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Producción Académica - Artículo 1

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LES OBJETS DE MÉMOIRE OU LA RUINE AU QUOTIDIEN

Pablo Cuartas

De Boeck Supérieur | « Sociétés »

2013/2 n° 120 | pages 35 à 47


ISSN 0765-3697
ISBN 9782804180492
DOI 10.3917/soc.120.0035
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-societes-2013-2-page-35.htm
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© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 27/10/2022 sur www.cairn.info (IP: 191.95.175.94)

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Dossier

LES OBJETS DE MÉMOIRE


OU LA RUINE AU QUOTIDIEN
Pablo CUARTAS *

Résumé : Bien qu’elle soit souvent associée à de « grands lieux », la notion de ruine
s’avère pertinente pour l’analyse des objets qui peuplent le « monde-de-la-vie ». Elle peut
éclaircir, plus précisément, les relations que l’on établit avec des objets qui évoquent un
passé révolu et réveillent la mémoire. En ce sens, on se propose d’élargir la portée hermé-
neutique de cette notion, afin qu’elle devienne opératoire dans la compréhension d’autres
vestiges, de traces autres : ces objets de mémoire qui actualisent une expérience de la ruine
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au quotidien.
Mots clés : ruine, objets, mémoire, vie quotidienne

Abstract: Altough is frequently associated to a “great place”, the notion of ruin result rel-
evant to analyse the objects that inhabit “the world of the life”. That notion can explain the
relationships we establish with objects that evoke the past and wake the memory in a more
precise way. In that sense, our purpose is to extend the hermeneutic reach of the notion of
ruin in order to turn it operative in the understanding of other vestiges, other traces: those
objects of memory that update the ruin experience in the everyday life.
Keywords: ruin, objects, memory, everyday life

* Doctorant en sociologie à l’Université Paris Descartes Sorbonne. Chercheur au Centre


d’Études sur l’Actuel et le Quotidien, CeaQ. Contact : cuartaspablo@gmail.com.

Sociétés n° 120 — 2013/2


36 Les objets de mémoire ou la ruine au quotidien

« … ces vieilles choses qui exercent sur l’esprit


une heureuse influence en lui donnant
la nostalgie d’impossibles voyages dans le temps. »
Marcel Proust

Cet article se veut « préparatoire » : il prétend concevoir une lecture rassemblant


un mot et des choses : la ruine et les objets de mémoire. « Préparatoire », en effet,
car il s’agit de donner lieu à une pensée en accomplissant un geste qui ne manque
pas de violence : déraciner le mot ruine du champ de références où il est habituel-
lement placé et le situer ailleurs, au cœur même du quotidien. Ce déplacement
suppose d’autres mouvements, dont on esquissera la trajectoire.
Le premier mouvement consiste à explorer une possibilité, celle d’élargir la
portée herméneutique de la notion de ruine. Si la ruine se définit comme une
partie appartenant à une totalité soudain inexistante, on pourrait considérer cer-
tains objets quotidiens comme étant les vestiges d’un temps qui n’existe plus. Ces
objets ne seraient pas les pièces d’une totalité physique, ni les morceaux, forcément
incomplets, d’une matérialité disparue – couvent, église, château… Ils seraient plu-
tôt une complétude en soi-même renvoyant, non pas à un espace, mais à un temps
perdu. La notion de ruine deviendrait ainsi opératoire pour l’analyse d’expériences
qui dépassent les ruines, c’est-à-dire le couvent abîmé, l’église de tel ou tel vil-
lage ou le château abandonné, depuis des siècles, aux tribulations incertaines de
l’Histoire 1.
En outre, il s’agit de tenir compte des usages multiples que peut acquérir le
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mot ruine, notamment dans une réflexion ancrée dans la vie quotidienne. Peuplé
d’objets qui témoignent eux aussi d’un passé révolu, le quotidien réclame une
pensée de la ruine. Cela suppose que la ruine n’est pas réductible au monument,
au sens étroit que l’on attribue souvent à ce terme. Pour saisir la présence étendue
de la ruine, il suffit de s’attarder sur d’autres traces matérielles qui réveillent et
sollicitent la mémoire.
Le deuxième mouvement suppose un glissement, celui du pluriel ruines au
singulier ruine, c’est-à-dire des espaces « monumentaux » à une idée qui peut se
cristalliser dans l’espace proche habité par les objets quotidiens. Mais ce glissement
n’est réalisable qu’à condition de modifier, pour ainsi dire, les « échelles » que
l’on met habituellement en œuvre lorsqu’il est question des ruines. On fait appel,
d’abord, à l’« échelle » spatiale : si les ruines sont toujours associées à un « grand »
lieu (au sens de « grandes dimensions » mais aussi de « grandeur »), la ruine, et
particulièrement l’objet de mémoire, peut être associée à une « petitesse », voire à
une miniature. La philosophie de Gaston Bachelard montre à quel point les ten-
tations de « miniaturiser le monde » ou d’« habiter dans une coquille » ont hanté
l’imagination des hommes 2.

1. S. Lacroix, Ruine, Éditions de la Villette, Paris, 2008.


2. G. Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, José Corti, Paris, 1948.

Sociétés n° 120 — 2013/2

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