Fiche Versification
Fiche Versification
Fiche Versification
w Pour la lecture à voix haute et le décompte des syllabes dans le vers, attention au [e] muet :
• on le prononce quand il se situe devant une consonne,
• on ne le prononce pas quand il se situe devant une voyelle ou à la fin du vers
(règle importante à mémoriser pour la lecture du poème à haute voix).
Exemples :
« Le Serpent qui danse », v.1 : « Que j’aime voir, chèr(e) indolent(e), » : 8 syllabes.
« Une Charogne », v.5 : « Les jambes en l’air comm(e) une femme lubriqu(e), » : 12 syllabes
(prononcer « les jambes-z-en l’air »)
Attention aux diérèses : quand 2 voyelles se suivent, on prononce 2 syllabes au lieu de une
dans la vie courante : « li-on » (en 2 syllabes = diérèse) au lieu de « lion » en 1 syllabe (=
synérèse): cela étire le mot et le met en valeur.
Exemple : « Et qu’un peuple mu-et d’infâmes araignées ».
Quand vous analysez un poème en vers vous devez prêter attention à son rythme
La césure est une pause forte marquée en un endroit fixe du vers, qui du coup le divise en deux
parties. Selon la règle classique, l’alexandrin a une césure médiane qui intervient après la 6 ème
syllabe et divise le vers en 2 parties égales qu’on appelle hémistiches (schéma 6/6) : « Quand le
ciel bas et lourd / pèse comme un couvercle » (6/6) : le rythme est alors binaire. Le respect de la
césure à l’hémistiche (rythme 6/6) donne de la régularité au poème.
On peut trouver des pauses moins fortes (des coupes) à l’intérieur de chaque hémistiche :
on a alors un tétramètre 3/3//3/3 :
« Il nous verse/ un jour noir //plus triste /que les nuits » (Baudelaire) ;
« Puis le soir /et le gaz //et je rentre /à pas lourds » (Laforgue).
Mais le rythme peut aussi être ternaire 4/4/4 (trimètre):
« Toujours aimer,/ toujours souffrir,/ toujours mourir » (Corneille)
Parfois les 2 hémistiches développent des antithèses : « Notre vie tu l'as faite / elle est ensevelie »
(Eluard) : le 1er hémistiche évoque la vie et le second évoque la mort, la fin de cette vie.
Mais la régularité de l’alexandrin n’est plus forcément respectée à partir du début du XIX (le
romantisme):
« Où l’Espérance, comme une chauve-souris, »
(la césure tombe au milieu d’un mot, on a donc le schéma 5/7)
LE REJET est un élément bref placé en début de vers qui se trouve étroitement lié par la
construction au vers précédent et est mis en valeur par sa position particulière : Exemple :
Rimbaud, « Le Dormeur du val »
« Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit. »
le rejet au vers suivant de l’adjectif « tranquille » le met en valeur,
c’est un indice de la mort du personnage.
LE CONTRE-REJET est le procédé inverse : un élément bref, placé à la fin d’un vers, se
trouve étroitement lié par la construction au vers suivant, et est mis en valeur par sa
position particulière : Exemple : « Spleen » (4), v.18-19 :
— Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir
Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
rejet et contre-rejet créent un effet de rupture du rythme, mettent en valeur l’élément
rejeté.
Pour un poème en alexandrin, le rythme est régulier quand les alexandrins ont un rythme 6/6 avec
césure à la fin de la 6ème syllabe, sinon le rythme est irrégulier.
« Quand le ciel bas et lourd / pèse comme un couvercle » (6/6) = rythme régulier
« Où l’Espérance, comme une chauve-souris, » (5/7) = rythme irrégulier
Le rythme est lent et saccadé quand on trouve une ponctuation forte à l’intérieur du vers
(plus les phrases sont courtes plus le rythme est lent) :
« Je mange, et bâille, et lis, rien ne me passionne...
Bah ! Couchons-nous. - Minuit. Une heure. Ah ! chacun dort ! »
(Laforgue, « Spleen ») rythme 2/2/2/2/2/2 et 1/3/2/2/1/3
Quand un vers comporte beaucoup de [e] muets, cela ralentit aussi beaucoup son rythme par
rapport à la prononciation courante :
« Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir » (Baudelaire),
« Des fiacres, de la boue, et l’averse toujours… » (Laforgue)
w LES RIMES :
La rime est constituée par le retour de sons identiques à la fin du vers
dispositions : plusieurs dispositions sont possibles, en fonction du type de strophes. 3 dispositions
majeures : rimes suivies ou plates (aabb), rimes embrassées (abba), rimes croisées (abab).
Qualités : rimes pauvres = 1 seul son en commun (répond / profond) ; rime suffisante = 2 sons en
commun (serein / airain) ; rime riche = au moins 3 sons en commun (éphémère / amère).
Sonorités : opposition rimes masculines (terminée par une syllabes accentuée) / rime féminine
(terminée par un [e] muet).
Dans les poèmes contemporains, la rime est parfois remplacée par l’assonance.
Remarques :
• prêtez attention aux mots mis à la rime, cela peut être signifiant (exemple dans dans la poème de
Baudelaire « Une charogne », v.45 et 47 : « vermine/ divine »: volonté de choquer).
• Prêtez attention à la place des mots dans le vers : au début, à la fin du vers ou à l’hémistiche (à
la 6ème syllabe), ils sont mis en valeur.
Exemple :
Pierre Reverdy, « Les Ardoises du toit », Plupart du poème en vers libres, sans aucune ponctuation.
temps, I (1918) Mise en page très particulière, importance des
blancs, mots disséminés sur la page : mots
En face décalés, formant une sorte de dessin en lien avec
ce qui est évoqué dans le poème: on peut y voir un
Au bord du toit soleil, la pente du toit. Rythme lent et saccadé car
Un nuage danse les vers sont très courts, on marque une pause à
Trois gouttes d’eau pendent à chaque fin de vers : lecture lente, temps suspendu
la gouttière comme les gouttes d’eau à la gouttière (toujours
Trois étoiles mettre en rapport remarque sur la forme et sens)
Des diamants Les groupes nominaux « la gouttière », « trois
Et vos yeux brillants qui regardent étoiles », « des diamants » ont chacun 3 syllabes et
Le soleil derrière la vitre représentent les trois gouttes d’eau. « Trois
Midi étoiles » et « des diamants » sont des métaphores
valorisantes pour les gouttes d’eau mais le mot
« diamants » peut aussi qualifier les « yeux ».
L’adjectif « brillant » renvoie à la fois aux gouttes
d’eau, aux yeux et au soleil.
Evolution de la poésie
A partir du début du 19ème siècle et des poètes romantiques, la poésie se libère des règles de
la versification :
D’abord apparition des rejets et contre-rejets qui brisent la régularité rythmique
de l’alexandrin (le rythme de l’alexandrin n’est plus forcément symétrique et régulier
avec deux hémistiches 6/6 syllabes)
Apparition du poème en prose au 19ème siècle avec Gaspard de la nuit (1842)
d’Aloysius Bertrand puis Le Spleen de Paris de Baudelaire (1862) et Illuminations
(1895) d’Arthur Rimbaud. Très utilisé au 20ème siècle par Henri Michaux.
Utilisation de vers courts et impairs par Verlaine pour rendre le poème plus musical
Apparition du vers libre fin 19ème siècle souvent accompagné au 20ème siècle par la
suppression de toute ponctuation (Apollinaire)
Importance de la mise en page des poèmes, présenté en vers libres décalés par Pierre
Reverdy (les blancs ont une grande importance, les silences mettent les mots en valeur)
ou en dessins avec les Calligrammes d’Apollinaire.