Poly CalVa2020
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Poly CalVa2020
Jean-François Babadjian
Table des matières
4 Quelques applications 45
4.1 Relaxation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
4.2 Homogénéisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.3 Réduction de dimension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3
4
Introduction
Dans ce cours, nous allons nous intéresser à un problème classique du calcul des variations qui
consiste à minimiser une fonctionnelle intégrale (ou énergie) de la forme
Z
F (u) = f (x, u(x), ∇u(x)) dx
Ω
parmi toutes les fonctions u ∈ C 1 (Ω; Rd ) telles que u = u0 sur ∂Ω, où u0 : ∂Ω → Rd est une
fonction (continue) donnée. Ici, Ω est un ouvert borné de RN et f : Ω × Rd × Rd×N → R est une
donnée du problème appelée intégrande ou densité. Rappelons que si u = (u1 , . . . , ud ) : Ω → Rd
est un champ de vecteurs, le gradient de u au point x, noté ∇u(x) ∈ Rd×N est une matrice à d
lignes et N colonnes dont les coefficients sont donnés par
∂ui
[∇u(x)]ij = (x) pour tout 1 ≤ i ≤ d, 1 ≤ j ≤ N.
∂xj
Cette fonctionnelle s’appelle énergie de Dirichlet et le problème consiste à minimiser cette énergie
parmi tous les déplacements u : Ω → R qui coı̈ncident avec u0 sur ∂Ω (la position de la membrane
est prescrite sur le bord).
Surfaces minimales. Si u : Ω ⊂ RN −1 → R, l’aire du graphe Gu := {(x, u(x)) ∈ RN , x ∈ Ω} ⊂ RN
de u est donnée par l’expression Z p
1 + |∇u|2 dx.
Ω
Le problème consiste à rechercher une surface représentable par le graphe d’une fonction, qui
s’appuie sur le graphe de u0 sur le bord et dont l’aire est minimale.
5
6
différentiable par rapport à (s, ξ)), on peut faire des variations de la forme u + tϕ avec t ∈ R et
ϕ ∈ Cc∞ (Ω; Rd ). On montre alors que si u est un point de minimum de F , alors nécessairement
d
F (u + tϕ)|t=0 = 0,
dt
ce qui donne, pour tout ϕ ∈ Cc∞ (Ω; Rd ),
Z
(∂s f (x, u, ∇u) · ϕ + ∂ξ f (x, u, ∇u) · ∇ϕ) dx = 0.
Ω
Autrement dit, si la fonction u est assez régulière, la formule de la divergence montre qu’elle est
solution du système d’EDP quasi-linéaires
Si u n’est pas suffisamment régulière, il est possible d’interpréter cette équation au sens des distri-
butions dans Ω. Cette condition d’optimalité d’ordre 1 s’appelle équation d’Euler-Lagrange. Son
étude peut être menée à l’aide de techniques d’EDP.
Dans le cas de la membrane élastique, l’équation d’Euler-Lagrange s’écrit
−∆u = 0 dans Ω,
et se ramène à la détermination des fonctions harmoniques sur Ω dont la valeur sur le bord est
prescrite.
Dans le cas des surfaces minimales, l’équation d’Euler-Lagrange prend la forme
!
∇u
div p = 0 dans Ω,
1 + |∇u|2
Malheureusement, en général (et c’est déjà le cas en dimension finie), un point critique n’est
pas forcément un point de minimum global (il peut s’agir d’un extremum local ou même d’un
point selle). Cette classification peut être clarifiée par l’étude de la stabilité des points critiques
en déterminant le signe de la différentielle seconde. Dans tous les cas, cette approche nécessite
beaucoup de régularité, ce qui n’est pas toujours souhaitable.
La méthode directe
La méthode directe en calcul des variations consiste à travailler directement sur la fonctionnelle F
à minimiser. Un moyen de montrer l’existence de minima consiste à trouver des suites minimisantes
compactes (pour une certaine topologie) et dont on peut extraire une sous-suite qui converge vers
un minimum.
En dimension finie, le théorème de Bolzano-Weierstrass assure qu’une suite est compacte si et
seulement si elle est bornée. Il est bien connu que ceci est en général faux en dimension infinie (le
théorème de Riesz montre que la boule unité fermée d’un espace de Banach n’est jamais compacte).
Par contre, il est possible d’affaiblir la topologie pour assurer la (séquentielle) compacité des suites
bornées, par exemple dans les espaces de Hilbert ou, plus généralement, dans les espaces de Banach
réflexifs. Ceci justifie partiellement pourquoi il est préférable, dans un premier temps, d’abandonner
7
les espaces de fonctions continûment différentiables au profit des espaces Sobolev qui jouissent de
bonnes propriétés topologiques, notammement celles liées à la topologie faible.
Pour montrer qu’un point d’accumulation d’une suite minimisante est un minimum, une condi-
tion naturelle sur la fonctionnelle à minimiser est la semi-continuité inférieure. Cette propriété se
traduit par des conditions de type convexité sur la densité f par rapport à la variable ∇u. L’un des
objets de ce cours sera d’introduire diverses notions généralisées de convexité sur f qui assurent la
semi-continuité inférieure (dans une topologie adéquate) de F .
En l’absence de semi-continuité inférieure de la fonctionnelle à minimiser on ne peut pas s’at-
tendre à l’existence de minimiseurs, du moins à l’aide de la méthode directe. Il est alors naturel de
considérer l’enveloppe semi-continue inférieurement de F , i.e., la plus grande fonctionnelle semi-
continue inférieurement plus petite que F . En notant cette nouvelle fonctionnelle F , on aura alors
par construction que les suites minimisantes de F convergeront vers un minimum de F et
inf F = min F .
Une question importante consiste alors à déterminer cette fonctionnelle F , également appelée
relaxée de F .
Ce problème est un cas particulier de la Γ-convergence, dont l’objet concerne l’étude et la
stabilité de suites de problèmes de minimisation. Si (Fε )ε>0 est une famille de fonctionnelles et
uε un minimiseur de Fε à ε > 0 fixé, on cherche alors à introduire un mode de convergence des
fonctionnelles Fε qui assure la convergence des minimiseurs de Fε ainsi que de la valeur minimale.
Autrement dit, on définira la Γ-limite de Fε (lorsqu’elle existe) comme étant une fonctionnelle F
telle que
uε ∈ arg min Fε → u ∈ arg min F , min Fε = Fε (uε ) → F (u) = min F .
Nous démontrerons que, sous certaines, hypothèses, la classe des fonctionnelles intégrales est stable
par Γ-convergence.
Nous étudierons en détails trois applications de cette propriété de stabilité. La première concerne
la relaxation, i.e., la détermination de l’enveloppe semi-continue inférieurement de fonctionnelles
intégrales. Ensuite, nous étudierons un problème classique d’homogénéisation périodique. Enfin
nous verrons une application à la réduction de dimension en théorie des plaques élastiques.
Dans une dernière partie, nous nous intéresserons à la régularité des quasi-minimiseurs. Nous
montrerons un résultat dû à Meyers qui assure une meilleure intégrabilité des quasi-minima d’une
fonctionnelle intégrale. Il s’agit d’un résultat de portée très générale qui ne nécessite aucune
régularité de la fonctionnelle.
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Chapitre 1
Soit E un espace de Banach et J : E → R une fonctionnelle que l’on cherche à minimiser. L’idée
de la méthode directe du calcul des variations consiste à considérer une suite minimisante. En effet,
si l’on suppose que l’infimum
m := inf J(u)
u∈E
est fini, la définition de l’infimum assure l’existence d’une suite minimisante (un )n∈E d’éléments
de E telle que J(un ) → m. Tout point d’accumulation (pour une topologie raisonnable) de la suite
(un )n∈N est alors un candidat pour être un point de minimum. Se posent alors deux problèmes :
— la compacité de la suite (un )n∈N ;
— montrer que si u est un point d’accumulation de la suite (un )n∈N , alors J(u) = m.
Pour la compacité, il est en général difficile d’obtenir de telles propriétés dans un espace de
Banach général de dimension infinie (penser au théorème d’Ascoli dans l’espace des fonctions
continues, ou le théorème de Riesz-Fréchet-Kolmogorov dans les espaces de Lebesgue). Pour cette
raison, nous privilègerons la convergence faible à la convergence forte (de la norme) car, au moins
dans le cas où E est réflexif, nous savons que toute suite bornée admettra une sous-suite faible-
ment convergente. Quant à la bornitude de la suite minimisante, elle résultera généralement d’une
propriété de coercivité de la fonctionnelle que l’on cherche à minimiser.
En ce qui concerne le second problème, si l’on sait déjà que un → u en un certain sens, il suffit
de montrer que J(u) ≤ lim inf n J(un ) ce qui nous conduit à la notion de semi-continuité inférieure.
On dit que J est sci sur E si elle est sci en tout point de E.
9
10 CHAPITRE 1. LA MÉTHODE DIRECTE EN CALCUL DES VARIATIONS
Définition 1.1.2. On dit que J est séquentiellement 1 faiblement sci en u ∈ E si pour toute suite
(un )n∈N telle que un * u faiblement dans E, on a
J(u) ≤ lim inf J(un ).
n→+∞
On dit que J est faiblement sci sur E si elle est faiblement sci en tout point de E.
Remarque 1.1.3. On a clairement que si J est faiblement sci, alors J est sci. La réciproque est
fausse : il suffit de prendre J(u) = 1 − kuk2 pour tout u ∈ H un espace de Hilbert séparable.
Alors J est continue donc sci (pour la convergence forte). En revanche, si (en )n∈N est une base
Hilbertienne de H, alors en * 0 faiblement dans H et
J(0) = 1 > 0 = lim inf J(en ).
n→+∞
Dans le cas convexe, les deux notions de semi-continuité inférieure coı̈ncident. On rappelle la
définition suivante.
Définition 1.1.4. Une fonction J : E → R ∪ {+∞} est convexe si
J(tu + (1 − t)v) ≤ tJ(u) + (1 − t)J(v) pour tout t ∈ [0, 1] et tout u, v ∈ E.
On dit que J est strictement convexe si l’inégalité précédente est stricte dès lors que u 6= v et
t ∈ ]0, 1[.
Exemple 1.1.5. 1. les applications linéaires sont convexes ;
2. les normes x 7→ kxk sont convexes ;
3. dans un espace de Hilbert (H, h, ·, ·i), l’application x 7→ kxk2 est strictement convexe car si
t ∈ ]0, 1[ et x 6= y,
ktx + (1 − t)yk2 − tkxk2 − (1 − t)kyk2 = t(t − 1)kxk2 + 2t(1 − t)hx, yi − t(1 − t)kyk2
= −t(1 − t)kx − yk2 < 0.
On a alors le résultat fondamental suivant.
Théorème 1.1.6. Soit J : E → R une fonction convexe et sci. Alors J est faiblement sci.
Démonstration. Soit (un )n∈N une suite d’éléments de E telle que un * u faiblement dans E. Si
lim inf n J(xn ) = +∞, le résultat est évident. Si α := lim inf n J(un ) < +∞, on considère une suite
décroissante (αk )k∈N de réels telle que αk & α. Comme J est convexe et sci, l’ensemble {J ≤ αk }
est convexe et fermé. Par ailleurs, comme αk > α = lim inf n J(un ), il existe une sous-suite, notée
(uσk (n) )n∈N , telle que uσk (n) ∈ {J ≤ αk } pour tout n ∈ N. Montrons que u ∈ {J ≤ αk }. En effet, si
u 6∈ {J ≤ αk }, d’après le théorème de Hahn-Banach sous forme géométrique, on pourrait séparer
strictement le convexe fermé non vide {J ≤ αk } du convexe compact {u}. Il existerait donc un
L ∈ E 0 \ {0} et t ∈ R tels que
hL, ui < t < hL, vi pour tout v ∈ {J ≤ αk }.
En particulier pour v = uσk (n) , on obtient que hL, ui < t < hL, uσk (n) i, puis par passage à la limite
quand n → +∞, hL, ui < t ≤ hL, ui, ce qui est absurde. Par conséquent, J(u) ≤ αk pour tout
k ∈ N, ce qui implique par passage à la limite quand k → +∞ que
J(u) ≤ α = lim inf J(un ),
n→+∞
Nous sommes à présent en mesure d’énoncer un résultat général d’existence de solutions à des
problèmes de minimisation.
Alors il existe un ū ∈ E tel que J(ū) ≤ J(v) pour tout v ∈ E. Si de plus J est strictement convexe,
alors le point de minimum ū est unique.
Soit (un ) une suite minimisante, i.e., J(un ) → m. Si, pour une sous-suite, kun kE → +∞, alors
d’après la coercivité de J, on aurait que J(un ) → +∞ ce qui est impossible puisque J(un ) → m <
+∞. Par conséquent, la suite (un )n∈N est bornée dans l’espace de Banach réflexif E. Il existe donc
une sous-suite (uσ(n) )n∈N et ū ∈ E tels que uσ(n) * ū faiblement dans E. Comme la fonctionnelle
J est convexe et sci, elle est faiblement sci, et donc
Il vient donc que J(ū) = m ce qui montre que ū est un point de minimum de J sur E.
Quant à l’unicité, si J est strictement convexe et ū0 et ū1 sont deux minima distincts de J sur
E, alors
ū0 + ū1 1 1
inf J ≤ J < J(ū0 ) + J(ū1 ) = inf J,
E 2 2 2 E
Démonstration. La fonction z étant mesurable, il existe une suite (zn )n∈N de fonctions étagées qui
converge vers z p.p. sur Ω. On peut alors trouver α1 , . . . , αk ∈ Rm et des ensembles mesurables
A1 , . . . , Ak ⊂ Ω deux à deux disjoints tels que
k
X
zn = αi χAi .
i=1
où l’on a utilisé la continuité de f (x, ·) p.p. tout x ∈ Ω. Par ailleurs, comme znk → z dans Lp (Ω),
on en déduit que
Z Z Z
lim inf (f (x, znk ) − b · znk − a) dx ≤ lim f (x, znk ) dx − (b · z + a) dx,
k→+∞ Ω k→+∞ Ω Ω
— il existe 1 < p < ∞, a0 , a1 ∈ L1 (Ω) et b ≥ 0 tels que p.p. tout x ∈ Ω et pour tout z ∈ Rd ,
Si u0 ∈ W 1,p (Ω; Rd ), alors il existe une solution u ∈ u0 + W01,p (Ω; Rd ) au problème de Dirichlet
Z Z
inf
1,p
J(v) := f (x, ∇v) dx + g(x, v) dx .
v∈u0 +W0 (Ω;Rd ) Ω Ω
Démonstration. Tout d’abord, en notant α l’infimum de J sur u0 + W01,p (Ω; Rd ), on a d’après les
hypothèses de croissance faites sur f et g que
Z Z Z
a0 dx ≤ α ≤ J(u0 ) ≤ Λ (1 + |∇u0 |p ) dx + (a1 + b|u0 |p ) dx,
Ω Ω Ω
ce qui montre que la suite (un )n∈N est bornée dans l’espace réflexif W 1,p (Ω; Rd ) (rappelons que
1 < p < ∞). Quitte à extraire une sous-suite (toujours notée (un )n∈N ), on peut donc supposer que
un * u faiblement dans W 1,p (Ω; Rd ) et donc,
Z Z
lim inf f (x, ∇un ) dx ≥ f (x, ∇u) dx.
n→+∞ Ω Ω
Comme un − u0 ∈ W01,p (Ω; Rd ) qui est (faiblement) fermé dans W 1,p (Ω; Rd ), on en déduit que
u−u0 ∈ W01,p (Ω; Rd ). De plus, comme un −u0 * u−u0 faiblement dans W1,p d
0 (Ω; R ), par injection
14 CHAPITRE 1. LA MÉTHODE DIRECTE EN CALCUL DES VARIATIONS
compacte de Rellich, on peut également supposer que, pour cette même sous-suite, on a un → u
fortement dans Lp (Ω; Rd ). La réciproque de la convergence dominée montre alors que, quitte à
extraire de nouveau une sous-suite, un → u presque partout dans Ω et |un | ≤ h ∈ Lp (Ω). La
fonction g étant de Carathéodory, on en déduit que g(x, un (x)) → g(x, u(x)) presque pour tout
x ∈ Ω, et |g(·, un )| ≤ max{|a0 |, |a1 | + b|un |p } ≤ max{|a0 |, |a1 | + b|h|p } ∈ L1 (Ω). Le théorème de la
convergence dominée montre alors que
Z Z
lim g(x, un ) dx = g(x, u) dx,
n→+∞ Ω Ω
soit
α = lim inf J(un ) ≥ J(u)
n→+∞
avec u ∈ u0 +W01,p (Ω; Rd ). Ceci montre bien que u est un minimiseur de J sur u0 +W01,p (Ω; Rd ).
Remarque 1.2.6. 1. Le résultat précédent est faux dans W 1,1 (Ω; Rd ) car une suite bornée
dans cet espace n’est en général pas séquentiellement compacte dans W 1,1 (Ω; Rd ) mais dans
l’espace plus large BV (Ω; Rd ) des fonctions à variation bornée.
2. Notons qu’aucune hypothèse de type convexité sur g n’est nécessaire pour assurer la semi-
continuité de J. C’est dû au fait qu’il s’agit d’un terme d’ordre inférieur pour lequel l’injection
compacte de Rellich assure la continuité de la fonctionnelle associée.
3. Les hypothèses de croissance sur f et g sont utilisées pour montrer que la fonctionnelle J est
bien définie sur W 1,p (Ω; Rd ) et que l’infimum n’est pas +∞.
4. L’hypothèse de coercivité sur f et le fait que g est bornée inférieurement assurent la bornitude
des suites minimisantes.
Les résultats précédents peuvent se généraliser à la situation suivante où f est une fonction de
x, u et ∇u, que nous admettrons (voir [4, Theorem 3.3.4] et [4, Theorem 3.4.1]).
Théorème 1.2.7. Soient Ω ⊂ RN un ouvert borné et f : Ω × (Rd × Rd×N ) → R une fonction de
Carathéodory tels que
— f (x, z, ·) est convexe pour tout z ∈ Rd et presque tout x ∈ Ω ;
0
— il existe 1 ≤ p < ∞, a ∈ L1 (Ω), b ∈ Lp (Ω; Rd×N ) tels que
f (x, z, ξ) ≥ a(x) + b(x) · ξ p.p. tout x ∈ Ω et pour tout (z, ξ) ∈ Rd × Rd×N .
Alors la fonctionnelle F : W 1,p (Ω; Rd ) → R définie par
Z
F (u) = f (x, u(x), ∇u(x)) dx
Ω
Dans ce chapitre, nous allons nous intéresser à étabir des conditions nécessaires et/ou suffisantes
de faible semi-continuité inférieure pour des fonctionnelles intégrale du type
Z
F (u) = f (∇u) dx
Ω
où Ω ⊂ RN est un ouvert borné et f : Rd×N → R est une fonction borélienne. Une grande partie
des résultats présentés peuvent se généraliser à des fonctionnelles dépendant explicitement de x
et u. Pour ne pas alourdir la présentation, nous allons nous restreindre au cas de fonctionnelles
autonomes où f ne dépend uniquement que de ∇u.
Etape 1. Supposons d’abord que p = ∞. On a que kuε kL∞ (Ω) ≤ kukL∞ (Y ) de sorte que l’on peut
extraire une sous-suite (uεj )j∈N telle que uεj * ū faible* dans L∞ (Ω) où ū ∈ L∞ (Ω). Montrons
que pour presque tout x ∈ Ω,
Z
ū(x) = u(y) dy,
Y
ce qui montrera que la limite faible* est à la fois indépendante de la sous-suite et de l’ouvert Ω.
Soit Q ⊂ Ω un cube dont les côtés sont parallèles aux axes de coordonnés et sont de longueur l.
Pour j assez grand, on a que εj < l. En posant mj = ([l/εj ] − 1)N , où [·] désigne la partie entière,
on a
mj
1 [
Q= (aji + Y ) + Ej ,
εj i=1
15
16 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
Comme mj ≥ ((l/εj ) − 2)N = (l/εj )N (1 − 2εj /l)N = (l/εj )N (1 − 2N εj /l + O(ε2j )), on en déduit
que |Ej | = 2N (l/εj )N −1 + O(ε2−N
j ). Or
Z Z Z Z
uεj (x) − u(y) dy dx = εN
j u(z) − u(y) dy dz
1
Q Y εj Q Y
mj Z Z
X
≤ εN
j u(z) − u(y) dy dz
i=1 aji +Y Y
Z Z
+ εN
j u(z) − u(y) dy dz .
Ej Y
Etape 2. Supposons à présent que 1 ≤ p < ∞. Soit uk := max(min(u, k), −k) la troncature de
k
u au niveau
R k. Comme u est Y -périodique, alors u reste également Y -périodique et d’après l’étape
1, ukε * Y uk (y) dy faible* dans L∞ (Ω) (et donc également faiblement dans Lp (Ω) puisque Ω est
borné). Par ailleurs, en notant Iε = {a ∈ ZN : (a + Y ) ∩ 1ε Ω 6= ∅}, alors #(Iε ) ≤ C/εN et
Z Z X Z
k p N k p N
|uε − uε | dx = ε |u − u| dx ≤ ε |uk − u|p dx
1
Ω εΩ a∈Iε a+Y
Z Z
N k p
= ε #(Iε ) |u − u| dx ≤ C |uk − u|p dx,
Y Y
2.1. CONVEXITÉ 17
0
où l’on a utilisé le fait que uk et u sont Y -périodiques. Pour tout v ∈ Lp (Ω), on écrit que
Z Z Z Z Z
k
uε − u(y) dy v dx = uε − u(y) dy v dx + (uε − ukε )v dx.
Ω Y Ω Y Ω
2.1 Convexité
Grâce au Théorème de Riemann-Lebesgue, nous allons pouvoir en déduire des conditions nécessaires
de semi-continuité inférieure pour les fonctionnelles intégrale.
Théorème 2.1.1. Soient Ω ⊂ RN un ouvert borné et f : Rm → R une fonction borélienne bornée
inférieurement. Si la fonctionnelle F : Lp (Ω; Rm ) → R ∪ {+∞} définie par
Z
F (z) = f (z(x)) dx
Ω
qui est (0, 1)N -périodicité. D’après le Théorème de Riemann-Lebesgue, la suite zε := z(·/ε) conver-
gence faiblement dans Lp (Ω; Rm ) vers
Z
z(y) dy = λA + (1 − λ)B.
(0,1)N
En regroupant les relations précédentes, on en déduit que f (λA + (1 − λ)B) ≤ λf (A) + (1 − λ)f (B),
i.e., que f est convexe.
En regroupant les Théorèmes 1.2.3 et 2.1.1, on constate que la convexité de f est une condition
nécessaire et suffisante pour que la fonctionnelle intégrale F : Lp (Ω; Rm ) → R définie par
Z
F (z) = f (z(x)) dx
Ω
A l’aide de la méthode générale employée dans la preuve du Théorème 2.1.1, nous allons à
présent nous intéresser aux fonctionnelles intégrales qui dépendent de gradients en distinguant le
cas scalaire (d = 1) du cas vectoriel (d ≥ 2).
Commençons par le cas scalaire. Notons que, dans ce cas, un élément de Rd×N n’est autre qu’un
vecteur (ligne) de RN .
Théorème 2.1.2. Soient Ω ⊂ RN un ouvert borné et f : RN → R une fonction borélienne bornée
inférieurement. Si la fonctionnelle F : W 1,p (Ω) → R ∪ {+∞} définie par
Z
F (u) = f (∇u(x)) dx
Ω
est faiblement semi-continue inférieurement dans W 1,p (Ω), alors f est convexe.
Démonstration. Soient λ ∈ [0, 1], A et B ∈ RN . On définit la fonction u : RN → R par
(
A−B
A · x − (1 − λ)n|A − B| si n ∈ Z, n ≤ |A−B| · x < n + λ,
u(x) := A−B
B · x + (1 + n)λ|A − B| si n ∈ Z, n + λ ≤ |A−B| · x < n + 1.
1,∞
Notons que u ∈ Wloc (RN ) et son gradient
(
A−B
A si n ∈ Z, n ≤ |A−B| · x < n + λ,
∇u(x) = A−B
B si n ∈ Z, n + λ ≤ |A−B| ·x<n+1
est Y -périodique, où Y est un cube avec une face orthogonale au vecteur A − B et dont la longueur
des côtés est égale à 1.
On pose uε (x) = εu(x/ε) pour tout x ∈ RN et tout ε > 0. Un calcul immédiat montre que pour
tout x ∈ RN ,
|uε (x) − (λA + (1 − λ)B)x| ≤ λ(1 − λ)|A − B|ε,
ce qui montre que uε → (λA+(1−λ)B)·x fortement dans Lp (Ω). Par ailleurs, comme ∇uε ∈ {A, B}
p.p. dans Ω, on en déduit que la suite (∇uε )ε>0 est bornée dans Lp (Ω; RN ) ce qui montre que
uε * (λA + (1 − λ)B) · x faiblement dans W 1,p (Ω).
Par semi-continuité inférieure, il vient
Z Z x
|Ω|f (λA + (1 − λ)B) ≤ lim inf f (∇uε (x)) dx = lim inf f ∇u dx.
ε→0 Ω ε→0 Ω ε
Comme la fonction f ◦∇u ∈ L∞ (RN ) est (0, 1)N -périodique, uneR nouvelle application du Théorème
de Riemann-Lebesgue montre que f (∇uε ) = (f ◦ ∇u)(·/ε)) * (0,1)N f (∇u(y)) dy = λf (A) + (1 −
λ)f (B), ce qui montre que
Z x
|Ω|f (λA + (1 − λ)B) ≤ lim inf f ∇u dx = |Ω|(λf (A) + (1 − λ)f (B)),
ε→0 Ω ε
et donc la convexité de f .
2.2. RANG-1-CONVEXITÉ 19
En regroupant le Corollaire 1.2.4 et le Théorème 2.1.2, on en déduit que dans le cas scalaire
(d = 1) la convexité de f est une condition nécessaire et suffisante pour que la fonctionnelle
intégrale F : W 1,p (Ω) → R définie par
Z
F (u) = f (∇u(x)) dx
Ω
soit faiblement semi-continue inférieurement dans W 1,p (Ω). Le cas vectoriel est autrement plus
compliqué. En effet, la convexité est loin d’être une condition nécessaire comme l’atteste l’exemple
ci-dessous.
Exemple 2.1.3. On se place dans le cas N = d = 2 et p > 2. On pose Q = (0, 1)2 et on considère
la fonctionnelle intégrale F : W 1,p (Q; R2 ) → R définie par
Z
F (u) = det∇u dx.
Q
Tout d’abord, remarquons que ξ ∈ R2×2 7→ detξ n’est pas convexe car c’est une forme quadratique
non positive. Pourtant, nous allons montrer que la fonctionnelle F est faiblement continue dans
W 1,p (Q; R2 ).
Tout d’abord, remarquons que si u : Q → R2 est une fonction régulière, alors on a
det∇u = div(u1 ∂2 u2 , −u1 ∂1 u2 ).
Par intégration, on obtient, pour tout ϕ ∈ Cc∞ (Q),
Z Z
ϕdet∇u dx = − (u1 ∂2 u2 ∂1 ϕ − u1 ∂1 u2 ∂2 ϕ) dx.
Q Q
i.e., det∇un * det∇u faible* dans D0 (Q; R2 ). Par ailleurs, comme le déterminant en dimension
2 est à croissance quadratique, on en déduit kdet∇un kLp/2 (Q) ≤ Ck∇un k2Lp (Q) ≤ C et comme
p/2 > 1, on en déduit que det∇un * det∇u faiblement dans Lp/2 (Q). Par conséquent,
Z Z
det∇u dx = lim det∇un dx.
Q n→+∞ Q
2.2 Rang-1-convexité
Pour comprendre pourquoi la preuve du Théorème 2.1.2 ne fonctionne pas quand d ≥ 2, il
convient de construire une fonction dont le gradient est constant par morceaux. Considérons pour
simplifier le cas où le gradient ne peut prendre que deux valeurs données par des matrices A et
B ∈ Rd×N .
Supposons pour fixer les idées que u : RN → Rd est une fonction Lipschitz telle que ∇u = A sur
{x1 < 0} et ∇u = B sur {x1 > 0}. Par intégration, on en déduit que
(
Ax + a si x1 < 0,
u(x) =
Bx + b si x1 > 0.
20 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
Comme u est continue à l’interface {x1 = 0}, on doit avoir A(0, x2 , . . . , xN )+a = B(0, x2 , . . . , xN )+
b pour tout (x2 , . . . , xN ) ∈ RN −1 , ce qui montre que a = b et
D2 f (A)(a ⊗ b)(a ⊗ b) ≥ 0
Par ailleurs, on a d’une part f ( 13 ξ1 + 13 ξ2 + 13 ξ3 ) = +∞ et, d’autre part, 13 f (ξ1 )+ 31 f (ξ2 )+ 13 f (ξ3 ) =
0, ce qui montre que
1 1 1 1 1 1
f ξ1 + ξ2 + ξ3 > f (ξ1 ) + f (ξ2 ) + f (ξ3 ),
3 3 3 3 3 3
et donc que f n’est pas convexe.
Exemple 2.2.5. Si l’on s’intéresse à des fonctions à valeurs finies, l’exemple suivant dû à Daco-
rogna et Marcellini (voir [4, Proposition 4.1.13 and 4.1.14]) fournit une fonction f : R2×2 → R
définie par
f (ξ) = |ξ|4 − a(detξ)2 − b|ξ|2 detξ,
√
qui est rang-1-convexe quand |b| ≤ 4 et 8a + 3b2 ≤ 16. Par ailleurs, si a = 0 et b = 4/ 3, f n’est
pas convexe.
Théorème 2.2.6. Soient Ω ⊂ RN un ouvert borné et f : Rd×N → R une fonction borélienne
bornée inférieurement. Si la fonctionnelle F : W 1,p (Ω; Rd ) → R définie par
Z
F (u) = f (∇u(x)) dx
Ω
est faiblement semi-continue inférieurement dans W 1,p (Ω; Rd ), alors f est rang-1-convexe.
Démonstration. Soient λ ∈ [0, 1], A et B ∈ Rd×N tels que A − B = a ⊗ b avec a ∈ Rd , b ∈ RN et
|b| = 1. On définit la fonction u : RN → Rd par
(
Bx + a(b · x) − (1 − λ)na si n ∈ Z, n ≤ b · x < n + λ,
u(x) :=
Bx + (1 + n)λa si n ∈ Z, n + λ ≤ b · x < n + 1.
1,∞
Notons que u ∈ Wloc (RN ; Rd ) et son gradient
(
B+a⊗b=A si n ∈ Z, n ≤ b · x < n + λ,
∇u(x) =
B si n ∈ Z, n + λ ≤ b · x < n
est Y -périodique, où Y est un cube avec une face orthogonale au vecteur b et dont la longueur des
côtés est égale à 1.
On pose uε (x) = εu(x/ε) pour tout x ∈ RN et tout ε > 0. Un calcul immédiat montre que pour
tout x ∈ RN ,
|uε (x) − (λA + (1 − λ)B)x| ≤ λ(1 − λ)|a|ε,
ce qui montre que uε → (λA + (1 − λ)B)x fortement dans Lp (Ω; Rd ). Par ailleurs, comme ∇uε ∈
{A, B} p.p. dans Ω, on en déduit que la suite (∇uε )ε>0 est bornée dans Lp (Ω; Rd×N ) ce qui montre
que uε * (λA + (1 − λ)B)x faiblement dans W 1,p (Ω; Rd ).
Par semi-continuité inférieure, il vient
Z Z x
|Ω|f (λA + (1 − λ)B) ≤ lim inf f (∇uε (x)) dx = lim inf f ∇u dx.
ε→0 Ω ε→0 Ω ε
Comme la fonction f ◦∇u ∈ L∞ (RN ) est (0, 1)N -périodique, uneR nouvelle application du Théorème
de Riemann-Lebesgue montre que f (∇uε ) = (f ◦ ∇u)(·/ε)) * (0,1)N f (∇u(y)) dy = λf (A) + (1 −
λ)f (B), ce qui montre que
Z x
|Ω|f (λA + (1 − λ)B) ≤ lim inf f ∇u dx = |Ω|(λf (A) + (1 − λ)f (B)),
ε→0 Ω ε
et donc la rang-1-convexité de f .
22 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
n’est pas faible* semi-continue inférieurement dans W 1,∞ ((0, 1)2 ; R3 ). Cet exemple se généralise
au cas où N ≥ 2 et d ≥ 3. Néanmoins, il s’agit d’un problème ouvert dans le cas N = d = 2.
Terminons cette section par un résultat de continuité des fonctions rang-1-convexes à croissance
polynômiale qui sont un cas particulier de fonctions convexes par rapport à chacune de leurs
variables.
Proposition 2.2.8. Soit f : Rm → R une fonction convexe par rapport à chacune de ses variables
et telle que
|f (ξ)| ≤ C(1 + |ξ|p ) pour tout ξ ∈ Rm ,
où C > 0 et 1 ≤ p < ∞. Alors il existe une constante C 0 > 0 qui ne dépend que de C, N , p et d
telle que
|f (ξ) − f (η)| ≤ C 0 (1 + |ξ|p−1 + |η|p−1 )|ξ − η| pour tout ξ, η ∈ Rm .
Pk
Démonstration. On pose z0 = ξ et, pour tout 1 ≤ k ≤ m, zk = ξ + i=1 (ηj − ξi )ei de sorte que
m
X
f (η) − f (ξ) = (f (zk ) − f (zk−1 )).
k=1
Or
f (zk ) − f (zk−1 ) = f (zk−1 + (ηk − ξk )ek ) − f (zk−1 ) = g(ηk − ξk ) − g(0),
où g(t) := f (zk−1 + tek ) pour tout t ∈ R. Remarquons que, comme |zk−1 | ≤ |η| + |ξ|, alors
|g(t)| ≤ C(1 + |η|p + |ξ|p + |t|p ) pour tout t ∈ R. Comme g est convexe, par croissance du taux
d’accroissement, on a pour tout s ≤ t ≤ t0 = t + |t| + |ξ| + |η| + 1,
g(t) − g(s) g(t0 ) − g(t) 1 + |ξ|p + |η|p + |t|p
≤ ≤ C ≤ C(1 + |ξ|p−1 + |η|p−1 + |t|p−1 ).
t−s t0 − t 1 + |ξ| + |η| + |t|
En particulier, si ηk − ξk > 0, on pose t = ηk − ξk et s = 0 et si ηk − ξk ≤ 0, on pose s = ηk − ξk
et t = 0. Il vient alors que
|f (zk ) − f (zk−1 )| ≤ C(1 + |ξ|p−1 + |η|p−1 + |ηk − ξk |p−1 )|ηk − ξk | ≤ C(1 + |ξ|p−1 + |η|p−1 )|η − ξ|,
ce qui donne le résultat annoncé après sommation.
2.3. QUASICONVEXITÉ 23
2.3 Quasiconvexité
Une notion intermédiaire entre la convexité et la rang-1-convexité est la quasiconvexité introduite
par Morrey.
Définition 2.3.1. Une fonction borélienne et localement bornée f : Rd×N → R est dite quasicon-
vexe si Z
1
f (ξ) ≤ f (ξ + ∇ϕ(y)) dy
|D| D
pour tout ouvert borné D ⊂ RN , tout ξ ∈ Rd×N et tout ϕ ∈ Cc1 (D; Rd ).
Remarque 2.3.2. Quand f ne prend que des valeurs finies (ce qui sera le cas ici), la condition
de quasiconvexité ne dépend pas de l’ensemble D. En effet, si D0 ⊂ RN est un autre ouvert borné,
alors il existe x0 ∈ RN et r > 0 tels que x0 + rD0 ⊂ D. Si ϕ ∈ Cc1 (D0 ; Rd ), on définit
(
x−x0
si x ∈ x0 + rD0 ,
rϕ r
ψ :=
0 sinon,
de sorte que ψ ∈ Cc1 (D; Rd ). Si la condition de quasiconvexité est vérifiée pour D, alors
Z
|D|f (ξ) ≤ f (ξ + ∇ψ(x)) dx
D
x − x0
Z
0
= |D \ (x0 + rD )|f (ξ) + f ξ + ∇ϕ dx
x0 +rD 0 r
Z
= (|D| − rN |D0 |)f (ξ) + rN f (ξ + ∇ϕ(y)) dy,
D0
d’où Z
0
|D |f (ξ) ≤ f (ξ + ∇ϕ(y)) dy.
D0
avec C > 0 et 1 ≤ p < ∞, alors un argument de densité montre que la condition de quasiconvexité
est équivalente à Z
1
f (ξ) ≤ f (ξ + ∇ϕ(y)) dy
|D| D
Remarque 2.3.4. Si f : Rd×N → R est convexe, alors l’inégalité de Jensen montre que pour tout
ϕ ∈ Cc1 (D; Rd ), on a
Z Z
− f (ξ + ∇ϕ(y)) dy ≥ f − (ξ + ∇ϕ(y)) dy = f (ξ)
D D
car ϕ = 0 dans un voisinage de ∂D. Ceci montre que toute fonction convexe est quasiconvexe.
Nous montrerons ultérieurement que la quasiconvexité implique la rang-1-convexité.
24 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
L’intéret majeur de la quasiconvexité est qu’elle fournit une condition nécessaire et suffisante de
semi-continuité inférieure pour les fonctionnelles intégrales. Le résultat suivant est dû à Morrey, il
a été étendu de nombreuses manières notamment dans l’une de ses formes les plus générales par
Acerbi et Fusco (voir [1]) pour des fonctionnelles intégrales dépendant de x, u et ∇u.
Commençons par la condition nécessaire qui est plus simple.
Si F est faiblement semi-continue inférieurement dans W 1,p (Ω; Rd ) alors f est semi-continue
inférieurement et quasiconvexe.
1
R f (ξ + ∇ϕ) ∈ L (Y ), le Théorème de1Riemann-Lebesgue montre que f (∇un ) = f (ξ + ∇ϕ(n·)) *
Si
Y
f (ξ + ∇ϕ(y)) dy faiblement dans L (Y ), d’où
Z
f (ξ) ≤ f (ξ + ∇ϕ(y)) dy.
Y
Dans la preuve de la condition suffisante, nous utiliserons le résultat suivant qui établit une
forme de “différentiabilité approchée” des fonctions de Sobolev.
Théorème 2.3.6. Soit u ∈ W 1,p (Ω) avec 1 ≤ p < ∞. Alors pour presque tout x0 ∈ Ω, on
Démonstration. Si u est une fonction régulière, en posant g(t) = u(x0 +t(x−x0 )), on a g(1)−g(0) =
R1 0
0
g (s) ds, et donc, pour tout x et x0 ∈ Ω,
Z 1
u(x) − u(x0 ) − ∇u(x0 ) · (x − x0 ) = [∇u(x0 + s(x − x0 )) − ∇u(x0 )] · (x − x0 ) ds.
0
Par densité cette propriété reste valide pour presque tout x0 ∈ Ω et presque tout x ∈ Ω. On
multiplie cette égalité par ϕ ∈ Cc1 (Bρ (x0 )) et on obtient d’après le Théorème de Fubini, la formule
de changement de variables et l’inégalité de Hölder,
Z
ϕ(x)(u(x) − u(x0 ) − ∇u(x0 ) · (x − x0 )) dx
Bρ (x0 )
1
y − x0
Z Z
1
= N +1
ϕ x 0 + [∇u(y) − ∇u(x0 )] · (y − x0 ) dy ds
0 s Bsρ (x0 ) s
1 p0 !1/p0 !1/p
y − x0
Z Z Z
1 1 p
≤ρ ϕ x0 + dy |∇u(y) − ∇u(x0 )| dy ds
0 sN Bsρ (x0 ) s sN Bsρ (x0 )
Z 1 Z !1/p
1 p
≤ ρkϕkLp0 (Bρ (x0 )) |∇u(y) − ∇u(x0 )| dy ds.
0 sN Bsρ (x0 )
En divisant par kϕkLp0 (Bρ (x0 )) et en prenant le supremum parmi toutes les fonctions ϕ ∈ Cc1 (Bρ (x0 )),
il vient pour presque tout x0 ∈ Ω,
Z 1 Z !
|u(x) − u(x0 ) − ∇u(x0 ) · (x − x0 )|p
Z
p
− dx ≤ − |∇u(y) − ∇u(x0 )| dy ds.
Bρ (x0 ) ρp 0 Bsρ (x0 )
R1
Il existe alors sρ ∈ [0, 1] tel que 0
fρ (s) ds ≤ fρ (sρ ) de sorte que
Si x0 est un point de Lebesgue de ∇u, i.e., presque tous les points de Ω, alors on a
Z
− |∇u(y) − ∇u(x0 )|p dy → 0,
Bsρ ρ (x0 )
Nous sommes à présent en mesure d’énoncer le résultat de condition suffisante de faible semi-
continuité inférieure.
26 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
Notons que le membre de droite est toujours fini d’après l’hypothèse de croissance, et du fait
qu’en vertu du Théorème de Banach-Steinhaus la suite (∇un )n∈N est bornée dans Lp (Ω; Rd×N ).
On considère une sous-suite (unk )k∈N telle que
Etape 1. On suppose d’abord que u(x) = ξx pour tout x ∈ Ω est une fonction affine. L’idée
consiste à modifier la condition limite de la suite unk par celle de sa limite u.
Soit (µk )n∈N la suite de mesures positives dans M(Ω) définie par
Z
µk (E) = (1 + |ξ|p + |∇unk |p ) dx pour tout Borélien E ⊂ Ω.
E
Comme cette suite de mesures est bornée, quitte à extraire une nouvelle sous-suite, on peut supposer
que µk * µ faible* dans M(Ω). Pour tout r > 0, on note Ωr = {x ∈ Ω : dist(x, ∂Ω) > r}. Comme
les ensembles ∂Ωr sont deux à deux disjoints, on en déduit que la famille {r > 0 : µ(∂Ωr ) > 0} est
au plus dénombrable, et on peut trouver un r > 0 tel que µ(∂Ωr ) = 0.
Pour tout 0 < δ < r, on considère une fonction cut-off η ∈ Cc∞ (Ω) telle que 0 ≤ η ≤ 1, η = 1 sur
Ωr+δ , η = 0 sur Ω \ Ωr−δ et |∇η| ≤ c/δ. On pose alors
qui satisfait vk (x) = ξx pour tout x ∈ Ω \ Ωr−δ et vk = unk sur Ωr+δ . En utilisant la condition de
croissance sur f , on en déduit que
Z Z Z Z Z
f (∇unk ) dx ≥ f (∇vk ) dx ≥ f (∇vk ) dx − f (ξ) − Λ (1 + |∇vk |p ) dx.
Ω Ωr+δ Ω Ω\Ωr−δ Ωr−δ \Ωr+δ
Or ∇vk = η∇unk + (1 − η)ξ + ∇η ⊗ (unk − u), ce qui implique que |∇vk |p ≤ c(|∇unk |p + |ξ|p +
|u − unk |p /δ p ). Par conséquent,
Z Z Z
f (∇unk ) dx ≥ f (∇vk ) dx − f (ξ)
Ω Ω Ω\Ωr−δ
Z
1
−C 1 + |∇unk |p + |ξ|p + p |unk − u|p dx.
Ωr−δ \Ωr+δ δ
2.3. QUASICONVEXITÉ 27
Par ailleurs,
lim sup µk (Ωr−δ \ Ωr+δ ) ≤ µ Ωr−δ \ Ωr+δ .
k→+∞
Par passage à la limite quand k → +∞, il vient
Z
lim f (∇unk ) dx ≥ |Ω|f (ξ) − |Ω \ Ωr−δ |f (ξ) − Cµ Ωr−δ \ Ωr+δ .
k→+∞ Ω
Comme cette mesure est bornée, quitte à extraire une sous-suite, on peut supposer que λk *
λ faible* dans M(Ω). On désigne par LN la mesure de Lebesgue dans RN . Le théorème de
décomposition de Lebesgue montre que λ = aLN + λs où a ∈ L1 (Ω) et λs est une mesure étrangère
à la mesure de Lebesgue. Nous allons montrer que pour presque tout x0 ∈ Ω,
a(x0 ) ≥ f (∇u(x0 )).
En effet, dans ce cas, on a
Z Z
lim inf F (un ) = lim λk (Ω) ≥ λ(Ω) ≥ a(x) dx ≥ f (∇u) dx,
n→+∞ k→+∞ Ω Ω
λk (Bρj (x0 ))
Z
1
= lim lim = lim lim f (∇unk (x)) dx.
j→+∞ k→+∞ ωN ρN
j
j→+∞ k→+∞ ωN ρN B (x )
j ρj 0
28 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
et
|unk (x) − u(x0 ) − ∇u(x0 )(x − x0 )|p
Z Z
p 1
|vk,j (y) − ∇u(x0 )y| dy = N dx
B ρ j Bρj (x0 ) ρpj
de sorte que Z
lim lim |vk,j (y) − ∇u(x0 )y|p dy = 0.
j→+∞ k→+∞ B
Pour tout j ∈ N, on peut donc trouver une suite k(j) % +∞ quand j → +∞ telle que, si l’on pose
vj := vk(j),j , alors vj → ∇u(x0 )y fortement dans Lp (B; Rd ) et
Z
1
a(x0 ) = lim f (∇vj (y)) dy.
j→+∞ ωN B
D’après la propriété de coercivité, on a que la suite (∇vj )j∈N est bornée dans Lp (B; Rd×N ) ce qui
montre que vj * ∇u(x0 )y faiblement dans W 1,p (B; Rd ). D’après l’étape 1, on en déduit que
a(x0 ) ≥ f (∇u(x0 )),
comme annoncé.
Remarque 2.3.8. Le résultat précédent est loin d’être optimal. Il se généralise au cas où f satisfait
−C1 (|ξ|q + 1) ≤ f (ξ) ≤ C2 (1 + |ξ|p ) pour tout ξ ∈ Rd×N ,
avec 1 ≤ q < p et C1 , C2 > 0.
La quasiconvexité de f est donc une condition nécessaire et suffisante pour que la fonctionnelle
intégrale F : W 1,p (Ω; Rd ) → R définie par
Z
F (u) = f (∇u(x)) dx
Ω
soit faiblement semi-continue inférieurement dans W 1,p (Ω; Rd ). Elle implique donc la rang-1-
convexité de f . Ces deux notions sont toutefois distinctes (du moins quand d ≥ 3) comme l’atteste
le contre-exemple de Sverak (voir Exemple 2.2.7) où on peut montrer que la fonction f construite,
bien qu’étant rang-1-convexe, n’est pas quasiconvexe.
Un exemple important de fonctions quasiconvexes quand N = d = 2 est le suivant. Nous avons
déjà vu que si Ω ⊂ R2 est un ouvert borné et un * u faiblement dans W 1,p (Ω; R2 ) avec p > 2,
alors det(∇un ) * det(∇u) faiblement dans Lp/2 (Ω). Par conséquent, si g : R2×2 × R → R est une
fonction convexe, le Théorème 1.2.3 assure que
Z Z
g(∇u, det∇u) dx ≤ lim inf g(∇u, det∇un ) dx,
Ω n→+∞ Ω
ce qui montre que, en vertu du Théorème 2.3.5 que ξ ∈ R2×2 7→ g(ξ, detξ) est quasiconvexe. Il
s’agit d’un cas très particulier d’une classe de fonctions dite polyconvexes.
Nous sommes à présent en mesure d’énoncer un résultat d’existence de minimiseurs dans le cas
vectoriel dont la démonstration est identique à celle du Théorème 1.2.5.
2.3. QUASICONVEXITÉ 29
— il existe 1 < p < ∞, a0 , a1 ∈ L1 (Ω) et b ≥ 0 tels que pour presque tout x ∈ Ω et tout
z ∈ Rd ,
a0 (x) ≤ g(x, z) ≤ a1 (x) + b|z|p .
Si u0 ∈ W 1,p (Ω; Rd ), alors il existe une solution u ∈ u0 + W01,p (Ω; Rd ) au problème de Dirichlet
Z Z
inf
1,p
f (∇v) dx + g(x, v) dx .
v∈u0 +W0 (Ω;Rd ) Ω Ω
30 CHAPITRE 2. NOTIONS GÉNÉRALISÉES DE CONVEXITÉ
Chapitre 3
Γ-convergence de fonctionnelles
intégrale
ii) (borne supérieure) il existe une suite (ūj )j∈N ⊂ X telle que ūj → u et
F (u) = lim Fj (ūj ).
j→+∞
Par ailleurs, pour tout v ∈ X, il existe une suite (v̄j )j∈N telle que v̄j → v et Fj (v̄j ) → F (v). Par
conséquent,
lim inf Fj ≤ lim Fj (v̄j ) ≤ F (v),
j→+∞ X j→+∞
31
32 CHAPITRE 3. Γ-CONVERGENCE DE FONCTIONNELLES INTÉGRALE
ce qui montre que F (u) ≤ F (v) pour tout v ∈ X et que F (u) = minX F ≤ limj inf X Fj ≤ F (v)
pour tout v ∈ X. En prenant v = u, on obtient le résultat annoncé.
A partir de la définition, on obtient immédiatement les propriétés suivantes.
Remarque 3.1.3. 1. Si Fj Γ-converge vers F , alors F est semi-continue inférieurement dans
X. En effet, soit uk → u, d’après la borne supérieure, pour tout k ∈ N, on peut trouver
une suite ūkj → uk telle que limj Fj (ūkj ) = F (uk ). Par récurrence, on construit une suite
croissante (σk )k∈N d’entiers telle que pour tout k ∈ N et pour tout j ≥ σk ,
1 1
d(ūkj , uk ) ≤ , |Fj (ūkj ) − F (uk )| ≤ .
k k
Définissons vj = ūkj si σk ≤ j < σk+1 de sorte que vj → u et
F (u) ≤ lim inf Fj (vj ) ≤ lim inf Fσk (vσk ) ≤ lim inf F (uk ).
j→+∞ k→+∞ k→+∞
2. Si Fj Γ-converge vers F , alors pour toute sous-suite (Fjk )k∈N , on a Fjk Γ-converge vers F .
Pour montrer la borne inférieure, on considère une suite uk → u et on définit
(
ujk si j = jk ,
ũj =
u si j 6= jk pour tout k
F (u) ≤ lim inf Fj (ũj ) ≤ lim inf Fjk (ũjk ) = lim inf Fjk (uk ).
j→+∞ k→+∞ k→+∞
Pour la borne supérieure, comme Fj Γ-converge vers F , alors il existe une suite (ūj )j∈N ⊂ X
telle que ūj → u et
F (u) = lim Fj (ūj ) = lim Fjk (ūjk ).
j→+∞ k→+∞
respectivement.
On a alors le résultat suivant
Proposition 3.1.5. La suite (Fj )j∈N Γ-converge si et seulement si F 0 = F 00 , auquel cas, la Γ-limite
est donnée par cette fonctionnelle commune.
Démonstration. Supposons que (Fj )j∈N Γ-converge vers une fonctionnelle F et montrons que F =
F 0 = F 00 . Remarquons qu’on a toujours F 0 ≤ F 00 . Par conséquent, il suffit de montrer que F ≤ F 0
et F 00 ≤ F . D’après la borne inférieure, on a pour tout u ∈ X et pour toute suite uj → u,
Par passage à l’infimum sur toutes les suites (uj )j∈N qui convergent vers u et par définition de la
Γ-limite inférieure, il vient F ≤ F 0 . Par ailleurs, la borne supérieure montre l’existence d’une suite
ūj → u telle que
F (u) = lim Fj (ūj ) = lim sup Fj (ūj ) ≥ F 00 (u),
j→+∞ j→+∞
ce qui montre la borne inférieure. Pour établir la borne supérieure, nous allons montrer que l’exis-
tence d’une suite ūj → u telle que
Il suffit de considérer que le cas où F 00 (u) < +∞. Pour tout k ∈ N, on peut alors trouver une suite
ukj → u telle que
1
lim sup Fj (ukj ) ≤ F 00 (u) + .
j→+∞ k
Par récurrence, on construit une suite croissante (σk )k∈N telle que pour tout k ∈ N et pour tout
j ≥ σk ,
1 2
d(ukj , u) ≤ , Fj (ukj ) ≤ F 00 (u) + .
k k
On pose alors ūj = ukj si σk ≤ j < σk+1 de sorte que ūj → u et lim supj Fj (ūj ) ≤ F 00 (u).
Dans les espaces métriques séparables, la Γ-convergence jouit d’une propriété de compacité.
Proposition 3.1.6. Soit (X, d) un espace métrique séparable et (Fj )j∈N une suite de fonctionnelles
Fj : X → R ∪ {+∞}. Alors il existe une sous-suite (Fjk )k∈N et F : X → R ∪ {+∞} telles que Fjk
Γ-converge vers F .
Démonstration. Comme X est séparable, il existe une base dénombrable de voisinages notée
{Ui }i∈N . Par un principe d’extraction diagonal, on peut extraire une sous-suite (Fjk )k∈N telle
que la limite
lim inf Fjk
k→+∞ Ui
existe pour tout i ∈ N. Pour tout u ∈ X, on définit les Γ-limites inférieures et supérieures associées
à cette sous-suite,
F 0 (u) := inf lim inf Fjk (xk ) : xk → x , F 00 (u) := inf lim sup Fjk (xk ) : xk → x .
k→+∞ k→+∞
D’après la Proposition 3.1.5, il suffit de montrer que F 0 = F 00 . Notons qu’on a toujours par
définition F 0 ≤ F 00 . Il s’agit de montrer l’autre inégalité. Soient u ∈ X et i ∈ N tels que u ∈ Ui . Si
uk → u, on a uk ∈ Ui pour k assez grand et, par conséquent,
soit
sup lim sup inf Fjk ≤ F 0 (u).
{i∈N: u∈Ui } k→+∞ Ui
1
inf Fjk (v) ≤ F 0 (u) + .
1
d(u,v)≤ n n
1
Il existe alors vkn ∈ X tel que d(u, vkn ) ≤ n avec
2
Fjk (vkn ) ≤ F 0 (u) + .
n
On pose v̄k = vkn si σn ≤ k < σn+1 , de sorte que v̄k → u et
Proposition 3.1.7. La suite (Fj )j∈N Γ-converge vers F si et seulement si pour toute sous-suite,
il existe une sous-suite qui Γ-converge vers F .
Démonstration. Nous avons déjà vu à la Remarque 3.1.3-2 que si Fj Γ-converge vers F , alors pour
toute sous-suite (Fjk )k∈N , on a Fjk Γ-converge vers F .
Réciproquement, supposons que Fj ne Γ-converge pas vers F . Cela signifie que soit il existe une
suite ūj → u telle que lim inf j Fj (ūj ) < F (u), soit lim supj F (uj ) > F (u) pour toute suite uj → u.
Dans le premier cas, on extrait une sous-suite telle que limk Fjk (ūjk ) = lim inf j Fj (ūj ) < F (u).
Par hypothèse, de cette sous-suite, on peut encore extraire une sous-suite telle que Fjkl Γ-converge
vers F et, en particulier,
F (u) ≤ lim inf Fjkl (ūjkl ) = lim Fjkl (ūjkl ) = lim Fjk (ūjk ),
l→+∞ l→+∞ k→+∞
F (u) = lim Fjkl (ul ) ≥ lim inf Fjkl = lim inf Fjk ,
l→+∞ l→+∞ U k→+∞ U
λ|ξ|p ≤ fε (x, ξ) ≤ Λ(1 + |ξ|p ) p.p. tout x ∈ Ω et pour tout ξ ∈ Rd×N , (3.2.1)
où λ > 0, Λ > 0 et 1 < p < ∞. On définit la fonctionnelle Fε : Lp (Ω; Rd ) → [0, +∞] par
Z
f (x, ∇u) dx si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ),
ε
Fε (u) = (3.2.2)
Ω
+∞ sinon.
L’idée consiste à localiser Fε sur la famille des sous ensembles ouverts de Ω notée A(Ω). Pour
tout u ∈ Lp (Ω; Rd ) et tout A ∈ A(Ω),
Z
f (x, ∇u) dx si u ∈ W 1,p (A; Rd ),
ε
Fε (u, A) =
A
+∞ sinon.
Un bon substitut à A(Ω) est R(Ω) qui est l’ensemble des unions finies de cubes de côtés rationnels
et de centre rationnel contenus dans Ω. La famille R(Ω) est dénombrable et, de plus, pour tout A,
B ∈ A(Ω) avec A ⊂ B, il existe R ∈ R(Ω) tels que A ⊂ R ⊂ R ⊂ B.
Comme Lp (Ω; Rd ) est un espace métrique séparable, pour toute suite (εj )j∈N , la Proposition
3.1.6 couplé à un argument de diagonalisation de sous-suite montre que l’on peut extraire une
sous-suite, notée (εn ≡ εjn )n∈N telle que, si l’on définit pour tout (u, A) ∈ Lp (Ω; Rd ) × A(Ω),
p d
F (u, A) = inf lim inf Fεn (un , A) : un → u dans L (A; R ) ,
n→+∞
alors F (·, C) est la Γ-limite de Fεn (·, C) pour tout C ∈ R(Ω) et pour C = Ω.
Commençons par déterminer le domaine de la Γ-limite. Soit u ∈ Lp (Ω; Rd ) tel que F (u, Ω) <
+∞, d’après la borne supérieure, il existe une suite (ūn )n∈N telle que ūn → u dans Lp (Ω; Rd ) et
D’après la propriété de coercivité, on en déduit que la suite (∇ūn )n∈N est bornée dans Lp (Ω; Rd×N )
ce qui implique que ūn * u faiblement dans W 1,p (Ω; Rd ) avec u ∈ W 1,p (Ω; Rd ). Ceci montre
36 CHAPITRE 3. Γ-CONVERGENCE DE FONCTIONNELLES INTÉGRALE
que F (u, Ω) = +∞ pour tout u ∈ Lp (Ω; Rd ) \ W 1,p (Ω; Rd ). On est donc ramené à étudier la
Γ-convergence dans W 1,p (Ω; Rd ).
D’après la borne supérieure, si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ), il existe une suite (ūn )n∈N ⊂ W 1,p (Ω; Rd ) telle
que Fεn (ūn , Ω) → F (u, Ω) < +∞. Par conséquent, la suite de mesures
est bornée dans M(Ω) et, quitte à extraire une autre sous-suite, on peut toujours supposer que
µn * µ faible* dans M(Ω).
Proposition 3.2.2. Pour tout A, B, C ∈ A(Ω), on a
i) F (u, A) ≤ F (u, A \ C) + F (u, B) si C ⊂ B ⊂ A ;
ii) pour tout δ > 0 il existe Cδ ∈ A(Ω) avec C δ ⊂ A et F (u, A \ C δ ) ≤ δ ;
iii) µ(Ω) ≤ F (u, Ω) ;
iv) F (u, A) ≤ µ(A) si A ⊂ Ω.
Démonstration. Comme µn * µ faible* dans M(Ω) et Ω est ouvert,
Par ailleurs, pour tout 0 < η < dist(C, ∂R0 )/2, il existe une suite (vn )n∈N ⊂ W 1,p (A \ C; Rd ) telle
que vn → u dans Lp (A \ C; Rd ) et
Nous allons construire une suite (wn )n∈N dans W 1,p (A; Rd ) telle que wn → u dans Lp (A; Rd )
en raccordant les suites vn et un là où leurs supports s’intersectent sur R0 \ C. Pour ce faire, on
définit la suite de mesures
νn := (1 + |∇un |p + |∇vn |p )χR0 \C LN
qui satisfait lim inf n νn (Ω) < ∞. Par conséquent, il existe une sous-suite (νnk )k∈N et une mesure
postive ν ∈ M(R0 \ C) telles que νnk * ν faible* dans M(R0 \ C). On peut par ailleurs également
supposer que, pour cette même sous-suite, on a lim inf n Fεn (vn , A \ C) = limk Fεnk (vnk , A \ C).
Pour tout 0 < t < dist(C, ∂R0 ), on définit Rt := {x ∈ R0 : dist(x, ∂R0 ) > t} et, pour tout
0 < δ < η, Lδ = Rη−δ \ Rη+δ . On considère une fonction cut-off ζ ∈ Cc∞ (Ω) telle que 0 ≤ ζ ≤ 1,
ζ = 1 sur Rη+δ , ζ = 0 sur Ω \ Rη−δ et |∇ζ| ≤ C/δ. On définit alors
wn := ζun + (1 − ζ)vn ∈ W 1,p (A; Rd ), wn → u dans Lp (A; Rd ).
Par conséquent, d’après la propriété de croissance,
F (u, A) ≤ lim Fεnk (unk , R0 ) + lim Fεnk (vnk , A \ C) + C lim sup νnk (Lδ )
k→+∞ k→+∞ k→+∞
Montrons à présent un résultat de représentation intégrale dû à Dal Maso et Buttazzo qui donne
des conditions suffisantes pour qu’une fonctionnelle u 7→ F (u) soit du type
Z
f (x, ∇u) dx.
Ω
Théorème 3.2.4. Soit Ω ⊂ RN un ouvert borné, 1 ≤ p < ∞. Soit F : W 1,p (Ω; Rd ) × A(Ω) →
[0, +∞) une fonctionnelle satisfaisant les conditions
i) (localité) F (u, A) = F (v, A) si u = v p.p. sur A ∈ A(Ω) ;
ii) (propriété de mesure) pour tout u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) la fonction d’ensemble F (u, ·) est la
restriction à A(Ω) d’une mesure de Radon ;
iii) (condition de croissance) il existe Λ > 0 tel que pour tout (u, A) ∈ W 1,p (Ω; Rd ) × A(Ω),
Z
F (u, A) ≤ Λ (1 + |∇u|p ) dx;
A
iv) invariance par translation) pour tout (u, A) ∈ W 1,p (Ω; Rd ) × A(Ω) et tout z ∈ Rd ,
F (u + z, A) = F (u, A);
v) (semi-continuité inférieure) pour tout A ∈ A(Ω), F (·, A) est semi-continue inférieurement
pour la convergence forte de Lp (Ω; Rd ).
Alors il existe une fonction de Carathéodory f : Ω × Rd×N → [0, +∞) satisfaisant la condition de
croissance
0 ≤ f (x, ξ) ≤ Λ(1 + |ξ|p ) p.p. tout x ∈ Ω et pour tout ξ ∈ Rd×N ,
telle que Z
F (u, A) = f (x, ∇u) dx pour tout (u, A) ∈ W 1,p (Ω; Rd ) × A(Ω).
A
Etape 2 : Représentation intégrale sur les fonctions continues affines par morceaux.
Soit A ∈ A(Ω) et u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) une fonction affine par morceaux. On peut donc écrire
m
X
u(x) = (ξi x + zi )χAi (x)
i=1
d×N d
, ξm ∈ R
où ξ1 , . . .S , z1 , . . . , zm ∈ R et A1 , . . . , Am sont des ouverts deux à deux disjoints tels
m
que |Ω \ i=1 Ai | = 0. D’après (i), (ii), (iv) et l’étape 1, on a
m
X m
X m
X
F (u, A) = F (u, Ai ) = F (ûξi + zi , Ai ) = F (ûξi , Ai )
i=1 i=1 i=1
m Z
X m Z
X Z
= f (x, ξi ) dx = f (x, ∇u) dx = f (x, ∇u) dx.
i=1 Ai i=1 Ai A
3.2. APPLICATIONS AUX FONCTIONNELLES INTÉGRALE 39
On pose uε (y) = εu(y/ε) pour tout y ∈ RN et tout ε > 0. Un calcul immédiat montre que pour
tout y ∈ RN ,
|uε (y) − ûλη+(1−λ)ξ (y)| ≤ λ(1 − λ)|a|ε,
ce qui montre que uε → ûλη+(1−λ)ξ fortement dans Lp (Ω; Rd ). Par semi-continuité inférieure, il
vient
F (ûλη+(1−λ)ξ , Bρ (x)) ≤ lim inf F (uε , Bρ (x)),
ε→0
et comme ûλη+(1−λ)ξ est affine et uε est affine par morceaux, on en déduit que
Z Z Z y
f (y, λη + (1 − λ)ξ) dy ≤ lim inf f (y, ∇uε (y)) dy = lim inf f y, ∇u dy.
Bρ (x) ε→0 Bρ (x) ε→0 Bρ (x) ε
En notant
[ [
Eη = {y ∈ RN : n ≤ b · y < n + λ}, Eξ = {y ∈ RN : n + λ ≤ b · y < n + 1},
n∈Z n∈Z
faible* dans L∞ (Ω) et donc comme f (·, ξ), f (·, η) ∈ L1 (Ω), il vient
Z Z Z
f (y, ∇uε (y)) dy → λ f (y, η) dy + (1 − λ) f (y, ξ) dy,
Bρ (x) Bρ (x) Bρ (x)
Etape 4 : Une inégalité par continuité. Soient u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) et A ∈ A(Ω). Pour tout
δ > 0 il existe C ∈ A(Ω) tel que C ⊂ A et F (u, A \ C) ≤ δ. On peut trouver une suite de
fonctions (un )n∈N ⊂ W 1,p (Ω; Rd ) telle que un |C est affine par morceaux et un → u fortement dans
W 1,p (Ω; Rd ). D’après l’étape 2, on a pour tout n ∈ N,
Z
F (un , C) = f (x, ∇un ) dx.
C
Par
R passage à la limite quand n → +∞, d’après (v) et la continuité de v ∈ W 1,p (C; Rd ) 7→
C
f (x, ∇v) dx, on en déduit que
Z Z
F (u, A) − δ ≤ F (u, C) ≤ f (x, ∇u) dx ≤ f (x, ∇u) dx,
C A
avec égalité si v est affine par morceaux. Si C ∈ A(Ω) est tel que C ⊂ A et (un )n∈N est une suite
de fonctions dans W 1,p (Ω; Rd ) telle que un |C est affine par morceaux et un → u fortement dans
W 1,p (Ω; Rd ), alors
Z Z
g(x, 0) dx = G(0, C) = F (u, C) ≤ f (x, ∇u) dx
C C
Z
= lim f (x, ∇un ) dx = lim F (un , C) = lim G(un − u, C)
n→+∞ C n→+∞ n→+∞
Z Z
≤ lim g(x, ∇un − ∇u) dx = g(x, 0) dx,
n→+∞ C C
ce qui implique que toutes les inégalités sont des égalités, et donc
Z
F (u, C) = f (x, ∇u) dx.
C
Si A = Ω où A ∈ R(Ω), on sait par construction que F (·, A) est la Γ-limite de Fεjn (·, A) et donc
qu’on peut trouver une suite (un )n∈N dans W 1,p (A; Rd ) telle que
Z Z
lim fεn (x, ∇un ) dx = f (x, ∇u) dx.
n→+∞ A A
On peut même montrer que cette propriété reste vraie pour tout A ∈ A(Ω).
Nous terminons ce chapitre par un résultat de stabilité de problèmes variationnels. Pour ce
faire, nous aurons besoin de la proposition suivante qui affirme qu’on peut toujours supposer que
les suites qui atteignent la borne supérieure ont la même valeur sur le bord que leur limite.
Proposition 3.2.6. Soit u ∈ W 1,p (Ω; Rd ), alors
n
F (u, Ω) = inf lim inf Fεn (un , Ω) : un → u dans Lp (Ω; Rd )
n→+∞
o
et un = u dans un voisinage de ∂Ω
n
= inf lim sup Fεn (un , Ω) : un → u dans Lp (Ω; Rd )
n→+∞
o
et un = u dans un voisinage de ∂Ω .
Il s’agit donc de montrer l’autre inégalité. Soit (vn )n∈N est une suite de W 1,p (Ω; Rd ) telle que
vn → u dans Lp (Ω; Rd ) et
lim inf Fεn (un , Ω) < +∞.
n→+∞
On définit la suite de mesures νk := (1 + |∇vnk |p + |∇u|p )LN qui satisfait supk νk (Ω) < ∞. Par
conséquent, quitte à extraire une nouvelle sous-suite, on a νk * ν faible* dans M(Ω).
42 CHAPITRE 3. Γ-CONVERGENCE DE FONCTIONNELLES INTÉGRALE
Pour tout t > 0, on définit Ωt := {x ∈ Ω : dist(x, ∂Ω) > t} et, pour tout 0 < δ < t,
Lδ = Ωt−δ \ Ωt+δ . On considère une fonction cut-off ζ ∈ Cc∞ (Ω) telle que 0 ≤ ζ ≤ 1 dans Ω, ζ = 1
sur Ωt+δ , ζ = 0 sur Ω \ Ωt−δ et |∇ζ| ≤ C/δ. On définit alors
un := ζvn + (1 − ζ)u ∈ W 1,p (Ω; Rd ), un → u dans Lp (Ω; Rd ).
Par conséquent, comme un = u sur Ω \ Ωt−δ , il vient
F 0 (u) ≤ lim inf Fεn (un , Ω) ≤ lim inf Fεnk (unk , Ω).
n→+∞ k→+∞
Par passage à la liminf quand k → +∞, il vient d’après la propriété de croissance (4.1.1),
Z Z Z
lim inf fεnk (x, ∇vnk ) dx ≥ lim fεnk (x, ∇unk ) dx − Λ (1 + |∇u|p ) dx − Cν(Lδ ).
k→+∞ Ω k→+∞ Ω Ω\Ωt−δ
Comme les ensembles {∂Ωt }t>0 sont deux à deux disjoints, l’ensemble {t > 0 : (LN +ν)(∂Ωt ) > 0}
est au plus dénombrable et on peut donc trouver une suite ti & 0 tel que (LN + ν)(∂Ωti ) = 0 pour
tout i ∈ N. Il vient alors en remplaçant t par ti dans l’expression précédente et en faisant tendre
i → +∞ que Z Z
lim inf fεnk (x, ∇vnk ) dx ≥ lim fεnk (x, ∇unk ) dx.
k→+∞ Ω k→+∞ Ω
On en déduit que
F 0 (u) ≤ lim Fεnk (vnk , Ω) = lim inf Fεn (vn , Ω),
k→+∞ n→+∞
puis par passage à l’inf parmi toutes les suite vn → u dans Lp (Ω; Rd ) que F 0 (u) ≤ F (u, Ω). La
formule avec la limsup se démontre de manière identique.
Nous sommes à présent en mesure de montrer la propriété de convergence des suites minimisantes
et de l’infimum. Soient ū ∈ W 1,p (Ω; Rd ) et g : Ω × Rd → R une fonction de Carathéodory telle que
a0 (x) ≤ g(x, z) ≤ a1 (x) + b|z|p ) p.p. tout x ∈ Ω et pour tout z ∈ Rd , (3.2.4)
où a0 , a1 ∈ L1 (Ω) et b > 0. On considère la fonctionnelle Jn : W 1,p (Ω; Rd ) → R définie par
Z Z
Jn (u) = fεn (x, ∇u) dx + g(x, u) dx
Ω Ω
et le problème de minimisation
In := inf Jn (v),
v∈ū+W01,p (Ω;Rd )
où (εn )n∈N est une sous-suite extraite satisfaisant la conclusion du Théorème 3.2.1 ait lieu. Alors
on a le résultat suivant :
3.2. APPLICATIONS AUX FONCTIONNELLES INTÉGRALE 43
Théorème 3.2.7. Soit Ω ⊂ RN un ouvert borné. Si un ∈ u0 + W01,p (Ω; Rd ) est telle que Jεn (un ) −
In → 0, alors on peut extraire une sous-suite (unk ) telle que unk * u faiblement dans W 1,p (Ω; Rd )
où u ∈ ū + W01,p (Ω; Rd ) est une solution de
Z Z
I := min
1,p
J(v) := f (x, ∇v) dx + g(x, v) dx
v∈ū+W0 (Ω;Rd ) Ω Ω
et donc, la suite numérique (In )n∈N est bornée. Par conséquent, la suite (Jεn (un ))n∈N est bornée,
ce qui implique que (∇un )n∈N est bornée dans Lp (Ω; Rd×N ) et, d’après l’inégalité de Poincaré
appliquée à un − ū, on en déduit que (un )n∈N est bornée dans W 1,p (Ω; Rd ). On peut donc extraire
une sous-suite (unk ) telle que unk * u faiblement dans W 1,p (Ω; Rd ) avec u ∈ ū + W01,p (Ω; Rd ) et,
d’après la borne inférieure,
J(u) ≤ lim inf Jεnk (unk ).
k→+∞
Par ailleurs, d’après la Proposition 3.2.6, pour tout v ∈ ū + W01,p (Ω; Rd ), il existe une suite (vn )n∈N
dans ū + W01,p (Ω; Rd ) telle que vn → v dans Lp (Ω; Rd ) et
On en déduit que
J(u) ≤ lim inf Jεnk (unk ) ≤ lim inf Ink ≤ lim sup Ink ≤ lim sup Jεnk (vnk ) = lim Jεn (vn ) = J(v),
k→+∞ k→+∞ k→+∞ k→+∞ n→+∞
ce qui montre que u est un minimiseur de J sur ū + W01,p (Ω; Rd ) et donc que I = J(u). En prenant
v = u, les inégalités précédentes deviennent des égalités et il vient que Ink → I.
44 CHAPITRE 3. Γ-CONVERGENCE DE FONCTIONNELLES INTÉGRALE
Chapitre 4
Quelques applications
4.1 Relaxation
Nous avons vu précédemment que la quasiconvexité (la convexité dans le cas scalaire) de f
est une condition nécessaire et suffisante à la faible semi-continuité inférieure de la fonctionnelle
intégrale Z
u 7→ W 1,p (Ω; Rd ) 7→ f (∇u) dx.
Ω
Une question naturelle se pose alors : que se passe-t-il quand f n’est pas quasiconvexe ?
Exemple 4.1.1. Par exemple, si N = d = 1 et Ω = (0, 1), on considère la fonction (non convexe)
f (ξ) = (1 − ξ 2 )2 et la suite uε (x) = εu(x/ε) où u : R → R est la fonction 1-périodique définie par
(
x−n si n ≤ x < n + 21 ,
u(x) =
n+1−x si n + 12 ≤ x < n + 1.
On a que uε * 0 faiblement dans W 1,4 (0, 1). Par conséquent, comme u0ε (x) = u0 (εx) ∈ {−1, 1}
p.p dans x ∈ (0, 1), il vient
F (0) = 1 > 0 = F (uε ).
45
46 CHAPITRE 4. QUELQUES APPLICATIONS
1
lim F (ukϕk (j) ) = lim inf F (ukj ) ≤ F 0 (u) + .
j→+∞ j→+∞ k
On construit ensuite une suite strictement croissante d’entiers (σk )k∈N telle que pour tout j ≥ σk ,
1 2
d(ukϕk (j) , u) ≤ , F (ukϕk (j) ) ≤ F 0 (u) + ,
k k
et on définit vj = ukϕk (j) si σk ≤ j < σk+1 de sorte que vj → u et
ce qui implique, par passage à l’infimum par rapport à toutes les suites (uj )j∈N que G ≤ F 0 , ce qui
montre que F ≤ F 0 et donc que F 0 = F est effectivement l’enveloppe semi-continue inférieurement
de F .
Nous allons maintenant nous intéresser à la relaxation de fonctionnelles intégrales. On considère
une fonction continue f : Rd×N → R satisfaisant des propriétés de croissance et coercivité
où λ > 0, Λ > 0 et 1 < p < ∞. On définit la fonctionnelle F : Lp (Ω; Rd ) → [0, +∞] par
Z
f (∇u) dx si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ),
F (u) = (4.1.2)
Ω
+∞ sinon.
Théorème 4.1.3. L’enveloppe semi-continue inférieurement de F dans Lp (Ω; Rd ) est donnée par
F : Lp (Ω; Rd ) → [0, +∞] par
Z
Qf (∇u) dx si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ),
F (u) =
Ω
+∞ sinon,
4.1. RELAXATION 47
Il s’agit alors de montrer que f = Qf . Dans la suite de la preuve, nous posons uξ (x) := ξx pour
tout x ∈ RN , où ξ ∈ Rd×N est fixée.
Etape 1. Montrons que f est indépendante de la variable spatiale x. Soient x0 , y0 ∈ Ω et ρ > 0
tels que Bρ (x0 ) ⊂ Ω et Bρ (y0 ) ⊂ Ω. D’après la Remarque 3.2.5, il existe une suite (uρn )n∈N dans
W 1,p (Bρ (x0 ); Rd ) telle que uρn → uξ dans Lp (Bρ (x0 ); Rd ) et
Z Z
ρ
lim inf f (∇un ) dx ≤ f (x, ξ) dx + ρN +1 .
n→+∞ Bρ (x0 ) Bρ (x0 )
On définit vnρ (x) = uρn (x − y0 + x0 ) de sorte que vnρ ∈ W 1,p (Bρ (y0 ); Rd ) et vnρ → uξ + ξ(x0 − y0 )
dans Lp (Bρ (y0 ); Rd ). Par conséquent, par changement de variables,
Z Z
f (x, ξ) dx ≤ lim inf f (∇vnρ ) dx
Bρ (y0 ) n→+∞ Bρ (y0 )
Z Z
= lim inf f (∇uρn ) dx ≤ f (x, ξ) dx + ρN +1 .
n→+∞ Bρ (x0 ) Bρ (x0 )
En particulier, d’après la condition de coercivité de f , on en déduit que la suite (∇uj )j∈N est
bornée dans Lp (Q; Rd×N ) ce qui implique que uj * uξ faiblement dans W 1,p (Q; Rd ). D’après la
Proposition 3.2.6, on peut supposer sans restreindre la généralité que uj = uξ sur ∂Q, en particulier
ϕ := uj − uξ ∈ W01,p (Q; Rd ). On pose alors ψ(x) = ϕ(x0 + ρx)/ρ de sorte que ψ ∈ W01,p ((0, 1)N ; Rd )
et, par définition de la quasiconvexification, on a
Z Z Z
f (∇uj ) dx = f (ξ + ∇ϕ) dx = ρN f (ξ + ∇ψ) dx ≥ ρN Qf (ξ).
Q Q (0,1)N
48 CHAPITRE 4. QUELQUES APPLICATIONS
ϕ(jx)
ϕj (x) =
j
Proposition 4.1.5. La fonction Qf est l’enveloppe quasiconvexe de f , i.e., pour tout ξ ∈ Rd×N ,
Le Proposition 4.1.2 (ou la Remarque 3.1.3) montre alors que F est semi-continue inférieurement
dans Lp (B; Rd ). Par injection compacte de Rellich, F est faiblement semi-continue inférieurement
dans W 1,p (B; Rd ), ce qui montre en vertu du Théorème 2.3.7 que Qf est quasiconvexe. Par
ailleurs, on a clairement que Qf ≤ f . Enfin, si g ≤ f et g est quasiconvexe, alors pour tout
ϕ ∈ Cc∞ ((0, 1)N ; Rd ),
Z Z
g(ξ) ≤ g(ξ + ∇ϕ(y)) dy ≤ f (ξ + ∇ϕ(y)) dy.
(0,1)N (0,1)N
Par passage à l’infimum en ϕ, on en déduit que g ≤ Qf ce qui montre que Qf est effectivement
l’enveloppe quasiconvexe de f .
4.2. HOMOGÉNÉISATION 49
Dans le cas scalaire, l’enveloppe quasiconvexe se réduit à l’enveloppe convexe. Pour revenir à
l’exemple 4.1.1, si N = d = 1 et Ω = (0, 1), alors la relaxée de la fonctionnelle
Z 1
(1 − |u0 |2 )2 dx si u ∈ W 1,4 (0, 1),
u ∈ L4 (0, 1) 7→ F (u) =
0
+∞ sinon,
Z 1
Cf (u0 ) dx si u ∈ W 1,4 (0, 1),
4
u ∈ L (0, 1) 7→ F (u) = 0
+∞ sinon,
où Cf (ξ) = (1 − ξ 2 )2 si |ξ| > 1 et Cf (ξ) = 0 si |ξ| ≤ 1 est l’enveloppe convexe de ξ 7→ f (ξ) =
(1 − ξ 2 )2 .
Le calcul de l’enveloppe quasiconvexe est une question difficile à résoudre en pratique. Très peu
d’exemples sont disponibles.
Exemple 4.1.6. On définit la fonction de Kohn-Strang f : R2×2 → [0, +∞) par
(
1 + |ξ|2 si ξ 6= 0,
f (ξ) =
0 si ξ = 0.
Cette fonctionnelle apparaı̂t naturellement dans les problèmes d’optimisation de forme ou d’en-
dommagement. On peut montrer (voir [4, Lemma A.2-2.7]) que l’enveloppe convexe de f est donnée
par (
1 + |ξ|2 si |ξ| ≥ 1,
Cf (ξ) =
2|ξ| si |ξ| < 1,
et l’enveloppe quasiconvexe est donnée par
(
1 + |ξ|2 si |ξ|2 + 2|detξ| ≥ 1,
Qf (ξ) = p
2 |ξ|2 + 2|detξ| − 2|detξ| si |ξ|2 + 2|detξ| < 1.
4.2 Homogénéisation
On s’intéresse à présent à un problème de Γ-convergence avec une échelle de microstructure. On
considère une fonction de Carathéodory f : RN × Rd×N → [0, +∞) satisfaisant
i) f (·, ξ) est 1-périodique pour tout ξ ∈ Rd×N ;
ii) il existe λ, Λ > 0 et 1 < p < ∞, tels que
On peut interpréter cette fonctionnelle comme l’énergie contenue dans un corps élastique ayant des
hétérogénéités périodiquement distribuées de période ε > 0 très petite. On cherche alors à essayer
de déterminer un milieu élastique “moyenné”, ou homogénéisé, en faisant tendre la période de la
microstructure vers 0. Nous avons le résultat suivant obtenu indépendamment par Braides [2] et
Müller [8].
50 CHAPITRE 4. QUELQUES APPLICATIONS
Remarque 4.2.2. 1. Dans la formule de cellule qui définit fhom , il est sous-entendu que la
limite quand la période T → +∞ existe. Il s’agit d’une propriété dite d’ergodicité qui se
généralise pour des géométries plus complexes comme dans le cas quasi-périodique ou même
stochastique (voir le Lemme 4.2.3 ci dessous).
2. si f = f (ξ) est indépendante de la variable spatiale y, alors la formule de cellule se réduit à
la formule de quasiconvexification de f .
3. Si f est convexe par rapport à la variable ξ, il est possible de montrer que la formule de
cellule se réduit à
Z
fhom (ξ) = 1,p
inf f (y, ξ + ∇ϕ(y)) dy pour tout ξ ∈ Rd×N .
ϕ∈Wper ((0,1)N ;Rd ) (0,1)N
Nous renvoyons pour cela au [3, Theorem 14.7]. Néanmoins, dans le cas non convexe, il est
vraiment nécessaire de considérer la limite d’une famille de problèmes de minimisation posés
sur des cellules qui envahissent l’espace (voir le contre-exemple de Müller [3, Example 14.12]).
Lemme 4.2.3. La limite
Z
lim inf − f (y, ξ + ∇ϕ(y)) dy
T →+∞ ϕ∈W 1,p ((0,T )N ;Rd ) (0,T )N
0
Si s > t, nous allons construire une fonction ψs ∈ W01,p ((0, s)N ; Rd ) comme suit. Tout d’abord, on
étend ϕt par zéro sur le plus grand cube (0, [t] + 1)N et on subdivise (0, s)N en l’union disjointe
de translatés de (0, [t] + 1)N . Soit I l’ensemble des indices i = (i1 , . . . , iN ) ∈ ZN tels que 0 ≤
([t] + 1)(ij + 1) ≤ s pour tout j = 1, . . . , N . Notons que
N N
sN (s − 2t − 2)N
s s
≥ #(I) = −1 ≥ −2 ≥ .
tN [t] + 1 [t] + 1 (t + 1)N
4.2. HOMOGÉNÉISATION 51
tN
|Es | = sN − tN #(I) ≤ sN − (s − 2t − 2)N .
(t + 1)N
Par définition de gs , on a
Z
gs ≤ − f (y, ξ + ∇ψs (y)) dy
(0,s)N
!
1 XZ Z
= N f (y, ξ + ∇ϕt (y − i)) dy + f (y, ξ) dy
s i+(0,t)N Es
i∈I
!
1 XZ
p
≤ N f (x + i, ξ + ∇ϕt (x) dx + Λ(1 + |ξ| )|Es |
s (0,t)N
i∈I
!
1 XZ
= N f (x, ξ + ∇ϕt (x) dx + Λ(1 + |ξ|p )|Es |
s (0,t)N
i∈I
1 N 1 p
≤ N #(I)t gt + + Λ(1 + |ξ| )|Es |
s t
(s − 2t − 2)N tN
1 p
≤ gt + + Λ(1 + |ξ| ) 1 − .
t sN (t + 1)N
Démonstration du Théorème 4.2.1. D’après le Théorème 3.2.1, pour toute suite (εj )j∈N , il existe
une sous-suite (εjn )n∈N et une fonction de Carathéodory f : Ω × Rd×N → [0, +∞) satisfaisant les
mêmes propriétés de croissance et coercivité que f , tels que la fonctionnelle Fεjn Γ-converge dans
Lp (Ω; Rd ) vers la fonctionnelle F : Lp (Ω; Rd ) → [0, +∞] donnée par
Z
f (x, ∇u) dx si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ),
F (u) =
Ω
+∞ sinon.
Etape 1. Montrons tout d’abord que f est indépendante de la variable spatiale x. Soient x0 ,
y0 ∈ Ω et ρ > 0 tels que Bρ (x0 ) ∪ Bρ (y0 ) ⊂ Ω. D’après la Proposition 3.2.6, il existe une suite
(un )n∈N dans W01,p (Bρ (x0 ); Rd )) telle que un → 0 dans Lp (Bρ (x0 ); Rd ) et
Z Z
x
lim inf f , ξ + ∇un dx ≤ f (x, ξ) dx + ρN +1 .
n→+∞ B (x )
ρ 0
ε j n Bρ (x0 )
52 CHAPITRE 4. QUELQUES APPLICATIONS
h i
y0 −x0
Soit τn = εjn εjn . Comme τn → y0 − x0 , alors si t > 1, on a Bρ (x0 + τn ) ⊂ Btρ (y0 ) pour n
assez grand. On étend la suite un par 0 à l’extérieur de Bρ (x0 ) et pour presque tout x ∈ Btρ (y0 ),
on pose
vn (x) = un (x − τn ).
On a alors,
Z Z Z
p p
|vn (x)| dx = |un (x − τn )| dx = |un (y)|p dy → 0
Btρ (y0 ) Bρ (x0 +τn ) Bρ (x0 )
puis, d’après le Théorème 3.2.7 appliqué à u0 (x) = ξx et g = 0, on a (quitte à extraire une nouvelle
sous-suite)
Z
min
1,p
f (ξ + ∇ϕ(x)) dx
ϕ∈W0 ((0,1)N ;Rd ) (0,1)N
Z
x
= lim inf f , ξ + ∇ϕ(x) dx
n→+∞ ϕ∈W
0
1,p
((0,1)N ;Rd ) (0,1)N εjn
Z
1
= lim inf N
f (y, ξ + ∇ψ(y)) dy,
n→+∞ ψ∈W 1,p ((0,Tn )N ;Rd ) Tn (0,Tn )N
0
où Tn = 1/εjn . D’après le Lemme 4.2.3, il vient que f (ξ) = fhom (ξ) et donc F = Fhom .
Etape 3. Nous avons montré que, de toute sous-suite (εj )j∈N , on peut extraire une nouvelle sous-
suite (εjn )n∈N telle que Fεjn Γ-converge vers la même limite Fhom . D’après la propriété d’Urysohn
(voir la Proposition 3.1.7), on en déduit que c’est toute la suite Fε qui Γ-converge vers Fhom .
4.3. RÉDUCTION DE DIMENSION 53
Il est en général très difficile de calculer explicitement la formule de cellule sauf dans des cas
très particuliers qui se ramènent à un calcul 1D.
Exemple 4.2.4. Suppposons que N = d = 1 et f (y, ξ) = a(y)|ξ|2 pour tout (y, ξ) ∈ R2 , où
a : R → R est une fonction mesurable 1-périodique telle que 0 < λ ≤ a(y) ≤ Λ < +∞ pour tout
y ∈ R. Comme la limite qui définit la formule de cellule existe, on peut se restreindre à une période
k ∈ N. Soit uk ∈ H01 (0, k) une solution du problème de minimisation
Z k
min
1
a(y)|ξ + v 0 (y)|2 dy.
v∈H0 (0,k) 0
L’équation d’Euler-Lagrange montre que uk est solution de [a(ξ+u0k )]0 = 0 au sens des distributions
dans (0, k). En particulier, il existe une constante c ∈ R (qui dépend de k et ξ) telle que a(ξ+u0k ) = c
p.p. dans (0, k) et donc, comme a ne s’annule jamais et uk (0) = 0,
Z x
c
uk (x) = − ξ dy.
0 a(y)
On utilise maintenant le fait que uk (k) = 0, ce qui implique que
Z 1 −1
dy
c=ξ ,
0 a(y)
où l’on a utilisé le fait que a est 1-périodique et k ∈ N. Par conséquent,
Z k
1
fhom (ξ) = lim a(y)|ξ + u0k (y)|2 dy
k→+∞ k 0
Z k Z 1 −1
c dy
= lim (ξ + u0k (y)) dy = cξ = |ξ|2 .
k→+∞ k 0 0 a(y)
3×3
où W : R → [0, +∞) est une fonction continue satisfaisant
avec λ, Λ > 0 et 1 < p < ∞. On s’intéresse au comportement asymptotique de cette énergie lorsque
ε → 0, i.e., lorsque la configuration de référence du milieu “converge” vers une surface plane de
l’espace. La première difficulté à laquelle nous sommes confrontés est le fait que l’espace ambiant
W 1,p (Ωε ; R3 ) dépend du paramètre ε. Nous allons donc remettre à l’échelle ce problème dans une
configuration unitaire Ω = Ω1 en posant, pour tout v ∈ W 1,p (Ωε ; R3 ),
où W0 (ξ) = minz∈R3 W (ξ|z) pour tout ξ ∈ R3×2 et QW0 est la quasiconvexification de W0 définie
par Z
QW0 (ξ) = 1,p
inf W0 (ξ + ∇0 ϕ(y 0 )) dy 0 pour tout ξ ∈ R3×2 .
ϕ∈W0 ((0,1)2 ;R3 ) (0,1)2
Remarque 4.3.2. Notons que le modèle limite est un modèle “réduit” car le domaine de la Γ-limite
est donné par W 1,p (ω; R3 ), c’est à dire des champs de vecteurs u ∈ W 1,p (Ω; R3 ) bidimensionnels,
i.e., tels que ∂3 u = 0 p.p. dans Ω.
Commençons par montrer un lemme de sélection mesurable pour les solutions du problème de
minimisation définissant W0 (ξ(x)) lorsque ξ : ω → R3×2 est une fonction mesurable.
Lemme 4.3.3. Pour toute fonction mesurable ξ : ω → R3×2 , il existe une fonction mesurable
b : ω → R3 telle que
Démonstration. Si ξ(x) = ξ ∈ R3×2 est constante, comme la fonction z 7→ W (ξ|z) est continue et
coercive, ilPexiste un b ∈ R3 tel que W0 (ξ) = W (ξ|b) = minz∈R3 W (ξ|z).
m
Si ξ = i=1 ξi χAi est une fonction étagée avec ξi ∈ R3×2 pour tout 1 ≤ i ≤ m et A1 , . . . , Am
est une partition mesurable de Pω, alors pour tout 1 ≤ i ≤ m, il existe bi ∈ R3 tel que W0 (ξi ) =
m
W (ξi |bi ). On définit alors b = i=1 bi χAi qui est une fonction mesurable de ω → R3 et qui satisfait
W0 (ξ) = W (ξ|b) p.p. dans ω.
Enfin, si ξ : ω → R3×2 est une fonction mesurable, il existe une suite (ξk )k∈N de fonctions
étagées telle que ξk → ξ p.p. dans ω. Soit bk : ω → R3 une fonction étagée mesurable telle que
W0 (ξk ) = W (ξk |bk ) pour tout k ∈ N. Tout d’abord, comme W0 est défini comme un infimum de
fonctions continues, alors W0 est semi-continue supérieurement ce qui montre que
Par ailleurs, on pose b = lim supk bk (composante par composante) qui définit une fonction mesu-
rable. Pour tout x ∈ ω, on extrait une sous-suite (qui dépend de x) telle que b(x) = limk bσx (k) (x).
Par continuité de W , pour presque tout x ∈ ω, on a
En regroupant les inégalités précédentes, on en déduit que W0 (ξ) = W (ξ|b) p.p. dans ω.
Supposons maintenant que ξ ∈ Lp (ω; R3×2 ). Pour montrer que b ∈ Lp (ω; R3 ), on utilise les
propriétés de croissance et de coercivité de W pour obtenir que
Z Z Z
0 0
λ p
|b| dx ≤ λ p
|(ξ|b)| dx ≤ W (ξ|b) dx0
ω ω ω
Z Z Z
= W0 (ξ) dx ≤ W (ξ|0) ≤ Λ (1 + |ξ|p ) dx0 < ∞,
ω ω ω
Démonstration. D’après le Théorème 3.2.1, pour toute suite (εj )j∈N , il existe une sous-suite (εn =
εjn )n∈N telle que la fonctionnelle Eεn Γ-converge dans Lp (Ω; Rd ) vers une fonctionnelle E. La
preuve est ensuite divisée en quatre étapes pour montrer que E = E.
Etape 1 : compacité. Soit (un )n∈N telle que un → u dans Lp (Ω; R3 ) et
Alors, quitte à extraire une sous-suite, la borne inférieure de coercivité implique que
Z p
0 1
∇ un ∂3 un dx ≤ C.
Ω εn
En particulier, si εn < 1, on a que (∇un )n∈N est bornée dans Lp (Ω; R3×3 ) ce qui implique que
un * u faiblement dans W 1,p (Ω; R3 ) et aussi que u ∈ W 1,p (Ω; R3 ). Par ailleurs, on a également
Z
|∂3 un |p dx ≤ Cεn .
Ω
ce qui montre que ∂3 u = 0 p.p. dans Ω. La fonction u peut donc être identifiée à un élément de
W 1,p (ω; R3 ).
Etape 2 : borne inférieure. Soit (un )n∈N telle que un → u dans Lp (Ω; R3 ). Si lim inf n Eεn (un ) =
+∞, il n’y a rien à montrer. Si en revanche lim inf n Eεn (un ) < ∞, l’étape 1 montre que un * u
faiblement dans W 1,p (Ω; R3 ) avec u ∈ W 1,p (ω; R3 ). Comme QW0 ≤ W0 ≤ W , on en déduit que
Z
lim inf Eεn (un ) ≥ lim inf Eεn (un ) QW0 (∇0 un ) dx.
n→+∞ n→+∞ Ω
56 CHAPITRE 4. QUELQUES APPLICATIONS
Montrons que QW0 est quasiconvexe de R3 dans R3 . Pour ce faire, on considère une fonction
ψ ∈ Cc∞ ((0, 1)3 ; R3 ). En particulier, pour tout x3 ∈ (0, 1), on a que ψ(·, x3 ) ∈ Cc∞ ((0, 1)2 ; R3 ), ce
qui montre que pour tout ξ ∈ R3×2 ,
Z
QW0 (ξ) ≤ QW0 (ξ + ∇0 ψ(x0 , x3 )) dx0
(0,1)2
Soit bk ∈ Cc∞ (ω; R3 ) telle que bk → b fortement dans Lp (ω; R3 ). On pose alors ukn (x) = u(x0 ) +
εn x3 bk (x0 ) pour presque tout x ∈ Ω de sorte que ukn → u fortement dans Lp (Ω; R3 ) quand n → +∞.
Comme ∇0 ukn (x) = ∇0 u(x0 ) + εn x3 ∇0 bk (x0 ) et ∂3 ukn (x) = εn bk (x0 ) pour presque tout x ∈ Ω, on a
Z Z
0 k 1 k
W ∇0 u(x0 ) + εn x3 ∇0 bk (x0 ) bk (x0 ) dx
W ∇ un ∂3 un dx =
Ω ε n Ω
Nous avons montré jusque là que E ≤ G. D’après la Remarque 3.1.3-1, la Γ-limite E est semi-
continue inférieurement dans Lp (ω; R3 ). Par conséquent, E est plus petite que la relaxée de G dans
Lp (ω; R3 ), et donc d’après le Théorème 4.1.3, pour tout u ∈ W 1,p (ω; R3 ),
Z
E(u) ≤ QW0 (∇0 u) dx0 = E(u),
ω
où 1 ≤ p < ∞, λ > 0, Λ > 0, b > 0 et a ∈ L1 (Ω) avec a ≥ 0 p.p. dans Ω. Pour tout u ∈ W 1,p (Ω; Rd ),
on définit Z
F (u) := f (x, u(x), ∇u(x)) dx.
Ω
1,p
Définition 5.0.5. Une fonction u ∈ W (Ω; Rd ) est un quasi-minimiseur de F si pour tout
v ∈ u + W01,p (Ω; Rd ),
F (u) ≤ F (v).
Théorème 5.1.1. Soit u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) un quasi-minimiseur de F avec a ∈ Ls (Ω) avec s > 1.
1,r
Alors il existe r > p tel que u ∈ Wloc (Ω; Rd ).
Quand l’exposant p est suffisamment grand, on obtient de la régularité Höldérienne pour les
quasi-minimiseurs.
Corollaire 5.1.2. Soit u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) un quasi-minimiseur de F avec a ∈ Ls (Ω) avec s > 1. Si
p ≥ N , alors il existe α ∈ (0, 1) tel que u ∈ C 0,α (Ω; Rd ).
Démonstration. Si p > N , alors par injection de Sobolev, si u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) est un quasi-
minimiseur de F , alors u ∈ C 0,1−N/p (Ω; Rd ). Si p = N , alors l’exposant de Meyers r > N et
donc, de nouveau par injection de Sobolev, on a u ∈ C 0,1−N/r (Ω; Rd ).
59
60 CHAPITRE 5. RÉGULARITÉ DES QUASI-MINIMISEURS
Commençons par montrer un lemme qui sera fort utile par la suite.
Lemme 5.1.4. Soit Φ : R → R une fonction positive et bornée sur [ρ, R] telle que pour tout
ρ ≤ s < r ≤ R,
A
Φ(s) ≤ ϑΦ(t) + + B,
(t − s)α
où A, B > 0 et α > 1 et 0 ≤ ϑ < 1. Alors il existe une constante c = c(α, ϑ) > 0 telle que
A
Φ(ρ) ≤ c +B .
(R − ρ)α
Démonstration. Soit λ ∈ (0, 1) tel que λ−α ϑ < 1. On définit par la récurrence la suite (ti )i∈N en
posant t0 = ρ, et pour tout i ≥ 0, ti+1 = ti + (1 − λ)λi (R − ρ). En appliquant l’hypothèse avec
s = ti et t = ti+1 , obtient on montre que
A
Φ(ρ) = Φ(t0 ) ≤ ϑΦ(t1 ) + +B
(1 − λ)α (R − ρ)α
k−1
!
k
X
−α i A
≤ ϑ Φ(tk ) + (ϑλ ) + B .
i=0
(1 − λ)α (R − ρ)α
P∞ −α i (1−λ)−α
En faisant tendre k → +∞, on obtient l’inégalité souhaitée avec c = i=1 (θλ ) = 1−ϑλ−α .
Commençons par établir une négalité de Caccioppoli et une inégalité de Hölder inversée.
Théorème 5.1.5. Soit u ∈ W 1,p (Ω; Rd ) un quasi-minimiseur de F . Alors il existe des constantes
R0 = R0 (λ, Λ, N, p, b) > 0 et C = C(λ, Λ, N, p, b) > 0 telles que pour tout R < R0 et toute boule
BR avec B R ⊂ Ω, on a l’inégalité de Caccioppoli
Z Z Z p Z
1
(|u|p + |∇u|p ) dx ≤ C |u − uR | p
dx + |B R | − |u| dx + a dx
BR/2 R p BR BR BR
Démonstration. Soit B = BR une boule telle que B R ⊂ Ω. Soient R/2 < s < t ≤ R et η ∈ Cc∞ (Ω)
2
une fonction cut-off telle que 0 ≤ η ≤ 1, η = 1 sur Bs , η = 0 sur B \ Bt et |∇η| ≤ t−s . On note
R
ut := −Bt u dx la moyenne de u sur Bt .
On définit le compétiteur v = u−η(u−ut ) ∈ u+W01,p (Ω; Rd ). Comme u est un quasi-minimiseur,
on a que
F (u) ≤ F (v)
et comme v = u p.p. sur Ω \ Bt ,
Z Z
p p
(λ|∇u| − b|u| − a) dx ≤ (Λ|∇v|p + b|v|p + a) dx.
Bt Bt
5.1. THÉORÈME DE RÉGULARITÉ DE MEYERS 61
où c∗ = c∗ (N, p) > 0. Soit R0 = R0 (λ, Λ, N, p, b) > 0 tel que C1 c∗ R0p ≤ 1/2. Si R < R0 , on en
déduit que Z Z
1
C1 |u − ut |p dx ≤ |∇u|p dx
Bt 2 Bt
ce qui implique que
Z (Z Z Z )
p p p 1 p p
(|u| + |∇u| ) dx ≤ C2 |∇u| dx + |u − ut | dx + |Bt ||ut | + a dx ,
Bs Bt \Bs (t − s)p Bt Bt
et
Z Z
|u − ut |p dx ≤ 2p−1 |u − uR |p dx + 2p−1 |Bt ||uR − ut |p
Bt Bt
Z Z Z
≤ 2p−1 |u − uR |p dx + 2p−1 |u − uR |p dx ≤ 2p |u − uR |p dx
BR Bt BR
avec C3 = C3 (λ, Λ, N, p, b) > 0. On applique alors la méthode du “hole filling” de Widman qui
consiste à ajouter des deux côtés de l’inégalité la même quantité
Z
C3 (|u|p + |∇u|p ) dx
Bs
C3
où ϑ = C3 +1 < 1. D’après le Lemme 5.1.4, on en déduit que
Z Z Z p Z
1
(|u|p + |∇u|p ) dx ≤ C4 |u − u R | p
dx + |BR | − |u| dx + a dx , (5.1.1)
BR/2 Rp BR BR BR
L’ensemble des points x ∈ Ω ne satisfaisant pas la propriété précédente est noté Su et est appelé
ensemble singulier de u. Le complémentaire de Su est l’ensemble des points de Lebesgue de u.
Rappelons également le résultat suivant de recouvrement géométrique qui est d’ailleurs utilisé
dans la démonstration du théorème des points de Lebesgue.
Théorème 5.1.7 (Recouvrement de Vitali). Soit F := {B = BR (x)} une famille de boules
telles que supBR (x)∈F R < +∞. Alors il existe une sous-famille F 0 = {Bi }i∈N ⊂ F au plus
dénombrable telle que Bi ∩ Bj = ∅ si i 6= j et
[ [
B⊂ 5Bi .
B∈F i∈N
Lemme 5.1.8 (Gehring). Soit B ⊂ R une boule. Supposons que f ∈ L1 (B) et g ∈ Lp (B)
N
(p > 1) qui satisfont l’inégalité de Hölder inversée : pour toute boule Br (z) ⊂ B,
!1/m Z
Z Z
− |f | dx ≤ K − |f |m dx +− |g| dx
Br/2 (z) Br (z) Br (z)
avec 0 < m < 1 et K ≥ 1. Alors il existe q ∈ (1, p] et C > 0 qui ne dépendent que de N , K, m et
p tels que
Z !1/q Z Z 1/q !
− |f |q dx ≤ C − |f | dx + − |g|q dx .
1
2B B B
5.1. THÉORÈME DE RÉGULARITÉ DE MEYERS 63
Etape 1. Montrons que pour tout λ > λ0 et pour tout z ∈ BsR ∩ {|f | > λ} \ (Sf ∪ Sg ), il existe
rz ∈ (0, t−s
10 R] tel que
E(z, rz ) = λ, sup E(z, r) ≤ λ. (5.1.2)
rz <r≤(t−s)R
et N Z
t−s
Z
20
E z, R ≤ − |f | dx + − |g| dx = λ0 < λ. (5.1.3)
10 t−s B B
Comme la fonction r 7→ E(z, r) est continue, le théorème des valeurs intermédiaires montre l’exis-
tence d’un r0 ∈ 0, t−s 0
10 R tel que E(z, r ) = λ. On définit alors
t−s
rz = max r0 ∈ 0, R : E(z, r0 ) = λ .
10
Notons que, d’après (5.1.3), on a 0 < rz < t−s t−s
10 R de sorte que pour rz < r ≤ 10 R, alors E(z, r) ≤ λ.
t−s t−s
Si 10 R ≤ ρ ≤ (t − s)R, alors il existe un réel c ∈ [1, 10] tel que ρ = c R. On en déduit alors que
N Z Z
2c
E (z, ρ) ≤ − |f | dx + − |g| dx ≤ λ0 < λ,
t−s B B
Z !1/m Z
m
≤K − |f | dx + 2K − |g| dx
Brz (z) Brz (z)
m !1/m !
λ λ
µf (Brz (z) ∩ {|f | > 8K }) νg (Brz (z) ∩ {|g| > 8K })
λ λ
≤K + + 2K +
8K |Brz (z)| 8K |Brz (z)|
!1/m
λ λ
λ µf (Brz (z) ∩ {|f | > 8K }) λ νg (Brz (z) ∩ {|g| > 8K })
≤ 2K + + + .
8K |Brz (z)| 8K |Brz (z)|
64 CHAPITRE 5. RÉGULARITÉ DES QUASI-MINIMISEURS
d’où
m
8K λ 8K λ
µf Brz (z) ∩ |f | > + νg Brz (z) ∩ |g| > ≥ |Brz (z)|.
λ 8K λ 8K
D’après le théorème de recouvrement de Vitali, il existe des points zi ∈ BsR ∩ {|f | > λ} \ (Sf ∪ Sg )
tels que Brzi (zi ) ∩ Brzj (zj ) = ∅ si i 6= j et
[
{|f | > λ} \ (Sf ∪ Sg ) ⊂ B5rzi (zi ) ∩ {|f | > λ}.
i∈N
Or Z
νf (B5rzi (zi ) ∩ {|f | > λ}) ≤ |f | dx ≤ |B5rzi (zi )|E(zi , 10rzi )
B5rz (zi )
i
Par conséquent, comme les boules Brzi (zi ) sont deux à deux disjointes,
Etape 3. Soit δ > 0 qui sera fixé ultérieurement. D’après le théorème de Fubini,
Z Z Z
1+δ 1+δ
|f | dx = |f | dx + |f |1+δ dx
BsR BsR ∩{|f |≤λ0 } BsR ∩{|f |>λ0 }
Z ∞
≤ λ1+δ
0 |BsR | + δ λδ−1 νf (BsR ∩ {|f | > λ}) dλ.
λ0
D’après (5.1.4) et la formule de changement de variables, on peut peut majorer le deuxième terme
5.1. THÉORÈME DE RÉGULARITÉ DE MEYERS 65
où nous avons utilisé de nouveau le théorème de Fubini dans la dernière inégalité. Comme m < 1
et p > 1, on peut trouver δ = δ(N, K, m, p) > 0 assez petit tel que
1/(1+N +δ)
δ 1
1 + δ ≤ p, 5N (8K)δ+1 ≤ ,
δ+1−m 2
alors
Z Z Z
1
|f |1+δ dx ≤ |f |1+δ dx + C |g|1+δ dx
BsR 21+N +δ BtR B
(1+δ)N Z Z 1+δ
20
+ − |f | dx + − |g| dx |BsR |,
t−s B B
t
où C = C(N, K, m, p) > 0. Comme s ≤ 2 et s ≥ 21 , on en déduit que
Z Z Z
1
− |f |1+δ dx ≤ − |f |1+δ dx + 2N C − |g|1+δ dx
BsR 21+δ BtR B
(1+δ)N Z Z 1+δ
20
+ − |f | dx + − |g| dx
t−s B B
On pose
Z 1/q Z Z 1/q ! Z 1/q
q 0 q
Φ(t) := − |f | dx , A := C − |f | dx + − |g| dx , B := C − |g|q dx
BtR B B B
1 A
Φ(s) ≤ Φ(t) + + B.
2 (t − s)N
66 CHAPITRE 5. RÉGULARITÉ DES QUASI-MINIMISEURS
Le Lemme 5.1.4 implique alors l’existence d’une constante c = c(N ) > 0 telle que Φ( 12 ) ≤ c(A+B),
i.e. !1/q
Z Z Z 1/q !
q q
− |f | dx ≤ C − |f | dx + − |g| dx ,
1
2B B B
Comme a ∈ Ls (Ω) avec s > 1, pour tout 1 ≤ i ≤ k, le Lemme de Gehring montre l’existence d’un
qi ∈ (1, s) tel que
!
Z 1/qi
Z Z 1/qi
− (|u|p + |∇u|p )qi dx ≤C − (|u|p + |∇u|p ) dx + − |a|qi dx .
Bi 2Bi 2Bi
Nous renvoyons à [9] pour les démonstrations des résultats énoncés ci-dessous.
Définition 6.1.1. On dit que µ : B(Ω) → [0, +∞] est une mesure Borélienne positive si
— µ(∅) = 0 ;
— pour toute suite (Bj )j∈N de Boréliens deux à deux disjoints,
X [
µ(Bj ) = µ Bj .
j∈N j∈N
Si de plus µ(K) < +∞ pour tout compact K ⊂ Ω, on dit que µ est une mesure de Radon positive.
67
68 CHAPITRE 6. APPENDICE : ESPACE DES MESURES DE RADON BORNÉES
dµ
dLN
se calcule alors par dérivation de mesure :
µ(Bρ (x))
a(x) = lim LN -p.p. tout x ∈ Ω.
ρ→0 LN (Bρ (x))
Notons que, par homogénéité et invariance par translation de la mesure de Lebesgue, on a LN (Bρ (x)) =
ωN ρN où ωN := LN (B1 (0)). De plus la partie singulière µs satisfait
µs (Bρ (x))
lim = 0 LN -p.p. tout x ∈ Ω.
ρ→0 ωN ρN
L’application |µ| : B(Ω) → [0, +∞] est alors une mesure de Borel positive finie qui satisfait la
propriété
|µ(B)| ≤ |µ|(B) pour tout B ∈ B(Ω).
On pose alors
µ ± |µ|
µ± :=
2
qui définissent des mesures de Borel positives finies qui satisfont
µ = µ+ − µ− , |µ| = µ+ + µ− .
L’intégration d’une fonction Borélienne positive (ou |µ|-intégrable) f : Ω → R par rapport à µ est
alors définie par Z Z Z
f dµ := f dµ+ − f dµ− .
Ω Ω Ω
Le théorème de représentation de Riesz montre que pour tout L ∈ [C0 (Ω)]0 , il existe une unique
mesure Borélienne réelle µ telle que
Z
L(f ) = f dµ pour tout f ∈ C0 (Ω), kLk[C0 (Ω)]0 = |µ|(Ω).
Ω
Le dual topologique de C0 (Ω), noté M(Ω), s’identifie alors à l’ensemble des mesures Boréliennes
réelles. Il s’agit de l’espace des mesures de Radon bornées. En tant qu’espace dual, on peut
considérer la topologie faible* sur M(Ω).
Définition 6.2.1. Une suite (µn )n∈N dans M(Ω) converge faible* vers µ dans M(Ω) si
Z Z
ϕ dµn → ϕ dµ pour tout ϕ ∈ C0 (Ω).
Ω Ω
Comme C0 (Ω) est séparable, toute suite bornée dans M(Ω) admet une sous-suite qui converge
faible* dans cet espace. Pour les suites de mesures positives, nous avons les conditions suivantes
de semi continuité le long d’ouverts ou de compacts.
Proposition 6.2.2. Si (µn )n∈N est une suite dans M(Ω) de mesures positives qui converge faible*
dans M(Ω) vers µ, alors
et
lim µn (E) = µ(E) pour tout borélien borné E ⊂ Ω tel que µ(∂E) = 0.
n→+∞
Démonstration. Si U ⊂ Ω est ouvert, par régularité intérieure de µ, pour tout ε > 0 on peut
trouver un compact C ⊂ U tel que µ(C) ≥ µ(U ) − ε. Soit ψ ∈ Cc (Ω) telle que 0 ≤ ψ ≤ 1, ψ = 1
sur C et ψ = 0 sur Ω \ U . Alors
Z Z
lim inf µn (U ) ≥ lim ψ dµn = ψ dµ ≥ µ(C) ≥ µ(U ) − ε.
n→+∞ n→+∞ Ω Ω
µ(E) = µ(E̊) ≤ lim inf µn (E̊) ≤ lim inf µn (E) ≤ lim sup µn (E) ≤ lim inf µn (E) ≤ µ(E) = µ(E),
n→+∞ n→+∞ n→+∞ n→+∞
Lemme 6.2.3. Soit µ ∈ M(Ω) une mesure positive et {Aλ }λ∈Λ une famille d’ensembles Boréliens
dans Ω tels que Aλ ∩Aλ0 = ∅ pour tout λ, λ0 ∈ Λ avec λ 6= λ0 . Alors, l’ensemble {λ ∈ Λ : µ(Aλ ) > 0}
est au plus dénombrable.
Démonstration.
S Soit Z = {λ ∈ Λ : µ(Aλ ) > 0} et Zn = {λ ∈ Λ : µ(Aλ ) > 1/n}. Comme
Z = n Zn , il suffit de montrer que Zn est dénombrable pour tout n ∈ N. Nous allons en fait
montrer que Zn est fini pour tout n ∈ N. En effet, si λ1 , . . . , λk ∈ Zn , alors comme les ensembles
Aλ1 , . . . , Aλk sont deux à deux disjoints,
k k
!
k X [
≤ µ(Aλi ) = µ Aλi ≤ µ(Ω),
n i=1 i=1
ce qui montre que k ≤ nµ(Ω), et que nµ(Ω) est une borne supérieure sur le cardinal de Zn .
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