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L'agent Economie Face Aux Risque

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1

L’agent économique
face au risque

Au-delà de l’existence même d’une possible évaluation de l’utilité (satisfaction),


il convient de considérer que méconnaissant, a priori, les caractéristiques des
produits, le consommateur ne peut connaître, à l’avance, l’utilité procurée par un
bien. Comment, dès lors, démuni d’informations, peut-il intégrer ce bien dans son
panier afin de maximiser son utilité ? Cette réflexion peut s’appliquer à l’ensemble
des agents économiques. C’est pourquoi, l’analyse du comportement des agents
économiques doit se réaliser en supposant que celui-ci évolue dans un univers où
il doit raisonner dans un environnement incertain.

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Risques et incertitudes
Une action est dite risquée s’il est possible de lister l’ensemble des évènements qui
en découlent et d’assigner, à chacun d’entre eux, une probabilité d’occurrence. Un
jet de dé est, par exemple, risqué si le lanceur ne connait pas, avec certitude, la face
qui va sortir. Il peut toutefois calculer la probabilité d’apparition d’une des six faces.
Face au risque quantifiable, la notion d’incertitude est source d’instabilité pour
l’agent économique. En effet, une action est incertaine lorsqu’il est impossible de
quantifier ses états de la nature1. Ainsi, il est impossible d’associer une probabilité
sur une éventuelle baisse des taxes dans les dix prochaines années. Cette décision
appartient à un prochain gouvernement dont l’élection est, elle-même, incertaine.

A. La valeur espérée en cas d’incertitude


Afin de tenir compte du risque qu’il encourt, l’agent économique va s’appuyer sur
les probabilités associées aux différents états de la nature de manière à calculer
la valeur espérée de son projet. Au même titre qu’une espérance mathématique,
la valeur espérée d’un projet considère le résultat des différents états de la nature
pondérés par leur probabilité respective. Elle est égale à : ∑ i∈IRi * Pi avec Ri le
revenu apporté par l’état de la nature i et Pi la probabilité associée.

Illustration
Soit un projet d’entreprise dont les espérances de gain et les probabilités associées
sont présentées dans le tableau ci-dessous :

Profit du projet 5 000 € 10 000 € 45 000 €

Probabilité associée 1/6 2/3 1/6

L’espérance d’utilité du projet (taux de rendement moyen) est alors égale à


(1/6) * 5 000 + (2/3) * 10 000 + (1/6) * 45 000 = 15 000 €
Outre la valeur monétaire, cette information indique à l’investisseur, le montant
initial qu’il doit investir pour réaliser un profit.

1. Tout évènement aléatoire pouvant se réaliser est appelé un « état de la nature ». Une action risquée a donc
des états de la nature dont les risques respectifs sont quantifiables par l’agent qui l’occasionne.

10 Partie I • Introduction à l’ouvrage

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Si la valeur espérée est un critère de décision en situation risquée, un autre paramètre
essentiel est à prendre en compte : la variabilité/volatilité des gains.

B. La volatilité
La volatilité mesure la variabilité des résultats d’un processus aléatoire associés aux
différents états de la nature. Une grande variabilité illustre l’importance du risque
encouru. Ainsi, un projet offrant la possibilité de réaliser un profit de 240 000 euros
avec une probabilité de 1/10 et d’enregistrer une perte de 10 000 euros avec une
probabilité de 9/10 paraît très risqué malgré une valeur espérée positive. En finance,
la volatilité d’un actif représente l’écart entre les résultats de la nature et la valeur
espérée moyenne du titre financier.
Au plan mathématique, la volatilité est égale à l’écart-type i.e. la racine carrée de
la variance

∑ i∈I ( )2
i * (Xi − E X = V (X )

Comparons le projet étudié précédemment à un second dont les états de la nature


sont les suivants :

Profit du projet 1 000 € 43 000 € 1 000 €

Probabilité associée 1/3 1/3 1/3

L’espérance de gain du projet est alors égale à :


(1/3) * 1 000 + (1/3) * 43 000 + (1/3) * 1 000 = 15 000 €

c’est-à‑dire égale au premier projet.


Sur la base uniquement de l’espérance de gain, nous pourrions donc affirmer que
l’entrepreneur est indifférent aux deux projets.
Toutefois, en calculant la variabilité des deux projets, nous observons que la disper-
sion du second projet est beaucoup plus élevée malgré une même espérance.
Écart type du premier projet :
[1/6 * (5 000 – 15 000)2 + 2/3 * (10 000 – 15 000)2 + 1/6 * (45 000 – 15 000)2]1/2
= 13 540,1

Écart type du second projet :


[1/3 * (1 000 – 15 000)2 + 1/3 * (43 000 – 15 000)2 + 1/3 * (1 000 – 15 000)2]1/2
= 34 292,9

1. L’agent économique face au risque 11

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Sur la base de ce second critère, un chef d’entreprise rationnel visant à maximiser
de son profit tout en minimisant son risque choisira, parmi deux projets de même
gain potentiel, celui dont la volatilité est la moins importante.

C. L’espérance d’utilité
Cette dernière occurrence (projets ayant la même espérance de gain) est peu
fréquente. La situation la plus courante est celle d’un arbitrage entre risque et
espérance de gain.
Comment un entrepreneur doit-il choisir un projet lorsque les gains et leur variabilité
sont différents ? Doit-il opter pour le projet le plus risqué et le plus rémunérateur
ou préférer un projet, plus raisonnable en termes de risque, mais ayant une faible
rentabilité ? Ainsi, à partir des données suivantes, quel projet doit-il choisir ?

Valeur espérée 10 000 € 25 000 €

Écart-type du projet 5 000 12 000

Il ne vous échappera pas qu’il existe dans la réponse une part assez subjective.
Certaines personnes sont plus averses au risque que d’autres (Cf. Paradoxe de
Saint Pétersbourg de Bernoulli). Leur acception du risque se matérialise par une
fonction d’utilité différente.

D. Le taux marginal de substitution


Afin de réaliser son choix optimal, un individu doit prendre en compte l’espérance
de gain, son risque et les probabilités afférentes. Il existe un point où il optimise son
choix en univers risqué i.e. en ce point, il est indifférent à deux choix : gain élevé
avec une probabilité faible ou faible gain avec une probabilité forte.
Afin de trouver ce point d’indifférence compte tenu des paramètres du jeu, la
démarche du taux marginal de substitution1 peut être utilisée.

Illustration
Considérons un jeu procurant un gain X avec une probabilité p et un revenu Y
avec une probabilité (1 – p). Supposons que l’utilité du consommateur égalise, en
situation incertaine, l’espérance des gains du jeu.

1. Le taux marginal de substitution est le taux selon lequel le consommateur substitue une quantité du bien X
par une quantité du bien Y, tout en gardant fixe le même niveau de satisfaction.

12 Partie I • Introduction à l’ouvrage

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Nous avons
dU (X, Y) = dE (U (X, Y)) = [p * dU (X)/dX] + [(1 – p) dU (Y)/dY] = 0
⇔ –dX/dY = [(1 – p) dU (Y)]/[p * dU(X)]
Ainsi, le taux marginal de substitution égalise le rapport des probabilités d’apparition
des deux états de la nature.
TMS = (1 – p)/p
Cette relation, utile dans la mesure où la fonction d’espérance d’utilité n’étant pas
toujours linéaire, indique, en présence de deux évènements, la probabilité permet-
tant d’atteindre l’utilité maximale de l’agent économique.

E. Le profil des joueurs


Chaque individu doit connaître son profil de risque afin de déterminer le choix
optimal maximisant son profit.
Un agent avers au risque voit son utilité se ralentir avec une espérance du gain élevée
ayant une probabilité faible de survenir. La courbe d’espérance d’utilité est concave
et la dérivée seconde de cette fonction est négative.

1. L’agent économique face au risque 13

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Un agent neutre au risque voit son utilité croître à la même vitesse que le gain moyen
espéré. La courbe de la fonction d’espérance d’utilité est linéaire et l’agent est
indifférent à prendre le risque ou non. Sa fonction d’utilité est donc U(X) = E(X).

Un agent ayant un profil de risque élevé s’orientera vers des situations aux gains et
risques importants. Son utilité croît de plus en plus vite avec l’espérance de gain.
La courbe de la fonction d’utilité est convexe. La dérivée seconde de cette fonction
est alors positive.

14 Partie I • Introduction à l’ouvrage

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F. La prime de risque
L’agent économique réalise un arbitrage en prenant comme critères de décision, le
risque et l’espérance d’utilité (rendement). Le différentiel perçu de valeur permet
d’estimer la valeur attribuée par l’agent au risque encouru.
L’utilisation de la notion d’équivalent (cf. utilité indirecte) facilite le calcul de la
valeur monétaire du risque. Elle permet de trouver le niveau de richesse certain
correspondant à l’espérance d’utilité d’un niveau de richesse incertain afin de main-
tenir, au même niveau, l’utilité de l’agent (Le raisonnement s’effectue en termes de
richesse totale et non en termes de gain).
Au plan mathématique, l’équivalent certain (X) du taux de rendement se définit
comme le point où l’utilité d’une richesse certaine égalise l’espérance d’utilité
incertaine :
U(X) = E(U(X))

L’expression de X est obtenue en calculant la fonction inverse


⇔ X = U [E(U(X))]–1

Illustration
La fonction d’utilité d’un individu est U(X) = X1/2. Il a une richesse initiale de
10 euros. Il participe à une loterie pouvant lui rapporter 100 € avec 25 % de chance
ou lui faire perdre 5 € avec une probabilité de 75 %. À l’instant initial, la richesse de
l’individu est de 10 €.
S’il joue à la loterie, l’espérance d’utilité est de :
E(U(X)) = U(110) * 0,25 + U(5) * 0,75 = 4,3
S’il souhaite avoir cette utilité de manière certaine i.e. sans avoir à jouer, il lui faudrait
avoir un revenu initial de :
[U(4,3)]–1 = 18,49 €1
Ainsi, à une espérance d’utilité de 4,3 correspond une richesse initiale de 18,49 euros
i.e. un individu sera donc indifférent entre garder sa richesse de 18,49 € et acheter
le jeu : son utilité serait la même.
S’il venait à participer au jeu, il pourrait espérer gagner :
E(X) = 0,25 * 110 + 0,75 * 5 = 31,25 €

1. La fonction inverse de la racine carrée est x².

1. L’agent économique face au risque 15

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L’individu serait donc indifférent entre jouer et recevoir 18,49 € mais l’espérance
mathématique du jeu peut être positive, représentant un manque à gagner potentiel
pour le joueur.
S’il renonçait à jouer, sa prudence lui serait donc perdre : 31,25 – 18,49 = 12,76 euros
À ce point d’indifférence, l’individu valorise les deux options de la même manière. Le
différentiel de gain (12,76 €) représente la prime de risque i.e. comment il valorise le
risque, qui évolue en fonction du profil de l’individu et du type de risque qu’il encourt.
–– Si la prime de risque (différence entre l’espérance de gain et le gain certain)
est positive, l’individu est prêt à payer une somme pour participer au jeu à la
condition que le rendement attendu soit supérieur à celui d’un placement non
risqué (utilité de l’espérance de gain du jeu supérieure à l’espérance d’utilité du
joueur). Nous avons :
E(X) – X > 0 ⇔ E(X) > X ⇔ E(X) > U[E(u(X))]–1
⇔ U[E(X)] > E(U(X))
–– Si la prime de risque est nulle, l’individu est indifférent au risque : son utilité n’est
pas modifiée par le fait de jouer ou non (utilité de l’espérance de gain du jeu égale
à l’espérance d’utilité du joueur). Nous avons :
E(X) – X = 0 ⇔ U[E(X)] = E(U(X))
–– Si la prime de risque est négative, l’individu est prêt à payer une somme pour jouer
à un jeu risqué i.e. l’espérance de gain est supérieure à son équivalent certain
(utilité de l’espérance de gain du jeu inférieure à l’espérance d’utilité du joueur).
Nous avons :
E(X) – X < 0 ⇔ U[E(X)] < E(U(X))

G. Les types de risque


Trois types de risque sont généralement distingués, chacun ayant un modèle
approprié de calcul :

a. Le risque additif, A

Ce risque s’ajoute/se soustrait à la richesse, W.


W=w±A

Un exemple est une loterie qui additionne au revenu, 10 euros en cas de victoire
ou soustrait 5 euros en cas de perte.

16 Partie I • Introduction à l’ouvrage

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