L'exploitation Du Fonds de Commerce À L'épreuve Du Covid 19
L'exploitation Du Fonds de Commerce À L'épreuve Du Covid 19
L'exploitation Du Fonds de Commerce À L'épreuve Du Covid 19
MEMOIRE
Présenté en vue de l’obtention du diplôme de MASTER RECHERCHE en Droit Privé
Option : Droit des Affaires
Par
FOTSING FOKUE Patrick Romuald
Matricule : 19B231JP
Titulaire d’une Licence en Droit Privé
Sous la Direction de :
Dr WAGOUE Diane
Sous la Supervision de :
Pr VOUDWE Bakreo
i
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
AVERTISSEMENT
i
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
DÉDICACEh
Je dédie ce travail,
Ma grande famille,
ii
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
REMERCIEMENTS
Au moment de présenter ce modeste travail, qu’il me soit permis de remercier tout d’abord
Madame le Recteur de l’Université de Ngaoundéré, le Professeur ChinjeUPHIEde m’avoir
accueilli dans cette auguste institution dont elle a la charge.
Qu’il me soit aussi permis de remercier le Professeur Janvier ONANA, Doyen de la Faculté
de Sciences Juridiques et politique de l’Université de N’Gaoundéré.
Mes remerciements vont à l’endroit de tous mes camarades de promotion et des ainés
académiques, parce qu’ils ont eu beaucoup d’intérêt à discuter avec moi sur ce travail.
Pour leur amitié et leur soutien, je remercie enfin Emmanuel BAKANG et Isaac LINGON,
de qui j'ai fini par apprendre qu'il ne faut jamais reculer devant les difficultés et que l'espoir
n'est pas un vain mot pour qui cherche son fil d'Ariane dans les labyrinthes de la vie.
Puissiez-vous, tous et chacun, trouver dans chacune des lignes de ce mémoire la marque de
votre contribution et l’expression de mon infinie reconnaissance.
iii
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
RÉSUMÉ
iv
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
ABSTRACT
The Covid-19 pandemic has plunged the worldwide economic landscape in an unusual
situation and has ever put in trouble the whole trading sector resistance. The restriction
measures taken by the governments to hold back the harmful effects of this pandemic have
clearly shown the strengths and weaknesses of the different ways to exploit the trading fund in
exceptional conditions like this one. Between threats and opportunities, Covid-19 pandemic
illustrates itself like a decisive period for the future of the commercial fund exploitation. The
physical trading fund exploiters and those of the virtual trading fund have been affected
differently in their activities. But overall, Covid-19 pandemic has been a great opportunity for
the entrepreneurial traders.
v
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
SOMMAIRE
vi
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Art. Article
ÉD Edition
EX Exemple
vii
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
N° Numéro
P Page
S. Suivant
V. Voir
viii
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
INTRODUCTION GENERALE
Le droit, qui est l’autre nom de la volonté, de la raison et de la prévision, n’échappe pas
toujours à la fantaisie du fait et à la folie de la nature. La COVID-19 le soumet encore à
l’épreuve de son ambition au règne et à la maîtrise absolue de tout ce qui saisit l’humain. Il
ébranle sérieusement le droit dans sa solidité, dans son hégémonie et dans sa prévisibilité1.
La maladie à coronavirus (COVID-19) qui a été déclarée dans la ville de Wuhan en Chine en
fin décembre 2019 s’est vite propagée dans plusieurs pays du monde. Elle a eu et continuera
d’avoir des répercussions sanitaires, économiques et financières sans précédent à l’échelle
mondiale et singulièrement dans l’espace OHADA. La crise sanitaire qui frappe le monde est
sans précédent et n’épargne aucun secteur d’activité économique. Le secteur du commerce qui
dépend directement de la fréquentation du public est fortement affecté. Depuis plusieurs mois,
de nombreux changements dans la vie du commerçant ont été observés à cause de cette crise
et du fait des mesures gouvernementales interdisant les rassemblements publics, ordonnant
des fermetures et imposant le confinement. Il en va de soi que le patrimoine du commerçant
doit être lui aussi affecté.
Cependant, la COVID-19 a été décrété comme une pandémie le 11 mars 2020 par
l’OMS2. Hissé officiellement au rang d’une pandémie selon l’OMS, le coronavirus (COVID-
19) soulève de nombreuses inquiétudes. D’un point de vue macro, la crise du coronavirus
contribuera à un ralentissement économique, voire à une récession au Cameroun comme dans
d’autres États de l’OHADA. Plusieurs entreprises, sont affectées par cette situation. D’un
point de vue micro, la propagation du virus a un impact certain sur l'emploi, aussi les
employeurs n’ont d’autres choix que de se préparer à gérer les conséquences de cette crise qui
pourrait durer plusieurs mois3.
Pour éviter la propagation du COVID-19 dans les différents États membres de l’OHADA
et garantir une prise en charge efficace des personnes déjà contaminées, tous les
Gouvernements de la zone ont pris des mesures d’urgence, dont la plupart ont porté sur la
1
J. DJOGBENOU, «Procédures civiles d’exécution et urgence sanitaire : le cas de la pandémie de la covid-19»,
Bulletin ERSUMA de pratique professionnelle numéro spécial- droit ohada & covid-19, 1ère série, n° 031, mars
2020, p. 11.
2
CCR, UEMOA Rapport Covid-19, impact de la pandémie du covid-19 sur le secteur prive de l’UEMOA, mai
2020, p.10.
3
https://crha.li/covid-19 . Consulté, le 05 mai 2021 à 21h 15mn.
1
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
fermeture des frontières, la mise en quarantaine des voyageurs provenant des pays à risque, le
confinement des populations et l’intensification des campagnes de sensibilisation et de
prévention par des mesures d’hygiène simples à observer par tous.
Les entreprises subissent alors plusieurs changements ces derniers mois du fait du
Covid-19. Cette crise a créé des situations qui ont affecté grandement les activités
commerciales. Par conséquent, la capacité des entreprises à créer de la valeur et à générer de
la croissance est devenue tributaire de leur degré d'adaptation à l’évolution de la pandémie.
Une entreprise peut se retrouver impactée dans son activité par la pandémie du Covid-19
au point de remettre en cause l’équilibre contractuel et la bonne exécution d’obligations
contractuelles. Afin de limiter l’impact économique, l’entreprise peut envisager une
exonération de responsabilité. Il est évident que l’avènement de cette crise pandémique4et ses
manifestations ont modifié en profondeur le paysage de l’activité commerciale, le rendant
plus difficile, mais aussi plus incertain. La crise sanitaire a évidemment un impact sur
l’activité du commerçant. Elle conduit inévitablement à une nouvelle réflexion sur les
incertitudes relatives à la qualification juridique de cette crise sanitaire et fait ressortir des
difficultés concernant l’exploitation du fonds de commerce.
L'entrée du commerçant dans les affaires a lieu au moyen de l'acquisition d'un fonds de
commerce, lorsqu'il ne crée pas un établissement absolument nouveau4. Pour exercer une
activité commerciale, celui-ci utilise un ensemble de biens corporels (machines,
marchandises…) et incorporels (brevet d’invention, le nom commercial…). Tous ces biens
sont regroupés et utilisés par le commerçant pour répondre au besoin de sa clientèle, pour
l’attirer, pour la retenir. Ces biens forment un ensemble auquel le droit OHADA applique un
régime particulier. Cet ensemble, c’est le fonds de commerce. Les mesures gouvernementales
prises pour limiter la propagation du virus ont influencés les activités des commerçants. Telle
est la raison pour laquelle nous avons optés pour l’étude du sujet : l’exploitation du fonds de
commerce à l’épreuve du Covid-19.
Le caractère libéral du droit commercial est illustré par la règlementation du statut et de
l’activité de l’entreprise. Le législateur va organiser le statut des biens des moyens d’action
mis à la disposition des commerçants pour l’exercice de leur activité. Il s’agit de la loi du 17
mars 1909 qui introduit dans le droit français la notion de fonds de commerce5. Cette loi
4
E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial, éd., A. ROUSSEAU, Paris, 1898, p. 59.
5
N. BEN AMMOU, Cours de droit commercial, Université de Tunis EL Manar, année universitaire 2003-2004,
p. 13. Disponible sur : http://rel.uvt.rnu.tn. Consulté, le 30 novembre 2021 à 11h 03mn.
2
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
organise la vente et le nantissement du fonds de commerce6. On peut encore ajouter une loi
postérieur, il s‘agit de la loi du 20 mars 1956qui organise la location gérance du fonds de
commerce7. Le propriétaire ou l’exploitant du fonds de commerce concède totalement ou
partiellement la location du fonds de commerce à un gérant qui l’exploite à ses risques et
périls. Les composantes du fonds de commerce sont la clientèle, le droit de bail et le nom
commercial. Une loi du 1926 ainsi qu’un décret-loi du 30 septembre 1953 vont fixer le statut
du bail commercial. Lorsque le commerçant loue les murs où est installé un fonds de
commerce, il est indispensable de protéger le bail qui est une source de richesse pour le
commerçant. Aussi, ces textes législatifs de 1926 et de 1953 reconnaissent au profit du
commerçant un droit « au renouvellement du bail ». Le droit commercial a ainsi
particulièrement développé l’idée selon laquelle les biens appartenant au commerçant et qui
ont le plus de valeur sont les biens incorporels. Ainsi, la valeur du fonds de commerce est
principalement constituée par la clientèle, le droit de bail et le nom commercial. D’autres
textes vont fixer le statut des propriétés incorporelles. On peut citer la loi du 5 juillet 1844 sur
les brevets d’invention (pour leur protection), la loi de 1909 sur les dessins et modèles et le
texte du23 septembre 1957 sur les marques de fabrique.
C’est la pratique qui a fait naitre le fonds de commerce, et c’est la pratique qui le développe et
le maintien. Le Code de commerce de 1807 a ignoré le fonds de commerce8. La loi l’ignore,
mais dès 1807 l’on connaissait ce concept et il regroupait les marchandises, le matériel, et au
XIXème siècle il était simplement un rassemblement de biens nécessaires à l’exploitation
commerciale, et non pas ce qu’il est aujourd’hui, à savoir une institution, un cadre juridique
inévitable pour exercer une activité commerciale.
L'expression « fonds de commerce» est employée pour la première fois par la loi fiscale du
28 février 1872 en frappant d'une taxe les mutations de clientèle9. C'est donc par la porte de
l'impôt que cette locution est entrée dans le langage juridique; c'était la reconnaissance d'un
nouvel élément de la fortune générale10.La notion de fonds de commerce se dégage donc au
XIXe siècle sous une double nécessité. D’une part, avec l’émergence du capitalisme, les
commerçants souhaitaient pouvoir protéger leur clientèle contre les attaques des concurrents,
donner à celle-ci la plus grande stabilité possible et, partant, protéger les investissements
intellectuels et financiers réalisés. En particulier, une reconnaissance du fonds de commerce
6
B.-J. BERNARD, D. RICHARD, Droit des affaires, 8e éd., L.G.D.J., 2015, p. 184.
7
Ibid.
8
Ibid.
9
Ibid.
10
G. CENDRIER, Le fonds de commerce, traité général théorique et pratique avec formulaire revue et
complétée par R. MARTIN , R. MAUS, Paris, Dalloz, 5éme éd., p.1.
3
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
permettait au commerçant de soutenir que son exploitation avait une valeur supérieure à la
simple somme du prix de ses éléments constitutifs11. D’autre part, la reconnaissance du fonds
de commerce était souhaitée par les créanciers des commerçants, en tant qu’élément
patrimonial de ces derniers. En créant l’entité « fonds de commerce », le contrôle des
opérations effectuées par le commerçant devenait plus commode, en particulier par la mise en
place de règles de publicité12.C’est dans ce contexte qu’est né le gage sur fonds de commerce,
dans la mesure où il permit aux commerçants de lever plus facilement des fonds pour financer
leurs activités et aux institutions de crédit de disposer d’une garantie plus efficace.
Le fonds de commerce n'est pas un tout juridique ayant son économie particulière. Il ne forme
pas une universalité soumise à un régime propre. A plus forte raison ne peut-on, même par
fiction, le considérer comme une personne distincte de celle de l'exploitant. C'est la
convention des parties qui réunit entre eux, pour en faire l'objet de transmissions simultanées,
des valeurs de condition différente. Ces valeurs sont rendues seulement solidaires en fait par
un intérêt d'exploitation13.
Nous voici en plein crise sanitaire aussi importante que n'importe quelle autre dans l'histoire
de l'humanité, celle de la pandémie de Covid-19. Dans de telles circonstances, s’il est
essentiel de faire tout notre possible pour comprendre les effets de la pandémie sur
l’exploitation du fonds de commerce et pour trouver des solutions qui répondent aux besoins
actuels sur le plan de la sauvegarde des objectifs attachés à la constitution d’un fonds de
commerce, il est tout aussi crucial de dégager des meilleures pratiques qui pourraient être
utilisées à l’avenir pour répondre à tout incident futur de ce type, d'une manière coordonnée et
cohérente.
Le fonds de commerce n’a pas de définition légale, ni une définition doctrinale unanimement
admise du fonds de commerce. La doctrine a cependant proposé un certain nombre de
définitions. Le mutisme a d’ailleurs continué avec la loi du 17 mars 1909 baptisée « Loi
Cordelet», n’en déplaise à l’importance qui lui est faite. Malgré l’ancienneté de la notion, et
son omniprésence dans la vie économique, le fonds de commerce, en tant qu’institution
juridique, ne reçoit aucune définition légale. Différents textes y font toutefois explicitement
référence14.Un auteur français nous donne également une définition intéressante « le fonds de
commerce est constitué par l’ensemble des biens mobiliers affectés à l’exercice des activités
11
M. VERCRUYSSE, E. LAUWERS, Le fonds de commerce, Bruxelles, LARCIER, 1967, Extrait du Journal
des tribunaux 121e année no 6044 du 23 février 2002 le fonds de commerce virtuel : une réalité juridique ?p. 8.
12
G. SADDE, La notion de fonds de commerce virtuel, mémoire de D.E.A. Informatique et droit, Université de
Montpellier I, 1999-2000, p.11 et s.
13
E. THALLER, op.cit., p.59.
14
M. VERCRUYSSE, E. LAUWERS, op.cit. P. 10.
4
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Pour le lexique des termes juridiques, il s’agit d’un ensemble former des éléments mobiliers
corporels (matériel, outillage, marchandises) et incorporels (droit au bail, nom, enseigne)
qu’un commerçant ou un industriel groupe et organise en vue de la recherche d’une clientèle,
15
Y. GUYON, Droit des affaires, t. I, Economia, Paris, 1994, p. 665.
16
C. Cass. fr., 15 févr. 1937, D.H., 1937, p. 179.
17
F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, Droit commercial, 3ème éd., Montchrestien, Paris, 1993, p. 268. Pour cet auteur,
la clientèle devient ainsi « une possibilité de contrats futurs et renouvelés ».
18
Art. 135 AUDCG.
19
M. GRÉGOIRE, A.-M. Stranart, D. LECHIENIN, Sûretés réelles, partie II, fascicule 3, P.U.B., 5eme éd.,
p.108.
20
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant 12ème éd. mise à jour « Quadrige » : 2018,
janvier, p. 1013.
21
V., Dictionnaire hachette encyclopédique, éd. 2001, p. 618.
5
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
et qui constitue une entité juridique distincte des éléments qui le composent. Le droit
commercial saisit le fonds au titre des opérations qui le prennent pour objet : cession,
constitution de garantie (nantissement), location-gérance. Le bénéfice de cette réglementation
est parfois étendu aux autres fonds professionnels, notamment artisanal et agricole22.D’après
Dominique LEGEAIS, le fonds de commerce est un ensemble d’éléments divers, mobiliers
corporels et incorporels relatifs à l’exploitation d’un commerce et ayant tendance à rallier une
clientèle au profit du commerçant23.
Il est essentiel de définir quelques notions voisines et notions connexes du fonds de commerce
pour éviter toute confusion. Le fonds de commerce est distinct du fonds commercial. En effet
le fonds commercial est la valeur d’acquisition de l’ensemble des éléments incorporels du
fonds de commerce (clientèle et achalandage ; droit de bail s’il ne fait pas l’objet d’une
convention à part)24. Le fonds commercial regroupe les éléments principaux du fonds de
commerce. Ce sont la clientèle et l'enseigne ou la clientèle et le nom commercial, ou encore la
clientèle, l’enseigne et le nom commercial25.Ensemble d'éléments incorporels ne pouvant faire
l'objet d'une évaluation et d'une comptabilisation séparées, au bilan, et qui participent au
maintien et au développement de l'activité de l'entreprise26.Le fonds social est composé de
tous les apports des associés : argent, marchandises, fonds de commerce, industrie, crédit,
meubles, immeubles. Mais chaque associé apporte surtout son nom et le crédit qui s'y attache
; le plus ordinairement son industrie et toute sa capacité commerciale27.Le fonds de commerce
est une notion essentiellement juridique alors que l’entreprise est une notion essentiellement
économique. Le fonds de commerce ne serait qu’une composante de l’entreprise au côté des
éléments humains, des éléments corporels, incorporels, …28 . La raison qui pousse à ne pas
confondre fonds de commerce et entreprise tient au fait que l’entreprise n’est pas une
exclusivité du droit commercial dans la mesure où il y a des entreprises civiles (sans fonds de
commerce), des entreprises agricoles, des entreprises artisanales sans fonds de commerce
mais avec des fonds artisanaux29. Le fonds de commerce n’a pas de personnalité juridique. En
revanche, la société constitue une personne juridique qui détient un patrimoine et qui peut
détenir un ou plusieurs fonds de commerce. La société est donc le sujet de droit, alors que le
22
Voir Lexique des termes juridiques, Dalloz, 25e éd., 2017-2018, p. 909.
23
D. LEGEAIS, Droit commercial, 11ème éd., Paris, Sirey, 1998, p.65.
24
Site internet : https://fr.m.wikipédia.org . Consulté, le 17 septembre 2021 à 00h 45mn.
25
Cours de droit civil, 2ème année sur le site http://dfp.ci. Consulté, le 05 mai 2021 à 15h 02mn.
26
H. BITSAMANA, Dictionnaire de droit OHADA, 2003, p. 46.
27
A. BOISTEL, Précis de droit commercial, 2eme éd., corrigée, mise au courant de la jurisprudence, et enrichie
d'innombrables citations de doctrine, Paris, 1878, p. 134.
28
Ibid.
29
Ibid.
6
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
fonds de commerce n’est qu’un instrument juridique à disposition de la société, un bien parmi
d’autres dans le patrimoine du commerçant30.
L’exploitation est l’action de mettre en valeur quelque chose et d’en tirer profit31.Elle est
dérivée du verbe exploiter et peut signifier la mise en valeur d’une source de richesse
(agricole, industrielle). Ex. exploitation d’un domaine rural, d’une usine, d’un fonds de
commerce. Elle signifie non seulement l’action d’exploiter, mais aussi l’action de tirer profit
d’une chose que l’on fait produire. Ce que l’on fait produire pour en tirer profit32.Fonds du
Latin fundus signifie bien, expression générique servant à désigner les immeubles par
nature(fonds de terre ou bâtiments) pris comme biens principaux, notamment par opposition
aux immeubles par destination33et par extension dans l’expression fonds de commerce, une
entité mobilière complexe, autre source de richesse. Voir par exemple héritage34. Il signifie
non seulement une terre considérée comme immeuble35mais aussi, ce terme usuel peut
désigner un immeuble non bâti (fonds de terre), une entreprise commerciale à caractère
individuel (fonds de commerce), un cabinet de clientèles civiles (fonds libéral), un fonds
artisanal et plus généralement un capital36. Le mot commerce vient du latin commercium, de
merx (chose vendue), merces (le prix) qui signifie échange de marchandise pour l’argent37. Il
signifie en droit commercial l’opération ayant pour objet de mettre les divers produits de la
nature ou de l’industrie ou des services à la portée des consommateurs et des clients, à effet
d’en tirer un profit38.
La locution prépositionnelle ‘’à l’épreuve de’’ (en parlant d’une personne ou d’une chose) qui
peut être soumis à une expérience, qui est capable d’y résister, de la supporter39. Évènement
pénible, malheur, souffrance qui éprouve du courage, qui fait apparaitre les qualités morales.
‘’A l’épreuve de’’ signifie ‘’qui résiste à’’40.Expérience à laquelle on soumet une (ou la)
qualité d’une personne ou d’une chose et qui est susceptible d’établir la valeur positive de
cette qualité41.
30
Ibid.
31
Site internet : https://www.toupie.org . consulté, le 03 mars 2021, à 10h 16mn.
32
Dictionnaire hachette encyclopédique, op.cit. p. 496.
33
V. C. civ. fr., Art. 518 et s.
34
G. CORNU, op.cit., p. 907.
35
Dictionnaire hachette encyclopédique, op.cit., p. 503.
36
Lexique des termes juridiques, op.cit., p. 763.
37
Site internet : https://sites.google.com. Consulté le 16 mars 2020 à 21h 35mn.
38
Site internet : https://www.cnrt.fr. Consulté le 27 mai 2020 à 01h 11mn.
39
Site internet : https://www.cnrtl.fr. Consulté le 19 février 2020 à 19h 46mn.
40
Dictionnaire hachette encyclopédique, op.cit., p. 436.
41
https://www.cnrtl.fr op.cit.
7
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Dans la délimitation matériellement, nous nous intéresserons à toutes les bases légales, des
fondements textuels que jurisprudentiels sur lesquels l’exploitation du fonds de commerce tire
sa source et son expansion c’est-à-dire les fondements et l’évolution jusqu’à nos jours des
difficultés liées à l’exploitation du fonds de commerce. Dans le cadre spatial, nous allons
mener notre étude dans l’espace territorial du Cameroun mais aussi de l’espace OHADA car
le droit commercial camerounais est gouverné par l’AUDCG. Cette réflexion sera en fin
menée sur la base du droit comparer avec le droit français. S’agissant de la délimitation
temporelle, nous partirons de la naissance de la covid-19 jusqu’à nos jours.
L’objectif général de la présente étude est d’identifier les difficultés auxquelles est confronté
l’exploitant du fonds de commerce dans cette période exceptionnelle dictée par la pandémie
de Covid-19et de proposer des mesures palliatives des effets. L’intérêt réside tout d’abord
dans la constatation que le fonds de commerce, reste au cœur de la vie juridique de
l’entreprise malgré les critiques dont il est la cible et les orientations prises par le commerce
contemporain. Étudier l’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du Covid-19, c’est
apprécier la dynamique d’un concept considéré comme l’épicentre des activités du
commerçant.
42
R. NEMEDEU, « Les pandémies et le droit », in LE NEMRO Revue Trimestrielle de Droit Économique,
Avril/Juin 2020, p. 2.
8
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
systématisation de cette expression apparue dans le langage juridique à la suite des discours
sur le développement et méconnu des juristes, alors que sa place grandissante dans le discours
juridique de l’espace de l’OHADA est aujourd’hui indéniable.
L’analyse de cette thématique pourrait permettre de bien cerner les contours de l’exploitation
du fonds de commerce en période de crise. Ainsi, les informations que nous aurons à apporter
pourraient être d’une modeste contribution à la façon d’adapter l’exploitation de son fonds de
commerce pendant la covid-19. Aussi comme tout travail scientifique, l’analyse de la
thématique permet d’enrichir les œuvres scientifiques ; car à base de cette étude, il existe de
multiples textes juridiques et des écrits scientifiques qui ont vu le jour. C’est ce qui permet
d’élargir le champ de recherche de ce sujet.
Nous pensons donc sans être présomptueux que les différentes parties intervenant
dans la chaine d’exploitation du fonds de commerce, trouverons les ressources nécessaires et
une politique indispensable à leur exploitation et à la satisfaction des objectifs fixés.
9
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
question centrale sus-posée, la réponse est duale car il est évident que la crise sanitaire du
coronavirus rend difficile l’exploitation du fonds de commerce, mais il en demeure pas moins
que la covid-19 peut être une opportunité à saisir par le commerçant.
Par la méthode analytique nous démontrerons la manière dont la survenance d’une crise
pareille est aménagée en général en droit positif. Il s’agit, en quelque sorte, d’une démarche à
suivre dans toutes ses formes requises pour aboutir à un résultat attendu. En réalité, l’objectif
général de la présente étude est de jeter un regard analytique et critique des différents textes,
leur application dans ce contexte particulier de la pandémie de Covid-19.
43
Les cours de droit, L.G.D.J, 1969, cité par C. NACH MBACK, Démocratisation et décentralisation, Paris,
Karthala, PDM, 2003, p.45 et s.
10
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
PREMIÈRE PARTIE :
11
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
On intègre la clientèle dans les biens incorporels parce que c'est quelque chose qu'on ne
peut pas saisir et elle fait la notoriété du fonds de commerce. C'est incontestablement
l'élément principal du fonds de commerce, c'est ce qui le caractérise. C'est même ce qui
caractérise le commerçant. Il ne peut pas exister de fonds de commerce sans clientèle. La
doctrine est d'accord avec ça et la jurisprudence, dans une logique constante considère, que
«des éléments du fonds de commerce, la clientèle représente le plus essentiel, celui sans
lequel le fonds ne saurait exister». Cette position jurisprudentielle est à relativiser lorsque l’on
est au commencement de l'activité commerciale. Dans cette hypothèse en effet, on peut
admettre que le fonds de commerce existe même si la clientèle n'est pas effectivement
constituée dès lors qu'elle est certaine. C’est ainsi que la clientèle n'est pas seulement un
élément essentiel du fonds de commerce mais c'est aussi la finalité.
Étudier l’impact du covid-19 sur la finalité du fonds de commerce revient à déceler les
influences des restrictions gouvernementales suites à la pandémie sur la clientèle physique
(chapitre 1) d’une part et sur la clientèle électronique (chapitre 2) d’autre part.
12
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
CHAPITRE 1 :
UNE DÉCADENCE CONSTATÉE DE LA CLIENTÈLE PHYSIQUE
L’importance de la clientèle du fonds de commerce n’est plus à démontrer, elle reste son
élément essentiel sans lequel le fonds de commerce ne peut exister. Le législateur OHADA a
dans cette logique rendu cet élément obligatoire. C’est ainsi que l’AUDCG dispose : «Le
fonds de commerce comprend nécessairement la clientèle et l’enseigne ou la clientèle et le
nom commercial, sans préjudice du cumul de la clientèle avec l’enseigne et le nom
commercial»44. La crise sanitaire du coronavirus a eu une influence significative sur la
clientèle et la conséquence directe est celle de la chute du chiffre d’affaire. Pour les
entreprises du secteur des services, le chiffre d’affaires devrait connaitre une baisse de plus de
la moitié dans les différents secteurs d’activités si la pandémie perdurait. En effet, dans le
secteur du tourisme, de l’hôtellerie, des agences de voyage, du transport et de l’enseignement,
des arts et spectacles, le chiffre d’affaires devrait baisser de plus de 50% de l’avis respectif de
69%, 55%, 52%, 57%, des acteurs interrogés. Dans le secteur de la restauration, le chiffre
d’affaires sera marqué par une baisse de 25% à 50% pour 58% des acteurs interrogés et dans
le secteur financier, la baisse devrait être de l’ordre de moins de 25%45.
Les mesures prise pour juguler la crise ont conduit à une baisse et perte du pouvoir d’achat de
la clientèle (Section 1) qui a eu pour conséquence la diminution du flux de la clientèle devant
les magasins physiques (Section 2).
44
Confère Art. 136 de l’AUDCG.
45
CCR-UEMOA, Rapport final étude impact covid-19 sur le secteur privé de l’UEMOA, mai 2020, p.13.
46
A. MBOG, « Cameroun : le chiffre d’affaires des entreprises chute de 80% à cause de la Covid-19 »,
Financial Afrik, 17 Juin 2021. Disponible sur https://www.financialafrik.com/author/mbogachilleyahoo-fr/.
consulté le 15 novembre 2021 à 16h 20mn.
13
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Le pouvoir d’achat c’est la quantité des biens matériels et immatériels qu’un agent peut
se procurer sur le marché grâce à son salaire47. Dans un contexte sanitaire ou le coronavirus
dicte sa loi, le déséquilibre existant dans la relation quantité de biens qu’on peut se procurer et
le salaire c’est accentué. Ce déséquilibre est occasionné par la rupture des activités et
l’augmentation des dépenses sociales (Paragraphe 1 ). Le commerçant se trouve ainsi
confronter à une baisse de sa clientèle. Pour y faire face, celui-ci est obligé de se réinventer
(Paragraphe 2).
rationnement sur les autres marchés, en modifiant en conséquence les offres et demandes
qu’ils y manifestent50.
En ce qui concerne l’emploi, il faut noter le grand effort fournit par les entreprises pour
maintenir les emplois. En effet, dans le secteur des services, la plupart des emplois ont été
maintenus. Les secteurs d’activités qui ont procédé à des suppressions d’emplois l’ont fait en
général dans une proportion de moins de 25% (Tourisme, Enseignement, Transport,
Restauration, Hôtellerie)51. Il s’agit pour la plupart de contractuels et de personnels non
essentiels. Toutefois certains secteurs comme l’hôtellerie, les agences de voyage et de
tourismes, l’enseignement, etc. ont dû recourir à des chômages partiels/chômages techniques
pour certaines catégories d’employés en réduisant leur effectif salarié dans les proportions de
25% à 50%52. Ceci a inévitablement contribué à la baisse du taux d’emploi. Les restrictions
gouvernementales pour freiner la propagation du coronavirus ont des incidences négatives sur
les clients. Les consommateurs n’ont plus de source de revenus en raison de la baisse ou de
l’arrêt de leurs activités au temps de confinement, aussi à l’augmentation des dépenses de
consommation. En effet,la plupart des chefs de ménages ont perdu leur travail, certains ont
connu une augmentation des heures de travail, d’autres ont gardé le même quota d’heures de
travail et environs cinquante pour cent ont conservé leur travail avec une chute du quota
horaire de travail. Des organisations patronales à l’instar du GICAM révèlent dans leurs
enquêtes que le Covid-19 a entrainé la suppression et la mise en congés techniques de plus de
72 000 emplois, tandis que près de 14 000 PME sont en état de faillite53.
Les confinements imposés pour contenir la pandémie ont poussé l’économie mondiale dans
une récession sans égale depuis la Grande Dépression, au cours de laquelle des millions de
personnes, majoritairement les plus pauvres et vulnérables, ont perdu leur emploi et leurs
moyens de subsistance54.L’emploi est donc lourdement affecté. Une augmentation brutale des
pertes d’emploi est observée, en particulier dans les secteurs tertiaire et secondaire. Les
mesures d’appui à l’économie, particulièrement pour les petites entreprises, s’avèrent
50
Ibid.
51
CCR-UEMOA, op.cit., p. 23.
52
Ibid.
53
A. MBOG, op.cit.
54
« La pandémie de la COVID-19 : une opportunité pour développer des sociétésplus durables, justes, et
résilientes », La revue Liaison Énergie-Francophonie, no 115, 4e trimestre 2020. Site internet:
www.ifdd.francophonie.org, consulté le septembre 2021 à 05h 17mn.
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« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
insuffisantes pour mitiger l’impact de la crise55. Il est important de signaler avec emphase que
toutes ces mutations et modifications vont impacter les revenus des ménages.
Au même moment, les revenus venant du travail et des fonds provenant de la diaspora sont
réduits à des fractions de leurs niveaux d’avant la crise. La pandémie de Covid-19 a révélé à
quel point les revenus des ménages sont importants et comment ceux-ci ne sont jamais à l’abri
d’un choc exogène pouvant entraîner une dégradation rapide et inattendue de leur situation.
La décrépitude de la clientèle physique est causée par une chute des revenus. Il s’agit en effet
d’une baisse ou d’une perte de salaire. Le salaire qui est la rémunération du travail effectué
par une personne pour le compte d’une autre en vertu d’un contrat de travail ou d’un mandat
salarié56. Cette rémunération perçue permet au salarié de subvenir à ses besoins. Le chômage
et la perte d’activité occasionnés par la crise sanitaire influencent négativement la possibilité
de satisfaire les besoins fondamentaux des ménages. Force est de constater que la hausse des
prix sur le marché est consécutive aux difficultés rencontrées par les ménages. Suite à des
restrictions et mesures prises par les gouvernements, certains commerçants véreux en ont
profité pour augmenter les prix des produits essentiels dont la consommation est privilégiée
pendant la crise. En septembre 2020, les pays ont engagé 13 mille milliards de dollars pour
atténuer les impacts de la pandémie sur les ménages, les petites et moyennes entreprises et les
différents secteurs de l’économie57.
55
«Analyse rapide des impacts socio-économiques du COVID-19 au Mali », rapport des Nations Unies au Mali,
10 Mai 2020, p. 3.
56
B. MUSHAGALUSA D. & All (2021), op.cit., p. 472.
57
« La pandémie de la COVID-19 : une opportunité pour développer des sociétésplus durables, justes, et
résilientes », op.cit.
16
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
La baisse de revenue provoquée par les pertes d’emplois dans divers secteurs d’activité
ainsi qu’un accès extrêmement difficile à de nouvelles embauches influence négativement le
pouvoir d’achat de la clientèle. La crise pandémique à coronavirus va augmenter la pauvreté
qui va accroître le nombre de personnes en besoin d’assistance alimentaire de plus de 70%,
pour atteindre 1,3 million dans les prochains mois. La COVID-19 approfondie la vulnérabilité
des populations et fragilise encore plus leur résilience58.
À mesure que les revenus baissent et que les prix des produits augmentent, les gens
perdent déjà l'accès aux besoins de base comme la nourriture, le savon et les fournitures. La
plupart d'entre eux choisissent d'acheter des aliments en premier, ce qui rend difficile le
maintien des pratiques d'hygiène nécessaires pour arrêter la propagation du COVID-19. De
nombreuses familles réduisent également le nombre de repas qu'elles mangent. Tous ceci
influencent négativement les habitudes d’achat de la population et simultanément les activités
de commerçant. Que peut donc faire l’exploitant d’un fonds de commerce pour contrecarrer
les pertes d’activités ?
58
«Analyse rapide des impacts socio-économiques du COVID-19 au Mali », op.cit., p. 8.
59
«Les nouvelles formes du commerce : préparer l’avenir ! », Commission des Affaires Économiques. Site
internet: http://www.senat.fr/commission/affaires_economiques/index.html, 10 février 2021.
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« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Il est toujours important de définir la zone de chalandise. Il s’agit en fait d’une zone
géographique dans laquelle de potentiels consommateurs y résident. Dans ce contexte
extrêmement difficile le commerce de proximité doit prévaloir. Il s’agit de trouver une
stratégie qui consiste à limiter la zone de chalandise en fonction de la zone de livraison vu les
contraintes sur la mobilité. Acheter en ligne et aller chercher en magasin, autrement connu
sous le nom de Click & Collect permet d’acheter la plupart des biens de cette manière ; quel
que soit la nature. Le Click & Collect a connu une croissance constante au cours des dernières
années, mais il a explosé ces derniers mois avec le COVID-19 et les restrictions d’achats en
magasin, affectant toutes les entreprises, aussi bien celles commercialisant des produits de
premières nécessités, que les autres. Avant l’impact du COVID-19 sur les habitudes de vente
et d'achat, près de 70% des consommateurs américains utilisaient le Click & Collect, et on
s'attend à ce qu'environ 90% des commerçants traditionnels proposent le Click & Collect avec
la COVID-19. Toutefois, ce pourcentage est susceptible de changer au fur et à mesure que les
commerçants et les consommateurs s’adaptent à ces circonstances particulières60.
Le Click & Collect a plusieurs avantages pour les commerçants. Certains d’entre eux
possèdent déjà une méthode efficace de Click & Collect, tandis que d'autres sont en recherche
d’optimisation. Lorsqu’un commerçant utilise un système efficace et sécurisé, il peut
bénéficier des avantages suivants61 : les achats supplémentaires effectués par les clients, la
diminution des frais d'expédition, la fourniture aux consommateurs un plus grand choix de
produits, une bonne exploitation des données et une personnalisation de sa matière
d’exploiter.
Le commerce de proximité est aussi à conseiller dans cette période pandémique. Alors
que le monde entier est ébranlé par la pandémie du coronavirus, les acteurs économiques et
les consommateurs locaux s’adaptent de plus en plus à cette crise inédite. À mesure que le
60
«COVID-19 et Commerce : l’impact de l’achat en ligne et du retrait en magasin». Site internet:
https://www.hitachi-solutions.fr/blog/.
61
Ibid.
18
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
comportement des consommateurs évolue et qu'ils expriment de plus en plus d’achats en ligne
ou de livraisons à domicile, le commerce de proximité se transforme pour maintenir son lien
social et économique avec les populations. Cela implique obligatoirement un amour
immodéré les produits locaux. Bien que chaque entreprise locale soit différente et que
chacune doive faire face à ses propres défis, un accompagnement collectif et solidaire
s’impose. Certes, le manque de perception de la sortie de crise inquiète, mais la covid-19 sera
forcément un nouveau marqueur dans la stratégie clientèle. S'il peut être judicieux de
continuer à investir dans la promotion territoriale des produits locaux et l’attractivité du fonds
de commerce, il est probable que les stratégies employées changeront pour s’adapter à la
réalité du covid-19. Le client sera de plus en plus sensible au « consommer local », à
l’authenticité du commerce de proximité. Par exemple, nous avons remarqué que les
commerçants du secteur alimentaire qui se sont mis à la vente et la livraison à domicile ont
pour la très grande majorité remporté un franc succès, économique et social. Cela nous
montre que les exploitants de fonds de commerce doivent poursuivre ce genre d’initiatives de
commerce de proximité comme un élément majeur de la résilience. Ils devront faire en sorte
de comprendre collectivement les futurs besoins des clients, puisque ces besoins seront ceux
de l’après covid-19, ceux du commerce de demain. Dans l’immédiat, l’urgence est à
l’accompagnement, l’urgence est à la solidarité commerciale, parce que cette crise, si inédite
et si pénible soit-elle, aura le mérite de nous rappeler la nécessité de développer le commerce
de proximité.
La livraison à domicile, comme les drives, doit être intensément utilisés pendant cette
période par de nombreux commerçants pour continuer à adapter et développer leurs services.
Mais pour être plus percutant il doit falloir accentuée la communication.
19
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Gardez le contact avec ses clients et faire connaître l’évolution de son offre permettra de
palier à une perte grandiose de la clientèle. Pour cela, il est important d’animer sa présence
sur les réseaux sociaux en publiant régulièrement et en partageant des contenus, des photos,
des offres promotionnelles... Pour cela un Smartphone, une tablette ou un ordinateur suffisent.
Aussi, tenez informés sa clientèle sur ses produits ou sur d’éventuelles nouveautés, réductions
en leur envoyant un courriel, un SMS ou grâce à la rédaction d’une lettre d’information.
L’enregistrement et préparation des commandes doit être pris au sérieux pendant la crise. Les
prises de commandes pourront être effectuées sous forme dématérialisée par mail, téléphone,
fax, sms, site web... Il est ensuite précisé au client qu’il doit attendre la confirmation de la
mise à disposition de la marchandise et d’un créneau d’enlèvement ou de livraison avant de se
déplacer. Les exploitants de fonds de commerce, selon leur mode de fonctionnement, mettront
en place des dispositions soit de livraison directe, soit de retrait de marchandises, selon les
préconisations indiquées ci-dessus.
Dans les cas où le commerce est contraint de fermés, il est essentiel d’afficher à l’entrée
de l’établissement que les agences sont fermées et indiquer les modalités de fonctionnement
éventuelles ; informer les collaborateurs, les clients et les sociétés de livraison de votre mode
de fonctionnement (messages sur répondeur, par courrier, mailing, affichage, sur site internet,
informant les clients des modalités mises en place pour passer leurs commandes et venir les
récupérer voire se les faire livrer) ; s’assurer de l’organisation de vos clients en cas de
livraison; organiser au maximum ses agences pour permettre une continuité de service pour
62
« Commerces en temps de crise sanitaire : comment recréer du trafic en magasin ? », Publié le 26 juillet 2020,
mis à jour le 18/05/2021. Disponible sur https://entreprise.mma.fr/.
20
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
En somme, il est indispensable de maintenir le contact avec les clients, et être transparents
avec eux sur les soucis éventuels qu’on rencontre. Mieux vaut prévenir que guérir, en termes
de santé comme en termes d’exploitation de fonds de commerce.
63
COVID 19 - Guide de bonnes pratiques pour les agences, publié le 21 avril 2020. Disponible sur
https://www.petitscommerces.fr/.
21
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Les commerçants ont vu leurs ventes chutées, la cause est que certains clients craignant
que les produits importés ne soient infectés par la COVID-19, et beaucoup d’autres ne
pouvant plus se permettre ces dépenses. S’agissant de la contamination de produits et défauts,
certains commerçants dépendent de leurs fournisseurs pour offrir des produits finaux de
qualité à leurs clients. Mais si, par exemple, un producteur alimentaire a un problème de
contamination ou si un produit présente un défaut de fabrication, commerçants peuvent se
trouver soit sans un article dont ils ont besoin, soit avec un produit qu’ils ne peuvent pas
vendre. Dans le cadre des éventuels plans d’urgence, il est conseiller de trouver d’autres
fournisseurs et stratégies qui vous permettront de poursuivre ses activités. Discutez également
avec ses fournisseurs de leur couverture d’assurance et déterminer si on sera couvert si un
problème éventuel survient de leur côté. De plus, on devrait passer en revue votre couverture
pour déterminer ce qui serait couvert par une police de rappel.
22
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
B- Changement de comportement
Dans cette situation de crise, le comportement des consommateurs a également changé,
et ceci d’une façon multi générationnelle. Il y a ceux qui sont isolés ou enfermés ne pouvant
pas accomplir leurs achats habituels, ceux qui transfèrent leurs achats sur un mode
exclusivement de drive ou de livraison à domicile, et puis il y a les touristes qui ne peuvent
plus venir et que nous avons définitivement perdus en cette période de covid-19. Par ailleurs,
les inquiétudes concernant la disponibilité des marchandises ont encouragé l'achat panique
d'articles en grande quantité pour du stockage.
A titre d’illustration, 51% des clients ont réduit non seulement les quantités des denrées
achetées mais également leur qualité (c'est-à-dire des denrées à moindre coût avec une faible
valeur nutritive). Dans le même chapitre, on a noté respectivement que 22,4% et 24,4% des
clients ont réduit la fréquence de leurs achats et sont demandeurs d’achats à crédit64.
64
Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, «évaluation de l’impact de la hausse des prix des
denrées alimentaires sur la sécurité alimentaire des ménages dans les villes de Bamenda, Douala, Maroua et
Yaoundé au Cameroun ».
23
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
virus perturbe nos vies est telle que chaque jour semble apporter une "nouvelle normalité",
nous devons faire preuve de prudence. Des clients ont revu à la baisse leurs commissions, ont
mis des campagnes en pause ou ont fermé des programmes entiers. Cela représente une partie
non négligeable des clients du réseau, mais nous sommes loin d'avoir atteint le pic mondial de
cette pandémie qui se répercutera bien plus loin lorsque nous reviendrons à la normale. Des
changements monumentaux se produisent quotidiennement et d'autres suivront
inévitablement.
65
« COVID 19 - Guide de bonnes pratiques pour les agences », op.cit.
24
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Les consommateurs sont désireux d’acheter en ligne des produits de première nécessité,
comme les produits d'épicerie, le shampoing et le papier toilette. Ce qui autrefois nécessitait
un déplacement en magasin, est susceptible de changer car les consommateurs ont changé
leurs habitudes de consommation. Alors que la crise sanitaire du covid-19 continue de
progresser contraignant la majorité des entreprises à se mettre en sommeil. Mais le secteur de
la grande distribution alimentaire, revoit ses perspectives vers une forte baisse.
Pour réduit la chute de la clientèle consécutive aux restrictions des gouvernements, il faut
un aménagement de l’agence en mode « dégradé », il s’agit par exemple le maintien des accès
restent fermés et surveillés par le responsable de l’accueil à l’entrée de l’agence : une pancarte
25
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
plastifiée indique les horaires d’ouverture de l’agence, les conditions de prise de commandes,
de retrait de marchandises, de livraison, d’accès en fonction de chaque entreprise et un
numéro de téléphone. Pour s’en sortir, les commerçants devront alors, d’une part, innover en
aménageant l’espace extérieur réservé à l’approvisionnement et au retrait des marchandises.
Dans cette logique, fermer tous les accès non essentiels à l’organisation du retrait des
marchandises ou des livraisons. Les clients ou livreurs patientent à l’extérieur ; indiquer un
numéro de téléphone visible de tous permettant au livreur ou au client de livrer ou récupérer
de la marchandise ; éventuellement filtrer l’accès, sur rendez-vous uniquement, aux clients
professionnels et livreurs, en fonction de votre organisation.
D’autre part, ceux-ci devront faire un aménagement des locaux intérieurs (en fonction du
mode d’organisation). Il s’agit par exemple de la fermeture du showroom, libre-service ; toute
porte donnant un accès à une zone d’enlèvement ou autre doit rester ouverte et être
désinfectée régulièrement. Pour les portes qui doivent rester fermées, demander à les ouvrir
avec le coude ou la main ; les comptoirs pour retrait de marchandises (selon le mode de
fonctionnent) : délimiter et aménager des zones de courtoisie entre le comptoir et le client ;
poser (éventuellement) des plaques en plexiglas pour éviter toute transmission du virus ;
retirer toutes fournitures des comptoirs.
26
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Chapitre 2 :
UNE ASCENDANCE CONTRASTÉE DE LA CLIENTÈLE
ÉLECTRONIQUE
La notion de clientèle virtuelle est apparue pour désigner la clientèle d’un fonds de commerce
électronique (ou numérique)66. En effet, les sites web marchands constituent de véritables
fonds de commerce, qui valent parfois très chers. De nouveaux éléments attractifs de la
clientèle sont nés par la même occasion, par exemple le référencement (l’équivalent de
l’emplacement géographique) ou le nom de domaine (l’équivalent de l’enseigne)67.
Alors que la crise sanitaire perdure et que le développement du commerce en ligne gagne en
intensité, il est essentiel d’analysé les enjeux pour les exploitants de fonds de commerce de
l’essor de nouvelles formes de commerce et proposer des pistes pour se saisir des opportunités
qu’elles offrent. Le commerce électronique et l’économie numérique ont connu une
croissance considérable tout au long de la décennie qui s’est achevée en 2019. Des taux de
pénétration d’Internet améliorés, des couts d’Internet réduits et l’essor du mobile constituent
un fondement solide qui pourrait être sous–tendu par les évolutions du capital et financement
risque, les payements en ligne, et la logistique. Le régime règlementaire de l’Afrique est
encore à la traine, et demeure généralement épars et caractérisé par une faible force
exécutoire68. Grand est le nombre de commerçants qui n’ont pas de point de vente réel et se
limitent à une commercialisation de leurs produits sur internet. Plusieurs d’entre eux n’ont pas
de local commercial pour exploiter leur fonds de commerce et exercent leurs activités
commerciales par le biais d'un site Web69.
Les canaux digitaux, notamment l’existence d’un site de vente associé aux magasins, ont
permis à de nombreux commerçants de pallier la fermeture ou la limitation du canal
magasin70. A menace globale réponse globale. C’est alors évident de remarquer que la crise
est un moteur de changement. Elle booste le développement du e-Commerce qui était masqué
par des réticences. Raison pour laquelle la majorité des exploitants des fonds de commerce
font de leur priorité la transformation numérique de leur fonds de commerce. Pour palier aux
effets pervers de la crise et s’adapter aux comportements de sa clientèle, le commerçant est
66
A. TONNELLIER, Le statut juridique du site internet, Th. Paris 2, 2011.
67
B.-J. BERNARD, D. RICHARD, Droit des affaires, 8e éd., L.G.D.J., p. 190.
68
« Impacts de la Covid–19 sur le Commerce électronique en Afrique », Commission économique des Nations
Unies pour l’Afrique, Site internet:www.uneca.org consulté le 13 février 2020 à 20h 11mn.
69
N. IVALDI, C. MANARA, Vers la société en réseau, Petites affiches, 02 juin 2000, n°110.
70
« 100 solutions digitales au service du commerce », Site internet: www.fevad.com, consulté le 28 octobre
2021 à 03h 58mn.
27
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
L’acte uniforme relatif au droit commercial général révisé de 2016 met un accent sur
l’évolution des pratiques commerciales. C’est ainsi qu’on assiste à une innovation telle que la
reconnaissance des échanges dématérialisés. Face aux évolutions d’achats des
consommateurs, il est crucial pour l’exploitant du fonds de commerce de prendre en compte
des nouveaux paramètres et de repenser la méthode d’exploitation pour une continuation
optimale de son activité. La Covid-19 est une sorte d'accélérateur des tendances présentes. Sur
certains sujets, la Chine était déjà en avance. Par exemple, le développement d'Alipay et du
paiement sans contact sont des développements en phase dans un monde post Covid. Cette
pandémie a permis de développer cela72.
71
Cité par R. ALEMDJRODO « Les défis du commerce électronique dans l’espace OHADA », p. 8.
72
S. BADAULT, « Le Covid-19 est un accélérateur de tendances », disponible sur Ecommercemag.fr, consulté
le 10 avril 2021 à 13h 02mn.
28
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
numérique. Le dernier rapport de la Fevad indique que les ventes sur internet atteignent
désormais 112 milliards d’euros, soit un bond de 8,5% effectué en un an73.
Un dynamisme est remarqué dans le secteur du e-commerce. Nous avons pendant cette
période de crise sanitaire observé non seulement une expansion des sites internet
(Paragraphe 1), mais aussi à l’évolution des modes de paiement (Paragraphe 2)
73
Disponible sur https://www.fevad.com/études-et-chiffres/, consulté le 13 mars 2020 à 10h 05mn.
74
Cité par R. ALEMDJRODO « Les défis du commerce électronique dans l’espace OHADA », p. 8.
75
CA, Paris, 28 janvier 2005.
76
Site internet :https://unemplacement.com/guide/fonds-de-commerce, consulté le 11 janvier 2021 à 16h 35mn.
77
C. VINCENTI, Colloque « Le Fonds de Commerce : un centenaire à rajeunir ! » Allocution de bienvenue et
présentation du colloque, Colloque de l'Association Droit et Commerce (Deauville, 4 et 5 avril 2009), Gazette du
Palais 04 juin 2009 n°155 ; B. WARUSFEL, Aspects juridiques de la dématérialisation des échanges dans le
commerce électronique, Petites affiches, 06 février 2004, n°27 ; G. PASSA, Les règles générales du commerce
électronique et leur application dans les rapports avec les consommateurs, Petites affiches, 06 février 2004, n°27
; G. BENAYOUN, TVA et commerce électronique : État des lieux, Petites affiches 06 octobre 1999 n°199 ; P.
GERARD, La réglementation des communications électroniques et le développement de l'internet et du
commerce électronique, Petites affiches, 21 février 2002, n°38 ; J. MESTRE, M. PANCRAZI, Droit commercial,
25ème éd, L.G.D.J., 2001, p. 1 et s.
29
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
plateformes on eu un fort taux de naissance (A) tandis que au même moment les clients se
sont orientés vers le e-commerce suite à la fermeture des points de vente physiques (B).
Il est essentiel de préciser que la création d'un site Internet n'est pas assimilable à
l'implantation d'un point de vente donnant naissance à un fonds de commerce comme l’a
souligné la Chambre commerciale de la Cour de cassation française78. Il a été soutenu que «
tout site électronique ouvert public, est bien un fonds de commerce en ce sens qu’il est destiné
à créer et développer une clientèle, et ce indépendamment d’autres éléments matériels
(marchandise, matériel informatique etc.) ou incorporels (logiciels, brevets etc.) »79.
Malgré une hausse de l’utilisation des sites de commerce électroniques dans les zones
urbaines au début de la pandémie, les ventes en ligne se sont stabilisées après la fin des
confinements alors que les services de logistique et de livraisons ont augmenté. Les
commerçants plus avancées dans les opérations numériques s’en sont mieux sorties que leurs
concurrents en raison de leur agilité, et de la diversification de leurs approches. Elles ont eu
une adoption accélérée des services numériques par leurs clients en raison des restrictions de
mobilité liées à la pandémie.
Le choix des formats les plus appropriés est important. La rentabilité de la publicité sur
des supports physiques tels que les panneaux d’affichage a
considérablement diminué pour des raisons évidentes et la distribution de brochures
imprimées a été interrompue : il est temps de miser sur les formats en ligne comme alternative
pour continuer à communiquer ses contenus et ses mises à jour. Les entreprises doivent
utiliser des formats en ligne qui conduisent rapidement les consommateurs vers leurs points
de vente physiques si ces derniers sont ouverts. Un catalogue dynamique, par exemple,
permet de mettre à jour le contenu en temps réel en fonction du stock disponible ; il peut
contenir des hyperliens qui redirigent les consommateurs vers votre site marchand en ligne.
CA Paris 28/1/2005, RJDA 2006, n°893. , Le site de commerce électronique : approche technique et juridique,
79
D’après l’indice Adobe Digital Economy Index d’Adobe, établi sur la base de milliers de
milliards de transactions en ligne pour 100 millions de produits, « le commerce en ligne est
devenu le principal canal de distribution durant la pandémie en raison des innombrables
mesures de distanciation sociale appliquées à travers le monde et de par le fait que les achats
antérieurement réalisés en personne le sont désormais en ligne »80.
En somme, partout dans le monde, le trafic Internet a explosé, notamment pour les
vidéoconférences ou les plateformes de streaming. En ce qui concerne les commerçants
exploitant les fonds de commerce par des canaux digitaux, ils ont vu leurs ventes augmenter
de plus de 50% et cela est dû à une nouvelle façon d’achat de la clientèle.
80
M. SPATARI, « le e-commerce en période de covid-19 un défi pour les travailleurs et les organisations
syndicales », étude a été réalisée grâce au soutien de l’organisation Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), 2020, p.7.
81
« Covid-19 : Tous les chiffres de l'explosion de l'e-commerce », Publié le 09 septembre 2020, mis à jour le 16
septembre 2020, disponible sur https://www.lsa-conso.fr/, consulté le 03 juillet 2021 à 07h 09mn.
82
Disponible sur :https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article-Ic/LEGIARTI000006220989/2020-10-07, consulté
le 19 octobre 2021 à 10h 43mn.
31
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
83
«COVID-19 : un nouveau palier atteint en France par le e-commerce», 22 April 2020, Site internet:
https://www.nielseniq.com/global/fr/insights/geography/western-europe/, consulté le 27 mai 2021 à 22h 17mn.
84
F. CLAESSENS, « 5 impacts du Covid-19 sur l’e-Commerce », 9 mars 2021, disponible sur https://www.sqli-
digital-experience.com/. Consulté le 01 novembre 2021 à 08h 32mn.
85
M. ABIDAR, l'impact du commerce électronique sur la stratégie marketing de l'entreprise, mémoire présenté
à université du Québec à Trois-Rivières ; septembre 2003, p. 57.
32
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Considérant toutes les possibilités qu'offre le commerce électronique, chaque entreprise doit
décider tout d'abord si elle utilisera ce moyen et, dans l'affirmative, pour quels produits
destiner à quelles clientèles et avec quelles formes de communication86. Il est observé pendant
la crise de coronavirus une augmentation des transactions en ligne(A) et un accroissement des
paiements en ligne(B).
Pendant cette période marquée par de multiples contraintes, les achats en ligne sont
devenus incontournable et les ventes en ligne ont été multipliées ainsi qu’une montée en
puissance des paiements dématérialisés.
Ibid.
86
87
M. RUFFEZ, « 2020, l'année où le e-commerce a définitivement pris son envol », publié le 4 février 2021 à
12h 40mn, sur le site internet :www.franceinter.fr. Consulté le 02 juin 2021 à 13h 44mn.
33
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Enfin, un dernier point permet de justifier qu’internet soit source d’économie pour la clientèle,
c’est la multiplication de l’offre et la confrontation facile des propositions commerciales.
Aujourd’hui on dénombre des millions de sites e-commerce actif, c’est autant de « magasins »
que le consommateur peut visiter en quelques clics pour comparer et trouver le produit le plus
approprié à son budget. Il peut également se faire assister par les comparateurs de prix qui
font le travail de façon très simple et gratuite.
88
R. ALEMDJRODO, « Les défis du commerce électronique dans l’espace OHADA », p. 2.
34
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
des inquiétudes pour le développement du secteur (A), il y a aussi que l’expérience en ligne
en vaut la peine d’être mis en exergue (B).
Une pandémie et ses conséquences socio-économiques qui a fait faire un bond en avant en
matière d'adaptation numérique mais de ce fait a également exacerbé le risque de fracture
numérique. C’est pourquoi plus que jamais il faut investir dans les infrastructures des TIC et
renforcer les compétences numériques, l'esprit d'entreprendre dans ce domaine et les
politiques de protection des données89. La cyber sécurité et sécurité de l’information : bien
que l’ère de la connectivité ait facilité la communication et que les chaînes
d’approvisionnement soient plus souples, il existe aussi des vulnérabilités.
développement, Premier segment, 2 et 3 juillet 2020, Point 3 sur les actions de la CNUCED, Covid 19 et
Relance, Remarques introductives.
36
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Les efforts supplémentaires et les difficultés rencontrées pour une transformation digitale
du fonds de commerce par les commerçants sont : l’achat du matériel et connectivité,
l’instabilité du courant, la connexion aléatoire et l’insécurité grandissant dans le secteur. Il est
aussi important de ne pas négligé l’expérience en ligne de la clientèle.
B- Expérience en ligne
Bien que la pandémie de COVID-19 présente une opportunité de transformation
immédiate pour le e-commerce, cela ne signifie pas que ce doit être un changement ponctuel.
Car les préférences des clients évolueront, et en parallèle, d’autres facteurs, comme des
startups innovantes, vont continuer à augmenter le rythme des perturbations dans le commerce
digital. Les commerçants doivent en conséquence innover plus rapidement que jamais dans le
développement de produits, l’expérience client et l’agilité opérationnelle.
Au-delà de la crise immédiate, les entreprises doivent investir dans l'éducation et dans
le numérique. Le e-commerce va certainement prendre de l’importance et pourrait même
connaître un essor après la crise. C'est le moment, si on a le temps, d'améliorer la planification
et les données de votre stock, de vous informer sur les outils numériques de communication et
de promotion, et de planifier des stratégies pour surfer sur la vague. Pour beaucoup
d'exploitants, un long chemin reste à faire pour endiguer les difficultés. Une majorité de
clients ayant acheté en ligne reportent ainsi des difficultés, soit dans l'expérience en ligne, soit
dans la disponibilité des produits ou la livraison. Il faut alors prévoir à l’avance les retours de
37
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Pour contrer les effets néfastes de la pandémie à coronavirus, les commerçants exploitant un
fonds de commerce virtuel, doivent opter non seulement pour une consolidation de la
visibilité en ligne (A), mais ceux-ci doivent également offrir une multitude de moyens de
paiement (B).
90
« Feuille de route pour une relance économique résiliente et durable », Conseil du patronat du Québec, 2021-
2022, p. 5.
38
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
qui sont devenues d’un coup des acteurs 100 % Internet, avec des ventes en ligne doublant ou
triplant en l’espace de quelques semaines91. Les commerçants doivent améliorer la visibilité
de leurs opérations. Ils permettront aux consommateurs de centraliser leurs opérations, en
supprimant les silos basés sur les magasins et les canaux et en donnant à ceux-ci une vue
d’ensemble claire des statuts des commandes, des profils clients et des niveaux de stock. Cette
visibilité accrue aide les membres de l’équipe à rester à jour avec les informations dont ils ont
besoin pour offrir un service exceptionnel. Dans les domaines de l’alimentation et de la
grande consommation, peu présents sur le Net, la bascule a été encore plus brutale. L’e-
commerce, une alternative rassurante pour les plus de 65 ans au temps du Covid-19, a
capté9,8 % des commandes lors du confinement, contre 5,7 % en 2019, selon le groupe
Nielsen. Et un tiers des 2,5 millions de foyers qui se sont approvisionnés en ligne pour la
première fois a l’intention de continuer92.
A la Fevad, on se réjouit tout autant de la percée des circuits courts et des magasins de
proximité sur le Web. « La crise a montré que l’on ne peut plus opposer local et vente sur
Internet », souligne son délégué général, Marc Lolivier. Une réponse à la campagne choc
lancée par la région Occitanie, en début d’année, autour du slogan « au lieu d’acheter en ligne,
j’achète dans ma zone »95. Selon Kottler et Dubois (1997), le marketing est si fondamental
que l'on ne saurait le regarder comme une fonction séparée. Il s'identifie à l'ensemble de
l'entreprise considérée du point de vue de son aboutissement final, c'est-à-dire le client. Si les
91
N. BAYLE, A. PIQUARD, « La bataille du e-commerce stimulée par la crise liée au coronavirus », Publié le
21 juin 2020 à 16h 00mn - Mis à jour le 22 juin 2020 à 11h 15mn. Site internet :https://www.lemonde.fr,
consulté le 29 octobre 2021 à 22h 16mn.
92
Ibid.
93
Ibid.
94
M. ABIDAR, op.cit, p. 62.
95
N. BAYLE, A. PIQUARD, op.cit.
39
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
96
M. ABIDAR, op.cit, p. 51.
97
Ibid.
98
Impact de la Covid-19 sur les FinTechs au Sénégal,Mars 2021.
40
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
incluse dans la carte bancaire et peut être activée ou désactivée par son utilisateur sur simple
demande auprès de sa banque. D’autre part via une application mobile sur un Smartphone.
On peut donc conclure que l’économie numérique peut être un puissant vecteur pour
l’exploitation du fonds de commerce en période de crise sanitaire actuelle avec le potentiel
d’alléger de nombreux fardeaux économiques de la COVID-19. Il s’ensuit que le commerce
électronique et le commerce numérique peuvent servir de moteur puissant pour la relance
économique désormais nécessaire99. La COVID-19 a permis aux acteurs du e-commerce
d’acquérir plus aisément des clients jusque-là réticents à l’idée de recourir à leurs services.
D’après un représentant syndical, « aux États-Unis, les clients se sont tournés vers le e-
commerce qui augmentera facilement sa part de marché après la crise sanitaire »100.
99
La CEA lancera un rapport sur les effets de la COVID-19 sur le commerce électronique en Afrique, 19 mars,
2021, Site internet : https://www.uneca.org/fr/, consulté le 24 aout 2021 à 19h 53mn.
100
M. SPATARI, op.cit., p. 9.
41
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Il ressort de cette première partie que l’exploitation du fonds de commerce a subi un coup
de fouet à cause de la COVID-19.La clientèle du commerçant, finalité de son fonds de
commerce a été fortement influencée ce qui a contribué à la chute de son chiffre d’affaire. La
baisse de l’activité suite restrictions suite au covid-19 a conduit inéluctablement à la baisse de
la clientèle. Pour y faire face, les réactions des commerçants sont diversifiées.
L’intensification des services en Drive, Click and collect et la livraison à domicile. Il faut
aussi mettre l’accent sur le commerce de proximité.
Les restrictions prises par les gouvernements ont contraint les populations à rester
chez eux et ont conduit inéluctablement à un développement accéléré du e-commerce. Le
coronavirus a bouleversé les habitudes des consommateurs. La demande en ligne restera
probablement conséquente après la fin de la pandémie, et les commerçants de tout horizon
devront s’adapter à un modèle nouveau que l’on a vu s’installer dans les habitudes et
comportements d’achat des consommateurs durant cette année. Pour les commerçants en
ligne, définir une stratégie de e-commerce gagnante et développer les compétences
nécessaires pour performer représentera sans aucun doute un défi énorme, mais aussi une
opportunité énorme d’augmenter les potentiels de rentabilité. Aujourd’hui, les spécialistes du
marketing et du commerce digital notent trois facteurs cruciaux qui seront indispensables pour
déployer une telle stratégie : développer une proposition de valeur commerciale adaptée à la
demande des consommateurs en ligne.
101
« Feuille de route pour une relance économique résiliente et durable », op.cit, p. 19.
42
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Deuxième partie :
43
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Le commerçant a aussi besoin du matériel et de l’outillage qui sont des biens meubles
durablement affectés à l’exploitation du fonds tels que les machines, le matériel roulant etc.
Desmarchandisesquisontdesstocksdematièrespremièresoudeproduitsdestinésàlavente. Il faut
noter cependant que ces éléments corporels n’ont pas toujours une importance dans un fonds
de commerce, par conséquent, bien que ces éléments corporels fassent partie du fonds de
commerce, l’acquéreur du fonds de commerce peut parfaitement se passer du matériel,
outillage et mobiliers anciens. Par ailleurs, il existe bien des fonds de commerce qui n’ont pas
de marchandises tels que les fonds des courtiers et agents d’affaires. Force est aussi de
souligner que, lorsque le commerçant exerce son activité dans un immeuble qui lui appartient,
le matériel et l’outillage sont considérés comme des immeubles par destination. Ils obéissent
alors au régime des immeubles, sortent du fonds de commerce et par conséquent ne peuvent
plus entrer dans le gage des créanciers nanti sur le fonds.
Il faut donc évaluer l’impact de la covid-19 sur le droit au bail (Chapitre 1) d’une part et
sur les éléments corporels du fonds de commerce (Chapitre 2) d’autre part.
44
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Chapitre 1:
L’IMPACT DE LA COVID-19 SUR LE DROIT AU BAIL.
Face à une crise sanitaire sans précédent aux lourdes conséquences économiques, nombreux
sont les bailleurs et locataires qui, engagés dans un contrat de bail commercial, cherchent à
préserver leurs intérêts respectifs. De la nécessité d’honorer des engagements financiers
importants pour les bailleurs, aux besoins de sauvegarder leur fonds de commerce pour les
locataires, les intérêts des uns et des autres s’opposent parfois. Dans un tel contexte, il est
important de connaitre les devoirs et obligations que leur relation contractuelle leur impose
tout en les actualisant au regard des décisions gouvernementales particulières nécessitées pour
tenter de sauvegarder des entreprises en perte d’activité ou au bord de la faillite. Tellement
d’intérêts financiers sont mises en jeux dans cette période qu’il est important de connaitre les
droits et obligations des locataires dans ce contexte financier difficile où la sauvegarde des
activités est une priorité.
Il est important d’étudier l’impact de la covid-19 sur les droits et obligations du locataire
commercial (Section 1) avant de voir comment celui-ci peut il se prévaloir des restrictions
gouvernementales suite à la pandémie à coronavirus pour essayer de s'affranchir de ses
obligations qui découlent du bail commercial (Section 2).
45
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
gouvernementales, mais également, plus généralement, des difficultés économiques pour les
fonds de commerce d’activité non essentielle touchés par cette pandémie.
Il est important de rappeler que le bail comme tout contrat de louage est soumis au
principe du droit commun du droit de louage102. Les exploitants de fonds de commerce ont vu
leurs droits se détériorer pendant la pandémie. En effet les droits impactés du locataire dans
les locaux pris à bail sont de deux ordres : ceux relatifs à l’affectation des lieux loués (A) ainsi
que ceux relatifs à l’abandon de la qualité de locataire (B).
A- Impact du covid-19 sur les droits relatifs à l’affectation des lieux loués.
Le preneur est tenu d’exploiter les locaux donnés à bail, en bon père de famille, et
conformément à la destination prévue au bail ou, à défaut de convention écrite, suivant celle
présumée d’après les circonstances103.Toutefois il est possible, pour le preneur, d’adjoindre à
l’activité prévue au contrat de bail des activités connexes ou complémentaires relevant d’un
même domaine que celui envisagé lors de la conclusion du bail. Le preneur doit en aviser de
manière expresse le bailleur. Le bailleur peut s’y opposer pour des motifs graves104.En cas de
changement de l’activité prévue au contrat, le preneur doit obtenir l’accord préalable et exprès
du bailleur qui peut s’y opposer pour des motifs sérieux. En cas de conflit entre le bailleur et
le preneur, il appartient à la partie la plus diligente de saisir la juridiction compétente105.
C’est ainsi que par un arrêt du 13 novembre 2014, la cour d’appel de Versailles a jugé que le
locataire ne peut se prévaloir du silence du bailleur à la demande de transformation des
locaux, pour déduire l’accord de ce dernier. Le locataire qui transforme un local commercial
en local d’habitation sans l’accord du bailleur commet un manquement à ses obligations qui
justifie la mise en œuvre de la clause résolutoire prévue par le bail106. De même une
jurisprudence constante énonce que le locataire ne peut exercer dans les lieux loués que
l'activité prévue au bail107.
Les mesures prises par les gouvernements dans le but de limiter la propagation du covid-
19 peuvent pousser le locataire à vouloir ajouter une activité ou à changer complètement
l’activité qu’il exerce dans les locaux. Il s’agit soit d’une déspécialisation partielle soit d’une
102
Confère Art. 1713 et s. C. Civ. fr.
103
Confère Art. 113, al.1, AUDCG.
104
Confère Art. 113, al.2, AUDCG.
105
Confère Art. 113, al.3, AUDCG.
106
J. DRAY, « Le respect de la destination du bail commercial », publié le 13/02/2015 sur le site internet:
https://wwww.consieljuridique.net/joan-dray/avocat-1647.htm, consulté le 17 septembre 2021 à 12h 36mn.
107
C. Cass. fr. ass. plén. 3 mai 1956 : JCP G 1956.II.9345.
46
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
déspécialisation plénière108. Face aux difficultés que rencontre l’exploitant d’un fonds de
commerce en cette période de crise sanitaire, celui-ci peut migrer vers les produits de
premières nécessité qui font l’objet d’une hausse de demande.
La déspécialisation plénière doit être justifiée "eu égard à la conjoncture économique et aux
nécessités d'une organisation rationnelle de la distribution". Le locataire a une double preuve à
apporter : son activité n'est plus rentable et celle qu'il envisage profitera au consommateur.
Ces deux critères sont cumulatifs : il a ainsi été refusé la transformation d'un magasin de
chaussures (dont il n'était pas contestable que l'activité était en net déclin = premier critère) en
agence d'administrateur de biens et d'agence immobilière car le nombre d'agences avait été
jugé suffisant (second critère absent= ici absence de besoin pour le consommateur)109. Il est
donc évident que dans cette période pandémique certains biens subissent une fluctuation
importante entre l’offre et la demande. Fort de ce constat, pour maintenir la continuité de son
activité, n’en déplaise aux conditions difficiles, le preneur peut changer la destination du
fonds en observant la règlementation qui y sied.
En effet la résiliation judiciaire d'un bail commercial pour défaut d'exploitation des
locaux ne peut être prononcée si aucune stipulation expresse du bail ne fait obligation au
preneur d'exploiter son fonds de commerce dans les lieux loués111.En présence de désordres
108
« Guide : Le bail commercial », Informations juridiques. Disponible sur www.cci.nc, consulté le 26 octobre
2021 à 21h 35mn.
109
Kit technique sur la pratique des baux commerciaux , INES, novembre 2004, p. 8.
110
Disponible sur le site : https://www.svp.com/livreblanc/, Version actualisée le 24 aout 2020, consulté le 16
septembre 2021 à 01h 26mn.
111
Cass.civ. 3, 03-12-2020, n° 19-20.613, F-D, (voir aussi en ce sens Cass.civ. 3, 10-06-2009, n° 07-18.618,
publié ; Cass.civ. 3, 10-06-2009, n° 08-14.422, publié.
47
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
structurels sur le plancher partie commune, le syndicat des copropriétaires, sur le fondement
de l’article 14 de loi du 10 juillet 1965, mais également le bailleur, sur le fondement de son
obligation de délivrance (même si les désordres ne lui sont pas directement imputables),
doivent réparer les préjudices subis par le locataire placé dans l’impossibilité de poursuivre
l'exploitation du fonds de commerce112.
Au cours d’un bail commercial, les parties peuvent aussi décider librement d’un commun
accord de rompre leurs relations contractuelles, ce qui permet au bailleur de reprendre
possession de son bien rapidement et au locataire de ne plus payer les loyers et charges
jusqu’au terme de la période triennale en échange d’une libération des lieux. Cette résiliation
est soumise à un formalisme, puisque l’exigence d’un écrit est nécessaire. Dans la pratique,
les parties prendront la précaution de rédiger en des termes clairs les modalités de cette
résiliation amiable. Cet article vise à mettre en lumière le principe de la résiliation amiable du
bail commercial, ainsi que ses principaux mécanismes.
Les entreprises ont été exposées à des risques accrus qui impactent surtout les relations
contractuelles nouées par les commerçant. Dans de telles circonstances, il est difficile de
développer des relations d’affaires et de remplir les obligations contractuelles précédemment
conclues. Il est donc question dans un premier temps de voir les difficultés relatives à
l’obligation d’exploiter le fonds de commerce (A), avant de voir dans un second temps celles
concernant les obligations pécuniaires (B).
112
Cass.civ. 3, 03-12-2020, n° 19-12.871, F-D.
113
Confère Art. 1134 C. Civ.
48
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
S’il est vrai que le bénéfice du statut des baux commerciaux est subordonné à
l’exploitation par le locataire d’un fonds de commerce, la jurisprudence est aussi constante et
refuse ainsi ce bénéfice à celui qui a cessé son exploitation commerciale117. Le contexte étant
particulier, il faut tout au moins préciser que tout dépend de la rédaction des clauses du bail
commercial. C’est dans ce sens, la Cour de Cassation118considère que l’obligation d’exploiter
est une condition d’application du statut des baux commerciaux dont l’inexécution ne peut
entraîner la résiliation du bail que si une clause impose l’exploitation effective et continue du
fonds dans les lieux loués. La vigilance s’impose donc lors de la rédaction du bail119.
114
Confère Art. 113 AUDCG.
115
Confère Art. 123, al.1 AUDCG.
116
CA Paris, 5 nov. 1992, n° 91-18504, 16e ch. B, Mezescaze c/ SA, Crédit Automobile de France.
117
C. Cass., 7 juill. 1959, 12 mai 1996 et 10 février 1999 notamment.
118
Civ. 3ème ch., 10 juin 2009 : 07.18618.
119
Site internet : https://www.svp.com/livreblanc/, op.cit.
49
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Il convient d’emblée de préciser que la Cour de cassation avait déjà réaffirmé dans l’un de ses
arrêts que le locataire ne peut opposer au propriétaire l’exception d’inexécution, pour refuser
le paiement du loyer, au motif qu’il existerait des désordres affectant les lieux loués
empêchant une jouissance paisible125.La jurisprudence a alors développé une exception à
l’obligation de payer le loyer en cas « d’exception d’inexécution » lorsque le bailleur manque
à ses propres obligations. En fait, de nombreux locataires qui subissent des troubles de
jouissance, suite aux effets du covid-19, dans le cadre de l’usage de leur local commercial,
sont tentés de suspendre le paiement de leur loyers et charges. Dans cette perspective, le
locataire devra prendre la précaution d’agir selon un intérêt légitime car il doit garder à
l’esprit que le paiement du loyer est une obligation et que nul ne peut se faire justice à lui-
même.
120
A. CRUQUENAIRE, C. DELFORGE, I. DURANT, P. WÉRY, Droit des contrats spéciaux - Ouvrage à
l’attention des étudiants du programme de bachelier en droit, 5e éd., Liège, Wolters Kluwer Belgium, 2018, p.
225.
121
V. Art. 112 AUDCG.
122
M. HIGNY, « Le bail de droit commun », in Guide juridique de l’entreprise - Traité théorique et pratique, 2e
éd., titre III, livre 33bis, Liège, Wolters Kluwer Belgium, p. 75.
123
V. Art. 114 AUDCG.
124
M. HIGNY, « Le paiement du loyer et des charges au bailleur dans le bail d’un bien immeuble face
coronavirus », J.T., 2020, n°15, p. 265. Cité dans le livre blanc, Droit des affaires et COVID-19, Synthèse des
règles applicables aux entreprises, « Droit immobilier et covid-19 : Le paiement du loyer et des charges au
bailleur », livre blanc.
125
C.Cass, C.Civ, 5 octobre 2017 – n°16-19.614
50
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Une doctrine, à l’heure actuelle majoritaire, considère que l’obligation de paiement du loyer
est suspendue en raison de l’impossibilité pour le bailleur de fournir la jouissance des lieux
loués126.Le régime juridique que l’on appliquera à la question de la jouissance des lieux loués
et à la question du paiement du loyer devrait s’appliquer à la question des frais et des
charges127. Un jugement rendu par la Cour Supérieure du Québec le 16 juillet 2020 risque
d’avoir une incidence importante sur l’obligation de certains locataires de payer leur loyer
pendant la pandémie128. Suivant les circonstances précises de ce dossier, la décision confirme
qu’un locataire peut être relevé de son obligation de payer le loyer en raison d’un événement
de force majeure, lorsque cet événement empêche le bailleur de fournir au locataire la
jouissance paisible des lieux loués129.
Par ailleurs, la fermeture des commerces ne peut être assimilée à une destruction de la
chose louée130, et, elle ne rend pas l’exécution excessivement onéreuse pour le locataire131.
Seul doit donc être examiné le principe de bonne foi. Le locataire échouant à apporter la
preuve de sa bonne foi doit être condamné au paiement. Tels sont les enseignements d’une
ordonnance de référé du tribunal de commerce de Paris132.
126
M. HIGNY, op.cit.
127
A. DE BOECK, « Genera non pereunt, of toch wel ? », R.G.D.C., 2009, p. 445: « Aangezien de
opeisbaarheid van de door tijdelijke overmacht getroffen verbintenissen wordt geschorst, is ook de opeisbaarheid
geschorst van alle verbintenissen die niet zonder deze eerste verbintenissen opeisbaar zijn; zie voor het verschil
met de toepassing van de accessorium sequitur principale-regel: P.H. Antonmattei, Contribution à l’étude de la
force majeure, Parijs, LGDJ, 1992, pp. 222-223, nr. 317 », cité par M. HIGNY, « DROIT IMMOBILIER ET
COVID-19 : Le paiement du loyeret des charges au bailleur », livre blanc.
128
Hengyun International Investment Commerce Inc. c. 9368-7614 Québec inc., 2020 QCCS 2251. Cité par M.
MANZANO, C. COMEAU, C. BÉLAIR, « Impact de la COVID-19 sur le paiement du loyer commercial »,
actualité juridique, droit immobilier, 28 juillet 2020.
129
M. MANZANO, C. COMEAU, C. BÉLAIR, op.cit.
130
C. civ. art. 1722.
131
C. civ., art. 1195.
132
T. com. Paris, 11-12-2020, aff. n° 2020035120.
51
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Si les difficultés économiques rencontrées par le locataire ne sont pas, en tant que telles,
un motif d’obtention de plein droit d’une réduction ou la suspension du loyer, il existe
cependant plusieurs techniques juridiques permettant au locataire de tenter de les obtenir.
Nous tenterons ainsi à résoudre se problème en analysant la covid-19 sous le plan de la force
majeure (Paragraphe 1) d’une part et sous le plan de l’imprévision (Paragraphe 2) d’autre
part.
133
Disponible sur le site https://www.svp.com/livreblanc/, consulté le 03 décembre 2020 à 18h 32mn.
134
S. MOUTABIR, « Impact de Covid 19 sur le paiement du bail commercial », RERJ, n°6, p. 196.
52
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son
obligation par le débiteur »135.
Il faut rappeler à ce stade que cette notion de force majeure a toujours fait débat entre les
juristes, étant une notion flottante qui peut s’interpréter différemment selon le contexte136. La
force majeure, notion prétorienne, est désormais codifiée par l’article 1218 du Code civil. Elle
est constituée par un évènement correspondant aux caractéristiques fixées par les parties ou, à
défaut, par la loi et a pour conséquence d’exonérer l’une ou l’autre des parties de l’exécution
de son obligation. Dès lors, l’examen des clauses et conditions de chaque contrat et plus
particulièrement des clauses afférentes aux conditions et conséquences de la force majeure
s’imposera nécessairement. Sous l'empire de l'ancien 1148 du Code civil, les Tribunaux
avaient déterminé les caractéristiques de celle-ci, à savoir l’existence de trois critères
cumulatifs : l’extériorité, l’imprévisibilité et l’irrésistibilité. Le nouvel article 1218 du Code
civil reprend substantiellement ces derniers et détermine la qualification de la force majeure
sous ces trois critères cumulatifs : l’événement doit nécessairement échapper au contrôle du
débiteur ; l’événement ne pouvait pas être raisonnablement prévu au moment de la conclusion
du contrat et l’événement doit produire des effets qui ne peuvent être évités par des mesures
appropriées.
135
L’article 79 de la convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises prévoit
qu’une partie n’ayant pas exécuté une obligation sera exonérée de responsabilité si elle prouve que « cette
inexécution est due à un empêchement indépendant de sa volonté et que l’on ne pouvait raisonnablement
attendre d’elle qu’elle le prenne en considération au moment de la conclusion du contrat, qu’elle le prévienne
ou le surmonte ou qu’elle en prévienne ou surmonte les conséquences ». Dans le même sens, Art. 1218 C.Civ.
français.
136
Pour une étude pointue de la notion de force majeure, Voir F. GLANSDORFF, «Le point sur : La force
majeure», Journal des Tribunaux, 2019, n°18, p. 355.
137
C. Cass., 14 oct. 2010, n°09-16.967.
138
C. Cass., 15 octobre 2013, n°12-23126.
53
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
La doctrine belge141, considère que la force majeure suppose la réunion de trois conditions
cumulatives: l’évènement qui rend l’exécution de l’obligation impossible doit être
insurmontable, indépendant de la volonté du débiteur et imprévisible. Pour qu’un événement
soit considéré comme insurmontable, il faut que le débiteur, considéré comme tout autre
débiteur qui serait dans la même situation, se trouve dans «l’impossibilité d’exécuter les
obligations découlant du contrat»142, cette impossibilité pouvant être matérielle, juridique ou
morale.
Dans les développements qui suivent, nous tenterons de voir comment peut-on envisager
une application de la théorie de la force majeure pour le paiement des loyers commerciaux
dans le contexte de Covid-19.
139
Cass. Ass. plén. 14-4-2006 n° 538; Cass. com. 8-3-2011 n° 10- 12.807; Cass. 1e civ. 30-10-2008 n° 07-
17.134.
140
Cass. 1e civ. 19-12-2000 n° 98-14.141.
141
P. OMMESLAGHE, Les obligations, tome II, volume 2, collection DE PAGE Traité de droit civil belge,
Bruylant, éd. 2013, n° 966, p. 145.
142
Ibid., n° 968, p. 96.
54
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
locataire en ce que la pandémie est « par essence imprévisible » même si, selon nous, le
caractère imprévisible de l’événement s’appréhende notamment à la date à laquelle les parties
ont conclu le contrat de bail , son irrésistibilité faisait défaut, nécessitant l’appréciation de sa
situation financière et comptable, exposé dont ce dernier avait semble-t-il fait l’économie,
alors même que le bailleur prétendait qu’il était « partie du groupe Bocuse », valorisé à
« 100 millions d’euros »143. De plus, la cour rappelle que l’obligation pécuniaire est toujours
susceptible d’être exécutée144, relevant que de « simples difficultés d’exécution provisoires »
ne relèvent pas du régime de la force majeure. En somme, les deux obstacles habituels à la
caractérisation de la force majeure sont bien réunis : d’une part, la force majeure n’est pas
invocable s’agissant du règlement de ses loyers par le locataire et, d’autre part, le locataire ne
justifie pas du caractère insurmontable de la situation145.
Dans le cas de l’épidémie du COVID-19, le preneur ne serait pas fondé à exciper d’une
inexécution du paiement du loyer au regard des manquements du bailleur, mais au regard du
cas de force majeure empêchant ledit bailleur, en l’absence de tout manquement, de remplir
ses obligations fondamentales de délivrance et de jouissance paisible146.La jurisprudence a en
effet reconnu l’impossibilité, pour le bailleur, de satisfaire à l’obligation de délivrance147 ,
ainsi que de jouissance paisible, dans le cas spécifique de force majeure148. Dès lors, les
effets de la force majeure, en ce qu’elle conduit à une impossibilité absolue d’exploiter,
durant une certaine période, devraient ou pourraient, en toute logique, être similaires à ceux
d’une exception d’inexécution et ainsi conduire à une annulation de la dette locative durant la
période d’impossibilité absolue d’exploiter.
Force est de constater que plusieurs pays du monde ont qualifié cette pandémie de force
majeure. Il est ainsi de la France149, l’Italie150et le gouvernement indien qui ont affirmé que la
143
v. Riom, 2 mars 2021, n° 20/01418, Dalloz actualité, 26 mars 2021, obs. P. de Plater.
144
v. par ex. TJ Paris, 17 juill. 2020, n° 20/50920.
145
Bail commercial et covid-19, le droit et l’équité, Bail commercial, Dalloz Actualité, Edition du 26 Juillet
2021. Site internet : https://www.dalloz-actualité.fr, consulté le 25 novembre 2021 à 23h 56mn.
146
Confère Art. 1719 du C. Civ.
147
Cass. 3e civ. 7 mars 2006 n°04-19.639.
148
Bourges, Chambre sociale, 21 Mai 2010 – n° 09/0129.
149
B. LE MAIRE, « Coronavirus et monde du travail : réunion avec les partenaires sociaux », 28 févr. 2020.
Selon le Ministre français de l’Économie et des Finances la Covid-19 sera considérée comme un « cas de force
majeure » et en conséquence, que « pour tous les marchés publics de l’État, si jamais il y a un retard de
livraison de la part des PME ou des entreprises, [l’État] n’appliquer [a] pas de pénalités ».
150
CIRCOLARE, n° 0088612, 25 mars 2020. Ces certificats, tout comme ceux délivrés par le CCPIT, ne
sauraient néanmoins être interprétés comme contenant un avis juridiquement contraignant, bien que pouvant être
utilisés comme moyen de preuve en cas de contentieux. V., concernant les certificats du CCPIT, A. DISCOURS,
55
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Covid-19 ainsi que les mesures de confinement prises seront considérées comme un cas de
force majeure pour certains types de contrats publics151.
Face aux épidémies, l’argument de la force majeure avait vraiment du mal à prospérer dans la
jurisprudence française155. Ainsi, « de manière synthétique, dans ces précédents cas, les juges
ont considéré soit que les maladies étaient connues, de même que leurs risques de diffusion et
effets sur la santé, soit qu’elles n’étaient pas (assez) mortelles et ont donc écarté qu’elles
puissent être invoquées pour refuser d’exécuter un contrat. Une épidémie n’est donc pas
nécessairement ni automatiquement un cas de force majeure »156.
S. QU et J. BUHART, « L’impact du Covid-19 sur l’exécution des contrats. Étude comparative droit chinois /
droit français », JCP 2020, p.329.
151
Ministry of Finance, Department of Expenditure, Procurement Policy Division, No F. 18/4/2020-PPD, 19
févr. 2020 (contrats publics pour l’achat de bien et la fourniture de services) ; Ministry of New & Renewable
Energy, Grid Solar Power Division, No 283/18/2020, 20 mars 2020.
152
Q. FASSASSI, juriste, chercheur stagiaire à l’ERSUMA, « réflexions sur la qualification juridique de la covid-
19 en droit des contrats », numéro spécial de droit OHADA & COVID-19, 1ère série, n° 031, mars 2020. Site
Web : http://ersuma.ohada.org, consulté le 18 décembre 2020 à 9h 07mn.
153
Ibid.
154
Ibid.
155
Paris, 25 sept. 1996, n° 1996/08159 ; Besançon, 8 janv. 2014, n° 12/0229 ; Nancy, 22 nov. 2010, n°09/00003 ;
Basse-Terre, 17 déc. 2018, n° 17/00739.
156
L. LANDIVAUX, « Contrats et coronavirus : un cas de force majeure ? », disponible sur le site internet :
https://www.dalloz-actualite.fr/node/contrats-et-coronavirus-uncas-de-force-majeure-ca-dépend, consulté le 13
novembre 2021 à 02h 24mn.
56
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
l’OHADA, ni dans le Code civil français avant la réforme de 2016. C’est pourquoi, il y a eu
souvent recours à la solution consacrée par la jurisprudence dite « Canal de Craponne »157,
laquelle avait exclu toute possibilité de révision du contrat.
157
C. Cass., civ., arrêt du 6 mars 1876, De Galliffet c/ Commune de Pélissanne.
158
Dalloz 1916.3.25, concl. Chardenet, et Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, par LONG,
WEIL, BRAIBANT, DELVOLVÉ et GENEVOIS, Dalloz, 12e éd., 1999, 184-192. On y relève le considérant
suivant : « Considérant que par suite du concours des circonstances ci-dessus indiquées (guerre ayant gêné la
production du charbon qui sert à produire l’électricité), l’économie du contrat se trouve complètement
bouleversée ; que la Compagnie est donc fondée à soutenir qu’elle ne peut être tenue d’assurer, aux seules
conditions prévues à l’origine, le fonctionnement du service tant que durera la situation anormale ci-dessus
rappelée ».
159
(Civ. 6 mars 1876, DP. P. 1876, I, 193, note Giboulot. Les juges du fond s’étaient arrogés le pouvoir de
réviser les redevances dues par les bénéficiaires d’un droit fixé par des contrats datant de trois siècles, sous
prétexte que cette redevance n’était plus en rapport avec les frais d’entretien du Canal de Craponne. La Cour de
cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’Aix qui avait élevé à 30 centimes de 1843 à 1874, puis à 60 centimes à
partir de 1874, la redevance fixée à trois sols par les conventions de 1560 et de 1567. Pour elle, « dans aucun cas,
il n’appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse leur paraître leur décision, de prendre en
considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des charges
nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants ».
57
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
C’est précisément pour contrer l’absolutisme de cette jurisprudence que les rédacteurs de
l’ordonnance du 10 février 2016 ont rédigé l’article 1195 du Code civil ainsi : « Si un
changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution
excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci
peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses
obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties
peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent,
ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord
dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y
mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe.»160
58
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
De plus en plus donc, le juge se voit parfois investi par le législateur du pouvoir de corriger
les déséquilibres contractuels les plus flagrants. Très souvent, ce pouvoir de correction e
ramène à une réduction des obligations contractuelles161. Comme le relève si justement
Monsieur le Professeur Dénis Mazeaud, cette réduction des obligations contractuelles paraît
constituer une réponse à un remède à la double crise à laquelle le contrat et le principe
d’intangibilité qui l’innerve peuvent être confrontés162.
161
D. MAZEAUD : « La réduction des obligations contractuelle », contribution au colloque de l’Université de
Chambéry de 1997 sur le thème « Que reste-t-il de l’intangibilité du contrat ?», revue Droit et Patrimoine, 1998,
p. 58 et s.
162
E. BOKALLI, Séminaire de droit des obligations, thème : le juge et le contrat, Université de Ngaoundéré,
Année Académique 2019– 2020. Il s’agit : -crise interne, en premier lieu : au lieu d’être le fruit d’une
communauté d’intérêts animée par un altruisme minimum, le contrat est encore trop souvent le produit de
l’inégalité des contractants lors de sa négociation et la source d’une injustice contractuelle. Bien souvent, le
contrat est miné de l’intérieur par des conflits de pouvoirs qui perturbent son exécution et son équilibre est
compromis par des abus et des excès qui menacent, à plus ou moins long terme, sa vitalité et sa pérennité. Dans
ce cas de figure, la réduction des obligations contractuelles apparaît comme un moyen de restaurer l’équilibre
contractuel qui constitue une des exigences de notre droit contemporain des contrats, devant laquelle la
« liberté » contractuelle doit s’incliner ; -crise externe, en second lieu : le contrat n’est pas une entité isolée du
monde extérieur, insensible à ses évolutions, ses mutations et ses dérèglements. Aussi le droit des contrats ne
peut-il faire abstraction de la crise économique qui peut frapper de plein fouet le débiteur, lequel se trouve alors
placé dans l’impossibilité de faire face à ses engagements, voire en situation de grande précarité. Dans cet autre
cas de figure, il s’agit moins de sauvegarder le contrat que de sauver le débiteur des graves menaces auxquelles
sa situation patrimoniale l’expose. La réduction ainsi consentie ou imposée aux créanciers apparaît comme un
acte de la solidarité avec le débiteur.
163
F. GLANSDORFF, op.cit, n° 19, p.358 ; Aussi, A. DE BOECK, «Genera non pereunt, of toch wel ?»,
R.G.D.C. 2009, p.437.
164
Adage latin relatif à l’application de la théorie des risques: le risque est supporté par le débiteur. Exemple: en
cas de livraison d’un bien, c’est celui qui le vend qui reste responsable en cas de destruction avant qu’il ne rentre
en la possession de l’acquéreur (sauf potentiellement en cas de force majeure).
59
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Il s’agit ici d’une solution qui paraît équitable aux yeux du locataire. Le loyer, étant la
contrepartie de la jouissance du local où il exploite son commerce, il ne peut être honoré en
tout ou en partie chaque fois que la jouissance du local devient impossible par un fait de
prince. D’ailleurs, il y’a longtemps que la Cour de cassation avait raisonné de la sorte, en
déclarant: «attendu que le bailleur doit procurer au preneur la jouissance paisible de la chose
louée, conformément à la destination prévue par les parties; que, partant, lorsque des
circonstances de force majeure rendent impossible ou contrarient cette destination,
l’obligation de payer les loyers cesse en tout ou en partie»165.
Il faut préciser ici que la position prise par la Cour de cassation pourrait paraître radicale,
puisqu’elle pousse les juges à prendre des décisions d’exonération totale du preneur à bail
s’ils estiment, selon leurs pouvoirs discrétionnaires, que celui-ci n’est pas en mesure d’exercer
totalement son activité commerciale, ni de faire l’usage et de bénéficier des lieux selon la
destination pour laquelle ils ont été loués. A notre modeste avis, ni la position du bailleur ni
celle du locataire ne paraît juste aux yeux du juriste avisé. Il y’a, donc, lieu de nuancer en
apportant une position médiane qui n’avantage aucune partie et qui prend en considération la
particularité de chaque cas selon les circonstances y afférentes166.
Ce qui est sûr maintenant, c’est que les parties à un contrat de bail devraient, dorénavant,
rechercher autant que faire se peut introduire des clauses qui prévoient des solutions qui
permettraient de régler à l’avance les difficultés d’exécution des obligations réciproques lors
des pandémies.
165
C. Cass., arrêt du 9 janvier 1919, Pas., 1919, I, 52.
166
S. MOUTABIR, op.cit, p. 200.
60
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Chapitre 2 :
LES INCIDENCES DU COVID-19 SUR LES ÉLÉMENTS CORPORELS
CONTRIBUANT À L’EXPLOITATION DU FONDS DE COMMERCE.
Le caractère pandémique de ce virus et sa forte capacité de propagation impliquent des
conséquences sur l’ensemble des secteurs d’activités. Il apparait que les mesures décidées par
les États pour limiter la propagation du Covid-19 ont contribué à réduire l’activité :
l’instauration d’un couvre-feu qui contribue à la réduction des heures travaillées en raison des
aménagements induits pour les entreprises ; La fermeture des boîtes de nuit, des restaurants,
des cinémas et des lieux de spectacle change les habitudes de consommation des populations
et la fermeture des frontières terrestres limite les échanges transfrontaliers et les activités de
transports associées.
Dans l’Industrie, les secteurs d’activités les plus impactés par la crise du COVID-19 sont
respectivement l’agro-industrie (77%), le BTP et la construction immobilière (72%), les
mines (62%), l’industrie manufacturière (61%), l’industrie du pétrole (60%). Ce secteur subit
les effets de la rupture des circuits/ perturbation d’approvisionnement en matières premières,
de la diminution des volumes importés des matières premières du fait du confinement des
167
D. BERT, F. PLANCKEEL, L’essentiel du Droit commercial et des affaires,1re éd. 2017 2018, p.67.
61
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
A- L’effritement de la production
La productivité est aussi pénalisée par les règles de distanciation sociale, peu adaptées
aux entrepôts, qui ne permettent pas d’accroître suffisamment le nombre d’employés qui y
travaillent pour répondre efficacement à la demande169. 40% des entreprises ont déclaré que
leur production est directement affectée par les effets de la pandémie du COVID-19170. Cette
proportion masque de fortes hétérogénéités observées au niveau sectorielle et suivant la taille
de l’entreprise171. 69% des entreprises industrielles affirment que leur production est
directement affectée contre 26% seulement des entreprises de services172. Les grandes
168
CCR-UEMOA, op.cit., p. 9.
169
«COVID-19 : un nouveau palier atteint en France par le e-commerce», 22 avril 2020. Site internet:
https://www.nielseniq.com/global/fr/insights/geography/western-europe/, consulté le 26 juin 2021 à 10h 38mn.
170
GICAM, « covid-19 : impact sur les entreprises au Cameroun», rapport enquête covid-19, édition du 22 Avril
2020, disponible sur le site internet : https://www.legicam.cm/index.php/p/covid-19, consulté le 15 janvier 2021
à 15h 23 min.
171
Ibid.
172
Ibid.
62
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
entreprises déclarent à 50% que leur production est directement affectée contre 36% chez les
PME173.
Les consommateurs paniquent, ce qui les pousse à acheter et accumuler des produits
essentiels. En raison de ce comportement, les fabricants de nombreux endroits connaissent
une baisse de production, des ruptures de stock pour certains articles, les produits de
nettoyage à base d’alcool et le papier hygiénique étant des excellents exemples. Des
problèmes de transport s’ajoutent à l’équation, ce qui fait que les détaillants ont du mal à
regarnir leurs tablettes175.
Ainsi, 53% des commerçants indiquent que leurs unités de production ne pourront pas
tenir au-delà de trois mois. Les grandes entreprises sont les plus résilientes. Dans le contexte
173
Ibid.
174
« La pandémie de la COVID-19 : une opportunité pour développer des sociétés plus durables, justes, et
résilientes », op.cit., p. 6.
175
« COVID-19 : un rappel brutal de relever les défis de la chaîne d’approvisionnement», mars 2020, disponible
sur le site internet : https://www.marsh.com/ca/fr/home.html, consulté le 19 octobre 2020 à 11h 43mn.
176
CCR-UEMOA, op.cit., p.11.
177
« Feuille de route pour une relance économique résiliente et durable », op.cit, p. 7.
63
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
actuel marqué par la pandémie du COVID-19, 50% des grandes entreprises estiment qu’elles
peuvent tenir au-delà de 3 mois. En revanche, les PME sont les moins résilientes étant donné
que seulement 15,5% d’elles estiment être capables de tenir au-delà de 3 mois178.
Dans ce contexte extrêmement difficile ou la majorité des producteurs vivent une période
de latence aigue. Pour éviter que cette période perdure, il faut se réinventer.
178
GICAM, op.cit.
179
A. MBOG, op.cit.
180
« Feuille de route pour une relance économique résiliente et durable », op.cit, p. 19.
181
Ibid.
64
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
La difficulté des entreprises à embaucher des travailleurs et trouver les différentes ressources
nécessaires à leur modèle d’affaires risque d’être un frein à l’activité. Il est donc nécessaire
d’automatiser de la production impliquant moins de travailleurs et accroitre la production des
produits de première nécessité pendant cette période pandémique.
182
« COVID 19 - Guide de bonnes pratiques pour les agences », op.cit, p. 21.
Ibid.
183
65
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
dans le cadre de leur stratégie de gestion des risques. Celles qui ne l’ont pas fait ont éprouvé
des difficultés184.
Le chiffre d’affaires est en baisse de l’ordre de 25% dans tous les segments du secteur
industriel notamment dans l’agro-industrie, les mines et l’industrie du pétrole. Cela
s’expliquerait par les baisses de production liées aux mesures de distanciation sociales
adoptées dans les unités industrielles, notamment les rotations d’effectifs, la limitation des
effectifs dans les usines et chantiers et le couvre-feu. En ce qui concerne les mines et le
pétrole, la baisse des cours des matières n’est pas de nature à favoriser le niveau du chiffre
d’affaires. Ledit chiffre d’affaires connait une forte baisse de l’ordre de 25% à 50% dans les
BTP en raison de l’arrêt des chantiers et des conditions difficiles de financement des
travaux185.
La crise a mis en lumière la complexité des liens entre les économies et des chaînes de
valeur mondiales. Entre les avantages du commerce international et les risques d’une trop
grande interdépendance, il va falloir reconfigurer nos relations commerciales en plaçant le
cursus de manière stratégique entre la diversification des fournisseurs de matières premières
et des clients, la compétitivité de la production nationale et le stockage186. Les commerçants
devront également investir activement dans la transformation des matières premières
(caoutchouc, cacao, coton, etc.) de sorte à créer des industries locales fortes et prospères qui
s’intègrent parfaitement aux chaînes de valeurs mondiales187. Il est donc important de
réorienter la production en cette période de crise sanitaire.
B- Réorienter la production
Les commerçants doivent constamment s’adapter à leur environnement d’affaires et, malgré
l’incertitude ambiante, investir dans leur agilité, leur compétitivité et leur croissance. C’est
encore plus vrai dans le contexte de la pandémie. Les gains de productivité peuvent aussi
passer par le développement du capital humain, la capacité à innover, la montée en gamme de
produits, par une intégration généralisée des technologies ou encore par la restructuration des
coûts. La relance requiert par ailleurs de conforter la confiance des entreprises. Alors que la
situation financière des entreprises est, dans un grand nombre de cas, fragilisée par la crise de
nature inédite, il faut voir à la mise en place d’outils de financement innovants et de mesures
184
Orange Business Services, op.cit.
185
CCR-UEMOA, op.cit., p.10.
186
« Feuille de route pour une relance économique résiliente et durable », op.cit, p. 6.
187
Ibid.
66
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Il devient crucial de comprendre les facteurs qui motivent les producteurs à desservir tel
ou tel marché, et les consommateurs à se rendre à tel ou tel point de vente. Ces facteurs sont
centraux pour comprendre les forces d'attraction (centripètes) ou de dispersion (centrifuges)
qu'exerce la clientèle sur la production. Les artisans, petits commerçants et producteurs locaux
se démènent aussi comme de beaux diables, depuis que le confinement limite leurs
possibilités de vendre leurs productions comme avant.
L’accent doit être mis sur la production locale et l’assurance de la stabilisation des
approvisionnements en matières premières pour une utilisation continue du matériel et de
l’outillage.
188
Ibid., p. 19.
189
D. BERT, F. PLANCKEEL, op.cit.,p.68.
67
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
de la clientèle. Dans cette catégorie, on trouve le concept de stock, qui peut être constitué de
différentes choses telles que de matières premières, d’objets finis, ou d’objets semis finis.
Quoi qu’il en soit, cette marchandise n’est pas un élément stable mais variable, précaire,
fugitif. Ce sont des actifs corporels circulants que l’on nomme stock de marchandises destinés
à être vendus. Elles alimentent l’exploitation commerciale car lorsqu’elles sont vendues, les
matières premières sont converties en créance sur les clients. Ces créances deviennent
liquides, disponibles avant d’être de nouveau converties en stock. Ainsi, plus de rotation de
marchandises dans un même délai, plus il y aura de marge bénéficiaire et accroissement du
chiffre d’affaire.
En plus des répercussions de la crise du COVID-19 sur leurs propres activités, les
commerçants ont été aussi confrontés à d'importantes perturbations dans leurs chaînes
d’approvisionnement190(Paragraphe 1) et la limitation de leurs chaines de distribution
(Paragraphe 2).
La chaîne d’approvisionnement est clé de la réussite des entreprises. Il est donc important de
rendre plus de flexible la gestion des achats et de toutes les étapes de la chaîne
d’approvisionnement afin d’éviter des interruptions aussi importantes192.Une étude montre
que 44% des entreprises ont déclaré que leurs achats et approvisionnements sont directement
affectés par la pandémie du COVID-19193. Les entreprises industrielles et les grandes
entreprises semblent être plus concernées que les entreprises de services et les PME194. En
effet, 62% des grandes entreprises affirment que leurs achats et approvisionnement sont
affectés contre 38% chez les PME195. De même 56% des entreprises industrielles indiquent
190
Source map (2020), « How the coronavirus is affecting consumer supply chains », Sourcemap, disponible sur
https://www.sourcemap.com/blog/2020/3/29/how-the-coronavirus-is-affecting-consumer-goods-supply-chains-
tldr-for-once-its-on-the-demand-side-not-the-supply, consulté le 17 avril 2021 à 20h 53 mn.
191
P. DEUBEL, « Coronavirus et chocs d’offre et de demande », IA-IPR de SES Académie de Lille. Disponible
sur https://www.melchoir.fr/synthese/. Voir le décryptage de Marc-Olivier Strauss-Kahn : « Peut-on comparer la
crise du Covid-19 et celle de 2008 ? ».
192
Orange Business Services, op.cit.
193
Ibid.
194
Ibid.
195
Ibid.
68
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
que leurs achats et approvisionnements sont affectés contre 38% chez les entreprises de
services196.Bien que la santé des gens soit la principale préoccupation pendant la pandémie de
COVID-19, les interruptions de la chaîne d’approvisionnement se trouvent près du sommet de
la liste des risques commerciaux. À mesure que les gouvernements et les organisations
adopteront des mesures de confinement et d’atténuation, les répercussions sur les entreprises
augmenteront197.
Les contraintes d’offre sont évidemment liées aux perturbations causées par la mortalité
ainsi que parles confinements et les restrictions de mouvements de personnes et de biens, qui
accroîtraient les coûts de transactions et les conditions financières et perturberaient plus
directement le commerce, le tourisme, le transport et les transferts des migrants200. Ces
craintes d’offre (peur, confinement, limitation de la mobilité, augmentation des prix) ont
conduit à la chute de celle-ci. Cette chute est cause de l’inflation observée des prix de certains
196
GICAM Rapport, op.cit.
197
« COVID-19 : un rappel brutal de relever les défis de la chaîne d’approvisionnement», mars 2020, disponible
sur le site internet : https://www.marsh.com/ca/fr/home.html. Consulté le 29 mai 2021 à 18h 34mn.
198
P. DEUBEL, « Coronavirus et chocs d’offre et de demande »,IA-IPR de SES Académie de Lille. Disponible
sur https://www.melchoir.fr/synthese/. Consulté le 03 juillet 2021 à 04h 11mn.
199
Ibid.
200
CEMAC-PREF, « Incidences économiques et financières du covid-19 sur les économies de la CEMAC et
esquisses de solutions », 2erapport de la CEMAC sur les incidences de la covid-19 en Afrique Centrale, 25 mars
2020, p. 5.
69
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Sous l’angle d’offre, la crise Covid-19 constitue ainsi un facteur contraignant à l’offre puisque
la production nationale a été quasiment perturbée pour certains secteurs productifs suite au
confinement, à la pénurie de certaines matières premières importées, à la réduction des trafics
commerciaux entre les pays au niveau exportations et importations201. Elle constitue donc un
choc d’offre négatif qui a réduit la production nationale et a généré par conséquent une
augmentation des prix de certains biens (inflation)202.
Selon les témoignages, les grands importateurs ont décidé arbitrairement d’augmenter les
prix et de créer des pénuries fictives, malgré les prescriptions gouvernementales. Les produits
principalement concernés, sont les denrées de première nécessité, notamment le riz, sucre,
farine, lait, constate la délégation régionale du Ministère du commerce au Cameroun. Dans la
pratique, confient ces témoins, les grossistes fixent les prix à la tête du client. Les prix
homologués sont affichés pour dissuader les contrôleurs. « C’est une fois à la caisse, qu’on est
informé du vrai prix, et on est obligé de payer parce que c’est la même pratique chez la
plupart des grossistes. Si nous achetons cher, nous sommes obligés de revendre cher »,
déplore un autre commerçant. Dans cette confusion, même les produits vivriers subissent la
surenchère. Cependant, dans le lot, quelques rares semi-grossistes par peur de répression ont
conservé les prix homologués203.
On a ainsi assisté à une offre limité pour les produits de base. Simultanément, les prix des
besoins de base augmentent sur les marchés avec l'arrêt des échanges transfrontaliers. Les
vagues successives de stockage d'urgence par les ménages urbains en quarantaine ont limité
ce qui est disponible sur les marchés. Il a été révélé que près de 75 % des entreprises ont
connu des interruptions dans leur chaîne d’approvisionnement, en partie en raison des
restrictions de transport liées à la pandémie en cours. Aussi, plus de 80 % des répondants
croient que leur entreprise sera touchée par les perturbations dues à la COVID-19204.
201
M. SOLTANI « La pandémie covid-19 : une récession de l’offre et de la demande », Revue Économie,
Gestion et Société Vol 1, N°29 février 2021, disponible sur http://revues.imist.ma/?journal=REGS, consulté le 19
novembre 2021 à 19h 16mn.
202
Ibid.
203
« COVID-19 : Une dizaine de structures de distribution scellée à Douala», 1erAvril 2020, Site internet:
http://datacameroon.com/, consulté le 12 decembre 2021 à 06h 02mn.
204
« COVID-19 : un rappel brutal de relever les défis de la chaîne d’approvisionnement», op.cit.
70
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Au niveau de la demande, la pandémie Covid -19 a ralenti la demande des biens et services
chez les ménages, les entreprises et l’extérieur. En effet tous les agents économiques, suite au
confinement, ont limité leurs demandes de biens et de services, ont réduit leurs
investissements et leurs exportations. Cette baisse de la demande se conjugue à la baisse de la
production, augmente le chômage et réduit le niveau général des prix pour certains biens207.
Aujourd'hui, alors que l'activité reprend dans les villes et que l'économie redémarre, la
demande des consommateurs augmente et les fournisseurs peinent toujours à y répondre.
Après avoir été prises au dépourvu, certaines entreprises stockent plusieurs types de
matériaux, ce qui pourrait aggraver les perturbations des chaînes d'approvisionnement. La
demande mondiale pour les exportations africaines peut également diminuer dans certains cas
avec une contraction de la demande mondiale. Bien que les données semblent incohérentes
selon les sources, plusieurs observateurs des prix mondiaux indiquent que le prix mondial du
cacao en fin avril 2020 a baissé de 25 % au cours du mois dernier. Cela reflète apparemment
l’opinion selon laquelle la demande internationale de cacao pourrait diminuer à mesure que le
pouvoir d’achat des pays en développement se contracte. Une réduction du prix des cultures
d’exportation africaines réduirait les recettes d’exportation et l’assiette fiscale des
gouvernements, à un moment où une relance budgétaire pourrait être plus que nécessaire208.
Les contraintes de la demande sont multiples : les produits demandés non fournis ; la montée
en puissance de l’incertitude ; la poussée de la méfiance, les efforts de confinement ;
l’augmentation des charges ; le renchérissement des conditions financières ; la baisse des
205
P. DEUBEL, op.cit.
206
Ibid.
207
M. SOLTANI, op.cit.
208
« Renforcer la résilience dans les systèmes alimentaires et les chaînes de valeur agricoles : réponses de
politiques agricoles à la pandémie de COVID-19 en Afrique», Séminaire de réflexion en ligne, Organisé par
l’Institut africain de développement, Groupe de la Banque africaine de développement, Sous les auspices de la
Communauté mondiale de pratiques (G-CoP) sur les stratégies de réponse à la COVID-19 en Afrique.
71
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
revenus et du pouvoir d’achat. Tout ceci a de toute évidence des conséquences sur l’activité
d’exploitation du fonds de commerce. Il peut s’agit de la diminution de la circulation des
marchandises ; de la hausse des couts de transport ; de la baisse des transactions
commerciales ; du changement de comportement du consommateur dans les quantités
achetées (moins d’achats et beaucoup moins pour les articles ménagers, vêtements et produits
non périssables, grande quantité d’achats pour les produits alimentaire et hygiénique). Ces
contraintes de demande, qui résulteraient de la montée de l’incertitude209, de la poussée des
comportements de précaution, des efforts de confinement et du renchérissement des
conditions financières qui dans l’ensemble feraient baisser les revenus et le pouvoir d’achat
des ménages210 comme vu plus haut.
La covid-19 a révélé les limites de la logistique (A), c’est la raison pour laquelle il doit
falloir adapter les circuits de distribution (B).
209
Plusieurs sources d’incertitudes affectent actuellement l’orientation des politiques économiques dans le
monde : le temps qu’il faudrait pour que les mesures strictes de confinement réduisent la propagation des
infections à un niveau supportable par les systèmes de santé actuels, l’efficacité des mesures de confinement, le
risque de résurgence des infections avec la levée des mesures de confinement obligeant les États à rentrer dans
un nouveau cycle de mesures restrictives et les implications potentielles du durcissement des conditions
financières, etc.
210
CEMAC-PREF, op.cit., p.7.
211
R. LE MOIGNE, «SUPPLY CHAIN MANAGEMENT Achat, production, logistique, transport, vente», 2e
éd., p. 9.
212
Ibid.
72
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
La logistique devient le nerf de la guerre pendant la crise pandémique. Elle aura été l'autre
goulet d'étranglement important. Avec des services postaux notoirement à la traine, la
présence d'un drive efficace a fortement bénéficié aux enseignes à réseau qui ont su proposer
ce service. Les distributeurs ayant des processus et outils logistiques bien rôdés auront marqué
des points pour répondre à l'afflux de commandes, dans un contexte où de nombreux salariés
manquaient à l'appel. Au-delà de la vente en ligne, c'est toute la relation client digitale qui
s'est avérée critique dans un moment où il a fallu improviser et informer les clients en temps
réel.
Les retards d'expédition ont été observés: Les goulots d'étranglement sur le plan du
transport, les embouteillages dans les ports, les pénuries de main-d'œuvre dues à la maladie et
au confinement, les retards dans le déchargement des marchandises et la forte demande de
conteneurs de transport ont causé des retards importants dans le monde entier. Les difficultés
rencontrées sont diverses. Le secteur du transport est ralenti, la limitation des transports, le
manque d’effectifs, la désorganisation, les surcouts, la fermeture de certains points de vente,
la pénurie pour certains produits, les retards et rupture de stocks, la réduction de la mobilité
des personnes, les difficultés de transport des marchandises, la restriction des importations,
l’indisponibilité des transporteurs et les contraintes d’acheminement des produits. Il faut alors
s’adapter pour éviter le pi.
Ibid.
213
73
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
les vendre en bloc ou par locaux. La crise actuelle a durement impacté le secteur commerçant
sur un plan économique et mis celui de la distribution en première ligne face au virus.
L’une des particularités de la distribution des pays émergents réside dans l’aspect dual des
circuits moderne et traditionnel (Godman, 1981)214. Selon Amine (2012), d’un côté on note
l’existence d’un commerce de proximité formel qui constituait l’essentiel du tissu
commercial215. Ce format de distribution remplit une double fonction, celle de veiller à la
satisfaction du besoin de la clientèle en lui assurant la proximité puisque le commerçant se
trouve géographiquement proche de sa cible. La seconde fonction est celle du lien social où le
commerçant dépasse son rôle de distributeur et établit des liens personnels avec l’acheteur216.
Il faut distinguer le commerce alimentaire du commerce non-alimentaire, qui ont subi la crise
de façon totalement différente. Le commerce alimentaire avait une feuille de route
extrêmement claire : assurer la continuité de la chaîne d’approvisionnement tout en évitant au
maximum les pénuries et les fermetures de magasins. Le suivi a été organisé autour de
réunions quotidiennes avec les pouvoirs publics et les ministres concernés, avec trois
indicateurs clés : le taux de service des commandes, l’absentéisme dans les magasins et le
fonctionnement de la chaine logistique. Malgré les grandes difficultés rencontrées à certains
moments, nous pouvons être satisfaits puisque la chaîne a tenu. S’agissant des commerces
non-alimentaires, les choses étaient malheureusement différentes avec une interdiction
d’ouvrir pour la quasi-totalité des boutiques pendant près de deux mois dans certains pays.
Pour palier et surmonter les difficultés liées à la distribution, il est important d’élaborer un
plan d’urgence pour assurer la continuité de la distribution. L’idée est de prévoir une
meilleure flexibilité dans les livraisons et une diversification des chaines logistiques. Sur ce, il
faut par exemple, réduire de la taille de la livraison, diversifier les chaines logistiques, des
solutions alternatives en cas de défaillance d’un fournisseur, élaborer un plan d’urgence pour
assurer la continuité de la distribution, avoir les partenaires logistiques et anticiper les impacts
sur les chaines d’approvisionnement. Il faut contacter ses fournisseurs, prestataires et client
…, afin de savoir comment ils ont eux-mêmes prévu le maintien de leur activité. Repérer des
fournisseurs pouvant remplacer les fournisseurs habituels défaillants.
214
K. HAJRAOUI, H. CHALABI, «Impact du confinement du a la pandémie du sars-cov-2 sur le comportement
d’achat et la fréquentation des points de vente des produits alimentaires au Maroc. », Revue D’Études en
Management et Finance D’Organisation, N°12 Janvier 2021, disponible sur
http://revues.imist.ma/?journal=REMFO&page=about, consulté le 22 décembre 2021 à 22h 32mn.
215
Ibid.
216
Ibid.
74
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Ibid.
217
75
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
Face à ces changements sans précédent et à ces répercussions inédites sur leurs activités elles-
mêmes ou sur leurs chaînes d'approvisionnement, les entreprises ont adopté un large éventail
de mesures, et nombre d’entre elles ont mis des ressources, des dispositifs logistiques, des
compétences et des approches innovantes au service de la lutte contre la pandémie218. Par
exemple, certaines ont pris des mesures exceptionnelles pour assurer la pérennité de la
fourniture de biens et de services essentiels, et dans certains cas, elles ont réorganisé leur outil
de production pour fabriquer du matériel de protection et des équipements de santé219.
Les commerçantsontétéconfrontésàdegravesperturbationsdel'offreetdelademandeenraisondu
COVID-19.
Ilestintéressantdenoteràquelpointleprixaétéunepréoccupationmajeurependantlapandémie.Quec
esoitducôtédel'offreouducôtédelademande, les entreprises ont souffert en raison des prix plus
élevés et déloyaux. Ceux-ci se sont mobilisé massivement pour faire front et tenter de limiter
la casse, mais au-delà des conditions extrêmement difficiles, la question de l’application des
contrats conclus ou des relations commerciales en cours devra être traitée avec une vigilance
accrue, dès lors par ailleurs que les mesures de confinement seront levées et qu’un état des
lieux contractuel pourra être engagé.
C’est ainsi que les circonstances actuelles tendent ainsi nécessairement vers une insécurité
juridique qui risque d’être source d’un contentieux abondant. Il est donc très largement
conseillé, outre la lecture attentive de chacun des baux et, plus généralement, des contrats
litigieux, de respecter scrupuleusement le mécanisme contractuel. Ainsi, si les outils précités
permettent aux débiteurs d’une obligation contractuelle de se soustraire, au moins
temporairement, à celle-ci, il n’en demeure pas moins que l’appréciation du juge, au cas par
cas, restera un élément clé de leur efficacité. Aucune application automatique n’étant de
rigueur à ce jour.
218
WBCSD (2020), « How business is responding to COVID-19 » World Business Council for Sustainable
Development, disponible sur:https://www.wbcsd.org/COVID-19, consulté le 13 mai 2021 à 8h 48mn.
219
Ibid.
76
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
CONCLUSION GÉNÉRALE
La pandémie constitue une crise sans précédent par son ampleur planétaire. Elle a mis en
lumière les failles et les forces, de toutes sortes, de nos systèmes : en santé, en économie, en
éducation, dans nos chaînes d’approvisionnement, que ce soit dans nos plus petites comme
dans nos plus grandes collectivités. Les effets ont été considérables. Et comme dans toute
tempête, où l’on se distingue par notre capacité à naviguer à travers les vagues pour orienter
notre direction, la crise actuelle nous commande de répondre de la même manière : savoir
profiter des défis, aussi grands soient-ils, pour mieux orienter nos prochaines décisions afin de
transformer cette crise en vecteur d’opportunités. Puisque la pandémie a transformé
l’exploitation du fonds de commerce ainsi qu’un bon nombre de secteurs d’activités, la
révision généralisée de nos façons de faire permet d’envisager l’avenir sur des bases
nouvelles.
220
CCR-UEMOA, op.cit., p.21.
77
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
connectivité faciliteront la sortie de crise. Les commerçants dotées d’une grande agilité
numérique dans leur exploitation seront celles qui se développeront pour l’après en
capitalisant sur leur capacité de réaction face à l’imprévu.
78
« L’exploitation du fonds de commerce à l’épreuve du covid-19 »
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