Guil Lau Mot Luca
Guil Lau Mot Luca
Guil Lau Mot Luca
L’UNIVERSITE DE RENNES1
COMUE UNIVERSITE BRETAGNE LOIRE
Par
Luca GUILLAUMOT
Comment modéliser les systèmes aquifères au sein du cycle
hydrologique ?
Une approche « multi-observables » à différentes échelles.
Composition du Jury :
Examinateurs : Florence Habets Directrice de recherche au CNRS (UPMC Sorbonne Univ.)
Nicolas Massei Professeur de l’Université de Rouen
Jean-Martial Cohard Maître de conférences de l’Université Grenoble Alpes
Pascal Audigane Ingénieur de recherche au BRGM
Jean-Raynald de Dreuzy Directeur de Recherche au CNRS (Géosciences Rennes)
Invité
Yoshihide Wada Chercheur et directeur adjoint du programme Water à l’IIASA (Autriche)
Résumé
Les systèmes aquifères constituent la partie souterraine du cycle hydrologique. Ils transfèrent
les pluies infiltrées à travers les sols sur des distances variables. Après un temps caractéristique de
l’ordre du mois au millier d’années, les eaux souterraines regagnent la surface en alimentant les
rivières et en satisfaisant en partie l’évapotranspiration. Les aquifères sont ainsi une ressource en
eau majeure pour l’Homme et les écosystèmes. La prédiction de leur réponse aux pressions an-
thropiques et climatiques se heurte à deux difficultés (1) la faible densité d’informations directes
sur les milieux géologiques et leur grande hétérogénéité (2) la complexité des échanges entre la
surface et la profondeur. L’enjeu est donc de développer des modèles représentant au mieux les
processus aux différentes échelles spatiotemporelles.
Pour aborder cette question, nous étudions le contenu informatif de différents types d’obser-
vables (piézométrie, débit de rivière, déformation de surface...) afin de déterminer comment ils
peuvent améliorer la paramétrisation des modèles. Notre travail s’appuie sur la modélisation hy-
drologique du site de Ploemeur (échelle locale) et du bassin du Rhin (échelle continentale). Dans
les deux cas, des modèles simples sont développés en utilisant des solutions analytiques et numé-
riques. Le modèle ModFlow a également été couplé à un modèle hydrologique. À petite échelle, les
résultats illustrent l’intérêt de différents types de données transitoires pour contraindre les proces-
sus. À grande échelle, le modèle développé ainsi que les observables permettent d’affiner le rôle
des systèmes aquifères dans la disponibilité de l’eau en surface. Les deux approches illustrent un
contrôle des flux à différentes échelles par la topographie, la géologie et l’hétérogénéité.
Abstract
Groundwater systems (GW) constitute an important part of the hydrological cycle. GW trans-
fer water infiltrated through soils on variable distances. After a characteristic time ranging from
the month to thousand of years, GW reach the surface supporting rivers and evapotranspiration.
Thus, they are a major resource for human and ecosystems. Predicting GW response to human and
climate pressures is limited by (1) the scarcity of direct information on the highly heterogeneous
geological media (2) the complexity of surface-depth exchanges. So, it seems necessary to develop
models representing at best the processes at different spatiotemporal scales.
To address this issue, we study the informative content of different observation types (piezo-
metry, streamflow, surface deformation. . . ) to assess how they can improve models parametriza-
tion. Our work is based on GW modeling of the Ploemeur site (local scale) and of the Rhine basin
(continental scale). For both approaches, simple models are developed, using analytical or nume-
rical solutions. Also, the ModFlow model was coupled to an hydrological model. At small scale,
results show the interest of temporal and multidisciplinary data to better constrain processes. At
large scale, the developed model, as well as observations, allows to precise the role of GW for water
availability on surface. Both approaches highlight a flows control at different scales by topography,
geology and heterogeneity.
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iv
Contexte et Remerciements
Cette thèse a été encadrée par Laurent Longuevergne et Olivier Bour, je tiens à les remercier.
D’abord parce qu’ils m’ont fait confiance pour réaliser ce projet. Initialement, l’idée de la thèse
était de s’appuyer sur deux expériences à taille réelle pour étudier les aquifères et leur relation avec
la surface. Il s’agissait d’une mise en pompage pour l’eau potable et de l’arasement d’un barrage
pour la restauration d’un cours d’eau. Finalement, les deux projets ont été retardés. Sortant de
l’ENSG de Nancy, le sujet m’avait semblé très intéressant car il me donnait l’occasion d’appliquer
les lois de la physique pour comprendre notre environnement (ma vision de l’"hydro" était alors
assez différente, je me rends compte maintenant que je ne savais pas où je mettais les pieds).
Avec du recul, l’arrivée à Géosciences Rennes s’est passée exceptionnellement bien. D’une part
grâce à la gentillesse de tout le monde et la bienveillance de mes encadrants. D’autre part grâce à
tous les doctorants du laboratoire et d’autres. Ils m’ont intégré et ont toujours été présents pour
rigoler, se plaindre, boire un coup, jouer au foot ou au volley, faire des vidéos et des photos pour les
thésards qui partent, et travailler parfois. J’espère qu’il en sera toujours ainsi. Merci à tous les doc-
torants que j’ai côtoyé durant cette thèse, sans oublier Marie-Françoise. Merci également à Angela,
Leonardo et Quentin (désormais doctorant au laboratoire) pour leur travail de stage rigoureux et
impliqué.
Cela me ramène au contenu de cette thèse. Elle résulte de nombreux travaux rendus acces-
sibles par les chercheurs du monde. J’ai probablement oublié d’en citer certains. La thèse est
parfois compliquée et j’espère que ce manuscrit sera aussi compréhensible que ceux que j’ai pu
lire ces trois années. Mon approche porte essentiellement sur le sens des modèles. Ces derniers
donnent du sens aux données. Par extension, toute réflexion que l’on peut avoir en tête est un
modèle. Cette réflexion se base sur des connaissances théoriques, des informations issues des
mesures, et est éventuellement intuitive. On n’en présente rarement les échecs qui sont pourtant
majoritaires. À chaque fois que j’ai eu une hypothèse ou une idée en tête, il m’a été difficile de
ne pas la mettre en œuvre. Les données de terrain contiennent énormément d’informations et il
existe de nombreuses techniques pour les étudier. Pour cela, je remercie encore Laurent et Olivier
pour m’avoir guidé. Ils m’ont aidé à comprendre les verrous scientifiques de l’hydro(géo)logie et
m’ont donné des outils pour les résoudre.
Merci au jury qui m’a confié cette bourse de thèse, elle m’a permis de m’épanouir (dans la
difficulté et avec beaucoup de travail certes). J’espère en avoir fait bon usage. Merci à l’équipe de
l’IIASA pour son accueil. Yoshi, Yusuke et Peter m’ont permis de faire partie d’un projet ambitieux :
modéliser le cycle de l’eau à l’échelle continentale. Merci aux examinateurs et aux rapporteurs de
la thèse, leurs remarques la rendent meilleure. Merci également à mes relecteurs : Luc, Quentin,
Jonathan et Nina qui ont trouvé du temps bien que je les ai prévenus au dernier moment.
Je remercie aussi toute ma grande famille pour leur soutien et leurs encouragements. Enfin,
rien ne me fait plus plaisir que de remercier mes parents et mes sœurs. Je leur dois beaucoup car
ils ont toujours cru en moi. Lucille, merci de m’accompagner et de me supporter au quotidien.
Je remercie Dorian Depriester pour le modèle de document LaTeX ayant servi à l’élaboration de ce manuscrit.
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vi
Table des matières
1 Introduction 1
1.1 Le cycle de l’eau sur les continents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2 Comment modéliser ce cycle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.3 Approche proposée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
vii
TABLE DES MATIÈRES
10 Références 221
viii
Liste des figures
1.1 Le cycle de l’eau sur les continents avec les flux moyens à l’échelle mondiale . . . . . 2
1.2 Modèle conceptuel de la circulation de l’eau dans les milieux souterrains en fonction
du climat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.3 Le rôle des systèmes souterrains d’après Y. Fan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.4 Comparaison entre le débit de rivière et les pluies efficaces sur différents bassins
versants bretons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.5 Représentation schématique de l’évolution possible de la loi de probablité d’un phé-
nomène hydrologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
1.6 Schéma de la Zone Critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.7 Variabilité spatiale des bassins et variabilité temporelle des processus associés . . . 11
1.8 Niveau piézométrique moyen d’après un modèle homogène et un modèle contenant
une zone moins perméable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.9 Comparaison des échelles intégrées par différentes méthodes d’observation . . . . . 13
1.10 Schéma de la représentativité des forages et du problème d’inversion en contexte
hétérogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.11 Comparaison du niveau piézométrique entre un modèle d’aquifère homogène et hé-
térogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
1.12 Schéma des flux hydrologiques dans les sols . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.13 Contribution des évènements journaliers aux flux totaux en France . . . . . . . . . . 22
1.14 Signal fréquentiel des mesures météorologiques et hydrologiques . . . . . . . . . . . 25
1.15 Schéma sur la complexité optimale des modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
ix
LISTE DES FIGURES
x
LISTE DES FIGURES
6.4 Réponse au pompage dans les deux couches du modèle de Ploemeur à pas journalier 159
6.5 Schéma conceptuel de l’inclinomètre LB1 sur Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
6.6 Comparaison entre le tilt N75E et la piézométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161
6.7 Schéma du modèle hydromécanique utilisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164
6.8 Carte piézométrique de différents modèles hydrogéologiques pour modéliser le tilt . 165
6.9 Représentation des meilleures simulations hydromécaniques obtenues par rapport
au tilt N75E normalisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
6.10 Évolution du critère minimal en fonction de certains paramètres du modèle n°4 . . 168
6.11 La meilleure représentation du tilt N75E normalisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170
6.12 Évolution du critère minimal en fonction du coefficient d’emmagasinement de la
zone moins perméable et du type d’observation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
7.1 Exemple de carte des concentrations obtenues avec le modèle de Ploemeur . . . . . 177
7.2 Erreur minimale du modèle de transport des CFC12 en fonction de la porosité du
modèle homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178
7.3 Carte des concentrations en CFC obtenues avec un modèle hétérogène . . . . . . . . 179
7.4 Carte des concentrations en CFC obtenues avec un modèle à deux couches . . . . . 179
7.5 Évolution temporelle de la concentration en CFC113 dans les forages pour différents
modèles conceptuels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
7.6 Définition d’une zone de concentration imposée sur le modèle de Ploemeur . . . . . 181
7.7 Évolution de la corrélation entre les données observées et simulées en fonction du
volume du réservoir chimique proche du pompage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181
xi
LISTE DES FIGURES
8.17 Contribution souterraine normalisée par les précipitations d’après la dernière ver-
sion du modèle couplé sur le bassin du Rhin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 208
8.18 Norme des flux latéraux souterrains en chaque maille du modèle couplé . . . . . . . 209
xii
Chapitre 1
Introduction
Sommaire
1.1 Le cycle de l’eau sur les continents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.1.1 Introduction générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.1.2 La Zone Critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.1.3 L’hétérogénéité : une caractéristique majeure du sous-sol . . . . . . . . . . . 9
1.1.4 La redistribution de l’eau à travers différents processus . . . . . . . . . . . . 15
1.1.5 Les forçages temporels : impact de l’Homme et du climat . . . . . . . . . . . 21
1.2 Comment modéliser ce cycle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.2.1 Enjeux de la modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.2.2 Les principales approches de modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.2.3 Les incertitudes dans la modélisation hydrologique . . . . . . . . . . . . . . 29
1.2.4 Quelle complexité pour les modèles ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
1.2.5 Les observations disponibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
1.3 Approche proposée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
1.3.1 Problématiques étudiées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
1.3.2 Démarche proposée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
1.3.3 Plan de la thèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
1
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Le cycle de l’eau sur les continents est globalement bien connu. L’eau s’évapore à la surface
des océans, puis elle est transportée par l’atmosphère avant de retomber quelques jours plus tard
sur les océans et les continents. Une partie de cette eau s’évapore à nouveau de la surface des
continents par évaporation au niveau des sols et par la transpiration des plantes : on parle alors
d’évapotranspiration. Ainsi, près de 60 % des précipitations se retrouvent de nouveau dans la cir-
culation atmosphérique par le processus d’évapotranspiration. L’autre partie des précipitations
alimente les cours d’eau par ruissellement ou s’infiltre dans les sols avant d’alimenter à son tour
les rivières. Les estimations des flux annuels moyens à l’échelle mondiale sont issues d’observa-
tions locales éventuellement extrapolées par des modèles ou des bilans de masse (figure 1.1). Mais
les flux hydrologiques restent très variables dans le temps et l’espace, ils sont dépendants de nom-
breuses variables et donc difficilement prédictibles. Ils varient dans le temps sous l’action du cli-
mat mais sont modulés de façon incertaine par les réservoirs terrestres : les couvertures neigeuses,
les lacs naturels et artificiels, la partie superficielle du sol et les aquifères souterrains [Kuppel et al.,
2017].
F IGURE 1.1 – Le cycle de l’eau sur les continents avec les flux moyens à l’échelle mondiale (valeurs d’après
De Graaf [2016]; Oki and Kanae [2006]; Schmied et al. [2016], généralement sans considérer l’Antarctique et
le Groenland). La "Recharge", modélisée par Wada et al. [2010], désigne l’eau s’infiltrant depuis les sols vers
les aquifères, elle est aussi égale à l’écoulement souterrain moyen ou encore à la "décharge" des eaux souter-
raines (somme des flèches grises). La "Consommation" désigne les prélèvements anthropiques brutes d’après
l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture [2016] (FAO), incluant l’évaporation des
réservoirs mais n’incluant pas l’eau d’irrigation qui repart dans les nappes.
L’eau tombant des nuages suit différents chemins : interception par les végétaux, stockage
sous forme de neige, évapotranspiration, ruissellement ou infiltration dans le sol. Ensuite, l’eau
évaporée apportera de nouvelles pluies au centre des continents, la neige fondra ou se sublimera
et approvisionnera les rivières, tout comme l’eau ruisselée, avant de rejoindre les océans. Et la
boucle sera bouclée. Non ! Qu’advient-il exactement de l’eau infiltrée dans les sols ? Est-elle sto-
2
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
ckée sous terre et immédiatement puisée par les plantes ? Comment expliquer que les rivières
coulent toujours pendant les sécheresses ? Comment expliquer les sources et les zones humides
permanentes ? La figure 1.1 montre que l’eau infiltrée sous terre participe à nouveau au cycle hy-
drologique. Toutefois, les interactions entre les systèmes souterrains et la surface, dont les flux
rechargeant les nappes, sont très mal contraintes à différentes échelles spatiales et temporelles. Il
en résulte que la représentation des processus de redistribution des précipitations, avant l’évapo-
transpiration et l’écoulement dans les rivières, est incertaine.
La partie souterraine et invisible du cycle de l’eau joue un rôle important. En général, les hy-
drogéologues désignent par le terme aquifère les formations géologiques suffisamment poreuses
et perméables pour que l’eau puisse s’y écouler, voire y être exploitée. La notion de ressource en
eau des aquifères caractérise l’hydrogéologie qui consiste à chercher et comprendre les réservoirs
souterrains afin de les gérer durablement. En réalité, toutes les formations sont plus ou moins
poreuses et alimentées directement ou indirectement par les précipitations.
Sur Terre, les aquifères constituent un volume d’eau très important. Ils sont avec les glaces le
principal réservoir d’eau douce de la planète (de l’ordre de 20.106 km 3 , soit une lame d’eau d’en-
viron 180 m sur la surface des continents) [Aeschbach-Hertig and Gleeson, 2012; Gleeson et al.,
2016; Oki and Kanae, 2006]. L’eau s’y écoule à des vitesses variant sur plus d’une dizaine d’ordres
de grandeur autour d’une moyenne de quelques mètres par jour, sur des distances allant du mètre
au millier de kilomètres [Alley et al., 2002]. Cette grande diversité des vitesses d’écoulement s’ex-
plique par la grande gamme de perméabilités des roches [Gleeson et al., 2011b], c’est à dire leur
capacité à conduire l’eau à travers la porosité ou des fractures. La figure 1.2 illustre conceptuelle-
ment la circulation de l’eau à travers les milieux souterrains.
F IGURE 1.2 – Modèle conceptuel de la circulation de l’eau dans les milieux souterrains en fonction du climat.
À gauche : le taux de recharge de l’aquifère par les pluies efficaces est élevé. À droite : le taux de recharge de
l’aquifère par les pluies efficaces est faible. Modifié d’après Goderniaux et al. [2013].
Les systèmes aquifères sont alimentés par l’eau qui s’infiltre dans les sols pendant les pluies et
à travers les lacs et rivières. Mais l’eau qui recharge les aquifères ressort ensuite en réalimentant
la surface de la Terre, sans cela le niveau des nappes serait en constante augmentation ! Ce cycle
hydrologique souterrain est essentiel dans la redistribution temporelle et spatiale de l’eau à la sur-
3
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Lorsque le niveau d’eau (dit piézométrique) dans les aquifères est suffisamment haut et ren-
contre la zone racinaire, l’eau souterraine peut être utilisée par les plantes qui vont alors la res-
tituer à l’atmosphère par transpiration. À ce titre, Fan [2015]; Fan et al. [2017] montrent que les
niveaux piézométriques contraignent la profondeur des racines et donc la distribution des diffé-
rents types de végétaux sur les continents (figure 1.3). D’autres auteurs ont modélisé la régulation
par les eaux souterraines de l’humidité de la partie superficielle du sol [Keune et al., 2016; Maxwell
and Condon, 2016], essentielle aux végétaux. Enfin, le niveau d’eau dans l’aquifère est parfois suf-
fisamment élevé localement pour affleurer en surface. Par conséquent, l’eau souterraine jaillit ou
suinte du sol créant ainsi des sources ou des zones humides et alimentant certaines portions de
rivières. Ce processus se produit généralement par convergence des écoulements souterrains vers
les creux topographiques (figure 1.2).
La figure 1.3 décrit qualitativement le rôle des systèmes aquifères sur la redistribution de l’eau
en surface. Les aquifères transportent l’eau latéralement de différentes façon en fonction du cli-
mat et des propriétés des systèmes souterrains. Ils la redistribuent aux rivières et aux plantes en
fonction de la profondeur des niveaux d’eau. La disponibilité en eau à la surface s’écarte donc
sensiblement des gradients climatiques et dépend d’échelles spatiales différentes.
Cependant, la contribution de ces systèmes souterrains au débit des rivières fait toujours dé-
bat. Quelle part des pluies ruisselle réellement en surface ? Sur la part qui s’infiltre, combien ali-
mente réellement les aquifères ? Si il ne fait aucun doute que le débit des cours d’eau est fourni
par les pluies, les mécanismes par lesquels les bassins versants restituent ces volumes de pluie
dans le temps demeurent peu quantifiables [Jasechko et al., 2016]. Principalement car les milieux
souterrains, non observables directement, sont hétérogènes à différentes échelles. Les forçages
temporels et l’hétérogénéité des milieux naturels rendent les comportements hydrologiques com-
plexes et non linéaires. Il est donc difficile de généraliser des observations locales ou de modéliser
4
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.3 – Le rôle des systèmes souterrains d’après Y. Fan. Relation schématique entre la profondeur des
racines des plantes et le niveau piézométrique des aquifères. Modifié d’après Fan [2015].
physiquement les processus à l’échelle des bassins versants. D’autant plus que les incertitudes sur
les mesures se répercutent dans les modèles et leurs conclusions.
D’après la figure 1.2, les circulations souterraines transgressent plus ou moins les frontières
des bassins hydrographiques définis par la topographie. Ces circulations impactent donc les bi-
lans hydrologiques des bassins versant. Certaines zones semblent déficitaires de ces interactions
avec les systèmes souterrains, d’autres semblent bénéficiaires. Ainsi, les pluies locales ne sont pas
les seules à alimenter les rivières dans les bassins versants. En effet, au premier ordre les bassins
hydrogéologiques sont une réplique des bassins hydrographiques de surface (ou topographiques)
[Tóth, 1963]. Cependant, la structure des écoulements profonds diffère légèrement de celle de la
surface et impacte les bilans hydrologiques en surface.
Des observations donnent une idée de l’amplitude de ces interactions. Par exemple, le ratio du
débit de rivière sur les pluies efficaces (la pluie moins l’évapotranspiration modélisée) a été cal-
culé sur différents bassins versants bretons (figure 1.4). Ce ratio est équivalent au bilan de masse
en surface du bassin versant. Si le ratio est supérieur à 1, cela signifie qu’une partie du débit sor-
tant du bassin versant provient des bassins voisins. Inversement, si le ratio est inférieur à 1, cela
signifie qu’une part de la pluie tombée sur le bassin s’échappe vers ses bassins voisins situés plus
en aval. Il apparaît que ce ratio s’éloigne significativement de 1 pour les bassins versants dont la
superficie est inférieure à 1000 km2 . Le cycle hydrologique est donc en partie décorrélé de la sur-
face. D’après le graphique, plus le bassin est petit et plus le déséquilibre du bilan de masse peut
être élevé soulignant l’importance grandissante des échanges souterrains entre les bassins. Pour
des bassins d’une centaine de kilomètres carrés, la contribution moyenne (positive ou négative)
des échanges souterrains nets est ainsi estimée à environ 20 % des précipitations efficaces. On
note également l’incertitude sur les flux à plus grande échelle : les précipitations, l’évapotranspi-
ration et les mesures de débit. En théorie, on s’attendrait à ce que le ratio tende vers 1 pour les
grands bassins versants qui ne sont que l’agrégation de tous les petits bassins qui les composent.
D’autres problèmes apparaissent donc par cette approche, notamment l’estimation de l’évapo-
transpiration par des modèles et la non prise en compte des différentes formes d’anthropisation
des bassins.
Schaller and Fan [2009] ont réalisé le même type d’étude à l’échelle des États-Unis. Sur 1555
bassins d’une superficie allant de 10 à 100000 km2 , environ 30 % ont un bilan de masse en surface
qui dévient de plus de 50 %. Il n’est pas rare que le débit dépende significativement des échanges
souterrains entre les bassins même à l’exutoire de grands bassins de 1000 à 100000 km2 . La varia-
bilité est donc beaucoup plus grande aux États-Unis qu’en Bretagne où le contexte géologique et
5
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.4 – Comparaison entre le débit de rivière et les pluies efficaces sur différents bassins versants bretons ;
moyenne sur la période 1990-2010. Les pluies efficaces sont égales aux pluies moins l’évapotranspiration mo-
délisée d’après le modèle Surfex [Habets et al., 2008] multipliées par l’aire du bassin. Les mesures de débits
sont issues du site http ://hydro.eaufrance.fr. Un ratio supérieur à 1 indique un apport souterrain d’un bassin
voisin. On note que le ratio ne semble pas tendre vers 1 pour les grands bassins versants.
climatique évolue peu dans l’espace. Les auteurs de ces travaux concluent que la géologie semble
le critère déterminant pour expliquer ces ratios. De plus, les échanges souterrains entre les bas-
sins versants ont tendance à diminuer lorsque les précipitations moyennes augmentent comme
le suggère la figure 1.2. Ce type d’observation illustre la variabilité des comportements en fonction
de l’échelle mais aussi l’importance des systèmes souterrains à travers une mesure indirecte de la
contribution des aquifères.
Pour conclure sur cette brève présentation des systèmes aquifères, on peut dire que leur contri-
bution est peu quantifiable et nécessite d’être mieux comprise. À l’image du climat sur la figure 1.2,
les propriétés des milieux souterrains contrôlent les niveaux piézométriques et la redistribution
latérale de l’eau. Par conséquent, elles impactent la végétation et la distribution des rivières, plus
globalement la disponibilité en eau sur les continents. Les aquifères atténuent la variabilité clima-
tique à court-terme en restituant les précipitations avec des temps de réponse assez étalés permet-
tant de stocker les précipitations en période humide et d’alimenter les rivières en période sèche. Il
est ainsi attendu que dans le temps mais aussi dans l’espace, la disponibilité en eau ne suive pas
tout à fait les gradients climatiques car elle est en partie contrôlée par les écoulements souterrains.
L’un des objectifs de ce travail est donc de comprendre et d’évaluer le rôle des systèmes aquifères
au sein du cycle hydrologique.
La chimie de l’eau
Le cycle de l’eau n’est pas uniquement une question de quantité. La qualité de l’eau est primor-
diale pour l’Homme et les écosystèmes. Sa composition évolue au cours de son parcours, principa-
lement au moment où elle entre en contact avec les sols et les roches. Il y a de nombreux exemples
de la dégradation de cette qualité dont les plus célèbres sont les rejets en rivière et les différentes
6
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
pollutions de surface comme les nitrates. L’évolution de la chimie des eaux souterraines est un
problème très complexe. Elle est liée aux chemins de l’eau dans les milieux souterrains, à la ré-
activité des espèces avec la roche et les autres espèces qui circulent dans les milieux souterrains
[Aquilina et al., 2012; Roques et al., 2018]. À plus petite échelle, les processus de diffusion et l’ac-
tivité biologique dans les sols sont souvent déterminants pour la dégradation des contaminants
[Babey et al., 2017]. Malgré cette complexité, les différents concepts théoriques sont assez bien
établis mais leur représentation à l’échelle des bassins reste un enjeu majeur.
L’eau participe activement au cycle des éléments chimiques par l’altération physique et chi-
mique des roches. En apportant des éléments essentiels aux organismes vivants, la circulation
de l’eau constitue un processus physique majeur de la vie sur Terre. L’altération des roches par
l’eau et le développement des racines aboutit aussi à la formation des sols plus propices à la vie.
À plus ou moins long terme, le cycle de l’eau est lui-même impacté par les déstabilisations qu’il
engendre sur les continents, tous les processus étant liés à différentes échelles spatiotemporelles.
En érodant les sols et les lits des rivières, l’eau modifie son chemin, en altérant les roches souter-
raines et les fractures, elle facilite son passage (ou le contraire si les conditions permettent une
précipitation des solutés). Il existe aussi des effets de seuil à partir desquels la connexion entre
les eaux souterraines et la surface peut être altérée de façon conséquente. Ce qui peut en retour
influencer l’humidité du sol et la disponibilité en eau pour l’évapotranspiration des végétaux. Si
l’évapotranspiration est modifiée, une quantité d’eau différente rejoint l’atmosphère et le climat
est alors perturbé.
Les non-linéarités des processus et leur interconnexion sont difficiles à mesurer et modéliser.
D’une part parce qu’elles sont souvent révélées par des conditions extrêmes sur lesquelles nous
avons peu de points de repères. D’autre part parce qu’elles demandent une vision intégrée des dif-
férents compartiments du cycle hydrologique. Dans une récente synthèse sur l’état des connais-
sances en hydrologie, Sivapalan [2018] souligne par exemple l’incapacité des modèles physiques
classiques à tenir compte des rétroactions entre disponibilité en eau et végétation.
L’exemple des prédictions de l’impact du réchauffement climatique illustre bien cette notion
de dépendance entre l’atmosphère, les végétaux, les sols et la profondeur, mais aussi entre les
processus physiques, chimiques et biologiques. Par exemple, la concentration en CO2 dans l’at-
mosphère modifie le taux de transpiration des plantes et les échanges radiatifs [Kruijt et al., 2008;
Zhu et al., 2017]. Autre exemple, la disponibilité en eau dans les sols contrôle l’évapotranspiration
[Jung et al., 2010], l’eau disponible pour les plantes de manière générale, étant elle-même régu-
lée par les écoulements souterrains [Keune et al., 2016; Kollet and Maxwell, 2008; Maxwell and
Condon, 2016]. Comme le bilan d’énergie en surface est contrôlé par la disponibilité en eau, on en
déduit que son évolution est difficile à prédire.
Les modèles climatiques tentent aujourd’hui de prendre en compte les principales rétroac-
tions entre les processus. Il n’en demeure pas moins une forte incertitude sur la modification du
cycle de l’eau, dont les précipitations, et donc la redistribution des eaux continentales. Cette mo-
dification pourrait être importante et impacterait en retour le climat. Une déstabilisation du ré-
gime des pluies entraînera une modification de la redistribution des eaux dans le temps et sur les
continents. Mais quelle sera l’amplitude de cette redistribution ? La figure 1.5 (d’après de Marsily
[2008]) illustre les évolutions éventuelles de la courbe de probabilité d’une variable hydrologique
telle que les précipitations ou la température de l’air. Nous considérerons qu’il s’agit des précipi-
tations. La courbe verte est alors un simple décalage du climat actuel. En revanche dans le cas où
la distribution deviendrait celle de la courbe rouge, l’augmentation de la moyenne des pluies s’ac-
compagnerait d’une augmentation de la fréquence des évènements rares de sécheresse (à gauche)
et de crues (à droite). Dans cette hypothèse, comment les systèmes hydrologiques répondront-ils
à la perturbation ?
7
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.5 – Représentation schématique de l’évolution possible de la loi de probablité d’un phénomène
hydrologique tel que les précipitations annuelles ou le débit d’une rivière. D’après de Marsily [2008].
Le cycle hydrologique est donc intimement lié aux cycles géologiques par la circulation de
l’eau dans les roches. De ce fait, il est également lié aux cycles biologiques car il transporte avec
l’eau les nutriments nécessaires à la vie. Nous avons montré précédemment qu’il était égale-
ment connecté au cycle climatique à travers quelques rétroactions, principalement par le proces-
sus d’évapotranspiration. La science de ce système complexe est donc interdisciplinaire comme
l’illustre la figure 1.6. Aujourd’hui on la nomme la science de la "zone critique".
Ce terme ("Critical Zone" en anglais) a été proposé en 2001 par le National Resarch Council
aux États-Unis [Council and Others, 2001]. Il définit la zone, entre le ciel et les roches souterraines
imperméables, au sein de laquelle se produisent beaucoup de processus interconnectés à toutes
les échelles de temps et d’espace. La figure 1.6 propose une vision schématique d’une zone cri-
tique en particulier et énumère quelques disciplines impliquées. Le terme "critique" fait référence
à l’interface que constitue cette zone qui contrôle les nombreux processus liés à la vie sur Terre.
Il fait aussi référence à la fragile ressource que constitue notre environnement. Le concept vise à
rassembler la communauté scientifique sur les questions d’environnement qui prennent de plus
en plus d’importance avec l’augmentation de la population et les risques liés au changement cli-
matique. L’objectif est de faire communiquer les différents domaines étudiés par les équipes de
recherche pour comprendre le comportement global de cette zone critique.
Comprendre la zone critique reste un enjeu de taille pour les "critical-zonists". Différents pro-
jets ont vu le jour, à l’échelle américaine avec les "Critical Zone Observatories", ou encore avec
l’infrastructure OZCAR ("Observatoire de la Zone Critique Applications et Recherches") en France.
Ces projets se structurent autour de sites instrumentés implantés dans différents contextes (on
parlera d’observatoires). Dans ces observatoires, des variables telles que les données météoro-
logiques, les débits de rivière, la géochimie des eaux ou les propriétés géophysiques des sols sont
mesurées quasiment en continu. Différentes disciplines sont donc impliquées sur des mêmes sites
d’étude afin de mieux intégrer les interactions entre chaque compartiment de la zone critique. On
verra à travers l’exemple de l’observatoire de Ploemeur-Guidel (en Bretagne) que l’approche plu-
ridisciplinaire est essentielle pour mieux comprendre les processus.
8
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.6 – Schéma de la Zone Critique (http ://www.ozcar-ri.org/) ; sa localisation, ses processus et les dif-
férentes disciplines impliquées ; on pourrait rajouter de nombreuses choses en fonction du contexte géogra-
phique et de l’échelle étudiée.
Le cycle hydrologique est caractérisé par une variabilité spatiale importante. En particulier,
une caractéristique majeure des systèmes aquifères est l’hétérogénéité à différentes échelles spa-
tiales, de l’échelle du pore à l’échelle régionale [Seyfried and Wilcox, 1995]. Pour parler plus pré-
cisément, nous allons définir plusieurs termes qui ont trait à la modélisation : l’échelle, la résolu-
tion et l’hétérogénéité, ce qui nous amènera à présenter également le terme de "variabilité sous-
maille".
1. L’échelle fait ici référence à la taille du système hydrologique. Les flux présentés sur la fi-
gure 1.1 font par exemple référence à l’échelle mondiale. Ces travaux de thèse se focalisent
entre l’échelle du kilomètre carré et celle d’un fleuve comme celui du Rhin.
2. La résolution est en général fonction du processus étudié mais est limitée par l’échelle.
Pour une échelle donnée, la résolution la plus basse doit rester plus fine que l’échelle des
phénomènes physiques étudiés. Par exemple, Rouholahnejad Freund and Kirchner [2017]
montrent que les reliefs des Alpes suisses n’existent plus dans les modèles lorsque leur réso-
lution est supérieure à 100 km. Or, on peut supposer que ces reliefs ont une importance pour
l’hydrologie de la région. La résolution ne peut pas non plus être trop fine car cela demande
beaucoup de puissance de calcul et nécessite de connaître la distribution des propriétés as-
sociées à cette résolution. Par exemple, rien ne sert de travailler à une résolution de 100 m si
on ne dispose que d’une carte topographique à 1 km de résolution. On remarque que cette
définition s’appliquerait également à la résolution temporelle étant donnée que l’on étudie
rarement l’échelle annuelle avec une résolution temporelle d’une seconde.
3. L’hétérogénéité se réfère de manière générale aux variations spatiales des propriétés d’un
milieu, elle mène à la variabilité des flux hydrologiques. Dans ce travail, elle porte princi-
palement sur la perméabilité, la porosité et l’épaisseur des sols et des roches. Elle est le ré-
sultat des processus géologiques de sédimentation, de tectonique et d’altération. On peut
dire qu’elle se réfère souvent à des hétérogénéités dont on suppose l’existence mais dont on
9
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
ignore la distribution.
4. La variabilité sous-maille ("subgrid" en anglais [Beven, 1989]) désigne les variations des
propriétés à une résolution plus fine que celle du modèle et qu’on soupçonne d’impacter les
processus. Lorsque ces processus sous-maille sont importants, les résultats dépendent de la
résolution du modèle, ce qui est problématique. La solution est d’améliorer la résolution ou
de prendre en compte différemment les processus sous-maille. On peut citer l’exemple de
TOPMODEL [Ambroise et al., 1996; Beven and Kirkby, 1979] qui permet, au sein des modèles
hydrologiques de surface, de représenter à une échelle plus large la distribution de l’eau
dans les sols due aux écoulements souterrains.
Si on délaisse la partie atmosphérique, les pluies tombées sur les continents se redistribuent
en fonction de la pente des sols, de la végétation, et surtout de manière incertaine en fonction
des propriétés du sous-sol. Or sous nos pieds, ces propriétés varient fortement. Les structures
géologiques qui nous intéressent principalement présentent la caractéristique d’être hétérogènes
à différentes échelles. Ainsi, les flux et les stocks souterrains sont inégalement distribués. Ils in-
fluencent le comportement hydrologique en surface de manière encore indéterminée. De façon
rigoureuse, tout milieu est hétérogène à un certain degré. Mais la question scientifique consiste
à comprendre comment et à partir de quelle taille l’hétérogénéité du milieu souterrain contrôle
le bilan en eau à l’échelle qui nous intéresse. Pourquoi ? Parce que l’hétérogénéité est partie inté-
grante du cycle hydrologique et qu’on ne peut pas la décrire à toutes les échelles.
Les propriétés des sols, importantes pour le processus de recharge des aquifères, et celles des
sous-sols sont parfois très différentes d’un mètre à l’autre et varient avec la profondeur. La terre
est plus ou moins tassée, argileuse, caillouteuse, épaisse, fissurée, poreuse [Beven and Germann,
1982, 2013] et de même pour les roches aquifères sous-jacentes [de Marsily et al., 2005]. Dans les
aquifères, les structures géologiques où s’écoulent l’eau sont de différentes tailles. Cette variabilité
est due à l’histoire géologique différente de chaque région du globe. C’est principalement l’hété-
rogénéité au sein des mêmes lithologies qui demeure inconnue. Au sein d’une unité géologique,
dont la taille caractéristique varie environ entre 100 m et 100 km, les propriétés peuvent varier à
cause de caractéristiques initiales différentes puis à cause des contraintes tectoniques, de l’érosion
ou d’une altération plus localisée.
Les roches fracturées et les systèmes karstiques représentent le maximum de degré d’hétéro-
généité pour les systèmes hydrogéologiques. Dans ces systèmes, les flux souterrains sont extrême-
ment localisés dans des réseaux de fractures ou des conduits karstiques plus ou moins denses [Le
Borgne et al., 2006]. Il ne fait aucun doute que les pluies infiltrées rejoignent ces réseaux et les che-
naux les plus conducteurs jusqu’à des exutoires formant généralement des sources. Néanmoins,
la connaissance de ces réseaux souterrains et leur compréhension demeurent assez faibles bien
qu’ils constituent 27 à 42 % de la surface continentale [Gustafson and Krásný, 1994; Hartmann
et al., 2014].
Il convient de décrire plus précisément les milieux fracturés étant donné qu’une large partie
de ce travail porte sur ce type de contexte dont les questionnements sont généralisables à l’en-
semble des terres. La compréhension de ces systèmes reste limitée du fait de la complexité des
réseaux de fractures multi-échelles et de l’impossibilité de les observer directement. En effet, il est
difficile d’avoir une représentation du milieu qui soit robuste physiquement à partir des seules
observations. Il est donc aussi difficile de développer des modèles physiques reproduisant les
comportements hydrologiques observés. La structure de tels milieux et leurs propriétés hydrody-
namiques, peuvent sembler chaotiques. Des études principalement numériques mais s’appuyant
sur des données de terrain ont explicité les liens entre les écoulements et les caractéristiques géo-
métriques des réseaux de fractures. Ces réseaux ont des densités de fractures variables plus ou
moins connectées. Ils hébergent des réseaux de petites fractures au sein de plus grandes struc-
10
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
tures ([Bour and Davy, 1997]). De plus, des tests hydrauliques et des modèles décrivant l’écou-
lement et le stockage des eaux souterraines, ont montré que les propriétés physiques pouvaient
varier en fonction de l’échelle spatiale ! En pratique, cette échelle est liée à la durée et l’amplitude
des tests [Le Borgne et al., 2006]. Pour résumer, le comportement hydrologique des systèmes frac-
turés peut être dicté par des grandes structures d’écoulements préférentiels, des petites fractures
nombreuses et bien connectées, ou bien les deux [Davy et al., 2006].
De manière plus générale pour les systèmes hydrologiques hétérogènes, la notion d’échelle
d’observation est très importante. La complexité de la modélisation réside en effet dans le fait que
l’échelle d’observation ne correspond pas forcément à l’échelle du processus principal [Blöschl,
2001]. Il est ainsi difficile de passer d’une compréhension locale à une compréhension globale et
ce constat est également valable pour l’échelle temporelle comme nous le verrons par la suite. La
figure 1.7 illustre ces différentes échelles spatiales et temporelles. Cependant, les limites proposées
sont grossières et masquent des propriétés très variables et des temps caractéristiques imbriqués.
On pourra se référer à Ficchí [2017] pour une introduction plus complète de la notion d’échelle
temporelle dans le cadre de la modélisation hydrologique.
F IGURE 1.7 – Variabilité spatiale des bassins (en haut) et variabilité temporelle des processus associés (en bas).
D’après Blöschl and Sivapalan [1995].
Dans les aquifères par exemple, l’hétérogénéité signifie la présence de zones de perméabili-
tés et de porosités différentes. La figure 1.8 donne un aperçu de l’impact d’une zone moins per-
méable sur les niveaux piéozométriques à travers un modèle d’aquifère simple en une dimension.
La courbe marron est obtenue avec un modèle homogène, elle montre que, pour une perméabi-
lité et un taux de recharge donnés, l’aquifère alimente une rivière en x=1500 m. Dans le cas homo-
gène, la section alimentant cette rivière s’étend sur 2500 m, le débit de rivière résultant est alors de
700 m2 /an (en 1D). En revanche, la courbe bleue est obtenue après l’ajout d’une zone moins per-
méable dans l’aquifère. Le niveau piézométrique a considérablement augmenté et on note qu’en
principe il devrait donner lieu à deux nouvelles rivières en x=2200 m et en x=3600 m environ. La
11
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.8 – Niveau piézométrique moyen d’après un modèle homogène [Bresciani et al., 2016] et un modèle
contenant une zone moins perméable ; on note une différence importante entre les deux simulations ; en prin-
cipe la piézométrie serait sous la topographie dans le cas hétérogène et elle donnerait probablement naissance
à deux rivières en x=2200 m et x=3600 m.
La variabilité des propriétés et celle qui en découle sur les flux sont une limite directe à la
compréhension et à la modélisation des phénomènes naturels dont les principes physiques sont
pourtant connus. Cela s’explique pour deux raisons. D’une part parce que cette variabilité est peu
connue et qu’elle mène à des phénomènes complexes, d’autre part parce qu’aucune méthode
d’observation (ou de caractérisation du milieu) ne couvre assez d’échelles comme le souligne la
figure 1.9. Malgré leur aspect ponctuel, les observations peuvent balayer différentes échelles en
fonction de leur caractère intégrateur et du produit répartition-densité des points de mesures.
Néanmoins, la figure 1.9 ne retranscrit pas le fait que ces méthodes d’observations sont sensibles
à des processus différents, leur degré d’information n’est donc pas le même. Il n’y a ainsi pas de
continuité évidente entre les différents observables 1 . La partie supérieure de la figure illustre éga-
lement le lien entre la représentativité spatiale et temporelle. La méthode de mesure s’inscrit gé-
néralement dans l’étude d’un système dont l’échelle temporelle caractéristique dépend de la taille
caractéristique.
La variabilité spatiale des propriétés et des flux complexifie donc la compréhension des don-
nées mesurées. Il est difficile de décrire et comprendre les milieux hétérogènes à partir de données
ponctuelles comme le schématise la figure 1.10. Dans les systèmes fracturés, la représentativité
spatiale des mesures est généralement plus petite que les structures principales fonctionnant en
trois dimensions sur des échelles de la centaine de mètres à plusieurs kilomètres. Plus largement,
les échelles d’intérêt s’étendent de la centaine de mètres au continent pour englober des questions
d’interactions entre les aquifères et la surface, de gestion de la ressource, de prévision de débit de
rivières ou de rétroactions sur le climat par exemple. Une bonne compréhension implique d’être
capable de modéliser plusieurs observations déterminantes pour la zone critique comme la dis-
ponibilité en eau et la distribution des flux hydrologiques. La modélisation apparaît donc comme
un outil important pour représenter le milieu souterrain et pour intégrer ces observations.
Pour conclure, la modélisation hydrologique des systèmes hétérogènes à différentes échelles
1. Le nom observable n’existe pas officiellement, il fait ici référence aux variables de la zone critique que l’on est
capable de mesurer à l’aide d’un suivi instrumental
12
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.9 – Comparaison des échelles intégrées par différentes méthodes d’observation. L’échelle spatiale
intégrée par une observation ou une expérience est en partie liée à l’échelle temporelle (et aux propriétés du
système). Modifié d’après Bense et al. [2013]; Schuite [2016].
F IGURE 1.10 – Schéma de la représentativité des forages et du problème d’inversion en contexte hétérogène.
D’après F. Day-Lewis, USGS.
13
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Roques et al., 2014b]. L’impact de l’hétérogénéité sur la recharge des aquifères est aussi très étudié
pour des questions de protection de la ressource qui nécessitent de connaitre la zone d’alimenta-
tion des captages. De plus, dans une optique de prédiction, si la recharge est fortement localisée
dans des chemins préférentiels [Beven and Germann, 2013; Gleeson et al., 2009; Lee et al., 2006;
Sililo and Tellam, 2000], il est possible qu’elle dépende de façon fortement non linéaire aux préci-
pitations.
Il y a plusieurs façons d’aborder les systèmes hétérogènes. Leur représentation est le fruit
d’une reconstitution de l’histoire géologique de la zone d’étude à travers les affleurements ro-
cheux en surface, les forages et l’imagerie géophysique [Bense et al., 2013]. À différentes échelles,
des tests hydrauliques et des traçages peuvent également permettre d’identifier les connexions
souterraines et les propriétés hydrodynamiques équivalentes (figure 1.9). Nous le verrons à tra-
vers la présentation de l’observatoire de Ploemeur.
La réponse des milieux hétérogènes est complexe d’autant qu’on ne peut pas caractériser tout
l’espace, en particulier sous la surface du sol. Moyenner les propriétés peut parfois suffire selon
les objectifs (estimer et prévoir un débit de pompage , un transport de soluté, un niveau d’eau...)
si la variabilité spatiale des propriétés est faible. On parlera alors de milieu homogène équivalent.
Dans ce cas, encore faut-il être capable de déterminer les paramètres équivalents qui ne sont pas
forcément égaux à la moyenne du champ de propriété. Généralement, il est difficile d’associer des
propriétés physiques qui ne sont mesurables que localement à des structures qui vont de l’échelle
du mètre à plusieurs kilomètres. Bien que depuis quelques années, certains auteurs tentent d’at-
tribuer des paramètres à chaque grande classe de sol et de roche, à une résolution de l’ordre de 1
km2 [Allen et al., 1998; Gleeson et al., 2014, 2011b].
Parfois, il semble aussi intuitif que le comportement d’un système hétérogène ne puisse pas
être équivalent à celui d’un système homogène. En particulier quand il s’agit de modéliser la non-
linéarité des relations entre la surface et les systèmes profonds. On peut d’ailleurs citer sur le su-
jet les travaux de Rouholahnejad Freund and Kirchner [2017] réalisés à partir d’observations à
l’échelle régionale et ceux de Kollet [2009] basés sur un modèle théorique à l’échelle d’une co-
lonne de sol.
Dans le même ordre d’idée, la partie supérieure de la figure 1.11 illustre l’impact potentiel
de l’hétérogénéité du champ de perméabilité sur la réponse d’un aquifère. L’impact de l’hétéro-
généité est comparé à travers un modèle 1D en régime transitoire. On compare en particulier le
niveau piézométrique simulé lorsque le milieu est homogène ou lorsque la distribution spatiale
de la perméabilité suit une variabilité aléatoire sur deux ordres de grandeurs avec une longueur
caractéristique de 100 m. On remarque que malgré une hétérogénéité faible, les interactions avec
la topographie et la réponse temporelle de l’aquifère sont sensiblement différentes par rapport au
modèle homogène. La partie inférieure de la figure 1.11 illustre quant à elle l’impact de la résolu-
tion du modèle. On note que le comportement modélisé pour un système homogène est différent
selon la résolution. Cela souligne l’importance de la variabilité sous-maille de la topographie. La
manière de modéliser l’hétérogénéité et la variabilité sous-maille est donc déterminante dans la
représentation des processus hydrogéologiques.
14
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.11 – Comparaison du niveau piézométrique entre un modèle d’aquifère homogène et hétérogène (en
haut). Dans le cas hétérogène, le logarithme de la transmissivité suit une loi normale avec une taille caracté-
ristique de 100 m. Dans le cas homogène la simulation a également été effectuée à une résolution plus basse
(en bas). Les niveaux en hautes-eaux (lignes continues) et basses-eaux (lignes pointillées) sont représentés.
Les différents phénomènes physiques du cycle hydrologique ont été cités dans l’introduction
générale. Ici, nous allons les présenter suivant le chemin que suivrait une particule d’eau. En réa-
lité ces processus se produisent en quelques minutes ou quelques jours, de façon locale ou spatia-
lisée. Chacun de ces processus fait toujours l’objet de nombreuses études. Les échelles de temps
et d’espace auxquelles ils se produisent restent mal connues à cause de l’hétérogénéité des sols et
de la difficulté de mesurer les flux de façon représentative et pertinente. La modélisation de tels
phénomènes à l’échelle du mécanisme principal [Beven, 2006] reste donc un enjeu majeur. De
plus, si les processus hydrologiques de surface sont difficiles à caractériser, les processus hydro-
géologiques le sont d’autant plus qu’ils se dérobent à l’observation directe.
Les précipitations constituent l’apport d’eau majeur sur la plupart des régions du globe. Après
évaporation à la surface des océans, des lacs, ou après évapotranspiration, l’eau rejoint l’atmo-
sphère. Une fois dans l’atmosphère plusieurs phénomènes peuvent entrainer les précipitations.
On relève notamment les précipitations frontales dont l’intensité varie suivant la nature du front
(chaud ou froid) ; les précipitations orographiques, liées à la montée d’une masse d’air chaude et
humide due à la rencontre d’un relief ; et les précipitations convectives, peu étendues, courtes et
intenses, produites par l’ascension rapide d’une masse d’air chaude suite à une instabilité.
Le comportement hydrologique est influencé par différents forçages, à savoir : l’ensoleille-
ment, la température et le vent qui influencent l’évapotranspiration et la fonte des neiges. La ré-
partition des pluies au cours de l’année est un autre facteur qui impose en grande partie la réponse
hydrologique, notamment si l’on compare les régions avec et sans saisons [Jasechko et al., 2014].
Les précipitations sont redistribuées de façon irrégulière sur les continents. À l’échelle d’un évè-
nement pluvieux sur un petit bassin versant, la répartition de la pluie peut également être très
inégale. Nous évoquerons cet aspect dans la partie consacrée aux observations disponibles.
15
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Dans un premier temps, la végétation peut intercepter les gouttes de pluies et stocker ainsi une
part conséquente des précipitations. À très haute résolution spatiale et temporelle, l’interception
est un processus qui peut jouer un rôle important [Ficchí, 2017]. Ensuite, cette eau présente sur
les végétaux pourra s’évaporer [Friesen et al., 2008].
Une fois que les gouttes d’eau atteignent le sol, plusieurs options sont possibles en fonction de
la perméabilité du sol, de sa saturation en eau initiale, de sa pente et de l’intensité de la pluie :
1. Le ruissellement sur le sol, il se produit sur des sols déjà saturés ou lorsque l’intensité des
précipitations dépasse la capacité d’infiltration des sols [Horton, 1933]. Cette eau ruisselée
rejoindra ensuite un cours d’eau ou s’infiltrera plus loin. Ce mécanisme est aussi lié à une
forte hétérogénéité spatiale.
2. Le stockage temporaire en surface suivi d’une évaporation ou d’une infiltration dans le sol.
3. L’infiltration dans le sol. L’eau peut alors faire l’objet d’une reprise évapotranspiratoire ou
d’un ruissellement hypodermique voire s’infiltrer plus profondément et recharger la nappe.
Si cette eau contribue à un moment donné à augmenter les niveaux piézométriques, elle est
alors comptabilisée comme de la recharge pour le système aquifère sous-jacent.
L’évapotranspiration
16
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Nous avons expliqué les principaux processus hydrologiques de surface. La question qui se
pose alors est la suivante : que devient l’eau s’infiltrant dans les sols ? Les écoulements souterrains
sont caractérisés très localement par des forages et de manière indirecte par des images géophy-
siques à des instants donnés. En dépit l’inaccessibilité des milieux naturels, nous connaissons de
façon théorique les phénomènes qui se produisent dans le sous-sol grâce à des modèles en labo-
ratoire et des lois physiques s’appliquant à l’écoulement des fluides en milieu poreux. En complé-
ment, des expérimentations sur le terrain sont venues valider ces théories.
La figure 1.12 schématise les processus de redistribution de l’eau en milieu poreux à l’échelle
d’une petite section de sol. Conceptuellement, l’eau de pluie s’écoule verticalement à travers le
milieu poreux non saturé que constitue la mince pellicule de sol. Elle peut ensuite s’infiltrer plus
profondément et recharger directement la nappe ou indirectement si la profondeur de celle-ci est
importante [Besbes and Marsily, 1984]. Le rôle de la végétation et du type de sol sont prépondé-
rants pour cet écoulement. Ces deux caractéristiques sont d’ailleurs liées entre elles. En effet, la
majeure partie de l’eau de pluie qui s’infiltre est prélevée par les racines des plantes. Le sol agit
comme une éponge dans laquelle l’eau s’écoule suffisamment lentement pour rester au contact
des racines et il est capable de maintenir une certaine humidité en dehors des pluies. La figure 1.12
illustre bien les différents processus auxquels l’eau du sol est destinée : la reprise évapotranspira-
toire, la percolation vers la nappe et éventuellement un écoulement latéral si la pente et la per-
méabilité du sol le permettent. Ces processus sont donc dépendants et reposent sur les propriétés
des sols telles que la conductivité, la porosité, l’épaisseur et la profondeur des racines.
F IGURE 1.12 – Schéma des flux hydrologiques dans les sols ; conceptuellement les sols sont une mince pellicule
de terre dans laquelle l’eau s’écoule verticalement et ne remplit pas nécessairement tout l’espace poral, on
parle de milieu non saturé. D’après Šimůnek and van Genuchten [2006].
L’écoulement des fluides dans ces milieux est régi par plusieurs lois physiques fondamentales.
Elles permettent de décrire l’évolution de la quantité (ou de la pression) et des flux d’eau dans
17
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
l’espace et le temps. Elles sont valables sous certaines hypothèses et ne sont donc pas adaptées
à tous les contextes. La première d’entre elle est le principe de conservation de la masse : ce qui
rentre dans un volume donné de sol est nécessairement stocké ou évacué par celui-ci. On utilise
plus rarement le principe de conservation de l’énergie pour les milieux souterrains. Vient ensuite
la loi de Darcy (équation 1.1), prouvée expérimentalement [Darcy, 1856]. Elle exprime le flux Q
passant à travers un milieu poreux en fonction de sa conductivité hydraulique K (aussi appelée
perméabilité) et du gradient hydraulique ∆H L appliqué :
∆H
Q = K×A× , avec : A l’aire de la section traversée par le flux. (1.1)
L
Comme pour la loi de Fourier en thermique, le flux d’eau (équiv. thermique) est donc proportion-
nel au gradient de charge hydraulique (équiv. température). La conductivité, K, caractérise donc
l’aptitude du matériau à laisser passer le flux, on dira que le milieu poreux est plus ou moins per-
méable (équiv. isolant). Notons que la loi de Darcy ne fait pas encore intervenir le temps, une
modification du gradient hydraulique imposé au milieu impliquerait en effet une modification
progressive du stock d’eau et du flux.
Quelques années plus tard, Dupuit [1863] obtiendra à partir de la loi de Darcy et du principe
de conservation de la masse une équation simplifiée permettant d’évaluer le niveau de la nappe
dans un terrain perméable situé entre deux canaux. La conclusion est simple, plus le terrain est
perméable et plus l’eau de pluie infiltrée s’y écoule vite vers les canaux. Au contraire, si la perméa-
bilité diminue, les flux souterrains sont ralentis et le niveaux piézométrique augmente donc se
rapproche de la surface. À l’époque, ces travaux sont motivés par des problématiques d’approvi-
sionnement en eau de la population (pour l’évacuation des eaux usées également), de l’industrie
et de l’agriculture mais aussi par des besoins géotechniques. La circulation de l’eau dans les roches
et l’interaction avec les rivières sont alors connues qualitativement mais peu de théories physiques
permettent de les expliquer. En effet, ces circulations souterraines ne sont pas observables mais
elles se manifestent lors de l’exploitation des puits ou par le débit d’étiage des rivières en été.
Pour caractériser ces écoulements, il convient de définir plusieurs variables qui varient dans
l’espace et le temps : la teneur en eau θ du sol ou de la roche, la charge hydraulique h (liée à la
pression et au niveau d’eau) et le flux Q passant à travers le milieu poreux. Dans la nature, les
principaux moteurs de ces écoulements souterrains sont la gravité (verticale vers le bas), l’énergie
solaire, qui exerce une pression capillaire via la végétation, et la pression capillaire (verticale vers
le haut). De ces forces, il résulte des différences de charge hydraulique dans les aquifères (verticale
et latérale) permettant un transfert de pression puis un écoulement. On peut citer deux équations
de bases qui décrivent l’évolution de l’eau dans les sols et les roches en fonction du temps et de
l’espace :
1. L’équation de Richards 1.2 [Richards, 1931], ici en 1D selon la verticale, utilisée principa-
lement pour les milieux non saturés (notamment les sols) et dans laquelle la conductivité
dépend de la saturation en eau :
· µ ¶¸
∂θ(h) ∂ ∂h
= K(h) × − 1 − R(h) (1.2)
∂t ∂z ∂z
2. L’équation de diffusivité 1.3 [de Marsily, 1981; Dupuit, 1863], valable en milieu saturé homo-
gène et abondamment utilisée pour modéliser les écoulement dans les aquifères :
∂h
T × ∆h = S × − R(t ) (1.3)
∂t
où S est la porosité de drainage de la roche aussi appelée coefficient d’emmagasinement et
T est la transmissivité (la perméabilité multipliée par l’épaisseur de l’aquifère). ∆ se réfère à
l’opérateur laplacien.
18
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
On trouve différentes versions de ces équations utilisant des hypothèses simplificatrices plus
ou moins adaptées au milieu étudié. Elles dépendent de la géométrie du site, du type d’écoule-
ment, du type de climat et des exigences de l’étude. Notons que les deux équations permettent
d’inclure un terme source, R, correspondant à une recharge par les pluies ou au contraire une
extraction par évapotranspiration. Ces équations sont ensuite résolues analytiquement ou numé-
riquement grâce à des conditions aux limites imposées telles qu’un débit (condition de Neumann)
ou un niveau de rivière ou de puits (condition de Dirichlet). La résolution des équations nécessite
donc une connaissance préalable du contexte. En complément, elle nécessite de choisir une valeur
pour chaque paramètre tel que la perméabilité et la porosité du milieu. Les résultats recherchés
sont typiquement les niveaux d’eau, les pressions, les degrés de saturation, les flux souterrains et
les contributions à l’écoulement de surface.
Nous avons déjà donné deux exemples de résolution de l’équation de diffusivité en 1D (fi-
gure 1.8 et figure 1.11). Dans les deux cas, un taux de recharge constant dans le temps et l’es-
pace est appliqué au modèle du milieu souterrain. Ces modèles simples illustrent aussi différentes
conditions limites appliquées sur les bords du modèle : des charges hydrauliques constantes aux
extrémités, un flux nul sur la limite inférieure et éventuellement la topographie qui contraint la
charge hydraulique sur la limite supérieure. Ces conditions limites et la structure du modèle ont
vocation à représenter de façon simplifiée la géométrie et les forçages extérieurs des aquifères étu-
diés. Il peut par exemple s’agir de rivières permanentes alimentées par l’aquifère ou inversement,
de flux imposés par un pompage, ou de limites géologiques imperméables. Nos deux modèles, de
la même manière que sur la figure 1.2, montrent une condition limite particulière imposée par
la topographie. Lorsque le niveau piézométrique intersecte la topographie, le point intersecté de-
vient alors à son tour une condition limite et représente conceptuellement une rivière alimentée
par l’aquifère.
Ces exemples illustrent le comportement théorique d’aquifères homogènes et hétérogènes.
Cependant, la réalité reste plus complexe car la variabilité spatiale des propriétés du sous-sol est
une inconnue considérable. Malgré des concepts théoriques bien établis, les flux qui résultent des
propriétés hétérogènes des systèmes hydrologiques sont difficiles à représenter aux échelles qui
nous intéressent.
Le parcours d’une goutte d’eau arrivant dans le sol demeure donc toujours relativement in-
connu en dépit de la connaissance des équations mentionnées, et du fait qu’elle rejoindra, en
quelques minutes à plusieurs milliers d’années, une rivière ou l’atmosphère par évapotranspira-
tion. Conceptuellement, on pourrait distinguer deux cas : l’eau n’est pas drainée suffisamment
vite vers la profondeur et reste donc disponible pour la demande évapotranspiratoire, ou bien
elle s’écoule sous la profondeur d’extinction des racines et rejoint ultérieurement la zone satu-
rée (voir figure 1.12). Cette zone saturée, définie par le niveau piézométrique de l’aquifère, peut
se situer entre zéro et plusieurs centaines de mètres de profondeur. Dans ces aquifères, l’eau est
alors transportée verticalement mais surtout horizontalement sur des distances très variables jus-
qu’à atteindre un exutoire de l’aquifère comme une source, une rivière ou une zone peu profonde
soumise à l’évapotranspiration.
De nombreuses études ont mis en évidence ces circulations souterraines dans et entre les bas-
sins versants. Les théories sur les écoulements en milieu poreux ont notamment été confirmées
par des méthodes de traçages, des pompages, ou par des modèles physiques reproduisant au pre-
mier ordre les débits de rivière et les niveaux piézométriques mesurés dans les puits. Tóth [1963],
puis Freeze and Witherspoon [1967], ont modélisé les circulations souterraines et la convergence
des eaux dans les fonds de vallée. Ses modèles partaient de l’hypothèse que les niveaux d’eau dans
les aquifères étaient connus et suivaient grossièrement la topographie. Plus récemment, Haitjema
and Mitchell-Bruker [2005], Gleeson and Manning [2008]; Gleeson et al. [2011a], Goderniaux et al.
19
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
[2013], Bresciani et al. [2016], Condon and Maxwell [2015] (avec un modèle 2D à grande échelle),
et d’autres, sont partis d’un postulat différent. Il est nécessaire de d’abord déterminer comment
les niveaux piézométriques dépendent de la géologie, du climat, et de la topographie. Ensuite, il
est possible d’estimer l’impact de ces niveaux sur la recharge et de manière générale sur les flux
souterrains et les interactions avec la surface.
De manière synthétique, ces modèles montrent que le ratio entre le taux de recharge et la per-
méabilité contrôle le comportement hydrogéologique. Si ce ratio est grand, les niveaux piézomé-
triques sont élevés et suivent relativement bien la surface topographique (voir figure 1.2 à gauche).
Par conséquent, la redistribution latérale des flux est faible. Inversement, si le ratio est petit les ni-
veaux piézométriques sont bas et les flux latéraux plus importants (voir figure 1.2 à droite). Ces
conclusions sont néanmoins à moduler par l’amplitude du gradient topographique. Est-on dans
une grande plaine sédimentaire ou dans un massif montagneux ?
Finalement, les hypothèses de ces études sont assez fortes car la composante climatique y
est représentée indépendamment par un taux de recharge des aquifères constant. La composante
géologique étant quant à elle représentée par défaut par une perméabilité homogène ou au mieux,
comme dans beaucoup d’études, par une fonction de la profondeur. Les études de modélisation
citées dans ce paragraphe partagent pour la plupart une vision stationnaire des écoulements bien
que le cycle de l’eau soit fondamentalement transitoire à plusieurs échelles. Dans ce contexte,
nous tenterons d’apporter des éléments de réponse quant au comportement temporel des aqui-
fères.
D’autres études viennent compléter ces travaux théoriques qui portent essentiellement sur
des échelles au mieux régionales. Les modèles hydrogéologiques présentés dans Fan et al. [2013]
ou dans De Graaf et al. [2015] ainsi que le modèle hydrologique de Maxwell et al. [2015] intègrent
des échelles continentales à une résolution de l’ordre du kilomètre. Ils mettent en évidence l’im-
pact des flux souterrains à grande échelle notamment la convergence des eaux souterraines car
les niveaux piézométriques obtenus sont parfois élevés dans des régions pourtant sèches. Mais
ces modèles montrent une inaptitude à reproduire fidèlement les niveaux piézométriques me-
surés ce qui soulève une interrogation quant à leur réalisme. Les écarts entre les modèles et les
observations ne sont pas faibles, il n’est pas rare qu’ils soient de plusieurs centaines de mètres.
Cela souligne un manque non pas forcément de compréhension mais en tout cas une inaptitude
à reproduire des comportements importants du cycle hydrologique. Notre travail sur le compor-
tement hydrologique à grande échelle tentera de définir à quel point la résolution et la représen-
tation de l’hétérogénéité sont contraignantes dans ces modèles. Des observations à l’échelle des
États-Unis indiquent que les bassins versants échangent une part conséquente de leur bilan en
eau en fonction de la géologie, de la structure de la topographie et du climat [Schaller and Fan,
2009], mais aussi en fonction de l’échelle étudiée [Krakauer et al., 2014]. Néanmoins dans ce genre
d’approche basée sur le bilan de masse des bassins, une large incertitude demeure sur l’estimation
de l’évapotranspiration réelle.
Globalement, même si la physique de chaque processus est comprise, leur représentation de-
mande une simplification de la complexité réelle. Chaque bassin versant répondant de façon dif-
férente au climat. Dans l’idéal, il suffirait de modéliser la zone critique à une résolution très fine
pour prendre en compte les disparités de la surface et du sous-sol (topographie, végétation, type
de sol et géologie). Cela nécessiterait alors la connaissance des propriétés physiques associées à
cette résolution, ce qui est impossible, d’autant plus pour les structures souterraines. En complé-
ment, un tel modèle demanderait des observations climatiques très fines pour l’alimenter et un
réseau de mesures conséquent pour le valider. Enfin, dans ce cas fictif, la capacité des ordinateurs
serait très vite dépassée, d’autant plus qu’il faudrait idéalement lancer les simulations à un pas de
temps assez fin (disons de une minute si on pense aux évènements pluvieux) sur plusieurs dizaines
20
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
d’années si on considère le rôle à long terme des aquifères. Nous reviendrons donc ultérieurement
sur ce problème de représentation des processus dans les modèles.
Aux processus naturels cités précédemment, on pourrait ajouter, et c’est un enjeu majeur
d’après Montanari et al. [2013] et Wada et al. [2017], les barrages, les prélèvements dans les aqui-
fères et les rivières ou encore l’irrigation. L’Homme utilise abondamment la ressource en eau et
en modifie directement ou indirectement le cycle à différentes échelles et à des amplitudes en-
core difficilement quantifiables. Il perturbe les systèmes hydrologiques que ce soit par l’utilisation
directe de l’eau ou par l’effet collatéral d’une action anthropique comme la transformation de
l’usage des sols, le changement de végétation, voire le réchauffement climatique. Une caractéris-
tique fondamentale du cycle hydrologique est son comportement temporel. Le climat, la distri-
bution de l’intensité des pluies en particulier, constitue le forçage majeur des systèmes hydrolo-
giques continentaux. La capacité de ces systèmes à redistribuer les pluies dans le temps et l’espace
est essentielle à notre zone critique.
À l’échelle mondiale, les chiffres montrent qu’il y a assez d’eau pour satisfaire nos besoins car la
consommation reste nettement inférieure au flux en circulation (voir figure 1.1). Mais le ratio des
ressources sur les besoins est très mal réparti spatialement [Dalin et al., 2017; Gleeson et al., 2012]
et temporellement. En France par exemple, où les flux sont comparables à ceux de la figure 1.1,
le climat tempéré n’empêche pas des périodes de sécheresse et des inondations au cours d’une
même année. La figure 1.13 décrit la distribution cumulée des débits journaliers de fleuves fran-
çais sur une cinquantaine d’années. On remarque que la moitié du débit de la Loire s’est écoulée
en seulement 20 % du temps, en 32 et 38 % du temps respectivement pour le Rhin et l’Essonne. La
même courbe des précipitations efficaces, soit celles susceptibles de s’infiltrer ou ruisseler après
déduction de l’évapotranspiration, montre une non linéarité encore plus marquée. D’autant que
la soustraction de l’évapotranspiration et le calcul à pas journalier constituent déjà sans doute un
lissage de cette courbe. Il est clair, en comparant la courbe des précipitations efficaces (données
représentatives du bassin de la Seine) à celle du débit de l’Essonne que la variabilité climatique est
fortement atténuée par le système hydrologique. Avec la même approche, Taylor et al. [2012] es-
timent que sur 55 années étudiées, seulement 11 ont contribué à 75 % de la recharge des aquifères
en Afrique de l’Est. Ce sont essentiellement les années affichant des précipitations exceptionnelles
et en concordance avec des évènements climatiques globaux qui ont rechargé les nappes. Dans le
cas de la France, les cours d’eau de montagne ou de plaine et les aquifères constituent la ressource
en eau. En climat aride, les aquifères sont souvent la seule alternative.
Sans évoquer les stocks d’eau présents dans les aquifères dits "fossiles", la ressource dispo-
nible localement peut se définir comme l’eau de pluie tombant sur la région considérée moins la
part jugée nécessaire aux écosystèmes (débit minimal de rivière, hauteur minimale de lacs, besoin
en évapotranspiration...). On pourra se référer à Montanari et al. [2013] pour une définition équi-
valente avec le terme "water security". On peut aussi parler de pluie récupérable dans les aquifères
et les cours d’eau en sous-entendant ainsi qu’il n’est techniquement et raisonnablement pas pos-
sible de récupérer toute l’eau disponible.
L’impact anthropique direct sur le cycle hydrologique est plus facilement quantifiable pour les
prélèvements en rivière. Pour les pompages en nappe, l’irrigation ou les barrages, même si les flux
prélevés sont connus, la modification des niveaux piézométriques impacte de manière peu quan-
tifiable les échanges entre les systèmes souterrains et la surface car ces derniers sont complexes et
difficilement modélisables. Les pompages souterrains se font toujours au détriment de la restitu-
tion vers la surface (débit de rivière ou évapotranspiration) [Bredehoeft, 2002; Theis, 1940; White,
21
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.13 – Contribution des évènements journaliers aux flux totaux en France. Données d’après http ://hy-
dro.eaufrance.fr et d’après la base de données GRDC. Les précipitations efficaces sont égales aux précipitations
mesurées moins l’évapotranspiration potentielle et sont représentatives du bassin de la Seine dont l’Essonne
fait partie.
22
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
potranspiration sur les cultures. Autrement dit l’eau n’est que déplacée d’un endroit à l’autre. Ce-
pendant, ces transferts d’eau peuvent être préjudiciables. Ils constituent surtout une accélération
du cycle hydrologique. La surexploitation mène à un assèchement progressif des ressources sou-
terraines voire à une impossibilité de les exploiter un jour ou l’autre. La déstabilisation des régimes
hydrologiques naturels, même dans le cadre d’une exploitation raisonnée, ne garantit pas la pré-
servation de l’environnement. Comme déjà évoqué, il existe un lien fort voire une dépendance
entre la surface et les systèmes souterrains. Toute déstabilisation des niveaux piézométriques et
donc des flux résultants aura un impact dont l’amplitude se doit d’être bien évaluée. Dans la plu-
part des cas, la perturbation physique des écoulements engendre également une altération de
la composition chimique de l’eau difficile à prédire. En effet, la modification des écoulements
change les chemins et les vitesses de circulations des eaux souterraines. Par conséquent, elle mo-
difie les interactions initiales avec la roche. Elle peut mener à un mélange d’eaux de différentes
origines suite à un pompage par exemple [Roques et al., 2018].
D’un point de vue pratique, le choix d’utiliser de l’eau de surface ou de l’eau souterraine dé-
pend de plusieurs facteurs qui conditionnent le coût : l’accessibilité, la quantité et la qualité de
l’eau. Des alternatives se sont développées comme les grands projets de déviation des fleuves, le
dessalement d’eau de mer et dans une moindre mesure le prélèvement de l’eau des brouillards par
des filets de structures particulières. Le nombre de barrages est également en augmentation dans
le monde (actuellement en France, les petits barrages ont tendance à être effacés pour restaurer la
continuité écologique des cours d’eau). Ces structures constituent une déstabilisation physique,
chimique et biologique importante des milieux hydrologiques. Le suivi et l’étude de leur impact
demande donc une approche interdisciplinaire.
Le forçage climatique
23
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
2017; Troch et al., 2009] notamment en fonction des saisons (couvert végétal, sols gelés...).
Ce temps de réponse des systèmes hydrologiques et en particulier des systèmes souterrains a
été étudié à travers des modèles et analyses fréquentielles (voir Massei and Fournier [2012] pour
la réponse mesurée par le débit la Seine et voir Duffy and Gelhar [1986]; Gelhar [1974]; Jazaei et al.
[2014]; Townley [1995]; Trefry [1999] pour la réponse mesurée à partir des niveaux de puits, donc
des fluctuations de stocks). Rousseau-Gueutin et al. [2013] comparent par exemple les temps de
réponse théoriques des grands aquifères mondiaux d’une longueur caractéristique comprise entre
200 et 1500 km. Ils concluent que ces temps sont compris entre une centaine d’années et une di-
zaine de millions d’années. Par conséquent, ces grands aquifères sont encore en train de répondre
au climat passé !
Pour caractériser ces comportements hydrologiques, les systèmes naturels sont observés à
travers la mesure des niveaux de nappe, des débits de rivière, d’humidité du sol ou d’autres ob-
servations moins directes. Ces mesures ont une échelle de temps limitée, jusqu’à une centaine
d’années au maximum pour le débit de certains grands fleuves. Les fluctuations mesurées pré-
sentent aussi une résolution temporelle assez faible selon les cas et l’objectif de la mesure. Dans
ces mesures, on repère différentes fréquences caractéristiques des processus hydrologiques (fi-
gure 1.14). Si le pas de temps de l’échantillonnage n’est pas assez fin, une partie du processus
n’est pas caractérisée. Des diverses mesures présentées sur la figure 1.14, la fréquence journa-
lière due aux variations d’ensoleillement entre le jour et la nuit apparaît comme une fréquence
majeure des systèmes hydrologiques. Vient ensuite la fréquence annuelle due au rôle des pluies,
de la température et de l’ensoleillement sur les crues, sur l’évapotranspiration ou encore sur la
fonte des neiges. Enfin, nous notons également que les systèmes hydrologiques enregistrent des
fluctuations pluriannuelles correspondant à des pseudo-cycles climatiques [Massei et al., 2007;
Taylor et al., 2012]. S’ajoutent à ces périodes caractéristiques un bruit continu pour les périodes
inférieures à l’année traduisant une distribution peu cyclique des pluies dans le cas des régions
françaises étudiées (Bretagne et bassin de la Seine). L’étude de la réponse aux évènement pluvieux
nécessite donc un suivi à différentes échelles temporelles allant de la minute à plusieurs années.
Bien que cela n’apparaisse pas sur la figure 1.14, les variations piézométriques et le débit à petite
échelle peuvent aussi afficher des fréquences semi-journalières et journalières de petites ampli-
tudes à cause des phénomènes de marées et du forçage que constitue l’évapotranspiration. Pour
conclure, nous avons déjà mentionné que le niveau moyen des nappes dépend des caractéris-
tiques de l’aquifère mais aussi de sa recharge moyenne par les pluies, ce qui revient également à
étudier sa réponse à long terme [Townley, 1995].
24
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
F IGURE 1.14 – Signal fréquentiel des mesures météorologiques et hydrologiques (précipitations, évapotrans-
piration potentielle, débit de rivière, niveaux de nappe et humidité du sol). Les données de Guidel à gauche
(et à droite pour l’humidité du sol) sont issues de la station Météo France et de l’observatoire hydrogéologique
de Ploemeur. Les données sur 40 ans du bassin de la Seine, à droite, sont présentées dans Massei and Fournier
[2012]; Quintana-Seguí et al. [2008] (base de données ADES du BRGM pour le piézomètre).
Démarche générale
Quel est l’intérêt de la modélisation ? Derrière cette grande question se cache deux objectifs
principaux qui sont comprendre et prédire le comportement de la zone critique, auxquels on peut
ajouter synthétiser la connaissance et estimer une variable importante qui n’est techniquement
pas mesurable. Les modèles permettent de tester et valider des théories puis de simuler des scé-
narios futurs. Classiquement, les modélisateurs construisent un modèle, c’est à dire une fonction
qui dépend du temps et de l’espace. Si le problème est bien posé, le résultat du modèle doit alors
être cohérent avec les observations. Il existe des approches de modélisation purement physiques,
des modèles statistiques et des méthodes semi-empiriques. En plus de restituer les observations,
il est important que les paramètres du modèle aient un sens physique. Les applications de ces
modèles sont diverses en hydrogéologie notamment pour l’estimation de l’impact anthropique
et climatique sur les milieux. Par exemple, la prévision de l’impact d’un pompage ou l’évaluation
de la sensibilité au climat des échanges entre les aquifères et la surface. Plus spécifiquement, la
prévision des sécheresses et des crues est un objectif important de l’hydrologie. Les modèles per-
mettent alors de mieux comprendre quels sont les facteurs clefs qui conditionnent la réponse de
la zone critique. Il apporte aussi des informations aux endroits où il n’y a pas de mesure, l’extra-
polation des variables est alors plus fiable.
En théorie, les modèles apportent de la rationalité aux phénomènes observés sur Terre car ils
25
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
sont fondés sur des raisonnements physiques, mathématiques et/ou une conceptualisation plau-
sible des systèmes naturels. Cela est d’autant plus vrai si les modèles se montrent capables de
reproduire fidèlement ces phénomènes. Des données sans modèle ont un faible pouvoir explicatif
(le modèle permet l’interprétation) et un modèle sans données également (les données valident
la pertinence des modèles). On perçoit donc bien l’apport et la complémentarité nécessaire des
données et des modèles. Les raisons pour lesquelles les modèles hydrologiques ne reproduisent
pas toujours bien des variables essentielles ont déjà été évoquées dans cette introduction, il s’agit
principalement de l’impossibilité de représenter spatialement les hétérogénéités de la surface et
du sous-sol. Effectivement, la mesure spatialisée à une résolution suffisamment fine des proprié-
tés de la surface et du sous-sol (de zéro à plusieurs centaines de mètres de profondeur) restera
toujours impossible. En revanche, les mesures des variables hydrologiques en surface et en pro-
fondeur sont nombreuses. Ces mesures sont intégratrices ou ponctuelles et sont caractéristiques
des propriétés du système étudié et de ses conditions limites. Plus exactement, elles sont caracté-
ristiques de la réponse spatiale et temporelle des écosystèmes.
C’est la comparaison entre les données de terrain et celles modélisées qui permet de tirer une
compréhension. Mais deux cas se produisent. Soit le modèle explique suffisamment les données
avec toujours quelques petits écarts, soit le modèle échoue à les représenter avec fidélité. Le pre-
mier cas n’est cependant pas une raison suffisante permettant d’affirmer que les processus sont
prédictibles. D’un côté l’ajout de paramètres au modèle, pour tenter par exemple de prendre en
compte la variabilité spatiale des paramètres, facilite la convergence du modèle vers les observa-
tions. Il existe alors généralement plusieurs jeux de paramètres qui aboutissent à des simulations
ayant des écarts similaires avec les données. De l’autre côté, les incertitudes sur les conditions li-
mites et la structure des modèles entrent aussi en ligne de compte et multiplient les possibilités
de reproduire les données observées, surtout si le forçage temporel est similaire aux observations
en terme d’amplitudes relatives et de saisonnalité. L’intérêt du modèle est alors compromis car
les différentes solutions ne donnent pas les mêmes extrapolations dans le temps et l’espace. De
plus, on ne saurait alors affirmer que le processus complexe résultant de la variabilité spatiale des
propriétés et des conditions limites est compris [Kirchner, 2006].
Pour synthétiser, on peut dire qu’un modèle qui restitue une observation peut n’avoir aucun
pouvoir explicatif si sa sensibilité aux conditions limites et aux paramètres n’est pas déterminée.
C’est à dire que la donnée de calibration, seule, contient très peu d’informations. La structure des
modèles (géométrie, conditions limites, distribution spatiale des propriétés) étant nécessairement
une représentation simplifiée des systèmes hydrologiques, leur paramétrisation englobe intrinsè-
quement l’hétérogénéité. Les enjeux sont donc de décrire avec parcimonie l’hétérogénéité et les
conditions limites.
L’objectif est ainsi de déterminer le contenu informatif des données à travers la modélisation.
Premièrement, il convient d’utiliser des modèles avec le moins de paramètres possibles. Malgré
la complexité apparente des systèmes hydrologiques, certaines variables comme les débits de ri-
vière peuvent généralement être reproduites par des modèles très simples [Sivapalan, 2018]. Les
fonctions objectifs basées sur des critères de comparaison entre les observations et les modèles
sont un autre point important de la démarche [Gupta et al., 2009]. Il y a plusieurs façons de com-
parer la ressemblance entre deux signaux : l’écart moyen, l’écart de la moyenne, l’écart absolu, ou
le déphasage sont des exemples simples. Il est aussi possible de se focaliser sur différentes parties
des signaux et de combiner les critères. Enfin, l’approche à partir de différents types d’observables
est une solution qui paraît indispensable pour réduire l’espace des paramètres possibles (on dit
aussi : pour mieux contraindre les paramètres).
Dans ce cadre, le contenu informatif des différents observables est loin d’être évident. D’abord,
la répartition des observations dans l’espace apporte toujours des points de contrôles supplémen-
26
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
taires pour les modèles. Mais la multiplication de ces points de mesures a un coût et des limites.
Ensuite, chaque type d’observation à une sensibilité différente aux processus physico-chimiques
se produisant dans les systèmes hydrologiques. Néanmoins, la complémentarité des observations
disponibles est encore peu explorée. Surtout, la dépendance de chaque observation aux proprié-
tés des systèmes hydrologiques, à leur hétérogénéité et à leurs conditions limites est sous-évaluée
alors qu’elle contrôle la paramétrisation des modèles. Malgré leur aspect local, certaines obser-
vations sont extrapolées dans l’espace (notamment les observations climatiques) et sont plus ou
moins représentatives du fonctionnement global des systèmes. Les observations faites dans les
bassins versants intègrent des échelles différentes, de la plus petite échelle à l’échelle régionale.
Connaître cette capacité intégratrice est important pour évaluer le crédit à apporter à telle ou
telle observation dans les modèles. À partir du moment où l’hétérogénéité n’est pas descriptible à
toutes les échelles, définir la représentativité spatiale des observations est une alternative intéres-
sante à la description toujours plus fine de l’hétérogénéité.
Nous avons vu que le cycle de l’eau faisait intervenir des processus physiques dans des milieux
différents : l’atmosphère, le sol et les roches, auxquels on peut rajouter les plantes, les surfaces
enneigées ou le permafrost. Cette séparation par compartiment a impliqué le développement de
modèles par discipline. Or, les échanges sont nombreux entre ces compartiments. Nous allons
tenter dans cette partie de présenter les principaux modèles hydrologiques existants, dont ceux
qui ont été utilisés dans ces travaux.
En modélisation hydrologique, la première étape est de déterminer les variables d’entrée, c’est
à dire les forçages climatiques. Cette étape permet d’estimer les quantités d’eau de pluie entrantes
dans le système. Pour résumer, la pluie se divise entre ruissellement et infiltration puis entre éva-
potranspiration et recharge des aquifères. Le ruissellement se produit à partir d’un seuil d’intensité
de pluie ou si le réservoir de sol est déjà saturé. La majeure partie de la modélisation du forçage
climatique consiste donc à estimer l’évapotranspiration. Pour cela deux types de modèles se dis-
tinguent :
1. Les modèles qui calculent au préalable l’évapotranspiration potentielle (ETP), correspon-
dant à l’évapotranspiration qui se produirait sur une surface enherbée disposant dans le sol
de toute l’eau nécessaire à sa croissance [Monteith, 1965; Thornthwaite, 1948]. Cette mé-
thode peut être corrigée du type de végétation et de l’évolution saisonnière de sa demande.
Bien que très empirique l’intérêt est qu’elle ne nécessite que quelques paramètres météoro-
logiques de base. Elle nécessite ensuite d’inclure le stock d’eau disponible pouvant satisfaire
cette demande potentielle. On parlera alors de déficit hydrique si le stock d’eau dans le sol
est insuffisant à certaines périodes. Par conséquent, l’évapotranspiration réelle (ETR) mo-
délisée est généralement inférieure à l’évapotranspiration potentielle durant les saisons les
plus sèches.
2. Le deuxième type d’approche est plus réaliste physiquement car il consiste à résoudre le
bilan d’énergie à la surface du sol pour obtenir l’évapotranspiration réelle directement (par
exemple tel qu’implémenté dans le modèle de surface CLM [Dai et al., 2003]). L’inconvé-
nient de cette méthode est qu’elle demande beaucoup de paramètres et de données atmo-
sphériques, mais l’intérêt est qu’elle permet de coupler le bilan énergétique de surface et
la quantité d’eau dans le sol. Ce type d’approche serait donc plus adéquat pour développer
une approche couplée entre le sol et l’atmosphère.
Les modèles d’évapotranspiration demandent donc une bonne estimation de l’eau disponible
dans les sols, c’est à dire une bonne représentation des processus d’infiltration. Au vu de la com-
27
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
plexité des sols, des modèles semi-empiriques basés sur le bilan hydrique moyen du sol sont utili-
sés. Le sol y est généralement modélisé par un simple réservoir ("dit bucket type") qui stocke l’eau
disponible pour l’évapotranspiration. Dans le même temps, l’eau de ce réservoir s’infiltre vers les
aquifères ou rejoint directement les rivières par de simples fonctions linéaires du taux de rem-
plissage du réservoir [Manabe, 1969; Perrin et al., 2003]. L’approche permet donc d’utiliser peu de
paramètres à calibrer et simplifie la complexité des sols à un seul réservoir équivalent générale-
ment indépendant des aquifères sous-jacents. Ces modèles ne permettent pas non plus de tenir
compte des écoulements latéraux au sein du sol.
Des modèles verticaux simplifiant l’équation de Richards (éq. 1.2) ont aussi vu le jour (voir
par exemple le modèle à large échelle PCR-GLOBWB présenté par van Beek and Bierkens [2008]
et Wada et al. [2014]). Ils nécessitent des paramètres physiques à calibrer ou à mesurer comme
l’épaisseur, la porosité et la perméabilité à saturation des sols. Ils séparent éventuellement le sol
en plusieurs couches mais restent difficilement couplables avec les aquifères. Enfin, le modèle
numérique HYDRUS [Simunek et al., 2005] permet de résoudre numériquement en une à trois
dimensions l’équation de Richards. Il représente donc très bien l’écoulement en milieux poreux
non saturé pour peu que l’on puisse calibrer ou mesurer les propriétés physiques du sol.
Ces modèles de surface permettent donc d’estimer en sortie l’évapotranspiration et les débits
de rivières. Pour tenir compte du rôle des aquifères un réservoir simplifié est parfois ajouté sous le
modèle de sol. Il permet ensuite de fournir le débit de base des rivières. Une troisième sortie de ces
modèles de surface peut donc être la recharge du réservoir aquifère qui sera alors utilisée comme
entrée dans les modèles hydrogéologiques.
Il reste à présenter les modèles purement hydrogéologiques aussi appelés modèles d’écoule-
ment souterrain ou d’aquifère. Ils se basent sur la résolution des équations de diffusivité (éq. 1.3)
ou de Richards (éq. 1.2) associées à la loi de Darcy (éq. 1.1). Dans tous les cas, la résolution de ces
problèmes demandent d’imposer des conditions aux limites des systèmes modélisés, un flux nul
ou un niveau d’eau par exemple. Dans un premier temps, ces équations ont été résolues analy-
tiquement lorsque une solution mathématique existait. Cette approche nécessite des hypothèses
fortes sur la structure du système qui doit être très simple : une dimension, radiale, seulement une
ou deux couches avec des paramètres homogènes. Malgré ces hypothèses, des modèles simples
ont fait leur preuve par exemple en hydraulique des puits. On peut notamment citer les solutions
de Dupuit [1863], Theis [1940], ou Boussinesq [1877, 1903, 1904] (équation 1.4) et les méthodes
de résolution par approche fréquentielle. Ces dernières considèrent les phénomènes transitoires
comme la somme de signaux sinusoïdaux [Gelhar, 1974; Townley, 1995] (équation 1.5) et étaient
initialement utilisées en thermique [Carslaw and Jaeger, 1959].
d 2 h̄(x, ω)
T − i ωS h̄(x, ω) + R̄(ω) = 0 (1.5)
d x2
qui n’est autre que la transformée de l’équation de diffusivité (équation 1.3) dans le domaine fré-
quentiel (ω).
Les modèles numériques sont la deuxième grande famille de modèles. Ils consistent à discréti-
ser l’espace en une grille plus ou moins fine. Ensuite, le bilan de masse est résolu en chaque point
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CHAPITRE 1. INTRODUCTION
de la grille grâce à un algorithme itératif. Les flux entre les mailles de la grille sont quant à eux
calculés par la loi de Darcy. Le plus connu de ces modèles est ModFlow [Harbaugh, Arlen, 2005;
McDonald and Harbaugh, 1984; Niswonger et al., 2011], développé par l’USGS (United States Geo-
logical Survey). Aujourd’hui, en quelques minutes, l’algorithme de ModFlow permet de simuler
plusieurs années avec des modèles complexes nécessitant des millions de mailles. Il permet aussi
de prendre en compte des pompages comme condition limite, d’où son utilisation abondante. On
peut également citer le logiciel MARTHE développé par le BRGM qui permet de modéliser en 3D
les écoulements souterrains en milieu saturé et non saturé (équation de Richards).
Le modèle ParFlow a vu le jour il y a quelques années [Ashby and Falgout, 1996; Kollet and
Maxwell, 2008; Maxwell et al., 2015] et semble très prometteur. Il a récemment été couplé au mo-
dèle de surface CLM [Kollet and Maxwell, 2008]. La partie ParFlow permet alors de résoudre l’équa-
tion de Richards et la partie CLM de résoudre le bilan d’énergie en surface. De part ce couplage
et la possibilité de lancer les calculs en parallèle, le modèle couplé ParFlow-CLM, aussi complexe
soit-il, peut être mis en œuvre pour la modélisation à grande échelle.
Comme nous l’avons mentionné précédemment, le processus d’alimentation des cours d’eau
est obtenu à partir des modèles de surface et d’écoulement souterrain. En général, la pluie qui ruis-
selle sur les sols rejoint directement le réseau hydrographique. En revanche, la pluie qui recharge
les aquifères est restituée aux rivières en sortie des modèles hydrogéologiques (voir figure 1.1).
Lorsque ce débit est mesuré il constitue la principale donnée de calibration des modèles hydrolo-
giques.
On verra dans les parties suivantes qu’implementer les équations physiques dans des modèles
numériques 3D ne suffit pas à représenter correctement les systèmes hydrologiques. Il faudrait
en réalité discrétiser ces modèles à une résolution très fine adaptée à la variabilité spatiale des
sous-sols, puis y associer des paramètres tels que l’épaisseur, la conductivité ou la porosité. Sans
compter les écoulements dans les fissures, les fractures ou les karsts. Face à de telles difficultés,
l’utilisation de modèles plus parcimonieux est nécessaire. D’où l’utilisation de modèles simples à
un réservoir équivalent qui sont parfois capables de reproduire avec fidélité les observations. Mal-
gré le réalisme physique que l’on veut injecter dans les modèles, ces derniers ont vocation à res-
ter une représentation équivalente des systèmes hydrologiques. Cette représentation équivalente
peut ensuite devenir contraignante pour la modélisation des processus chimiques ou mécaniques
liés aux écoulements souterrains.
En complément, des modèles de transports de solutés s’appuient sur les modèles de flux. Ils
peuvent même être couplés dans le cas où les propriétés physiques de l’eau dépendent de sa
chimie (voir par exemple SEAWAT ). On peut citer notamment le modèle de transport MT3DMS
[Zheng and Wang, 1999] qui s’applique à ModFlow. MT3DMS permet de calculer l’évolution des
concentrations en soluté dans l’eau souterraine à partir du moment où un modèle de flux a été
simulé. De tels modèles permettent de prendre en compte l’adsorption de certaines espèces par
la roche, des réactions chimiques ou encore d’éventuelles décroissances radioactives. Dans une
moindre mesure, ce modèle numérique permet également de modéliser le transport de chaleur.
D’autres logiciels plus spécifiques au transport réactif en milieu poreux sont utilisés à petite échelle.
En plus des processus cités, ils peuvent parfois permettre de prendre en compte l’écoulement de
différents fluides dans les milieux souterrains.
Nous avons entrevu la complexité des milieux souterrains liée à leur hétérogénéité. Nous avons
aussi mis en avant notre manque de visibilité sur ces milieux peu accessibles. De nombreuses
29
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
études, citées précédemment, indiquent un rôle fort des milieux souterrains pour redistribuer la-
téralement l’eau y compris en surface. En hydrologie, différentes observations ont permis de vali-
der les théories physiques (loi de Darcy, écoulement en zone non-saturée, bilan d’énergie, conser-
vation de la masse...). Généralement, cela a été réalisé par des expériences contrôlées en milieu
suffisamment homogène et sur des durées assez courtes. Dans ces cas d’école, on a pu déterminer
localement les propriétés physiques des milieux et ainsi décrire les flux dans le temps à partir des
relevés météorologiques. Cela a été fait, notamment pour les sols, afin d’estimer l’infiltration, le
ruissellement ou l’évapotranspiration. Pour les aquifères, cela a été fait pour estimer les flux sou-
terrains et les stocks d’eau via les niveaux piézométriques mesurés. En complément, des obser-
vations plus intégratrices, comme le débit des rivières, et l’interpolation des données météorolo-
giques, sont venues expliquer le fonctionnement à plus grande échelle des bassins versants. Mais
d’après cette caricature de l’état des connaissances du cycle hydrologique plusieurs problèmes se
distinguent.
Les mesures météorologiques admettent une incertitude non négligeable tout comme leur in-
terpolation. Dans les modèles, cette incertitude participe au problème d’inversion et peut donc
devenir relativement importante. À cet égard, dans une synthèse comparant différents modèles à
large échelle, Bierkens [2016] mentionne que les forçages climatiques sont aussi importants que
le réalisme physique et que les données de précipitations sont une des sources majeures d’incer-
titude. L’estimation de l’évapotranspiration provient aussi généralement de bilans ou de modèles
calibrés sur les pluies et les débits de rivière sortants des bassins. Or, les rivières ne sont pas les
seuls exutoires au sein des bassins. En effet, les bassins hydrographiques reçoivent ou perdent de
l’eau avec leurs voisins sous la surface [Schaller and Fan, 2009]. Enfin, l’estimation des débits de
rivière se fait à partir du niveau d’eau dans les rivières et de mesures ponctuelles du débit, donnant
lieu à une courbe de calibration qui change en fonction des saisons. Il en résulte une incertitude
des estimations à l’échelle des bassins versants.
Le deuxième problème est la représentativité des expérimentations sur l’écoulement de l’eau
dans les sols et les aquifères. D’une part, les bassins versants sont constitués de propriétés hé-
térogènes en surface et en profondeur. D’autre part, il n’existe pas de données expérimentales
en chaque point de la planète. En conséquence, les hydro(géo)logues ont tendance à séparer le
fonctionnement local, compris physiquement, et le fonctionnement à l’échelle du bassin versant
compris conceptuellement [Beven, 2006]. La question de la représentativité des expérimentations
et plus généralement celle des observations a surtout lieu d’être du fait de l’hétérogénéité des mi-
lieux hydrologiques. Les expérimentations permettent de comprendre plus finement les processus
y compris en milieux hétérogène. Les observations viennent mesurer la réponse aux expérimen-
tations mais aussi le comportement naturel des systèmes. Une grande partie de ce travail sera
d’évaluer le contenu informatif des données mesurées lorsqu’elles sont mises à l’épreuve de mo-
dèles physiques. Que nous disent-elles sur les propriétés des systèmes étudiés, leurs structures et
leurs forçages ? Ces forçages sont les flux entrants et sortants du système étudié, c’est à dire les
échanges avec les autres compartiments, dans notre cas l’atmosphère, le sol ou les cours d’eau.
Un troisième point clef est la difficulté de représenter avec réalisme les interactions entre les
aquifères et le sol, et donc de quantifier le rôle de ces aquifères. On peut résumer une partie de ces
problèmes par cette question : comment le comportement à grande échelle est-il influencé par
celui à petite échelle et vice versa ? C’est bien sûr le comportement des aquifères qui est au centre
de cette question. Ces problèmes sont cruciaux pour la modélisation hydrologique. Ils mènent
à une limitation de la compréhension par les modèles [Beven, 1989; Clark et al., 2017] dont on
discutera dans quelques paragraphes.
Historiquement, trois disciplines se distinguent : la climatologie, l’hydrologie de surface et
l’hydrogéologie. On y associe trois compartiments. Dans chaque communauté scientifique, les
autres compartiments ont longtemps eu tendance à représenter des conditions limites simplifiées
[Decharme and Douville, 2007; Fan et al., 2013; Manabe, 1969; Tóth, 1963; Wada et al., 2010]. De
plus, les échanges nets verticaux entre les milieux souterrains et la surface sont souvent négligés
30
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
pour boucler les bilans hydrologiques à grande échelle (Pl ui e = ETR + Qrivière ). Aujourd’hui, la
représentation des aquifères apparaît de plus en plus dans les modèles hydroclimatiques (GCM
pour General Circulation Model, LSM pour Land Surface Model et GHM pour Global Hydrological
Model) car leur comportement semble critique pour le bilan hydrique des sols et l’évapotrans-
piration [Keune et al., 2016; Krakauer et al., 2014; Maxwell and Condon, 2016; Wang et al., 2018].
De plus, nous avons déjà évoqué leurs rôles dans l’alimentation des cours d’eau, des zones hu-
mides et la distribution de la végétation. En conséquence, les modèles couplés peuvent fournir
des conditions limites qui manquaient jusque là aux modèles hydrologiques et climatiques.
Les verrous scientifiques se dessinent maintenant assez clairement. Au vu de la variabilité des
propriétés physiques des bassins versants, seuls des modèles numériques discrétisés spatialement
et résolvant des équations physiques peuvent fournir une explication robuste du comportement
des milieux hydrologiques [Wood et al., 2011]. Cette affirmation n’est pas exagérée mais elle défi-
nit un but peut-être impossible à réaliser. Nous connaissons les théories physiques et nous pou-
vons augmenter la puissance de calcul des ordinateurs. Nous mesurons aussi de plus en plus de
variables et de propriétés physiques notamment par les images satellites. Il restera toujours im-
possible de connaître toutes les structures géologiques et d’y associer des paramètres physiques.
D’autant que des méthodes alternatives et simples, parfois empiriques, apportent également des
connaissances et des capacités prédictives [Hrachowitz and Clark, 2017; Kirchner, 2009].
Les incertitudes sur la modélisation des interactions entre les systèmes souterrains et la sur-
face peuvent s’expliquer par plusieurs points. À moyen terme (> 1 an), les échanges verticaux nets,
c’est à dire la différence entre les flux verticaux ascendants et descendants, sont proches de zéro
à l’échelle du bassin versant. De plus, ils ne sont pas facilement mesurables si ce n’est que très
localement. À l’échelle de la parcelle, on s’attend généralement à ce que le flux net soit descen-
dant, donc que le système souterrain reçoive de l’eau plus qu’il n’en donne. On s’attend alors à
ce que le système souterrain restitue cette eau plus localement et de façon prononcée au niveau
d’une zone humide ou d’une rivière. La répartition de ces échanges est donc assez hétérogène.
Par conséquent, ces échanges ne sont pas contraints dans les modèles. La conséquence est que
différents modèles, ou différentes simulations d’un même modèle peuvent expliquer d’autres va-
riables hydrologiques sans que ces échanges verticaux ne soient réellement contrôlés. Ainsi, entre
différents modèles, la répartition du débit sortant entre écoulement souterrain et ruissellement de
surface peut être très différente bien que le total soit identique. Cela fait écho à un problème de
modélisation récurrent. Quel est le bon modèle ? Quel est le pouvoir explicatif des théories dans les
modèles [Clark et al., 2016; Nearing and Gupta, 2015] ? Et comment les observations et les modèles
se transforment en compréhension ?
En général, un modèle est une fonction de plusieurs paramètres, de données d’entrées et
du temps. L’objectif de cette fonction étant de simuler une variable hydrologique (une hauteur
d’eau, un débit, ...). Dans les modèles numériques, un algorithme résout une équation physique
en chaque point de l’espace discrétisé par un maillage plus ou moins fin. Ces modèles produisent
donc une estimation des variables hydrologiques en tout point du maillage et en fonction du
temps. Une conséquence, et une nécessité pour faire tourner le modèle, est de devoir attribuer
une valeur aux paramètres en chaque maille. Or, les milieux sont hétérogènes et les aquifères sont
inaccessibles. Les paramètres et les forçages climatiques étant relativement peu connus, la confi-
guration (on peut l’appeler paramétrisation) des modèles n’est donc pas fixée.
La complexité des modèles augmente s’ils résolvent plusieurs équations nécessitant des para-
mètres différents. Elle augmente également si ils ont pour ambition de représenter finement les
variations spatiales de ces paramètres. Le problème avec l’augmentation de la complexité est de
déterminer ces paramètres géométriques ou physiques. La démarche consiste alors à détermi-
ner quelles configurations sont les plus réalistes. Pour cela, on utilise des critères basés sur l’écart
31
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
entre les résultats des simulations et les observations [Gupta et al., 2009; Krause et al., 2005]. Les
configurations les plus réalistes permettent alors de fixer les paramètres des modèles (on utilise le
terme inversion) puis de s’en servir pour prédire le comportement du système.
La complexité d’un modèle et la résolution de son maillage est aussi un compromis entre le
réalisme voulu et les capacités du calculateur. La résolution de ces maillages en hydrogéologie est
typiquement de 1 à 100 m à l’échelle de quelques kilomètres et de 1 à 50 km à l’échelle continen-
tale. Ce qui signifie que les processus "sous-maille" ne sont pas représentés de manière explicite à
l’échelle continentale.
Différents auteurs expliquent intuitivement ou mathématiquement comment comparer les
modèles et lesquels choisir [Gupta et al., 2008; Höge et al., 2018; Kirchner, 2006]. Il en résulte que
la démarche du modélisateur doit suivre un certain principe de parcimonie : le modèle doit être le
plus simple possible pour reproduire les données observées. La raison vient du fait que le nombre
de paramètres augmente exponentiellement la complexité du problème d’inversion bien que cela
puisse faciliter la restitution des observations de terrain. Autrement dit, des configurations diffé-
rentes aboutissent au même critère. On parlera de modèle sous-contraint ou de problème sous-
déterminé, c’est à dire que les observations, ne permettent pas de déterminer les paramètres. Par
exemple, des études comparatives entre les différents modèles mondiaux mentionnent que les
débits à l’exutoire des bassins ne sont pas assez contraignants [Sood and Smakhtin, 2015] et re-
lèvent l’utilisation de valeurs différentes pour les mêmes paramètres physiques [Samaniego et al.,
2017]. Au contraire, un modèle trop simple présentera l’inconvénient de moins bien reproduire les
observations malgré des paramètres bien contraints. Dans le premier cas extrême, la complexité
peut induire une mauvaise compréhension. Dans le deuxième, le modèle n’est pas assez réaliste.
Ce problème est en partie résumé par la figure 1.15. Dans cette thèse, nous nous intéresse-
rons particulièrement aux contraintes qu’exercent les données disponibles sur les modèles hy-
drologiques. Dans cette optique, la complémentarité des types d’observation [Dorn et al., 2013;
Kazmierczak et al., 2016; Sutanudjaja et al., 2014] et l’évaluation de leur contenu informatif sont
essentielles [Gupta et al., 2008].
F IGURE 1.15 – Schéma sur la complexité optimale des modèles. Le résultat de l’ajout d’observations dépend
de leur pertinence et de leur complémentarité. Modifié d’après Höge et al. [2018].
32
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
En référence au titre de cette thèse, cette partie aurait aussi pu s’intituler les "observables" dis-
ponibles. Ce terme qui n’existe pas officiellement fait ici référence aux variables de la zone critique
que l’on est capable de voir et mesurer à l’aide d’un suivi instrumental.
Remarques générales
Les mesures ou observations, sont donc le point clef qui permet de comprendre les proces-
sus hydrologiques en validant les théories physiques. En pratique, le développement des modèles
se fait par des aller-retours avec les observations. Si les observations sont des variables, elles per-
mettent de calibrer les paramètres physiques des modèles. Si elles constituent des mesures de
propriétés, elles permettent de fixer les paramètres des modèles. Ici, nous nous intéresserons uni-
quement aux mesures des variables hydrologiques qui fournissent des données temporelles. Nous
considérerons que ces variables sont le principal lien avec les paramètres hydrodynamiques à
l’échelle du bassin versant. D’ailleurs, la mesure des propriétés passe elle-même par des modèles
qui interprètent des variables plus localement et sur des temps plus courts.
La zone critique n’a jamais été aussi bien instrumentée. Des capteurs en tout genre permettent
aujourd’hui d’enregistrer localement des chroniques temporelles à hautes fréquences (de l’ordre
de la minute). Certains satellites fournissent quant à eux des données à des résolutions de l’ordre
du kilomètre à un pas de 15 jours. Les différents types de capteurs mesurent des flux, des niveaux
d’eau ou des taux d’humidité. Ils enregistrent aussi des déformations, des températures ou des
concentrations qui sont une conséquence du mouvement de l’eau. Les instruments de mesure
font généralement partie de réseaux d’observatoires scientifiques ou de réseaux de surveillance
mis en place par des autorités, des compagnies industrielles ou des bureaux d’études. Les mesures
sont ensuite sauvegardées dans des bases de données accessibles par les différents organismes.
L’exploitation de cette multitude de données reste incomplète pour plusieurs raisons. Selon
l’étude et le rythme imposé d’enregistrement des variables (minutes, jours, années), le nombre de
données recueillies peut augmenter exponentiellement. Il est compréhensible alors que l’exploi-
tation de celles-ci puisse être incomplète. Dans ce contexte, la question de la pertinence des diffé-
rentes observations se posent, d’autant que les mesures ont des coûts variables. Lesquelles four-
nissent des informations utiles ? Quels types d’observation devront être ajoutés dans les études
pour améliorer les modèles ? D’autre part, leur complémentarité n’est pas exploitée au mieux.
Certes, les différentes observations permettent d’avoir une vision globale de la zone critique. Mais
nous avons aussi évoqué que pour les modélisateurs, elles constituent des contraintes supplé-
mentaires et doivent aboutir à des modèles plus robustes. Le paragraphe suivant synthétise briè-
vement les principaux outils dont nous disposons pour sonder les systèmes hydrologiques. Nous
parlerons aussi de la capacité intégratrice de ces observables et par conséquent de la représenta-
tivité des mesures.
Des variables essentielles pour l’Homme sont observées depuis de nombreuses années, voire
des siècles : les précipitations, la hauteur des fleuves ou le niveau des nappes par exemple. De nos
jours, les instruments et les techniques permettent de mesurer de nombreuses autres variables.
1. Par exemple, les variables climatiques sont mesurées par des stations météorologiques puis
extrapolées dans l’espace grâce aux radars et aux satellites. En revanche, l’évapotranspiration
reste généralement estimée à partir d’autres variables et ne constitue pas une mesure en soi.
Il n’est en effet pas évident de mesurer des flux de vapeur ! Elle constitue néanmoins le pro-
cessus principal en terme de transfert d’eau à l’interface sol-atmosphère. On peut citer des
instruments permettant sa mesure mais dont l’utilisation est rare : les lysimètres consistant à
33
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
mesurer l’eau s’infiltrant et à en déduire l’eau évapotranspirée (échelle du mètre), les tours à
flux par covariance turbulente ou "eddy covariance" (dizaines de mètres), la scintillométrie
(échelle du kilomètre). À cela s’ajoute la télédétection qui permet d’extrapoler spatialement
l’évapotranspiration mais qui n’en est pas une mesure directe et avec un pas de temps qui
n’est pas forcément adéquat.
2. Les débits des cours d’eau sont mesurés de façon assez régulière en fonction des régions
du globe. La densité des mesures décroit avec la taille et l’importance des cours d’eau. Ces
débits sont estimés la plupart du temps à partir d’une calibration sur les niveaux de rivière
qui sont eux mesurés de manière automatisée. Les vrais mesures du débit sont faites ma-
nuellement par traçage d’une masse de soluté, ou par un débitmètre que l’on déplace sur
une section du cours d’eau. Cette approche laisse place à une incertitude conséquente. De
plus, on dispose rarement de l’évolution de ce débit le long du cours d’eau bien que cela soit
potentiellement informatif.
3. Les niveaux des aquifères sont suivis par des réseaux de forages peu denses hormis au droit
de sites spécifiques. Ils intègrent rarement l’évolution de la pression avec la profondeur et
ont donc tendance à moyenner les charges hydrauliques de toutes les structures intersec-
tées par le forage. Ils sont limités en profondeur et sont implantés principalement dans les
aquifères constituant une ressource. La mesure des niveaux piézométriques est l’observa-
tion in-situ la plus simple nous renseignant sur les écoulements et les stocks souterrains. En
effet, les variations spatiales de niveaux d’eau, interpolées sur des cartes piézométriques, in-
diquent les sens d’écoulement. Les variations temporelles indiquent quant à elles si le stock
est en diminution ou en augmentation. Les flux souterrains latéraux ne sont eux pas mesu-
rables directement.
4. L’humidité du sol est mesurable localement à une profondeur donnée par des capteurs en-
fouis sous la terre (sonde TDR ou tensiomères mesurant la succion) et indirectement par des
satellites (extrapolation de données in-situ et hypothèses sur les propriétés des sols) à une
résolution de quelques kilomètres. Elle apporte des informations pour le calcul de l’évapo-
transpiration et de la recharge par déduction.
5. Les principales méthodes géodésiques que l’on peut citer sont les GPS [Biessy et al., 2011]
mesurant des déplacements horizontaux et verticaux, les mesures optiques de la topogra-
phie et les images INSAR spatialisées. À cela s’ajoute les inclinomètres ("tiltmeter" en an-
glais) dont les récentes études sont prometteuses [Schuite et al., 2015]. Ces instruments
enregistrent tous la déformation de la surface terrestre. Typiquement, ces signaux se com-
posent d’une tendance long terme liée à la tectonique, des évènements sismiques, des ma-
rées terrestres, et des variations saisonnières liées au poids de l’eau sur la croute et à sa
propagation dans les aquifères. La mission GRACE mesure les variations de gravité au ni-
veau de deux satellites en orbite autour de la Terre. Cette gravité est directement fonction
des variations de masse à la surface de la Terre à une résolution d’au moins 100 km. Le point
intéressant est que ces variations de masse correspondent essentiellement à la somme des
variations de stocks d’eau dans les aquifères, les sols, les lacs et les glaciers [Feng et al., 2013;
Shamsudduha et al., 2012].
6. La mesure des températures en forage et en rivière permet quant à elle d’identifier des
flux souterrains. Récemment, ce domaine a fait un bon en avant avec le déploiement des
mesures par fibre optique [Selker et al., 2006] en rivière et en forage. Cette outil permet un
suivi temporel de la température ultra précis sur des centaines de mètres.
7. Enfin, la mesure des concentrations en soluté, en gaz dissout, ou des traceurs isotopiques
dans les forages et les rivières informe sur l’origine de l’eau et sur les processus chimiques
qui contrôlent sa qualité. On peut citer les mesures de traceurs atmosphériques (voir Leray
et al. [2012] pour l’exemple des gaz CFC), des rapports isotopiques [Jasechko et al., 2016], de
la silice [Marçais et al., 2018] ou encore des nitrates [Roques et al., 2018].
34
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
La représentation des systèmes aquifères au sein du cycle hydrologique est l’enjeu principal de
cette thèse. Plusieurs aspects se dégagent. Le comportement des aquifères et leurs rôles dans la re-
distribution de l’eau sont difficiles à caractériser à cause de la complexité des milieux. Il existe une
difficulté de mesurer et modéliser la dépendance entre les aquifères et la surface. Pourtant les sys-
tèmes souterrains ont un rôle évident dans le fonctionnement du cycle de l’eau. Ils constituent à la
fois la condition limite inférieure de la zone critique et le principal réservoir fournissant les cours
d’eau. Ils constituent aussi une ressource majeure pour l’agriculture, l’industrie et la consomma-
tion en eau potable.
C’est notamment le rôle des aquifères à travers les échelles temporelles et spatiales qui de-
meure incertain. La diversité des contextes à travers le monde ne permet pas de généraliser les
comportements étudiés localement, en tout cas d’y appliquer les mêmes structures de modèles.
Cette diversité implique des degrés d’hétérogénéité, des capacités de stockage et des flux souter-
rains très différents d’un contexte à l’autre, donc un fonctionnement hydrologique différent. De
manière générale, les aquifères jouent un rôle à plusieurs échelles temporelles. De l’échelle de
plusieurs heures à plusieurs années, les aquifères répondent lentement aux précipitations en les
stockant et en les restituant de façon atténuée. La restitution de l’eau souterraine se fait du rythme
nycthéméral à annuel par la végétation et à une fréquence journalière à pluriannuelle pour l’ali-
mentation des rivières mais aussi pour la demande anthropique. Cette redistribution temporelle
implique une redistribution spatiale à travers des aquifères de tailles variables alimentant locale-
ment les zones humides, les rivières et les populations.
Le frein majeur à la compréhension du cycle hydrologique est l’hétérogénéité des milieux sou-
terrains. Elle complexifie le cycle hydrologique, réduit la représentativité spatiale des mesures et
elle ne peut pas être décrite fidèlement dans les modèles. Les modèles sont donc une représenta-
tion équivalente et simplifiée des systèmes hydrologiques. D’un côté, les modèles les plus sophis-
tiqués se voulant proches de la réalité nécessitent beaucoup de paramètres et autant de données.
D’un autre côté, les modèles trop simples ne sont pas assez fiables et explicatifs. Dans ces deux cas
extrêmes, la compréhension et la capacité prédictive sont limitées.
Face à la complexité des systèmes hydrologiques les modèles ne seront jamais une exacte re-
présentation de la réalité. Ce qui ne les empêche pas d’être pertinents. Ils doivent permettre la
compréhension des processus et des interactions au sein de la zone critique. Dans un second
temps, ils ont pour but de prédire les comportements hydrologiques, notamment la ressource
en eau. La paramétrisation de ces modèles pose problème. Entre les deux cas extrêmes cités pré-
cédemment, la paramétrisation de l’hétérogénéité à travers des modèles physiques parcimonieux
est un enjeux majeur de l’hydrologie.
Cette paramétrisation nécessite des observations dont la représentativité spatiale et la perti-
nence doivent être évaluées. De nombreux observables du cycle hydrologique sont disponibles
ou sont en développement mais leur capacité à informer les modèles reste incertaine. Il existe
plusieurs types d’observations dont la sensibilité aux processus hydrologiques est variable. Ces
observations permettent de caractériser les différentes propriétés et composantes des systèmes
hydrologiques. Leur complémentarité est aussi au cœur de notre problématique. Dans le cadre de
la modélisation, le contenu informatif des différents observables demeure incertain car les signaux
35
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
mesurés intègrent des processus se produisant à différentes échelles temporelles et spatiales. Dès
lors, l’intégration de ces données dans des modèles physiques doit permettre de les interpréter et
d’en comprendre les facteurs clefs.
Cette thèse s’inscrit dans la thématique de la zone critique, à savoir mieux comprendre les
systèmes hydrologiques à travers le couplage de modèles et d’observations différentes. L’objet de
ce travail se cantonne à la partie quantitative du cycle hydrologique à travers plusieurs échelles,
du bassin versant d’un petit ruisseau breton à celui d’un grand fleuve comme le Rhin. L’objectif
est de développer une représentation parcimonieuse des systèmes aquifères à travers des modèles
physiques. Nous verrons comment des observations de différentes natures peuvent se greffer au
sein d’un unique modèle. Ce modèle pouvant également servir de cadre dans les questions de
qualité de l’eau.
Pour répondre à ces problématiques nous proposons une approche basée sur la modélisation
et la comparaison à des observations. L’observatoire de Ploemeur (Bretagne, Fr.) est étudié et ins-
trumenté par différents capteurs depuis plus de 20 ans. Il fait partie du réseau national des sites
hydrogéologiques H+ (http ://hplus.ore.fr/) créé en 2002 pour "maintenir un réseau de sites expéri-
mentaux fournissant des données pertinentes pour la compréhension et la modélisation du cycle
de l’eau". L’observatoire, implanté en domaine granitique fracturé, présente l’avantage d’abriter
un réseau de puits où sont suivis à intervalles réguliers les niveaux d’eau, la composition chimique
et la température. En complément, la déformation de surface est enregistrée par un GPS et des in-
clinomètres. Un avantage de cet observatoire est d’être composé de deux bassins comparables,
d’environ 3 km2, Ploemeur et Guidel. Le premier est soumis à un pompage municipal depuis 1991
tandis que le second est toujours à l’état "naturel". Cette comparaison est une opportunité d’éva-
luer l’impact anthropique sur le milieu, elle constitue une sorte d’expérimentation à taille réelle.
L’approche consiste à développer des modèles d’écoulement souterrain simples sur ces deux
sites en se basant sur plusieurs observables : les niveaux piézométriques, les débits de rivière,
la déformation de la surface et les concentrations chimiques dans l’eau des puits. Ces différents
observables caractérisent à leur manière le comportement du système hydro(géo)logique. Ils ne
sont a priori pas sensibles aux mêmes processus, ce qui nécessite l’implémentation de différentes
équations. La complémentarité de tels observables a rarement été étudiée au sein d’un même
modèle. Pour chacun d’entre eux l’objectif est donc de développer la meilleure représentation
possible.
En contexte hétérogène, la représentativité des observations est un point clef de la compré-
hension, même pour des bassins de quelques kilomètres carrés. À travers l’inversion des modèles,
ces travaux évaluent le contenu informatif des mesures de terrain. Ces informations portent prin-
cipalement sur trois points : les conditions limites du système, les échanges verticaux et les pa-
ramètres physiques. Le comportement des aquifères hétérogènes est complexe, non linéaire et
hystérétique. Leur réponse aux forçages dépend en partie de leur état passé résultant de nom-
breux évènements transitoires. Face à cette complexité, l’objectif est de cibler les processus les
plus pertinents, c’est à dire ceux qui permettent de comprendre et prédire le fonctionnement. Les
observations et la compréhension actuelle des sites d’étude nous disent que les forçages extérieurs
au système aquifère et les processus qui en résultent couvrent des périodes de temps allant de la
minute à une vingtaine d’années.
Au centre de cette démarche se trouve également la nécessité de mieux connaitre les taux de
recharge des aquifères. De manière générale, de mieux contraindre la relation entre les systèmes
36
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
souterrains et la surface (les sols, l’atmosphère et les cours d’eau). Les travaux présentés à cette
échelle donnent une bonne représentation des processus et de la sensibilité des observations.
L’échelle étant relativement petite, elle permet d’avoir une vision assez complète des sites et de
développer des modèles à fine résolution.
À l’échelle continentale
La dernière partie de la thèse tente de faire le lien entre l’échelle locale et continentale, l’hydro-
logie étant multi-échelles du fait de ses processus et de ses enjeux. Le comportement hydrologique
global peut être vu comme la somme de plusieurs échelles qui s’entrecroisent. À grande échelle
spatiale (>100 km), la représentation des aquifères est généralement très simplifiée pour diverses
raisons pratiques et théoriques. Nous nous sommes intéressés à leur représentation dans les mo-
dèles hydrologiques globaux (échelle mondiale) à travers l’exemple d’un grand bassin versant,
celui du Rhin. La taille caractéristique d’un tel bassin implique un spectre assez large d’échelles.
Travailler sur une superficie intermédiaire comme celle du bassin du Rhin facilite les tests grâce
à une plus grande rapidité d’exécution des calculs et permet un meilleur contrôle des compor-
tements dans l’espace. Une motivation supplémentaire de cette approche est qu’elle fait face à
des problématiques de modélisation assez similaires à celles de l’échelle locale mais à des degrés
différents.
Cette grande échelle est néanmoins particulière pour plusieurs raisons. D’abord, elle implique
des échelles de temps plus grandes car le temps de réponse des aquifères augmente avec leur
taille. Ensuite, la diversité des contextes nécessite la représentation simultanée de phénomènes
différents comme par exemple le stockage et la fonte des neiges en montagne. Enfin, il est encore
plus difficile à cette échelle d’avoir une représentation fine des milieux étant donné la basse ré-
solution des modèles (limite informatique) et le fait que les paramètres hydrologiques de chaque
région ne soient pas disponibles.
Les systèmes aquifères sont de plus en plus intégrés dans les modèles à large échelle. Cepen-
dant, il existe plusieurs manières de les représenter avec parcimonie. Ici, nous proposons, en col-
laboration avec l’International Institute for Applied Systems Analysis (IIASA, Autriche), en parti-
culier avec Y. Wada et son équipe, un modèle à large échelle qui couple les systèmes aquifères
aux processus hydrologiques de surface. Ces types de modèle ont tendance à compter beaucoup
de paramètres et sont donc très complexes. Nous nous focalisons sur l’apport d’une représenta-
tion physique des écoulements souterrains. La question de la paramétrisation d’un tel modèle est
abordée en se basant sur des observations comme les débits de rivières et les niveaux d’eau dans
les forages, mais aussi en se basant sur des données satellites notamment pour les forçages clima-
tiques. Enfin, nous verrons en quoi la représentation de la variabilité géologique et la résolution
sont déterminantes et contraignantes dans ces modèles.
Plan général
37
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
les principaux résultats de notre approche et discutera de la modélisation des systèmes aquifères
dans le cycle hydrologique.
Tout au long de ces chapitres nous chercherons à déterminer le contenu informatif des obser-
vations et le rôle des aquifères dans le cycle de l’eau. Nous verrons en quoi la pluridisciplinarité
des observations est nécessaire pour la compréhension et la modélisation. De manière générale,
l’objectif est d’évaluer comment les données observées informent les modèles et à quels facteurs
elle sont sensibles.
La partie sur l’échelle continentale est un peu différente. À cette échelle, la résolution est très
basse, typiquement de l’ordre du kilomètre, et la représentation du système intègre donc de ma-
nière implicite des processus à plus petite échelle. Les informations et les observations disponibles
à cette échelle sont également très différentes. Nous tenterons de mieux définir le lien entre la ré-
solution des modèles et la représentation de la variabilité spatiale des processus hydrologiques.
38
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
GPS sont complémentaires des suivis piézométriques puis nous évaluerons l’intérêt et les
limites des mesures inclinométriques.
6. Le sixième chapitre constitue une approche préliminaire de la modélisation du transport de
soluté. Nous développerons ainsi deux exemples de modélisation hydrochimique à partir
du modèle hydrogéologique du site de Ploemeur.
7. Le septième chapitre est consacré à la modélisation à grande échelle. Nous illustrerons d’abord
l’aspect critique de la résolution et des paramètres hydrodynamiques sur la modélisation
des systèmes aquifères. Ensuite, le modèle couplé développé durant cette thèse, est testé à
une échelle intermédiaire puis sur le bassin du Rhin en entier. Les résultats sont comparés
à différentes observations et la sensibilité aux paramètres du modèle d’aquifère est briè-
vement testée. Dans cette partie, l’évaluation du rôle des aquifères sur la disponibilité en
eau pour l’évapotranspiration est importante. Elle se base sur la comparaison des observa-
tions et des simulations du modèle couplé et du modèle sans écoulement souterrain. Nous
verrons ce que peut apporter l’intégration des écoulements souterrains à la modélisation
hydrologique. En perspectives, un modèle amélioré est proposé, accompagné de différentes
suites à donner à ces travaux.
Nous conclurons sur l’apport des différents observables et leur capacité à informer les modèles
pour les observatoires de la zone critique. Il conviendra de discuter des points à développer et des
nouvelles questions qui se posent à l’issue de ces travaux. La zone critique sur laquelle nous vivons
constitue une boite noire au sein de laquelle se produisent des processus physiques. Dans cette
vision, évaluer au mieux ce que caractérise chaque type de mesure est primordial en particulier
à travers des modèles physiques. On peut parler de l’aptitude respective de chaque observable à
imager les processus clefs se produisant au sein des systèmes hydrologiques. Nous finirons donc
en répondant à la question : comment une observation locale nous permet-elle d’identifier les
processus majeurs du système étudié ?
39
CHAPITRE 1. INTRODUCTION
40
Chapitre 2
Sommaire
2.1 L’observatoire de Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
2.1.1 Présentation générale de l’observatoire de Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . 42
2.1.2 Contexte géologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
2.1.3 Un site hydrogéologique en contexte hétérogène . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.1.4 Questions scientifiques associées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
2.2 L’observatoire de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
2.2.1 Présentation générale de l’observatoire de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . 55
2.2.2 Hydrogéologie du site de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
2.2.3 Présentation des débits observés à Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
2.2.4 Modèle conceptuel du site . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.2.5 Questions scientifiques associées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.3 Le bassin du Rhin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.3.1 Présentation générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
2.3.2 Les données climatiques ou d’entrées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
2.3.3 Les données de calibration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
2.3.4 Calcul du bilan de masse du Rhin d’après les observations . . . . . . . . . . 63
41
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
Les chapitres suivants s’appuient sur les données recueillies sur les sites de Ploemeur et Guidel
(Bretagne, Fr.). Ces deux observatoires, distants de 4 km, font partie du réseau national des sites
hydrogéologiques H+ . Ils sont implantés dans des contextes très comparables, mais sur Ploemeur,
un pompage municipal est imposé depuis 1991 tandis que le site de Guidel demeure à l’état "natu-
rel". Nous allons dans premier temps faire l’inventaire des connaissances acquises sur Ploemeur.
Contexte
Le site de Ploemeur (figure 2.1) est suivi depuis sa mise en pompage en 1991 et fait depuis
l’objet de nombreuses études. En revanche, le site de Guidel n’est instrumenté que depuis 2009,
lorsqu’il a été envisagé d’y implanter un second pompage en complément de celui de Ploemeur. À
l’heure actuelle on ignore toujours la date de cette future mise en pompage. Ce temps de latence
du projet a permis aux chercheurs de mieux caractériser l’état initial avant la future perturbation,
contrairement au site de Ploemeur dont on ignore quel était l’état hydrologique avant 1991.
Pour son approvisionnement en eau potable, la ville de Ploemeur (environ 20000 habitants) a
implanté en 1991 un site de pompage souterrain (figure 2.2) au niveau d’une dépression topogra-
phique plutôt humide et parsemée de plusieurs sources qui ne fournissent plus d’eau aujourd’hui.
Les sols sont caractérisés par un couvert végétal important composé de champs agricoles en ma-
jorité. Les pentes sont plutôt faibles hormis localement dans certains vallons. Au nord, la base
aérienne de Lann Bihoué constitue un plateau de quelques kilomètres carrés à une altitude de
50 mNGF. Les zones basses au sud (site de Ploemeur) et au sud-ouest (site de Guidel) de la base
culminent à 20 mNGF environ. La base militaire peut être comparée à un château d’eau comme
en témoigne la présence de plusieurs sources à son pourtour (figure 2.1).
Climat local
Le climat à Ploemeur est tempéré et océanique. Le site est à quelques kilomètres de l’Océan
Atlantique. Il en résulte des précipitations conséquentes toute l’année avec une légère réduction
durant les mois d’été. D’après les mesures enregistrées par la station Météo France de Lann Bihoué
(à 3 km de l’observatoire), il a plu en moyenne 900 mm/an de 1975 à 2015. À l’échelle annuelle, ces
pluies sont peu variables avec un minimum de 600 mm et un maximum de 1150 mm pour un
écart-type de 120 mm.
L’estimation de l’évapotranspiration potentielle (ETP) par la méthode de Penman-Monteith
est de 736 mm/an en moyenne sur la période 1991-2015. On note que l’écart-type est plus faible
(70 mm/an) que pour les précipitations et que l’ETP annuelle augmente légèrement de façon
constante (on est passé de 660 à 800 mm/an entre 1991 et 2015) sur la période considérée. L’ETP
a un comportement très similaire chaque année et suit l’évolution de la température et de l’inten-
sité de l’ensoleillement (ce sont les facteurs clefs qui permettent de la calculer). Elle vaut environ
0 mm/jr au pic de l’hiver et atteint 4-6 mm/jr en juillet-août.
D’après les modèles de sols (selon Thornthwaite, Hydrus ou Surfex), l’évapotranspiration réelle
ETR serait d’environ 620 mm/an en moyenne, ce qui impliquerait alors un déficit hydrique d’envi-
ron 100 mm/an concentré entre juillet et septembre. Malgré, une apparente constance des pluies
et de l’évapotranspiration potentielle, l’évapotranspiration réelle (et donc par déduction la re-
charge des aquifères) montre une variabilité annuelle importante avec un écart-type de 170 mm/an.
Ces estimations d’évapotranspiration impliquent qu’au maximum 280 mm/an en moyenne
42
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.1 – Localisation des sites d’étude de Ploemeur et Guidel. En haut : localisation des deux sites d’étude ;
le pompage municipal est effectué au niveau du site de Ploemeur ; en complément d’autres sites annexes sont
étudiés ou utilisés pour des expérimentations. En bas : carte géologique du BRGM au niveau des sites d’études ;
les limites entre les unités géologiques et les principales failles (lignes noires orientées N20E) sont très large-
ment extrapolées à partir des observations malgré l’apparente continuité des lignes.
sont disponibles pour la recharge des aquifères. Une part de cette eau peut ruisseler en surface
ou en subsurface et alimenter les rivières sans jamais recharger les aquifères. L’incertitude qui
pèse sur l’estimation de la recharge est donc liée au modèle d’évapotranspiration mais aussi au
partitionnement de l’eau restante. En proportion, la variabilité annuelle de ce taux de recharge
est considérable car les 170 mm/an évoqués précédemment correspondent à 61 % de la valeur
43
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.2 – Le site de pompage de Ploemeur vu depuis la colline de granite ; la photo est orientée vers le
nord-est.
moyenne. On note un minimum annuel proche de 0 mm et un maximum de 600 mm. Ces données,
issues de modèles de surface (Surfex), très locaux (Hydrus) ou empiriques (Thornthwaite) restent
néanmoins à prendre avec précaution.
Finalement, d’après ces modèles de surface les aquifères bretons seraient donc plutôt bien
rechargés par les pluies. Par exemple, en considérant que l’on capte tout l’écoulement, soit la re-
charge nette, un bassin de 3 km2 pourrait fournir 22000 personnes consommant 100 L/jr. Mais la
perméabilité et les capacités de stockage des roches de socles sont généralement trop faibles pour
en permettre l’exploitation ou pour subvenir à l’alimentation de populations importantes. La Bre-
tagne dont le sous-sol est constitué de roches cristallines s’alimente d’ailleurs essentiellement en
eau de surface.
Malgré le contexte granitique peu perméable, le site de Ploemeur produit un taux de pompage
exceptionnel. Pour les besoins en eau potable de la ville, il fournit 1.106 m3 /an depuis 25 ans. Soit
l’approvisionnement d’environ 20000 habitants. Le site de Guidel pourrait également avoir une
telle productivité. Mais n’oublions pas que ce prélèvement a forcément un impact. Malgré une
bonne conductivité, le pompage de Ploemeur a induit un cône de dépression relativement im-
portant avec un rabattement du niveau d’eau d’environ 25 m au droit des forages principaux. Les
niveaux fleurtent désormais avec le niveau de la mer, située à quelques kilomètres à l’ouest du site.
Il est clair qu’une telle sollicitation du milieu souterrain a déstabilisé l’hydrologie du bassin voire
des bassins alentour, avec principalement une réduction des apports souterrains à la surface et
une modification de la chimie de l’eau. On peut aussi se demander si la baisse du niveau d’eau n’a
pas favorisé le processus de recharge de l’aquifère et induit une diminution de l’évapotranspira-
tion.
Il n’en demeure pas moins qu’un débit aussi élevé demande à ce que la transmissivité et la ca-
pacité de stockage de l’aquifère soient suffisamment importantes. Ce fort rendement est expliqué
par la fracturation du granite et du micaschiste sur lesquels reposent le site. Le site de Ploemeur est
donc particulier car les aquifères cristallins sont rarement aussi productifs. Il soulève ainsi beau-
coup de questions. La première approche consiste donc à caractériser sa structure géologique. La
deuxième à caractériser le comportement hydrologique d’un tel milieu.
44
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
Aperçu général
Lors des forages de reconnaissance pour le futur pompage de Ploemeur, des débits allant jus-
qu’à 100 m3 /hr ont été enregistrés au niveau de zones fracturées à différentes profondeurs. Les
zones fracturées, qui ne fournissent pas toutes beaucoup d’eau, ne se situent pas à la même pro-
fondeur en fonction des forages. Comme nous allons le voir, ces fractures marquent la transition
entre les micaschistes présents en surface et le granite de Ploemeur.
Aujourd’hui, malgré un réseau très dense de puits et de nombreuses investigations géophy-
siques, on ne peut pas corréler les arrivées d’eau entre elles car la structure souterraine qui conduit
l’eau est très hétérogène et complexe [Le Borgne et al., 2006]. Pour mieux l’appréhender, il faut
d’abord faire appel à la géologie. Dans ses travaux de thèse, Touchard [1999] synthétise l’état des
connaissances sur la structure géologique du secteur, basées sur l’analyse des forages et des af-
fleurements, sur les datations des roches [Bernard-Griffiths et al., 1985] et sur une étude des ano-
malies gravimétriques [Vigneresse, 1983]. Puis, ces études seront complétées en 2010 par de nou-
velles études géophysiques dont la gravimétrie [Ruelleu et al., 2010] permettant de dessiner un
schéma géologique du site d’étude (voir figure 2.3). Le réservoir hydrogéologique est donc aujour-
d’hui assez bien compris, néanmoins la structure considérée comme aquifère reste mal imagée et
difficilement modélisable.
La structure géologique du secteur est le fruit d’évènements survenus il y a des millions d’an-
nées dans un contexte bien différent. Il y a environ 420 millions d’années (Ma), s’est formée la
chaine hercynienne suite à la collision des plaques Gondwana et Laurussia. À travers le monde, il
subsiste encore des traces de cette immense chaîne de montagnes dont le massif armoricain est
un vestige. Hormis l’augmentation du relief, la collision des plaques a provoqué la subduction de
l’une d’entre elles. En s’enfonçant, celle-ci a partiellement fondu et formé des bulles de magma qui
sont ensuite remontées par effet de densité (304 Ma environ). La remontée du fluide magmatique,
associée à la tectonique régionale, a profondément modifié la structure des roches rencontrées.
En particulier, les micashistes présents sur le site de Ploemeur.
Aujourd’hui, le contact entre le pluton granitique et l’unité micaschisteuse est visible grâce à
l’exhumation des roches. Dans les terres, la végétation et le sol masquent la majeure partie des af-
fleurements. En revanche, sur la plage de Fort-Bloqué à quelques kilomètres à l’ouest du site (voir
figure 2.1), les roches affleurent et on comprend alors l’ampleur de l’intrusion magmatique qui
s’y est produite. Le contact entre les micaschistes et le granite étant orienté est-ouest globalement
(voir la carte géologique sur la figure 2.1), les structures visibles sur la plage peuvent être extrapo-
lées au niveau des terres et en profondeur. Sur la plage, on observe une transition progressive du
granite aux micaschistes en marchant du sud vers le nord. Cette transition s’effectue sur plusieurs
centaines de mètres. Il est difficile de savoir la taille exacte de cette transition, d’une part parce
qu’elle n’est pas nette et d’autre part parce qu’on ignore comment les structures ont été inclinées
par la suite. Par exemple, les blocs pourraient être basculés de telle sorte que le contact nous ap-
paraisse en biais et il nous paraîtrait alors plus large. Peut-être que cette inclinaison est aussi une
cause de la bonne productivité du pompage. Il est difficile de conclure. Reste que cette transition
est caractéristique d’une intrusion magmatique. On voit notamment que la déformation ductile
des micaschistes est de plus en plus marquée en s’approchant du granite.
Le contact entre les deux roches est aussi marqué par l’injection de fluides magmatiques rési-
duels (pegmatites et aplites) dans les micaschistes et par des enclaves de micaschistes au sein du
granite. On peut supposer que lors de leur remontée, les bulles magmatiques ont intrudé les mi-
caschistes de manière hétérogène de telles sortes que certaines zones se sont détachées de l’unité
45
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
principale. Les filons de pegmatites et d’aplites se seraient eux mis en place plus tardivement car
leur composition correspond plus à un liquide, dit résiduel, de fin de cristallisation du magma.
Ce réseau de filons s’apparente à un système de fractures qui recoupent à la fois le granite et les
micaschistes ce qui indique qu’il s’est créé lorsque le granite avait déjà en partie cristallisé par
refroidissement. Il est difficile de savoir si ces fractures ont été engendrées par des pressions de
fluide importantes liées à la remontée du granite et sa cristallisation conjointe ou si des contraintes
tectoniques plus larges les ont ouvertes avant qu’elles ne soient injectées par les fluides résiduels.
Probablement les deux processus ont joué en même temps. Plus tardivement, des failles normales,
à composante décrochante dextre, et orientées globalement N20E sont venues décaler le contact
entre le granite et les micaschistes à plusieurs endroits. On relève cependant peu d’informations
sur ces grandes failles dont certaines semblent se prolonger jusqu’à la plage d’après la carte géo-
logique. Le pompage de Ploemeur se situe sur une de ces failles (voir la carte géologique sur la
figure 2.1).
F IGURE 2.3 – Contexte géologique du site de Ploemeur. a) Le site de Ploemeur se situe à l’ouest de Lorient, au
sud du cisaillement sud-armoricain. b) Carte géologique simplifiée du site. c) Diagramme 3D au niveau de
la zone de pompage, le contact entre les micaschistes et le granite plonge doucement vers le nord et est décalé
par une faille orientée N20E normale à composante dextre. D’après Ruelleu et al. [2010].
Enfin, il y a une centaine de millions d’années, la Bretagne était sous un climat tropical, cela
aurait généré une érosion importante des roches et surtout une altération importante des gra-
nites et des micaschistes. En témoigne en particulier la présence de carrières de kaolins au sud du
site de Ploemeur. En effet, la transformation du granite en kaolin demande une altération consé-
quente. D’après Boulvais et al. [2000], une telle altération serait le résultat combiné de processus
hydrothermaux lors du refroidissement du magma puis de l’altération plus tardive par les eaux
météoriques. La première phase aurait en quelque sorte préparé le terrain en augmentant la per-
méabilité des zones fracturées, préférentiellement le long des filons de pegmatites.
Sur les sites de Ploemeur et Guidel, implantés dans les micaschistes, il reste difficile d’évaluer
cette altération. Les nombreux forages sur la zone indiquent une épaisseur de micaschistes altérés
comprise entre 5 et 50 m. En revanche, d’après Touchard [1999], les relevés des cuttings men-
tionnent des zones très fracturées au niveau des filons de pegmatites symbolisant la transition
vers le granite. Il est parfois fait mention de zones très altérées autour de ces zones d’écoulements
préférentiels. Il est donc envisageable que les structures d’altération préférentielle ayant formées
46
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
les kaolins au sud du site soit les mêmes à 50-100 m de profondeur au droit des sites étudiés.
Nous allons maintenant présenter succinctement les principaux travaux qui se sont attachés à
comprendre les caractéristiques hydrodynamiques et hydrochimiques de cet aquifère hétérogène.
L’observatoire de Ploemeur dispose d’un réseau de forages conséquent, dont une vingtaine
est implantée dans un rayon de 700 m autour de la zone de pompage (figure 2.4). Il atteignent
typiquement une profondeur de 100 m. Une quinzaine de ces forages disposent d’un suivi ré-
gulier automatisé. De nombreux tests hydrauliques ont été menés dans les forages proches des
pompages [Le Borgne et al., 2006]. Ils permettent de caractériser les propriétés de l’aquifère de
l’échelle du forage à l’échelle de quelques centaines de mètres. Des essais de pompage de longue
durée ont aussi été menés par Le Borgne et al. [2006]. Ils constituent quant à eux des tests à grande
échelle car l’échelle d’investigation augmente pendant que la dépression se propage autour du
puits pompé. Ainsi les sollicitations de longue durée, pourvu que leur amplitude soit suffisam-
ment importante, permettent de caractériser des propriétés plus globales du système. La mise en
pompage pour l’alimentation en eau potable de Ploemeur est donc une belle expérience à grande
échelle même si l’on dispose de peu d’informations sur l’état initial du système.
F IGURE 2.4 – Carte piézométrique moyenne du site de Ploemeur. La carte est basée sur l’interpolation des
niveaux moyens mesurés dans les puits ; les niveaux sont en mètre par rapport au niveau marin (mNGF).
Le Borgne et al. [2006] concluent de ces essais à différentes échelles que la variabilité spatiale
de la transmissivité diminue lorsque l’échelle d’investigation augmente. La transmissivité à large
échelle semble converger vers 1-3.10−3 m2 /s, ce qui est à peu près la plus grande valeur obte-
nue à plus petite échelle. Ces constatations indiquent donc une bonne connectivité des zones les
plus conductrices à l’échelle du site. En revanche, le coefficient d’emmagasinement reste variable
même quand il est estimé à partir des essais de pompage de longue durée. Il est estimé entre 10−4
et 10−2 selon les forages où les niveaux sont mesurés.
47
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
Les travaux déjà très interdisciplinaires de Touchard [1999] ont révélé à partir de l’étude de la
composition chimique de l’eau des différents forages que l’eau pompée était un mélange entre des
eaux vieilles et jeunes. Les dernières études sur la géochimie des eaux de Ploemeur [Ayraud et al.,
2008; Roques et al., 2018] montrent en particulier que l’eau pompée provient de différents pôles
ou réservoirs ayant des signatures géochimiques différentes. Le pompage a d’ailleurs modifié la
contribution de ces différents pôles en réorganisant les flux souterrains.
La perturbation physique semble avoir également modifiée les processus chimiques et notam-
ment engendrée une dénitrification probablement à cause d’un mélange plus important entre des
eaux de différentes composition. En effet, localement le pompage brasse des eaux jeunes chargées
en oxygène et des eaux plus vieilles, plus minéralisées et plus chaudes aussi, ce qui peut expliquer
la réactivité.
Sur Ploemeur, nous disposons donc d’un suivi des concentrations en CFC dans l’eau des fo-
rages. Ces composés sont des gaz dissous qui proviennent des eaux de pluie. L’évolution de la
concentration de ces gaz dans l’eau de pluie est connue et mesurée (figure 2.5). Elle est particu-
lière étant donné que ces gaz sont d’origine industrielle et ont augmenté constamment de 1944
aux années 2000, avant de commencer à réduire lentement depuis l’entrée en vigueur du proto-
cole de Montreal (fin des années 1980) limitant leur utilisation (voir figure 2.5).
F IGURE 2.5 – Concentrations en gaz CFC dans les eaux de pluies depuis 1940. D’après National Oceanic and
Atmospheric Administration.
Leur prélèvement s’effectue par un pompage des zones les plus transmissives dans les forages,
puis au bout d’un certain temps la concentration est relevée et est supposée être représentative
de l’aquifère localement [Labasque et al., 2014]. Les pluies chargées en CFC, dont seule une par-
tie s’infiltre selon nos modèles de recharge, constituent donc un test de traçage à l’échelle de
l’aquifère. Un inconvénient est que la concentration "injectée" forme un plateau à partir des an-
nées 1990. Par conséquent, comme le temps caractéristique sur Ploemeur semble plus faible que
l’âge de ce plateau, ses données seront moins discriminantes que si nous avions l’évolution des
CFC dans les forages avant les années 1990. Par exemple, imaginons que l’eau de pluie mette en
moyenne 10 ans à circuler de la surface du sol aux puits de pompage, alors des mesures effectuées
en 2010 vont être assez proches de mesures effectuées en 2000 et seront donc très peu discrimi-
48
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
nantes.
D’autres problèmes apparaissent du point de vue pratique. L’étude des données montre en ef-
fet une éventuelle pollution aux CFC dans l’aquifère du fait de valeurs anormalement élevées pour
être le seul fait des écoulements souterrains (figure 2.6). Cette pollution est de plus mal évaluée
dans l’espace et la très faible concentration en CFC due aux seules précipitations est facilement
perturbée par des pollutions extérieures.
Aussi, l’étude des mesures montrent que les concentrations des trois types de CFC étudiés
(CFC11 ,CFC12 et CFC113) sont parfois discordantes au sein des mêmes forages sans logique ap-
parente. Pour valider une mesure de CFC au niveau d’un forage, nous avons comparé l’âge obtenu
en fonction de chaque CFC à partir d’un modèle simple classiquement utilisé (travail effectué par
T. Labasque). Nous n’avons alors conservé que les données pour lesquelles l’âge était similaire
pour au moins deux types de CFC (voir par exemple les forages conservés pour le CFC113 dans
l’encart de la figure 2.6). Ces écarts importants ne peuvent être attribués à une dégradation hété-
rogène et différente de certains CFC où à la présence de pollutions.
L’échantillonnage de ces traceurs joue également un rôle essentiel au vu de l’hétérogénéité et
de la complexité de l’aquifère fracturé. Les concentrations sont sans doute différentes si le forage
intercepte une structure plus ou moins profonde et plus ou moins conductrice. Pour résumer, il
reste délicat d’interpréter les concentrations mesurées en terme de processus hydrogéologiques
de façon qualitative.
F IGURE 2.6 – Concentrations en CFC113 dans les forages de Ploemeur. Y figure en noir la concentration dans
l’atmosphère. L’encart représente, en fonction de la distance au pompage, les concentrations moyennes dans
les forages pour lesquels les concentrations en CFC11 ou CFC12 sont cohérentes avec celles en CFC113.
Plusieurs études [Biessy et al., 2011; Moreau and Dauteuil, 2013; Moreau et al., 2006] ont com-
paré les déplacements verticaux mesurés par des GPS aux variations piézométriques dans les
forages. Elles ont permis d’estimer le coefficient d’emmagasinement spécifique (multiplié par
l’épaisseur de l’aquifère) de l’aquifère à environ 3.10−3 d’après les variations hydro-mécaniques
mesurées à l’échelle saisonnière. En revanche, la comparaison entre les variations piézométriques
49
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
et les déplacements verticaux suite à un essai de pompage de 40 heures est plus délicate. Au vu
de l’incertitude de mesure associée au GPS (de 1 mm à 1 cm), Moreau and Dauteuil [2013] éva-
luent tout de même l’emmagasinement à 8.10−4 sur ce test à court terme. D’après Biessy et al.
[2011], les déformations verticales enregistrées sont dépendantes de l’implantation du GPS et des
variations piézométriques associées, mais l’ordre de grandeur du coefficient d’emmagasinement
estimé reste le même. Ils relèvent de plus l’influence de l’eau stockée dans les premiers horizons
du sous-sol qui ferait gonfler le sol au début de la saison humide, ce qui expliquerait l’avance de
phase du GPS par rapport à la piézométrie. Enfin, ces différents auteurs mentionnent aussi la ré-
versibilité des déplacements horizontaux et verticaux entre les saisons.
Ces corrélations entre les déformations verticales et les variations piézométriques révèlent
donc le caractère confiné de l’aquifère car la structure souterraine "se gonfle" quand la charge
hydraulique augmente et inversement. De plus, la compressibilité de l’aquifère semble élevée
d’après les estimations du coefficient d’emmagasinement. On interprète cette forte compressi-
bilité par la capacité à s’ouvrir et se comprimer de la zone fracturée.
Le site de Ploemeur a été instrumenté par des inclinomètres longue-base dès 2006 (LB1 N75E
et N328E). Ces instruments mesurent l’inclinaison du sol avec une précision de l’ordre de 10-9rad,
soit un dénivelé de 1 mm sur 1000 km. Comme pour les GPS, on suppose que le dispositif expéri-
mental est parfaitement couplé à la roche, donc qu’il n’y a pas de pertes de signal entre le support
naturel et l’instrument. Cela reste difficile à prouver étant donné la quantité de bruit non expliqué
qui peut apparaitre dans ces mesures dites (hydro)géodésiques.
À partir d’un essai de pompage suivi entre autres par ces inclinomètres longue base, Schuite
et al. [2015] évaluent par inversion d’un modèle hydro-mécanique le coefficient d’emmagasine-
ment de l’aquifère à 3, 4.10−4 -1, 4.10−3 et la transmissivité à 3, 7.10−3 -1, 2.10−2 m2 /s. De plus, l’ex-
périence a également montré que l’orientation de la faille propice à l’écoulement serait plutôt
N30E.
Le plan de déformation obtenu par le produit vectoriel de deux signaux inclinométriques
orientés dans les directions N75E et N328E semble s’incliner chaque année selon un axe nord-
sud grossièrement [Schuite, 2016]. La figure 2.7 retrace l’orientation de cette direction principale
de déformation mesurée entre 2006 et 2011. Elle montre notamment que la direction est sensi-
blement différente entre la montée et la baisse des niveaux piézométriques. Lorsque les niveaux
piézométriques sont en train de monter le plan s’incline selon un axe nord-nord-ouest, et plutôt
nord-nord-est quand les niveaux baissent. Contrairement à l’expérience court-terme mentionnée
précédemment, l’interprétation de ces déformations à l’échelle saisonnière est plus délicate car
des processus à plus grande échelle peuvent intervenir. À l’échelle saisonnière, les écoulements
des zones de recharge vers l’exutoire (ici le pompage) peuvent influencer voire constituer la ma-
jeure partie du signal temporel mesuré par l’inclinomètre. On distingue d’ailleurs pour certaines
années les fluctuations imputées aux variations journalières de débit (sur les montées 2010 et 2011
par exemple sur la figure 2.7). Il reste aussi envisageable que les fluctuations saisonnières du débit
influencent le signal inclinométrique ce qui expliquerait la différence de comportement entre la
baisse des niveaux, au moment où les pompages augmentent, et leur remontée. Ces observations
restent néanmoins à nuancer au vu du rôle incertain des fluctuations de pompage à proximité et
du comportement inexpliqué de l’inclinomètre LB1 N328E.
À l’échelle d’une dizaine de kilomètres carrés comprenant le site de pompage, Leray et al.
[2014, 2012] ont modélisé l’aquifère avec une structure proche de celle présentée sur l’encart c)
de la figure 2.3. Les auteurs ont choisi de donner une certaine épaisseur à la zone de contact et
à la faille N20E, ces deux structures constituant des zones de fortes perméabilités. L’objectif était
d’évaluer la sensibilité des temps de résidence de l’eau pompée à la structure du modèle. Comme
50
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.7 – Évolution saisonnière de la direction du plan de déformation mesuré par les inclinomètres LB1
N75E et N328E. Les couleurs correspondent à des périodes de baisse et de montée du niveau d’eau dans l’aqui-
fère (respectivement de mars à novembre et de novembre à mars généralement) ; pour une meilleur lisibilité
le tilt est remis à zéro entre chaque période ; les puits de pompage sont dans la direction N70E en moyenne ; le
pendage du plan en µrad est indiqué par les cercles concentriques.
déjà suggéré auparavant, il apparaît que la zone de contact par son faible pendage intercepte et
conduit une quantité importante d’eau infiltrée sur le bassin. La faille favoriserait quant à elle le
drainage de la zone de contact vers la surface. Dans un premier temps, le modèle calibré sur le
niveau d’eau moyen au principal puits pompé a permis d’évaluer la transmissivité moyenne de
l’aquifère à 1,7-3 .10−3 m2 /s. Dans un second temps, la calibration obtenue sur l’âge CFC12 au
puits de pompage a permis de contraindre le produit de l’épaisseur moyenne et de la porosité du
modèle à une valeur de 6-10 m.
Jimenez-Martinez et al. [2013] ont utilisé un modèle analytique 1D beaucoup plus simple pour
étudier la réponse temporelle du système aquifère de Ploemeur. Les auteurs analysent la fonction
de transfert dans le domaine fréquentiel entre la piézométrie mesurée dans différents puits et le
taux de recharge estimé par un modèle de type Thornthwaite. Malgré l’hétérogénéité de l’aquifère,
les auteurs démontrent que le comportement du système s’apparente à un modèle de réservoir
linéaire à l’échelle saisonnière. Cependant, les paramètres de ce modèle dépendent des puits ana-
lysés signifiant que les propriétés varient dans l’espace. Par analogie avec un modèle de Dupuit, la
transmissivité est estimée entre 4.10−3 et 4.10−2 m2 /s. Le coefficient d’emmagasinement varie lui
entre 5.10−3 et 5.10−2 .
L’hétérogénéité de l’aquifère se manifeste donc à travers les observations des cuttings de fo-
rages et à travers la variabilité des comportements hydrauliques observés dans ces mêmes forages.
51
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
On peut conclure que la transmissivité est très variable localement mais qu’elle s’homogénéise à
plus grande échelle. Au niveau des forages, elle dépend de l’interception des structures conduc-
trices. Les mesures de la chimie et de la température de l’eau dans les forages indiquent aussi une
hétérogénéité importante et une contribution différente des structures. Malgré, des informations
sur l’origine de l’eau ces dernières mesures ne permettent pas encore de valider un modèle phy-
sique représentant les principales structures contrôlant le comportement hydrologique du milieu
souterrain.
La compréhension du site est synthétisée à travers la figure 2.8. Cette conception résulte du sa-
voir emmagasiné sur le fonctionnement hydrogéologique de l’aquifère. Cependant, cela reste une
image simplifiée de la réalité. La capacité de stockage des structures et leur connexion demeurent
méconnues à cette échelle de l’ordre de quelques kilomètres. De même, les processus de recharge,
localisés dans des fractures sur cette illustration, restent non identifiés. Pour valider cette vision
du site de Ploemeur, mais aussi pour un besoin de compréhension, des modèles doivent être im-
plémentés. Plusieurs options sont possibles. Il apparaît que l’on dispose d’une connaissance préa-
lable du site à l’échelle du secteur sur la figure 2.3 et la figure 2.8. Mais cette connaissance reste
principalement qualitative à l’échelle du site de pompage.
F IGURE 2.8 – Schéma conceptuel de l’aquifère fracturé de Ploemeur. D’après Jimenez-Martinez et al. [2013].
D’après la figure 2.8, les volumes d’eau circulant et contribuant au pompage sont symbolisés
par la taille des flèches. La figure 2.9, dont les chiffres sont issus de l’analyse de différents élé-
ments chimiques dans le puits de pompage et les puits d’observation, donne des informations
plus quantitatives sur la contribution des différentes structures. L’enjeu est donc d’expliciter ces
flèches à travers un modèle physique. Néanmoins, la représentation des structures et la paramé-
trisation qui lui est associée n’est pas évidente. Il est donc difficile de modéliser ces structures
à partir des équations d’écoulement en milieux poreux au vu des incertitudes sur les conditions
limites et sur l’organisation et les propriétés des structures géologiques.
Le pompage de Ploemeur prouve que la zone conductrice (si on peut considérer qu’il n’y en a
qu’une) s’inscrit dans un système plus vaste à l’échelle annuelle. En effet, malgré un prélèvement
de 1.106 m3 /an, le niveau piézométrique, donc le stock d’eau, s’est stabilisé après environ 5-7 ans
de diminution (voir figure 2.10). Cette zone conductrice est donc capable de drainer et conduire
un volume de pluie tombé sur une aire d’alimentation d’au moins 3 km2 en supposant un taux de
recharge par les pluies de 0.27 m/an (valeur haute).
De manière intuitive, on peut supposer que les chances de tomber sur des fractures très conduc-
trices augmentent avec le volume sondé, à condition que les structures soient connectées à plus
grande échelle comme cela semble être le cas sur le site de Ploemeur. Ainsi, malgré la complexité
52
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.9 – Un autre schéma conceptuel de l’aquifère fracturé de Ploemeur. Les contributions des différentes
structures au débit de pompage sont estimées à partir de l’analyse des concentration en éléments chimiques
dans les forages. D’après Roques et al. [2018].
et l’hétérogénéité du milieu, on peut envisager de le décrire plus simplement par quelques struc-
tures principales [Leray et al., 2012] voire par un seul milieu équivalent [Jimenez-Martinez et al.,
2013]. Dans ce cas, il est décrit par des propriétés moyennes équivalentes, des conditions limites
(climat, pompage, topographie) et des lois physiques.
L’observatoire hydrogéologique de Ploemeur repose donc sur une structure souterraine hé-
térogène qui se caractérise par des flux souterrains importants localement. À l’échelle du réseau
de forages, les observations ne révèlent aucune corrélation entre la profondeur et les fractures les
plus productrices si ce n’est une légère augmentation de leur densité avec la profondeur. Il est pro-
bable que le même type de structure contrôle le comportement à l’état naturel du site de Guidel et
pourrait expliquer le débit assez élevé du cours d’eau. De manière générale, ces sites sont des ob-
servatoires privilégiés du comportement hydro(géo)logique en contexte hétérogène pour étudier
comment le milieu souterrain impacte la redistribution de l’eau des pluies et comment il interagit
avec la surface.
La question de l’origine de l’eau sur Ploemeur reste d’actualité malgré un impressionnant suivi
depuis plus de 25 ans. Est-ce que l’eau vient principalement de l’infiltration sur le bassin versant
topographique du pompage ou vient-elle de plus loin ? Est-elle distribuée de façon homogène ou
localisée dans des chemins préférentiels, des fractures reliant la surface à l’aquifère ? Enfin, que
vaut le taux de recharge ? Nous n’avons pas d’estimation robuste de cette recharge sur l’observa-
toire de Ploemeur.
De manière générale, cette thématique scientifique ne s’applique pas uniquement à un ob-
servatoire mais à l’ensemble des systèmes hydrologiques. Les processus de recharge des aquifères
(voire de redistribution des pluies) font globalement l’objet d’estimations incertaines et peuvent
mener à une mauvaise compréhension puis de mauvaises prévisions (voir par exemple les incerti-
tudes de modélisation obtenues par Hartmann et al. [2017] à plus grande échelle). De plus, le site
de Ploemeur constitue une opportunité d’évaluer comment les pompages déstabilisent l’environ-
nement et comment la ressource évolue dans le temps. La figure 2.10 illustre cet aspect transitoire
avec des variations annuelles de la ressource disponible amplifiées par le pompage. D’autant plus
53
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.10 – Évolution de la ressource en eau à travers la piézométrie à Ploemeur en fonction des forçages
anthropiques et climatiques.
Une autre question scientifique qui se rapporte à l’observatoire de Ploemeur est le compor-
tement des systèmes fracturés. Comment les fractures sont connectées, comment transmettent-
elles l’eau ? Comment se déforment-elles ? Et comment peut-on les caractériser à partir des obser-
vations ? Les mesures permettent de nous informer localement, mais estimer des propriétés qui
nous intéressent à notre échelle reste un vrai défi dans ce type de système. Les applications qui
découlent de ces recherches sur le rôle des hétérogénéités et le comportement hydraulique de ces
systèmes sont diverses. On peut citer le stockage de déchets, le stockage de CO2 , la géothermie,
les interactions entre les aquifères et les rivières, la compréhension des processus de recharge ou
encore la réactivité chimique.
Pour finir, ces systèmes hétérogènes mènent à des processus géochimiques complexes. Dans
ce type de système, la composition géochimique de l’eau des forages est le résultat d’un mélange
d’eaux d’origines différentes. Le temps de séjour de l’eau issue des pluies dans les aquifères ainsi
que sa distance parcourue dans le milieu aboutissent théoriquement à une signature particulière.
En réalité, les eaux souterraines provenant de différents compartiments se mélangent et peuvent
mener à des réactions bio-géochimiques. Il est envisageable que le mélange et donc la réactivité
soient exacerbés dans les systèmes fracturés. Néanmoins, la modélisation des processus géochi-
miques nécessitent des modèles physiques d’écoulement. Or, nous avons vu que ces modèles font
défaut en contexte hétérogène. D’autant que les processus géochimiques ne se produisent pas for-
cément à la même échelle que les processus d’écoulement que l’on souhaite représenter [Babey,
2016].
À Ploemeur, le pompage a modifié la chimie de l’eau avec un temps de réponse d’un dizaine
d’années, donc plus long que la piézométrie (figure 2.11). Cette estimation provient de Roques
et al. [2018]. Il apparaît que la décomposition de l’eau pompée en différents pôles (la fraction de
chaque pôle est indiquée sur l’échelle verticale de la figure 2.11) ait mis environ 10 ans pour trou-
ver un nouvel équilibre. Cette modification est liée aux parcours différents de l’eau imposé par
le pompage qui oriente les flux dans sa direction et augmente considérablement les gradients hy-
54
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
drauliques. Désormais, les vitesses de circulation sont plus grandes, donc le temps de contact avec
les roches est plus court pour l’eau qui tombe à proximité du pompage. L’évolution de la chimie
de l’eau suite au pompage constitue donc une belle expérience à grande échelle pour comprendre
les processus de mélanges.
F IGURE 2.11 – Évolution des pôles chimiques dans l’eau pompée à Ploemeur. Le temps pour atteindre un équi-
libre de la chimie de l’eau est d’environ 10 ans contre seulement 5-7 ans d’après la piézométrie. Cependant,
les signaux montrent toujours des fluctuations annuelles. D’après Roques et al. [2018].
L’observatoire de Guidel est un site à priori très comparable à celui de Ploemeur situé à quelques
kilomètres (figure 2.1), hormis qu’il n’y a pas de pompage à Guidel. Le contexte géologique semble
en effet très similaire au premier ordre si ce n’est que le site de Guidel est plus éloigné de la zone
de contact entre les micaschistes et le granite située à quelques centaines de mètres plus au sud.
La localisation de cette zone de contact en surface est en fait incertaine car on a vu qu’elle n’était
pas franche d’après les forages et les affleurements et qu’elle était masquée en grande partie par
les sols. Il en résulte que le granite plongeant sous les micaschistes n’est pas atteint par les diffé-
rents forages de Guidel malgré leur profondeur moyenne d’environ 100 m. En revanche, les forages
intersectent des zones fracturées et des arrivées d’eau tout comme sur le site de Ploemeur. Cela
signalerait qu’au moins la partie supérieure de la zone de contact est atteinte. Pour cette raison le
site a été choisi pour une mise en pompage par Lorient Agglomération dans un futur proche.
Le bassin qui nous intéresse, situé en partie sur la commune de Saint-Mathieu, comprend deux
55
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
rivières se rejoignant au niveau d’une zone humide d’environ 0,04 km2 puis se jetant dans l’étang
de Lannénec quelques centaines de mètres en aval (figure 2.12). Le débit de rivière présente la
particularité d’être plutôt élevé comparé à la superficie de son bassin versant topographique (2,6
km2 ). Si on compare à Ploemeur, au lieu d’être attirer vers un pompage, les eaux souterraines
convergent vers la surface principalement dans les bas topographiques donnant naissance à une
rivière et une zone humide. Cependant, une part inconnue de ces eaux souterraines continuent
de s’écouler et gagne la surface plus en aval du bassin versant d’étude.
Le cours d’eau le plus au nord est moins important, voire parfois à sec durant l’été. En re-
montant les cours d’eau, on note également la présence de quelques zones humides en plus de
la principale. Ces zones seraient alimentées par l’aquifère dont la charge hydraulique est par en-
droit supérieure à la topographie comme en atteste la présence de plusieurs piézomètres artésiens
(PZ2, PZ26, PZ23). On peut voir par la présence de cette zone humide permanente et par les débits
de rivières importants, la signature en surface de flux hydrogéologiques importants.
F IGURE 2.12 – Vue Google Earth du site de Guidel ; la zone humide délimitée en vert est d’environ 0,04 km2 ; y
figure les différents forages ainsi que la localisation de la station de jaugeage.
Sur Guidel, un pompage de deux mois a été réalisé en 2009 afin d’évaluer la transmissivité
du site en vue d’un pompage complémentaire pour la ville. L’essai de pompage a été réalisé de
septembre à novembre 2009 à travers trois forages en bordure nord de la zone humide principale.
Le débit imposé était en moyenne de 150 m3 /hr (180 m3 /h au maximum), soit un débit un peu
plus grand que le pompage de Ploemeur (120 m3 /h en moyenne). Le niveau piézométrique a été
suivi grâce à un réseau de 18 piézomètres captant de 52 à 150 m de profondeur (figure 2.12). Ce
réseau permet aujourd’hui un suivi automatisé des niveaux piézométriques.
Les niveaux mesurés au cours du pompage n’ont pas tous évolués de la même façon en fonc-
tion des forages. Au niveau des puits de pompage et de la plupart des puits d’observation, le ra-
battement a atteint une valeur maximale de 25 m, le niveau piézométrique est alors passé à une
quinzaine de mètres sous le niveau marin. Certains puits se démarquent avec un rabattement
56
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
beaucoup plus faibles. Il s’agit principalement des puits au nord et à l’est du site : PZ16, PZ17,
PZ18 et PZ24. D’autres semblent très peu affectés par le pompage : PSR1, PSR2, PZ15, PZ2, PZ15 et
PZ25. Les piézomètres sur les hauts de versant dans la partie est ont donc tendance à ne pas réagir
au pompage. Ces derniers ne semblent pas connectés à la structure conductrice et de plus cer-
tains n’intersectent pas de zones fracturées. Pour la plupart des forages aux alentours de la zone
humide, la connectivité semble bonne et la réponse au pompage semble surtout fonction de la
distance à celui-ci.
D’après l’interprétation par la méthode de Theis des rabattement dans les forages très influen-
cés par le pompage, la transmissivité du milieu serait de l’ordre de 3.10−4 m2 /s et le coefficient
d’emmagasinement serait lui plus variable, entre 1.10−3 et 1.10−1 (Lenaig Rolland du Roscoat, rap-
port de stage de Master 1, Géosciences Rennes, 2010).
Le rayon d’action de l’essai de pompage est difficile à évaluer. En effet, plus la distance au
pompage augmente et plus son influence est faible et se mêle aux variations piézométriques sai-
sonnières. Au moment du pompage à la fin de l’été, les niveaux piézométriques étaient en effet
déjà en cours de diminution (Attaher Souleymane Gourgoudou, rapport de stage de Master 1, Géos-
ciences Rennes, 2016).
57
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
350
Streamflow at Guidel
300
250
Flow rate [m3/hr]
200
150
100
50
0
Mar Apr May Jun Jul
Year 2017
F IGURE 2.13 – Débit de rivière mesuré à Guidel, ramené au pas journalier ; la mesure initiale porte sur la
hauteur d’eau dans la rivière à une fréquence de 4 minutes.
nières était néanmoins suffisant pour expliquer les débits observés. Mais quelle part serait alors
laissée à l’évapotranspiration ?
À noter que cette unique année de mesure était exceptionnellement sèche en terme de re-
charge modélisée, nous verrons par la suite que les pluies efficaces étaient bien plus importantes
les années précédentes. Cependant, nous ne disposions que de ces mesures de débit. La repré-
sentation de cette période particulière est donc un défi pour la modélisation de la recharge et des
écoulements souterrains.
F IGURE 2.14 – Comparaison entre les cumuls du débit de la rivière et de la recharge par les pluies ; les précipi-
tations sur le bassin sont également représentées ; le débit a été ramené en millimètres après division par l’aire
du bassin versant topographique de la station de jaugeage.
58
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
À l’échelle du secteur, la compréhension du site de Guidel est donc la même que celle de Ploe-
meur. L’aquifère semble tout aussi hétérogène. Néanmoins, les conditions limites sont sensible-
ment différentes. Alors que le pompage constitue le principal exutoire du milieu souterrain à Ploe-
meur, le site de Guidel en présente plusieurs. Le débit de rivière qui est mesurable, les écoulements
souterrains qui ne le sont pas, et une éventuelle reprise évapotranspiratoire au niveau de la zone
humide.
Malgré l’hétérogénéité, les gradients piézométriques et donc les flux restent globalement orien-
tés des hauts topographiques vers les bas topographiques. Ce qui permet vraisemblablement d’ali-
menter les deux rivières et la zone humide. En revanche, d’après les débits de rivières importants
et l’évapotranspiration supplémentaire au niveau de la zone humide, il est probable qu’une part
des eaux souterraines proviennent des bassins voisins.
Les questions scientifiques associées au site de Guidel sont identiques à celles du site de Ploe-
meur. La comparaison des deux sites qui sont très comparables structurellement et géographique-
ment pourrait permettre de mieux évaluer l’impact des pompages. Notamment d’estimer l’impact
sur la redistribution de l’eau entre évapotranpiration, écoulement de subsurface et recharge de
l’aquifère.
L’étude du piézomètre PZ26 a récemment révélé l’influence des écoulements à travers les frac-
tures sur le transport réactif [Bochet, 2017]. Les résultats soulignent l’importance de l’hétérogé-
néité et de la variabilité des flux pour les processus biochimiques.
Le suivi de l’état initial du site de Guidel permettra d’ailleurs de mieux quantifier la future dé-
stabilisation qu’engendrera le pompage. Cette déstabilisation sera suivie à différents niveaux par
plusieurs types d’observables. Principalement à l’échelle du bassin versant par la piézométrie, la
géochimie et la température dans les forages, par une station GPS et par les mesures de la station
de jaugeage en sortie du bassin. En complément, on pourra envisager un suivi dans les puits de
pompage qui constitueront alors le principal exutoire du bassin. À l’échelle de la zone humide
par un suivi des températures et des variables associées à la géochimie et à l’écologie. La mise
en pompage va impacter les échanges verticaux au niveau de la zone humide et surtout les ap-
ports souterrains à l’écosystème en surface. Le suivi de la réponse du milieu en terme de bilan
hydrologique et d’écologie est donc important. Sur Ploemeur, malgré le rabattement, une rivière
continu de s’écouler à quelques centaines de mètres du site. Le site de Guidel constitue ainsi un
observatoire unique de la zone critique à l’échelle locale et à l’échelle du bassin versant.
Contexte géographique
Le bassin versant du Rhin à partir de son exutoire à Lobith, à la frontière entre l’Allemagne
et les Pays-Bas, couvre une superficie de 0,16 Mkm2 . Le fleuve se jette dans la mer du Nord un
peu plus en aval. Le bassin couvre la partie nord-ouest des Alpes, l’ouest et le nord des Vosges,
l’Alsace et un tiers de l’Allemagne. Le climat y est continental et plutôt humide avec toutefois une
variabilité climatique assez prononcée notamment à cause du relief. Les précipitations vont par
exemple jusqu’à 2 m/an au sommet des Vosges contre moins de 600 mm/an à Colmar. Le bassin
59
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
présente des contextes assez différents : des zones de plaines, des montagnes et des vallées. La
géologie est aussi assez variée. Elle essentiellement constituée de roches silicoclastiques (grès) et
de sédiments non consolidés. S’y ajoute une variabilité des types de couverture en surface comme
la neige, les forêts, les champs, les lacs ou les aires urbanisées.
La région est en effet très urbanisée (50 millions d’habitants environ) et industrialisée. La
consommation y est donc importante. De même, cette urbanisation s’accompagne d’infrastruc-
tures importantes sur le fleuve en lui-même notamment des centrales nucléaires et des barrages
dans la partie supérieure.
L’avantage d’étudier le bassin du Rhin est la disponibilité des mesures. De nombreuses me-
sures de terrain sont en effet disponibles notamment celles du débit des rivières et de la piézomé-
trie. La région constitue ainsi un site d’étude à l’échelle continentale. Elle sera modélisée par un
modèle à large échelle, CWATM, présenté dans le chapitre suivant.
Il s’agit dans les parties suivantes de présenter succinctement les observations disponibles
à l’échelle du bassin du Rhin. Ces données intègrent des échelles très différentes et ne sont pas
toutes spécifiques à l’hydrologie à large échelle. Elles permettent à elles seules d’expliquer glo-
balement le bilan hydrologique du bassin. Ces observations peuvent être séparées entre données
d’entrées et données de calibration ou de contrôle du modèle. L’évapotranspiration se situe entre
les deux.
Pour les modèles hydrologiques, les seules véritables variables d’entrées sont les données cli-
matiques telles que les précipitations, la température, la vitesse du vent ou encore l’ensoleille-
ment. Ici, on ajoutera aussi l’évapotranspiration potentielle qui découle de ces conditions clima-
tiques et ne dépend pas de l’état hydrique en surface.
Les forçages climatiques sont tous issus de données satellites extrapolées temporellement à
un pas journalier. Elles sont généralement le résultat de l’inversion d’images satellitaires alimen-
tées par des mesures de terrain plus fiables car plus directes. Ici, elles proviennent de la base de
données WFDEI ("WATCH Forcing Data methodology applied to ERA-Interim data") présentée
notamment par Weedon et al. [2014]. Cette base de données fournit toutes les données clima-
tiques usuelles de 1961 à 2013 avec une résolution de 30’ (soit 0,5° ou environ 50 km à l’équateur).
Cette résolution est donc égale ou plus basse que celle que nous utilisons dans le modèle CWATM
qui est de 5’ ou 30’, mais nous n’avons pas mieux !
En dépit de la faible représentativité apparente des stations météorologiques, les comparai-
sons avec les modèles satellites semblent satisfaisantes à l’échelle journalière d’après Weedon
et al. [2014]. Il ne faut cependant pas oublier que les extrapolations des données satellites sont
ajustées à partir de ces mêmes stations. De même, elles sont corrigées pour boucler les bilans
de masse des grands bassins versants [Ngo-Duc et al., 2005] à partir de modèles hydrologiques à
grande échelle. Des biais et incertitudes sont donc présents dans ces mesures brutes apparentes.
Ces jeux de données sont ensuite utilisés pour calculer l’évapotranspiration potentielle par la
méthode de Penman-Monteith ou celle de Priestley et Taylor [Weedon et al., 2011]. Le taux d’éva-
potranspiration réelle calculé par le modèle hydrologique CWATM est ensuite limité par cette va-
leur potentielle de référence et par le contenu en eau modélisé dans les sols.
60
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
Principe
Les modèles numériques permettent de restituer en tout point les variations temporelles des
flux et des contenus en eau, ce qui permet alors une comparaison directe avec les observations.
En théorie, rien n’empêche de comparer les sorties d’un modèle "grande échelle" aux observations
utilisées pour la modélisation à petite échelle. Ce n’est généralement pas le cas étant donné que
les objectifs sont assez différents entre les échelles. C’est pourtant la pertinence de ces données
et leur capacité à informer les modèles qui importent principalement. Il semble peu pertinent
de calibrer un grand modèle sur une donnée ponctuelle peu intégrative. Sauf si cette donnée est
aussi disponible à d’autres endroits du bassin. Dans ce cas, si la densité des mesures est assez
importante, ces dernières peuvent informer sur la variabilité spatiale des processus et donner des
tendances. L’exemple opposé est la mesure du débit à l’exutoire, dans notre cas le débit du Rhin
est mesuré à Lobith à la frontière entre les Pays-Bas et l’Allemagne. Cet unique point de mesure
rassemble la somme de toutes les pluies et neiges moins l’évapotranspiration et les variations de
stock sur la partie nord des Alpes, le flanc est des Vosges, l’Alsace et un tiers de l’Allemagne.
On a vu qu’à l’échelle de quelques kilomètres carrés les données de débit sont intéressantes
mais difficiles à calibrer. Principalement car les flux souterrains sont plus importants pour le bilan
hydrologique du bassin à petite échelle. Au contraire, le débit à l’exutoire d’un grand bassin est
plus facile à restituer car les échanges souterrains avec les bassins voisins diminuent en propor-
tion.
L’objectif des données de calibration est donc d’abord de vérifier le réalisme du modèle ou
plutôt de vérifier son aptitude à reproduire les observations et les variables clefs pour la gestion de
l’eau. L’objectif est ensuite d’étudier la contrainte que ces données exercent sur les paramètres du
modèle et sur la représentation des processus.
Pour le bassin du Rhin en particulier, on peut s’appuyer sur un réseau conséquent de piézo-
mètres dont seuls les niveaux d’eau moyens sur des périodes variables ont été extraits (seules ces
données sont accessibles actuellement). Cette base de données a auparavant été compilée par Fan
et al. [2013] puis a été utilisée spécifiquement pour le Rhin par Sutanudjaja et al. [2014]. Elle est
présentée sur la figure 2.15. Ces mesures sont néanmoins à prendre avec précaution car elles com-
portent de nombreux biais. Les piézomètres sont par exemple principalement implantés dans la
partie aval de la plaine du Rhin. Nous procèderont donc à un ré-échantillonnage des données.
Ensuite, la localisation de ces piézomètres est rarement anodine et est surement corrélée avec la
présence d’aquifères exploitables donc plutôt transmissif. Ce qui implique aussi la probable in-
fluence de pompages à proximité de ces forages, donc des niveaux anormalement bas. Une poi-
gnée de piézomètres avec des variations temporelles a également été extraite à partir de la base de
données du BRGM. Ils se situent malheureusement tous dans la même zone au niveau de la plaine
d’Alsace.
61
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
F IGURE 2.15 – Réseau piézométrique et de mesure du débit sur le bassin du Rhin. Le fond en couleur représente
la topographie à 200 m de résolution.
Le débit du Rhin en plusieurs points (voir figure 2.15) est le deuxième observable in-situ qui
va nous intéresser. D’une part, ces données permettent d’observer la redistribution spatiale de
l’eau. En effet, le fait d’avoir plusieurs points de mesures permet de spatialiser les informations et
d’évaluer la qualité de la représentation du débit à différentes échelles ou en fonction du contexte
géographique. On peut envisager dans le futur d’ajouter des points de mesures sur les affluents
du Rhin, notamment la Moselle qui en contient également un nombre conséquent. Cette spatiali-
sation des données de débit pourrait alors s’apparenter à une contrainte sur les flux souterrains à
une échelle intermédiaire.
D’autre part, les variations temporelles des débits peuvent apporter une information diffé-
rente et notamment aider à évaluer la part d’eau évapotranspirée et stockée en surface et en pro-
fondeur. L’intérêt est aussi de capturer la dynamique temporelle du bassin et d’en tirer des pro-
priétés caractéristiques. On pense notamment au temps de réponse du système à des forçages
climatiques de différentes fréquences.
Ces observations sont complétées par des données satellites spatialisées qui fournissent in-
directement des données hydrologiques. En effet, ces mesures à distance portent sur des obser-
vables qui sont reliés au cycle hydrologique par une calibration sur des mesures de terrain ou à
l’aide de modèles.
62
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
Les données GRACE (Gravity Recovery and Climate Experiment) fournissent les variations de
masse d’eau du bassin à un pas de temps de 10 jours d’après le Groupe de Recherche de Géodésie
Spatiale (GRGS) ou de un mois d’après le "Center for Space Research" (CSR). Elles contraignent
ainsi à chaque période de temps la somme des précipitations moins le débit sortant Qout l et (sou-
terrain + exutoire du Rhin) et l’évapotranpiration réelle AET, ce qui est égal à la variation totale du
stock (neige, sol, lac et aquifère). Le signal mesuré par GRACE, ∆M, vérifie donc les équations 2.1
et 2.2 :
∆M = ∆MGroundwater + ∆MSoil Moisture + ∆MSurface water + ∆MIce and Snow (2.1)
∆M = P − AET − Qout l et (2.2)
valables pour l’ensemble du bassin considéré et à un pas de temps donné.
Ces données issues initialement de l’inversion des variations gravimétriques mesurées par
GRACE sont limitées à une résolution de l’ordre de 300 km. Elles contiennent une incertitude non
négligeable du fait de la non unicité de la solution et du recours à des modèles hydrologiques pour
l’inversion des mesures brutes [Longuevergne et al., 2007, 2010]. Elles sont très intégratrices, au
même titre que le débit à l’exutoire Qout l et . D’après l’équation 2.2, les mesures du débit à l’exu-
toire et de GRACE fournissent une estimation de l’évapotranspiration AET en supposant que les
précipitations, P, ne constituent pas le terme critique à déterminer.
Dans la littérature, on retrouve trois utilisations des données issues de GRACE. La première
est l’utilisation de GRACE comme variable de calibration des modèles (on peut citer notamment
l’article de Werth et al. [2009] illustrant la complémentarité avec les mesures de débit dans l’op-
timisation de l’inversion). La deuxième approche consiste à estimer l’évapotranspiration à partir
du bilan de masse (équation 2.2) avec notamment les travaux de Long et al. [2014]; Ramillien et al.
[2006]; Rodell et al. [2004]. Le dernier type d’étude se focalise sur la diminution des ressources en
eau. En utilisant le signal GRACE dans l’équation 2.1, on estime les variations de stock dans les
grands aquifères exploités, les autres termes de l’équation étant obtenus à partir de modèles hy-
drologiques de surface. On trouve de nombreuses études abordant cette dernière approche [Chen
et al., 2014; Richey et al., 2015; Rodell et al., 2009; Scanlon et al., 2012b; Yeh et al., 2006].
Les observations satellites fournissent également une estimation spatialisée de l’évapotrans-
piration. Néanmoins cette donnée n’est pas une mesure directe. Elle est obtenue par une combi-
naison des images satellitaires et des modèles théoriques d’évapotranspiration potentielle. Sur le
bassin du Rhin, on utilisera les données MODIS (MOderate resolution Imaging Spectroradiome-
ter) à 0,5’ de résolution (soit environ 600 m) et à un pas mensuel. Ces informations, bien qu’in-
directes, sont potentiellement très informatives car elles sont à la fois intégratrices et distribuées
spatialement sur l’ensemble du bassin. Elles permettent donc d’analyser le comportement hydro-
logique à travers des échelles différentes.
Pour le bassin du Rhin, nous disposons donc d’un suivi temporel de tous les termes du bi-
lan de masse (équation 2.2). La comparaison des données observées à un pas mensuel montre un
cycle annuel assez marqué pour l’évapotranspiration selon MODIS, le débit du Rhin à Lobith et les
variations de masse enregistrées par GRACE (en haut sur la figure 2.16). La régularité de l’évapo-
transpiration est assez frappante. Le débit semble moins régulier car dépendant des précipitations
qui sont moins régulières. Ces données peuvent ainsi servir à valider les modèles hydrologiques
à large échelle en contraignant à la fois les volumes entrants et sortants (précipitations, débits de
rivière et évapotranspiration) et les variations de stock d’eau sur le bassin (neiges, eaux de surface,
eaux contenues dans les sols et les aquifères).
Comme le révèle le deuxième graphique (en bas sur la figure 2.16), l’incertitude sur ces dif-
férents termes est assez élevée. Il est alors difficile d’attribuer l’erreur respective de chaque ob-
servable et par conséquent d’en tirer des modèles robustes. En effet, la méthode d’estimation de
63
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES SITES D’ÉTUDE
l’évapotranspiration basée sur l’utilisation des données GRACE (équation 2.2) aboutit à une sures-
timation par rapport aux données issues de MODIS d’environ 100 mm/an, soit 20 %. Nous verrons
alors comment le modèle permet de restituer ces différents termes à l’échelle de tout le bassin.
F IGURE 2.16 – Bilan de masse du bassin du Rhin à partir des observations à pas mensuel ; le débit est mesuré à
Lobith et les données GRACE sont dérivées du GRGS. En haut : les différents termes du bilan de masse d’après
les observations. En bas : comparaison du bilan de masse en se focalisant sur l’évapotranspiration ; il semble
que l’estimation de l’évapotranspiration par satellite (MODIS) soit trop faible ou que l’estimation de la baisse
de stock par GRACE soit trop élevée en été.
64
Chapitre 3
Sommaire
3.1 Modèle hydrogéologique 1D analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.1.1 Modèle de recharge utilisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.1.2 Principe de l’approche fréquentielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
3.1.3 Modèle conceptuel associé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
3.2 Modèle hydrogéologique numérique : ModFlow . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.2.1 Pourquoi un modèle numérique ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.2.2 Démarche de modélisation sur le site de Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.2.3 Démarche de modélisation sur le site de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.2.4 Distinction entre régime stationnaire et transitoire . . . . . . . . . . . . . . . 75
3.3 Modèle hydrogéologique de transport, MT3DMS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
3.3.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
3.3.2 Le modèle de transport de soluté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
3.4 Modèle hydrologique à grande échelle (Global Hydrological Model) . . . . . . . . 78
3.4.1 Contexte et enjeux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
3.4.2 Le modèle CWATM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
3.4.3 Le modèle CWATM-ModFlow : couplage avec les aquifères . . . . . . . . . . 83
3.4.4 Prise en compte de la variabilité sous-maille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
65
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Au préalable, il est nécessaire de déterminer la quantité d’eau entrante dans les modèles hy-
drogéologiques. Pour les modèles de Ploemeur et Guidel, on considérera que les précipitations,
après infiltration dans les sols, viennent recharger l’aquifère. Cependant, au vu de la variabilité
spatiale des variables météorologiques et des propriétés des sols, nous avons opté pour un modèle
de recharge très simple basé sur un bilan hydrique du sol (aussi appelé modèle de Thornthwaite
[Thornthwaite, 1948]). En effet, il ne semble pas judicieux de développer un modèle physique
complexe qui prenne en compte la variabilité des facteurs pouvant influencer l’évapotranspira-
tion, le ruissellement et la recharge des aquifères. Ainsi, nous considérerons que ces processus se
produisant au sein de la zone non saturée sont modélisables par un réservoir équivalent. Ce ré-
servoir, d’une certaine épaisseur et porosité, représente alors la zone dans laquelle les végétaux
peuvent accéder facilement à l’eau. Il n’est pas influencé par d’éventuelles remontées de nappes.
Dans un premier temps, il est nécessaire de calculer l’évapotranspiration potentielle à partir
des données climatiques (pour les sites de Ploemeur et Guidel, cette donnée est fournie par Météo
France à partir d’une station météo proche des sites). La méthode semi-empirique de Penman-
Monteith [Allen et al., 1998; Monteith, 1965] est pour cela couramment utilisée à pas journalier.
Elle calcule notamment de façon simplifiée le bilan d’énergie contrôlant l’évaporation d’une sur-
face humide à partir de données météorologiques accessibles telles que la température, l’enso-
leillement ou la vitesse du vent. Elle intègre d’autres paramètres caractéristiques du couvert vé-
gétal comme l’albédo ou la résistance stomatique effective. L’évapotranspiration potentielle cor-
respond alors à l’évapotranspiration d’une surface enherbée disposant de toute l’eau nécessaire à
son développement.
Ensuite, le principe du modèle de recharge consiste à ajouter les précipitations du jour au
réservoir de sol dont la capacité maximale est fixée (figure 3.1). Après quoi, l’évapotranspiration
potentielle est comparée au stock d’eau disponible dans le réservoir. Si il n’y a pas assez d’eau dis-
ponible, alors l’évapotranspiration réelle est plus faible que l’évapotranspiration potentielle (si-
tuation de stress hydrique). Si l’eau est suffisante voire excédentaire (quand le réservoir est plein),
alors l’évapotranspiration potentielle est satisfaite et l’excédent vient recharger la nappe. Le calcul
est effectué chaque jour en conservant l’état précédent du stock d’eau dans le réservoir de sol. La
démarche est synthétisée sur la figure 3.1.
66
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
F IGURE 3.1 – Modèle de Thornthwaite pour calculer la recharge des aquifères et l’évapotranspiration réelle.
À gauche : structure conceptuelle du modèle, la complexité des processus au sein des sols est ramenée à un
réservoir unique dont le fonctionnement est équivalent au comportement global dans la zone non saturée. À
droite : description de l’algorithme utilisé à pas journalier.
Le site de Ploemeur dispose d’un réseau de piézomètres implantés dans un rayon d’environ
700 m autour des puits de pompage. Une dizaine de ces piézomètres disposent d’un enregistre-
ment continu sur une période commune d’au moins 20 ans. Les niveaux piézométriques pré-
sentent la particularité d’être abaissés par le pompage qui prélève 1 Mm3 /an depuis 1991. Sur
Guidel, les niveaux sont suivis depuis 2009 dans une dizaine de piézomètres également. Ils ne
sont impactés par aucun pompage et sont donc plus proches de la surface.
Malgré la complexité apparente des écoulements sur ces deux sites, une façon d’évaluer le
comportement de l’aquifère est de le représenter de façon simple à travers des modèles à base
physique. Cette représentation est alors évaluée par la comparaison entre la piézométrie mesurée
dans les forages et celle modélisée. La modélisation des systèmes aquifères peut donc se faire à
travers la piézométrie et la résolution de l’équation de diffusivité :
∂h
T × ∆h = S × − R(t ) (3.1)
∂t
où S est la porosité de drainage de la roche (ou bien le coefficient d’emmagasinement), T la trans-
missivité (la perméabilité multipliée par l’épaisseur de l’aquifère) et R(t) un taux de recharge im-
posé fonction du temps mais constant dans l’espace. Cette équation porte l’hypothèse que l’aqui-
fère est homogène et que les variations de charge hydraulique n’impactent pas la transmissvité du
système dans le temps et l’espace.
D’après Carslaw and Jaeger [1959], cette équation devient la suivante en domaine fréquentiel :
d 2 h̄(x, ω)
T − i ωS h̄(x, ω) + R̄(ω) = 0 (3.2)
d x2
où ω est la fréquence temporelle et h̄, R̄ et i sont des nombres complexes. Cette approche fré-
quentielle considère les phénomènes transitoires comme la somme de signaux sinusoïdaux. Elle
implique comme hypothèse que les conditions limites soient décomposables en une somme de
67
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
signaux sinusoïdaux qui imposent leurs variations aux charges hydrauliques. Toute variable du
système peut alors se décomposer sous la forme :
X ³ ´
f (x, t ) = f mean (x) + Re f¯(x).e i ωt (3.3)
L’intérêt de la méthode est alors de pouvoir résoudre analytiquement l’équation 3.2, c’est à dire dé-
terminer la charge hydraulique h dans le domaine fréquentiel, car elle est plus simple à résoudre
que l’équation 3.1. En domaine fréquentiel, l’équation ne dépend plus que de la variable x, la fré-
quence étant un paramètre. La charge hydraulique calculée est ensuite ramenée dans le domaine
temporel par l’équation 3.3 qui consiste à sommer la contribution de chaque fréquence (c’est à
dire en calculant la transformée de Fourier inverse).
∂h(x, t )
− NT = Q(t ) (3.4)
∂x
où N est la largeur du système. On suppose donc que l’écoulement radial induit par le pompage
peut être représenté par un système 1D. L’hypothèse est alors d’autant plus fausse que l’on se
rapproche du pompage. Cette première condition limite imposée ne permet pas encore de ré-
soudre l’équation. Une deuxième condition limite est nécessaire. Nous proposons donc d’imposer
la charge hydraulique à une valeur constante en x=L :
h(L, t ) = h L (3.5)
Ce type de condition permet donc aussi de définir la taille, L, du système et de considérer qu’à une
distance donnée du pompage la charge varie peu dans le temps. Dans ce cas de figure, la condition
limite est relativement simple puisque le terme transitoire de l’équation 3.3 est nulle.
Pour modéliser le site de Guidel, on imposera la charge hydraulique en x=0 et en x=L. Il en
résulte que le modèle n’a pas besoin d’avoir une largeur définie pour être résolu. Les conditions li-
mites choisies sous-entendent donc que l’on peut représenter l’aquifère par un système 1D bordé
par deux limites à charge constante. Conceptuellement, le modèle étant appliqué en chaque pié-
zomètre, on suppose que chaque point de l’aquifère se situe entre deux rivières par exemple ou
entre une rivière et un haut topographique où le niveau varie peu dans le temps. Finalement, ces
modèles analytiques sont équivalents à des systèmes rectangulaires auxquels un taux de recharge
par les précipitations efficaces est imposé. La pression se propage ensuite latéralement dans ces
systèmes (figure 3.2) selon les lois d’écoulement en milieu poreux.
68
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
F IGURE 3.2 – Schéma des modèles analytiques développés pour représenter les aquifères. En haut : dans le cas
de Ploemeur, la charge est imposée constante en x=L et le flux est imposé égal au pompage en x=0. En bas :
dans le cas de Guidel, la charge est imposée constante en x=0 et x=L.
Résolution du problème
Pour le cas soumis à un pompage (en haut sur la figure 3.2) et le cas "naturel" (en bas sur la
figure 3.2) les solutions analytiques s’écrivent donc respectivement :
1.
2 cosh Xx x−L
" Ã !#
Rmean 2 2 Qmean X i ωt X X si nh X
h(x, t ) = (L −x )+ (L−x)+h L + Re e R̄ 1− + Q̄
2T NT T cosh XL TN cosh L
X
(3.6)
2.
2 si nh x−L x
" Ã !#
Rmean 2 hL − h0 i ωt X X − si nh X
X
h(x, t ) = (Lx − x ) + x + h 0 + Re e R̄ 1+ (3.7)
2T L T si nh L X
s
D T
avec X = et D = (3.8)
iω S
Le premier terme des deux solutions analytiques représente alors la partie stationnaire de la pié-
zométrie tandis que le second représente la partie transitoire. Nous nous intéresserons principa-
lement au transitoire en nous attachant à représenter les fluctuations temporelles au niveau de
chaque piézomètre de façon indépendante. On note également que les charges imposées qui sont
constantes n’apparaissent pas dans les termes transitoires bien que ce soient les différences de
charge qui imposent les gradients hydrauliques au sein du système.
69
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Utilisation du modèle
Nous avons donc développé deux modèles analytiques différents pour nos deux sites d’études.
Pour le cas d’un pompage, la même approche a également été effectuée avec un modèle radial
ou semi-radial présentant ainsi l’avantage de ne pas devoir fixer une largeur au système. Pour
conclure, ces modèles contiennent peu de paramètres et représentent physiquement et simple-
ment des milieux hydrogéologiques hétérogènes. L’approche a vocation à représenter la piézomé-
trie au niveau des différents forages de Ploemeur et Guidel. À travers la piézométrie, c’est l’étude
du comportement transitoire de l’aquifère qui est ciblée. Nous discuterons dans le chapitre sui-
vant, à travers une publication, de la capacité de ces modèles à restituer la piézométrie. Une part
importante du travail s’attachera à déterminer ensuite la sensibilité du modèle aux paramètres et
au taux de recharge imposé.
L’approche précédente a l’avantage d’être extrêmement rapide en temps de calcul. Elle per-
met de modéliser en quelques secondes les variations temporelles du niveau d’eau en plusieurs
point sur 25 ans. Cependant, elle simplifie grandement la géométrie des écoulements et fixe par
deux paramètres (la charge imposée et la taille du système) les conditions limites du système.
Cette géométrie semble trop simple pour restituer les niveaux piézométriques dans l’espace en
particulier à partir de plusieurs forages. Par conséquent ce modèle présente peu d’intérêt pour
la modélisation de l’état stationnaire. Cette approche suppose aussi que la réponse de l’aquifère
est linéaire. Ces hypothèses ne seraient en fait pas nécessaires en considérant l’aquifère par un
modèle en deux dimensions dont les niveaux piézométriques seraient limités par la topographie.
De plus, la solution analytique ne permet pas de prendre en compte une structure hétérogène
qui pourrait s’avérer nécessaire. Enfin, de par sa structure très simple, elle ne montre qu’un faible
potentiel pour modéliser d’autres observables comme le débit de rivière ou la déformation.
Pour pallier à ces problèmes, un modèle numérique ModFlow en 2D (ModFlow-2005 Har-
baugh, Arlen [2005]; McDonald and Harbaugh [1984]; Niswonger et al. [2011]) a donc été implé-
menté pour modéliser la piézométrie moyenne des sites de Guidel et de Ploemeur. L’intérêt de
ce modèle est de prendre en compte une géométrie plus réaliste qu’une solution analytique 1D
ou radiale qui nécessite une charge imposée à une certaine distance du pompage. Surtout, le rôle
de la topographie va désormais être pris en compte au moyen d’un MNT (Modèle Numérique de
Terrain") à 5 m de résolution. L’intérêt de ce modèle est ensuite de pouvoir porter d’autres obser-
vables que la piézométrie en greffant d’autres modèles (déformation, transport de solutés...) sur le
modèle de flux.
Pour représenter le site de Ploemeur, nous avons considéré un modèle carré d’environ 9 km2 ,
suffisamment plus grand que l’aire de captage du pompage. Pour cette dernière, l’ordre de gran-
deur estimé est d’environ 3-5 km2 compte tenu de l’incertitude qui pèse sur la valeur du taux de
recharge de l’aquifère. Les flux sur les bords du modèle sont nuls et nous supposons donc que cette
condition limite est suffisamment éloignée de la zone d’intérêt pour ne pas l’impacter. Pour mieux
évaluer cet aspect, il suffit d’en mesurer l’impact (les charges hydrauliques modélisées autour du
pompage) en fonction de la taille du modèle et pour différents paramètres. Le toit de l’aquifère est
70
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
fixé égal à la topographie (figure 3.3). Une condition limite de type "drain" est imposée sur cette
topographie. Ainsi, l’eau sort du modèle par "débordement" là où les niveaux modélisés atteignent
la topographie. Ces zones se comportent alors comme des charges imposées (égales à l’altitude de
la topographie) et vont contrôler en partie les directions d’écoulement. Ce sont donc les points
bas du relief et le pompage qui structurent la forme de la carte piézométrique. Ce processus est
réversible au cours du temps, ainsi si le niveau baisse au droit d’une zone de débordement jusqu’à
ce que la nappe n’affleure plus, alors la charge hydraulique est à nouveau libre et l’eau souterraine
n’alimente plus la surface dans cette zone.
Si on regarde la partie droite de la figure 3.3, on remarque que le niveau piézométrique in-
tersecte la surface en plusieurs points malgré la baisse de niveau liée au pompage. Ces points
imposent bien les directions d’écoulement en plus de constituer des zones de décharge des eaux
souterraines. Ici, les flux restent malgré tout orientés vers le pompage mais on note que la structure
n’est pas tout à fait radiale à cause de la topographie. Dans un premier temps, la transmissivité de
l’aquifère sera choisie constante dans l’espace. Elle sera indépendante du niveau piézométrique,
faisant ainsi l’hypothèse qu’elle ne varie pas au cours du temps sur Ploemeur (hypothèse d’un
aquifère confiné dans ModFlow). Le coefficient d’emmagasinement restera également constant
dans l’espace.
F IGURE 3.3 – Topographie et exemple d’une simulation du modèle ModFlow du site de Ploemeur. À gauche :
topographie à 10 m de résolution et emprise du modèle. À droite : exemple de carte piézométrique obtenue
pour un modèle homogène de transmissivité 1.10−3 m2 /s et un taux de recharge uniforme de 270 mm/an ; les
lignes représentent les isopièzes (tous les 2 mNGF) ; les zones en bleu indiquent les zones de débordement des
eaux souterraines.
En plus de la condition limite de type "drain" imposée sur toute la surface, un taux de recharge
uniforme est appliqué à toutes les mailles du modèle, il est cependant possible de le faire varier
dans l’espace. Un flux est également imposé au droit des trois puits de pompage. Bien que le taux
de pompage moyen soit connu sur Ploemeur, nous ne connaissons qu’approximativement la ré-
partition du débit entre les trois puits sur les années antérieures à 2012. Par défaut, le puits princi-
pal PE concentre 40 % du débit tandis que F31 et F29 se répartissent équitablement le restant. On
peut alors considérer que cette répartition a peu d’importance en s’éloignant du pompage. Parmi
les piézomètres étudiés, seul le piézomètre F11 se situe à moins de 100 m d’un puits de pompage.
Il est donc possible que les niveaux modélisés au niveau de ce piézomètre soient impactés par la
répartition des débits entre les trois puits de pompage. Nous avons donc comparé les résultats
avec et sans le piézomètre F11 pour tester son influence sur l’inversion des paramètres.
Enfin, nous avons choisi de travailler à une résolution de 10 m estimant que celle-ci était large-
ment suffisante pour prendre en compte le relief et les gradients piézométriques observés. Cette
71
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
résolution se justifie également par le fait que nous n’avons pas d’informations plus fines à y as-
socier concernant la distribution des valeurs de la transmissivité ou du coefficient d’emmagasine-
ment.
Le modèle précédent peut être divisé en deux couches comme le montre le schéma de la fi-
gure 3.4. On illustrera l’intérêt de ce deuxième modèle numérique dans la partie consacrée aux
mesures de déformation sur Ploemeur.
F IGURE 3.4 – Description du modèle à deux couches développé pour le site de Ploemeur ; la topographie consti-
tue le toit de la couche supérieure ; y figure également un schéma de la modélisation de la recharge imposée à
la couche supérieure.
La couche supérieure devient alors une couche non confinée dans laquelle la transmissivité
dépend du niveau d’eau. Les paramètres de cette couche sont donc la perméabilité, le coefficient
d’emmagasinement et l’épaisseur. Cependant, l’épaisseur de cette couche n’a pas d’importance
pour les modèles de flux, on s’attachera surtout à la valeur de la transmissivité (perméabilité mul-
tipliée par l’épaisseur). La seconde couche garde quant à elle les mêmes caractéristiques que pré-
cédemment. Comme elle est confinée son épaisseur n’a pas d’importance. La transmissivité et
le coefficient d’emmagasinement restent constants latéralement. Les conditions limites, soit la
recharge par les pluies et la topographie, ne changent pas mais sont appliquées à la couche supé-
rieure uniquement. Le pompage est lui appliqué à la couche inférieure qui représente la structure
conductrice de l’aquifère.
La résolution du problème par ModFlow est similaire à celle du problème à une couche mais
cette fois l’écoulement est 3D. En plus de l’écoulement latéral, des flux verticaux entre les deux
couches sont modélisés à l’aide de la loi de Darcy. Ces flux sont donc dépendants de la perméabi-
lité moyenne et de la différence de charge hydraulique entre les deux couches en chaque point du
modèle.
Conceptuellement, ce nouveau modèle a vocation à séparer le compartiment transmissif et
confiné de l’aquifère du compartiment moins perméable mais avec une plus grande capacité de
72
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
stockage. La partie inférieure pourrait s’apparenter à la zone de contact ou en tout cas au réseau
de fractures connectées, sous-pression et très transmissif. Le coefficient d’emmagasinement de
ce compartiment serait alors assez faible et correspondrait à celui d’un aquifère confiné. C’est à
dire que seule la déformation du milieu permettrait d’assurer le stockage de l’eau. La couche su-
périeure s’apparenterait quant à elle à la matrice poreuse de l’aquifère, c’est à dire les micaschistes
qui surplombent la zone de contact. La perméabilité de ces derniers est très faible lorsqu’il n’y a
pas de fracturation. En revanche comme cette partie n’est pas confinée, sa capacité de stockage
est assurée par sa porosité et est donc beaucoup plus grande que celle du compartiment inférieur.
On utilisera pour le site de Guidel le même modèle que celui développé pour Ploemeur. Un
modèle homogène à une couche avec une superficie et une résolution équivalente. Le modèle
hydrogéologique a été simulé sur une aire de 12,6 km2 englobant le bassin versant topographique
de la station de jaugeage (2,6 km2 ). Comme pour le modèle numérique de Ploemeur, les bords sont
par défaut des limites à flux nul. Ces limites peu réalistes sont supposées ne plus avoir d’impact sur
la zone d’intérêt car suffisamment éloignées pour que leur rôle soit atténué. Une partie de l’étang
de Lannénec est comprise dans le modèle au niveau du coin sud-ouest du domaine étudié. Cette
zone constitue la partie la plus basse du modèle. La topographie a été agglomérée sur des mailles
de 10 m à partir d’une résolution initiale de 5 m.
Le modèle de recharge est également identique à celui utilisé pour le site de Ploemeur. Comme
il n’y a pas de pompage imposé sur le site de Guidel, l’eau entrante par la recharge ressort exclusi-
vement par la surface, là où les niveaux piézométriques intersectent la surface.
On étudiera à nouveau l’aptitude du modèle à représenter la piézométrie mesurée dans dif-
férents forages autour du futur site de pompage. En complément, et c’est l’atout supplémentaire
du modèle numérique, on comparera le débit mesuré dans la rivière de Guidel à la somme des
débits modélisés sortants par la topographie sur le bassin versant correspondant. Ce calcul et la
condition limite de type "Drain" qui y est associée sont détaillés dans les parties suivantes.
Pour le site de Guidel, nous considérerons qu’il n’y a pas de ruissellement car les pentes sont
faibles, les sols suffisamment perméables et les évènements pluvieux peu intenses. Cette hypo-
thèse n’exclut pas en revanche que l’eau infiltrée puisse circuler en partie dans un aquifère de
subsurface. Moyennant le modèle de sol qui permet d’estimer l’évapotranspiration et la recharge,
73
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
on dispose donc en entrée du volume d’eau entrant dans le système aquifère. Ce volume d’eau
ressort alors entièrement par la topographie ou est stockée temporairement dans l’aquifère.
D’après la condition limite qu’impose la topographie, les niveaux d’eau dans l’aquifère déter-
minent les zones de résurgences et ainsi le réseau hydrographique. Toute l’eau sortant du système
souterrain à un point donné s’écoule ensuite directement à l’exutoire du bassin versant topogra-
phique auquel appartient ce point. On suppose qu’elle ne peut pas se réinfiltrer à travers les berges
de la rivière.
Dans cette approche, rien n’empêche que le bassin hydrogéologique alimentant la rivière soit
différent du bassin topographique. C’est la modélisation de la piézométrie qui détermine les li-
mites des bassins hydrogéologiques et leurs points d’exutoires.
∆x∆y
Qk = Ck × (h k − bot k ) , avec Ck = K × (3.9)
W
où k est l’indice de la maille du modèle, Ck est la conductance, hk est la charge hydraulique mo-
délisée, botk est l’altitude du drain, K est la perméabilité des berges du drain [L.T−1 ], ∆x = ∆y est
égale à la résolution du modèle et W est l’épaisseur des berges du drain. Les propriétés des berges
sont donc regroupées en un seul paramètre. D’autant que ces propriétés spécifiques à l’interac-
tion localement entre l’aquifère et la rivière sont peu connues. De plus, nous allons voir à travers
quelques tests qu’elles ont peu d’impact sur les niveaux d’eau et le débit simulés.
La figure 3.5 compare le débit et la piézométrie modélisés pour une conductance des drains
100 fois plus petite et 100 fois plus grande que la valeur choisie initialement. On voit qu’en régime
stationnaire la valeur de la conductance influe peu sur le débit sortant à l’exutoire de notre bassin.
En revanche, pour des valeurs faibles, on remarque que les niveaux piézométriques ont augmenté
d’environ 1,5 m. Par conséquent, la distribution des zones de résurgence est sensiblement plus
étalée et semble moins réaliste étant donnée l’extension de la surface de zones humides qui en
résulte. Ce résultat est assez logique puisque réduire la conductance revient à freiner la sortie de
l’eau dans la rivière. Ainsi, l’eau souterraine s’accumule et ressort (ou déborde) sur une surface
plus étalée mais le flux sortant reste assez identique. Enfin, les flux sont également peu modifiés
en régime transitoire, en partie aussi du fait que la charge hydraulique modélisée sous la rivière,
h k , évolue de façon inverse à la conductance (ce qui régule le flux d’après l’équation 3.9).
Sur les modèles de Ploemeur et Guidel, le package "Drain" est donc appliqué sur toute la sur-
face du modèle en définissant l’altitude des drains égale à la topographie. Pour chaque maille, il en
résulte qu’une certaine quantité d’eau rejoint le réseau hydrographique si le niveau piézométrique
dépasse la surface. Le débit de surface passant en un point donné est alors calculé en sommant
les débits, Qk , provenant des mailles situées en amont de ce point. Le calcul de ce débit nécessite
donc de délimiter au préalable le bassin versant topographique du point de mesure en rivière.
74
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
F IGURE 3.5 – Impact de la conductance sur le modèle de Guidel. L’influence sur le débit total à l’exutoire est
assez faible, en revanche on remarque une hausse des niveaux piézométriques et une extension des zones
humides lorsque la conductance est très faible.
75
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
point.
Enfin, les modélisations en régime transitoire sous ModFlow démarreront toujours par une
étape en régime permanent afin d’assurer la meilleure initialisation possible. Cette étape préalable
nécessite donc une estimation de la valeur moyenne du taux de recharge. Elle permet de démarrer
la simulation avec des niveaux piézométriques moyens qui correspondent déjà à la transmissivité
choisie pour le modèle.
3.3.1 Démarche
Le modèle de transport numérique MT3DMS, utilisable avec ModFlow, a été choisi pour modé-
liser les concentrations chimiques dans l’aquifère et pouvoir ensuite les comparer à celles relevées
dans les forages de Ploemeur. Cette partie résume dans un premier temps le principe de résolu-
tion du problème de transport de soluté en milieu poreux par le modèle numérique MT3DMS.
Ensuite, nous décrivons les conditions limites appliquées au modèle de transport pour s’adapter
au contexte et aux données disponibles sur le site de Ploemeur.
76
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Dans le modèle MT3DMS, plusieurs solveurs numériques sont capables de résoudre cette
équation par discrétisation sur le maillage du modèle de flux. Néanmoins, la documentation fait
référence à des problèmes de dispersion numérique artificiellement créés dans ce type d’approche
purement advective. Ce type de problème a en effet été constaté mais est considérablement réduit
lorsque le maillage et le pas de temps sont fins. De plus, le solveur TVD ("Total Variation Dimini-
shing method"), plus efficace pour les modèles dominés par l’advection, a été utilisé Zheng and
Wang [1999].
Enfin, des conditions initiales et aux limites sont nécessaires pour résoudre l’équation. MT3DMS
permet d’imposer des concentrations en fonction du temps sur les différentes mailles du modèle
ModFlow, mais aussi d’imposer une concentration à l’eau qui recharge l’aquifère par exemple.
À partir des différents modèle ModFlow évoqués précédemment, fixant un cadre physique au
problème, plusieurs conditions limites sont possibles pour répondre aux besoins de la représen-
tation des données géochimiques de Ploemeur. Le choix de l’approche dépend des données dis-
ponibles et de la manière dont on conceptualise le système du point de vue de la chimie de l’eau,
c’est à dire la provenance et l’exutoire des solutés que l’on modélise au seins du modèle.
L’approche basique consiste à considérer qu’un traceur est présent dans l’eau qui recharge
l’aquifère. La concentration de ce traceur peut varier dans le temps. Cette concentration et le taux
de recharge définissent alors le volume de l’espèce modélisé entrant dans le modèle à chaque pé-
riode de temps. Cette modélisation peut représenter différents cas auxquels on s’attend dans la
réalité. Par exemple, une concentration d’un élément donné dans l’eau de pluie (des espèces ou
des gaz dissous, des traceurs isotopiques) ou une concentration dans l’eau qui recharge l’aquifère.
Ce deuxième cas se distingue du premier en sous-entendant que l’eau qui percole sous le sol et
rejoint l’aquifère n’a plus la même composition que l’eau de pluie. Elle peut s’être chargée en élé-
ments présents dans les sols (nitrates...) ou concentrée un peu plus en certaines espèces suite au
processus d’évapotranspiration. Ensuite, le transport de l’espèce dissoute est donc simulé dans
l’aquifère par MT3DMS, latéralement si il n’y a qu’une seule couche ou en 3 dimensions si il y
en a plusieurs. La concentration peut alors être comparée en n’importe quel point du maillage,
notamment ceux correspondant à des forages.
77
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
La deuxième approche est de considérer que le traceur provient de l’aquifère. Dans ce cas, un
taux de production peut être imposé en chaque maille du modèle signifiant que l’eau se charge en
soluté au contact de la roche à chaque pas de temps. La méthode nécessite de connaître le taux de
production de l’espèce en question en fonction de la géologie. Cette valeur sera de plus fonction
de la porosité qui définit la surface de contact entre l’eau et la roche.
Enfin, pour estimer la contribution d’une zone délimitée dans le modèle, on peut lui attri-
buer une concentration en une espèce fictive égale à 1. Toute l’eau qui passe par cette zone se
verra alors attribuée une concentration de 1. En dehors de cette zone, le mélange d’eaux d’ori-
gines différentes permet de diluer la concentration. Dans ce cas de figure, l’objectif est d’évaluer
la contribution ou la signature d’une structure particulière sur l’eau prélevée à un endroit donné.
Sur Ploemeur, on s’intéressera à la contribution de différents réservoirs chimiques à l’eau pompée
dans le puits principal. On verra néanmoins que cette approche présente des limites conceptuelles
dont l’interprétation chimique permet de s’affranchir.
Notons que, au même titre que les charges hydrauliques, la comparaison des concentrations
chimiques dans les modèles hétérogènes ou à plusieurs couches nécessite de bien évaluer dans
quel compartiment de l’aquifère l’échantillonnage sur le terrain a été effectué. Ce qui n’est mal-
heureusement pas évident compte tenu de la complexité des aquifères fracturés.
L’hydrologie à grande échelle, de celle des grands bassins hydrographiques régionaux à celle
du globe, est en plein essor. Dans une optique de prise en compte intégrée des différents proces-
sus sur Terre et de leurs interactions, le cycle hydrologique apparaît au carrefour de plusieurs do-
maines : la climatologie, l’écologie, la géomorphologie, le cycle du carbone ou encore l’économie
et la sécurité alimentaire. L’essor de la modélisation à cette échelle est aussi lié à l’augmentation
des données disponibles et à l’amélioration des capacités informatiques. Elle s’inscrit clairement
dans un besoin de prédiction à cause de l’augmentation de la pression anthropique sur les milieux
et du réchauffement climatique.
La modélisation hydrologique passe nécessairement par des modèles numériques dont les
ambitions sont multiples. L’un des premiers objectifs de ces modèles était de prendre en compte
l’hydrologie continentale dans la modélisation du climat. En 1969, Manabe [1969] avait déjà inté-
gré l’hydrologie de surface dans un modèle climatique à travers un schéma très simple. La surface
des continents était représentée en chaque maille par un réservoir de sol pouvant absorber les
pluies puis fournir l’évaporation ou générer du ruissellement.
Aujourd’hui, les objectifs et les enjeux sont multiples. Il s’agit de comprendre et prédire l’évo-
lution de systèmes multi-échelles tels que l’atmosphère, les rivières, les écosystèmes ou les aqui-
fères. De cet objectif découle le besoin d’améliorer la représentation dans les modèles des liens
entre climatologie et hydrologie de surface, le but final étant de mieux anticiper et optimiser la
gestion des territoires à différentes échelles via de meilleures prévisions. Les sorties des modèles
hydrologiques à grande échelle sont typiquement des flux comme les débits de surface ou l’éva-
potranspiration et des quantités d’eau comme l’humidité des sols ou les stocks d’eau souterraines.
Les applications directes qui peuvent en être faites sont la prédiction des inondations, du poten-
tiel énergétique des rivières (barrages et refroidissement des centrales) et des ressources en eau
pour diverses applications [Wada et al., 2010].
On parle donc de prévisions en référence à des évènements climatiques qui pourraient se pro-
78
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
duire à plus ou moins long terme (réchauffement climatique, intensification des pluies, fonte des
neiges...) mais aussi en référence à des déstabilisations anthropiques telles que les changements
d’usage des sols, l’impact des prélèvements en aquifère ou en rivière et l’implantation de barrages
[Angarita et al., 2018]. La compréhension et la modélisation couplée de ces processus restent des
enjeux majeurs [Wada et al., 2017] à grande échelle. Plusieurs travaux de modélisation illustrent
l’importance des systèmes aquifères à large échelle. [Miguez-Macho and Fan, 2012] démontrent
l’importance du niveau piézométrique sur le bassin de l’Amazone. Celui-ci réduit le drainage de
l’eau du sol vers la profondeur en saison humide et permet de maintenir l’évapotranspiration dans
les vallées en période sèche. De plus, le réservoir souterrain semble atténuer les périodes de sé-
cheresse.
Aux aspects quantitatifs du cycle hydrologique, s’ajoutent également des questions de qualité
de l’eau et d’impacts environnementaux. Récemment, les sorties de ces modèles ont été utilisées
à des fins météorologiques et hydrologiques mais ont aussi permis d’estimer la contribution des
aquifères à la montée des niveaux marins et même au commerce international. Dalin et al. [2017]
parlent en particulier de la dépendance du commerce mondial aux ressources aquifères surex-
ploitées. L’estimation du comportement de ces grands réservoirs souterrains passe aussi par des
modèles à grande échelle.
79
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Dans cette brève synthèse de la modélisation à grande échelle, il est peu fait mention des sys-
tèmes aquifères. Peu de modèles fournissent une représentation explicite de ces systèmes. Pour-
tant leur représentation physique est nécessaire pour modéliser le débit des rivières, l’évolution
de la ressource en eau et l’humidité des sols [Keune et al., 2016; Maxwell and Condon, 2016;
Wada et al., 2010]. On peut citer plusieurs modèles qui s’attachent à mieux décrire la physique
des écoulements souterrains et leur interaction avec la surface, notamment ParFlow [Kollet and
Maxwell, 2008; Maxwell et al., 2015] et PCR-GLOBWB [Sutanudjaja et al., 2018]. Le premier modèle
à l’avantage d’avoir été couplé à un modèle de surface permettant un couplage robuste physique-
ment entre la subsurface et l’atmosphère. Le modèle SAFRAN-ISBA-MODCOU [Habets et al., 2008;
Vergnes et al., 2012, 2014] est aussi un bel exemple de modèle s’efforçant de représenter explicite-
ment les processus hydrologiques au sein des différents systèmes et notamment les interactions
entre ces systèmes.
La paramétrisation de ces modèles est un enjeu majeur. D’une part il représente les proces-
sus à une résolution plutôt grossière et d’autre part les propriétés hydrodynamiques des systèmes
souterrains ne sont pas disponibles à grande échelle. Nous voulons donc nous focaliser sur deux
enjeux. Les modèles physiques semblent les plus pertinents et dans ce cadre nous voulons amélio-
rer la représentation des aquifères dans les modèles. Cette représentation passe par une descrip-
tion parcimonieuse des flux latéraux et des interactions entre les milieux souterrains et la surface.
Elle nécessite une paramétrisation des modèles qui demande donc de bien évaluer le contenu
informatif des observations disponibles (voir par exemple Sutanudjaja et al. [2014]).
Dans cette partie, nous allons nous intéresser au rôle des aquifères sur la répartition de l’eau à
la surface du globe. En effet, si le couplage entre climat et hydrologie de surface est pris en compte
depuis de nombreuses années [Manabe, 1969], les études intégrant l’hydrogéologie sont plus rares
en tout cas à grande échelle. De manière un peu caricaturale peut-être, on peut dire que l’hydro-
géologie (ou hydrologie souterraine) est une science focalisée sur la ressource. Elle nécessite une
représentation physique des écoulements souterrains pour évaluer localement la ressource ex-
ploitable.
Les interactions entre les systèmes aquifères et la surface, bien que connues, sont encore trop
superficiellement intégrées dans les modèles. On évoque souvent le fait que le ruissellement de
surface ou de subsurface alimente les rivières tandis que les aquifères fournissent le débit de base.
Cette dichotomie permet de modéliser les débits dans la plupart des cas tant que l’échelle est as-
sez grande ou tant que les échanges souterrains entre les bassins sont négligeables. De plus, cette
théorie montre qu’il est possible de séparer la contribution relative du milieu souterrain à par-
tir des courbes de débits mesurés. Mais fondamentalement, il apparaît plus juste de dire que le
débit des rivières est fourni par débordement des aquifères (des structures souterraines en géné-
ral) et par le ruissellement produit par les pluies dont l’intensité dépasse la capacité d’infiltration
des sols. À priori, on ignore donc quelle est la part du débit de rivière qui a transité par le milieu
souterrain.
Dans cette vision, la distribution des niveaux piézométriques dans le temps et l’espace condi-
tionne l’humidité du sol et la présence des rivières. Quels sont alors les flux latéraux souterrains
et où alimentent-ils la surface ? La réponse des systèmes hydrologiques au forçage climatique dé-
pend donc en partie des aquifères. Ces derniers auraient tendance à atténuer la variabilité clima-
tique court-terme et vocation à redistribuer l’eau dans l’espace. Les écoulements souterrains sont
donc un processus clef influençant la disponibilité en eau sur les continents.
Pour finir, le comportement naturel des milieux souterrains, et la redistribution des flux qui en
découle, sont très contraints par la physique des écoulements en milieux poreux. En complément,
la modélisation des déstabilisations induites par les pompages en nappe demande une évaluation
80
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
au moins au premier ordre des rabattements de nappe pour évaluer l’impact sur les autres proces-
sus (alimentation des rivières, évapotranspiration et recharge). D’où le besoin de mieux prendre
en compte cette physique.
Contexte
Les travaux présentés dans ce chapitre sont le fruit d’une collaboration avec Yoshihide Wada,
Peter Burek et Yusuke Satoh de l’International Institute for Applied Systems Analysis (IIASA, Au-
triche). Cet institut étudie différents domaines à l’échelle internationale tels que l’écologie, l’éner-
gie, la qualité de l’air ou l’économie. Il vise à "délivrer des avis scientifiques sur les changements
auxquels nous sommes confrontés". L’équipe "Water" de l’IIASA a pour mission "d’incorporer la
science de l’eau dans les études d’évaluation et de planification de la gestion de l’eau" et "d’éta-
blir des connaissances par le développement de modèles et la collecte de données". Le moteur
de cette collaboration est l’implémentation d’un modèle d’écoulement souterrain au sein d’un
modèle hydrologique développé par l’IIASA, le Community Water Model (CWATM), à la lumière
du couplage développé entre PCR-GLOBWB et ModFlow [De Graaf et al., 2015; Sutanudjaja et al.,
2018] ou du modèle ParFlow-CLM [Kollet and Maxwell, 2008].
Le modèle CWATM est très proche du modèle PCR-GLOBWB développé il y a quelques années.
En phase finale de développement, il présente l’avantage d’être efficace et facilement utilisable. Il
est développé en langage Python où chaque processus est représenté par une classe (ou module)
ce qui permet de le lier facilement à d’autres modèles. Il permet de prendre en compte de nom-
breux processus dont les différents forçages anthropiques (voir figure 3.6).
À partir de données climatiques comme la pluie et la température, le modèle prend en compte
l’interception par la végétation, le ruissellement de surface, l’évaporation, l’évapotranspiration à
partir des sols, l’infiltration et les remontées capillaires dans trois couches de sol (figure 3.6). Sous
certaines températures, CWATM prend en compte les précipitations sous forme de neiges alors
stockées en surface. En fonction des températures, la neige s’accumule sur les sols ou fond avant
de s’infiltrer via un modèle spécifique. Sous les couches de sols, les aquifères sont représentés par
un réservoir linéaire fournissant un débit de base aux rivières en fonction de son stock. En surface,
les flux ruisselés forment des rivières dont le chemin dépend des gradients topographiques et des
lacs préalablement définis.
Un des points forts de CWATM est de pouvoir modéliser les perturbations anthropiques du
cycle continental de l’eau [Wada et al., 2017]. La demande en eau est répartie entre eaux souter-
raines et eaux de surface. Cette eau est ensuite utilisée pour différents secteurs dont l’irrigation.
L’eau d’irrigation fournit alors la demande évaporatoire des plantes et s’infiltre en partie dans les
sols. Si l’eau est utilisée pour d’autres besoins, elle est réinjectée dans les rivières.
Théoriquement, le modèle CWATM est un algorithme qui travaille sur une grille (en latitude
et longitude) de n’importe quelle résolution tant que les paramètres et les forçages climatiques et
anthropiques sont fournis. En pratique, le modèle tourne pour l’instant à 30’ et 5’ de résolution
(équivalent à environ 50 et 8 km au niveau du Rhin) sur quelques bassins tests dont celui du Rhin.
Les cartes de paramètres demandent en effet une mise en forme préalable et doivent être adaptées
à la résolution de travail, de même pour les forçages temporels.
81
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Conceptuellement, le schéma du modèle est très vertical (voir figure 3.6). Pour chaque maille,
différents réservoirs sont discrétisés verticalement et interagissent entre eux via des relations assez
simples. Nous détaillons ici la partie "sol" de CWATM.
Schématiquement, les trois couches superficielles disposent chacune d’une conductivité hy-
draulique à saturation, d’une porosité et d’une épaisseur. En fonction des contenus en eau et des
conductivités de ces réservoirs, les flux verticaux de "percolation" ou de "remontée capillaire" sont
calculés. On pourra se référer à l’annexe de Wada et al. [2014] pour une description plus détaillée
du modèle PCR-GLOBWB qui est assez similaire à CWATM pour cette partie. Dans la zone non
saturée, les flux sont contrôlés par l’équation de Richards qui s’écrit en 1D (vertical selon z) [Ri-
chards, 1931] : · µ ¶¸
∂θ ∂ ∂h(θ)
= K(θ) × − 1 − S(θ) (3.12)
∂t ∂z ∂z
où θ est la teneur en eau volumétrique du sol [], t le temps, h la pression en eau du sol [L], K(θ) la
conductivité hydraulique [L/T], et S(θ) est un terme source[T −1 ]. Par simplification, le flux verti-
cal de percolation entre deux couches (mais aussi entre la troisième couche de sol et le réservoir
aquifère) est alors égal à la conductivité hydraulique qui peut se calculer de la façon suivante [Van
Genuchten, 1980] :
#m #2
θ − θr 0.5 θ − θr 1/m
µ ¶ " " µ ¶
K(θ) = K S 1− 1− (3.13)
θS − θr θS − θr
82
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
se produit à un taux égal à K S couche i n f . × (1 − θcouche sup. ). Ces couches de sol sont alimentées
par le haut par les précipitations qui s’infiltrent [Todini, 1996] et par le bas par les remontées de
nappe lorsque le niveau du réservoir aquifère est proche de la surface (voir les parties suivantes).
L’eau présente dans les deux premières couches a la particularité de pouvoir être disponible pour
l’évapotranspiration. Si la première couche déborde, l’eau ruisselle et rejoint le réseau hydrogra-
phique.
L’interaction entre la dernière couche de sol et le réservoir souterrain est intéressante. Les flux
verticaux entre ces deux systèmes reposent sur les mêmes principes que précédemment hormis
que les remontées capillaires provenant du réservoir aquifère ne peuvent se produire que si le ni-
veau est suffisamment haut pour atteindre le fond de la dernière couche de sol. Ce réservoir se
vidange dans le même temps selon une fonction linéaire contribuant ainsi au débit des rivières.
L’eau ne s’écoule donc pas d’une maille à l’autre au sein de l’aquifère, chaque maille est une boite
indépendante de ses voisines. Ainsi, conceptuellement l’eau souterraine présente dans une maille
alimente directement les rivières sus-jacentes via un coefficient de récession à calibrer. Cette mé-
thode a fait ses preuves pour restituer les débits de grands bassins et fait aussi l’hypothèse qu’à
basse résolution, la variabilité spatiale des flux souterrains latéraux n’est pas déterminante. La re-
présentation des aquifères par des modèles simples de type réservoir linéaire n’est en effet pas
anecdotique en hydrologie. Le flux continu qui est alors restitué aux rivières apparaît générale-
ment sous le nom de débit de base ("baseflow" en anglais).
C’est au niveau de ces aquifères que les modèles font à priori défaut puisque les systèmes
souterrains ont vocation à transférer l’eau latéralement sur des dizaines voir des centaines de ki-
lomètres. Ils ne restituent pas forcément l’eau aux rivières situées dans la même maille. Les écou-
lements latéraux conditionnent aussi les niveaux piézométriques qui vont affecter non seulement
la distribution des rivières mais aussi la disponibilité en eau pour l’évapotranspiration. Ces pro-
cessus semblent à priori plus déterminants sur les capacités prédictives à long-terme des modèles
étant donnés les volumes et temps de réponses importants des réservoirs souterrains. Ce manque
de prise en compte des lois physiques montre aussi ses limites lors de la paramétrisation à par-
tir des observations. L’enjeu de ce travail est donc d’évaluer la criticité de la représentation des
systèmes souterrains au sein de ces modèles à grande échelle.
Idée générale
Notre approche est simple, elle consiste à intégrer un modèle ModFlow à la place du réser-
voir linéaire de CWATM. C’est à dire qu’on utilisera le solveur de ModFlow pour déterminer les
niveaux piézométriques et les flux latéraux entre les cellules à chaque instant t. En effet, le mo-
dèle initial ne tient pas compte des flux latéraux se produisant par transfert de pression dans les
milieux souterrains. Ce processus est alors régit par l’équation de diffusivité qui s’écrit dans notre
cas en 2D (équation 1.3) avec un terme de recharge correspondant à la percolation en provenance
de la troisième couche de sol. Pour faciliter la convergence du modèle et sa paramétrisation nous
nous sommes cantonnés à la modélisation d’une couche aquifère confinée d’épaisseur constante
(ce qui n’empêche pas les paramètres hydrodynamiques de varier d’une cellule à l’autre). C’est
à dire que le milieu souterrain est représenté par une couche dans laquelle les variations spatio-
temporelles des charges hydrauliques et des flux sont calculés numériquement selon un maillage
régulier. La relation avec la couche supérieure de CWATM est inchangée pour les flux descendants,
dits de recharge souterraine ("groundwater recharge" ou "percolation"). Pour les flux ascendants,
de l’aquifère vers le sol (on parle de "capillary rise"), le taux est égal à la différence entre le niveau
d’eau dans l’aquifère et le fond de la couche de sol (voire du contenu en eau dans la couche de sol)
multiplié par une conductance. Cette relation vient du fait que les flux ascendants sont définis par
le package "Drain" de ModFlow déjà utilisé précédemment sur les modèles de Ploemeur et Guidel.
83
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Par conséquent, la conductance (consistant à fixer une zone intermédiaire de transmissivité fixée)
peut s’avérer être un paramètre critique, cependant les tests montrent une sensibilité assez faible
sur ce paramètre. Une période de simulation du modèle couplé ainsi développé se déroule selon
l’algorithme décrit sur la figure 3.7.
Le couplage n’est donc pas parfait et mériterait d’être approfondi via l’intégration du modèle
ModFlow en tant que module inclus dans CWATM. Cela pourrait notamment augmenter la vitesse
de calcul du modèle. Dans notre cas, les deux modèles sont redémarrés à chaque étape ce qui
oblige à charger l’état précédent et sauvegarder l’état final à chaque fois. Cela permettrait égale-
ment d’implémenter une équation plus réaliste pour décrire les échanges entre la partie aquifère
et la partie sol. Ici, le modèle CWATM fournit de l’eau quel que soit le niveau piézométrique, on
verra cependant en perspective une nouvelle approche permettant de prendre en compte l’in-
fluence de la proximité de la nappe sur la recharge. En théorie, le couplage nécessiterait l’implé-
mentation d’un solveur à part entière pour que les systèmes soient dépendants. Cette approche
reste parcimonieuse, considérant qu’il plus important de représenter la physique des écoulements
dans les aquifères qu’à l’interface avec le sol.
La mise en place du couplage a demandé quelques précautions qu’il est important de docu-
menter. En particulier, à chaque période de temps et pour chaque maille, CWATM reçoit un flux
vertical de ModFlow et en fournit un en retour. Mais la remontée capillaire peut être ajoutée à dif-
férents moments. Nous avons choisi d’apporter cette contribution au début de chaque période de
simulation, juste avant le calcul de l’évapotranspiration afin que l’eau supplémentaire soit dispo-
nible immédiatement. L’intérêt est aussi de limiter les échanges, c’est à dire d’éviter que cette eau
84
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
1. Un modèle ou un système en régime permanent (ou stationnaire) ne dépend pas du temps, il s’apparente à l’état
moyen du système sur une durée suffisamment longue. La moyenne des différentes variables du système (niveaux
piézométriques, débits de rivières...) est alors obtenue en calculant l’état d’équilibre du système lorsque celui-ci est
soumis à des conditions limites constantes (pluies moyennes, évapotranspiration moyenne...)
85
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
Un point clef de CWATM que n’avons pas encore discuté est sa capacité à intégrer une variabi-
lité sous-maille pour certains processus. Cette capacité est courante dans ce genre de modèles et
permet de prendre en compte des informations plus fines sans augmenter sensiblement le temps
de calcul. Dans CWATM plusieurs processus dits sous-mailles se distinguent.
Chaque maille est constituée de six types de sols (forêts, champs...) en proportions différentes
d’après les informations disponibles dans les bases de données. Ces sols possédant des propriétés
différentes, éventuellement en fonction des saisons, en terme d’épaisseur, d’extension des racines
végétales, de couvert végétal ou d’évapotranspiration potentielle, les développeurs ont opté pour
un schéma sous-maille de type "mosaïque". Cette approche consiste à diviser les mailles en six
et à effectuer la simulation en parallèle pour chaque sous-maille (techniquement, une dimension
est ajoutée au calcul matriciel). Pour chaque type de couverture, les données d’entrées que sont la
pluie, la température ou la remontée capillaire par exemple, sont les mêmes. Ensuite, pour chaque
maille, les contenus en eau calculés pour les six types de couvertures (ou des six sous-mailles) sont
sauvegardés pour l’étape suivante. Enfin, les flux obtenus sont rapportés au pourcentage surfa-
cique de chaque type de couverture puis ils sont sommés pour obtenir les flux totaux sortant au
niveau de chaque maille tels que l’évapotranspiration réelle ou l’écoulement.
Le ruissellement lié à la saturation des sols fait lui aussi l’objet d’une approche sous-maille
via le schéma Arno [Hagemann and Gates, 2003; Todini, 1996]. Ce dernier permet de générer du
ruissellement à partir d’une estimation du pourcentage de saturation de chaque maille CWATM.
Ainsi, on peut générer du ruissellement même si les volumes de pluies sont normalement insuffi-
sant pour remplir la maille dans sa totalité. On estime que cette approche est plus réaliste car en
réalité les flux convergent dans certaines zones et du ruissellement peut se produire localement.
Schématiquement, la méthode Arno permet donc de redistribuer le contenu en eau du sol au sein
des mailles le temps de calculer le ruissellement et l’infiltration.
La fonte des neiges est quant à elle fonction de l’écart-type de la topographie à une résolution
plus fine au sein de chaque maille. Enfin, pour chaque maille, la remontée capillaire du réservoir
aquifère est elle aussi calculé à partir d’informations plus fines sur la topographie ce qui permet
de générer une remontée capillaire même si le niveau souterrain est inférieur à l’altitude moyenne
de la cellule sus-jacente. Ainsi, le niveau d’eau dans l’aquifère est calculé puis augmenté de 5 m
par exemple (pour prendre en compte la remontée capillaire). Ce niveau piézométrique est alors
comparé à la profondeur du sol mais à une résolution plus fine que celle du modèle. On en dé-
duit ainsi la fraction de maille influencée par la remontée de nappe ce qui permet d’ajouter une
contribution profonde se produisant localement dans les bas topographiques malgré un niveaux
moyen très inférieur à l’altitude moyenne du sol.
Dans le cas du modèle couplé, la résolution du modèle ModFlow ne peut pas être la même que
celle de CWATM étant donné que les systèmes de coordonnées ne sont pas superposables directe-
ment (figure 3.8). En effet, CWATM travaille en système géographique (WGS84) alors que la version
de ModFlow utilisée (ModFlow-2005) utilise un système projeté en coordonnées cartésiennes car
son schéma de résolution par différences finies nécessite une grille régulière. Typiquement, notre
résolution CWATM est de 5’ (soit environ 7-8 km au niveau du Rhin) alors que celle de ModFlow
est modulable entre 4 et 1 km actuellement. Cette dernière doit rester assez fine pour permettre
une bonne projection de CWATM vers ModFlow c’est à dire pour éviter que de grandes cellules se
retrouvent à cheval et non superposées. Mais elle ne peut descendre sous le kilomètre sans impli-
quer des temps de calculs de plusieurs jours (sur un ordinateur portable standard) à l’état actuel
86
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
du modèle. Par conséquent, on peut dire que notre modèle couplé inclut un modèle hydrogéolo-
gique sous-maille. Le taux de percolation vers l’aquifère, calculé au droit d’une maille CWATM, est
donc appliqué uniformément aux cellules ModFlow sous-jacentes. Après résolution numérique,
ces dernières restituent alors à la maille CWATM un flux "capillaire" comme étant la somme du
flux de chaque cellule (figure 3.8).
F IGURE 3.8 – Les processus sous-mailles implémentés dans le modèle couplé CWATM-ModFlow
De manière simplifiée, le modèle d’aquifère, à résolution plus fine que CWATM, fournit plus
d’eau à la surface dans les bas topographiques qui sont des zones de convergence des flux souter-
rains. Nous proposons de ne pas perdre cette distribution spatiale des flux capillaires provenant
de la partie aquifère. Pour ce faire, nous avons ajouté un schéma sous-maille similaire à celui im-
plémenté pour les six types de sol. Il permet de diviser la maille CWATM en deux parties, l’une sera
impactée par les remontée de nappe, l’autre non (voir le schéma du centre sur la figure 3.8). L’effet
recherché est une meilleure prise en compte de l’influence de la distribution de l’eau dans les sols.
On peut supposer que les taux d’évapotranspiration, de percolation ou de ruissellement seront
différents si l’eau est répartie uniformément sur 64 km2 ou si elle est concentrée plus localement
au sein de cette surface. Le schéma de discrétisation implémenté est explicité sur la figure 3.8. Il
consiste à relever le pourcentage de cellules ModFlow qui participent à de la remontée capillaire
au sein d’une maille CWATM. Ensuite, seul ce pourcentage de la maille CWATM se voit attribuer ce
flux capillaire. Comme pour l’approche mosaïque avec les six types de sol, le modèle CWATM est
ensuite appliqué en parallèle aux zones recevant et ne recevant pas d’eau de la part de l’aquifère
(il y a donc désormais deux "sub-sous-mailles" dans chaque sous-maille).
Il reste à définir la part des remontées de nappe attribuable respectivement à la remontée ca-
pillaire et au débit de base des rivières. Initialement, le modèle CWATM considérait que le débit de
base pour chaque maille était une fonction linéaire du stock d’eau de l’aquifère. L’objectif est ici
de reproduire ce débit de base mais de considérer qu’il se produit dans les zones de convergence
uniquement. Pour cela nous proposons de définir au préalable un réseau hydrographique à partir
de la carte topographique utilisée par ModFlow. Le principe est de définir une aire minimale à par-
tir de laquelle une cellule drainant plusieurs cellules en amont est considérée comme une rivière
87
CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DES MODÈLES HYDROLOGIQUES ET HYDROGÉOLOGIQUES
[Schwanghart and Scherler, 2014]. Ensuite, les flux ascendants vers CWATM sont attribués directe-
ment au débit de base des rivières si les cellules sont identifiées comme des rivières, sinon ils sont
attribués à une remontée capillaire vers les sols. Une deuxième solution mise en place est présen-
tée sur la figure 3.8 (encart du bas). Elle consiste à définir le réseau hydrographique du bassin à
une résolution plus fine que celle de ModFlow. Cela permet ensuite de calculer un pourcentage de
rivières pour chaque cellule de ModFlow. Les flux ascendants sont alors réparties entre le débit de
base et la remontée capillaire en fonction de ce pourcentage.
88
Chapitre 4
Sommaire
4.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
4.1.1 Introduction générale sur la piézométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
4.1.2 Pourquoi différents modèles ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
4.2 Contenu informatif des niveaux piézométriques moyens . . . . . . . . . . . . . . 92
4.2.1 Problématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92
4.2.2 Inversion du modèle stationnaire homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92
4.2.3 Ajout d’une zone moins perméable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
4.2.4 Synthèse sur la piézométrie moyenne de Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . 97
4.3 Contenu informatif des fluctuations temporelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
4.4 Le régime transitoire à travers le modèle numérique 2D . . . . . . . . . . . . . . . 127
4.4.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127
4.4.2 Résultats sur les piézomètres de Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128
4.4.3 Résultats sur les piézomètres de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
4.5 Déstabilisation de l’aquifère par le pompage sur Ploemeur . . . . . . . . . . . . . 131
4.5.1 Comparaison entre l’état initial et l’état pompé . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
4.5.2 Une mauvaise représentation de l’état initial dans le modèle . . . . . . . . . 132
4.5.3 Mise à profit des écarts observés : l’importance des conditions limites . . . 132
4.6 Quelles connaissances acquises et quels manques ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
4.6.1 Contenu informatif des niveaux moyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
4.6.2 Contenu informatif des fluctuations temporelles des niveaux . . . . . . . . . 134
4.6.3 Intérêts et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136
89
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
4.1 Démarche
Les niveaux piézométriques constituent l’observation in-situ la plus simple nous renseignant
sur les écoulements dans les systèmes aquifères. Après une brève introduction sur la piézométrie
et son lien avec les propriétés des sols, nous proposons une première approche sur la modélisa-
tion des niveaux moyens sur le site de Ploemeur. Le même type de modèle sera appliqué pour
la piézométrie du site de Guidel dans le chapitre suivant consacré à la complémentarité entre le
débit et la piézométrie. Dans un second temps, nous nous focalisons sur l’étude des fluctuations
temporelles des niveaux d’eau dans les forages.
La piézométrie se rapporte à l’altitude du niveau d’eau au droit d’un forage dans un aquifère
donné. Si l’aquifère est libre, son niveau d’eau réel est égal à celui mesuré dans les forages. Si il est
confiné, son niveau d’eau réel est limité par le toit de l’aquifère (une couche moins perméable)
tandis que le niveau mesuré dans le forage serait lui plus élevé. De manière générale, l’important
est de garder en tête que le niveau d’eau mesuré dans les forages indique la charge hydraulique
moyenne (la pression d’eau) dans l’aquifère. Ainsi, si un forage traverse une succession d’aquifères
(libre, confiné ou fracturé), son niveau d’eau moyenne la charge hydraulique de toutes les struc-
tures rencontrées. La délimitation peut parfois être assez nette lorsque l’on traverse des couches
bien définies avec des propriétés hydrodynamiques très différentes et que l’on peut identifier des
comportements très différents. Dans ce cas, il est préférable de mesurer la charge hydraulique de
chaque aquifère en isolant chaque partie du forage. En revanche, la différenciation peut s’avérer
impossible quand les structures géologiques sont plus hétérogènes, il se peut alors que les forages
relient des compartiments initialement peu connectés.
La mesure de la piézométrie est essentielle en terme de gestion de la ressource. Le suivi de
l’évolution du niveau piézométrique permet de savoir si la ressource diminue ou augmente. Lors
des essais de pompage, elle permet de prévoir si la ressource est suffisante et si elle sera suffi-
samment accessible (si la perméabilité est suffisante). Les différences de charge hydraulique entre
plusieurs forages permettent aussi de cartographier la direction des écoulements. Il est possible à
partir de quatre ou cinq forages espacés de dizaines de mètres, de dresser une carte piézométrique
et comprendre ainsi d’où vient l’eau et où va-t-elle, de manière indirecte, puisque cela demande
d’estimer les propriétés des aquifères. Les gradients hydrauliques indiquent par exemple l’aire de
captage des pompages et si les flux souterrains proviennent des rivières ou au contraire les ali-
mentent.
Derrière ces observations au premier ordre, on imagine les implications en terme de gestion
de la ressource, d’impact anthropique sur les rivières et les zones humides ou encore en terme de
gestion de la propagation de pollutions. Le niveau piézométrique joue également un rôle dans la
prévention des inondations puisqu’il peut nous dire à l’avance si les niveaux de nappe sont en train
de monter et de se rapprocher de la surface. Dans certains cas, la connaissance de la profondeur
du niveau piézométrique est donc plus critique que celle de son niveau.
Néanmoins, les observations à travers les forages sont insuffisantes pour comprendre les mi-
lieux souterrains de façon plus précise. La variabilité latérale des propriétés du sous-sol et leur
évolution avec la profondeur sont souvent trop importantes pour être appréhendées à partir de
quelques observations locales. De plus, les forages sont coûteux, d’autant plus si la profondeur
souhaitée est grande. Pour surmonter cette difficulté, on a parfois recours à des modèles qui per-
mettent d’extrapoler les niveaux piézométriques dans l’espace et le temps. Mais ces modèles de-
mandent d’être alimentés par des conditions limites et des jeux de paramètres souvent issus d’ob-
servations de terrains. Il y a donc beaucoup de flexibilité dans la démarche qui part des observa-
tions de forage pour en conclure un fonctionnement du système. Cela vient du fait qu’il y a des
90
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
incertitudes à toutes les étapes et parce que la distribution des paramètres est très hétérogène et
peu connue.
Les paramètres hydrodynamiques qui contrôlent l’écoulement de l’eau dans les aquifères sont
les suivants :
1. la perméabilité, K, définie par la loi de Darcy, mais on préférera parler de la transmissivité,
T, qui intègre la perméabilité sur une épaisseur donnée.
2. le coefficient d’emmagasinement, S, qu’on assimile de manière générale à la quantité d’eau
libérée sous une variation unitaire de la charge hydraulique, et qui regroupe donc la poro-
sité efficace (sauf si l’aquifère est confiné) et la déformation de l’espace poreux (coefficient
d’emmagasinement spécifique, S s ) si l’aquifère est confiné.
3. la porosité cinématique (ω), plus utilisée pour caractériser la vitesse d’écoulement et le
transport de soluté, on considère que c’est la porosité qui participe réellement au transport
de l’eau.
Ces propriétés varient donc dans les aquifères de manière plus ou moins complexes et indéter-
minées. À une extrémité, les aquifères sédimentaires peuvent présenter une certaine homogé-
néité à grande échelle, à l’autre extrémité les aquifères fracturés ont des propriétés variant sur
plusieurs ordres de grandeur et présentent une hétérogénéité multi-échelle. La perméabilité et
la transmissivité peuvent varier sur une bonne dizaine d’ordres de grandeur. De manière quali-
tative, moins un aquifère est perméable et plus les gradients piézométriques sont élevés car la
résistance à l’écoulement est grande. Si le relief est faible, on peut ainsi voir sur les cartes piézomé-
triques que les zones où les isopièzes se resserrent correspondent à des zones moins perméables.
Le coefficient d’emmagasinement joue un double rôle puisqu’il intervient dans la transmission
de pression à travers la diffusivité (D = T/S) et dans le battement de nappes. Il vaut jusqu’à 40 %
(équivalent à une porosité) pour les nappes libres et varie entre 0,1 et 0,001 % [de Marsily, 1981]
pour des nappes captives.
Différents modèles ont été présentés dans le chapitre précédent : un modèle analytique 1D et
un modèle numérique 2D qui permet de prendre en compte la topographie. À partir de ce modèle
numérique, il est ensuite possible de discrétiser le champ des paramètres latéralement et vertica-
lement.
Au sein de ces modèles, on fera la différence entre l’état moyen qui représente la moyenne des
niveaux mesurés sur plusieurs années et l’état transitoire qui prend en compte les variations tem-
porelles. La raison est qu’ils ne contiennent pas nécessairement les mêmes informations. L’état
moyen des systèmes est modélisé par des simulations dites en régime stationnaire ou permanent.
C’est à dire que les conditions limites, telles que le taux de recharge, ne varient pas dans le temps
et par conséquent les variables du modèle non plus. Les variations temporelles peuvent être étu-
diées à différents pas de temps en fonction de l’échelle de temps étudiée et du temps de calcul
souhaité.
La raison pour laquelle on emploie différentes structures de modèles est le principe de parci-
monie. Le modèle analytique est le plus simple, il n’a cependant que peu de sens dans la modé-
lisation des niveaux stationnaires. En effet, la structure 1D ne permet guère d’y inclure de façon
réaliste la position des différents forages. On verra néanmoins sa pertinence pour représenter le
transitoire. Au contraire, le modèle numérique se veut plus complexe même si il ne comporte
finalement que deux paramètres dans le cas homogène, une transmissivité et un coefficient d’em-
magasinement. Il est notamment beaucoup plus long en temps de calcul. Cependant, l’objectif du
modèle numérique est d’apporter du réalisme au modèle. Tout en restant assez simple, ce modèle
permet de modéliser l’évolution dans le temps et l’espace du niveau piézométrique. Ce dernier
91
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
étant suivi par un réseau de forages plutôt bien répartis spatialement, il permet de comprendre la
physique du processus.
Les modèles hétérogènes viennent encore un peu plus complexifier le problème. Ils tentent
d’évaluer le rôle potentiel de l’hétérogénéité sur la mesure et les processus. Ils apportent éventuel-
lement une amélioration de la représentation des processus d’écoulement en milieu souterrain.
4.2.1 Problématique
En pratique, les niveaux piézométriques moyens peuvent être difficiles à modéliser pour dif-
férentes raisons. Ils sont le résultat des échanges avec la surface (la recharge des aquifères prin-
cipalement), du champ de perméabilité et des circulations souterraines. De manière générale, les
paramètres des modèles hydrogéologiques et leurs conditions limites ne sont pas bien contraints
car les seules données piézométriques moyennes ne sont pas assez informatives. Soit les niveaux
piézométriques moyens sont bien modélisés dans l’espace mais les paramètres et les conditions
limites ne sont pas contraints. Soit ils sont moins bien représentés sans que le modèle soit forcé-
ment mieux contraint. De manière synthétique, un des problèmes en hydrogéologie est donc de
ne pas être capable de déterminer les causes des différences entre les niveaux observés et modé-
lisés [Carrera et al., 2005]. Est-ce-qu’il suffit de réduire la perméabilité à un endroit ? D’augmenter
le taux de recharge à un autre ?
Nous proposons ici une approche à travers un modèle très simple appliqué au site de Ploe-
meur. L’objectif est d’évaluer l’apport et les limites de ce type de modèle dans un contexte hété-
rogène. Notre problématique est donc, comme pour l’ensemble de cette thèse, de déterminer en
quoi les données observées informent les modèles.
Nous avons donc utilisé le modèle numérique ModFlow, présenté dans le chapitre précédent,
pour modéliser l’aquifère de Ploemeur en régime permanent. Les charges hydrauliques modéli-
sées sont comparées aux niveaux moyens mesurés dans sept forages compris dans un rayon de
700 m autour du site de pompage. La moyenne a été calculée à partir des mesures effectuées entre
1998 et 2012 lorsque les niveaux se sont stabilisés après la mise en pompage en 1991 (le débit a été
fixé à environ 1 Mm3 /an à partir de 1993 seulement).
Les paramètres homogènes que nous avons fait varier sont le taux de recharge et la transmis-
sivité. Pour le premier, 12 valeurs sont testées entre 140 et 360 mm/an. Pour le second, 40 valeurs
sont testées entre 1.10−4 et 1.10−1 m2 /s. Soit au total 480 simulations. Les piézomètres de calibra-
tion sont F7, F9, F11 (proche des pompages), F19, F20, F34 et F35 (voir la figure 3.3 au chapitre
précédent).
Pour comparer les niveaux modélisés aux niveaux observés, une fonction objectif servant de
critère a été définie. Elle vaut la moyenne des valeurs absolues des différences entre les niveaux
observés et modélisés. Afin de normaliser le résultat, cette valeur a ensuite été divisée par la pro-
fondeur moyenne des niveaux piézométriques observés, soit 17 m. Cette normalisation est tout à
fait subjective mais permet de mieux apprécier les écarts par rapport au rabattement général des
niveaux piézométriques à cause du pompage.
92
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Les résultats sont présentés sur la figure 4.1. L’exploration de l’espace des paramètres montre
que la contrainte des observations sur la transmissivité équivalente est assez forte. Il apparaît net-
tement un minimum global sur les courbes représentant le critère minimal obtenu pour chaque
transmissivité testée (en haut sur la figure 4.1). En revanche, il est intéressant de voir qu’en ex-
cluant le piézomètre F11 de l’inversion, les résultats sont sensiblement meilleurs étant donné que
l’erreur moyenne passe de 24 à 17 % (ou de 4,1 à 2,9 m). Surtout, l’estimation de la transmissi-
vité est différente puisque la valeur optimale passe de 6.10−4 -1.10−3 m2 /s à 3.10−4 -6.10−4 m2 /s. Le
niveau piézométrique mesuré en F11 demande donc à ce que la transmissivité soit sensiblement
plus grande. Ces estimations, en tout cas en ne prenant pas en compte le piézomètre F11, res-
tent assez faibles en comparaison aux précédentes études. D’après Le Borgne et al. [2006] (pom-
page longue durée), Leray et al. [2012] (niveau moyen au principal puits de pompage) et Jimenez-
Martinez et al. [2013] (approche fréquentielle à l’échelle saisonnière dans plusieurs forages) la
transmissivité à l’échelle du site se situerait plutôt vers 1-3 .10−3 m2 /s.
F IGURE 4.1 – Résultats de l’exploration de l’espace des paramètres du modèle stationnaire de Ploemeur. Le
critère est basé sur la comparaison entre les niveaux observés et modélisés au niveau des forages F7, F9, F11,
F19, F20, F34 et F35. En haut : critère minimal obtenu pour différentes valeurs de la transmissivité. En bas :
critère minimal obtenu pour différentes valeurs du taux de recharge.
Dans le cas où le niveau piézométrique mesuré en F11 est pris en compte, le taux de re-
charge est assez peu contraint et la courbe affiche deux minimums peu marqués (en bas sur la
figure 4.1). La gamme de valeurs optimales est globalement comprise entre 160 et 250 mm/an.
Ces taux semblent plutôt faibles comparés à ceux estimés par les modèles de recharge convention-
93
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
nels (280 mm/an si considère que toute les pluies efficaces rechargent l’aquifère). En revanche, les
conclusions sont différentes quand on retire le piézomètre F11 de l’inversion. Les meilleurs résul-
tats sont alors obtenus pour des taux de recharge compris entre 240 et 320 mm/an. Cette dernière
valeur semble quant à elle trop élevée si on considère notamment qu’un taux de 280 mm/an est
une estimation haute de la recharge.
La figure 4.2 représente l’évolution du critère (en couleur) dans l’espace des deux paramètres
que sont la transmissivité et le taux de recharge. Le critère optimal n’est alors pas défini par un
point mais par une droite. Le ratio du taux de recharge sur le logarithme de la transmissivité est
donc assez bien contraint dans les gammes de valeurs retenues pour la transmissivité équivalente,
c’est à dire entre 2.10−4 et 2.10−3 m2 /s. Ce ratio converge vers 1,2.10−5 m−1 en intégrant tous les
forages à l’inversion et vers 2,2.10−5 m−1 en excluant le forage F11 de l’inversion.
Il est donc assez problématique que la paramétrisation du modèle homogène équivalent dé-
pende autant d’un point de mesure. Comme la prise en compte de ce piézomètre a tendance à
augmenter la valeur de la transmissivité on pourrait suggérer que la zone proche du pompage doit
être plus perméable en supposant que cet effet n’est pas lié à une mauvaise distribution des dé-
bits de pompage entre les trois puits. Dans le contexte particulier de Ploemeur, deux tendances
s’opposent. Baisser la transmissivité diminue les niveaux moyens à cause du rabattement par le
pompage, mais les augmente aussi (en s’éloignant du pompage principalement) car l’eau circule
moins bien dans le système. Autour du pompage, c’est surtout la condition de pompage qui l’em-
porte. Le contexte n’aide donc pas à contraindre nos deux paramètres.
F IGURE 4.2 – Évolution du critère du modèle stationnaire de Ploemeur en fonction à la fois de la transmissivité
et de la recharge. On distingue une contrainte sur le ratio de la recharge sur la transmissivité ; ce ratio est un
peu différent lorsque le piézomètre F11 est exclu de l’inversion.
Dans un second temps, une zone moins perméable a été ajoutée au modèle stationnaire de
Ploemeur (voir figure 4.3). Cette zone, implantée au sud-ouest du domaine et assez proche du
pompage, suit grossièrement le contour d’une butte de granite qui se dégage dans le paysage.
D’après une campagne d’imagerie géophysique, elle se prolonge vers le nord-est sur une centaine
de mètres. L’impact de cette hétérogénéité est une augmentation du rabattement autour du pom-
94
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
page (figure 4.3) ce qui est logique puisqu’on réduit la capacité de l’aquifère à conduire l’eau sur
toute la partie sud-ouest de la zone de pompage. Conjointement, les niveaux sont plus hauts dans
la zone moins perméable et les isopièzes sont plus resserrées. Cela implique des gradients piézo-
métriques forts notamment entre cette zone et le pompage.
F IGURE 4.3 – Exemple d’une simulation en régime stationnaire du modèle ModFlow du site de Ploemeur en
considérant une zone moins perméable. La transmissivité du modèle vaut 1.10−3 m2 /s et est 100 fois plus faible
dans la partie correspondant au granite ; le taux de recharge appliqué vaut 270 mm/an ; les lignes représentent
les isopièzes (tous les 2 mNGF), les zones bleues indiquent les zones de décharge des eaux souterraines.
Nous avons à nouveau procédé à une exploration de l’espace des paramètres qui contient cette
fois trois dimensions : la transmissivité du modèle, celle de la partie moins perméable et toujours
le taux de recharge. L’espace des paramètres à échantillonner est considérablement plus grand
que précédemment, le nombre de combinaisons possible augmentant en fonction de la densité
d’échantillonnage selon une loi de puissance dont le degré est égal au nombre de paramètres. La
densité des valeurs échantillonnées pour la transmissivité a donc été divisée par deux pour des
raisons de temps de calcul. On est passé de 40 à 20 valeurs testées entre 1.10−4 et 1.10−1 m2 /s. Cela
se traduit par des courbes légèrement différentes si l’on compare les modèles homogènes de la
figure 4.4 (courbes rouges) avec ceux des figures 4.1. La transmissivité de la zone moins perméable
est imposée à une valeur 1000, 100 ou 10 fois plus faible que celle de l’autre partie du domaine.
On note d’abord que l’ajout de la zone moins perméable permet d’améliorer le critère dans
le cas où l’on compare tous les niveaux piézométriques y compris ceux de F11. En effet, l’erreur
moyenne normalisée par la profondeur moyenne des niveaux passe de 23 à 15 % (figure 4.4). Dans
le cas où F11 est exclu de l’inversion, l’erreur minimale diminue en revanche très peu malgré
l’ajout de la zone moins perméable. Ensuite, on remarque que la courbe du minimum de l’erreur
en fonction de la transmissivité ne dépend plus de la présence ou non du piézomètre F11 dans l’in-
version (car les lignes pleines et en tiretés sont assez confondues sur la figure 4.4 en haut). C’est
pour une transmissivité de 2.10−3 m2 /s que le meilleur modèle est obtenu, avec une transmissivité
10 fois plus faible dans la zone moins perméable. Cette valeur de transmissivité est donc plus en
accord avec les précédentes études.
95
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Pour ce qui est de l’impact du taux de recharge, les résultats sont assez surprenants puisque ce
sont des taux faibles (140 mm/an) qui donnent les meilleurs résultats (figure 4.4 en bas), sauf pour
le cas homogène déjà évoqué. Là encore la prise en compte du piézomètre F11 impacte moins
l’estimation des paramètres équivalents même si les courbes sont moins confondues que pour la
transmissivité.
Pour les différents ratios testés entre la transmissivité du modèle et celle de la zone moins
perméable, les courbes du critère en fonction de la recharge suivent une même tendance et le mi-
nimum est assez marqué. Cependant, pour le ratio qui semble donner les meilleures simulations
(K1 /K2 = 10), on note qu’un minimum local se dégage en R = 220-240 mm/an. On remarque éga-
lement que pour ce ratio l’erreur minimale évolue finalement assez peu entre R = 140 mm/an et
R = 260 mm/an. Elle n’évolue en effet que entre 15 et 20 % soit une erreur moyenne comprise entre
2,6 et 3,4 m sur les sept piézomètres utilisés.
F IGURE 4.4 – Résultats de l’exploration de l’espace des paramètres du modèle stationnaire de Ploemeur en
considérant une zone moins perméable ; le critère est basé sur la comparaison entre les niveaux observés et
modélisés au niveau des forages F7, F9, F11, F19, F20, F34 et F35. En haut : critère minimal obtenu pour
différentes valeurs de la transmissivité et en fonction de la perméabilité de la zone moins perméable. En bas :
critère minimal obtenu pour différentes valeurs du taux de recharge.
96
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Cette partie fait l’objet d’une future publication qui sera soumise à la revue Water Resource
Research. Elle traite de la modélisation des fluctuations piézométriques enregistrées sur les sites
de Ploemeur et Guidel. Un modèle analytique est développé (présenté dans la première partie du
chapitre précédent). Il présente l’avantage de pouvoir être adapté à différents contextes (pompage
ou non, géométrie 1D ou radial). Ensuite, nous évaluons l’aptitude de ce modèle à restituer les
fluctuations piézométriques observées. Dans un second temps, nous analysons la sensibilité aux
paramètres et notamment la sensibilité au taux de recharge appliqué au modèle en fonction du
temps. Enfin, les résultats sont comparés entre Ploemeur et Guidel, soit entre un système soumis
à un pompage et un système toujours à l’état naturel.
Le modèle analytique se montre alors capable de restituer correctement plus de 20 ans de
fluctuations piézométriques malgré la complexité de l’aquifère. Les résultats montrent que l’in-
certitude sur le taux de recharge a peu d’influence sur l’estimation des paramètres à l’échelle de
plusieurs années. Une fois les paramètres estimés, il est donc possible d’inverser analytiquement
le modèle pour obtenir les fluctuations du taux de recharge au niveaux de différents puits sur le
site en pompage et sur le site à l’état naturel. Nous montrons notamment que le pompage atténue
fortement le signal de recharge à haute fréquence (pour les périodes inférieures à une centaine de
jours).
97
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
4
1 Univ Rennes, CNRS, Geosciences Rennes - UMR 6118, F-35000 Rennes, France
5 Key Points:
–1–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
13 Abstract
35 1 Introduction
36 With increasing anthropogenic and climate pressures on water resources [Gleeson et al., 2012;
37 Wada et al., 2016], the understanding on how water is transiently stored and flows in the subsurface is
38 crucial. Water management need to answer the sustainability challenge, i.e. resolve the compromise
39 which encompasses climate variability, ecosystem preservation, economic and public domain activ-
40 ities [Armandine Les Landes, 2014; Gerten et al., 2013]. Groundwater (GW), as the world′s largest
41 accessible freshwater storage, has a considerable importance [Taylor et al., 2013]. GW sustain river
42 baseflow [Schaller and Fan, 2009] and ecosystems [Maxwell and Condon, 2016; Fan, 2015], support
43 food security [Scanlon et al., 2012; Dalin et al., 2017] and enable human adaptation to climate vari-
44 ability. The increasing climate variability is expected to intensify this strategic importance [Gerten
45 et al., 2013]. Because of these vital contributions, there is a critical need to improve our knowledge
46 of aquifer systems, their connection with the surface and how they are impacted by surface pressures.
47 GW flows in geological bodies over depths up to kilometers, locally intercepting the surface
48 where it interacts with rivers and atmosphere [Alley et al., 2002; Fan, 2015], or directly extracted by
49 vegetation, contributing to evapotranspiration [Maxwell and Condon, 2016]. Though, GW-surface
50 interactions are fundamental processes but complex to represent physically across space and time.
–2–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
51 Recharge, as the single water inflow feeding groundwater, is focusing a lot of attention, as it
52 is the primary requirement for proper management of groundwater systems while being broadly
53 inaccessible to direct observations [Scanlon et al., 2006; Healy and Cook, 2002]. Globally, annual
54 recharge rates represent more than a third of the world’s renewable freshwater resources, ranging
55 from 13000 to 18000 km3 .yr −1 [Wada et al., 2010; Döll and Fiedler, 2008; Mohan et al., 2017]. On
56 a spatial point of view, recharge is controlled by multiple factors such as heterogeneity, vegetation
57 and soil properties [Hartmann et al., 2017; Kollet, 2009; Lee et al., 2006; Sililo and Tellam, 2000;
58 Mohan et al., 2017].
59 Beyond mean annual recharge, fluctuations of recharge over time, at short to long time scales,
60 remain a critical information. On a temporal point of view, recharge is highly variable throughout
61 the year, showing a pronounced seasonality [Jasechko et al., 2014] with potentieal high sensitivity
62 to extreme events [Taylor et al., 2012; Owor et al., 2009; Mileham et al., 2009]. It is also modulated
63 by water table depth, human actions such as pumping [Bredehoeft, 2002] and managed recharge or
64 return flow from irrigation [Taylor et al., 2013; Guihéneuf et al., 2014]. Indeed, several authors
65 brought proofs of the strong relationship between small recharge rate variations and groundwater
66 flow reorganization through threshold effect: spatiotemporal recharge/discharge variability due to
67 irrigation or GW abstraction [Cao et al., 2016; Lee et al., 2006; Shamsudduha et al., 2011; Johansen
68 et al., 2011], topographic control in the response to rainfall [Bresciani et al., 2016; Marçais et al.,
69 2017]. Recently, several works documented changes in hydrological and/or groundwater response
70 linked to changes in surface system vegetation, characteristics at interannual time scales [Ajami et al.,
71 2017; Troch et al., 2009; Fan, 2015; Condon and Maxwell, 2017; Favreau et al., 2009].
72 Several methods have been developed to estimate recharge [Healy, 2010], ranging from a
73 fraction of annual precipitation to more complex land surface models resolving energy and water
74 balance. Conceptually, considering large idealized closed basin, GW recharge can be constrained by
75 a simple water balance as the difference between precipitations less evapotranspiration and surface
76 flow. Such approach assumes no interactions at the basin boundaries, and is generally hampered by
77 uncertainties in flux estimation [Long et al., 2014]. More generally, recharge is often estimated as
78 the water percolating from the last unsaturated horizon to reach down the water table. Therefore, it
79 can be measured by a lysimeter or tracing methods [Scanlon et al., 2002]. Such methods are subject
80 to spatial variability, and difficult to upscale. Another approach consists in modeling vertical water
81 transfer through a defined thickness of the unsaturated zone [Morton, 1983; Thornthwaite, 1948].
82 This modeling approach is generally considered in regional to large scale models, where modeled
83 soil thickness is limited to a few meters, with no consideration of the actual water table depth [Clark
84 et al., 2017]. Infiltration cannot be assimilated as groundwater recharge considering potential storage
85 changes and lateral flow in the deep unsaturated zone [Besbes and Marsily, 1984; Vergnes et al.,
86 2014; Hector et al., 2018].
87 All these studies have in common to assess infiltration (interpreted as GW recharge) "by above",
88 propagating uncertainties on flux estimations. Observed hydraulic heads in boreholes are probably
89 the most direct observation to characterize aquifers behavior, so GW recharge can be computed
90 by the function it performs, i.e. increasing GW level. Transient GW level variations are linked to
–3–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
91 GW storage variations due to imposed boundary conditions, GW flows and hydrodynamic properties.
92 Therefore, the hydrogeological toolbox contains tools to estimate recharge directly from groundwater
93 level variations, such as the water table fluctuation method [Healy and Cook, 2002; Crosbie et al.,
94 2005; Cuthbert, 2010; Maréchal et al., 2006]. Main uncertainties arise from the limited knowledge
95 on hydrodynamic parameters, and the representativeness of the observation point to infer flow
96 characteristics in heterogeneous media.
97 Another approach consists in modeling GW flow and benefit from the coherence among different
98 observations inherited from lateral GW flow. Several authors proposed frequency analysis between
99 long-term recharge and water levels assuming an equivalent homogeneous aquifer [Gelhar, 1974].
100 In this case, time lags and amplitude of the aquifer response to periodic recharge can be described by
101 a linear transfer function [Jimenez-Martinez et al., 2013; Townley, 1995]. Based on this theoretical
102 framework, [Dickinson, 2004] inverted the method to infer time varying recharge linked to climate
103 variability from water levels.
104 In this study, we propose to address the challenge of estimating recharge fluctuations (RF) in
105 a two-step approach based on a simple analytical GW flow model. We question the informative
106 content of GW level observations and their respective sensitivity to heterogeneity and recharge. The
107 approach consists in applying a parsimonious GW flow model to fully explore contributions to water
108 level variations and estimate uncertainties. In a first step, hydrodynamic parameters are inverted by
109 prescribing a set of different prescribed modeled recharge. In a second step, recharge is computed
110 backward and analytically from the simple model.
111 The main objectives of this work are threefold (1) explore the sensitivity of observed GW level
112 variations to recharge and hydrodynamic properties; (2) estimate recharge fluctuations (RF) over a
113 20-year period in a highly heterogeneous context (3) explore the main controls on recharge processes.
114 To achieve these goals, we propose to estimate recharge "by below" on a fractured crystalline aquifer
115 in both pumped and natural contexts. Although simple, the model (section 2) can adapt to different
116 boundary conditions and RF can be inverted analytically once the model reproduces GW level
117 observations. In a third section, we present the Ploemeur and Guidel hydrogeological observatories
118 on which the model is set up (section 4) and finally main results are discussed (section 5). The whole
119 strategy is synthesized on figure 1.
126 In this section, we describe (1) the 1D GW flow model that will be deployed to estimate
127 recharge from head time series; (2) the surface models used to estimate infiltration and drive the GW
128 flow model; and (3) the inversion strategy. The model is based on Townley [1995] developments,
129 describing the response of a 1D aquifer of finite length to periodic boundary conditions.
131 Transient groundwater flow in an aquifer is described by the diffusivity equation De Marsily
132 [1986]. In a long aquifer, the vertical component of flow can be neglected(Dupuit hypothesis), so
–4–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
120 Figure 1. Description of the simple modelling approach to estimate recharge fluctuations (RF) based on water
121 level variations. Uniformly distributed recharge rate, R(t), is linked to GW levels based on an homogeneous
122 1D lateral GW flow model of length L. Model boundary conditions can be both constant head or imposed flow
123 rate, Q(t). PET is potential evapotranspiration. Arrows represent the different steps, white rectangles refer to
133 that the diffusivity equation can be simplified along a single dimension x. Considering further an
134 homogeneous and confined aquifer, the diffusivity equations writes as (Eq. 1):
d 2 h(x, t) dh(x, t)
135 T 2
=S − R(t), (1)
dx dt
136 where h(x, t) are hydraulic head variations [L]; R(t) the uniformly distributed recharge rate from
137 the surface [L.T −1 ]; T the aquifer transmissivity [L 2 /T] and S the storage coefficient of the aquifer
138 []. This formulation with constant transmissivity is also valid in unconfined aquifer where head
139 variations are small compared to the aquifer thickness. In this case, S is equivalent to specific yield.
140 The system is defined by a domain comprised between x = 0 and x = L, where flow direction is
141 parallel to x axis (Fig. 1). The width of the model is noted W (Fig. 1).
142
143 Solving equation 1 requires two boundary conditions (BC) imposed at x = 0 and x = L, which
144 can be constant in time or transient. These BC must be chosen to best represent actual aquifer system
145 configurations. Three options can be encountered: defined head (e.g. river, natural boundary),
–5–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
146 defined flow (pumping, no flow), or a combination of both. Note that pumping are generally
147 punctual while BC should be applied along the width W of the model (Fig. 1).
148 Equation 1 with associated BC can be solved analytically in frequency domain. A function
149 f (x, t) can be decomposed as the sum of complex functions:
Re f¯(x, ω).eiωt
Õ
150 f (x, t) = fmean (x) + (2)
151 where fmean (x) is the steady state term, Re means the real part and f¯ are complex Fourier coefficients.
152 The transient term is decomposed into the sum on each frequency ω.
153 In the following, equation 1 is further resolved for the pumping case, but can be resolved for any
154 combination of BC [Townley, 1995]. For the constant head BC, a simpler similar solution is obtained
155 and independent of the model width. When injecting Fourier transform of the different terms into
156 equation 1, the solution h(x, t) is decomposed as the sum of a quadratic steady state and a transient
157 term (Eq. 3):
Rmean 2 Q mean
h(x, t) = (L − x 2 ) + (L − x) + h L
2T ! NT
(3)
( " #)
158 Õ X2 cosh Xx X sinh X
x−L
+ Re eiωt R̄ 1− + Q̄
T cosh XL T N cosh XL
r
D T
159 with X = and D =
iω S
160
2
where D is the hydraulic diffusivity [L /T] and h L [L] is the constant imposed head at x = L. Rmean
161 and Q mean are the mean values of recharge and pumping rates. Note that head temporal variations
162 are independent from the steady state conditions. Also, imposed pumping rate requires the use of the
163 model width W to define a volume per unit of time. Finally, the transient part of equation 3 can be
164 rewritten (Eq. 4) to highlight the relevant geometric and hydrodynamic parameters: characteristic
165 time (tc ) describing how a pulse in pressure is propagated along the distance L, storage coefficient
166 (S), model length (L) and width (W).
√ √
sinh( iωtc (xr − 1))
Õ R̄ cosh(xr iωtc ) Q̄ tc
htr ansient (xr , t) = Re eiωt 1− √ + √ √
iωS cosh iωtc N LS iωtc cosh iωtc
167 (4)
x L2
168 with xr = and tc =
L D
169 When hydrodynamic parameters and boundary conditions (Q(t) and h L ) are known, GW level
170 variations can be reversed analytically in frequency domain,
√ √ √ −1
Q̄ iωtc sinh( iωtc (xr − 1))
cosh(xr iωtc )
171 R̄ = iωS h̄(xr , ω) − √ × 1− √ (5)
N L cosh iωtc cosh iωtc
–6–
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174 The forward model described previously is driven by GW recharge R(t). In order to assess the
175 sensitivity of the flow model to prescribed recharge estimates, we tested three different classical soil
176 models computing infiltration "from above". These models use climate data (precipitation, incoming
177 energy) to infer infiltration defined as percolation below the root zone. In all cases, we consider that
178 modeled infiltration is feeding instantaneously the GW system as recharge, and neglect unsaturated
179 zone processes between the modeled soil layer and the actual water table depth.
180 The first infiltration model is based on the representation of the unsaturated zone as a simple
181 reservoir accumulating rainwater and satisfying potential evapotranspiration while water is available.
182 Water percolates to GW when the reservoir is full [Thornthwaite, 1948]. Based on previous studies
183 on the Ploemeur site [Jimenez-Martinez et al., 2013], we consider a soil storage reserve of 166 mm
184 based on a local soil characterization.
185 The second infiltration model is derived from the GR4J hydrological model [Perrin et al., 2003].
186 Infiltration estimates are based on the so called production store and defined as the sum of downward
187 fluxes out of the production store (see https://webgr.irstea.fr). In this model, evapotranspiration
188 and other water fluxes depend on the amount of water stored in the reservoir in a non-linear but
189 incremental way, providing more diffuse infiltration as compared to the previous model. After
190 several tryouts, the capacity of the production store is set to 300 mm.
191 The third infiltration model is provided by SURFEX modeling plateform. SURFEX is a land
192 surface model simulates energy and water fluxes at the interface between atmosphere and the surface
193 (soil, vegetation, snow). SURFEX is built to be coupled to forecast and climate models and then can
194 be used over different spatial and temporal scales from 100 m to 100 km grid-resolution and from a
195 few seconds to a 30-minutes time step [Noilhan and Planton, 1989; Masson et al., 2013]. The basic
196 physics of the land surface are taken into account using the Interaction between Soil Biosphere and
197 Atmosphere (ISBA) land surface scheme. ISBA requires only a limited number of parameters, which
198 depend on the type of soil and vegetation. In the present study, ISBA uses a multilayer soil scheme
199 to solve both the one-dimensional Fourier law and mixed form of the Richards equation explicitly
200 in order to calculate the time evolution of the soil energy and water budgets [Boone et al., 2002;
201 Decharme et al., 2013]. This approach allows explicit representation of the surface/groundwater
202 capillarity exchanges [Vergnes et al., 2014] as well as the vertical distribution of the root profile in
203 the soil [Braud et al., 2005]. A detailed description of the ISBA multilayer soil scheme can be found
204 in [Decharme et al., 2013]). SURFEX is provided on a 8-km grid over France.
206 The forward model is now fully defined. The first step of our approach consists in defining
207 geometric (L, W) and hydrodynamic parameters (T, S) based on the comparison with measured
208 groundwater heads. In the pumped case, W was chosen to be N = 1000 m (W does not appear in
209 the analytical solution of the natural case). The location x of the observation wells also needs to be
210 defined in coherence with the 1D hypothesis. In pumping context, x is defined as the distance to the
–7–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
211 pumps. In natural context, x is defined as the distance to the lower boundary condition (river).
212
213 As the simple model is computationally efficient, the whole parameter space (T, S, L) has been
214 sampled to estimate to which extent model parameters can be defined with GW head observation.
215 For each parameter, a realistic range is set and regularly sampled with 40 values : transmissivity
216 (T ∈ [10−4 ; 2.10−1 ] m2 .s−1 ), storage coefficient (S ∈ [10−4 ; 2.10−1 ] SI), length (L ∈ [800; 6000] m)
217 and three infiltration models on the Ploemeur site. A total of 254400 and 400000 models where
218 run for Ploemeur and Guidel site respectively. Modeled GW heads are evaluated against root mean
219 square error (RMSE) divided by the standard deviation of head observations (called normalized
220 RMSE nRMSE) to favour comparison among the different observation wells:
rÍ
(hobs − hmodel )2 1
221 nRMSE = × (6)
n σobs
222 where n is the samples number along time and σobs is the standard deviation of observed data along
223 time.
225 In a last step, GW recharge R(t) is analytically determined from equation 5, based on observed
226 GW heads (h(xobs, t)) and pumping rates (Q(t)) when required. Uncertainties in estimated recharge
227 are evaluated by propagating parameter uncertainties. As a first initial evaluation, we considered the
228 best 5 % models.
230 In the end, rainfall and inverted recharge are analyzed on both sites and inter-compared in time
231 and frequency domain. In order to focus on the transformation of rainfall into recharge, we propose to
232 reference recharge to effective rainfall (rainfall minus potential evapotranspiration) and compute both
233 the coherence and the transfer function [Jimenez-Martinez et al., 2013]. The coherence examines the
234 relationship between two signals X̄(ω) and Ȳ (ω) by computing the frequency-dependent correlation,
PXY (ω)2
235 defined as CXY = PX X (ω)PX X (ω) , where PXY is the cross-spectral density between X and Y, and PX X
236 and PYY are the autospectral density of x and y respectively. The transfer function H̄(ω) describes
237 the amplitude ratio between output and input in the frequency domain as Ȳ = H̄ X̄. Here, we used
238 the Matlab functions ’mscohere’ and ’tfestimate’. Coherence and transfert function are computed by
239 splitting time series into 20 segments overlapping by 50 %, each of them convolved by a Hamming
240 window.
242 The ability of this simple model to estimate RF is tested on the Ploemeur-Guidel hydrogeological
243 observatory (http://hplus.ore.fr/en/ploemeur), both part of H + network (http://hplus.ore.fr/en/) and
244 the French Critical Zone network OZCAR (http://ozcar-ri.org/) [Gaillardet et al., 2018]. Both
245 neighboring sites are set in a similar climatic, geologic, land use and land cover context. Landscape
–8–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
246 consists of fields and meadows with slight topography (average gradients around 3 %). GW is
247 hosted in highly fractured crystalline rocks. [Ruelleu et al., 2010; Touchard, 1999; Jimenez-Martinez
248 et al., 2013]. Both sites differ by their functioning: Ploemeur site has been pumped at constant rate
249 (∼ 1Mm3.yr −1 ) since 1991, while Guidel site is in natural context with large GW upflowing zones
250 creating groundwater-dependent ecosystems.
251 Figure 2. Schematic of the Ploemeur and Guidel sites: a) General location; b) Geological map and location
252 of used monitoring and pumping wells (modified from [Ruelleu et al., 2010]). Mean GW head measured over
253 the piezometric network is represented with grey lines; c) South-north cross section of the Ploemeur site.
255 Crystalline rocks are generally considered as impermeable and low porosity structures, with
256 limited productivity. However, several examples show high-yielding aquifers, which are mostly
257 explained by the heritage of tectonic structures and their connection to weathered porous structures
258 at the surface [Roques et al., 2016; Bense et al., 2013; Gleeson and Novakowski, 2009]. Ploemeur
259 site is a striking example: the site has been producing more than 1 Mm3 .yr −1 of water since 1991,
260 with stable water levels since 1996. The high yield of Ploemeur aquifer is explained by the specific
261 geological context. It is located at the contact zone between granite and micaschist, which is highly
262 fractured and gently dipping towards North. Such structures are preferential pathways for water,
263 which also allow drainage of a wide region beyond the topographic catchment [Ruelleu et al., 2010;
264 Touchard, 1999; Leray et al., 2012; Jimenez-Martinez et al., 2013]. The thickness of the weathered
265 zone varies from 0 to 30 m.
–9–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
266 The Ploemeur observatory is monitored by more than 25 wells since 1991. As these wells are
267 mostly localized in the close vicinity of the pumping site (at a distance < 700 m), i.e. close to the
268 aquifer outflow, they provide a partial view on the aquifer behavior [Roques et al., 2018]. Observed
269 heads highlight a main control by pumping (Fig. 3). GW is disconnected from the surface (depth
270 ∼ 7 to 15 m), with limited interactions with the surface (rivers are nearly nonexistent). Water is
271 extracted by three wells aligned along the N20E direction and distant of around 50 m. Pumping
272 rates were measured weekly from 1991 to 1997, daily since 1997, hourly since 2015. Mean GW
273 abstraction stabilized at 3000 m3 .day −1 , with a seasonal variability around 15 % due to local demand
274 increase during summer. The three pumps are located close to the contact between micaschist and
275 granite (Fig. 2), north of the southern granitic outcrop, which can be considered as impermeable.
276 Pumping creates a radial flow structure over a few hundreds of meters, stretched along the N20E
277 direction. Flow structure becomes unidirectional (1D) over the remaining system (∼ 2 − 3 km long)
278 [Leray et al., 2012]. Therefore, the 1D hypothesis required by the analytical model can be valid at
279 the scale of the hydrogeological system (Fig. 2). The x coordinate of each piezometer is defined as
280 the actual distance to the pump barycenter. At x = 0, we impose transient pumping rates. At x = L,
281 we assume a constant head (see the model on Fig. 1). Indeed, observations at a distance x = 1200
282 m (not shown) highlight reduced seasonal variations and a mean altitude of 37.5 m.
284 Guidel is located 4 km west of the Ploemeur site (Fig. 2) and is located the same geological
285 context as Ploemeur. GW levels are much closer to the surface in convergence zones (downstream
286 PZ19), so that hydraulic gradients are more controlled by topography. GW feeds rivers and a
287 classified wetland southward (Fig. 2). The whole GW system can be seen as a set of 1D structures
288 feeding the river (Fig. 1). This river represents conceptually a constant head, as suggested by limited
289 head changes on borehole PZ19 close to the river (Fig. 4), justifying the assumption of imposed
290 constant head at x = 0. Similar to Ploemeur, we considered unknown constant head at x = L.
292 A national weather station is located in between the 2 sites, providing daily precipitations and
293 Penman-Monteith potential evapotranspiration (PET) estimates. Along the studied period, annual
294 precipitation ranges from 600 to 1100 mm.yr −1 (mean of 880 mm.yr −1 ) with limited variability
295 (σ=120 mm.yr −1 ). Rainfalls have a low seasonal variability, 45 % of rainfalls occur between
296 October and January. Potential evapotranspiration (PET) ranges from 670 to 890 mm.yr −1 with a
297 mean of 760 mm.yr −1 with lower variability (σ=50 mm.yr −1 ). PET has a strong seasonal variability,
298 with mean values going from 0.6 mm.d −1 in December and January to 3.6 mm.d −1 in June and July.
300 Mean surface infiltration rates modeled by "Thornthwaite", GR4J and SURFEX models are
301 respectively 242, 320 and 246 mm.yr −1 . Infiltration is generally focused from December to March.
–10–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
302 For the Thornthwaite model, annual infiltration rates range from 0 mm.yr −1 in 2002 to 600 mm.yr −1
303 in 2001, representing 0 to 50 % of annual rainfall, with clear impacts on GW levels (Fig. 4). The
304 temporal structure of infiltration rates, as simulated by the different models remain highly variable
305 (Fig. 3). Thornthwaite model generates highly episodic infiltration events with high intensity. GR4J
306 and SURFEX infiltrations are more diffuse with earlier events late automn associated to high rainfall
307 rates. Note that GR4J model allow episodic infiltration events in the summer period linked to high
308 rainfall intensity (summer storms).
309 Figure 3. Precipitations, potential evapotranspiration and simulated infiltration rates from Thornthwaite,
310 GR4J and SURFEX models for hydrological water year 2003.
312 While first GW level data in Ploemeur dates back to 1991, we focus our analysis on the 1996-
313 2017 period to avoid potential transient response to the pumping setup. On the Guidel site, data is
314 available from 2009 to 2017. Water levels are recorded at minute to daily time steps and decimated
315 to daily time scales for our analysis. Temporal fluctuations of GW head in Ploemeur boreholes have
316 similar structures, in response to two transient forcings, pumping and recharge (Fig. 4). Seasonal
317 variations decrease with the distance to the pump (2.5 m at F7 and 5 m at F11, respectively at a
318 distance of ∼ 700 m and ∼ 20 m from pumping), emphasizing a general control of pumping on the
319 global behavior. Conversely, on the Guidel site, transient variations in response to rainfall and water
320 cycle vary significantly among boreholes. Level variations are fairly stable for low elevation wells
321 located close to the GW outflow (PZ19). Wells located at the top of basin (PSR1, PSR2, PZ15, PZ16
322 and PZ17) exhibit larger seasonal variability - but still smaller than in pumped context.
–11–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
323 Figure 4. Observed GW water level variations in boreholes at Ploemeur (upper graph) and Guidel (lower
324 graph) observatories. Note the difference in scales between the two sites.
325 4 Results
326 In this section, we describe results obtained by applying the 1D GW model on the two sites. A
327 first step consists in separating the steady-state and transient components.
329 We explore the stationary part of equation 3, defining the relationships between aquifer trans-
330 missivity, long-term mean recharge and flow. In theory, Rmean /T can be directly estimated from
331 the quadratic shape of the water table (Eq. 3) hypothesizing an homogeneous media. Mean water
332 levels projected along the x axis are compared to one of the best model (Fig. 5). The information
333 content of long-term GW is limited by (1) incomplete sampling within the observation network, con-
334 sidering the punctual nature of piezometric data with respect to local heterogeneities in recharge and
335 hydrodynamic properties, blurring the evolution of hydraulic head in space (Fig. 5); (2) incomplete
336 sampling of the GW system as the observation network represents only a limited part of the aquifer;
337 and (3) limitations of the conceptual model. Uncertainties in actual boundary conditions, such as the
338 representation of local GW behavior close to the puming wells also limit interpretation. The inability
339 to constrain Rmean /T, therefore hydraulic parameters and mean recharge based on long-term mean
340 well observations is in line with several studies[e.g. Sánchez-Vila et al., 1996].
–12–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
50
F7
F9
40
F30
F34
F19 Pumping
30 F20 MF4 MF3
F35 F18
MF1 F11 F32
F17 MF2
F36
Altitude [masl]
20
10
-10 Topography
Measured water levels
Modeled water levels
-20
400 200 0 -200 -400 -600
Distance to pumping [m]
341 Figure 5. Mean GW head (blue curve) on the Ploemeur site shown on a SE-NW cross section. The red
342 dashed curve represents the best 1D analytical model which has the lowest least square difference between data
345 In the following, we will focus on GW head variations defined by the transient part of equation
346 3. This part synthesizes the results of the parameter space exploration for Ploemeur and Guidel sites.
347 Observed and modeled water levels are compared at different boreholes
349 Overall, when comparing observed and modeled head variations for the Ploemeur site, the 1D
350 model seems satisfactory (Fig. 6). For F9 well, The centered RMS error is lower than 0.8 m, i.e.
351 nearly three times better than the standard deviation of the head time series. While some wet or
352 dry years are less well represented, seasonal to interannual variability is well modeled for all wells
353 along the study period. In general, differences between modeled and observed head variations are
354 small considering the differences among recharge models and the simplicity of the flow model. RMS
355 errors are increasing when getting closer to the pumping zone, ∼ 0.5 m (F7), between [0.7; 1] m (F9,
356 F30, MF2) and up to 1.2 m for F11 well which is 20 m away from the main pumping well. The high
357 frequency head fluctuations, linked to pumping rates variations are not well described, as expected
358 from the 1D hypothesis of the model with respect to the observed 2D flow structure.
362 Although a best parameter set has been inferred from least square inversion, all parameters
363 are not equally well determined (Fig. 7). As defined in equation 4, characteristic time is well
364 constrained, ranging between 1 to 3 yr, independently of prescribed recharge (see shaded area on
–13–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
10
Measured water level in borehole F9
Modeled water level in borehole F9
-5
10
Measured water level in borehole F19
Modeled water level in borehole F19
Hydraulic Head [m]
-5
1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Date
359 Figure 6. Comparison between the best modeled and observed water levels fluctuations at borehole F9 (upper
360 graph) and F19 (lower graph), respectively at 519 m and 268 m of the Ploemeur’s pumping wells.
365 Fig. 7). Note that the same approach has been developed in radial symmetry, driving to similar
366 characteristic times. The impact of unknown infiltration volumes (Fig. 3) has a limited impact on
367 parameter estimation (Fig. 7). This is a very important result: although local heterogeneities can
368 play an important role (as in the stead recharge case), the correlation among well observations due
369 to lateral GW flow brings insights into the averaged characteristic time for the aquifer.
370 Interestingly, storativity is also well constrained (S ∈ [3.5.10−2 ; 8.10−2 ], see Fig. 7), but more
371 variable in space among the different wells as compared to characteristic time. The analytical solution
372 (Eq. 4) shows that S participates in the overall amplitude of the well reaction to recharge, linked to
373 recharge volume for each frequency. One more time, storativity is slightly affected by uncertainties in
374 prescribed recharge volumes, where it directly modulates the amplitude of head changes in equation
375 4. These storativities are similar to the one obtained in previous studies: S was ranging from 5.10−3
376 to 5.10−2 for a recharge of 260 mm/yr [Jimenez-Martinez et al., 2013] or 2.10−2 to 6.10−2 for
377 a recharge of 200 mm/yr [Leray et al., 2012]. Such values are much larger than expected for a
378 crystalline context, and larger than short-term estimates typically estimated from pumping tests: S
379 was ranging from 10−5 to 10−2 [Le Borgne et al., 2006]. This study, mostly based on seasonal time
380 scales, suggests that part of the confined fractured aquifer is well connected to a less conductive
381 but more porous aquifer functioning as a storage. Further discussion on this point can be found in
382 Jimenez-Martinez et al. [2013].
383 Conversely, transmissivity and aquifer length are poorly estimated, mainly because they do not
384 appear explicitly in equation 4. In previous studies, authors need to add geological information
385 to define L to [2.7 − 3] km [Jimenez-Martinez et al., 2013; Leray et al., 2012]. In this work,
386 transmissivity is estimated in the range T ∈ [8.10−4 ; 6.10−2 ] m2 .s−1 (Fig. 7), such large ranges are
387 also aknowledged in previous studies, e.g. T ∈ [4.10−3 ; 4.10−2 ] m2 .s−1 in Jimenez-Martinez et al.
–14–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
388 [2013] and Le Borgne et al. [2006]. Leray et al. [2012] calibrated a 3D model and defined a constant
389 transmissivity T = 2 − 3.10−3 m2 .s−1 . When exploring the parameter space, we observed that L
390 and T are correlated. Both T and L appear explicitly as the ratio tc /LS in equation 4, linked to the
391 pumping boundary condition. The ratio tc /LS simplifies into L/T, which controls the capacity of
392 the aquifer to sustain water flow demand towards the pump.
393 Figure 7. Evolution of the minimal normalized RMS error for Ploemeur wells as a function of model
394 parameters: characteristic time (top-left), storage coefficient (top-right), transmissivity (bottom-left) and length
395 (bottom-right); The impact of infiltration model is drawn by the shaded area on the borehole F7
397 Similar to Ploemeur, the 1D simple model is able to describe adequately head variations (Fig. 8),
398 based on the same Thornthwaite infiltration model as in Ploemeur, although the temporal evolution
399 of head is very different. For PZ15, RMS error is 0.4 m, i.e. ∼ 40 % of the head standard deviation.
400 More generally, the simple model explains 50 to 60 % of the head temporal variability, with RMS
401 errors ∼ 0.4 m for wells located upstream, while limited to 0.1−0.2 m for wells located near the lower
402 boundary condition (PSR15, PZ19, PZ21). Overall, the performance of the model is less pronounced
403 on the Guidel site as compared to Ploemeur, therefore, model parameters are also less constrained.
404 Characteristic times are close to those obtained in Ploemeur, but ranging from tc ∈ [1 − 10] yr
405 (Fig. 8). Estimated storage coefficient is ranging from S ∈ [3.10−2 − 1.5.10−1 ], transmissivity
406 T ∈ [10−4 − 5.10−3 ] m2 .s−2 . Once more, system length L is poorly defined and closely linked to T
407 as in the Ploemeur case.
412 In the previous section, we showed that a simple model can fit well head time series, in spite
413 of the hydrogeological complexity. An important result is that these parameters are independent of
–15–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
5 1
Measured water level in borehole PZ15
4 Modeled water level in borehole PZ15
0.8
Hydraulic Head [m]
RMSE/stdobs
0.6 Boreholes
2
PSR1
PSR2
1
0.4 PSR15
PZ15
0 PZ16
0.2 PZ17
-1 PZ19
PZ21
-2 0
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 10 -2 10 -1 10 0 10 1 10 2
Date Characteristic Time [yr]
408 Figure 8. Comparison between modeled and observed water levels fluctuations at Guidel’s PZ15 borehole
409 (left) Evolution of the minimal normalized RMS error as a function of the characteristic time for Guidel
414 the prescribed recharge model, providing confidence on estimated parameters. Furthermore, their
415 values are coherent with previous studies. This static parameters defines GW lateral flow, so the
416 model can be further exploited for temporal variations in vertical exchanges with the surface. In
417 this section, we recompute recharge fluctuations (RF) based on observed head variations (Eq. 5)).
418 For each well, recharge is estimated based on the best parameter set. We also consider the 5 % best
419 models to estimate uncertainties on inferred RF.
420 5.1 Recharge fluctuation estimates for Ploemeur and Guidel sites
421 GW flow appears as a low-pass filter in equation 4, smoothing out high frequency pumping
422 and recharge variability (these variables are divided by the frequency in equation 5). In the inverse
423 method, any high frequency GW head variability is therefore amplified to recompute recharge. In
424 order to reduce noise amplification linked to observation uncertainties, recharge time series are
425 intercompared at monthly time scales. RF among the different wells are quite similar to the different
426 modeled infiltration (Fig. 9). Main recharge events are well described in phase and amplitude. High
427 frequency noise is increasing when getting closer to the pumping station or when wells are better
428 connected to the pumps, as shown by the difference in RF between F9 and F19, respectively 519
429 m and 268 m far from the pumping station. This can be expected as well time series contain high
430 frequency variations linked to short-term pumping rate variations, which are difficult to model (Fig.
431 6).
432 On the Ploemeur site (respectively Guidel), based on F7 inversed RF (respectively PSR1),
433 the Thornthwaite model overestimates RF monthly amplitudes by 40 % (respectively 20 %), while
434 both GR4J and SURFEX models fall within 5 − 6 %. In terms of the succession of recharge events,
–16–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
435 correlation is 0.55, 0.58 and 0.65 for Thornthwaite, GR4J and SURFEX respectively on the Ploemeur
436 site. In general, Thornthwaite infiltration is ∼ 15 days in advance as compared to inversed RF on
437 the Ploemeur site, and slightly in advance with respect to the Guidel site. SURFEX outperforms
438 the other models, better predicts all effective recharge events during dry years (2002, 2005) and wet
439 summers (2004, 2012), but fails in describing intense recharge events.
200
Monthly recharge fluctuations
Thornthwaite model
150 GR4J model
Surfex model
100 Modeled recharge at F9
50
-50
200
Monthly recharge fluctuations
Thornthwaite model
150 GR4J model
Surfex model
100 Modeled recharge at F19
50
-50
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Date
440 Figure 9. Comparison between the three infiltration models (Thornthwaite, GR4J, SURFEX) and inferred
441 recharge fluctuations (RF) (in mm.month−1 ) for F9 (upper graph) and F19 (lower graph) boreholes on the
443 Figure 10 shows estimated recharge for both Ploemeur and Guidel sites, including uncertainties
444 linked to parameters uncertainty. Despite different well level variations, both estimated RF are highly
445 coherent. At short time scales, uncertainties on storage parameter S directly impact uncertainties
446 on recharge amplitude. Based on these results, we can estimate that recharge events greater than 25
447 mm.month−1 can be detected with this method, as highlighted by single events that occurred in 2002
448 and 2005.
449 Figure 10. Monthly RF for Ploemeur and Guidel sites, propagating model parameter uncertainties.
–17–
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450 Figure 11. Coherence (left) and Transfer function (right) between effective rainfall (i.e. rainfall minus
451 potential evapotranspiration and estimated recharge on both Guidel and Ploemeur sites or modeled infiltration
452 (Thornthwaite, GR4J, SURFEX). The transfer function of a 25mm.month−1 Gaussian noise is given as a
453 reference.
455 In figure 11, we show both coherence and transfer function between estimated RF and effective
456 rainfall - computed as rainfall minus potential evapotranspiration. These functions describe the
457 behavior of the unsaturated zone and inform on the efficiency of rainfall events to generate recharge.
458 RF and infiltration models are highly coherent with effective rainfall (i.e. significantly larger than the
459 expected coherence of Gaussian noise) over a wide range of frequencies, especially for periods larger
460 than 100 days. At such time scales, the efficiency reaches 75to80 %, showing high sensitivity to
461 rainfall occurring during long time periods (typically seasonal time scale with winter rainy season).
462 However, models generally fail to describe rainfall efficiency at smaller time scales. This means
463 that modeled infiltration generally happens too rapidly after episodic events, with larger amplitudes as
464 compared to inferred RF. On the Ploemeur site, rainfall efficiency seems to be negligible (i.e. below
465 the noise level) at periods below ∼ 30 days, and climbs to maximum values for period > 100 days.
466 Interestingly, the coherence and rainfall efficiency in Guidel are rising much earlier than in Ploemeur,
467 beginning ∼ 10 days periods. which underlines a tighter link between effective rainfall and recharge
468 (i.e. a higher sensitivity to rainfall events in Guidel). This tighter link might be explained by the mean
469 thickness of the unsaturated zone, which tends to play an "inertial" role by storing water and filtering
470 out higher frequency variability. This is confirmed when looking at frequency-dependent time lags
471 between effective rainfall and recharge (not shown), which is systematically larger on the Ploemeur
472 site than on the Guidel site. Note that this tighter link in recharge should be translated into a tighter
473 link in discharge, meaning that groundwater certainly contributes significantly to evapotranspiration
474 and river discharge.
475 Although the aquifer response time can be larger than years, intense rainfall events can generate
476 recharge pulses through the unsaturated zone which will be diffused through the aquifer. Indeed,
–18–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
477 a single event is mathematically equivalent to a dirac, which Fourier transform has a constant
478 amplitude on all frequencies. The efficiency of such event is therefore distributed on the whole
479 spectrum, including the largest amplitudes on long periods. We can also expect that intense rainfall
480 events will be more pronounced on the Guidel site as the efficiency increases earlier at small scale
481 (i.e. thinner unsaturated zone).
482 6 Discussions
484 In this work, we question the information content of groundwater level variations observed on a
485 piezometric network. The approach we developed here consists in applying a parsimonious GW flow
486 model to link recharge to lateral GW flow and discharge. Model parsimony has several advantages
487 [Hill, 2006]. First, they offer an easy understanding of simulated flow processes [Rousseau-Gueutin
488 et al., 2013], focusing the interpretation on the physical meaning of model misfit and the balance
489 between model complexity and available data. Secondly, the limited execution time allocate time
490 for a deep exploration of the actual knowledge that could be gained from available (often sparse)
491 observations. The first outcome of this work is that a simple physical model can explain GW level
492 variations in heterogeneous fractured aquifers at the scale of the network. Transient variations in
493 head time series contain two essential information: (1) equivalent hydraulic parameters, namely the
494 characteristic time tc = L 2 S/T, controlling how the distribution of recharge events are transferred
495 laterally and the storage coefficient S, controlling the amplitude of head variations for a defined
496 recharged volume; and (2) information on both "recharge" and "discharge" conditions, as they
497 control the general shape of GW level variations.
498 The main hypothesis of the parsimonious model are threefold: (1) the 1D lateral flow structure
499 (2) homogeneous hydraulic parameters and (3) distributed recharge. Concerning the 1D assumption,
500 in the Ploemeur case, pumping controls the aquifer behavior, so that 1D assumption is valid over most
501 part of the system except close to the pumping stations. On the Guidel site, GW intercepts locally the
502 surface, the flow structure is mainly controlled by topography. In this case, the GW can be considered
503 as a set of 1D homogeneous models, where the distance x to the downstream boundary condition
504 should be well defined. Previous works have highlighted that the behavior of complex aquifers
505 could be described by equivalent homogeneous models beginning at a specific spatial/temporal scale
506 [Clauser, 1992; Rovey and Cherkauer, 1995; Jimenez-Martinez et al., 2013], which is linked to the
507 general connectivity of the fractured aquifer. Inferred equivalent hydraulic and geometric parameters
508 are similar among boreholes and close to those obtained by previous modeling studies investigating
509 the global behavior of the Ploemeur site, including a spatially-distributed approach [Leray et al.,
510 2012]. This provides confidence that the general aquifer behavior is well captured and that inferred
511 parameters have some physical meaning. The hypothesis of uniform recharge might be seen as
512 cumbersome, considering that local topographic/geological structures can favour exchanges between
513 surface and depth [Favreau et al., 2009]. It should be noted that the recharge period typically lasts 4
514 to 5 months, while groundwater flow behaves as an integrative (smoothing) system with typical time
515 integration scale ∼ 1 year, smoothing out high frequency pumping and recharge variability. In these
–19–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
516 conditions, it is expected that the deviation of recharge distribution does not alter the estimation of
517 total recharge.
518 We show that heterogeneity largely impacts the ability to interpret mean GW level to estimate
519 mean recharge. Conversely, recharge fluctuations over time generate lateral GW flow that links
520 different GW head observations. The second outcome of this work is that local head variations
521 contains the global aquifer response for observation periods around and larger than the characteristic
522 time. For this reason, a single well contains information on diffuse (total) recharge, as underlined in
523 the WTF approach [Cuthbert, 2010; Healy, 2010]. Though, we show that the position of the well
524 within the groundwater flow system is as important as storativity to define annual diffuse recharge
525 volumes (Eq. 5). Indeed, as recharge is transferred laterally, downstream wells will integrate the
526 impact of both local and upstream recharge. Such behavior is expected to be even more pronounced
527 if the well is located in a convergence zone (2D behavior).
400
Relative recharge rate [mm]
300
200
100
-100
529 Figure 12. Annual recharge volumes estimated by recharge models and piezometric models from Ploemeur
531 The proposed approach allow computation of both recharge fluctuations and associated uncer-
532 tainties. In figure 12, we re-investigate the relationship between wet season precipitations and GW
533 RF. As underlined by previous authors [Taylor et al., 2012, e.g.], a minimum rainfall amount is
534 required to generate recharge in some conditions. Above this threshold, annual recharge cannot be
535 fully expressed as a fraction of rainfall as underlined by various authors [Barron et al., 2012; Kendy
536 et al., 2004; Gee and Hillel, 1988].
537 We show that the distribution of rainfall events throughout the year impacts recharge fluctuations
538 because rainfall efficiency is basically frequency dependent (Fig. 11). The amount of effective rainfall
–20–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
539 that effectively recharges GW varies from < 20 % at small temporal scales to > 70 % at long-term
540 time scales. Efficiency does not reach 100 % because rainfall also generate surface runoff (estimate
541 at 150 mm.yr −1 by Leray et al. [2012] on the Ploemeur site). Therefore, recharge can occur during
542 both (1) long/sustained winter rainfall and (2) episodic/intense rainfall events. Mathematically, a
543 single rainfall event has an impact on a wide range of frequencies, meaning that intense rainfall
544 events are necessarily translated into recharge. This link might not be immediate because of the
545 integrative nature of the unsaturated zone, but contributes to increase storage and therefore recharge.
547 The comparison between Guidel and Ploemeur sites offer the opportunity to gain insights into
548 the role of the unsaturated zone. Indeed, as Ploemeur is pumped, the unsaturated zone is much
549 thicker than on the Guidel site. The thickness of the unsaturated zone buffers infiltration due to
550 delays to reach the saturated zone and plays the role of an inertia filtering out quick variations. We
551 obtain the same results as Cao et al. [2016], the thickening of the unsaturated zone due to pumping
552 impacts negatively recharge at small time scales (Fig. 11). We show that this impact is not directly on
553 the amount of recharge, but rather on the efficiency of short-term effective rainfall variations. From
554 these observations, we can conclude that setting up a pumping can decrease recharge by increasing
555 the thickness of the unsaturated zone, leaving limited probability for episodic recharge events.
557 A large uncertainty in hydrological modeling lies in the fact that GW recharge can be derive
558 from oversimplified conceptual soil models. In this work, we directly compared recharge derived
559 from GW level analysis with infiltration estimates typical formulated by large-scale models. The
560 transfer function describing the amplitude ratio between effective rainfall and recharge on the two sites
561 (Fig. 11) highlights that modeled infiltration and inferred recharge are fairly equivalent and roughly
562 represent a large fraction of effective rainfall on the Ploemeur and Guidel sites. Though, the models
563 lack realism at short temporal scales (typically ∼ 3 months), infiltration is often overestimated.
564 7 Conclusion
565 In this work, we propose to set a physically-based parsimonious 1D GW flow model to infer
566 recharge fluctuations over time, based on its impact on groundwater level variations and taking into
567 account lateral flow. It has been set on two close sites, which are comparable in terms of area,
568 climate, geology and vegetation. The single difference is linked to the pumped nature of Ploemeur
569 site, implying that groundwater is disconnected from the surface, and the unsaturated zone much
570 thicker.
571 The second important question is the boreholes representativity. In this context, temporal
572 fluctuations in boreholes integrate the recharge signal of the basin. So, one conclusion is that in an
573 heterogeneous aquifer with transmissivity varying on two magnitude orders, water level fluctuations
–21–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
574 in one borehole inform on the seasonal recharge of the basin. because the aquifer characteristic time
575 is longer than the length of the recharge period.
576 Results could be different in other contexts, particularly for boreholes located in no recharge
577 zones and very disconnected GW compartments. This work shows how a long term local measure-
578 ment can record a global processes in spite of the heterogeneity. In other words, based on a previous
579 idea of recharge rates, from hydraulic heads fluctuations in a complex system, we manage to extract
580 interesting information about water exchanges with the surface.
581 Acknowledgments
582 This work is part of the ANR project EQUIPEX CRITEX (grant ANR-11-EQPX-0011) and set on
583 the Ploemeur Critical Zone Observatory H + (http://hplus.ore.fr/en/ploemeur). We are greatful to the
584 OZCAR research infrastructure.
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–22–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
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Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
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Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
–27–
Confidential manuscript submitted to Water Resource Research
818 We performed a numerical test to estimate the ability of the analytic approach to estimate
819 recharge. This experience is based on a comparison with a ModFlow model. We tested several
820 scenarios, namely (1) At which time scale is recharge well estimated and (2) What is the impact of
821 parameter uncertainties on recharge estimates ?
823 Following Cuthbert [2010], we tested our method with a virtual case using a ModFlow numerical
824 model. This model is composed of one row and 200 columns with a mesh size of 10 m to obtain
825 a 1D geometry. We simulate a confined layer of transmissivity T = 1.10−3 m2 .s−1 and of storage
826 coefficient S = 0.05. Heads are imposed at x = 0 and x = 2000 m. In such case, the 1D numerical
827 model is equivalent to the 1D analytical model used for the Guidel site (natural case).
828 Next, recharge from the "Thornthwaite model" is applied at daily time-step from 1991 to 2010.
829 At the end of the simulation, hydraulic head at x = 1500 m is recorded and will be used to recover
830 recharge and compare it to the imposed one.
832 Although the analytical model can be run at the time step of the well data, recharge estimates
833 are affected by numerical oscillations linked to the discrete frequency-domain computations over
834 a finite length time series. Estimated recharge can be integrated over time to avoid these spurious
835 oscillations. Overall, an integration time larger than a few original time step is sufficient to ensure
836 an estimation of the recharged volume at a 99 % level (Fig. A.1). An accurate recovery of temporal
837 variations, though, require integration over 10 time steps to reach determination and correlation
838 coefficients r, r 2 > 0.95. In the main study, recharge is estimated at monthly time scales.
839 Figure A.1. Impact of integration time on recharge volume and determination coefficient r 2
–28–
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841 This test gives also an idea of the parameters uncertainties. We can see how estimated recharge
842 fluctuations are influenced in term of timing and mean amplitude. Parameters uncertainties have
843 a limited impact on the timing of recharge as shown by figure A.2. However, we observe a major
844 impact on recharge amplitude due to uncertainty on storage coefficient.
845 Figure A.2. Impact of uncertainties on the estimation of characteristic time tc and storage coefficient S on
–29–
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
4.4.1 Démarche
Pour des raisons de temps de calcul, seul le modèle de recharge dit de Thornthwaite a été uti-
lisé. Pour la même raison, l’espace des paramètres a été échantillonné avec une densité plus faible
que pour le modèle analytique mais toujours conséquente. Pour Ploemeur, 30 valeurs ont été ré-
gulièrement sélectionnées entre 1.10−4 et 1.10−1 m2 /s pour la transmissivité et entre 1.10−4 et 0,1
pour le coefficient d’emmagasinement (soit 900 modèles). Pour Guidel, 35 valeurs ont été régu-
lièrement sélectionnées entre 1.10−4 et 2.10−1 m2 /s pour la transmissivité et entre 1.10−4 et 0,2
pour le coefficient d’emmagasinement (soit 1225 modèles). Ces gammes de valeurs sont suppo-
sées encadrer les valeurs attendues au vu des précédents travaux sur l’observatoire (voir Jimenez-
Martinez et al. [2013]; Le Borgne et al. [2006]; Leray et al. [2012]).
Enfin, le même critère que dans la publication présentée est utilisé, c’est à dire la RMS ("Root
127
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Mean Square Error") divisée par l’écart-type des variations temporelles mesurées pour chaque
piézomètre. À noter que la RMS donne un poids supérieur aux écarts importants entre le modèle
et les observations. Une valeur de 0,7 pour le critère est un bon repère, sous cette valeur l’écart
moyen entre observations et modèle est environ inférieur à 70 % de la variabilité des observations.
Mais dans tous les cas, la qualité de la restitution par le modèle reste une valeur très subjective.
128
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
F IGURE 4.5 – Évolution du minimum du critère sur la piézométrie en fonction de la transmissivité du modèle
numérique de Ploemeur ; en complément de la partie transitoire pour chaque piézométre, y figure la moyenne
entre les piézomètres et la partie stationnaire (déjà étudiée précédemment, mais ce n’est pas le même critère
qui est utilisé).
Ainsi, le réalisme des flux souterrains n’est pas déterminant pour la représentation des variations
temporelles mais en revanche les conditions limites et les paramètres le sont.
On peut conclure que les variations temporelles sont mieux modélisées que les variations spa-
tiales du niveau moyen. Sur la figure 4.5, le meilleur critère est proche de 0,5 pour la partie sta-
tionnaire mais il n’a pas la même signification que celui de la partie transitoire. Il signifie que
l’erreur moyenne au niveau de chaque piézomètre est de 50 % (soit 4,6 m) par rapport à la varia-
bilité spatiale des niveaux piézométriques en régime stationnaire. En d’autres termes, malgré une
transmissivité bien contrainte, les niveaux moyens sont mals représentés ce qui remet en cause
la pertinence du modèle dans la représentation de la piézométrie moyenne. La partie transitoire
semble beaucoup plus informative.
129
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
F IGURE 4.6 – Comparaison de la capacité à restituer les fluctuations piézométriques mesurées à PSR1 entre
le modèle analytique et le modèle numérique. Il s’agit des meilleurs modèles obtenus suite à l’exploration des
paramètres.
sible que la déconnexion progressive en été entre la piézométrie et la topographie à Guidel mène
à une réorganisation des flux. Dans ce cas la représentation des niveaux moyens serait détermi-
nante, le modèle homogène serait donc limité. Une meilleure prise en compte de la condition
limite que représente les rivières pourrait aussi être invoquée ou encore une reprise évapotranspi-
ratoire importante durant la saison sèche au droit de la zone humide (on le verra dans le chapitre
suivant consacré à la complémentarité entre le débit et la piézométrie).
Pour les piézomètres suffisamment bien modélisés, la transmissivité demeure très peu contrainte
quelle que soit l’approche. On note cependant une contrainte plus forte sur le coefficient d’em-
magasinement du système en utilisant le modèle numérique (figure 4.7). Alors que le modèle ana-
lytique donnait une gamme de valeurs assez large comprise entre 0,001 et 0,1, le modèle numé-
rique restreint les valeurs entre entre 0,02 et 0,09. Le fait que la position des piézomètres ne soit
pas imposée dans le modèle analytique pourrait expliquer cette différence (elle l’a été dans un
second temps, voire la publication présentée précédemment). La plus faible contrainte sur ce pa-
ramètre comparé au cas de Ploemeur pourrait aussi être liée à la moins bonne représentation des
fluctuations piézométriques. La contrainte est d’ailleurs plus forte pour les piézomètres les mieux
représentés (figure 4.7) : PSR1, PSR2 (peu de données disponibles), PZ15, PZ16 et PZ19 (dont le
coefficient de 0,15 est plus grand que les autres). Comme pour Ploemeur, les valeurs estimées res-
tent assez élevées et s’apparentent à une porosité. Tout comme pour Ploemeur, on peut supposer
que malgré le caractère fracturé et confiné de l’aquifère, il est possible qu’à partir de l’échelle sai-
sonnière l’aquifère mobilise la porosité de l’encaissant pour stocker et déstocker l’eau.
130
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
F IGURE 4.7 – Évolution du minimum du critère sur la piézométrie en fonction du coefficient d’emmagasine-
ment du modèle numérique de Guidel ; y figure également l’évolution de la moyenne des critères pour chaque
piézomètre.
Un point encore non soulevé est la transition entre l’état naturel et l’état pompé sur le site de
Ploemeur. On dispose pourtant de quelques mesures ponctuelles du niveau piézométrique avant
pompage en 1991. Ces mesures montrent clairement que la charge hydraulique au droit de la zone
de pompage était proche voire supérieure à l’altitude de la surface (figure 4.8). Ce qui ne signifie
pas pour autant qu’il y avait un flux de l’aquifère vers la surface. Il faudrait encore que la structure
souterraine permette à l’eau de s’échapper à travers une couche assez perméable ou par des che-
mins préférentiels par exemple. Dans ce cas, ces structures permettraient aujourd’hui à l’eau de
s’infiltrer de la surface vers l’aquifère. On peut néanmoins affirmer que la zone était plutôt humide
et qu’une part de l’eau souterraine s’échappait via les sources environnantes.
F IGURE 4.8 – Comparaison entre l’état initial et pompé à Ploemeur (projeté suivant un axe nord-ouest sud-
est). Les données à l’état initial sont issues de quelques mesures datant de 1991. Au niveau des puits F7 et F9,
il est probable que l’aquifère interagissent toujours localement avec la surface durant les hautes-eaux.
131
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Il est intéressant de voir que la plupart des simulations analytiques qui restituent correcte-
ment les variations temporelles de piézométrie ne parviennent pas à représenter correctement le
passage de l’état initial à l’état pompé lors des deux premières années de pompage (voir l’exemple
du piézomètre F9 situé à 500 m du pompage, figure 4.9). Pourtant lors des années suivantes, les
niveaux continuent de diminuer à l’échelle annuelle et cela n’empêche pas leur bonne représen-
tation. Notre interprétation est donc la suivante : la déconnexion progressive entre l’aquifère et la
surface est mal prise en compte, mais une fois celle-ci terminée, la dépression engendrée par le
pompage continue de se propager durant quelques années jusqu’en 1997-1998.
On peut évoquer plusieurs causes à cette mauvaise représentation durant les premières an-
nées de pompage. D’une part, la déconnexion avec la topographie et la propagation du pompage
doivent contribuer à réduire progressivement la variabilité des comportements temporels. Ainsi,
les premières années de pompage sont difficiles à modéliser car les flux dépendaient des inter-
actions avec la topographie. Or ces dernières dépendent de la modélisation des niveaux moyens
qui n’est pas évidente comme nous l’avons déjà évoqué. En effet, les variations piézométriques
enregistrées à Guidel indiquent une plus grande diversité des comportements temporels lorsque
les niveaux sont proches de la surface, même lorsqu’ils ne le sont que localement sur le bassin.
De manière générale, les modèles de Ploemeur présentés précédemment surestiment les ni-
veaux piézométriques au niveau de tous les forages durant cette courte période (figure 4.9), ce qui
amène à penser qu’il y a trop d’eau dans le système. Globalement, les écarts observés au démar-
rage du pompage peuvent donc être équivalents à une non prise en compte d’un flux de l’aquifère
vers la surface. Pour rappel, ces modèles considèrent une transmissivité constante dans l’espace,
on a vu que cette hypothèse impliquait des niveaux moyens assez peu réalistes. Mais ici, ce sont
bien les niveaux relatifs durant les premières années qui nous interpellent.
F IGURE 4.9 – Exemple de modélisation des fluctuations piézométriques au niveau du piézomètre F9. On re-
marque une erreur commune à l’ensemble des piézomètres durant les deux premières années de pompage. On
note aussi que, dans ce cas, la variance expliquée par le modèle semble plus faible que celle des mesures.
4.5.3 Mise à profit des écarts observés : l’importance des conditions limites
Trois approches en 1D ont été testées pour interpréter le décalage piézométrique observé en
terme de flux sortant du système aquifère pour rejoindre la surface (réseau hydrographique ou
évapotranspiration). Elles sont présentées sur la figure 4.10 (en haut : les flux imposés en sortie, en
bas : impact des modifications imposées sur la piézométrie) :
132
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
F IGURE 4.10 – Estimation du flux naturel au cours des premières années de pompage à partir de la modélisa-
tion de la piézométrie en F9. En haut : évolution du flux naturel sortant du système d’après le modèle initial,
le modèle sans pompage, et les trois approches utilisées (en orange, jaune et rouge). En bas : comparaison de
la piézométrie initialement modélisée et de la piézométrie améliorée grâce à trois approches différentes.
À l’état naturel, le flux sortant du système est donc évalué à environ 1500 m3 /jr soit 63 m3 /h
133
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
(en haut sur la figure 4.10). Le temps de déconnexion entre la surface et l’aquifère serait d’envi-
ron 530 jours. Si le temps d’atteinte d’un régime pseudo-permanent pour l’aquifère (la dépression
engendrée par le pompage) est plus long (il faut quelques années avant que les niveaux se stabi-
lisent), d’un point de vue hydrologique le système semble répondre avec un temps caractéristique
qui correspondrait à la durée que les puits de pompage mettent pour capter les flux naturelle-
ment voués à rejoindre la surface. La faiblesse du modèle est donc de ne pas réussir à prendre en
compte ce comportement transitoire lié à l’hétérogénéité et à la mauvaise représentation des ni-
veaux moyens. Néanmoins, ces résultats mettent à nouveau en évidence l’importance des condi-
tions limites transitoires dans les signaux piézométriques observés.
Quelques conclusions s’imposent après ces différentes études de la piézométrie. Dans ces tra-
vaux, nous avons séparé le contenu informatif de la piézométrie entre l’état stationnaire et l’état
transitoire. Sur le site de Ploemeur, soumis à un pompage, comme pour celui de Guidel (déve-
loppé dans le chapitre suivant), toujours à l’état "naturel", les niveaux moyens sont difficilement
représentables. Les modèles homogènes montrent des limites et ne peuvent que représenter une
version simplifiée de la piézométrie du site, supérieure de quelques mètres aux mesures par en-
droit, inférieure à d’autres.
À cette difficulté de représenter les niveaux moyens s’ajoute une incertitude sur la transmis-
sivité et le taux de recharge équivalents de l’aquifère. Les modèles hétérogènes apportent des de-
grés de liberté en plus mais ne réduisent pas forcément significativement les écarts entre le mo-
dèle et les observations. De plus, la cartographie des propriétés ne peut pas être réalisée dans des
contextes très hétérogènes comme les milieux fracturés. Le problème d’inversion devient aussi
vite plus complexe du fait de l’augmentation du nombre de paramètres. Il faut donc disposer
d’une information préalable sur les structures géologiques pertinentes à l’échelle de l’aquifère.
Pour Ploemeur, nous nous sommes contentés d’ajouter une zone moins perméable. Dans le fu-
tur, un modèle hétérogène à l’échelle des deux sites d’étude pourra être utilisé en se basant sur
l’extrapolation d’un grand nombre de données géophysiques et d’observations locales. Ce mo-
dèle géologique est présenté dans le chapitre suivant, il sera peut-être une des clefs permettant
d’expliquer certaines observations.
Concernant le régime transitoire, les résultats sont très intéressants car les fluctuations tempo-
relles de la piézométrie sont bien modélisées avec des modèles très simples malgré l’hétérogénéité
des aquifères étudiés. Pourtant, on conçoit que le comportement transitoire soit conditionné par
l’état stationnaire, c’est à dire les gradients piézométriques, les interactions avec la topographie et
les processus de recharge moyens. D’après les solutions analytiques testées seules, une condition
lointaine de type charge imposée donne de bons résultats sur les deux sites. Cela s’apparente dans
le cas des modèles numériques à une intersection entre la topographie et l’aquifère. Dans le cas
de Ploemeur, on note que des solutions en radial ou en 1D donnent des résultats équivalents en
terme de restitution de la piézométrie et de contraintes sur les paramètres.
Dans le cas de Ploemeur, les niveaux piézométriques sont loin de la surface (quelques mètres
au mieux) et le pompage oriente les flux dans sa direction à tout instant. Pour ces raisons, peut-
être que le système présente moins de non-linéarité et ainsi les fluctuations temporelles sont peu
134
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
influencées par la mauvaise représentation des niveaux stationnaires. Dans le cas de Guidel, il est
remarquable qu’une bonne partie des piézomètres soit assez bien représentée malgré l’hétérogé-
néité et la diversité des comportements piézométriques observés contrairement à Ploemeur où
les données piézométriques montrent toutes des comportements temporels similaires (on pour-
rait superposer les signaux).
Le coefficient d’emmagasinement et le temps caractéristique (L2 /D, déterminé seulement dans
le cas analytique) du système sont très contraints. Surtout, ils dépendent très peu du piézomètre
de calibration. Pour Ploemeur et Guidel, ces deux paramètres convergent respectivement vers 0,05
et 2 ans en moyenne. Mais la contrainte reste plus faible sur Guidel à cause d’une moins bonne re-
présentation de la piézométrie. Les écarts semblent causées par la mauvaise représentation du
stationnaire et donc des interactions avec la topographie qui dicte l’orientation des flux d’une sai-
son à l’autre. Il pourrait éventuellement s’agir de processus de recharge plus complexe qu’à Ploe-
meur. La comparaison entre les modèles numériques et analytiques et entre Ploemeur et Guidel
montre que la transmissivité et les paramètres géométriques du modèle restent indéterminés sans
doute à cause de l’hétérogénéité des aquifères. Ce qui explique que ces paramètres ne soient ja-
mais contraints ou, quand ils le sont, soient différent d’un piézomètre à l’autre. Ces résultats sont
donc différents de ceux de Le Borgne et al. [2006]; Meier et al. [1998] qui indiquent qu’à l’issue de
pompages de longue durée la piézométrie est intégratrice pour la transmissivité mais pas pour le
coefficient d’emmagasinement.
Les variations piézométriques annuelles sont donc principalement le résultat des propriétés
moyennes et des taux de recharge de l’aquifère. De ce point de vue, chaque piézomètre est por-
teur d’une information intégratrice sur le système malgré l’aspect ponctuel de la mesure et l’hé-
térogénéité. En conclusion, les variations temporelles de la piézométrie sont très peu dictées par
l’hétérogénéité des propriétés, ou plutôt il est possible de se passer de l’hétérogénéité pour les
expliquer. En revanche, les conditions limites transitoires du système sont essentielles.
Les conditions limites transitoires sont donc déterminantes, c’est à dire le pompage sur Ploe-
meur et les échanges verticaux sur les deux sites. La future publication présentée dans ce chapitre
montre que la représentation des fluctuations piézométriques et l’estimation des paramètres sont
très peu sensibles au modèle de recharge sur plusieurs années. À travers les données piézomé-
triques pluriannuelles de Ploemeur et Guidel et à travers les premières années de pompage sur
Ploemeur, nous montrons que l’impact de l’hétérogénéité se traduit sur les échanges entre les sys-
tèmes profonds et la surface.
Dans ce cas, les écarts entre les modèles et les mesures peuvent être interprétés comme des
flux verticaux non pris en compte dans le modèle. En particulier, selon le contexte, des flux de
recharge de l’aquifère ou de décharge correspondant à une alimentation de la surface (réseau hy-
drographique ou reprise évapotranspiratoire). Par exemple, les écarts entre le modèle et les obser-
vations lors des premières années de pompage sur Ploemeur peuvent être vu comme une modifi-
cation des interactions entre la nappe et la surface. L’hétérogénéité devrait être déterminante pour
modéliser ces flux. Cependant, nous montrons qu’elle n’est pas nécessaire tant que les flux qui en
résultent sont représentés. De ce point de vue, la piézométrie, bien que locale, enregistre donc le
comportement temporel à l’échelle du bassin et en particulier les conditions limites transitoires
auxquelles il est soumis.
Ces approches sont très informatives en terme de processus hydrologiques et de représen-
tation du milieu à partir de la piézométrie puisqu’elles permettent de quantifier des temps de
réponse et le rôle des aquifères dans la disponibilité en eau à la surface.
135
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
Outre les informations relatives aux interactions entre l’aquifère et la surface, ce travail s’inscrit
dans un objectif de mieux représenter les aquifères dans les modèles. Les résultats de ce chapitre
(et en partie ceux du suivant) montrent les apports et limites de la piézométrie mesurée dans les
forages. Quel enseignement faut-il en tirer ?
Les paramètres équivalents obtenus sont précieux et caractérisent les propriétés moyennes de
l’aquifère. Mais ils ne sont pas pour autant pertinents en terme de gestion de la ressource et no-
tamment pour la prédiction. En effet, des modèles aussi simples ne sont pas forcément robustes
dans le temps. On voit d’ailleurs que certaines années ne sont pas bien modélisées sur une chro-
nique longue de 25 années au total. En effet, la variabilité inter-annuelle visible dans les données
reste assez peu représentée par le modèle (hormis les grandes tendances liées au pompage). À
travers une méthode et des observations, ce travail apporte bien des informations sur le compor-
tement de l’aquifère et sur la compréhension des interactions avec la surface mais il ne permet
pas encore de modéliser ces interactions essentielles. Le temps caractéristique moyen reste néan-
moins un paramètre important qui permet d’évaluer la réponse de l’aquifère à long-terme. En
particulier l’évolution de son stock en fonction des prédictions sur les taux de recharge.
Pour conclure, les limites du contenu informatif de la piézométrie dépendent aussi en partie
de la densité des forages et des chroniques disponibles. Nous verrons dans le chapitre suivant que
ces limites sont très contraignantes pour la représentation du débit des rivières. Nous proposons
donc dans les chapitres suivants d’ajouter des observations de différentes natures afin de venir
compléter notre approche, l’objectif étant de développer un modèle parcimonieux capable de re-
présenter la piézométrie et le débit des rivières mais contraint aussi par d’autres observations.
Perspectives
136
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
visibles au niveau des forages en dehors de la zone humide. Est-ce parce que le signal est très loca-
lisé et trop haute fréquence pour se propager plus loin dans l’aquifère ? Il sera intéressant d’étudier
dans le futur comment cette information se propage et si elle est détectable par la piézométrie à
l’échelle mensuelle par exemple. L’enjeu sera d’une part d’estimer les flux, donc la contribution
souterraine à l’évapotranspiration du bassin, et d’autre part de chercher sa signature dans la pié-
zométrie.
137
CHAPITRE 4. QUELLES INFORMATIONS EXTRAIRE DE LA PIÉZOMÉTRIE ?
138
Chapitre 5
Sommaire
5.1 Comment combler le déficit d’information de la piézométrie ? . . . . . . . . . . . 140
5.1.1 Contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
5.1.2 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
5.2 Modélisation en régime permanent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
5.2.1 Mise en place du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
5.2.2 Impact des paramètres sur le débit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143
5.2.3 Inversion du modèle stationnaire sur le débit et la piézométrie . . . . . . . . 144
5.3 Modélisation en régime transitoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
5.3.1 Mise en place du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
5.3.2 Aptitude à modéliser les variations temporelles de débit sur le site de Guidel 147
5.3.3 Implémentation d’un modèle hétérogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
5.4 Quelles connaissances acquises et quels manques ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151
5.4.1 Conclusion sur le contenu informatif des mesures de débit . . . . . . . . . . 151
5.4.2 Quels manques ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
139
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
5.1.1 Contexte
Le contenu informatif des débits est à priori différent de celui de la piézométrie. En effet, il
est clair que le débit des rivières est bien plus intégrateur que la plupart des mesures ponctuelles
étant donné qu’ils résultent de la somme des contributions de chaque processus en amont sur le
bassin versant. Basiquement, si l’on soustrait le débit aux précipitations tombées sur le bassin on
obtient l’évapotranspiration. En régime transitoire, si l’on soustrait l’évapotranspiration en plus
du débit on obtient la masse d’eau accumulée dans le bassin. Certaines études vont plus loin et
infèrent des propriétés aux bassins versants à partir des courbes de récession entre les évènements
pluvieux, c’est à dire la partie décroissante des courbes de débit en fonction du temps [Brutsaert,
1994; Kirchner, 2009; Rupp and Selker, 2006; Troch et al., 2013].
Malgré les nombreuses études sur le débit des rivières et sa modélisation [Berghuijs et al.,
2016; Beven and Kirkby, 1979; Troch et al., 2003], le potentiel descriptif des chroniques de débit
reste sous-exploité et leur utilisation dans l’inversion des modèles physiques montre des limites.
Que les modèles soient purement hydrologiques où qu’ils prennent plus ou moins en compte la
physique des systèmes aquifères, la seule mesure du débit en sortie du bassin ne suffit généra-
lement pas à contraindre les paramètres et le choix du modèle conceptuel. L’évapotranspiration
et les échanges souterrains étant mal évalués, l’incertitude sur la quantité d’eau qui entre dans le
système contribue à la sous-détermination du problème. De plus, le problème n’est généralement
pas unique et des combinaisons différentes de paramètres mènent à des modèles équiprobables.
De ce fait, le choix de la fonction objectif servant de critère est important [Gupta et al., 2009].
Le fait que la paramétrisation des modèles puisse être différente (avec des résultats équivalents
sur les critères définis) a des répercussions très concrètes. Les modèles ne sont alors pas aptes à
bien représenter les mêmes processus ou ils peuvent répondre différemment aux évènements cli-
matiques extrêmes par exemple (induisant ainsi un problème de fiabilité). Ils peuvent aussi mon-
trer une variabilité spatiale différente au niveaux des flux et de la disponibilité en eau. Les résultats
des modèles calés sur les débits sont donc peu fiables localement et dans le temps car ils peuvent
montrer des sensibilités différentes à certains processus. Ainsi, on peut questionner notre aptitude
à bien interpréter les mesures de débit en terme de ruissellement, de débordement et de débit de
base (lui-même constitué de flux souterrains se produisant dans des structures différentes).
À ces difficultés s’ajoutent la méconnaissance des flux souterrains. L’inconnu sur les échanges
souterrains remet en cause ces bilans. D’après le calcul du ratio des pluies efficaces sur les dé-
bits mesurés en fonction de la taille des bassins en Bretagne (cf. chapitre d’introduction), il est
assez courant d’avoir une contribution souterraine (positive ou négative) d’une vingtaine de pour-
cents par rapport aux précipitations efficaces pour des bassins dont la superficie est inférieure à
1000 km2 . À l’échelle des États-Unis, les travaux de Schaller and Fan [2009] montre que cette dé-
viation du bilan hydrologique est parfois très élevée même sur des grands bassins. On note par
exemple des déviations de 50 % pour des bassins de 10000 km2 .
Les modèles hydrologiques de surface calculent généralement le débit des rivières comme la
somme d’un débit de base ("baseflow" en anglais) provenant des aquifères et d’un ruissellement
de surface. Le débit moyen permet donc d’estimer les pluies efficaces tombées sur le bassin to-
pographique des rivières (les précipitations moins l’évapotranspiration réelle). Mais les choses se
compliquent si les échanges souterrains avec les bassins voisins ne sont pas négligeables. Dans ce
140
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
cas, le débit moyen comme seul observable est insuffisant pour contraindre le bilan hydrologique
du bassin.
L’évolution temporelle du débit semble plus riche d’informations. En effet, la forme des courbes
de débit (augmentation brusque pendant certaines précipitations, augmentation globale pendant
la période humide, courbes de récession) permet sans doute de mieux contraindre les pluies effi-
caces dont leur partitionnement entre ruissellement, recharge du système souterrain et restitution
du système souterrain. La forme des hydrogrammes est alors reliée, du moins en partie, aux vo-
lumes infiltrés ainsi qu’à leur temporalité. En d’autres termes, les mesures de débits apportent
des informations sur les paramètres équivalents du sol et des systèmes aquifères. Mais compte
tenu de la méconnaissance des propriétés équivalentes, il n’est pas certain que ces mesures de
débit suffisent à contraindre les différents processus de redistribution de l’eau en même temps.
Cette incertitude est encore plus importante si l’on considère que les échanges souterrains inter-
bassins ont un rôle important. De plus, rien ne prouve que la distribution interne des processus
au sein du bassin sera pertinente à l’issue d’un modèle uniquement focalisé sur le débit.
Deux arguments peuvent expliquer ces indéterminations : l’incertitude des mesures météoro-
logiques et de débit et la représentation simplifiée d’un système toujours plus complexe en réalité.
Il est envisageable d’instrumenter encore plus les rivières mais cela ne résoudra pas tous les pro-
blèmes. Le besoin d’autres observables informant sur le comportement du système est important.
En particulier, d’observables permettant de contraindre d’avantage les processus internes au sein
des bassins versants. Les mesures de piézométrie ont une incertitude relative beaucoup plus faible
et elles sont nombreuses. Elles informent exclusivement sur le compartiment aquifère des bassins
et pourraient donc permettre de lever les indéterminations inhérentes aux mesures de débit en
rivière. Nous venons par exemple de voir que les fluctuations piézométriques informaient sur les
fluctuations temporelles de la recharge et sur la réponse des aquifères à l’échelle des bassins.
5.1.2 Démarche
Comme décrit précédemment, la piézométrie informe assez peu sur la transmissivité équiva-
lente des aquifères. En contexte hétérogène notamment, les modèles homogènes ou les modèles
hétérogènes déterministes restituent la piézométrie moyenne avec des écarts assez conséquents
au niveau de chaque piézomètre. De plus, l’estimation de cette transmissivité varie en fonction
des points de mesures (notamment en étudiant le comportement transitoire de la piézométrie). Il
en résulte une représentation spatiale des flux et des interactions avec la topographie incertaine.
La piézométrie moyenne seule ne permet donc pas d’évaluer la pertinence du modèle. D’un autre
côté, les variations temporelles de la piézométrie se sont révélées plus informatives puisqu’elles
contraignent les variations de la recharge, le coefficient d’emmagasinement et le temps caracté-
ristique de l’aquifère en n’importe quel point de mesure.
Le débit de rivière n’a en effet sans doute pas les mêmes informations à offrir. Il intègre en théo-
rie le comportement hydrologique de la totalité du bassin et il constitue un observable majeur des
systèmes hydrologiques. En régime stationnaire, le débit sortant est égal au taux de recharge du
bassin topographique plus les échanges souterrains positifs et négatifs. Il contraint donc en par-
tie les volumes. En régime transitoire, les variations de stock dans le système s’ajoutent au bilan.
S’ajoute également un comportement temporel plus ou moins caractéristique des propriétés et
des conditions limites transitoires du système. Les contenus informatifs étant donc potentielle-
ment différents et complémentaires, la piézométrie et le débit peuvent constituer les deux piliers
d’une représentation parcimonieuse des systèmes hydrologiques.
À partir du modèle numérique de Guidel représentant les écoulements souterrains et la pié-
zométrie associée, il est possible d’évaluer le débit sortant de l’aquifère et rejoignant la surface.
On peut donc comparer sur un même modèle la piézométrie et le débit de rivière. L’intérêt est
d’évaluer si la restitution de la piézométrie mesurée permet d’expliquer les débits mesurés ou in-
141
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
versement. Dans la mesure où un seul observable ne suffit pas à lever l’indétermination sur les
paramètres et les conditions limites du système hydrologique, il est primordial d’évaluer la com-
plémentarité des mesures de débit et de niveau piézométrique.
La piézométrie et les mesures de débit sont les principaux observables des systèmes hydro-
logiques. Il est donc nécessaire d’évaluer si ils suffisent à modéliser les systèmes hydrologiques
et notamment les interactions entre la surface et les systèmes profonds. Dans le cas du site de
Guidel, où une station de jaugeage a été installée, nous considérerons que toute l’eau de la rivière
passe nécessairement par un réservoir souterrain. Cette étude s’appuie principalement sur les tra-
vaux d’Angela Nieto Parra (stage de Master 1 à Géosciences Rennes, 2017) encadrée par Laurent
Longueverne et moi-même. Dans la seconde partie, l’implémentation du modèle structural dans
ModFlow a été réalisée par Leonardo Pereira Machado (stage de Master 2 à Géosciences Rennes,
2018) également encadré par Laurent Longueverne et moi-même.
Une première approche consiste à modéliser les niveaux piézométriques et le débit de rivière
qui en résulte à l’état stationnaire. Le taux de recharge moyen appliqué à l’aquifère est obtenu à
partir d’un bilan hydrique selon Thornthwaite. Pour la zone de Ploemeur, la moyenne sur 20 ans
de ce taux de recharge tourne autour de 270 mm/an en considérant que toute l’eau restante après
l’évapotranspiration rejoint l’aquifère.
La figure 5.1 illustre les premiers résultats obtenus avec une transmissivité de 1.10−3 m2 /s.
Elle décrit la structure du modèle (à gauche) avec la topographie, l’implantation des piézomètres
d’observation et de la station de jaugeage en rivière. En complément y figure les limites des zones
humides sur le bassin principal ainsi que la délimitation du bassin versant topographique de la
rivière. La figure à droite représente la carte piézométrique obtenue avec en couleur de fond les
zones de résurgence de l’aquifère donnant lieu au calcul du débit de surface. Les principaux points
bas dans la topographie, contrôlent la direction des flux souterrains qui sont globalement est-
ouest et du nord-est vers le sud-ouest dans le bassin qui nous intéresse. Les zones de résurgences
souterraines, c’est à dire les points bas où la nappe intersecte la surface topographique, sont si-
tuées au niveau des principales sources ou rivières observées dans le secteur. Au premier ordre,
un modèle homogène associé à la topographie suffit donc à expliquer les principales zones hu-
mides de la zone d’étude.
On note que la surface correspondant à une partie de l’étang de Lannénec est entièrement
saturée. Sous sa surface l’étang serait donc abondamment alimentée par l’aquifère. Toutefois, ce
n’est pas le point qui nous intéresse et l’impact des bords du modèle ou encore de la topographie
constante sur l’étang pourraient avoir une influence sur les comportements modélisés dans cette
zone (de plus, on ignore si le MNT indique le fond de l’étang ou sa surface).
L’alimentation du ruisseau principal se traduit par une inflexion des isopièzes au sein d’un
écoulement général du nord-est vers le sud-ouest (à droite sur la figure 5.1). Cette première simu-
lation montre un apport régulier de l’aquifère le long du ruisseau principal tandis que celui plus
au nord n’est alimenté que dans sa partie finale. De plus, la simulation indique un apport consé-
quent dans la partie amont de la zone humide de Guidel au niveau de l’intersection entre les deux
cours d’eau.
Le débit modélisé, 97 m3 /hr, est dans l’ordre de grandeur des observations. Sur la carte piézo-
métrique modélisée, on constate que le bassin hydrogéologique de la station de mesure du débit
est plus grand (3,1 km2 ) que son bassin versant topographique (délimité à gauche sur la figure 5.1).
Ce qui explique que le débit modélisé en régime permanent soit supérieur aux 80 m3 /h attendus.
142
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
F IGURE 5.1 – Modèle hydrogéologique de Guidel. À gauche : carte topographique à 10 m de résolution avec
implantation des piézomètres et de la station de mesure du débit. À droite : exemple de carte piézométrique
modélisée (une isopièze tous les 1 mNGF) et zones de résurgences associées ; le débit des résurgences est nor-
malisé par le débit de rivière (échelle de couleur) ; le débit de rivière correspond à la somme des résurgences
dans le bassin versant topographique étudié.
Les seuls paramètres que nous pouvons tester avec cette approche sont la transmissivité et le
taux de recharge moyen de l’aquifère. La transmissivité conditionne les niveaux piézométriques
moyens et par conséquent les interactions entre le modèle souterrain et la surface. Au même
titre que le taux de recharge. L’inversion est donc assez simple mais est soumise à une incerti-
tude conséquente sur la mesure du débit moyen puisque nous ne disposons actuellement que de
quelques mois de mesures.
À recharge fixée, le débit modélisé est représenté en fonction de la transmissivité du modèle
sur la figure 5.2. En considérant un taux de recharge classique, le débit montre une relation as-
sez complexe avec la transmissivité. Lorsque celle-ci est très petite le débit tend vers le taux de
recharge multiplié par la surface du bassin topographique. Les niveaux d’eau sont alors peu pro-
fonds et la carte piézométrique est une réplique de la topographie car de nombreuses résurgences
apparaissent. Le bassin hydrogéologique est alors identique au bassin hydrographique. Lorsque
la transmissivité est très grande, les niveaux piézométriques s’abaissent tellement qu’ils n’inter-
sectent plus la surface au sein du bassin versant. Ce qui sous-entend que l’eau souterraine ressort
entièrement un peu plus en aval du bassin versant étudié. L’exutoire est donc repoussé et la rivière
ne commence plus qu’à l’aval de notre bassin versant.
Le comportement du système entre ces deux positions extrêmes est intéressant. En partant
des faibles transmissivités, le débit augmente progressivement alors qu’on s’attend à une dimi-
nution car les niveaux de base interceptent de moins en moins la topographie. Ensuite, le débit
chute assez brusquement à partir d’un certaine transmissivité jusqu’à atteindre une valeur nulle
(figure 5.2). On peut expliquer ce résultat par le fait que l’augmentation de la transmissivité aug-
mente la taille du bassin versant hydrogéologique tandis que dans le même temps les niveaux
diminuent. Cette baisse des niveaux se traduit par la réduction des zones de résurgence sur le bas-
sin topographique. Progressivement, l’exutoire de l’aquifère se décale de plus en plus vers l’aval
du bassin. Pour simplifier, si l’eau souterraine alimente moins notre bassin d’étude, elle alimente
forcément plus les bassins voisins d’après le principe de conservation de la masse du modèle sta-
tionnaire. Malgré un modèle homogène et stationnaire, la structure seule de la topographie induit
donc déjà un comportement assez complexe et non linéaire.
143
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
F IGURE 5.2 – Impact de la transmissivité sur le débit moyen modélisé à Guidel ; le taux de recharge est fixé
à 270 mm/an ; la relation est loin d’être linéaire : vers les faibles transmissivités le débit tend vers le taux de
recharge multiplié par la surface du bassin topographique, vers les grandes transmissivités il tend vers zéro
car les niveaux piézométriques n’intersectent plus la surface au niveau du bassin versant.
Première approche
Nous n’avons pas encore discuté de l’aptitude du modèle à reproduire les niveaux piézomé-
triques moyens observés dans les forages du site de Guidel. Nous allons voir que les niveaux
de base sont difficiles à représenter par le modèle homogène malgré une résolution assez fine
permettant une topographie réaliste. Tout comme pour le site de Ploemeur, on peut invoquer
la non prise en compte de l’hétérogénéité pour expliquer cette difficulté à restituer les niveaux
moyens observés. En particulier, la figure 5.3 montre que l’erreur moyenne peut atteindre une va-
leur proche de 1 m avec une transmissivité de 2.10−4 m2 /s. À titre de comparaison, la profondeur
moyenne des niveaux mesurés dans les puits est de 5 m. Les piézomètres où les niveaux sont pro-
fonds, c’est à dire ceux éloignés du fond de vallée, montrent un écart conséquent d’environ 2 m.
Pour pallier ce problème, nous tenterons dans un second temps d’ajouter des structures géolo-
giques à notre modèle. En attendant, quelle serait la transmissivité équivalente du système ?
La figure 5.3 qui synthétise les résultats obtenus pour différentes transmissivités et trois taux
de recharge indique une valeur optimale proche de 2.10−4 m2 /s pour la piézométrie (à gauche). Si
on s’intéresse à la restitution du débit du cours d’eau à droite, on note deux minimums locaux à
1,2.10−4 m2 /s et 1,8.10−3 m2 /s. Ces résultats restent néanmoins à prendre avec précaution étant
donné l’incertitude qui pèse sur la mesure du débit moyen observé, estimé ici à 90 m3 /hr, et sur le
réalisme des modèles stationnaires.
On a vu que sur Ploemeur, les niveaux moyens contraignaient assez bien la transmissivité équi-
valente et assez peu la recharge. C’est aussi le cas à Guidel. Mais dans ce contexte non sousmis à
un pompage, on voit que le taux de recharge influence l’estimation de la transmissivité. Les va-
leurs obtenues semblent légèrement sensibles au taux de recharge imposé au modèle. Pour un
taux de recharge compris entre 200 et 350 mm/an, le minimum de transmissivité évolue dans une
gamme de 1 à 4.10−4 m2 /s. La valeur de la recharge ne semble pas détériorer la représentation de
144
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
la piézométrie moyenne car l’erreur moyenne reste proche de 1 m. En revanche, l’impact du taux
de recharge sur le débit est important. L’écart observé semble sensible à la valeur de ce taux (on
s’éloigne rapidement d’une erreur absolue de 0 m3 /hr sur la figure 5.3 à droite). Enfin, la contrainte
sur la valeur de la transmissivité optimale est encore peu claire.
F IGURE 5.3 – Impact de la transmissivité et de la recharge sur les observables de Guidel. Trois valeurs ont été
testées pour le taux de recharge. À gauche : l’erreur moyenne entre la piézométrie mesurée et modélisée en
fonction de la transmissvité. À droite : l’erreur entre le débit de rivière mesuré et modélisé en fonction de la
transmissivité.
Une exploration plus complète de l’espace des paramètres a été réalisée en tenant compte du
rôle conjoint de la transmissivité et de l’estimation du taux de recharge. Nous avons ajouté à l’in-
version une fonction objectif prenant en compte à la fois la piézométrie moyenne et le débit de la
rivière. Les deux fonctions erreurs précédentes ont pour cela été normalisées respectivement par
la profondeur moyenne des niveaux piézométriques (5 m) et le débit moyen (90 m3 /h) mesurés.
Puis, la fonction-objectif totale a été déterminée en moyennant les fonctions normalisées du débit
et de la piézométrie.
Au regard des gammes de valeurs testées, on peut affirmer que le débit mesuré contraint
faiblement le taux de recharge appliqué au modèle (à gauche sur la figure 5.4). Ce taux varie
entre 240 et 340 mm/an avec une incertitude liée au calcul du débit moyen de la rivière. Le dé-
bit contraint également assez peu pas la transmissivité de l’aquifère. On distingue deux compor-
tements différents sur le rôle des paramètres. Les contraintes sont en effet différentes avant et
après T=6.10−4 -1.10−3 m2 /s. Avant cette valeur, la transmissivité évolue inversement au taux de
recharge. Après cette valeur, les deux paramètres jouent dans le même sens et la sensibilité au
taux de recharge augmente.
Les niveaux piézométriques moyens contraignent quant à eux le ratio de la recharge sur le
logarithme de la transmissivité. Effectivement, une droite se dessine sur le graphique au centre
sur la figure 5.4. Ici, les niveaux piézométriques correspondent à un ratio de 5,6.10−5 m−1 , pour
rappel on avait obtenu un ratio de -1,2 à -2,2.10−5 m−1 d’après les données piézométriques de
Ploemeur.
Enfin, le dernier graphique présenté est très intéressant (à droite sur la figure 5.4). En com-
binant les critères sur le débit et la piézométrie, les contraintes sur les deux paramètres se com-
plètent. Le problème admet une solution unique qui se traduit par un minimum global à environ
T=2.10−4 m2 /s et R=270 mm/an. Dans cette configuration, le modèle homogène est capable de
reproduire assez précisément le débit moyen observé et avec 20 % (1 m) d’erreur la piézométrie
145
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
F IGURE 5.4 – Inversion conjointe sur les observables de Guidel. Influence de la transmissivité et du taux de
recharge sur la modélisation du débit (à gauche), des niveaux piézométriques dans les puits (au centre) et
des deux observables à la fois (à droite) ; l’erreur normalisée correspond à la valeur absolue de la différence
entre la valeur modélisée et observée, divisée par la valeur observée ; la combinaison du débit moyen et de la
piézométrie moyenne permet de contraindre les deux paramètres.
Conclusion partielle
146
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
modèle de type Thornthwaite. En supposant que la totalité des précipitations efficaces rejoint la
rivière par l’aquifère, la valeur moyenne obtenue est de 270 mm/an.
Le modèle développé initialement avait pour objectif de décrire la piézométrie de 2009 à 2016.
Les simulations réalisées sur cette période assurent ainsi l’initialisation du modèle pour la déter-
mination du débit sur la période de mars 2017 à juillet 2017. Le pas de temps choisi est hebdo-
madaire afin de réduire les temps de calcul et de conserver les principales variations temporelles
du système. Comme évoqué dans le chapitre précédent, l’échantillonnage de l’espace des para-
mètres est assez dense. 35 valeurs ont été régulièrement (en base logarithmique) sélectionnées
entre 1.10−4 et 2.10−1 m2 /s pour la transmissivité et entre 1.10−4 et 0,2 pour le coefficient d’em-
magasinement (soit 1225 modèles testés).
5.3.2 Aptitude à modéliser les variations temporelles de débit sur le site de Guidel
F IGURE 5.5 – Comparaison entre le débit observé et celui obtenu par un modèle homogène. Il s’agit du meilleur
modèle obtenu suite à l’exploration de l’espace des paramètres.
147
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
D’après la figure 5.6, l’année modélisée (2017) est en effet très particulière rendant ainsi la
représentation du forçage météorologique (modèle de Thornthwaite) sujette à discussion. Il est
actuellement difficile de statuer sur la quantité d’eau apportée au système via le modèle de re-
charge. Celui-ci peut être faible pour cette année précise, ou déficitaire de manière générale. La
recharge appliquée devrait alors fournir une quantité d’eau plus importante au milieu modélisé.
La description du forçage pourrait éventuellement être améliorée par introduction d’un ruisselle-
ment superficiel. Dans tous les cas, le volume de pluie étant fixé, cela impliquerait une réduction
conséquente de l’évapotranspiration estimée. Les mesures de 2017 à aujourd’hui devraient alors
permettre de répondre à cette question.
F IGURE 5.6 – Comparaison entre le débit observé et celui obtenu par un modèle homogène sur plusieurs an-
nées. La transmissivité utilisée pour le modèle est de 1.10−3 m2 /s et le coefficient d’emmagasinement est de
0,05. Il apparait que l’année 2017, seule année de mesure pour le moment, est particulièrement sèche en terme
de recharge, ce qui pourrait signifier que le modèle n’est pas performant pour représenter les évènements ex-
trêmes.
Une autre piste est ouverte. Comme évoqué dans le chapitre précédent, le modèle numérique
et la solution analytique en 1D ont des difficultés à restituer la partie décroissante des variations
piézométriques sur Guidel, c’est à dire lorsqu’il n’y a à priori plus de recharge par les pluies. Cela
apparait par exemple au niveau du piézomètre PZ19, en rouge sur la figure 5.7, ou au niveau de
PSR1 sur la figure 4.6 du chapitre précédent. Potentiellement, la présence d’une erreur systéma-
tique localisée dans le modèle pourrait alors dégrader sa paramétrisation, rendant les valeurs infé-
rées moins fiables. Si la position de cette erreur était suffisamment identifiée, il serait envisageable
de l’ignorer lors de l’inversion.
La non prise en compte de la consommation de la zone humide durant les saisons sèches
pourrait permettre d’expliquer ces comportements. Malgré le manque d’eau en été, les plantes
ont une demande évapotranspiratoire potentielle d’environ 5 mm/jr (valeur assez haute, d’après
l’ETP selon Monteith à la station Météo France située à quelques kilomètres). Or sur Guidel, les
zones humides sont toujours alimentées par l’aquifère et les plantes peuvent donc extraire l’eau
de l’aquifère par leurs racines même si le réservoir du modèle de recharge est à sec. Pour simpli-
fier, nous avons ajouté une zone carrée de 300 sur 400 m au niveau de la zone humide principale
consommant 5 mm/jr entre les mois de juin et septembre. Le taux d’évapotranspiration est appli-
148
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
F IGURE 5.7 – Impact d’une évapotranspiration forcée dans la zone humide au niveau du piézomètre PZ19.
Enfin, on peut ajouter que dans le cadre du modèle homogène, le débit modélisé est peu sen-
sible à la position de la station de jaugeage. En effet, le décalage du point de mesure sur le modèle
d’une centaine de mètres vers l’amont ou l’aval n’impacte quasiment pas la courbe de restitution
modélisée. Ainsi, il semble certain que la redistribution temporelle des précipitations par le sys-
tème hydrologique est encore assez mal représentée.
Afin d’améliorer la description des données par le modèle, il est nécessaire de mieux tenir
compte de la structure géologique du milieu souterrain. L’impact de l’ajout des hétérogénéités est
analysé par comparaison entre un modèle déterministe simple et un modèle stochastique.
1. Dans un cas, une zone moins perméable a été ajoutée dans le coin sud-ouest du domaine
149
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
modélisé, soit une zone d’une taille caractéristique de plusieurs centaines de mètres. Ainsi,
le flux souterrain passant sous la station de jaugeage est considérablement réduit car la zone
agit comme une barrière. Par conséquent, le flux ressort en surface par débordement, le
débit de la rivière augmente alors de façon importante, ce que le modèle homogène n’était
pas capable de restituer. En contrepartie, le débit d’étiage est lui aussi augmenté. Or, d’après
les variations temporelles mesurées, le débit doit être important en hiver et assez faible en
été. L’ajout d’une structure souterraine plus complexe pourrait alors permettre de mieux
décrire ces variations saisonnières.
2. Dans le second cas, une distribution aléatoire de la perméabilité est appliquée au modèle se-
lon une loi log-normale. Dans ce cas, la perméabilité imposée ne varie pas forcément d’une
maille à l’autre, on peut considérer qu’elle reste constante au sein de blocs constitués de
une à plusieurs mailles. La résolution du modèle étant de 10 m, nous avons fait varier la
taille des blocs de perméabilité constante. Il ressort de ces tests que l’impact des structures
géologiques, symbolisées par les blocs de perméabilités différentes, ne se fait sentir sur le
débit que si la taille caractéristique de ces blocs est comparable à la morphologie du bas-
sin versant, ici de l’ordre de la centaine de mètres. Le rôle des structures souterraines est
donc potentiellement très important à notre échelle. Il reste à définir ces structures à partir
d’autres informations.
150
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
F IGURE 5.8 – Modèle géologique de Guidel réalisé à partir de l’inversion des données géophysiques et du logi-
ciel Gocad. À gauche : vue de la topographie (en bleu et rouge) et du pendage de la zone de contact (en rose).
À droite : vue du modèle sous la topographie et les altérites, y figure aussi l’implantation des failles. D’après
L. Pereira Machado.
151
CHAPITRE 5. COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LA PIÉZOMÉTRIE ET LE DÉBIT DE RIVIÈRE
zométrie. De l’autre côté, les processsus de reprise évapotranspiratoire au niveau des zones hu-
mides semblent également importants. En été, cette évapotranspiration sur la zone humide serait
environ équivalente à 0,1 mm/jr ce qui reste assez faible sur le bilan hydrologique annuel. En re-
vanche, ce flux correspondrait à une valeur de 10 m3 /h entre juin et septembre soit un volume très
comparable au débit de la rivière à cette saison.
Une des questions que l’on est amené à se poser est de savoir si il est contraignant de ne pas
être capable de représenter le débit à cette échelle (quelques kilomètres carrés). D’un point de vue
de la gestion locale de l’eau, la mauvaise modélisation des flux mène à des incertitudes élevées sur
l’impact anthropique et climatique sur les milieux. C’est également le cas à grande échelle si l’on
considère que les échanges souterrains peuvent aussi être importants ou si l’on considère que la
représentation des processus à petites échelles est nécessaire pour celle des processus à grande
échelle. Et enfin, cette problématique mérite d’être approfondie afin de mieux connaitre les pro-
cessus en jeu et d’améliorer les modèles prédictifs à toutes les résolutions. Dès lors, comment
s’affranchir des problématiques rencontrées ?
Dans l’exemple de Guidel, la représentation du milieu semble critique. D’une part parce que
l’échelle est petite, d’autre part parce que le milieu est très hétérogène. Il en résulte que la re-
distribution spatiale et temporelle des flux est difficilement modélisable. L’approche proposée se
montre donc insuffisante pour expliquer les variations de débit. Une approche complémentaire
aurait consisté à étudier le rôle du modèle de recharge dans la modélisation du débit. Un point
limitant reste cependant la disponibilité des données de débit sur plusieurs années. Une vérifica-
tion importante serait la comparaison entre le taux de recharge estimé par la piézométrie d’après
la méthode analytique et le taux de recharge utilisé dans le modèle numérique.
L’écart entre les débits observés au cours du temps et le modèle, malgré une représentation de
la piézométrie qui reste correcte dans l’ensemble souligne bien le manque d’informations appor-
tées par cette dernière.
152
Chapitre 6
La déformation en surface
Sommaire
6.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
6.1.1 Contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
6.1.2 Originalité de la démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154
6.2 Les données GPS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
6.2.1 Suivi des déformations verticales par la station GPS de Ploemeur . . . . . . 155
6.2.2 Processus mécaniques en jeu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
6.2.3 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156
6.2.4 Informations complémentaires et apport d’un modèle . . . . . . . . . . . . . 157
6.3 Les données inclinométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
6.3.1 Principe de fonctionnement des inclinomètres longue-base . . . . . . . . . 160
6.3.2 Présentation des données sur Ploemeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161
6.3.3 Concept du modèle hydromécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162
6.3.4 Structure du modèle de flux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164
6.3.5 Résultats de l’inversion des modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
6.4 Conclusion sur le contenu informatif des mesures de déformation . . . . . . . . 168
6.4.1 Synthèse sur le contenu informatif des mesures de déformation . . . . . . . 168
6.4.2 Complémentarité avec la piézométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
6.4.3 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171
153
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
6.1 Démarche
6.1.1 Contexte
Les mesures de débit en rivière et les mesures piézométriques ne sont pas toujours suffisantes
pour comprendre le comportement des milieux souterrains. Si on élimine les mesures de débit
qui nécessitent la présence d’une rivière, il n’existe pas d’outils permettant de mesurer les flux
souterrains. La piézométrie permet de remonter à ce type d’information par le biais de modèles
mais dans la plupart des cas la paramétrisation de ces modèles pose problème. Nous proposons ici
d’explorer le contenu informatif des mesures de déformation en surface. Ces mesures, plutôt rat-
tachées à la géophysique historiquement, enregistrent les déformations se produisant au sein de
la Terre et se propageant dans les roches suivant des lois mécaniques jusqu’à la surface. Lorsqu’on
s’affranchit des évènements tectoniques et des phénomènes de marées, clairement identifiés dans
les signaux géodésiques, il ne subsiste que les signaux hydrologiques. C’est donc ce point qui nous
intéresse.
Cette approche est donc très originale. Elle se base sur l’observation des milieux souterrains
à distance, depuis la surface. Finalement, le contenu informatif de ce type de données a encore
été très peu exploité à travers plusieurs années de mesures et une modélisation hydrogéologique
à base physique. Nous pensons qu’elles disposent d’un fort potentiel. Les données GPS sont nom-
breuses dans le monde et sont facilement accessibles. Les inclinomètres longue-base ont en re-
vanche été très peu déployés pour des besoins hydrologiques, bien que des travaux récents en
ont déjà montré la pertinence, notamment une sensibilité aux flux souterrains [Jacob et al., 2010;
Lesparre et al., 2017; Longuevergne et al., 2009; Schuite et al., 2015, 2017].
154
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
Une station GPS a été installée à proximité du pompage de Ploemeur en 2003. La station est
un capteur implanté sur un plot en béton lui-même fixé dans le sol et supposé être stable, c’est
à dire non soumis à des déformations très locales. Les déplacements de cette station sont enre-
gistrés dans les trois composantes de l’espace. Les données initiales apparaissent très bruitées,
néanmoins les déplacements verticaux mesurés apparaissent en phase avec les variations piézo-
métriques à l’échelle saisonnière (figure 6.1). La précision et l’incertitude de la mesure ne semblent
a priori pas permettre d’étudier cette déformation à un pas de temps plus fin (le chapitre consacré
à la présentation des sites fait référence aux précédentes études). Alors que l’amplitude annuelle
de la piézométrie est typiquement d’une dizaine de mètres, celle des déplacements verticaux est
de l’ordre d’une dizaine de millimètres. En complément du déplacement vertical, la station enre-
gistre les déplacements horizontaux selon les directions nord-sud et est-ouest. Ces déplacements
latéraux montrent un signal plus complexe, parfois déphasé avec la piézométrie ou affichant deux
pics sur certaines années. Au regard de ces observations, on ne peut dire si les déplacements la-
téraux indiquent des déformations caractéristiques des processus hydrologiques. Il est de plus
possible que la variabilité temporelle des taux de pompage à proximité influe beaucoup sur la
dynamique de ces déplacements. En revanche, les déformations verticales saisonnières semblent
bien liées aux variations de stock dans l’aquifère.
F IGURE 6.1 – Déplacement vertical au niveau de la station GPS et fluctuations piézométriques au niveau du
piézomètre F19 ; l’échelle est en millimètre pour les déformations et en mètre pour la piézométrie ; les données
sont filtrées avec une moyenne glissante sur 2 mois.
On peut supposer que la déformation verticale enregistrée au niveau de la surface du sol est
principalement causée par la déformation de l’espace poreux dans l’aquifère sous-jacent suite à
une modification de la charge hydraulique. En particulier sur Ploemeur, les fluctuations tempo-
relles de la piézométrie sont assez similaires entre les forages. Au premier ordre, la déformation
verticale observée en un point serait donc uniquement liée aux variations piézométriques à la
verticale de ce point. Son estimation ne nécessite pas pour l’instant de modèle de déformation tri-
dimensionnel qui prendrait en compte la propagation latérale de la déformation de chaque point
155
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
de l’espace.
En complément, deux processus différents contribuent à la déformation verticale : la sur-
charge (les masses d’eaux continentales, présentes dans les sols, les lacs et les aquifères de la
région, pèsent sur la croûte terrestre) et les déformations liées aux variations thermiques de l’at-
mosphère. D’après les modèles classiques, ces contributions sont assez faibles par rapport aux
déformations verticales observées. La déformation de la croûte est plutôt opposée à celle qui nous
intéresse. En effet, lorsque les niveaux piézométriques sont élevés, l’aquifère est "gonflé" donc la
déformation verticale est positive. Au contraire, comme la masse d’eau présente dans les aqui-
fères est importante, la croûte terrestre aura tendance à se tasser. Il convient donc de retrancher
ces contributions thermiques et régionales à la mesure GPS initiale afin d’isoler le processus hy-
drogéologique local (figure 6.1).
La relation la plus simple reliant en un point la variation temporelle de charge hydraulique
∆h à la déformation verticale ∆e de l’aquifère est donnée par la théorie de la consolidation et la
définition du coefficient d’emmagasinement spécifique S s [L−1 ] :
où ∆ se réfère à une variation entre deux instants, E à l’épaisseur de l’aquifère, ρ à la masse volu-
mique de l’eau, g à l’accélération de la pesanteur (9,81 m/s2 ), et βp au coefficient de compressibi-
lité de l’aquifère. Ce coefficient de compressibilité s’exprime en fonction de la déformation volu-
mique relative de l’aquifère ∆VV0 associée à une variation de pression ∆P, ou encore en fonction du
module de cisaillement µ et du coefficient de Poisson ν :
1 1 ∆V 3(1 − 2ν)
βp = = × = (6.2)
K V0 ∆P 2µ(1 + ν)
6.2.3 Résultats
Dans notre cas, nous avons travaillé sur les mesures de 2011 à 2016. Typiquement, l’amplitude
de la déformation verticale atteint la dizaine de millimètres, alors que celle de la piézométrie à
proximité du pompage est d’une dizaine de mètres. Le ratio entre les deux signaux est donc d’en-
viron 10−3 . Cette valeur est plutôt cohérente avec les informations issues des essais de pompage
(S compris entre 2.10−4 et 4.10−2 d’après [Le Borgne et al., 2006]). Pour une meilleure lisibilité, les
résultats sont présentés en fonction du cycle hydrologique. Sur la figure 6.2, une nouvelle courbe
est tracée et ramenée à une valeur initiale de zéro pour chaque partie ascendante (période de
recharge) et descendante (période de récession) de la piézométrie. Les tendances semblent as-
sez identiques entre les périodes de recharge et celles de récession. Là encore, le rapport moyen
entre la déformation et la piézométrie est de 10−3 . Cette valeur est donc similaire aux précédentes
études sur les données GPS [Biessy et al., 2011; Moreau and Dauteuil, 2013; Moreau et al., 2006].
Que ce soit pendant la baisse ou la montée des niveaux piézométriques, la plupart des courbes de
156
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
tendances présentent une pente proche de 1.10−3 même si certaines petites périodes sortent de
cette observation générale. On note deux saisons dont les pentes semblent plutôt correspondre à
une valeur de 6.10−3 (sur la figure 6.2 : de novembre 2011 à mars 2012 et de mars 2012 à novembre
2012).
F IGURE 6.2 – Corrélation entre la déformation verticale par GPS et la piézométrie sur le site de Ploemeur.
Chaque courbe partant de l’origine (0,0) correspond à une saison hydrologique définie par la piézométrie
(en augmentation ou en diminution). Les données sont filtrées avec une moyenne glissante sur 2 mois entre
2011 et 2016. Les lignes noires en pointillé, correspondant à des ratios de la déformation sur la piézométrie de
1.10−3 et 6.10−3 , servent ici de repère.
Schuite et al. [2015] mentionnent qu’un suivi de la gravimétrie du site avait été effectué en mai
2006 lors d’une expérience au cours de laquelle les pompages furent stoppés pendant 40 heures.
Ce suivi n’avait alors pas permis de déceler de variations de masse significatives au droit du site,
ce qui confirmait le caractère confiné de l’aquifère fracturé. C’est à dire que la quantité d’eau pré-
sente dans l’aquifère (autour du pompage) était restée inchangée durant l’expérience malgré la
hausse des niveaux piézométriques. C’est donc la déformation élastique de l’aquifère qui a joué.
Les modèles hydrogéologiques utilisés précédemment pour représenter les fluctuations piézomé-
triques, aussi bien le modèle numérique que l’analytique, sont donc en conflit avec les observa-
157
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
tions géodésiques. En effet, ces dernières indiquent un aquifère uniquement confiné dont le coef-
ficient d’emmagasinement est de l’ordre de 10−3 . Pourtant, les fluctuations piézométriques sont
caractéristiques d’un emmagasinement relativement élevé (∼ 5.10−2 ) et donc d’un aquifère non
confiné. Pour tenter, de résoudre cette contradiction un second modèle numérique de Ploemeur
a été implémenté.
Le modèle est défini par deux couches, la première de plusieurs dizaines de mètres d’épaisseur
est une nappe libre avec un emmagasinement de 5.10−2 et une transmissivité faible, de l’ordre
de 2.10−5 m2 /s. La seconde est une nappe confinée d’emmagasinement 1.10−3 et de transmissi-
vité 1.10−3 m2 /s. Pour la première couche, non confinée, l’épaisseur et la perméabilité n’ont pas
beaucoup d’importance pour le modèle de flux, c’est surtout la transmissivité qui importe. Pour la
seconde couche, confinée, l’épaisseur n’a toujours aucune importance. On peut relever la charge
hydraulique dans chacune des couches en chaque maille du modèle.
Dans cette configuration, la simulation à pas hebdomadaire montre que le comportement
temporel de la piézométrie dans les deux couches est équivalent à celui obtenu avec un modèle à
une couche avec un emmagasinement de 5.10−2 et une transmissivité 1.10−3 m2 /s. En effet, l’écart
entre le niveau piézométrique en été et en hiver est identique dans les deux cas (en haut sur la fi-
gure 6.3). Le comportement stationnaire dans l’espace est lui légèrement différent mais peut être
ajusté par la perméabilité ou l’épaisseur de la couche supérieure qui ont peu d’impact sur le com-
portement temporel. Le graphique du bas sur la figure 6.3 illustre bien que les comportements
entre le modèle à une ou deux couches sont très proches en terme de variations temporelles.
F IGURE 6.3 – Comparaison des niveaux piézométriques entre les modèles à une et deux couches. En haut :
section est-ouest du modèle présentant les niveaux en hautes-eaux et basses-eaux pour les deux modèles. En
bas : comparaison des comportements temporels à pas hebdomadaire au niveau du piézomètre F34.
158
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
comportement piézométrique à partir de deux compartiments conceptuels. L’un, très poreux, dis-
pose d’une capacité à emmagasiner l’eau assez importante (5.10−2 est équivalent à une porosité),
l’autre étant capable de transmettre cette eau rapidement. C’est la transmissivité de la couche
confinée qui domine mais c’est la capacité de stockage de la couche supérieure qui contrôle le
comportement à long terme. Le premier compartiment a donc un temps de réponse très long tan-
dis que le second réagit très rapidement (pour rappel le temps caractéristique d’un aquifère est
fonction de l’inverse de la diffusivité T/S). Cette différence de diffusivité entre les deux structures
pourrait expliquer que seule la partie confinée répond aux sollicitations à court terme comme
semble l’indiquer les mesures gravimétriques (comportement uniquement confiné) et les essais
hydrauliques en forage présentés par Le Borgne et al. [2006].
En utilisant le même modèle à pas journalier, nous pouvons donc comparer l’évolution du
niveau piézométrique dans le piézomètre F19 à une échelle de temps plus fine (figure 6.4). Pour
bien séparer la réponse au pompage, situé dans la couche confinée et transmissive, un taux de
recharge constant est imposé en surface du modèle. Lorsqu’on regarde les variations temporelles
dans les deux couches, on s’aperçoit que la réponse est plus tardive et atténuée dans le compar-
timent non confiné, voire que certaines fluctuations sont quasiment gommées. Dans ce cas de fi-
gure, la piézométrie et le GPS sont donc très complémentaires puisqu’ils mettent en évidence que
le système n’a pas les mêmes propriétés en fonction de l’échelle temporelle d’observation. Ces ré-
sultats expliqueraient également le comportement piézométrique relevé au niveau du piézomètre
MF2 (proche des pompages). En effet, ce piézomètre n’est captant que sur 30 m de profondeur et
est donc plus représentatif de la piézométrie en surface. Les fluctuations piézométriques y sont
beaucoup plus lisses que pour les piézomètres profonds qui enregistrent de nombreuses varia-
tions hautes fréquences dues aux variations journalières du débit de pompage.
F IGURE 6.4 – Réponse au pompage dans les deux couches du modèle de Ploemeur à pas journalier. Un taux
de recharge constant a été appliqué pour mettre en évidence les réponses au pompage, ici au niveau du pié-
zomètre F19.
159
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
Le site de Ploemeur a été instrumenté par des inclinomètres longue-base dès 2006. Ce nouveau
type d’instrument [Boudin, 2004; Boudin et al., 2008] est capable de mesurer l’inclinaison relative
entre deux points ancrés dans la roche avec une précision de l’ordre de 10−9 rad, soit un dénivelé
de 1 mm sur 1000 km. Les inclinomètres longue-base sont constitués de deux pots remplis d’eau
et reliés par un tube (figure 6.5). La mesure de l’inclinaison (ou du "tilt" en anglais), c’est à dire de
l’angle entre les deux points, se fait par la mesure du niveau d’eau dans ces deux pots. Lorsque la
structure rocheuse qui porte l’instrument s’incline, l’eau se met à l’équilibre, au même niveau dans
les pots, faisant ainsi varier la hauteur d’eau relative de chaque pot. Sachant que la distance qui
les sépare est connue, la variation de l’angle au cours du temps par rapport à une position initiale
peut être déduite (voir figure 6.5). La précision impressionnante de l’instrument (10−9 rad) tient
à la précision de la mesure de la différence de niveau entre les deux pots et à la grande distance
qui les sépare. On pourra se référer aux travaux de thèse de Jonathan Schuite pour une description
plus complète de l’instrument et sur sa sensibilité [Schuite, 2016].
F IGURE 6.5 – Schéma conceptuel de l’inclinomètre LB1 sur Ploemeur. L’instrument est installé dans une galerie
souterraine datant de la Seconde Guerre mondiale, au sein d’une butte de granite, il se situe à environ 150 m
du pompage de Ploemeur. D’un point de vue hydrologique, le tilt mesuré, α, est sensible aux déformations
induites par les variations de gradient piézométrique.
L’application de tels outils à l’hydrogéologie est récente et très prometteuse [Chen et al., 2010;
Longuevergne, 2008; Schuite et al., 2015]. Grâce à leur longueur de plusieurs mètres ils peuvent
s’affranchir d’effets locaux et montrer une bonne stabilité dans le temps (voir Schuite [2016]). Dans
ce travail, nous nous intéresserons à l’inclinomètre LB1 composé de deux instruments quasiment
perpendiculaires implantés dans le granite (dans un bunker de la Seconde Guerre Mondiale). Le
premier, orienté dans la direction N75°E, soit en direction du pompage, mesure 32,8 m. Le second,
orienté N328°E, mesure 7,75 m. Cette différence de taille peut être à l’origine d’une différence de
comportement constatée entre les deux directions. La configuration de l’inclinomètre N75°E est
représentée de manière simplifiée sur la figure 6.5.
160
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
Les travaux de Schuite et al. [2015] ont démontré la capacité de l’instrument à mesurer la ré-
ponse mécanique à un essai de pompage de 1 h. De plus, ils mettent en évidence la forte sensibilité
de l’instrument à l’hétérogénéité. Ces études préalables ont également mis en évidence une corré-
lation du signal inclinométrique mesuré en surface avec les variations court-terme des débits de
pompage. À l’échelle saisonnière, le "tilt" fluctue avec une amplitude moyenne d’environ 10 µrad.
Il montre cependant un déphasage avec la piézométrie. Ces travaux préalables montrent donc
un potentiel intéressant pour l’observation des flux souterrains. Nous proposons ici de modéliser
physiquement ces variations à l’échelle saisonnière afin d’en extraire le contenu informatif.
Le signal temporel mesuré par l’inclinomètre LB1 dans la direction N75E est intéressant car il
est synchrone avec les fluctuations du gradient temporel de la piézométrie (figure 6.6), du moins
au pas mensuel. En effet, on note par exemple que chaque année le tilt est à son maximum quand
la montée du niveau d’eau est maximale. Le signal de déformation mesuré en surface est donc en
avance par rapport à la piézométrie (voir figure 6.6). Une explication simple expliquant ce com-
portement est que le tilt dépend principalement du gradient temporel de piézométrie via le même
type de relation que celle présentée dans la partie consacrée à l’étude du signal GPS.
F IGURE 6.6 – Comparaison entre le tilt N75E et la piézométrie. Le tilt N75E mesuré par l’inclinomètre LB1 est
déphasé avec la piézométrie du site mais est très corrélé avec son gradient temporel ; les signaux sont lissés
pour mettre en avant le cycle saisonnier.
Des questions se posent. Quelle est la sensibilité ou la capacité intégratrice des inclinomètres ?
Comment expliquer cette avance sur les variations piézométriques ? Sans modèle physique expli-
quant ces fluctuations temporelles, il est aussi difficile d’évaluer le rôle des écoulements dans la
partie non-saturée autour des inclinomètres. On ignore si de tels instruments enregistrent des
déformations importantes mais lointaines (à plusieurs kilomètres) ou de petites déformations
plus proches de l’instrument. On imagine en revanche que les gradients de la piézométrie dans
le temps et l’espace puissent être dépendants des conditions à plus grande échelle.
Enfin, d’après les mesures, l’inclinaison mesurée dans la direction N328E n’a pas le même
comportement que dans la direction N75E (figure 6.6). Elle est en phase avec la direction N75E
à certaines périodes, mais est en déphasage à d’autres périodes. Est-ce lié à la différence de taille
entre les deux instruments ? Ou au contraire est-ce révélateur des flux souterrains dans cette direc-
161
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
tion ? L’inclinomètre N75E est lui orienté en direction du pompage, là où les variations de pression
sont les plus fortes, ce qui pourrait suggérer que l’instrument nécessite des forts gradients piézo-
métriques.
1−ν 3
q
D’après la solution de Mogi : u z = g f a ρ∆h , avec R = f 2 +r2 (6.4)
µR3
On remarque donc que la déformation est fonction de 1/r ou de 1/r 3 . Dans le modèle de
Mogi, la surpression n’est pas ponctuelle et son volume a donc une importance via le coef-
ficient a.
3. Le tilt α peut ensuite être évalué à un endroit donné en sommant la contribution de chaque
point du modèle. Cette contribution au tilt est calculée par dérivation du produit de convo-
lution entre la déformation verticale et la charge hydraulique, h(x,t), convertie en surpres-
sion [M.L−1 T−2 ]. On fait ainsi l’hypothèse que la déformation liée à chaque point n’influence
162
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
pas ses voisins. D’un point de vue pratique, les gradients hydrauliques sont mesurés selon
les axes est-ouest et nord-sud pour chaque pas de temps au sein du modèle. Ils sont ensuite
projetés dans la direction de l’instrument. Enfin, le tilt dû à chaque point est projeté sur les
directions mesurées par l’inclinomètre, ici N75E et N328E :
X 1−ν ∆h k
Tilt d’après la solution de Boussinesq : α = 2g Aρ cos(ǫk ) (6.5)
k 4πµr ∆x
où k se réfère à l’indice des mailles du modèle, A à la surface sur laquelle est intégrée la sur-
charge ponctuelle, ici la résolution au carré, ǫk à l’angle entre la direction radiale et l’orien-
∆h
tation de l’inclinomètre (ici N75E ou N328E), et ∆xk est le gradient hydraulique dans la di-
rection de l’inclinomètre (ou direction radiale).
X 1 − ν 3 ∆h k
Tilt d’après la solution de Mogi : α = g fa ρ cos(ǫk ) (6.6)
k µR3 ∆x
1 − ν X 1 ∆h k
D’après la solution de Boussinesq : α = 2g Aρ cos(ǫk ) (6.7)
4πµ k r ∆x
1 − ν 3 X 1 ∆h k
ou d’après la solution de Mogi : α = g fa ρ 3
cos(ǫk ) (6.8)
µ k R ∆x
où les coefficients à gauche de la somme définissent l’amplitude. Les paramètres élastiques étant
inconnus, nous allons travailler en normalisant le tilt pour se focaliser sur la partie variable dans
le temps. Pour le modèle de Mogi nous prendrons arbitrairement une profondeur de 50 m, cette
profondeur correspondant d’après le modèle à la zone à laquelle se produit la déformation initiale.
Cette valeur choisie se situe dans l’ordre de grandeur des profondeurs auxquelles sont rencontrées
les fractures productrices de Ploemeur. On imagine conceptuellement que ce sont ces fractures
qui sont sous pression et à l’origine de la déformation observée en surface.
163
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
F IGURE 6.7 – Schéma du modèle hydromécanique utilisé. Dans un premier temps la piézométrie est modélisée
en fonction du temps, ensuite les variations de charge obtenues en chaque maille sont assimilées soit à une
surcharge en surface (modèle de Boussinesq), soit à une variation de pression dans une sphère en profondeur
(modèle de Mogi). Ces deux modèles mécaniques permettent alors de calculer le tilt produit à une distance
donnée. Attention, malgré ce que semble illustrer le schéma, la couche aquifère modélisée est confinée.
En normalisant le tilt mesuré et modélisé, nous nous privons donc d’une certaine information
mais cela permet de réduire le nombre de paramètres et de garder une cohérence dans la physique
du modèle. Ainsi, nous proposons de travailler principalement sur la temporalité du tilt et ses am-
plitudes annuelles relatives dans les directions N75E et N328E. Pour alimenter les deux modèles
mécaniques, quatre modèles hydrogéologiques sont proposés. Ils se différencient uniquement par
leur distribution des paramètres hydrodynamiques et sont de complexité croissante.
Le modèle hydrogéologique utilisé est le modèle 2D à une couche déjà présenté précédem-
ment. Différentes structures de modèles ont été envisagées. En particulier, le contact entre les mi-
caschistes et le granite a été pris en compte à partir des observations et de données géophysiques.
On suppose que le granite, sur lequel l’inclinomètre est implanté, est moins perméable et impacte
ainsi les écoulements. De manière théorique, comme le granite serait moins diffusif, il filtrerait
les variations de pression hautes fréquences en plus de modifier la structure des écoulements. La
représentation de ces deux milieux peut donc jouer un rôle important sur la modélisation du tilt.
Les différences de structure entre les modèles sont présentées dans les lignes suivantes et sur la
figure 6.8.
164
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
zone, et sur lequel l’inclinomètre de Ploemeur est installé (à gauche sur la figure 6.8).
3. Le troisième modèle est assez similaire si ce n’est que la forme du granite est définie selon
des données géophysiques. Au lieu d’un carré, la zone moins perméable forme désormais
un éperon orienté selon une direction N20E (à droite sur la figure 6.8).
4. Enfin, le dernier modèle est identique au troisième mais le coefficient d’emmagasinement
de la zone moins perméable se différentie de celui imposé au reste du domaine modélisé.
Ce qui porte le nombre de paramètres à quatre pour ce dernier modèle, deux transmissivités
et deux emmagasinements, la normalisation du tilt permettant de n’avoir aucun paramètre
mécanique.
F IGURE 6.8 – Carte piézométrique de différents modèles hydrogéologiques pour modéliser le tilt. Il ne s’agit que
de la piézométrie à un instant donné pour un certain jeu de paramètres. À gauche : modèle hydrogéologique
n°2 avec une zone moins perméable dans le coin inférieur gauche. À droite : modèle hydrogéologique n°3 et 4
avec une zone moins perméable délimitée par des observations et des données géophysiques.
Pour comparer les résultats, le même critère que pour la modélisation des fluctuations pié-
zométriques a été utilisé, à savoir la RMS ("Root Mean Square Error") divisée par l’écart-type des
mesures du tilt. Le pas de temps choisi pour le modèle est de 14 jours, ce qui a pour effet de lisser
sensiblement les variations temporelles. La résolution spatiale est de 20 m. La gamme de trans-
missivité dans laquelle on échantillonne se situe entre 1.10−4 et 1.10−1 m2 /s. La zone représentant
le granite présente, elle, une transmissivité 10 à 1000 fois moins grande que le reste du modèle.
L’emmagasinement varie quant à lui entre 1.10−4 et 1.10−1 . L’échantillonnage régulier dans l’es-
pace des paramètres est assez dense pour le modèle homogène, en revanche il l’est moins pour le
quatrième modèle qui contient quatre paramètres.
Pour ces différents modèles, les résultats sont encourageants en terme de restitution du tilt et
de détermination des paramètres. Nous allons principalement nous focaliser sur la représentation
du tilt dans la direction N75E. En effet, le tilt dans la direction N328E n’est lui jamais suffisamment
bien modélisé. Nos modèles simples se montrent capables d’expliquer une partie importante du
signal. Le quatrième modèle est légèrement plus performant que les autres malgré une exploration
de l’espace des paramètres moins exhaustive, ce qui laisse supposer que sa paramétrisation peut
être sensiblement améliorée.
165
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
La comparaison des meilleurs résultats pour chaque modèle est assez parlante (à gauche sur la
figure 6.9). Pour les différents modèles, il existe plusieurs jeux de paramètres donnant des critères
minimaux relativement proches, de l’ordre de 0,7. Comme le suggère cette valeur, les modèles sont
capables de décrire environ 30 % de la variabilité temporelle du tilt. On note que les paramètres
influencent également l’extension de la zone contribuant au tilt (à droite sur la figure 6.9). Dans les
différents cas, la contribution au tilt modélisé au niveau de l’inclinomètre s’estompe assez rapide-
ment après quelques centaines de mètres. L’inclinomètre semble donc sensible aux variations de
pressions locales. Les meilleurs modèles sont d’ailleurs ceux pour lesquels la contribution au tilt
provient d’une zone proche autour de l’inclinomètre.
F IGURE 6.9 – Représentation des meilleures simulations hydromécaniques obtenues par rapport au tilt N75E
normalisé. Le modèle n°1 est le modèle homogène, le n°3 est le modèle avec une zone moins perméable déli-
mitée selon les données géophysiques et le n°4 celui où l’on considère que l’emmagasinement aussi peut varier.
À gauche : comparaison entre le tilt mesuré dans la direction N75E et celui modélisé. À droite : contribution
de chaque point du modèle au tilt N75E modélisé au niveau de l’inclinomètre, à un instant donné.
166
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
entre 1 et 0,7 montrant une faible sensibilité aux paramètres. Il y a donc beaucoup de modèles
peu discriminant entre eux. Nous allons synthétiser plus précisément les résultats pour chaque
paramètre.
Le cas de la transmissivité est assez intéressant, on remarque que pour le modèle homogène,
les meilleurs résultats sont obtenus pour des valeurs comprises entre 5.10−3 et 3.10−2 m2 /s alors
qu’elles sont comprises entre 1.10−3 et 7.10−3 m2 /s pour les modèles hétérogènes n°2 et n°3. Pour
ces mêmes modèles hétérogènes, le ratio entre la transmisivité du modèle et celle de la zone moins
perméable est très peu contraint.
Le coefficient d’emmagasinement a lui aussi une influence différente entre le modèle homo-
gène et les autres. Dans le cas n°1, il est clair que les meilleurs résultats sont conditionnés par un
coefficient compris entre 0,05 et 0,1. Pour les modèles hétérogènes (n°2, 3 et 4), la seule condition
est qu’il soit supérieur à 3.10−4 sauf pour le modèle n°4 (en haut sur la figure 6.10).
Dans le cas du modèle homogène (n°1), la diffusivité (ratio de la transmissivité sur l’emmaga-
sinement) est particulièrement bien contrainte. Le critère minimal pour chaque valeur de diffusi-
vité testée montre effectivement un minimum bien marqué entre 1 et 4.10−1 m2 /s. En revanche,
le critère minimal se montre moins sensible pour les modèles n°2 et n°3 où l’on peut dire que la
diffusivité optimale varie entre 2.10−2 m2 /s et 2.101 m2 /s. Pour le modèle n°4, cette diffusivité est
aussi moins contrainte, les meilleurs critères sont obtenus à partir d’une valeur de 4.10−2 m2 /s.
Dans ces différents cas, l’impact des paramètres est peu sensible au modèle mécanique utilisé
(Boussinesq ou Mogi).
On discutera de la complémentarité avec la piézométrie dans quelques paragraphes malgré
les faibles contraintes apparentes sur les paramètres. En effet, les paramètres sont faiblement
contraints car le critère minimal dépend peu de chaque valeur testée pour les différents para-
mètres. La raison est aussi que les meilleurs modèles ne produisent pas des résultats aussi bon
que souhaités. En effet, le critère n’est jamais inférieur à 0,6 contrairement à la piézométrie où il
valait régulièrement 0,4.
Par conséquent, il reste encore des points à approfondir soit au niveau du modèle hydrogéo-
logique (structure hydrogéologique, modèle de recharge,...) soit au niveau du modèle mécanique
(modèle plus complexe). Faut-il développer plus le modèle mécanique ou s’attacher à mieux dé-
crire le milieu ? On peut se demander par exemple si chaque zone contribue de la même façon
au tilt. Il est envisageable que l’aquifère ne soit pas confiné au niveau de la butte de granite, par
conséquent la zone autour de l’inclinomètre ne contribuerait alors pas à la déformation.
On note une contrainte importante sur la diffusivité de la zone peu perméable du modèle n°4.
Pour le modèle de Mogi, le minimum est centré sur une valeur de 3.10−3 m2 /s. Pour le modèle de
Boussinesq, il est centré sur une valeur de 1,5.10−3 m2 /s. Le ratio entre la diffusivité du modèle
et celle de la zone peu perméable est également assez bien contraint (en bas sur la figure 6.10).
Cela renvoie aux mêmes conclusions que Schuite et al. [2017]. Par un modèle hydromécanique du
site de Ploemeur à pas horaire, les auteurs de l’étude ont également montré que le tilt était très
sensible aux contrastes dans les propriétés du sol. Parmi toutes les combinaisons de paramètres
testées, ce ratio évolue sur une grande plage de valeur entre 10−2 et 106 . Pour les faibles valeurs, le
critère est très élevé et diminue fortement jusqu’à ce que le ratio vaille 101 environ, puis il stagne
jusqu’à 103 avant de remonter doucement. Le ratio des diffusivités entre les deux zones est un des
paramètres les plus importants de ce modèle. Il semble donc que la zone moins perméable dans
laquelle l’inclinomètre est implantée soit environ 100 à 1000 fois moins diffusive que le reste du
domaine.
Les résultats du modèle numéro 4 sont donc encourageants car le tilt N75E y est plutôt bien
167
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
F IGURE 6.10 – Évolution du critère minimal en fonction de certains paramètres du modèle n°4. En haut :
impact du coefficient d’emmagasinement de la partie la plus perméable du modèle. En bas : impact du ratio
entre la diffusivité de la partie la plus perméable du modèle et celle de la zone moins perméable.
représenté (le meilleur critère vaut 0,6) malgré un espace des paramètres faiblement échantillonné
(seulement 5 ou 10 valeurs testées pour chaque paramètre). L’amélioration semble venir de la
différence de diffusivité entre les deux zones quelle que soit la forme exacte de l’hétérogénéité.
Dans notre approche, les déformations verticales enregistrées par le GPS indiquent directe-
ment le coefficient d’emmagasinement de l’aquifère au droit de la station. Ce qui n’empêche pas
l’aquifère d’être plus complexe qu’une simple couche confinée très transmissive. C’est à dire que
168
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
la mesure de surface intègre la totalité des déformations verticales produites par les variations de
charges hydrauliques éventuellement dans différents compartiments, ou à travers un réseau de
fractures. Notre approche est assez simple et se base sur le fait que des mesures piézométriques
sont disponibles et peuvent être corrélées aux déformations.
Les résultats montrent que le coefficient d’emmagasinement de l’aquifère est de l’ordre de
10−3 confirmant son caractère confiné (valeur trop basse pour être une porosité). Pourtant, l’in-
version du modèle hydrogéologique basée sur la piézométrie converge très nettement vers un em-
magasinement d’environ 5.10−2 (valeur trop haute pour un aquifère confiné). D’après ce résultat,
l’aquifère n’est donc pas confiné car cela impliquerait un emmagasinement élevé (de l’ordre d’une
porosité) et des déformations trop importantes, ce que n’indique pas nos mesures GPS.
Une solution pour accorder ces deux constatations consiste à considérer que l’aquifère est
globalement non confiné mais qu’une faible part de sa capacité de stockage est assurée par la dé-
formation des roches. Dans ce cas, on peut écrire le coefficient d’emmagasinement ("storativity"
en anglais) de l’aquifère de la façon suivante :
S = S y + Ss × E (6.9)
où S y est l’emmagasinement ou la porosité de drainage de la partie libre de l’aquifère ("specific
yield"), S s le coefficient d’emmagasinement spécifique de l’aquifère ("specific storage") [L−1 ] et
E est l’épaisseur de l’aquifère. C’est donc la porosité qui permet principalement le stockage et le
déstockage de l’eau dans le temps, le deuxième terme étant négligeable devant le premier.
Sur Ploemeur, des observations complémentaires fournissent une vision différente. À l’échelle
de quelques jours, le coefficient d’emmagasinement semble faible et l’aquifère essentiellement
confiné. La modélisation hydrogéologique montre alors que ces observations peuvent être in-
terprétées par un fonctionnement à deux compartiments. Dans une optique de parcimonie, un
modèle à deux couches parallèles et homogènes a été utilisé. D’après les simulations de ce mo-
dèle, les déformations et le comportement piézométrique modélisés avec une seule couche sont
obtenus assez facilement en considérant un compartiment supérieur libre peu transmissif et un
compartiment inférieur confiné très transmissif. À l’échelle saisonnière et plus, la transmissivité
du système est égale à celle du compartiment confiné. L’emmagasinement est quant à lui égal à la
porosité du compartiment supérieur. À l’échelle journalière, le comportement est plus complexe
et les propriétés des deux compartiments entrent en ligne de compte.
Les mesures de déformation par GPS apportent donc une information plus précise sur le fonc-
tionnement hydrogéologique. Ces données précisent les capacités de stockage de l’aquifère mais
aussi, par complémentarité avec la piézométrie, sa diffusivité. Combinées à d’autres observations
et à l’aide d’un modèle, ces mesures se montrent sensibles aux structures d’écoulements souter-
rains.
Pour l’inclinométrie, la simple comparaison avec les données piézométriques ne suffit pas
à informer sur les propriétés du système contrairement au déformations verticales par GPS. Un
modèle hydromécanique a été implémenté pour tenter de restituer les mesures. Ce modèle très
simple, avec ou sans l’ajout de structures géologiques qui restent encore très basiques, se montre
capable de reproduire grossièrement les mesures dans une direction. Si on considère l’inaccessibi-
lité du milieu confiné, l’apport conjugué de l’instrument et du modèle est important. Sans recours
à la piézométrie, cette étude montre une sensibilité à distance aux principales structures d’écoule-
ment. Au vu de l’hétérogénéité du site, il reste difficile d’expliquer de façon satisfaisante toutes les
observations et surtout d’évaluer la sensibilité aux paramètres hydrodynamiques, au même titre
que la piézométrie. Néanmoins, l’exploration de l’espace des paramètres informe en particulier
sur la diffusivité du milieu. De plus, l’ajout d’une zone moins perméable à l’inversion montre la
capacité à intégrer une information plus fine sur l’hétérogénéité.
169
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
Pour le dernier modèle utilisé (n°4), une exploration plus fine de l’espace des paramètres a été
effectuée sur une gamme réduite mais centrée sur les paramètres optimaux qui semblaient se des-
siner lors de la première exploration. On relève une légère meilleure représentation du tilt N75E
(figure 6.11) mais le critère reste assez élevé (0,65). D’autres fonctions objectifs pourraient être
envisagées pour comparer différemment les modèles et les observations (ce qui pose à nouveau
la question : quel est le meilleur modèle ?). L’objectif serait alors de caractériser la restitution de
certains comportements en particulier. Ici, la RMS utilisée donne un poids important aux grands
écarts entre le modèle et les observations, ce qui n’est pas forcément le plus judicieux pour compa-
rer le tilt car on sait que certaines périodes risquent d’être mal représentées. Ces périodes auraient
alors un poids trop important notamment si elles ne sont pas pertinentes. Il en résulterait une
mauvaise représentation des autres périodes. La corrélation entre le modèle et les données a par
exemple aussi été utilisée. Elle donne des résultats assez similaires à ceux obtenus avec la RMS en
fonction de la structure du modèle. Une approche alternative pourrait consister à donner plus de
poids aux périodes bien modélisées et chercher ensuite à comprendre celles qui le sont moins.
F IGURE 6.11 – La meilleure représentation du tilt N75E normalisé. L’écart entre le modèle et les mesures donne
un critère de 0,65 (RMS normalisée).
En revanche, la modélisation de l’inclinaison dans la direction N328E est loin de caler sur les
données observées. L’évolution de l’inclinaison dans cette direction reste un mystère. Alors que les
tendances du tilt mesuré sont parfois en accord avec le modèle, elles se révèlent opposées durant
d’autres périodes. Cependant, nous avons remarqué ces phénomènes d’inversion, qui peuvent
s’apparenter à un "déphasage", lors de tests sur le tilt N75E. En effet, dans certains cas les jeux de
paramètres choisis aboutissaient à un tilt modélisé s’opposant aux mesures sur toute la chronique,
mais pas uniquement sur certaines périodes comme c’est le cas dans la direction N328E.
Les causes possibles de cette différence avec les observations dans la direction N75E sont les
suivantes. D’abord, les gradients et les flux hydrogéologiques dans la direction N75E sont beau-
coup plus marqués que dans la direction N328E (si on se situe au niveau de l’inclinomètre). Sim-
plement car la direction N75E pointe vers le pompage situé à quelques centaines de mètres. Dans
cette direction, il n’est donc pas difficile de bien représenter les tendances du gradient piézomé-
trique. On peut en effet supposer qu’à cette distance du pompage les gradients soient toujours
orientés dans la direction du pompage qui est à peu près la même que celle de l’inclinomètre. La
direction N328E est quant à elle perpendiculaire à l’écoulement principal. Par conséquent, l’orien-
tation des gradients dans cette direction est plus variable en fonction des saisons et du taux de
170
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
pompage imposé. La représentation des gradients dans cette direction est plus difficile à représen-
ter car elle n’a pas beaucoup d’intérêt pour le modèle hydrogéologique dont on a déjà mentionné
l’incapacité à bien représenter les flux dans l’espace. Un autre point est la taille de l’instrument.
Pour rappel, l’inclinomètre longue-base N75E mesure 32,8 m alors que l’inclinomètre N328E ne
mesure que 7,75 m. Il est envisageable que l’inclinomètre N328E soit donc plus sensible à des pro-
cessus locaux d’autant plus difficiles à modéliser.
F IGURE 6.12 – Évolution du critère minimal en fonction du coefficient d’emmagasinement de la zone moins
perméable et du type d’observation.
6.4.3 Discussion
On rappelle donc que la mesure de la déformation en surface est pertinente si l’aquifère étudié
présente un caractère confiné. Les données GPS peuvent être utilisées à différentes échelles pour
venir compléter la compréhension des milieux. Les différents modèles présentés ont permis de
déterminer l’intérêt et les limites des mesures inclinométriques.
171
CHAPITRE 6. LA DÉFORMATION EN SURFACE
Les informations apportées ici portent principalement sur la structure du système avec la dé-
finition de deux réservoirs par le GPS et celle d’une zone moins perméable par l’inclinomètre.
Dans les deux cas, les mesures de déformation ont permis de discrétiser le modèle homogène
de base et donc d’améliorer notre compréhension du site. On peut néanmoins dire que tous les
comportements observés ne sont pas encore compris et que des études complémentaires seront
nécessaires.
Pour le GPS, seule une comparaison entre les données de déformation et de piézométrie a été
effectuée en analysant la corrélation entre les deux signaux. On pourrait envisager une modéli-
sation hydromécanique pour mieux interpréter les comportements temporels et éventuellement
pour étudier les déformations horizontales enregistrées par le GPS. À l’image de l’inversion ef-
fectuée sur les données inclinométriques, il serait intéressant d’évaluer le contenu informatif des
données GPS dans les modèles sans avoir recours aux données piézométriques.
Pour l’inclinométrie, l’ajout du modèle mécanique complexifie en théorie le problème. Dans
notre cas, afin de réduire le problème d’inversion nous avons opté pour des modèles mécaniques
simples qui impliquent des hypothèses assez fortes. Il a suffi de normaliser le tilt pour s’affran-
chir des paramètres mécaniques tout en ajoutant des contraintes sur les paramètres hydrody-
namiques. Cependant, de nouveaux paramètres ont dû être ajoutés par la suite avec la prise en
compte d’une structure moins perméable dans le modèle. Le modèle restitue en partie les don-
nées inclinométriques à l’échelle saisonnière, ce qui constitue une grande nouveauté. Malgré la
complexité apparente des processus hydromécaniques en jeu, un modèle assez simple a permis
d’expliquer les observations. À travers la calibration du modèle hydrogéologique sur les mesures
d’inclinométrie c’est une information sur la recharge du système qui est aussi apportée.
172
Chapitre 7
Sommaire
7.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
7.1.1 Démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
7.1.2 Conceptualisation du problème de transport . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
7.2 Modélisation des concentrations en CFC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176
7.2.1 Inversion du modèle homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176
7.2.2 Autres facteurs contrôlant les concentrations en CFC . . . . . . . . . . . . . . 178
7.3 Modélisation du pôle chimique correspondant au puits F9 . . . . . . . . . . . . . 180
7.3.1 Inversion du modèle homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
7.4 Conclusion sur le contenu informatif de chimie de l’eau . . . . . . . . . . . . . . . 182
173
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
7.1 Démarche
À l’issue des chapitres précédents, les différents observables ont permis de dresser le cadre
physique du modèle. Néanmoins, certaines limites apparaissent dues à l’hétérogénéité des mi-
lieux aquifères. La variabilité spatiale des paramètres est déterminante pour bien représenter les
flux au sein du système. Ici, nous intégrons un modèle de transport au modèle de flux utilisé pré-
cédemment. Des résultats préliminaires sur la modélisation des concentrations en éléments chi-
miques sont présentés.
7.1.1 Démarche
La chimie de l’eau souterraine est très révélatrice de l’origine et des chemins d’écoulements de
l’eau, mais également de son temps de résidence dans les aquifères. L’eau porte en elle la signa-
ture de différents processus. Sa composition chimique est relevée localement dans des forages ou
généralement à l’exutoire des bassins versants. Pour des questions de coûts, ces mesures ne sont
généralement pas faites à des pas de temps très fins. Les mesures en rivières sont plus intégratrices
étant donné qu’elles sont des zones de convergence des eaux souterraines.
La modélisation du transport de solutés demande un modèle de flux que seuls les autres ob-
servables nous ont pour l’instant permis de paramétriser. Néanmoins, nous avons vu qu’il subsiste
de nombreuses lacunes pour la modélisation des aquifères hétérogènes à partir de la piézométrie,
du débit de rivière et de la déformation. Nous proposons donc ici d’étudier le contenu informatif
potentiel de données géochimiques à partir du même modèle numérique utilisé précédemment.
Ces données pouvant fournir des contraintes supplémentaires sur l’estimation des paramètres
physiques de notre modèle. Nous proposons dans le même temps d’évaluer l’aptitude du modèle
à restituer ce type d’observables à partir des informations précédentes.
Dans cette partie, nous proposons donc d’étudier le contenu informatif de la chimie de l’eau
dans les forages de Ploemeur. Ces forages ont fait l’objet d’un suivi manuel des concentrations
en différents éléments depuis la mise en pompage, à un pas de temps plus ou moins régulier. Le
contenu informatif des mesures des concentrations en CFC dans le puits de pompage a déjà été
exploré par Leray et al. [2014] (voir Chapitre 2, section "Un site hydrogéologique en contexte hé-
térogène"). Cette étude, basée sur un modèle hydrogéologique prenant en compte les principales
structures géologiques connues, révèle la sensibilité de cet observable au volume de l’aquifère
(l’épaisseur pondérée par la porosité) et à sa structure interne. Le contenu explicatif des données
géochimiques n’est pas encore complètement déterminé au regard des incertitudes de mesures et
du mélange des eaux dans le milieu souterrain. Nous proposons d’étudier l’intérêt pour les mo-
dèles d’intégrer la variabilité spatiale et temporelle des mesures géochimiques.
Nous proposons deux approches basées sur le site de Ploemeur. Dans un premier temps, le
modèle homogène est mis à l’épreuve des données de concentrations en CFC enregistrées dans
les forages de Ploemeur. Ensuite, nous testerons l’aptitude du modèle à pouvoir expliquer physi-
quement les contributions des différents réservoirs chimiques au débit de pompage calculées par
Roques et al. [2018] (figure 2.11).
Contexte
En première approche, les espèces chimiques à étudier sont celles qui ne réagissent pas du-
rant leur transport dans le milieu souterrain. On parle dans ce cas de traceur conservatif. Notre
démarche se base sur des traceurs environnementaux issus des pluies, des sols ou des roches. Le
volume entrant est ainsi moins contrôlé que lors d’un test de traçage. L’échelle d’investigation est
174
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
plus grande et le problème d’inversion peut justement permettre de déterminer les conditions
limites du système en plus de ses propriétés.
En réalité, les traceurs naturels conservatifs ne sont pas simplement transportés par les écou-
lements souterrains. Ils interagissent plus ou moins avec la roche et se dispersent voire se diffusent
dans l’aquifère. La prise en compte de ces processus, si elle est nécessaire, augmente la complexité
du modèle par l’ajout de paramètres difficilement quantifiables.
Le cadre conceptuel est bien défini pour la modélisation des concentrations en gaz CFC dans
l’aquifère de Ploemeur. L’évolution de la concentration en CFC dans l’aquifère de Ploemeur a été
modélisée à partir de MT3DMS et du modèle ModFlow précédemment implémenté pour repré-
senter la piézométrie. Il suffit alors d’attribuer une certaine concentration à la recharge en fonc-
tion du temps (données présentées sur la figure 2.5) et de relever les concentrations modélisées
au niveau des forages d’observation. Les mesures de CFC dans les forages sont présentées dans le
chapitre de présentation des sites d’études.
Une autre approche possible est d’utiliser la contribution de chaque compartiment géochi-
mique (ou géologique) au puits de pompage. À partir du suivi temporel de différentes espèces chi-
miques dans le puits de pompage et les puits d’observation, Roques et al. [2018] démontrent qu’on
peut statistiquement séparer l’eau pompée en trois composantes (figure 2.11). Ces trois compo-
santes portent chacune leur propre signature chimique et sont associées à des réservoirs concep-
tuels différents.
D’après leur analyse en composante principale (ACP), les réservoirs sont caractérisés chacun
par un puits d’observation : le puits F9 (à 500 m à l’ouest du pompage et d’une profondeur de
100 m, il traverse du granite) qui contient des eaux jeunes à circulation peu profonde ; le puits
F38 (proche du pompage, d’une profondeur de 150 m, il intersecte la zone transmissive) qui ca-
ractérise des eaux vieilles et profondes ; et le puits MF1 (34 m de profondeur et représentatif de la
zone altérée, il intersecte tout de même une zone fracturée) qui caractérise un réservoir de sur-
face peu profond. Le tracé des contributions au puits de pompage montre une évolution dans le
temps plutôt cohérente avec notre vision du système (figure 2.11). En sollicitant le milieu, le pom-
page allonge les lignes de flux et par conséquent récupère progressivement des eaux lointaines
jusqu’à atteindre un état d’équilibre pour le système. La contribution des eaux portant la signa-
ture de F9 était d’environ 100 % en 1991 au lancement du pompage. Cette contribution a diminué
progressivement suivant une exponentielle jusqu’à atteindre une trentaine de pourcents. Dans le
même temps, la part d’eaux dites profondes est passée de 0 à 60 % du fait de la sollicitation d’eaux
plus lointaines induites par le pompage vraisemblablement. Par sa demande importante, celui-ci
imposerait des boucles de circulation plus grandes. Enfin, la signature des eaux du réservoir de
surface est, elle, passée de 0 à environ 10 %. Ces analyses sont donc très quantitatives, elles four-
nissent une information sur le mélange des eaux souterraines et la contribution de trois réservoirs
conceptuels au débit de pompage. Une façon de valider et exploiter cette approche serait l’implé-
mentation d’un modèle d’écoulement et de transport souterrain en définissant au préalable les
différents pôles associés à chaque forage. La contribution de ces pôles au débit pompé pourrait
alors être comparée aux mesures.
Cette deuxième approche permet de s’affranchir un peu plus de l’aspect localisé et éventuel-
lement peu intégrateur des mesures dans les forages. Cependant, elle contient une difficulté dans
la conceptualisation des pôles chimiques à définir pour le modèle numérique. Une première idée
serait de considérer un modèle à deux couches et de leur attribuer à chacune une signature. Dans
175
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
ce cas, toute l’eau de la couche inférieure aurait nécessairement une concentration égale à celle
de la première étant donnée qu’elle s’infiltre à travers cette couche. De même, toute l’eau pom-
pée dans la couche inférieure aurait nécessairement la signature de cette même couche. De plus,
les données présentées représentent trois réservoirs, et la définition de ces deux couches pourrait
sembler arbitraire. Une autre idée serait de quantifier l’évolution de l’eau pompée provenant de
l’ancien bassin versant hydrogéologique (avant pompage) au droit du pompage, cette zone cor-
respondrait alors au réservoir représenté par le puits F9. Dans ce cas de figure, le bassin versant
naturel est peu identifiable et il est difficile de fixer ses limites amont et aval, d’autant plus que le
bassin versant hydrogéologique dépend des paramètres hydrodynamiques du modèle. Pour pal-
lier à ce problème, nous allons principalement nous intéresser à la réponse temporelle du système
mesurée au niveau du pompage. L’objectif est ainsi d’étudier la sensibilité du temps de réponse
observé sur la figure 2.11 aux paramètres du modèle et à la structure des réservoirs géochimiques.
Configuration du modèle
La simulation s’étend de 1940 à 2015 au pas annuel. Par manque de données, le taux de re-
charge de 1940 à 1991 est considéré constant et égal à 270 mm/an jusqu’en 1991. Ce taux est en-
suite calculé par notre modèle de recharge de 1991 à 2015. Enfin, le débit de pompage est nul
jusqu’en 1991 puis il est ramené à sa valeur annuelle pour chaque période. Le modèle hydrogéo-
logique pour modéliser les concentrations en CFC est le modèle homogène à une couche déjà
présenté. Il contient trois paramètres : la transmissivité et l’emmagasinement, auxquels il faut
ajouter la porosité. Comme l’aquifère est confiné, seul le produit de la porosité et de l’épaisseur,
c’est à dire le volume d’eau contenu dans l’aquifère, contrôle la vitesse d’écoulement. Ainsi, il est
redondant de considérer indépendamment chacun des deux paramètres. Le véritable paramètre
contrôlant l’âge de l’eau est la "lame d’eau" ou le volume de l’aquifère [Leray et al., 2014, 2012]. Un
exemple de résultat est proposé sur la figure 7.1. En 1990, les concentration en CFC113 sont d’en-
viron 70 pptv dans l’atmosphère et d’environ 18 pptv dans l’aquifère. Malgré la stabilisation des
concentrations atmosphériques entre 1990 et 1995, les concentrations modélisées dans l’aquifère
continuent d’augmenter et atteignent environ 52 pptv en 2010.
Les concentrations moyennes prédites par le modèle sur la période 2006-2014 sont comparées
aux valeurs mesurées dans les forages sélectionnés pour les différents CFC (cf. chapitre de présen-
tation des sites d’étude). Nous proposons maintenant de synthétiser les résultats de l’exploration
de l’espace des paramètres.
Le modèle est capable de très bien reproduire les concentrations moyennes en certains CFC.
C’est par exemple le cas de la concentration en CFC12 dans les piézomètres MF2, F9, et F34. Pour
autant la transmissivité optimale pour obtenir ces résultats est toujours différente selon que l’on
considère tel ou tel piézomètre. Cela dépend également du type de CFC sélectionné, y compris
pour un même piézomètre. Seule la concentration en CFC113 dans MF2, F19 et F20 est resti-
tuée avec une erreur de 0 pptv pour une même gamme de transmissivité comprise entre 1 et
4.10−3 m2 /s. Pour ces mêmes forages, et toujours le CFC113, l’influence du coefficient d’emma-
gasinement est faible puisque quelle que soit sa valeur l’erreur minimale est proche de 0 pptv.
Pour ce paramètre, l’influence sur l’erreur minimale est en réalité faible pour la plupart des pié-
zomètres et des types de CFC. En effet, l’erreur minimale varie typiquement entre 0 et 2 pptv pour
176
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
F IGURE 7.1 – Exemple de carte des concentrations obtenues avec le modèle de Ploemeur. Les concentrations
en CFC113 sont en pptv ; les lignes en noire désignent les isopièzes. Malgré la stabilisation des concentrations
dans l’atmosphère au début des années 90, les concentrations modélisées dans l’aquifère continuent d’aug-
menter entre 1990 et 2010. À noter que les échelles sont différentes.
chaque forage en fonction du coefficient d’emmagasinement, alors qu’elle variait plutôt entre 0
et 10 pptv en fonction de la transmissivité. Comme les transmissivités optimales sont différentes
d’un piézomètre à l’autre, les critères englobant plusieurs piézomètres à la fois sont supérieurs
à 10 pptv et ne dépendent ni de la transmissivité ni de l’emmagasinement. La diffusivité n’appa-
rait pas mieux contrainte que ces derniers paramètres. Nos données moyennes en CFC dans les
forages ne semblent donc fournir aucune contrainte sur ces paramètres hydrodynamiques.
Enfin, les courbes de l’erreur minimale en fonction de la porosité délimitent assez nettement
la valeur optimale de ce dernier paramètre (figure 7.2). Pour rappel ces valeurs sont à moduler par
l’épaisseur de l’aquifère, ici imposée à 150 m. On relève par exemple pour le CFC12, une valeur
de porosité de 0,02 avec le puits F9, de 0,025 avec le puits F34 et de 0,07 avec le puits MF2. Ces
valeurs sont différentes pour le CFC113, avec une porosité de 0,015 pour F20, de 0,02 pour F19,
de 0,045 pour F34 et de 0,055 pour MF2. Pour le CFC11, elles sont de 0,03 et 0,035 respectivement
pour F9 et F20. Il n’y a pourtant pas de raisons au niveau du modèle pour que les valeurs optimales
soient différentes en fonction du type de CFC pour des mêmes puits. On peut invoquer le rôle de
la forme de la courbe d’entrée (qui est légèrement différent en fonction des CFC), l’incertitude de
mesure ou encore l’aspect non conservatif des CFC dans le milieu souterrain. Spatialement, on
est tenté de traiter séparément le puits MF2 qui échantillonne principalement la surface (30 m de
profondeur) et dont les valeurs de porosité obtenues sont un peu plus élevées. Finalement, ces
valeurs restent tout de même assez proches et cohérentes. L’évolution de l’erreur minimale en
fonction de la porosité (exemple sur la figure 7.2) montre cependant que le modèle ne peut pas
restituer correctement les concentrations au niveau de plusieurs forages en même temps.
D’après Leray et al. [2012], avec un modèle de flux en régime stationnaire, une porosité de
0,035-0,05 permettait de caler l’âge CFC12 au niveau du puits de pompage, en considérant une
épaisseur de 200 m. L’ordre de grandeur du produit de la porosité et de l’épaisseur de l’aquifère est
donc sensiblement identique malgré une donnée de calibration différente et un taux de recharge
moyen sensiblement plus grand (270 contre 200 mm/an). Globalement, on peut conclure que les
concentrations moyennes en CFC entre 2006 et 2014 indiquent que la porosité multipliée par
l’épaisseur du modèle évolue entre 2 et 11 m selon le puits de calibration, contre 5-10 m d’après
Leray et al. [2012]. En considérant que la surface de l’aquifère vaut le débit de pompage moyen di-
177
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
F IGURE 7.2 – Erreur minimale du modèle de transport des CFC12 en fonction de la porosité du modèle ho-
mogène. C’est en fait le paramètre "porosité fois épaisseur" de l’aquifère qui est important, une épaisseur de
150 m est ici considérée.
visé par un taux de recharge de 270 mm/an, le volume impliqué serait donc d’environ 7,5-41 Mm3 .
On peut s’interroger sur la signification de ces résultats. Les différences entre les piézomètres
sont-elles dues au fait qu’ils échantillonnent des compartiments différents ? Comment s’affranchir
ou exploiter la variabilité spatiale des concentrations en CFC ? Est-ce que les piézomètres échan-
tillonnés sont représentatifs et permettent d’en tirer des paramètres pertinents ? Nous proposons
deux autres structures de modèles pour apporter des éléments de réponse.
Modèle hétérogène
D’autres modèles conceptuels sont possibles. À titre d’exemple, un modèle avec une distri-
bution hétérogène aléatoire de la perméabilité a été implémenté. L’objectif est d’étudier dans
quelle mesure les structures souterraines peuvent influencer la variabilité spatiale et temporelle
des concentrations afin d’adopter la meilleure approche. Un exemple de résultat est proposé sur
la figure 7.3. Les concentrations au sein de l’aquifère semblent alors plus variables et plus élevées
dans les zones moins perméables. Les zones où les concentrations mesurées sont faibles semblent
les plus conductrices. En particulier, la chenalisation des écoulements et le mélange dans l’aqui-
fère semblent très complexes. Néanmoins, la variabilité spatiale des propriétés est clairement un
facteur clef de la variabilité spatiale des concentrations au sein de l’aquifère.
Une autre possibilité est de considérer un modèle à deux couches comme celui développé
dans la partie consacrée à la mesure des déformations en surface. Le modèle est donc divisé en
deux couches parallèles. La première de 40 m d’épaisseur est non-confinée tandis que la seconde,
plus transmissive, reste confinée. La figure 7.4, issue du modèle à un instant donné, illustre bien
une différence de comportement entre les deux couches mais aussi une variabilité beaucoup plus
marquée dans la seconde couche en comparaison au modèle à une couche (voir l’échelle de cou-
leur). La structuration verticale des écoulements associée à la structure des milieux hétérogènes
178
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
F IGURE 7.3 – Carte des concentrations en CFC obtenues avec un modèle hétérogène. Le logarithme de la per-
méabilité est défini par une loi normale et sa valeur est constante sur des carrés de 200 m de côté. À noter que
les échelles (en pptv) sont différentes.
apparait donc essentielle. D’après ces deux exemples, la variabilité spatiale est donc un frein ma-
jeur de l’utilisation de ces données au sein des modèles. En effet, hormis au droit du pompage qui
intègre le comportement général du système, les concentrations moyennes mesurées sont théori-
quement peu représentatives dans l’espace.
F IGURE 7.4 – Carte des concentrations en CFC obtenues avec un modèle à deux couches, à un instant donné.
En comparaison aux cartes précédentes, la gamme de concentrations dans l’aquifère est beaucoup plus im-
portante en particulier dans la couche inférieure. À noter que les échelles (en pptv) sont différentes.
Comportement temporel
Finalement, pour les différents cadres conceptuels, l’évolution temporelle des concentrations
modélisées en traceur atmosphérique varie peu quels que soient les puits considérés (figure 7.5).
Au vu des mesures, il ne semble pas possible de caractériser une structure spatiale (de la définir
pour un modèle physique) à partir des mesures de concentration en CFC. La variabilité spatiale
est plutôt mise en relation avec les autres marqueurs géochimiques comme la température, le
pH, la conductivité ou d’autres espèces chimiques comme les nitrates. L’évolution temporelle des
CFC d’origine atmosphérique est donc possiblement un traceur plus informatif, en particulier les
179
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
fluctuations saisonnières, mais elle nécessite un suivi soutenu. On retiendra de ces résultats préli-
minaires qu’en dépit de la variabilité spatiale, les concentrations moyennes observées apportent
une idée de l’ordre de grandeur du volume de l’aquifère.
F IGURE 7.5 – Évolution temporelle de la concentration en CFC113 (en pptv) dans les forages pour différents
modèles conceptuels, à pas annuel
Pour modéliser l’évolution de différents pôles chimiques au puits de pompage, nous avons
utilisé le modèle homogène à une couche décrit auparavant. Nous proposons de modéliser l’évo-
lution temporelle de la contribution au débit pompé d’une zone située autour du pompage. L’évo-
lution de cette contribution est ensuite comparée à celle du compartiment géochimique caracté-
risé par le puits F9. Pour ce faire, la concentration est imposée à une valeur de 1 à l’extérieur d’un
carré de taille variable centré sur le pompage comme le montre la figure 7.6. Dans ce carré com-
prenant la zone de pompage, la concentration est calculée par le modèle. L’approche permet ainsi
de mesurer au cours du temps la contribution respective des deux zones au pompage.
Ensuite, l’évolution temporelle de la concentration dans le pompage est comparée à celle du
pôle représenté par le puits F9 (figure 2.11). Au vu des problèmes de conceptualisation de ce ré-
servoir, nous ne comparons pas la valeur de la concentration, mais nous nous focalisons sur la
corrélation entre notre concentration normalisée et l’évolution de la contribution du pôle F9. Le
critère est alors défini par la corrélation entre les données temporelles modélisées et mesurées.
C’est donc principalement le temps de réponse du système hydrochimique qui est ciblé.
Une première exploration grossière de l’espace des paramètres a été effectuée sur la transmis-
sivité, l’emmagasinement, la porosité et l’extension latérale de la zone autour du pompage. Elle
montre que les paramètres, ainsi que la diffusivité, ne sont pas contraints par notre critère de cor-
rélation. Le critère optimal, c’est à dire la meilleure corrélation entre la concentration modélisée
et le pôle chimique F9, est quasiment constant en fonction de chaque paramètre et vaut 0,93.
180
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
F IGURE 7.6 – Définition d’une zone de concentration imposée sur le modèle de Ploemeur.
Dans une seconde exploration, la transmissivité et l’emmagasinement ont été fixés respecti-
vement à 1.10−3 m2 /s et 0,05 (définis par les données piézométriques). L’étude a alors porté plus
en détail sur l’impact de la porosité et de l’extension latérale du compartiment autour du puits.
Résultats
D’après cette seconde inversion, il apparait que la corrélation entre modèle et observations
contraint fortement le produit de la porosité et de l’extension latérale du compartiment géochi-
mique (figure 7.7). Pour être plus précis, le volume d’eau du compartiment est contraint, à savoir le
produit de la porosité et de l’aire du compartiment multiplié par l’épaisseur de l’aquifère. D’après
la figure 7.7 synthétisant les résultats, ce volume d’eau serait compris entre 1,3 et 5,5 Mm3 . Pour
rappel, le volume d’eau en circulation serait de 7,5-41 Mm3 d’après l’inversion des données en
CFC. Malheureusement, il est impossible de déterminer l’extension latérale du compartiment, ce
qui aurait permis d’estimer son volume de recharge par les pluies. En revanche, on déduit d’après
la figure 2.11 que la contribution de ce réservoir s’est stabilisée à environ 30 % du débit de pom-
page soit 0,31 M3 /an.
F IGURE 7.7 – Évolution de la corrélation entre les données observées et simulées en fonction du volume du
réservoir chimique proche du pompage.
181
CHAPITRE 7. INTÉGRATION D’UN MODÈLE DE TRANSPORT DE SOLUTÉ
À travers ces travaux préliminaires, nous avons donc essayé d’explorer le potentiel de la chi-
mie des eaux souterraines pour contraindre la géométrie de l’aquifère. Deux types de données
recueillies sur le site exploité de Ploemeur ont été pour cela utilisées. D’autres types de données
sont disponibles dans les bassins versants, d’autres traceurs environnementaux, qui peuvent être
échantillonnés soit en rivière ou bien dans des forages plus spatialisés.
Nos résultats montrent des contraintes essentiellement sur le volume de l’aquifère à partir
des concentrations moyennes en CFC dans les forages de Ploemeur. Dans le cas de la mesure
de l’évolution temporelle des pôles chimiques, la méconnaissance de la structure complexe de
l’aquifère est très limitante. Seul le volume des pôles chimiques se montre impactant. Peut-être
que l’absence de contraintes supplémentaires sur les paramètres hydrodynamiques vient de la
condition limite du pompage qui est assez particulière et du manque d’aspect transitoire dans
l’approche sur les CFC. En effet, d’après la résolution de l’équation 3.1 en régime stationnaire en
considérant un flux imposé en x = 0, il est possible d’évaluer la vitesse moyenne de l’eau au sein
du système en introduisant la porosité et l’épaisseur de l’aquifère dans l’équation. On s’aperçoit
alors que cette vitesse, et donc le temps de transit moyen dans l’aquifère, ne dépend pas de la
transmissivité avec une condition limite du type pompage.
Si on suit la méthode développée pour les différents types d’observation, les données géochi-
miques apportent en théorie des informations sur le volume des aquifères principalement. Leur
intégration dans les modèles physiques est délicate mais est donc nécessaire de ce point de vue
car aucune autre observation ne nous informera sur ces propriétés de volume. Or, elle sont essen-
tielles dans l’optique d’intégrer des processus de différentes natures dans les modèles, notamment
pour modéliser à la fois la quantité et la qualité de l’eau.
Á l’échelle pluriannuelle, les mesures géochimiques informent sur des propriétés différentes
notamment le volume d’eau disponible et sa vitesse de circulation réelle. On peut aussi suppo-
ser que les traceurs atmosphériques contiennent une information sur le taux de recharge si l’on
considère le modèle hydrogéologique fixé. Cependant, les modèles hydrochimiques demandent
une structure conceptuelle exigeante. À l’image de la piézométrie, les données moyennes sont fi-
nalement peu informatives au vu de l’hétérogénéité des sites d’études. Les tests réalisés montrent
que l’hétérogénéité des aquifères est un facteur très limitant pour interpréter les mesures géochi-
miques moyennes dans les forages. Il apparaît nécessaire d’intégrer des données géochimiques
transitoires aux modèles. En effet, le comportement temporel semble beaucoup plus intégrateur
et pertinent.
Les défis et enjeux de la représentation du transport de soluté sont donc importants. En outre,
le contenu explicatif des mesures géochimiques est encore très incertain. Hormis la complexité
des échanges bio-géochimiques et éventuellement de la modélisation de processus couplés, les
modèles chimiques sont très exigeants sur leur structure physique. Le volume d’eau dans l’aqui-
fère affecte la dilution des eaux de pluies et la porosité joue sur la surface d’échange avec la roche
et sur la vitesse de l’eau tout comme les paramètres hydrodynamiques. Les conditions limites sont
aussi essentielles puisqu’elles vont conditionner les masses de soluté entrantes et sortantes. Enfin,
la représentation des structures géologiques va prendre de l’importance du point de vue de la mo-
délisation mais aussi du point de vue de l’échantillonnage. En ce sens les données géochimiques
sont donc très, voire trop, informatives. Enfin, l’ajout du transport de soluté dans les modèles aug-
mente la complexité du problème d’inversion car il augmente le nombre de paramètres. Il n’en est
pas moins essentiel.
182
Chapitre 8
Sommaire
8.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
8.2 Paramètres et structure du modèle hydrogéologique . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
8.2.1 L’importance de la topographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184
8.2.2 Données de perméabilités et de porosités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
8.3 Sensibilité du modèle CWATM-ModFlow à la résolution et aux paramètres : com-
paraison avec les observations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
8.3.1 Test à petite échelle et impact de la résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
8.3.2 Comparaison entre simulations et observations sur le bassin du Rhin . . . . 194
8.3.3 Représentation et rôle des aquifères à travers les échelles . . . . . . . . . . . 201
8.4 Conclusions et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
8.4.1 Rôle des aquifères dans la variabilité spatiale et temporelle . . . . . . . . . . 206
8.4.2 Impact de la géologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 208
8.4.3 Optimisation du modèle couplé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
8.4.4 Perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210
183
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
8.1 Introduction
Le rôle des aquifères est important localement comme on l’a évoqué sur le site de Guidel. Ces
systèmes participent au cycle hydrologique en stockant l’eau et en la restituant aux rivières et en
partie à l’atmosphère lors de l’évapotranspiration. D’après les travaux sur les sites de Ploemeur et
Guidel, l’hétérogénéité des milieux souterrains est très importante pour expliquer la redistribution
des flux à cette échelle. Il semble cependant possible de paramétriser cette hétérogénéité à partir
de différentes observations permettant de mieux contraindre les modèles.
Ici, nous nous intéressons aux écoulements à une échelle au moins régionale. L’intérêt est
d’évaluer à quel point la compréhension acquise à l’échelle locale peut être généralisée. Á cette
échelle, le couplage des compartiments hydrologiques apparaît encore plus critique. Précédem-
ment, les aquifères étaient modélisés par des systèmes indépendants recevant et restituant de
l’eau. Dans cette partie, leur comportement influence l’évapotranspiration et la quantité d’eau
qu’ils reçoivent des systèmes de surface. La paramétrisation reste une étape critique. Á cette échelle,
la connaissance des milieux est moins fine et les observables disponibles sont assez différents. La
bonne représentation des aquifères n’en est pas moins nécessaire. En effet, il semble nécessaire de
rendre compte de la physique des écoulements souterrains afin de pouvoir évaluer les ressources,
d’intégrer des échanges latéraux et de mieux prendre en compte l’impact des niveaux piézomé-
triques sur les échanges entre la surface et la profondeur.
Nous proposons dans ce chapitre de travailler à l’échelle continentale en mettant à contribu-
tion le modèle CWATM de l’IIASA ainsi que le modèle couplé CWATM-ModFlow développé durant
cette thèse. Notre démarche porte dans un premier temps sur un modèle ModFlow 1D à grande
échelle. Dans un deuxième temps, le modèle couplé est testé sur une partie du bassin de la Mo-
selle. Enfin, les capacités des modèles CWATM avec et sans couplage sont comparées sur le bassin
du Rhin en se focalisant sur différents observables.
Dans cette partie, nous présentons les informations relatives aux structures contrôlant les
écoulements souterrains, la topographie et la géologie. Ce sont ces deux facteurs qui vont impac-
ter notre modèle hydrogéologique, les propriétés de la partie "sol" étant déjà relativement bien
documentées.
La topographie est un des principaux moteurs des écoulements souterrains avec le climat et la
géologie. Elle contrôle d’autant plus les flux et les niveaux d’eau que la perméabilité est faible. On
dispose d’une carte topographique (appelé MNT, ou "DEM" en anglais) du bassin du Rhin à 25 m
de résolution 1 . Cette résolution semble suffisante pour décrire le contrôle de la topographie sur
les flux souterrains. Cependant, il n’est pas possible de travailler à cette résolution sur un bassin
aussi grand au vu des capacités informatiques actuelles. Cela impliquerait en effet un modèle à
256.106 mailles.
Dès lors, il convient de chercher jusqu’à quelle résolution on peut produire une représentation
réaliste des aquifères. On s’attend à ce que cette résolution optimale dépende de la structure de
la topographie, des propriétés hydrodynamiques et du climat de la région étudiée [Haitjema and
Mitchell-Bruker, 2005]. La dégradation de la résolution atténue la variabilité du relief. On peut
1. https ://www.eea.europa.eu/data-and-maps/data/copernicus-land-monitoring-service-eu-dem
184
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
supposer que cela a peu d’impact en plaine, en revanche cela peut aboutir à la suppression d’élé-
ments essentiels comme les vallées voire les montagnes si la résolution est vraiment très basse.
Plus le climat est sec et la perméabilité du milieu grande, plus les niveaux piézométriques sont
bas, donc moins contrôlés par les gradients topographiques locaux. Il est également important de
souligner que les écoulements de nappe dépendent de l’amont (recharge, flux latéraux) mais aussi
des conditions limites en aval. Dans les lignes suivantes, nous nous focalisons sur le rôle critique
de la résolution de la topographie.
La démarche consiste à prendre une section est-ouest du Rhin de 450 km de long (voir la loca-
lisation de la coupe sur la figure 8.1) et y modéliser un écoulement souterrain en une dimension
en régime stationnaire. On utilisera un modèle ModFlow à une couche de transmissivité homo-
gène. Les flux sur les extrémités est et ouest du modèle sont nuls tout comme les flux verticaux
au niveau de la limite inférieure. Au niveau de la topographie, on utilisera le package "Drain" de
ModFlow permettant à l’aquifère d’évacuer le trop plein par débordement au droit des mailles où
les charges hydrauliques atteignent la surface. L’intérêt est de pouvoir tester le comportement de
la piézométrie modélisée sur une grande gamme de résolutions. À partir du MNT à 25 m, la ré-
solution est dégradée jusqu’à 15 km. Les critères choisis pour comparer les modèles à différentes
résolutions sont la distribution des flux souterrains, leur moyenne et la surface de zones humides,
ces dernières étant définies par les zones où le niveau piézométrique est à moins d’un mètre de
profondeur.
Dans la littérature, on ne trouve pas de travaux sur l’influence de la résolution de la topo-
graphie sur une telle gamme de valeurs. Ce thème est plus étudié à travers les modèles hydrolo-
giques de subsurface dont on trouvera une synthèse dans Shrestha et al. [2015]. Notre test prouve
pourtant que le réalisme des modèles hydrogéologiques décroit rapidement lorsque la résolution
est dégradée. La figure 8.1 illustre l’évolution de la topographie et du niveau piézométrique mo-
délisé avec ModFlow en fonction de la résolution choisie. À 25 m de résolution, les niveaux pié-
zométriques intersectent la topographie localement dans les fonds de vallées (en haut sur la fi-
gure 8.1). L’épaisseur non saturée est importante et très variable spatialement. Les minimums
topographiques constituent une condition limite fondamentale. De plus, les connexions entre
l’aquifère et la surface sont localisées dans ces minimums topographiques. En dégradant la ré-
solution, (à 1 et 5 km sur la figure 8.1), la variabilité à petite échelle du relief est lissée et implique
des niveaux piézométriques moins profonds voir superposés à la surface.
Il est évident que la dégradation de la résolution lisse la topographie, par conséquent les gra-
dients topographiques diminuent. Or, d’après Haitjema and Mitchell-Bruker [2005] et Bresciani
et al. [2016], le contrôle par la topographie est inversement proportionnel à ces gradients. Autre-
ment dit, le lissage de la topographie mène à une réduction de la profondeur des nappes et donc
à des interactions plus fortes avec la surface.
Résultats
Cette diminution de la profondeur des nappes peut être quantifiée par l’évolution du pourcen-
tage surfacique de zones humides en fonction de la résolution. En testant des résolutions com-
prises entre 25 m et 15 km, on compte trois phases quelle que soit la transmissivité du modèle
(en haut sur la figure 8.2. Entre 25 et 100 m de résolution, le pourcentage de zones humides évolue
peu, il vaut 9 % pour une transmissivité de 864 m2 /jr et 60 % pour une transmissivité de 8,64 m2 /jr,
ce qui illustre aussi l’impact de la transmissivité. Passée cette résolution, le réalisme du modèle dé-
croit brutalement jusqu’à ce que le système soit complètement saturé. On note que la résolution
à partir de laquelle le modèle devient entièrement saturé dépend beaucoup de la transmissivité.
En conclusion, pour des gammes de transmissivités usuelles, la résolution critique de notre mo-
185
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
dèle homogène 1D en régime permanent se situe vers 100 m si l’on se focalise sur la profondeur
des niveaux piézométriques qui constituent une variable critique pour les interactions entre les
aquifères et la surface.
186
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.2 – Évolution de la proportion de zones humides (en haut) et des flux latéraux modélisés (en bas)
en fonction de la résolution. Les flux latéraux sont représentés à partir de leur moyenne.
La dégradation de la résolution impacte également les flux latéraux mais à partir d’une réso-
lution plus basse (en bas sur la figure 8.2). La diminution de la profondeur de nappe engendre en
effet une réduction des flux souterrains. La raison que l’on peut invoquer est là encore la diminu-
tion des gradients topographiques. Étant donné que les niveaux sont de plus en plus conditionnés
par la topographie au fur et à mesure que la résolution se dégrade, les gradients hydrauliques
s’apparentent de plus en plus aux gradients topographiques. Or, le flux latéral est égal à la trans-
missivité multipliée par le gradient hydraulique. Pour décrire l’évolution des flux latéraux, on dis-
tingue cette fois-ci deux phases. Le flux moyen reste constant jusqu’à une résolution critique puis
il chute brusquement. Cette résolution critique dépend de la transmissivité du modèle : environ
500 m pour T = 8,64 m2 /jr, 3 km pour T = 86,4 m2 /jr et peu évaluable pour T = 864 m2 /jr. Le choix
de la résolution est donc déterminant et il devient assez clair qu’à large échelle les niveaux piézo-
métriques modélisés sont peu réalistes. Il apparaît difficile de compenser la basse résolution en
augmentant la transmissivité car cette dernière n’a pas le même impact sur les flux latéraux et sur
la connexion avec la surface. Cette solution peut néanmoins sembler envisageable en terme de
flux moyen. Il faudrait alors comparer la distribution spatiale de ces flux latéraux, et non unique-
ment leur moyenne, pour confirmer que la représentation est équivalente.
187
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
La résolution à partir de laquelle la représentation des aquifères devient critique dépend donc
en partie de la transmissivité. Nous avons calculé la contribution des flux latéraux Qi n et Qout au
bilan de masse de bassins de différentes tailles de la même manière que le proposent Krakauer
et al. [2014]. Nous proposons en complément d’évaluer dans quelles mesures la transmissivité
modifie cette contribution. Pour cela, le modèle 1D a été lancé à 25 m de résolution pour diffé-
rentes valeurs de transmissivité en considérant une recharge de 280 mm/an. Nous avons ensuite
calculé les échanges souterrains nets au niveau d’une région donnée (Qi n − Qout sont les flux sou-
terrains aux limites est et ouest de chaque région). La contribution des flux latéraux est alors cal-
culée comme le ratio des échanges souterrains sur le volume de recharge appliqué à cette région
(équation 8.1). Ce calcul est effectué pour toutes les autres régions du modèle, ensuite la moyenne
est relevée, et puis pour différentes tailles de régions ("basin scale" sur la figure 8.3).
Qi n − Qout
Di schar g e = Rechar g e + Qi n − Qout ⇒ GWcont r i b = | | (8.1)
Rechar g e
Assez logiquement, les résultats montrent que l’influence des aquifères diminue avec l’échelle
et augmente avec la transmissivité (figure 8.3). À petite échelle, les échanges souterrains nets
moyens évoluent de 40 à 160 % du volume de recharge pour une transmissivité qui évolue entre
1.10−4 m2 /s et 1.10−2 m2 /s. Les valeurs supérieures à 100 % signifient que les échanges souterrains
nets peuvent être supérieurs au volume de recharge, en moyenne. À partir d’une échelle de 10 km,
la contribution moyenne des aquifères au bilan hydrologique devient faible (environ 10 %) pour
des transmissivités inférieures à 5.10−4 m2 /s. Elle reste importante pour des échelles de plusieurs
dizaines de kilomètres si la transmissivité est supérieure à 5.10−4 m2 /s. Ces conclusions restent
néanmoins à moduler étant donné le caractère 1D et stationnaire du modèle. Une hypothèse forte
et peu réaliste de ce modèle est aussi l’homogénéité des propriétés. Dans leurs travaux, Krakauer
et al. [2014] étudiaient un modèle mondial 2D intégrant des transmissivités fonction des types de
roches [Gleeson et al., 2014] et des taux de recharge variables spatialement obtenus à partir de
modèles hydrologiques globaux. On peut supposer que le taux de recharge aurait eu un impact
inverse de celui de la transmissivité dans notre test, mais dans des proportions différentes.
F IGURE 8.3 – Contribution des aquifères au bilan hydrologique en fonction de l’échelle et de la transmissivité.
La contribution est égale au ratio de la différence entre les flux souterrains entrants et sortants sur le taux de
recharge des bassins ; la résolution du modèle 1D est de 25 m, le taux de recharge appliqué est de 280 mm/an.
188
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
Les propriétés hydrodynamiques des aquifères sont le deuxième facteur contrôlant les flux
souterrains. Comme vu précédemment, leur paramétrisation dans les modèles à grande échelle
est sans doute dépendante du choix de la résolution, ce choix aura des conséquences en terme de
représentation des flux latéraux et des interactions entre aquifère et surface. De plus, nous avons
également démontré que la perméabilité des terrains avait un impact très fort sur les niveaux pié-
zométriques mais surtout sur la redistribution de l’eau en surface. La perméabilité (ou la trans-
missivité plus généralement) contrôle le bilan hydrologique avec une importance qui décroît en
fonction de l’échelle d’étude. Ainsi, il semble important d’informer au préalable les modèles sur
la variabilité spatiale des propriétés hydrodynamiques. Malheureusement, ces données à grande
échelle ne sont pas rassemblées dans une base de données bien que les aquifères dans la région
du Rhin soient assez bien caractérisés.
Nous disposons néanmoins d’une cartographie de la géologie de la région fournissant déjà une
idée de la variabilité spatiale des propriétés hydrodynamiques des aquifères. En effet, une carte
mondiale des perméabilités et des porosités à 10 km de résolution a été créée sur la base de cartes
géologiques et de valeurs typiques attribuées à chaque lithologie [Gleeson et al., 2014] (figure 8.4).
Ces informations sont à prendre avec précaution. Il est vrai qu’elles contiennent une information
sur la variabilité spatiale des paramètres. Cependant, l’extrapolation des paramètres en fonction
des grands types de roche laisse place à une incertitude de plusieurs ordres de grandeurs (pour la
perméabilité) du fait des gammes de valeurs rencontrées pour des mêmes types de roche [Gleeson
et al., 2014]. De même, la résolution de ces cartes n’est peut-être pas encore suffisante en raison de
l’importance de bien représenter les processus à petite échelle. Enfin, ces données ne fournissent
pas d’informations sur l’épaisseur d’aquifère à considérer et par conséquent sur la transmissivité
à renseigner. Ainsi, la capacité de ces mailles d’environ 100 km2 à transmettre l’eau n’est pas com-
plètement intégrée puisqu’il manque un facteur "épaisseur" pouvant varier entre 10 et plusieurs
centaines de mètres.
En conclusion, on ne s’attend pas à ce que l’hétérogénéité au sein des mêmes lithologies soit
déterminante à cette échelle. En revanche, la variabilité des propriétés liée à la géologie a sans
doute une grande importance pour bien restituer les flux latéraux et la profondeur des niveaux
piézométriques qui contrôle les interactions avec la surface. Les cartes de propriétés basées sur
la géologie (figure 8.4) sont donc un outil qui pourrait s’avérer utile pour la paramétrisation du
modèle.
F IGURE 8.4 – Cartes des perméabilités en [m/s] (à gauche) (ou conductivités hydrauliques) et des porosités (à
droite) sur le bassin du Rhin, extraites de GLHYMPS [Gleeson et al., 2014].
189
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
L’objectif de cette partie est de synthétiser et mettre en avant quelques résultats issus des si-
mulations du modèle couplé CWATM-ModFlow. Dans un premier temps, nous regarderons l’effet
de la résolution qui, comme observé précédemment, est un paramètre crucial. Dans un second
temps, nous mettrons le modèle à l’épreuve des données observées sur le bassin du Rhin. Enfin,
nous discuterons de la représentation des aquifères à travers les données satellites MODIS.
Quelques lignes auparavant, nous avons démontré à quel point la résolution des modèles hy-
drogéologiques à grande échelle semble critique. En particulier à partir de l’échelle régionale, la
mémoire informatique et le temps de calcul restreignent cette résolution à des valeurs généra-
lement supérieures au kilomètre (pour un ordinateur portable standard). C’est également le cas
pour la modélisation du bassin du Rhin. Nous avons pu tester une gamme de résolution comprise
entre 1 et 4 km pour le modèle aquifère qui a été couplé à CWATM.
Comme il apparaissait que la résolution minimale de 1 km n’était pas suffisante pour contrôler
la bonne représentation des processus d’écoulement à l’échelle locale, il a été décidé d’implémen-
ter le modèle sur une zone d’environ 90*60 km afin de tester le modèle couplé CWATM-ModFlow
à une résolution de 200 m. L’objectif est de comparer les résultats en fonction de la résolution et
d’évaluer l’aptitude de notre nouveau modèle à représenter la physique des processus. De ma-
nière générale, il est intéressant d’essayer de comprendre comment la représentation du milieu
souterrain, en terme de résolution et de paramètres, affecte le modèle.
Contexte
La simulation à petite échelle a été effectuée sur le versant ouest du Rhin, au niveau de Metz
(Fr.) sur le bassin de la Moselle. La zone est caractérisée par une topographie allant de 150 à
450 mNGF et par un cours d’eau principal de direction nord-sud, la Moselle (figure 8.5). En moyenne,
l’écoulement sur le bassin de la Moselle est de l’ordre de 400 mm/an. Ce débit est fortement as-
socié aux importantes précipitations sur les zones montagneuses qui alimentent notamment la
nappe des grès vosgiens. Notre zone d’étude est, elle, composée essentiellement de roches cal-
caires et d’argiles. Il pleut en moyenne 750 mm/an à Metz au centre de notre zone d’étude. En
comparant, l’évolution du débit de la Moselle entre Nancy (à Custines plus précisément), à l’ex-
trémité sud de la zone, et Thionville, à l’extrémité nord, on obtient un écoulement de 248 mm/an.
Sur la rivière de la Seille, qui rejoint la Moselle à Metz, on note une lame d’eau équivalente de
246 mm/an.
Configuration du modèle
Après une initialisation consistant à faire tourner le modèle en régime stationnaire, puis en
régime transitoire durant quelques années (cf. chapitre de présentation des modèles), la simu-
lation a été effectuée de 2003 à 2008 au pas journalier. Pour le premier test, les paramètres hy-
drodynamiques choisis sont homogènes avec une transmissivité de 3.10−3 m2 /s et un coefficient
d’emmagasinement de 0,05. Vu la résolution du modèle (200 m), les mailles rivières sont totale-
ment identifiées au sein de ModFlow. La totalité des flux ascendants au droit des mailles dites de
rivières sera donc envoyée au débit de base ("baseflow") des rivières dans CWATM. Les flux au
190
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.5 – Aperçu du modèle hydrogéologique sur le petit bassin étudié. Le modèle testé est constitué d’une
partie "sol et surface" gérée par CWATM à une résolution de 7-8 km. En dessous des couches de sol, nous avons
développé un modèle d’aquifère dont la limite supérieure est égale à la surface topographique (représentée ici
à une résolution de 200 m) moins l’épaisseur de sol.
droit des autres mailles seront eux comptabilisés comme de la remontée capillaire alimentant les
mailles "sols" de CWATM (influant ainsi l’humidité des sols et par conséquent le ruissellement par
débordement, l’évapotranspiration et la recharge).
En moyenne annuelle, et à l’échelle de la zone d’étude, les flux obtenus sont satisfaisants et
correspondent à des valeurs auxquelles on peut s’attendre (tableau 8.1). On obtient un écoulement
de 225 mm/an et une recharge nette des systèmes aquifères ("GW Recharge" moins "Capillary
Rise") de 120 mm/an (tableau 8.1). Comme notre zone d’étude n’intègre pas la totalité du bassin
versant amont de la Moselle, nous comparons notre valeur à l’écoulement moyen entre Nancy et
Metz et au débit de la Seille dont le bassin hydrographique est entièrement compris dans la zone
modélisée (figure 8.5). L’écoulement moyen simulé (ruissellement + débit de base) est donc du
même ordre de grandeur que les observations. Cela permet de valider au premier ordre le modèle,
ce dernier pourrait ensuite être affiné par une calibration des paramètres hydrodynamiques.
Le débit simulé est facile à comparer aux observations. Ce n’est pas le cas des flux verticaux
comme la recharge des aquifères et la remontée capillaire. Il est en effet impossible de mesurer ces
flux sur des échelles au moins pluri-kilométriques. D’après le modèle, la recharge estimée repré-
sente 170 mm/an. Elle se redistribue en remontées capillaires (50 mm/an) et en contribution au
débit des rivières (150 mm/an, soit ∼ 65 % du débit total). Cependant, les variations interanuelles
de stock dans la partie aquifère semblent non négligeables, le stock a diminué de 30 mm/an sur
notre période d’étude (2003-2008). Il est important de préciser que cette baisse de stock ne semble
pas liée aux conditions initiales. En revanche, d’après le tableau 8.1, on note que le bilan de masse
du bassin n’est pas correct. Le test a donc permis de déceler une erreur dans l’implémentation du
couplage entre ModFlow et CWATM. Cependant, l’interprétation des résultats et des tendances
reste possible. Le bilan de la partie souterraine demeure quant à lui correct. Une nouvelle version
du modèle, corrigée de cette erreur, sera présentée en perspectives.
Une autre simulation a été effectuée avec une résolution de 2 km. D’après les résultats, les
échangent verticaux s’intensifient quand la résolution se dégrade (tableau 8.1). La recharge ("GW
191
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
TABLEAU 8.1 – Flux moyens [mm/yr ] sur une partie de la Moselle d’après le modèle CWATM-ModFlow (pé-
riode 2003-2008).
Recharge") passe par exemple de 170 à 600 mm/an. Comme expliqué précédemment avec une
approche 1D, les niveaux piézométriques sont plus élevés et affleurent lorsque la résolution se
dégrade. Or dans notre modèle, le processus de percolation de l’eau du sol vers la nappe est in-
dépendant des niveaux piézométriques. Il en résulte une augmentation de la recharge à cause
de l’augmentation de la remontée capillaire et inversement. En revanche, la recharge nette du
compartiment aquifère ("GW Recharge" moins "Capillary Rise") est modifiée de façon différente
puisqu’elle diminue en passant de 120 à 60 mm/an. En conséquence, les remontées capillaires
sont augmentées significativement pour absorber la recharge. Cela affecte également légèrement
l’évapotranspiration totale du bassin.
En regardant de plus près, les contenus en eau dans les sols augmentent légèrement en fonc-
tion de la résolution et montrent toujours une forte saisonnalité dont probablement une limitation
importante de la disponibilité en eau durant l’été. Les fluctuations annuelles de l’évapotranspira-
tion sont également très proches entre les deux résolutions testées. Logiquement, l’évapotrans-
piration augmente durant les périodes de déficit hydrique en été avec une résolution de 2 km à
cause de la proximité de la nappe et des remontées capillaires importantes. Cependant, elle n’évo-
lue quasiment pas durant les autres saisons. Le débit de base subit quant à lui une diminution
suite à cette redistribution des flux puisqu’entre 200 m et 2 km de résolution celui-ci passe de 150
à 100 mm/an (le ruissellement a lui augmenté de 78 à 85 mm/an du fait de la plus grande humidité
des sols).
192
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.6 – Comparaison entre les niveaux piézométriques moyens mesurés et modélisés sur la zone test.
Les paramètres de l’aquifère sont les mêmes en tout point : T=3.10−3 m2 /s et S=0,05. La résolution de la to-
pographie appliquée à ModFlow vaut 200 m (en noir) ou 2000 m (en rouge). La droite bleue représente le
modèle parfait. En haut : niveau piézométrique par rapport au niveau marin. En bas : profondeur du niveau
piézométrique par rapport à la surface.
193
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.7 – Carte piézométrique moyenne modélisée sur la zone test. Les paramètres de l’aquifère sont les
mêmes en tout point : T=3.10−3 m2 /s et S=0,05. À gauche : résultats obtenus avec une résolution de 200 m
pour la partie ModFlow. À droite : résultats obtenus avec une résolution de 2000 m pour la partie ModFlow.
Démarche
D’après la partie précédente, à une échelle intermédiaire, la résolution apparaît bien comme
un paramètre clef pour la modélisation hydrologique à grande échelle. Nous avons vu que la ré-
solution du modèle hydrogéologique dégrade fortement le réalisme des niveaux piézométriques
et par conséquent des échanges verticaux. Les débits de base des rivières fournis par les aquifères
sont éventuellement impactés par cette modification des échanges souterrains. En particulier, il
semble que les aquifères participent plus à la disponibilité en eau dans les sols lorsque la résolu-
tion est dégradée.
À l’échelle du bassin du Rhin, nous nous appuierons sur quelques simulations du modèle
CWATM-ModFlow. À noter que le modèle initial est déjà calibré sur le débit à l’exutoire, il est donc
difficile de valider les résultats suite à l’ajout du compartiment aquifère. Il est en revanche possible
d’en étudier l’impact. La résolution de la partie hydrogéologique sera fixée à 2 ou 4 km. Plusieurs
paramétrisations seront testées notamment à partir des cartes de propriétés disponibles (voir fi-
gure 8.4). L’objectif est d’évaluer l’impact de l’ajout des flux latéraux au modèle hydrologique ini-
tial en terme de représentation des observations puis d’estimer à quel point la représentation des
aquifères est critique.
Les premières comparaisons portent sur les flux moyens à l’échelle de tout le bassin. Le débit
mesuré à l’exutoire du bassin à Lobith, à la frontière entre les Pays-Bas et l’Allemagne, est équi-
valent à une lame d’eau d’environ 400 mm/an. Des exemples de résultats de simulations sont
donnés sur le tableau 8.2. L’écoulement total modélisé (380-440 mm/an) est donc de l’ordre de
grandeur du débit moyen mesuré. On note cependant que les flux de recharge et de remontée
194
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
capillaire sont très élevés comme pour notre précédent test à petite échelle bien que la recharge
nette soit réaliste (110-240 mm/an).
À partir de quelques tests (tableau 8.2), on peut conclure que les flux globaux moyens, que
sont l’évapotranspiration et le débit à l’exutoire, semblent relativement peu sensibles aux para-
mètres d’entrées et à leur distribution spatiale. De plus, les valeurs obtenues sont plutôt proches
de celles estimées par le modèle CWATM sans l’ajout du modèle hydrogéologique. On note que
la contribution du compartiment aquifère au débit de rivière est sensiblement modifiée entre une
transmissivité homogène de 2.10−3 m2 /s et de 8.10−3 m2 /s, elle passe en effet de 240 à 270 mm/an.
En revanche, la résolution du modèle aquifère et l’aire minimale de drainage imposée (pour rap-
pel il s’agit du paramètre définissant la densité du réseau de rivières) influencent fortement les
échanges verticaux et la contribution des aquifères au débit de base. Il en résulte également une
modification du ruissellement en surface.
TABLEAU 8.2 – Flux moyens [mm/yr ] obtenus sur le bassin du Rhin d’après le modèle CWATM-ModFlow pour
la période 2004-2009. Le coefficient d’emmagasinement vaut 0,05 pour toutes les simulations sauf pour le cas
"GLHYMPS" où les paramètres varient dans l’espace.
À de telles résolutions, les niveaux piézométriques sont élevés et interagissent avec le sol sur la
majorité du bassin. Les simulations à 2 km de résolution montrent que la nappe reste affleurante
dans la plupart des cellules du modèle. Dans cette situation, il faut noter que la définition du ré-
seau hydrographique drainant l’aquifère est très importante. En effet, initialement nous considé-
rions que le réseau de rivières calculé à partir du MNT à 200 m était assez dense avec une aire mi-
nimale de drainage imposée à 0,2 km2 (tableau 8.2). Deux autres valeurs ont été testées pour cette
aire minimale : 0,6 et 2 km2 . Les simulations montrent que ce paramètre ne change pas significati-
vement le comportement de l’aquifère qui reste dans tous les cas trop saturé. En revanche, plus le
réseau est dense et plus l’eau souterraine est attribuée au débit de base des rivières, au détriment
de la remontée capillaire dans les sols. Cette redistribution est significative puisque pour nos deux
derniers tests (tableau 8.2), la recharge de l’aquifère atteint respectivement 1130 et 1450 mm/an
(la recharge nette reste respectivement à 170 et 130 mm/an) alors que l’on s’attendait à une dimi-
nution des échanges avec l’amélioration de la résolution. Globalement, l’augmentation de l’aire
195
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
Il est ici question de comparer le bilan de masse du bassin à un pas de 10 jours et de 1 mois à
partir des données issues de GRACE. Ensuite, nous nous intéressons à l’évapotranspiration men-
suelle à partir des données satellites MODIS. À l’échelle du bassin, l’ajout du modèle hydrogéo-
logique ne semble pas modifier la dynamique des flux moyens en comparaison au modèle initial
(voir figure 8.8). De manière générale, il ressort une moins bonne description des observations à
cette échelle, néanmoins, la paramétrisation initiale de CWATM pourrait jouer un rôle important.
De plus, nous relevons quelques différences mentionnées dans les paragraphes suivants.
Le signal GRACE au pas mensuel est à peu près synchrone avec la mesure des variations de
masse modélisées avec ou sans le modèle hydrogéologique (en haut sur la figure 8.8). Il est à no-
ter que le modèle couplé semble apporter une variabilité interannuelle plus importante due au
stock d’eau dans le compartiment aquifère. Les variations de masse sont donc informatives à ces
échelles de temps. Les amplitudes sont également respectées compte tenu de l’incertitude qui
pèse sur ces estimations issues de l’inversion de l’attraction terrestre mesurée par satellite. Il n’est
pas surprenant que le modèle CWATM initial restitue déjà à peu près ces variations de masse car
il est calibré sur le débit de sortie alors que l’évapotranspiration à l’échelle du bassin reste peu
influençable car contrôlée principalement par le climat. Comme le modèle considère les précipi-
tations en entrée et qu’il restitue assez bien le débit du Rhin en sortie, par déduction le terme de
variation de masses plus d’évapotranspiration doit être bien contraint.
La restitution du signal GRACE au pas de 10 jours est plus contrastée (non illustrée ici). Mal-
gré le signal annuel toujours bien visible, on remarque des fluctuations d’amplitudes importantes
à des périodes plus petites. Ces fluctuations s’apparentent à un bruit, mais au vu de certaines
correspondances avec les fluctuations modélisées il est envisageable qu’elles contiennent un si-
gnal hydrologique. On ne peut cependant pas conclure pour l’instant et la question demeure. Les
variations de masse du bassin sont-elles réellement aussi variables dans le temps malgré un com-
portement mensuel assez lisse ? On note que les variations de masse au pas de 10 jours, comme
au pas mensuel, sont assez proches entre CWATM et CWATM-ModFlow.
Enfin, d’après le graphique du milieu sur la figure 8.8, l’évapotranspiration est surestimée pen-
dant les périodes sèches. Cependant, si on parvient à abaisser ce flux, on augmentera nécessaire-
ment le débit moyen à l’exutoire qui sera alors à son tour surestimé. En revanche, on a vu que les
estimations étaient sujettes à une certaine incertitude (en bas sur la figure 2.16) et que l’évapo-
transpiration selon MODIS semblait trop faible en été comparée aux autres observations permet-
tant de boucler le bilan hydrologique du bassin : les précipitations, le débit à Lobith et GRACE.
Nos simulations semblent donc confirmer que l’estimation de l’évapotranspiration selon MODIS
est biaisée, notamment si l’on compare l’année 2007 (figure 8.8).
Les chroniques temporelles de débit ont été contrôlées au niveau de trois stations de jaugeage
sur le Rhin : à Lobith (à l’exutoire), à Maxau (au Nord de l’Alsace) et à Rheinfelden (en Suisse). La
196
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.8 – Comparaison des observations et des modèles CWATM et CWATM-ModFlow à l’échelle du bas-
sin du Rhin. La résolution de ModFlow vaut 4 km ; la transmissivité et le coefficient d’emmagasinement de
l’aquifère valent respectivement 8.10−3 m2 /s et 0,05. Les courbes magenta sont obtenues en utilisant les cartes
GLHYMPS pour les deux paramètres. En haut : signal GRACE au pas mensuel (données d’après CSR). Au mi-
lieu : évapotranspiration au pas mensuel (d’après MODIS). En bas : débit journalier à Lobith (d’après GRDC).
197
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
calibration sur le débit à l’exutoire ne garantit pas une bonne représentation des débits en amont.
On s’attend en particulier à ce que le modèle soit de moins en moins apte à restituer les débits
de rivière mesurés lorsque l’aire drainée par ces rivières diminue. C’est à dire lorsque l’échelle
d’observation rétrécit, pour la bonne raison que la contribution relative des échanges souterrains
augmente. En effet, les débits sont moins bien restitués à Maxau et Rheinfelden (non illustrés ici)
qu’à Lobith (en bas sur la figure 8.8) malgré un comportement temporel plutôt correct. Le rôle
des paramètres sur les débits est difficile à quantifier, notamment en comparant la restitution des
débits en fonction de la transmissivité. À partir de quelques modèles à transmissivité constante
et à paramètres variables (cartes de perméabilité et de porosité sur la figure 8.4), on constate que
l’amélioration du débit modélisé à certaines périodes se fait généralement au détriment d’autres
périodes. Dans le cas homogène, l’augmentation de la transmissivité rehausse les débits parti-
culièrement en saison sèche, probablement car les niveaux piézométriques deviennent plus bas
induisant ainsi une contribution plus faible à l’évapotranspiration. Enfin, l’ajout du modèle hydro-
géologique à CWATM ne semble pas modifier la temporalité de ces débits (en bas sur la figure 8.8),
y compris à Maxau et Rheinfelden.
L’évolution du débit moyen le long du Rhin est plus marquante. Pour chaque simulation, le
débit moyen sur la période d’étude a été comparé à celui mesuré au niveau des stations présentées
sur la figure 2.15. Cette approche offre la possibilité de visualiser la redistribution spatiale des flux
avec le modèle CWATM et le modèle couplé CWATM-ModFlow, en fonction de l’échelle et des
paramètres. Trois cas illustrant l’impact de la transmissivité sont présentés sur la figure 8.9. La
résolution de ModFlow est fixée à 4 km et le réseau hydrographique imposé est très dense (aire
minimale de drainage de 0,2 km2 ). Pour les deux premiers cas, la transmissivité de l’aquifère vaut
respectivement 2.10−3 et 8.10−3 m2 /s sur tout le modèle et la porosité vaut 0,05. Pour le troisième,
les cartes de perméabilité et de porosité présentées précédemment ont été utilisées (figure 8.4),
les transmissivités et porosités moyennes valant respectivement 4, 2.10−3 m2 /s et 0,15.
F IGURE 8.9 – Évolution du débit moyen du Rhin, des Alpes aux Pays-Bas. Comparaison entre les observations,
le modèle CWATM et le modèle couplé CWATM-ModFlow. Pour ce dernier, les résultats de trois simulations,
à une résolution de 4 km, sont présentés ; l’aquifère est homogène dans les deux premiers cas ; dans le troi-
sième, les paramètres varient spatialement et valent en moyenne 4, 2.10−3 m2 /s et 0,15 respectivement pour la
transmissivité et la porosité.
D’après ces simulations, le débit du Rhin est assez sensible à la représentation des systèmes
aquifères. On voit sur la figure 8.9 que le débit est plutôt bien modélisé dans la partie alpine et
dans la partie finale du bassin. Dans la partie centrale, le débit est sous-estimé d’une dizaine de
198
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
pourcents lorsqu’on utilise le modèle CWATM seul. L’ajout du modèle d’aquifère n’améliore pas
forcément les choses. On voit que pour une transmissivité homogène de 2.10−3 m2 /s, ou pour le
modèle hétérogène, le comportement est à peu près identique dans la partie centrale alors qu’il
sous-estime à nouveau le débit dans la partie finale. L’évapotranspiration doit donc être suresti-
mée dans la majeure partie du bassin (au milieu sur la figure 8.8).
Il n’y a pas de flux latéraux dans le cas du modèle CWATM, donc les écarts entre l’observation
et la modélisation peuvent être expliqués plus facilement. En sortie des Alpes, le débit modélisé
est déjà en dessous des observations, on note un déficit d’environ 20 % à la station de Rekingen (fi-
gure 8.9). À la station suivante, à Rheinfelden, le déficit passe à 250 m3 /s, soit environ 25 % du dé-
bit. Ensuite ce volume manquant reste plus ou moins constant jusqu’à Dusseldorf, puis le modèle
redevient relativement proche des observations. On peut donc supposer que le modèle CWATM
(pour rappel, après une calibration des paramètres basée sur le débit à Lobith) surestime l’évapo-
transpiration dans la partie amont du Rhin. Le déficit de débit étant comblé dans la partie finale.
Il est cependant difficile de conclure sur une échelle de temps aussi petite (nous avons choisi une
période courte, de 6 ans, afin de pouvoir effectuer un maximum de test) car, comme mentionnée
précédemment, le modèle montre une variabilité interannuelle du stock d’eau dans l’aquifère.
Dans le cas du modèle couplé, la version homogène avec une transmissivité de 8.10−3 m2 /s
donne le meilleur résultat. On sous-estime alors légèrement le débit du Rhin dans sa partie cen-
trale, avant de le surestimer à l’exutoire au détriment de l’évapotranspiration. Malgré cela, il reste
difficile d’évaluer si ces écarts sur le débit sont liés à une mauvaise distribution des flux latéraux
ou bien une mauvaise estimation de l’évapotranspiration. Néanmoins, ces observations illustrent
la sensibilité aux échanges souterrains de la redistribution interne des flux au sein du bassin. Au
contraire, actuellement sans inversion du modèle couplé, les flux globaux moyens et transitoires
se montrent peu sensibles.
Le point qui va maintenant nous intéresser est la comparaison entre les niveaux piézomé-
triques simulés et ceux observés. L’ajout d’un modèle d’écoulement souterrain n’a pas unique-
ment vocation à mieux représenter les interactions avec la subsurface mais il a aussi pour objectif
d’évaluer les réserves d’eaux souterraines. Dans ce cadre, l’évolution des niveaux dans le temps
est une observation intéressante car elle est directement corrélée à l’évolution de la ressource. On
comparera d’abord les niveaux moyens à partir du réseau de piézomètres décrit précédemment
(figure 2.15) puis on comparera les fluctuations des niveaux piézométriques à partir des quelques
piézomètres situés dans la plaine d’Alsace.
Les niveaux piézométriques moyens sont très mal modélisés (voir figure 8.10), ce qui n’est pas
surprenant. En effet, nous avons évoqué à plusieurs reprises l’importance de l’hétérogénéité sur
ces niveaux moyens. Nous avons également vu en introduction de ce chapitre que les niveaux pié-
zométriques deviennent assez rapidement irréalistes lorsque la résolution spatiale est faible. On
conçoit donc qu’une mesure ponctuelle du niveau ait peu de chance d’être représentative au sein
d’une surface de quatre kilomètres sur quatre car la topographie qui contrôle en partie les écoule-
ments varie à une échelle plus fine. De plus nous n’avons ici aucune idée de la transmissivité réelle
du milieu. D’ailleurs, on rappelle la difficulté de restituer la piézométrie moyenne sur l’observa-
toire de Ploemeur malgré une résolution très fine et une meilleure connaissance du système. La
profondeur du niveau piézométrique constitue une variable intéressante car son altitude absolue
dépend de la représentation de la topographie (figure 8.10). Visuellement, il est aussi plus facile
de comparer les profondeurs car elles varient sur une échelle plus petite que l’altitude. De plus, la
profondeur de la nappe est la variable qui contraint l’alimentation de la surface par les systèmes
profonds. Il peut néanmoins être intéressant de contrôler l’altitude des niveaux piézométriques
afin d’estimer si les gradients hydrauliques sont bien représentés.
199
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
Ici, les erreurs relatives sont de l’ordre de la dizaine de mètres. Comme pour le test préliminaire
en 1D, les niveaux ont tendance à être trop haut et à interagir avec les sols dans une grande partie
du domaine. Pour un grand nombre de points, les profondeurs modélisées sont égales aux pro-
fondeurs de sol imposées en condition limite (de l’ordre de 1 m). Assez logiquement, on note une
meilleure représentation des profondeurs des niveaux piézométriques lorsque la transmissivité
augmente (voir figure 8.10) mais il demeure toujours des écarts importants.
F IGURE 8.10 – Comparaison entre les profondeurs des niveaux piézométriques moyens mesurés et modélisés
sur le bassin du Rhin. La droite bleue représente le modèle parfait ; la résolution de la topographie appliquée
à ModFlow vaut 4 km. En haut : la transmissivité et le coefficient d’emmagasinement de l’aquifère valent
respectivement 2.10−3 m2 /s et 0,05. En bas : ils valent respectivement 8.10−3 m2 /s et 0,05.
On constate que la temporalité des fluctuations piézométriques mesurées est respectée (voir
par exemple la figure 8.11) malgré une mauvaise représentation des niveaux moyens. Cette bonne
représentation des variations temporelles amène à penser que les flux nets de recharge sont assez
bien restitués dans le temps et que les gradients hydrauliques sont relativement réalistes. Pour rap-
pel, les piézomètres dans lesquels sont comparés les variations temporelles sont tous situés dans la
même zone dans la plaine d’Alsace. Dans ce secteur, l’amplitude des fluctuations temporelles est
d’environ 1 m seulement, et la profondeur moyenne du toit de la nappe est inférieure à 1 m. Dans
cette même zone, les niveaux modélisés sont suffisamment élevés la plupart du temps pour que
leur fluctuations saisonnières soient contraintes par la surface. Ainsi, soit ils sont en permanence
saturés, soit leurs fluctuations sont limitées par la surface durant les périodes de recharge en hiver
(voir figure 8.11). Il serait donc intéressant à l’avenir de constituer une base de données avec des
200
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.11 – Comparaison des fluctuations temporelles du niveau piézométrique mesuré et modélisé au
niveau d’un forage situé dans la plaine d’Alsace. Les données mesurées sont en noir, celles modélisées en bleu ;
la résolution de ModFlow vaut 4 km ; la transmissivité et le coefficient d’emmagasinement de l’aquifère valent
respectivement 2.10−3 m2 /s et 0,05. Malgré l’échelle, les signaux sont très synchrones.
Idée générale
Les mesures intégratrices sont donc finalement peu sensibles à la physique du modèle. La
distribution spatiale des débits révèle quant à elle l’importance de la contribution souterraine à
des échelles plus petites (figure 8.9). Pour apporter une meilleure compréhension de ce qu’ap-
portent les aquifères au comportement du système hydrologique nous proposons d’étudier com-
ment l’évapotranspiration se distribue dans l’espace non pas en fonction du climat mais en fonc-
tion de la disponibilité en eau.
Les données modélisées ont été comparées aux estimations de MODIS qui fournissent déjà
une idée de la distribution spatiale de l’évapotranspiration. Le lien entre cette distribution spa-
tiale et les aquifères réside dans les flux latéraux dont la communauté des climatologues et des
hydrologues mesure de plus en plus l’importance, en particulier à large échelle. La problématique
est donc de quantifier la redistribution latérale de l’eau via les aquifères. De plus, les aquifères
peuvent aussi jouer un rôle dans le temps en stockant l’eau durant les périodes humides et en
la restituant en période sèche. On peut aussi évoquer leur capacité à atténuer la variabilité clima-
tique ou leur nécessité pour les besoins anthropiques, au même titre que les barrages par exemple.
À l’échelle de plusieurs années, la contribution des aquifères pourrait également être importante
à cause de la grande variabilité des temps de réponse.
Mise à part l’évapotranspiration dont MODIS fournit des estimations, on s’appuiera en com-
plément sur la distribution spatiale des flux modélisés qui ne sont pas observables comme la re-
charge des aquifères, la remontée capillaire ou les flux souterrains. L’intérêt du modèle étant de
pouvoir modéliser ces flux et d’en évaluer l’impact. En effet, un des objectifs de ces travaux est
de préciser le rôle des systèmes aquifères au sein du cycle hydrologique à travers les échelles. Or,
les interactions entre ces systèmes et la surface ne sont ni observables ni mesurables directement.
Nous avons aussi vu que la mesure des débits ne suffisait pas à contraindre les processus au sein
du bassin, en particulier la contribution des aquifères. Dans ce cadre, les données satellites spatia-
lisées pourraient contenir indirectement des preuves de la contribution des systèmes souterrains
(voir notamment Sutanudjaja et al. [2014]) et permettre ainsi leur meilleure représentation.
201
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
L’approche Budyko
Sur une surface donnée, l’évapotranspiration est un flux qui repose sur les pluies locales, la
demande évapotranspiratoire potentielle et les échanges latéraux souterrains et de surface. En
régime stationnaire, c’est à dire en supposant qu’à long terme il n’y a pas de variations de stock,
l’évapotranspiration vérifie l’équation 8.2 :
où les termes représentent respectivement l’évapotranspiration, les précipitations et les flux laté-
raux entrants (Qi n ) et sortants (Qout ) à la fois par les aquifères et les rivières. Les modèles qui ne
prennent pas en compte les flux souterrains réduisent donc cette équation à la suivante (équa-
tion 8.3) :
AET = P − Qr i ver (8.3)
où Qr i ver est le débit apporté aux rivières sur la surface considérée.
Afin de s’affranchir de la composante climatique, on divisera systématiquement l’évapotrans-
piration réelle par l’évapotranspiration potentielle ou par les précipitations. D’après l’approche
Budyko [M.I. Budyko, 1974], on distingue deux situations théoriques. Dans l’une, l’évapotrans-
piration potentielle est inférieure aux précipitations, l’évapotranspiration réelle est alors limitée
d’un point de vue énergétique. Dans l’autre, ce sont les précipitations qui sont déficitaires et dans
ce cas l’évapotranspiration est limitée par la quantité d’eau apportée par les pluies.
En théorie donc, sans redistribution latérale de l’eau, l’évapotranspiration d’une surface don-
née doit être égale à l’évapotranspiration potentielle tant que la pluie est supérieure à cette der-
nière (le rapport ETR/P vaut alors ETP/P). Lorsque la pluie devient inférieure à l’évapotranspira-
tion potentielle, elle limite l’évapotranspiration réelle (ainsi le rapport ETR/P est constant et vaut
1). En réalité, une partie de l’eau des précipitations s’échappe par le réseau hydrographique et n’est
donc pas disponible. Ce qui explique en partie les écarts entre les droites théoriques en rouge sur
la figure 8.12 et les données satellites MODIS sur le bassin du Rhin.
Sur la figure 8.12, les points situés au-dessus de la limite AET/P = 1 dans la partie droite illus-
trent l’apport des systèmes souterrains dans certaines zones. En particulier, des apports qui se-
raient particulièrement importants dans les zones de convergence. Nous pensons que ce phé-
nomène cache des échanges beaucoup plus présents localement mais "noyés" dans la masse de
points représentés. On peut même supposer que si on était capable de retrancher l’écoulement de
surface aux précipitations on verrait apparaitre uniquement les contributions souterraines (mais
il faudrait alors pouvoir séparer le ruissellement des débits de base). De plus, si il existe des zones
d’apports, on peut considérer qu’il doit aussi y avoir des zones d’infiltration. Dans ce cas, on verrait
apparaître des points situés sous la droite AET/(P-Qr i ver ) = PET/(P-Qr i ver ) dans la partie gauche.
Pour résumer, sur la figure 8.12, les écarts constatés entre les points d’observations et les droites
théoriques sont égaux aux échanges latéraux nets, souterrains et surfaciques. Ils sont également
imputables aux incertitudes des estimations issues de MODIS et aux différentes formes d’anthro-
pisation présentes notamment l’irrigation.
On peut expliquer plus précisément ces processus sans pour autant les mesurer à ces échelles.
Les écoulements souterrains jouent un rôle dans le comportement transitoire et spatial des sys-
tèmes hydrologiques. En effet, les aquifères redistribuent l’eau latéralement lorsque celle-ci est en
excès et s’infiltre profondément notamment en période humide. Durant les périodes dites sèches
(P<ETP), ou dans les régions déficitaires en précipitations, l’eau souterraine peut subvenir à la
demande évaporatoire à condition que les niveaux d’eau rejoignent la zone racinaire.
En tout point, l’écart entre les courbes théoriques et les observations est donc égal au ruisselle-
ment plus au flux net entre l’aquifère et la surface [Condon and Maxwell, 2017]. À l’échelle du Rhin,
cet écart est entièrement égal à la lame d’eau écoulée ce qui donne une idée du rôle des proprié-
tés des sols et des aquifères sur le bilan hydrologique. Une approche intéressante serait alors de
202
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.12 – Approche Budyko sur le bassin du Rhin. Les données, d’après MODIS, représentent tous les
points du bassin du Rhin à 600 m de résolution.
déterminer à partir de quelle échelle le ratio de l’évapotranspiration sur les précipitations moins
l’écoulement (AET/(P − Qr i ver )) sort du comportement théorique puisque cette déviation corres-
pondrait à la contribution du milieu souterrain. Cette méthode permettrait ainsi de mesurer de
manière indirecte les échanges entre les systèmes de surface et profonds. Pour estimer la recharge
des bassins versants par exemple, Troch et al. [2009] utilisent une méthode similaire nécessitant
tout de même de pouvoir séparer le débit de base et le ruissellement sur les bassins étudiés.
D’après les observations spatialisées à 600 m de résolution (celles présentées sur la figure 8.12),
le ratio moyen de l’évapotranspiration sur les précipitations affiche une variabilité importante. Les
données s’étalent entre 0,3 et 1,4, ce qui est équivalent à une évapotranspiration respectivement
inférieure de 70 % et supérieure de 40 % aux précipitations ! Cette disparité traduit la diversité des
réponses des milieux continentaux. Comme déjà mentionné, on note la présence de nombreux
points où les valeurs du ratio sont supérieures à 1. Ces points sont relativement éparpillés (la carte
n’est pas représentée ici) mais une partie d’entre eux semble se concentrer dans les principales
vallées du bassin du Rhin, la plaine d’Alsace notamment. L’autre partie semble dessiner un ré-
seau hydrographique dans la partie centrale du bassin. On peut expliquer ces forts ratios par la
convergence des eaux souterraines qui fournissent ainsi l’évapotranspiration que les précipita-
tions seules ne peuvent suffire à expliquer. Ce ratio ne peut cependant pas permettre de discerner
les zones de recharge qui perdent de l’eau. De même, il ne permet pas de caractériser les zones où
les apports souterrains sont importants mais restent inférieurs à l’écoulement en rivière puisque
ce dernier flux n’est pas quantifiable. D’ailleurs, lorsque la résolution des observations est dégra-
dée à celle du modèle CWATM (environ 7-8 km) ces zones supérieures à 1 n’apparaissent plus.
Les modèles offrent la possibilité de quantifier ces flux et de tester leur sensibilité. On peut par
203
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
exemple voir que le ratio de l’évapotranspiration sur les précipitations est plus grand que 1 dans
certaines zones lorsqu’on ajoute le modèle hydrogéologique à CWATM (à droite sur la figure 8.13),
malgré la résolution de 7-8 km. En particulier, ce rapport augmente dans les zones de convergence
que sont la plaine du Rhin et ses principaux affluents. Dans ces zones, le rapport était déjà élevé
initialement mais il est évident que l’ajout du modèle d’aquifère y augmente l’évapotranspiration
significativement. Les valeurs supérieures à 1 soulignent à nouveau le rôle des flux souterrains
latéraux, apportant de l’eau des hauts vers les bas topographiques, chose que le modèle CWATM
ne pouvait prendre en compte. Dans les deux cas, la plupart des grandes tendances observées
d’après MODIS sont respectées. On relève des comportements différents principalement dans la
partie centrale du bassin à l’est et à l’ouest.
F IGURE 8.13 – Ratios de l’évapotranspiration sur les précipitations d’après le modèle CWATM (à gauche) et
le modèle couplé (à droite) pour le bassin du Rhin. Valeurs moyennes pour la période 2004-2009 ; les cartes
figurent en coordonnées géographiques WGS84 d’où l’aplatissement apparent du bassin du Rhin.
Le ratio de l’évapotranspiration réelle sur l’évapotranspiration potentielle est lui moins va-
riable avec des valeurs minimales proches de 0,3 et des valeurs maximales de 0,9. Même si l’on
distingue la forme de certaines vallées et de la topographie, la distribution de ce ratio est moins
évidente à cerner du fait qu’elle dépende aussi des précipitations. Pour s’affranchir complètement
de la composante climatique et mettre en avant les propriétés de la surface et de la subsurface,
nous proposons un autre critère : le ratio de l’évapotranspiration réelle sur l’évapotranspiration
potentielle là où la pluie est excédentaire et le ratio de cette même évapotranspiration réelle mais
sur les précipitations là où les pluies sont déficitaires. Puis, la moyenne est soustraite pour mieux
visualiser la variabilité des résultats (figure 8.14). Ce ratio fournit donc une observation satellite
de la variabilité moyenne des échanges latéraux au sein de chaque maille. C’est à dire le ruisselle-
ment (il faut bien séparer du débit de base) plus la recharge nette pour chaque maille. Une valeur
positive indique donc que les flux latéraux reçus par la maille sont plus élevés que la moyenne et
inversement. Par la suite, on pourra nommer ce ratio par le terme "contribution relative des flux
latéraux au bilan évapotranspiratoire". On pourra aussi parler de "variabilité spatiale de la dispo-
nibilité en eau".
La disponibilité en eau pour l’évapotranspiration résulte du processus de ruissellement, de
l’infiltration (la capacité du sol à capter l’eau de pluie excédentaire) et de l’échange entre les aqui-
fères et le sol. Une fois affranchie de la composante climatique, l’évapotranspiration apparait plus
grande principalement dans les zones de convergence qui sont situées dans la partie centrale du
bassin du Rhin. Certaines sont quasiment d’extension régionale comme au sud de la plaine d’Al-
sace. Les zones où l’évapotranspiration apparait plus faible semblent être les zones montagneuses
comme les Alpes, la Forêt Noire et les Vosges. On note que ces données, issues des satellites, fluc-
204
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.14 – Contribution relative des flux latéraux au bilan évaporatoire sur le bassin du Rhin d’après les
données satellites. Les valeurs présentées sont égales au ratio ETR/ETP là où les précipitations sont excéden-
taires ou au ratio ETR/P là où elles sont déficitaires. La résolution est de 600 m initialement à gauche mais
elle sera ramenée à environ 7-8 km à droite pour comparaison avec le modèle.
tuent entre -25 et +25 % sur la figure 8.14. Dans ces différents contextes, il est difficile d’évaluer
les contributions respectives du ruissellement et des interactions avec les aquifères. On note que
l’écart-type de la "disponibilité en eau" chute brutalement en dégradant la résolution de 0,5 à 5’
(soit de 600 m à 7-8 km environ) sur la figure 8.14. En effet, l’écart-type des valeurs présentées sur
la figure 8.14 passe de 11 à 6 % assez rapidement puis diminue doucement. La variabilité spatiale à
petite échelle est donc relativement élevée, son amplitude est comparable aux tendances (ou à la
variabilité) régionales. Actuellement, on ne sait pas comment interpréter cette variabilité. Elle in-
tègre vraisemblablement les contributions souterraines et le partitionnement des précipitations
entre ruissellement et infiltration. Néanmoins, hormis les tendances régionales, cette variabilité
ne se produit qu’à petite échelle d’après la figure 8.14.
La figure 8.15 illustre le variogramme de la carte des contributions latérales sur une zone ré-
duite. Elle compare les données satellites à deux résolutions différentes ainsi que les sorties des
modèles CWATM et CWATM-ModFlow. Le premier variogramme met en évidence la variabilité
observée à petite échelle, celle que les modèles ne peuvent atteindre (courbe bleue). Elle se tra-
duit par une variance élevée sur les faibles distances et par un fort effet "pépite" (ce qui signifie
qu’à cette résolution, il y a peu de corrélation entre des mailles voisines). Elle traduit des processus
se produisant à l’échelle du kilomètre ou moins, la redistribution des écoulements souterrains due
à la topographie. L’idée générale est que les niveaux de nappe maintiennent un accès à l’eau très
significatif (le variogramme de la remontée capillaire modélisée est également tracé en violet).
Les mêmes données à une résolution dix fois plus basse (courbe orange) illustrent en revanche
des tendances à l’échelle des massifs montagneux et des plaines au sein du bassin du Rhin. Elles
illustrent également la variabilité géologique qui détermine les propriétés hydrodynamiques des
aquifères et donc des comportements hydrologiques. La différence de comportement entre les
deux résolutions, illustré ici par le variogramme, signifie donc que les modèles représentent les
processus observés à des échelles très différentes.
La distribution spatiale de l’évapotranspiration (normalisée par le climat) semble donc révé-
latrice des processus hydrologiques. D’après les données présentées, la signature des systèmes
aquifères à très haute résolution, soit à l’échelle du versant (∼ 0,1-1 km), semble importante. Les
résultats issues des simulations montrent que les modèles donnent une représentation différente
des processus à cause de la résolution, mais ils illustrent aussi l’apport potentiel d’une meilleure
représentation des aquifères (voir les courbes vertes et rouges sur la figure 8.15). D’après les ré-
sultats précédents, les processus hydrogéologiques sous-mailles ne semblent pas déterminants à
l’échelle d’un bassin de la taille du Rhin. Néanmoins, il serait nécessaire d’abaisser la résolution (à
205
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.15 – Variogrammes des contributions latérales à la disponibilité en eau d’après les données satellites
et les modèles. Les courbes bleues et oranges illustrent les données MODIS à 0,5’ et 5’ de résolution respective-
ment ; les modèles hydrologiques, en vert et rouge, sont eux à une résolution de 5’ ; figure également en violet
la remontée capillaire issue de ModFlow à 4 km de résolution. L’encart définit la zone d’étude (carré noir).
au moins 1 km environ) afin d’obtenir des niveaux piézométriques plus bas et par conséquent des
échanges entre les sols et les aquifères plus réalistes.
Cependant, le couplage entre le modèle d’aquifère et le modèle hydrologique pourrait per-
mettre d’augmenter la robustesse des modèles par une représentation plus physique des proces-
sus. Notamment, en intégrant les processus sous-mailles avec une résolution d’au moins 1 km.
Nous avons aussi vu que la représentation des milieux souterrains prend de l’importance dans la
modélisation des débits à l’échelle régionale (figure 8.9). D’après les comparaisons entre les don-
nées spatialisées et les modèles, certaines tendances à cette échelle ne sont pas reproduites par
les modèles. Cela va nous amener à discuter en perspectives de l’importance de la géologie mais
aussi du rôle du transitoire dans la redistribution des masses d’eau.
206
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
Un nouveau modèle a donc été développé. À basse résolution, il produit des échanges verti-
caux très peu réalistes. En particulier parce que les niveaux piézométriques modélisés sont trop
élevés à des résolutions typiquement de l’ordre de quelques kilomètres. En effet, ces niveaux in-
duisent de fortes remontées capillaires sur une grande partie du bassin ce qui augmente la re-
charge du compartiment aquifère en contrepartie. Finalement, il paraît assez peu réaliste que des
flux ascendants et descendants se produisent au même endroit. Nous proposons donc ici d’im-
plémenter différemment le modèle de percolation vers l’aquifère, à la manière dont nous l’avons
fait pour la remontée capillaire.
Comme évoqué dans la présentation du modèle (chapitre "Présentation des modèles"), la
distribution spatiale de la remontée capillaire est prise en compte dans CWATM en divisant les
mailles en deux parties ou sous-mailles. Celle qui reçoit une contribution souterraine et celle qui
n’en reçoit pas. Les deux pouvant fournir de l’eau à l’aquifère par percolation. Le nouvelle ver-
sion dont il est question ici permet de supprimer la percolation dans la sous-maille qui reçoit déjà
de l’eau souterraine. Ainsi, cela permet de profiter de la précédente compartimentation entre la
surface de la maille qui est influencée par la remontée capillaire et celle qui ne l’est pas. Schémati-
quement, si on considère qu’une maille est un sous-bassin, la recharge se produirait dans la partie
amont où les niveaux piézométriques sont bas et la décharge dans la partie aval où les niveaux
piézométriques atteignent le sol (figure 8.16).
F IGURE 8.16 – Schéma représentant la variabilité sous-maille des échanges entre le sol et l’aquifère dans
CWATM-ModFlow (dernière version). Vue en une dimension pour un type de sol au sein d’une maille de
CWATM ; dans cette exemple, la résolution de ModFlow est trois fois plus fine que celle de CWATM.
Exemple de résultats
Les premiers tests effectués avec cette version du modèle couplé montrent bien une réduction
des échanges verticaux et une modification de certains résultats présentés précédemment. On
note par exemple que la recharge nette (la recharge moins la remontée capillaire) a fortement
diminué à l’échelle du bassin alors que sa variabilité spatiale a considérablement augmenté.
La figure 8.17 illustre la nouvelle carte obtenue de la contribution souterraine soit l’opposé de
la recharge nette. Pour avoir une idée de la variabilité temporelle de ce flux, les données moyennes
pour le mois de février et d’août sur une période de 12 ans sont présentées. En février, les aqui-
207
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
fères sont rechargés sur l’ensemble du bassin, assez peu sur les Alpes et sur la plaine du Rhin. Ils
alimentent en retour le réseau hydrographique par débordement dans les bas topographiques. En
août, la situation est différente. Les aquifères sont rechargés dans les Alpes et encore légèrement
dans les hauts topographiques mais on voit surtout que le fond de carte a changé de couleur et est
légèrement positif sur l’ensemble du bassin. En conclusion, d’après cet exemple la contribution
des aquifères représente une part significative du bilan évaporatoire durant l’été en plus de fournir
le débit d’étiage des rivières. Le comportement moyen ou stationnaire a donc un contenu expli-
catif limité pour expliquer des processus qui sont très différents d’une saison à l’autre. De même,
l’exploration des variations interannuelles et à plus long terme serait également particulièrement
intéressante.
F IGURE 8.17 – Contribution souterraine normalisée par les précipitations [%] d’après la dernière version du
modèle couplé sur le bassin du Rhin. La contribution souterraine est égale à la remontée capillaire moins la
recharge en chaque maille du modèle. À gauche : moyennes sur les mois de février. À droite : moyennes sur les
mois d’août, sur la période 1997-2008.
Si les grandes tendances de l’évapotranspiration sont bien représentées par les modèles, il
apparaît des zones où l’écart avec les observations est assez significatif. En théorie, l’amélioration
de la résolution devait permettre d’abaisser les niveaux piézométriques et modifier les échanges
actuellement modélisés. Cependant, d’après les exemples en une dimension et sur le bassin de
la Moselle, l’amélioration de la résolution ne suffit pas. On peut supposer que la prise en compte
de la variabilité spatiale des paramètres hydrodynamiques sera déterminante pour améliorer la
représentation des niveaux piézométriques et par conséquent celle des flux latéraux et verticaux.
La figure 8.18 montre à quel point passer d’un modèle hydrogéologique à paramètres homo-
gènes à gauche puis variables spatialement à droite modifie la structure des écoulements. Entre les
deux modèles, les valeurs des flux latéraux dans les aquifères sont très différentes et les tendances
semblent même inversées. Par exemple, alors que les flux sont plus faibles dans la plaine du Rhin
pour le cas homogène, c’est précisément l’endroit où ils sont le plus élevé pour le cas hétérogène.
Dans le premier cas, cela s’explique par une topographie plate donc des gradients hydrauliques
faibles. Dans le second cas, la grande perméabilité de la zone explique ce comportement malgré
la topographie plate.
208
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
F IGURE 8.18 – Norme des flux latéraux souterrains [mm/an] en chaque maille du modèle couplé. Moyennes
sur la période 2004-2009 issues de ModFlow à 4 km de résolution. À gauche : modèle avec une transmissivité
homogène de 2.10−3 m2 /s. À droite : modèle avec une transmissivité variable d’après GLHYMPS et dont la
moyenne vaut 4.10−3 m2 /s.
Le couplage du modèle peut être optimisé. Plusieurs étapes pourraient permettre de gagner
en efficacité lors des simulations. L’objectif est de réduire les temps de calcul qui sont tout de
même de l’ordre de l’heure pour une année de simulation à pas journalier avec des résolutions de
7-8 km et 2 km respectivement pour les parties CWATM et ModFlow (sur un ordinateur portable
standard). Cette durée reste tout à fait raisonnable jusqu’à une résolution ModFlow de 1 km. À
partir de cette valeur, le temps de calcul devient très vite limitant pour réaliser des tests. Cette
contrainte étant causée principalement par l’algorithme de résolution des charges hydrauliques
de ModFlow. Dans une moindre mesure, elle est aussi due au temps de projection des cartes entre
les deux modèles, la taille des matrices à gérer augmentant en loi de puissance.
On peut s’attendre à une amélioration significative de la gestion des grandes matrices en utili-
sant un calculateur plus puissant. En revanche, la résolution de ModFlow reste le point critique. En
terme de temps de calcul, l’implémentation de ModFlow en tant que module de CWATM devrait
permettre de diviser environ par deux les durées évoquées. Il s’agirait d’inclure ModFlow comme
un solveur de CWATM et non comme un modèle séparé. Pour cela, il suffira de créer une nouvelle
classe dans CWATM dans laquelle on ajoutera le code développé dans cette thèse. Ainsi, le modèle
couplé se déroulera en une seule simulation comprenant plusieurs périodes et non pas en plu-
sieurs simulations de une seule période. Le nombre d’opérations serait donc considérablement
réduit, en particulier l’initialisation et la sauvegarde des données à chaque pas de temps. Une
autre possibilité serait d’augmenter le pas de temps de ModFlow, passer de un jour à une semaine
par exemple diviserait le temps de calcul par sept environ. La question serait alors la même que
pour la résolution spatiale : à quel point peut-on dégrader la résolution temporelle ? Cette option
semblerait envisageable car les aquifères ont des temps de réponse généralement assez grand.
Ensuite, comme les niveaux modélisés sont trop hauts, ils interagissent énormément avec la
topographie ce qui ralentit la résolution du modèle ModFlow. Ce qui nous amène à un autre point.
Les paramètres du solveur ModFlow (NWT pour ModFlow-2005 dans notre cas) n’ont pas été ajus-
tés pour nos différents tests. Celui-ci est fixé pour résoudre le régime stationnaire qui est plus exi-
geant que le transitoire. Or, les critères de convergence relevés lors des différentes simulations
présentées sont parfaits (erreur sur le bilan < 0,01 %). Il semble donc possible d’optimiser les pa-
209
CHAPITRE 8. LA MODÉLISATION HYDROLOGIQUE À GRANDE ÉCHELLE
ramètres du solveur, par exemple le nombre d’itérations nécessaires ou la tolérance sur le critère.
Finalement, on peut espérer réduire le temps de calcul à une trentaine de minutes par année
de simulation en considérant une résolution de 1 km à l’échelle d’une zone de la taille du Rhin.
On peut en complément envisager de réduire la résolution du modèle CWATM. Ce dernier est
suffisamment efficace pour que sa résolution ne soit pas critique au niveau du temps de calcul.
Le passage d’un système de coordonnées régulières à un système géographique est aussi assez
contraignant et peut mener localement à une mauvaise redistribution de la recharge de la surface
vers l’aquifère, en particulier si les limites de mailles entre les deux modèles ne se superposent
pas. On pourrait envisager à l’avenir de résoudre ce problème.
8.4.4 Perspectives
Un modèle couplant l’hydrologie de surface et souterraine a donc été créé. Notre travail se
focalise sur une représentation physique des écoulements latéraux dans les aquifères à une réso-
lution plus fine que le modèle de base. Conceptuellement, les échanges verticaux sont représentés
de façon assez fines à travers une distribution sous-maille de la recharge et de la décharge des eaux
souterraines. Le calcul de cette recharge n’est pas impacté par le niveau piézométrique lorsque
celui-ci est profond. En revanche, la remontée capillaire est fonction du niveau piézométrique et
de l’épaisseur de sol, voire de l’humidité du sol, à travers une équation très simple. Le coefficient
de cette équation ne semble néanmoins pas avoir un grand impact car si le flux ascendant est
réduit au sein d’une maille ModFlow il aura tendance à se répartir sur les mailles voisines.
Ce nouveau modèle est plutôt efficace numériquement. De plus, il se montre flexible sur le
choix de la résolution sous-maille du modèle hydrogéologique. Ce choix dépend de la résolution
des données topographiques disponibles et des contraintes de temps de calcul. Il est également
possible de modifier le pas de temps de la partie ModFlow. Enfin, il est assez facile de modifier les
paramètres hydrodynamiques du modèle et d’en comparer les sorties.
Au vu du besoin en paramètres et en résolution spatiale pour modéliser les milieux aquifères,
ce modèle montre des limites. Après une calibration préalable du modèle couplé, l’étape suivante
sera de mettre le modèle à l’épreuve sur plusieurs dizaines d’années. Á travers cette calibration, il
faudra nécessairement intégrer la variabilité spatiale de la transmissivité et de la porosité. Il serait
aussi intéressant de valider le modèle à haute résolution à travers un bassin plus petit comme celui
de la Moselle dont on dispose des données MODIS et de nombreuses mesures de débit. L’objectif
étant de mieux évaluer la pertinence de l’ajout des flux latéraux.
210
Chapitre 9
Conclusions et Perspectives
Sommaire
9.1 Rappel de la problématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
9.1.1 Rôle des aquifères au sein de la zone critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
9.1.2 Les difficultés de la modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
9.2 Le contenu informatif des données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
9.2.1 Les enjeux de la modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
9.2.2 Connaissances acquises par les différents observables . . . . . . . . . . . . . 213
9.2.3 De quels observables et modèles a-t-on besoin ? . . . . . . . . . . . . . . . . 216
9.2.4 Quelles différences à travers les échelles ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
9.3 Le rôle des systèmes aquifères au sein du cycle hydrologique . . . . . . . . . . . . 218
9.3.1 Rappel des enjeux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218
9.3.2 Rôle à travers les échelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219
9.4 Perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219
9.4.1 Le site de Guidel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219
9.4.2 Le comportement transitoire de la piézométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . 220
9.4.3 La modélisation du transport de solutés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220
9.4.4 Les données d’évapotranspiration et de débit . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220
211
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Les aquifères ont un rôle fondamental dans le cycle hydrologique. Ils transportent l’eau des
pluies efficaces de façon transitoire sur des distances très variables. Durant cet écoulement l’eau
est stockée au sein des roches souterraines. De par leur grand volume et leur temps de réponse
long, les aquifères constituent une ressource en eau majeure. Ils fournissent une eau de qualité du-
rant les périodes de sècheresse et représente une alternative aux eaux de surface. Cette ressource,
ou cette capacité à stocker les pluies temporairement, fait des aquifères un enjeu économique
également. Les aquifères sont aussi essentiels aux écosystèmes pour les mêmes raisons. Dans le
temps et l’espace, ils restituent aux rivières et aux plantes les eaux infiltrées. De part le proces-
sus d’évapotranspiration, les aquifères sont également reliés au climat. De plus, ils participent au
cycle biogéochimique au sein des bassins versants.
Avec l’augmentation de la pression anthropique sur les milieux naturels et l’incertitude sur
l’amplitude du changement climatique, il apparaît nécessaire de mieux comprendre et prédire le
comportement hydrologique de la zone critique. L’hétérogénéité des aquifères et la complexité des
processus qui en résulte représente une limite majeure à cet objectif. Les milieux souterrains étant
inaccessibles, il est difficile de caractériser spatialement leur propriétés qui résultent des proces-
sus géologiques principalement. La modélisation des aquifères pose donc problème. D’une part,
la modèles ne peuvent que représenter de manière simplifiée la complexité réelle des systèmes et
les processus qui en résultent. D’autre part, les conditions limites qui s’appliquent à ces milieux
sont également sujettes à des incertitudes. Quelle part des précipitations recharge les aquifères ?
Quelle part est prélevée par l’évapotranspiration ? Quelle est la contribution des aquifères au dé-
bit des rivières ? De manière générale, la représentation des flux entre la surface et les systèmes
profonds fait défaut.
Comme évoqué dans le chapitre d’introduction, le contenu informatif des données fait réfé-
rence à des enjeux sur la modélisation des systèmes aquifères dont les objectifs principaux sont
la compréhension et la prédiction. Les systèmes hydrologiques étant complexes, ils nécessitent
des modèles pour les représenter. Ces modèles se doivent d’être robustes et capables de représen-
ter des événements extrêmes en restituant correctement la comportement de la zone critique. Ils
doivent aussi reposer sur des hypothèses solides et le meilleur cadre physique possible. Malheu-
reusement, l’hétérogénéité au sein des systèmes hydrologiques sous-contraint généralement les
problèmes d’inversion des modèles. Il est alors difficile d’évaluer si les modèles restituent les me-
sures avec des écarts à cause de l’incertitude des mesures, de la physique conceptuelle du modèle,
de la variabilité spatiale des paramètres, ou à cause d’une mauvaise connaissance des forçages
extérieurs (la recharge typiquement). Dans ce cadre, les données d’observation, et leur contenu
informatif potentiel, ont un grand rôle à jouer.
Les observables disponibles ont vocation à valider la pertinence des modèles. Indirectement,
ils les informent. En effet, la calibration sur les mesures permet de fixer les paramètres des mo-
dèles et d’identifier les incertitudes ou les comportements mal compris. Cependant, les données
disponibles n’ont pas toutes le même contenu informatif. De façon caricaturale, certaines sont
212
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
représentatives localement et d’autres sont plus intégratrices spatialement. En réalité, leur com-
portement moyen et surtout temporel contient des signatures caractéristiques de processus se
produisant à différentes échelles spatiales et temporelles. Ainsi, de manière générale, chaque type
de données est sensible à différents processus et informe différemment la paramétrisation né-
cessaire aux modèles. Nous pouvons alors envisager que certaines de ces données soient com-
plémentaires pour résoudre le problème d’indétermination qui pèse sur les paramètres et sur les
conditions limites des systèmes.
Ces données sont en effet de différentes natures, certaines sont critiques pour l’Homme et son
environnement tandis que d’autres semblent pertinentes indirectement mais n’en sont pas moins
essentielles à la paramétrisation des modèles. Elles caractérisent directement ou indirectement
les processus hydrologiques ciblés, notamment en géophysique et par les données satellites (c’est
à dire que la mesure effectuée permet de remonter à une variable hydrologique). Elles peuvent
être physiques comme les mesures de pression, de débit et de déformation ou bien chimiques.
Évaluer l’apport potentiel de chaque observable est essentiel pour la modélisation des sys-
tèmes hydrologiques. Il est nécessaire de déterminer lesquels sont les plus utiles et à quel point ils
contiennent des caractéristiques typiques permettant la paramétrisation des modèles. Par exemple,
il n’est pas toujours pertinent de focaliser une inversion sur des données très locales. Dans ce cas,
il convient d’estimer où ces données sont les plus informatives et à partir de combien de points
de mesures, dans le temps et l’espace, elles deviennent pertinentes. Les modèles constituent une
représentation simplifiée mais pertinente des systèmes environnementaux. Dans cette optique, le
principe de parcimonie et la complémentarité des observations semblent une approche intéres-
sante à explorer. Le défi consiste ainsi à paramétriser l’hétérogénéité de façon pertinente à partir
des données observées.
Démarche
213
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
obtenus en régime transitoire. Pour la déformation, nous nous sommes intéressés uniquement au
comportement transitoire car les instruments fournissent plutôt des mesures relatives.
214
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
apparaît comme une condition limite essentielle pour mieux représenter les écoulements. Les mi-
nimums topographiques semblent en effet déterminants sur la dynamique des écoulements.
En comparant les nouvelles estimations des taux de recharge obtenus entre les deux sites, on
remarque une plus faible amplitude des variations du taux de recharge sur le site de Ploemeur
qui est en pompage (à la différence de Guidel). Comme la méthode d’inversion analytique pré-
sentée ne permet pas d’estimer la recharge moyenne, il est difficile d’évaluer l’impact potentiel
de la reprise évapotranspiratoire sur Guidel ou d’affirmer que la recharge y est plus importante
en période humide. Néanmoins, la comparaison des recharges modélisées au niveau des diffé-
rents puits montre que la recharge de l’aquifère sur Guidel est plus rapide et plus élevée à haute
fréquence. L’épaisseur de zone non saturée impacte donc le processus de recharge de l’aquifère.
Le débit de rivière
Les mesures de débit contraignent à priori le volume d’eau entrant dans le système, les préci-
pitations efficaces et les échanges souterrains. En complément, elles apportent une information
sur le débit de base apporté par les aquifères.
Á partir du modèle numérique utilisé pour représenter la piézométrie sur Guidel, il a été pos-
sible de calculer le flux sortant de l’aquifère par débordement au niveau du bassin versant de la
rivière. Ce flux a ensuite été comparé au débit mesuré. Nous avons également séparé la modéli-
sation du débit entre le régime stationnaire et transitoire, cependant dans le cas du débit, le ré-
gime stationnaire reste inclus dans le comportement transitoire (contrairement à la piézométrie).
D’après nos simulations, le débit moyen n’est pas assez informatif pour notre modèle homogène
à deux dimensions. Utilisé seul, il contraint peu les paramètres du modèle que sont la transmissi-
vité et le taux de recharge. Il contient en plus une incertitude de l’ordre de grandeur des échanges
souterrains et de l’incertitude des pluies efficaces. D’un point de vue théorique, le débit moyen
est pourtant très complémentaire avec la piézométrie moyenne dont on connait également les
limites.
D’après le modèle en régime transitoire du site de Guidel, la représentation du débit de rivière
se montre très critique. Cela confirme également la faiblesse d’une représentation moyenne de la
piézométrie en contexte hétérogène. En effet, les modèles homogènes qui permettaient de repré-
senter les profondeurs moyennes ou même le débit moyen ne sont pas capables de représenter
les variations temporelles du débit. Au vu de seulement quelques mois de mesures, nous mettons
ainsi en avant la sensibilité du débit au modèle de recharge du bassin et à la variabilité spatiale
des processus à l’intérieur du bassin. Il n’est pour l’instant pas possible d’attribuer la contribution
respective de chaque composante mais les dernières mesures de débit et de piézométrie devraient
permettre de lever le doute sur l’incertitude du modèle de recharge et sur un éventuel ruisselle-
ment de surface ou de sub-surface. L’inversion en régime transitoire à la fois sur les débits et la
piézométrie semble très prometteuse et potentiellement très informative.
La déformation en surface
Les données de déformation en surface reposent sur le fait que les changements de pression
dans les milieux confinés induisent des déformations qui se propagent jusqu’en surface. Ces don-
nées ont un potentiel intéressant pour imager les processus hydrologiques. Pour la modélisation
de la déformation mesurée en surface, plusieurs modèles mécaniques ont été développés. En par-
ticulier, la modélisation du "tilt" a nécessité le développement d’un modèle hydromécanique re-
lativement simple.
Les données de déformation verticale mesurées par une station GPS ont permis de mettre
en évidence une compartimentation de l’aquifère. Le modèle hydrogéologique à deux comparti-
ments illustre que les informations sont différentes en fonction de l’échelle temporelle étudiée,
215
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Enfin, parmi les divers observables utilisés dans la modélisation à grande échelle, les données
d’évapotranspiration à haute résolution présentées dans ces travaux semblent également très pro-
metteuses. La variabilité spatiale observée à petite échelle s’apparente à la signature des systèmes
aquifères. En effet, la proximité de la nappe est un facteur important, elle garantit l’accès à l’eau
selon les périodes. Les données satellites montrent qu’en plus de cette variabilité caractéristique
de l’échelle du versant, il apparaît une variabilité à plus grande échelle que l’on pourrait éventuel-
lement attribuer à la variabilité géologique. Cette donnée semble donc d’un intérêt majeur pour
la paramétrisation des modèles à grande échelle mais aussi pour la modélisation des systèmes
hydrologiques plus localement.
En théorie, la mesure du niveau d’eau dans les forages est la méthode informant le plus sim-
plement sur l’état des milieux souterrains. Cependant, il s’agit d’une mesure ponctuelle au sein de
milieux très hétérogènes. Dans le cadre de la modélisation, il faudrait donc beaucoup de points de
mesures et disposer des bonnes informations quant à la structure du milieu afin de donner plus
de sens à ce type de données. Les modèles nécessitent d’être alimentés par des informations plus
intégratrices et demandent de réaliser un compromis entre leur réalisme et leur finalité. Cette fi-
nalité étant différente en fonction du contexte. Elle peut nécessiter une précision, une robustesse
ou un réalisme physique différent. Si le contexte est la compréhension des milieux hétérogènes et
de leurs interactions avec la surface à différentes échelles, alors des modèles physiques semblent
le plus appropriés. Par cette approche, quelles données informent le mieux ?
D’après l’approche multi-observables développée sur les sites de Ploemeur et Guidel, plu-
sieurs informations ressortent. La modélisation en transitoire de la piézométrie et du tilt permet
de restituer les observations avec seulement quelques paramètres physiques. Dans ce cas, les don-
nées informent également sur les conditions limites imposées aux systèmes aquifères. Ces deux
observables semblent sensibles aux principales structures d’écoulement au sein du bassin mais de
différentes manières. La piézométrie paraît intégrer des propriétés moyennes du système tandis
que l’inclinométrie apparaît plus sensible au contraste de diffusivité entre les structures. En re-
vanche, nos modèles simples ne sont pas capables de restituer les fluctuations de débit observés
avec fidélité. Néanmoins, ce résultat illustre que malgré son aspect intégrateur, le comportement
temporel du débit informe sur la variabilité spatiale et temporelle des processus se produisant en
amont des stations de jaugeage.
Pour conclure, chaque observable présente des avantages et des inconvénients du fait qu’ils
demandent des concepts différents et possèdent des sensibilités différentes. D’un côté, cela per-
met aux données d’être complémentaires et de compléter les informations sur chaque paramètre
physique, mais d’un autre, cela implique une complexité croissante du modèle. Les exemples pré-
sentés précédemment illustrent les difficultés de la modélisation liées à l’hétérogénéité. Ils tentent
de présenter une approche générique pour la modélisation des milieux hydrologiques et sur la ma-
nière d’aborder l’hétérogénéité. Malgré différents observables, ces modèles ne parviennent pas à
216
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
capturer au premier ordre la variabilité spatiale des flux latéraux. Cette faiblesse se traduit par
une mauvaise représentation des débits de rivière et probablement du transport de soluté. Notre
exemple sur la modélisation de la piézométrie illustre une approche différente des données. L’hé-
térogénéité des propriétés du sous-sol restera toujours indéterminée. En revanche, les processus
qui résultent de cette hétérogénéité peuvent être évalués par différents observables.
À large échelle, nous disposons de peu d’informations sur les volumes d’eau en circulation,
ce qui pourrait venir compléter les jeux d’observables utilisés pour l’inversion. À l’échelle de Ploe-
meur et Guidel, les informations conjuguées des différents observables peuvent permettre de défi-
nir le rôle de l’hétérogénéité et un cadre physique aux modèles de transport. De manière générale,
il est difficile de définir précisément les observations manquantes mais il semble incontournable
d’associer la piézométrie aux débits de rivière pour contraindre les processus d’alimentation des
rivières.
Dans ces travaux, nous avons modélisé explicitement les écoulements dans les aquifères à
l’échelle du kilomètre et à l’échelle continentale. Les deux échelles demandent des données d’ob-
servation pour contraindre les modèles. Malgré le contexte différent, les enjeux sont identiques
au niveau de la paramétrisation des modèles et des données disponibles. L’inconnue sur les flux
souterrains reste la même. Ces derniers sont le résultat des gradients topographiques et de la per-
méabilité qui dépend de la géologie et de l’hétérogénéité. Quelle que soit l’échelle, il y a un besoin
de représenter le mieux possible les principaux processus. Cette démarche passe par des modèles
physiques parcimonieux et des observations de différentes natures. La variabilité spatiale des sys-
tèmes hydrologiques se trouve au cœur de cette ressemblance.
Dans le cas de la modélisation à grande échelle, il apparaît que la résolution doit être suffisam-
ment basse pour des raisons informatiques malgré certaines connaissances plus fines du milieu,
notamment la topographie. Dans ce cas de figure, la problématique devient de paramétriser un
modèle dont la résolution est différente de l’échelle des processus. Nous avons vu sur le site de
Guidel, sur le modèle centré sur la Moselle, et aussi à travers un modèle 1D, que la distribution
spatiale des paramètres est également limitante. La variabilité spatiale des propriétés reste diffi-
cile à représenter malgré la connaissance des différents contextes géologiques. Elle est pourtant
nécessaire pour représenter la piézométrie au premier ordre.
Pour répondre aux besoins d’une modélisation intégrée des systèmes hydrologiques à grande
échelle, un modèle couplant les écoulements souterrains et l’hydrologie de surface a été déve-
loppé. L’idée était que la physique des écoulements souterrains constituent un processus majeur
du cycle hydrologique. En première approche, nous avons donc développé un modèle simple qui
permet un écoulement latéral entre les mailles du modèles, mais qui ne modélise pas explicite-
ment les interactions avec la surface. En effet, même si le compartiment aquifère développé in-
fluence le phénomène de recharge, il fournit de l’eau aux rivières et aux sols par simple débor-
dement. Nous faisons ainsi l’hypothèse que la représentation physique de cette "remontée capil-
laire" est moins critique que le besoin de prendre en compte les flux latéraux.
Les premières comparaisons entre les simulations issues de ce modèle et du modèle initial,
sans écoulements latéraux, révèlent que les systèmes souterrains contribuent à transporter l’eau
des zones de recharge vers les zones de décharge. C’est donc bien le processus que l’on voulait
représenter. En revanche, les simulations montrent que la basse résolution inhérente à la modéli-
217
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
sation à grande échelle et le manque d’informations sur les milieux donnent des niveaux piézomé-
triques peu réalistes. Par conséquent, la représentation physique des processus hydrogéologiques
est insuffisante, elle demande une paramétrisation préalable et une résolution plus fine. Néan-
moins, la difficulté consistait également à intégrer un processus dans un modèle qui restituait
déjà le cycle hydrologique à large échelle (le débit du Rhin à l’exutoire). La question était donc
de discriminer le rôle des aquifères en montrant des caractéristiques qui leurs sont propres. Nous
avons vu à travers les données spatiales mesurées et modélisées que l’une de ces caractéristiques
est de générer des gradients qui diffèrent des gradients climatiques. Enfin, un intérêt plus direct
est de mieux évaluer les ressources en eau via une calibration sur la piézométrie par exemple, ce
qui n’était pas possible dans la version initiale.
La comparaison entre le modèle couplé, le modèle initial et certains observables met en évi-
dence les observations qui ne sont pas contraintes par la physique du modèle, en tout cas pour
la partie souterraine. Cette comparaison montre aussi à partir de quelles échelles la contribution
des aquifères est significative sur le bilan hydrologique, à l’échelle du kilomètre avec la topogra-
phie et l’hétérogénéité, à l’échelle d’une dizaine de kilomètres avec la géologie et la topographie
régionale. Au vu des résultats sur Guidel et Ploemeur, il semble pertinent de devoir intégrer les
fluctuations piézométriques temporelles dans les modèles à plus grande échelle malgré leur ca-
ractère ponctuel. En effet, nous avons montré que ces données sont intégratives à l’échelle des
bassins en terme de temps de réponse, de porosité et de recharge. Enfin, il semble nécessaire de
travailler sur l’évolution dans le temps de la contribution des aquifères à la disponibilité de l’eau
en surface. En particulier, l’évolution de cette contribution en fonction du stock disponible.
Le rôle des aquifères est multiple et la compréhension de leur comportement fait intervenir
divers enjeux. L’augmentation croissante des besoins en eau, le réchauffement climatique, la pré-
vision des inondations et le rôle environnemental des aquifères s’inscrivent pleinement dans le
concept de la zone critique.
De par l’inaccessibilité et la complexité structurale des aquifères, leur suivi et leur modélisa-
tion posent de nombreux problèmes que nous avons déjà évoqué. Pourtant, il est nécessaire de
mieux comprendre les aquifères et leurs interactions avec la surface pour plusieurs raisons. La
première est la gestion de la ressource en eau. Les aquifères constituent une ressource majeure
dans la plupart des régions du globe et offrent une eau de qualité même en période de sécheresse.
Les milieux souterrains permettent donc de faire face aux périodes de sècheresse à la différence
des eaux de surface. Comprendre leur comportement temporel à des échelles saisonnières à pluri-
décennales est donc vital. Dans le même temps, mieux comprendre l’impact du prélèvement de
cette ressource est capital pour des questions environnementales. Connaître et prédire le taux
de recharge des aquifères est notamment important pour la gestion de la ressource. Comprendre
l’évolution dans le temps des aquifères et en particulier prévoir leur réponse à des forçages cli-
matiques est nécessaire. Les milieux souterrains participent au comportement hydrologique à la
surface de la Terre. Quantifier cette participation et sa sensibilité est un enjeu qui pose encore des
difficultés. Leur contribution au débit des rivières est incertaine mais leur rôle sur l’évapotrans-
piration, et la biosphère en général, l’est probablement encore plus. Dans cette optique, l’évapo-
transpiration crée un lien entre les aquifères et le climat.
218
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Il y a plusieurs preuves de l’imbrication des processus hydrologiques entre les échelles spa-
tiales, et par répercussion entre les échelles temporelles. Le comportement local des systèmes hy-
drologiques dépend des conditions à plus large échelle et inversement, chaque échelle spatiale
ayant une sensibilité différente aux forçages transitoires. Le moteur de ce comportement transi-
toire est le climat. Les variations nycthémérales, saisonnières, annuelles et inter-annuelles prin-
cipalement, auxquelles s’ajoutent les précipitations, plus irrégulières à court terme (les variations
inter-annuelles à pluridécennales sont apportées par les précipitations). Les systèmes aquifères
agissent comme des filtres passe-bas et ont tendance à atténuer la variabilité météorologique à
court terme et locale en stockant l’eau excédentaire et en l’apportant durant les périodes de défi-
cit hydrique.
Les aquifères interviennent à différentes échelles dans le cycle hydrologique. Ils constituent les
plus grands réservoirs d’eau douce (avec les glaciers) mais n’alimentent la surface que localement
en fonction de la variabilité géologique et topographique. Ils contribuent à une part significative
des comportements observés en surface tels que les débits de rivière ou l’évapotranspiration. En
fonction de l’échelle d’étude, leur contribution à tendance se confondre avec le débit des rivières
bien que leur rôle reste très important localement.
1. Le site de Ploemeur illustre le réservoir d’eau douce que constituent les aquifères, exploités
par des pompages.
2. Sur Guidel, l’aquifère contribue à un débit moyen élevé et à une variabilité temporelle im-
portante. Il semble également contribuer de façon importante au fonctionnement de la
zone humide du bassin. Par conséquent, il contribue vraisemblablement grandement au
bilan hydrologique du bassin durant l’été par l’évapotranspiration des plantes dans la zone
humide.
3. À l’échelle du Rhin, l’ajout des écoulements souterrains semble expliquer la variabilité ré-
gionale de la redistribution des flux aux rivières d’après les mesures en plusieurs points du
fleuve. En moyenne dans le temps, ces flux latéraux apportent une grande variabilité spatiale
dans la disponibilité en eau pour l’évapotranspiration. Cette variabilité est potentiellement
encore plus élevée durant les périodes sèches puisque la contribution des précipitations di-
minuent.
9.4 Perspectives
Plusieurs perspectives sont à envisager au regard des différents chapitres de la thèse. Le site
de Guidel est un observatoire hydrogéologique très intéressant parce qu’il est complexe et parce
que le milieu souterrain y joue un rôle important. Dans ce cadre, un modèle géologique du site est
disponible et pourrait être utilisé pour mieux modéliser la piézométrie et le débit. Les flux souter-
rains se manifestent en surface à travers l’existence d’une zone humide située dans une dépression
topographique. Au droit de cette zone humide, les niveaux piézométriques restent peu profonds
durant la période sèche. Les premiers suivis semblent indiquer que dans cette zone la piézométrie
dépend fortement de la demande évapotranspiratoire. Une question qui se pose alors est la sensi-
bilité des piézomètres éloignés de la zone à ce processus qui se manifeste essentiellement l’été. En
effet, les variations temporelles de la piézométrie pourraient permettre de préciser le comporte-
ment temporel de l’évapotranspiration dans la zone humide. Il est probable que le signal à haute
fréquence de ces mesures soit atténué par le milieu aquifère. En revanche, le signal hebdomadaire
ou mensuel pourrait être suffisamment intense pour se propager dans l’aquifère. Les fluctuations
219
CHAPITRE 9. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
Dans le même ordre d’idée, il serait pertinent de mettre la méthode d’estimation de la recharge
par la piézométrie à l’épreuve d’autres données à des échelles plus grandes. Il sera alors intéressant
de comparer les résultats à d’autres méthodes d’estimation telles que la "Water Table Fluctuation"
[Healy and Cook, 2002] par exemple. Il existe de nombreux piézomètres dont le contenu informa-
tif n’est pas exploité et l’estimation de la recharge est incertaine dans de nombreuses régions du
globe.
Il y a un besoin de mieux représenter le transport de soluté pour diverses raisons dont celle
de mieux contraindre la structure spatiale des paramètres hydrodynamiques. Dans ce cadre, les
modèles et le contexte de nos études n’ont pas permis de mettre en avant des contraintes sur les
paramètres hydrodynamiques des aquifères à partir des mesures géochimiques. Deux des raisons
de ce résultat seraient la trop grande hétérogénéité du site et la condition limite de pompage. Il se-
rait utile de définir des traceurs communs aux différents bassins et dont on dispose de chroniques
temporelles.
Pour mieux contraindre les modèles, les données temporelles de débit sont essentielles. Ces
données demandent également une calibration des paramètres de sol. Néanmoins, les mesures
de débits ne suffisent pas forcément à contraindre à la fois les variations de stock et l’évapotrans-
piration. De plus, il semble nécessaire de comparer les débits modélisés en plusieurs points des
bassins et non seulement à l’exutoire, afin d’augmenter les contraintes sur les paramètres des mo-
dèles hydrogéologiques.
Enfin, les données d’évapotranspiration par satellite ont fourni des informations sur les échanges
entre les systèmes profonds et la surface. Ces données à une résolution assez fine (600 m) illustrent
en particulier l’importance de la variabilité à petite échelle induite par les écoulements souter-
rains. Dans le cadre de cette thèse, un modèle hydrologique à large échelle couplant les processus
hydrologiques profonds et de surface a été développé. Les premières modélisations montrent la
variabilité spatiale de la redistribution de l’eau suite à l’ajout d’un modèle d’écoulement souter-
rain. Il apparaît donc possible de mieux évaluer à grande échelle la contribution des aquifères au
cycle hydrologique à travers la modélisation et les observations. Ainsi, intégrer ces observables
dans le nouveau modèle couplé pourrait permettre de mieux comprendre le cycle hydrologique et
de mieux étudier la sensibilité des processus aux déstabilisations anthropiques et climatiques.
220
Chapitre 10
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Titre : Comment modéliser les systèmes aquifères au sein du cycle hydrologique ?
Une approche « multi-observables » à différentes échelles.
Résumé : Les systèmes aquifères constituent bles (piézométrie, débit de rivière, déformation
la partie souterraine du cycle hydrologique. Ils de surface...) afin de déterminer comment ils
transfèrent les pluies infiltrées à travers les sols peuvent améliorer la paramétrisation des mo-
sur des distances variables. Après un temps dèles. Notre travail s'appuie sur la modélisation
caractéristique de l’ordre du mois au millier hydrologique du site de Ploemeur (échelle
d’années, les eaux souterraines regagnent la locale) et du bassin du Rhin (échelle conti-
surface en alimentant les rivières et en nentale). Dans les deux cas, des modèles
satisfaisant en partie l’évapotranspiration. Les simples sont développés en utilisant des
aquifères sont ainsi une ressource en eau solutions analytiques et numériques. Le mo-
majeure pour l’Homme et les écosystèmes. dèle ModFlow a également été couplé à un
La prédiction de leur réponse aux pressions modèle hydrologique.
anthropiques et climatiques se heurte à deux À petite échelle, les résultats illustrent l’in-
difficultés (1) la faible densité d’informations térêt de différents types de données tran-
directes sur les milieux géologiques et leur sitoires pour contraindre les processus. À
grande hétérogénéité (2) la complexité des grande échelle, le modèle développé ainsi que
échanges entre la surface et la profondeur. les observables permettent d’affiner le rôle des
L’enjeu est donc de développer des modèles systèmes aquifères dans la disponibilité de
représentant au mieux les processus aux diffé- l’eau en surface. Les deux approches illustrent
rentes échelles spatio-temporelles. un contrôle des flux à différentes échelles par
Pour aborder cette question, nous étudions le la topographie, la géologie et l’hétérogénéité.
contenu informatif de différents types d’observa-