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Ordinal Disciplinary Responsibility of The Certifying Physician

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ARTICLE ORIGINAL

La responsabilité disciplinaire ordinale du médecin


certificateur
Ordinal disciplinary responsibility of the certifying physician

Mehdi Khalfallah1,3, Ikram Kort², Moncef Hamdoun2,3, Ramzi Nouira1,3, Mohamed Allouche2,3

1. Service de Chirurgie générale B23, hôpital Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie.


2. Service de médecine légale, hôpital Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie.
3. Faculté de Médecine de Tunis, Université Tunis El Manar, Tunis, Tunisie

R ésumé
Introduction : La rédaction de certificats médicaux fait partie de la pratique quotidienne d’un médecin.
Objectif : Analyser les plaintes en rapport avec les certificats médicaux déposés au Conseil Régional de l’Ordre des Médecins de Tunis
(CROM) et identifier les facteurs prédictifs de sanctions disciplinaires.
Méthodes : Nous avons colligé les plaintes déposées au CROM de Tunis entre le 01/01/2017 et le 31/12/2017, en rapport avec un
problème quant à l’établissement et/ou la délivrance de certificats médicaux par des médecins certificateurs inscrits au CROM, Tunis.
Résultats: Nous avons colligé 32 plaintes, dont le motif était un certificat de complaisance dans 88% des cas, une erreur de rédaction
dans 9% des cas et un problème d’honoraires dans 3% des cas. La décision du CNOM était un classement du dossier dans 56% des cas,
un rappel à l’ordre dans 28% des cas et une interdiction temporaire d’exercer la médecine dans 16% des cas.
L’analyse multivariée avec régression logistique a permis d’identifier un seul facteur prédictif indépendant de rappel à l’ordre ou de
sanction du CNOM à savoir le fait que le médecin n’a pas apporté le dossier du(des) patient(s) ayant fait l’objet de la plainte au moment
de son invitation au CROM Tunis (p=0.037, OR=22,66).
Conclusion : Le médecin doit toujours tenir un dossier ou une fiche-patient, qui vont lui permettre de se justifier en cas de plainte à son
encontre pour le motif de certificat médical de complaisance.
Mots-clés: responsabilité médicale, déontologie, certificat médical, code de déontologie médicale

A bstract
Introduction: Writing medical certificates is part of the doctor’s daily practice.
Aim: To analyze the complaints related to medical certificates filed to the Regional Council of the Order of Doctors (RCOD) of Tunis and
to identify the predictive factors of disciplinary sanctions.
Methods: We collected the complaints filed to the RCOD of Tunis between 01/01/2017 and 31/12/2017, in relation to a problem with the
establishment and/or the issuance of medical certificates by registered certifying doctors at RCOD, Tunis.
Results: We collected 32 complaints, the reason for which was a certificate of convenience in 88% of cases, a drafting error in 9% of
cases and a fee problem in 3% of cases. The decision of the RCOD was a closing of the file in 56% of cases, a call to order in 28% of
cases and a temporary ban on practicing medicine in 16% of cases.
The multivariate analysis with logistic regression identified one independent predictor of a call to order or a sanction from the RCOD,
namely the fact that the doctor did not bring the file of the patient(s) having been the subject of the complaint, at the time of his invitation
to RCOD Tunis (p=0.037, OR=22.66).
Conclusion: The doctor must always keep a medical form or a patient file, which will allow him to justify himself in the event of a complaint
against him, for the reason of a certificate of convenience.
Keywords: medical liability, ethics, medical certificate, code of medical ethics

Correspondance
Mehdi Khalfallah
Service de Chirurgie générale B23, hôpital Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie.
Email: drmehdikhalfallah@gmail.com

LA TUNISIE MEDICALE - 2023 ; Vol 101 (02) : 299 - 305


Cet article est distribué selon les termes de la licence internationale Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International (CC BY-NC-ND 4.0) qui autorise l’utilisation non
commerciale, la production, la reproduction et la distribution de l’œuvre sans autre autorisation, à condition que l’auteur original et la source soient mentionnés. 299
M. Khalfallah & al. Responsabilité déontologique et certificats

INTRODUCTION Analyse statistique


Nous avons réalisé une étude descriptive. Pour les variables
L’exercice de la médecine en Tunisie est encadré par plusieurs
quantitatives : les variables continues ont été exprimées par la moyenne
textes législatifs et en particulier, par le code de déontologie
plus ou moins la déviation standard (DS) lorsque leur distribution était
médicale (CDM) [1]. Cet exercice comporte normalement
Gaussienne, et la médiane avec les valeurs extrêmes lorsque la
l’établissement par le médecin de certificats, ordonnances,
distribution n’était pas Gaussienne. Les variables qualitatives ont été
attestations ou documents médicaux, dont les règles de
exprimées par leurs nombres et leurs pourcentages.
prescription sont encadrées par plusieurs articles du code de
déontologie médicale, notamment les articles 27, 28 et 42. Nous avons réalisé une étude univariée et une étude multivariée
type régression logistique comparant deux groupes : « classement
Différents types de responsabilité médicale peuvent être
du dossier » versus « rappel à l’ordre ou sanction du CNOM ».
engagés lors de la rédaction de certificats médicaux à savoir
pénale, civile et ordinale. La responsabilité disciplinaire Pour les variables qualitatives, nous avons utilisé le test de Chi-
ordinale concerne les médecins qui sont en infraction au deux et le test exact de Fisher et pour les variables quantitatives,
code de déontologie médicale. nous avons utilisé le test t de Student et le test U de Mann-Whitney.

Les objectifs de notre travail étaient d’analyser les plaintes Nous avons calculé les indices informationnels des variables
en rapport avec les certificats médicaux déposés au Conseil retenues à l’analyse univariée avec leur intervalle de
Régional de l’Ordre des Médecins de Tunis (CROM) et d’identifier confiance à 95% respectif à savoir la sensibilité, la spécificité,
les facteurs prédictifs de rappel à l’ordre ou de sanctions émises la valeur prédictive positive et la valeur prédictive négative.
par le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM). Une courbe ROC (Receiver Operating Characteristic) a été réalisée pour
les variables continues retenues à l’analyse univariée et multivariée.
Nous avons calculé le cut-off point des variables continues
MÉTHODES retenues à l’analyse univariée et multivariée; point correspondant
au meilleur couple sensibilité-spécificité. Le seuil de signification
Il s’agissait d’une étude rétrospective ayant colligé les plaintes en retenu était p ≤ 0,05.
rapport avec un problème quant à la rédaction et/ou la délivrance
de certificats médicaux de la part de médecins certificateurs,
déposés au CROM de Tunis entre le 01/01/2017 et le 31/12/2017.
RÉSULTATS
Nous avons consigné les données suivantes concernant le
médecin certificateur : le sexe, l’ancienneté d’inscription au CNOM, Population
s’il s’agissait d’un médecin généraliste ou spécialiste et l’existence Nous avons colligé 30 médecins hommes et deux médecins
de compétences, le mode et le lieu d’exercice, les antécédents de femmes, soit un sex-ratio égal à 15. La moyenne de
plainte à l’encontre du médecin ainsi que de sanction disciplinaire. l’ancienneté du médecin cible de la plainte était de 23 ± 8,5
Nous avons consigné les données suivantes concernant la plainte ans [extrêmes: 3 à 36 ans]. Il y avait 25 médecins généralistes
: l’origine et le motif de la plainte, le type de certificat et le nombre (78%) et sept médecins spécialistes (22%), dont quatre
de certificats posant problème, délivrés par le médecin certificateur. psychiatres, deux gynécologues et un cardiologue. Trente et
Nous avons consigné les données suivantes concernant le(s) un médecins exerçaient dans le privé (97%) et un médecin
certificat(s) posant problème : si le médecin certificateur a exerçait dans le public (hôpital régional) (3%).
fourni le dossier médical du / des patient(s) posant problème Dossier disciplinaire du médecin
et le problème de rédaction et/ou de délivrance posé par Dix-sept médecins avaient des antécédents de plainte à leur
le(s) certificat(s) objet(s) de la plainte. encontre dans leur dossier soit 53% des médecins colligés dont 2
Nous avons noté la proposition de sanction émise par le ont été sanctionné avec une sanction de premier degré.
CROM de Tunis, la décision émise par le conseil de discipline Plainte
du CNOM. Le critère de jugement retenu était la présence
Les caractéristiques de la plainte sont présentées dans le
d’une sanction disciplinaire prononcée par le CNOM.
Tableau 1.

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LA TUNISIE MEDICALE - 2023 ; Vol 101 (n°02)

Tableau 1. Caractéristiques de la plainte


Caractéristiques de la plainte
Entreprise privée 11 (35%)
Origine de la plainte Citoyen 8 (25%)
Structure sanitaire publique 4 (13%)
Municipalité 3 (9%)
Direction régionale de la santé 2 (6%)
Entreprise publique 1 (3%)
Ministre de l’éducation 1 (3%)
Ministère de l’industrie et du commerce 1 (3%)

Motif de la plainte Certificat de complaisance 28 (88%)


Erreur de rédaction des certificats 3 (9%)
Problème d’honoraires 3 (9%)

Type de certificats objet de la plainte Certificat de repos 18 (57%)


Certificat de maladie 6 (19%)
Certificat médical initial 3 (9%)
Certificat de bonne santé 3 (9%)
Certificat de prolongation 1 (3%)
Certificat pour prise en charge 1 (3%)

Nombre de certificats objet de plainte (en moyenne) 3 [1,16]

Dossier médical du/des patients ayant fait objet de plainte Fourni par le médecin 23 (72%)
Non fourni par le médecin 9 (28%)
Étude du/des certificats objet de la plainte
Erreur de rédaction 18 (56%)
Erreur volontaire 16 (50%)
Erreur involontaire 2 (6%)
Problèmes posés par le certificat objet de la plainte
Date erronée 4 (13%)
Délai de repos inapproprié 3 (9%)
Patient non examiné 3 (9%)
Examen d’un mineur sans consentement du tuteur et en dehors 2 (6%)
d’urgence
Problème de signature 2 (6%)
Mauvaise écriture 1 (3%)
Termes inappropriés 1 (3%)
Tarification des différents certificats 1 (3%)
Nombre élevé de certificats délivrés par le médecin 1 (3%)
Décision du Conseil National de l’Ordre des Médecins
Classement du dossier 18 (56%)
Rappel à l’ordre 9 (28%)
Blâme 1 (3%)
Interdiction temporaire d’exercer 4 (13%)
Articles du code de déontologie médicale qui ont été
enfreints Article 27,28 (rédaction de certificats de complaisance) 17 (53%)
Article 35 (examen d’un mineur) 2 (6%)
Article 27 (honoraires) 1 (3%)

Analyse comparative d’identifier un seul facteur prédictif indépendant d’un rappel à


L’analyse univariée des variables préopératoires est présentée l’ordre ou d’une sanction du CNOM à savoir le fait que le médecin
dans le Tableau 2. n’a pas apporté le dossier du (des) patient(s) ayant fait l’objet de
la plainte au moment de son invitation au CROM Tunis, avec un
L’analyse univariée comparant le groupe « classement du dossier » versus
Odds Ratio de 22.66 (IC 95% de 2,32-221,1; p=0,007).
« sanction du CNOM », a révélé une différence statistiquement significative
pour les variables suivantes : le médecin n’a pas présenté le dossier du(des) La courbe ROC concernant le nombre de certificats délivrés par le
patient(s) lors de son invitation au CROM de Tunis (p=0,004), la présence médecin, est rapportée dans la figure 1.
d’une erreur dans la rédaction du(des) certificat(s) ayant fait l’objet de la Le cut-off point était de 10 certificats délivrés par le médecin.
plainte (p<0,001) et le nombre de certificats délivrés (p=0,037). L’aire sous la courbe était égale à 0,718 avec un IC 95% (0,528-
L’analyse multivariée avec régression logistique nous a permis 0,908) et p=0,037.

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M. Khalfallah & al. Responsabilité déontologique et certificats

Tableau 2. Analyse univariée comparant le groupe « classement du Tableau 3. Indices informationnels concernant la variable nom-
dossier » au groupe « rappel à l’ordre ou sanction du CNOM » bre de certificats délivrés
Variables Classement Rappel p Sen* Spé* VPP* VPN*
du dossier à l’ordre (IC95%) (IC95%) (IC95%) (IC95%)
N=18 ou sanction
du CNOM Nombre de 14% 89% 50% 57%
N=14 certificats [4-33] [74-100] [1-90] [39-75]
délivrés ≥ 10
Sexe Hommes 18 12 0,183 *Sen= Sensibilité, Spé= Spécificité, VPP= Valeur prédictive positive, VPN= Valeur
prédictive négative, IC= Intervalle de confiance.
Femmes 0 2
Généraliste ou Généraliste 16 9 0,195 Les indices informationnels concernant la variable dossier du
spécialiste
Spécialiste 2 5 (des) patient(s) ayant fait l’objet de la plainte sont rapportés dans
Ancienneté 22,5 23,4 0,896 le Tableau 4.
(médiane en
Tableau 4. 4ndices informationnels concernant la variable dos-
années)
sier du(des) patient(s) ayant fait l’objet de la plainte
Compétence Non 15 13 0,613
Sen* Spé* VPP* VPN*
Oui 3 1 (IC95%) (IC95%) (IC95%) (IC95%)
Mode d’exercice Public 1 0 0,37
Le patient n’a 14% 89% 50% 57%
Privé 17 14 pas fourni [4-33] [74-100] [1-90] [39-75]
ATCD plainte Non 10 9 0,308 le dossier
du (des)
Oui 8 5 patient(s)
ATCD Sanction Non 18 12 0,183 ayant fait
Oui 0 2 l’objet de la
ATCD Non 17 13 0,854 plainte
Complaisance Oui 1 1 *Sen= Sensibilité, Spé= Spécificité, VPP= Valeur prédictive positive, VPN= Valeur
prédictive négative, IC= Intervalle de confiance.
Type convocation Normale 12 11 0,694
(lettre) Recommandée 6 3 Les indices informationnels concernant la présence d’une erreur
Délai convocation 65 61 0,464 de rédaction du certificat sont rapportés dans le Tableau 5.
(médiane en jours)
Médecin a fourni le Non 1 8 0,004 Tableau 5. Indices informationnels concernant la variable dos-
dossier médical Oui 17 6 sier erreur de rédaction du certificat
Erreur de rédaction Non 14 0 <0,001 Sen* Spé* VPP* VPN*
du Certificat Oui 4 14 (IC95%) (IC95%) (IC95%) (IC95%)
Présence 100% 78% 78% 100%
d’une erreur [100] [56-97] [59-97] [100]
de rédaction
du certificat
*Sen= Sensibilité, Spé= Spécificité, VPP= Valeur prédictive positive, VPN= Valeur
prédictive négative, IC= Intervalle de confiance.

DISCUSSION

Les motifs de plainte les plus fréquents étaient le nombre


exagéré de certificats, et les périodes de repos inadéquates,
ayant perturbé le fonctionnement normal d’entreprises privées
et de structures sanitaires les poussant à porter plainte (60%).
Dans 25% des cas, la plainte a été déposée par un citoyen . En
Figure 1. Courbe ROC du nombre de certificats délivrés par le médecin
effet, les certificats qui posaient le plus de problèmes étaient des
certificats médicaux de repos dans 57% des cas, des certificats
Indices informationnels
de maladie dans 19% des cas, des certificats médicaux initiaux
Les indices informationnels concernant le nombre de certificats dans 9% et des certificats de bonne santé dans 9% des cas.
délivrés sont rapportés dans le Tableau 3.

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LA TUNISIE MEDICALE - 2023 ; Vol 101 (n°02)

Les erreurs étaient : une date erronée dans quatre cas, un « la délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de
délai de repos inapproprié dans trois cas, un patient non complaisance constitue une faute grave » [1]. Il s’agit d’une
examiné dans trois cas, l’examen d’un mineur sans son tuteur faute professionnelle et déontologique du médecin.
légal et hors contexte d’urgence dans deux cas, un problème Un certificat médical d’arrêt de travail pour maladie, de repos
de signature dans deux cas (une fois apposée par la secrétaire ou un certificat médical initial peuvent être contestés. Les
et une fois apposée sur un tampon), une mauvaise écriture en médecins sont appelés à faire preuve de discernement et de
arabe dans un cas, des termes inappropriés dans un cas, la se limiter à leur domaine de compétence et à formuler leurs
présence d’une tarification des différents certificats dans un conclusions sur des éléments objectifs de l’examen médical.
cas et un nombre élevé de certificats délivrés par le médecin
La délivrance de certificat médical à un mineur sans le
dans un cas.
consentement (ou la présence) de son tuteur est une faute
Le médecin ayant fait l’objet de la plainte n’a pas fourni le dossier déontologique. En effet, L’article 35 du CDM stipule qu’« Appelé
médical du patient ou des patients ayant fait l’objet de la plainte d’urgence auprès d’un mineur ou d’un incapable et lorsqu’il est
dans 28% des cas car il n’était pas disponible dans tous les cas. impossible de recueillir en temps utile le consentement légal, le
L’analyse univariée comparant le groupe « classement du médecin doit donner les soins qui s’imposent » [1] ; or la délivrance
dossier » versus « rappel à l’ordre ou sanction du CNOM», d’un certificat médical n’est en aucun cas un acte urgent.
a révélé une différence statistiquement significative pour On peut citer l’exemple des élèves qui se procurent des certificats
les variables suivantes : le médecin n’a pas présenté le de repos sans que leurs parents le sachent : les médecins
dossier du(des) patient(s) lors de son invitation au CROM prescripteurs de ces documents sont passibles de sanctions
de Tunis (p=0,004), la présence d’une erreur dans la disciplinaires de la part du Conseil de l’Ordre des Médecins, ce
rédaction du(des) certificat(s) ayant fait l’objet de la plainte qui était le cas de deux médecins dans notre série : un médecin
(p<0,001) et le nombre de certificats délivrés (p=0,037). a eu une interdiction temporaire d’exercer de trois mois et un
L’analyse multivariée avec régression logistique nous a permis médecin a eu une interdiction temporaire d’exercer d’un mois.
d’identifier un seul facteur prédictif indépendant de sanction du Le certificat médical est l’attestation écrite par un médecin
CNOM, à savoir le fait que le médecin n’a pas apporté le dossier de toute constatation positive ou négative résultant de son
du(des) patient(s) ayant fait l’objet de la plainte au moment de examen et concernant la santé [2-4]. La responsabilité
son invitation au CROM Tunis (p=0.037, OR=22,66). disciplinaire, pénale et civile du médecin est engagée chaque
Le Code de Déontologie Médicale (CDM) est un ensemble fois qu’il accepte de rédiger un certificat médical [2-4] :
de dispositions législatives règlementant l’exercice de la • Sur le plan civil, un certificat litigieux peut porter préjudice
médecine en Tunisie, qui s’impose à tous les médecins inscrits à un tiers, et engager la responsabilité civile du médecin
au tableau de l’Ordre, qu’ils exercent ou non [1]. Ce code a qui l’a rédigé, et peut entraîner sa condamnation à la
une portée obligatoire et revêt la forme d’un décret signé du réparation pécuniaire du préjudice ainsi subi (articles 82
Président de la République [1]. Ses prescriptions sont des et 83 du code des obligations et des contrats) [5].
règles de droit, qui s’imposent à ceux qui y sont assujettis,
• Sur le plan pénal, la loi définit des infractions pouvant
auxquelles les tribunaux de droit commun se réfèrent, et que
entraîner la condamnation à une peine de prison ou à
les chambres disciplinaires sont tenues de faire respecter.
une amende pour la rédaction d’un certificat médical de
Le CDM est composé d’articles d’ordre général tels que les complaisance : Des sanctions sont prévues dans le code
articles 8,9,16,17,22 concernant les devoirs généraux des pénal Article 197 (Modifié par la loi n° 98-33 du 23 mai 1998)
médecins, devoirs de confraternité, modes d’exercice de la : « Est puni d’un an d’emprisonnement et de 1000 dinars
médecine et d’articles dédiés à la rédaction de certificats d’amende, toute personne exerçant une profession médicale
médicaux tels que les articles 27 et 28, ainsi que des articles ou paramédicale qui aura délivré, par complaisance, un
concernant les honoraires tels que les articles 42,43 et 44 [1]. certificat faisant état de faits inexacts relatifs à la santé
Un certificat médical de complaisance est un acte de nature d’une personne ou qui aura dissimulé ou certifié faussement
à procurer à un malade un avantage matériel injustifié ou l’existence d’une maladie ou infirmité ou d’un état de
illicite (article 17 du CDM) [1]. L’article 28 du CDM stipule que grossesse non réelle, ou fourni des indications mensongères

303
M. Khalfallah & al. Responsabilité déontologique et certificats

sur l’origine d’une maladie ou d’une infirmité ou sur la cause de l’autorité parentale si le patient est mineur, ou au
du décès. La peine est portée à 5 ans d’emprisonnement et représentant légal si le patient est un majeur protégé
à 5000 dinars d’amende lorsque, dans le cadre de l’exercice ou à un proche si le patient est inconscient, ou bien
de sa profession médicale ou paramédicale, la personne sur réquisition des autorités requérantes.
aura sollicité ou agrée, soit pour elle-même soit pour autrui, Le médecin mentionne alors au-dessus de sa signature :
directement ou indirectement, des offres ou promesses ou “Certificat rédigé à la demande de …. et remis en main propre”.
dons ou présents ou rémunérations » [6].
• Un double du certificat médical doit toujours être
• Sur le plan ordinal, la délivrance d’un certificat médical conservé par le médecin qui l’a rédigé.
injustifié ou de complaisance constitue une faute grave:
Enfin, le médecin doit toujours tenir un dossier ou une
Article 28 du CDM : « la délivrance d’un rapport tendancieux
fiche-patient, sur lesquels il doit mentionner la date de
ou d’un certificat de complaisance constitue une faute grave
l’examen, les données de l’examen clinique, le traitement
» [1]. La rédaction d’un tel document expose donc son auteur
prescrit ainsi que la durée d’un éventuel repos qui a été
à une sanction ordinale pouvant aller jusqu’à l’interdiction
prescrit. Ce dossier, ou cette fiche-patient vont permettre
temporaire d’exercer. L’article 28 a été enfreint dans 14 cas.
au médecin de justifier sa prescription médicale et/ou la
Les sanctions disciplinaires émises par le conseil de durée de repos délivrée en cas de plainte à son encontre
discipline du CNOM sont des sanctions de premier degré pour le motif de certificat médical de complaisance [11].
tels que l’avertissement, le blâme, et des sanctions de
deuxième degré tels que l’interdiction temporaire d’exercer
la fonction de médecin et la radiation du tableau de l’Ordre.
CONCLUSIONS
Suite à ce travail, nous proposons certaines règles de
forme à respecter dans la rédaction et l’établissement du
L’exercice de la médecine comporte normalement l’établissement
certificat médical [8-10]:
par le médecin, conformément aux constatations médicales qu’il est
• Un certificat médical doit être rédigé de façon claire et lisible. en mesure de faire, des certificats, ordonnances, attestations ou
• Sur un certificat médical, doivent obligatoirement documents dont la production est prescrite par les textes législatifs
figurer : le nom, prénom, qualité, et adresse du et réglementaires (article 27 CDM) [1]. La rédaction de certificats
médecin, ainsi que le nom et prénom du patient. médicaux fait partie de la pratique quotidienne d’un médecin.
• Un certificat médical doit être daté du jour où le patient a Les faits punissables en vertu du CDM sont les manquements
été examiné et signé de façon manuscrite par le médecin aux règles déontologiques qui peuvent être des fautes graves
• Un certificat médical doit être rédigé avec précision, comme la rédaction de certificats de complaisance [1].
objectivité, prudence et circonspection. Le médecin L’exercice de la médecine est personnel et chaque médecin est
y rapporte ce qu’il a lui-même constaté et peut y responsable de ses décisions et de ses actes. Les certificats
signaler au conditionnel les éventuelles indications médicaux, manifestations quotidiennes de l’activité de tout praticien
fournies par le patient ou son entourage. sont des documents médico-légaux qui engagent une triple
Certaines règles de fond sont à respecter dans la rédaction responsabilité du médecin : pénale, civile et disciplinaire. Certains
et l’établissement du certificat médical [8-10]: certificats prévus par la loi sont obligatoires et constituent une
dérogation relative au secret médical, mais la plupart des certificats
• Un certificat médical doit toujours impérativement être
sont facultatifs et le médecin ne doit les établir qu’à bon escient.
rédigé après examen préalable, toujours très attentif,
du patient. Les données de cet examen ainsi que Le médecin doit également toujours tenir un dossier ou une fiche-
la date de l’examen doivent être consignées sur le patient, sur lesquels il doit mentionner la date de l’examen, les
dossier médical ou la fiche médicale du patient. données de l’examen clinique, le traitement prescrit ainsi que la
durée d’un éventuel repos qui a été prescrit. Ce dossier, ou cette
• Un certificat médical ne doit être remis, en main propre,
fiche-patient vont permettre au médecin de justifier sa prescription
qu’au patient lui-même qui en fera ensuite ce que
médicale et/ou la durée de repos délivrée en cas de plainte à son
bon lui semble, et jamais à un tiers sauf au détenteur
encontre pour le motif de certificat médical de complaisance.

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LA TUNISIE MEDICALE - 2023 ; Vol 101 (n°02)

REFERENCES

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www.ilo.org/dyn/natlex/docs/ELECTRONIC/61250/60936/F1198127290/
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