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Biolubrifiants

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BIOLUBRIFIANTS

Lubrifiants et environnement
Abstract: As figures show, volumes of lost lubricants in Europe like in most of industrial countries
represent a threat for the environment and for the human health. Numerous activity fields are concerned
Pascale DE CARO through equipment involved in transports, in construction, in mechanical industry, in forest harvesting
Christine CECUTTI or in agriculture... The spread of lubricants in the environment affects different parts of the natural
medium (soils, underground waters, rivers...), which explains the difficulty to select analytic methods
Laboratoire de chimie agro-industrielle,
assessing the real environmental impact of these products. The most usual analyses provides degrada-
UMR 1010 INRA/INP- ENSIACET, tion rates of the substance in contact with microorganisms, doses of non-toxicity or measures regarding
118 route de Narbonne, to the oxygenation rate of waters. It is important to select the most adapted method according to the
31077 Toulouse cedex 04 context. For a few years, vegetable based lubricants have been considered as a reliable solution to
combine technical performances and ecocompatibility characteristics. These meet criteria defined in
ecolabels or other classifications concerning several categories of biolubricants. National and european
programs aiming at technology transfer allowed to measure and compare the ultimate biodegradability
in liquid and in soil for hydraulic fluids. The results obtained show an environmental gain for
biolubricants included after a 1,000 hours operation period.
Key words: lubricants, environment, biodegradability

Quel que soit le secteur d’application, au cours chaque année en Europe et avec quelles consé- tricité statique, se retrouvent dans les eaux de
de leur cycle de vie, une partie des lubrifiants quences pour l’environnement et pour la santé lavage.
consommés entre inévitablement en contact humaine ? La lubrification en système fermé, lors d’une
avec le milieu environnant. On constate que les utilisation normale, limite le contact avec
lubrifiants dérivés de la pétrochimie présentent l’extérieur, mais il subsiste des pertes acciden-
des risques pour les écosystèmes et donc pour Interaction entre telles. Ainsi, la rupture des flexibles sous pres-
les ressources naturelles (eau, cultures...) [1]. les lubrifiants sion est à l’origine de la perte de 20 à 30 % des
Outre l’huile de base, les lubrifiants contien-
nent un certain nombre d’autres substances
et l’environnement fluides hydrauliques et des huiles de transmis-
sion. Ces rejets concernent de nombreux sec-
destinées à améliorer les performances lubri- En lubrification perdue, par définition, il n’est teurs d’activités tels que les travaux publics,
fiantes. Ces composés jouent également un pas possible de récupérer le lubrifiant après l’exploitation forestière, l’agriculture ou l’entre-
rôle non négligeable au niveau de l’impact utilisation. La lubrification perdue représente tien des cours d’eau... Par ailleurs, 50 % des
environnemental. En effet, les analyses et les environ 20 % de la consommation totale en huiles moteurs ne sont pas comptabilisées dans
contrôles portant sur la nature de ces additifs lubrifiants (source CPL 2003). les circuits de collecte à cause des rejets « sau-
ne sont pas systématiques, ce qui laisse encore vages » [3].
Un certain nombre d’applications sont concer-
le champ libre à l’utilisation de substances peu
nées : Les lubrifiants rejetés dans l’environnement
compatibles avec l’environnement. Pourtant, il
– les graisses utilisées en système ouvert sont peuvent se retrouver directement au contact
existe des solutions techniques pour faire évo-
appliquées régulièrement sur les engrenages et de l’eau lorsqu’il s’agit d’équipements partiel-
luer les formulations et leur mode d’utilisation.
mécanismes de divers équipements (écluses, lement immergés (bateaux, écluses, centrales
Les formulations d’origine végétale constituent
aiguillages de trains, équipements de station hydrauliques...) ou bien d’équipements tra-
à ce titre une alternative intéressante : un
de ski...) ; vaillant à proximité des cours d’eau ou du
niveau d’écocomptatibilité élevé, une faible
– les huiles pour moteur deux temps génèrent littoral. Or il suffit d’un litre de lubrifiant pour
inflammabilité et l’utilisation de ressources
dans l’atmosphère des composés de combus- polluer mille litres d’eau potable [4].
renouvelables pour ne pas contribuer à l’effet
tion ;
de serre [2]. En 1997, la pollution du Rhin par les huiles
– les agents décoffrants utilisés dans le BTP se
retrouvent sous la forme de dépôts sur les minérales a été estimée à 1 032 tonnes par an
En Europe, les systèmes de collecte récupèrent sur un total de polluants de 5 000 tonnes [5].
environ 30 % des lubrifiants usagés sur les 4,8 moules et sur les parements avant d’être lessi-
millions de tonnes consommées, tandis que vés sur le sol ; De façon générale, la dispersion des lubrifiants
45 % sont considérés comme consommés ou – les huiles de chaînes en exploitation forestière dans l’environnement affecte les différents
brûlés1. Que devient le million de tonnes perdu et les huiles de coupe utilisées dans les carrières compartiments du milieu naturel. Un sol souillé
sont dispersées dans des milieux naturels sou- peut donner lieu à une contamination des nap-
vent fragilisés ; pes d’eau souterraines via la migration des
1
Source : UEIL (Union européenne des indépen- – les huiles d’ensimage appliquées sur les fils produits au travers du sol et conduire à la
dants en lubrifiants). textiles pour les protéger et pour réduire l’élec- pollution des eaux de rivières par les eaux de

OCL VOL. 12 N° 4 JUILLET-AOÛT 2005 279

Article disponible sur le site http://www.ocl-journal.org ou http://dx.doi.org/10.1051/ocl.2005.0279


ruissellement qui emportent avec elles les La biodégradabilité l’objet d’un préprojet de norme Afnor NF X31-
agents polluants. 222 [9]. Cette méthode, basée sur le principe
Plus les processus naturels de la biodégradation
De la pollution environnementale, découle un du test OCDE 301 B, permet d’évaluer la bio-
sont rapides et moins la substance est polluante
impact sanitaire ; c’est la qualité des eaux qui dégradabilité ultime de substances déposées
envers le milieu environnant. La biodégradabi-
est en question et, plus ponctuellement, ce dans un bioréacteur contenant du sol naturel
lité s’exprime donc en pourcentage de subs-
sont les cultures qui peuvent être contaminées. avec les micro-organismes d’origine, par
tance dégradée durant un temps déterminé,
Ce constat permet d’identifier les lubrifiants dosage du dioxyde de carbone formé au cours
généralement 28 jours. Pour être biodégradés,
comme une source de pollution non négligea- des processus de biodégradation.
les hydrocarbures doivent passer par une étape
ble mais qui s’opère de façon insidieuse du fait
supplémentaire d’oxydation par rapport aux
du fractionnement des déperditions sur
esters ou aux acides gras qui, eux, sont direc-
l’ensemble des territoires.
tement accessibles par les micro-organismes
L’écotoxicité
via la fonction carboxylique.
Évaluation de l’impact Le taux de biodégradation peut être évalué en Elle est mesurée au moyen de tests normés qui
environnemental suivant la disparition du composé parent : il mettent en œuvre des organismes représenta-
s’agit-là de la biodégradabilité primaire qui se tifs de la chaîne alimentaire. Les tests d’écotoxi-
des lubrifiants cité qui font référence sont les lignes directrices
base sur le test CEC L33T94 réalisé en milieu
Pour cette évaluation, il est préférable de pren- aqueux. C’est la méthode la plus simple à met- OCDE 201, 202 et 203 qui représentent le
dre en compte l’impact de l’ensemble de la tre en œuvre et, de ce fait, la plus utilisée par les milieu aquatique à travers les algues, les daph-
formulation (huile de base et additifs). Il est formulateurs. Mais cette méthode, de par son nies et les poissons. On mesure les doses seuils
également plus représentatif de réaliser des principe, ne traduit pas réellement l’impact qui provoquent chez ces êtres vivants des per-
mesures sur le lubrifiant usagé. En effet, on environnemental des substances étudiées car turbations dans leur comportement (inhibition
peut craindre une baisse de la qualité environ- elle ne se préoccupe pas du devenir des méta- de croissance pour les algues, immobilisation
nementale lorsque le lubrifiant d’un système bolites formés lors de la décomposition du pour les daphnies) ou leur mort (dose létale
clos se charge en métaux d’usure (principale- composé parent. Or, il peut y avoir un grave pour les poissons). Plus les seuils d’écotoxicité
ment du fer, du cuivre et du plomb) ou lorsqu’il danger environnemental au niveau de la toxi- sont bas, plus les produits testés sont toxiques.
a subi une dégradation chimique du fait d’une cité et de la persistance de ces métabolites. Si on se réfère aux phrases de risque [10], on
utilisation à hautes températures. Ainsi, les taux mesurés à l’aide de cette considère un composé comme étant toxique
L’impact des lubrifiants sur le milieu environ- méthode sont-ils souvent supérieurs à ceux quand il cause un effet négatif envers les orga-
nant nécessite de prendre en compte plusieurs donnés par la biodégradabilité ultime. Cette nismes vivants à une teneur inférieur à 100 mg
paramètres présentés ci-après. dernière est déterminée via la quantité de par litre.
Ainsi, il faut regarder de quelle façon se décom- dioxyde de carbone émis en stade final des
posent les substances au contact des micro- processus de dégradation du composé parent. Il faut noter que la biodégradabilité et l’éco-
organismes présents dans le milieu naturel ; il Précisément, on détermine la quantité de toxicité sont deux paramètres indépendants et
s’agit de mesurer la biodégradabilité de la for- matière qui est transformée en éléments chimi- donc deux conditions à remplir simultanément
mulation. ques inoffensifs pour l’environnement (dioxyde pour répondre au critère d’écocompatibilité
Il faut également caractériser l’impact des subs- de carbone, eau, biomasse). Le test OCDE
tances sur le développement et la survie des 301B basé sur ce principe est le test de réfé-
organismes vivants ; il s’agit de mesures d’éco- rence. Il est réalisé en milieu aqueux avec des Pollution des eaux
toxicité. micro-organismes provenant de boues de sta-
Il existe d’autres types de mesures pour évaluer tions d’épuration. La mesure de la DBO et DCO est une méthode
le degré de pollution du milieu et qui apportent Il est généralement admis qu’un produit est générale pour évaluer le degré de pollution
des renseignements complémentaires. Par facilement biodégradable quand son taux de d’une eau par les matières organiques. Elle
exemple, pour les eaux, on peut déterminer la biodégradabilité dépasse 60 % au bout de requiert une bonne dispersion du lubrifiant
DBO (demande biologique en oxygène) et la DCO 28 jours, selon la ligne directrice OCDE 301. Le dans le prélèvement aqueux.
(demande chimique en oxygène) et pour les sols, critère de la fenêtre des 10 jours stipule que le
le coefficient de partage octanol/eau (W/O) qui fluide doit atteindre les 60 % de dégradation Les rejets de lubrifiants en milieu aqueux sont
rend compte de l’affinité des polluants avec sur une période de 10 jours, commençant lors- également concernés par la norme NF EN ISO
l’eau et donc de leur persistance dans le sol [6]. que le taux de biodégradation atteint 10 % et 9377-2 qui porte sur le dosage des hydrocar-
Outre la détermination de ces paramètres, finissant avant le 28e jour de l’essai. bures totaux conformément à la réglementa-
l’impact environnemental d’une substance Les protocoles de biodégradabilité (OCDE et tion sur la qualité des eaux, relative aux instal-
doit normalement prendre en compte le para- CEC) sont basés sur des mesures en milieu lations classées (arrêté du 2 février 1998). Cette
mètre de migration au travers des différentes aqueux. Or, de nombreux lubrifiants sont norme vient se substituer à la norme française
couches du sol : un suivi spatio-temporel permet d’abord dispersés sur le sol. Ces protocoles ne NF T90-114 dont le protocole de dosage pré-
de contrôler la dégradation du polluant dans le sont pas alors forcément adaptés. En effet, le sol sentait l’inconvénient d’assimiler une partie des
temps et dans l’espace [7, 8]. Une migration est moins bien oxygéné que l’eau, les micro- esters à des hydrocarbures [11]. Dans ces
trop rapide du produit avec les eaux de drai- organismes contenus dans le sol sont différents conditions, il est facile de faire valoir le bénéfice
nage conduit à une pollution des eaux souter- de ceux que l’on peut trouver en milieu environnemental lié à l’utilisation d’une formu-
raines. Au contraire, si le produit reste adsorbé aqueux, et enfin, l’adsorption des substrats aux lation sur base d’ester végétal.
sur les particules de sol, dans la mesure où il est particules du sol diminue leur accessibilité vis-
biodégradable, il peut être transformé par les à-vis des micro-organismes. La biodégradabi- Il s’agit d’un exemple pour lequel le processus
micro-organismes et ne causera pas de dégâts lité ultime peut également être évaluée dans le de substitution doit s’accompagner d’une évo-
environnementaux. sol à l’aide d’une nouvelle méthode qui a fait lution des méthodes d’analyse.

280 DOSSIER
Caractéristiques taux et sanitaires sur l’ensemble de la chaîne de lement du fer, du cuivre ou du plomb) et
environnementales production de la fibre. La limitation de l’utilisa- absence de modifications chimiques (oxyda-
tion de substances nocives pour l’eau, l’air et la tion, hydrolyse) découlant de leur utilisation à
des biolubrifiants issus santé concerne, entre autres, 90 % des pro- hautes températures et à hygrométrie élevée.
de ressources renouvelables duits de cardage et d’ensimage mis en œuvre. Ce suivi analytique a également comporté des
Devant la demande croissante des utilisateurs mesures de biodégradabilité et d’écotoxicité
Depuis une dizaine d’années, un certain nom- et des organismes de santé, les adhérents du dont les résultats sont présentés ci-après.
bre d’organismes et de réseaux professionnels Synad (Syndicat national des adjuvants pour
se sont mobilisés avec la collaboration de quel- bétons et mortiers) ont construit une classifica- Biodégradabilité ultime
ques formulateurs pour mettre au point des tion des agents de démoulage sur des critères
lubrifiants plus respectueux de l’environne-
en milieu aqueux et en milieu sol
d’information en matière de santé, d’environ-
ment et pour favoriser leur utilisation. Les dif- nement et d’inflammabilité. Les produits adhé- Le tableau 1 rassemble des résultats de biodé-
férents programmes consacrés à ces études rents sont identifiés par un logo spécifique. Une gradabilité ultime mesurés sur des biolubri-
montrent que dans de nombreux cas l’utilisa- appellation végétale a même été créée : elle fiants employés comme fluides hydrauliques.
tion de lubrifiants d’origine naturelle est une concerne les agents formulés entièrement ou À la lecture de ce tableau, on observe les taux
solution fiable pour combiner performances en partie avec des constituants végétaux et élevés de biodégradabilité ultime mesurés en
techniques et compatibilité avec l’environne- répondant à un seuil minimal de biodégrada- milieu aqueux pour des biolubrifiants utilisés
ment [12-14]. bilité ultime. dans des conditions habituelles de travail pen-
Dans certains cas, la substitution d’un lubrifiant dant au moins 1 000 heures. Ces résultats sont
d’origine minérale par un lubrifiant d’origine intéressants car ils démontrent que les fluides,
Des campagnes de démonstration
végétale s’accompagne d’une modification du malgré des conditions drastiques (températu-
protocole d’application, ce qui du même coup
sur sites pilotes res et taux d’humidité élevés), n’ont pas subi
favorise la mise en place de pratiques plus Des programmes de transfert de technologie d’altération pouvant influer sur leur comporte-
respectueuses de l’environnement. visant à promouvoir l’utilisation de biolubri- ment environnemental. Ce résultat va dans le
On peut citer le cas du travail des métaux, pour fiants sur des sites pilotes, à l’échelle régionale, même sens que la quantification des métaux
lequel la technique de micropulvérisation de nationale et européenne [5, 13, 16] ont permis d’usure et des particules présentes dans les
fluide végétal diminue considérablement les de démontrer les qualités environnementales fluides usagés ; les teneurs se situent en des-
volumes de lubrifiants consommés et donc le des biolubrifiants. sous des seuils limites fixés pour garantir les
stockage des rejets. Concernant les huiles de Notamment, des analyses ont été réalisées à bonnes propriétés lubrifiantes.
décoffrage, il a été montré que l’utilisation de partir des fluides hydrauliques qui représentent Des études comparatives menées à la fois sur
formulations végétales doit s’accompagner des volumes importants (600 000 tonnes par certains de ces biolubrifiants (lubrifiants 1, 2 et
d’une réduction des doses d’emploi pour opti- an dans l’Europe des quinze). Des prélève- 3) et sur un lubrifiant traditionnel d’origine
miser les performances de démoulage [15]. Le ments ont été effectués sur des équipements pétrolière testé sur porteur, ont montré des
développement d’émulsions aqueuses est un fonctionnant en conditions normales avec des écarts notables de taux de biodégradation
autre moyen de réduire le rejet de matières fluides à base d’esters oléochimiques : pelles ultime entre les deux catégories de lubrifiants
actives. mécaniques, bateaux dragueurs et écluses lorsque l’expérimentation est menée en milieu
automatisées appartenant aux VNF (voies navi- sol, toujours après 1 000 heures d’utilisation
Les référentiels gables de France), ainsi que des abatteuses et (tableau 2). De plus, quel que soit le sol, les
des porteurs utilisés en exploitation forestière. taux de biodégradabilité sont inférieurs à ceux
Dans certains pays européens comme l’Allema- Les études réalisées sur les fluides usagés après mesurés en milieu aqueux ; on explique cette
gne, on a pu observer que la mise en place 1 000 heures d’utilisation permettent de tendance à la surévaluation des résultats de
d’écolabels crée un contexte favorable à l’utili- s’assurer qu’il n’y a pas eu de dégradation de la biodégradabilité en milieu liquide, par la
sation de lubrifiants respectueux de l’environ- qualité environnementale des fluides : pas nature même du milieu qui présente à la fois
nement : en répondant à une liste de critères d’enrichissement en métaux d’usure (principa- une meilleure disponibilité du substrat et une
environnementaux associés à quelques spécifi-
cations techniques, les formulations lubrifian-
tes labélisées offrent une garantie de qualité qui Tableau 1. Biodégradabilité ultime des biolubrifiants usagés mesurée dans l’eau selon la ligne directrice OCDE 301B.
rassure les applicateurs.
En France, il existe depuis décembre 2002 un Lubrifiant et machine Nature du Nombre d’heures % de biodégradabilité
lubrifiant d’utilisation ultime
écolabel français de la marque NF-environ-
nement certifié par l’Afnor, qui s’applique aux Biolubrifiant 1 Ester de TMPa 1 000 75
lubrifiants pour chaînes de tronçonneuse. sur abatteuse
Le 9 décembre 2004, les instances européen- Biolubrifiant 2 HETGb Colza + TO 1 000 79
nes ont adopté un écolabel européen pour les sur porteur
lubrifiants, ce qui évite aux formulateurs qui Biolubrifiant 3 HETGb TO 1 000 69
exportent leurs produits de demander une sur porteur
labellisation dans chaque pays. Les produits Biolubrifiant 4 HEESc saturé colza 2 000 80
labellisés sont reconnaissables par le symbole sur bateau-drague
de la fleur reprenant les étoiles du drapeau Biolubrifiant 5 HEESc saturé colza 1 000 85
européen. sur pelle mécanique
Concernant l’industrie textile, il existe égale- a
TMP : triméthylolpropane.
ment depuis 2002, un écolabel européen qui b
HETG : huile environnement triglycéride sur base colza et/ou tournesol oléique (TO).
c
prend en compte les impacts environnemen- HEES : huile environnement ester synthétique.

OCL VOL. 12 N° 4 JUILLET-AOÛT 2005 281


Tableau 2. Biodégradabilité ultime des lubrifiants usagés mesurée dans deux sols selon le pré-projet concentrations qui peuvent correspondre à cel-
de norme Afnor NF X31-222. les mesurées en sortie d’usine si l’on ne prend
pas la précaution de réaliser une dilution avant
Biodégradabilité ultime Biodégradabilité ultime rejet.
en sol sableux (%) en sol argileux (%) De par la faible solubilité des lubrifiants dans
Biolubrifiant 1 60 61 l’eau, les méthodes d’analyse ne sont pas tou-
Biolubrifiant 2 61 62 jours adaptées pour faire la distinction entre les
Biolubrifiant 3 57 57 deux types de lubrifiants (origine pétrochimi-
Lubrifiant traditionnel 25 27 que et végétale). La tendance observée sur la
figure 2 dans le cas de l’étude réalisée est favo-
rable [11] à la formulation à base d’ester végé-
tal. Cette dernière permet d’abaisser la DCO
ainsi que la concentration « apparente » en
meilleure oxygénation, favorisant ainsi les pro- fiants, et ceci pour tous les organismes étudiés. hydrocarbure.
cessus aérobies de la biodégradation. Cepen- On remarque également que la toxicité aug-
dant, la méthode en milieu sol est plus sensible mente avec l’usure des fluides, mais cette dété-
et permet de se rapprocher des conditions rioration reste moindre pour les biolubrifiants, Conclusion
réelles de risque de pollution, lorsqu’un lubri- excepté pour le biolubrifiant 3 testé sur les Les différentes données environnementales
fiant est répandu sur le sol de façon acciden- algues : dans ce cas, le seuil de toxicité est assez collectées s’accordent pour faire valoir un gain
telle. On peut ainsi mieux évaluer les risques de bas (de l’ordre de 100). On peut imputer cette environnemental positif lié à l’utilisation des
pollution des eaux souterraines et du sol, tout valeur à la présence de sélénium, élément biolubrifiants. Les mesures de biodégradabilité
en différenciant nettement les lubrifiants selon apporté par les additifs et très toxique envers ultime et de seuil d’écotoxicité constituent les
leur capacité à être dégradé par les micro- les êtres vivants. Par ailleurs, il semble que le paramètres de référence en la matière, mais
organismes présents dans le milieu. test sur les algues soit le plus sensible. On voit l’interprétation des résultats doit tenir compte
donc que pour bien évaluer l’écotoxicité des des protocoles de mesure mis en œuvre. Par
Mesures d’écotoxicité produits, il est préférable de disposer de exemple, une mesure de biodégradabilité pri-
Des mesures de seuils de toxicité envers des l’ensemble des trois tests car l’interprétation maire en milieu aqueux constitue des condi-
organismes vivants (algues, poissons et daph- d’un seul peut conduire à des conclusions erro- tions favorables à la dégradation des compo-
nies) pratiquées sur les biolubrifiants 1, 2 et 3 nées. sés. La biodégradabilité ultime, plus proche de
vont dans le même sens. la réalité donnera des niveaux de biodégrada-
Les résultats rassemblés dans la figure 1 mon-
Résultats de mesures bilité moins élevés et, là encore, on notera un
trent que le lubrifiant d’origine minérale, qu’il de pollutions aqueuses écart entre les mesures réalisées en milieu
soit neuf ou usagé, est toxique à des doses Les mesures ont été réalisées sur des effluents aqueux ou en milieu sol, ce dernier étant plus
nettement plus faibles que pour les biolubri- aqueux chargés en huiles d’ensimage à des sensible pour différencier des niveaux de bio-

12 000

Doses en mg/L

10 000
Algues
Poissons
Daphnies
8 000

6 000

4 000

2 000

0
Neuf Usagé Neuf Usagé Neuf Usagé Neuf Usagé

Biolubrifiant 1 Biolubrifiant 2 Biolubrifiant 3 Lubrifiant usuel

Figure 1. Seuils d’écotoxicité des lubrifiants neufs et usagés. La dose en mg par litre correspond à : une concentration efficace (EC50-72 h) pour les algues selon OCDE 201 ; une
concentration létale (LC50-48 h) pour les poissons selon OCDE 203 ; une concentration efficace (EC50-48 h) pour les daphnies selon OCDE 202.

282 DOSSIER
800
Huile minérale
700

600

DCO (mg/L) 500


Ester végétal
400

300

200

100

0
0 50 100 150 200 250 300 350 400
Teneur en hydrocarbures (mg/L)

Figure 2. Mesure de la demande chimique en oxygène et détermination de la teneur en HC selon la norme NF T90-114 sur des effluents aqueux reconstitués contenant 200 mg/L
(échantillons pour DCO) et 400 mg/L (échantillons pour HC) d’huiles d’ensimage d’origine pétrochimique et d’origine végétale.

dégradation. De même, afin d’avoir des résul- 2. WILLING A. Oleochemical esters – environ- 11. DE CARO P. Évaluation des performances des
tats représentatifs en matière d’écotoxicité, il mentally compatible raw material for oils and huiles d’ensimage textile formulées sur base
est conseillé de réaliser les tests sur plusieurs lubricants from renewable resources. Fett/lipids d’esters – développement de méthodes analy-
organismes vivants. 1999 ; 101 : 192-8. tiques adaptées. Rapport ADEME, février 2002.
Les bilans environnementaux réalisés dans ces 3. DE CARO P. Analyse de la situation relative à 12. DE CARO P, NGUYEN THE N. Vegetable based
programmes de recherche montrent que l’uti- l’utilisation de lubrifiant d’origine naturelle en lubricants in Forestry: results from a test cam-
lisation de biolubrifiants semble être une excel- France et dans quelques pays européens, Rap- pain. Agro-Food- Industry High-Tech 2001 ; 4 :
lente opportunité pour participer activement à port de la convention de recherche 26-9.
la protection de l’environnement car ces pro- ADEME/ONIDOL n° 97 01 007, Novembre
13. DE CARO P. Mise en place et suivi d’un réseau
duits grâce à leur caractère facilement biodé- 1997.
de démonstration pour l’utilisation de biolubri-
gradable ne présentent pas de risque de pollu- 4. CORNET J. Économie, écologie, lipochimie. fiants : application au secteur de la viticulture,
tion des sols ou des eaux souterraines et les OCL 1994 ; 1(2). Rapport ADEME, septembre 2003.
tests écotoxicologiques de référence montrent
5. Lubrication in Inland and Coastal water activi- 14. MARTINS R, SEABRA J, BRITO A, SEYFERT C,
qu’ils ne sont pas nocifs envers les organismes
ties, Rapport final du programme européen LUTHER R, IGARTUA A. Friction coefficient in
environnants. LLINCWA, Programme du 5e PCRD « Innova- FZG gears lubricated with industrial gear oils:
Pour quantifier l’ensemble du gain environne- tion and SMEs ». A. A. Balkema publishers, biodegradable ester vs. mineral oil. Tribology
mental lié à la production et à l’utilisation de 2003. International (2005, A paraître).
biolubrifiants, une analyse de cycle de vie serait
nécessaire. Les travaux menés dans ce domaine 6. WILLING A. Lubricants based on renewable 15. DE CARO P. Utilisation d’huiles à base végétale
resources – an environmentally compatible pour le démoulage de matériaux de construc-
font état généralement d’un bilan positif pour
alternative to mineral oil products. Chemos- tion. Rapport ADEME, septembre 2000.
les lubrifiants d’origine naturelle [17, 18], mais
phere 2001 ; 43 : 89-98.
les résultats peuvent varier sensiblement en 16. CECUTTI C. Impact environnemental de lubri-
fonction du domaine d’application et des don- 7. CECUTTI C, AGIUS D, CAUSSADE B, GASET A. fiants d’origine végétale utilisés dans l’exploita-
nées disponibles intégrées dans le bilan. En Fate in the soil of an oil additive of plant origin. tion forestière. Programme AGRICE de la
attendant, il est souhaitable que les biolubri- Pest Manag Sci 2002 ; 58 : 1236-42. convention de recherche n° 00 01013, juin
fiants soient explicitement pris en compte dans 8. AGIUS D. Biodégradabilité et devenir d’une 2001.
les descriptifs des systèmes de management huile adjuvante d’origine végétale dans le sol. 17. WIGHTMAN PS. Environmental benefits to be
environnemental (plans environnementaux, Thèse de doctorat N° 1669 de l’INPT, mai derived from the use of vegetable oils in place
norme ISO 14000) de façon à promouvoir leur 2000. of existing petrochemical materials. CTVO-net
utilisation, plus particulièrement en zones sen- 9. CECUTTI C. Un nouveau test d’évaluation de la Workshop, november 1998.
sibles. biodégradabilité dans le sol-Travaux de norma- 18. HEKSTER F. A comparative study to the envi-
lisation en cours. OCL 2003 ; 10(5-6) : 354- ronmental effects of mineral oil and vegetable
RÉFÉRENCES 459. oil based lubricants in open lubricating sys-
1. BARTZ WJ. Lubricants and the environment. 10. Directive européenne sur la classification des tems, Report for LLINCWA Program,
New Dir Tribol, Plenary Invited Pap World Tribol substances dangereuses 67/548/CEE (9e amen- Chemiewinkel- Université d’Amsterdam, avril
Congr, 1st 1997 : 103-19. dement). 2001.

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