditing and Assurance Standards Board financiers
(IASB) a publié la norme International Standard on Auditing (ISA) 240, The Auditor’s Responsi- frauduleux
bility Relating to Fraud in an Audit of Financial Statements, qui indique que « lorsque l’auditeur
planifie et effectue l’audit afin de ramener le risque d’audit à un niveau acceptable, il doit pren- Actes comprenant
dre en compte les risques d’anomalies graves, dues à une fraude, dans les états financiers ». La la falsification des
norme ISA 240 formule des recommandations supplémentaires analogues à celles de la norme
états financiers
SAS 99 ci-dessus.
d’une organisation
En France : la norme d’exercice professionnel NEP 240, adaptatoin de la norme ISA 240 (cf. ci (par exemple une
dessus) a été publié au Journal officiel du 3 Mai 2007. surestimation du
chiffre d’affaires
Elle vise les fraudes susceptible d’entraîner des anomalies significatives dans les comptes, à
savoir les actes intentionnels portant atteinte à l’image fidèle des comptes (...) et le détourne-
ou une sous-
ment d’actifs. En plus des dispositions prévues aux normes ISA, elle inclut aussi deux spécifici- estimation du
tés légales propres au contexte frausers : l’obligation pour les auditeurs internes de révéler au passif et des
procureur de la république tout fait délictueux et de déclarer à la justice (via le service TRACFIN) charges).
tout soupçon de sommes provenant d’activités illégales, de corruption, ou de terrorisme.
8-9
Exemples de peuvent leur permettre d’obtenir. Là encore, il apparaît clai-
détournement rement que l’IIA a une conception large du rôle des auditeurs
d’actifs internes dans une organisation. Nombre d’aspects de cette
• Vol
définition seront examinés plus loin dans ce chapitre.
• Abus de biens
sociaux La définition proposée par l’AICPA est beaucoup plus étroite, ce qui
• Malversation n’est pas surprenant. Elle est spécifiquement axée sur les anoma-
lies qui résultent d’une information financière frauduleuse ou d’un
détournement d’actifs. Étant donné que les auditeurs externes
se concentrent sur l’audit des états financiers, qui est désormais
étendu, à l’audit du contrôle interne portant sur l’information
financière, il n’est pas surprenant que l’AICPA débatte du concept
de fraude en évaluant sa relation avec les états financiers d’une
organisation et ses effets sur ses comptes. L’encadré 8-5 énumère
les normes auxquelles les auditeurs externes doivent se référer.
La définition retenue par l’ACFE est axée sur la fraude dans l’entre-
prise, c’est-à-dire sur le lieu de travail. Ce type de fraude recouvre
divers agissements répréhensibles de salariés, de cadres ou de diri-
geants. Il peut s’agir d’un simple vol dans la caisse ou d’une fraude
8-10
complexe telle que la présentation d’états financiers mensongers.
Quatre éléments semblent caractériser l’incidence d’une fraude
dans les entreprises.
Un tel acte :
Est clandestin c’est-à-dire secret.
Constitue un manquement aux obligations du fraudeur vis-à-vis
de l’organisation qui en est la victime.
Est commis dans le but de procurer un avantage financier, direct
ou indirect, au fraudeur.
Représente pour l’organisation qui emploie le fraudeur un coût
en termes de perte d’actifs, de recettes ou de réserves.
Source : Managing the Business Risk of Fraud: A Practical Guide, IIA, AICPA et ACFE, p. 24.
8-11
d’actifs d’une organisation (par exemple, l’écrémage des recettes, le
vol dans les stocks ou une fraude portant sur la paie) ; et la corrup-
tion, qui consiste, pour les fraudeurs, à exercer une influence indue
lors d’une transaction commerciale afin d’en tirer un avantage pour
eux-mêmes ou quelqu’un d’autre (par exemple, pots-de-vin, délits
d’initié ou conflits d’intérêts), en violation de leurs obligations vis-à-
vis de leur employeur ou des droits de quelqu’un d’autre. L’encadré
8-6 présente ce système de classification.
Pe
rce
lle
pt
ne
io
ion
nd
r at
’un
on
eo
at i
pp
fic
or
sti
tu
Ju
nit
é
Perception d’un besoin (d’une pression)
Source : Cressey, D.R., Other People’s Money: A Study in the Social Psychology of Embezzlement (Glencoe, Illinois,
The Free Press, 1986).
8-15
Traitement des être utile de recueillir des informations auprès des instances de
risques réglementation extérieures, du secteur, des organismes qui formu-
Mesure, ou
lent des recommandations et des associations professionnelles. Le
ensemble de triangle de la fraude décrit dans la section précédente peut guider
mesures, que la le brainstorming portant sur les risques de fraude, et permettre
direction prend notamment de définir les opportunités pouvant donner naissance
pour déployer à ces scénarios. Ainsi, la prise en compte des mesures d’incitation
la stratégie de et des pressions actuelles, ou la connaissance des failles connues
management des de l’accès aux systèmes, peut faciliter l’élaboration d’un scénario de
risques définie. risque de fraude (par exemple, l’encadrement accède aux entrées
Le traitement
des journaux et pour les modifier pour surévaluer le bénéfice et,
des risques
consiste à éviter, ainsi, obtenir une prime de résultat).
réduire, partager
ou accepter les Après avoir identifié les risques de fraude potentiels, il faut évaluer
risques. l’impact et la probabilité de chacun. Il est essentiel de prendre en
compte tous les effets possibles des fraudes, et non leurs seules
conséquences financières. Si la fraude est fréquente, elle peut enta-
cher la réputation d’une organisation ou enfreindre la législation,
même si elle n’entraîne pas toujours des pertes financières impor-
tantes. L’évaluation des risques de fraude constitue une étape
cruciale, car elle permet à l’organisation de déterminer le niveau
des ressources à consacrer à la prévention ou à la détection des
scénarios de fraude identifiés.
Enfin, une organisation doit décider de ce qui doit être fait dans
les différents scénarios de fraude, c’est-à-dire comment traiter les
risques de fraude. Comme pour le traitement des risques décrit au
chapitre 4, les organisations peuvent faire face au risque de fraude
de plusieurs façons : en évitant ce risque, en le partageant, en le
réduisant, en l’acceptant ou en combinant plusieurs de ces options.
Il est fondamental de déterminer une option offrant un bon rapport
coût-bénéfice, qui réduit le risque à un niveau acceptable en tenant
compte de toutes les conséquences possibles.
8-16
dement une fraude déjà commise ou en cours. Ces contrôles peuvent
dissuader la fraude, mais ils ne sont pas conçus pour l’empêcher. Ils
donnent en fait des informations montrant qu’une fraude a eu lieu,
ce qui peut être utile dans le cadre d’une enquête.
Détection de la
Notification d’une fraude, enquête et mesures mises en œuvre fraude
(Principe 5) D’après le Rapport
de l’AFCE, il est
Comme indiqué plus haut dans ce chapitre, le rapport de l’AFCE bien plus probable
indique que les fraudes sont davantage susceptibles d’être détec- de détecter
tées grâce à un informateur que par les audits, les contrôles ou la fraude en
entreprise grâce
d’autres moyens. Il est par conséquent important qu’une organi-
à un informateur
sation dispose d’un système de notification pour faciliter et encou- que par les audits,
rager le signalement de cas de fraude potentiels. Par exemple, un les contrôles ou
dispositif d’alerte professionnelle ou éthique (« whistleblowing », d’autres moyens.
non autorisé en France) permettant de dénoncer des fraudes poten-
tielles constitue un moyen de notification rapide, facilite la collecte
des informations nécessaires à une éventuelle enquête et permet
à l’informateur de garder l’anonymat s’il le souhaite. Ce système
peut être géré par un membre de l’encadrement. La législation
peut également imposer l’instauration d’un mécanisme permettant
d’informer directement le Conseil dans certaines circonstances, si
l’informateur pense que la direction générale risque d’être impli-
quée dans la fraude en question. La légalité de ce type de dispositifs
est encadrée dans de nombreux pays, dont la France (cf. encadré
8-8).
8-17
ENCADRÉ 8-8 La transposition des dispositifs d’alerte éthique
(« whistleblowing ») en France
Le déclenchement d’alerte est le geste accompli par un individu qui est témoin, dans son acti-
vité professionnelle, d’actes illicites et qui, par civisme, décide d’alerter les autorités ayant le
pouvoir d’y mettre fin. Mes anglo-saxons désignent ce geste par l’expression whistleblowing, ce
qui signifie littéralement « donner un coup de sifflet ».
Un tel dispositif a été rendu obligatoire aux États-Unis par la Sarbanes-Oxley Act, pris en 2002.
Il impose aux entreprises cotées en Bourse à New York, et à toutes leurs filiales même étran-
gères, de mettre en place un système de déclenchement d’alerte. Certaines entreprises fran-
çaises ont donc été concernées par ricochet. La procédure est également prévue par certaines
conventions internationales. Par exemple, la Convention des Nations unies contre la corruption
du 31 octobre 2003 (article 33).
Concernant le droit français, ces mécanismes ne sont « ni prévus ni autorisés par le droit du
travail » selon la CNIL. Cependant, un certain nombre de règles de droit français peuvent s’en
rapprocher : obligation faite de tous les fonctionnaires de dénoncer les infractions dont ils ont
connaissance dans le cadre de leur activité ; formes d’alerte prévues par le code du travail en
cas de harcèlement ou de discrimination devant la Haute autorité de lutte contre les discrimi-
nations et pour l’Égalité (HALDE) formes d’alerte prévues dans le domaine bancaire, déclaration
de soupçon de Tracfin (cf. encadré 8-5),… De plus, la loi di 13 Novembre 2007, protège les
salariés qui dénoncent une irrégularité à leur employeur ou à la justice (article L.1161-1 du code
du travail) contre les mesures de rétorsion.
La CNIL, gardienne de la loi « informatique et libertés », était dans un premier temps oppo-
sée aux processus d’alerte éthique dans la mesure où ils instituaient « un système organisé
de délation professionnelle » et risquaient de multiplier les ces de dénonciation calomnieuse.
Néanmoins, elle revint sur sa déclaration en 2005 afin de permettre la mise en conformité
de certaines entreprises françaises concernées avec le Sabanes Oxley Act. Elle adopta ainsi
le 10 novembre 2005, un document d’orientation destiné à encadrer les procédures d’alerte
professionnelle (document d’orientation du 10 novembre 2005) et un régime d’autorité unique
le 8 décembre 2005 (article 25-I.4° de la loi du 6 janvier 1978). Ces dispositifs sont donc envisa-
geables, sous respect d’un certain nombre de conditions destinées à limiter les dénonciations
abusives, dont les principales (pour une présentation complète, voir le site de la CNIL : www.
cnil.fr) sont :
à la porté du dispositif : c’est un dispositif complémentaire, autorisé seulement en cas d’obli-
gation légale de les mettre en place ou du fait de l’existence d’un intérêt légitime du respon-
sable de traitement ;
à son caractère facultatif : il ne fait l’objet que d’une incitation, aucune sanction ne peut être
prise en contre le salarié ;
aux informations obligatoires sur le dispositif : sur les catégories de personnes concernées,
l’identité du responsable, le domaine concerné, les sanctions attachées à son utilisation
abusive ;
au respect des droits d’accès et de rectification : la personne mise en cause doit être infor-
mée de l’enregistrement des données la concernant.
au traitement confidentiel des données : les informations recueillies ne peuvent faire l’objet
d’une communication que si l’enquête l’exige. Si les données ont confiées à un prestataire,
celui-ci doit s’engager à assurer cette confidentialité ;
à la coopération internationale : tout transfert de données personnelles ers un pays hors
Union européenne obéit aux règles particulières du transfert international des données ;
a la limite dans le temps de la conservation des données personnel : les données en lien avec
une alerte non fondée doivent être détruites.
En cas de non respect de ces règles, l’auteur peut être poursuivi pour dénonciation calom-
nieuse, délit réprimé à l’article 226-10 du code pénal, ou sur le fondement d’un manquement
au devoir de loyauté que le salarié doit à son entreprise. Il n’est pas exclu que la responsabilité
pénale de l’entreprise soit recherchée pour complicité dans la mesure où c’est elle qui aurait mis
à disposition les moyens de commettre cette infraction.
La cour de cassation a admis dans un arrêt du 12 juillet 2006 que la dénonciation d’une
infraction par un salarié ne s’opposait pas à son devoir de loyauté si les faits incriminés
étaient exacts ou si le salarié était de bonne foi lorsque les faits se seraient aérés inexacts.
Pour autant, dans cet arrêt, la dénonciation a été faite auprès du Procureur de la Républi-
que et il n’y a pas encore de jurisprudence sur les procédures de whistleblowing.
8-18
une fraude doivent pouvoir se défendre rapidement, et c’est même
un droit dans de nombreux pays. Deuxièmement, les organisations
doivent déterminer les causes à l’origine d’une fraude, afin que des
actions correctives (par exemple, une amélioration des contrôles)
puissent être mises en œuvre. Enfin, l’encadrement doit veiller de
façon homogène à la discipline du personnel, afin d’éviter toute
décision perçue comme du favoritisme ou des mesures disciplinai-
res arbitraires. La direction peut ainsi donner le ton en montrant
clairement que la fraude ne sera pas tolérée, et qu’il y sera mis un
terme de manière rapide et cohérente.
Les principes énoncés dans cette section revêtent une telle impor-
tance pour l’instauration et l’administration d’un programme effi-
cace de gestion de la fraude que chacun d’eux sera analysé plus en
détail dans les sections suivantes. Le lecteur pourra ainsi mieux
comprendre comment suivre les étapes nécessaires pour appliquer
ces principes.
Ou
Environnement
Ces éléments montrent l’importance d’une culture d’entreprise de contrôle).
permettant au Conseil d’obtenir une assurance sur le comporte-
ment éthique de l’encadrement et du personnel. Le Fraud Guide
indique ensuite que « les codes de déontologie efficaces peuvent
servir à la prévention, à la détection et à la dissuasion des actes
frauduleux et délictueux. Si l’organisation traite son personnel,
8-19
ses clients, ses fournisseurs et ses partenaires selon des principes
éthiques, tous en bénéficieront. Un code de déontologie permet de
créer un environnement dans lequel la prise de bonnes décisions
est implicite. » 7
Rôles et responsabilités
8-23
organisation à l’autre, mais l’évaluation des risques fait générale-
ment intervenir les personnes suivantes :
Le personnel du service comptable et financier, qui pourra iden-
tifier des scénarios de fraude portant sur l’information finan-
cière et sur la conservation des actifs ;
Le personnel des services non financiers, qui peut valoriser sa
connaissance des opérations au jour le jour, des relations avec
les clients et les fournisseurs, ainsi que sa connaissance des
autres scénarios de fraude possibles dans le secteur concerné ;
Le personnel du service juridique, ainsi que celui en charge
de la conformité, qui peut identifier des scénarios susceptibles
d’entraîner une responsabilité au pénal, au civil ou réglemen-
taire en cas de fraude ou de faute ;
Le personnel chargé du management des risques, qui peut
identifier des scénarios de fraude sur le marché ou de fraudes à
l’assurance, et veiller à ce que l’évaluation des risques de fraude
soit intégrée dans l’évaluation globale des risques de l’entre-
prise ;
Les auditeurs internes, qui connaissent bien les scénarios et
contrôles des risques de fraude au sens large ;
D’autres intervenants, internes ou externes, qui peuvent appor-
ter des compétences supplémentaires.
8-24
Incitations, pressions et opportunités – Les motivations
des fraudeurs peuvent être multiples. Lors d’un brainstorming
portant sur des scénarios de risques de fraude, la première diffi-
culté est d’identifier le plus grand nombre possible de ces moti-
vations. Comme l’a montré la section consacrée au Triangle de la
fraude, une fraude est commise lorsqu’il existe une incitation ou
une pression, qu’une opportunité se présente et que le fraudeur
peut avancer une justification rationnelle pour son comporte-
ment. Il n’est pas fréquent d’effectuer un brainstorming sur les
scénarios de justification, étant donné qu’il faut d’abord exami-
ner les deux autres composantes du Triangle de la fraude et que
la justification peut être propre à un individu. Néanmoins, en se
concentrant sur les différentes incitations, pressions et oppor-
tunités potentielles, on peut identifier des scénarios auxquels
l’organisation peut être confrontée. Parmi les incitations peuvent
figurer l’argent ou d’autres gains susceptibles de donner à des
individus une raison de ne pas se comporter normalement.
De même, des individus peuvent être amenés à agir différem-
ment pour se soustraire à des pressions. Les opportunités sont
les possibilités de commettre une fraude sans que celle-ci soit
éventuellement détectée (par exemple lorsque les contrôles sont
faibles). On peut probablement définir la plupart des scénarios
de fraude en procédant à un brainstorming sur les incitations,
pressions et opportunités potentielles.
Risque de contournement des contrôles par la direction –
Même lorsqu’un système solide de contrôle interne est en place,
le risque de contournement des contrôles ne peut être totalement
exclu. Il peut arriver que la direction, à laquelle on fait généra-
lement « confiance » pour prendre de bonnes décisions, passe
outre les contrôles car, le plus souvent, les autres membres du
personnel ne contestent pas ses décisions et supposent qu’elle
agit pour le bien de l’organisation. De nombreux cas de contour-
nement des contrôles par la direction dans le but de faciliter
la présentation d’états financiers falsifiés ou le détournement
d’actifs ont été rapportés. Le brainstorming des scénarios de
contournement des contrôles par la direction permet d’identifier
des scénarios différents de ceux obtenus avec le brainstorming
portant sur les incitations, pressions et opportunités.
Classification des risques de fraude – Il existe des risques
de fraude « universels », qui concernent toutes les organisa-
tions, et d’autres propres à certains secteurs ou pays. Bien que
le brainstorming permette d’identifier la plupart de ces risques,
ces scénarios sont parfois déjà documentés et disponibles auprès
d’autres sources : organisations sectorielles, associations profes-
sionnelles, cabinets-conseil, etc. L’AFCE a établi une classifi-
cation des risques de fraude en entreprise. Cette classification
peut aider les organisations à procéder au brainstorming sur
les scénarios de risque de fraude. Elle est présentée dans l’enca-
dré 8-6.
8-25
Information financière frauduleuse – Les éléments décrits
ci-dessus doivent permettre d’identifier la plupart des risques
de fraude au sein d’une organisation. Il est néanmoins utile de
prendre également en compte des types de scénarios spécifiques,
afin de déterminer si d’autres scénarios pourraient se produire.
Les scénarios d’information financière frauduleuse suscitent
Exemples de
beaucoup de préoccupations depuis quelques années, au point
non-respect de la
qu’ils ont donné lieu à une législation dans de nombreux pays.
réglementation
Ces textes visent à réduire la probabilité de fraudes graves dans
ou de la
les états financiers. C’est un point qui mérite un brainstorming
législation
avec les auditeurs externes, dans la mesure où ceux-ci sont
Conflit d’intérêts, susceptibles de travailler sur ce type de scénarios.
délit d’initiés,
vol de secrets Détournement d’actifs – Un autre scénario spécifique est le
commerciaux risque de détournement d’actifs. Il faut tout d’abord identifier
de concurrents, les actifs de l’organisation qui pourraient être convoités par des
pratiques membres du personnel ou par des tiers (fournisseurs ou clients,
anticoncurren par exemple). On peut ensuite définir les scénarios qui permet-
tielles, infraction traient le détournement de ces actifs. Il importe de se souvenir
au droit
que les mesures de protection physique ne sont pas toujours suffi-
environnemental,
infraction à la santes. Ce type de fraude concerne forcément des actifs corpo-
réglementation rels, tels que les liquidités, le stock, les matières premières et le
sur les échanges, matériel, mais aussi, éventuellement, des actifs incorporels, par
infractions exemple des données confidentielles relatives au personnel ou à
douanières à la clientèle, ou des plans et dessins commerciaux. Les systèmes
l’import/export. d’information jouent donc un rôle important dans la réduction
de certains risques de détournement d’actifs.
Corruption – Dans le Fraud Guide, la corruption « est défi-
nie, du point de vue opérationnel, comme l’utilisation abusive
d’un pouvoir dans le but d’en tirer un avantage privé 9 ». La
corruption consiste, par exemple, à verser des pots-de-vin à des
fonctionnaires étrangers ou aider et encourager d’autres organi-
sations à frauder. Le temps consacré au brainstorming sur les
scénarios de corruption dépend du secteur d’activité de l’organi-
sation, ainsi que des pays dans lesquels celle-ci opère, mais il ne
faut pas négliger ces scénarios.
Autres risques de fraude – Il peut exister d’autres risques
de fraude potentiels. Le Fraud Guide cite à ce propos les infrac-
tions à la réglementation ou à la législation, telles que « […] les
conflits d’intérêts, les délits d’initié, le vol de secrets commer-
ciaux de concurrents, les pratiques anticoncurrentielles, les
infractions au droit environnemental, les infractions à la
réglementation sur les échanges et les infractions douanières
à l’import/ export 10 ». Ils peuvent aussi nuire à la réputation
de l’organisation. Nombre des risques déjà identifiés peuvent
avoir un impact sur la réputation, mais il peut aussi en exister
d’autres.
8-27
ni même nécessaire, de quantifier précisément cette probabilité.
C’est pourquoi il est plus fréquent de recourir à des apprécia-
tions générales : impact probable, possible ou peu probable, par
exemple.
8-28
Si l’occurrence d’un risque est acceptable, l’encadrement peut
décider de tolérer ce risque à son niveau actuel et de ne pas
déployer d’efforts particuliers pour le gérer.
8-29
peut permettre d’écarter de l’organisation les personnes qui sont
les plus susceptibles de frauder. Ce type d’enquête peut concer-
ner des candidats à un poste dans l’organisation, mais aussi des
fournisseurs, clients et partenaires commerciaux nouveaux ou
anciens, afin de limiter le risque de fraude par ces tiers.
Formation à la lutte contre la fraude – Même si les salariés
embauchés sont compétents et honnêtes, ils doivent comprendre
en quoi consiste la fraude, les signaux d’alerte à surveiller, les
procédures permettant de signaler des cas de fraude potentiels
et les conséquences de la fraude. Cette formation doit être obli-
gatoire et renouvelée périodiquement.
Évaluation des performances et systèmes de rémunéra-
tion – Les organisations doivent veiller à ne pas inciter à des
comportements répréhensibles. Il faut examiner de près les
systèmes de rémunération pour vérifier que, non seulement, ils
encouragent les bons comportements, mais également qu’ils les
récompensent. Ces systèmes ne doivent pas négliger les compor-
tements susceptibles d’inciter (ou être considérés comme inci-
tant) à des comportements potentiellement frauduleux.
Entretien de départ – Des salariés partent pour diverses
raisons, et, souvent, ils souhaitent expliquer pourquoi. L’entre-
tien de départ est souvent considéré comme un contrôle de détec-
tion parce qu’un individu peut vouloir « dénoncer » quelqu’un
qu’il n’a pas voulu mettre en cause lorsqu’ils étaient collègues.
ENCADRÉ 8-9
Critères de mesure pour la détection des fraudes
8-30
Cependant, le fait même de savoir que des entretiens de départ
ont lieu peut également avoir un effet dissuasif sur la fraude.
L’entretien de départ est donc aussi un contrôle préventif.
Plafonnement des transactions autorisées – On peut empê-
cher des fraudes potentielles en plafonnant les transactions
autorisées. Il est fréquent, par exemple, d’interdire les vire-
ments externes dépassant un certain montant s’ils n’ont pas été
autorisés par deux personnes. Dans l’hypothèse de l’absence de
collusion entre ces individus, un tel contrôle empêche les tran-
sactions frauduleuses portant sur un montant supérieur.
Vérification des transactions ex ante – Nombre de cas de
fraudes impliquent des tiers, notamment des parties liées. En
imposant une vérification minutieuse de ces transactions avant
qu’elles ne soient réalisées, une organisation peut empêcher des
transactions inappropriées (exemple : référentiels fournisseurs
validés en amont).
DETECTION DE LA FRAUDE
8-34
Protocoles d’enquête Contrôle de
détection
La mise en place de protocoles d’enquête formels validés par la Activité destinée
direction et le Conseil permet la réalisation des objectifs de l’en- à mettre au jour
quête. Le Fraud Guide mentionne un certain nombre de « facteurs des événements
à prendre en compte pour élaborer le plan d’enquête : non souhaitables
qui sont déjà
Rapidité – Il peut être nécessaire de mener les investigations survenus. Pour
rapidement, pour des raisons juridiques, afin d’atténuer les être considéré
pertes ou les dommages potentiels, ou pour déclarer un sinistre comme efficace,
à la compagnie d’assurance. un contrôle de
détection doit
Notification – Certaines allégations peuvent nécessiter une être appliqué
notification aux instances de contrôle, aux autorités chargées de rapidement (avant
faire appliquer la loi, aux assureurs ou aux auditeurs externes. que l’événement en
question ait eu un
Confidentialité – Les informations recueillies doivent rester impact négatif sur
confidentielles et être diffusées aux seules personnes qui en ont l’organisation).
effectivement besoin.
Légalité – En faisant appel à un avocat-conseil dès le début du
processus ou, dans certains cas, pour conduire l’enquête, on peut
protéger le produit du travail et la confidentialité des communi-
cations entre l’avocat-conseil et le client.
Conformité – Les enquêtes doivent respecter les lois et règles en
vigueur concernant la collecte d’informations et l’interrogation
des témoins.
Mise en lieu sûr des preuves – Il convient de protéger les éléments
de preuve afin qu’ils ne soient pas détruits et qu’ils puissent être
présentés devant les tribunaux.
Indépendance – L’équipe chargée de l’enquête doit être tenue
suffisamment à l’écart des problèmes et des personnes faisant
l’objet de l’enquête, afin qu’elle puisse procéder à une évaluation
objective.
Objectivité – Les problèmes ou préoccupations spécifiques doivent
influer de manière appropriée sur l’orientation, le champ et le
calendrier de l’enquête 15 ».
8-35
Actions correctives
Quelles que soient les mesures retenues, elles doivent être justes
et rapides. Au sein de l’organisation, certaines personnes peuvent
en effet souhaiter savoir comment les fraudeurs sont traités. Si
les dernières dispositions prises ne sont pas rendues publiques, le
personnel doit avoir la certitude qu’elles sont justes étant donné les
circonstances, et que la direction traiterait d’autres fraudeurs de la
même manière. Cela renforce le sentiment que la direction « donne
le ton », et cette exemplarité est fondamentale pour la gouvernance
de la gestion du risque de fraude.
Joseph Wells, fondateur de l’ACFE, propose une analyse poussée de la manière de penser des
fraudeurs. Faisant écho à Jeremy Bentham, économiste du XVIIIe siècle, il observe que la pro-
babilité de commettre un délit (en col blanc) dépend de la perception, par son auteur, des
risques et des récompenses. Associés en d’autres termes, ceux qui estiment qu’il existe une
forte probabilité de se faire prendre sont naturellement moins enclins à perpétrer une fraude.
Chacun sait que pour ce qui est de l’efficacité, les activités de contrôle du risque de fraude
sont loin la perception du risque de se faire prendre (ne comptent pas tant que, d’après l’his-
torique du traitement réservé aux cas analogues par l’organisation). Dès lors, du point de vue
comportemental, cela ouvre la possibilité de créer un « effet d’anticipation » (c’est-à-dire l’anti-
cipation d’être audité), avec des vérifications surprises dans le cadre des activités de contrôle,
de prévention et de dissuasion des fraudes. Selon ce même raisonnement, les auditeurs ex-
ternes et les auditeurs internes, par des approches imaginatives de leur travail recourant à la
technologie (par exemple le pilotage continu des contrôles) ou les avancées de la statistique
(par exemple les méthodes de sondage de dépistage, la loi de Benford), voire des « séances
de réflexion collectives sur les moyens de frauder » peuvent exercer un puissant effet dissuasif
et dresser des barrières à la fraude, tout en améliorant les capacités de détection. La direction
doit agir rapidement et avec fermeté à l’encontre des auteurs des fraudes lorsque ces derniers
sont démasqués à la suite d’une enquête. De telles mesures peuvent largement consolider les
efforts de dissuasion.
Wells, Joseph T., « Let Them Know Someone’s Watching », Journal of Accountancy, mai 2002.
8-37
Les joueurs invétérés,
Les individus qui veulent absolument obtenir un statut social et
pensent que l’argent peut les y aider.
8-39
projet de fraude bien dissimulé. Ainsi, la persévérance opiniâtre de
Cynthia Cooper, désignée « personnalité de l’année » en 2004 par
le magazine Time, et de son équipe chez WorldCom, a été détermi-
nante pour faire éclater au grand jour la fraude massive perpétrée
par la direction de WorldCom.
8-40
techniques numériques, à savoir les outils et les technologies les
plus avancés dans ce domaine. Certified Fraud
Examiners
Le recours à des spécialistes de la lutte contre la fraude (CFE)
Individus qui
L’audit interne peut lutter contre la fraude de diverses façons au ont obtenu le
sein d’une organisation. Il peut, par exemple, organiser des sessions titre de CFE et
de sensibilisation au risque de fraude, concevoir des programmes sont spécialisés
et des contrôles antifraude, tester l’efficacité opérationnelle de ces dans les enquêtes
contrôles, examiner de manière approfondie les anomalies/prati- juricomptables et
ques répréhensibles et enquêter sur les signalements, conduire des dans les conseils
enquêtes sur demande du comité d’audit, ... Cependant, le service sur les risques
de fraude et
d’audit interne peut ne pas disposer de l’expérience et des compé-
autres questions
tences nécessaires pour toutes ces activités. En conséquence, il est relatives à la
courant que le responsable de l’audit interne recourt à des spécia- fraude.
listes de la lutte contre la fraude afin de compléter les compétences
des auditeurs.
8-41
se développe l'expertise de fraude (« forensic »), comme nouvelle
branche de la comptabilité, qui vient des pays anglo-saxons. Ces
experts sont souvent multidisciplinaires, avec de bonnes compé-
tences en comptabilité et en audit, mais aussi en droit, voire en
criminologie. De plus, les spécialistes de la technologie peuvent
être en mesure d'utiliser des techniques d'investigation avancées
et se servir d'outils sophistiqués. Ainsi, ils peuvent contribuer à
identifier et évaluer les « suspects habituels » et recommander les
méthodes d’investigation optimales. En outre, ayant déjà travaillé
avec des juristes indépendants, des chefs du contentieux, des procu-
reurs locaux, des instances de réglementation, des représentants
de l’ordre public, d’autres comptables et auditeurs, ainsi que des
substituts du procureur général, ils savent :
Quelle est la meilleure approche à adopter pour enquêter sur
une fraude donnée.
Évaluer la qualité et la quantité des preuves nécessaires.
Évaluer l’admissibilité des preuves en concertation avec des
juristes extérieurs.
Préserver les preuves et la chaîne de conservation des pièces à
conviction.
S’il est nécessaire, rechercher un témoin, factuel ou expert, ou
agir en tant que tels.
Il est très important que les auditeurs internes mènent les enquêtes
de manière équitable et consciencieuse, et qu’ils élaborent et tien-
nent à jour les documents nécessaires pour soutenir toute action
résultant de l’enquête. Le recours à des spécialistes est une prati-
que courante pour faire en sorte que les objectifs soient atteints.
Dans tous les cas, les rapports produits par les auditeurs internes
ne doivent contenir que des faits, et les auditeurs doivent éviter le
plus possible d’y inclure des avis personnels ou tout type de préjugé
ou hypothèse susceptibles de fausser l’analyse. Ils ne doivent
jamais chercher à faire porter la culpabilité sur un ou plusieurs
collaborateurs en particulier, mais simplement indiquer que les
preuves recueillies semblent corroborer la conclusion selon laquelle
une fraude a pu être commise. C’est au tribunal, et non à l’auditeur
interne, d’établir la culpabilité et de déterminer la sanction.
8-43
RÉSUMÉ
8-44
Questions de révision
1. Selon l'enquête PWC 2007 sur la fraude, combien la fraude a-t-elle coûté aux entrepri-
ses française en 2006 et 2007 ?
2. Quelle est la définition de la fraude donnée par le Fraud Guide ?
3. Selon l’AICPA, quelles sont les trois méthodes permettant de falsifier les états finan-
ciers ?
4. Selon l’ACFE, quels sont les quatre éléments qui caractérisent une fraude en entre-
prise ?
5. Quels sont les trois éléments que l’on peut qualifier de « causes à l’origine de la fraude »
(qui sont toujours présents, quel que soit le type de fraude) ?
6. Le Conseil aide à donner le ton au sein d’une organisation. Quelles sont les responsa-
bilités en matière de supervision que doit généralement exercer le Conseil ?
7. Selon le Fraud Guide, quels sont les dix éléments que comporte généralement un
programme efficace de gestion du risque de fraude ?
8. Quelles sont les trois principales étapes d’une évaluation du risque de fraude ?
9. Dans un monde parfait, vaut-il mieux éviter ou déceler toute fraude ? Expliquez votre
réponse.
10. Quelle est la méthode la plus courante pour déceler les fraudes ?
11. Sur quoi se concentre la dernière étape d’un programme efficace de gestion du risque
de fraude ?
12. Quels sont les différents rôles que peut jouer un service d’audit interne dans la lutte
contre la fraude au sein d’une organisation ?
13. Citer les raisons pour lesquelles, selon le rapport PWC2009, le contexte économique
de la crise favorise les comportements frauduleux.
8-45
Questions à choix multiple
8-46
Questions de révision
8-47
Questions à choix multiple
8-48
Questions
Thèmes dede
discussion
révision
8-49
ÉTUDE DE CAS
CAS N°1 Les ex dirigeants de la société de distribution XYZ1 vont être traduit en justice. En effet il
leur est reproché d’avoir falsifié leur comptes pendant plusieurs années, sans qu’il y ait de
réelles réactions des commissaires aux comptes. Toute la communication financière (bilan
et compte de résultat notamment) portant sur les années 200x et 200y était « fausse »,
« inexacte et trompeuse ».
En effet, la société a réussi à cacher ses pertes sur plusieurs exercices avant de devoir, sous
la pression du commissaire au compte, les révéler au public.
Pendant deux ans, l’entreprise a mis en place un circuit comptable ne reflétant pas la réalité
des opérations ainsi que des informations reflétant la réalité des opérations mais non enre-
gistrées en comptabilité. Le principal poste qui faisait l’objet de manipulation était celui
relatif aux marges arrière, c’est-à-dire le niveau de marge négocié entre la direction des
achats et les fournisseurs. Le suivi des marges arrière est important pour une société de
distribution car ces marges ont une incidence directe et importante sur le niveau des résul-
tats et du chiffre d’affaires et nécessitent donc une vigilance particulière. Ces marges ont été
sciemment gonflées, indépendamment des marges réelles. Dans d’autre cas, elles ont été
volontairement enregistrées au cours de l’exercice suivant de leur perception pour modi-
fier le résultat. De faux documents ont sciemment été rédigés pour tromper le commissaire
au compte. Cela a permis ainsi de gonfler le résultat d’exploitation.
Quel(s) problème(s) se posent pour les auditeurs internes ? En quoi les auditeurs internes
risquent-ils d’enfreindre les Normes professionnelles de l’IIA ?
Quelle aurait dû être leur réaction ? De quel(s) dispositif(s) disposaient-ils pour éviter de se
trouver malgré eux impliqués dans ces pratiques frauduleuses ?
Le responsable de l’audit interne perçoit par ailleurs des stocks-option. Cela peut-il nuire à
son indépendance ? Existe-t-il un conflit lorsque les auditeurs internes reçoivent des stock-
options e des primes liées aux performances financières ?
1
Si le cas emprunte des faits tirés de la réalité, il a été totalement remanié et imaginé pour
les besoins de l’exercice.
8-50
6-50
ÉTUDE DE CAS
CAS N°2 Actuellement, plusieurs affaires de fraude sont instruites par les tribunaux et les enquêtes
a posteriori se terminent. Vous en avez appris beaucoup sur l’identification du risque de
fraude, sur les contrôles qui réduisent ce risque, ainsi que sur l’importance de la déontolo-
gie et de la conformité au sein de l’organisation. Vous devez à présent être en mesure de
comprendre que l’incidence de la fraude est plus courante qu’on ne le pensait auparavant,
et qu’il existe de nombreuses techniques, méthodes et motivations pour commettre une
fraude. Vous devez également avoir compris que la découverte d’une fraude trahit peut-
être d’autres problèmes (par exemple, lorsque la direction ne fait pas preuve d’intégrité,
un retraitement des états financiers peut indiquer que les commissaires aux comptes et/ou
l’auditeur interne ont réussi à déjouer une tentative de fraude). C’est pourquoi la réglemen-
tation a été considérablement renforcée, comme cela s’est déjà produit lors de périodes
similaires de l’histoire.
Votre projet de groupe est stratégique et traite de la manière dont les auditeurs internes
peuvent aborder les cas de fraude, ainsi que des conséquences de certaines lois actuel-
les, comme le Sarbanes-Oxley Act de 2002 aux États-Unis ou la LSF de 2003 en France.
La première partie de cette étude de cas consiste à citer trois cas similaires. Votre tâche
consiste à rechercher la cause à l’origine de chaque fraude et à identifier les techniques qui
auraient pu en empêcher la survenue, ou au moins la déceler rapidement.
2-51
6-51
8-51
ÉTUDE DE CAS
CAS N°3 Cette étude de cas a pour objectif de vous familiariser avec la fonctionnalité Loi de Benford
des logiciels ACL et IDEA. Si vous ne l’avez pas encore fait, installez le logiciel sur votre ordi-
nateur à partir du CD joint au présent manuel.
A. Ouvrez le logiciel ACL. Localisez la description de la « commande de Benford » dans
l’aide. Répondez aux questions suivantes :
1. Que fait la commande de Benford ?
2. Quelle mise en garde est donnée concernant l’utilisation d’outils d’analyse numé-
riques tels que la commande de Benford ?
3. Comment la commande de Benford est-elle activée ?
B. Ouvrez le logiciel IDEA. Localisez la description de la « Loi de Benford » dans l’aide.
Répondez aux questions suivantes :
1. L’analyse de la Loi de Benford est la plus efficace sur les données présentant
certaines caractéristiques. Quelles sont ces caractéristiques ?
2. Identifiez et décrivez brièvement les sept étapes servant à effectuer une analyse
selon la Loi de Benford.
3. Quels sont les champs contenus dans la base de données créée lorsqu’une
analyse selon la Loi de Benford est effectuée ?
C. Localisez la description des « Investigations portant sur des fraudes » dans l’aide.
Cliquez sur « Fraudes relatives à la paye ». Répondez aux questions suivantes :
1. Quels types de fraude sont décrits ?
2. Comment la plupart des fraudes à la paye sont-elles décelées ?
3. Décrivez les tests portant sur les fraudes à la paye qui peuvent être effectués à
l’aide d’IDEA.
8-52
6-52
RÉFÉRENCES
1
ACFE, Occupation Fraud : a study of the impact of an Economic Recession, 2009 (téléchargeable en
anglais sur www.acfe.com)
2
PWC, Enquête sur la fraude dans les entreprises en France, en Europe et dans le monde, Ed. 2005
(téléchargeable en Français et en Anglais sur www.pwc.fr
PWC, Enquête 2009 sur la fraude dans les entreprises en temps de crise, Nov. 2004, p 24
3
Managing the Business Risk of Fraud: A Practical Guide, The Institute of Internal Auditors, The
American Institute of Certified Public Accountants, and the Association of Certified Fraud Exami-
ners. Téléchargeable sur www.theiia.org, p. 5.
4
Ibid, p. 6.
5
Ibid.
6
Ibid, p. 10.
7
Ibid, p. 11.
8
Ibid, p. 14.
9
Ibid, p. 26.
10
Ibid, p. 28.
11
Ibid, p. 30.
12
Ibid, p. 33.
11
Ibid, p. 39.
13
Ibid, p. 40.
14
Ibid, p. 41.
15
Ballou, B., D.L. Heitger, and C.L. Landes, « The Future of Corporate Sustainability Reporting »,
Journal of Accountancy, (Décembre 2006).
16
Cohen, I., and M. Felsen, « Social Change and Crime Rate Trends: A Routine Activity Approach »,
American Sociological Review, Vol. 44, (1979), pp. 588-608.
Pons N et Vidaux F, « Audit et Fraude », IFACI, Ponis , 2004
Gallet U, " Halte aux fraudes ", Guide pur les auditeurs et les dirigeants, Dunod, 2010 ,224 p
Pons N et Bearshar V, « Arnaques - le manuel antifraude », CNRS Edition, 2009
Sites internet : www.theiia.org ( Institute of Internal Auditor)
www.ogl-audit.com
www.transparence-france.org
NOTES
NOTES