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COMMENTAIRES SUR « MIGRATION ET DÉVELOPPEMENT : LES

EXTERNALITÉS DE LA DIASPORA »

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Anda David

De Boeck Supérieur | « Revue d'économie du développement »

2017/1 Vol. 25 | pages 63 à 68


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ISSN 1245-4060
ISBN 9782807390980
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-d-economie-du-developpement-2017-1-page-63.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour citer cet article :


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Anda David, Commentaires sur « Migration et développement : les externalités de la
diaspora » , Revue d'économie du développement 2017/1 (Vol. 25), p. 63-68.
DOI 10.3917/edd.311.0063
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Commentaires sur

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« Migration et développement :
les externalités de la diaspora »
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Toman Barsbai*

Outre qu’elle génère des revenus moyens substantiels pour les migrants, la migration interna-
tionale a également des effets importants sur les pays d’origine et de destination. Bon nombre de
ces effets sont accentués par le fait que, dans l’économie mondialisée d’aujourd’hui, les migrants
restent connectés avec leurs pays d’origine et bâtissent des ponts transnationaux. Nous commen-
çons donc seulement à comprendre la variété des externalités de la diaspora. Je tiens à souligner
deux thèmes dans lesquels nos connaissances sont encore limitées : (i) existe-t-il une corrélation po-
tentielle entre l’intégration des immigrants et la taille des externalités de la diaspora ? (ii) en quoi
les envois de fonds affectent-il la qualité de la gouvernance et les modèles de dépenses publiques
dans les pays d’origine des migrants ?

Mots clés : intégration des immigrants, transnationalisme, envoi de fonds,


qualité de la gouvernance.

Besides generating large average income gains for migrants, international migration also has
important effects on countries of origin and destination. Many of these effects are enhanced by
the fact that in today’s globalized world migrants remain connected to their countries of origin
and build transnational bridges. We are therefore just starting to understand the range of dias-
pora externalities. I highlight two questions on which our knowledge is still limited: (i) Is there a
potential trade-off between immigrant integration and the size of diaspora externalities? (ii) How
do monetary remittances affect the quality of governance and patterns of public spending in
migrants’ countries of origin?

Keywords: Immigrant integration, Transnationalism, Monetary remittances,


Quality of governance.
Codes JEL : F22, F24, O15.

*
Institut d’économie mondiale de l’université de Kiel, Allemagne.

63
64 Toman Barsbai

Nous parlons généralement de l’impact de la migration internationale en


nous plaçant du point de vue des pays d’origine ou des pays de destination.
En utilisant le lieu comme base de départ, il est facile d’oublier que ce sont
surtout les migrants eux-mêmes qui tirent profit de la migration internatio-
nale. Lorsqu’ils passent d’un pays en développement à un pays développé, les
migrants voient bondir leur revenu moyen.

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Par exemple, en se rendant aux États-Unis, le travailleur moyen en prove-
nance d’un pays en développement peut s’attendre à une hausse de ses reve-
nus annuels de plus de 200 % à 300 % (Clemens, Montenegro et Pritchett,
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2008). L’étude menée sur des migrants arrivés en Nouvelle-Zélande en prove-


nance de Tonga, qui porte sur les différences systématiques entre les migrants
et les non-migrants, parvient à des résultats similaires en termes de hausse
des revenus (McKenzie, Stillman et Gibson, 2010).
Ces hausses dépassent largement celles qui résultent des politiques de dé-
veloppement mises en œuvre dans les pays d’origine (Clemens, Montenegro et
Pritchett, 2008). Si l’on considère le développement comme une amélioration
durable du niveau de vie, avec un meilleur accès aux soins, une meilleure édu-
cation et un bon environnement institutionnel, la migration internationale
peut être considérée comme une forme de développement. Pour utiliser les
mots de Clemens, Montenegro et Pritchett, le développement deviendrait une
question d’individus, quel que soit leur lieu de résidence, ce qui permettrait
d’y inclure la migration internationale. La réflexion autour du développement
ne serait plus axée sur les lieux où vivent les individus, contrairement à ce qui
est fait dans l’approche traditionnelle de la coopération au développement.
En partant à l’étranger, les migrants ne se contentent pas de s’aider eux-
mêmes. Ils partagent généralement leur supplément de revenus et envoient
des fonds aux membres de leurs familles restés dans le pays d’origine. Les
envois de fonds sont devenus une source de revenus très importante pour
de nombreux habitants des pays en développement. En 2015, ils atteignaient
441 milliards d’USD, soit l’équivalent de plus de trois fois le montant de l’aide
publique au développement (Banque mondiale, 2016).
On assiste donc, en moyenne, à une nette hausse des revenus pour les mi-
grants et pour leurs familles. D’une certaine manière, les migrants acceptent
simplement des emplois mieux payés. Pourquoi la migration internationale
est-elle donc un thème si controversé ?
La controverse résulte des externalités potentielles de la migration inter-
nationale, c’est-à-dire des effets négatifs ou positifs que les décisions de migra-
tion individuelles ont sur d’autres parties qui n’ont pas choisi de subir ces
Commentaires sur « Migration et développement : les externalités de la diaspora » 65

effets. Ou, en d’autres termes, les conséquences de la migration internationale


pour les pays d’origine et de destination.
Jusqu’à ces dernières années, le débat public et académique sur la mi-
gration internationale restait axé sur les externalités négatives potentielles,
avec, par exemple, l’argument de la fuite des cerveaux dans les pays d’origine
ou l’argument selon lequel les immigrants prennent les emplois des natifs

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dans les pays de destination. Il est clair que les externalités peuvent aussi être
positives. De fait, comme le résume H. Rapoport, les études sont de plus en
plus nombreuses à documenter les effets secondaires positifs de la migration
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internationale.
Ces impacts sont accentués par le fait que, dans l’économie mondialisée
d’aujourd’hui, les migrants restent connectés avec leurs pays d’origine. Grâce
à la baisse substantielle du coût des transports et des communications, les
migrants sont plus que jamais en mesure de bâtir des ponts transnationaux
qui permettent non seulement de réaliser des transactions économiques, mais
aussi de diffuser des informations, des idées et des normes. Nous commençons
donc seulement à appréhender la variété des externalités potentielles de la
diaspora.
Dans ce contexte, j’aimerais ajouter deux points au résumé de H. Rapoport
sur les externalités de la diaspora. Le premier point est plus une question
qu’un commentaire : les externalités de la diaspora disparaissent-elles au bout
d’un certain temps une fois que le migrant est bien installé dans le pays de
destination ? En particulier, existe-t-il une corrélation entre l’intégration des
immigrants et la taille des externalités de la diaspora ?
A priori, une meilleure intégration économique, sociale et politique pour-
rait potentiellement accroître ou réduire les externalités de la diaspora.
Prenez, par exemple, le cas des transferts sociaux. Mieux intégrés, les mi-
grants risquent d’être plus exposés aux valeurs et aux normes du pays de
destination. Ils sont donc mieux à même de transmettre à leurs familles et à
leurs amis restés dans le pays d’origine des informations au sujet du pays de
destination, ce qui augmente le « contenu » des transferts sociaux.
Dans le même temps, les migrants mieux intégrés risquent de voir leurs
liens avec leurs pays d’origine se distendre au fil du temps. Ceci est particu-
lièrement le cas pour la deuxième ou la troisième génération d’immigrants
qui n’est plus née et n’a plus été élevée dans le pays d’origine de son (grand)-
parent. Il est donc possible qu’au fil du temps, les migrants communiquent
moins avec les personnes restées dans les pays d’origine, ce qui entraînerait
une diminution de la fréquence des transferts sociaux. Il est difficile de prédire
lequel des deux effets dominera à long terme.
66 Toman Barsbai

Il existe très peu de preuves empiriques sur la corrélation entre intégra-


tion des immigrants et externalités de la diaspora. Les récents travaux de
Burchardi, Chaney et Hassan (2015) offrent toutefois quelques orientations.
Ils montrent que la migration historique entre l’Europe et les États-Unis
conduit aujourd’hui à une augmentation des investissements directs étrangers
depuis et vers les pays d’origine des migrants. Mais surtout, ils notent que cet

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impact se produit davantage au niveau des descendants que des migrants eux-
mêmes. Dans le cas de l’investissement direct étranger et des immigrants aux
États-Unis, les externalités de la diaspora pourraient donc s’avérer durables.
Mais, sans autre élément de preuve, il est difficile de savoir si ce résultat se
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vérifie également pour d’autres externalités de la diaspora (par exemple, les


transferts sociaux) et dans d’autres contextes.
Le deuxième point que j’aimerais ajouter concerne les externalités poten-
tielles des envois d’argent, qui ne sont pas évoquées par H. Rapoport. Quelques
études suggèrent que les envois de fonds sont susceptibles de nuire à la qualité
de la gouvernance dans les pays d’origine des migrants. En théorie, en effet,
les ménages qui reçoivent les fonds envoyés dépendent moins des services
publics, qu’ils peuvent peu à peu remplacer par des équivalents du secteur
privé (par exemple, école privée au lieu de l’école publique ou soins privés au
lieu des soins publics). Les gouvernements risquent alors de dépenser plus
pour alimenter des groupes clientélistes ou acheter le soutien populaire (par
exemple, sous la forme d’emplois publics). En outre, sachant que les ménages
qui reçoivent les fonds envoyés sont moins dépendants des services publics, ils
ont moins tendance à surveiller le gouvernement. Ce dernier risque alors de
s’en tirer avec de moins bonnes performances, ce qui pourrait avoir un effet
négatif sur la qualité de la gouvernance et des institutions.
Dans une certaine mesure, ces arguments s’appliquent également aux
sources de revenus nationales. Mais les envois de fonds présentent deux as-
pects bien spécifiques. Premièrement, contrairement aux revenus nationaux,
les envois de fonds sont générés par des migrants à l’étranger, c’est-à-dire
en dehors de l’économie locale et du contexte politique local. Deuxièmement,
les envois de fonds sont difficiles à observer pour les gouvernements et ne
sont généralement pas taxés. Les envois de fonds risquent donc d’affaiblir la
relation entre les ménages et le gouvernement, à un degré plus élevé que les
sources de revenus nationales.
Seules quelques études empiriques ont testé ces hypothèses. Les résultats
d’Abdih et al. (2012) suggèrent que les envois de fonds ont un effet néfaste sur
la corruption et sur d’autres indicateurs de qualité institutionnelle. Ahmed
(2013) élargit ces résultats et montre que les envois de fonds entraînent une
Commentaires sur « Migration et développement : les externalités de la diaspora » 67

augmentation des dépenses publiques consacrées à l’emploi public et une


baisse des dépenses consacrées aux services publics comme la santé et l’éduca-
tion. Conformément à l’argument selon lequel les envois de fonds permettent
au gouvernement d’acheter du soutien populaire, Ahmed (2012) prouve éga-
lement que les envois de fonds améliorent le taux de survie des gouverne-
ments. Et, conformément à l’argument selon lequel les ménages qui reçoivent

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les fonds envoyés se sentent moins obligés de surveiller le gouvernement,
Goodman et Hiskey (2008) montrent que les municipalités mexicaines qui
présentent des niveaux élevés d’émigration affichent également des niveaux
plus faibles de participation aux élections.
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D’autres études émettent, toutefois, l’argument inverse selon lequel les


envois de fonds améliorent la qualité de la gouvernance et obligent le gou-
vernement à rendre des comptes. Ces études partent de l’hypothèse qu’une
plus grande indépendance des ménages par rapport au gouvernement affaiblit
les réseaux clientélistes et rend les ménages plus réceptifs au mécénat. Dans
le cas du Mexique, Pfutze (2013) montre que les envois de fonds améliorent
la compétitivité politique en réduisant le taux de participation aux élections
pour le parti clientéliste au pouvoir et en améliorant les chances des partis
d’opposition de remporter les élections. Dans la même veine, Combes et al.
(2013) fournissent des preuves en coupe transversale qui indiquent que les
envois de fonds atténuent le cycle politique et économique.
Barsbai et Lücke (2016) montrent, en outre, que les ménages de migrants
sont beaucoup plus susceptibles de verser des contributions privées en vue de
la mise à disposition de biens publics locaux. Même si les motivations poten-
tielles de ces donateurs sont multiples, ce résultat ne va pas dans le sens de
l’argument selon lequel les ménages qui reçoivent les fonds envoyés ne s’inté-
ressent plus aux affaires communautaires.
En résumé, la question des externalités des envois de fonds n’est pas en-
core tranchée. Mais les quelques preuves qui existent sont plus partagées que
pour les autres externalités de la diaspora résumées par H. Rapoport.
68 Toman Barsbai

REFERENCES
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