Le Statut Ambigu Des Magistrats Du Parquet
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Les magistrats du parquet, que l’on désigne aussi par l’expression "ministère
public", représentent la société au cours d’une procédure pénale, et pendant le
procès. Ils ont notamment pour fonction le déclenchement de l’action publique
(l’opportunité des poursuites) et son exercice. En phase de poursuite, le Procureur
dirige et contrôle l’activité de la police judiciaire. Il adresse des instructions
aux enquêteurs, et veille au respect du droit pendant les actes d’investigation.
Cependant, et alors que les termes de M. Leurent étaient sans ambiguïté, le statut
du parquet en France est l’objet de controverses depuis de nombreuses années. On
lui reproche en effet un manque, voire une absence d’indépendance et d’impartialité.
L’indépendance concerne une problématique statutaire, elle désigne plutôt des
pressions extérieures, tandis que l’impartialité, elle, désigne davantage des
pressions intérieures, intrinsèques à la personne. Or, dans le cas des controverses
qui entourent le statut du ministère public en France, on reproche parfois à ce
dernier de n’être ni totalement indépendant, ni vraiment impartial.
Cependant, selon l’adage "La plume est serve, mais la parole est libre", on
considère que le ministère public conserve tout de même une certaine liberté de
parole. Cette liberté de parole peut être nuancée en raison de l’indivisibilité des
membres du parquet. En effet, ces derniers sont interchangeables. Autrement dit,
chacun de ses membres représente les mêmes intérêts. Le procureur qui engage des
poursuites par exemple, ne le fait pas en son propre nom, mais engage l’ensemble du
ministère public.
On peut donc penser que la liberté de parole est illusoire, parce que selon toute
hypothèse, si un magistrat constatait que son subordonné n’était pas tout à fait
convaincu par les réquisitions écrites, il pourrait décider qu’un autre individu
intervienne au cours de l’audience.
La loi de 2013 modifiant le Code de procédure pénale a été suivie par une loi du 3
juin 2016 (4) qui introduit une disposition à l'alinéa 2 du nouvel article 39-3 du
Code de procédure pénale, lequel prévoit que le Procureur de la République "veille
à ce que les investigations tendent à la manifestation de la vérité et qu'elles
soient accomplies à charge et à décharge, dans le respect des droits de la victime,
du plaignant et de la personne suspectée". On peut aisément constater dans ces
dispositions un certain rapprochement avec le rôle attribué au juge d’instruction,
ce qui vient ajouter à la conclusion, et aux interrogations quant à l’exigence
d’impartialité du ministère public.
Lorsque l’on a établi que l’indépendance du ministère public est fragile, et que
son impartialité peut être remise en cause, on peut en conclure que la véritable
problématique qui est au coeur du statut du parquet français n’est pas réellement
son absence d’indépendance ou d’impartialité. Comme l’explique Maître Daniel
Soulez-Larivière, dans un article publié à l’AJ Pénal en 2012 : "Le problème en
France est de couper le cordon non pas entre le parquet et le pouvoir politique
mais entre les magistrats du siège et ceux du parquet. Non pour amoindrir
l'autorité judiciaire, mais au contraire pour la renforcer, voire tout simplement
pour constituer un pouvoir judiciaire."
Cela marque une réelle distinction entre le ministère public et les magistrats du
siège. On précisera à cet égard que si leur mode de formation est identique (au
sein de l’Ecole Nationale de la Magistrature), leur mode de nomination diffère. Les
magistrats du parquet sont nommés sur avis simple du Conseil National de la
Magistrature, alors que les magistrats du siège, sont nommés certes par le Garde
des Sceaux, mais sur avis conforme du Conseil National de la
Mathilde AMBROSI
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