La diablesse cherche désespérément son enfant perdu et frappe aux portes la nuit. Bien qu'elle ait un beau visage, les gens ont peur d'elle quand ils voient ses sabots de chèvre à la place de ses pieds. Elle continue de chercher sans relâche son enfant disparu.
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La diablesse cherche désespérément son enfant perdu et frappe aux portes la nuit. Bien qu'elle ait un beau visage, les gens ont peur d'elle quand ils voient ses sabots de chèvre à la place de ses pieds. Elle continue de chercher sans relâche son enfant disparu.
La diablesse cherche désespérément son enfant perdu et frappe aux portes la nuit. Bien qu'elle ait un beau visage, les gens ont peur d'elle quand ils voient ses sabots de chèvre à la place de ses pieds. Elle continue de chercher sans relâche son enfant disparu.
La diablesse cherche désespérément son enfant perdu et frappe aux portes la nuit. Bien qu'elle ait un beau visage, les gens ont peur d'elle quand ils voient ses sabots de chèvre à la place de ses pieds. Elle continue de chercher sans relâche son enfant disparu.
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Une diablesse allait de maison en maison et demandait :
- Où est mon enfant ? Je l’ai perdu. Avez-vous vu mon enfant
?
Cette diablesse avait un visage agréable à regarder. Sa peau
était sombre et ses yeux luisants. Elle frappait aux portes, à la nuit tombée, et demandait : - Quelqu’un parmi vous sait-il où se trouve mon enfant ? Et la personne qui avait ouvert sa porte à la diablesse voyait ses beaux yeux un peu humides qui brillaient dans l’obscurité, sa jolie figure et ses habits bien propres. La personne qui n’avait pas eu peur d’ouvrir sa porte à la nuit s’apprêtait à sourire et à tenter d’aider la diablesse, quand soudain son regard tombait sur les pieds de celle qui venait de frapper.
Et la personne qui avait oublié d’avoir peur en ouvrant grande
sa porte sur la pénombre, était alors glacée de terreur en découvrant que celle qui cherchait son enfant à la nuit n’avait pas de pieds mais des sabots. C’étaient de petits sabots noirs et fins comme ceux d’une chèvre, séparés par une longue fente.
Aussitôt la porte se refermait en claquant et toute lumière
s’éteignait dans la maison.
Chacun attendait, tremblant, que la diablesse s’éloigne. Et
chacun frémissait de crainte : on pensait que la diablesse allait peut–être se fâcher et se venger d’une manière terrible.
Mais cette diablesse-là ne savait même pas ce que cela
signifiait. Elle ne savait même pas pourquoi on la redoutait. Elle soupirait puis s’en allait de son pas léger, et ses petits sabots de chèvre claquaient sur la route, tip-tap, tip-tap.
Quand le bruit des sabots avait disparu, la lumière s’allumait
de nouveau dans les maisons. Chacun se promettait de plus ouvrir sa porte après la tombée de la nuit. Car on avait peur des sabots de la diablesse, de ses petits sabots noirs et fins, plus que de n’importe quoi au monde.
La diablesse s’en allait et cherchait une autre maison.
- J’ai perdu mon enfant. N’est-il pas chez vous ? Ses yeux scintillaient, pleins de larmes et d’espoir. Mais, chaque fois, le sourire se figeait sur les lèvres de celui qui s’apprêtait à répondre, qui se préparait à réconforter cette pauvre femme dont l’enfant n’était pas revenu avant la nuit.Il n’y avait pas de pitié possible pour la diablesse, dès lors qu’on s’apercevait qu’elle n’avait pas le pied humain. On avait trop peur, bien trop peur de ces petits sabots fendus.
On avait tellement peur qu’on ne se demandait même pas quel
pouvait être cet enfant de la diablesse. - Mais où est mon enfant ? demandait-elle, partout, sans trêve, avec son beau visage doux qui brillait dans la nuit. On avait tellement peur qu’on était persuadé d’une chose : c’est que la diablesse était capable d’inventer n’importe quelle histoire pour s’introduire dans les maisons et y apporter le malheur par sa seule présence.
De même, pensait-on, la diablesse a su se faire une jolie
figure, afin d’émouvoir et de se faire inviter à entrer, en pleine nuit, chez les gens qui prenaient pitié de ses yeux mouillés. On pensait : il n’y a que ses sabots, ses horribles sabots, qu’elle n’a pas pu changer, heureusement pour nous. Sinon, comment saurait-on que cette femme est une diablesse? Mais la diablesse, elle, se rappelait avoir eu un enfant, longtemps auparavant. Elle se rappelait avoir tenu un tout petit enfant dans ses bras et elle se rappelait que cet enfant avait été le sien, qu’elle l’avait aimé, nourri, cajolé, avant qu’un jour il disparaisse. Elle ne savait plus comment. Elle se rappelait seulement que, depuis ce jour, ses yeux ne cessaient de couler. C’est depuis ce jour également qu’elle avait de petits sabots noirs et fins à la place des pieds. La diablesse n’avait pas de maison. Elle se rappelait aussi avoir eu une maison, longtemps auparavant, et que dans sa maison son enfant dormait. La maison avait disparu en même temps que l’enfant. La diablesse ne savait plus comment. C’était simplement arrivé. Cela avait existé et cela n’existait plus. Elle avait eu dans sa maison une belle lumière jaune qui éclairait la campagne tout autour. Et la diablesse se rappelait que son enfant avait aimé regarder la lumière jaune avant de s’endormir le soir. Quand elle marchait encore dans sa maison, la diablesse avait eu de petits pieds fins de jeune femme ordinaire. On était dans une région chaude, où les gens marchent le plus souvent pieds nus. La diablesse se rappelait qu’à cette époque, quand elle marchait dans sa maison, quand elle entrait dans la chambre où son enfant dormait, elle n’entendait pas : tip-tap, tip-tap. Elle entendait le bruit de ses pieds nus sur le sol de sa maison. Ce n’était que depuis que sa maison et son enfant n’étaient plus là où ils avaient été, que le bruit de son pas avait changé et qu’elle voyait, en baissant les yeux vers ses pieds, de petits sabots de chèvre qui l’étonnaient encore maintenant.
La diablesse vivait dans la forêt.
La forêt de cette région était épaisse et sombre.
La diablesse y trouvait de quoi manger car, dans les forêts humides et tièdes de cette région où il fait toujours très chaud, beaucoup de fruits poussent sur les arbres, beaucoup de plantes sortent de la terre. La diablesse dormait le jour et sortait à la nuit. Elle se rappelait que c’est un soir, un triste soir, qu’elle avait regardé le creux de ses bras arrondis et constaté que son enfant n’y était plus.
Elle sortait de la forêt, marchait sur la route de son pas
dansant. Lorsqu’elle apercevait un enfant qui se dépêchait de rentrer chez lui, elle courait dans sa direction. Et l’enfant qui entendait courir les petits sabots voulait s’enfuir et se mettait à courir lui aussi. Il courait en criant : ” Voilà la diablesse ! À moi ! “
Alors la diablesse s’arrêtait aussitôt. ” Si ce petit était le mien,
il ne crierait pas ces mots-là “, se disait-elle. La région tout entière connaissait maintenant la diablesse. Tout le monde savait qu’elle cherchait son enfant. On se mit à dire : ” Et s’il était vrai qu’elle ait eu un enfant et que cet enfant se soit sauvé ? Comment être sûr qu’il n’est pas parmi nous ? “ On regarda attentivement les enfants qui jouaient dans la rue, qui allaient à l’école, qui creusaient des trous dans le sable, les enfants qui se baignaient dans la mer ou qui rêvaient, assis sur une pierre. On observa de près les enfants qui glissaient sur les toboggans ou s’envolaient sur les balançoires. On examinait tout particulièrement les pieds des enfants afin de voir s’ils ne ressemblaient pas un tout petit peu aux sabots de la diablesse. Un soir, au moment de quitter la forêt, la diablesse prit une décision. Elle se sentait découragée, fatiguée.
“Personne ne me dira jamais où se cache mon enfant, pensa-t-
elle. Je sens bien, à présent, que personne ne me le dira jamais. “ Alors elle décida que le premier enfant qu’elle rencontrerait en sortant de la forêt serait le sien. Elle avança sur la route de son pas habituel, tip-tap. Elle aperçut bientôt une petite silhouette assise dans l’herbe, au bord de la route. Elle sentit son cœur battre si fort qu’elle n’entendait plus le bruit de ses sabots.
Elle s’approcha et toucha l’épaule de l’enfant assis au bord de
la route. C’était une fillette à la tête couverte de petites nattes. ” Viens, viens avec moi “, lui dit la diablesse tout doucement. La fillette se leva et posa sa toute petite main dans la main un peu tremblante de la diablesse. Celle-ci referma ses doigts bien fort. Puis elle allait reprendre la direction de la forêt, emmenant avec elle la petite fille, lorsqu’elle se rendit compte que l’enfant boitait. Alors, elle baissa les yeux vers les pieds de la fillette et vit qu’ils étaient difformes.
Le matin de ce même jour, les habitants du village voisin
avaient chassé la petite fille. Ils croyaient avoir trouvé l’enfant de la diablesse et s’étaient dit : ” Chassons celle-là ou elle nous portera malheur. Ses tout petits pieds mal formés vont tourner en sabots, et alors il sera trop tard. “ Voyant cela, voyant comme la fillette avait du mal à marcher, la diablesse la porta. La petite fille passa ses bras autour du cou de la diablesse et soupira de soulagement.
Elle regardait la jolie figure de la diablesse, ses yeux doux, elle
respirait l’odeur de forêt de la diablesse et finit par s’endormir tranquillement. La diablesse revenait vers la forêt. Son cœur battait un peu moins fort. La nuit était calme et chaude. Soudain la diablesse se rendit compte qu’elle n’entendait plus le tip-tap, tip-tap de ses petits sabots noirs. La nuit était si sombre maintenant que la diablesse, en se penchant, ne put apercevoir ses sabots.
Mais elle entendait un bruit différent.
Et la diablesse comprit que c’était le frottement de ses pieds nus sur la route.
Puis, comme elle passait devant une petite maison tout
éclairée, elle se rappela que cette maison n’était pas là tout à l’heure. Elle poussa la porte, entra dans la pièce où brillait une belle lampe jaune. Elle déposa tendrement la petite fille qui dormait toujours dans un lit bien propre et frais. Ensuite, elle s’assit sur une chaise, fit glisser ses pieds sur le parquet ciré et dit tout haut, d’une voix gaie : ” Je ne pensais pas qu’une aussi petite fille était aussi lourde à porter ! “