Le Pari de Ti Jean
Le Pari de Ti Jean
Le Pari de Ti Jean
A la brume du soir, Grandyab se rendit au jardin et constata que Ti Jean avait arraché
toutes les plantes cultivées et avait laissé les mauvaises herbes. Il se garda de se fâcher
pour ne pas perdre son pari.
Grandyab avala la pilule et, toujours pour faire semblant de ne pas se fâcher, il proposa
à Ti Jean d'accompagner sa femme au bal. Ti Jean mit son habit de soirée, son haut de
forme, ses souliers cirés. Il dansa, courtisa et séduisit Madame Grandyab qui ne ft que
minauder, sourire et roucouler.
A minuit, prétextant comme Cendrillon qu'il avait perdu son soulier, il interrompit la
soirée au grand dam de sa cavalière et quitta le bal.
Sur le chemin du retour, un énorme crabe, qui lui semblait avoir la voix de sa propre
mère, le menaça et lui ordonna de rentrer chez ses parents. Il hurla de terreur, prit ses
jambes à son cou et avoua à Grandyab qu'il n'avait jamais eu autant peur devant cet
énorme crabe qui parlait comme un chrétien vivant.
- Quoi ! Tu n'as pas eu peur de moi et tu as peur d'un crabe, s'écria Grandyab fou de
rage. Tiens, deux paires de claques !
- J'ai gagné le pari : tu t'es mis en colère ! Ta fortune est à moi, mais garde ta femme, je
n'en veux pas, elle n'est pas fut' fut'.
Depuis que Grandyab a perdu tous ses sous, il erre sur les routes où il ne fait pas bon le
rencontrer car il ne décolère pas. Il se venge de sa déconvenue sur sa femme et sur les
voyageurs sans défense.
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conte de Haïti