11 SOULI Infections Associées Soins Perceptions Des Infirmiers
11 SOULI Infections Associées Soins Perceptions Des Infirmiers
11 SOULI Infections Associées Soins Perceptions Des Infirmiers
THEME
Figure 1 INFECTIONS ASSOCIEES AUX SOINS :
Présenté par
SOULI MARC
ETUDIANT EN MASTER DE SCIENCES INFIRMIERES, OPTION
PEDAGOGIE/MANAGEMENT DE LA QUALITE ET DE LA SECURITE DES SOINS
ANNEE UNIVERSITAIRE 2016 - 2017
II
REMERCIEMENTS
DIEU, tout puissant, vous nous avez inspiré ce travail, Gloire éternelle vous soit rendue.
Ce travail est le résultat des efforts conjugués de plusieurs personnes, sans lesquelles il
n’aurait pas pris corps. Je voudrais dire infiniment merci :
Au Docteur HIEN Hervé, mon Directeur de mémoire. Vous m’avez fait l’honneur de
diriger mon mémoire. Je vous remercie de vos conseils précieux. Soyez rassuré de
toute ma reconnaissance et de mon profond respect.
A Monsieur NANA Noufou Gustave, mon Co-directeur. C’est avec vous que j’ai
connu les merveilleuses aventures de la recherche qualitative. Vos qualités
professionnelles, votre ardeur et votre rigueur au travail m’ont inspiré. Trouvez en ces
lignes l’expression de ma profonde gratitude.
A tous ceux qui m’ont soutenu d’une manière ou d’une autre et dont les noms n’ont pu
être cités. Trouvez ici ma profonde reconnaissance.
III
RESUME
Les infections associées aux soins (IAS) constituent une préoccupation mondiale du
fait de leur ampleur et leur coût humain et financier. Si les attitudes de non-observance
des infirmiers quant aux mesures d’hygiène et d’asepsie sont mises en cause, les
logiques qui les justifient ne sont pas tout à fait élucidées. Nous supposions que les
expériences et les perceptions des infirmiers constituent une des raisons qui expliquent
leurs attitudes de non-observance des mesures de prévention. Aussi, l’approche du
caring des infirmiers jouerait un rôle important pour la sécurité des patients.
L’objectif de cette étude était de décrire le vécu et les perceptions des infirmiers sur les
IAS dans un hôpital de district du Burkina Faso. Le but étant de contribuer à la
compréhension des facteurs qui déterminent les attitudes de non-observance des
mesures d’hygiène et d’asepsie, révélées être à l’origine de la survenue des IAS.
Dans cette étude qualitative, des entrevues non-structurées ont été réalisées auprès de
dix (10) infirmiers de l’hôpital de district de Ziniaré. La méthode phénoménologique
selon Giorgi (1997) a été utilisée pour l’analyse des données.
L’analyse phénoménologique (Giorgi, 1997) a permis de décrire quatre thèmes : « une
réalité ignorée » ; « une responsabilité déniée » ; « une perception négative » et « un
problème solvable». Ces résultats montrent une faible perception de l’ampleur et de la
gravité des IAS par les infirmiers ainsi qu’un déni de responsabilité dans leur
survenue. Par conséquent, les IAS ne sont pas toujours perçues comme une
préoccupation. Toutefois, les infirmiers déplorent la situation mais restent optimistes
quant à la résolution du problème.
Ces perceptions des infirmiers sur les IAS pourraient expliquer leur non-observance
des mesures d’hygiène et d’asepsie qui est à l’origine du problème. Les pistes qui se
dégagent de ce travail portent sur la sensibilisation, la formation continue, la
communication et l’amélioration des conditions de travail. Aussi, l’implication de
l’ensemble des acteurs y compris les patients et leur famille s’avère primordiale dans
la lutte contre les IAS.
IV
ABSTRACT
The aim of this study is to describe the experiences and perceptions of nurses on HAIs
in a district hospital in Burkina Faso. The goal is to help understand the factors that
determine attitudes of non-compliance with hygiene measures. In this qualitative
research, semi-structured interviews were conducted with 10 nurses from the Ziniaré
district hospital. The phenomenological method according to Giorgi (1997) was use to
analyze collected data.
Nurses’ perceptions on HAIs could explain their non-compliance with hygiene and
asepsis, which is causing the problem. Solutions to solve the problem can be
awareness raising, continuing training and communication. Also, the involvement of
all actors including patients and their families is essential in the fight against HAIs.
V
SOMMAIRE
RESUME .................................................................................................................................. IV
LISTE DES ABREVIATIONS ...............................................................................................VII
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1
CHAPITRE I : PROBLEMATIQUE ......................................................................................... 4
1.1. Enoncé du problème.............................................................................................. 4
1.2. But et objectifs ...................................................................................................... 6
1.3. Question de recherche ........................................................................................... 7
CHAPITRE II : REVUE DE LITTERATURE .......................................................................... 9
2.1. Définition des concepts clés .................................................................................. 9
2.2. Généralités sur les infections associées aux soins .............................................. 14
2.3. Résumé critique des études sur les perceptions des soignants sur les IAS ......... 20
2.4. Considérations théoriques ................................................................................... 24
CHAPITRE III : MATERIELS ET METHODES ................................................................... 32
3.1. Type d’étude: ...................................................................................................... 32
3.2. Cadre de l’étude .................................................................................................. 32
3.3. Echantillon et échantillonnage ............................................................................ 33
3.4. Techniques et outils de collecte des données ...................................................... 34
3.5. Analyse des données ........................................................................................... 35
3.6. La rigueur scientifique ........................................................................................ 35
3.7. Aspects éthiques .................................................................................................. 37
CHAPITRE IV : RESULTATS ............................................................................................... 39
4.1. Profil sociodémographique et professionnel des participants ............................. 39
4.2. Résultats de l’analyse phénoménologique .......................................................... 39
4.3. Synthèse des résultats.......................................................................................... 64
CHAPITRE V : DISCUSSION DES RESULTATS................................................................ 68
5.1. Perception de la réalité du problème des IAS .................................................... 69
5.2. Les déterminants de la survenue des IAS selon les infirmiers ............................ 72
5.3. Les solutions au problème des IAS selon les infirmiers .................................... 76
5.4. Limites de l’étude ............................................................................................... 79
CONCLUSION ........................................................................................................................ 81
REFERENCES ......................................................................................................................... 85
ANNEXES ................................................................................................................................ A
VI
LISTE DES ABREVIATIONS
ACESI Association Canadienne des Ecoles de Sciences Infirmières
CERS Comité d’Ethique pour la Recherche en Santé
CHU Centre Hospitalier Universitaire
CMA Centre Médical avec Antenne chirurgicale
CVP Cathéter Veineux Périphérique
IAS Infection Associée aux Soins
IDE Infirmier Diplômé d’Etat
IB Infirmier Breveté
OMS Organisation Mondiale de la Santé
Op.cit. Ouvrage précédemment cité
PCI Prévention Contre les Infections
PI Prévention des Infections
SF2H Société Française d’Hygiène Hospitalière
VII
INTRODUCTION
1
intéresser aux dimensions subjectives des soignants notamment leurs expériences et
perceptions dans une perspective d’éclairer le phénomène de non-observance des
mesures d’hygiène et d’asepsie qui constitue un facteur de survenue des IAS.
2
CHAPITRE I : PROBLEMATIQUE
Par leur ampleur et leurs conséquences, les infections associées aux soins (IAS)
constituent l’un des premiers risques pour la santé et un défi à relever par les systèmes
de santé à l’échelle mondiale (Astagneau & Lepoutre, 2002 ; Thiolet et al., 2007 ; Hien
et al., 2012 ; Magill et al., 2014 ; Ouendo et al., 2015). Les IAS constituent de ce fait
un problème de sécurité pour les patients. Plusieurs facteurs ont été identifiés comme
étant à l’origine des IAS. Ces facteurs sont notamment liés au système de santé, à
l’organisation des soins, aux professionnels de santé, à la nature des soins réalisés, à
l’environnement des soins ainsi qu’aux patients eux-mêmes (Thiolet et al., 2007 ; Hien
et al., 2012 ; Magill et al., 2014 ; Ouendo et al., 2015 ; Lucet & Birgand, 2016).
S’agissant des professionnels de santé, leurs attitudes et pratiques ont été mises en
cause dans la survenue des IAS (Amiel, 2005 ; Bagny et al., 2013 ; Stone et al., 2012 ;
Borg, 2014, 2014 ; Fricain et al., 2008 ; Haas & Larson, 2007 ; Hien et al., 2013 ;
Lucet & Birgand, 2016). L’évaluation des pratiques montre que des insuffisances
subsistent quant à la mise en œuvre des procédures de soins et des principes de
prévention des infections. En effet, la négligence des mesures d’hygiène et d’asepsie
par les soignants figure parmi les difficultés les plus rapportées lors des évaluations de
la qualité des soins (Amiel, 2005 ; Bagny et al., 2013 ; Borg, 2014, 2014 ; Fricain et
al., 2008 ; Haas & Larson, 2007 ; Hien et al., 2013 ; Lucet & Birgand, 2016 ; Stone et
al., 2012). Aussi, les agents de santé mettent en doute les procédures et moyens de
prévention mis à leur disposition (Ndione, 2010). De plus, notre pratique quotidienne
des soins nous a permis de constater que nombre d’infirmiers produisaient beaucoup
de fautes d’asepsie et ignoraient les notions les plus élémentaires de l’hygiène. Cette
situation est d’autant plus incompréhensible que des mesures simples comme le lavage
des mains, le port de gants ont prouvé leur efficacité dans la prévention des IAS. Face
à cette situation est apparue une volonté de sécuriser les soins par un ensemble de
mesures et de recommandations et au-delà de développer une culture de sécurité chez
le personnel de santé. Dès lors, des normes de prévention contre les infections ont été
élaborées et leur application rigoureuse recommandée (Carricaburu et al., 2008 ;
4
Ducel et al., 2002). Ces mesures ont eu un impact certes sur la réduction des IAS
notamment dans les pays développés. Cependant, elle n’a pas éradiqué le problème
particulièrement dans les pays en développement où les IAS restent ignorées et la
sécurité des soins négligée (Hien et al., 2012 ; Simon et al., 2007). Malgré les
multiples interventions, ces infections demeurent et font chaque année de nombreuses
victimes dans les établissements de santé (Ducel et al., 2002). L’analyse de la situation
montre que les interventions se basent essentiellement sur l’élaboration de
recommandations ou de protocoles à l’endroit des soignants (Lucet et Birgand, 2016).
Or, pour ces auteurs, la seule diffusion de recommandations ne suffit pas pour les
appliquer. Carricaburu et al. (2008) corroborent ce discours en affirmant que « le
savoir scientifique ne suffit pas pour expliquer ou comprendre le comportement des
professionnels ». S’il parait évident que les soignants disposent de connaissances de
base qui leur permettraient d’adopter des attitudes favorables à la sécurité des malades,
leurs pratiques observées sur le terrain contrastent avec ces savoirs reçus lors des
formations (D’Alessandro, 2012). Les apprentissages accordent pourtant une place
importante aux mesures d’asepsie dans les procédures de soins. S’interroger sur les
déterminants comportementaux des professionnels de santé en lien avec la survenue
des IAS s’avère alors une problématique très pertinente afin d’élucider la situation.
Dans ce sens, Lucet et Birgand (2016), suggèrent de tenir compte des facteurs propres
aux soignants ainsi que des aspects pratiques afin d’améliorer les soins ; cela passe par
un changement de comportements. Cette situation nous amène à nous intéresser aux
dimensions subjectives des soignants que sont les infirmiers1. De par leur position
dans le système de soins, ils réalisent de nombreuses interventions auprès des patients
et ont le devoir d'assurer les conditions de sécurité notamment d’asepsie lors de la
réalisation des soins. Comme le souligne Nolin (1993), leur fonction soignante impose
le respect strict des mesures d’hygiène hospitalière à travers des actes spécifiques. De
ce fait, ils sont plus susceptibles d’être interpellés (Ndione, 2010). Par ailleurs, nous
nous intéressons aux actes invasifs à haut risque d’IAS réalisés couramment par les
infirmiers (Castelli-Vergnau & Durand, 1992 ; Thiolet et al., 2007 ; Hien et al., 2012 ;
Raud, 2016 ; Astagneau & Lepoutre, 2002). Ainsi, nous évoquons une probable
1 Le terme infirmier utilisé dans ce document désigne aussi bien les infirmiers que les infirmières.
5
influence des expériences et perceptions des infirmiers sur leurs attitudes et pratiques
en rapport avec la non observance des mesures d’hygiène et d’asepsie. Comme le
souligne Lucet et Birgand (2016), les perceptions des soignants non seulement
influencent leurs attitudes et leurs pratiques mais aussi se basent souvent sur des
intuitions personnelles qui peuvent être erronées. Aussi, peu d’études ont été faites à
ce sujet dans le contexte du Burkina Faso où Hien et al (2012) trouvaient une
prévalence de bactéries isolées à 71,8% et une faible adhésion des soignants aux
mesures d'hygiène et d’asepsie. A travers cette étude, nous voulons contribuer au
changement de comportement des infirmiers notamment pour ce qui concerne
l’application des mesures de prévention afin d’amoindrir le problème des IAS.
L’objectif général de notre étude était d’investiguer les facteurs personnels des
infirmiers qui sont associés à la survenue des IAS.
- recueillir le vécu des infirmiers relatif aux infections associées aux soins,
- décrire les perceptions des infirmiers sur les infections associées aux soins,
- appréhender l’influence des perceptions des infirmiers dans la survenue des
infections associées aux soins.
6
1.3. Question de recherche
Pour répondre à cette interrogation, nous avons formulé les propositions théoriques
suivantes :
- les expériences des infirmiers déterminent leurs pratiques relatives à l’application des
mesures de PI ;
- les perceptions des infirmiers influencent leurs attitudes relatives à l’application des
mesures de PI ;
- les expériences des infirmiers déterminent la survenue des infections associées aux
soins ;
- les perceptions que les infirmiers ont des infections associées aux soins expliquent
leur survenue.
La variable dépendante de notre étude est représentée par la survenue des IAS et les
variables indépendantes par les expériences et les perceptions des infirmiers sur les
IAS. En effet, les expériences et les perceptions des soignants joueraient un rôle dans
la survenue des IAS par l’intermédiaire de leurs attitudes et pratiques.
7
CHAPITRE II : REVUE DE LITTERATURE
La précision des concepts de notre étude est une étape indispensable. C’est ainsi
qu’avant d’aborder le cadre de référence de notre étude, nous avons fait une revue de
littérature sur le problème des IAS. Cela nous a amené à explorer des ouvrages, des
articles de revues, des mémoires, des thèses, et des sites internet qui ont abordé la
question des IAS. Ainsi la restitution de cette revue de littérature est bâtie autour des
points ci-après :
Le concept d’ « infection associée aux soins » est venu suppléer celui d’« infection
nosocomiale » pour prendre en compte les infections acquises en dehors des
établissements hospitaliers qui n’étaient pas forcement prises en compte dans la
définition d’infection nosocomiale (Comité technique des infections nosocomiales et
des infections liées aux soins, 2007). Les IAS concernent non seulement les patients,
malades ou non, mais aussi leur famille, le personnel de santé ainsi que les visiteurs
(op.cit, 2007). L’actualisation de la définition de l’infection nosocomiale a été aussi
faite dans un but opérationnel de surveillance épidémiologique, ainsi que de
prévention et de gestion du risque infectieux par les professionnels de santé (Ibid,
2007). Selon le Comité Technique Français des Infections Nosocomiales et des
infections liées aux Soins (2007, p. 3) :
Une infection est dite associée aux soins si elle survient au cours ou au décours
d’une prise en charge […] d’un patient et si elle n’était ni présente, ni en
incubation au début de la prise en charge. Lorsque l’état infectieux au début de la
prise en charge n’est pas connu précisément, un délai d’au moins 48 heures […]
est couramment accepté. Toutefois et quel que soit le délai de survenue, il est
recommandé d’apprécier dans chaque cas la plausibilité de l’association entre
l’intervention et l’infection, …
9
2.1.2. Perception
2.1.3. Expérience
10
l’expérience à la fois comme un acquis et un vécu mais aussi un processus fonctionnel,
la mémoire et l’action jouant un rôle important dans ces trois éléments. En effet,
Cadière (2017), distingue: « Avoir l'expérience » qui est une connaissance subjective
de soi et du monde, de « Faire expérience de » … des objets, des situations, des
pratiques, des relations, d'autrui, … qui constituent le monde du dehors. L’expérience
résulte d’une incorporation particulière, éprouvée de ce qui est perçu, vécu, ressenti,
fait… et qui s’archive comme histoire vécue du sujet. Ce sont des connaissances
éprouvées et acquises par interaction avec l’environnement. Ces connaissances sont et
demeurent, autoréférentielles et sont réactivées de manière consciente dans les
activités. En outre, pour Cadière (2017) l’expérience est dans la subjectivité du sujet
une donnée (consciente ou inconsciente) qui a pour fonction de servir de référence qui
permet de réfléchir et d’agir. L’expérience en tant que connaissance est mobilisée en
vue de l’action. L’expérience est un élément central dans cette étude en ce sens que,
quand les infirmiers réalisent les soins, ils agissent avec leurs expériences. Il s’agit là
de leurs expériences des IAS.
2.1.4. Attitude
L’attitude est une notion polysémique qui renvoie aux manières d’être et d’agir.
Phaneuf (2013), aborde l’attitude comme une prédisposition de la personne à porter un
jugement ou à manifester un comportement dans une situation donnée à l'égard d'une
personne, d'un objet, d’une action, ... L’attitude est interne mais peut être extériorisée
par des comportements qui la décrivent et comportements qu’elle permettrait de
prédire (Ajzen et Fishbein, 1980). Si l’attitude est une prédisposition, le comportement
est une réaction observable en réponse à une stimulation intérieure ou extérieure
(op.cit, 1980). Ces deux notions sont donc souvent reliées, mais pas nécessairement.
Les attitudes et comportements sont influencés par des facteurs propres au sujet
(expériences, valeurs, convictions, connaissance ou méconnaissance, capacité de
réflexion critique, degré de confiance en soi,...) et des facteurs externes
(comportements des autres, sources d'information, normes sociales…) (Ibid, 1980).
Pour Phaneuf (2013) les attitudes et les comportements professionnels sont influencés
par des valeurs, des finalités et des schèmes d’action qui orientent les choix des
11
professionnels. Elle, résume en trois catégories les attitudes et comportements relatifs
aux soins infirmiers. Il y a d’abord les attitudes propres à l’infirmière comprenant : la
gestion de soi (connaissance de ses propres capacités : forces et limites...), l’esprit
d’équipe, la métacognition (perception de ses manières d’agir et d’être, adaptation de
son comportement pour une amélioration), le professionnalisme (sens du travail bien
fait, engagement, assumer ses actes…) et la présentation (apparence physique,
hygiène, politesse, langage, posture…). Ensuite, il y a les attitudes et comportements à
l’égard des autres comprenant : la sensibilité envers les autres (écoute, bienveillance,
perception holistique, empathie…) et l’éthique (respect, confidentialité, justice…).
Enfin, il y a les attitudes orientées vers l’action (résolution des problèmes ; capacité à
évaluer une situation, à prioriser et à prendre de décisions adéquates ; mobiliser des
moyens pour exécuter des soins efficients et efficaces). L’intérêt d’aborder les
attitudes dans cette étude vient du fait qu’elles influencent le comportement et donc les
pratiques. En effet, les pratiques des infirmiers en rapport avec la mise en œuvre des
mesures d’hygiène et d’asepsie, lorsqu’elle est inadéquate peut être un facteur de
survenue des IAS.
2.1.5. Pratiques
Goutille (cité par Essi et Njoya, 2013), définit les pratiques comme « des actes réels
accomplis par une personne en situation, dans son contexte habituel ». L’auteur
souligne ici la particularité de l’action dans une situation donnée qui constitue la
pratique. MacIntyre (Cité par l’Association canadienne des écoles de Sciences
infirmières (ACESI), 2014) quant à lui définit la pratique comme « Toute forme
cohérente et complexe d’activité humaine coopérative socialement établie par laquelle
les biens internes à cette activité sont réalisés en tentant d’obéir aux normes
d’excellence appropriées qui définissent en partie cette forme d’activité ». Cette
définition souligne le caractère collectif de la pratique de même que les biens sociaux
qu’elle produit. Dans le même sens l’ACESI (2014), considère la pratique infirmière
comme un ensemble d’activités coopératives produisant des biens sociaux. Essi et
Njoya (2013), quant à eux soulignent particulièrement le fait que les pratiques de soins
préservent la santé ou exposent aux problèmes de santé. Dans cette étude, les pratiques
12
sont relatives aux soins infirmiers notamment pour ce qui concerne la mise en œuvre
des mesures d’hygiène et d’asepsie qui lorsqu’elle est inadéquate peut être un facteur
de survenue des IAS.
13
2.2. Généralités sur les infections associées aux soins
Les infections associées aux soins constituent de nos jours une préoccupation du fait
de leur ampleur et de leurs coûts humains. Marion-White et al (1988), dans une étude
internationale comprenant 47 hôpitaux dans 14 pays sur 4 continent ont révélé des
prévalences d’IAS variant entre 3 et 21% avec une moyenne de 8,4%. La prévalence
d’IAS était estimée à 4% en 2001 aux Etats Unis, (Magill et al., 2014) ; à 5 % en
France en 2006 (Thiolet et al., 2007). Selon le Réseau International pour la
Planification et l’Amélioration de la Qualité dans les systèmes de santé en Afrique
(2011), la prévalence des infections associées aux soins estimée dans plusieurs pays en
Afrique oscille entre 10 et 60%. Cette prévalence est estimée à 10,9% au Sénégal, 12%
en Côte d’Ivoire, 10% au Bénin (Ouendo et al., 2015) et 14% au Mali. Au Burkina
Faso, une étude menée dans un district sanitaire en 2012 révélait une prévalence des
germes isolés de 71.8% parmi les échantillons prélevés (Hien et al., 2012). Plusieurs
études ont révélé que les infections associées aux soins sont responsables ou
contribueraient à de nombreux décès dans le monde (Astagneau & Lepoutre, 2002).
S’agissant des types d’IAS, la situation varie selon les pays. En France ce sont les
infections urinaires (30 % des cas), suivies des pneumopathies (15 %) et des infections
du site opératoire (14 %) qui sont retrouvées (Op.cit. 2007). Aux Etats Unis, les
pneumonies (21,8%) les infections du site postopératoire (21,8%) et des infections
gastro-intestinales (17,1%) sont les plus fréquentes (Magill et al., 2014) . Au Benin, les
tissus mous (37%), le site urinaire (32%), le sang (10%) et les sites opératoires (5%)
sont les plus évoqués (Ouendo et al., 2015). Au Burkina Faso, les infections des
cathéters urinaires suivies des infections du site chirurgical étaient les plus importantes
(Hein et al, 2012).
Pour les germes les plus en cause, Magill et al (2014) ont mis en évidence Clostridium
avec 12,1% d’IAS ; Ouendo et al (2015) quant à eux ont retrouvé Klebsiella
pneumoniae, Escherichia coli, Staphylococcus aureus qui représentaient 60% des
germes; Hien et al (2012) retrouvaient Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae qui
14
représentaient 56,26% des germes. La plupart de ces études ont identifié des micro-
organismes résistant aux antibiotiques usuels.
Les actes invasifs sont les facteurs les plus associés à la survenue des IAS. En France,
les interventions chirurgicales, les poses de cathéter vasculaire, les
intubations/trachéotomies, les poses de sonde urinaire sont le plus souvent évoquées
(Thiolet et al., 2007). Aux Etats Unis, 25,6% des facteurs mis en cause sont les
cathéters centraux, les cathéters urinaires, les dispositifs de ventilation respiratoire
(Magill et al., 2014).
Le type de services cliniques est aussi déterminant dans la fréquence des IAS. Aux
Etats Unis, les IAS sont associées principalement aux services de soins intensifs
(Magill et al., 2014). Quant au Benin, les unités des grands brûlés et d’urologie étaient
celles qui enregistraient le plus d’IAS (Ouendo et al., 2015).
Tous ces facteurs de risque, bien que très importants, sont pour une bonne part
contrôlables et même évitables (Phaneuf & Gadbois, 2010). Un fait qui a recentré
l’attention sur les IAS est l’épidémie à virus Ebola qui a sévi en Afrique de l’ouest de
2013 à 2016. Les services de santé se sont révélés être des sources très importantes de
transmission du virus Ebola. Cependant des mesures rigoureuses de contrôle ont
permis de limiter la propagation de l’épidémie (OMS, 2016).
Il est urgent de traiter le problème des infections associées aux soins au regard de leur
ampleur et de leurs conséquences. Si les études épidémiologiques ont permis
d’enregistrer des avancées significatives dans la lutte contre les IAS, peu de recherches
ont porté sur les facteurs humains témoignant de pratiques et d’attitudes dépassées qui
annihilent les efforts de prévention. D’autres approches notamment en Sciences
humaines et Sociales sont nécessaires pour mettre en évidence les logiques qui sous-
tendent les actes des professionnels de santé. Dans ce sens, l’investigation des
expériences et perceptions des infirmiers sur les IAS apparaît donc fondamentale pour
comprendre cette situation.
15
2.2.2. Actes invasifs et infections : cas des voies veineuses périphériques
Plusieurs raisons ont suscité l’intérêt que nous portions aux voies veineuses
périphériques (VVP). En effet, la pose, l’utilisation et l’entretien de voie veineuse
périphérique sont des actes de soin invasifs très courants dans la pratique infirmière
(Castelli-Vergnau & Durand, 1992). La pose d’une VVP est un acte relevant d’une
prescription médicale mais sa gestion et son entretien relèvent du rôle propre de
l’infirmier en référence à un protocole de soins (article R4311-7 du Code de la Santé
Publique français, cité par Acker, 1991). En outre, des études ont révélé que cette
intervention est responsable d’IAS (Hien et al., 2012 ; Magill et al., 2014 ; Thiolet et
al., 2007). Aussi, des facteurs relatifs aux perceptions et attitudes des soignants tels
que les écarts de pratiques de pose et de gestion des VVP concourent à la survenue de
ces IAS (Castelli-Vergnau & Durand, 1992 ; Hien et al., 2012). Face à cette situation,
des recommandations de prévention sont faites et prennent en compte les mesures
d’asepsie, le choix du matériel, les sites de pose, les gestes techniques, l’utilisation et
l’entretien ainsi que la surveillance attentionnée (Ducel et al., 2002 ; SF2H, 2005).
Cependant, les Audits des cathéters veineux périphériques font ressortir que les
recommandations ne sont pas toujours mises en application par les infirmiers (Pefau &
Zaro-Goni, 2011). Il est donc évident qu’un changement d’attitude passerait par
l’investigation des déterminants personnels des infirmiers qui font obstacles au respect
des bonnes pratiques de pose et de gestion des VVP. Dans ce sens, l’étude de leurs
expériences et perceptions des IAS pourrait permettre de comprendre les raisons de
non-observance des mesures de prévention des infections.
16
Gadbois, 2010, p. 13) est évocatrice de cette lutte : « ça fait déjà 160 ans qu’on sait
que se laver les mains avant de toucher un patient, peut lui sauver la vie ». Sont
apparues alors les notions d’asepsie et d’antisepsie. Dès lors des mesures d’hygiène
sont enseignées aux soignants et recommandées lors de l’administration des soins aux
malades et grâce à l'application de règles, la mortalité a fortement diminué dans les
Hôpitaux (Galmiche, 1999). De nos jours, de nombreux auteurs d’études sur les IAS
attirent l’attention quant à la priorité de lutter contre ce problème et cela d’autant plus
que des mesures simples et efficaces existent pour leur contrôle (Astagneau &
Lepoutre, 2002 ; D’Alessandro, 2012 ; Ducel et al., 2002 ; Durand-Zaleski et al.,
2002 ; Hien et al., 2012 ; Magill et al., 2014 ; Ouendo et al., 2015 ; Phaneuf &
Gadbois, 2010 ; Thiolet et al., 2007). Pour Astagneau et Lepoutre (2002), la réduction
du risque d’IAS passe par l’amélioration de la qualité des soins. Ces auteurs suggèrent
également la collaboration de l’ensemble des acteurs sanitaires. Ainsi, de grands
moyens ont été consacrés à la lutte contre les IAS à travers le monde. Au sein des
hôpitaux, des comités de lutte contre les infections nosocomiales et des services
d'hygiène animés par de professionnels spécialisés en hygiène hospitalière ont été mis
en place. Dans la lutte contre les IAS, plusieurs stratégies ont été mises en œuvre à
travers le monde (Ducel et al., 2002). Il s’agit notamment de l’implication de toutes les
personnes et services intervenant dans les structures de soins ; la création de profession
d’hygiéniste ; la mise en place de programmes et de comités de lutte contre les
infections nosocomiales ; l’élaboration de protocoles de lutte contre les infections
nosocomiale (op.cit 2002). Les recommandations de prévention des infections lors de
la mise en œuvre des soins font référence aux mesures suivantes : l’hygiène des mains,
le port de gants, les mesures d’asepsie, la réduction des gestes invasifs, les mesures
d’isolement, l’hygiène du milieu, l’usage approprié d’antibiotiques, la traçabilité de
l’infection, la formation continue et la sensibilisation du personnel (ibid., 2002). Il
s’agit aussi des précautions standard qui sont : « un ensemble de mesures visant à
réduire le risque de transmission croisée des agents infectieux entre soignant, soigné
et environnement, ou par exposition à un produit biologique d’origine humaine »
(SF2H, 2017 p.13). Ces mesures portent sur l’hygiène des mains, les équipements de
protection individuelle, l’hygiène respiratoire, la prévention des accidents avec
17
exposition au sang, la gestion des excrétas et gestion de l’environnement (op.cit,
2017). La surveillance également joue un rôle important dans la prévention des
infections associées aux soins car elle permet d’anticiper sur leur éclosion (Ducel et
al., 2002). Aussi, les précautions standard doivent être appliquées à tout soin, à tout
moment, en tout lieu, à tout malade quel que soit son statut infectieux, et par tout agent
de santé (ibid., 2017).
La prévention des infections est importante pour le malade, mais elle l’est aussi
pour les infirmiers, […] il en va de leur carrière, voire même de leur vie; […] Il
nous faut réaliser le devoir éthique que nous avons, envers nous-mêmes et envers
la clientèle, d’observer les mesures de prévention.
Le rôle de l'infirmier dans la prévention est essentiel à tous les niveaux du système de
soins. En effet, la prévention des IAS repose sur les équipes de soins qui ont la
responsabilité de mettre en œuvre les mesures d’hygiène appropriées ainsi que les
recommandations préconisées (Phaneuf & Gadbois, 2010). Pour l’Ordre des
Infirmières et Infirmiers du Québec (cité par Phaneuf & Gadbois, 2010, p. 21), « la
prévention et le contrôle des infections constituent l’une des responsabilités de
l’infirmière, peu importe sa fonction ou son milieu de pratique, et que cette
responsabilité doit se traduire dans toutes les facettes de sa pratique et dans chacun
de ses gestes ».
De nombreuses études ont porté sur les attitudes et les pratiques des soignants en
rapport avec la survenue des infections associées aux soins (Amiel, 2005 ; Fricain et
al., 2008 ; Haas & Larson, 2007 ; Hien et al., 2013 ; Lucet & Birgand, 2016 ; Ndione,
2010 ; Ndongo, 2011 ; Stone et al., 2012 ; Thiolet et al., 2007). Ces études ont révélé
l’existence d’écarts entre les pratiques des soignants et les recommandations de
prévention des infections. Ces insuffisances se traduisent en générale par une faible
application des mesures d’hygiène et d’asepsie ainsi qu’une faible perception des
18
risques infectieux (Amiel, 2005 ; Fricain et al., 2008 ; Haas & Larson, 2007 ; Hien et
al., 2013 ; Lucet & Birgand, 2016 ; Ndione, 2010 ; Ndongo, 2011 ; Stone et al., 2012 ;
Thiolet et al., 2007). En effet, l’OMS (2006) estime en moyenne le taux d’observance
de l’hygiène des mains à 38,7% pour le monde entier. Dans les pays développés, selon
de nombreuses études, les taux d’observance ne dépassent guère 60% et ce, malgré les
diverses stratégies mises en place pour promouvoir cette pratique chez le personnel
soignant. Les observations de Alessandro (2012, p. 6) à travers son étude
anthropologique du milieu de soins, corroborent tout à fait les résultats de ces études.
Ces observations mettent en évidence les manquements des soignants quant au respect
des mesures d’hygiène et d’asepsie au moment de la mise en œuvre des soins. Ce sont
des négligences qui favorisent l’émergence des IAS.
Les attitudes et comportements des soignants ne sont pas seulement déterminés par les
caractéristiques objectives de la situation mais aussi par les représentations et le sens
attribué à la situation (Lucet & Birgand, 2016). Ces auteurs soulignent également que
les perceptions des soignants non seulement influencent leurs attitudes et pratiques
mais se basent souvent sur leurs propres intuitions qui peuvent être erronées (Op.cit,
2016). Cette situation est également soulignée par Olivier de Sardan (cité par Amiel,
2005, p. 55) qui affirme que : « les comportements réels ne sont pas simplement des
déviances par rapport aux normes officielles, ils relèvent en fait d’autres normes, non
dites, latentes, que l’on appellera normes pratiques ». L’exploration des perceptions
des soignants pourraient donc être une piste pour comprendre les attitudes des
soignants en rapport à l’application des recommandations de prévention des infections
(PI). Aussi, les perceptions se modèlent, se modifient par l’expérience et l’éducation
ouvrant des perspectives d’amélioration des pratiques de soins (Lucet & Birgand,
2016).
19
Dans le domaine de la santé un lien supposé entre les perceptions, les attitudes et les
comportements a été évoqué par certains auteurs (Carricaburu et al., 2008 ;
D’Alessandro, 2012 ; Mortell, 2012 ; Ndione, 2010). Pour ces auteurs, le défaut de
mise en œuvre des mesures d’hygiène, n’est pas toujours la conséquence d’un manque
de connaissances théoriques mais plutôt une forme de négligence, une indifférence aux
recommandations. Carricaburu, Lhulier et Merle (2008), abondent dans ce sens en
affirmant que l’adoption de mesures de prévention ne dépend pas seulement de l’accès
aux connaissances scientifiques ni de la bonne volonté des soignants. Mortell (2012),
quant à lui estime qu’une certaine mentalité des soignants persiste et que l’écart
éthique explique la non-observance des mesures d’hygiène et d’asepsie. Il
recommande de mettre l’accent sur les obligations morales et éthiques des cliniciens
concernant le respect de l’hygiène des mains dans le cadre de la formation.
2.3. Résumé critique des études sur les perceptions des soignants sur les IAS
La plupart des études qui ont mis en évidence la non-observance des mesures de
prévention des infections chez les soignants ont également révélé leurs perceptions des
IAS en rapport avec leurs attitudes et leurs pratiques de soins (Amiel, 2005 ;
Carricaburu et al., 2008 ; D’Alessandro, 2012 ; Laurence, 2012 ; Mortell, 2012 ;
Ndione, 2010). Ces perceptions sur les IAS sont relatives aux préoccupations des
soignants quant au risque, à l’ampleur, aux facteurs ainsi qu’aux moyens de
prévention. Ces perceptions sont déterminées par des variables telles que les
caractéristiques propres aux soignants, le type de patients pris en charge, ou les unités
de soins où travaillent ces soignants.
Plusieurs auteurs ont noté que les IAS sont objet de préoccupations de la part des
soignants (Amiel, 2005 ; Carricaburu et al., 2008 ; Laurence, 2012). Laurence (2012)
relevait une perception de l’ampleur des infections nosocomiales par les infirmières
qui redoutaient une perte de contrôle face à la recrudescence de ces infections. Cette
situation représentait un défi dans la mesure où plusieurs personnes atteintes au même
moment devaient être prises en charge. Il fallait donc limiter les dégâts par la mise en
20
place de mesures drastiques et de consignes fermes. Amiel (2005) quant à elle, trouvait
que l’hygiène hospitalière était un sujet sensible qui constituait une grande
préoccupation. Pour Carricaburu et al (2008), les termes employés par les soignants
pour désigner les IAS avaient une connotation négative qui module leurs sensibilités et
leurs pratiques. Les soignants ressentaient une culpabilité de n’avoir pas été à mesure
d’éviter la transmission d’une infection nosocomiale à un patient (Carricaburu et al.,
2008).
L’IAS perçue comme risque par les soignants a été évoquée par certains auteurs. Si
pour Laurence (2012) les soignants ne considéraient pas le risque à tous les niveaux,
Amiel (2005) par contre trouvait que les soignants qui « obéissent à des logiques de
microculture hospitalière » n’ignoraient pas ces risques relatifs à l’absence
d’application des recommandations. Le risque d’IAS est perçu de manière
indifférenciée aussi bien pour le malade que pour le soignant (Carricaburu et al., 2008)
qui perçoit sa propre vulnérabilité face aux IAS. La crainte des soignants « de se voir
transformés en soignés » a été soulignée par Carricaburu et al., (2008) qui trouvaient
également que le risque est perçu indistinctement pour les malades et les soignants qui
sont de plus en plus préoccupés par un sentiment d’exposition aux risques infectieux.
Lhuilier, Niyongabo et Rolland (cité par Amiel, 2016) quant à eux faisaient ressortir
que ce risque d’être infecté est perçu selon le type de malades pris en charge ou de
l’unité de soins. Ainsi le risque d’exposition au VIH est rarement évoqué quand il
s’agit de patients âgés ou de nouveau-nés.
2.3.3. La perception des facteurs d’IAS par les soignants dans la littérature
Plusieurs facteurs sont évoqués par les soignants comme étant à l’origine de la
survenue des IAS (Alzin et al., 2012 ; Amiel, 2005 ; Carricaburu et al., 2008 ;
Laurence, 2012 ; Ndione, 2010 ; Phaneuf & Gadbois, 2010). Phaneuf et
Gadbois (2010) notaient que les infirmières évoquent plusieurs raisons de mauvaise
observance des mesures d’hygiène. Toutefois ces raisons sont partagées par
l’ensemble des acteurs hospitaliers. Amiel (2005), quant à elle trouvait que l’âge et
21
l’expérience sont présentés par certains soignants comme des arguments pour se
détourner des recommandations. En effet, les infirmières plus âgées s’assignaient des
droits implicites d’estimer si certaines mesures peuvent être respectées ou non (Amiel,
2005). Elle a également mis en évidence la perception du rôle du représentant
hiérarchique dont l’absence incite les infirmières à outrepasser les règles (Op.cit,
2005). Laurence (2012) relevait plutôt une mise en cause des patients par les
infirmières qui évoquent la résistance des patients aux mesures de prévention.
Les conditions de travail sont très souvent dénoncées par les soignants. Laurence
(2012) notait un discours des infirmières qui dénonçaient un manque de matériel pour
mettre en œuvre adéquatement les soins. Amiel (2005) pour sa part souligne les
contraintes auxquelles font face les soignants qui ont pour souci d’achever dans les
temps les soins tout en respectant les recommandations de PI. Ces mêmes perceptions
ont été relevées par Carricaburu et al., (2008) chez le personnel soignant qui estime
que la charge de travail élevée est un facteur de survenue des IAS. Pour eux, le temps
consacré aux mesures prophylactiques est difficilement compatible avec le rythme des
soins. Laurence (2012) a mis en évidence un problème d’organisation de travail
qu’elle trouve convenir à un ordre souhaité par les infirmières. Ces dernières
ressentant un certain privilège lorsqu’elles considèrent que : « seuls les professionnels
de la santé sont autorisés à circuler en tant qu’agents de surveillance, mais aussi en tant
que dispensateurs de soins » (Laurence, 2012, p. 177).
Laurence (2012) a relevé une perception des soignants selon laquelle la survenue des
IAS ne leur incombe pas. Ils renvoient les responsabilités aux autres et au système de
soins. Dans son étude sur l’analyse critique de la culture de sécurité elle affirmait que
pour les infirmières, « la quête de l’origine de la maladie infectieuse trouve son
coupable dans l’Extérieur et dans l’Autre. À aucun moment, il n’est question
directement des infirmières elles-mêmes » (Laurence, 2012, p. 162). Cette conception
de l’origine des IAS pose le problème de l’adhésion ou la résistance des infirmiers à
l’application des mesures de PI.
La formation reçue est aussi citée comme déterminante dans la survenue des IAS. Une
étude réalisée par des étudiants de l’Ecole Nationale des Hautes études en Santé
22
Publique (Alzin et al., 2012), montrait une perception chez les infirmières qui pensent
que la formation initiale sur la prévention des IAS est souvent insuffisante et nécessite
une actualisation des connaissances. Ces étudiants affirmaient que :
2.3.4. Les perceptions des soignants des moyens de prévention des IAS
Certains auteurs ont souligné les perceptions et les attitudes des soignants à l’égard des
mesures et moyens de lutte contre les IAS (Laurence, 2012 ; Ndione, 2010). Dans le
discours des infirmières, Laurence (2012) a noté les moyens de PCI suivants : la
surveillance, l’isolement, le confinement et la circulation des personnes, la
vaccination, l’hygiène corporelle, la salubrité, l’équipement de protection personnelle
et la tenue vestimentaire. Elle qualifiait ces mesures de PCI de Rituels de purification
et de rituels de protection (op.cit 2012). Ndione (2010) quant à lui trouvait que les
personnels de santé mettaient en doute les moyens et procédés de protection mis à leur
disposition et ne les mettaient en application que très rarement. Les soignants adoptent
plutôt des stratégies d’évitement qu’ils estiment plus efficaces pour minimiser le
risque de contamination (op.cit 2010). Laurence (2012) soulignait également le rôle de
l’infirmière dans l’implication des patients et de leur famille concernant l’application
des mesures de prévention ; un rôle de renforcement des comportements des malades
ou de leur famille perçus comme positifs.
Ces perceptions des soignants sur les IAS influencent leur adhésion ou leur résistance
aux mesures de prévention et mettent ainsi en exergue la nécessité d’une intervention,
afin de contrôler le risque infectieux. Or, selon Lucet et Birgand (2016), les
perceptions sont influencées par la culture dans laquelle évoluent les professionnels de
santé. Cela nous amène à nous interroger sur les perceptions des infirmiers dans le
contexte particulier d’hôpital de district dans un pays en développement comme le
Burkina Faso où l’ampleur des IAS est élevée et les pratiques des soignants mis en
cause. Une étude sur le vécu et les perceptions des soignants sur les IAS s’avère donc
nécessaire afin d’identifier les obstacles à l’observance des mesures de prévention.
23
2.4. Considérations théoriques
Aussi, les facteurs individuels sont peu pris en compte dans les stratégies de
prévention et leur investigation peut permettre de combler la distance qui existe entre
les recommandations et leur application (Lucet et Birgand, 2016). Cela nous a amenés
à nous intéresser aux expériences et perceptions des professionnels de santé dont les
attitudes et pratiques sont mises en cause dans la survenue des IAS.
24
2.4.2. Perception et comportements
La perception serait un processus et une donnée intégrante de l’individu. Elle est
définie comme un processus cognitif et émotionnel de sélection et d’interprétation, à
l’aide des expériences antérieures, de données recueillies à partir de stimuli externes et
internes à l’individu.
Le modèle des croyances relatives à la santé (Rosenstock, cité par Lucet & Birgand,
2016) a été utilisé pour comprendre les comportements des individus en rapport avec
leur santé. Selon Godin (2012, p. 15), « le modèle des croyances relatives à la santé est
probablement celui qui est le plus présent, […] dans le discours social entretenu quant
aux motifs invoqués pour expliquer pourquoi les bons comportements ne sont pas
adoptés.». Ce modèle décrit les perceptions comme des déterminants des
26
comportements favorables à la santé. Selon ce modèle la perception de la vulnérabilité
à une menace [l’individu se sent potentiellement vulnérable], la perception de sa
sévérité [l’individu entrevoit un état désagréable pouvant avoir des conséquences
graves] ainsi que la perception des bénéfices de l’application des recommandations [la
croyance en l’efficacité de l’action à mettre en œuvre pour diminuer et éradiquer la
menace] ou des barrières à leur mise en œuvre conditionnent le déclenchement
d’actions [décision d’agir ou ne pas agir] qui à leur tour déterminent l’adoption et le
maintien de comportements de prévention. Les perceptions sont à l’origine d’actions
qui induisent les comportements de prévention. Les expériences des individus dans un
milieu donné façonnent leurs perceptions des éléments de ce milieu et peuvent être
transposées dans d’autres milieux.
La théorie des comportements planifiés (Ajzen cité par Lucet & Birgand, 2016) prend
en compte plusieurs dimensions de la personne dont la perception du comportement
des collègues, la perception de son propre comportement, la perception du risque ainsi
que la motivation au changement. Lucet et al (cité par Lucet & Birgand, 2016) ont
utilisé cette théorie pour comprendre les comportements d'hygiène des mains des
soignants. La routine a été intégrée à cette théorie comme moyen pour les individus
d'éviter un travail cognitif et la prise de décision constante.
La sécurité des patients est une préoccupation mondiale des systèmes de santé et est de
plus en plus considérée comme un des aspects les plus essentiels de la performance des
services de santé. Pour l’OMS (2008), la sécurité des patients constitue la clé de voûte
27
de tout système de santé de qualité ; elle est l’absence, chez un patient, de tout
préjudice inutile ou potentiel associé aux soins de santé ; elle est liée à plusieurs
facteurs notamment le respect des principes et recommandations à observés. Pour
(Ducel et al., 2002), la sécurité des patients est l’absence de tout préjudice inutile ou
potentiel associé aux soins de santé et l’amélioration de cette sécurité demande de la
part des professionnels de santé des efforts pour l’application des recommandations.
Dans ce sens la contribution des infirmiers est capitale du moment où ces derniers
constituent un maillon essentiel du système de soins. En réaction aux préoccupations
liées aux IAS, s’est développée la réflexion sur la promotion d’une culture de sécurité
des soins que Ducel et al (2002) estiment être une priorité pour les systèmes de santé.
28
Pour Watson (1979), le caring est l’essence du soin infirmier qui constitue un idéal
moral établi dans la relation soignant-patient et qui exige une préoccupation constante
envers le patient ainsi qu’un engagement et une responsabilité des infirmiers vis-à-vis
des soins.
Watson (cité par Daphney, 2007), a développé une approche existentielle (attention
portée à la personne dans la singularité dans son existence) et phénoménologique
(permet de découvrir la signification de son existence et de ses expériences vécues)
des soins infirmiers. Cette approche, accorde une importance particulière à la relation
patient-soignant ainsi qu’à l’expérience vécue de l’individu. Pour Watson (cité par
Cara & O’Reilly, 2008 p38), patient et infirmière ont chacun son champ phénoménal
respectif (somme des expériences de la personne constitué de « sentiments, sensations
physiques, pensées, croyances spirituelles, buts, espérances, considérations
environnementales et significations de ses propres perceptions ») et l’interaction
continue entre les deux influence la pratique infirmière. Watson (cité par Cara &
O’Reilly, 2008) souligne que l'expérience, la perception et la signification des
expériences vécues dans le champ phénoménal peuvent être capturées par la
conscience. La phénoménologie comme étude de la description des réalités telles
qu’elles sont vécues et explicitées par la personne (Giorgi, 1997), permettrait d'accéder
aux perceptions et expériences vécue par l'infirmière dans l'approche du caring.
29
Le moment de caring s’établit dès lors que l’infirmière et le patient se rencontrent
chacun avec son champ phénoménal respectif (Watson cité par Cara & O’Reilly,
2008). L’infirmière prend alors conscience du fait de vivre un moment de caring avec
le patient (op.cit, 2006). Ce moment, où sont partagées les perceptions et les
expériences de chacun, offre une opportunité de décider des choix et des actions à
prendre dans la relation (cité par Cara & O’Reilly, 2008).
Selon Watson (cité par Cara & O’Reilly, 2008), la profession infirmière est à la fois
une science et un art riche de valeurs humanistes et altruistes. Pour Watson (cité par
Cara & O’Reilly, 2008), les facteurs caratifs constituent un guide pour l'infirmière
dans sa pratique de soins qui mettent en avant les dimensions humaines de son travail,
sa présence authentique auprès du patient ainsi que les expériences subjectives du
patient afin de préserver sa dignité et son intégrité physique. Les facteurs caratifs
développés par Watson (cité par Cara & O’Reilly, 2008, p39) sont au nombre de dix
dont le huitième facteur qui prend en compte : « La création d’un environnement
visant à la sécurité et le confort Soutien, protection et/ou modification de
l’environnement mental, physique, socio-culturel et spirituel ».
Pour Watson (cité par Cara & O’Reilly, 2008), la relation de caring est une relation
entre le soignant et le soigné, qui s’appuie sur des valeurs humanistes et qui vise la
protection, l’amélioration et la préservation de l’intégrité physique, la dignité humaine
et l’harmonie de la personne soignée (Ibid, 2008). C’est une relation dans laquelle
l’infirmière démontre un intérêt pour la compréhension subjective et profonde de la
signification donnée par la personne en regard de son état de santé (Ibid, 2008). La
conscience qu’a l’infirmière du caring et son ouverture d’esprit sont des éléments
essentiels pour établir la relation de caring et communiquer avec le champ phénoménal
de la personne soignée (Ibid., 2008).
30
CHAPITRE III : MATERIELS ET METHODES
L’enquête s’est déroulée dans les unités de soins du Centre Médical avec Antenne
chirurgicale (CMA) de Ziniaré. Le District sanitaire de Ziniaré est l’un des trois
districts que compte la région sanitaire du plateau central. Ce CMA qui compte 35 lits
est la structure de référence des centres de santé du District Sanitaire de Ziniaré. Le
personnel infirmier est composé de 40 infirmiers (IDE et IB) répartis dans les unités de
soins de médecine, de pédiatrie, de post-opéré, des urgences médico-chirurgicales et
d’infirmiers spécialisés officiant comme surveillants d’unité de soins (SUS) ou
exerçant au bloc opératoire et dans les services de spécialité. Ce personnel est sous la
hiérarchie/tutelle technique du Coordonnateur des soins infirmiers et obstétricaux. Sur
une journée de 24 heures, trois équipes d’infirmières se succèdent. L’équipe du matin
32
débute à 7 h 00 pour terminer à 12 h 00 ; l’équipe de l’après-midi prend son service à
12 h 00 jusqu’à 17 h 00 ; enfin, l’équipe de nuit prend la relève de 17 h 00 à 7 h 00.
Au départ, l’échantillon théorique était fixé à dix (10) infirmiers réalisant des poses de
voies veineuses périphériques. L’échantillon a été constitué de manière à obtenir une
plus grande diversité des participants. Ainsi nous avons réalisé une diversification
interne (Pires, 1997) qui prend en compte des paramètres individuels tels que l’âge,
l’ancienneté professionnelle, le niveau d’étude et une diversification externe
(Michelat, 1975) selon laquelle nous avons retenu des variables telles que le sexe et
l’unité de soins. A terme, le nombre de participants a été retenu compte tenu de la
saturation des données c’est-à-dire la redondance des thèmes telle que suggérer par
Benner (1994). Pour elle la recherche qualitative ne vise pas la généralisation, mais
l’explication de phénomènes locaux. Ce ne sont donc pas la quantité des données qui
valide sa crédibilité, mais plutôt la qualité ainsi que la richesse dans la description du
phénomène étudié.
Pour le recrutement des dix (10) infirmiers, nous avons procédé à un choix raisonné.
Le coordonnateur des soins infirmiers et obstétricaux et les surveillants d’unité de
soins étaient des informateurs clés qui ont permis d’identifier les infirmiers qui ont
participé à l’étude. Des rendez-vous ont été pris avant les entretiens notamment pour
les infirmiers qui n’étaient pas disponibles. Parmi les infirmiers approchés pour la
participation à l’étude, un seul avait refusé compte tenu de contraintes personnelles.
33
3.4. Techniques et outils de collecte des données
Nous avons privilégié pour la collecte des données, des entretiens libres à partir d’une
question générale ouverte. Comme le souligne Royer et Baribeau (2012, p. 26)
: « l’entretien individuel, plus que tout autre dispositif, permet de saisir […] le point de
vue des individus, leur compréhension d’une expérience particulière, leur vision du
monde, en vue de les rendre explicites ». Pour Van der Maren (cité par Baribeau &
Royer, 2012, p. 26), l’entrevue, qu’elle soit libre, semi-structurée ou structurée, vise à
colliger des données ayant trait aux aspects personnels des individus (émotions,
jugements, perceptions, expériences etc.) par rapport à des situations données. Afin
d’orienter les questions, une pré-enquête a été faite à l’hôpital de district de Saponé
(District de la Région du Centre-Sud qui partage les mêmes réalités que le District de
Ziniaré dont la proximité avec la capitale Ouagadougou). Les entretiens se sont
déroulés du 14 au 20/10/2017 au sein de l’hôpital de district conformément aux dates
convenues avec les participants. Ces entretiens d’une durée moyenne de 25 mn ont été
répétés afin de mieux approfondir certaines questions. La question principale était :
racontez une expérience que vous avez vécue, où un patient a développé une infection
survenue suite à un soin qu’il a reçu. Que pensez-vous et que ressentez-vous face cette
situation ? Des questions de relance ont été également posées afin de susciter
l’expression du participant ou de préciser ses propos.
Avant la collecte des données, nous avons comme le suggère Giorgi (1997) effectué le
« braketing ». Il s’est agi pour nous de rédiger nos croyances, préconceptions,
connaissances et expériences personnelles relatives au phénomène étudié. Cela nous a
permis de distinguer nos points de vue de ceux des participants et de décrire avec
« neutralité » les expériences et les perceptions des infirmiers.
Nous avons suivi les cinq (05) étapes de l’analyse phénoménologique selon Giorgi
(1997) tout en faisant une triangulation avec les données issues de l’observation. Les
données de l’entretien ont d’abord fait l’objet d’une transcription. S’en est suivie une
lecture minutieuse et répété des données transcrites afin de s’imprégner de chaque
entrevue dans sa globalité et de laisser dégager des unités de signification ou une
signification globale. Il s’est agi ensuite de procéder à un regroupement des unités de
signification à l’aide d’une matrice (annexe 14). En confrontant les unités de sens pour
faire ressortir les similitudes et les contradictions, nous avons identifié des sous-
thèmes auxquels nous avons soumis la méthode de variation libre et imaginaire. Cela
nous a permis de dégager des thèmes relatifs aux expériences et aux perceptions des
infirmiers sur les IAS.
35
jusqu’à redondance des données/thèmes (saturation) et pratiqué la variation libre et
imaginaire lors de l’analyse des données. Il s’est agi aussi de réaliser la triangulation
des données, c’est-à-dire de confronter nos différentes sources de données (entretiens,
observations, documents) de même que de soumettre nos résultats au jugement des
participants (pour la reconnaissance de leur verbatim) et de personnes expertes du
phénomène étudié.
L’Authenticité : signifie que les résultats correspondent à l’expérience vécue par les
participants de l’étude. Il s’est agi pour nous de respecter la méthode de réduction
phénoménologique comme le suggère Giorgi (1997) en réalisant le « braketing ». Il a
été question de rédiger nos croyances, préconceptions, connaissances et expériences
relatives au phénomène à l’étude afin d’en être conscient au moment des entrevues et
de l’analyse des résultats. Cela nous a permis de distinguer nos points de vue de ceux
des participants et de décrire, le plus fidèlement possible, la perception des infirmiers.
Il s’est agi aussi d’effectuer plusieurs lectures des verbatim afin de saisir avec
précisions le sens des propos des participants. La recherche de l’authenticité nous a
amenés à pratiquer la réflexivité dans nos investigations. En effet, la prise en compte
de la subjectivité et de la complexité des situations relationnelles nous invite à une
pratique réflexive tout au long de la démarche phénoménologique. Pour cela, nous
avons tenue un journal de bord où nous commentions nos impressions, sentiments,
pensées tout au long de nos investigations. Il s’est agi également de soumettre les
résultats aux participants pour qu’ils s’y reconnaissent.
Par ailleurs, un autre critère de rigueur scientifique que nous avons pris en
considération est la transférabilité des résultats à des contextes jugés similaires. Pour
augmenter la transférabilité de nos résultats, nous avons procédé à une diversification
interne et externe de notre échantillon, une triangulation entre plusieurs sources de
données ainsi que la saturation des données recueillies.
36
3.7. Aspects éthiques
37
CHAPITRE IV : RESULTATS DE L’ETUDE
Ce chapitre présente les résultats de l’analyse des données recueillies auprès des
participants. La première partie décrit le profil sociodémographique et professionnel
des participants ; la seconde partie présente l’analyse phénoménologique en thèmes et
sous thèmes et enfin la troisième partie illustre la synthèse des résultats.
Notre échantillon comprenait dix (10) participants dont un attaché de santé et neuf
infirmiers d’Etat/Breveté (IDE/IB). L’échantillon était composé d’autant d’hommes
que de femmes. Le participant le plus âgé avait 53 ans contre 31 ans pour le moins
âgé. La plupart des infirmiers ont plus de quatre années d’expérience professionnelle
et également plus de quatre années de service dans le poste actuel. L’ancienneté
professionnelle variant entre 01 et 30 ans. Parmi les dix infirmiers un seul avait un
niveau d’étude supérieure. Tous ont déclaré avoir reçu un cours de prévention des
infections pendant la formation initiale et au moins un recyclage sur ce thème. Les
participants provenaient des unités de médecine, des urgences médico-chirurgicales,
de pédiatrie et de post-opéré.
Pour tous les participants les IAS constituent une réalité. Cependant, Il y a une
ambivalence dans leurs propos. D’une part, ils soutiennent que le problème est réel et
d’autre part, leurs discours semblent refoulés leurs vécus personnels des IAS. Perçues
39
autant chez les patients que chez les soignants, les IAS sont vues comme une menace
pour soi car on en perçoit sa propre vulnérabilité. Mais s’agissant des malades, les IAS
constituent un sujet moins préoccupant sur lequel on communique peu. Aussi,
l’ampleur du problème est sous-estimée et le risque pas assez perçu. Par ailleurs, les
participants ont une conception restrictive de l’IAS.
En outre, certains participants qui déclaraient ne pas avoir vécu de cas d’IAS
admettaient plus tard qu’ils auraient bien eu au moins une expérience d’IAS. C’est le
cas de Inf4 qui dit : « … en matière d’expérience vécue personnellement je n’ai pas
rencontré de problème […] de mon expérience c’est une seule fois que j’ai rencontré
une infection liée aux soins [...] c’est suite à une perfusion et la patiente a eu un abcès,
[…]. C’était vraiment très vilain à voir […]. C’était la première fois que je vois ça ».
40
Par ailleurs, dans le discours des participants, des raisons sont évoquées pour expliquer
pourquoi les IAS passent souvent inaperçues. Le plus souvent, les malades ne restent
pas assez longtemps dans l’unité de soins jusqu’à l’apparition des manifestations
clinique de l’infection. Inf7 déclare dans ce sens : « moi je n’ai jamais vu … puisse que
ici on garde pas les malades longtemps. Quand on lève l’urgence, après on amène le
malade en médecine pour poursuivre les traitements ». Dans certains cas, les
participants affirment faire difficilement la preuve d’IAS. C’est ce que soutient Inf4
quand il dit : « Souvent c’est des trucs [les IAS] qui ne sont pas vérifiables sur place ».
Ainsi, les infirmiers reconnaissent d’une part l’existence du problème des IAS et
d’autre part, ignorent les cas qui proviendraient de leurs propres pratiques.
Aussi, les IAS constituent un sujet peu abordé. Les participants hésitent de parler de
leurs propres expériences d’IAS et certains affirment que les IAS sont un sujet dont on
ne parle presque pas. Inf2 déclare : « On en parle pas, on parle peu de ça ». Pourtant
des occasions ne manquent pas pour en parler. Inf4 illustre cela à travers ces propos :
« … lors des visites c’est des sujets qu’on peut développer pour amoindrir ce genre de
chose. Et y a la formation continue à travers les supervisions, les réunions de service
et tout ce qui est activité de suivi-évaluation, les monitorages, […] les cadres de
concertation si on en a, chaque fois on va essayer de ... de résoudre ces genres de
problème ». Ainsi, les IAS constituent un sujet peu abordé qui pourtant peut trouver
solution dans les discussions lors des cadres de concertations.
L’ampleur des IAS est perçue par les participants selon d’une part leurs expériences et
d’autre part leur capacité à établir l’association entre l’infection et les soins. En effet,
la plupart des participants soutiennent que les IAS ne sont pas aussi fréquentes. C’est
dans ce sens que Inf2 déclare : « … je ne peux pas dire que c’est trop fréquent comme
ça, voilà mais ça ne manque pas. […]. C’est pas tellement, c’est pas fréquent ». Les
propos de Inf6 soutiennent cela : « les infections liées aux soins, […] je pense que, ces
infections, c’est un peu courant, le phénomène, le problème n’est pas récurrent. Seul
Inf3 a un point de vue, contraire, pour elle, les IAS ont plutôt une grande ampleur. Elle
dit : « Sur le terrain on rencontre beaucoup de cas. […] Donc y a trop de cas ».
41
Il s’agit là d’un discours nuancé mais qui dans l’ensemble révèle une faible perception
de l’ampleur des IAS par les infirmiers. En outre, cette faible perception de l’ampleur
des IAS par les participants pourrait être due au fait qu’ils font difficilement la part des
choses entre les IAS et les infections dont les patients viennent avec dans la formation
sanitaire. Pour eux, il est souvent difficile de qualifier une infection d’IAS puisqu’ils
ne peuvent pas d’emblée l’attribuer aux soins. Les IAS ne sont souvent pas perçues
comme telles parce que le lien n’est pas établi avec les soins. De ce fait, ils estiment
faible leur ampleur. Ainsi, Inf4 déclare : « souvent c’est des trucs [les IAS] qui ne sont
pas vérifiables sur place. Parce que la personne peut revenir après avec des
problèmes qu’on ne peut pas d’emblée lier à la mauvaise qualité des soins. On ne peut
pas savoir si la personne a contracté l’infection au cours des soins ». Ainsi, il y a une
difficulté à faire la part entre ce qui est IAS de ce qui ne l’est pas.
L’asepsie n’est pas toujours perçue par les infirmiers comme une exigence pour la
prévention des IAS et au-delà, la sécurité du malade. Certains participants prêtent à
leur collègue une inconscience du risque d’IAS. L’observation des pratiques de soins
corrobore cette perception et montre une méconnaissance des mesures d’asepsie. Les
infirmiers ignorent le risque d’infections lorsqu’ils réalisent les actes de soins. Les
discours recueillis montrent des participants qui accusent les autres de ne pas prendre
en compte l’asepsie. Inf1 souligne cet aspect lorsqu’elle déclare : « Y a la mentalité qui
est là. Imaginez-vous, l’hygiène n’y est pas. […] y en a qui nettoie mais c’est pas
suffisant, [...] Ou bien prendre l’intranule, à essuyer avec le coton alcoolisé, c’est pas
hygiénique, c’est pas aseptique ». A travers le discours de certains participants, on se
rend compte que des actes sont réalisés sans être sûr de leur innocuité. C’est le cas de
Inf1 qui déclare : « si je place une perfusion, quand je veux libérer un peu la main de
l’enfant, je, désadapte, je mets le bouchon blanc là, je ferme la voie veineuse […].
Voilà donc je me dis que je suis en train d’échanger, vous allez me corriger ». Par
ailleurs, certains discours des participants laissent entendre que l’IAS ne serait pas
aussi préoccupante puisse qu’elle va se résorber spontanément. Inf8 déclare : « en
réalité c’est un truc qui n’est pas aussi grave... ça va se résorber de lui-même ». Ces
42
discours confirment que les infirmiers ne perçoivent pas toujours le risque d’IAS
lorsqu’ils réalisent des soins.
La notion d’IAS a été abordée par la plupart des participants. Le rapport avec les soins
est vite souligné. De prime à bord, l’IAS est qualifiée par certains d’infections
nosocomiales en précisant que c’est une infection acquise au moment des soins. Le
malade n’est pas venu avec dans l’établissement de soins. Inf8 donne une synthèse de
cette conception de l’IAS :
… c’est souvent ce que on appelle les infections nosocomiales. Parce que, le
malade est rentré, y avait pas de problème et c’est à la suite de la prise de la voie
veineuse que il a eu une infection [...] au niveau du bras perfusé c’était œdématié
entre temps c’était un peu la douleur, voilà il sentait la douleur et à un moment
donné ça s’est enflammé jusqu’à bon entre temps il faisait la fièvre. Voilà … je
pense que, en tout cas ça peut être à l’origine de la fièvre-là.
Inf6 se prononce dans le même sens : « Bon, les infections liées aux soins, voire les
infections nosocomiales. Bon, c’est dire c’est des infections, le malade n’est pas venu
peut être au centre de soins avec. Mais bon, c’est au cours des soins ou cours de son
séjour que bon, il contacte ces infections-là ». Cela est corroboré par Inf2 qui déclare :
« C’est ça les infections nosocomiales ou bien je ne sais pas et il s’est avéré […] que
l’enfant a pris d’autres germes et le germe était encore plus puissant, [plus virulent]
que l’infection que l’enfant avait auparavant, donc l’enfant a été réadmis. Le manque
de précautions d’hygiène et les fautes d’asepsie sont le plus souvent évoqués dans la
description des IAS. Ainsi selon Inf4 « … ça réside essentiellement dans les
précautions à prendre avant l’administration des soins, ». Inf2 précise : « c’est dans
les soins là que … les fautes d’asepsie […] que l’enfant a pris d’autres germes ».
Le membre est œdématié et puis bon on sent que la voie veineuse-là, c’est un
peu, la main est enflammée parce quand on fait les produits ça fait très mal,
voilà ! Moindre contact avec, quand on touche on voit que ça fait. […] Souvent
même on a vu même quand on a enlevé la voie veineuse-là, c’est devenu
carrément une plait, une plaie qui suscite même un peu de pansement, ne serait-
ce qu’un pansement alcoolisé,…
Inf8 abonde dans le même sens en tenant à peu près les mêmes propos : « ce qu’on
rencontre couramment, c’est surtout, au niveau même de, du site de pose de la voie
veineuse-là. Bon ! Ça souvent on voit que le malade n’est pas tranquille, le fait de
bouger … ». Ainsi, l’IAS est perçue par les infirmiers comme des manifestations
localisées essentiellement au site de ponction.
Les infirmiers, quand bien même semblent ignorés la réalité du problème, ont tout de
même une perception négative des IAS. La plupart des participants déplorent les cas
d’IAS qu’ils ont vécus. Ce sont des torts causés aux patients du fait des soins. Inf3
témoigne des conséquences d’un cas d’IAS qu’elle a vécu : « … ça s’est infecté et
voilà un problème. […] Y avait un abcès profond, […] la femme a fait près de trois
mois, rampait sur ses genoux, voyez, c’était infecté. Vous voyez la souffrance de la
personne-là même ». Les infirmiers ressentent alors de la culpabilité et du regret et
remettent en cause les pratiques de soins qui ne répondent pas aux exigences de
prévention des IAS.
Les participants ont une perception négative des IAS dans la mesure où les malades
sont perçus comme des victimes. Ils sont vus à la fois comme des victimes de leur
maladie et des soins qu’ils reçoivent. Les propos de Inf6 corroborent cela lorsqu’il
déclare : « c’est des situations pas agréables, parce que si il y a la maladie et qu’il y a
en plus une infection, […] et souvent c’est des infections plus graves même que celle
pour quoi, le malade est venu ».
44
Inf2 soutient également dans le même sens : « l’enfant a pris d’autres germes et le
germe était encore puissant [plus virulent] que l’infection que l’enfant avait
auparavant, donc l’enfant a été réadmis ».
Le mal déjà fait n’empêche pas de ressentir de l’empathie, de la compassion envers les
patients. Les participants évoquent des expériences qu’ils ont vécues comme une
confrontation à la souffrance des malades victimes d’IAS. Ce sont des torts qui leur
sont causés et qui auraient pu être évités. C’est ainsi que Inf10 s’indigne en affirmant :
« c’est des situations malheureuses qui arrivent, […] alors que ça pouvait être évité».
Inf3 illustre également ce sentiment à travers ces propos :
Quand on arrive à là, quand tu regardes, … le malade même est souffrant, …
maintenant, ça fait pitié. […] Parfois quand tu regardes au fond de toi tu n’es pas
contente. […] on aurait dû … faire pour ne pas en arriver là. […] Parce que le
patient est venu pour des soins, pour avoir la santé et si maintenant en voulant la
santé nous-même on augmente maintenant la souffrance, … c’est pas bon !
Le discours des participants traduit souvent de l’empathie qu’ils ressentent envers
les malades. Ils ne souhaiteraient pas endurer leurs souffrances. En témoignent les
propos de Inf1 qui dit : « … en tout cas je ne souhaiterais pas que on fasse çà à mon
enfant ou bien à qui que ce soit, c’est pas prudent ». Inf6 partage ce sentiment
quand il affirme : « je fais les soins comme si c’était moi-même. Je ne voudrais pas
que autrui me fasse cela, je ne voudrais pas faire cela à autrui. Voilà ! Aujourd’hui
c’est autrui mais demain ça peut être moi ».
Les IAS sont d’autant plus déplorées que les participants ont vécu une situation
dramatique, le décès d’un malade. C’est le cas de Inf1 qui dit : « le cas vraiment qui
m’a frappé, c’est l’enfant malnutri qu’on a beaucoup piqué […] l’enfant avait des
plaies un peu partout, […] quelques jours après l’enfant était décédé ».
Pour les participants, les IAS rendent la prise en charge des malades encore plus
difficile. Cela demande plus d’effort de la part des patients mais aussi des soignants.
Inf4 s’exprime ainsi : « Ça complique la prise en charge. […], l’agent de santé n’est
pas tranquille et le malade aussi parce que ça demande plus d’effort. Voilà. Donc et
encore il faut mobiliser plus de ressource pour la prise en charge. […] Et souvent
c’est des infections plus graves même que celles pour ceux bon le malade est venu ».
45
Les infirmiers déplorent ainsi les IAS dont ils ont une perception négative. Aussi, le
discours des participants révèle un sentiment de regret et de culpabilité. Un regret et
une culpabilité d’avoir par leurs attitudes et pratiques, causé des torts aux patients.
Ainsi, Inf4 s’exprime : « Si il arrive que nous on a contribué à créer plus de problème
au patient bon…. Souvent c’est des sentiments de culpabilité […] Parce que le malade
en venant, il est venu pour demander de l’aide et être guéri, bon pas pour encore
repartir avec ». Inf3 tient le même discours : « quand je vois que … ça aboutit à ça,
c’est vraiment regrettable […] tu traumatises, ça s’infecte, ça devient des dépenses.
[…] les parents maintenant disent : voilà que la maladie est partie mais voilà ».
Toutefois, la survenue des IAS est perçue comme une faillite non pas du soignant mais
de l’ensemble du système de soins. En témoigne cette affirmation de Inf4 : « c’est une
faillite même pour tout l’ensemble de la structure ».
Les infirmiers perçoivent leur propre vulnérabilité face aux IAS. Pour la plupart des
participants, lorsque des précautions ne sont pas prises, ils peuvent être aussi victimes
des IAS. Le soignant est autant exposé que le malade alors qu’il ne bénéficie pas assez
de protection. Par ailleurs, le vécu d’expériences d’accidents d’exposition au sang
(AES), viennent conforter ce sentiment de vulnérabilité. Cette perception est soulignée
avec insistance par Inf2 : « On est chaque fois exposé ». Dans le même sens, Inf4
déclare : « Voilà, si on n’a pas pris toutes ces précautions, on peut transmettre des
germes au patient mais on peut recevoir des germes du patient ». Inf10 donne encore
plus de précision pour étayer cette perception.
… tu peux te faire piquer, […] il peut y avoir l’hépatite B ou le VIH … C’est des
infections que le praticien peut avoir du patient, […] dans la manipulation de
certains objet tels que des seringues, les lames de bistouris, il peut se blesser, […]
on a vu des collègues qui en voulant soigner des patients-là se sont fait piquer.
Cette vulnérabilité serait due à une insuffisance de protection des soignants ainsi qu’un
manque de sensibilisation et de formation sur les moyens de protection. Inf10 déclare :
… y a le niveau même de protection du personnel qui n’est pas au top. […] y a
aussi manque de connaissance auprès des prestataires […] des gens qui font par
exemple des traitements et ils remettent les seringues utilisées dans le sachet.
Alors que non. C’est des seringues à usage unique qu’on doit jeter.
46
4.2.2.3. Une remise en cause des attitudes et pratiques de soins
Pour les participants, les IAS sont déplorables et auraient pu être évitées d’autant plus
qu’elles sont imputables à des professionnels de santé. La survenue des IAS interpelle
et vient remettre en cause le système de soins et la manière de soigner. Inf4 dans ce
sens déclare : « Ça nous interpelle quand même. Parce que, on est sensé faire le
bonheur du patient […], c’est une remise en cause de notre manière de soigner et
d’administrer les soins ». Inf6 dans le même sens s’exprime : « c’est un pincement au
cœur, parce que bon, c’est face à des professionnels que la chose arrive […], les
choses doivent changer et le système aussi, voilà ! ». Inf3 s’indignant également des
attitudes et des pratiques des infirmiers tient ces propos : « Même si c’est pas toi qui as
posé l’acte là, tu regardes que, on pourrait bon, on aurait dû en tout cas avoir du
temps ou faire d’autres choses pour ne pas en arriver là. […], il faut donc revoir les
choses en tout cas. ».
Ainsi les participants ont une perception négative de la survenue des IAS et remettent
en cause les attitudes et pratiques des infirmiers d’une part, et le système de soins
d’autre part.
L’évocation des IAS soulève chez les infirmiers, la question même de la sécurité des
patients. Au-delà des IAS les participants déplorent beaucoup d’évènements qu’ils ont
vécus et qui affectent la sécurité des patients ; des torts causés aux malades du fait des
soins qu’ils jugent inappropriés. Inf3 témoigne de conséquences de soins qu’elle a
vécues personnellement : « … l’enfant est guéri mais les plaies sont là, il faut traiter
maintenant les plaies. […] A cause de nous aussi y a des cas d’infection qui vont aller
plus loin et puis entrainer d’autres problèmes ». Témoignant également de ce qu’elle a
vécu, Inf5 affirme : « ... y a des collègues qui forcent. Dès que,….une veine ça ne se
force pas. Dès qu’un enfant,… ça ne passe pas tu es obligé de changer carrément.
Mais y en a qui forcent, ils traumatisent la veine et après la main s’enfle,... ».
L’évocation des IAS suscite alors chez les infirmiers une préoccupation pour la
sécurité des patients.
47
4.2.3. Une responsabilité déniée
Les infirmiers reconnaissent qu’il y a un lien entre les IAS et les attitudes et pratiques
relatives aux soins. Dans leurs discours, quand bien même ils ont une faible perception
de l’ampleur des IAS, les participants se sont assez prononcés sur ce qu’ils pensent
être à leur origine. Les raisons et les responsabilités qui expliquent leur survenue sont
largement abordées. Cependant, dans leurs propos, les participants occultent leur
propre responsabilité. Ils n’admettent pas leur imputabilité dans la survenue du
problème. Pour la plupart d’entre eux, les IAS sont associées à plusieurs facteurs et
leur survenue imputée au système de soins.
L’ensemble des participants sont unanimes que les soins constituent la source du
problème. En effet, les pratiques de soins témoignent d’une négligence et sont perçues
comme des facteurs de survenue des IAS. Inf3 déclare dans ce sens : « je sais pas si
c’est la négligence […] prendre le temps même pour faire […] c’est comme si c’est …
un bon débarras quoi ». Inf4 s’exprime dans le même sens : « si au moins y avait un
minimum, de vigilance, d’attention vis-à-vis des patients […] les infections allaient
diminuer…».
En outre, pour les participants, les IAS témoignent d’un manque d’application des
mesures de PI. Les règles, normes et protocoles tels que enseignés lors des formations
et recyclages sont ignorés. Les soins sont alors réalisés sans précautions d’hygiène et
d’asepsie. Inf1 illustre bien cette situation lorsqu’elle témoigne : « déposer l’intranule
au niveau de la table d’observation,… […] mais c’est pas aseptique ! Tout un chacun
fait ce qu’il veut […] prendre l’intranule, essuyer avec le coton alcoolisé ! C’est pas
aseptique. […] dans les soins et les fautes d’asepsie le malade a pris d’autres
germes ». Les propos de Inf2 soutiennent ces déclarations lorsqu’elle dit : « je sais que
ce sont des infections généralement liées à des fautes d’asepsie. Oui les fautes
d’asepsie ! […] Oui. On fait comme si on avait jamais été formé ». Inf3 s’exprime
également dans le même sens : « c’est par manque d’asepsie. […]. En tout cas la PI
compte beaucoup […] malheureusement, on ne fait pas attention à ça. » Ainsi pour les
participants, les IAS résultent d’une insuffisance de précautions d’hygiène et
48
d’asepsie. Certains affirment pourtant que les infirmiers sont formés pour éviter cette
situation. Il s’agirait plutôt d’un manquement de leur part. Ainsi, Inf9
affirme : « …quoiqu’on dise, à l’école on reçoit tout ce qu’il faut pour ne pas
commettre ce genre d’erreur préjudiciable à la vie de nos patients… Peut-être en
oubliant tout ce qui a été enseigné à l’école. Voilà ».
Aussi, les infirmiers n’assurent pas leur travail comme il se doit. Pour certains
participants, il arrive très couramment que leurs collègues n’exécutent pas certaines
tâches. C’est le cas des voies veineuses qui ne sont pas régulièrement renouvelées
quand cela est nécessaire. Inf8 témoigne : « des voies veineuses qu’on amène des
CSPS et arrivé, souvent c’est pas renouvelé […], on utilise la même voie encore pour
administrer et chaque fois. Le discours de Inf9 corrobore tout à fait ces propos.
… on devrait changer mais souvent bon, s’il y a eu des négligences, il va de soi
que ça fasse une infection. […] Quand c’est ton tour tu trouves que le membre est
œdématié, bon ! Y a lieu aussi de changer. […] Quand on voit quelque chose qui
ne va pas, il faut changer. […] ils disent : « Nous, d’ici là on va descendre, ceux
qui vont suivre-là vont gérer ça ». Finalement c’est ça qui traine, qui crée la
négligence sur toute la ligne-là et finalement on a le résultat qu’on a. voilà
donc…, il faut que chacun vraiment se mettre aux sérieux faire le travail quoi !
Par ailleurs, les propos des infirmiers révèlent une insuffisance de surveillance des
malades. Les participants pensent que, si les infirmiers surveillaient bien les voies
veineuses, ils auraient pu anticiper sur certaines complications infectieuses. Cet aspect
est illustré par Inf8 quand il dit : « C’est un truc [l’IAS] qui évolue. Donc si c’est
surveillé, une fois que vous voyez que la main est en train de former, vous pouvez
changer de lieu, de site quoi. Voilà ! Je me dis que c’est la surveillance surtout en ce
moment aussi ça évite beaucoup de problème quoi ».
49
En outre, il y a une méconnaissance du risque d’IAS par les infirmiers. Les infirmiers
n’ont pas toujours conscience des risques d’infections relatifs à leurs pratiques de
soins. L’asepsie n’est pas toujours perçue comme une exigence pour la prévention des
infections et au-delà, pour la sécurité du malade. Inf1 s’exprime : « Y a la mentalité
qui est là. Imaginez-vous, l’hygiène n’y est pas. Y en a même pour … faire le
prélèvement fémoral, il ne sait pas, il hésite, on demande à ce qu’il nettoie. Y en a qui
nettoie mais c’est pas suffisant, c’est pas bien nettoyer, c’est pas assez, il faut
demander à ce qu’il refasse ».
Ainsi, le discours des participants révèle une inconscience du risque voire une
insouciance pour le malade.
Par ailleurs, il y a de moins en moins de valeurs dans la pratique des soins. Une raison
avancée serait qu’il n’y ait plus de vocation dans le métier d’infirmier. Pour certains
participants cela est surtout le fait de la nouvelle génération. Les jeunes soignants sont
indexés, comme étant moins sensibles à la souffrance des patients. C’est plutôt les
avantages financiers qui les intéressent. Il en résulte que les soins ne soient pas faits
avec empathie des malades. Les propos de Inf3 illustrent cette situation.
… bon je ne sais pas si c’est la nouvelle génération, […]. Les gens cherchent le
travail seulement, ils ne viennent pas parce qu’ils veulent être des agents de
santé, ils n’ont pas trouvé du boulot et ils viennent. […] Mais on voit que on fait
pour faire pour attendre la fin du mois pour avoir le salaire, […].Mais si toi-
même, tu veux vraiment cette profession-là, hein, tu vois, tu as la compassion des
malades, tu regardes la souffrance de la personne-là, ça te fait pitié.
Ainsi, il y aurait une insouciance de la part des infirmiers pour la sécurité des soins.
Par ailleurs, les IAS seraient perçues comme des dommages collatéraux. Il existe des
situations où les infirmiers priorisent la survie du malade. Ainsi, les mesures d’hygiène
passent au second plan quand il s’agit de soins urgents pour sauver le malade. C’est
dans ce sens que Inf1 affirme : « quand on voit vraiment l’enfant qui va partir, surtout
quand c’est une anémie, ah ! Moi en tout cas je ne vais mentir mais je n’hésite pas à
aborder la jugulaire. Et dans l’urgence on ne voit pas trop les….mesures ». Ainsi
quand les infirmiers réalisent des soins d’urgence, ils considèrent les besoins vitaux
des patients prioritaires par rapport à l’application des mesures de prévention.
50
4.2.3.2. L’imputabilité individuelle rejetée
Si les soins sont mis en cause dans la survenue des IAS, les infirmiers n’admettent pas
pour autant leur propre imputabilité. Individuellement les infirmiers ne se sentent pas
responsables d’une IAS. Ils tiennent plutôt un discours accusateur qui laisse supposer
que l’origine des IAS est extérieure à eux.
En effet, dans leurs propos, les participants évoquent peu leur propre responsabilité
dans la survenue des IAS. Or ces infections sont couramment observées en
hospitalisation. Certains s’expriment avec une attitude défensive en déclarant ne pas
avoir d’expérience personnelle des IAS. Inf5 s’exprime avec un ton élevé et une
attitude (geste de la main) de rejet : « moi personnellement je n’ai jamais fait cela,
[…] moi personnellement je n’ai jamais vécu cela je n’ai jamais vu, voilà. Je n’ai
jamais vu, voilà». Inf4 tient le même discours : « en matière d’expérience vécue
personnellement je n’ai pas rencontré de problème lié à une injection ». Point de vue
également partagé par Inf2 qui soutient : « …une expérience en tant que telle, moi-
même proprement dit, je peux pas dire, bon,… » . Ces discours témoignent d’un
refoulement ou d’un rejet de leurs vécus personnels des IAS. Aussi, cette attitude
défensive révèle que les infirmiers se sentent accusés quand les IAS sont évoquées.
En outre, les participants ont un discours accusateur envers les autres, un discours qui
tend à les disculper, un discours qui semble les blanchir. Ils tiennent leurs collègues
pour responsables de la survenue des IAS. En témoigne la récurrence de l’expression
« y en a qui » pour dire que ce sont les autres qui ne prennent pas les précautions. Inf1
s’exprime ainsi : « y en a qui ont tendance à piquer l’intranule au niveau de la table
d’observation […], tout un chacun fait ce qu’il veut [….] y en a qui ne prennent pas
quand même le soin de le faire.[…]Y en a même pour faire le prélèvement fémoral, il
ne sait, il hésite, […]. Y en a qui nettoie mais c’est pas suffisant, … ». Inf5 tient
également le même discours, lorsqu’elle déclare : « y en a qui forcent, ils
traumatisent la veine […] Y en a qui franchement bon,… y en a aussi qui ont la
volonté de faire le travail mais qui ne sont pas compétents, […] Y en a qui n’ont même
pas une goutte d’alcool […] elle va faire avec ce qu’elle a ». Ainsi, les infirmiers
accusent leurs collègues et ignorent leur rôle dans la survenue des IAS. On pense
51
toujours bien faire pour éviter les IAS, ce sont les autres qui n’appliquent pas les
mesures recommandées. Dans ce même sens Inf1 tient ces propos : « Et moi à mon
niveau par exemple si je place une perfusion, quand je veux libérer un peu la main de
l’enfant, je désadapte, […] mais y en a qui ne prennent pas quand même le soin de le
faire ». Inf3 avec une attitude indexant les infirmiers parle ainsi : « ou bien ce sont eux
[les infirmiers] qui n’appliquent pas […] ou c’est ce que eux [les enseignants] ils
transmettent là que ils n’appliquent pas ».
Quelques participants reviennent sur leurs déclarations pour admettre leur propre
responsabilité dans la survenue des IAS. C’est le cas de Inf3 qui dit : « A cause de
nous aussi y a des cas d’infection qui vont aller plus loin et puis entrainer d’autres
problèmes … quand je vois que c’est par des actes qu’on pose et puis ça aboutit à ça
[…] nous-même on augmente maintenant la souffrance des patients aussi c’est pas
bon ». Dans le même sens, Inf4 dit : « ça nous interpelle quand même. Parce que on
est sensé faire le bonheur du patient mais si il arrive que nous on a contribué à créer
plus de problème au patient bon, c’est souvent des sentiments de culpabilité. [….]
c’est une remise en cause de notre manière de soigner». Ainsi, des participants qui au
départ rejetaient leur imputabilité dans la survenue des IAS finissent par admettre leur
responsabilité.
Aussi, pour certains participants, les responsables d’unité de soins ont leur part de
responsabilité. Ils manquent de leadership et d’autorité. En effet, ces responsables ne
jouent pas leur rôle de contrôle et d’interpellation des infirmiers indélicats qui
52
n’exécution pas adéquatement les soins. Inf9 souligne cela en ces termes : « Il faut
aussi que le premier responsable-là ait aussi un regard. Qu’il arrive à dire bon telle
chose, voilà ! […]. Mais pour un chef qui se contente de ̏disponibiliser˝ le nécessaire
et puis il disparait. Je pense que ça peut aussi être un problème […] si y a un collègue
qui fait quelque chose qui n’est pas trop ça, y a lieu de l’interpeler ».
Toutefois, le problème des IAS n’est pas dû aux seuls faits des agents de santé. Pour
certains participants, les malades et leur famille ont aussi une part de responsabilité.
Leurs comportements en matière d’hygiène sont souvent à l’origine de la survenue
d’IAS. Inf1 affirme dans ce sens : « les parents des enfants en hospitalisation eux
aussi peuvent être la cause de ces infections-là. On met une voie veineuse en place,…
la maman ou le parent de l’enfant qui est à côté par faute d’inattention, peut souiller
la veineuse ». Elle poursuit son discours en disant : « On conseille très souvent aux
mamans quand un enfant est sous voie veineuse, on ne le douche pas. Y en a quand
même qui force. Y en a même qui mettent, un sachet, ils attachent et ils douchent
l’enfant. […] il y a des femmes, les selles sont au niveau des pagnes, elles vont
prendre ça mettre l’enfant au dos ». Aussi, les malades manquent souvent d’interpeller
les soignants. Ils acceptent subir certaines pratiques de soins qu’ils jugent inadéquats.
Pour certains participants, si les accompagnants interpellent souvent les infirmiers,
cela pourrait leur éviter certains problèmes. Inf1 dans ce sens dit : « si l’accompagnant
l’interpelle. Ah ! à ce niveau-là y a telle chose. Il [l’infirmier] est obligé de changer.
[…] L’agent de santé est obligé d’être à la hauteur ». Elle témoigne d’une situation où
une patiente avertie l’avait interpelée et refusé ses soins. Elle dit : « Mais dites-vous
bien qu’on a reçu une dame, je pense qu’elle a quitté l’extérieur venir l’enfant avait
une fièvre, on voulait faire le prélèvement, la dame nous a demandé : « le prélèvement
se fait dans la même salle ? » Ça nous a tiqués. Mais elle a refusé qu’on prenne la
voie à son enfant ».
Ainsi, les patients, du fait de leurs comportements relatifs à l’hygiène peuvent être à
l’origine de la survenue des IAS. Toutefois, ils peuvent contribuer à leur prévention en
interpelant souvent les infirmiers.
53
4.2.3.4. Une imputabilité au système de soins
Au-delà des infirmiers et de l’équipe soignante les IAS sont imputées au système de
soins. Des facteurs que les infirmiers ne contrôlent pas constituent des obstacles à la
prévention des infections. Ainsi, les participants ont beaucoup exprimé leurs
préoccupations au sujet des conditions de travail qui ne permettent pas de mettre en
application les mesures d’hygiène et d’asepsie lors de la dispensation des soins. Inf8
s’exprime : « Souvent aussi ça c’est indépendant de notre volonté ». Inf6 se prononce
également en ces propos : « On peut parler de l’aspect général qui dépasse peut être
l’infirmier. Donc il y a aussi les mesures d’accompagnement que les services doivent
avoir. […] je pense que tout le système est concerné […] la dotation du matériel, ça ne
dépend pas seulement du CMA […] je pense que tout le système est interpellé ». Ainsi
plusieurs éléments du système de soins sont évoqués comme des facteurs de la
survenue des IAS.
En effet, les participants posent le problème de la disponibilité des ressources comme
un obstacle à la mise en œuvre des soins et l’application de la PI. Le matériel est
vétuste, inadapté et insuffisant, les ruptures de consommables de soins sont fréquentes.
Inf3 affirme dans ce sens : « parfois aussi y a pas de matériel, les gens essayent de
faire de leur mieux, ». Inf5 s’exprime également dans le même sens : « Y en a qui
n’ont même pas une goutte d’alcool […] et dès que l’enfant arrive seulement si y a
l’intranule, c’est fini, on commence le travail. […]. Avec ces ruptures-là. [...], elle va
faire avec ce qu’elle a ». Les propos de Inf4 témoignent davantage sur la disponibilité
des ressources nécessaires à l’exécution des soins.
… les agents travaillent avec les moyens de bord alors qu’avec ces moyens de
bord, c’est pas évident que…..par exemple si il est dit que on doit utiliser un
plateau stérile pour chaque pansement mais pourtant si vous n’avez que deux ou
trois plateau pour faire par exemple le pansement de dix, quinze malades, vous
ne pouvez pas arrêter chaque fois pour stériliser, avant de revenir. Souvent on est
obligé de désinfecter avec l’eau de javel avant de continuer avec les autres
pansements. Bon c’est des trucs bon c’est indépendant de la volonté de chose.
[…] Je me dis que actuellement on devrait avoir le minimum de rudiment de
matériel pour nous éviter les choses.
Ainsi, les infirmiers dénoncent un manque de ressources pour la prise en charge
adéquate des patients. Cette situation n’est pas propice à la prévention des IAS dans la
54
mesure où la disponibilité du matériel est essentielle pour l'application des mesures
d’hygiène et d’asepsie.
Pour certains participants la communication manque sur la question des IAS. Pourtant,
des occasions ne manquent pas pour en parler. Il y a notamment la visite des malades,
les staffs cliniques, les réunions de service, les supervisions, les monitorings des
activités, et les études sur les IAS comme celle en cours. Inf6 souligne cet aspect
lorsqu’il dit : « y a pas eu suffisamment de sensibilisation ou même d’information.
Sinon bon, c’est des choses que normalement on peut et on doit éviter ».
Le discours de Inf4 illustre davantage cette perception.
… par exemple lors des visites c’est des sujets qu’on peut développer pour
amoindrir ou du moins à défaut d’éliminer ce genre de chose, au moins
amoindrir. Et y a la … les supervisions, les réunions de service [oui] et tout ce
qui est activité de suivi, évaluation, bon genre par exemple les monitorages, bon
s’il s’avère par exemple au cours des monitorages, s’il revient que dans votre
service, il y a par exemple beaucoup de ce genre de cas-là, on doit vous
interpeller et au besoin établir un plan de résolution de ces problèmes-là.
Ainsi pour les participants, l’insuffisance de communication constitue un obstacle à la
prévention des IAS dans la mesure où parler des IAS met le soignant face à ses erreurs
et aurait pu susciter en lui une remise en cause de ses attitudes et pratiques de soins.
55
Aussi, c’est le problème de la formation des infirmiers qui n’aborde pas suffisamment
la question des IAS et qui au-delà de l’apprentissage initial demande sur le terrain une
actualisation des connaissances. Or, les formations continues sur la PI sont rares.
Inf2 dit dans ce sens : « les formations et les sensibilisations, surtout sur la PI et
l’hygiène, c’est un peu rare ». Inf3 accuse plutôt la qualité de la formation de base
quand elle dit : « on voit une dégradation du niveau maintenant de l’enseignement,
[…] le niveau même a baissé et la rigueur même qu’on avait n’y est plus […]. Il faut
revoir, depuis la base même, […] parce que ça ne va pas ». Cette situation constitue
donc un handicap qui ne permet pas l’adoption de bonnes attitudes et pratiques pour la
prévention des IAS. Aussi, s’agissant de la sécurité même des soignants, il y a un
manque de formation sur la prévention des AES. Inf10 dit dans ce sens : « y a manque
de formation parce que, j’ai vu que y a des gens qui font des traitements remettent les
seringues utilisées, dans le sachet du patient. Alors que non. C’est des seringues à
usage unique qu’on doit jeter immédiatement […]. Il faut des formations du
personnel, ». Ainsi, les infirmiers ne sont pas suffisamment formés et sensibilisés sur
la problématique des IAS.
En somme, le discours des infirmiers montre que ceux-ci attribuent l’imputabilité des
IAS aux autres et au système de soins. Ils ne perçoivent donc pas leur responsabilité
personnelle dans la survenue des IAS. Cela ne permet pas une remise en cause de la
part des infirmiers et pourrait expliquer la résistance à l’application des mesures de PI.
56
4.2.4. Un problème solvable
Les infirmiers sont optimistes face au problème des IAS. Les participants tiennent un
discours selon lequel les IAS peuvent être évitées. La nécessité et l’intérêt de lutter
contre les IAS sont évoqués de même que l’engagement à un changement d’attitude
vis-à-vis des mesures d’hygiène et d’asepsie. Toutefois, l’amélioration de la situation
est conditionnée par un ensemble de mesures. Dans ce sens, les participants ont fait
plusieurs propositions.
La plupart des participants soutiennent que les IAS peuvent et doivent être évitées et à
défaut minimisées. A ce sujet, Inf2 déclare : « je pense que c’est des choses que l’on
peut vraiment…, éviter ou bien essayer je peux dire, diminuer». Inf6 soutient cela
lorsqu’il dit : « c’est des choses que normalement on peut et on doit éviter. […] si on
peut éviter, bon, le mieux est de tout faire pour que ça n’arrive pas ». Ces discours
mettent en évidence une perception des infirmiers selon laquelle les IAS ne constituent
pas un problème insurmontable et que bien au contraire il peut être résolu. Alors, les
participants affirment être disposés à changer leurs attitudes et pratiques à l’égard des
mesures d’hygiène et d’asepsie afin d’éviter les IAS. Dans ce sens, Inf1 dit : « c’est de
nous y mettre, voilà ! […] on va s’y mettre, c’est d’éviter ça, … On va essayer d’éviter
au maximum en respectant les règles d’hygiène […], en mettant la PI vraiment en
pratique ». Inf2 soutient cela quand elle affirme : « nous pouvons éviter ça […] en
pratiquant vraiment des règles d’hygiène, voilà ! En respectant les règles d’asepsie
dans nos soins. On peut éviter ça par le lavage des mains, le port des gants et puis
aussi donner des conseils ». Inf8 quant à lui souligne l’importance de la surveillance
des malades. Il dit : « Bon, pour l’éviter aussi, il faut qu’on surveille… c’est la
surveillance, voilà ».
57
4.2.4.2. Le changement des attitudes et pratiques
S’agissant des infirmiers, premiers acteurs des soins aux malades, différentes
propositions sont faites et visent leurs attitudes et pratiques en rapport avec la mise en
œuvre des recommandations de PI. Aussi, les participants suggèrent que les infirmiers
développent des qualités humaines et relationnelles, un climat d’empathie dans leurs
pratiques de soins. Inf6 dit : « Moi personnellement, … je fais les soins comme si
c’était moi-même […] ce que je ne voudrais pas que autrui me fasse, je ne voudrais
pas faire à autrui. Voilà ! Peut-être aujourd’hui c’est autrui mais demain ça peut être
moi, donc pour ça je me donne cette rigueur-là ».
Certains participants pensent qu’il faut que les infirmiers, eu égard aux critiques qui
leurs sont faites, acceptent de se remettre en cause et améliorent leurs pratiques de
soins. Dans ce sens, Inf4 soutient que : « si chacun arrive à se remettre en cause, pas
une seule fois mais à chaque fois, permanent, je pense que c’est des situations qu’on
peut éviter ». De même, Inf9 affirme : « je suis ouvert à ces critiques […] Y a lieu
quand même …, de ne pas négliger. De faire ce qu’on peut faire quoi !».
D’autres participants suggèrent une rupture avec la routine. Pour cela, les infirmiers
doivent à tout moment adapter leurs attitudes et pratiques à la situation de soins. Inf10
s’exprime dans ce sens quand il dit : « il faut rappeler les gens, parce que bon quand
on travaille, c’est devenu sous forme, c’est comme la routine ». Ainsi, les infirmiers
doivent s’adapter à tout instant, changer leurs pratiques en fonction des besoins des
patients et avoir un jugement par rapport à la situation afin de prendre les mesures de
prévention adéquates.
De plus, les participants estimant que les infirmiers ne font pas assez d’efforts dans
l’exécution des soins, suggèrent de bien s’appliquer dans leur travail afin d’assurer des
soins de qualité aux patients. Ils doivent à tout moment faire l’effort de réaliser les
différentes tâches. Inf5 souligne cela quand elle dit : « Il suffit pas de bâcler un travail.
Je pense que chacun de nous a une conscience professionnelle ». Inf9 arbore le même
discours et interpelle : « C’est chacun, d’être vigilent, de faire bien son travail. Quand
c’est ton tour tu trouves que le membre est œdématié, bon ! y a lieu aussi de changer.
Voilà ! […] il faut que chacun vraiment … se mettre au sérieux faire le travail ».
58
Aussi, les participants invitent les infirmiers à se conformer aux protocoles de soins
enseignés à l’école de formation et à adopter des bonnes attitudes et pratiques en
matière d’hygiène et d’asepsie. Inf4 dit dans ce sens que : « la prévention réside
essentiellement dans les précautions à prendre avant l’administration des soins ». Inf6
également soutient cela quand il déclare : « il faut revoir la prévention. […] Avoir
l’asepsie dans nos pratiques, toujours se laver les mains avant et après bon. C’est
banal mais bon voilà. Porter des gants, la blouse, des gestes que nous devrions avoir
comme réflexes pour éviter les infections ». Inf9 tient le même discours : « il faut se
conformer à la manière correcte de prendre les voies veineuses : réunir le matériel,
bien aseptiser et bon appliquer vraiment les règles de l’asepsie. […] après la prise de
la voie veineuse aussi : le traitement du matériel, l’élimination des déchets, […]
respecter un peu ces petites règles-là ». Par ailleurs, certains participants soutiennent
qu’il faut mettre un accent sur la surveillance des malades afin de détecter
précocement d’éventuelles infections. Ainsi, Inf8 interpelle : « si c’est surveillé, une
fois que vous voyez que la main est en train de former, vous pouvez changer de lieu, de
site quoi. Voilà ! Je me dis que c’est la surveillance surtout, en ce moment aussi ça
évite beaucoup de problèmes ».
Ainsi, une remise en cause des pratiques et attitudes des infirmiers, une rupture avec la
routine, davantage d’efforts dans l’exécution des soins permettraient un changement
favorable à la mise en application des recommandations de PI, ce qui contribuerait à la
réduction des IAS.
Les participants soutiennent qu’il faut une prise de conscience de la part des soignants
sur le problème des IAS. Cela d’autant plus que les enseignements reçus pendant la
formation initiale ne suffisent pas pour que ceux-ci adoptent les bonnes pratiques de
prévention. Il faudrait donc trouver d’autres opportunités pour former et sensibiliser
les infirmiers sur la problématique des IAS. Ainsi, Inf2 soutient : « il faut faire des
recyclages aux agents de santé pour les permettre vraiment de se rappeler ces règles
là et de les mettre en pratique. […] La formation, la sensibilisation et puis, et
encourager à maintenir les acquis. Ces propos suggèrent qu’il faut rappeler
constamment l’importance des mesures de prévention des infections et par là, la
59
sécurité même des patients. Certains participants estiment que les infirmiers,
nonobstant qu’ils veulent bien faire, manquent souvent de compétences et pour cela, il
faudrait insister sur la formation continue. C’est dans ce sens que Inf5 déclare : « ce
que je pense, c’est peut être, essayer de sensibiliser les collègues vis-à-vis de cela,
voilà. […] essayer de sensibiliser sur les bonnes techniques. Y en a qui franchement
bon […], ne savent pas. Y en a aussi qui ont la volonté de faire le travail mais qui ne
sont pas compétents, qui n’ont pas de bonnes techniques ». Ainsi, il faut non
seulement former les infirmiers à la lutte contre les IAS mais surtout mettre l’accent
sur le respect des mesures d’hygiène et d’asepsie à travers la sensibilisation. Pour la
protection personnelle des infirmiers, certains participants suggèrent particulièrement
que l’administration prenne des dispositions pour les former sur la prévention des AES
qui sont également des IAS. A ce sujet, Inf10 déclare : « la sécurité des soins autant
du côté des prestataires que du côté aussi des patients est importante […] il faut des
formations du personnel,…sur cet aspect aussi ».
Aussi, les participants, suggèrent de revoir la formation des infirmiers, de sorte à avoir
des soignants compétents, disciplinés, humbles, dévoués à leur travail, des soignants
qui ont l’amour et l’empathie des malades. Inf3 s’exprime :
Il faut revoir vraiment l’encadrement, le contenu-même des programmes
d’enseignement. […] il n’y a plus l’amour du travail, l’amour du prochain, la
compassion. […] Et puis que les gens acceptent s’abaisser et aller vers l’autre
puisque on est là pour se compléter. […] sur le terrain les élèves …, on va même
pas les voir. Où ils vont apprendre ? Ils sont sur le terrain, ils n’ont rien appris.
[…] puis vraiment la discipline, que les gens aient l’amour du travail […] et
accepter apprendre, accepter les critiques pour pouvoir … s’améliorer.
Ainsi, il faut non seulement mettre l’accent sur la prévention des infections lors de la
formation initiale des infirmiers, mais il faut également revoir les méthodes de
formation.
60
4.2.4.4. La nécessité d’un leadership
Certains participants ont évoqué la nécessité d’un leadership fort de la part des
responsables d’unité de soins. Ils sont disposés à s’engager dans la lutte contre les IAS,
toutefois ils estiment que le responsable doit s’impliquer davantage. Il doit jouer
pleinement son rôle de leader et avoir de l’autorité afin que les soins soient bien mis en
œuvre. C’est dans ce sens que Inf9 déclare : « il faut aussi que le premier responsable-
là aussi ait un regard […]. Y a le fait que il devrait quand même interpeler et c’est ça
aussi la responsabilité ». Inf2 interpelle les responsables quant à leur rôle dans
l’application des mesures de prévention : « nos supérieurs … doivent rappeler ces
règles-là et de les mettre en pratique […] il faut … encourager à maintenir les
acquis ». Le responsable d’unité de soins devrait pouvoir mobiliser toute l’équipe
soignante dans la prévention des IAS. Inf9 dit dans ce sens : « c’est la contribution de
tous les éléments du service qui va en tout cas nous aider à avoir les résultats ». Inf4
s’exprime également sur cet aspect : « pour remédier à ce genre de situation, d’abord,
l’agent, mais l’engagement de l’ensemble des agents à mieux faire ». Ainsi, le
leadership du responsable d’unité de soins serait capital pour la mobilisation du
personnel dans la lutte contre les IAS.
Selon les participants, il y a très peu de communication sur les IAS. Cette situation
n’est pas favorable à l’adoption de bonnes pratiques de prévention. Il faudrait alors
trouver des alternatives afin de maintenir les infirmiers sensibilisés sur cette question.
Pour ce faire, certains participants proposent de saisir toutes les occasions possibles
pour discuter des pratiques de soins et aborder le problème des IAS. Ces occasions
peuvent être notamment la visite des malades, les réunions de services, les
supervisions, le monitoring … Les propos de Inf4 illustre bien cette perception :
61
Aussi, certains participants considèrent la recherche, notamment cette étude, comme
une opportunité pour interpeller les infirmiers sur la question des IAS. C’est le cas de
Inf2 qui dit : « je trouve vraiment que cette étude est la bienvenue. […] ça se fait rare
les formations et les sensibilisations, surtout sur la PI […] Mais si ces genres d’étude
viennent de temps en temps rappeler, voilà ! … c’est vraiment bien ».
Ainsi, pour les infirmiers, la communication en toute circonstance sur les IAS est une
approche à privilégier pour leur prévention.
S’agissant des conditions de travail, les participants ont évoqué des aspects qu’ils
estiment nécessaires de prendre en compte pour l’application effective des
recommandations de PI. Il s’agit d’abord de mettre à la disposition du personnel du
matériel et des consommables suffisants pour la mise en œuvre adéquate des soins.
Inf5 dans ce sens dit : « il faut remédier avec ces ruptures-là, si on veut faire de sorte
à avoir des soins de qualité ». Inf4 dans le même sens affirme : « l’amélioration
dépend en partie aussi du service, de l’état de la disponibilité des choses […] Du
matériel suffisant pour faire les soins ». Pour Inf6 : « il faut faire des plaidoyers pour
s’approvisionner, pour qu’il n’y ait de rupture de stock et qu’on vous donne du
matériel de qualité ». Il y a également la surcharge de travail que les participants
évoquent. Pour eux, il faut organiser les activités de soins de manière à réduire la
charge de travail. Pour cela, il faut du personnel conséquent pour assurer les soins.
Inf4 s’exprimant sur cet aspect affirme : « … normalement on devrait avoir une fille de
salle ou bien un garçon de salle qui soit là et que, si vous avez besoins de nettoyage
qu’il soit là […]. Souvent vous êtes confrontés à la réalité et vous pouvez pas faire
autrement ». Aussi, pour la prévention des AES, des moyens de protection notamment
du matériel et des équipements de protection sécurisés doivent être mis à la disposition
des infirmiers. A ce sujet, Inf6 dit : « il faut des équipements, adéquats, pour nous
protéger […] en tout cas du matériel de protection suffisamment ».
Ainsi, pour les infirmiers, l’amélioration des conditions de travail est un aspect
essentiel dans la prévention des IAS.
62
4.2.4.7. Rôle des patients et de leur famille
Pour certains participants, les patients et leurs accompagnants doivent être impliqués
dans la prévention des IAS. Les malades et leur famille devraient éviter certains
comportements néfastes à la santé. Ils devraient pouvoir interpeller les soignants et
même refuser certaines de leurs pratiques qu’ils jugeraient inadéquates. Pour ce faire,
ils doivent être sensibilisés, éduqués sur la promotion de l’hygiène et la prévention des
IAS. Inf1 s’exprime ainsi : « si l’accompagnant l’interpelle. Ah ! à ce niveau-là y a
telle chose. Il est obligé de changer. […] L’agent de santé est obligé d’être à la
hauteur ». Inf2 dans le même sens dit : « On peut aussi conseiller les parents, une fois
son enfant est hospitalisé, comment s’y prendre pour ne pas que l’enfant prenne
d’autres germes ».
Ainsi pour les participants, la prévention des IAS passe par l’implication des patients
et leur famille.
63
4.3.Synthèse des résultats
Absence de
Une responsabilité déniée préoccupation
-Des pratiques de soins mises en cause pour la sécurité Survenue
-L’imputabilité individuelle rejetée des IAS
-Plutôt une responsabilité collective des patients
-Une imputabilité au système de soins
-Un sujet sensible
Absence de mise
en œuvre des
mesures
Une perception négative
-Le patient victime des soins d’hygiène et
-De la culpabilité et du regret d’asepsie
-Une menace pour le soignant
-Une remise en cause des attitudes et pratiques
de soins Perspectives
d’interventions
Un problème solvable et d’amélioration
-Des IAS évitables
-Le changement des attitudes et pratiques
-La formation et la sensibilisation
-Un leadership fort dans les soins infirmiers
-La communication sur les IAS
-L’amélioration des conditions de travail
-L’implication des patients et leur famille
Pour les infirmiers, les IAS constituent une réalité dans les structures de soins.
Cependant, peu d’entre eux ont évoqué leur vécu personnel des IAS. Ils parlent le plus
souvent, des expériences des autres, leurs collègues. En effet, les IAS constituent un
problème dont l’ampleur est sous-estimée par les participants. En outre, le risque
d’IAS n’est pas assez perçu, constituant ainsi un sujet moins préoccupant. Aussi, les
participants ont une conception restrictive de l’IAS. L’IAS n’étant perçue qu’à travers
64
les signes locaux. Ainsi, les infirmiers reconnaissent d’une part l’existence du
problème des IAS et d’autres parts, ils ignorent les cas qui proviendraient de leurs
propres pratiques. Ce qui est à souligner dans le discours des participants, c’est que les
IAS sont moins évoquées comme une préoccupation.
Dans le discours des infirmiers, les IAS sont imputées à plusieurs facteurs. En effet,
les participants admettent le lien entre les IAS et les pratiques de soins à travers
lesquelles les mesures de PI ne sont pas appliquées. Aussi, Ils estiment qu’il y a de
moins en moins de valeurs dans la pratique des soins. De ce fait, il y a peu de
préoccupation pour la sécurité des malades. Cela expliquerait la non observance des
mesures d’hygiène et d’asepsie. En outre, les participants attribuent l’imputabilité des
IAS aux autres, leurs collègues. Ils ne perçoivent pas leur responsabilité personnelle
dans la survenue des IAS. Cela ne permet pas une remise en cause de soi de la part des
infirmiers et pourrait expliquer la résistance à l’application des mesures de PI. Au-delà
du soignant et de l’équipe de soins, c’est tout le système de soins qui est imputable.
Ainsi, le manque de ressources matérielles, la charge de travail élevée, l’inadéquation
de la formation ou l’insuffisance de sensibilisation des infirmiers, l’insuffisance de
communication et l’insuffisance d’implication des malades et leur famille dans la
prévention sont perçus par les infirmiers comme des obstacles à la lutte contre les IAS.
Les infirmiers ont une perception négative des IAS. En effet, les malades sont perçus à
la fois comme des victimes de leur maladie et des soins qu’ils reçoivent. Ils ressentent
alors de la culpabilité et du regret du fait de n’avoir pas évité des torts aux patients.
Les IAS sont déplorées dans la mesure où elles auraient pu être évitées et surtout parce
qu’elles sont imputables à des professionnels de santé. Aussi, l’IAS est perçue comme
une menace car les infirmiers en perçoivent leur propre vulnérabilité. La survenue des
IAS interpelle donc et vient remettre en cause des attitudes et pratiques de soins ainsi
que le système de soins.
65
Un problème solvable
Les infirmiers sont optimistes quant à la solvabilité du problème des IAS. Cela
demande un changement d’attitude vis-à-vis des mesures d’hygiène et d’asepsie.
Toutefois, l’amélioration de la situation est conditionnée par un ensemble de mesures
qui sont : la formation et la sensibilisation des infirmiers sur le problème des IAS ; le
développement d’un leadership des infirmiers responsables d’unité de soins ; le
développement de la communication sur les IAS dans les unités de soins ;
l’amélioration des conditions de travail des infirmiers et l’implication des patients et
leur famille dans la prévention des IAS. Dans le cadre d’une intervention visant la
prévention, la perception de la solvabilité du problème des IAS constitue un facteur
favorisant. En effet, la perception des bénéfices attendus, constituerait une motivation
d’adhésion aux mesures de prévention pour les infirmiers.
66
CHAPITRE V : DISCUSSION DES RESULTATS
La principale force de cette étude est qu’elle a suscité l’intérêt et l’adhésion des
participants au thème des IAS qu’ils trouvent très pertinent car étant un problème
d’actualité. En effet, à travers des informateurs clés nous avons pu identifier des
participants qui se sont beaucoup prononcés sur le sujet, ce qui nous a permis
d’atteindre nos objectifs. Aussi, l’intérêt de l’étude vient du fait qu’elle aborde le
problème des IAS du point de vue des déterminants comportementaux et personnels
des infirmiers, acteurs majeurs des soins.
Les résultats de l’étude méritent d’être soulignés car constituant une perspective
d’explication de la persistance des IAS dans les structures de santé. En effet, les
perceptions des infirmiers mises en évidence par l’étude pourraient être à l’origine de
la non-observance des mesures d’hygiène et d’asepsie, facteur de survenue des IAS.
Aussi, cette étude vient faire prendre conscience aux infirmiers, mais également aux
autres acteurs de santé, du problème des IAS. De ce fait, l’étude aura des retombés
dans la mesure où elle pourrait contribuer à l’amélioration de la qualité et la sécurité
des soins.
Dans la suite de cette section, nous discuterons les résultats de notre étude suivant trois
points : la perception de la réalité du problème des IAS, les déterminants de la
survenue des IAS et les solutions au problème des IAS.
68
5.1. Perception de la réalité du problème des IAS
Les IAS constituent une réalité que les infirmiers consciemment ou inconsciemment
semblent ignorer. Si l’IAS est perçue comme un problème réel, elle ne fait pas toujours
l’objet d’une préoccupation. De ce fait, peu d’efforts sont faits pour appliquer les
mesures d’hygiène et d’asepsie, ce qui favorise l’émergence des IAS. Alessandro
(2012) à travers son étude anthropologique du milieu de soins mettait en évidence les
mêmes observations. Il révélait les manquements des soignants concernant le respect
des mesures d’hygiène et d’asepsie au moment de l’exécution des soins. Il affirmait
également que ces négligences favorisaient l’émergence des IAS.
Les infirmiers perçoivent l’ampleur des IAS en fonction des expériences qu’ils ont
vécues et leur capacité à en reconnaitre. En effet, la majorité des participants affirme
n’avoir pas vu beaucoup de cas d’IAS et estime de ce fait que leur ampleur est
moindre. Cela dénote une faible perception de l’ampleur du problème par les
infirmiers dans la mesure où plusieurs études ont mis en évidence de fortes
69
prévalences des IAS allant jusqu’à 60% (Astagneau & Lepoutre, 2002 ; Thiolet et al.,
2007 ; Hien et al., 2012 ; Magill et al., 2014 ; Ouendo et al., 2015). En outre, la
difficulté à reconnaitre les IAS pourrait être un facteur de sous-estimation de leur
ampleur. Cette faible perception de l’ampleur des IAS pouvant expliquer l’absence de
préoccupation des infirmiers à appliquer les mesures de PI lorsqu’ils réalisent les
soins. Laurence (2012) trouvait par contre un résultat contraire. Les infirmières avaient
une forte perception de l’ampleur des IAS dont elles se préoccupaient. Ces infirmières
se faisaient le souci de perdre le contrôle face à la recrudescence des infections
nosocomiales dont il fallait limiter l’incidence à travers l’exécution de consignes
fermes.
L’observation des attitudes et pratiques de soins des infirmiers laisse penser qu’ils ne
perçoivent pas toujours le risque d’IAS. Les témoignages de certains participants ont
également ressorti cette observation selon laquelle, les infirmiers ignorent le risque
d’infections lorsqu’ils réalisent les actes de soins. Or, comme le souligne Rosentock
(cité par Lucet et Birgand 2016) dans la théorie relative aux croyances en santé, la
décision d’agir dans le sens de la prévention est influencée par la perception du risque
comme une menace. Ainsi, la méconnaissance du risque et des conséquences des IAS
n’incite pas les infirmiers à appliquer les mesures de prévention, ce qui entraine leur
émergence. Cela a été souligné par Phaneuf et Gadbois (2010) qui affirmaient que
l’une des principales raisons de mauvaise observance des mesures de PI est le fait que
les infirmières ne pensent pas au risque d’infection lorsqu’elles réalisent les soins.
Laurence (2012) trouvait également que les soignants sous-estimaient le risque d’IAS
dans la mesure où ils trouvaient certains secteurs d’hospitalisation moins préoccupants
que d’autres pour ce qui concerne l’application des mesures de PI. Amiel (2005) par
contre a un discours contraire. Pour elle, les soignants n’ignorent pas les risques
encourus lorsqu’ils n’observent pas les mesures de PI, mais plutôt, obéissent à des
logiques de « microculture » hospitalière. Elle soutient que les pratiques concernant
l’hygiène hospitalière sont influencées par la construction et la défense d’identités
soignantes ainsi que de logiques d’adaptation aux contraintes du milieu.
70
Pour Mortell (2012), la non observance des mesures d’hygiène et d’asepsie de la part
des soignants s’expliquerait par un écart d’éthique. Cela se comprend dans le sens où il
y a de la part des infirmiers une absence de bienveillance, de sensibilité à l’autre et de
respect de l’intégrité de la personne.
La perception de l’IAS par les infirmiers est restrictive par rapport aux définitions
admises (OMS, 2010 ; Rogues, 1983). En effet, l’IAS est perçue le plus souvent
comme une manifestation localisée au site de ponction. Ainsi, pour certains infirmiers,
l’IAS est moins préoccupante du moment où ses manifestions, perçues comme
essentiellement locales vont se résorber spontanément. Cette situation révèle une
absence de perception de la gravité de certaines IAS. Or, Rosentock (cité par Lucet et
Birgand 2016) dans sa théorie des croyances relatives à la santé souligne que l’absence
de perception de la gravité, ne suscite pas d’attitudes et des comportements de
prévention. Ainsi, l’absence de perception de la gravité des IAS par les infirmiers ne
favorise pas l’adoption de comportements de prévention notamment l’application des
mesures d’hygiène et d’asepsie.
Les infirmiers déplorent la survenue des IAS chez les malades qu’ils estiment être à la
fois des victimes de leur maladie et des soins. Ils trouvent cette situation regrettable
d’autant plus qu’elle aurait pu être évitée. Les infirmiers ressentent alors de l’empathie
et de la compassion à l’égard des malades. Comme le soulignent Carricaburu et al.,
(2008), les soignants ressentaient une culpabilité de n’avoir pas été à mesure d’éviter
la transmission d’une infection nosocomiale à un patient. Cette situation interpelle les
infirmiers et remet en cause leurs attitudes et pratiques relatives aux mesures de
prévention des infections. Aussi, cette perception négative des IAS est un élément
favorable au changement de comportement du moment où, eu égard aux théories
comportementales (Lucet & Birgand, 2016), les infirmiers seraient plus réceptifs aux
interventions de sensibilisation par l’intermédiaire d’une communication persuasive.
71
5.1.6. L’IAS vécue comme une menace par les infirmiers
Les IAS sont perçues par les infirmiers comme des événements dommageables aussi
bien pour les malades que pour les soignants. Phaneuf et Gadbois (2010), soulignaient
cet aspect en affirmant que les infirmières se contaminent au cours des soins et souvent
au risque de leur vie. Toutefois, l’observation des pratiques de soins révèle une
application différentiée des mesures de prévention. L’utilisation des moyens de
protection n’étant faite essentiellement que lorsque l’infirmier perçoit le risque pour
lui-même. Cela amène à dire que les infirmiers perçoivent plus leur propre
vulnérabilité que celle des patients. Amiel (2005) avait noté cela lorsqu’elle trouvait
que les soignants ne portaient des gants que quand ils remarquaient de la souillure ou
lorsque le patient porte une maladie qu’ils risquent de contracter. Ainsi, les infirmiers
n’appliquent pas souvent les mesures d’hygiène et d’asepsie et donc ne protègent pas
toujours les malades des IAS.
Les participants se sont beaucoup prononcés sur ce qu’ils pensent être à l’origine de la
survenue des IAS. Les raisons et les responsabilités qui expliquent la survenue des IAS
sont largement abordées. Ainsi, les IAS sont associées à plusieurs facteurs. Cependant,
les infirmiers dénient leur responsabilité personnelle. Phaneuf et Gadbois (2010)
faisaient ressortir que les infirmières évoquaient plusieurs raisons de mauvaise
observance des mesures de PI, toutefois, elles estimaient que ces raisons étaient
partagées incluant les infirmières elles-mêmes.
Dans leur discours, les infirmiers attribuent l’imputabilité des IAS aux soins. En effet,
les pratiques de soins témoignent d’une négligence, les normes et protocoles tels que
enseignés lors des formations et recyclages ne sont pas appliqués. Alessandro (2012)
mettait en évidence les mêmes observations concernant le respect des mesures
d’hygiène et d’asepsie au moment de la réalisation des soins. Il affirmait également
que ces négligences favorisaient l’émergence des IAS. Pour certains participants les
infirmiers font de la routine plutôt que d’agir selon la particularité de chaque situation.
72
Cela est corroboré par Lucet et Birgand (2016), qui soulignaient que la routine
constitue un moyen pour les soignants d’éviter un travail cognitif et une prise de
décision constante. A ce sujet, Phaneuf et Gadbois (2010) évoquaient un manque
d’application de jugement professionnel de la part de l’infirmière qui devrait être à
mesure de choisir les mesures de prévention adaptées à chaque situation. Cette
situation témoigne d’un manque d’application de la part des infirmiers dans la
réalisation des soins. Aussi, les infirmiers ne surveillent pas assez les malades. Or,
Phaneuf et Gadbois (2012) soutenaient que la surveillance permet d’anticiper la
survenue des IAS.
En outre, les infirmiers soulignent que les soins ne sont pas réalisés avec empathie du
malade. Il y a moins de sensibilité à la souffrance des patients. Il en résulte un manque
de préoccupation pour leur sécurité. Trambley (2011), soulignait cet aspect lorsqu’il
faisait ressortir que les infirmiers évoquaient le respect, la compassion comme des
valeurs primordiales permettant d’établir un lien bienfaisant qui respecte la dignité et
l’intégrité du patient.
Par ailleurs, les infirmiers admettent qu’il existe des situations où ils priorisent la
survie du malade et reléguant les mesures d’hygiène au second plan. Phaneuf et
Gadbois (2010) trouvaient également que les besoins des patients étaient considérés
comme prioritaires par les infirmières pour justifier le manque d’observance des
mesures de prévention. Les IAS sont alors perçues comme des dommages collatéraux
des soins d’urgence.
73
Lucet et Birgand (2016), qui affirment que les individus ont une vision de leur propre
comportement et se font une idée de celui des autres, en se basant sur des intuitions
personnelles qui peuvent se révéler erronées. Ainsi, les infirmiers accusent les autres et
ne reconnaissent pas leur responsabilité dans la survenue des IAS. Cette perception ne
les incitera pas à remettre en cause leurs pratiques inappropriées qui favorisent la
survenue des IAS.
Toutefois, les obstacles ne viennent pas uniquement des agents de santé. Les malades
et leur famille sont aussi indexés. Leurs habitudes et comportements en matière
d’hygiène sont souvent à l’origine de la survenue des IAS. Aussi, les malades
manquent souvent d’interpeller les soignants quand ils jugent inadéquats certaines de
leurs pratiques. Laurence (2012) trouvait également une mise en cause des patients par
les infirmières. Cependant, un rôle est reconnu au patient dans la prévention des IAS,
celui d’interpeller l’infirmier. Lucet et Birgand (2016), notait que les soignants
reconnaissaient ce rôle aux patients dans leur prise en charge, quand bien même ils
désapprouvaient leurs interpellations.
74
d’hygiène et d’asepsie lors de la dispensation des soins. Le matériel est vétuste,
inadapté et insuffisant. De plus, il y a très souvent des ruptures de consommables de
soins. Laurence (2012) trouvait un discours similaire des infirmières qui dénonçaient
un manque de matériel pour prendre soin des patients. Cette situation ne favorise pas
la prévention car comme le soulignent Lucet et Birgand (2016) la disponibilité des
ressources matériels joue un rôle important dans l'application effective de la PI.
Aussi, les infirmiers pensent que l’insuffisance de communication entre les acteurs sur
la question des IAS constitue un frein à leur prévention. En effet, peu d’acteurs s’en
intéressent alors que des occasions pour en parler ne manquent pas. Il y a notamment
la visite des malades, les staffs cliniques, les réunions de service, les supervisions, les
monitorings des activités. Evoquer les IAS permet une prise de conscience sur le
problème et une remise en cause des attitudes et des pratiques. Comme le souligne
Raude (2016), évoquer le risque d’IAS interpelle les soignants sur le problème.
Par ailleurs, la charge de travail élevée est perçue par les infirmiers comme un facteur
favorisant la survenue des IAS. Ils ont des difficultés à réaliser des soins très souvent
nombreux tout en respectant les exigences de PI. Amiel (2005) soulignait les
contraintes auxquelles font face les professionnels de santé qui se trouvent préoccupés
par la nécessité de réaliser les soins dans le temps, mais aussi le risque de s’exposer ou
d’exposer le patient aux IAS. Les mêmes perceptions ont été retrouvées chez le
personnel soignant par Carricaburu et al., (2008) qui affirmaient que la charge de
travail élevée favorisait la survenue des IAS.
Ces perceptions des infirmiers sur la survenue du problème montrent que les
participants trouvent l’origine des IAS en dehors d’eux même c’est-à-dire chez les
75
autres et dans le système. Ils ne se voient pas d’emblée responsables de la survenue
des IAS. Dans son étude sur l’analyse critique de la culture de sécurité, Laurence
(2012) était parvenue aux conclusions que les infirmières trouvent les déterminants des
IAS dans l’extérieur et dans l’Autre. À aucun moment, il n’est question directement
des infirmières elles-mêmes. Cette perception de l’origine des IAS pose le problème
de l’adhésion ou la résistance des infirmiers aux mesures de PI. Aussi, les conditions
de travail telles que perçues par les infirmiers ne favorisent pas une pratique
professionnelle de qualité et conduisent à une banalisation du risque. Ne voir que les
précautions de soins ne serait qu’une vision étriquée du problème des IAS. Il faudra
prendre en considération un système plus complexe qui prend en compte les
perceptions, les attitudes et comportements des infirmiers. Cette situation est encore
soulignée par Olivier de Sardan (cité par Amiel 2005 p.55) lorsqu’il affirme que : « les
comportements réels ne sont pas simplement des déviances par rapport aux normes
officielles, ils relèvent en fait d’autres normes, non dites, latentes, que l’on appellera
normes pratiques ».
Face au problème des IAS, le discours des infirmiers est optimiste. En effet, les
participants affirment que les IAS peuvent et doivent être évitées, à défaut minimisées.
Leurs propos mettent en évidence une perception selon laquelle les IAS ne constituent
pas un problème insurmontable mais bien au contraire cette situation peut être
améliorée. En outre, les infirmiers affirment pouvoir modifier leurs attitudes et
pratiques relatives à l’application des mesures d’hygiène et d’asepsie afin d’assurer
une sécurité des patients. Toutefois, ils estiment qu’au-delà du changement d’attitudes
et de pratiques, des conditions de travail qui permettent d’offrir des soins humanisés et
sécurisés sont nécessaires. Ainsi, les participants ont fait des propositions
d’amélioration à l’endroit des soignants, du système des soins, ainsi que des patients et
leur famille.
Pour les participants, il faut d’abord une remise en cause des façons de penser, d’être
et d’agir. Les infirmiers notamment les plus jeunes doivent avoir l’humilité
d’apprendre auprès des plus expérimentés, leur demander de l’aide quand ils en ont
76
besoin et accepter les critiques quand cela est justifié. Les infirmiers doivent
développer des qualités humaines et relationnelles, un climat d’empathie dans leur
pratique de soins. A ce sujet, Mortell, (2012), suggère de mettre l’accent sur les
obligations morales et éthiques des cliniciens concernant le respect de l’hygiène des
mains dans le cadre de la formation. Outre cela, les infirmiers doivent rompre avec la
routine. Ils doivent s’appliquer pour offrir des soins personnalisés, des soins adaptés à
l’état du patient. Dans ce sens Phaneuf et Gadbois (2010) invitent à l’application du
jugement professionnel de l’infirmière afin d’adopter des mesures appropriées à
chaque situation. Aussi, il faut une surveillance des malades concernant les mesures
d’hygiène. Pour Laurence (2012), cette surveillance doit tenir compte du contexte de
soin et permettre de détecter précocement les éclosions infectieuses. Enfin, les
infirmiers doivent mettre la prévention en avant. Ils doivent se conformer aux
protocoles de soins enseignés et mettre en application les règles élémentaires
d’hygiène et d’asepsie.
Toutefois, pour les infirmiers, c’est l’ensemble de l’équipe de soins qui doit être
mobilisé dans la prévention des IAS. Phaneuf et Gadbois (2010, p. 21) soulignent à ce
sujet qu’une partie importante des précautions préconisées se situe au niveau de
l’équipe de soins. Les infirmiers suggèrent également que les responsables d’unité
jouent pleinement leur rôle de leader, rôle de contrôle dans la réalisation des soins et
rôle d’interpellation des soignants qui n’appliquent pas les recommandations. Ce rôle
du responsable a été souligné par Birgand et Lucet (2016) pour qui le leader cultive
l'excellence clinique et la transfère à son équipe, inspire et motive ses hommes. Ainsi,
pour les infirmiers l’implication du responsable est capitale pour l’application des
recommandations.
Par ailleurs, les infirmiers pensent que les patients et leurs accompagnants doivent être
impliqués et pour cela doivent être sensibilisés à la promotion de l’hygiène. Ils
pensent aussi que les malades et leur famille doivent pouvoir interpeller les soignants
et même refuser certaines de leurs pratiques qu’ils jugeraient inadéquates. Phaneuf et
Gadbois (2010) soutenaient dans ce sens que les patients peuvent exiger des soignants
certains mesures d’hygiène lors des soins les concernant. Aussi, Laurence (2012)
soulignait le rôle de l’infirmière concernant l’implication des familles dans
77
l’application des mesures de prévention notamment le renforcement des
comportements perçus comme positifs.
S’agissant du système de soins, plusieurs propositions ont été évoquées par les
infirmiers afin de permettre une bonne mise en application des recommandations. En
effet, ils évoquent les conditions de travail qui devraient être améliorées. Ainsi,
l’organisation du travail doit être revue de sorte à diminuer la charge de travail des
infirmiers. Aussi, l’administration doit mettre à la disposition du personnel soignant, le
matériel nécessaire permettant l’application effective des mesures de prévention.
Laurence (2012) trouvait également que les infirmières évoquaient les difficultés au
sein de l’unité de soins pour réclamer des conditions sécuritaires afin de pouvoir
dispenser aux patients des soins de qualité. En outre, les infirmiers estiment que
l’administration doit prendre des dispositions pour protéger le personnel de santé.
Dans ce sens les soignants doivent non seulement être formés et sensibilisés sur la
prévention des AES mais aussi obtenir du matériel et des équipements de protection.
Aussi, l’amélioration des attitudes et pratiques passe par la communication et une
sensibilisation continue. Il faudrait donc saisir toutes les occasions possibles pour
discuter des pratiques des soignants, les remettre en cause et aussi aborder le problème
des IAS. Ces occasions peuvent être notamment la visite des malades, les réunions de
services, les supervisions, le monitoring… Tout cadre de concertation doit être une
occasion pour parler des IAS car comme le souligne Raude (2016), évoquer le risque
d’IAS permet de tenir en éveil la conscience des soignants. Par ailleurs, les infirmiers
suggèrent de revoir la formation de base de sorte à avoir des infirmiers compétents,
disciplinés, dévoués à leur travail, des soignants qui ont l’amour de ce qu’ils font et
qui ont de l’empathie pour les malades. Pour ce faire, il faut non seulement mettre
l’accent sur la prévention lors de la formation de base mais aussi revoir les méthodes
d’enseignement. Birgand et Lucet (2016) soutiennent à ce sujet que la seule diffusion
de recommandations ne suffit pas à les faire respecter. Ils suggèrent de tenir compte de
la culture dans laquelle les soignants évoluent car elle influence leur perception des
recommandations de prévention ; si certaines cultures semblent être plus influencées
par l'information et la formation, d’autres auront plus tendance à faire confiance aux
experts. Pour Mortell, (2012), il faut mettre l’accent sur les obligations morales et
78
éthiques des cliniciens concernant le respect des mesures d’hygiène lors de la
formation.
En somme, pour les infirmiers, la lutte contre les IAS passe par l’offre de soins
humanisés et sécurisés. Cela est conditionné par des changements d’attitudes et de
pratiques au niveau des soignants, des équipes de soins et des responsables d’unité de
soins. Toutefois des mesures doivent être prises afin d’améliorer les conditions de
travail des infirmiers.
La pratique réflexive nous amène à considérer quelques aspects que nous estimons être
des insuffisances de notre étude. En effet, le thème de notre étude est un sujet sensible
pour les participants qui à un moment donné de l’entretien ont dû se sentir évalués. En
témoigne que certains participants adoptaient parfois une position défensive. Cela a dû
entrainer une certaine réserve de parole par rapport à certains thèmes abordés lors des
entretiens. Aussi, des entretiens ont été menés alors que le participant était de service,
ce qui occasionnait de nombreuses interruptions. Nous pensons cependant avoir réduit
cette difficulté par la multiplication des entretiens, cela nous a permis d’éclairer
certains points avec les participants. De même, étant infirmier, nous sommes
personnellement concernés par la thématique de l’étude, et nos expériences et nos
perceptions ont pu d’une manière ou d’une autre influencer le déroulement de
l’entretien et l’analyse des données recueillies. Nous pensons avoir réduit ce biais par
le « bracketing » suggéré par Giorgi (1997).
79
CONCLUSION
Les IAS demeurent une préoccupation mondiale. Malgré les efforts de prévention,
elles persistent et continuent de faire de nombreuses victimes. Une des raisons qui
expliquent cela est la non mise en application des recommandations de prévention.
Pour comprendre cette situation, une approche méthodologique qui explore en
profondeur les facteurs associés aux IAS déjà connus notamment les aspects
personnels et comportementaux des soignants était nécessaire. Il s’agissait pour nous
d’avoir une vision autre qu’hospitalière des comportements des soignants. A travers
une approche phénoménologique, notre étude vient souligner le rôle des expériences et
perceptions des infirmiers dans la survenue des IAS. Les résultats que nous avons
obtenus montrent que les IAS paraissent être une question moins préoccupante pour
les infirmiers. En effet, ces résultats montrent une faible perception de l’ampleur et de
la gravité des IAS qui sont perçues comme des problèmes mineurs. Aussi, les
infirmiers ne reconnaissent pas leur responsabilité dans leur survenue. Cette faible
préoccupation faisant que ces derniers n’appliquent pas suffisamment les mesures
d’hygiène et d’asepsie, situation qui favorise l’émergence de ces infections. De ce fait,
ces facteurs pourraient contribuer à expliquer la persistance des IAS. Toutefois, les
infirmiers ont tout de même une perception négative des infections associées aux soins
car leur évocation suscite en eux une indignation. Par ailleurs, ils sont optimistes quant
à la résolution du problème. En effet, ils sont prêts à modifier leurs attitudes et
pratiques relatives aux mesures d’hygiène et d’asepsie afin de prévenir les IAS. Ces
deux aspects sont à prendre en considération pour les interventions correctrices. Ces
résultats interpellent ainsi l’ensemble des acteurs du système de soins. Au demeurant,
les perceptions se modèlent, se modifient par l’intermédiaire d’interventions
correctrices ouvrant des perspectives d’amélioration des pratiques de soins notamment
l’application stricte des mesures d’hygiène et d’asepsie (Birgand et Lucet 2016).
Notre étude est loin d’être exhaustive pour expliquer la survenue des IAS car d’autres
facteurs personnels des soignants sont également mis en cause. Il s’agit notamment des
valeurs que les infirmiers associent à l’humanisation des soins qui peuvent faire l’objet
d’autres études.
81
SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS
A la lumière des résultats que nous avons obtenus, nous avons formulé des suggestions
et recommandations dont la mise en œuvre pourrait permettre d’obtenir un succès
durable dans la prévention des IAS. Il paraît incontournable d’agir au niveau du
processus de soins mais surtout au niveau de chaque acteur du système de soins.
Pour la pratique des soins, l’ensemble des soignants devraient faire de la sécurité des
patients et l’humanisation des soins une préoccupation permanente. Les infirmiers
doivent observer de bonnes pratiques de soins en adéquation avec l’excellence de la
pratique infirmière comme le préconise Watson (1997). Pour ce faire, ils doivent
remettre en cause leurs attitudes et pratiques afin d’assurer des prestations de soins de
qualité favorables à la sécurité. Les infirmiers doivent cultiver les valeurs d’empathie,
de professionnalisme et d’éthique. Ils devraient alors accorder une grande attention à
l’application rigoureuse des mesures d’hygiène et d’asepsie dans leurs pratiques
quotidiennes. Aussi, les différents cadres de communication tels que les staffs
cliniques et réunions de service devraient être des occasions pour aborder la question
des IAS. Par ailleurs, il est essentiel d’associer les patients et leur famille à la lutte
contre les IAS en mettant en œuvre une stratégie de sensibilisation et d’éducation à
leur endroit. Il s’agira aussi de prendre en compte leurs préoccupations et leur offrir
des soins individualisés.
Pour la recherche, les responsables des instituts de recherche en santé (IFRISSE, IRSS,
Centre Muraz, etc.), devraient promouvoir la recherche en Sciences infirmières en
explorant en profondeur les facteurs intrinsèques des infirmiers ainsi que
l’organisation des activités afin d’améliorer substantiellement la qualité et la sécurité
des soins.
83
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88
ANNEXES
ANNEXE 1: Lettre d’invitation à participer à l’étude
Je vous saurai gré d’avance pour votre contribution combien inestimable en participant
à cette étude.
B
ANNEXE 2 : Questionnaire sociodémographique
Lieu de l’entretien : /___/ sur le lieu du travail /___/ autres, préciser :……………
Informations socioprofessionnelles
…………………………………………………………………………………………
C
ANNEXE 3 : Guide d’entrevue
Consigne : je vous laisse développer comme vous le souhaitez, selon votre expérience
et vos connaissances. Exprimez-vous sur ce que vous savez, ce que vous pensez, ce
que vous ressentez en tant qu’infirmier.
Thèmes :
- Vécu et perception de la réalité du problème des IAS.
- Les imputabilités du problème des IAS.
- propositions/suggestions pour améliorer la situation.
D
ANNEXE 4 : Grille d’observation inspirée de Peretz (2004)
5. les règles formelles définissant la présence dans les lieux (ceux qui sont présent
et pourquoi sont-ils là, où se situent-ils et quand, que font-ils ?) ;
6. comment sont organisés les soins ? cela est-il formalisé (outils d’organisation :
description et répartition des taches) : quelle sont les horaires, comment sont
réparties les taches ? les équipes : les tours, les passations de service
(transmissions ?) ? comment le travail est fait ? comment est fait le travail
(équipe, seul, en série, surcharge)
8. quelles précautions pour les soins ? Des stratégies de minimisation des IAS ?
9. autres :
E
ANNEXE 5 : Formulaire d’information du participant
Introduction
Nous sollicitons votre participation à cette étude en tant qu’infirmier (ère) de l’Hôpital
de district de Ziniaré. Votre participation est volontaire et anonyme. Avant d’accepter
de participer à cette étude, nous vous demandons de prendre le temps de comprendre
les implications de votre participation en lisant les informations contenues dans ce
formulaire.
Ce formulaire peut contenir des informations que vous ne comprenez pas. Nous vous
invitons à nous poser toutes les questions que vous jugerez utiles.
I. Information générale
Structure : IFRIS
F
infections associés aux voies veineuses périphériques et ensuite de décrire leurs
perceptions de ce problème.
Méthodologie:
- analyser des documents concernant les soins ainsi que des documents personnels en
rapport avec les soins ;
Nous aurons à réaliser l’étude avec dix (10) infirmiers de l’hôpital de district de
Ziniaré.
Nous vous demandons de participer aux entrevues individuelles d’une durée d’environ
45 mn.
Nous vous demanderons votre vécu et vos perceptions d’infirmier sur différents sujets
relatifs aux infections associés aux soins survenant sur voie veineuse périphérique.
Durant les entrevues, un enregistrement vocal sera réalisé. Ceci nous permettra de
n’omettre aucune information de l’entretien. Les enregistrements seront identifiés par
un code attribué à l’entrevue afin d’assurer la confidentialité et seront consignés dans
un dossier de recherche qui sera détruit dix (10) ans après l’étude.
Nous aurons également à observer les soins que vous administrez aux malades. Pour
ce faire nous allons participer aux soins tout en prenant des notes que nous allons
commenter.
G
Une autorisation d’enquête du Directeur Régional de la Santé du Plateau central sera
requise avant la collecte des données sur le terrain. La confidentialité sera assurée par
le caractère anonyme de l’enquête.
Conditions de participation
Risques et inconforts
Avantages à participer
Aussi, vous ne recevrez pas de compensation financière pour votre participation à cette
étude. Nous prendrons cependant des dispositions pour que cette participation ne vous
occasionne pas de dépenses (déplacement).
Votre participation à cette étude est tout à fait volontaire. Vous êtes donc libre de
refuser d’y participer sans que cela n’affecte vos relations avec l’hôpital. Vous pouvez
également vous retirer de cette étude à n’importe quel moment, sans avoir à donner de
raison. Vous avez simplement à aviser l’étudiant, son directeur ou son co-directeur.
H
Confidentialité
Durant votre participation à cette étude, nous recueillerons sur une fiche d’enquête des
informations vous concernant qui sont nécessaires pour l’atteinte des objectifs de cette
étude. Toutes ces informations recueillis sur vous demeureront strictement
confidentielles. L’anonymat sera requis, vous ne serez identifié que par un code auquel
seul l’étudiant, son directeur ou son co-directeur aura accès. Les données de l’étude
seront conservées pendant dix ans après la fin de l’étude et seront détruites par la suite.
Nous restons disposer à vous fournir toute information sur l’avancement des travaux
ou les résultats de l’étude. Les résultats de l’étude vous seront communiqués à la fin de
la recherche.
Personnes ressources
I
ANNEXE 6 : Formulaire de consentement à l’étude
Consentement
Je m’engage avec mes encadreurs à respecter ce qui a été convenu dans ce formulaire
d’information et de consentement et à remettre une copie signée au participant.
J
ANNEXE 7 : Demande d’autorisation d’enquête
SOULI Marc Burkina Faso
Elève conseiller de santé à l’institut de Unité - Progrès - Justice
formation et de recherche interdisciplinaire
en santé (IFRIS) sis à l’université Saint
Thomas d’Aquin (USTA). Option : master
en management de la qualité et la sécurité
des soins
Téléphone : 70 44 66 84
Email : macsoul7@gmail.com Ouagadougou, le 01/07/2017
Monsieur le Directeur,
SOULI Marc
K
ANNEXES 8 : Lettre de demande d’avis au Comité d’Ethique pour la Recherche
en santé
SOULI Marc,
Burkina Faso
Etudiant en Sciences Infirmières,
Institut de Formation et de Recherche Unité – Progrès – Justice
Interdiciplinaire en santé (IFRIS)
Téléphone : 70 44 66 84
Email : macsoul7@gmail.com
Monsieur le Président,
Ci-joint :
- Cinq (05) copies du protocole de recherche ;
- Le fichier électronique du protocole de recherche ;
- Les curriculum vitae de l’investigateur et du directeur de recherche ;
- Le formulaire de consentement éclairé ;
- Le budget de l’étude ;
- Les pièces justificatives des frais de dossier.
Veuillez agréer Monsieur le Président, l’expression de ma considération.
L
ANNEXE 9 : CERTIFICAT D’ETHIQUE
ANNEXE 10 : AUTORISATION D’ENQUETE
N
ANNEXE 12 : CHRONOGRAMME DE L’ETUDE
Période
Respon er
1
Activités juillet Août Sept Oct Nov Dec
sable 2016 Semest
2017 2017 2017 2017 2017 2017
re 2017
Elaboration du
protocole de recherche Etudiant
Directeur de
mémoire
Rédaction de la version
finale du mémoire Etudiant
Validation du mémoire
Directeur de
mémoire
Dépôt du mémoire
Etudiant
O
ANNEXE 14 : BUDGET ESTIMATIF POUR LA REALISATION DE L’ETUDE
Quant
Durée
ité/ Coût
Numéro Rubriques en Total
Nomb unitaire
jour
re
Préparation de l’étude
Recherche documentaire 10 1 10000 100000
Mission exploratoie 0
Elaboration et validation du
0
masque de saisie
4
Formation Opérateur de saisie 0
Saisie(encodage)
Transcription des données
des données 1 7 5000 35000
enregistrées
P
données
Q
ANNEXE 15 : Braketing de l’étudiant (chercheur)
J’ai fait ma carrière d’infirmier (administrant des soins aux malades) essentiellement en
service de médecine notamment dans la prise en charge des PVVIH. Très tôt j’ai été
sensibilisé à la question des AES. Il y avait cette peur d’être infecté par le VIH. Au cours des
soins, je faisais attention à chacun de mes gestes afin d’éviter de me piquer avec toute aiguille
usagée. Au fil du temps et malgré les risques dont il fallait faire avec, je me suis habitué à les
prendre en charge comme tout autre patient). Je développais plus d’assurance en moi en me
disant que la sécurité des soins résidait dans les précautions à prendre. Dans ce service, j’ai
vécu plusieurs cas de patient qui ont été victimes d’infections lié aux soins notamment les
voies veineuses. Au cours de cette période j’ai reçu une formation sur la PI. Après avoir
parcouru la littérature sur les IAS, je les comprends comme des infections qui surviennent au
cours de la prise en charge du malade après un délai de 48h et qui ont un rapport avec les
soins reçus. Peuvent être victime d’IAS, les patients, le personnel de santé et les visiteurs.
Cependant, je me demande toujours pourquoi les infirmiers n’appliquent pas assez l’asepsie
pourtant enseigné à l’école de base. Pour moi les infections associées aux soins sont
dues surtout au laxisme des soignants, à leur négligence dans la réalisation des soins. Les IAS
surviennent parce que les infirmiers n’appliquent pas suffisamment les mesures d’hygiène et
d’asepsie. S’il est difficile d’appliquer tout ce qu’on enseigne à l’école dans toute la rigueur,
je pense que les infirmiers font peu d’effort pour appliquer les recommandations de
prévention. Aussi, il y a une absence de contrôle de leur travail de la part des responsables. Je
considère également d’autres facteurs dans la survenue des IAS. Il s’agit notamment du ratio
infirmier/patients (un seul infirmier qui s’occupe de plus d’une vingtaine de malades à la
fois) ; du manque de ressource (gants, plateau, savon liquide…) ; des conditions de vie et
d’hygiène précaire des patients. Je pense aussi que les décideurs sont peu regardants sur ces
aspects. Soit ils sont peu sensibilisés à la question ou ils sont peu éclairés sur le problème.
Enfin, je pense que les infirmiers doivent faire siennes les valeurs de professionnalisme
(réaliser le travail : « les soins », avec le plus grand sérieux ; appliquer ce qui est
recommandé ; avoir un comportement digne ; savoir répondre de ses actes ; avoir une capacité
d’attention ; une capacité de jugement clinique) ; d’éthique (respecter la dignité des malades ;
être bienveillant à leur égard; avoir de la compassion et de l’empathie pour eux).
R
ANNEXE 14 : Grille d’analyse