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Algodystrophie

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ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 14-286-A-10

14-286-A-10

Algodystrophie
C Masson R é s u m é. – L’algodystrophie est un syndrome douloureux régional complexe caractérisé
M Audran par des anomalies neurovasculaires, le plus souvent confiné à un membre, un segment de
membre ou une zone encore plus limitée, par ordre de fréquence la région distale, après un
événement initiateur. Son évolution naturelle est divisée en trois stades (inconstants) : aigu
ou pseudo-inflammatoire, dystrophique, puis atrophique, avec un chevauchement possible
entre ces stades. La douleur disproportionnée par rapport à l’événement initial est continue
et accentuée avec l’essai d’utilisation des articulations affectées. La douleur spontanée,
l’allodynie, l’hyperalgésie et/ou l’hyperpathie ne se limitent pas au territoire d’un seul nerf
périphérique. L’œdème, les anomalies du flux vasculaire cutané, les anomalies
sudoromotrices sont perceptibles cliniquement pour les atteintes distales ou mésoméliques.
L’hyperperméabilité vasculaire transitoire dans la zone affectée est bien mise en évidence
par les signes d’imagerie par résonance magnétique (IRM) et la scintigraphie aux trois
temps. Cette dernière, avec le méthylène-bisphosphonate marqué au technétium 99m,
permet une évaluation des anomalies vasculaires et de l’activité des ostéoblastes. Certains
patients, des adultes jeunes et surtout des adolescents de sexe féminin, peuvent ne pas
avoir d’œdème, en particulier osseux, dans la zone affectée et la scintigraphie montre alors
une hypofixation du radiotraceur par rapport au côté opposé. La déminéralisation locale
retardée – quand elle est présente –, peut être mise en évidence par des radiographies, le
scanner ou les techniques modernes de mesure directe du contenu minéral osseux.
L’importance de la perte osseuse dans l’algodystrophie, en quelques semaines ou mois, est
possiblement celle survenant en 10 ans d’évolution d’une ostéoporose commune. Une
fracture initiale est indiscutablement un événement initiant fréquent de l’algodystrophie, mais
les patients souffrant d’algodystrophie peuvent garder une déminéralisation prolongée et
être ainsi à risque de développer une fracture. La causalgie, les fractures trabéculaires,
l’ostéoporose régionale transitoire, la rétraction capsulaire, l’ostéonécrose aseptique sont
discutées au diagnostic différentiel.
© 1999, Elsevier, Paris.

Introduction adultes jeunes) sont de plus en plus fréquentes ou diagnostiquées. Aux


membres supérieurs, les localisations à la main et au poignet, à l’épaule sont
L’algodystrophie est un syndrome régional douloureux vasomoteur et fréquentes, l’association de ces deux localisations (assez rare) étant appelée
trophique portant sur des structures sous-cutanées, articulaires, syndrome épaule-main. L’algodystrophie du coude est plus exceptionnelle,
périarticulaires et osseuses, le plus souvent d’un segment de membre en règle mais possible. Aux membres inférieurs, les atteintes du pied et de la cheville
après un traumatisme. Le traumatisme est modéré sur des zones riches en sont plus fréquentes que celles du genou et de la hanche. La richesse différente
terminaisons nerveuses ou important : fractures incluant l’os cortical, en terminaisons nerveuses des différents segments de membre imprime une
d’emblée radiologiquement visibles, ou fractures corticales et surtout expression variable à l’algodystrophie des membres selon ses sites distaux
trabéculaires occultes les premières semaines en radiologie standard, (mains-poignets, pieds-chevilles), mésoméliques (genoux, coudes) ou
principalement sur un membre inférieur après un traumatisme ou un effort rhizoméliques (hanche, épaule).
prolongé plus important que d’habitude. Quand la fracture survient L’algodystrophie évolue spontanément en trois phases résumées sur le
spontanément ou après un effort modéré, c’est la fracture en elle-même qui tableau I. Le stade I comporte une hyperperméabilité locorégionale dans la
représente le facteur traumatique local épiphysaire qui va déclencher zone affectée (phase dite aiguë ou chaude). Le second, qui peut inaugurer la
l’algodystrophie. À la lésion initiale douloureuse succède une réponse maladie, est sclérodystrophique (phase froide). Durant cette phase,
anormale, au moins dans sa prolongation, du système nerveux. l’hyperperméabilité locorégionale initiale laisse place à l’installation
progressive d’une fibrose régionale pouvant porter sur l’ensemble des tissus,
L’algodystrophie survient à tout âge, dans les deux sexes (avec une
peau, muscle, ligament, tendon, aponévrose, capsule articulaire, synoviale,
prédominance féminine). Les formes du sujet jeune (enfants, adolescents,
tissu osseux, voisinage de neurorécepteurs, autres structures nerveuses et
vaisseaux sanguins. Son aboutissant est le stade III, atrophique, source de
séquelles.
Il n’y a pas de réponse de phase aiguë dans l’algodystrophie. Les patients
Charles Masson : Rhumatologue des Hôpitaux. n’ont pas de fièvre. Mais les signes locaux, dans l’aire affectée au stade I,
Maurice Audran : Professeur des Universités, rhumatologue des Hôpitaux ; suggèrent une inflammation vasculaire : gonflement, œdème marqué,
Service de rhumatologie, centre hospitalier universitaire, 4, rue Larrey, 49033 Angers
© Elsevier, Paris

cedex 01, France. augmentation de la température locale, rougeur. Des explorations isotopiques
au stade I révèlent une augmentation de la perméabilité microvasculaire dans
la zone algodystrophique, pour les protéines de haut poids moléculaires
Toute référence à cet article doit porter la mention : Masson C et Audran M. Algodystrophie.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Appareil locomoteur, 14-286-A-10, 1999, 13 p.
(immunoglobulines G [IgG]) marquées à l’indium 111 ainsi que pour les
hématies. Le signe d’une hyperfixation plus étendue sur le segment de
14-286-A-10 ALGODYSTROPHIE Appareil locomoteur

Tableau I. – Les trois stades de l’algodystrophie.

Stade I : stade « aigu » d’hyperperméabilité locorégionale transitoire


Il dure de quelques semaines à 3 mois, mais certains patients passent directement au
stade II
La douleur débute dans la région du site traumatisé, augmente volontiers à la mobilisation,
à la pression, à la chaleur, aux émotions
Des signes autonomiques sont nets : augmentation du flux sanguin, provoquant rougeur,
hyperthermie locale, œdème, pousse accrue des phanères
L’ostéoporose commence
Stade II : stade dystrophique
Il commence à la fin du stade I et dure plusieurs mois, parfois presque une année ou plus
La douleur s’aggrave en extension, en intensité ; le froid, plutôt que le chaud, augmente la
douleur
Une hyperactivité sympathique apparente est présente : diminution du flux vasculaire
avec cyanose, peau froide, troubles des phanères, hypersudation
La fibrose commence
L’ostéoporose devient marquée
L’atrophie commence
Stade III : stade atrophique
Il commence à la fin du stade II et dure 2 ans ou plus après le début de la maladie
La douleur peut rester importante pour ensuite s’atténuer
Des dommages tissulaires potentiellement irréversibles surviennent : aux extrémités peau
brillante, fine, pâle, tissu sous-cutané atrophique (aspect en pencil-pointing)
Le gonflement a disparu. La raideur et la limitation des mouvements prédominent
L’ostéoporose est présente de façon nette sur le segment de membre ou le membre
NB Les stades sont plus ou moins marqués, inconstants. Le stade II est le mode d’entrée dans la maladie pour
1 Plasmostase osseuse rosée aspécifique de Rutishauser (illustration réalisée par MF
certains patients. Baslé, LHEA Angers).

Tableau II. – Situation terminologique historique. Liste partielle des termes utilisée par les auteurs et à intégrer la discussion de l’ostéoporose régionale
appliqués. migratrice et de la rétraction capsulaire au diagnostic différentiel. Dans l’état
actuel de nos connaissances, ce point de vue est arbitraire. Certains
A. Dystrophie sympathique B. Ostéoporose régionale transi- considèrent l’ostéoporose régionale transitoire, migratrice et la rétraction
réflexe* [23, 51, 85] toire* capsulaire comme deux formes cliniques particulières de l’algodystrophie.
Causalgie de Weir-Mitchell, 1864 Ostéoporose/déminéralisation/ ostéo-
Atrophie aiguë de l’os de Sudeck, 1900 pénie transitoire
Trophoneurose périphérique aiguë de Zur Ostéolyse migratrice
Verth, 1929 Ostéoporose régionale migratrice Algodystrophie post-traumatique
Angio- ou vasospasme traumatique de Morton Ostéoporose régionale idiopathique
et Scott, 1931, Lehman, 1934 Ostéoporose transitoire douloureuse d’un segment de membre
Ostéoporose post-traumatique de Fontaine et Ostéoporose transitoire radiologique
Hermann, 1933 Ostéoporose idiopathique transitoire
Dystrophie réflexe sympathique des extrémités Ostéoporose régionale douloureuse Traumatisme responsable sur l’appareil locomoteur
de Takats, 1937 Algodystrophie*
Causalgie mineure de Homans, 1940
Sclérodactylie postinfarctus de Johnson, 1943
Œdème médullaire osseux transitoire* Une fracture corticale et trabéculaire d’un membre se complique
Rhumatisme neurotrophique de Ravault, 1945 régionalement sur ce membre d’une algodystrophie avec une grande
Syndrome épaule-main de Steinbrocker, 1947 incidence. La fracture distale de l’avant-bras se complique volontiers d’une
Dystrophie réflexe neurovasculaire* de Stein- algodystrophie de la main et du poignet homolatéral. Ainsi 77 patients sur 274
brocker, 1947
Dystrophie réflexe sympathique* d’Evans, (28,1 %) ont des signes d’algodystrophie 2 semaines après avoir enlevé leur
1947 contention [8], et même 24 patients sur 60 – soit 40 % –, ont des signes
Ostéoporose algique post-traumatique de d’algodystrophie 9 semaines après la fracture [4] . Sur 60 patients vus
Leriche consécutivement pour une fracture de la diaphyse tibiale, 18 – soit 30 % –
Maladie de Sudeck-Leriche
Algoneurodystrophie décalcifiante diffuse, développent une algodystrophie [94]. Des fractures occultes, corticales ou
sympathique réflexe trabéculaires, quelles que soient leurs origines, leurs modes de survenue,
Algodystrophie* quelles que soient leurs localisations aux membres, surtout inférieurs, peuvent
Pseudodystrophie*
Syndrome régional douloureux complexe de
se compliquer d’algodystrophie, en particulier si leur diagnostic n’a pas été
type I* (1995) [100] porté précocement (patient non mis au repos). Une immobilisation prolongée,
* Termes privilégiés pour le suivi actuel de la littérature. une kinésithérapie inadaptée, des luxations, des entorses sur un membre, un
acte chirurgical (orthopédique, thoracique, vasculaire) sont source
d’algodystrophie, de même qu’une contusion paraissant modérée sur un site
membre en scintigraphie osseuse conventionnelle (extended pattern) est lié à riche en terminaisons nerveuses (main, poignet, dessus du pied, cheville,
l’hyperhémie régionale. Cette hyperperméabilité microvasculaire régionale, genou) [10].
caractéristique du stade I, explique l’œdème des parties molles, assez ferme
Il n’y a pas de parallélisme entre la sévérité du traumatisme et la survenue
car riche en protéines, et l’œdème de structures plus profondes : osseuses
d’une algodystrophie. Des patients ayant un traumatisme d’intensité égale
(plasmostase osseuse) (fig 1), articulaires (épanchement articulaire, œdème
dans deux localisations symétriques peuvent développer une algodystrophie
de la membrane synoviale) et des structures périarticulaires. L’IRM est le
d’un seul côté. Une hypothermie régionale paraît un mécanisme réactionnel
moyen moderne de démontrer la présence de cet œdème dans les tissus
assez fréquent après un traumatisme. Ainsi, chez 207 recrues militaires sur
superficiels et profonds algodystrophiques.
1 000 étudiées pendant un entraînement assez intensif [20], elle survient, dans
Les signes autonomiques (modifications du flux sanguin, hyperhidrose, 8,6 % des cas, 24 à 48 heures après la lésion orthopédique (entorse, douleur
œdème) traduisent ou évoquent un dérèglement localisé, intense et durable, de la cheville, fractures de fatigue) et elle est notée dix fois chez 32 recrues
du système nerveux végétatif. Tout se passe comme si des agressions, venues avec fractures de fatigue non compliquées d’une algodystrophie. Il y a
de la périphérie, déclenchaient des impulsions efférentes anormales, au moins vraisemblablement tout un continuum entre la réponse physiologique à un
par leur intensité et leur durée, responsables des perturbations vasomotrices traumatisme et la constitution d’une algodystrophie [9].
par un arc réflexe avec, comme voie afférente, les nerfs sensitifs ou des
structures proches ; comme centre, les formations végétatives de la moelle ;
et comme voie efférente, les fibres sympathiques postganglionnaires ou Tableau clinique d’installation progressive ou rapide
d’autres fibres proches. Il n’y a pas une équivalence entre la douleur
maintenue par le système sympathique (un mécanisme de douleur) et Évoquent une algodystrophie post-traumatique sur le segment de membre
l’algodystrophie (qui n’est pas définie par un mécanisme de douleur) [35]. Si la lésé et à son voisinage :
participation du système nerveux périphérique est certaine – avec des – un œdème assez ferme (brawny edema), persistant au-delà du délai de
mécanismes plus complexes qu’il n’apparaissait [6] –, la participation du guérison du traumatisme initial (souvent moins de 6 semaines, rarement plus
système nerveux central est également indiscutable, ne serait-ce que par les de 12 semaines), rendant une contention douloureuse ;
pathologies touchant le système nerveux central et responsables – une douleur après un intervalle libre de quelques jours ou semaines,
d’algodystrophie (cf infra). anormalement intense par rapport au degré du traumatisme initial, à la reprise
La difficulté nosologique, bien mise en évidence par la terminologie de la fonction articulaire ou au repos (même la nuit), avec une impotence
historique (tableau II) entre algodystrophie et, d’une part, l’ostéoporose fonctionnelle parfois majeure ;
régionale transitoire, migratrice, d’autre part la rétraction capsulaire, nous a – la survenue de troubles vasomoteurs, d’une hyperhidrose, d’un
conduit à analyser les données de la littérature en fonction de la terminologie enraidissement articulaire passif, actif.

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2 Algodystrophie du pied : si-


gnes vasomoteurs.

La douleur algodystrophique est ressentie dans la région affectée sous forme


d’un élancement, de fourmillements, de picotements (paresthésies), d’une
brûlure ou bien quelque chose d’aigu, ou souvent sans autre précision que : 3 Scintigraphie osseuse main-poignet : hyperfixation tardive.
« C’est une douleur. » Elle est présente au repos, volontiers aussi la nuit, à la
pression légère ou au simple toucher (hyperesthésie), dès l’essai de mise en
fonction du membre affecté (boiterie, marche avec une ou deux cannes pour et une demi-vie de 6 heures. La courbe obtenue à la première minute suivant
le membre inférieur). Parfois toute stimulation non douloureuse est ressentie son injection intraveineuse reflète le réseau vasculaire par rapport au côté
comme une douleur (allodynie). Une stimulation douloureuse peut entraîner opposé : le premier segment a une pente ascendante élevée qui dure 13 à
une douleur hors de proportion avec le stimulus douloureux (hyperalgésie). 17 secondes chez le sujet normal ; il traduit le passage du traceur dans les
L’application de chaud (parfois de froid) majore la douleur (thermodynie) ou artères et les capillaires (flux sanguin). Ce temps angiographique précoce est
au contraire la soulage. Les moindres excitations sensitives ou affectives suivi d’une cassure correspondant à une courte phase veineuse. Le second
(émotions, stress) peuvent entraîner une douleur anormale par son intensité et segment a une pente ascendante moins élevée ; les 45 premières secondes
son caractère angoissant ou encore, chez certains patients, le seuil douloureux apprécient le pool vasculaire en donnant une indication sur le volume et le lit
dépassé, la douleur progresse en intensité plus vite et pour un degré plus élevé vasculaire, et probablement sur la diffusion débutante du traceur dans les
qu’attendu, de façon explosive, en étant encore perçue après arrêt du stimulus espaces extravasculaires. La fixation attendue au temps précoce est accrue
déclenchant (hyperpathie). La douleur globale est quantifiée sur une échelle chez les patients en phase d’hyperperméabilité locorégionale. En phase
visuelle analogique servant de référence. scléroatrophique, la scintigraphie peut montrer une normo- ou une
hypofixation. L’image statique vers la 5e-10e minute représente le temps
Les troubles vasomoteurs dans le territoire douloureux sont nets à la main, au tissulaire appelé « os précoce ». La fixation du traceur y est généralement
pied, à la cheville ou au genou (dans les régions articulaires superficielles) accrue dans l’algodystrophie en phase chaude. L’hyperfixation tardive, entre
(fig 2) : peau rouge ou cyanotique, hyperthermie locale ou alternances rapides la 3e et la 5e heure après l’injection, est le reflet de l’activité ostéoblastique
hyper-/hypothermies locales, œdème assez ferme des tissus mous osseuse, mais aussi du lit vasculaire et de ses débordements (fig 3).
périarticulaires, majoration à l’essai modéré d’activité du membre affecté ou
en charge des signes vasomoteurs, épanchement articulaire paucicellulaire L’accroissement de la fixation osseuse est un paramètre scintigraphique
(moins de 1 000 à 2 000 cellules/mm3), aseptique, sans cristaux (rarement précoce (troubles fonctionnels), sensible, habituel, durable, mais non
ponctionné en pratique dans l’algodystrophie). spécifique. Des localisations régionales ou locales infracliniques, en
particulier sur le même membre, sont parfois découvertes. La réalisation
Progressivement s’installe le stade II algodystrophique, avec disparition de d’une scintigraphie osseuse n’est pas systématique devant toute suspicion
l’œdème et apparition de troubles de la trophicité tissulaire : peau froide, d’algodystrophie. Elle est d’autant plus utile au stade initial, s’il existe un
sèche, cyanotique – en particulier en position déclive –, ou pâle, atrophique, doute pour le diagnostic, à cause d’un site anatomique inhabituel, lors de
hypersudation, troubles des phanères, rétractions capsulaire, tendineuse, discordance entre l’intensité des douleurs et la pauvreté des signes cliniques,
ligamentaire, réalisant à la main une peau d’allure sclérodermiforme, au pied après chirurgie, en cas de problèmes médicolégaux et en cours d’évolution si
un varus équin, au genou un flessum. La douleur, dans les meilleurs cas, l’on craint une extension à un autre site localement, régionalement ou à
s’atténue, mais elle peut rester encore vive, en particulier à la fonction distance, si l’on suspecte une fracture secondaire trabéculaire favorisée par
articulaire. l’ostéoporose locorégionale algodystrophique et en cas de problèmes
Ce stade II est la modalité d’entrée dans la maladie dans un grand pourcentage médicolégaux.
de cas. Dans la série de 829 patients de Veldman et al, 156 sont examinés dès
les 2 premiers mois, 22 % d’entre eux ont une forme d’emblée froide [107]. Une Radiographies comparatives
forme froide primaire est plus fréquente au membre inférieur que supérieur
(154/275 : 56 %, versus 108/403 : 26,8 %). Sur 199 observations Elles montrent une hypertransparence osseuse locale puis régionale, après un
d’algodystrophie du pied, le stade II est présent d’emblée chez 25 % des délai d’au moins 3 à 4 semaines, hétéro- ou homogène (fig 4). Quand la
patients, 10 % des patients ont des rétractions (tendon d’Achille, aponévrose déminéralisation est homogène, la comparaison avec le côté sain fait
plantaire, etc) [32]. comprendre l’importance de l’effacement des travées de l’os trabéculaire,
On note si le patient se considérait avant l’installation de l’algodystrophie réalisant l’atrophie osseuse de Sudeck. La déminéralisation hétérogène se
plutôt émotif, anxieux, dépressif ou hyperactif. traduit par une hypertransparence trabéculaire mouchetée micro- ou
L’algodystrophie n’entraîne ni altération de l’état général, ni fièvre, ni macropolygéodique. La déminéralisation prédominant dans la zone
adénopathies. La vitesse de sédimentation globulaire et la concentration de la épiphysaire sous-chondrale fréquente, nette, souligne la corticale quand
protéine C réactive restent normales ou subnormales (sauf pathologie celle-ci est respectée ou fine (fig 4B). Cette déminéralisation peut s’étendre
intriquée). progressivement dans la profondeur de l’épiphyse ou à la lame osseuse sous-
chondrale, rendant alors le contour épiphysaire transitoirement pratiquement
invisible (fig 4C). L’os cortical est possiblement le siège d’une résorption
Imagerie [70, 72] sous-périostée, ou intracorticale superficielle ou endostéale. Les métaphyses
dans la région algodystrophique, chez des enfants, des adolescents ou des
Scintigraphie osseuse aux trois temps adultes jeunes, sont volontiers le siège de bandes claires (extrémité inférieure
Le méthylène-bisphosphonate marqué au technétium 99m (99mTcMBP), du tibia ou du péroné, extrémité distale ou proximale des métatarsiens ou
radiotraceur le plus utilisé, a une fixation osseuse importante sur les noyaux carpiens, extrémité inférieure du radius, métaphyse tibiale supérieure ou
de phosphate de calcium amorphe, une élimination du produit non fixé rapide fémorale inférieure, selon l’aire affectée), six à sept fois plus souvent que chez

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14-286-A-10 ALGODYSTROPHIE Appareil locomoteur

B C

4 Déminéralisation radiologique algodystrophique.


A. Main algodystrophique versus saine.
B. Déminéralisation sous-chondrale au tarse.
A C. Aspect fantomatique des têtes métatarsiennes.

A B

5 IRM d’algodystrophie.
A. Œdème en hypersignal T2 au col fémoral.
B. Séquence en annulation de graisse : zones condy-
liennes en hypersignal.
C. Œdème de l’arrière-pied isolé périarticulaire prenant
le gadolinium.
D. Hypersignal d’une parcelle osseuse sous-chondrale
tibiale.
C D

les adultes [32]. Ces zones osseuses hypervascularisées déminéralisées se correspondant à la zone ou à une partie de la zone d’hyperfixation
rencontrent dans d’autres pathologies (exemple la leucémie aiguë). scintigraphique [60, 61] (fig 5A). Elle permet, assez souvent pour le membre
L’interligne articulaire est, en règle générale, conservé. La présence d’une inférieur, de mettre en évidence des fractures trabéculaires (six fois chez 14
bande inhomogène de condensation épiphysaire ou métaphysaire évoque une patients ayant une atteinte du pied [60] ) correspondant à une zone de
fracture trabéculaire, cause ou complication de l’algodystrophie selon la renforcement de l’hyperfixation scintigraphique. L’image de perte du signal
chronologie. L’absence de déminéralisation radiologique n’est pas un sous-chondral, arciforme, immédiatement sous-chondrale, peut correspondre
argument contre une algodystrophie. Elle est constatée, par exemple, dans à une zone d’œdème intense, à une fracture sous-chondrale ou à la zone
28 % des atteintes algodystrophiques du pied [ 3 2 ] . L’ostéoporose d’intense déminéralisation sous-chondrale retrouvée sur les clichés
locorégionale est d’autant plus marquée que la maladie a continué à évoluer. radiologiques (quand elle est fine, allongée, régulière, parallèle à la lame
Des patients ont une déminéralisation homogène localisée puis régionale. Les osseuse sous-chondrale et disparaissant après injection de gadolinium).
sésamoïdes peuvent être englobés dans le processus de déminéralisation, ainsi La séquence IRM, avec annulation du signal graisseux et avec ou sans
au genou la fabella, ou au pied le sésamoïde de l’hallux (aspects de injection de gadolinium, a un intérêt considérable dans l’algodystrophie. Elle
déminéralisation homogène, ou polymicrogéodique ou en « cible »). Le est toujours positive dans le travail de Lechevalier et al [60] portant sur des
scanner, sur les coupes osseuses et parties molles, visualise remarquablement algodystrophies au stade I (algodystrophies aiguës ou chaudes), alors que les
la déminéralisation locorégionale, son type homogène ou pommelé et séquences pondérées T1 et T2 peuvent être prises en défaut. L’œdème
l’épaississement de structures para-articulaires (capsules, tendons, ligaments, médullaire, dans cette séquence, peut paraître bigarré (fig 5B) [70] . En
parties molles) en regard des atteintes osseuses [61]. revanche, au stade d’algodystrophie froide d’emblée (ou secondairement), il
n’y a pas (ou plus) d’œdème intramédullaire : l’IRM est normale. Les prises
Imagerie par résonance magnétique (hanche, genou,
en compte du stade des patients au moment de l’IRM et de la technique
cheville, pied) (fig 5) d’acquisition des images expliquent les résultats en apparence décevants
Elle objective, sur une même aire, l’œdème transitoire des tissus superficiels, d’une étude IRM de l’algodystrophie des extrémités chez 25 patients, 17
périarticulaires, synoviaux, l’épanchement synovial transitoire (hypersignal ayant un diagnostic certain d’algodystrophie à la révision du diagnostic (huit
en images pondérées T2), la plasmostase intramédullaire inconstante, localisations à la main, huit au pied, une au genou, seulement quatre stades
transitoire, aspécifique dans l’aire osseuse affectée, incluant toujours une zone I) : 16 faux négatifs, six vrais négatifs, un vrai positif, deux faux positifs :
sous-chondrale épiphysaire et, dans sa globalité, sans limites précises sensibilité 6 %, spécificité 75 % [48] . La présence d’un œdème
(hyposignal en images pondérées T1, hypersignal d’intensité variable T2, algodystrophique des tissus mous périarticulaires n’implique pas la constance
rehaussement par le gadolinium), ultérieurement déminéralisée et d’un œdème médullaire intraosseux (fig 5C).

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Appareil locomoteur ALGODYSTROPHIE 14-286-A-10

Dans des formes chroniques séquellaires avec déminéralisation intense, tardive. La corticale algodystrophique dans 14 formes anciennes aux
l’IRM met parfois en évidence de petites plages épiphysaires en discret genoux [72] est « mitée », « trouée », rendue mince (11/14), irrégulière (13/14)
hypersignal T1 et T2, traduisant l’atténuation du signal normalement généré par des lacunes de résorption périostées, endostéales ou intracorticales, avec
par la présence du réseau trabéculaire [70, 72]. un contenu fibreux ou fibrovasculaire, et quelques ostéoclastes dans trois cas.
L’os trabéculaire plus largement étudié est le siège possible d’une
Densitométrie dégénérescence focale d’ostéocytes, de perte de trabécules laissant des zones
Elle quantifie la perte minérale osseuse dans l’aire osseuse algodystrophique ; algodystrophiques de travées grêles, fines, espacées, pauvrement
plus marquée sur l’os trabéculaire que cortical, elle est équivalente chez anastomosées, offrant de grandes lacunes [7]. Une augmentation de l’activité
certains patients, en quelques semaines ou mois, à celle apparaissant, en 10 ostéoblastique est un trait dominant. Les ostéoclastes sont présents ici et là, à
ans d’évolution, d’une ostéoporose postménopausique. Les données de la des intervalles irréguliers, parfois face à un os lamellaire « mort » ou un os
littérature sont toutefois hétérogènes sur son intérêt pour le diagnostic, irrégulier nouvellement formé ; ils paraissent peu nombreux, mais sur des
certains étant contre [14] et d’autres pour [3, 66]. La densité minérale osseuse biopsies surtout de hanche ou de genou, et l’idéal serait de pouvoir les
(DMO, g/cm2) et le contenu minéral osseux (CMO, g) dans le membre quantifier dans des sites algodystrophiques distaux. La microscopie
algodystrophique par absorptiométrie biphotonique aux rayons X sont électronique objective certaines travées normalement calcifiées, côtoyant
significativement plus bas sur l’aire affectée chez 12 patients ayant une d’autres, déminéralisées : dans des zones d’os lamellaire, les cristaux
algodystrophie post-traumatique évoluant depuis moins de 60 jours d’hydroxyapatite forment des amas de taille variable, irrégulièrement
(diminution respectivement de 28,4 et 45,1 %), par comparaison aux valeurs dispersés sur les fibrilles de collagène et, par endroits, la minéralisation a
du membre controlatéral et 18 sujets témoins [3]. Une perte de masse osseuse totalement disparu laissant la matrice collagène lamellaire sans cristaux
d’au moins 10 % est démontrée par absorptiométrie biphotonique au d’hydroxyapatite.
médiopied [50]. Chez 44 patients algodystrophiques issus d’une série de 250 Au stade où le patient est en voie de guérison ou guéri, des travées régénérées
patients suivis pour une fracture de Pouteau-Colles, la DMO et le CMO et développées, selon les lignes de force du membre, sont microscopiquement
évalués par absorptiométrie aux quatrième et cinquième métacarpiens épaissies, irrégulières (« os tissé »). Elles expliquent – jointes à la disparition
objectivent, par rapport aux valeurs de 33 sujets n’ayant pas développé de travées non portantes d’os spongieux – cette trame osseuse lâche,
d’algodystrophie, une perte osseuse, 7 semaines après la fracture, plus grande grossière, mais structurée selon les lignes de force (ce qui est différent de la
dans l’algodystrophie que chez les témoins en os cortical et trabéculaire. La maladie de Paget) qui, des années plus tard, traduit encore radiologiquement
diminution de la DMO corticale est de plus de 10 % et de l’os trabéculaire de l’épisode d’algodystrophie.
plus de 25 % [7]. D’autres études [72] montrent aussi cette perte osseuse après
fractures de Pouteau-Colles par absorptiométrie monophotonique : 18 % à Les anomalies décrites ici ne préjugent pas définitivement du mécanisme de
1 an au radius distal, 18 % à 1 an à la partie moyenne du radius et du cubitus, perte osseuse algodystrophique. Des questions restent posées : le mécanisme
36 % à 2,5 ans au radius distal. La perte osseuse chez les sujets de déminéralisation est-il le même dans les formes avec déminéralisation
algodystrophiques persiste à 6 mois et, chez les neuf patients étudiés, à 1 an homogène et dans celles où la déminéralisation focalisée est plus dispersée ?
tandis qu’elle n’est plus présente chez les témoins en 19 et 31 semaines, Quelle est la validité de la loi de Leriche et Policard « l’hyperhémie entraîne
respectivement aux sites cortical et trabéculaire. Chez 39 malades (28 une ostéoporose » ? La déminéralisation retardée de quelques mois est-elle
hommes, 11 femmes, âge moyen 37 ans) souffrant d’une algodystrophie liée à la non-utilisation ? Quel est le pourcentage de patients
depuis 8 mois en moyenne, le contenu minéral osseux du membre algodystrophiques sans déminéralisation ? Les interactions cellulaires
algodystrophique, par rapport au membre controlatéral, diminue de 8,8 %, la interviennent aussi si le patient a une fragilité osseuse préexistante. Une
densité minérale osseuse de 9,6 %, la masse musculaire de 6,2 % avec une meilleure reconnaissance du réseau vasculaire intraosseux serait
augmentation de la masse grasse de 6 % [58]. L’intérêt d’une évaluation par particulièrement intéressante, de même que ses liens avec les sites
ultrasons de l’os périphérique algodystrophique est en cours d’étude. déminéralisés.

Documents anatomopathologiques [56, 72] Tests dysautonomiques, vasculaires, neurologiques [72]


Les données histologiques sont rares dans l’algodystrophie. Des biopsies ont
été pratiquées à une époque où le diagnostic posait plus de problèmes, pour La thermographie permet de cartographier objectivement les anomalies
exclure une pathologie infectieuse ou tumorale. Il n’est pas éthique, thermiques régionales, mais n’est pas spécifique. La mise en évidence, par la
désormais, de réaliser une biopsie si le diagnostic d’algodystrophie est posé. prise de température cutanée, d’une différence d’au moins 1 degré entre le site
Des prélèvements sont toutefois possibles lors d’une intervention algodystrophique et le côté sain est fondamentale. Le test de la sueur offre
orthopédique (par exemple forage biopsique, correction d’un cal vicieux) ou une quantification de l’hypersudation [15]. La production de sueur spontanée
au cours d’une autopsie. (resting sweat output) est déterminée de la façon suivante. Une capsule est
La synoviale algodystrophique prélevée sur des métacarpophalangiennes, maintenue sur la peau avec un flux d’azote entrant et sortant à 100 mL/min.
interphalangiennes proximales, poignets, hanches ou genoux [51, 72] a une Les flux, entrant et sortant à travers un système d’évaporation de l’eau,
prolifération de vaisseaux de petits calibres (capillaires, artérioles, parfois permettent la comparaison des conductances de la chaleur. La différence entre
aspect pseudoangiomateux), un œdème, une prolifération cellulaire modérée les deux valeurs à 50 °C génère un voltage qui est linéairement fonction du
de synoviocytes, un discret infiltrat périvasculaire de lymphocytes, une contenu en eau de l’air. Les mesures se font en continu sur 5 minutes. La
fibrose dans sa profondeur. Cette prolifération de vaisseaux capillaires dans production de sueur provoquée par un réflexe d’axone (sweating elicited by
un tissu conjonctif œdématié est retrouvée dans une biopsie du pli de l’ongle axon reflex) est également étudiée. La stimulation d’une glande sudoripare
chez un adolescent de 17 ans victime d’un traumatisme fermé sur les troisième par un agent cholinergique (l’acétylcholine) entraîne l’activation d’une
et quatrième doigts de la main, siège de manifestations inflammatoires glande sudoripare distante par un réflexe d’axone. Un courant de 2 mA est
transitoires, suivies par l’apparition d’une cyanose, d’une hyperhidrose et utilisé pour la pénétration de l’acétylcholine à travers la peau. Une
d’une ostéoporose mouchetée régionale [103]. augmentation de la production de sueur spontanée prédit le diagnostic
Le cartilage articulaire, en règle générale préservé (la conservation de la d’algodystrophie avec une spécificité de 94 % dans un groupe de 396 patients
hauteur de l’interligne articulaire est un signe important dans algodystrophiques [15]. Cette spécificité est toutefois discutée [72].
l’algodystrophie), est quelquefois fibreux, érodé ; à la jonction Les flux microcirculatoires cutanés par laser-doppler sont variables selon les
ostéochondrale existent parfois des zones de résorption sous-chondrale où des stades de l’algodystrophie. Chez 42 patients avec algodystrophie de la main,
bourgeons médullaires pénètrent dans la couche profonde du cartilage [72]. le flux sanguin dermique mesuré par laser-doppler en site distal par rapport au
Une ankylose fibreuse fait exceptionnellement place à une ankylose osseuse traumatisme est augmenté chez les patients ayant une sensation de chaleur
(médiotarse) [101]. dans la zone algodystrophique (état I), et diminué chez ceux ayant, d’un
Le muscle est souvent atrophique cliniquement, dans le segment de membre moment à l’autre, des sensations de froid ou chaud (état II) ou en phase froide
algodystrophique affecté ; en microscopie électronique, on observe une (état III) [53, 54]. Quand la main est abaissée, patient au repos, en décubitus
réduction de l’activité des enzymes mitochondriales, une vésiculation des dorsal, 40 cm en dessous du manubrium sternal, la réduction attendue du flux
mitochondries, une désintégration de myofibrilles, des dépôts anormaux de sanguin, par un réflexe sympathique périphérique d’axone induisant une
lipofuchsine, un gonflement des cellules endothéliales, un épaississement de constriction artériolaire locale, est plus faible dans les trois états par rapport à
la membrane basale avec, en spectroscopie à résonance magnétique nucléaire celle obtenue chez les sujets contrôlés ; le flux sanguin est même augmenté à
(RMN) au 32P, un défaut du métabolisme des phosphates en haute énergie. l’état I. Ces éléments sont interprétés en faveur d’une « dénervation ou
L’os algodystrophique médullaire comporte trois anomalies possibles. La hypoactivité sympathique » dans l’aire distale par rapport à la zone
première est la « plasmostase rosée » de Rutishauser, précoce, transitoire, traumatisée. En revanche, la même équipe objective une activation
correspondant à une accumulation d’hématies et à une exsudation sympathique aux trois états sur le membre en amont de la zone
plasmatique ; la seconde, des changements vasculaires sous forme de traumatisée [53, 54] et peut-être sur le membre controlatéral. La réponse réflexe
dilatation veineuse et capillaire, d’un épaississement de l’intima et de la média sympathique s’exprimerait ainsi, selon ces auteurs, sur le membre
de certains vaisseaux ; et la troisième, une colonisation fibroblastique, plus algodystrophique, mais en amont du lieu du traumatisme initial.

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14-286-A-10 ALGODYSTROPHIE Appareil locomoteur

Le flux sanguin dermique ne doit pas être considéré obligatoirement comme hyperparathyroïdie, anorexie mentale) ont leur symptomatologie propre [12] et
le reflet de celui, par exemple, du tissu osseux. Au stade I algodystrophique, il se compliquent parfois d’une algodystrophie. Les syndromes de Fanconi de
semble se produire, en intraosseux, un recrutement d’une partie des capillaires l’adulte d’âge moyen (50 ans), d’origine acquise (toxique, médicamenteuse,
intercytaires en réserve (ils sont aplatis et non fonctionnels dans un os dysglobulinémie, affection maligne, amylose, syndrome sec ou diverses
« normal » par activité du système sympathique, par l’intermédiaire de affections rénales), se compliquent indirectement d’algodystrophies par
récepteurs alpha-adrénergiques). La perturbation du réflexe veinoartériolaire l’intermédiaire de fractures trabéculaires des membres inférieurs [29]. Le
aux membres supérieurs et inférieurs nécessite des évaluations. diabète phosphoré suspecté devant l’hypophosphorémie (< 0,9 mmol/L) est
confirmé par un taux de réabsorption du phosphore inférieur à 80 % et un taux
Explorations neurologiques de réabsorption maximal du phosphore (TmPO4/GFR) inférieur à 0,8. Laroche
Beaucoup d’explorations neurologiques portant sur l’atteinte des nerfs de et al retrouvent, chez 37 malades algodystrophiques, quatre cas de diabète
faible calibre et des terminaisons nerveuses impliqués dans l’algodystrophie phosphoré chez les algodystrophiques versus un seul dans le groupe
sont du domaine de la recherche : évaluation de l’augmentation des contrôle [59].
conductions nerveuses orthodromiques des fibres A et C, évaluation des Une algodystrophie après chirurgie de revascularisation peut être liée à une
salves constantes d’activité, en réponse au toucher ou à la pression légère sur abolition transitoire du réflexe veinoartériolaire. Une algodystrophie après
les nouvelles zones terminales nerveuses, degré de sensibilité aux substances une intervention chirurgicale fait discuter le rôle de la pathologie initiale
libérées par les nerfs de la zone affectée, sensibilité à la pression et aux justifiant la chirurgie et le traumatisme chirurgical. Au cours de pathologies
amines, en particulier sympathiques, des zones de régénérescence nerveuse. articulaires inflammatoires ou infectieuses, le diagnostic d’algodystrophie est
Des progrès voient le jour. Le peptide vasomoteur intestinal a été identifié sur rare, possible, mais particulièrement difficile. Le diabète paraît plus fréquent
les fibres nerveuses sympathiques innervant le périoste et l’os. Il a la capacité dans une grande population algodystrophique par rapport à une population
de stimuler la résorption osseuse. Les taux plasmatiques de norépinéphrine témoin, mais l’algodystrophie doit être dissociée de la cheiroarthropathie
(noradrénaline) dans le sang veineux du membre algodystrophique, en aval diabétique. Les troubles lipidiques ne paraissent pas retrouvés dans
du traumatisme, sont plus bas que ceux des sujets sans algodystrophie [85] l’algodystrophie [31]. Le nombre de syndromes épaule-main, surtout gauche,
avec, élément assez intéressant, une élévation au membre controlatéral. Le survenant 2 à 8 semaines après un infarctus myocardique, a chuté par rapport
métabolite 3-4-dihydroxyphényléthylèneglycol de la norépinéphrine est à l’incidence de 10 à 20 % selon Froment en 1956, sous l’effet des traitements
également plus bas côté algodystrophique distal. La diminution du taux de efficaces vasculaires et/ou du meilleur contrôle de la douleur. Douze à 21 %
norépinéphrine est d’autant plus forte que l’allodynie et l’hypersudation sont des patients hémiplégiques développent une algodystrophie de l’épaule, de la
marquées. L’allodynie est plus importante si le taux de norépinéphrine main, parfois du coude, 2 à 4 mois après l’installation de l’hémiplégie,
augmente dans la peau. La dose effective de norépinéphrine, pour provoquer différente de la contracture musculaire permanente neurologique. Deux à 5 %
une vasoconstriction veineuse de 50 %, est plus faible pour l’algodystrophie, des patients avec une lésion sur un nerf périphérique développent une
côté algodystrophique et côté opposé par rapport à des sujets normaux. algodystrophie. Le phénobarbital (rhumatisme gardénalique des membres)
peut occasionner des troubles algodystrophiques volontiers bilatéraux, pas
toujours symétriques, davantage aux membres supérieurs. La prescription de
Anomalies au membre controlatéral ciclosporine chez des greffés rénaux ou cardiaques peut entraîner, quelques
mois après la greffe, un syndrome douloureux osseux, articulaire, musculaire
Kozin et al ont insisté sur la fréquence d’anomalies radiologiques,
aux deux membres inférieurs de façon symétrique, avec des troubles
scintigraphiques, sur le côté controlatéral chez des patients
vasomoteurs dans les zones affectées, une ostéoporose localisée, une
algodystrophiques [51]. Ils attribuent les anomalies scintigraphiques retrouvées
hyperfixation scintigraphique se prolongeant après disparition des douleurs.
dans 22 % des cas avec le 99mTc-MBP à une augmentation du pool vasculaire
La nature de ce syndrome de description française (Lucas et al, Bouteiller et
sur le membre controlatéral. Des études plus récentes sur la microcirculation
al) est discutée [80]. L’impact iatrogène intraosseux de la ciclosporine se
dermique montrent la possibilité d’une augmentation du flux sanguin cutané
produit dans les conditions bien particulières des modifications brutales de
à l’extrémité du membre controlatéral non affecté et indiquent qu’un
l’état ostéodystrophique précédant la greffe (il n’y a pas de cas décrits après
composant médullaire intervient dans les anomalies microcirculatoires
prescription de ciclosporine dans la polyarthrite rhumatoïde). Les anomalies
initiales de l’algodystrophie, probablement par un mécanisme neurologique
épiphysaires IRM initiales transitoires évoquent des fractures
vasodilatateur antidromique à partir d’une excitation post-traumatique
trabéculaires [104]. La guérison survient en quelques mois, parfois presque une
provenant du côté affecté cliniquement [54]. Chez 14 patients, nous avons
année.
retrouvé des troubles de la microcirculation dermique de façon constante,
dans des cas d’algodystrophie sur des segments de membres distaux, du côté Plusieurs facteurs peuvent être intriqués. Bien que certains patients paraissent
pathologique, mais aussi sur le membre controlatéral avec soit un hypodébit, indiscutablement avoir une personnalité fragile, une labilité neurovégétative,
soit, plus rarement, un hyperdébit [73]. les études portant sur l’algodystrophie postfracturaire ne retrouvent pas, en
règle générale, de détresse psychologique avant la survenue de
Les tests de provocation thermique montrent aussi des anomalies au membre
l’algodystrophie post-traumatique [33]. L’absence de cause retrouvée dans
controlatéral. Au froid, la main non affectée, plongée 1 minute dans de l’eau
certaines séries (jusque dans 30 % des cas) pose la question même de la
à 15 °C, a un début de réchauffement anormalement long chez le sujet
définition de l’algodystrophie, qui inclut ou non la nécessité d’un facteur
algodystrophique [40] . Rosen et al [93] , chez des patients ayant une
déclenchant. Chez 829 patients [107] (487 atteintes des membres supérieurs,
algodystrophie ancienne (durée moyenne 37 mois d’évolution), constatent,
342 des membres inférieurs), une cause traumatique est retrouvée chez 545
lors du test au froid sur le membre controlatéral : une diminution moyenne du
patients (65 %), une intervention chirurgicale chez 155 (19 %) ; les autres
flux sanguin dermique de 37,5 % chez des témoins (22-60 %) contre
causes sont un processus inflammatoire (2 %), un accident vasculaire
seulement 0 à 13 % chez les patients algodystrophiques, patient au repos, en
cérébral, des injections intraveineuses... (4 %). Dans cette série, apparemment
décubitus dorsal, main à hauteur du manubrium sternal ; une moindre
aucun facteur n’est présent chez 9,6 % des cas, alors qu’un facteur initiant
diminution de la perfusion dermique, main en dessous du niveau du cœur :
faisait partie des critères d’inclusion [107].
7 % chez les sujets algodystrophiques versus 42 % chez les contrôles.
D’autres constatent aussi des anomalies du flux circulatoire dermique dans le
membre non affecté, proches de celles du membre algodystrophique par Formes symptomatiques particulières
rapport à des sujets témoins. Des anomalies du flux dermique lors du test à la
chaleur (stimulation thermique locale à 43-44 °C simultanément sur le Algodystrophie froide d’emblée
membre algodystrophique et celui sain pendant 20 minutes) sont retrouvées C’est la forme la plus fréquente chez l’enfant, l’adolescent [36]. Elle est
aussi au membre controlatéral. S’agit-il d’un phénomène acquis lors de possible aussi chez l’adulte, surtout jeune. Une prédominance féminine est
l’installation de l’algodystrophie ou d’un signe de la « labilité indiscutable. Sa présentation clinique prend une allure d’ischémie d’un
neurovégétative» avancée dans l’algodystrophie ? Les anomalies au membre membre, surtout au membre inférieur. Il n’y a pas, dans cette forme,
controlatéral restent le plus souvent infracliniques, sauf dans certaines d’hyperperméabilité localisée. Dans le segment de membre atteint, siège
observations (cf infra). d’une douleur intense, existent une hypothermie, une érythrocyanose, une
hyperhidrose. Les patients sont parfois adressés pour la suspicion d’une
vascularite ou d’une ischémie artérielle aiguë. La scintigraphie osseuse
Formes cliniques objective une hypofixation aux temps précoces et tardifs (à différencier de la
non-utilisation du membre). Les images IRM restent normales : il n’y a pas
Formes étiologiques (tableau III) d’œdème intramédullaire ou des parties molles. La déminéralisation
radiologique est retardée, parfois de plusieurs mois (rôle de la non-
L’algodystrophie chez la femme enceinte ou en post-partum touche utilisation), ou absente jusque dans plus de 60 % des cas dans la série majeure
préférentiellement, mais non exclusivement, la hanche [24] et a des liens avec d’atteinte algodystrophique du pied [32]. L’artériographie exceptionnellement
l’ostéoporose de la grossesse [92]. Des fractures d’apparition spontanée aux pratiquée montre, dans un cas, un aspect grêle distal de l’arbre vasculaire du
membres inférieurs apparaissant au cours de maladies avec fragilité osseuse membre inférieur [28]. Tout se passe comme s’il y avait une hypoperfusion
(maladie de Lobstein, ostéomalacies diverses, diabète phosphoré, régionale globale dans les tissus profonds. Cette forme clinique est si

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Appareil locomoteur ALGODYSTROPHIE 14-286-A-10

Tableau III. – Étiologies de l’algodystrophie [18, 87] (souvent intriquées).


Circonstances Maladies ou lésions pathologiques Données sémiologiques particulières
Physiologiques : femmes enceintes ou en post-partum Liens avec l’ostéoporose de la grossesse fractures favori- Atteinte de la hanche (90 cas [28]) ou plus rare d’autres sites
sées par une fragilité osseuse antérieure, aggravée au cours du membre inférieur au 3e trimestre ou en post-partum im-
de la grossesse, contraintes mécaniques liées à la gros- médiat
sesse
Post-traumatiques : le traumatisme est un choc direct, une Fractures trabéculaires, bone bruise Environ la moitié des algodystrophies
chute, un mouvement brusque d’amplitude maximale, une Fractures corticales et/ou trabéculaires La survenue et la sévérité de l’algodystrophie ne sont pas
kinésithérapie inadaptée Luxations proportionnelles à la sévérité du traumatisme
Atteintes caspulaires ou ligamentaires Le siège de l’algodystrophie est initialement la région du
Entorses, « pouce du garde-chasse » ou du « skieur » [46] traumatisme et la zone de proximité
Plaie
Procédures d’immobilisation
Lésions inconnues

Post-traumatiques ou inapparentes Maladies avec fragilité osseuse : maladie de Lobstein [99], Des fractures trabéculaires possiblement spontanées se
ostéomalacies, anorexie mentale [18]. compliquent d’une algodystrophie
Chirurgie orthopédique Rôle du traumatisme initial, ou de la chirurgie
Chirurgie du canal carpien 0 à 5 %
Arthroscopie (1 cas sur 2 500) du genou ou d’autres articulations
Thoracotomie (chirurgie cardiaque)
Chirurgie de revascularisation [76] Abolition transitoire du réflexe veinoartériolaire

Néoplasiques [88] Cancers pulmonaires et pleuraux Atteintes des membres supérieurs


Autres cancers Liens avec la fasciite palmaire avec polyarthrite
Conséquences neurologiques locales ou situation paranéo-
plasique

Thromboses vasculaires Infarctus myocardique Syndrome épaule-main (plutôt gauche, parfois bilatéral) 2 à
8 semaines après l’infarctus.
Hémiplégie Atteinte de l’épaule, de la main, parfois du coude, 2 à 4 mois
après l’installation de l’hémiplégie. La contracture muscu-
laire permanente peut donner le change pour une algodys-
trophie

Neurologiques Tumeurs cérébrales


Radiculalgies sciatiques, crurales, cervicobrachiales, neuro-
pathies périphériques
Zona avec névralgie, traumatisme médullaire ou cérébral...

Infectieuses Arthrites/ostéites septiques Diagnostic difficile


Pasteurellose d’inoculation Atteinte de la main
Tuberculose pulmonaire ou osseuse
Maladie de Lyme [44]

Rhumatismales Tendinites (de l’épaule) Diagnostic difficile au début


Rhumatisme psoriasique post-traumatique [37] Arthrite isolée ou algodystrophie et arthrite ?
Pseudopolyarthrite rhizomélique, dermatopolymyosite Rétraction capsulaire (épaules)
Lupus érythémateux disséminé [83] Une observation à formes multiples
Purpura thrombopénique [41]

Métaboliques Diabète ? Épaule(s) douloureuse(s) enraidie(s) diabétique(s) [2] pro-


che(s) de la chéiropathie diabétique

Médicamenteuses
Phénobarbital Prédominance des troubles trophiques, assez souvent bila-
téraux, pas toujours symétriques, volontiers aux membres
supérieurs
Ciclosporine Fractures trabéculaires sur un os au statut bouleversé en Membres inférieurs, évolution quelques mois à 1 an
postgreffe

différente de l’algodystrophie précédente à forme chaude que certains d’un condyle ou de la tête fémorale (forme zonale d’algodystrophie). Chez
l’isolent du concept d’algodystrophie et utilisent, par exemple, le terme de ces patients, une déminéralisation devient nette au deuxième mois seulement,
pseudodystrophie. s’étend d’emblée sur une assez longue plage osseuse sous-chondrale avec, à
la scintigraphie osseuse, une hyperfixation massive localisée ou panrégionale
Autres formes symptomatiques et, parfois, d’autres sites infraradiologiques. L’ostéoporose zonale ne reste
partielle et trompeuse que durant les 2 ou 3 premiers mois ; elle devient
Doury a décrit la claudication douloureuse intermittente algodystrophique, ensuite panrégionale. Un certain nombre de ces patients nous paraissent
retrouvée chez 4 % des patients pour l’atteinte du pied [32]. La douleur est un développer une fracture trabéculaire ou une ostéonécrose compliquée
signe obligatoire pour certains dans l’algodystrophie, d’autres admettent secondairement d’une algodystrophie. Doury et al [25] ont décrit de leur côté,
l’absence de douleur jusque dans 5 % des cas d’algodystrophie. Dans des vers la même période, la survenue de zone déminéralisée très localisée (une
observations, il y a manifestement une prédominance des signes liés à parcelle osseuse) proche de l’articulation d’un membre inférieur avec douleur
l’hyperperméabilité locale, alors que dans d’autres la douleur est plus à vive, hyperfixation homogène intense scintigraphique, régressant sans phase
composante neurologique comme l’analyse une équipe japonaise [78] . d’accentuation locorégionale de la déminéralisation dont la nature reste à
Quelquefois, une absence de sensibilité au toucher contraste avec la présence préciser (cf infra) (fig 5D).
d’une douleur sévère dans la même zone algodystrophique (« anaesthesia
dolorosa »). Certains patients se plaignent de contracture musculaire, après Formes en dehors des membres
essai d’efforts, de tremblements de l’extrémité affectée, de petits mouvements
cloniques rythmiques des doigts, de signes d’incoordination musculaire. Un Le concept d’algodystrophie est envisagé pour des localisations au rachis, au
tremblement, une incoordination musculaire, des spasmes musculaires gril costal, au sternum [23]. Elles font discuter des pathologies plus fréquentes,
sévères ont été retrouvés respectivement dans 49, 54 et 25 % des 829 patients en particulier des fractures trabéculaires, et peuvent s’intégrer dans une
de Veldman et al [107]. Des rétractions plantaires ou palmaires peuvent survenir pathologie osseuse sous-jacente (cf infra).
de façon rapide (symptômes proches respectivement de la maladie de Certains auteurs vont au-delà et décrivent des localisations algodystrophiques
Ledderhose et de la maladie de Dupuytren). La peau est, dans quelques cas, le à des endroits divers de l’organisme. Ainsi la « dystrophie sympathique de la
siège d’ulcérations ou d’une éruption bulleuse [103]. tête » ou de la face [18, 106]. Un patient après fracture du poignet et de l’arcade
zygomatique dans un accident de voiture développa, dans les deux zones
Formes selon la localisation traumatisées, un syndrome douloureux. La douleur, dans la face et au crâne,
fut accompagnée de changements vasomoteurs augmentant après exercice et
Formes focales des membres par une hyperesthésie, une hyperpathie, une parésie, une hyperhidrose. En
l’absence d’autres causes reconnues, le diagnostic de dystrophie sympathique
Lequesne et al [64] ont décrit des patients ayant une algodystrophie touchant de la tête fut retenu après 1 an d’évolution (celui au poignet après 3 semaines
un ou deux rayons de la main ou du pied (forme radiale d’algodystrophie) et d’évolution). Cooper [18] retient l’hyperpathie, l’allodynie, la douleur à type
d’autres patients ayant une atteinte osseuse douloureuse portant sur une partie de brûlure, avec des signes sudoromoteurs, vasomoteurs et des changements

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14-286-A-10 ALGODYSTROPHIE Appareil locomoteur

6 Fractures trabéculaires récentes (IRM, T1), stries en hyposi-


gnal au sein de l’hyposignal de l’œdème médullaire (illustrations
réalisées par C Masson).
A. Épiphyse fémorale.
A B B. Calcanéum.

trophiques après chirurgie maxillofaciale de cancer, blessure par balles,


blessure au crâne ou procédures dentaires. Des cas isolés sont rapportés dans
d’autres localisations. Une femme de 27 ans développa une douleur régionale,
avec gonflement, hypothermie clinique et thermographique, pendant plus de
1 année, dans la région mammaire, lieu d’une chirurgie esthétique [84]. Des
localisations périnéales sont citées, en dehors même de signes
vésicosphinctériens signalés par certains au cours d’algodystrophie [13, 18].

Diagnostics différentiels

Diagnostics à versants neurologiques 7 Liseré en hyposignal T1 isolant l’ostéo-


nécrose aseptique épiphysaire fémorale (il-
La causalgie de Weir-Mitchell, ou syndrome douloureux régional complexe lustration réalisée par C Masson).
de type II [10, 100], survient après une lésion identifiable d’un tronc nerveux
riche en fibres sympathiques (nerf médian, nerf sciatique, plexus brachial).
La douleur sévère à type de brûlure, avec allodynie, hyperpathie, l’œdème et équivalents périphériques du tassement vertébral sans rupture corticale. Les
les autres troubles de la microcirculation, l’hypersudation, les conséquences conditions mécaniques font que les ruptures corticales sont, en règle générale,
trophiques restent cantonnés au métamère du nerf traumatisé ou bien absentes dans les fractures trabéculaires des membres inférieurs, sauf quand
s’étendent régionalement. Les soldats blessés examinés par Weir-Mitchell se surajoute un traumatisme ou une activité inadaptée. À l’inverse, les
étaient obligés de porter une bouteille d’eau et une éponge pour humidifier conditions mécaniques incontrôlables s’exerçant sur les vertèbres liées au
avec du froid leur segment de membre blessé par balle dans l’espoir de calmer poids du patient, au tonus musculaire, à l’espace intersomatique, font qu’il
la brûlure ressentie. existe souvent, dans la fracture vertébrale trabéculaire, un tassement avec
L’ABC syndrome d’Ochoa (angry backfiring C nociceptor syndrome) [10] se rupture de la corticale des bords supérieur ou inférieur et/ou antérieur,
traduit, chez des patients porteurs de lésions sciatiques importantes, d’une tellement fréquent qu’il a donné son nom à cette forme de fracture. De même
neuropathie diabétique ou d’une autre maladie neurologique, par une douleur qu’il existe des patients ayant un seul tassement vertébral, ou plusieurs
régionale volontiers à type de brûlure, induite par des stimulations tassements vertébraux en quelques mois ou années, il est possible d’avoir, aux
mécaniques et thermiques modérées sur la peau (hyperalgésie polymodale, membres inférieurs, un seul épisode de fracture trabéculaire ou plusieurs
allodynie). La diminution de la température cutanée s’accompagne, chez la épisodes en quelques mois ou années (« polyfracture trabéculaire
plupart des patients, d’une diminution de la douleur spontanée et mécanique périphérique »). Une fracture déclenche localement un foyer de résorption
provoquée, et la chaleur aggrave les douleurs (moins souvent l’inverse ou les osseuse (les travées fracturées sont éliminées totalement ou en partie), suivie
deux). Un stimulus influence le niveau de perception des autres stimulations. d’une phase de réparation. La phase de résorption se traduit par une
Une vasodilatation survient volontiers après application de chaleur sur la zone déminéralisation localisée au bout de quelques semaines, la phase de
douloureuse. Les symptômes dépendant de l’augmentation de la température régénération par une condensation trabéculaire en « serpentin » ou en bandes
s’aggravent lors de blocs sympathiques. Selon Ochoa, il existerait une assez épaisses, à renflement visible radiologiquement sur le site de la fracture
sensibilisation de nocicepteurs polymodaux. trabéculaire, 3 à 6 semaines après la survenue de la fracture trabéculaire. Cette
dernière image correspond au cal trabéculaire témoin de l’évolution favorable
Fractures trabéculaires de la fracture.

Leur symptomatologie douloureuse, le gonflement locorégional, l’absence Liens entre fractures trabéculaires et algodystrophie
initiale de signe radiologique rendent leur diagnostic difficile avec une
algodystrophie débutante [12]. Elles se rencontrent au cours des insuffisances Les fractures trabéculaires des membres se compliquent spontanément
osseuses et surviennent alors parfois de façon spontanée, ou bien après des souvent d’une algodystrophie, comme toute fracture [23, 27], surtout si le
contraintes anormales et les circonstances de survenue sont alors évocatrices. diagnostic de fracture trabéculaire (et donc la mise au repos précoce) n’a pas
La scintigraphie osseuse objective toujours une hyperfixation présente été effectué. L’os, nous l’avons vu, est ainsi souvent responsable
comme dans l’algodystrophie aux trois tremps. Elle a un rôle majeur dans le d’algodystrophie (« os coupable »), une lésion à son niveau douloureuse
diagnostic topographique des fractures trabéculaires. L’IRM focalisée met en provoquant l’algodystrophie [27]. Mais il peut subir aussi les conséquences
évidence les stries des zones de fractures trabéculaires au sein de l’œdème trophiques de l’algodystrophie (« os victime »). L’algodystrophie, de par sa
plus ou moins hémorragique médullaire. Ces stries sont en hyposignal en déminéralisation locorégionale nette, peut se compliquer d’une fracture plus
pondération T2 et après injection intraveineuse de gadolinium. Elles sont souvent trabéculaire que corticale et trabéculaire, après un traumatisme
également en hyposignal T1, mais parfois masquées totalement ou important ou minime, ou de façon spontanée. La limitation d’activité du
partiellement alors par l’image également en hyposignal T1 de l’œdème de patient liée à la douleur en charge diminue mais n’annule pas ce risque.
voisinage (fig 6). Ces stries – parcelles osseuses linéaires épiphysaires – sont Lechevallier et al [62] rapportent 16 fractures des épiphyses métatarsiennes
différentes du liseré de démarcation d’une ostéonécrose aseptique qui, chez 11 patients induisant une algodystrophie (deux fois), s’y associant (deux
anatomiquement, isole complètement un secteur épiphysaire (fig 7). fois) ou la simulant : douleurs aiguës localisées, arthropathie
Les sites de fractures trabéculaires sont nombreux aux membres inférieurs : métatarsophalangienne d’allure inflammatoire, œdème diffus de l’avant-
calcanéum, astragale, épiphyse tibiale inférieure, cuboïde, scaphoïde, pied, évolution favorable après décharge d’appui de 1 mois. La prédominance
cunéiformes, métatarses (diaphyse, épiphyse [62]), épiphyses phalangiennes, des fractures trabéculaires vient de la sévérité plus grande de la diminution de
plateau tibial interne, plateau tibial externe, condyle interne [55], condyle la masse osseuse dans ce site par rapport à l’os cortical (respectivement 25-
externe, grand trochanter, col du fémur, épiphyse fémorale supérieure ; au 35 % ou plus, versus 10 %). Ces données posent la question de l’intérêt
bassin : région supra-acétabulaire, sacrum partie droite ou gauche, ou global, potentiel de la surveillance du contenu minéral osseux chez certains patients
aile iliaque. Aux membres supérieurs, une fracture trabéculaire isolée est algodystrophiques puisqu’il conditionne, au moins en partie, le risque de
exceptionnelle. Les fractures trabéculaires des membres inférieurs sont des fracture [72].

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Ostéoporose régionale transitoire, migratrice, entraîne les mêmes signes histologiques que ceux décrits plus hauts [87]. Des
syndrome d’œdème médullaire transitoire [11, 57, 67, 69, 71] troubles lipidiques sanguins sont retrouvés dans des cas d’ostéoporose
régionale transitoire migratrice [86] et doivent y être recherchés. L’IRM initiale
L’ostéoporose régionale transitoire est au cœur de discussions souvent apporte des indications diagnostiques et évolutives. Une plage tissulaire sous-
passionnées depuis une trentaine d’années. Elle pose la question de son chondrale en hyposignal T2 assez profonde ou étendue, ou encore (ce qui
existence, de ses liens avec l’algodystrophie de survenue spontanée, signifie le même signe) non rehaussée (c’est-à-dire non vascularisée) après
l’ostéonécrose aseptique à son stade précoce, les fractures trabéculaires, injection intraveineuse de gadolinium, est en faveur d’une ostéonécrose
l’ostéoporose de la grossesse. Dans l’ostéoporose régionale transitoire, les aseptique épiphysaire irréversible. Un travail élégant le démontre ainsi au
patients – plus souvent des hommes que des femmes –, jeunes ou d’âge genou dans les atteintes « œdémateuses » osseuses du condyle interne :
moyen, développent de façon rapide – et le plus souvent sans notion de l’évolution vers une ostéonécrose aseptique ou une forme réversible est
traumatisme antérieur –, ou bien après une chute modérée ou un mouvement fonction de la présence d’une aire sous-chondrale en hyposignal T2 de plus
brusque d’amplitude maximale, un syndrome douloureux dans une aire de 4 mm d’épaisseur ou d’une longueur de plus de 14 mm, alors que la zone
osseuse (ou plusieurs) aux membres inférieurs (exceptionnellement aux d’œdème médullaire est comparable [63].
membres supérieurs). Les aires préférentielles sont situées, par ordre Chez trois patients avec une ostéoporose transitoire de la hanche, la perte en
décroissant, à la hanche (ostéoporose transitoire de la hanche), au genou, à la DMO sur la hanche affectée est similaire, avec une perte moyenne aussi
cheville et au pied. Le site affecté est une épiphyse, ou une partie ou une élevée que 36 % dans le triangle de Ward (aire non affectée par le poids du
parcelle d’épiphyse, parfois une métaphyse ou une partie de diaphyse, en corps) [105]. Le retour à une même densité minérale osseuse (DMO) a demandé
particulier celle du fémur ou du tibia [90]. 25 à 31 mois dans une atteinte de la hanche, malgré la guérison clinique plus
La douleur est accentuée avec l’utilisation de l’articulation, à la limite des rapide. De nombreux cas sont rapportés chez les femmes enceintes ou en post-
mouvements possibles, à la mise en charge. La boiterie marquée oblige le partum. La première grossesse, chez une patiente ayant une ostéoporose
patient, en quelques jours ou semaines, à esquiver presque totalement l’appui jusque-là inconnue, s’accompagne d’un risque de fracture de corps
sur le membre atteint et, pour le mettre en décharge, il s’appuie de toutes ses vertébraux, du sacrum ou d’os périphérique (hanche) avec une présentation
forces sur une ou deux cannes. Une amyotrophie régionale et précoce est clinique semblable à celle évoquée ici. Dans un cas exceptionnel, les DMO,
fréquente. La douleur est rare ou modérée, en décubitus. Elle survient évaluées juste avant la conception et après l’accouchement chez une patiente
volontiers de façon spontanée ou après un traumatisme minime, s’aggrave en ayant développé une atteinte de la hanche, se sont révélées basses à la hanche
quelques semaines et devient maximale au deuxième et au troisième mois et aux vertèbres avant la grossesse, avec une nette aggravation pendant le
pour s’atténuer et disparaître ensuite, mais souvent en plusieurs mois. temps de la grossesse et les 4 semaines suivantes (13 % au col fémoral, 14 %
L’hyperfixation scintigraphique homogène ne manque jamais au stade initial au grand trochanter, et 3 % au rachis) [46].
et est précoce. Un épanchement synovial est retrouvé cliniquement ou sur une La question des liens avec des fractures trabéculaires est rendue encore plus
articulation profonde en échographie ; ainsi à la hanche [49]. Une ostéoporose difficile par la possibilité de fractures secondaires sur os déminéralisé. Un
radiologique homogène est visible au bout de quelques semaines. La vitesse homme de 62 ans développa une ostéoporose régionale migratrice avec huit
de sédimentation est normale ou subnormale. épisodes à un ou deux sites, toujours aux membres inférieurs, sur une période
Le pronostic favorable est fonction de la survenue d’autres épisodes, la de 8 ans, avec deux épisodes de fractures pendant la sixième et la septième
récurrence étant fréquente sur la même épiphyse controlatérale ou sur des année d’évolution [91]. Il est décédé d’une fracture du col du fémur quelques
sites autres du même membre ou du membre controlatéral : 41 % des patients années plus tard. Moran rapporte un cas d’ostéoporose transitoire de la hanche
dans une revue ont au moins un autre épisode [57]. Une extension locale sur le compliqué d’une fracture corticale pendant la réalisation d’une biopsie
même os ou une aire proche est possible (récidive au même site : 8 % des cas). chirurgicale [77].
Souvent alors la douleur n’est pas cliniquement strictement au même endroit. La différenciation ostéoporose régionale transitoire/algodystrophie a des
Des cartographies scintigraphiques répétées montrent les localisations conséquences thérapeutiques. Une procédure chirurgicale peut aggraver une
successives dans les différentes aires au pied et à la cheville (28 os ou osselets, algodystrophie, mais ce n’est pas le cas dans l’ostéoporose régionale
sésamoïdes non inclus) mais aussi au genou (condyles et plateaux tibiaux transitoire, que ce soit pour des interventions orthopédiques après fractures
internes et externes, rotule). Le scanner et l’IRM, dans des observations secondaires [34] ou bien quand on réalise un forage biopsique pour lutter contre
privilégiées, ont permis de visualiser la migration locale. La progression de la l’hyperpression localisée intraosseuse épiphysaire fémorale, supérieure ou
déminéralisation de type homogène s’est faite sur trois scanners successifs à inférieure. Dans cette situation, les patients ne s’aggravent pas et, au contraire,
la hanche à 1 mois d’intervalle d’abord aux deux tiers postérieurs de la tête paraissent rapidement soulagés après le forage biopsique [87]. Les corticoïdes
fémorale, puis à l’ensemble de l’épiphyse fémorale supérieure [95]. Hauzeur et sont en revanche inefficaces.
al [39] ont mis en évidence un signal anormal IRM, en premier dans l’aire
antérieure, puis dans la zone postérieure, tandis que le signal redevenait
normal dans l’aire antérieure atteinte. Cette même migration locale a été Raideurs d’origine capsulaire
prouvée par scanners ou IRM répétés dans quelques cas au genou.
Une algodystrophie d’une région d’un membre peut se compliquer, nous
Plenk et al [87], dans leur série de 32 biopsies osseuses de hanche au cours du l’avons vu, d’un enraidissement articulaire, quelle que soit la localisation, par
syndrome d’œdème médullaire transitoire de la hanche (ostéonécrose différents mécanismes. Certains patients, surtout des femmes en période
aseptique exclue) (28 hommes, trois femmes, âge 25-63 ans), insistent sur la périménopausique, parfois après un traumatisme minime, développent une
plasmostase intramédullaire, la déminéralisation acellulaire, la non- atteinte préférentielle de la capsule articulaire réalisant une rétraction
diminution du volume trabéculaire osseux, l’augmentation du volume de l’os capsulaire ou capsulite rétractile primitive [82] . La localisation la plus
ostéoïde, avec activité ostéoblastique importante et formation d’un os fréquente est l’épaule, d’autres sont possibles (par exemple la hanche). À
nouveau dans des aires œdématiées. Les ostéoclastes présents ici et là, à l’épaule, la rétraction capsulaire glénohumérale entraîne une limitation
intervalles irréguliers, parfois face à un os lamellaire « mort » ou un os articulaire nette ; la rotation externe y est rarement supérieure à 30° ; la
irrégulier nouvellement formé, paraissent peu nombreux [30, 72]. contenance articulaire est diminuée, ce que confirme l’éventuelle
Outre les problèmes nosologiques avec l’algodystrophie, le diagnostic arthrographie glénohumérale. La bourse sous-acromiale peut être aussi le
différentiel, surtout au premier épisode, est parfois difficile avec une lésion siège d’une rétraction prouvée par bursographie sous-acromiodeltoïdienne
tumorale bénigne ou maligne, une arthrite en particulier infectieuse (perte de l’aspect dit en « béret basque »). L’IRM (en général non indiquée)
(tuberculose), une ostéomyélite, une ostéonécrose aseptique, une fracture peut objectiver l’épaississement et la prise de contraste capsulaire. La phase
trabéculaire isolée. douloureuse de 3 à 6 mois est suivie de la phase de raideur qui, spontanément,
L’importance et la durée de la déminéralisation locale avec un aspect dure 18 à 36 mois, avec un risque de séquelle sous forme d’une raideur
homogène sont indiscutables, et inhabituelles dans une fracture non modérée ou de douleurs plutôt mécaniques dans un quart des cas. Le
compliquée. L’hyperhémie régionale constatée en scintigraphie osseuse, les diabétique peut développer une capsulite rétractile, souvent bilatérale,
signes vasomoteurs qui peuvent apparaître secondairement, la rapprochée de la chéiroarthropathie diabétique. Elle est de traitement souvent
déminéralisation secondairement plus régionale et préférentiellement difficile mais peut guérir sans séquelles.
mouchetée, parfois un enraidissement localisé pouvant aller jusqu’à une
rétraction capsulaire, sont autant d’arguments laissant penser que
l’ostéoporose régionale transitoire et l’algodystrophie sont proches car la Devant une arthropathie
lésion initiale osseuse douloureuse se complique, comme dans d’autres Une algodystrophie de la main en phase œdémateuse fait discuter une arthrite,
pathologies osseuses douloureuses, d’une dystrophie réactionnelle. une ténosynovite, une cellulite (existence d’un syndrome inflammatoire) et,
La différenciation ostéoporose régionale transitoire et ostéonécrose à un stade en phase scléreuse, une cheiroarthropathie diabétique (diabète ancien et
précoce (type I et II de Ficat) est difficile et certains pensent qu’il s’agit de la connu), une sclérodermie ou une fasciite palmaire avec arthrite (cancer de
même maladie [87] . Les troubles circulatoires ischémiques avancés l’ovaire, autres cancers). L’atteinte est, dans les trois cas, en règle bilatérale
n’entraînent pas une ischémie osseuse d’amplitude identique à celle de avec signe de « la prière » [2, 43]. Une algodystrophie de la cheville ou du
l’ostéonécrose aseptique, où l’ischémie est définitive. Les travaux de genou, ou localisée au pied avec aspect pseudo-inflammatoire, fait discuter
Rutishauser ont montré qu’une ischémie chronique modérée ostéomédullaire une arthrite septique ou aseptique (rhumatisme inflammatoire, arthrite

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microcristalline parfois) ; quand une atteinte ténosynoviale périmalléolaire structures anatomiques (peau, tissu sous-cutané, capsule, synoviale, tendons,
est au premier plan, peut même se discuter un phlegmon des gaines. Une muscles, os, structures nerveuses), les patients peuvent rester handicapés.
chondromatose synoviale ou une synovite pigmentée villonodulaire peut L’allodynie, l’hyperpathie, la douleur spontanée – volontiers une sensation
entraîner une ostéoporose locale [69]. de brûlure –, expliquent l’appréhension compréhensible du malade à se faire
Une impotence fonctionnelle douloureuse, depuis quelques jours ou examiner et est source d’interprétations fallacieuses. Dans la série de Veldman
semaines, avec boiterie et radiographies normales au pied, à la cheville, au et al [107], 121 patients sur 829 restaient dans l’impossibilité d’effectuer des
genou ou à la hanche chez un sujet avec un état général conservé, sans fièvre, mouvements de leur membre algodystrophique. Une décompensation
fait discuter outre une algodystrophie, une fracture de stress ou par psychologique survient obligatoirement si la douleur persiste sur une longue
insuffisance osseuse d’une zone portante épiphysaire ou métaphysaire, ou période. Tous ces paramètres doivent être à l’esprit quand des issues
diaphysaire (qui peut se compliquer, nous l’avons vu, d’une algodystrophie) médicolégales sont en cause.
(signes focaux d’œdème/d’hémorragie péricorticaux échographiques
précoces en parties molles, hyperfixation scintigraphique précoce, signes
IRM), une ostéonécrose aseptique (circonstances évocatrices, hypofixation Diagnostic positif
scintigraphique partielle épiphysaire entourée d’une hyperfixation, bande
étroite arciforme IRM en hyposignal T1 réalisant l’interface entre la zone L’observation et le contexte clinique permettent, en règle générale, de faire le
nécrotique qu’elle circonscrit et la zone saine), une enthésite diagnostic d’une algodystrophie. Le choix des examens d’imagerie est
(spondylarthropathie connue ou non, hyperfixation scintigraphique localisée, fonction de la période de consultation et des doutes diagnostiques. Un patient
signes échographiques, signes IRM sur l’enthèse, avec œdème se plaignant de douleurs avec des signes vasomoteurs nets à la main et aux
intramédullaire osseux en regard de l’enthèse, syndrome inflammatoire doigts, un enraidissement des doigts en demi-flexion et une épaule
biologique), une tendinobursite. La présence sur les sites superficiels de homolatérale limitée et douloureuse, a un syndrome épaule-main
signes d’instabilité vasomotrice, fréquents mais inconstants, oriente vers une algodystrophique clinique.
algodystrophie. Intérêt du cliché radiologique standard 4 à 8 semaines après
le début clinique : déminéralisation dans l’algodystrophie, méplat du contour Différents critères sont proposés pour le diagnostic d’algodystrophie. Kozin
de l’épiphyse si ostéonécrose ou fracture sous-chondrale, signe de « la et al [52] retiennent une algodystrophie définie quand existent une douleur et
coquille d’œuf » si ostéonécrose, bande de condensation si fracture une sensibilité provoquées dans une extrémité distale d’un membre, des
trabéculaire correspondant au cal osseux. signes ou symptômes d’instabilité vasomotrice, un gonflement d’une
extrémité – avec souvent une prédominance périarticulaire, souvent des
modifications dystrophiques cutanées. Une telle définition restrictive exclut
Forme à expression douloureuse préférentielle les formes proximales d’algodystrophie et ne peut pas être acceptée. La
présence d’un facteur initiant identifiable est obligatoire pour certains [100] et
Dans les formes à expression douloureuse préférentielle (sans signes non pour d’autres [23], pour retenir le diagnostic d’une algodystrophie (formes
vasomoteurs superficiels), la mise en évidence à la scintigraphie osseuse spontanées d’algodystrophie). Les critères de Doury sont souvent utilisés [23]
d’une hyperfixation, ou plus rarement d’une hypofixation, va à l’encontre mais ne permettent pas de différencier les patients ayant une algodystrophie
d’un pithiatisme, d’une hystérie ou d’une simulation. Eulry et al retrouvent, et ceux ayant une fracture trabéculaire (éventuellement spontanée) et non
dans la localisation du pied, un patient sur 10 ayant un pied douloureux avec compliquée d’algodystrophie de par la symptomatologie même rapportée.
hyperesthésie sans autres anomalies cliniques [32], renforçant ainsi la réalité Les quatre critères suffisants et nécessaires de l’Association internationale
défendue par Homans, d’observations avec symptomatologie douloureuse ne pour l’étude de la douleur (1994) sont les suivants [35] :
semblant pas avoir une origine fondée, mais qui lui paraissait certaine et
compréhensible à partir des cas plus sévères (d’où le terme de causalgie – un événement initial délétère ou une cause d’immobilisation ;
mineure). Un certain nombre de patientes ont toutefois une hystérie post- – une douleur continue, une allodynie ou une hyperalgésie, avec une douleur
traumatique de Charcot avec persistance d’un segment de membre traumatisé disproportionnée par rapport à l’événement initiant ;
douloureux ou inerte, ou comme ne faisant plus partie d’elle-même (pour une – la preuve, à une certaine période d’œdème, de modifications dans le flux
atteinte du pied, la patiente en parle avec le terme « il » : « il » me fait mal, sanguin ou d’une activité sudoromotrice anormale dans la région douloureuse
« il » ne peut pas me porter...), alors qu’aucune lésion ostéoarticulaire ou (exemples : modification de la température cutanée, de la couleur de la peau,
nerveuse claire ne peut être incriminée. hyperhidrose) ;
– exclusion du diagnostic en présence d’une condition qui pourrait expliquer
Pièges selon l’imagerie le degré de la douleur par elle-même.

L’hyperfixation scintigraphique régionale d’une région d’un membre aux


trois temps n’est pas spécifique de l’algodystrophie à forme chaude, mais sa Modes évolutifs
confrontation avec les données cliniques et paracliniques permet en général
de ne pas la confondre avec un ostéome ostéoïde, une maladie de Paget, une Guérison
ostéonécrose aseptique. La différenciation hyperfixation algodystrophique
focalisée et hyperfixation d’une fracture trabéculaire isolée est impossible,
La guérison est obtenue le plus souvent en quelques mois, ou 1 année – parfois
sauf si une hyperhémie régionale (souvent moins marquée) entoure la zone
plus –, sans séquelles. Les formes de la hanche et du genou évoluent souvent
d’hyperfixation intense. L’hypofixation scintigraphique pourrait
plus rapidement que celles de la main, de l’épaule, du pied et de la cheville où
correspondre dans certains cas à une non-utilisation du membre (« pied de
les évolutions à 2 ans ne sont pas rares. Chez 77 patients algodystrophiques
béquillage »).
sur 274 évalués après fracture de Pouteaux-Colles [9] et traités uniquement par
L’œdème intramédullaire osseux visible en IRM accompagne d’autres rééducation, l’évolution a été la suivante :
conditions : toujours les fractures trabéculaires récentes [108], souvent les
– à 6 mois, douleurs et gonflement persistants : 20-30 % ;
enthésites évolutives des spondylarthropathies et assez souvent des cas
d’ostéonécrose aseptique dans la zone qui deviendra ostéonécrotique, ou plus – instabilité vasculaire et sensibilité à la pression : 50 % ;
souvent en dessous de la zone nécrotique visible en IRM ou en radiologie – raideur : 80 % ;
standard. Il se rencontre aussi en périphérie de l’ostéome ostéoïde, au cours – à 1 an, raideur : 50 % des cas.
de néoplasme infiltrant ou d’infections osseuses. Un œdème intramédullaire Chez certains patients, l’algodystrophie passe progressivement au stade III
parcellaire (sur une parcelle d’os) ou partiel (sur un condyle, un plateau tibial, atrophique, redoutable dans sa chronicité. Les patients gardent alors des
une zone épiphysaire, ou métaphysaire ou diaphysaire, ou encore un osselet séquelles dans la zone algodystrophique : raideur douloureuse, atrophie,
du pied ou de la main) fait discuter selon le contexte une fracture occulte ostéoporose, hyperpathie, allodynie, mobilisation ou démarche
trabéculaire, une ostéonécrose ischémique localisée, ou encore un ostéome pseudoparalytique (sans paralysie vraie) difficile à dissocier d’une hystérie
ostéoïde, une ostéite. La densitométrie quantifie la perte osseuse, mais n’a pas
ou d’une simulation dans une situation éventuellement de bénéfices
de valeur diagnostique pour l’œdème intramédullaire.
secondaires. Cette forme d’algodystrophie atrophique, fixée, avec une
chronicité assez désespérante, se rencontre dans un grand nombre de cas dans
Algodystrophies factices, compensation [71] les séries de patients venant consulter en centres tertiaires. Elle représente
probablement moins de 10-15 % des cas. Sa réalité a rendu caduque l’adage
Le gain est « externe », exemple compensation financière, syndrome du « une algodystrophie guérit toujours ». La gravité de l’évolution a conduit,
revenu paradoxal, simulation, ou « interne » syndrome de Munchausen [16], dans quelques observations anciennes et récentes, à pratiquer une arthrodèse
névrose de conversion [102]. Toutefois, certains patients ne guérissent jamais ou une amputation, avec pour des malades persistance des douleurs [21]. Un
de leur algodystrophie. L’hyperperméabilité est transitoire, mais la fibrose patient algodystrophique encore douloureux au stade atrophique a une
peut être définitive et, quand elle colonise régionalement différentes probabilité faible de guérir spontanément.

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Algodystrophie récidivante plurifocale [26] prolongée a, par définition, toujours un retentissement psychologique qu’il
ne faut pas prendre pour la maladie initiale. Le malade, une fois la douleur
Des localisations cliniques successives sont décrites, locales, régionales, sur disparue, retrouve une personnalité normale. Les patients continuant
le même membre, au membre controlatéral, rarement aux quatre membres, malheureusement à souffrir d’une algodystrophie sont réellement
en quelques mois ou années, cartographiées cliniquement, parfois handicapés. Une psychothérapie peut réaliser un soutien pour le patient
scintigraphiquement (dans leur apparition, dans leur disparition), avec soit algodystrophique qui continue à souffrir, d’autant que l’entourage proche –
une guérison entre les différentes atteintes, soit une évolution d’un seul amis, collègues de travail, employeur – et parfois les médecins peuvent
tenant [71]. considérer à tort le patient algodystrophique comme une personne qui se
Dans la série de Veldman et al de 829 patients algodystrophiques, 39 patients plaint de façon exagérée. Dans un même ordre d’idée, des associations de
ont une algodystrophie touchant plus d’un membre (deux membres, 34 ; trois malades se sont créées dans différents pays et il existe plusieurs sites internet
membres, quatre ; et les quatre membres, un patient [107] ). Ces auteurs d’informations et de dialogues sur l’algodystrophie.
signalent une récidive dans le même membre après une période libre ou Les bisphosphonates (pamidronate de sodium par voie intraveineuse) font
presque libre de symptômes chez 18 patients. Quelques autres observations
l’objet de travaux, surtout ouverts. Sept malades sur 11 ayant une
de récidives sont signalées : une récidive d’algodystrophie de la hanche 17
algodystrophie depuis plus de 6 mois ont une amélioration modérée (un
ans après un premier épisode, dans le cas d’une algodystrophie itérative du
membre inférieur droit (atteinte également au pied, à la cheville, au patient), significative (trois patients) ou excellente (trois patients) après une
genou) [109] ; une algodystrophie multirécidivante chez une jeune femme ayant perfusion 3 jours de suite de 30 mg/j de pamidronate jugée 1 et 3 mois
un lupus érythémateux disséminé (plus de 20 sites non donnés clairement après [68]. Quatorze malades sur 23 ayant une algodystrophie depuis plus de 6
mais aux quatre extrémités des membres, à différentes périodes, sans mois sont améliorés 1,5 mois après une seule perfusion de 60 mg de
corrélation entre les sites de poussées d’arthrite et ceux de récidive de pamidronate [59]. Les effets secondaires dans la série de Cortet et al [19] (26
l’algodystrophie) [83] ; un cas avec quatre épisodes touchant trois membres sur patients, dose de pamidronate 1mg/kg/j sur 1, 2 ou 3 jours) comportent de la
une période de 4 ans, n’ayant pas répondu à la corticothérapie, mais aux blocs fièvre [6], une inflammation veineuse (2), une hypocalcémie transitoire [3], des
sympathiques ou une sympathectomie [96] ; un autre à trois extrémités en 4 ans nausées (1), une lymphopénie (1), une hypertension transitoire (1). L’étude
sans facteur déclenchant (main, poignet et coude gauches, membres inférieurs contrôlée pamidronate versus placebo de Liens et al [65] ne montre pas
sans séquelles) [5]. d’efficacité. Une étude densitométrique longitudinale, chez 21 patients
algodystrophiques traités par pamidronate, ne montre pas de différence avant
La question se pose dans ces formes de liens avec des fractures trabéculaires
et la présence d’une maladie générale : dyslipidémie, hyperparathyroïdie, et après le traitement (47 à 1 038 jours après, moyenne 367 jours) [14].
maladie maligne [88], ostéomalacie, en particulier diabète phosphoré. L’alendronate per os a fait l’objet d’une étude demandant confirmation [1]. La
mise en évidence d’une cause de déminéralisation osseuse (ostéoporose
féminine ou masculine par hypogonadisme, ostéomalacie, diabète phosphoré)
Traitement [74] conduit au traitement de celle-ci, adapté selon l’évolution de nos
connaissances pour éviter des fractures trabéculaires ou corticales, sources de
Le traitement a pour but de lutter contre la douleur, les anomalies nouvelles localisations d’algodystrophie.
vasomotrices et de prévenir l’installation d’éventuelles rétractions Les blocs régionaux intraveineux des membres supérieurs ou inférieurs avec
capsulaires, synoviales, tendineuses, aponévrotiques, mais il n’y a pas de la guanéthidine, la réserpine [81], ou d’autres produits (buflomédil, brétylium,
traitement actuellement définitif. L’algodystrophie n’est pas souvent la seule kétansérine, dropéridol, atropine) font l’objet d’études ouvertes. Des résultats
cause de douleurs et il faut tenir compte de la maladie sous-jacente, de la spectaculaires sont parfois rapportés [28]. La disparition (transitoire) de la
lésion initiale, des données psychologiques, de maladies chroniques associées douleur après injection intraveineuse de phentolamine (Régitinet) pourrait
comme le diabète, de problèmes médicolégaux. prédire l’efficacité des blocs sympathiques [89] mais cette notion est
discutée [47]. La réserpine, alcaloïde extrait de Rawwolfia serpentina, entraîne
une déplétion en catécholamines de 95-98 % au niveau de la fibre post-
Médicaments ganglionnaire contre 50 % pour la guanéthidine. Sa vie biologique de 386
Les antalgiques de niveau OMS I ou II ne remplissent pas leur fonction de heures dans le sang, 271 heures dans le plasma, sa demi-vie de distribution de
painkillers dans l’algodystrophie. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens 3 à 5 heures, sa liposolubilité expliquent un relargage différé et son utilisation
sont peu efficaces. Une corticothérapie (20 à 30 mg/j en équivalent possible, y compris pour des formes d’algodystrophie situées en amont du
prednisone), pendant 1 à 2 semaines, avec réduction ensuite et sevrage en bloc (atteinte de l’épaule dans le syndrome épaule-main, atteinte de la hanche
moins de 1 mois, est proposée [52] , y compris après une étude contre dans des formes complexes du membre inférieur). Le concept traitement
placebo [17], mais controversée. Les injections locales de corticoïdes retard régional pour une maladie régionale est intéressant, mais les produits
non fluorés sont parfois utilisés, dans les formes de l’épaule (avec rétraction utilisables doivent faire l’objet de travaux contrôlés, de même que les
capsulaire) ou du genou. L’application locale de capsaïcine est plus efficace techniques analgésiantes épidurales (morphine, clonidine,...), qui ne sont pas
dans les douleurs neurologiques d’origine périphérique que dans sans risques.
l’algodystrophie [47]. L’efficacité de l’application locale de diméthylsulfoxyde La sympathectomie est assez rarement pratiquée, d’autant que le rôle du
(DMSO) est discutée. Beaucoup de médicaments ont été ou sont proposés : la sympathique est controversé dans des formes d’algodystrophie [6], mais elle
Griséofulvinet, des bêtabloquants, des alphabloqueurs (phénoxybenzamine), est proposée dans des études récentes, souvent sur des cas isolés [22, 42, 45].
mais aussi la nifédipine (antagoniste du calcium) ; souvent les études Schwartzman et al ont fait réaliser, sur une période de 10 ans, 29
concernent un grand nombre de patients, mais malheureusement sans groupe sympathectomies (L2-L4, 26 patients, tiers inférieur du ganglion stellaire
contrôle [79]. jusque T3, trois patients). Ils constatent un meilleur résultat quand la
La calcitonine, peptide faisant partie de la superfamille « amylin, calcitonin sympathectomie a été pratiquée la première année d’évolution de
gene-related peptide, calcitonine, adrénomédulline » est souvent utilisée en l’algodystrophie [98].
France. Elle est essayée à raison d’une injection intramusculaire ou sous- C’est dire l’intérêt, chez les patients difficiles, d’une prise en charge
cutanée une fois par jour, 10 à 15 jours de suite. Passé ce délai, une multidisciplinaire et aussi des mesures non médicamenteuses et préventives.
amélioration peut justifier sa poursuite, par exemple à raison d’une injection
quotidienne encore 1 semaine puis trois fois par semaine, pendant encore et
uniquement 1 mois. Il ne faut pas continuer des semaines et des mois la Thérapeutiques physiques
prescription de calcitonine chez un malade manifestement non amélioré par
cette médication. Son mécanisme d’action (direct ou indirect) est discuté : Les thérapeutiques physiques comportent de nombreuses possibilités,
antalgique, vasomoteur ou antiostéoclastique. L’injection de calcitonine est toujours utiles dans la prise en charge d’un patient algodystrophique. Mise au
accompagnée assez souvent de flushs au visage, de céphalées, de nausées, et repos en décharge ou hors contrainte du segment de membre atteint, marche
plus rarement de sensations vertigineuses, de vomissements. Sa tolérance avec pas simulé ou port de cannes anglaises, repos au lit, membre affecté
paraît accrue lors d’une injection le soir et, pour certains, avec en même temps surélevé, contention élastique si verticalisation pour les atteintes distales
une injection d’une ampoule de métoclopramide. L’étude de Doury et al chez (main, pied), physiothérapie à visée circulatoire (bains écossais, à adapter
28 patients ayant une algodystrophie des membres inférieurs a montré une selon la tolérance), hydrokinésithérapie antalgique et facilitatrice, massage de
diminution de la douleur chez 64 % des patients traités par 100 unités/j de drainage de l’œdème, mobilisation kinésithérapique douce, active, assistée,
calcitonine synthétique de saumon et chez 25 % des patients recevant le analytique, luttant contre la raideur et restant en deçà des amplitudes
placebo (p < 0,01) (sans différence significative au 28e jour). La calcitonine provoquant ou exacerbant la douleur (règle de la non-douleur). Une
par voie nasale à 400 unités/j n’est pas plus efficace que le placebo chez 40 rééducation hâtive ou douloureuse entretient une algodystrophie. Donner
patients ayant une algodystrophie après une fracture de Pouteau-Colles [8]. d’emblée quatre séances de rééducation par semaine pendant 6 semaines.
La prescription de tranquillisants, ou d’antidépresseurs, est à adapter selon L’hyperesthésie cutanée, l’allodynie limitent les possibilités d’une
les patients. La gabapentine a été proposée en étude ouverte [75] . Les kinésithérapie active qu’elle interdit le plus souvent, le moindre effleurement
interférences état psychique-algodystrophie sont complexes, mais la douleur étant insupporté.

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14-286-A-10 ALGODYSTROPHIE Appareil locomoteur

Plus tardivement, étirements progressifs et répétés, postures adaptées, •


hydrokinésithérapie (piscine chauffée), orthèses statiques et dynamiques avec • •
matériaux thermoformables luttant contre l’enraidissement ; Les données cliniques sont suffisantes dans un grand nombre de cas
neurostimulation transcutanée dans des formes rebelles permettant la pour retenir le diagnostic d’algodystrophie. La scintigraphie osseuse aux
mobilisation active, le port d’une orthèse, la rééducation de la sensibilité. La trois temps est démonstrative dès le début de l’algodystrophie. Selon les
neurostimulation périphérique avec implantation d’électrode chirurgicale est malades, l’hypofixation isotopique est aussi importante que
proposée quand l’atteinte préférentielle siège au territoire d’un gros tronc l’hyperfixation ; il existe de plus en plus de cas rapportés avec
nerveux dans des formes rebelles. Chez 32 patients algodystrophiques hypofixation, en particulier chez le sujet jeune (enfant, adolescente).
résistants testés, 30 ont été implantés avec, chez 19 d’entre eux, un bon L’IRM est normale dans les formes avec hypofixation scintigraphique et
résultat sur l’atténuation de la douleur spontanée et l’allodynie, mais sans dans les stades tardifs (quand l’œdème a disparu). Le cliché
modifications nettes pour la force musculaire et les troubles trophiques, et radiologique standard, 4 à 8 semaines après le début clinique, reste
seulement 6 ont pu reprendre un travail [38]. La neurostimulation médullaire intéressant, en particulier pour les atteintes des membres inférieurs où
cordonale postérieure est discutée dans des formes rebelles. le diagnostic se pose souvent avec les fractures trabéculaires isolées ou
l’ostéonécrose aseptique. Le choix des examens d’imagerie est fonction
de la période de consultation et des doutes diagnostiques. La prise en
charge d’une algodystrophie ne se résume pas à la prise en charge
Mesures préventives après un traumatisme [20, 97] d’une douleur. La personnalité du patient ne doit pas être mise en avant
comme explication de la survenue d’une algodystrophie, sauf cas
particuliers. Dans les formes à localisations multiples, il faut rechercher
une fragilité osseuse sous-jacente ou une maladie générale (troubles
Surveillance régulière des patients sous contention, immobilisation aussi métaboliques). En l’absence d’un traitement définitivement efficace de
courte que possible, utilisation de matériaux nouveaux mieux supportés, l’algodystrophie, tout médecin doit envisager d’emblée devant un
rééducation douce, contrôle de l’initiation de la rééducation en testant la traumatisme, une maladie ou un acte thérapeutique susceptible de se
sensibilité douloureuse des sujets à la reprise d’une activité, éviter le compliquer d’une algodystrophie, une prise en charge aussi précoce
cercle vicieux de la douleur provoquant, puis maintenant, une que possible et efficace de la douleur, pour mettre le patient dans les
algodystrophie. meilleures conditions de ne pas développer une telle complication.

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