Adaptation Des Impedances I
Adaptation Des Impedances I
Adaptation Des Impedances I
1ère Partie
INTRODUCTION
L’adaptation des impédances est un problème qui en principe concerne tous les radioamateurs. En
effet, la station radioamateur la plus élémentaire comprend au moins un émetteur et un récepteur
(ou un transceiver) et une antenne. En général, nous souhaitons évidemment que la puissance
produite par notre émetteur soit au maximum rayonnée par l’antenne et inversement, que la
puissance captée par l'antenne pour un signal donné, soit transférée au maximum au récepteur. Cela
ne peut se produire que si une relation bien précise est établie entre l’impédance de sortie de
l’émetteur et l’impédance de l’antenne vue à travers la ligne (idem dans l'autre sens avec le
récepteur), c'est-à-dire, si ces impédances sont adaptées.
L’objet de cet article est d’expliquer en quoi consiste exactement cette adaptation des impédances et
comment on la réalise. En particulier, dans le domaine qui nous intéresse, la théorie débouche sur le
principe de fonctionnement des coupleurs d’antennes (aussi appelés boîtes d'accord ou boîtes de
couplage). Nous n'étudierons pas de schémas pratiques de coupleurs; on en trouve à profusion dans
les revues et handbooks, ainsi que sur internet.
Cette première partie sera surtout consacrée au rappel des notions importantes d'impédance et
d'admittance.
1. POSITION DU PROBLEME
ZS
ZL
US
concret, il pourrait s’agir d’un émetteur raccordé à une antenne via une ligne, Z L étant l'impédance
à l'entrée de la ligne. Nous désirons transférer un maximum de puissance du générateur à la charge ;
cela ne peut être obtenu que s’il existe une relation bien déterminée entre Z L et Z S . On dit alors
que les impédances sont adaptées.
En général, cette condition n’est pas satisfaite. Dans le cas de l’exemple émetteur-antenne,
l’impédance de sortie de l’émetteur peut être purement résistive et égale à 50 Ω, tandis que
l’impédance de l’antenne (en fait, l'impédance vue à travers la ligne reliant l'émetteur à l'antenne)
est en général complexe; c'est-à-dire qu’elle peut être considérée comme étant équivalente à une
résistance en série avec une inductance ou une capacité. On doit alors insérer entre le générateur et
la charge, un réseau passif (donc composé uniquement de résistances, inductances et capacités) qui
réalisera l’adaptation des impédances (figure 2).
Pratiquement, ce réseau ne comprendra que des inductances et des capacités, les résistances étant
exclues puisqu’elles produiraient des pertes de puissance par effet Joule.
ZS
Réseau
d’adaptation des ZL
US impédances
Figure 2: le réseau d'adaptation des impédances permet d'obtenir un transfert maximum de puissance du générateur
vers la charge.
2. IMPEDANCES ET ADMITTANCES
Puisque nous allons utiliser en long et en large ces notions d’impédance et d’admittance, un petit
rappel s’impose, sans toutefois refaire tout un cours sur la question. Nous supposons évidemment
ici que les notions élémentaires de résistance et de réactance sont bien connues. Nous supposerons
aussi que le lecteur possède une connaissance élémentaire des nombres complexes.
2.1 IMPEDANCES
2.1.1 Définition
L'impédance Z d'un circuit est le rapport de la tension aux bornes de ce circuit au courant circulant
dans le circuit, soit
3/12
U
Z=
I
Les barres sur les symboles U et I indiquent que l'on a affaire ici aux substituts complexes (ou
phaseurs) des grandeurs sinusoïdales u(t) et i(t).
L'impédance Z est donc en général un nombre complexe et peut être considérée comme
l’association (en série) d’une résistance R et d’une réactance X. L'impédance est notée Z = R + jX ; la
barre au dessus du Z indiquant que l'on a affaire à une expression complexe. Il ne faut donc pas
confondre l'impédance Z avec son module Z (voir plus loin). La réactance X peut être positive
(inductive) ou négative (capacitive). Le symbole j désignant le nombre imaginaire pur j = − 1 ;
plus concrètement, il exprime le fait que si l’impédance est traversée par un courant sinusoïdal I , la
tension jXI aux bornes de la réactance est déphasée de 90° (en avance ou en retard suivant le signe
de X) par rapport à la tension aux bornes de la résistance R I .
Cas particuliers:
- X = 0, Z = R (résistance pure);
- R= 0, Z = jX (réactance pure), avec X = ωL = 2πfL pour une inductance L et X = -1/ωC = -1/(2πf
C) pour une capacité C.
Une impédance peut être représentée graphiquement dans un plan cartésien X – R (représentation
cartésienne); l’axe horizontal R correspondant à des résistances pures et l'axe vertical X à des
réactances pures (figure 3).
Dans ce plan X – R, une impédance est représentée par un point de coordonnées (R,X). Tous les
points représentatifs d’impédances sont situés à droite de l’axe des X (les résistances sont
positives). Un point tel que Z1 , de coordonnées (X1, R1), situé au-dessus de l’axe des R, correspond
à une réactance positive (inductance); un point tel que Z 2 , de coordonnées (X2, R2), situé en
dessous de l’axe des R, correspond à une réactance négative (capacité).
La distance de l'origine des axes au point représentatif de l'impédance est égale au module Z de
l'impédance: Z = R 2 + X 2 .
La résistance et la réactance n’apparaissent pas toujours comme une résistance réelle mise en série
avec une capacité ou une inductance réelle. Une antenne par exemple, présente à son point
d’alimentation une certaine impédance et peut être représentée par une résistance R (résistance due
aux pertes + résistance de rayonnement) en série avec une inductance ou une capacité dont les
valeurs varient généralement avec la fréquence.
4/12
X (réactance)
X1 Z1
R L
Z1
Φ1
0 R2 R (résistance)
R1
Φ2
Z2
X2 Z2
R C
Figure 3: une impédance peut être représentée par un point dans le plan complexe X – R.
Exemple 1
Une résistance de 100 Ω est connectée en série avec une inductance de 5 µH. Calculer l'impédance
correspondante à la fréquence de 3,7 MHz. Si une tension sinusoïdale de 100 V d'amplitude et de
fréquence égale à 3,7 MHz est appliquée aux bornes de ce circuit, que vaudront l'amplitude du
courant et son déphasage par rapport à la tension?
Solution
A 3,7 MHz, la réactance de l'inductance vaut XL = 2πfL = 116,24 Ω. L'impédance du circuit vaut
alors Z = (100 + j 116,24) Ω. Soit un module Z = 153,34 Ω et un argument φ = 49,30°. On peut
donc aussi écrire Z = 153,34∠49,30° Ω.
100
Pour une tension d'amplitude 100 V, le courant vaudra: I = = 0,652∠ − 49,30° A.
153,34∠49,30°
Cela signifie que le courant dans le circuit a une amplitude de 0,652 A et est déphasé de 49,30° en
retard sur la tension.
Exemple 2
Même question pour une résistance de 100 Ω en série avec un condensateur de 300 pF, la
fréquence étant inchangée.
Solution
-1
A 3,7 MHz, la réactance de la capacité vaut X = = - 143,38 Ω. L'impédance du circuit vaut
C 2π f C
alors Z = (100 - j 143,38) Ω ou Z = 174,81∠ − 55,11° Ω .
5/12
100
Pour une tension d'amplitude 100 V, le courant vaudra: I = = 0,572∠55,11° A,
174,81∠ − 55,11°
soit une amplitude de 0,572 A et un déphasage en avance de 55,11°.
En particulier :
L’équation (1) montre que le fait de mettre une résistance en série avec une impédance ne modifie
Réactance
' Inductance en
X’1
Z1 série avec Z
Z = R + jX
X Z Z1
0 R R1 Résistance
Résistance en
série avec Z
''
X’’1 Z1 Capacité en série
avec Z
Figure 4: transformation d'une impédance quelconque par mise en série avec cette impédance,
d'une résistance ou d'une réactance (inductance ou capacité).
que la partie résistive de cette impédance ; par contre (équation (2)), si l’on met une réactance pure
en série avec cette impédance, on ne modifie que la partie réactive de l’impédance. Ce deuxième
cas est d’application dans les coupleurs d’antennes, nous en reparlerons plus loin.
La figure 4 montre la transformation d’une impédance lorsque l'on met en série avec cette
impédance, une résistance ou une réactance.
''
- En plaçant une capacité Cs en série avec Z , on obtient une impédance Z1 = R + jX"1 dont la partie
résistive n’a pas changé et dont la partie réactive vaut X"1 = X - 1/(2πfCs).
D'une façon générale, le point représentatif de l'impédance se déplace sur une droite parallèle à l'axe
réel pour une résistance en série et parallèle à l'axe imaginaire pour une réactance en série.
Exemple 3
On connecte en série les deux circuits des exemples 1 et 2. Que vaudra (à 3,7 MHz) l'impédance
résultante? A quelle fréquence l'impédance résultante sera-t elle purement résistive?
Solution
Pour trouver à quelle fréquence on obtiendra une résistance pure, il faut chercher la fréquence à
1
laquelle les deux réactances seront égales en valeur absolue: = 2π f L . On retrouve alors la
2π f C
1
formule de Thompson: f= .
2π LC
En introduisant les valeurs de L et de C dans cette formule, on obtient f ≈ 4,109 MHz.
Z1 × Z 2 (R 1 + jX1 ) × (R 2 + jX 2 ) (R 1 × R 2 - X1 × X 2 ) + j(R 1 × X 2 + R 2 × X1 )
Z= = = (3)
Z1 + Z 2 (R 1 + jX1 ) + (R 2 + jX 2 ) (R 1 + R 2 ) + j(X1 + X 2 )
En multipliant haut et bas dans (3) par le complexe conjugué du dénominateur, on obtient :
2 2 2 2
(R 1 + R 2 ) × R 1 × R 2 + R 1 × X 2 + R 2 × X 1 R 1 × X 2 + R 2 × X 1 + (X 1 + X 2 ) × X 1 × X 2
Z= + j = R + jX (4)
2 2 2 2
(R 1 + R 2 ) + (X 1 + X 2 ) (R 1 + R 2 ) + (X1 + X 2 )
En particulier :
2 2
(R 1 + R 2 ) × R 1 × R 2 + R 2 × X1 R 2 × X1
Z= +j = R + jX ; (5)
2 2 2 2
(R 1 + R 2 ) + X1 (R 1 + R 2 ) + X1
7/12
2 2
R ×X R × X + (X + X ) × X × X
1 2 1 2 1 2 1 2
Z= +j = R + jX . (6)
2 2 2 2
R + (X + X ) R + (X + X )
1 1 2 1 1 2
La relation (5) montre que si l’on met une résistance en parallèle sur une impédance, on modifie à la
fois la partie résistive et la partie réactive de cette impédance. De même (équation (6)), on peut
modifier les parties résistive et réactive d’une impédance en la shuntant par une réactance. Ce
deuxième cas nous intéresse tout particulièrement pour la conception des coupleurs
d’antennes.
X Z = R + jX
0 Résistance
R
Figure 5: lorsque l'on shunte une impédance par une inductance ou une capacité, le point
représentatif de l'impédance se déplace sur un cercle centré sur l'axe des résistances.
Dans ce cas, le point représentatif de l'impédance ne se déplace plus sur une droite, mais sur un
cercle centré sur l'axe des résistances, comme le montre la figure 5, pour une impédance shuntée par
une réactance Xp (dans le cas d'une impédance shuntée par une résistance, le point représentatif de
l'impédance se déplace aussi sur un cercle dont le centre se trouve sur l'axe des réactances).
2.2 ADMITTANCES
2.2.1 Définition
R
-la conductance G = (8)
2 2
R +X
X
-la susceptance S = − (9)
2 2
R +X
1 −1
Cependant, pour une résistance pure R, on a bien: G = et pour une réactance pure X: S =
R X
(attention au signe - !). Donc,
Tout comme pour les impédances, on peut représenter une admittance par un point dans le plan
complexe; l'axe vertical peut alors être gradué en valeurs de susceptance (siemens) et l'axe
horizontal en valeurs de conductance (siemens également). Comme l'admittance est l'inverse d'une
impédance, on peut aussi considérer qu'elle est représentée par le point représentatif de l'impédance
correspondante.
Exemple 4
Solution
100 + j143 , 38
= (3 , 272 + j 4 , 692 ) mS
1 1
Y = = =
Z 100 - j 143,38 100 2 + 143 , 38 2
Nous avons vu qu'une impédance peut être représentée comme une résistance Rs en série avec une
réactance Xs. Dans certains cas, l'impédance se présente sous la forme d'une résistance Rp en
parallèle avec une réactance Xp (les indices s et p ont été mis pour bien distinguer les deux cas)
(figure 6). Il est intéressant de pouvoir passer de la forme série à la forme parallèle et vice versa.
9/12
Xp
1 1 1
Z s = Rs + jXs = + = Yp
Z p R p jX p
R p * jX p R p * X 2p R 2p * X p
Z s = Rs + jXs = Z p = = +j (10)
R p + jX p R 2p + X 2p R 2p + X 2p
R p * X 2p R 2p * X p
Rs = et Xs = (11)
R 2p + X 2p R 2p + X 2p
1 1 R − jX s 1 1 -1
Ys = = = s2 = Yp = = +j (12)
Zs R s + jX s R s + Xs
2
Zp R p Xp
D'où les relations inverses, pour passer de la forme série à la forme parallèle:
R s2 + X s2 R s2 + X s2
Rp = et Xp = (13)
Rs Xs
Exemple 5
Solution
1° Une résistance de 100 Ω en série avec une inductance de 5 µH. Dans ce cas, les relations (13)
nous donnent: Rp = 235,12 Ω et Xp = 202,27 Ω; soit une résistance de 235,12 Ω en parallèle avec
une inductance de 8,70 µH (à la fréquence de 3,7 MHz).
10/12
2° Une résistance de 100 Ω en série avec un condensateur de 300 pF. Les relations (13) nous
donnent: Rp = 305,58 Ω et Xp = -213,13 Ω; soit une résistance de 305,58 Ω en parallèle avec un
condensateur de 201,83 pF (à la fréquence de 3,7 MHz).
1 1 1
Comme on l'a vu précédemment, pour deux impédances Z1 et Z 2 en parallèle, on a: = + .
Z Z1 Z2
Donc, en terme d'admittances:
Lors de la mise en parallèle de deux impédances, les conductances et les susceptances s'ajoutent:
G = G1 + G 2 et S = S1 + S 2 .
1 1
En particulier, si Z 2 est une résistance pure (dans ce cas, = =G = Y 2 ), seule la conductance
Z2 R 2
2
est modifiée, alors que pour l'impédance correspondante, et la résistance et la réactance sont
modifiées. De même, dans le cas d'une réactance pure en parallèle sur Z1 (dans ce cas,
1 1
= = jS = Y 2 ), seule la susceptance est modifiée (pour l'impédance correspondante, la
Z2 jX 2
2
résistance et la réactance sont modifiées).
Les cercles tels que celui représenté à la figure 5 sont donc des lieux à conductance constante, la
valeur de la conductance étant donnée par l'inverse de la valeur de la résistance correspondant au
point d'intersection du cercle avec l'axe des R.
Dans le cas d'une adaptation vers une valeur finale de 50 Ω, un cercle particulièrement intéressant
est le cercle correspondant à une conductance constante de 0,02 siemens (1/50 Ω).
La figure 7 résume les différents chemins sur lesquels se déplace le point représentatif d'une
impédance lorsque l'on place une réactance en série ou en parallèle avec cette impédance (voir la
figure 8 pour les schémas).
- Une inductance placée en série avec Z = R + jX (chemin N° 1) déplace vers le haut (c'est-à-dire,
dans le sens des réactances croissantes) le point représentatif de l'impédance sur une parallèle à l'axe
des réactances passant par R. Le déplacement est d'autant plus grand que l'inductance est grande (X
= ωL).
- Une capacité placée en série avec Z = R + jX (chemin N° 2) déplace vers le bas (c'est-à-dire, dans
le sens des réactances décroissantes au sens mathématique du terme) le point représentatif de
l'impédance sur une parallèle à l'axe des réactances passant par R. Le déplacement est d'autant plus
grand que la capacité est petite (X = -1/ωC).
- Une inductance placée en parallèle sur Z = R + jX (chemin N° 3) déplace dans le sens anti
horlogique, le point représentatif de l'impédance sur le cercle passant par ce point. Le déplacement
est d'autant plus grand que l'inductance est petite.
11/12
Réactance
Inductance en Inductance en
parallèle sur Z série avec Z
3 1
X Z = R + jX
0 4 Résistance
R
Capacité en
parallèle sur Z
2
Capacité en série
avec Z
Figure 7: influence sur une impédance d'une réactance placée en série (chemins 1 et 2) ou en
parallèle (chemins 3 et 4) avec cette impédance (les schémas correspondants sont donnés à la
figure 8).
- Une capacité placée en parallèle sur Z = R + jX (chemin N° 4) déplace dans le sens horlogique, le
point représentatif de l'impédance sur le cercle passant par ce point. Le déplacement est d'autant
plus grand que la capacité est grande.
C
L
Chemin N° 1 Z Chemin N° 2 Z
Chemin N° 3 Z Chemin N° 4 Z
L C
Figure 8: suivant le chemin que l'on veut suivre dans le plan complexe, la réactance doit être mise
en série ou en parallèle avec l'impédance Z .
Le long des chemins 1 et 2, la résistance R est constante (mais pas la conductance); le long des
chemins 3 et 4, la conductance G est constante (mais pas la résistance).
12/12
Dans la pratique, on utilise plutôt une représentation graphique polaire des impédances et des
admittances mieux connue sous le nom d'abaque de Smith. Dans cette représentation, les chemins 1
et 2 deviennent aussi des cercles. Mais dans un premier abord, l'abaque de Smith est plus complexe
que la représentation cartésienne, c'est pourquoi nous ne l'utilisons pas ici.
On constate donc qu'il est en principe toujours possible de transformer une impédance donnée en
une autre impédance, en plaçant des réactances en série et/ou parallèle avec cette impédance.
CONCLUSION
Dans cette première partie, nous avons introduit le problème de l'adaptation des impédances et
rappelé les notions essentielles sur les impédances et les admittances. Ce faisant, nous avons vu
qu'on pouvait transformer une impédance en plaçant une réactance en série ou en parallèle avec
cette impédance, ces transformations étant matérialisées dans le plan complexe par des segments de
droite ou des arcs de cercle.
Dans la suite de cet article, nous étudierons plus en détail le problème de l'adaptation des
impédances et son application aux coupleurs d'antennes.
ON5WF
ON5WF@UBA.be