International Journal of Financial Studies, Economics and Management, 2022, Vol.1, NO. 1, 12-33
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Abdeladim ENNAHAL
Doctorant, Laboratoire Universitaire de Recherche en Instrumentation et Gestion des
Organisations (LURIGOR), Faculté des sciences juridiques économiques et sociales,
Université Mohamed Premier, Oujda, Maroc
Mohamed ALMAACHE
Professeur d’enseignement supérieur. Laboratoire Universitaire de Recherche en
Instrumentation et Gestion des Organisations (LURIGOR), Faculté des sciences juridiques
économiques et sociales, Université Mohamed Premier, Oujda, Maroc
Résumé. Depuis les années 1980, la gestion publique traditionnelle s’est transformée,
donnant naissance à ce qu’on appelle le paradigme du nouveau management public (NMP).
Beaucoup d’administrations publiques sont imprégnées de cette tendance, réformant leurs
organisations, leurs outils et leurs formes d’intervention en vue d’améliorer l’efficacité et
l’efficience de leur gestion en vue de fournir des services publics de qualité. Toutefois, à
plusieurs reprises, les caractéristiques propres à chaque pays signifient que la mise en œuvre
des postulats du NMP est différente et a des rythmes différents même si sur certains points il
y a un certain degré de convergence. Cela a mis en lumière l’existence de limites quant à
l’applicabilité du NMP, ce qui a donné lieu à des critiques. Le Maroc n’a pas échappé au
processus de modernisation de son administration en s’appuyant sur les principes du nouveau
management public, l’objectif était d’améliorer l’efficacité des services rendus aux citoyens
et de réaliser des économies de coûts des dépenses publiques. Toutefois, un certain nombre
de lacunes n’ont pas permis aux pouvoirs publics marocains d’obtenir les résultats souhaités
du processus de modernisation mis en place depuis 2000.
Mots clés : Nouveau Management Public, Performance, Outils de gestion public.
Abstract
Since the 1980s, traditional public management has been transformed, giving rise to the so-
called New Public Management (NPM) paradigm. Many public administrations are
embracing this trend, reforming their organisations, tools and forms of intervention to
improve the effectiveness and efficiency of their management, in order to provide quality
public services. However, in different cases, the specific characteristics of each country mean
that the implementation of the NPM postulates is different and has different rhythms even if
on some points there is some degree of convergence. This highlighted the existence of limits
to the applicability of the NPM, which gave rise to criticism. Morocco has not escaped the
process of modernization of its administration by relying on the principles of new public
management, the objective was to improve the efficiency of the services rendered to the
citizens and to achieve cost savings of public expenditure. However, a number of
deficiencies have prevented the Moroccan authorities from achieving the expected results of
the modernization process in place since 2000.
Keywords : New Public Management, Performance, Public management tools
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1. Introduction
L’une des plus grandes transformations que subissent actuellement les États est la
remise en question de leur capacité à gouverner. Son existence même n’est pas remise en
question, puisque l’État est l’une des plus anciennes institutions et probablement la seule
capable de résoudre les grands problèmes auxquels l’humanité est confrontée. Les critiques,
mettent l’accent sur l’efficience et l’efficacité de l’administration publique à répondre aux
besoins et exigences croissantes d’une société plus participative et plus exigeante, de manière
adéquate et opportune et avec des ressources limitées. L’administration publique, en tant que
partie la plus visible du gouvernement, est confrontée à l’un de ses plus grands défis : devenir
un facteur de développement et non un obstacle pour consolider le développement
économique et social des nations. Dans un souci d’amélioration de performance, depuis les
années 80, les gouvernements ont commencé à remettre en cause leur philosophie
d’intervention et leur mode de fonctionnement. Le paradigme du nouveau management public
constituait le cadre de référence du processus de modernisation des organismes publics,
quoique son application par les différents pays soit sujette à un grand débat.
Partant de cela, comment le nouveau management public a vu le jour ? et quels en sont
les principes fondamentaux ? Comment les gouvernements les ont-ils mis en application ? et
est-ce que le NMP est une démarche universelle, applicable dans tous les contextes, ou bien
c’est une démarche contingente, qui doit prendre en considération les spécificités de chaque
pays ? Qu’en est-il de l’expérience du Maroc en matière de l’application des principes du
NMP, adoptés depuis l’année 2000 ? Quelles leçons a-t-on tirées de l’application du NMP au
Maroc ?
Pour répondre à ce questionnement, nous allons essayer de structurer le présent
document de la manière suivante : dans un premier lieu, le présent document décrit
l’émergence du paradigme du nouveau mangement public (New Public Management). D’un
point de vue historique et théorique, il passe en revue la bibliographie la plus représentative
qui montre la naissance du nouveau management public, ainsi que les onze principes de base
qui constituent la pierre angulaire de ce nouveau paradigme en management public. Afin de
tirer les leçons nécessaires de l’application du NMP dans de différents contextes, nous allons
faire une analyse comparative et présenter les trois modèles d’application du management
public dans différents pays. Ensuite, nous élaborerons une vision globale des grandes limites
et perspectives du nouveau management public. Enfin, la présentation de l’expérience
marocaine dans la mise en œuvre du nouveau management public en tant qu’approche de la
réforme de la sphère publique. Tout en résumant les grandes conclusions tirées de l’incapacité
à appliquer les principes de la nouvelle gestion publique au Maroc.
2. La genèse et l’évolution du nouveau management public (NMP)
Le nouveau management public (NMP) est un domaine international de débat
professionnel et politique sur les questions relatives à la gestion publique, y compris le
leadership exécutif, la conception de l’organisation des programmes et les opérations
gouvernementales. Le NMP est présenté comme politiquement neutre, bien qu’en réalité elle
ne le soit pas. Son hégémonie et sa large diffusion sont dues à sa capacité à répondre à
certains des dilemmes du monde d’aujourd’hui, notamment ceux générés par les coûts élevés
des services publics, ainsi que par la faiblesse de performances des services publics, et le
manque de contrôle des bureaucraties (Pollitt et Talbot, 2003). Dans ce contexte, les sources
théoriques du nouveau management public se trouvent dans l’école des choix publics et le
managérialisme classique (Osborne et Gaeber, 1992). En tant qu’ensemble de théories, la
critique du choix public des institutions et de la bureaucratie est très importante.
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ait aux États-Unis et au Canada qui ressemblent un peu à de telles approches, elles suivent des
voies différentes.
Le nouveau management public a une base intellectuelle éclectique (Vigoda-Gadot,
Cohen, et Tsfati, 2018). Dans une certaine mesure, il s’est inspiré du « nouvel »
institutionnalisme économique qui avait fleuri dans les années 40. Ainsi, il a tiré une partie de
sa splendeur des doctrines de la « culture d’entreprise » qui était en vogue dans les années
1980 (Peters et Waterman, 1982). Pour Hood et Jackson (1991), le NMP s’inscrit dans le
développement du mouvement intellectuel de la gestion scientifique, avec son souci
d’éliminer le gaspillage et de mesurer les produits du travail.
Cependant, pour Hood et Jackson (1991), il existe cinq éléments qui constituent un
facteur d’acceptation du nouveau management public, que l’on peut résumer comme suit :
• Symétrie : le NPM correspond au désir de changement des modes
administratifs, à l’émergence de quelque chose de nouveau, comme un « new
look » différent des idées de planification et d’ingénierie sociale des années
1960 et 1970 ;
• Métaphore : la principale métaphore du NMP consiste à gérer l’organisation de
l’État comme une entreprise privée (Bruno, 2021) ;
• Ambiguïté : comme le souligne Pollitt (1990), la rhétorique de la
« performance » comme leitmotiv du NMP est un concept vague et multiforme
qui véhicule un large ensemble de significations potentielles (efficience,
économie, efficacité, qualité, ou satisfaction des usagers). Ainsi, l’« amélioration
des performances » peut être interprétée comme un code pour l’économie
financière (amélioration des performances financières) et, en même temps,
comme un code pour la qualité du service. Il en va de même pour la
« responsabilité » et l’« excellence », si souvent invoquées par Peters et
Waterman (1982) ;
• Bien public et intérêts privés : le nouveau management public est présenté
comme une formule de bénéfice collectif. Elle repose sur la promesse de
meilleurs services publics pour les citoyens et moins coûteux pour les
contribuables ;
• Sélectivité de l’argumentation : le nouveau management public a généralement
recours à la citation d’exemples, d’autorités et de maximes. Sa défense regorge
d’anecdotes sur les échecs ou les gaspillages extravagants de l’« ancienne »
administration publique.
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passé du management public au nouveau management public. En réalité, les explications sur
le développement de l’administration publique ont reçu une secousse lorsque plusieurs pays
de l’OCDE ont commencé à s’orienter vers ce qu’on a appelé le nouveau management public.
Ce nouveau modèle stipule que les méthodes de fonctionnement du secteur public doivent
être modifiées, en supprimant les règles empiriques et en mettant l’accent sur les résultats.
Hood (1995), diffère de Hood et Jackson, (1991) sur plusieurs points. Tout d’abord,
l’idée que le nouveau management public est un « argument administratif » n’a pas été
mentionnée. Deuxièmement, il a fait référence au NMP du point de vue d’un modèle de
politiques et de pratiques, décrit comme un « style organisationnel des services publics » et
non du point de vue d’une philosophie administrative.
A présent, nous allons découvrir les autres développements du NMP à partir des années
1996. L’année 1996 a été marquée, entre autres, par deux publications importantes liées au
nouveau management public. La première était la compilation par Ferlie et al. (2008) d’une
étude sur le service national de santé britannique. En fait, cette étude a surtout mis l’accent
sur la conception et la mise en œuvre des programmes plutôt que sur le leadership exécutif ou
les politiques de gestion publique.
Une autre étude publiée en 1996 dans l’ouvrage Schick (2007) intitulé « The federal
budget: politics, policy, process », qui, en collaboration avec le département du Trésor et la
commission des services publics de Nouvelle-Zélande, a analysé le cas de la Nouvelle-
Zélande. L’accent a été mis sur la mise en œuvre des politiques de management public, dans
les domaines de la planification des dépenses, de la gestion financière et de la fonction
publique.
La publication de ces livres en 1996 sur le nouveau management public a montré à
nouveau qu’il s’agissait d’études de cas du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande. À cette
époque, le NPM avait déjà développé une expérience plus empirique, mais le travail théorique
restait timide.
Parmi les livres de la période 1998 à 2000, on trouve, l’ouvrage de Hood et al. (1999),
dans lequel il reprend le modèle de fixation de l’agenda de Hood et Jackson, (1991). Le
volume comprend plusieurs chapitres qui commentent le nouveau management public d’un
point de vue analytique et critique. L’année suivante, la Brookings Institution a publié l’étude
de Donald Kettl (2005) sur la « the global public management revolution ». Enfin, en 2000,
plusieurs publications sur le nouveau management public ont vu le jour.
3. Les principes fondamentaux du nouveau management public
Les propositions du nouveau management public sont aussi larges et variées que leur
utilisation. Elles vont des instruments, techniques ou technologies, qui, par leur nature même,
connaissent un succès circonstanciel et évoluent extraordinairement rapidement, aux
propositions sur la meilleure façon de lier les relations entre les organisations publiques.
Ces approches font partie des idées du nouveau management public qui, prises
ensemble, visent à construire des alternatives au modèle traditionnel du management public.
Sujet à de larges discussions, elles sont présentées brièvement :
• Réduction du secteur public : le principal postulat du NMP est la réduction de
l’influence exercée par l’Etat. La privatisation est l’outil le plus récurrent pour
justifier l’inefficacité du secteur public et la supériorité supposée du marché
dans l’allocation des ressources.
• Décentralisation des organisations : l’une des aspirations les plus immédiates
des acteurs du NMP a été de mettre fin au gigantisme supposé des organisations
publiques (Bruno, 2021). L’objectif central de la décentralisation est de
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les gérer, les écrits sur le New Public Management ont inventé un nouveau
concept : l’empowerment. Renforcer les capacités des gestionnaires ou des
citoyens, c’est leur reconnaître la capacité de prendre des décisions relativement
autonomes et de jouer un rôle actif dans la définition de l’intérêt public.
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1 Du nom de Derek Rayner, conseiller du Premier ministre britannique Margaret Thatcher, entre 1979 et 1990.
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Dans le cas des Pays-Bas, il existait un désir de réforme qui s’est poursuivi tout au long
des années 1980 et 1990. L’objectif global est la réduction de la taille et du champ d’action du
gouvernement par des politiques de privatisation, la création d’agences et l’analyse des
différentes formes d’intervention et de dépenses.
En 1982, l’initiative Great Deals a été lancée, visant à atteindre six objectifs (Kickert,
2003) : 1) reconsidération des dépenses publiques ; 2) réorganisation des services
administratifs centraux ; 3) déréglementation de l’intervention gouvernementale ; 4)
décentralisation ; 5) débureaucratisation des organisations étatiques ; et 6) lancement d’un
processus de privatisation.
Au début des années 1990, un nouveau projet appelé «Opération Grande Efficacité» a
été développé dans ces pays, visant à réduire les tâches gouvernementales et à améliorer les
structures organisationnelles. À partir de ce moment, les transformations aux Pays-Bas se sont
concentrées sur des objectifs spécifiques, tels que la création d’agences responsables de la
mise en œuvre des politiques, diverses mesures axées sur le client, des tentatives d’accroître
la productivité de la fonction publique ou la privatisation du système de gestion de la sécurité
sociale. Les innovations en matière de gestion publique dans les pays scandinaves suivent un
modèle similaire à celui des Pays-Bas. Toutefois, des réformes substantielles sont introduites
dans certains domaines inspirés partiellement par le «New Public Management».
Le cas de la Suède illustre bien les tendances de la gestion publique dans ce groupe de
pays. Le mouvement de réforme a commencé dans le cadre des défis de l’internationalisation
et de son adhésion à l’Union européenne dans les années 1990. Les stratégies suédoises
étaient les suivantes : réforme des processus budgétaires, introduction de mécanismes de
gestion des performances et transfert de la prise de décision gouvernementale aux agences en
ce qui concerne les ressources nécessaires pour obtenir des résultats (organisation, personnel
et finances).
Le Danemark, pour sa part, a mené une série de réformes visant à combiner l’impératif
d’efficacité, conformément aux principes du nouveau management public, et la défense de
l’économie de marché.
En analysant les expériences des différents pays en matière de l’application de la
démarche du nouveau management public, nous avons déduit que toutes les initiatives
présentées, cherchent à atteindre les mêmes objectifs, à savoir, la qualité de service,
l’efficacité socioéconomique et l’efficacité de gestion.
Mais elles se différencient en ce qui concerne la logique de mise en œuvre et de
l’ampleur de la réforme mise en place. A ce titre, la majorité des pays anglo-saxons, qui sont
considéré des pionniers (Huet et al., 2013) en matière d’adoption de la démarche du nouveau
management public, ont opté pour une démarche de réforme radicale de leur système de
management public, en transposant les outils et méthodes du management privé au
management public et en optant pour une logique de réduction de l’interventionnisme de
l’Etat au strict minimum. Tandis que l’expérience des pays de l’Europe continentale, a opté
pour une démarche progressive en matière de la mise en œuvre du NMP, notamment dans sa
composante managériale, mais l’interventionnisme de l’Etat dans ces pays est resté intact, au
contraire ces réformes visaient entre autres à renforcer la légitimité de l’interventionnisme de
l’Etat.
L’expérience de réforme dans les pays du troisième modèle, consiste à combiner entre
les deux logiques susmentionnées. Sur le plan managérial, ces pays ont procédé à l’adoption
des outils et méthodes du secteur privé qui peuvent contribuer efficacement à l’amélioration
de la performance des organismes publics qui souffrent d’un dysfonctionnement managérial.
Parmi les actions de matérialisation des approches du nouveau management public par
ces pays, l’adoption de l’agencification, en tant que démarche qui a permis à ces pays de
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réduire l’interventionnisme de l’Etat, mais en gardant le pouvoir sur les agences créées, via
leur statut juridique, la nomination de son directeur ou l’attribution de son budget.
En somme, nous avons constaté que les applications du nouveau management public
sont différentes d’un pays à l’autre, mais les objectifs visés demeurent les mêmes :
l’amélioration de, l’efficacité du management, la qualité des services rendus et l’efficacité
socioéconomique.
5. Le nouveau management public : approche universelle ou contingente ?
Comme déjà discuté, certaines réformes ont été des changements radicaux et d’autres
ont été plus progressives. Il est toutefois presque impossible de trouver un gouvernement qui
n’ait pas sérieusement examiné son système de management public et imposé une certaine
forme de changement. Il existe des différences dans l’ampleur du changement et dans le style
de changement adopté, mais il y a presque toujours eu un changement.
La réforme administrative a été une activité centrale des gouvernements au cours des
dernières décennies. Il ne s’agit cependant pas d’une activité indifférenciée, elle a pris
plusieurs formes différentes dans les différents contextes politiques dans lesquels elle s’est
produite. Ces différences sont, d’une certaine manière, liées aux différentes racines
intellectuelles des réformes. Les différences d’interprétation peuvent également être liées à
des différences dans les traditions politiques et administratives des pays dans lesquels elles
sont mises en œuvre (Blum, 2014).
En 1994, Schwartz (1994) a publié « Small States in Big Trouble », l’objectif principal
était de rendre compte des similitudes entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Suède et le
Danemark dans les années 1980. L’auteur s’est appuyé sur des cas dans des domaines aussi
disparates que la planification des dépenses et la gestion financière, les relations entre le
gouvernement central et les services déconcentrés, ainsi que la conception des prestations de
services publics. Ce que ce point de vue a démontré, c’est que le nouveau management public
n’est pas un paradigme unique et universel, car chaque pays a mené certaines politiques dans
des domaines qu’il considérait comme prioritaires.
Sur cette base, Schwartz (1994) a fait valoir que l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la
Suède et le Danemark étaient extrêmement similaires en matière de résultats, bien qu’ils
utilisent des outils administratifs différents. Il a ensuite expliqué ces similitudes, en faisant
largement appel à une grande partie du répertoire des idées théoriques du domaine de la
politique publique.
Le nouveau management public est loin d’être un paradigme universel qui pourrait être
appliqué de manière unique, au contraire, certains pays utilisent des outils différents du
nouveau management public pour obtenir les mêmes résultats.
Le développement des théories de l’organisation et de la gestion à un niveau général
peut nous aider à le comprendre, mais nous ne devons pas nous attendre à ce que toutes les
réponses proviennent de ce domaine, aussi fertile soit-il. La nature publique de
l’administration et la nécessité de comprendre le contexte social, culturel et politique des
organisations rendent l’administration publique spéciale. Par conséquent, l’adaptation de
l’approche générale du nouveau management public devra se faire très soigneusement et en
tenant dûment compte des facteurs contextuels et situationnels de chaque pays.
Pour l’essentiel, les objectifs des réformes, comme déjà précisé, sont les mêmes que
ceux exprimés dans le rapport Gore (National Performance Review) aux États-Unis en 1993 :
faire en sorte que le gouvernement fonctionne mieux et coûte moins cher. Cette expression de
« mieux fonctionner » peut varier d’un gouvernement à l’autre, et même d’une composante à
l’autre d’un même gouvernement. Le point fondamental, cependant, est que si le
gouvernement doit être en mesure de surmonter le mécontentement et la méfiance de ses
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citoyens, il doit trouver des moyens de devenir plus efficace et efficient dans les processus
d’élaboration et de mise en œuvre de ses politiques.
La bonne nouvelle est que les réformes ont créé un tout nouveau laboratoire pour
comprendre l’administration publique dans le monde entier. Une façon utile de comprendre
les processus politiques et administratifs de manière comparative est d’observer la manière
dont les différents pays répondent aux stimuli communs du changement. Ces stimuli
communs ont été présents dans le processus de réforme des dernières décennies, puisque les
idées sur ce qui constitue une bonne gestion publique ont été diffusées dans le monde entier, à
la fois de manière autonome et par l’action d’agents tels que les organisations internationales
et les consultants. Ces idées ont été comprises différemment, et mises en œuvre différemment,
lorsqu’elles sont entrées en contact avec les différentes cultures administratives, de sorte
qu’un langage commun du changement masque une complexité et une variation beaucoup
plus grandes.
Les réformes de l’administration publique doivent déterminer leurs propres priorités et
être guidées par les besoins de chaque situation spécifique. La recherche de solutions aux
problèmes de gouvernance dans les pays en développement exige une vision plus large qui est
adaptée à leurs besoins spécifiques et particuliers (Hinson et al., 2022).
Pour conclure ce point, il est à signaler, qu’il n’existe pas de modèles préétablis et
universels du NMP. Le changement doit être ancré dans la configuration spécifique de
l’histoire de chaque pays, de ses traditions et structures constitutionnelles et juridiques, de ses
forces politico-administratives, de ses perspectives économiques et sociales, ainsi que de sa
position internationale. Il n’existe pas de solution unique pour le secteur public dans son
ensemble.
6. Les limites et les perspectives du nouveau management public
Le nouveau management public n’a cessé de se développer depuis les deux dernières
décennies du 20ème siècle. Sa portée et ses limites structurelles doivent être examinées dans
le domaine de l’administration publique afin de déterminer la véritable nature de ce
paradigme.
Le nouveau management public reflète les idiosyncrasies de plusieurs disciplines qui le
nourrissent et, par conséquent, de ses sujets de spécialisation. Les disciplines qui l’étudient
sont l’administration publique, les sciences politiques, la gestion, l’économie institutionnelle
et publique, le droit administratif et la sociologie des organisations. A cet effet, la nouvelle
gestion publique est avant tout une gestion administrative des politiques publiques et tous les
domaines (Knoepfel, 1995) : de la planification et de la gestion financière, la fonction
publique et les relations de travail, l’organisation et les méthodes, les audits et l’évaluation.
Dans cette perspective, (HUGHES & Teicher, 2004) conviennent que le nouveau
management public est présenté comme un phénomène international, de sorte que ses
principes peuvent être appliqués à n’importe quel pays, quel que soit son niveau de
développement. Cependant, en réalité, les pays mettent en œuvre différentes réformes de
l’administration publique à différents moments et pour différentes raisons.
Pour sa part, Cristopher Pollitt (1990) relève quatre critiques de ce qu’il considère
comme un développement excessivement néo-tayloriste du New Public Management. Tout
d’abord, il détecte les tensions et les contradictions qui entravent la cohérence interne du
modèle, comme la motivation des employés publics, la participation démocratique, ou les
processus simultanés de délégation-contrôle.
Deuxièmement, Pollitt qualifie les postulats néo-tayloristes d’irréalistes, car il considère
qu’ils supposent la possibilité de transférer la gestion privée vers la sphère publique sans tenir
compte des spécificités de cette dernière.
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la Cour des comptes fait état de la faiblesse de la réalisation des objectifs initiaux du Plan de
Développement Économique et Social (Cours des comptes, 2017, p. 34), voire même des
réformes importantes non réalisées.
Quant au programme d’appui à la réforme de l’administration publique, dans ce même
rapport, la cour des comptes a constaté que « les réformes menées dans le cadre du PARAP
n’ont pas été centrées sur le citoyen et les mesures touchant la qualité des services offerts au
public. L’offre de services publics administratifs au citoyen n’a pas été améliorée » (Cours
des comptes, 2017, p. 34).
C'est pourquoi, à plusieurs reprises, Sa Majesté le roi Mohammed VI a exhorté
l’administration publique à repenser son mode de fonctionnement : « Les administrations et
les services publics accusent de nombreuses carences relatives à la faible performance et à la
qualité des prestations qu’ils fournissent aux citoyens. Ils pâtissent également de la pléthore
des effectifs, du manque de compétence et de l’absence du sens des responsabilités chez de
nombreux fonctionnaires. L’Administration souffre essentiellement d’une culture ancienne
chez la majorité des Marocains. »3 ;
En 2017, le souverain a réitéré ses directives au gouvernement visant à améliorer la
gouvernance et la qualité des services fournis par les administrations publiques. Elles sont
accusées du ralentissement du développement du pays : « L’un des problèmes qui entravent
aussi le progrès du Maroc, réside dans la faiblesse de l’Administration publique, en termes de
gouvernance, d’efficience ou de qualité des prestations offertes aux citoyens (…) Cette réalité
paradoxale est encore accentuée lorsqu’on établit un parallèle entre, d’une part, le secteur
privé rendu efficient et compétitif grâce à un modèle de gestion organisé autour des notions
de suivi, de contrôle et d’incitation, et, d’autre part, le secteur public, en particulier
l’Administration publique, qui souffre d’une faible gouvernance et d’une productivité
insuffisante. »4 ;
En 2018 également, le souverain n'a cessé de demander aux organismes publics de
revoir leurs méthodes de travail : « L’impératif d’une gestion efficiente des ressources et la
satisfaction nécessaire des exigences du développement global posent avec acuité la question
fondamentale de l’efficacité de l’Administration publique et des établissements de l’Etat.
Pour un traitement judicieux de cette question, deux démarches sont indispensables : une
révision des méthodes de travail des structures administratives et une refonte des modalités de
gestion des ressources publiques, en vue d’une utilisation optimale des moyens en place. »5 ;
« Une réforme profonde du secteur public doit être lancée avec diligence pour corriger
les dysfonctionnements structurels des établissements et des entreprises publics, garantir une
complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives et, in fine,
rehausser leur efficience économique et sociale. À cette fin, Nous appelons à la création d’une
Agence Nationale dont la mission consistera à assurer la gestion stratégique des participations
de l’Etat et à suivre la performance des établissements publics. »6.
Quatre conclusions peuvent être tirées de la mise en œuvre du NMP au Maroc :
• La première concerne la reconnaissance de la composante dite institutionnelle
du management, au-delà de la composante purement technique ou instrumentale,
via la mise en œuvre d’outils et de méthodes et en négligeant l’aspect
3 Extrait du discours Royal, lors de l’ouverture de la première session de la 1ère année législative de la 10ème
législature, le vendredi 14 octobre 2016.
4 Extrait du discoure Royal, à l’occasion de la Fête du Trône 29 juillet 2017
5 Extrait de la lettre Royal adressée aux participants au Forum National de la Haute Fonction Publique organisé
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Enfin, le succès du NMP consiste à admettre qu'un grand nombre des problèmes
auxquels est confrontée la transformation de l'État ne peuvent être valablement résolus par
l’utilisation des outils et démarches transposés du secteur privé, mais par d’autres aspects, qui
sont liés entre autres à la motivation et l’accompagnement des équipes, au changement de la
culture administrative et à la réduction des procédures administratives et réglementaires en
vigueur.
8. Conclusion
Le nouveau management public est une réponse à la nécessité pour l’administration
publique de s’adapter à l’environnement socio-économique récent, étant donné que le modèle
traditionnel de gestion publique ne répond pas aux changements qui se produisent dans les
différents pays. Cette nouvelle forme de gestion entraîne un changement d’orientation et de
culture au sein de l’organisation, orienté vers le citoyen en tant que client, et se fonde
principalement sur les économies et la réduction des coûts, sur l’évolution des techniques et
sur l’amélioration de la quantité et de la qualité des services publics.
Cependant, l’applicabilité et l’efficacité des postulats qui composent le NMP sont une
tâche ardue pour les administrations publiques des différents pays, avec une intensité variable
et même des variations considérables d’un pays à l’autre, d’une culture à l’autre et d’une
juridiction à l’autre. Cela signifie que les principes fondamentaux du NMP ne doivent pas être
traités comme un modèle universel, car chaque pays a son propre environnement politique et
idéologique.
Ces différences et les difficultés qui surgissent dans la mise en œuvre du NMP sont
principalement dues aux caractéristiques culturelles, économiques et administratives de
chaque entité publique, donnant lieu à des convergences et des divergences dans divers
aspects de sa gestion.
Toutefois, malgré les critiques adressées au paradigme du NMP, sa mise en place a
considérablement modifié la manière dont les différentes administrations publiques agissent,
les rendant plus transparentes, plus ouvertes aux citoyens et plus souples dans leur gestion.
En somme, la mise en place du nouveau management public dans les administrations
publiques marocaines a franchi plusieurs étapes depuis 2001 et ce processus n'est pas encore
achevé. Ces réformes n'ont pas été en mesure de changer la façon dont l'administration
marocaine fonctionne, qui souffre encore de nombreuses lacunes, ce qui a un impact négatif
sur le développement de la nation. Ces lacunes découlent, tout d’abord de l'absence d'une
approche intégrée de la mise en œuvre d'outils et de méthodes du NMP. Deuxièmement, le
manque d'intérêt à l'égard des aspects managériaux, durant tout le processus de mise en œuvre
de la réforme de l'administration marocaine. Ensuite, les instances de réforme au Maroc n'ont
pas pris en considération la dimension contingente du NMP, car des postulats de ce
paradigme ont été appliqués sans adaptation aux cultures et pratiques propres de
l'administration marocaine. Cela s'explique par la nécessité pressante de mettre en œuvre la
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réforme dictée par les bailleurs de fonds. Dans ce contexte, jusqu'à quand l'administration
publique marocaine va-t-elle maintenir la situation actuelle basée sur la lourdeur et
l'inefficience ? Quid des établissements publics ? Sont-elles également inefficaces, en dépit de
l'existence d'entités publiques autonomes presque semblables à des entreprises du secteur
privé, tels que les offices, les agences et sociétés d’État ? Sachant qu’un grand chantier de
réforme des établissements publics marocains est lancé en fin de 2021. Ce processus de
réforme vise à optimiser le nombre des établissements publics, à ancrer le principe de l’Etat-
actionnaire via la création de l’Agence nationale de gestion stratégique des participations de
l'État et à orienter ces établissements publics vers plus d’autonomie financière avec une
amélioration de la qualité des services rendus aux citoyens.
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