Histoire de La Pédaggie
Histoire de La Pédaggie
Histoire de La Pédaggie
DU MÊME A U T E U R
HISTOIRE
DE LA PÉDAGOGIE
PRÉFACE DE M. ANDRÉ BAUDRILLART
AGRÉGÉ DE L'UNIVERSITÉ
ONZIÈME MILLE
IMPRIMATUR :
S Stephani, die 2a maii 1924.
STEPHANUS-I REN US
E p . Abyd., auxil.
D R O I T S D E T R A D U C T I O N E T D E R E P R O D U C T I O N R É S E R V É S P O U R TOUS L E S P A Y S
C O P Y R I G H T BY E M M A N U E L V I T T E
PREFACE
Le livre que l'on va lire est avant tout une histoire de la pédagogie, nom
un peu rerêche d'une science et d'un art. Science, puisqu'elle implique,
à tout le moins, la connaissance de la psychologie et même d'une partie
de la physiologie; art pour ce qu'elle comporte d'adaptation, de souplesse,
de savoir faire, et aussi de dons naturels. Les principaux systèmes,
et ils sont légion, qui se sont fait jour presque depuis les origines histo-
riques, sont donc ici analysés et appréciés successivement, leurs appli-
cations exposées et jugées. Mais c'est aussi un livre de principes et
l'auteur n ' a pas hésité à soutenir les siens ayec une genéreuse fermeté,
a les affirmer avec une loyauté à laquelle les adversaires mêmes de sa
pensée rendront certainement hommage. C'est que la pédagogie n'est
pas une science abstraite. Elle opère sur la matière vivante et sur ce qu'il
y a de plus essentiel et de plus precieux dans la nature humaine, l'âme,
dont elle assure la formation.
L'Antiquité
CHAPITRE PREMIER
Bibliographie (2). — A BROS, La Religion des peuples non civilisés (Paris, 1907). —
CHRISTUS, Manuel d'histoire des Religions, ch. I et II (Paris, 1912) — Cyclopedia of
education, art. Primitive peoples (New-York, 1911). — Dictionnaire apologétique, art.
Animisme, Fétichisme, Naturisme. — EASTMAN, Indian boyhood (New-York, 1902). —
Mgr LE ROY, La Religion des primitifs (Paris, 1909). — P. MONROE, A text-book in
the history of education, ch. I (New-York, 1906).
CHAPITRE II
L 'ÉDUCATION EN C H I N E
(1) D i c t i o n n a i r e de p h i l o s o p h i e a r t , C o n f u c i u s ,
Le taoïsme est la doctrine du Tao, livre capital de Lao-tseu, philosophe
contemporain de Confucius. Son enseignement se résume en une espèce de
panthéisme, et sa morale en la doctrine du non-agir. II veut que le peuple
vive dans le bien-être et la tranquillite, mais sans recevoir d'instruction,
afin d'echapper a u x désirs inquiets, inassouvis, qui en sont la suite.
Bibliographie. — BIOT, Essai sur l'instr. publ. en Chine (Paris, 1847). — M. COU-
RANT, Etudes sur l'éducation et la colonisation (Paris, 1904). — Cyclopedia of educa-
tion, art. China. — S. S. LAURIE, Historical survey of Pre-Christian education (Lon-
dres, 1907). — MARTIN, The Chinese, their education, philosophy and letters (New-
York, 1881). — Nouv. Diction. de pédagogie, art. Chine. — R. P. WIEGER, La Chine
moderne, 3 vol. (Paris, 1922).
L' É D U C A T I O N A U J A P O N
CHAPITRE IV
L'ÉDUCATION D E S INDOUS
CHAPITRE V
CHAPITRE VI
CHAPITRE VII
CHAPITRE VIII
CHAPITRE IX
- L'ÉDUCATION EN GRÈCE
(1 PLATON, P r o t a g o r a s .
récents de la famille. Les statues des dieux, par la beauté de leurs
formes, lui donnaient l'idée de la perfection. Enfin, les fêtes publiques,
éclatantes, d'un remarquable caractère esthétique, où il n'était pas
simplement spectateur, mais le plus souvent acteur, étaient très
propres à développer en lui des sentiments de piété. En outre, pour
s'offrir aux regards des dieux les jeunes gens devaient déployer tous
les dons de l'âme et du corps ; ils regardaient comme un très grand
honneur de porter la couronne sacrée et d'approcher tout particu-
lièrement des autels.
Littérature. — L'enseignement littéraire avait pour but de former
le goût et faire aimer la vertu. La littérature fut l'élément habituel
de la jeunesse grecque. On ne concevait pas même d'autre école que
celle des poètes. Au foyer paternel, l'enfant entendait de merveilleux
récits, et lorsque, vers sept ans, il se présentait à l'école, son imagi-
nation était remplie de fictions poétiques. A l'école, c'était dans les
ouvrages des grands poètes qu'il faisait ses lectures. Il apprenait
des extraits d'Homère, de l' Iliade surtout, parce que Achille était le
héros préféré du peuple grec ; à côté d'Homère on plaçait Hésiode et
Euripide ; on faisait une part très large aux gnomiques : Solon,
Minmerne, Theognis, etc. Les autres exercices scolaires: écriture,
grammaire, essais de composition, étaient faits au moyen d'extraits
d'auteurs. Enfin, le milieu où vivait l'enfant était éminemment poé-
tique. Les orateurs citaient les grands écrivains pour se donner l'appui
de leur autorité ; dans les théâtres on représentait les œuvres d'Es-
chyle, de Sophocle, d'Euripide ; dans les panathénées on lisait d e s
extraits d'Homère. La poésie avait sa place dans toutes les fêtes.
Enfin, la statuaire et la céramique reproduisaient les plus belles
inspirations des poètes épiques et dramatiques.
Musique. — Les Grecs regardaient la musique comme un des meil-
leurs moyens d'éducation. Les philosophes répandaient cette idée
parmi le peuple en disant que le rythme et l'harmonie agissent sur
l'âme, la dépouillent de sa rudesse, lui communiquent le tact et la
modération, la rendent acessible aux idées du beau et du juste.
L'éducation musicale eut donc toujours un but moral : assouplir
l'âme, régler ses mouvements désordonnés, inspirer des sentiments
de vertu et de patriotisme, donner de l'élégance au maintien. Elle
servait de correctif à une culture physique excessive. « Il faut regarder
les Grecs, dit Montesquieu, comme une société d'athlètes et de combat-
tants ; or ces exercices si propres à former des gens durs et sauvages,
avaient besoin d'être tempérés par d'autres qui pussent adoucir les
mœurs. La musique, qui tient à l'esprit par les organes du corps,
était très propre à cela. »
Les instruments en usage étaient la lyre et la cithare, l'aulos, sorte
de flûte à bec, et la syringe, sorte de flûte de Pan. Les anciens prohi-
baient la flûte comme propre à exciter les passions mauvaises. Après
les guerres médiques, elle fut quelque temps en usage, mais on l'aban-
donna parce que les contractions des lèvres qu'elle occasionne rendent
le visage difforme et le chant impossible.
Gymnastique. — La gymnastique, nécessaire au développement
harmonieux du corps, fut enseignée avec un soin particulier. L'État
s'en préoccupait et attachait à cet enseignement la plus grande
importance.
Les exercices physiques contribuaient à la formation morale de
l'enfant ; ils l'accoutumaient à la soumission aux autorités, à la disci-
pline, l'endurcissaient à la fatigue, donnaient à ses mouvements l'élé-
gance et la grâce et contribuaient à l'harmonie du corps et de l'âme.
La danse était regardée comme le complément de la musique et de
la gymnastique. « Elle parlait à l'âme, par le geste, les attitudes nobles
ou gracieuses et le sens des paroles chantées ; elle favorisait la santé,
la beauté des mouvements, l'agilité (1). » Chez les Athéniens, la danse
était une institution nationale. Elle figurait au programme de toutes
les fêtes religieuses et civiles.
Éducation des anciens Grecs.
Platon a raison de dire qu'Homère fut le véritable éducateur des
Grecs. Bien avant l'apparition de l'Iliade, ils avaient reçu de l'Orient
certaines doctrines qu'ils conservaient précieusement ; mais aucun
livre ne nous renseigne sur cette culture traditionnelle. Dès que les
chefs-d'œuvre d'Homère eurent reçu leur forme définitive, la Grèce
y reconnut ses traditions. L'Iliade devint le poème national par
excellence, l'épopée de la patrie hellénique. Les Grecs y trouvèrent,
(1) DAMSEAUX, H i s t o i r e de a p é d a g o g i e , 4 é d . , p. 35.
avec l'histoire de la race, leur théologie et leurs sciences sacrées. Les
bardes, les peintres, les sculpteurs y cherchèrent l'inspiration de leurs
œuvres les plus célèbres.
L'Odyssée fut le poème des traditions et des coutumes domestiques.
Les Hellènes en tirèrent leur philosophie morale, leur éloquence, leur
généalogie et des connaissances géographiques. Plus tard, ils en firent
même le fondement de leur philologie, de leur critique des textes et
de leur grammaire.
Ils trouvèrent également dans les
œuvres d'Homère leur idéal d'édu-
cation : faire de chaque citoyen un
homme d'action et un sage. Ulysse, par
sa bravoure, son respect pour les dieux
et cette maîtrise de soi-même qui l'em-
pêche d'aller aux extrêmes, devint le
type de l'homme d'action. Achille, dont
la pensée est toujours soumise à la
raison et à la réflexion, fut le type de
l'homme sage. Au point de vue reli-
gieux, l'idéal des Grecs, calqué sur ce-
lui de ces deux héros, fut de s'élever à
la divinité par la culture formelle des
facultés corporelles et spirituelles. Cette
tendance de l'éducation développa
HOMÈRE. (1 ) chez eux l'individualisme et le senti-
ment de la liberté civile.
Telle fut, dans son ensemble, l'éducation grecque. Mais chacune des
grandes races dorienne et ionienne appliqua ces principes selon son
idéal particulier. Il est donc nécessaire d'étudier séparément les
Spartiates et les Athéniens.
L'éducation à Sparte.
L'organisation de l'éducation spartiate remonte à Lycurgue (880av. J.-C.).
Cet illustre législateur avait emprunté quelques-unes de ses idées à Minos,
roi de Crète, qui, dès la plus haute antiquité, avait amené cette île à un
(1) La plupart des clichés représentant les grands éducateurs nous ont été gracieuse
m e n t communiqués par la direction de l'Editorial Luis Vives, Barcelone.
remarquable état de civilisation. Lycurgue visa surtout à former des sol-
dats parce que Sparte était sans cesse menacée par les autres peuples de la
Laconie, et que lui-même, pour se maintenir au pouvoir, avait besoin d'une
force militaire imposante.
( 1 ) F U S T E L DE COULANGES. L a C i t é a n t i q u e , 2 3 éd. p. 16 6 .
des théâtres, des stades pour les courses. Athènes eut trois gymnases
célèbres : l'Académie, le Lycée, le Cynosarge. Les deux premiers
furent illustrés par l'enseignement de Platon et d'Aristote.
(1) Isocrate (436-338) a exercé une influence considérable sur l'éducation des Grecs
et des Romains. Il réagit contre l'enseignement donné par les sophistes et, vers 390, il
ouvrit une école de rhétorique où il se proposa de former les jeunes gens à la vie publique
et à l'action. Il a d m e t t a i t à ses leçons les élèves qui possédaient déjà des connaissances
assez étendues, et leur enseignait la philosophie, la littérature et l'art oratoire. Par
l'heureux choix des sujets à traiter, p a r l'idéal élevé qu'il leur proposait, Isocrate tra-
vaillait à la formation du caractère et à l'éducation morale. Le bon goût, la rectitude
du jugement, la conduite exemplaire, la maîtrise de soi-même, la modestie, tels sont
d'après lui, les caractères auxquels on reconnaît un homme bien élevé.
Son école eut un plein succès ; il en sortit des hommes d ' É t a t , des orateurs, des avo-
cats, des historiens. Elle contribua dans une large mesure à faire d'Athènes le centre
intellectuel du monde. Des écoles du même genre se répandirent en Orient et surtout à
Rome où pendant de longs siècles elles préparèrent la jeunesse aux carrières libérales et
aux emplois publics.
Organisation des écoles athéniennes.
L'école.— Au sujet des écoles, Solon n'avait donné que des préceptes
généraux : « Les garçons doivent, avant toute chose, apprendre à
nager et à lire ; les pauvres seront ensuite exercés à l'agriculture ou
à un métier ; les riches feront de la musique et de l'équitation et
s'adonneront à la fréquentation des gymnases, à la chasse et à la
philosophie. » L'organisation scolaire fut le résultat de l'initiative
privée d'un peuple ami des arts et des sciences. La République n'in-
tervint ni dans les constructions d'écoles, ni dans la nomination des
maîtres ni dans le choix des matières ou l'emploi des méthodes d'en-
seignement.
Dans les temps anciens, l'école se tenait dans un coin de rue,
sur une place publique. Plus t a r d des locaux spéciaux furent bâtis.
Les grandes cités eurent plusieurs écoles.
Le maître et la classe. — Le maître était appelé grammatiste. Son
emploi, regardé comme inférieur, était peu estimé. L'enseignement
était le dernier refuge de celui qui avait tout essayé. On disait commu-
nément d'un disparu : « Il est mort », ou « il enseigna l' alphabet ».
Démosthène, dans son Discours pour la couronne, reproche à son adver-
saire d'avoir aidé son père à balayer son école.
En classe, le maître se plaçait sur un siège élevé ; ses élèves se
groupaient autour de lui, car il n ' y avait ni bancs ni tables. Le long
des murs étaient étalés différents objets nécessaires à l 'enseignement :
tableaux de lecture et d'écriture, boîtes pour les rouleaux manu-
scrits, planchettes pour le calcul, cailloux pour la numération, casiers
pour les instruments de musique. On prétend même qu 'il y avait des
tableaux noirs pour les démonstrations. Certaines classes étaient
ornées d'images et de peintures.