FICHE PRATIQUE

DROIT DES CHANTIERS

Ce qu’il faut savoir sur le permis de feu
Le permis de feu est un document opérationnel créé à l’initiative des assureurs afin de limiter le risque
incendie lors de la réalisation de travaux par « points chauds ». Il comporte un certain nombre de consignes
de sécurité devant être respectées avant, pendant et après les travaux.

sécurité pour la construction des immeubles exécutera les travaux « par points chauds ».
PAR CYRIL CROIX et de grande hauteur et leur protection contre 3. Par l’intervenant : il est défini par le CNPP
PAULINE TREILLE,  les risques d’incendie et de panique). comme « le responsable d’intervention
avocats, cabinet Seban & associés
et/ou opérateur qui réalise le travail par
Qui sont les rédacteurs et les signataires point chaud ».
du permis de feu ?
Qu’est-ce que le permis de feu ? Le permis de feu doit être rédigé par « une Que contient le permis de feu ?
Le permis de feu est un « document auto- personne compétente et formée, connais- A minima, il doit comporter les informations
risant l’exécution de travaux par points sant les risques spécifiques des travaux par suivantes :
chauds. Il a pour but de prendre toute me- point chaud, les dangers propres à l’entre- – description des travaux réalisés ;
sure de prévention contre les risques prise ainsi que les actions de prévention – risques identifiés lors de l’enquête préalable ;
d’incendie ou d’explosion à l’occasion de et de protection pour les éviter ». – identité des signataires ;
travaux et de définir les moyens et mesures Il doit faire l’objet d’une triple signature. – actions de prévention et de protection.
nécessaires pour prévenir et lutter contre 1. Par le donneur d’ordre : il s’agit du chef
tout début d’incendie pouvant intervenir de l’entreprise utilisatrice dans laquelle sont En quoi consistent les actions de prévention
à cette occasion » (article GH 3 de l’annexe I réalisés les travaux ou bien son représen- et de protection ?
de l’arrêté du 30 décembre 2011). tant. Le permis de feu doit être signé Il s’agit des mesures devant être prises
par la personne juridiquement responsable avant, pendant et après les travaux :
Quels sont les textes imposant le recours de l’entité pour le compte de laquelle les – vérification du parfait état de l’outillage
au permis de feu ? travaux sont réalisés. et du matériel ;
Les dispositions légales prescrivant le 2. Par la personne désignée pour la sécurité – nettoyage de la zone de travail et aspiration
recours à un permis de feu sont éparses et la surveillance : selon le Centre national de des poussières ;
(voir encadré textes de référence p. 32) : prévention et de protection (CNPP), il s’agit – pose des objets chauffés sur des supports
– ordonnance préfectorale n° 70-15.134 de la personne « désignée par le chef de l’en- ne craignant pas la chaleur ;
du 16 février 1970 (opérations de soudure ou treprise utilisatrice », qui « doit être formée à – présence d’une personne désignée pour la
de découpage par appareils thermiques) ; l’utilisation des moyens de lutte contre le feu sécurité et la surveillance de l’intervention
– articles R. 4511-1 et R. 4512-2 du Code du placés à proximité du lieu de travail ». Elle et chargée d’intervenir ultérieurement si
travail (travaux réalisés dans un établisse- sera nécessairement distincte de celle qui nécessaire ;
ment par une entreprise extérieure) ;
– articles R.4227-1 et suivants, R.4216-1 
et suivants et L.4121-1 du C. trav. (santé et CE QU’IL FAUT RETENIR
sécurité au travail) ;
– article R.4512-7 du C. trav. et article 1er, 21° • Le permis de feu est un document les travaux), la personne désignée pour
de l’arrêté du 19 mars 1993 fixant la liste des obligatoire dépourvu de formalisme. la sécurité et la surveillance et
travaux dangereux pour lesquels il est établi les intervenants réalisant les travaux ;
• Il a pour objectif de prévenir tout risque
par écrit un plan de prévention ; – être conservé, a minima, pendant
– arrêtés du 8 décembre 2011 et du 13 octobre
d’incendie et d’explosion pouvant être
occasionné par des travaux dits par toute la durée des travaux. Il est
2010 relatifs à des installations classées pour
la protection de l’environnement ; « points chauds », en contraignant les fortement conseillé de l’archiver afin de
– arrêté du 5 août 2002 « relatif à la différents intervenants à analyser les le conserver comme élément de preuve
prévention des sinistres dans les entrepôts risques encourus et en établissant des en cas de sinistre ;
couverts soumis à autorisation sous la ru- mesures de sécurité à mettre en œuvre – faire l’objet d’un suivi par
brique 1510 » ; avant, pendant et après les travaux. ses signataires qui pourront voir engager
– arrêté du 25 juin 1980 (règlement de sécuri- leur responsabilité civile et/ou pénale
té contre les risques d’incendie et de panique • Le permis de feu doit :
en cas de sinistre.
dans les établissements recevant du public) ; – être signé par le chef de l’entreprise
– arrêté du 30 décembre 2011 (règlement de utilisatrice (dans laquelle sont réalisés 3

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FICHE PRATIQUE

– inspection du lieu de travail, des locaux de l’article 1147 du Code civil, le permis TEXTES DE RÉFÉRENCES
contigus et des environs pouvant être de feu faisant partie intégrante du contrat • Arrêté du 30 décembre 2011
concernés par les projections d’étincelles de travaux conclu. Le maître d’ouvrage devra « portant règlement de sécurité
ou les transferts de chaleur […]. apporter la preuve de la faute dans l’exé- pour la construction des immeubles
de grande hauteur et leur protec-
cution du contrat, et plus précisément du tion contre les risques d’incendie
Qui assure le respect du permis de feu ? permis de feu, par l’entreprise. et de panique ».
• Le chef de l’entreprise utilisatrice : La jurisprudence exige la démonstration • Ordonnance préfectorale
– « assure la coordination générale des me- du non-respect des obligations de sécurité n° 70-15.134 du 16 février 1970
sures de prévention » (article R. 4511-5 du prévues au sein du permis de feu et/ou des « fixant des mesures de sécurité
à observer lors des opérations
C. trav.) ; règles de l’art auxquelles sont tenues les de soudures ou de découpages par
– veille à l’exécution des mesures décidées sociétés de travaux par « points chauds ». appareils thermiques ».
et à la bonne diffusion des instructions La société de travaux ne pourra s’exonérer de
• Travaux réalisés dans un établis-
aux travailleurs par les chefs des entreprises sa responsabilité totalement ou partiellement sement par une entreprise exté-
extérieures (articles R. 4511-5, R. 4513-1 ali- qu’en apportant la preuve que le sinistre rieure : articles R.4511-1 et suivants
du Code du travail.
néa 2 et R.4513-7 du C. trav.). provient d’une cause étrangère, d’un cas de
• Le chef de l’entreprise extérieure doit quant force majeure ou d’un cas fortuit. A l’encontre • Circulaire DRT n° 93-14 du 18 mars
à lui informer les travailleurs « sur les dan- du sous-traitant, le maître d’ouvrage peut 1993 (non parue au JO), prise pour
« l’application du décret n° 92-
gers spécifiques auxquels ils sont exposés et agir sur le fondement de la responsabilité 158 du 20 février 1992 complétant
les mesures de prévention prises » (article délictuelle en application des articles 1382 le Code du travail et fixant les pres-
R. 4512-15 du C. trav.). Le suivi de l’applica- et suivants du Code civil. Il devra apporter la criptions particulières d’hygiène et
de sécurité applicables aux travaux
tion des mesures est également assuré par la preuve d’une faute imputable au sous-trai- effectués dans un établissement
réalisation d’une inspection commune pério- tant. La plupart du temps, le maître d’ou- par une entreprise extérieure
(art. R. 237-1 à R. 237-28 du Code
dique entre le chef de l’entreprise utilisatrice vrage se contentera d’agir contre l’entreprise du travail) ».
et le chef de l’entreprise extérieure (articles avec laquelle il est contractuellement lié,
R. 4513-2 et 3 du C. trav.). à charge pour cette dernière d’agir à l’en- • Arrêté du 8 décembre 2011 relatif
« aux prescriptions générales ap-
contre de son sous-traitant, qui ne pourra plicables aux installations relevant
Quelle est la durée de validité du permis de feu ? s’exonérer qu’en démontrant l’existence des du régime de l’enregistrement au
Si aucun texte ne définit cette durée, le CNPP causes d’exonération précitées. En cas de titre de la rubrique n° 2910-C de
la nomenclature des installations
précise que le permis est valable pour la propagation d’un incendie, les tiers victimes classées pour la protection de
durée des travaux mentionnée sur le docu- pourront engager la responsabilité du maître l’environnement ».
ment. Il doit être renouvelé chaque fois qu’un d’ouvrage en sa qualité de propriétaire ou • Arrêté du 13 octobre 2010 « relatif
de ses éléments constitutifs est modifié : lieu, d’occupant de l’immeuble concerné, sur le aux prescriptions générales appli-
intervenants, nature des travaux, méthode fondement de l’article 1384 du Code civil, cables aux installations classées
pour la protection de l’environne-
et procédé de travail… ce qui nécessite la démonstration d’une ment soumises à déclaration sous
Lorsque les travaux sont réalisés dans un faute imputable au maître d’ouvrage. la rubrique n° 2713 ».
immeuble de grande hauteur (IGH), l’article Ce dernier pourra faire valoir le respect du
• Article 22 de l’arrêté du 5 août
GH 3 de l’annexe I de l’arrêté du 30 décembre permis de feu afin de se voir exonérer. 2002 « relatif à la prévention
2011 précise que la validité du permis de feu En présence d’un coordonnateur en matière des sinistres dans les entrepôts
couverts soumis à autorisation
« est limitée à un jour ou une opération. Dans de sécurité et de protection de la santé (SPS), sous la rubrique 1510 ».
ce dernier cas, la durée maximale de validité les obligations du maître d’ouvrage se trou-
est de cinq jours au-delà desquels le permis veront assurées par celui-ci (article R.4532- • Arrêté du 25 juin 1980 « portant
approbation des dispositions
de feu est renouvelé ». 13 du C. trav.). générales du règlement de sécurité
• Responsabilité pénale du maître d’ouvrage contre les risques d’incendie et de
Doit-on conserver le permis de feu ? et/ou des sociétés de travaux « par points panique dans les établissements
recevant du public (ERP) ».
Aucun texte ne semble imposer la conserva- chauds ».
tion du permis de feu délivré. Il est cependant Au titre de l’article 121-2 du Code pénal,
fortement conseillé de conserver ce document, la responsabilité pénale de la personne
qui constitue la seule preuve de l’ensemble morale, à l’exclusion de l’Etat, peut être enga-
des mesures de sécurité prises par le maître gée pour toutes infractions commises « pour
d’ouvrage en réponse au risque d’incendie. leur compte, par leurs organes ou représen-
Et ce, a minima, durant le temps de réalisation tants ». Plusieurs qualifications pénales
des mesures de sécurité après travaux. pourront être envisagées selon que les tra-
vaux concernés auront causé un dommage
Quelles sont les conséquences du non-respect effectif ou éventuel :
du permis de feu ? – délit d’homicide involontaire ou de bles-
• Responsabilité civile du maître d’ouvrage sures involontaires (articles 221-6 et s.
et/ou des sociétés de travaux « par points et articles 222-19 et s. du Code pénal) ;
chauds ». – délit de destruction, dégradation et/ou
En cas d’incendie, le maître d’ouvrage pourra détérioration involontaire d’un bien par
agir, sur le fondement de la responsabilité incendie (article 322-5 du Code pénal) ;
contractuelle, à l’encontre de la société de – délit de risque causé à autrui (article 223-1
travaux par « points chauds » en application du Code pénal). n

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