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Aide-Mémoire de COMMUNICATION DIGITALE

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Aide-mémoire de

COMMUNICATION
DIGITALE
Jean-Éric Pelet
Jérémy Lucas-Boursier

Aide-mémoire de
COMMUNICATION
DIGITALE
Dans la même collection
Aide-mémoire de Communication, G. Séror, 2016
Aide-mémoire de Communication digitale, J.-É. Pelet et J. Lucas-Boursier, 2017
Aide-mémoire de Marketing, C. Demeure et S. Berteloot, 7e édition, 2016
Aide-mémoire Marketing digital, C. Lejealle et T. Delecolle, 2017
Aide-mémoire de Mathématiques financières, É. G. Harb, F. Batini, X. Durand, 2016
Aide-mémoire de Microéconomie, J.-P. Gayant, 2014
Aide-mémoire de Macroéconomie, C. Guillaumin, 2014

Mise en page : PCA

© Dunod, 2017
11 rue Paul Bert, 92240 Malakoff
www.dunod.com
ISBN 978-2-10-076754-0
Table des matières

Introduction 1

A. La communication digitale
et son environnement

1 • Internet : un espace de communication ouvert 5


1 Un média de masse 5
2 Internet et la recomposition du paysage médiatique 23

2 • Une pluralité des dialogues entre une multitude


d’acteurs 29
1 Une recomposition de la relation entre émetteur et récepteur 29
2 La communication digitale et son contexte économique 37

B. Les supports de la communication digitale

3 • Le Web mobile 43
1 L’impact du mobile sur la communication digitale 43
2 Mobile : formats et contenus 47

4 • Les sites Internet 57


1 Un format standardisé qui évolue dans le temps 57
2 Une typologie des sites Internet 61

5 • Les réseaux sociaux 75


1 Les réseaux sociaux : développement et usages 75
2 Un état des lieux des réseaux sociaux 84

V
C ommunication digitale

C. La communication digitale
des organisations

6 • Déployer une stratégie


de communication digitale 101
1 La place de la communication digitale dans la stratégie
des organisations 101
2 La pratique de la communication digitale 112

7 • La communication digitale des acteurs publics 143


1 L’impact du digital sur la vie politique 143
2 La communication politique digitale et sa pratique 148

8 • Maîtriser sa réputation en ligne 163


1 Internet : un espace risqué pour l’image des organisations ? 163
2 Prévenir et gérer les situations de crise en ligne 168

D. La communication digitale
comme projet

9 • Les standards de création du digital 181


1 La communication comme expérience utilisateur 181
2 Les tendances graphiques,
visuelles et ergonomiques sur le Web 188

10• Mener à bien un projet


de communication digitale 203
1 Les étapes et acteurs d’un projet de communication digitale 203
2 Les méthodes et les outils d’un projet
de communication digitale 214
Glossaire 223

Bibliographie 231

Index 243

VI
Introduction

La communication digitale « numérique », ou « en ligne », découle de pra-


tiques qui se sont rapidement et solidement ancrées en moins de vingt ans,
dans une proportion toujours plus grande de la population mondiale, en
France en particulier, à mesure du développement de l’Internet grand public.
Les supports mobiles, accompagnés de l’explosion des réseaux sociaux ont
fait d’Internet non seulement un média puissant, mais un compagnon du
quotidien. De nombreuses activités humaines, sociales, coopératives, écono-
miques, politiques ou marchandes s’y déroulent.
La force de ce mouvement oblige les acteurs de cet écosystème média-
tique, des entrepreneurs aux responsables de grandes organisations, du
département marketing à celui des systèmes d’information, à s’interroger
sur les effets de l’adoption des outils digitaux sur la communication, entre
les individus d’une part, et entre les organisations et les individus d’autre
part. Par organisation, nous entendons toute entreprise, association ou
institution qui réunit des acteurs autour d’un but spécifique. La commu-
nication digitale revêt désormais le rôle de levier indispensable permet-
tant d’atteindre ce but, lucratif ou non, quelle que soit la taille de l’orga-
nisation. Marques, ONG, institutions d’enseignement, partis politiques
ou grandes entreprises, tous doivent à des degrés divers s’interroger sur
leur présence sur les réseaux sociaux, au recours à un site Web, à une
application, à une campagne de publicité en ligne ou encore à l’articula-
tion de ces pratiques entres-elles. Car tous potentiellement s’adressent à
des étudiants, à des clients, des utilisateurs, des usagers, à des citoyens en
somme qui, quotidiennement, achètent des produits, paient leurs impôts,
préparent leurs vacances, discutent avec leurs amis et leurs familles, solli-
citent un service après-vente en ligne, apprennent à distance ou font des
rencontres.

1
C ommunication digitale

Cet ouvrage se présente comme un guide d’accompagnement. Pour com-


prendre les mécanismes de la communication digitale, il explore dans
un premier temps le contexte spécifique dans lequel elle se présente et
se déploie (partie A). Communiquer sur Internet revient avant tout à
investir un espace de communication dans lequel cohabitent plusieurs
supports spécifiques parfois complémentaires tels que des sites Web, des
applications ou/et des réseaux sociaux. Leurs particularités vont condi-
tionner la fabrication des discours et leur réception ou non par les indi-
vidus ciblés (partie B). L’exploration se poursuit par l’analyse de la com-
munication digitale en tant que stratégie des organisations (partie C).
Sa dimension pratique y est appréhendée à la fois pour les entreprises et
pour les institutions publiques. Enfin, et pour une intégration réussie, la
communication digitale doit être comprise comme un projet comprenant
méthodes, outils, acteurs, métiers et tendances (partie D). Ces quatre par-
ties sont complétées de cas pratiques concrets et de focus, illustrant par
des exemples et des liens vers des sites Web le contenu de chacun.
Le but de cet ouvrage est d’apporter des clés méthodologiques concrètes
au lecteur, lui permettant de comprendre la communication digitale en
tant que pratique des individus et des organisations. Il pose des grands
principes et des repères durables dans un environnement qui évolue en
permanence.

2
A
Introduction

La communication
digitale et son
environnement

3
1 Internet : un espace
de communication
ouvert

Mots-clés
World Wide Web, hypermédia, Web 2.0, mème, légitimité, viralité

1  Un média de masse

1.1  Les origines d’Internet : un environnement


technique spécifique
Comprendre la communication digitale c’est d’abord comprendre le
contexte spécifique dans lequel elle apparaît et évolue. C’est pourquoi
il convient d’explorer brièvement les conditions d’émergence d’Inter-
net comme réseau de référence. On ne peut rendre compte de manière
exhaustive de près de ces cinquante années de développement, depuis son
ancêtre Arpanet en 1969, ni de la multitude d’acteurs privés et publics qui
ont contribué au développement d’Internet en tant que système qui conti-
nue à se développer. Mais nous allons nous attacher à donner les étapes
clés, nécessaires à la compréhension des enjeux du moment en matière de
communication.
Internet tel que nous le connaissons aujourd’hui, en tant que réseau
mondial grand public, est très différent de ce qu’il était à ses débuts. Il
est intéressant d’explorer l’histoire non linéaire de son développement
depuis les années  1960 pour comprendre les spécificités de ce réseau
dans lequel se déploient les dispositifs de communication complexes qui
nous intéressent ici. La mise en lumière de ces éléments historiques est

5
A La communication digitale et son environnement

d’autant plus cruciale qu’il se n’agit pas d’un déploiement homogène à


partir d’un plan de développement centralisé. Au contraire Internet se
développe de manière non linéaire, sous l’impulsion d’acteurs centrali-
sés et étatiques, d’acteurs privés, de nouvelles technologies et des usages
que le public en fait. Cette séquence historique peut se découper en deux
temps. D’abord les origines, avec les premiers réseaux militaires et uni-
versitaires, puis, dans un deuxième temps, l’apparition d’un réseau plus
vaste tourné vers le grand public.

„„ Arpanet : l’ancêtre d’Internet


Après une phase de développement initiée au début des années 1960 par
le Département américain de la défense, c’est en 1969 q ­ u’apparaît le
premier réseau Arpanet (Advanced Research Projects Agency Network).
Il relie p
­ rogressivement entre elles les plus grandes universités et leurs
labora­ toires de recherche. Le principe, initié par l’armée dans un
contexte de guerre froide, est d’instaurer la décentralisation des réseaux
de communication pour renforcer leur sécurité. En cas d’attaque ou
de dysfonction­nement sur un noeud du réseau, un autre nœud peut
prendre le relai et garantir l’intégrité de l’ensemble du système. Cette
structure est  ­toujours à l’œuvre aujourd’hui. Arpanet modifie aussi
l’usage de l’ordinateur qui devient alors un outil de communication
et pas seulement une machine à calculer destinée à des scientifiques,
des militaires ou encore des experts. Ceci intervient à un moment où
l’ordinateur personnel que nous c­ onnaissons n’existe pas encore. Ce qui
en fait à l’époque une réussite techno­logique, c’est la mise au point de
la commutation par paquets (technique de commu­tation utilisée dans
le transfert de données dans les  réseaux informatiques), toujours en
vigueur aujourd’hui. Elle consiste à découper les informations en plu-
sieurs morceaux pour les faire transiter par différents itinéraires sur le
réseau afin d’être finalement rassemblées au moment d’atteindre le des-
tinataire du message. Outre la connexion d’ordi­nateurs éloignés géo-
graphiquement, Arpanet a dû aussi faire face à un enjeu important : la
connexion de réseaux préexistants bâtis sur des architectures techniques
différentes les unes des autres. De cette problé­matique vont naître les
premiers efforts de standardisation qui permettront, plus tard, l’appari-

6
Internet : un espace de communication ouvert

tion d’un Internet unique et mondia­lisé. En 1973, le TCP (Transmission 1


Control Protocol) voit le jour et s’attache à garantir la fiabilité du réseau.
Il est complété en 1978 par le Internet Protocol (IP). C’est la combinaison
des deux, connue sous le nom de TCP/IP, qui pose les bases techniques
et fonctionnelles d’Internet. Le réseau va en effet s’étendre à mesure que
des réseaux locaux l’adoptent et s’agrègent ensemble. À partir de 1983,
Arpanet devient donc le réseau des réseaux auquel peuvent se rattacher
un grand nombre d’universités ainsi que pour la première fois les ordi-
nateurs privés.

„„ Le World Wide Web (WWW)


Rapidement le nombre de « nœuds » connectés au réseau augmente for-
tement : ils passent de 562 en 1983 à près d’un million en 1992. C’est en
Europe que va se jouer cette fois un nouveau tournant dans l’histoire d’In-
ternet. Le CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire)
met en effet au point avec Tim Berners-Lee, citoyen britannique, principal
inventeur du World Wide Web (WWW) au tournant des années 1990, le
concept de toile (Web) en 1991, communément admis aujourd’hui. Le
World Wide Web est une étape décisive vers l’émergence d’un véritable
réseau grand public qui repose sur un ensemble de facteurs techniques
structurants toujours en vigueur : l’URL, le HTTP, le HTML. C’est sur
les deux premiers facteurs que repose l’hypertextualité, la possibilité pour
chacun de naviguer de page en page à travers des liens, sans nécessaire-
ment suivre un chemin préétabli. Ce standard technique permet à toutes
les machines connectées au réseau de traiter les contenus selon les mêmes
normes et ainsi de les interconnecter selon le modèle du tissage de toile.
De cet aspect technique découlent des enjeux culturels, cognitifs et orga-
nisationnels, qui influencent directement les questions de communica-
tion qui nous intéressent et qui font la spécificité d’Internet.
L’hypertexte est évoqué dès 1965 par Theodor Holm Nelson, sociologue
américain, pionnier de l’histoire des technologies de l’information. Il est
considéré comme l’inventeur du terme hypertexte et imagine une nou-
velle bibliothèque d’Alexandrie, où tous les textes seraient connectés
entre eux (Nelson, 1965). De fait, ce concept répond à une probléma-
tique ancienne : comment organiser et mettre en relation des supports de

7
A La communication digitale et son environnement

savoirs dont le volume ne cesse d’augmenter ? Qu’il s’agisse d’ouvrages


écrits ou de supports numériques, la question de l’accessibilité de l’infor­
mation demeure. La notion de toile devient un principe d ­ ’organisation,
d’abord des machines entre elles, qui s’additionnent au sein d’un réseau de
serveurs informatiques. C’est ensuite un mode d’organisation des conte-
nus, dans un univers presque infini, que l’on peut difficilement indexer
comme l’on indexerait une bibliothèque, aussi grande soit-elle. Le Web
fait donc apparaître un nouveau principe de navigation qui procède d’un
double mouvement : d’un côté les contenus sont clairement délimités
– puisqu’un site s’articule selon sa propre logique avec un début et une
fin –, mais peuvent aussi être enrichis par d’autres pages externes immé-
diatement accessibles. Là, une notion récemment popularisée intervient
alors : la sérendipité ou l’art de naviguer d’une page à l’autre sur Internet,
sans suivre un chemin de causalité prédéfini. C’est ce que nous expéri-
mentons tous lorsqu’à la recherche d’une information sur un fait précis,
on se retrouve plusieurs liens plus loin à consulter une vidéo de reportage
animalier, la page Web d’un acteur inconnu ou un site d’e-commerce qui,
in fine, n’ont plus qu’un rapport éloigné avec la recherche initiale.
Si l’URL et le HTTP structurent Internet à partir des années 1990, le mou-
vement d’uniformisation technique ne serait pas complet sans l’adoption
du HTML (Hyper Text Markup Language) comme langage commun. Son
usage souligne un aspect pratique au sein des projets de communication,
mais il convient d’en comprendre ici l’origine. Déjà utilisé par la firme
informatique américaine IBM, ce langage est retenu par les fondateurs du
WWW pour sa simplicité, ce qui permettra par la suite à des utilisateurs
non experts de créer leurs propres pages Internet. Plusieurs versions vont
se succéder pour arriver au HTML5 utilisé aujourd’hui. Dans les premiers
temps, le HTML permet de structurer des contenus en ligne grâce à un
système de balisage qui permet l’hypertextualité et la navigation d’un élé-
ment à un autre au sein d’une même page (on parle d’encre) ou d’une
page à une autre, au sein d’un site ou depuis un site vers un site tiers,
vers un réseau social ou vers une application… Pour qu’un document
soit lisible par l’infrastructure Web il faut qu’il soit marqué par le HTML
qui va en définir la structure. Il sera ensuite interprété au moment d’être
affiché pour l’utilisateur. Le langage s’enrichit peu à peu pour intégrer

8
Internet : un espace de communication ouvert

de nouvelles balises comme celles qui permettront de gérer des images. 1


Aujourd’hui le HTML5 offre des possibilités étendues adaptées à la com-
plexité des sites Web actuels (animations, objets dynamiques, vidéos,
etc.).
La question du langage de programmation utilisé pour créer des pages
sur le Web nous amène à nous pencher sur un autre composant essentiel
au développement du Web : l’interface. Dans l’histoire d’Internet, c’est la
partie dont les évolutions sont les plus visibles puisque directement en
contact avec l’utilisateur. Au-delà des évolutions techniques et historiques
– de Mosaic à Chrome en passant par Internet Explorer –, l’interface est
un sujet central pour comprendre la communication digitale. C’est là que
se noue la rencontre entre émetteur et récepteur (entre client et serveur
sur le plan technique) dans un jeu complexe de décryptage, d’interacti-
vité, de compréhension et parfois d’incompréhension.

„„ Krach et expansion
À partir de la deuxième moitié des années 1990, Internet s’ouvre progres-
sivement au grand public. Les évolutions techniques décrites précédem-
ment font sortir le réseau Internet du pré carré réservé aux chercheurs,
militaires et experts et le rendent accessible à un nombre grandissant
d’utilisateurs privés. Peu à peu Internet se dote d’outils qui renforcent son
intérêt auprès du public. Ses champs d’application s’étendent. En 1995,
dans le même mouvement d’amélioration des interfaces, Microsoft lance
Windows 95, système d’exploitation pour micro-ordinateurs, accompa-
gné du navigateur Internet Explorer. En 1996, c’est le développement des
messageries instantanées (comme ICQ et plus tard Yahoo Messenger et
Microsoft Messenger) qui marque un tournant dans l’histoire d’Internet.
Parallèlement, il faut noter l’apparition du commerce électronique et de
la publicité en ligne à partir de 1994. C’est un nouveau marché qui s’ouvre
et un très grand nombre de nouvelles entreprises voient le jour. Elles
proposent de nouveaux services liés à l’extension d’Internet : des logi-
ciels, des jeux vidéo, l’enregistrement de noms de domaine, des moyens
de communication, des possibilités de faire des achats via l’e-commerce,
d’apprendre via l’e-learning ou les MOOCs  des portails d’information,
des fournisseurs d’accès Internet, des banques, etc. Des acteurs majeurs

9
A La communication digitale et son environnement

du digital comme Amazon, eBay ou Yahoo sont nés durant cette période.
C’est aussi à ce moment que les grands journaux américains et européens
font leur apparition en ligne. Ainsi, dès 1996, le New York Times et Le
Monde lancent leur premier site Internet. La réalité économique de ce
marché du dotcom en référence à l’extension des sites Internet en « .com »
qui se popularisent, s’illustre avec l’entrée en bourse en 1995 de Netscape,
l’un des leaders du monde des navigateurs Web. Internet devient un phé-
nomène amplement relayé par les médias. Il s’incarne à travers la figure de
la start-up ou « jeune pousse », une entreprise innovante à fort potentiel
de croissance qui peut faire l’objet de levées de fonds. Les investisseurs
se tournent massivement vers ces acteurs, souvent jeunes, qui incarnent
la vigueur d’un secteur de plus en plus ouvert au grand public, laissant
entrevoir d’importantes perspectives de croissance et de revenus. Mal-
heureusement, dès 1999, certains experts s’inquiètent des excès d’inves-
tissements et craignent un emballement spéculatif. Leurs inquiétudes se
matérialisent l’année suivante avec l’explosion de la bulle Internet.

1.2  Diffusion et expansion d’un média


de masse hétérogène
„„ Du World Wide Web au Web 2.0
En dépit des désillusions, des dégâts économiques et humains causés
en quelques mois par l’effondrement brutal d’une partie de l’économie
du net, le Web poursuit son expansion auprès d’un public toujours plus
large. À partir de l’an 2000, le statut d’Internet change définitivement. En
1998, 4 % des foyers ont un accès à Internet. En 2002, ce sont déjà 25 % des
foyers français qui disposent d’un abonnement Internet. En 2016, 85 %
des Français ont un accès Internet à domicile (Statista, 2017  ; ARCEP,
2015). Ces chiffres donnent du relief à une adoption très rapide d’une
technologie récente qui, en moins de 15 ans, s’est imposée comme un
moyen de communication incontournable et comme un média de masse.
Si l’évolution du nombre d’utilisateurs a été spectaculaire, les bouleverse-
ments d’Internet sur la forme et sur le fond sont tout aussi remarquables.
Internet en 2017 repose toujours sur la même structure technique qu’au
moment de son lancement sous la forme du World Wide Web (WWW).

10
Internet : un espace de communication ouvert

Nous utilisons toujours des navigateurs en tant qu’interface graphique 1


entre le client (l’ordinateur, la tablette, le téléphone, la montre ou tout
objet connecté de l’utilisateur) et les serveurs (là où est stockée l’informa-
tion, comme un site Web ou une application). Mais Internet diffère radi-
calement par ses évolutions techniques, le nombre d’acteurs et d’usagers,
les possibilités qu’il offre en termes d’usage.
Une expression, à l’origine forgée par le chercheur canadien Marshall
McLuhan (1967), le « village global », est reprise au début des années 2000
pour décrire ce que deviendrait Internet. Dans cette perspective, Inter-
net rapproche des individus et des communautés dont la communication
était jusque-là entravée par l’éloignement géographique. Il y a derrière ce
concept de village global l’idée d’un rapprochement culturel, parallèle au
mouvement de globalisation des économies mondiales. Ce processus est
bien antérieur à Internet, qui ne viendrait ainsi qu’en renforcer le principe
en facilitant la communication à une échelle mondiale. Il est vrai, d’abord,
que la standardisation technique du World Wide Web permet à tous les
utilisateurs d’accéder aux mêmes contenus, à partir de n’importe quel
ordinateur dans pratiquement tous les pays du monde. Ensuite, Internet
apporte une immédiateté nouvelle dans les interactions entre les indivi-
dus qui peuvent échanger en temps réel sans limitation géographique. On
peut désormais discuter via une messagerie (« chat ») en direct avec un
individu situé sur un autre continent, commander un livre à l’étranger sur
le site Amazon, regarder une vidéo produite à l’autre bout du monde. En
revanche, l’idée d’une uniformisation culturelle et d’une homogénéisation
des expériences et des pratiques digitales reste discutable. Au contraire,
les immenses possibilités offertes par Internet entraînent une forte dif-
férenciation des pratiques, presque au niveau individuel. Les internautes
ne sont par ailleurs pas débarrassés de leurs déterminants sociologiques
liés à leur âge, leur milieu social, leur environnement culturel, au moment
où ils se mettent à interagir en ligne. L’âge, le genre, le milieu social, les
revenus, la culture, la langue ou la nationalité demeurent des facteurs qui
déterminent des pratiques différenciées en ligne. Certains pays mettent à
mal l’uniformité du Web en interdisant temporairement ou de manière
permanente l’accès à certains sites. C’est le cas de la Chine où certains
sites, ainsi que des mots clés sur les moteurs de recherche, sont bloqués.

11
A La communication digitale et son environnement

Figure 1.1 Le site Web de la marque en Apple en 1996

Figure 1.2 Le site Web de la marque Apple en 2017

12
Internet : un espace de communication ouvert

C’est probablement parce qu’il n’a pas résisté à la réalité de l’usage d’Inter- 1
net que la notion de village global semble disparaître peu à peu des discours.
Ce glissement correspond à l’apparition d’une nouvelle étape dans l’évo-
lution d’Internet : le Web 2.0. Ce terme décrit un tournant dans l’histoire
d’Internet, puisqu’il correspond à la généralisation du droit en écriture qui
marque l’avènement d’un Internet contributif. Les utilisateurs, les consom-
mateurs deviennent acteurs d’un Internet dont ils peuvent construire eux-
mêmes les contenus. Chaque internaute a la possibilité de modifier une
page (en y ajoutant du texte, une image, un commentaire) ou d’en créer
une nouvelle avec son propre contenu. La dimension participative s’incarne
d’autant plus qu’un nouveau type de plateforme a fait son apparition dans le
paysage du Web : les réseaux sociaux. Des premiers forums Internet Usenet,
jusqu’à l’explosion de Facebook depuis 2007, on assiste à un renforcement
de la dimension sociale d’Internet. Cette dimension opère une mutation
des modes d’accès à l’information qui ne se fait plus seulement à partir des
moteurs de recherche, mais via des contenus échangés, partagés, commen-
tés sur ces plateformes. Cela modifie les processus de communication entre
les individus et entre les individus et les organisations. Nous explorerons
dans un chapitre ultérieur comment se composent, d’un réseau à l’autre, les
modalités spécifiques de cette communication socialisée.

„„ Un espace hétérogène
Le rythme soutenu avec lequel Internet se diffuse à partir du début des
années 2000 entraîne rapidement des interrogations sur son statut. Inter-
net est-il un média ? En tant que support technique qui sert à communi-
quer, Internet répond bien à la définition d’un média. Sa dimension, sa
puissance technique qui permet la consultation et la création simultanée
de texte, d’images, de vidéos et de musique en font un média singulier. De
cette particularité est né le concept d’hypermédia : un espace qui, de par
son ampleur occuperait peu à peu une position englobante par rapport
aux autres médias traditionnels. Les frontières, les principes et le statut
d’un support de communication doivent être appréhendés le plus pré-
cisément possible, pour donner corps à une stratégie de communication
cohérente qui déploie des messages adaptés aux formats en vigueur et
aux cibles visées. Malgré des évolutions (formats, technologies, etc.), la

13
A La communication digitale et son environnement

presse écrite, la télévision, la radio, le cinéma, l’affichage, et les supports


publicitaires qui y sont rattachés proposent un cadre de communication
identifié et relativement stable. Ce cadre permet d’anticiper les modalités
de la fabrication d’un discours, d’une prise de parole et de la mise en rela-
tion avec un destinataire, soit tout ce qui a trait à la mise en place d’une
communication. Or Internet pose un cadre de communication mouvant.
Il est aussi, par certains aspects, insaisissable : les spécificités techniques,
les usages et les supports évoluent parfois trop rapidement pour pouvoir
se les approprier sans un temps d’adaptation conséquent.
Internet est donc en réalité un média fortement hétérogène. C’est cette hété-
rogénéité qui fait la complexité de la communication digitale. La pénétra-
tion d’Internet chez les particuliers s’est accompagnée d’un développement
massif de services en ligne variés. À mesure que la puissance des serveurs
et des accès Internet augmente, de nouveaux supports ont fait leur appa-
rition au côté du texte. Dès le début des années 2000, il était ainsi possible
d’échanger en ligne des images, des vidéos, de la musique. L’hypertextua-
lité évoquée s’est trouvée enrichie de ces nouveaux supports multimédias :
un lien textuel peut mener à une vidéo qui peut elle-même renvoyer à un
article ou à une archive sonore, un extrait de musique ou de conférence,
sur un réseau social comme Soundcloud (https://soundcloud.com) par
exemple. Dans le même temps, le nombre d’acteurs et de sites Web s’est
aussi considérablement accru. On comptait un million de sites en 1997, il
en existe aujourd’hui plus d’un milliard d’après Wikipédia. Alors que les
premiers réseaux Arpanet étaient principalement réservés à une sphère de
techniciens et d’ingénieurs spécialistes, il est devenu possible avec Inter-
net, pour un particulier, de créer son propre site Web. Les institutions, les
médias ou les marques ont donc parallèlement investi eux aussi cet espace
de communication à mesure qu’il s’ouvrait au grand public. L’apparition
de solutions comme Wordpress, Joomla ou Drupal, qui sont des Systèmes
de gestion de contenu ou « CMS » (Content Management Systems) permet
à chacun, experts comme amateurs, de créer et d’administrer une page
Web. Le succès des Youtubeurs par exemple, repose sur la simplicité avec
laquelle il est possible pour un particulier de filmer, monter et diffuser très
facilement et très rapidement ses propres contenus vidéo. Tout en attirant
pour certains des millions de fidèles (Cyprien, Norman, Pew Die Pie, etc.).

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