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Neurobiologie Des Addictions

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NEUROBIOLOGIE DES ADDICTIONS

PLAN :

• Introduction

• Définitions

• Circuits impliqués

• Adaptations cellulaires et moléculaires induites par l’administration répétée des drogues

• Théories de l’addiction

• Facteurs influençant le développement d’une addiction

• Lien entre stress et addiction

• Signes de manque, «craving» et rechute

• Conclusion
Introduction :

L’addiction est un état de dépendance vis-à-vis d’une substance. C’est une pathologie psychiatrique
chronique caractérisée

Différentes substances psychoactives peuvent mener à une dépendance.

Le terme addiction peut être étendu à certains comportements qui ont le même caractère répétitif,
compulsif, avec perte de contrôle.

Le cycle de l’addiction se caractérise par trois stades : intoxication, malaise (psychique et


éventuellement physique) envie irrésistible de consommer («craving»), dont le déroulement répétitif
signale la perte de contrôle de la consommation.

Il se manifeste quel que soit le type de substance consommée. Ce qui suggère l’existence d’une base
neurobiologique commune au phénomène d’addiction.

Le sevrage est difficile et le risque de rechute très important

L’étude de la neurobiologie de l’addiction est l’occasion de corriger certains stéréotypes


préjudiciables qui conduisent à la stigmatisation de la toxicomanie et à des décisions thérapeutiques
et administratives erronées.

Définitions :

Le système limbique

1. Ce n’est pas une structure cérébrale en tant que telle, mais plutôt un réseau de voies nerveuses
intégrant certaines structures situées en profondeur dans les lobes temporaux, telles que :

- l’hippocampe : une structure cérébrale qui intervient dans la mémorisation de souvenirs liés
à une expérience.

- l’amygdale : une structure cérébrale qui aide à évaluer la valeur émotionnelle d’un
événement.

2. Il est très fortement associé à l’hypothalamus, ainsi qu’au cortex frontal

3. Il influe sur le système endocrinien et le système nerveux autonome responsable des fonctions
automatiques et du maintien de l’équilibre intérieur (homéostasie).

4. Une des fonctions primordiales du système limbique est de renforcer les comportements
essentiels à la survie de l’espèce.

Le système de récompense

1. Toutes les substances addictives ont en commun d’agir sur une partie spécifique du système
limbique. Elles activent une région appelée “aire tegmentale ventrale“, située en plein centre du
cerveau.

2. L’ATV reçoit l’information de plusieurs autres régions du système limbique qui l’informent du
niveau de satisfaction des besoins fondamentaux et la transmet ensuite au noyau accumbens.

3. Grâce à ce circuit, les actions intéressantes pour l’individu sont repérées et renforcées dans le but
de les voir, à l’avenir, reproduites dans le même contexte.

4. Le neurotransmetteur utilisé par ces neurones est la dopamine.


La dopamine

C’est le neurotransmetteur impliqué dans le fonctionnement du système de récompense. Il informe


le système nerveux de la différence entre ce qui est attendu et ce qui est effectivement reçu.

La dopamine serait donc un signal d’apprentissage libérée quand un comportement mène à


l’obtention d’une récompense (positive et inattendue) dans un contexte précis. De cette manière, le
cerveau fait en sorte que la probabilité de voir se renouveler ce comportement soit augmentée.

Circuits neuronaux impliqués dans les effets de renforcement positif d’une prise aiguë de drogue

Le rôle du circuit de récompense dans les effets de renforcement positif des drogues a été suggéré il
y a plus de 30 ans.

Décrit par Olds et Milner en 1954, il a pour éléments essentiels les corps cellulaires des neurones
sont situés dans l’aire tegmentale ventrale (ATV) et leurs axones atteignent le noyau accumbens, le
tubercule olfactif, le cortex frontal et l’amygdale.

Le neurotransmetteur utilisé par ces voies est la dopamine.

Schématiquement, la voie dopaminergique peut être activée de deux façons :

- une activation directe : soit en favorisant la libération de dopamine (amphétamine,


methamphétamine, ...) soit inhibent sa recapture (cocaïne, méthylphénidate, ...) au niveau
des terminaisons dans le noyau accumbens

- une activation indirecte : levée de l’inhibition du fonctionnement de la voie


mésocorticolimbique (opioïdes tels que morphine, cannabis) au niveau des neurones
dopaminergiques de l’ATV normalement assurée par des interneurones GABAergiques
présents dans l’ATV. L’activation des récepteurs opioïdes ou cannabinoïdes présents sur ces
interneurones GABAergiques permet de diminuer la libération du neurotransmetteur GABA,
et donc de diminuer l’inhibition du neurone dopaminergique, ce qui conduit à une
augmentation de la libération de dopamine dans le noyau accumbens.

D’autres neurotransmetteurs et neuromodulateurs sont également impliqués : le GABA, le


glutamate, la sérotonine, la noradrénaline et les peptides opioïdes. L’implication de ces
neurotransmetteurs peut être indirecte et/ou direct.

Adaptations cellulaires et moléculaires induites par l’administration répétée des drogues

• Adaptations Au Niveau Du Circuit De Récompense :

Modifications communes :

1. Dans des conditions physiologiques normales, le circuit de récompense fournit la motivation


nécessaire à la réalisation d’actions ou de comportements adaptés à la survie, comme la recherche
de nourriture, la reproduction, le contact social.

2. La stimulation par les substances toxicomanogènes est plus intense et plus durable que la
stimulation induite par les récompenses naturelles, ce qui aura pour résultat de focaliser l’attention
et la motivation sur la drogue au détriment des stimuli naturels.

3. Avec la répétition de la consommation, cette activation anormalement intense et durable peut


générer des modifications synaptiques durables au sein du circuit de récompense et des régions
associées et entraîner des modifications psychologiques et comportementales qui peuvent aboutir à
la dépendance.

Les drogues détournent le circuit de récompense de son rôle physiologique normal.

4. De manière générale, le cerveau répond de manière homéostatique à l’exposition chronique aux


drogues par une diminution compensatoire du fonctionnement du système dopaminergique =>
phénomène de tolérance.

Les taux de DA cérébrale sont réduits et la réponse aux récompenses naturelles est réduite. Ceci
pourrait expliquer les sensations émotionnelles négatives ressenties entre les périodes de
consommation de drogue et lors de l’abstinence.

5. Un changement psychologique important est la sensibilisation motivationnelle ou hypersensibilité


aux effets motivationnels des drogues et des stimuli associés à leur consommation. Les buts habituels
de la vie sont négligés et le comportement s’oriente de plus en plus exclusivement vers la recherche
de drogue et sa consommation.

Modifications spécifiques : liées à leur action sur des cibles pharmacologiques distinctes

Les opiacés ont des effets analgésiques liés à la stimulation des récepteurs mu situés au niveau des
voies de transmission de la douleur.

La cocaïne stimule le système cardio-vasculaire en bloquant la recapture des catécholamines au


niveau du système ortho-sympathique.

Des spécificités existent aussi dans les modifications neurobiologiques entraînées par
l’administration chronique des différents types de drogues : diminution de la sensibilité des
récepteurs mu pour les opiacés, diminution de la sensibilité des récepteurs GABAA pour l’alcool,
modifications de la densité des récepteurs nicotiniques pour le tabac.

Adaptations Au Niveau Des Régions Corticales Et De L’hippocampe

Une hypo-frontalité corticale a été mise en évidence, caractérisée par une diminution de l’activité
basale au niveau des régions préfrontales, cingulaires antérieures et orbito-frontales qui contrôlent
les fonctions exécutives, la mémoire de travail, l’attention et l’inhibition comportementale.
Les modifications entraînées par l’administration chronique des drogues pourraient être impliquées
dans l’impulsivité et la compulsion à consommer qui caractérisent le comportement addictif.

La diminution de l’activité des cellules pyramidales du cortex s’accompagne d’une diminution de la


sensibilité aux récompenses naturelles. Par contre, ces cellules manifestent une hypersensibilité à
l’action activatrice des drogues et des stimuli associés à leur consommation.

Les recherches réalisées au cours des dix dernières années chez les rongeurs ont mis en évidence un
autre effet commun aux différentes substances toxicomanogènes :

• la propriété commune de réduire la neurogenèse au niveau du gyrus dentelé de


l’hippocampe lors de leur administration chronique, ce qui pourrait contribuer aux
problèmes cognitifs observés chez de nombreux toxicomanes.

• Etant donné le lien étroit entre maladies mentales et toxicomanies, certains auteurs ont
proposé un modèle neurogénique du double diagnostic.
Théories de l’addiction

La théorie du « renforcement positif-renforcement négatif » :

• on reconsomme la substance qui procure du plaisir (positif) ou bien on reconsomme pour se


soulager des effets désagréables ressentis lors du sevrage (négatif).

• Dans le développement de l'addiction, le renforcement positif s'émousse et laisse place


progressivement au renforcement négatif.

La théorie des « apprentissages aberrants ou de l'automatisme »

Si au départ on consomme pour des raisons sociales et de recherche des effets aigus, ensuite le
comportement devient inflexible. Le comportement initialement motivé par un objectif devient par
la suite une habitude et un automatisme

La théorie de la « sensibilisation motivationnelle »

Ce n'est pas le fait d'aimer de plus en plus la substance qui se produit dans l'addiction mais plutôt le
fait d'être de plus en plus motivé à consommer. On comprend mieux alors comment la
consommation devient incontrôlable et compulsive.

La théorie des « processus opposants » ou de « l'allostasie hédonique »

Explique que la stimulation chronique des neurones dopaminergiques associée à la sensation de


plaisir entraîne des processus de neuro-adaptations qui viennent contrer cette stimulation. Ainsi, le
système finit par être régulé à la baisse jusqu'à atteindre un nouvel état d'équilibre plus bas générant
ainsi un mal être, une dysphorie, un état émotionnel négatif.

« Déficit de contrôle inhibiteur »

Vient expliquer comment les sujets perdent le contrôle sur la consommation avec l'hypoactivité des
régions corticales frontales qui sont impliquées dans les fonctions exécutives, la planification et le
jugement des conséquences de ses actes.

Facteurs Influençant Le Développement D’une Addiction

De nombreux facteurs influencent la probabilité d’une première consommation de drogue,


l’évolution vers un usage problématique, puis l’évolution vers le cycle d’addiction. Ils dépendent du
consommateur lui-même (âge, sexe, maladies mentales), de la nature de la drogue (type de
substance, mode de consommation, quantité consommée) et de l’environnement (rôle des pairs,
disponibilité de la drogue, soutien social et familial, statut économique).

Des facteurs génétiques jouent également un rôle certain dans le développement du cycle
d’addiction.

Lien Entre Stress Et Addiction Ce lien doit s’envisager dans les deux sens

Chez l’homme et chez l’animal, le stress facilite l’initiation de la consommation de drogue et le


maintien de cette consommation.

Il est à noter que l’augmentation de la transmission excitatrice au niveau de l’ATV, rapportée lors de
l’administration de différentes drogues, est également induite par le stress et que le stress réduit
également la neurogenèse hippocampique.

Le stress est, par ailleurs, un facteur de risque important de la rechute.


D’autre part, l’administration aiguë et chronique de diverses drogues module de manière variable
l’activité de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, entraînant des modifications de la sécrétion
de CRF (facteur de libération de la corticotrophine), d’ACTH (corticotrophine) et de cortisol.

Sevrage Le sevrage brutal de virtuellement toutes les drogues s’accompagne d’une activation des
neurones CRF de l’amygdale. Son activation pourrait expliquer, en partie, les symptômes
émotionnels négatifs éprouvés par les toxicomanes en sevrage. Outre le CRF, d’autres
neurotransmetteurs impliqués dans le stress sont également activés lors du sevrage. L’activation des
systèmes noradrénergiques est particulièrement bien documentée dans le cas du sevrage aux
opiacés et à l’alcool.

Des manipulations pharmacologiques de ces systèmes (par la clonidine, plus particulièrement) ont
d’ailleurs la capacité de réduire une partie des signes de manque observés chez les alcooliques et les
héroïnomanes en sevrage.

Signes De Manque, «Craving» Et Rechute

Le troisième stade du cycle d’addiction mentionné au début, à savoir le stade du «craving», est un
élément clé de la rechute qui fait de l’addiction une maladie mentale récurrente.

On parle de dépendance secondaire lorsque la consommation de drogue devient nécessaire pour


éviter de ressentir les signes de manque.

Cette notion de «craving» est difficile à définir ; elle correspond à une envie irrésistible de
reconsommer la drogue après une période d’abstinence de durée variable.

Les modèles animaux indiquent que la recherche de drogue après sevrage peut être induite de
différentes manières :

- par une nouvelle administration de la drogue,


- par un stimulus stressant,
- mais aussi par l’exposition à des stimuli neutres appariés précédemment avec
l’administration de la drogue («indices contextuels»).

Ces observations mettent l’accent sur l’influence prépondérante des facteurs environnementaux
(contexte de consommation) qui, lorsqu’ils sont associés de manière répétée à la consommation de
drogue, acquièrent la valeur de stimuli conditionnels, évoquant la disponibilité de la drogue et la
mémoire de ses effets euphorisants.

Les études chez l’animal et les études d’imagerie chez l’homme ont mis en évidence l’implication de
régions corticales et limbiques dans cet apprentissage associatif ainsi que dans le «craving» et la
rechute.

Conclusion
L’addiction implique une succession de neuro-adaptations aboutissant à une reprogrammation de
circuits neuronaux impliqués dans le plaisir et la motivation, la mémoire, le conditionnement, les
fonctions exécutives, le jugement, le contrôle de soi et la réaction au stress. Ces neuro-adaptations
entraînent des modifications complexes dans les fonctions psychologiques et dans le comportement.
Des facteurs génétiques, développementaux et environnementaux influencent le décours et la
sévérité du processus.

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