Cours 3A Histoire Et Origine de La Responsabilité Sociale Des Entreprises
Cours 3A Histoire Et Origine de La Responsabilité Sociale Des Entreprises
Cours 3A Histoire Et Origine de La Responsabilité Sociale Des Entreprises
Nous allons comprendre qu’après les mécanismes mis en place par les états en faveur de la
prise en compte des aspects sociaux et environnementaux pour le bien-être du travailleur et
l’évolution de la conception de l’entreprise à partir du XVIIIe, nous avons commencé à assister à
la capitulation des Etats.
- Un défi écologique sans précédent, connu depuis l’alerte du club de Rome de 1974, s’ajoute
à ces dérèglements, sans être pris en compte par les dirigeants politiques occidentaux.
Les États se retirent face aux nouveaux défis. Amputant leurs budgets de façon
drastique, ils cherchent à maquiller leur démission en modifiant les indicateurs de
croissance et les critères d’évaluation des politiques publiques, remplaçant la
production tangible par des éléments plus subjectifs comme le bien-être, ou érigeant
en dogme des indices financiers.
Des « experts », ceux des agences de notation, des cabinets privés ou des institutions
transnationales souvent proches des États-Unis, apprécient les performances des
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nations et les évaluent selon leur capacité à rembourser la dette, et non plus suivant
l’efficacité économique et sociale de leurs politiques.
Les États abandonnent une partie de leur souveraineté à ces « experts » méconnus du
public.
Les menaces que ces « experts » font peser sur les démocraties incitent à s’interroger
sur les mécanismes qui les portent au pouvoir et à chercher leur origine dans la
genèse de la RSE au début de l’industrialisation.
Ce point de départ distingue l’approche de la RSE de celle du droit positif pour lequel
le concept de « Responsabilité » n’apparaît qu’avec la sanction, c’est-à-dire à la fin du
XIXe siècle (loi de 1898 sur les accidents du travail – Ewald, 1986).
Ce constat incite d’abord à chercher les origines de la RSE dans les transformations
des formes de l’entreprise et dans celles de la législation sur les sociétés, puis à
s’intéresser à l’évolution du droit du travail dans un second temps.
B. Histoire :
1. La première est une phase transitoire entre l’Ancien régime économique et la diffusion
de l’industrialisation, LA PLURIACTIVITE PAYSANNE ET FAMILIALE DOMINE ALORS.
- Cette période correspond chez les donneurs d’ouvrages, les patrons, artisans et négociants,
au début d’une prise de conscience de la rareté relative de la main-d’œuvre, surtout si
elle est qualifiée, et des difficultés inhérentes à sa mise au travail.
2. La loi de 1841 innove. Elle reconnaît aux donneurs d’ouvrages et au législateur UNE
RESPONSABILITE A L’EGARD DES INDIVIDUS LES PLUS VULNERABLES.
- Il est accéléré par la hantise de la classe laborieuse, jugée dangereuse (Louis Chevalier), et
freiné par les résistances des propriétaires du capital et par leurs alliés politiques. Cette
législation commence par produire des règles défendant les travailleurs les plus exposés.
- Cette loi qui, inversant la charge de la preuve aux dépens de l’employeur, inaugure un
partage progressif de responsabilités entre l’État et l’entreprise et annonce le
fordisme.
- Cette loi marque le début de la dernière période examinée (1898-1945). La période est
coupée par les deux guerres mondiales, puis par la crise des années 1930. Elle voit
s’effriter les dernières résistances de l’État qui s’approprie une partie des
responsabilités sociales de l’entreprise et lui impose le paritarisme et la recherche de
compromis.
La révolte des canuts lyonnais, artisans de la soie réclamant une augmentation des tarifs, et
son écrasement (1830-1831), puis les premiers travaux des observateurs sociaux comme
Pierre Guillaume Frédéric Le Play (Ingénieur, Homme politique et Réformateur
Français) constatant la dégradation physique et morale des ouvriers à mesure de
l’industrialisation incitent à réagir et à réglementer les pratiques de gestion de la main-
d’œuvre.
- Le chocolatier Menier à Noisiel, l’entreprise Godin, le Bon Marché des Boucicaut témoignent
du succès de ces politiques. Pourtant, les réactions des entrepreneurs ne peuvent plus rester
facultatives ni individuelles. La pression des notables convaincus par les observateurs
sociaux du caractère dramatique de la situation physique et morale des ouvriers et la
nécessité de garantir la disponibilité de la main-d’œuvre imposent une réaction législative.
- Le rapport Villermé de 1840 aboutit à la loi de 1841 sur le travail des enfants qui marque
la première intrusion du législateur dans l’entreprise, prescrivant un contrôle extérieur
et chargeant l’entrepreneur d’une responsabilité. Les limites de ce texte poussent les
industriels de Mulhouse à réclamer la création d’un corps d’inspecteur du travail.
- La bourgeoisie s’intéresse au sort des ouvriers, non plus seulement parce qu’il
inquiète, mais parce qu’il engage la collectivité. L’ouvrage d’Émile Levasseur (L’histoire
des classes ouvrières et de l’industrie en France), comme les travaux d’Émile Durkheim sur
la société organique, selon laquelle l’entreprise peut être un intégrateur social ou un
repoussoir source d’anomie, en témoignent.
- Le paternalisme de l’école de Mulhouse (voir plus haut dans les origines) est importé
par les patrons alsaciens immigrés en France après le rattachement de la ville à
l’Allemagne en 1871.
- Les protestants ne sont pas les seuls que cette question préoccupe. L’encyclique Rerum
Novarum (1891) visant à rallier les catholiques à la République pose clairement la
responsabilité du chef d’entreprise et invite au paternalisme. L’État républicain s’en mêle.
- Ainsi par exemple, la loi sur les délégués mineurs pose les jalons d’une réglementation
du droit d’alerte. Ces interventions répondent à l’accélération de l’industrialisation et elles
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s’inscrivent aussi dans l’affirmation du solidarisme impulsé par Léon Bourgeois au tournant
du XXe siècle.
La Grande Guerre entraîne une rupture. C’est une guerre industrielle qui conduit à poser
la question du travail à l’échelle internationale, ce qui conduira à la création du Bureau
international du travail (BIT), et qui force l’État à intervenir davantage dans l’économie.
En France cependant et dès 1919, l’État renonce à une partie des prérogatives
exceptionnelles qu’il s’était attribuées pendant la guerre. À l’échelle internationale en
revanche, une concertation coordonnée par les États se met bien en place dans le cadre du
Bureau International du Travail, qui s’engage à définir des règles universelles
d’organisation du travail.
Ces évolutions constituent les prémices de la régulation fordiste qui n’attend que
l’intervention de l’État pour prospérer après le choc de la Seconde Guerre mondiale.
La question de la RSE est donc bien posée avant 1945.
Conclusion
L’approche historique de la RSE est un vaste chantier qui devra tenir compte des conditions
particulières de l’industrialisation française, et en particulier de l’importance du rôle de l’État
depuis le colbertisme, de la forte empreinte du Saint simonisme, du poids des utopistes et de la
fréquence des expérimentations de nouvelles formes d’organisation du travail.
Cette approche vise à décrypter les fondations de la RSE offensive d’aujourd’hui, elle cherche à
analyser les mécanismes de déconstruction de l’État Providence en pointant les étapes de sa
lente formation depuis le début de l’industrialisation au XVIIIe siècle.
Cette histoire contient aussi de nombreuses zones d’ombre qu’il conviendra d’éliminer : la
définition de l’entreprise sur le long terme, celle de ses composantes, de ses finalités, de ses
frontières, tout d’abord.