Rimbaud Les Cahiers de Douai Roman
Rimbaud Les Cahiers de Douai Roman
Rimbaud Les Cahiers de Douai Roman
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INTÉRÊT DU SUJET • Rimbaud a composé ce poème quand il avait 16 ans : poète adolescent, il
se fait ici poète de l’adolescence.
Commentez ce texte d’Arthur Rimbaud extrait des Cahiers de Douai en vous aidant du parcours
de lecture ci-dessous.
DOCUMENT -
II
III
IV
4. Piqué : tacheté.
Définir le texte
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Construire le plan
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Les titres en couleur ou entre crochets ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
[Présentation du texte] Dans ce poème, qu’il a écrit à seize ans, il parle très probablement de
l’adolescent qu’il est et rend compte de ses premiers émois amoureux, mais indirectement en
utilisant le pronom généralisant « on » : « On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans ».
[Annonce du plan] Il rend compte ainsi de l’exaltation éprouvée au cours d’une escapade aux
abords de la ville un soir de juin, occasion d’une première rencontre amoureuse [I]. À travers ce
court récit, c’est son portrait qu’il dresse, avec une fantaisie teintée d’humour et d’ironie [II].
LE SECRET DE FABRICATION
On étudie ici le poème en suivant sa structure en quatre parties pour mettre en évidence les
caractéristiques de chaque épisode.
■ Hors de la ville, le ciel étoilé peut être contemplé. L’adolescent s’en approprie la grandeur
cosmique : vu à travers un arbre (« encadré d’une petite branche »), le morceau de ciel nocturne
(« azur sombre ») devient « un tout petit chiffon » où brille une étoile « petite et toute blanche ».
■ L’escapade se déroule à des heures agréables (« air […] si doux », « bons soirs de juin »), dans
une nature accueillante (fin du printemps, courant de l’été). Celle-ci fait naître une double envie,
contradictoire : s’abandonner à une forme d’étourdissement proche du sommeil (« on ferme la
paupière ») ou, au contraire, rester éveillé, tous les sens en alerte.
Quatre sens sont sollicités à travers diverses notations : non seulement la vue, mais également
l’ouïe (le « vent chargé de bruits »), l’odorat (les « parfums de vignes et […] de bière »), le goût
(« on sent aux lèvres un baiser »).
■ Dans cet environnement bienfaisant, l’adolescent sent en lui un bouillonnement intérieur, une
vigueur que l’image de la « sève » assimile à une germination naturelle ; l’envie d’embrasser qu’il
ressent s’apparente à une éclosion de fleur (« on se sent aux lèvres un baiser », vers 15).
Le sentiment d’exaltation est traduit par le lexique de l’ivresse (« griser », « monte à la tête »,
« divague ») et le « champagne » qui parcourt les veines de l’adolescent semble un alcool bien
plus fort que les « bières » et les « limonades » proposées dans les cafés de la ville.
3. La cristallisation amoureuse
Les deux derniers épisodes (III et IV) retracent le petit roman d’amour à proprement parler.
■ Jusqu’au début de l’épisode III, le « cœur fou » de l’adolescent papillonne. Pour décrire cet
état, Rimbaud invente le verbe robinsonner (« Le cœur fou Robinsonne ») qui donne l’idée d’un
vagabondage solitaire, en référence au fameux personnage d’aventurier naufragé, Robinson
Crusoé.
■ Avec l’apparition de la « demoiselle », son exaltation se fixe sur un objet : la silhouette d’une
jeune femme bien vivante, décrite de pied (« ses petites bottines » qui trottent) en cap (avec de
« petits airs charmants ») ; celle-ci est d’autant plus désirable qu’elle semble plus expérimentée
que le jeune homme « immensément naïf ».
L’adolescent a le cœur pris, « loué jusqu’au mois d’août ». La répétition de « Vous êtes
amoureux. » ne laisse aucun doute sur l’intensité de ses sentiments.
4. Le dénouement
LE SECRET DE FABRICATION
Il s’agit de montrer comment Rimbaud, jouant sur plusieurs tonalités – lyrisme, humour et
ironie –, évoque ce moment miraculeux de l’adolescence où toutes les émotions sont à la fois
intenses et sans lendemain…
1. La tonalité lyrique
■ Les sentiments personnels, les élans passionnés exprimés dans ce poème lui donnent sa
tonalité lyrique . On en retrouve d’ailleurs différentes marques syntaxiques : Rimbaud utilise des
phrases exclamatives (vers 3, 5, 13), signes d’exaltation ; il recourt aussi à des points de
suspension comme si, par moments, l’émotion, trop forte, empêchait d’aller jusqu’au bout d’une
phrase.
MOT CLÉ
Dans la tradition, la poésie lyrique – par opposition à l’épopée – permet l’expression des
sentiments personnels, notamment de la passion amoureuse.
■ Ce lyrisme est en harmonie avec l’état d’esprit de l’adolescent : amoureux, il a envie de chanter,
comme un soliste d’opéra, des airs brefs et tendres (« Sur vos lèvres meurent les cavatines… »)
ou bien d’adresser à la bien-aimée des vers (« sonnets ») exprimant ce qu’il sent.
2. La distance ironique
Mais ce lyrisme est tempéré par le regard distancié que le poète porte sur son aventure. Il suffit
d’observer le choix des pronoms personnels.
■ Ainsi, alors que le poème prend rapidement le tour d’une confidence autobiographique, jamais
le « je », n’apparaît. C’est le pronom indéfini « on » que le poète utilise dans les parties I et II,
donnant ainsi l’impression qu’il observe avec une tendre ironie le jeune homme qu’il a été
(impression fausse : Rimbaud a écrit ce poème à seize ans !)
■ Puis, à partir du vers 21, le « vous »inclut dans ce portrait le lecteur. L’expérience singulière
rapportée ici aurait-elle valeur universelle ? L’utilisation des verbes au présent de vérité
générale le confirme : les émotions du jeune Rimbaud pourraient être celles que vit tout
adolescent.
3. Humour et légèreté
■ La demoiselle qui surgit sous la lumière d’un « pâle réverbère » nous entraîne du côté du
théâtre et de la comédie. Chaperonnée par son père, elle a l’aspect d’une jeune première,
coquette, faisant des mines (« petits airs charmants »).
Finalement le « roman » tourne court, l’adolescent se retrouve devant un bock ou une limonade
au café. Un tel dénouement enlève à l’aventure toute pesanteur lyrique.
■ Rimbaud joue aussi sur le rythme : dans ce poème composé en alexandrins (potentiellement
solennels), les ruptures syntaxiques marquées par les tirets créent un mouvement instable, une
sorte de sautillement léger.
Conclusion
[Synthèse] Dans ce poème, Rimbaud évoque avec une grande justesse ce moment miraculeux
de l’adolescence où toutes les émotions sont à la fois intenses et sans lendemain. Il invente ainsi
un lyrisme singulier, empreint de fantaisie et d’ironie, loin des conventions du romantisme.
[Ouverture] Ce poème laisse déjà deviner la suite de son aventure littéraire et la révolution qu’il
va effectuer dans l’écriture poétique, notamment avec Une saison en enfer ou Illuminations.