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MN210 FR Le Développement Transformationnel Et L'église

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Le Développement

Transformationnel
et l’Église
Un regard biblique
sur le besoin humain

de Miriam Smith
et Suzanne Hurst
LE DÉVELOPPEMENT TRANSFORMATIONNEL ET L’ÉGLISE :
Un regard biblique sur le besoin humain

de Miriam Smith et Suzanne Hurst

Version originale publiée en anglais sous le titre :


TRANSFORMATIONAL DEVELOPMENT AND THE CHURCH:
A Biblical Approach to Human Need

Traduction : Sandra Berkley


Copyright © 2008 Africa’s Hope
580 West Central Street
Springfield, Missouri 65802

Sauf indication contraire, toutes les citations bibliques sont tirées de la


SAINTE BIBLE, NOUVELLE VERSION SEGOND RÉVISÉE.
© 1978, Alliance Biblique Française.
Tous droits réservés.

info@AfricasHope.org

Imprimé au BELARUS
ISBN 978-1-935531-19-7

MN 210
Table des matieres
Chapitre Page

Graphiques et tableaux iv
La Série Découverte d’Espoir de l’Afrique v
Remerciements xi

Première partie :
Les bases bibliques du développement transformationnel
1 La transformation et la mission de l’Église 3
2 Comprendre le holisme biblique 15
3 Une perspective biblique de la pauvreté 31

Deuxième partie
L’évangélisation et le témoignage dans le contexte du
développement transformationnel
4 Les bases du changement : une vision biblique du monde 57
5 Un témoignage holistique :
Savoir identifier les occasions que Dieu donne 77
6 Comprendre les concepts clés du développement 99

Troisième partie
Le processus de développement transformationnel
7 Le bilan communautaire : commencer par les faits 127
8 La planification : savoir où l’on va 141
9 La mise en œuvre : l’action et son impact 159
10 L’évaluation : qu’avons-nous accompli ? 175

Quatrième partie
Les activités de développement transformationnel
11 L’église en action : mener une action de lutte
contre le VIH/SIDA 185
12 Kit pédagogique de base sur le VIH/SIDA 199

Glossaire 219
Appendice : les peuples récalcitrants : Étude de cas de Hayyu 221
Bibliographie 225

— iii —
Graphiques et tableaux
Figure 1.1 9
Figure 2.1 16
Figure 2.2 17
Figure 3.1 39
Figure 4.1 57
Figure 4.2 59
Figure 4.3 60
Figure 4.4 61
Figure 4.5 63
Figure 4.6 67
Figure 4.7 68
Figure 4.8 70
Figure 4.9 72
Figure 5.1 78
Figure 5.2 78
Figure 5.3 79
Figure 5.4 80
Figure 5.5 84
Figure 5.6 93
Figure 5.7 94
Figure 6.1 105
Figure 6.2 118
Figure 7.1 128
Figure 8.1 153
Figure 9.2 160
Figure 9.1 160
Figure 9.3 166
Figure 9.4 171

— iv —
La Série Découverte
d’Espoir de l’Afrique

Ce livre fait partie de la Série Découverte développée par Espoir de


l’Afrique. Nous sommes convaincus que cette série deviendra un outil
important dans la formation des dirigeants d’églises en Afrique. Nous
désirons avant tout que cette série soit le reflet de ce que nous désirons
accomplir.

Notre mission est de faciliter


la formation au sein de l’Église d’Afrique
afin qu’elle puisse faire des nations des disciples
par la puissance du Saint-Esprit.

Pour faciliter la formation, les cours de la Série Découverte d’Espoir


de l’Afrique ont été conçus de manière à être enseignés dans des salles
de classe et dans des petits groupes. Comme le nom de la série l’indique,
celle-ci permettra à l’élève de partir à la « découverte » du savoir. Six
caractéristiques particulières faciliteront un apprentissage pratique :

• Un plan détaillé de chaque partie principale du livre vient résumer


le contenu des chapitres.

—v—
• Les commentaires dans la marge accentuent les expressions clés
et encouragent l’application.
• Les graphiques, les tableaux et les illustrations servent à renforcer
les concepts les plus importants.
• Chaque chapitre se termine par des questions de révision et
d’explication de texte.
• Un glossaire donne la définition des termes clés.
• Des exercices de révision sont proposés pour chaque chapitre à la
fin du cours.

Pour mieux faciliter la formation au sein de l’Église d’Afrique, cette série


a été développée dans le but de répondre aux besoins des pasteurs en
Afrique. Cet engagement est reflété dans le choix des mots, dans les
illustrations et dans l’application du contenu au contexte africain. Ces
cours sont plus particulièrement destinés aux :

• Étudiants en formation dans des instituts bibliques ;


• Pasteurs ayant déjà suivi une formation pastorale ;
• Laïcs qui se sentent appelés à une forme de ministère quelconque.

Nous sommes convaincus que le moment est venu pour l’Afrique


de faire de toutes les nations des disciples. Le réveil qui a lieu au sein
des assemblées pentecôtistes en Afrique est l’un des plus importants
de toute l’histoire de l’Église. Nous espérons que ces cours serviront de
base à une formation qui permettra à des milliers d’Africains d’annoncer
Christ aux nations. C’est donc dans cette perspective que ce cours, et
d’autres, s’attacheront à démontrer que la mission internationale fait bel
et bien partie intégrante du rôle de l’Église africaine.

Le ministère par la puissance de l’Esprit est un autre thème souvent


repris dans les cours de la Série Découverte d’Espoir de l’Afrique. Nous
croyons que le savoir ne doit jamais être dissocié de l’onction du Saint-
Esprit. Les auteurs et éditeurs de cette série de cours se sont engagés à
créer un équilibre entre la théorie et la pratique. Le but est de susciter des
hommes et des femmes de Dieu capables d’exercer un ministère efficace
au sein du contexte pastoral africain.

— vi —
Description

Le thème du développement communautaire a fait l’objet de plusieurs


livres et, ces dernières années, d’excellents organismes chrétiens de
développement nous ont permis d’en savoir plus sur le développement
transformationnel. Ce cours est unique en ce qu’il s’adresse à un large
éventail de pasteurs en Afrique pour les aider à incorporer les principes et les
pratiques du développement transformationnel dans le cycle hebdomadaire
de la vie de l’église, que ce soit en milieu rural ou urbain. C’est donc la raison
pour laquelle bon nombre des écrits sur le développement tendent à inclure
des instructions compliquées concernant la rédaction de propositions de
projet, le suivi et l’évaluation des projets, et la rédaction de rapports.

L’objectif de ce cours n’est nullement de « professionnaliser » le travail


de développement au sein des églises locales. Au contraire, il vise à initier
les pasteurs au processus de base du développement et à encourager les
églises à mettre sur pied des projets locaux basés sur ledit processus.
De plus en plus d’églises s’ouvrent à la pratique du développement
transformationnel, ce qui entraîne un besoin de plus en plus pressant de
formation spécialisée et technique.

Ce cours est également unique en ce qu’il insiste sur le témoignage


holistique et missionnel rendu dans le cadre des activités de développement,
quelles qu’elles soient. Il incite les étudiants à rendre témoignage en paroles
et en actes, quoi qu’ils fassent. La terminologie utilisée et la progression
du cours, passant d’un support biblique à un savoir purement technique,
participent du désir conscient de vouloir susciter l’intérêt et de gagner la
confiance de la majorité des candidats au ministère.

Objet
Ce cours a pour objet d’analyser les fondements bibliques du
développement transformationnel en rapport avec l’église locale,
d’examiner les principes des meilleures pratiques du développement
transformationnel, de dispenser un enseignement pratique sur le
processus de développement et d’identifier les caractéristiques clés des
ouvriers du développement transformationnel.

— vii —
Ce cours permettra essentiellement aux étudiants d’acquérir les
connaissances nécessaires pour pouvoir ouvrir l’église à la pratique d’un
ministère holistique tout en continuant de présenter l’Évangile de façon
pertinente. Les étudiants seront ainsi à même de mettre en œuvre des
actions de lutte contre la pandémie du VIH/SIDA, un problème crucial
auquel sont confrontées les communautés africaines, et ce, en s’appuyant
sur le processus du développement transformationnel.

Buts
À l’issue de ce cours, les étudiants pourront :

1. Comprendre davantage les concepts clés du développement


transformationnel, du ministère holistique, de la vision biblique
du monde et du témoignage holistique.
2. Expliquer la raison pour laquelle, selon la Bible, il est essentiel pour
l’Église de prendre part au développement transformationnel.
3. Démontrer leur capacité à utiliser les activités de développement
transformationnel de manière à indiquer la voie qui mène à Dieu
dans différents contextes, y compris celui de l’islam.
4. Examiner leur propre vision du monde et comprendre l’influence
que celle-ci exerce sur le processus de transformation.
5. Identifier les compétences et les particularités des ouvriers du
développement transformationnel.
6. Comprendre les divers principes et étapes du processus de
développement transformationnel.
7. Guider la communauté cible à travers le processus d’identification
et de classement des besoins par ordre d’importance, et la
planification d’une réponse précise et efficace.
8. Comprendre l’importance de l’évaluation.
9. Mettre sur pied une action de lutte contre le VIH/SIDA sous
le patronage de l’église en ayant recours au processus de
développement.

Auteurs
Ce texte est le fruit d’une collaboration entre deux auteurs. Miriam
Smith a rédigé les deux premières parties. Les deux auteurs ont collaboré
à la rédaction de la troisième partie, et c’est à Suzanne Hurst qu’est
attribuée la paternité littéraire de la quatrième partie.

— viii —
En tant qu’enfant de missionnaires, Miriam Smith a grandi au Tchad
et a passé sa vie en Afrique. Dieu l’a appelée à devenir missionnaire alors
qu’elle n’était encore qu’une adolescente ; elle avait tout particulièrement
à cœur de toucher les nomades musulmans des alentours. Elle se rendit à
New York où elle entreprit d’étudier la biologie et les sciences missionnaires
au Houghton College ; son désir le plus cher était de retourner en Afrique
afin d’y exercer son ministère auprès de diverses communautés. Ensuite,
elle obtint un diplôme d’études supérieures en Études interculturelles, avec
une concentration sur le développement transformationnel, du Wheaton
College, dans l’Illinois (États-Unis). Miriam et son époux, Kevin, lui aussi
enfant de missionnaires en Afrique, servent le Seigneur en exerçant un
ministère holistique en Érythrée, en Somalie, à Djibouti et au Kenya depuis
1993. Ils ont trois enfants : Katie, Kaleb et Micah.

Suzanne Hurst est infirmière diplômée d’État titulaire d’un master de


Santé publique. Elle a vécu et a travaillé en Afrique occidentale et en
Afrique centrale pendant plus de 15 ans. À l’heure actuelle, elle travaille
en collaboration avec les églises des Assemblées de Dieu qui mettent en
œuvre, sous le patronage des églises locales, des actions de prévention
relatives aux questions de santé communautaire touchant le VIH/SIDA, le
paludisme et les maladies infantiles. À l’heure actuelle, elle vit à Kinshasa,
en République démocratique du Congo, avec son mari, Pat. Ils ont trois
enfants : Ben, Abby et Emily.

Équipe de développement
Une équipe chargée de l’élaboration des cours travaille sous la
direction du Comité des programmes d’études d’Espoir de l’Afrique.
L’équipe comprend les docteurs David Duncan, Carl Gibbs, Bill Kirsch
et John Easter, ainsi que Mmes Joy York et Joy Spain. Au nombre des
membres de l’équipe éditoriale figurent Tim Lord, Annette Duncan et
Sandy Eltringham. L’expertise de JoAnn Butrin, Emily Johns, Don Tucker
et Phil Malcolm a également été sollicitée à des fins de mise en page et
de vérification du contenu du cours.

— ix —
Remerciements

de Miriam Smith
Bien qu’il me soit impossible de remercier tous ceux et celles qui
m’ont influencée au cours des dix dernières années, je tiens toutefois à
mentionner le nom de certaines personnes qui, par l’intermédiaire de
leurs écrits, de leurs enseignements, de leurs raisonnements et de leur
vie, m’ont permis de mieux comprendre le sens véritable du ministère
holistique tel qu’il doit être exercé à travers le corps de Christ, Son Église.

Je suis éternellement reconnaissante à mes parents missionnaires


qui m’ont introduite pour la première fois au ministère interculturel
tandis que nous vivions en Afrique, au Tchad plus précisément. Ils ont
développé en moi un amour pour les autres cultures et m’ont donné
l’opportunité de voir l’impact que pouvait avoir le ministère holistique
sur une population frappée par la pauvreté.

Je suis tout particulièrement redevable à plusieurs penseurs et auteurs


phares qui m’ont soutenue lors de la préparation de ce cours de la Série
Découverte.

Le Dr Bryant Myers a formulé les principes et les pratiques du


développement transformationnel dans son livre Walking with the Poor

— xi —
[Marcher avec les pauvres]. J’ai surligné un grand nombre de passages de
chaque chapitre de cet ouvrage qui est devenu mon guide par excellence
lorsque j’enseigne sur le thème du ministère holistique à l’étranger. Le
Dr Myers a clairement exprimé des principes et des défis qui ne peuvent
nullement être ignorés lorsqu’on essaie de faire « du bien » aux autres.
Au fil des ans, je me suis efforcée de mettre en pratique ces principes,
et je suis constamment encouragée à réexaminer ce livre et à mesurer
mon travail à l’aune de son contenu. Je reconnais que mes pensées, mon
enseignement, mes écrits et mes pratiques sont fortement marqués par
les principes que m’a enseignés le Dr Myers dès le début. Son influence
sur ma vie est on ne peut plus évidente dans ce cours.

John Steward et son cours interactif intitulé Biblical Holism, Where God,
People and Deeds Connect [Le holisme biblique : où Dieu, les hommes et
les actions se rencontrent] m’ont permis de mieux comprendre le plan
holistique de rédemption de Dieu. La façon illustrée et méthodique à
travers laquelle il a expliqué le concept du holisme biblique a transformé
à jamais ma vision du monde. Ce cours est fortement influencé par ses
réflexions et ses illustrations pratiques.

Je n’aurais jamais entendu parler de ces grands penseurs sans l’aide


des cours que j’ai suivis à la Wheaton Graduate School sous l’égide
experte du Dr Levy Campbell, cours durant lesquels j’ai vécu plusieurs
moments de révélation alors qu’elle dévoilait de main de maître les
vérités soulignées par ces auteurs, et d’autres encore. Qui plus est, elle
m’a encouragée à mettre en pratique ces principes et a, depuis lors, été
une source d’encouragement et de conseil.

de Suzanne Hurst
Je tiens à remercier Don Tucker, JoAnn Butrin, Nancy Valnes, Brad
Tucker, Miriam Smith et d’autres collaborateurs au sein du réseau des
ministères de compassion de l’Action missionnaire des Assemblées
de Dieu pour leurs efforts de pionniers, leurs écrits et leur désir de me
conseiller dans le domaine du développement transformationnel. Ces
personnes ont largement contribué à promouvoir et à faire avancer le
mandat de l’Église qui est appelée à exercer un ministère holistique

— xii —
auprès des communautés et se sont investies corps et âme dans la
formation des autres et dans la promotion d’une stratégie exemplaire.

Je suis éternellement reconnaissante à mon merveilleux mari, Pat, et


à nos trois enfants, Benjamin, Abigail et Emily, qui ont été patients avec
moi lorsque j’étais stressée, qui m’ont encouragée lorsque j’étais abattue
et qui se sont même lancés dans l’action de lutte contre le VIH/SIDA en
apportant leur aide aux cliniques locales, en priant pour les malades et
en faisant passer le message aux personnes avec lesquelles ils entraient
en contact. Leur consécration à la tâche dès leur tout jeune âge a été pour
moi une grande source d’inspiration.

Pat a été mon supporter le plus ardent. Il n’a jamais douté de moi,
même lorsque je doutais de moi-même ; il m’a constamment encouragée
à aller toujours plus loin. Jamais autre partenaire n’aurait fait l’affaire !
Pat—nalingi yo mingi mpenza !

Plus important encore, je voudrais remercier notre Seigneur


Jésus-Christ qui, à travers Son œuvre et les méthodes qu’Il a utilisées
durant Son séjour sur la terre, nous a donné l’exemple le plus parfait
du développement transformationnel et du ministère holistique. Quel
privilège de pouvoir Le servir en Afrique !

— xiii —
Première partie :
Les bases bibliques
du développement transformationnel
C h a p i t r e 1 ����� Aider ceux qui souffrent : à qui de droit ? ;
comprendre la mission de l’Église ; la
rédemption selon Dieu ; la manifestation
concrète de Dieu ; la transformation et la
missio Dei
C h a p i t r e 2 ����� La Création ; la Chute, la rédemption, Jésus,
le Messie ; l’Église
C h a p i t r e 3 ����� Qui sont les pauvres ? ; les causes de la
pauvreté ; une perspective biblique de
la pauvreté ; la lutte de l’Église contre la
pauvreté
C H A P I T R E 1

La transformation
et la mission de l’Église

Aider ceux qui souffrent : à qui de droit ?

E
ncore un mort-né. La perte d’une récolte à cause de la sécheresse.
Victime du SIDA, un enfant devient orphelin. Les jeunes gens
sont au chômage. Les femmes ont du mal à nourrir leurs enfants.
Sécheresse. Famine. Tremblements de terre. Déforestation. Maladie.
Calamités. Guerre.

Malgré la croissance fulgurante de l’Église dans plusieurs pays du


monde entier, la souffrance causée par la présence toujours plus évidente
du mal dans ce monde ne peut passer inaperçue. Les problèmes qui
accablent notre monde aujourd’hui ne sont un secret pour personne.
Nous avons tous nos propres problèmes et nous connaissons des gens
qui se trouvent dans une situation bien pire que la nôtre.

En tant que pasteurs et membres d’églises, nous voulons nous


aider nous-mêmes et aider les autres, mais nous nous sentons souvent
submergés par les besoins et par le manque de ressources. Nous
sommes conscients des défis à relever pour pouvoir aider les pauvres et
les nécessiteux, mais nous ne nous sentons pas à la hauteur de la tâche.

—3—
Les bases bibliques du développement transformationnel

Nous savons que le péché et la rébellion contre Dieu sont à l’origine


du mal, y compris de la pauvreté. Nous sommes convaincus que la
réconciliation avec Dieu est le seul moyen de vivre en paix dans cette
vie, et dans l’au-delà. Nous savons que Dieu a placé les chrétiens dans le
monde afin qu’ils soient le sel et la lumière du monde. Étant en paix avec
Dieu, les chrétiens ont souvent tendance à vouloir aider à résoudre les
problèmes de la société.

L’Église universelle, qui représente le Royaume de Dieu ici-bas, doit


savoir quoi faire pour répondre aux besoins de ceux qui sont en proie à la
souffrance physique dans ce monde. Que doit faire l’église pour pouvoir
aider les pauvres à croître et à évoluer ? Quel est le rôle du pasteur local et
des membres de l’église dans la promotion de la santé et du développement
au sein des communautés locales ? Que dit la Bible à ce sujet ?

Il est facile pour les chrétiens de se soustraire à la responsabilité qui


est la leur de prendre soin des indigents, estimant qu’après tout cette
tâche appartient à quelqu’un d’autre. Peut-être pensons-nous qu’il
est du ressort du gouvernement de prendre soin des pauvres et des
malades de nos communautés. Ou encore, sommes-nous convaincus
que l’éradication de la pauvreté relève uniquement de la compétence de
certains organismes internationaux ? Mais que dit la Bible ? Que nous
enseigne notre Seigneur Jésus-Christ à travers Ses actions et Sa Parole ?

Les chrétiens doivent-ils laisser à des organismes laïques le soin


d’être des agents de changement positif et de transformation durable au
sein de nos communautés ? C’est souvent ce que nous attendons d’eux
et nous finissons par être déçus et exaspérés lorsque les problèmes de
notre société demeurent, et nous blâmons les autres pour les problèmes
de la communauté.

Les problèmes que constituent la pauvreté et la violence dans notre


monde ont fait l’objet de bien des débats. Nous avons tous participé
à des actions mises en œuvre par des organisations humanitaires
internationales et plusieurs autres organismes de développement.
Peut-être votre ville a-t-elle bénéficié directement d’une action de
développement. Peut-être des écoles ou des programmes de formation
à la lutte contre le VIH/SIDA ont-ils été mis en place dans votre région

—4—
Les bases bibliques du développement transformationnel

grâce à l’intervention d’un de ces organismes. Nous avons tous une


idée de ce en quoi devraient consister les activités de développement.
Certains d’entre nous sont satisfaits de ce que le gouvernement ou une
organisation humanitaire internationale a pu faire dans notre région.
D’autres, en revanche, ont l’impression de s’être fait berner par une
organisation qui n’a pas su tenir ses promesses.

Le gouvernement d’un pays et les organismes internationaux jouent,


chacun pour leur part, un rôle important au sein d’une communauté,
mais il est rare qu’ils s’intéressent à l’aspect spirituel de la vie d’une
personne. Des années durant, ils se sont efforcés d’aider les gens
à améliorer leur condition de vie et à sortir de la pauvreté, mais la
situation est toujours la même, voire pire. Malgré leur acharnement
à vouloir éradiquer les effets de la pauvreté comme, par exemple, la
malnutrition, l’eau insalubre, la violence ethnique ou la corruption, il
leur manque cependant un élément clé : la transformation du cœur ! Les
représentants du gouvernement vivent souvent loin du village auquel
ils sont rattachés et, par conséquent, sont incapables de développer les
relations de confiance nécessaires à un développement véritable et à
une transformation durable.

Certains affirment que l’Église doit uniquement cibler l’aspect spirituel


de la vie et confier au gouvernement et aux autres la charge de prendre
soin des problèmes physiques. D’après la Bible, que doivent faire les
chrétiens ? Nous devons sonder la Parole de Dieu afin de découvrir le
cœur de Dieu. Comment Dieu a-t-Il choisi de veiller sur les personnes
spirituellement et physiquement pauvres, désespérées et indigentes ? A-t-
Il laissé la charge des pauvres aux bons soins de ceux qui n’appartiennent
pas au Royaume de Dieu, ou bien a-t-Il confié à l’Église le mandat de
prendre soin des pauvres et des indigents ?

Les églises locales ne peuvent ni ne doivent tenter d’endosser la


responsabilité qui incombe au gouvernement. Que doivent donc faire
les pasteurs ? Les églises locales sont parfaitement bien placées pour
atteindre les multitudes au sein desquelles elles vivent et œuvrent car les
pasteurs et les membres des églises ont pu développer des relations de
confiance avec leurs communautés respectives. Les êtres humains et les
relations sont au cœur du développement véritable !

—5—
Les bases bibliques du développement transformationnel

Dieu a sommé les églises locales urbaines et rurales d’aimer tous


ceux qu’elles côtoient, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de leurs
murs. Le verbe aimer est un verbe d’action que manifeste le peuple de
Dieu lorsqu’il donne de son temps et de ses ressources pour pouvoir
atteindre ceux qui souffrent, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’église.
Les pasteurs qui ont pleinement conscience de l’amour de Jésus et du
style de ministère qu’Il pratiquait seront motivés pour s’impliquer dans
la lutte physique des âmes dont ils ont la charge.

Les églises qui exerceront un ministère auprès des indigents devront


relever plusieurs défis. Le but de ce cours est d’aider chacun de vous
à comprendre les fondements bibliques de la lutte contre la pauvreté
et également de vous préparer à venir en aide à votre communauté
de façons pratiques. N’importe qui peut prendre part à l’œuvre de
développement, mais seul le peuple de Dieu suscitera un développement
transformationnel à l’infini !

Comprendre la mission de l’Église


Le cœur de Dieu languit de racheter et de guérir ceux qui souffrent et
qui sont perdus. L’Église de Jésus-Christ est appelée à être les mains et
le cœur de Christ pour tous ceux qui sont perdus et qui souffrent, et ce,
de manière à glorifier Dieu. La mission de l’Église dans ce monde est de
faire et d’être tout ce que Christ Lui-même aurait fait et été s’Il avait été
présent en personne !

Le terme « mission » vient du mot latin mitto, lui-même dérivé du


grec apostello, qui signifie « envoyer » et qui, en français, donne le mot
apôtre. Dans le contexte laïque, le terme mission renvoie simplement au
fait de dépêcher quelqu’un dans un but bien précis. Dans le contexte
évangélique, la mission est regardée comme le but universel de Dieu
dans le monde. Certaines questions ont été soulevées concernant la
mission, à savoir se rapporte-t-elle à l’ensemble de l’intention divine
pour le monde, ou, plus précisément, à la tâche missionnaire que Dieu a
confiée à l’Église ?

Les croyants évangéliques ont tendance à utiliser le mot mission pour


décrire « tout ce que le peuple de Dieu, l’Église, doit être et faire dans le

—6—
Les bases bibliques du développement transformationnel

monde » et l’expression tâche missionnaire sert à décrire de façon précise


« le rôle de celui qui, en tant que représentant de son église d’origine,
est envoyé dans des lieux où Christ n’a pas encore été annoncé afin
d’amener de nouvelles âmes à la foi et de regrouper ces nouveaux
croyants en de nouvelles assemblées » (McQuilkin, 650).

Que nous parlions de la mission globale de l’Église ou, plus précisément,


de la tâche missionnaire, il est important de comprendre le désir ultime
de Dieu pour tous les hommes, qu’ils vivent tout près ou au loin.

Dans toute l’Écriture, du récit de la création à celui de l’apocalypse,


Dieu révèle Son plan de rédemption de l’Humanité, Sa mission dans
ce monde. Ce plan est souvent qualifié de missio Dei. Missio Dei est
une expression latine qui signifie littéralement « l’envoi de Dieu » ou
« la mission de Dieu ». La mission de Dieu dans ce monde consiste à
interpeler les nations afin de rétablir une alliance avec elles. Les croyants
évangéliques donnent une définition assez large de l’expression missio
Dei ; d’après eux, il s’agit de « tout ce que Dieu fait pour communiquer
Son plan de salut et tout ce que l’Église a été appelée à faire » (McIntosh,
633).

Dans son livre La mission à l’ère de l’Esprit, le Dr John York déclare


que « la mission de Dieu… est d’avoir un peuple racheté parmi les
nations » (56). Il affirme également que « le désir de Dieu d’avoir un
peuple qui le serve conformément aux stipulations de l’alliance est au
cœur de la missio Dei » (York, 29).

La rédemption selon Dieu


La Bible est l’histoire de l’interaction entre Dieu et les hommes ;
elle révèle la missio Dei, la mission de Dieu. Du récit de la création
retracé dans la Genèse à l’attente anticipée des nouveaux cieux et de
la nouvelle terre qui ressort du livre de l’Apocalypse, la Bible nous dit
ce que Dieu désire pour Ses enfants et ce qu’Il attend d’eux. La Bible, à
travers les histoires, les poèmes, les cantiques et les sermons, les aide
à comprendre la relation que Dieu désire entretenir avec les hommes
et la relation qu’Il souhaite qu’ils cultivent les uns avec les autres et
avec Sa création. Nous appelons rédemption tous les procédés mis en

—7—
Les bases bibliques du développement transformationnel

œuvre par Dieu au profit des êtres humains afin de les sauver de la
malédiction du péché et de la mort.

Grâce à une étude attentive des Écritures, nous arrivons à nous faire
une idée de ce que Dieu attendait de Son peuple. Tout au long de la Bible,
les divers prophètes, apôtres, disciples et Christ Lui-même enseignent
au peuple de Dieu — d’abord aux Israélites, puis à chacun d’entre nous
aujourd’hui — à se comporter d’une manière digne du véritable « peuple
de Dieu ».

Dieu a une vision parfaite de l’avenir ; Il sait ce que sont l’amour et


l’harmonie véritables. Il sait également à quel point le monde est pécheur,
brisé et opprimé. C’est pour cela qu’en entendant les gémissements du
peuple d’Israël tenu en esclavage en Égypte, Il le délivra du joug de l’ennemi.
C’est également pour cela qu’Il envoya Son Fils unique pour racheter tous
ceux qui allaient croire en Lui de la captivité du péché et de la malédiction.
Dieu désire racheter, sauver et rétablir les hommes de manière à ce qu’ils
puissent mener une vie conforme à l’intention originelle.

Mais qu’est-ce que la rédemption aux yeux de Dieu ? Comment désire-


t-Il que Ses enfants vivent et communiquent avec Lui et les uns avec les
autres ? Quelle est l’histoire de l’humanité selon la perspective divine ?
Quelle est la mission de l’Église ? Que doivent être et que doivent faire
ceux que Dieu a envoyés dans le monde ?

Pour trouver ces réponses, nous devons sonder les Écritures. Avant
d’entamer l’activité suivante, pliez une feuille de papier en deux dans le
sens de la longueur. Sur un côté, au haut de la page, écrivez : « Qu’est-ce
qui plaît à Dieu ? » De l’autre côté, écrivez : « Qu’est-ce qui ne plaît pas
à Dieu ? »

Ensuite, choisissez dix des passages bibliques suivants tirés de


l’Ancien Testament. Nous avons choisi ceux-ci car ce sont des textes
représentatifs, bien que l’on puisse en ajouter d’autres. En lisant chaque
passage, notez, sur votre feuille de papier, les actions et les attitudes qui,
selon l’Écriture, plaisent ou non à Dieu. Qu’est-ce qui semble préoccuper
Dieu dans les passages suivants ? Remarquez à quel point Dieu se soucie
du bien-être physique et social de Son peuple. Quels sont les mots

—8—
Les bases bibliques du développement transformationnel

qui, dans ces passages, se rapportent au salut, à la rédemption ou au


Royaume de Dieu ?

Lévitique 6.1–7 ; Deutéronome 15.11 ; Psaume 33.5 ;


Psaume 72.1–14 ; Psaume 89.15 ; Psaume 146 ; Proverbes 2.9 ;
Proverbes 21.3, 13 ; Proverbes 28.27 ; Ésaïe 1.14–18 ; Ésaïe 3.13–15 ;
Ésaïe 9.6 ; Ésaïe 16.3–5 ; Ésaïe 24.1–9 ; Ésaïe 32 ; Ésaïe 41.17–20 ;
Ésaïe 42.1–7 ; Ésaïe 56.1–2 ; Ésaïe 58 ; Ésaïe 59 ; Ésaïe 61.1 ;
Jérémie 7.1–7 ; Jérémie 9.23–24 ; Jérémie 22.1–5, 13–16 ;
Ézéchiel 16.48–49 ; Ézéchiel 18.1–9 ; Amos 5 ; Michée 6.8 ;
Zacharie 7.8–11 ; Malachie 3.5
Figure 1.1

À l’issue de l’exercice précédent,

• Lisez le premier chapitre du livre d’Ésaïe qui raconte la rébellion de


Juda et d’Israël. Dans les versets 11 à 15, Dieu déclare à quel point
l’adoration des Israélites Lui fait horreur. Il dit que leurs sacrifices
et leurs offrandes ne Lui sont pas agréables. Mais que leur dit-Il de
faire ? Il ne leur donne pas une liste d’instructions pour les aider à
mieux L’adorer ou à Lui offrir de meilleurs sacrifices. Au contraire,
au verset 17, Il leur dit ceci : « Efforcez-vous de pratiquer le bien,
d’agir avec droiture, assistez l’opprimé, et défendez le droit de
l’orphelin, plaidez la cause de la veuve » (version Segond, dite
« à la Colombe »). C’est ainsi que le peuple doit adorer Dieu. À
présent, considérez votre communauté. Comment les veuves et
les orphelins y sont-ils traités ? L’Église plaide-t-elle leur cause ?

• Lisez Ézéchiel 16.49. Dans ce passage, il est dit que les habitants
de Sodome, connus pour leur impudicité, étaient orgueilleux,
vivaient dans l’abondance et dans une insouciante sécurité ;
ils ne soutenaient pas la main du malheureux ni de l’indigent.
Leurs péchés étaient multiples ; pourtant, ce que Dieu a choisi
de leur reprocher, c’était d’avoir méprisé les pauvres ! En lisant
l’Écriture, il est évident que Dieu désire que Ses enfants s’érigent
en défenseurs de la justice et de la droiture, de la miséricorde, de
la compassion, des veuves et des orphelins, des étrangers et des

—9—
Les bases bibliques du développement transformationnel

pauvres. Il se préoccupe également de la sainteté et de l’intégrité


de chacun.

Jésus, le Messie, nous sert d’exemple. Il a pleinement accompli la Loi


et les Prophètes. Jésus est Lui-même le reflet de la rédemption selon
Dieu. Sa vie tout entière et Son ministère sont l’exemple parfait d’une
vie rachetée, sainte, juste et miséricordieuse. En mourant sur la croix,
Il nous a permis, une fois pour toutes, d’être pardonnés de nos péchés
et Il a réconcilié toutes choses avec Dieu. Bien qu’en tant que croyants
— Ses enfants, Son corps — nous ne puissions sauver les hommes
du péché, il est de notre ressort de leur indiquer la voie qui mène au
Messie, qui est le Sauveur et le grand Médecin. Comment devons-nous
donc nous y prendre ? Nous devons prendre exemple sur Christ qui,
lorsqu’Il était sur terre, a Lui-même tracé la voie à suivre pour accéder à
Dieu : Il se préoccupait du corps, de l’âme et de l’esprit de tous ceux qu’Il
rencontrait. Nous nous efforçons de calquer notre vie et notre ministère
sur Son exemple. Jésus a confié Sa mission dans le monde d’abord aux
apôtres, puis à nous, Son Église.

Considérez une fois de plus votre foyer et votre église. En quoi votre
église reflète-t-elle la mission de rédemption qui nous a été confiée dans
l’Écriture ? Que fait-elle pour s’acquitter de la missio Dei, la mission de
Dieu dans ce monde ?

La manifestation concrète de Dieu


Dieu accomplit Sa mission par l’intermédiaire de Son peuple. L’Église
est le nouveau peuple de Dieu. À ce titre, nous représentons la plénitude
du Royaume de Dieu ici-bas. Où que nous allions, nous devons revêtir les
attributs de Dieu au sein de nos communautés. En ce sens, nous pouvons
dire que nous sommes les témoins de Christ. En tant que pasteur ou
implanteur d’églises, vous avez été envoyé afin de réaliser les desseins
de Dieu dans le monde.

Lisez l’étude de cas suivante, puis répondez à chaque question


dans votre cahier. (Une autre étude de cas est également disponible en
appendice ; elle s’intitule Étude de cas de Hayyu et porte principalement
sur les peuples récalcitrants.)

— 10 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Étude de cas
Vous êtes pasteur d’une petite église située dans un village
proche de la capitale de votre pays. Il y a quelques chrétiens dans
la communauté, mais il y a également beaucoup de musulmans
qui refusent d’accepter le témoignage de l’église. Bon nombre des
habitants du village consultent un puissant sorcier pour les aider
à résoudre leurs problèmes, mais le prix de ses consultations est
exorbitant. Beaucoup de jeunes sont au chômage. Vous, votre femme
et les membres de l’église vous faites du souci pour les membres de
la communauté qui ont beaucoup de problèmes et pour les nombreux
enfants dont les besoins demeurent inassouvis.

Votre église compte environ 35 membres. Il y a une autre église


dans le village, mais vous ne voyez son pasteur que très rarement.
Vous prêchez souvent sur les méfaits causés par l’inconduite sexuelle ;
toujours est-il que les cas de VIH/SIDA sont de plus en plus nombreux et
le nombre d’enfants vulnérables ne cesse de croître chaque jour. Vous
aimeriez bien que le gouvernement fasse quelque chose. Vos relations
avec les dirigeants et autres membres de la communauté sont au beau
fixe. Pour la plupart, les membres de la communauté sont conscients
des problèmes, mais ils ne savent pas vraiment comment répondre aux
besoins des enfants et de leurs familles.

Le village compte environ entre 2 000 et 3 000 habitants. La population


active se compose essentiellement d’agriculteurs et d’ouvriers. Quelques
femmes du village ont monté une petite coopérative de fabrique de pain
qu’elles vont vendre à la capitale. Cette entreprise a été créée il y a un an
et demi environ et les affaires commencent tout doucement à produire
quelques bénéfices. Le village est suffisamment proche de la capitale
pour que l’on puisse se rendre à son marché. Il y a une école dans le
village pour laquelle les enfants ont à payer des frais d’inscription et des
frais mensuels ; ils doivent également acheter leurs fournitures scolaires.
L’année dernière, de nombreux enfants ont dû abandonner l’école parce
qu’il leur fallait s’occuper de leurs parents malades, travailler dans les
champs à plein temps et prendre soin de leurs petites sœurs ou petits
frères. Résultat, beaucoup d’entre eux ne reçoivent aucune éducation
et il semblerait même qu’ils soient moins bien nourris qu’il y a deux ou
trois ans.

— 11 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

De nombreux membres de la communauté sont tombés malades—


souffrant pour la plupart de paludisme, de problèmes d’estomac, de
tuberculose, de malnutrition ou du VIH/Sida. Or, il n’y a aucun centre
de soins dans le village. Les réserves en nourriture s’amenuisent peu
à peu à cause de la maladie ou de la mort de certains agriculteurs.
(Adapté à partir des documents publiés dans le cadre de Quest for
Excellence, 2005.)

Questions
1. Que feriez-vous dans ce village pour que le message de la
rédemption selon Dieu puisse y être apporté ?
2. Comment pourriez-vous vous y prendre ?
3. D’après vous, comment les habitants du village réagiront-ils ?
4. À quels problèmes vous attendez-vous à être confrontés ?

La transformation et la missio Dei


La situation présentée dans l’étude de cas précédente est assez
courante en Afrique. Pour que l’Église puisse annoncer la bonne nouvelle
de la rédemption de manière efficace à tous les peuples d’Afrique,
elle doit trouver des moyens efficaces d’aider les gens à appliquer les
principes du Royaume de Dieu au quotidien. Nous avons vu que la missio
Dei, la mission de Dieu, concerne la vie tout entière. Cela signifie que
nos méthodes d’évangélisation et nos pratiques missionnaires doivent
également toucher chaque aspect de la vie humaine. Pour pouvoir
réussir dans notre entreprise, nous devons prendre exemple sur Jésus
Lui-même. Tout d’abord, Il nous a aimés. À notre tour, nous devons
accomplir la mission de Dieu par amour pour Dieu et pour notre prochain
(Matthieu 22.37–40). C’est là la première étape de la réussite. Ensuite,
Jésus S’est personnellement investi dans la vie des gens et, de ce fait,
a entraîné une transformation totale de leur façon de penser, de leur
façon de voir le monde, de leurs convictions, de leur attitude et de leur
comportement. C’est là notre but ultime !

Le mot transformation renvoie simplement à l’idée de « changement ».


Mais lorsque nous parlons de susciter un changement, il est important de
préciser en quoi consistera le changement.

— 12 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Lorsque nous disons que la mission de l’Église consiste en une


transformation, nous voulons parler d’un « changement bien spécifique »,
un changement pour aboutir à quelque chose qui plaira à Dieu. Un
changement doit s’opérer dans la vie des gens afin qu’ils puissent mener
une vie conforme au désir de Dieu.

« Selon la conception biblique de la vie humaine, la transformation


est donc le changement d’un état de l’existence humaine contraire aux
desseins de Dieu à un autre au sein duquel les hommes pourront mener
une vie en harmonie avec Dieu » (Samuel et Sugden, 265).

Paul Hiebert en a conclu que la transformation n’est pas une question


de technologie mais, au contraire, le « remaniement de la vision, des
valeurs et des buts de la communauté » (90).

Avant d’essayer de changer le comportement, les pensées, les


croyances ou la vie des hommes, nous devons déjà commencer par savoir
et comprendre où ils en sont dans leur vie et leur donner une vision de
quelque chose de meilleur. C’est précisément ce que fait la Parole de Dieu
lorsque nous l’étudions et lorsque nous comprenons le formidable plan
de rédemption de Dieu. Il nous a donné la vision d’un avenir meilleur et
la possibilité de vivre aujourd’hui même une vie meilleure.

— 13 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous avez terminé l’étude du premier chapitre de ce cours,
posez-vous des questions du genre « En quoi la missio Dei me concerne-t-elle
et concerne-t-elle mon église ? » et « Comment suis-je censé comprendre la
sempiternelle question : ‘Suis-je le gardien de mon frère ?’ »

1. Prenez l’exemple de votre ville ou de votre village. À quoi ressemble-


t-elle/il ? À présent, imaginez-la/le tel(le) que Dieu l’envisage. En
quoi ces deux images diffèrent-elles ?

2. En un seul mot, résumez le but ultime de l’œuvre missionnaire.

3. Établissez une comparaison et un contraste entre le rôle des


organismes gouvernementaux et celui de l’Église pour répondre
aux besoins humanitaires dans votre pays et votre communauté.

4. Que diriez-vous à ceux qui affirment que l’Église doit uniquement


se préoccuper des besoins spirituels des hommes du fait que le
gouvernement se charge de leurs besoins physiques ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 14 —
C H A P I T R E 2

Comprendre
le holisme biblique

L
e holisme est un terme utilisé pour décrire un système de pensée.
Ce phénomène n’est pas centré sur les actions mais sur le système
fondamental de pensée qui régit les actions. En tant que chrétiens
à l’œuvre au sein de l’Église, nous devons avoir recours à une approche
holistique si nous voulons établir un dialogue avec ceux qui sont dans le
besoin et avoir un impact sur leur vie sociale, émotionnelle et physique.

Dans le chapitre précédent, nous avons vu que Dieu a une vision


pour Son peuple, un plan de rédemption qui, entre autres, suscitera des
changements dans chaque domaine de l’existence. Dieu désire opérer
une transformation holistique dans la vie de tous les êtres humains. Il
souhaite que les hommes se confient en Christ et que, de ce fait, ils
puissent naître de nouveau au sein du Royaume de Dieu ; c’est ce que
nous appelons la naissance spirituelle. Ce renouveau spirituel entraînera
également des changements d’ordre physique, affectif et relationnel.
Dieu est un Dieu holistique ; Il s’intéresse à chaque aspect de notre vie !
Lorsque nous entrons dans le ministère, notre désir doit être également
d’assister à une transformation holistique (totale) de chaque aspect de la
vie humaine. Notre ministère doit toucher tant le spirituel que le physique.

— 15 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Le terme grec holos signifie « entier » ou « complet ». En français, nous


nous sommes inspirés de ce terme pour créer l’adjectif « holistique ». Par
conséquent, le mot holistique signifie tout bonnement « venir en aide à la
personne tout entière » ; nous devons toucher non seulement son esprit,
mais aussi son corps, ses pensées, son âme et ses émotions.

Il est important pour les chrétiens de savoir que leurs pensées et leurs
actions sont solidement ancrées sur des bases bibliques. La Bible somme-
t-elle véritablement les chrétiens d’exercer un ministère holistique, c’est-
à-dire de toucher le corps, l’âme et l’esprit des hommes ? Les églises
locales sont-elles censées s’intéresser au bien-être tant physique que
spirituel des personnes dont elles ont la charge ?

La Création
Pour pouvoir répondre à cette question, revenons un instant sur le
récit de la Création. Les diagrammes et les explications suivants sont
adaptés de l’atelier interactif de John Steward intitulé Biblical Holism,
Where God, People and Deeds Connect [Le holisme biblique : où Dieu, les
hommes et les actions se rencontrent.] (Si vous le pouvez, procurez-vous
ce livre qui propose une étude exhaustive du holisme biblique.)

DIEU

LES HOMMES LA TERRE

Figure 2.1

Au commencement, toute la création et toutes les créatures de Dieu


vivaient en harmonie les unes avec les autres. Telle était la vie humaine
que Dieu nous destinait. Régnait alors le shalom, un mot hébreu

— 16 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

qui signifie plénitude. En français, ce terme est également traduit par


« complétude, paix, santé, et même salut ».

Le concept de shalom est basé sur trois principes fondamentaux :

1. Le monde et tout ce qu’il contient appartiennent à Dieu.


2. Dieu se soucie de tous les hommes sans exception.
3. La soumission au règne de Dieu mène à la paix, à la justice et à des
vies véritablement comblées.

Si le shalom véritable ne sera pleinement rétabli qu’au moment du


retour de Christ et de la création des nouveaux cieux et de la nouvelle
terre, chaque chrétien doit néanmoins s’efforcer de restaurer le shalom
dans ses relations avec les autres et avec son environnement. C’est là le
but ultime du développement transformationnel.

DIEU

Relations Possession

Seigneurie
LES HOMMES LA TERRE
Intendance
Figure 2.2

L’harmonie régnait au moment de la Création. Dieu le Créateur


est Tout-Puissant ; Il est le Maître de toute la création. Dieu et les
hommes jouissaient d’une relation parfaite. Dieu se promenait et
s’entretenait avec Adam et Ève dans le jardin ; Il leur avait confié la
tâche de prendre soin des ressources de la terre afin qu’il puisse y en
avoir assez pour tout le monde. Adam et Ève étaient les intendants
de toute la nature, et cela leur convenait ; ils étaient régisseurs et
non propriétaires.

— 17 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Bien entendu, la terre continue d’appartenir à Dieu qui l’a créée, mais
Satan s’efforce par tous les moyens de s’approprier ce qui est à Dieu. Il
a fait croire aux hommes qu’ils n’avaient pas à se contenter d’être les
« intendants » de la terre car, après tout, c’était à eux qu’elle appartenait.

Dans le jardin d’Éden, Dieu et les êtres créés jouissaient d’une relation
parfaite ; ils vivaient en parfaite harmonie avec le reste de la création.
Adam et Ève obéissaient à Dieu ; ils L’adoraient et Le considéraient
comme le Maître de chaque aspect de leur vie. Cette vérité constitue le
fondement du holisme biblique.

Reconnaître la souveraineté de Dieu dans chaque aspect de l’existence


est une caractéristique du holisme biblique ; rien n’échappe à Son
autorité. D’après Steward, « le holisme biblique se manifeste lorsque des
personnes, qui jouissent d’une bonne relation avec Dieu et avec leurs
prochains, gèrent de manière responsable les ressources qui leur ont
été confiées — en montrant bien qu’elles appartiennent à Dieu » (138).
D’un point de vue pratique, cela signifie que, lorsque nous prenons soin
de nos prochains, en fait, nous manifestons notre amour à l’égard de
Dieu et nous nous soumettons à Ses commandements. Par conséquent,
les chrétiens qui adoptent une approche holistique selon la Bible auront
à cœur de toucher chaque aspect de la vie d’une personne, et pas
seulement son âme.

Dans son livre La mission à l’ère de l’Esprit, le Dr John York a déclaré


que l’un des thèmes principaux de l’Écriture a trait à la souveraineté, à
l’autorité et au règne de Dieu sur Son royaume éternel et universel. Le
Psaume 100 nous dit de pousser vers l’Éternel des cris de joie car c’est
Lui qui nous a faits… Il est le Créateur et le Souverain de la terre entière !
L’autorité de Dieu sur la création et sur les créatures mène à la paix, à la
justice et à des vies comblées.

La Chute
La paix merveilleuse qui régnait dans le jardin d’Éden n’a
malheureusement pas duré. Satan a induit Adam et Ève en erreur, et
le péché a fait son apparition dans le monde. Quelles ont donc été les
conséquences du péché ?

— 18 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

La désobéissance et le péché de l’homme sont venus perturber


l’harmonie qui prédominait dans chaque domaine de la vie. Adam et
Ève ont fui Dieu et la terre a été maudite, certes, mais Dieu n’a pas
abdiqué Son autorité en tant que propriétaire de la terre entière, fait que
les hommes et les dominations ont choisi d’ignorer. Le péché a brisé
la relation intime que Dieu entretenait avec l’homme ; à cause de cela,
Adam et Ève ont fui la présence de Dieu. C’est cet aspect de la Chute que
les chrétiens identifient en premier ; cependant, nous voyons également
que la Chute a creusé un fossé entre Adam et Ève sur le plan relationnel.
Tout à coup, leur relation innocente a pris une tournure différente au point
qu’ils éprouvèrent le besoin de se couvrir car leur nudité les mettait mal
à l’aise. Le jugement de Dieu contre le péché a également eu un impact
sur la terre étant donné que l’homme a cessé d’en prendre soin comme il
faut. Au lieu de gérer ses vastes ressources pour le bien de l’humanité, les
hommes sont devenus avides d’argent et se sont mis à exploiter la terre
afin d’en tirer profit. À l’origine, Dieu voulait que les hommes prennent
soin de la terre et jouissent des ressources qu’elle avait à leur offrir ; au
lieu de cela, les hommes pensaient pouvoir se l’approprier et s’enrichir à
ses dépens. Il n’est aucun aspect de la Création qui n’ait été entaché par
la Chute ! Les conséquences du péché ont eu un impact holistique et ont
affecté tous les domaines de la vie !

Dieu continue d’être le Seigneur de toute la Création, mais la plupart


des hommes ont refusé de reconnaître Son autorité et de se soumettre à
Lui. Le péché est à l’origine de la destruction du shalom et a entraîné la
jalousie, la haine, l’ethnocentrisme, les rivalités, l’injustice, la violence et
les guerres. Il ne peut y avoir de shalom lorsque les hommes s’obstinent
à vivre dans le péché et à faire le mal. Le renouvellement de la droiture
et de la justice est essentiel au rétablissement du shalom. Sur le plan
biblique, Dieu appelle les chrétiens à rétablir paix et harmonie dans
chaque aspect de leur vie ! Pour cela, ils doivent accepter Dieu comme
le Seigneur de leur vie spirituelle et Lui confier chaque activité de leur
vie quotidienne.

La rédemption
Heureusement, Dieu n’a pas livré les hommes à leur sort dans un
monde détruit par le péché. Il a élaboré un plan de rédemption qui,

— 19 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

comme l’a affirmé Steward, visait à neutraliser les effets de la Chute de


l’homme. Tout d’abord, Dieu a choisi Abraham et a promis de faire de ses
descendants une nation, un peuple que Dieu bénirait afin qu’à leur tour
toutes les familles de la terre puissent être bénies en lui (Genèse 12.3 ;
18.18 ; 22.18 ; 26.4 ; 28.14). Dieu voulait que la nation d’Israël soit un
témoin holistique de Son plan de rédemption pour le monde païen. Dieu
a donné un pays à Son peuple, un pays où coulaient le lait et le miel.
Dieu a confié à Moïse des lois pour gouverner chaque domaine de la vie
d’Israël afin que les Israélites puissent à tous égards montrer au reste du
monde l’exemple d’une vie rachetée et d’une relation rétablie avec Dieu,
mais aussi comment utiliser la terre d’une manière conforme au désir de
Dieu et à quel point il était important de savoir que la terre était un don
de Dieu offert à tous, un don à utiliser en fonction des principes érigés
par Dieu.

Le désir le plus cher de Dieu était de rétablir une relation intime


avec Son peuple. Lors de notre étude de la théologie biblique, nous
avons bien vu que ce thème est repris à travers toute l’Écriture, de la
Genèse à l’Apocalypse. Dès le début, Dieu a dit à Abraham : « J’établirai
mon alliance entre moi et toi, … ce sera une alliance perpétuelle… »
(Genèse 17.7). Jean le disciple a ajouté ceci : « Et j’entendis du trône une
forte voix qui disait : Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes ! Il
habitera avec eux, et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec
eux » (Apocalypse 21.3). Le Dr John York nous rappelle que « le désir de
Dieu d’avoir un peuple qui le serve conformément aux stipulations de
l’alliance est au cœur de la missio Dei » (29).

Dans son livre Living as the People of God, Christopher Wright insiste
sur la nature holistique du plan de rédemption de Dieu à travers la nation
d’Israël. Exode 20 cite les Dix Commandements. Lisez les chapitres 21 à 23
du livre de l’Exode. Chacun de ces chapitres a trait aux lois économiques
et sociales que Dieu a imposées à Israël. Peut-être avons-nous tendance
à ne pas tenir compte de ces lois sociales, politiques et économiques
parce que nous les considérons comme insignifiantes, mais détrompez-
vous ; elles constituaient un signe extérieur des rapports internes du
peuple d’Israël avec Dieu. Les prophètes de l’Ancien Testament tenaient
le peuple pour responsable des règles de l’alliance devant Dieu. En fait,
Dieu envoya le prophète Ésaïe vers Son peuple afin que ce dernier sache

— 20 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

que l’adoration qu’il Lui avait vouée au jour des expiations ne lui avait
pas été agréable. Le chapitre 58 du livre d’Ésaïe rapporte la réprimande
d’Ésaïe adressée au peuple d’Israël :

Que nous sert de jeûner,


si tu ne le vois pas ?
De mortifier notre âme,
si tu n’y as point égard ?
Voici, le jour de votre jeûne, vous vous livrez à vos penchants,
Et vous traitez durement tous vos mercenaires...
Voici le jeûne auquel je prends plaisir :
Détache les chaînes de la méchanceté,
Dénoue les liens de la servitude,
Renvoie libres les opprimés,
Et que l’on rompe toute espèce de joug ;
Partage ton pain avec celui qui a faim,
Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile ;
Si tu vois un homme nu, couvre-le,
Et ne te détourne pas de ton semblable.

Ces passages de l’Écriture nous aident à réaliser à quel point, aux


yeux de Dieu, il est important pour nous d’aimer notre prochain, car
cela montre à quel point nous L’aimons Lui-même. Morris Stuart dit ceci :
« Il ne doit pas y avoir de séparation entre adoration et vie au sein de la
communauté. Dieu ne peut agréer l’adoration de celui ou de celle qui
demeure indifférent(e) à l’affliction des autres et qui ne recherche pas la
justice » (Steward, 142). La relation d’une personne avec Dieu s’évalue
à l’aune de son attitude à l’égard de son prochain et de ses ennemis !
Le plan de rédemption de Dieu, qui a débuté avec Israël, était un plan
holistique qui influait sur chaque aspect de l’existence !

Jésus, le Messie
Malheureusement, les Israélites n’ont pas obéi aux commandements
de Dieu ; ce dernier a cependant envoyé Jésus, le Messie qui, Lui, a obéi
en tous points à la loi et l’a accomplie. En Christ Jésus, tous les aspects
du plan holistique de rédemption de Dieu se sont réalisés. Sa vie et Son
ministère sont la concrétisation parfaite du plan de rédemption tel que

— 21 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Dieu l’avait conçu. Le royaume et la bénédiction tant attendus se sont


manifestés à travers l’autorité et la puissance de Jésus, le roi davidique
qui règne à jamais (York, 74). Lisez ce que dit Jésus au sujet de la mission
que le Père Lui a confiée dans ce monde :

… on lui remit le livre du prophète Ésaïe. L’ayant déroulé, il trouva


l’endroit où il était écrit :

L’Esprit du Seigneur est sur moi,


parce qu’il m’a oint
pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ;
Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé,
pour proclamer aux captifs la délivrance,
et aux aveugles le recouvrement de la vue,
pour renvoyer libres les opprimés,
pour publier une année de grâce du Seigneur.
(Luc 4.17–19)

Lorsque Jésus a annoncé la venue de l’« année de grâce du Seigneur », les


Juifs pensaient qu’Il annonçait l’année du jubilé, qui était célébrée après une
période de sept fois sept années (Kraybill, 91). Au cours de cette année-là,
les Hébreux étaient censés rendre aux propriétaires d’origine les terrains que
ces derniers leur avaient vendus cinquante ans plus tôt. Les dettes étaient
annulées et les esclaves affranchis. L’intégration d’un tel mandat dans les lois
de Dieu pour Israël montrait à quel point Dieu s’intéressait à la justice sociale.
Le jubilé entraînait des bouleversements sociaux considérables. Les Israélites
avaient lancé un appel à la justice et à la délivrance de leurs oppresseurs, et
Dieu les avait entendus. Tout ce que Dieu désirait pour Son peuple, Israël,
s’est matérialisé en la personne et en l’œuvre de Jésus.

Jésus proclama une année de jubilé au cours de laquelle les opprimés


seraient libérés, les aveugles recouvreraient la vue, les captifs obtiendraient la
délivrance, et les hommes recevraient le pardon de leurs péchés. Les paroles
de Jésus montrent à quel point Dieu désirait que les hommes soient sauvés.
Jésus Lui-même allait être l’instrument du rétablissement des relations entre
Dieu et les hommes. Jésus annonça à ceux qui L’écoutaient que le Royaume
de Dieu était proche. Dès lors, la relation avec Dieu pouvait être rétablie à
travers le pardon des péchés, les rapports avec nos semblables pouvaient

— 22 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

être renouvelés grâce à la rupture des liens de l’oppression et de l’injustice,


et toute la création allait, une fois de plus, pouvoir témoigner du fait que Dieu
est l’Auteur même du rétablissement et de la délivrance.

Dans son épître aux Colossiens, voici ce que dit l’apôtre Paul au sujet
de Christ :

Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création.


Car en lui ont été créées toutes les choses qui sont dans les cieux et
sur la terre, les visibles et les invisibles… Il est avant toutes choses,
et toutes choses subsistent en lui. (1.15–17)

Jésus est Lui-même le reflet exact de Dieu. Il toucha le corps, l’âme, la


pensée et l’esprit des hommes. Les chrétiens ne doivent-ils pas en faire
de même ? L’apôtre continue en ces termes :

Il est la tête du corps de l’Église ; il est le commencement, le


premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier… il a
voulu par lui réconcilier tout avec lui-même, tant ce qui est sur la
terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le
sang de sa croix. (Colossiens 1.18–20)

La paix est le fruit de l’œuvre de réconciliation de Dieu à travers


Christ, une œuvre qui touche chaque aspect de l’existence. La paix, le
shalom, sera rétablie dans la vie de tous les peuples, quelle que soit leur
communauté, dès lors qu’ils réaliseront que l’onction du Saint-Esprit
peut satisfaire leurs besoins physiques, sociaux, affectifs et spirituels
(Moreau, 966).

Ce passage de l’épître aux Colossiens nous aide à comprendre que le Christ


de la création est également le Christ de l’Église ! Il est le Souverain de toute la
terre, le Maître suprême de toutes les dominations et de tous les pouvoirs, de
toute la science et du monde naturel, et de toute émotion humaine !

L’Église
L’Église, appelée la nouvelle Israël, constitue la communauté mondiale
de ceux et celles qui se soumettent à l’autorité de Christ. Il ne s’agit pas

— 23 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

d’un bâtiment ; au contraire, l’Église de Jésus-Christ consiste en un corps


de croyants qui ont remis chaque aspect de leur vie entre les mains de
Christ. Les membres des églises individuelles se rassemblent dans des
bâtiments, certes, mais il n’y a pas vraiment besoin d’un bâtiment pour
former une église ! L’Église, ce sont les membres qui la constituent, ceux
qui sont nés de nouveau et qui sont devenus le nouveau peuple de Dieu.
Seuls les êtres humains peuvent aimer Dieu.

Parce qu’ils connaissaient les lois de Dieu concernant Israël et son


rôle en tant que nation, et parce qu’ils étaient conscients de l’importance
d’appartenir au peuple de Dieu, les membres de l’Église primitive,
le peuple de Dieu, vivaient en communion les uns avec les autres et
partageaient leurs ressources. Le mot grec koinonia est généralement
traduit par « communion ». Il se construit à partir de la racine koinon,
terme qui renvoie aux relations sociales et économiques entre chrétiens,
et révèle un système de partage pratique et coûteux (Wright, 98). Wright
fait remarquer que la communion dont il est question dans le Nouveau
Testament prend sa source dans l’éthique socioéconomique de l’Ancien
Testament (98). Il ajoute ceci :

La communion fraternelle, telle que le Nouveau Testament nous la


décrit en termes détaillés, riches et concrets, a, pour le chrétien,
des implications morales et théologiques semblables à celles de la
prise de possession du pays promis par les Israélites de l’Ancien
Testament. L’une et l’autre font partie intégrante du plan de
rédemption… Le but de l’exode était de pouvoir jouir de la riche
bénédiction de Dieu dans Son ‘bon pays’ ; le but de la rédemption
à travers Christ est la manifestation d’‘un amour fraternel sincère’
(1 Pierre 1.22), et de tout ce que cela implique dans la pratique.
(98)

L’Église est définie par la communauté fraternelle et l’adoration de


ses membres. S’intégrer dans la communauté des croyants, ce n’était
pas simplement une question d’interdépendance spirituelle mais plutôt
la proclamation de son appartenance à la famille de Dieu et de son
acceptation des privilèges et des responsabilités afférents à ce statut.
Aucun membre de la famille ne doit demeurer seul lorsqu’il a besoin de
réconfort ; aucun ne doit rester sur sa faim tandis que les autres sont

— 24 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

repus ; aucun ne doit souffrir de l’injustice lorsque les autres membres


sont libres. Les croyants sont le corps de Christ, les membres d’une
communauté qui, à travers leur vie, reflètent la nature et le caractère de
Dieu et attirent les nations à Lui !

Jésus jeta les bases d’un nouveau royaume en mourant sur la Croix,
en ressuscitant et en s’asseyant à la droite du Père. Ce royaume a déjà
commencé mais il ne s’est pas encore manifesté dans toute sa puissance.
Le Royaume de Dieu se compose de tous ceux et celles qui s’en remettent
à l’autorité et au pouvoir de Dieu ; il n’est pas encore de ce monde.
Un jour, Jésus reviendra sur la terre pour rassembler Son peuple, punir
les méchants, exercer Son hégémonie sur chaque dirigeant et chaque
royaume de la terre, et créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre.

À l’heure actuelle, nos églises ne sont pas « le royaume », mais elles


sont censées être un signe annonciateur du Royaume de Christ à venir.
Les communautés de croyants qui composent l’Église sont considérées
comme le « peuple du royaume ». Elles sont remplies du Saint-Esprit et
sont les représentantes du Royaume de Dieu dans ce monde ! Des églises
sont implantées lorsque les croyants réalisent qu’ils doivent soumettre
leur vie à l’autorité de Dieu. En tant qu’enfants du Roi, ils s’unissent sous
la bannière du peuple de Dieu dans le but de respecter l’ensemble des
principes institués par Dieu en vue de la communion (koinonia) au sein de
Son Royaume, reconnaissant ainsi Christ comme le Seigneur de leur vie
tout entière. Comme nous l’avons vu dans l’évangile de Matthieu, lorsque
Jésus guérissait les malades, pardonnait les pécheurs ou nourrissait
ceux qui avaient faim, Il en profitait également pour « prêcher la bonne
nouvelle du royaume » ! Lorsque les chrétiens, le corps de Christ, sont
présents, nous pouvons dire que « le royaume de Dieu est proche ». À
présent, en tant que représentants du royaume, lorsque nous tendons
la main à ceux qui souffrent et lorsque nous les touchons et les aimons,
nous voulons nous unir à Jésus et dire : « Recevez l’amour tel qu’il est
pratiqué dans le Royaume de Dieu ». L’amour est le principe directeur de
la loi du Royaume de Dieu.

Un des enseignants de la loi s’approcha de Jésus et Lui posa cette


question : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus
répondit : « Voici le premier : Écoute, Israël, le Seigneur, notre Dieu, est

— 25 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

l’unique Seigneur ; et : Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton


cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force. Voici
le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas
d’autre commandement plus grand que ceux-là » (Marc 12.28–31).
Matthieu 22.40 ajoute ceci : « De ces deux commandements dépendent
toute la loi et les prophètes ». Jésus rappelle aux croyants qu’il n’y a rien
de plus important que d’aimer Dieu et son prochain.

De notre cœur, le berceau de nos émotions, émane notre amour pour


Dieu. Nous jouissons de rapports intimes avec Dieu et nous ressentons
Son amour à notre égard. Lorsque nous choisissons de Lui obéir, Sa
présence est évidente à nos côtés et Sa paix nous envahit. Aimer Dieu
de tout notre cœur signifie que nous choisissons de Lui obéir afin de
demeurer à Ses côtés et d’éviter d’attrister Son Saint-Esprit.

L’Écriture nous commande d’aimer Dieu de toute notre âme. Il s’agit


de notre être intérieur, notre âme éternelle libérée de l’esclavage du
péché grâce à Dieu. Notre âme est l’essence même de notre identité, le
cœur de notre personnalité et de notre caractère, le « vrai nous ». Chaque
jour, nous montrons que nous aimons Dieu de toute notre âme lorsque
nous Lui permettons de contrôler nos décisions et notre avenir.

L’Écriture nous dit également d’aimer Dieu de toute notre pensée.


La pensée est si souvent le champ de bataille de nos vies. C’est avec
notre pensée que nous croyons soit la vérité, soit les mensonges ;
c’est également avec notre pensée que nous imaginons faire le bien
ou le mal, et c’est également avec notre pensée que nous acquérons
les connaissances qui soit nous rapprochent de Dieu, soit nous en
éloignent. Dieu désire que nous élargissions nos pensées car, plus nous
en savons, plus nous sommes en mesure de Lui rendre gloire pour la
magnificence de Sa création. Il souhaite également que nous gardions
l’esprit pur grâce à l’étude de Sa Parole et de Ses commandements.

L’intensité (la force) de notre amour pour Dieu se manifeste à


travers nos actions. Notre détermination nous permet de subvenir
aux besoins de notre famille, d’utiliser les dons spirituels que Dieu
nous a donnés pour le bien de l’Église et de manifester l’amour de
Dieu aux autres.

— 26 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Dieu Lui-même, en la personne de Jésus-Christ, nous a ainsi aimés


avant que nous puissions Lui rendre la pareille.

Il est intéressant de noter que le docteur de la loi ne s’intéressait qu’au


premier des commandements, mais que Jésus lui en a donné deux. Il lui
dit que le deuxième commandement (aimer son prochain comme soi-
même) était aussi important que le premier. De même qu’une médaille a
deux côtés, on ne peut aimer Dieu sans aimer son prochain. Les deux font
partie du même commandement. L’amour de soi est un instinct naturel.
La plupart du temps, nous agissons dans notre propre intérêt, que ce
soit à long ou à court terme. Il est naturel pour l’homme de chercher à
satisfaire ses propres désirs. Jésus nous dit de porter la même attention
à notre prochain. Il nous dit de prendre des décisions qui profiteront
aux autres, que nous en tirions ou non un avantage. Parfois, de telles
décisions nécessiteront un sacrifice de notre part. Quoi qu’il en soit, c’est
de cet amour que, d’après Jésus, nous devons aimer notre prochain.
Sans cet amour, il n’est de véritable justice sociale. Sans le Saint-Esprit, il
est impossible de pratiquer un tel amour. Bien que l’idée de se sacrifier
par amour pour notre prochain puisse être difficile à envisager, il n’en
demeure pas moins que Jésus exige que nous allions au-delà de nous-
mêmes.

Dans le récit de Luc, après que Jésus ait répondu à la question du scribe,
ce dernier renchérit en ces termes : « Et qui est mon prochain ? » Jésus
continue donc en racontant l’histoire d’un homme juif qui, après avoir
été attaqué par des brigands, gisait à demi-mort sur le bord d’un chemin.
Un sacrificateur (un chef religieux) le voit mais décide de l’ignorer. Un
autre membre de la communauté religieuse lui passe devant mais ne
l’aide pas non plus. Enfin, un homme issu d’un groupe social méprisé
voit l’homme blessé et fait preuve de miséricorde envers lui : il panse ses
blessures et règle sa facture d’hôpital. Jésus lui demande alors : « Lequel
de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au
milieu des brigands ? » Ce à quoi le docteur de la loi répond : « C’est celui
qui a exercé la miséricorde envers lui ». Et Jésus de renchérir : « Va, et toi,
fais de même » (Luc 10.29–37).

Jésus établit clairement qu’obéir au premier de tous les


commandements, c’est-à-dire aimer Dieu de tout son cœur, signifie

— 27 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

également faire preuve de compassion à l’égard de ceux qui souffrent,


peu importe d’où ils viennent ou leur situation spirituelle.

L’Église doit être une communauté remplie du Saint-Esprit, une


communauté ouverte à tout type de personne. L’Église doit s’efforcer
d’éliminer les barrières de la langue, de la race, des classes sociales, du
sexe et du nationalisme, et ce, par la puissance du Saint-Esprit. L’Église
est appelée à promouvoir la paix et la justice sociale, à répondre aux
besoins des nécessiteux (y compris les veuves, les orphelins et les
pauvres) et à se prononcer en faveur de la protection des personnes
exploitées et opprimées.

L’Église se prévaut d’une nature apostolique ; elle a été envoyée dans le


monde chargée d’une mission divine : celle d’annoncer et de démontrer
que le royaume de Dieu est proche et que Jésus est Seigneur. Ce n’est qu’à
ce moment-là que les âmes et les communautés seront transformées.
Ces personnes transformées qui s’aiment les unes les autres iront de
par le monde et formeront de nouvelles communautés de croyants. Ces
corps de croyants sont unis sur le plan spirituel, social et économique.

Lisez le chapitre 6 du livre des Actes et prenez le temps de réfléchir


à ce qu’il nous enseigne. Le mode d’adoration et de comportement du
nouveau peuple de Dieu dans l’Église primitive évoquait la vision de Dieu
exprimée dans l’Ancien Testament. Aujourd’hui, c’est nous qui sommes le
nouveau peuple de Dieu et, pour pouvoir Le représenter au mieux, nous
devons adopter un cadre de réflexion holistique et chercher à atteindre la
personne tout entière : son corps, son âme et son esprit !

Résumé
Le holisme biblique est un mode de pensée basé sur les vérités de la
Parole de Dieu. Il s’agit d’une théologie biblique qui incite les hommes
à mener une vie conforme à l’éthique du Royaume. Le holisme biblique
part du principe que Dieu a autorité sur chaque aspect de Sa Création et
sur chaque aspect de la vie individuelle et collective de Son peuple. Le
holisme biblique donne aux croyants les bases dont ils ont besoin pour
tendre la main à ceux qui souffrent au sein de leurs communautés en
leur manifestant l’amour de Dieu par tous les moyens possibles. La prise

— 28 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

en charge holistique des gens n’est pas une question de ressources ; elle
s’inscrit dans le mandat que Dieu nous a donné dans Sa Parole et dont
se sont acquittés la nation d’Israël, Jésus-Christ et l’Église du Nouveau
Testament. Le prophète Michée résume le cœur de la mission holistique
lorsqu’il reproche à la nation d’Israël de n’avoir pas su rester fidèle à la
totalité de son engagement : « On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est
bien ; et ce que l’Éternel demande de toi, c’est que tu pratiques la justice,
que tu aimes la miséricorde, et que tu marches humblement avec ton
Dieu » (Michée 6.8).

— 29 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous avez terminé l’étude de ce chapitre, le moment est
venu pour vous de mettre en pratique ce que vous y avez appris et de vous
poser des questions du genre : « Est-il important pour le shalom d’exister
au sein de nos communautés ? Si oui, dans quelle mesure ? » et « Quel rôle
l’homme a-t-il joué dans la rupture de l’harmonie qui régnait sur la terre ? »

1. Donnez votre propre définition du holisme biblique.

2. Citez certaines conséquences du péché et de la Chute au sein de


votre communauté en ce qui concerne les domaines suivants : la
politique, la vie sociale, l’économie, le système juridique, la culture,
la famille, l’agriculture.

3. En tant que pasteur, que pourriez-vous faire pour neutraliser


de telles conséquences négatives et arriver à une plus grande
harmonie, telle que Dieu l’a voulue ?

4. En quoi votre église est-elle un signe annonciateur de l’avènement


du Royaume éternel de Dieu ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 30 —
C H A P I T R E 3

Une perspective biblique


de la pauvreté

L
es chrétiens qui désirent aider les pauvres doivent comprendre
ce que la Bible enseigne sur la pauvreté. L’évangile de Matthieu
contient l’un des passages les plus connus de la Bible concernant
les pauvres (26.6–13). Il raconte qu’une femme avait versé une bouteille
de parfum de grande valeur sur la tête de Jésus, et il fait remarquer que
les disciples s’étaient indignés en disant : « À quoi bon cette perte ? » puis
avaient ajouté : « On aurait pu vendre ce parfum très cher, et en donner
le prix aux pauvres » (vs. 8). Mais Jésus leur avait répondu en ces termes :
« vous avez toujours des pauvres avec vous » (v. 11).

Des années durant, les chrétiens ont eu recours à ce passage pour


justifier leur inaction auprès des pauvres, estimant qu’après tout il y a
trop de pauvres, et il y en aura toujours ; alors à quoi bon s’impliquer
dans un ministère qui n’aura que peu ou pas d’impact sur leur situation.

Nous nous devons cependant d’analyser ce passage de l’évangile de


Matthieu de manière plus approfondie. Tout d’abord, nous voyons que,
dans ce verset, Jésus citait une portion bien connue (des Juifs religieux)
de la loi juive consignée dans Deutéronome 15.11 : « Il y aura toujours des

— 31 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

indigents dans le pays ; c’est pourquoi je te donne ce commandement:


Tu ouvriras ta main à ton frère, au pauvre et à l’indigent dans ton pays ».

À présent, ouvrez votre Bible et lisez l’histoire rapportée dans


Matthieu 26.6–11, puis lisez Deutéronome 15.7–11.

Deutéronome 15 montre clairement que Dieu se soucie des pauvres


et qu’Il somme le peuple de Dieu de prendre soin des indigents et des
défavorisés. En effet, Dieu a dit : « Il y aura toujours des indigents dans
le pays » et c’est pour cette raison qu’Il a ordonné au peuple de partager
ses ressources avec prodigalité avec les pauvres et les indigents d’Israël.
Comme nous l’avons vu dans Matthieu 26, lorsque Jésus disait : « vous avez
toujours des pauvres avec vous », en fait, Il reprochait aux disciples leur
cupidité. Si les récits de Matthieu et de Marc ne nomment pas la personne
qui a fait un tel commentaire, Jean, quant à lui, précise qu’il s’agissait
de Judas Iscariot (Jean 12.4–7). Jésus savait que Judas voulait vendre le
parfum afin de pouvoir s’approprier une partie du prix de la vente et non
pour subvenir aux besoins des pauvres ! Judas prétendait vouloir aider les
pauvres pour que ses amis aient une bonne opinion de lui mais, en réalité,
Judas était un voleur ! Sachez que Jésus admoneste tous les chrétiens qui
croient pouvoir en toute impunité passer outre à la souffrance des pauvres
ou puiser dans la caisse des offrandes aux pauvres pour s’enrichir eux-
mêmes. Plusieurs centaines de passages bibliques nous enseignent que
Dieu se soucie des pauvres et qu’Il désire faire justice aux opprimés.

Qui sont les pauvres ?


Sur un morceau de papier, écrivez tous les mots qui vous passent
par la tête pour décrire les pauvres. Qu’avez-vous inscrit sur votre liste ?
Insistez-vous davantage sur le caractère du pauvre ou sur celui des
instigateurs de la pauvreté ? À présent, sur le même morceau de papier,
citez les raisons de la pauvreté. Quel est le contraire de la pauvreté ?

Inscrivez, dans votre cahier de notes, votre propre définition de la


pauvreté.

Le mot pauvreté est souvent utilisé dans notre monde d’aujourd’hui. Les
Nations Unies et d’autres organismes d’aide font tout leur possible pour

— 32 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

réduire, voire même éradiquer,


la pauvreté, mais à quoi sont-
… Ne me donne
ils confrontés exactement ? ni pauvreté, ni
Qu’est-ce que la pauvreté
et comment pouvons-nous richesse, accorde-
évaluer sa régression ?
Quiconque désire aider les moi le pain qui
pauvres doit, dans un premier
temps, savoir ce qu’il ou elle m’est nécessaire.
pense réellement des pauvres.
De peur que,
La pauvreté est un concept
difficile à saisir. Nous pensons
dans l’abondance,
savoir ce que c’est — nous
la voyons autour de nous,
je ne te renie et
nous en entendons parler ne dise : Qui est
et, lorsqu’on nous interroge
à son sujet, nous nous l’Éternel ? Ou que,
efforçons de trouver des
réponses adéquates, mais, dans la pauvreté,
à bien des égards, il s’agit là
d’un concept difficilement je ne dérobe, et ne
définissable. Quoi qu’il en
soit, notre propre définition de m’attaque au nom
la pauvreté est extrêmement
importante car elle régit
de mon Dieu.
notre façon de répondre aux (Proverbes 30.8–9)
besoins des pauvres.

Bryant Myers nous rappelle que « les pauvres » sont avant tout des
êtres humains : des hommes, des femmes et des enfants créés à l’image
de Dieu. Les personnes pauvres sont comme tout le monde ; elles ont
des ambitions et des idées, et connaissent tant la souffrance que la joie.
Les pauvres ne sont pas des objets à manipuler ; ce sont des personnes
à part entière.

Notre interprétation de la pauvreté dépend en grande partie de


notre environnement et de notre culture. La culture dans laquelle nous

— 33 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

avons été élevés, l’instruction que nous avons reçue et notre situation
financière exercent une influence sur notre façon de considérer les gens
et la pauvreté. Qui plus est, notre interprétation des causes de la pauvreté
est également soumise à la pression de nos valeurs et de notre vision du
monde. Myers fait remarquer que « la pauvreté est une question de point
de vue. Nous voyons ce que notre vision du monde, notre éducation,
notre formation et notre situation socioéconomique nous permettent de
voir » (81). Par exemple, un politicien qui se fait conduire en Mercedes
peut penser qu’un missionnaire est pauvre parce qu’il ne conduit qu’une
Peugeot. À son tour, le missionnaire pensera qu’un de ses collègues est
pauvre du fait qu’il utilise les transports en commun. De même, cet usager
des transports en commun supposera que sa cousine est pauvre parce
qu’elle se déplace à pied. Il est bien évident que chaque interprétation de
la pauvreté est relative !

Qu’est-ce que la pauvreté ?


Revenez sur la définition de la pauvreté rédigée précédemment. On dit
souvent que la pauvreté se caractérise par un manque de quelque chose :
de choses matérielles, d’instruction, d’opportunités ou de l’Évangile.
Définie ainsi, nous pourrions penser qu’en apportant ce qui manque, on
devrait pouvoir résoudre le problème. Si donc cette définition est correcte
et exhaustive, alors le simple apport de biens matériels devrait pouvoir
éradiquer la pauvreté. Pendant des années, plusieurs pays généreux se
sont engagés à répondre aux besoins des pauvres. Pourtant, les pauvres
sont toujours pauvres ; rien n’a changé. Pourquoi donc ? Il est risqué de
considérer la pauvreté uniquement comme « un manque de choses ».
Tout d’abord, cette interprétation est trop simpliste étant donné que les
nantis pourraient en arriver à penser qu’ils ont le pouvoir de « sauver »
les plus démunis. Le Dr Myers a suggéré que les riches se considèrent
parfois comme les sauveurs des pauvres, des « messies » humains en
quelque sorte. Au vu de cette définition étriquée, les pauvres sont réduits
au rang de « bénéficiaires passifs, d’êtres humains défectueux que [les
non-pauvres] peuvent remettre sur pied grâce à leurs… dons » (Myers,
57). Lorsque les non-pauvres ont inconsciemment une telle image des
pauvres, ils ont aussi vite fait de se placer sur un piédestal. Cette définition
de la pauvreté est insuffisante ; elle mérite une analyse plus approfondie
qui aborde ses causes véritables.

— 34 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

Les causes de la pauvreté

La pauvreté a fait l’objet de bien des études qui ont mis en évidence
la complexité de ses causes. La pauvreté est semblable à un réseau de
systèmes interdépendants et étroitement liés à l’intérieur duquel les
pauvres sont enfermés. Jayakumar Christian a affirmé que les pauvres
sont opprimés par les systèmes sociaux établis par les non-pauvres afin
de continuer à décider pour les pauvres et à « jouer au Bon Dieu » dans
leur vie (Myers, 73).

Les systèmes économiques du monde qui échappent au contrôle


des familles, ou même de pays entiers, peuvent exercer une influence
oppressive sur les pauvres. Un bref aperçu de l’histoire économique
mondiale fait ressortir les nombreux facteurs interconnectés qui font que
les riches s’enrichissent et que les pauvres s’appauvrissent.

Dans Training for Transformation [Former pour transformer], Timmel


et Hope offrent un excellent panorama du développement économique
global et de son impact sur la pauvreté dans le monde. Ce qui suit est une
adaptation de leur ouvrage.

Des années 1400 aux années 1950, les expéditions européennes


d’exploration et de colonisation ont eu de lourdes répercussions sur
l’Afrique et l’Asie, ainsi que sur l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud.
C’est au début de cette période qu’est apparue la traite des esclaves, l’un
des pires fléaux de tous les temps qui a privé bien des pays de leurs jeunes
gens, des membres les plus forts de la société, et qui a considérablement
perturbé la vie au sein du noyau familial. La traite des esclaves a eu des
effets dévastateurs et durables qui se sont traduits par des sentiments
de crainte, d’impuissance et d’infériorité qui, à leur tour, ont largement
contribué à la pauvreté et au fatalisme.

Pendant l’ère coloniale, certaines richesses, en grande partie les


matières premières, furent extraites du continent africain et asiatique,
et envoyées en Europe par le biais des colonies. Les coutumes
tribales traditionnelles, et plus particulièrement les droits de propriété
foncière, furent considérablement bafoués au profit de la production
et de l’exportation. Avant la période coloniale, les populations locales

— 35 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

contrôlaient leur propre production étant donné qu’elles étaient elles-


mêmes propriétaires des matières premières et des outils utilisés pour
les extraire ; à noter cependant que le débit de production était limité au
minimum vital. Fortes de leur capacité de production, elles faisaient affaire
les unes avec les autres et s’enrichissaient en conséquence. Cependant,
les puissances coloniales se mirent à augmenter la production au sein de
leurs colonies respectives, notamment dans le domaine de l’agriculture,
et finirent par diviser les terres et par les répartir entre les membres
d’une élite restreinte dotés de moyens agricoles et d’un fort potentiel
de production. Les populations locales se retrouvèrent sans terre et, par
conséquent, privées des matières premières dont elles avaient besoin
pour produire la nourriture nécessaire à leur propre survie et à leur
mieux-être.

C’est ainsi que deux catégories de personnes ont émergé : les propriétaires
munis de « biens générateurs de revenus » et les non-propriétaires qui
n’avaient que peu, voire pas du tout, de biens rémunérateurs (Hope, 10). En
outre, les puissances coloniales mirent en place un système de marché au
comptant. Auparavant, les populations locales pouvaient acquérir des biens
au moyen d’un système d’échange. À présent, elles avaient besoin d’argent
pour pouvoir se procurer les articles de première nécessité. Le seul moyen
d’obtenir de l’argent était de travailler. Les riches propriétaires étaient donc
acquéreurs de main-d’œuvre, de terres et d’équipements. Les pauvres, quant
à eux, avaient besoin de vendre leur savoir-faire, et les rentrées d’argent
suffisaient tout juste à les nourrir pour pouvoir avoir la force de travailler.
Des milliers de personnes sont donc devenues tributaires d’une élite de
« propriétaires » pour assurer leur survie. L’acquisition de l’indépendance vis-
à-vis des puissances coloniales n’a pourtant pas réussi à combler le fossé
qui séparait « propriétaires » et « non-propriétaires » car les terres ont tout
simplement été transférées aux membres de l’élite nationale. Les pauvres,
quant à eux, ont continué à vivre dans la soumission et le désespoir.

Après la Seconde Guerre Mondiale, ce n’est plus l’expansion politique


qui motivait les puissances coloniales ; ces dernières cherchaient plutôt à
acquérir de nouveaux marchés pour leurs produits manufacturés. Le
capitalisme devint la théorie économique de prédilection qui prônait
l’accumulation des bénéfices ; le monde était à l’heure de la concurrence
et de l’expansion (Hope, 13). Plus une compagnie arrivait à réduire ses

— 36 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

coûts de production, plus sa marge


bénéficiaire était importante. Plus
Tous les êtres
elle arrivait à conquérir de humains ont
nouveaux marchés, plus les
bénéfices étaient considérables. besoin de pain
Les petites entreprises, qui
n’avaient pas les moyens de et d’amour. Mais
produire une quantité suffisante de
biens à des coûts suffisamment peut-on vraiment
bas, se voyaient contraintes à
fermer leurs portes ou à fusionner parler d’amour
avec d’autres compagnies. Ceci
entraîna la création d’immenses
et de dignité
multinationales comme Coca-
Cola® et les chaussures Bata®.
humaine lorsque
la survie d’un
En quête de nouveaux marchés
et d’une main-d’œuvre à bas homme dépend
coût, ces multinationales se sont
tournées vers l’Afrique, l’Asie et d’un autre ?
l’Amérique du Sud qui regorgeaient
de travailleurs très bon marché
et constituaient un vaste marché. Si certains membres de l’élite locale
sont devenus gérants et se sont enrichis, il n’en demeure pas moins que
la plupart des bénéfices réalisés par ces sociétés ont été exportés. Les
plus pauvres, les non-propriétaires, avaient un besoin urgent d’argent et
ont contribué à la réussite financière des grandes sociétés parce qu’ils
constituaient une main-d’œuvre bon marché. Aujourd’hui, bon nombre
d’Africains et d’Asiatiques gagnent moins d’un dollar par jour en travaillant
dans des usines de biens manufacturés qui seront vendus en Occident à
des prix exorbitants. Les bénéfices sont énormes, pourtant ils ne profitent
en aucun cas aux plus pauvres qui gagnent tout juste de quoi survivre.

Il convient également de noter qu’après la Seconde Guerre Mondiale


furent créées plusieurs organismes qui, depuis, ont fortement influencé
l’économie mondiale : la banque internationale pour la reconstruction
et le développement, souvent appelée Banque mondiale, le fonds
monétaire international (FMI) et l’Accord général sur les tarifs douaniers

— 37 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

et le commerce (AGETAC, ou GATT). À l’origine, le but de la banque


mondiale était d’aider les nations pauvres dans le domaine de la
reconstruction et du développement en leur proposant des prêts à faible
taux d’intérêt. Cependant, dans la réalité, les intérêts que certains de ces
pays emprunteurs doivent verser paralysent la totalité de leur système
économique. Ajoutez à cela la corruption de haut niveau et l’utilisation
inappropriée des fonds empruntés, et les pauvres se retrouvent dans
une situation bien pire que s’ils avaient reçu leur propre lopin de terre à
cultiver pour subvenir à leurs besoins alimentaires.

À cette période-là, l’idée que les gens se faisaient du développement a


pris une tournure regrettable. Les pays récemment indépendants voulaient
le « développement » qui était défini de manière assez restrictive comme un
signe de croissance économique et d’évolution de la production mesurée à
partir du produit national brut (PNB) d’un pays. Les pays qui n’avaient pas
les moyens de construire des usines ont invité des investisseurs, comme
les grandes multinationales, à s’implanter sur leur territoire. Les pauvres
se sont mis à affluer vers les villes dans l’espoir de pouvoir travailler pour
ces compagnies. Malheureusement, le nombre de demandeurs d’emploi
excédait, et de loin, le nombre de postes disponibles. Cela entraîna la
prolifération de grands bidonvilles et la hausse du taux de chômage ; les
pauvres se retrouvèrent dans une misère noire.

Ce que la banque mondiale et les gouvernements n’ont pas réalisé, et


que les sociétés ont ignoré, c’est que le « développement » (la croissance
économique, l’augmentation de la production et du PNB) était souvent
acquis aux dépens des plus pauvres et finissait en réalité par accroître et
non réduire l’état de pauvreté de bon nombre de gens. Les investissements
étrangers, motivés par un capitalisme incontrôlé, ont souvent été des
vecteurs d’endettement et de pauvreté, et non de prospérité (Hope, 32).

Si beaucoup pensaient que la création de richesse finirait par profiter


aux pauvres, ce ne fut pourtant pas le cas. Vandana Shiva fait remarquer
que cette « crise du développement » est due au fait que l’on avait associé
à tort l’augmentation de la production à la possibilité d’assurer les besoins
essentiels des gens. Elle ajoute que, « en réalité, à cause du processus
de développement, il y a bien moins d’eau, le sol est moins fertile et
la richesse génétique a diminué » (Hope, 32). Nous pouvons voir qu’il

— 38 —
Les bases bibliques du développement transformationnel

ne suffit pas de mesurer le développement uniquement à l’aune de la


croissance économique globale d’un pays étant donné que la répartition
des richesses et le bien-être de la majorité de la population ne sont
nullement pris en compte. Les quelques personnes qui sont devenues
riches et puissantes ne s’intéressent que rarement à l’amélioration des
conditions de vie des pauvres.

Il est évident que les causes de la pauvreté sont complexes et que, à


l’échelle mondiale, elles sont souvent irrémédiables. Toutefois, partout
dans le monde, il a bel et bien été démontré que les choses ont tendance
à bouger lorsque plusieurs personnes se manifestent en faveur d’un but
commun. Il est plus facile d’aborder certains facteurs de la pauvreté
lorsque les pauvres eux-mêmes s’unissent pour créer un mouvement en
faveur de la justice. C’est cela le développement véritable.

Le diagramme suivant a été adapté à partir de l’œuvre de Bryant


Myers intitulée Marcher avec les pauvres. Il s’attache à mettre en évidence
les diverses causes de la pauvreté d’une famille type. La famille
représentée dans ce diagramme s’est fait prendre au piège de la pauvreté
et elle ne peut s’en sortir (Myers, 66).

Le système culturel
Les mensonges de la
vision du monde

Le système La vulnérabilité
biophysique Les catastrophes
La faiblesse du corps Les attentes
et de l’esprit sociales

Le système personnel L’impuissance


La dévalorisation Les négociations
de l’identité L’exploitation
L’isolation Le système spirituel
Le subterfuge des
dominations et des
autorités

Figure 3.1

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Veuillez étudier attentivement la Figure 3.1 : la famille pauvre illustrée


précédemment est prise au piège au milieu de nombreux systèmes
interconnectés. Tous ces systèmes exercent une influence sur le bien-
être de l’individu et sur sa capacité à échapper ou non à la pauvreté. À
présent, nous allons aborder quelques-uns de ces systèmes :

Le système biophysique
Ce système a trait au bien-être physique de la personne. Les pauvres
sont sujets à la faiblesse physique car ils manquent souvent de nourriture,
ou du bon type d’aliments. En raison de cette faiblesse physique, ils ont
du mal à garder leur emploi, et leur productivité en pâtit. Parfois, la
malnutrition dont ils souffrent à certains stades critiques de leur vie finit
par affecter leur santé mentale. Ainsi, une personne peut avoir du mal à
trouver un meilleur emploi en raison de carences mentales.

Les pauvres sont forts sur le plan physique étant donné qu’ils sont
souvent chargés d’effectuer de dures tâches manuelles au quotidien.
Mais si un(e) pauvre tombe malade ou se retrouve dans un état de
santé précaire, il ou elle aura du mal à trouver du travail car les seuls
emplois disponibles nécessitent de l’endurance et une grande force
physique. Heureusement, malgré le manque de nourriture, les aliments
traditionnels les moins chers, comme les haricots, les patates douces
et les légumes verts, que consomment le plus souvent les pauvres sont
bien plus sains sur le plan nutritif que ceux préparés et servis dans les
restaurants et auxquels les riches sont accoutumés. Si la nourriture servie
dans les restaurants est davantage un signe extérieur de richesse, les
aliments les plus nutritifs sont généralement les moins chers en Afrique.
Dieu est vraiment bon !

L’aspect biophysique du carcan de la pauvreté comprend entre autres


le manque d’accès aux soins médicaux et leur coût. Lorsqu’un membre
de la famille tombe malade, le peu d’argent gagné sert à acheter des
médicaments. Il ne reste donc plus rien pour acheter de la nourriture ;
cela signifie donc que le père ou la mère ne mange pas ce jour-là et
repart au travail le lendemain affamé et affaibli. La médecine moderne
s’avère coûteuse, sans compter que les pauvres font également souvent
appel à un guérisseur s’ils pensent que la maladie est due à une attaque
du monde des esprits. Un simple problème physique peut causer des

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dégâts insurmontables pour une famille pauvre qui se verra contrainte


d’y consacrer la totalité d’un mois de salaire, plongeant ainsi la famille
dans une misère noire. Il arrive souvent qu’une personne pauvre doive
emprunter de l’argent à un ami ou à un employeur. Selon la situation,
cette même personne peut, dès lors, être exploitée de diverses manières
jusqu’à ce qu’il ou elle « rembourse » la somme empruntée. Lorsqu’une
personne doit de l’argent à quelqu’un, le créditeur peut exercer une
influence décisive sur la vie du débiteur. En Inde, certains créanciers
exigent des familles pauvres qu’elles leur versent un gage, c’est-à-dire
qu’un enfant de la famille devra travailler comme serviteur dans la
maison du créancier jusqu’à ce que l’emprunt soit remboursé ; cela peut
souvent durer plusieurs années.

Cette pratique est également mentionnée dans l’Ancien Testament.


Dans 2 Rois 4.1–7, nous lisons l’histoire d’une veuve qui vivait à
l’époque du prophète Élisée. Nous savons qu’elle était pauvre parce
que lorsqu’Élisée lui demanda ce qu’elle avait chez elle, elle répondit :
« Ta servante n’a rien du tout à la maison qu’un vase d’huile » (v. 2).
Elle avait très peur, alors elle fit part de sa situation à Élisée : « Ton
serviteur mon mari est mort, et tu sais que ton serviteur craignait
l’Éternel ; or le créancier est venu pour prendre mes deux enfants
et en faire ses esclaves » (v. 1). Élisée, guidé par Dieu, lui donna des
instructions. Il ne lui donna pas d’argent mais lui dit d’aller rassembler
un grand nombre de vases. Ensuite, Dieu opéra un miracle : Il fit en
sorte que le peu d’huile dont elle disposait puisse remplir tous les
vases qu’elle avait pu se procurer ! Abasourdie, la veuve se présenta
une nouvelle fois auprès d’Élisée et lui demanda ce qu’elle devait faire
ensuite. Il lui dit : « Va vendre l’huile, et paie ta dette ; et tu vivras, toi et
tes fils, de ce qui restera » (v. 7). Il est bon de relever plusieurs choses
dans cette histoire. Premièrement, Élisée a fait preuve de compassion.
Deuxièmement, le prophète a dit à la veuve de s’en sortir par ses
propres moyens, ce qui lui a permis de conserver son amour-propre
au lieu de se sentir vulnérable et impuissante. Troisièmement, Élisée
l’a chargée de payer ses dettes en premier. Ainsi, elle était libre de
toute obligation envers qui que ce soit, et sa dignité est demeurée
intacte. Elle a également appris à s’organiser en fonction des priorités.
Elle aurait pu être tentée de ne pas régler toutes ses dettes et de garder
une partie de l’argent pour s’acheter de plus beaux habits ou une plus

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grande maison. Or, le choix le plus judicieux était de s’acquitter de


ses dettes en premier.

Le système culturel
Chaque culture s’en tient à des valeurs et à des croyances qui peuvent
soit lui être bénéfiques, soit lui nuire. Depuis la Chute de l’homme, aucune
culture ne peut se targuer d’être parfaite. Les peuples, quelle que soit leur
culture, se fient involontairement à des mensonges susceptibles de les
dépouiller de la vie abondante que Dieu leur réserve. Ces mensonges font
partie intégrante de la vision du monde des hommes et ont tendance à
les priver de leur autonomie, à entraver le changement et à promouvoir
les inégalités et la tyrannie (Myers, 75). Par exemple, certaines cultures
prétendent que la femme et les biens d’un homme appartiennent à sa
famille ; par conséquent, en cas de décès du mari, la veuve se retrouve
dans le dénuement. Aux yeux de Jayakumar, ces mensonges mettent en
valeur les « carences de la vision du monde » (Myers, 75).

En Inde, selon une vision hindoue du monde, les êtres humains


sont nés au sein de castes bien particulières et doivent être traités
en conséquence. Certains, appelés « intouchables », sont considérés
comme des parias. Ils ne peuvent prétendre à aucun poste si ce n’est
à celui d’éboueur ou de balayeur, et ils ne peuvent ni manger, ni prier
avec des personnes en dehors de leur caste, ni même les fréquenter. Ce
système de pensée est destructeur et déplorable. Il ne fait qu’aggraver
la situation des pauvres qui ne peuvent tout simplement pas s’en sortir
du fait que leur sort est lié à un mode de pensée culturel indéfectible.
Les valeurs culturelles de votre pays favorisent-elles le maintien du cycle
de la pauvreté ? Nous pourrions prendre comme exemple l’attitude
de certains pour lesquels « que sera, sera » — une attitude fataliste
fermement établie qui pousse les gens à croire qu’il n’y a rien qu’ils
puissent faire ou dire pour changer leur situation puisque d’autres
personnes, ou Dieu Lui-même, ont déjà décidé de leur sort. Ce système
de pensée est erroné car l’Écriture nous enseigne que « tout est possible
à Dieu » (Marc 10.27) et, comme nous l’avons vu dans les chapitres
précédents, dès le début, Dieu voulait que les êtres qu’Il avait créés
vivent en harmonie les uns avec les autres. Par conséquent, avec Son
aide, les hommes peuvent améliorer leur situation en vue d’un avenir
plus positif, plus juste et plus harmonieux.

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Les croyances culturelles des riches peuvent également contribuer


à entretenir la situation des pauvres. Il y a dans chaque communauté
des personnes qualifiées de « non-pauvres » ; à leur nombre figurent
les usuriers, les dirigeants ou les politiciens. En général, ces personnes
sont convaincues que Dieu les a « bénies » et que, par conséquent,
elles méritent d’être « respectées » et « reconnues », c’est-à-dire que les
pauvres doivent leur verser de l’argent. De leur côté, les pauvres sont
persuadés que Dieu est mécontent d’eux puisqu’après tout Il n’a pas fait
d’eux des riches ; alors, ils donnent leur argent aux « non-pauvres » qui,
eux, sont bénis, et ce, afin de « planter une graine » et éventuellement
d’être bénis en retour. Les églises et les pasteurs doivent veiller à ne pas
entretenir une telle aberration. Il s’agit là d’une position fort dangereuse ;
toutefois, elle continue de resserrer l’étau autour des pauvres de l’Afrique
tout entière. L’enseignement de Jésus consigné dans les chapitres 5 à 7
de l’évangile de Matthieu permet de rectifier cette position.

Le système spirituel
Ce système est étroitement lié au système culturel. Ce que les gens
croient au sujet du monde spirituel, et leurs interactions avec ce dernier,
servent de base à plusieurs pratiques et croyances culturelles. Les chrétiens
croient que ce monde, ses habitants et ses systèmes appartiennent
temporairement à Satan, et ils sont également convaincus que « les
dominations et les autorités » sont bel et bien à l’œuvre et exercent en
permanence une influence sur les êtres humains et sur les systèmes
sociaux. Ces forces démoniaques empêchent les hommes d’expérimenter
la vie abondante dont Jésus parle lorsqu’Il dit que « le voleur ne vient que
pour dérober, égorger et détruire; moi, je suis venu afin que les brebis aient
la vie, et qu’elles soient dans l’abondance » (Jean 10.10). La crainte des
mauvais esprits et l’emprise de la sorcellerie forcent bon nombre de foyers
pauvres à dépenser le peu de ressources dont ils disposent pour apaiser
les esprits. Il se peut qu’une famille n’ait qu’une seule vache qui représente
pour elle son unique source de revenus et d’alimentation en lait ; mais si
un enfant tombe malade et si le sorcier lui demande de sacrifier la vache,
il est fort probable que la famille s’exécute sans se demander de quoi se
composera son prochain repas.

Dieu a créé en l’homme le besoin d’adorer et de rechercher quelqu’un


de plus puissant que lui. En temps de crise, les gens éprouvent le plus

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souvent le besoin de trouver des réponses et de l’aide auprès d’un être


suprême. Lorsqu’un enfant est malade, lorsque les vivres sont épuisés,
lorsqu’il n’y a plus d’argent pour payer le loyer, lorsqu’un mari perd la
tête, lorsqu’un accident survient, lorsqu’un déluge emporte les dernières
graines récemment plantées ; c’est dans ces moments que les êtres
humains cherchent une aide spirituelle. Le christianisme semble avoir
introduit un Dieu que l’on adore le dimanche mais, parfois, n’a pas réussi
à faire de Lui un Être suffisamment réel et puissant pour résoudre les
problèmes de la vie quotidienne ; cela est fort regrettable. C’est dans
les moments difficiles que les gens — même ceux qui vont à l’église —
peuvent choisir de faire appel à un système religieux traditionnel et, à
leurs yeux, plus puissant. Si, sur le plan financier, ce système leur coûtera
bien plus cher que ce que l’église leur coûte, ils sont cependant certains
qu’il les aidera à se débarrasser de leurs problèmes immédiats. Seul le
développement véritablement transformationnel sera à même d’apporter
des réponses théocentriques aux problèmes des pauvres en s’appuyant
sur la Parole de Dieu et de les libérer des exigences impossibles que leur
imposent les religions traditionnelles. Les pauvres n’ont pas les moyens
de dépenser tant d’argent pour éloigner les mauvais esprits, alors ils se
retrouvent prisonniers de la pauvreté et s’embourbent dans un cycle
d’endettement sans fin.

Les chrétiens occidentaux ne font pas forcément appel à Dieu en


temps de crise non plus. Au lieu de se tourner vers les chamans et les
sorciers, ils se fient aux merveilles de la science, de la technologie et de la
médecine moderne car leur système religieux n’envisage aucune solution
spirituelle à un problème physique. Les populations occidentales qui vivent
dans la pauvreté contractent des dettes importantes en essayant d’avoir
recours aux meilleurs spécialistes, aux meilleurs hôpitaux ou aux meilleurs
docteurs. Elles pensent que le seul moyen de s’en sortir, c’est d’accéder
aux meilleures technologies. À la base, les systèmes spirituels controuvés
qui enferment les hommes dans le carcan de la pauvreté sont les mêmes
dans les deux cas ; ils se présentent juste de façons différentes.

En tant que chrétiens, nous croyons que Jésus est la réponse à chacun
de nos problèmes. Par la puissance et la présence du Saint-Esprit, Dieu
apportera la solution aux problèmes de la vie quotidienne de Son peuple,
parfois même au travers d’un miracle ! Ce n’est que lorsque les pauvres

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réalisent que Jésus est Celui qui guérit, Celui qui pourvoit à leurs besoins,
Celui qui fait pousser les plantes, Celui qui contrôle la pluie et toute la
nature, et Celui qui, seul, possède toute la sagesse et la connaissance,
qu’ils sont libérés de l’emprise des autres systèmes religieux qui font tout
pour leur voler le peu de ressources qu’ils ont et les plongent dans une
misère noire. Toutefois, cela comporte un risque, à savoir que le chaman
ou le sorcier local exerce une emprise considérable sur les pauvres. Son
revenu dépend également de la crédulité de ceux qui pensent avoir
besoin de ses services. Les pauvres devront faire preuve de beaucoup de
courage et d’une confiance illimitée en Dieu pour pouvoir vaincre leur
crainte et échapper à cette emprise.

Le système social
La vulnérabilité. Le terme vulnérable vient du mot latin vulnerare qui
signifie « blesser ». Être vulnérable signifie s’exposer à un risque, être
sensible aux attaques ou aux meurtrissures. Les pauvres sont menacés
de toutes parts. Ils sont constamment menacés de perdre le peu qu’ils
ont. Les enfants qui vivent dans les familles pauvres courent le risque
d’être exploités. Il arrive que des familles réduites à une pauvreté
extrême envoient leurs enfants mendier dans les rues. Les enfants
soumis à de telles obligations courent le risque d’être percutés par un
véhicule et d’être exploités à tout-va car ils sont prêts à tout en échange
de quelques piécettes. Certains, notamment les filles, peuvent également
être victimes de sévices sexuels. Les familles pauvres sont vulnérables
du fait que l’on ne leur accorde pas autant de respect qu’aux riches. Les
pauvres sont traités différemment. Certains pensent qu’il n’y a rien de
mal à exploiter les plus démunis, que ce soit en les maltraitant sur le plan
physique ou en les sous-payant.

Les catastrophes naturelles, telles que les famines et les tremblements


de terre, ou les catastrophes d’origine humaine, comme les conflits
politiques, montrent à quel point les pauvres sont vulnérables. Lorsque,
lors d’un sinistre, une famille perd le peu qu’elle a, il lui sera difficile,
voire impossible, de s’en remettre. Les exigences culturelles et sociales,
comme la dot, le prix de la mariée, les frais d’obsèques et de mariage,
ou les sacrifices religieux, poussent les pauvres à s’endetter toujours
plus. Le plus souvent, ils empruntent de l’argent à de puissants usuriers
qui les exploitent lorsqu’ils n’arrivent pas à rembourser leurs emprunts.

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Esclaves des attentes sociales et de leur amour-propre, les pauvres font


des dépenses (vêtements ou bijoux) qu’ils ne peuvent assumer.

Parfois, il nous arrive de critiquer les pauvres lorsque, à nos yeux, ils
font des dépenses superflues, comme l’achat d’une nouvelle paire de
chaussures ou même d’un soda par exemple. Nous pensons que, vu leur
situation financière, leur argent ne devrait être consacré qu’à l’achat de
choses indispensables à la vie. Malgré le bien-fondé de ce raisonnement,
nous devons également nous rappeler que les pauvres ont, eux aussi,
des sentiments comme vous et moi. Nous aimons tous nous divertir, et
parfois nous ne sommes pas sérieux dans les choix que nous faisons. Il
se peut qu’un mari bien intentionné dépense trop d’argent en achetant
du tissu pour sa femme ou encore qu’un passionné de football encoure
des dépenses excessives pour assouvir sa passion. Si un riche fait un
mauvais choix quant à ses dépenses, peut-être en ressentira-t-il les
conséquences ; en revanche, lorsqu’un pauvre commet une erreur de
ce genre, cela peut littéralement avoir des conséquences fatales pour lui
et sa famille. Cela montre à quel point les pauvres sont vulnérables. Une
seule erreur peut être fatale sur le plan financier. Les pauvres ne peuvent
se permettre aucune erreur sur le plan financier, et cela les soumet à une
pression accablante.

Une telle pression financière peut en amener plus d’un à noyer son
chagrin dans l’alcool ou la drogue. Lorsque les pauvres ont recours à un tel
exutoire, leurs problèmes ne font qu’empirer. Malheureusement, ce sont
souvent les plus démunis qui sont les moins armés pour se protéger à cet
égard. Les pauvres, qui ont désespérément besoin d’argent, se laissent
facilement convaincre de donner le peu qu’ils ont à des personnes
qui leur promettent un moyen de s’enrichir rapidement. Ce sont les
membres de la société les moins instruits et, par conséquent, les plus
sensibles aux manœuvres de ceux qui cherchent à exploiter leur manque
d’éducation. Par exemple, au Kenya, bon nombre se sont jetés sur les
actions (investissement) d’une grande compagnie de téléphone mobile
qui promettait de leur verser de gros dividendes. En fin de compte, la
vente de ces actions a fait un tel tabac que les actions individuelles ont
perdu de leur valeur, et les investisseurs ont fini par y perdre au lieu
d’y gagner. Ceux qui désirent aider les pauvres à renforcer leur position
doivent porter un regard honnête sur la société et identifier les facteurs

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de vulnérabilité des pauvres. Il est nécessaire de faire pression sur les


grandes entreprises qui exploitent le désespoir des pauvres afin qu’elles
versent à leurs ouvriers des salaires équitables qui leur permettront
de réussir sur le plan financier et non pas uniquement de survivre.
Les pauvres doivent eux-mêmes prendre conscience de leur propre
vulnérabilité vis-à-vis des groupes ou des populations qui continuent de
perpétrer des actes de violence contre eux. En se joignant les uns aux
autres, en s’exprimant d’une seule voix et en se protégeant les uns les
autres, les pauvres peuvent commencer à devenir moins vulnérables.

L’impuissance. Les familles pauvres perdent leur droit de décider pour


elles-mêmes. Les pauvres sont contraints à travailler dans des conditions
difficiles en échange d’un salaire de misère du fait qu’ils sont prêts à tout
pour nourrir leur famille ou payer leurs dettes. Par conséquent, ils sont
souvent exploités par les non-pauvres et sont privés des avantages offerts
par les systèmes sociaux. Les systèmes sociaux, quant à eux, sont très
complexes et sont généralement créés par les non-pauvres de la société
en vue de servir leurs propres intérêts. Comme Myers l’a fait remarquer,
même parmi les plus pauvres de la société (comme les enfants des rues,
par exemple), il y a ceux qui sont ‘moins pauvres’ que les autres et qui
se considèrent comme des « gardiens », des « dieux » chargés d’imposer
leur volonté aux plus démunis. Ces personnes (souvent des agents de
police, des propriétaires, des usuriers ou des dirigeants religieux) sont
convaincues qu’elles méritent d’occuper une position privilégiée et
mettent en place des systèmes et des scénarios pour pouvoir conserver
leur position. Les pauvres en arrivent donc à croire que leur position et
la situation d’impuissance dans laquelle ils se trouvent sont normales et
que celles-ci ne peuvent ni ne doivent changer. Ainsi, les pauvres sont
prisonniers des systèmes et des scénarios établis par les non-pauvres
(Myers, 72-75).

Pour pouvoir reconquérir leur pouvoir, il est important que les pauvres
prennent part au processus de prise de décisions. Bon nombre de
décisionnaires croient que les pauvres sont incapables de décider pour
eux-mêmes. Ils partent du principe que si les pauvres pouvaient prendre
de bonnes décisions, alors ils ne seraient probablement pas pauvres.
Malheureusement, cela fait si longtemps que les pauvres s’entendent dire
que leur opinion ne compte pas, que leur avis ne vaut rien, que l’on n’a pas

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besoin d’eux et que leurs désirs ne sont pas importants, qu’ils commencent
eux-mêmes à croire ces mensonges. Il est du ressort du chrétien d’essayer
de faire renaître l’espoir dans la vie des pauvres. Si vous voulez aider les
pauvres, assurez-vous qu’ils puissent s’impliquer dans les décisions qui les
concernent ; cela est primordial. Au tout début, il se peut qu’ils refusent et
qu’ils vous demandent de décider pour eux et de faire les choses à leur
place ; cependant, ne les écoutez pas. En les incitant à prendre part au
processus décisionnel, vous ferez renaître en eux un sentiment de dignité,
vous les aiderez à reprendre confiance en eux et vous contribuerez ainsi à
neutraliser les effets de ce sentiment d’impuissance qui domine leur vie.

Le système personnel
Réfléchissez à la citation : « La pauvreté est destructrice ; la dignité
en est la première victime ». Qu’est-ce que cela signifie ? Comment
peut-on perdre sa dignité ? Qu’arrive-t-il à une personne lorsqu’elle perd
sa dignité ? Peut-on véritablement dire que les pauvres n’ont aucune
dignité ? Que dit la Parole de Dieu à ce sujet ?

À cause de leur situation, les pauvres se considèrent comme inférieurs


aux riches. Le fait d’avoir de l’argent ou d’accéder à un rang élevé peut en
amener plus d’un à se sentir important et puissant. D’après Genèse 1.27,
« Dieu créa l’homme à son image, il le créa à l’image de Dieu, il créa
l’homme et la femme ». Dans ce passage, la Parole de Dieu déclare que la
valeur et l’importance d’une personne ne dépendent nullement de son
rang, de ses richesses, de ses habits ou de sa position. Nous sommes
importants parce que nous avons été créés à l’image de Dieu. Tous les
êtres humains, quels que soient leur appartenance ethnique, leur langue,
leur sexe ou leur situation socioéconomique, sont égaux devant Dieu.

Malheureusement, les pauvres


« La pauvreté est n’y croient pas. Ils ne savent plus
qui ils sont ou pourquoi ils ont
destructrice ; la été créés (Myers, 76). Ils sont
convaincus qu’ils n’ont aucune
dignité en est la valeur et qu’ils n’ont rien à offrir
au monde. Ils se croient inutiles.
première victime. » C’est là l’expression la plus
profonde de la pauvreté, souvent

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appelée pauvreté de l’être. On raconte l’histoire d’une femme qui, après


avoir entendu l’Évangile pour la toute première fois, avait dit d’un air
préoccupé : « Je comprends votre histoire. Elle est probablement vraie.
Il est possible que Dieu ait envoyé Son Fils mourir pour l’homme blanc,
et peut-être même pour l’homme noir. Mais Il n’aurait JAMAIS envoyé
Son Fils pour sauver une femme comme moi » (Myers, 76). Cette femme
est très pauvre dans sa façon de penser. La pauvreté, la vie dure et les
mensonges que sa culture lui a inculqués lui ont fait croire qu’elle n’était
pas digne d’être aimée. Ce type de pauvreté est spirituel et psychologique.
Les comportements autodestructeurs des pauvres sont en grande partie
dus au sentiment d’insignifiance qu’ils éprouvent, et bon nombre d’entre
eux ont une image de soi déformée. Dans certains cas, les riches (les
non-pauvres), même ceux qui vont à l’église, contribuent à faire croire
ces mensonges aux pauvres.

Une perspective biblique de la pauvreté


Bryant Myers en a conclu que, « à la base, la pauvreté procède de relations
qui ne fonctionnent pas bien, de rapports qui ne sont pas équitables,
harmonieux ou vivifiants » (86). Lorsque des personnes sont convaincues
de leur infériorité en tant qu’êtres humains, de leur manque d’intelligence,
de force, de biens matériels ou même d’énergie nécessaire à leur bien-être
ou à celui de leur famille, l’image qu’elles ont d’elles-mêmes est déformée.
Lorsqu’elles pensent qu’elles n’ont rien à apporter au monde, elles ont une
image erronée de leur vie qui, d’après elles, n’a aucun sens.

Myers a fait remarquer que ce manque de vision et d’estime de soi


contribue à la pauvreté dans le monde. Les non-pauvres (les riches) ont,
eux aussi, une image faussée d’eux-mêmes. Les non-pauvres du monde
entier, du dirigeant d’entreprise richissime au chef de village à peine plus
riche que ses sujets, ont souvent tendance à se prendre pour Dieu et à
imposer leur volonté aux pauvres. Tant les pauvres que les non-pauvres
ont une conception faussée de leur identité et ont perdu de vue leur
véritable raison d’être ; ils ne font que l’exprimer de différentes façons.
Les pauvres se sentent inutiles et pensent qu’ils n’ont rien à apporter.
Les non-pauvres sont convaincus d’avoir le droit de prendre la place de
Dieu dans la vie des gens ; ils s’adjugent le droit de prendre les décisions
à la place des autres et, en retour, exigent le respect et un paiement

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Les bases bibliques du développement transformationnel

compensatoire. Ils agissent comme si leur position était censée leur


apporter un gain personnel et, tant qu’ils y sont, n’ont aucun scrupule à
exploiter les autres. Pourtant, de par leur position, ils pourraient mettre
en œuvre des moyens destinés à encourager la prospérité en vue du bien-
être de la communauté tout entière, notamment pour aider les pauvres à
s’affranchir des systèmes qui les maintiennent dans la pauvreté. Le seul
moyen d’y arriver, c’est de se repentir des mensonges et du péché qui
sont à l’origine de toutes les formes de domination.

La lutte de l’Église contre la pauvreté


Nous avons vu que la pauvreté est due à une interaction complexe
de systèmes qui touchent chaque aspect de la vie : physique, social,
économique, culturel, spirituel et personnel. La pauvreté la plus profonde
est celle que l’on appelle la pauvreté de l’être, la conviction selon laquelle
une personne se considère comme inutile et à laquelle adhèrent tant les
pauvres que les non-pauvres.

En tant que chrétiens, la repentance doit être au cœur de notre lutte


contre la pauvreté. Si nous faisons partie des non-pauvres, peut-être
sommes-nous de ceux qui pensent que les pauvres n’ont rien à offrir.
Peut-être contribuons-nous à la mauvaise image que les pauvres ont
d’eux-mêmes en nous fiant aux mensonges que notre société colporte,
comme par exemple : « Les pauvres ne doivent pas être inclus dans les
prises de décisions ; ils sont paresseux ; ils n’ont pas de bonnes idées ; ils
n’ont rien à offrir ; ils ne sont pas assez intelligents ; ils sont porteurs de
maladies dangereuses ; ils ne comprennent rien ». Peut-être croyons-nous
qu’il est de notre devoir divin de décider à la place des pauvres et des
démunis. Peut-être aimons-nous nous faire remarquer pour ce que nous
« faisons » pour les pauvres. Peut-être avons-nous besoin de confesser
notre orgueil qui nous pousse à nous imposer en « messies » humains,
convaincus qu’il est de notre ressort de sauver les autres grâce à notre
argent ou à nos biens. Si, en tant que non-pauvres du Corps de Christ,
nous croyons à ces mensonges, nous devons nous repentir sur-le-champ.

Nous devons croire que, comme les pauvres, nous avons été créés à
l’image de Dieu et que, à l’image des pauvres, nous sommes les régisseurs
de tout ce qui nous a été donné en vue de l’édification du Royaume de Dieu.

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Les bases bibliques du développement transformationnel

Si nous avons grandi dans la pauvreté et que nous en sommes toujours


prisonniers, il se peut que, nous aussi, nous croyions à ces mensonges
nous concernant. Là encore, la Bible nous dit de nous repentir. Si nous
nous accrochons à des principes que notre culture nous a enseignés en
ce qui concerne la pauvreté, des principes non-bibliques, nous devons
nous en défaire et changer notre façon de penser.

Cette vérité est consignée dans Genèse 1.27, 31 : « Dieu créa l’homme
à son image, il le créa à l’image de Dieu, il créa l’homme et la femme….
Dieu vit tout ce qu’il avait fait et voici, c’était très bon ». La Bible nous
enseigne que chaque être humain — chaque homme, chaque femme
et chaque enfant — est créé à l’image de Dieu et a reçu des dons, des
talents et des aptitudes qui lui sont propres. C’est sur cette vérité, et
non sur l’argent, le pouvoir ou le standing, que repose la dignité humaine.
C’est cette vérité que les pauvres ni ne connaissent ni ne croient. C’est
également cette vérité dont bon nombre de chrétiens non-pauvres ne
tiennent aucun compte lorsqu’ils excluent ou exploitent les pauvres.

De ces vérités ressort une bonne nouvelle, à savoir qu’il n’est pas
nécessaire pour une église locale d’avoir beaucoup d’argent pour pouvoir
lutter contre la pauvreté ! L’Église est le Corps de Christ, c’est-à-dire
littéralement les mains et les pieds de Jésus dans ce monde. Seule
l’Épouse de Christ est en mesure d’œuvrer en vue de la promotion de
relations plus équitables, plus harmonieuses et plus vivifiantes entre tous
les êtres humains créés à l’image de Dieu. Un bon moyen d’atténuer ce
genre de pauvreté est d’orienter les hommes vers le Sauveur véritable qui
Seul peut leur donner une meilleure image d’eux-mêmes et un sens à leur
vie. En nouant des relations avec les pauvres, les chrétiens contribueront
à renforcer la valeur et la dignité de ces derniers, et à les aider à voir
qui ils sont véritablement en Christ. C’est ainsi que nous arriverons à
endiguer la pauvreté la plus extrême ! Cela ne veut pas dire que nous
ne devons pas faire de dons matériels car sachez que ceux qui n’ont
pas suffisamment de quoi se nourrir, se vêtir et se loger ont réellement
besoin d’aide.

Cependant, nous devons apporter notre aide de manière à ce que les


gens prennent conscience de leur importance et de leur valeur aux yeux
du Dieu Tout-Puissant qui est la source même de leur dignité. Attachons-

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Les bases bibliques du développement transformationnel

nous à redonner aux pauvres la dignité qui est la leur au lieu d’alimenter
de fausses assertions selon lesquelles les pauvres ne sont bons à rien.
Dans une autre partie de ce cours, nous traiterons diverses façons d’aider
les pauvres. Dans la majorité des cas, l’aide alimentaire ou vestimentaire
dont bénéficient les pauvres n’a pas besoin d’être à long terme. La plupart
des pauvres ont besoin qu’on les aide à trouver des moyens de subvenir
à leurs propres besoins. Nous devons donner avec nos mains, mais notre
cœur ne doit pas oublier que nous ne sommes que les intendants des
dons que nous faisons. En toute humilité, nous devons reconnaître que
Christ, et Lui seul, est le Messie.

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Les bases bibliques du développement transformationnel

Révision et application
Après avoir considéré « Une perspective biblique de la pauvreté », le
moment est venu pour vous d’appliquer certains des concepts et des principes
présentés dans ce chapitre. Répondez à chacune des questions en donnant le
plus de détails possible.

1. Lisez Deutéronome 15 ; à votre avis, quel regard Dieu porte-t-Il sur


les pauvres et quelle est la responsabilité de l’Église à leur égard ?

2. Analysez les causes de la pauvreté en utilisant le diagramme


proposé dans le chapitre.

3. Expliquez la phrase suivante : « la véritable pauvreté est une


question de relations ».

4. Que pourrait faire votre église pour commencer à endiguer la


pauvreté ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 53 —
Deuxième partie
L’évangélisation et le témoignage dans le contexte
du développement transformationnel
C h a p i t r e 4 ����� Les bases du changement : une vision
biblique du monde ; deux aperçus ; un
changement durable ; se rapprocher d’une
vision biblique du monde
C h a p i t r e 5 ����� Un témoin holistique : savoir reconnaître
les occasions que Dieu donne ; la vision du
monde et le christianisme ; le témoignage
chrétien et la vision biblique et holistique
du monde ; le sacrement du forage de
puits ; la vision biblique du monde et le
Saint-Esprit
C h a p i t r e 6 ����� Comprendre les concepts clés du
développement ; définitions ; l’aide et le
développement ; le développement ; la
transformation ; les meilleures pratiques
C H A P I T R E 4

Les bases du changement :


une vision biblique du monde

Deux aperçus

É
tudiez attentivement le dessin de la Figure 4.1 Que voyez-vous ?
Si possible, invitez d’autres personnes à examiner cette illustration
en même temps que vous.

Voyez-vous une femme ? Est-


elle jeune ou âgée ? Poursuivez
attentivement votre examen. Voyez-
vous deux femmes ? Après quelques
instants, peut-être arriverez-vous
à discerner deux femmes : l’une
âgée, l’autre jeune. Et que voient
les personnes autour de vous ?
Certains ne verront qu’une seule
femme. Le but de cet exercice est
de montrer que diverses personnes
peuvent considérer une même
situation ou un même événement
de deux façons différentes. Figure 4.1

— 57 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

L’histoire ci-dessous nous est contée par le Dr Dan Fountain, un


missionnaire qui, pendant plusieurs années, a travaillé dans le domaine
de la santé communautaire en Afrique.

Un missionnaire spécialisé dans les soins médicaux en Inde


voulait démontrer les avantages de la chirurgie moderne à ceux
qui n’avaient que peu de contacts avec la technologie occidentale.
Il invita un jeune indien à assister à l’opération de sa tante qui
devait se faire enlever un goitre important.

Immédiatement après l’opération, le neveu se précipita chez lui


pour raconter aux anciens du village ce qui s’était passé. Voici sa
version des événements :

On m’a amené dans le temple de la guérison ; après m’avoir revêtu


d’une sainte tunique blanche et avoir couvert mon visage et ma
tête, on m’a conduit dans le saint des saints où je me suis assis
dans un coin. La présence des dieux a envahi le sanctuaire tant
est si bien que tous ceux qui étaient présents devaient se voiler le
visage et la tête.

Le docteur Sahib est entré dans le saint des saints, puis il a entamé un
rituel de purification qui consistait à se laver les mains pendant plusieurs
minutes. Entre chaque lavage, il se frottait les mains avec de l’huile.

Ensuite, une prêtresse est entrée dans la pièce ; elle s’est assise au
bout de l’autel du sacrifice et s’est mise à invoquer la bénédiction des
dieux. Après quoi, elle a soufflé sur ma tante et l’a plongée dans un
profond sommeil.

Après que ma tante se soit endormie, le docteur Sahib lui a ouvert la


gorge d’un coup de couteau, comme on le ferait lors d’un sacrifice,
pour essayer d’apaiser les dieux avec son sang. Le docteur et ses
prêtres assistants ont lutté contre les mauvais esprits pendant assez
longtemps. La lutte était si féroce que, de temps à autre, une prêtresse
devait éponger les gouttes de sueur qui perlaient sur le front du
docteur Sahib. Le docteur a fini par vaincre les mauvais esprits qui

— 58 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

ont promptement quitté le cou de ma tante qui, maintenant, n’est plus


possédée. (Fountain cité dans l’œuvre de Steward, 30)

C’est donc l’histoire d’un docteur chrétien au service du Seigneur qui


prend soin de plusieurs patients. Il agit avec amour et pour glorifier Dieu.
En revanche, pour le villageois indien, ce que fait le docteur a une tout
autre connotation.

John Steward utilise cette histoire pour montrer que certaines


personnes, selon leur vision respective du monde, peuvent interpréter
différemment une même situation (31). Prenez quelques minutes et
comparez la façon dont le docteur et le villageois ont chacun interprété
le même événement. Suivez l’exemple et remplissez les cases vierges en
donnant le point de vue du docteur.

Point de vue du villageois indien Point de vue du docteur


Exemple : le temple de la guérison Exemple : l’hôpital
La sainte tunique blanche
Le saint des saints
Le rituel de purification
Se frotter les mains avec de l’huile
La prêtresse
L’autel du sacrifice
Invoquer la bénédiction des dieux
Ouvert la gorge d’un coup de
couteau, comme on le ferait lors
d’un sacrifice
Lutter contre les mauvais esprits
Les esprits ont promptement
quitté

Figure 4.2

— 59 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Comment se fait-il que le jeune indien et le docteur voient les choses si


différemment ? Est-ce que l’un avait raison et l’autre tort ? Les différences
d’interprétation sont dues au contraste prononcé de la vision du monde
de l’un et de l’autre.

Notre vision du monde révèle notre propre façon de concevoir le


monde. C’est un peu comme si nous
portions des lunettes. Nous voyons
le monde à travers les verres des
lunettes que nous portons. Si
quelqu’un porte des lunettes
différentes, il se peut qu’il voie le
monde différemment. Celui qui
porte des lunettes de soleil, quant à
lui, peut être tenté de croire qu’un
Figure 4.3 orage se profile à l’horizon car les
nuages blancs semblent s’assombrir.

Notre vision et notre interprétation du monde participent de la vision


du monde qui nous est propre. La vision du monde est essentiellement
un système ou une perspective à partir duquel/de laquelle nous interprétons
ce qui se passe autour de nous. Cette perspective repose sur des suppositions
faites quant à la réalité, suppositions dont la plupart découlent de notre
culture et de la façon dont nous avons été élevés. La culture renvoie
généralement aux règles ou aux coutumes auxquelles adhère un groupe
de personnes qui ont une vision commune du monde.

De par la façon dont il avait été élevé, le jeune indien voyait le


monde via le prisme de la « vision traditionnelle du monde ». Pour
lui, chaque étape de l’opération avait une connotation « spirituelle »
et des conséquences « spirituelles ». Le docteur, quant à lui, de par
sa formation, voyait le monde à travers le prisme d’une « vision
scientifique du monde ». Tout ce qu’il voyait ou faisait avait une
signification scientifique. Il ne lui est jamais venu à l’idée que le jeune
garçon puisse attribuer à ses actions une signification « spirituelle ». La
vision du monde du jeune garçon et celle du docteur sont le produit de
leur culture respective. Aucun des deux n’a tort ni raison. Les deux sont
dans le vrai, chacun à sa façon.

— 60 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Un changement durable

Pour pouvoir réellement aider les personnes qui sont dans le besoin,
les chrétiens doivent comprendre la vision du monde de ceux et celles
qu’ils s’efforcent d’aider afin qu’un changement véritable puisse s’opérer.

Examinez l’arbre de la Figure 4.4. C’est un manguier. Chaque année,


il donne des mangues, mais, à
présent, les gens veulent des oranges
et non plus des mangues. Ils cueillent
toutes les mangues et attendent
impatiemment de pouvoir cueillir
des oranges ; pensez-vous que cet
arbre puisse produire des oranges ?
Bien sûr que non !

Aussi folle que puisse paraître cette


idée, c’est pourtant souvent ce que FRUIT Conséquences
nous essayons de faire dans le cadre BRANCHES Comportement
de l’œuvre de développement et dans TRONC Valeurs
RACINES Croyances
l’église. Nous pourrions comparer le
fruit de cet arbre aux conséquences Figure 4.4
de comportements particuliers.

Par exemple, ceux qui ont des mœurs sexuelles libres (comportement)
peuvent contracter le SIDA (conséquence). Les gens payent un sorcier
pour qu’il prononce quelques incantations avant la saison des semences
(comportement) et se retrouvent dans la pauvreté (conséquence).
Plusieurs groupes chargés du développement tendent à s’attaquer aux
conséquences du comportement humain. Leur objectif est de vaincre la
pauvreté et le SIDA en distribuant de l’argent et des préservatifs, et ils
espèrent que, l’année suivante, le fruit (les conséquences) sera différent.
Les conséquences, ainsi que les comportements autodestructeurs,
ne changeront jamais à moins d’une transformation profonde des
convictions et de la vision du monde (les racines) des hommes.

Semblable aux racines d’un arbre, la vision du monde est la chose


la plus difficile à changer car elle demeure au plus profond de l’être et

— 61 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

n’est donc pas visible. En tant que membres du Corps de Christ appelés
à amener les hommes à rejoindre le Royaume de Dieu, nous devons
prendre conscience du fait qu’une transformation de la vision du monde
s’impose. Si nous voulons réellement contribuer au bien-être physique
et spirituel de nos semblables, nous ne devons pas simplement nous
contenter de cueillir les fruits et ordonner à l’arbre de produire des fruits
contre nature. Nous devons fouiller davantage et encourager les gens à
adopter une vision biblique du monde.

Les projets de développement transformationnel permettent d’encourager


les gens à reconsidérer leur vision du monde et leurs profondes convictions.
Puisque la plupart des projets de développement traitent les problèmes et les
plaisirs de la vie quotidienne, les convictions des gens ont inévitablement
tendance à faire surface.

Par exemple, lisez ces deux histoires vraies :

• Un missionnaire avait rendu visite à un ouvrier impliqué dans une


action chrétienne de développement. Dès l’aube, ils étaient allés
rejoindre un groupe d’agriculteurs pour les aider à ensemencer
leurs jardins. Les agriculteurs n’avaient pas plus tôt franchi le
pas de la porte lorsque le cop s’était mis à chanter. Aussitôt, ils
firent volte-face et rentrèrent chez eux, disant qu’ils allaient devoir
attendre un autre jour pour planter (Steward, p. 118).

• Une jeune étudiante d’une école biblique venait juste de


s’initier aux avantages de la cuisson solaire. À l’aide d’un
cuiseur solaire tout simple et d’une marmite noire, la chaleur
du soleil peut cuire du riz ou faire mijoter un repas des heures
durant, ce qui allait donc lui permettre de faire d’importantes
économies de fuel. Toute excitée, elle se précipita chez elle
afin de montrer à sa famille ce qu’elle pouvait faire. Une fois
le repas prêt, elle en offrit une assiette à sa domestique. Cette
dernière recula et refusa de manger ce que sa maîtresse lui
proposait car elle était convaincue que ce procédé de cuisson
relevait de la sorcellerie.

— 62 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Ces histoires servent à illustrer le type de conflit de croyances


susceptible d’émerger lors d’une activité de développement.

Il est facile de dissimuler ses véritables convictions lors d’un culte ;


cependant, ces dernières ont tendance à remonter à la surface lors des
activités d’aide proposées, que ce soit dans le cadre de l’agriculture, de
l’alimentation en eau, de la santé ou de toute autre activité de la vie courante.
Ce n’est que lorsque les gens arrivent à extérioriser ce qui demeure au plus
profond d’eux-mêmes qu’une transformation peut s’opérer !

Chacun voit le monde à sa façon. En général, les membres d’un même


groupe ethnique ont des comportements et des croyances culturelles
similaires. Arrêtez-vous un instant sur l’image de la Figure 4.5.

La vérité adoptée par la culture


Principes de l’éthique du développement

Les mensonges auxquels adhère


la culture

Figure 4.5, voir Miller, 176

Que remarquez-vous en regardant ces arbres ? Dans quel sol sont-


ils plantés ?

— 63 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

L’arbre situé à droite est grand et feuillu. Il prend racine dans de la


terre remplie de vérité (V). L’arbre situé à gauche est chétif et mourant. Il
est alimenté par de la terre remplie de mensonges.

Chaque culture a son lot de vérité et de mensonges. Chaque culture


se prévaut de comportements ou de croyances qui n’ont rien à voir avec
l’enseignement biblique. La capacité d’épanouissement des membres
d’une culture donnée est largement amoindrie lorsque la vision du monde
et la culture d’un groupe ethnique sont parsemées de mensonges.

Réfléchissez attentivement à votre culture.

Sur une feuille de papier, notez les pratiques et les croyances culturelles
en vigueur au sein de votre communauté. Discutez les points suivants
avec d’autres personnes.

• Quelles sont les traditions ou les croyances qui ont un impact


positif sur votre communauté ?
• Quelles sont les pratiques susceptibles d’aider les membres de
la communauté à améliorer leur vie et à avancer dans la bonne
direction ? Par exemple, la tradition du respect des anciens
exerce une action favorable et vivifiante dans bon nombre de
communautés africaines.
• Quel comportement ou quelle attente socio-culturel(le) entrave le
développement de votre communauté ?
• Quelles sont les traditions ou formalités intégrées dans la vie de la
communauté qui, en réalité, sont une entrave à l’amour, à la santé
et à la vie ? Par exemple, dans certaines cultures, les jeunes garçons
sont obligés d’avoir des relations sexuelles avant le mariage. Cela
les expose, eux et les autres, aux MST ou au SIDA ; qui plus est,
ceci est contraire à l’enseignement biblique.

Satan est le père du mensonge, et tout comportement basé sur un


mensonge finira par affaiblir la communauté et par lui ravir sa vie.

Les pensées et les actions des hommes, quelle que soit leur culture,
sont guidées par leur besoin de survie. Dans les sociétés traditionnelles,
ces stratégies de survie s’accompagnent généralement d’un élément

— 64 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

spirituel (Myers, 141). L’illustration de la Figure 4.6 montre que la


communauté dont les stratégies de survie sont basées sur la vérité sera
une communauté bien portante, tandis que celle dont les stratégies
relèvent du mensonge perdra de sa vitalité et finira même par mourir.

Les activités de développement transformationnel entreprises par


des chrétiens offriront à l’église des occasions non seulement de faire
face aux croyances spirituelles des gens, mais aussi de les remanier. Ces
croyances sont à l’origine de l’épanouissement du fruit de chaque culture.
Cette transformation doit s’opérer au niveau des croyances spirituelles
traditionnelles de manière à ce que les hommes puissent en venir à se
confier à Dieu en tant que Créateur, Sauveur et Soutien du monde. Les
expressions d’adoration et les vérités de la Bible varient considérablement
d’une culture à l’autre. Il est nécessaire pour l’église de promouvoir la
vérité biblique étant donné que celle-ci touche à chaque domaine de la
culture de même que l’Église primitive le faisait déjà selon le texte du
livre des Actes.

Pour que nos communautés puissent véritablement être transformées,


nous devons viser droit au cœur des attitudes, des croyances et, au bout
du compte, de la vision du monde — la nôtre et celle de ceux auprès
desquels nous exerçons notre ministère. L’Ancien Testament nous
montre l’impact que peut avoir une vision du monde transformée sur un
peuple tout entier. Les Israélites avaient été réduits en esclavage par les
Égyptiens pendant plus de 400 ans. L’esclavage était leur quotidien, et ce,
depuis plusieurs générations. Bien qu’ils continuent de croire en Dieu et
de prier pour qu’Il les délivre, il n’en demeure pas moins qu’ils avaient
dès lors adopté une mentalité d’esclaves ; ils se considéraient comme
des esclaves et agissaient en tant que tels. Ils avaient pour habitude que
l’on subvienne à leurs besoins fondamentaux, et ils n’étaient donc pas
habitués à prendre des décisions.

Malgré tous les miracles accomplis par Dieu pour pouvoir les affranchir
du joug du pays d’Égypte, nous voyons que, à maintes reprises, les enfants
d’Israël ont douté de Dieu et de Sa capacité à les guider tout au long
de leurs pérégrinations. Chaque fois qu’ils se heurtaient à une difficulté
ou qu’ils rencontraient un obstacle — manque d’eau ou de nourriture,
obstacle de la mer Rouge, dangers physiques — ils se lamentaient sur

— 65 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

leur sort en disant qu’ils n’auraient jamais dû quitter l’Égypte. Dieu les
guidait miraculeusement vers un nouveau pays, et Il avait promis de faire
d’eux Sa nation ; pourtant, par moments, tout ce qu’ils voulaient, c’était
retomber dans l’esclavage ! Pendant quarante ans, Dieu a entrepris de
remanier leur vision du monde. Il les a formés ; Il les a instruits ; Il leur a
appris à développer de bonnes relations les uns avec les autres, à mener
une vie saine, à L’adorer et même à s’unir pour former une nation à part
entière. La mentalité de ceux qui avaient enfin été autorisés à rentrer
dans le pays promis était bien différente de celle de leurs ancêtres qui
avaient quitté l’Égypte tant d’années auparavant. Au cours des quarante
ans passés à errer dans le désert, les Israélites avaient bien changé. Dès
à présent, ils formaient une équipe, une nation fière, une nation capable
de prendre des décisions, une nation confiante en son Dieu et confiante
en sa capacité, par Lui, de prendre possession du pays promis.

Se rapprocher d’une vision biblique du monde


Les ouvriers chrétiens du développement transformationnel doivent
clairement énoncer le type de modification qu’ils désirent susciter au sein
de la vision du monde des communautés dans lesquelles ils œuvrent.
Une vision traditionnelle du monde semblable à celle du jeune indien
n’est manifestement ni biblique ni souhaitable puisque ceux qui voient
le monde ainsi vivent dans la peur constante des esprits. Toutefois, il est
tentant de vouloir rectifier les erreurs de la vision traditionnelle du monde
en faisant valoir une vision du monde purement scientifique et séculière qui,
elle, prétend que Dieu, si tant est qu’Il existe, est un Être lointain qui ne
s’intéresse qu’aux questions d’ordre privé et spirituel. La vision scientifique
du monde part du principe que Dieu n’intervient nullement dans le monde
physique et visible, et, par conséquent, n’a aucune incidence sur lui. La
vision scientifique du monde sépare le « réel » de l’« irréel » et s’en remet
uniquement aux concepts de la raison et de la preuve scientifique. Elle
avance que l’on ne peut connaître que ce que l’on peut voir, toucher ou
sentir. Puisque l’existence de Dieu, des anges, des démons, des esprits
et du monde invisible ne peut être prouvée au moyen de la science, les
adeptes de la vision scientifique du monde sont convaincus que ces choses
relèvent uniquement du monde « spirituel » de la religion et ne sont donc
pas réelles. À leurs yeux, il n’y a de « réel » que ce qui touche au monde
physique et qui peut être vu, entendu, senti, goûté ou touché.

— 66 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Imaginez une pièce couverte d’un toit. L’intérieur de la pièce représente


le monde physique que l’on peut voir et toucher. L’extérieur de la pièce
représente le monde spirituel. Celui ou celle qui se trouve dans la pièce et qui
se déclare partisan de la vision scientifique du monde pose en principe
qu’une barrière infranchissable sépare le monde spirituel et invisible du
monde physique et visible. Il ou elle suppose une séparation totale entre les
mondes spirituel et physique. Certains croient que Dieu existe et qu’Il est
tout-puissant, certes, mais ils croient également souvent qu’Il réside dans un
monde invisible et spirituel, et qu’Il se désintéresse des tenants et des
aboutissants de la vie quotidienne touchant au monde visible. Le monde
visible, celui qui se trouve à l’intérieur
de la pièce, s’explique entièrement
au moyen des sens physiques, de la
science et de la technologie. C’est la
raison pour laquelle bon nombre
d’ouvriers impliqués dans l’œuvre
de développement ne s’intéressent
qu’à la terre, aux graines et à l’eau
lorsqu’ils s’apprêtent à entreprendre
des plantations. Ils sont convaincus
que Dieu ou le monde spirituel n’a
rien à voir avec la culture et les
récoltes. Dans ses systèmes de
classification, la vision scientifique Figure 4.6
du monde ne tient AUCUN compte
des êtres spirituels qui communiquent avec le monde physique. En fait,
l’interaction entre le monde physique et le monde spirituel n’est nullement
reconnue. C’est ce que le Dr Paul Hiebert appelle le « milieu exclu » de la
vision scientifique du monde. Par conséquent, l’adepte de la vision
scientifique du monde peut en arriver à nier l’existence des mauvais esprits
qui portent atteinte à la vie physique car, selon sa vision du monde (les
racines de son système de croyances), cela semble impossible.

La vision traditionnelle du monde se rapproche de celle du jeune


indien. Elle sous-entend l’existence d’un dieu puissant mais distant qui
ne se préoccupe aucunement du quotidien de l’être humain. En général,
ce dieu est considéré comme un être tout-puissant, prévenant et capable
d’aider quelqu’un, ou de lui nuire, selon son bon vouloir. Si ce dieu

— 67 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

puissant n’est pas censé s’impliquer directement dans la vie des gens,
il n’en demeure pas moins que la vie physique des êtres humains est
soumise à l’action directe d’une myriade d’autres esprits. Le surnaturel,
pense-t-on, exerce une influence directe sur le quotidien.

Reprenons l’image de la pièce fermée. Selon l’adepte de la vision


traditionnelle du monde qui se trouve à l’intérieur de la pièce, cette dernière
est pourvue d’ouvertures qui permettent aux esprits de se déplacer facilement
d’un monde à l’autre (du physique au spirituel, et inversement). Il croit
fermement que l’activité physique
d’une personne a une incidence
directe sur le monde spirituel et que
le monde spirituel a, lui aussi, des
retombées physiques. C’est la raison
pour laquelle certains, en entendant
chanter le coq, refusent de planter
quoi que ce soit. Pour eux, il s’agit
d’un signe spirituel annonciateur
d’une calamité dans le monde
physique. Par conséquent, selon la
vision traditionnelle du monde, au
sein du monde visible se meuvent
Figure 4.7 des esprits dont les faits ont des
retombées sur le monde physique.
C’est pourquoi une jeune domestique pensait que le fait de cuire de la
nourriture dans un cuiseur solaire relevait de la sorcellerie. Les sorciers
procèdent à des rituels religieux qui sont censés contrôler ces esprits ou du
moins les empêcher de passer par les ouvertures et de perturber la vie de
famille. Les gens vivent dans la crainte de ces esprits.

D’après vous, laquelle de ces visions du monde est basée sur la


Bible ? Existe-t-il véritablement un lien entre le monde des esprits et le
monde physique ? Ou bien le monde physique est-il simplement soumis
aux lois scientifiques ?

Nous pourrions répondre « oui » aux deux dernières questions.


Cependant, ni l’une ni l’autre ne sont véritablement basées sur la Bible.
C’est là un point que nous allons développer plus amplement.

— 68 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Il est essentiel de rectifier les opinions des adeptes de la vision


scientifique du monde. Dieu a créé le monde, que ce soit le monde
visible ou invisible, et Il règne sur toutes choses (Colossiens 1.15–23).
Il a également créé la science. Il est vrai que les disciplines associées au
monde physique, comme l’agriculture ou la médecine par exemple, sont
régies par des principes scientifiques. Les phénomènes qui se manifestent
dans le monde physique, comme la maladie, la famine ou la sécheresse,
relèvent eux aussi de causes scientifiques. Cependant, les explications
scientifiques ne sont pas les seules explications valables aux problèmes
physiques. Dieu Lui-même est l’auteur de la science. Il transcende les lois
de la nature, quelles qu’elles soient. S’Il le désire, Il peut contourner les
lois de la nature et avoir recours au surnaturel pour guérir une personne
atteinte du SIDA. D’après les lois scientifiques, la personne affectée par
le virus du SIDA n’a d’autre issue que la mort. Mais le champ d’action de
Jésus va bien au-delà du processus naturel du virus. Il convient également
de noter que les mauvais esprits peuvent, eux aussi, affecter les hommes
et les terres sur le plan physique. La terre est entourée d’êtres spirituels,
soit anges, soit démons, issus respectivement des lieux célestes ou des
ténèbres de l’enfer. Par conséquent, il est juste d’avancer que les causes
des problèmes physiques de l’Humanité sont à la fois d’ordre physique
et spirituel. Dans la Bible, notamment dans l’Ancien Testament, Dieu a
souvent eu recours à la famine, à la maladie et aux guerres pour punir Israël
(Deutéronome 28). La cause fondamentale du problème était spirituelle,
mais les conséquences du problème spirituel se sont manifestées dans le
monde physique. Une vision strictement scientifique du monde a besoin
d’être remaniée, et on ne peut ignorer le fait que le monde des esprits
communique avec le monde physique et a de l’influence sur lui.

D’un autre côté, la vision traditionnelle du monde n’est pas non plus
entièrement basée sur la Bible. Il est vrai que le monde des esprits et le
monde physique sont reliés l’un à l’autre et que bon nombre de problèmes
physiques relèvent de causes spirituelles. Toutefois, il est très important de
comprendre que Dieu, à travers Jésus-Christ, règne sur toute la Création,
qu’elle soit visible ou invisible. Cela signifie que Dieu est plus puissant
que le monde des esprits tout entier, y compris les anges et les démons.
Dieu seul est incréé ; tous les autres êtres, qu’ils soient physiques ou
spirituels, ont été créés et sont soumis à la souveraineté de Christ. Bien
que Satan ait beaucoup de mauvais esprits à sa disposition pour nous

— 69 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

attaquer, Jésus les surpasse tous. Ainsi, le chrétien ne doit pas vivre dans
la peur d’attiser la colère des mauvais esprits et de s’attirer des ennuis
physiques. Pas besoin de sacrifier des choses ou des personnes pour
apaiser les esprits. Le Seigneur Jésus-Christ est Seul digne de recevoir
notre adoration et nos sacrifices. Les adeptes de la vision traditionnelle
du monde doivent également réaliser que Dieu est l’Auteur de la science
et des lois de la nature, et que plusieurs manifestations physiques sont
dues à des causes scientifiques. Les chrétiens doivent épouser les idées
de la science et de la médecine car Dieu en est le Créateur et Il désire que
le monde opère selon les lois de la nature.

Le tableau du Dr Paul Heibert intitulé « La faille du milieu exclu » permet


d’illustrer ce point (Myers, 8) :

VISION TRADITIONNELLE VISION SCIENTIFIQUE


DU MONDE DU MONDE
Le monde invisible : Le monde invisible :
Haute religion Haute religion
• Dieu créateur • Dieu
• Allah • Allah
• Religion officielle • Être suprême
Basse religion Basse religion
• Chamans et magie • « milieu exclu »
• Ancêtres et esprits • Croyance selon laquelle il
• Malédictions et bénédictions n’est aucun être spirituel ou
• Mauvais œil, sacrifices rituel capable d’influer sur
• Religion populaire la vie physique
Le monde visible Le monde visible
• Les relations • Entendre, voir, sentir, toucher
• Entendre, voir, sentir, toucher • La science et la technologie
• La science populaire • Le développement
• Le Coran
Figure 4.8

La colonne de gauche présente une autre façon d’illustrer ce que nous


venons de développer. Les adeptes de la vision traditionnelle classique

— 70 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

du monde croient fermement au monde invisible. En général, le monde


invisible est divisé en deux groupes :

1. La « Haute religion » renvoie aux êtres spirituels suprêmes qui


n’ont aucune communication directe avec les êtres humains, et
2. La « Basse religion » fait référence au monde invisible au sein
duquel se meuvent les esprits inférieurs qui sont en interaction
constante avec le monde physique et qui influencent la vie.

En dernier lieu figure le monde visible, c’est-à-dire la terre, les êtres


humains et leurs interactions.

La colonne de droite présente la vision scientifique du monde.


Dans certains cas, les adeptes d’un tel mode de pensée croient en
l’existence d’un monde invisible gouverné par un être suprême divin
auquel est attribué le nom de Dieu, d’Allah ou de toute autre divinité.
Toutefois, les partisans de la vision scientifique du monde ne croient
nullement en l’existence d’une « basse religion » ou d’êtres spirituels
susceptibles d’influencer le monde physique ou de communiquer
avec lui. C’est pour cela que l’on parle de milieu « exclu ». Aux yeux
de l’adepte de la vision scientifique du monde, le monde visible
constitue la catégorie la plus importante étant donné qu’il abrite le
monde « réel ».

Malheureusement, plusieurs ont essayé de dissiper les craintes


inspirées par la vision traditionnelle du monde en remplaçant cette
dernière par un mode de pensée scientifique. Le nouveau croyant finit
par ne plus savoir où il en est ; il ou elle est pleinement conscient(e) de
la réalité et de la puissance du monde des esprits mais ne reçoit aucun
enseignement biblique susceptible de valider ses opinions. Au contraire,
tout ce qu’il s’entend dire, c’est que sa vision du monde n’est que
« superstition ». Bien souvent, cette personne reçoit un enseignement
scientifique et technologique qui est censé l’« aider » à « surmonter »
sa crainte des esprits. Cela n’est tout simplement pas acceptable car
présenter la science sous les traits de Dieu n’est autre qu’un blasphème.
À présent, voyons où se situe la vision biblique du monde comparée aux
visions traditionnelle et scientifique.

— 71 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

VISION VISION VISION BIBLIQUE DU


TRADITIONNELLE SCIENTIFIQUE DU MONDE
DU MONDE MONDE
Le monde invisible : Le monde invisible : Le monde invisible :
Haute religion Haute religion • Dieu le Père
• Dieu créateur • Dieu • Dieu le Fils
• Allah • Allah • Le Saint-Esprit
• Religion officielle • Être suprême • Les anges
Basse religion Basse religion • Les démons
• Chamans et • « milieu exclu » • Les dons de l’Esprit
magie • Croyance selon • Les membres du
• Ancêtres et spirits laquelle il n’est corps
• Malédictions et aucun être
bénédictions spirituel ou
• Mauvais œil, rituel capable
sacrifices d’influer sur la vie
• Religion populaire physique
Le monde visible Le monde visible Le monde visible
• Les relations • Entendre, voir, • Dieu a créé le
• Entendre, voir, sentir, toucher monde physique
sentir, toucher • La science et la qui est soumis aux
• La science technologie lois de la nature
populaire • Le et aux principes
• Le Coran développement scientifiques
• Dieu peut suspendre
les lois de la nature
• Dieu est toujours
étroitement impliqué
dans le monde
physique
• Le Saint-Esprit remplit
le croyant et opère de
façon surnaturelle
Figure 4.9

Étudiez attentivement le tableau de la Figure 4.9. Arrêtez-vous un


instant sur la colonne de droite intitulée « Vision biblique du monde ». En
quoi se compare-t-elle aux deux visions traditionnelle et scientifique du
monde ? Nous avons fait remarquer que la vision scientifique du monde
exclut le monde des esprits et refuse de reconnaître son existence. La

— 72 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

vision traditionnelle du monde, quant à elle, avance que les hommes


et la création sont, à tout instant, soumis à l’action de diverses forces
spirituelles. Les rituels sont nécessaires pour apaiser les nombreux
esprits qui assaillent les hommes.

Examinons de plus près la vision biblique du monde. La Bible nous dit


clairement qu’il n’y a qu’un seul Seigneur et qu’un seul Dieu manifesté
en trois personnes distinctes : Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-
Esprit. Le Dieu Tout-Puissant est le seul Créateur de l’univers. Il a créé
toutes choses, visibles et invisibles, y compris les anges et les démons
(anges déchus). Dieu règne sur toute Sa création et, pour Lui, tant les
éléments invisibles et spirituels que les éléments visibles et physiques
font partie du monde qu’Il a créé. La vision scientifique se trompe sur
toute la ligne lorsqu’elle affirme que Dieu et les forces spirituelles n’ont
aucune incidence sur la nature. La Bible enseigne clairement que les
anges sont « des esprits qui servent » ; en fait, la Bible nous dit que les
anges sont venus servir Jésus.

La Bible ajoute également que Satan et ses démons sont présents


dans le monde et s’efforcent par tous les moyens de nuire aux hommes.
À travers Christ, Ses disciples et les croyants aujourd’hui, nous savons
que le Saint-Esprit lutte contre les forces du diable qui s’attaquent aux
êtres humains du monde entier. Il y a une grande différence entre les
visions biblique et traditionnelle du monde, à savoir que les chrétiens
savent que, par l’intermédiaire de Jésus-Christ, Dieu, et non les forces
démoniaques effroyables, est le Maître du monde spirituel. Les hommes
seront affranchis de l’emprise qu’exercent sur eux les esprits lorsqu’ils
abandonneront la « basse religion » qui les ruine et les accapare tant, et
accepteront de croire en la puissance de Dieu le Saint-Esprit qui les aime
et qui ne veut que leur bien.

Jésus, lors de Son séjour sur la terre, a calmé la tempête, multiplié les
pains et les poissons, et ressuscité les morts. Dans l’Ancien Testament,
nous lisons que la terre s’est ouverte et a englouti ceux qui avaient désobéi,
que les eaux de la mer Rouge se sont partagées en deux, que le feu est
descendu du ciel et a consumé Sodome et Gomorrhe, et que les animaux
sont entrés dans l’arche deux par deux. Ézéchiel 14 mentionne certains
châtiments que Dieu se préparait à infliger à Israël à cause de son péché :

— 73 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

interruption de l’approvisionnement alimentaire, famine, invasion de


bêtes féroces, guerre et épidémie de peste. Tous ces châtiments ont trait
au monde physique ; il ne s’agit pas simplement de problèmes spirituels.
Bien qu’ils puissent être expliqués au moyen de la science, à la base,
ces problèmes ne sont ni scientifiques ni technologiques. Dieu en est
l’instigateur.

Cependant, nous aurions tort de présumer que chaque problème


physique est dû à un problème spirituel. Jean 9 raconte l’histoire d’un
homme aveugle-né. Avant que Jésus ne guérisse cet homme, Ses disciples
Lui demandèrent : « Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour
qu’il soit né aveugle ? » (Jean 9.2). Jésus leur répondit en disant : « Ce
n’est pas que lui ou ses parents aient péché ; mais c’est afin que les
œuvres de Dieu soient manifestées en lui » (v. 3). Les croyants prient pour
la guérison ; ils croient également que la plupart des maladies relèvent
directement de causes scientifiques et peuvent être soit prévenues, soit
traitées sans avoir recours à la sorcellerie, et ce, en tenant compte tout
simplement des bonnes pratiques médicales mises en place par Dieu.

La vision biblique du monde est holistique ; ses adeptes attribuent les


problèmes à des causes scientifiques et spirituelles. C’est pour cela que les
organismes laïques de développement partisans d’une vision scientifique
sont absolument incapables de s’attaquer à la racine de bon nombre
de problèmes. Seule l’Église peut véritablement aider les hommes à
apporter un changement durable — susciter une transformation — au
sein de leurs communautés.

À moins d’une transformation fondamentale d’une vision traditionnelle


à une vision biblique du monde, la peur qu’éprouvent les communautés à
l’égard du monde des esprits et des sorciers, et l’emprise que ces derniers
exercent sur elles finiront par les appauvrir. À moins d’une transformation
fondamentale d’une vision scientifique à une vision biblique du monde,
l’œuvre des ouvriers du développement continuera d’être vouée à l’échec
étant donné que ces derniers n’acceptent pas la vérité spirituelle selon
laquelle Christ est souverain ; ainsi, les gens continueront de vivre dans
la peur et dans la pauvreté.

— 74 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Lorsque l’église organise des actions de développement à petite


échelle au sein de la communauté, les croyants ont alors l’opportunité
de proclamer la souveraineté et la puissance de Christ, et donc de
transformer la vision du monde des membres de la communauté.

— 75 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous avez terminé votre étude des « bases du changement :
une vision biblique du monde », l’heure est venue pour vous de mettre en
pratique le savoir acquis ; pour cela, répondez aux questions suivantes.

1. Pourquoi arrive-t-il que différentes personnes expliquent souvent


une même expérience vécue de façons différentes ? Basez votre
discussion sur les concepts de la vision du monde et de la culture
traités dans cette leçon.

2. Dans le cadre des projets de développement, que peut-on faire


pour susciter un changement durable dans la vie des membres de
la communauté ?

3. Quel est l’objectif des stratégies de survie mises en œuvre au sein


d’une communauté ?

4. Comparez les visions traditionnelle et scientifique du monde et


exposez leurs différences. Quelle est la différence principale entre
les deux ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 76 —
C H A P I T R E 5

Un témoignage holistique :
Savoir identifier les occasions
que Dieu donne

La vision du monde et le christianisme

N
otre vision du monde aura un impact sur notre vie chrétienne.
Lorsque nous devenons chrétiens, notre vision du monde ne
change pas systématiquement. Notre vie participe de notre
culture et il en est de même de notre vie chrétienne. Cette diversité est
une bonne chose, et elle fait partie du plan de Dieu. Cependant, parfois,
nous ne réalisons pas que notre culture et notre vision du monde peuvent
mettre un frein à l’expression de nos convictions chrétiennes.

Darrow Miller, dans son livre intitulé Faites des nations mes disciples,
met en évidence l’impact de la vision scientifique sur notre vie chrétienne
(voir la Figure 5.1).

La vision scientifique du monde part du principe que les mondes


spirituel et physique sont séparés l’un de l’autre et n’ont aucun contact.
Voir la Figure 5.2. Pour ainsi dire, le chrétien adepte de la vision scientifique
du monde voit Dieu comme le Dieu du monde spirituel mais pas comme

— 77 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

le Maître du monde naturel. Les nombreux chrétiens qui se rangent sous


la bannière d’un tel mode de pensée considèrent l’évangélisation comme
une « œuvre spirituelle » et le développement comme une « œuvre laïque ».
Si les évangéliques croient que la Bible est la révélation de Dieu et est
digne de foi, leur vision scientifique du monde peut en pousser certains à
ne la considérer que comme un guide uniquement applicable au monde
spirituel. Pour eux, la Bible n’a rien à voir avec la vie économique, les
structures politiques ou la découverte scientifique.

DIEU

VIE SPIRITUELLE

MONDE
NATUREL
PHYSIQUE

Figure 5.1 (Miller, 47)

DIEU

Figure 5.2

— 78 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Il s’agit là d’un malentendu que la vision biblique du monde s’efforce


de dissiper ; le mode de pensée biblique est de nature holistique et
présente Dieu comme le Seigneur de toute la création, que ce soit sur le
plan physique ou spirituel. Les défenseurs de la vision biblique du monde
sont convaincus que Dieu peut racheter les hommes en tout temps, que
ce soit durant les moments d’activité « spirituelle » ou les moments
d’activité « physique ».

Le diagramme de la figure 5.3 est un autre moyen d’illustrer ce point :

DIEU

Figure 5.3

La case de gauche illustre l’impact de la vision scientifique du monde


sur notre vie chrétienne. Nous avons souvent tendance à enfermer
Dieu dans l’église parce que nous croyons qu’Il ne s’intéresse qu’aux
choses spirituelles. Nous croyons à la puissance de Son Saint-Esprit
et nous sommes convaincus de la vérité de Sa Parole. Cependant, les
programmes que nous mettons en place semblent indiquer que la
puissance de Dieu et Sa vérité se limitent exclusivement à l’enceinte
de l’église ; nous ne considérons pas les activités de la vie quotidienne
comme des occasions spirituelles de rendre témoignage. Nous creusons
un fossé entre Dieu et le monde.

— 79 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Si une église désire aider ceux qui se trouvent à l’extérieur de ses murs,
par exemple en leur fournissant des vivres ou en les aidant à creuser un
puits, alors pourquoi ne pas commencer par leur apporter Dieu ?

DIEU

Figure 5.4

La case de droite de la Figure 5.4 permet d’illustrer ce point. Elle


montre que nous essayons toujours de tracer une ligne de démarcation
entre l’intervention divine et les activités de la vie quotidienne.

En quoi une vision biblique et véritablement holistique du monde peut-


elle influencer notre pratique et notre témoignage chrétiens ? Les adeptes
de la vision biblique du monde croient que Dieu est le Seigneur de la
terre entière, c’est-à-dire à la fois des éléments invisibles et spirituels, et
des éléments visibles et physiques ; leurs actions sont guidées par cette
conviction. En tant que chrétiens, si nous adhérons à cette vision du
monde, elle exercera un véritable impact sur notre témoignage chrétien.
La peur du monde des esprits ne nous accaparera plus au point de
nous empêcher d’utiliser tout ce que Dieu a créé pour le bien de notre
communauté. Nous refuserons de croire que la science, la technologie
et l’argent sont seuls capables de résoudre les problèmes du monde

— 80 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

naturel. Si nous avons permis à ces choses de remplacer Dieu dans


notre esprit, peut-être devrions-nous nous en repentir. Aucun aspect de
la création n’échappe au contrôle de Dieu ; nous devons en être certains.
En tant que chrétiens, nous nous attendrons à ce que Dieu manifeste Sa
puissance et Sa vérité à l’intérieur comme à l’extérieur de l’église, et ce,
à travers les activités spirituelles et les activités dites physiques. Nous
sonderons les Écritures pour voir ce qu’elles nous enseignent concernant
chaque activité de la vie quotidienne. En outre, nous trouverons des
moyens de partager la Parole de Dieu avec à-propos dans tout ce que
nous faisons, et pas uniquement à l’intérieur de l’église. Nous serons des
chrétiens holistiques et bibliques convaincus que la Bible est la vérité de
Dieu applicable à chaque aspect de la vie.

Prenons comme exemple la vie de Jésus. Quelles méthodes a-t-


Il utilisées lors de Son ministère ? Où et comment a-t-Il exercé Son
ministère ? Les évangiles nous disent que Jésus marchait et s’entretenait
avec les gens tandis qu’ils vaquaient à leurs occupations quotidiennes. Il
allait souvent à la rencontre des pêcheurs sur les rivages de la mer et Il se
rendait également sur les places des marchés, dans les maisons et dans
les champs. En fait, Il passait la plupart de Son temps à l’extérieur. Il est
très important de constater que Jésus ne répétait pas constamment les
mêmes choses lorsqu’Il enseignait. Qui plus est, Il utilisait des illustrations
tirées de la vie quotidienne : agriculture, pêche, les impôts, le fait de
puiser de l’eau ou tout simplement de manger, selon ce que les gens
faisaient au moment où Il s’entretenait avec eux. Dans les évangiles,
nous rencontrons également Jésus en train de lire un manuscrit dans
la synagogue et d’enseigner dans le temple. Il Se consacrait à l’œuvre
spirituelle de l’« église », certes, mais la majorité des miracles et de
Son ministère pédagogique ont eu lieu en dehors de l’« église ». Qu’a
donc fait Jésus pendant Son ministère ? Le plus souvent, Il guérissait les
malades, touchait les gens, enseignait et chassait les démons. L’Esprit
était à l’œuvre dans tout ce qu’Il faisait, que ce soit dans l’enceinte du
temple ou dans la rue. À chaque fois, Il expliquait la signification de Ses
miracles et de tout ce qu’Il faisait. Luc 5 raconte l’épisode de la pêche
miraculeuse au cours de laquelle Jésus a appelé Pierre, Jacques et Jean
à Le suivre. Par Ses paroles, Il cherchait toujours à proclamer la vérité
autour de Lui et à remettre en question leurs visions du monde, leurs
croyances et leurs valeurs. Par exemple, Matthieu 15 rapporte la façon

— 81 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

dont Jésus a répondu aux pharisiens qui voulaient savoir pourquoi Il ne


se lavait pas les mains avant le repas, une tradition cérémonielle qui
avait une certaine importance à leurs yeux. Il comptait se servir de cette
pratique pour leur enseigner la pureté intérieure. Jésus voulait que les
hommes soient transformés de l’intérieur ! Jésus ne S’est pas contenté
de mémoriser un message d’évangélisation qu’Il adaptait à toutes les
situations. Au contraire, Il avait assimilé toutes les vérités du Royaume et
de la Parole de Dieu, et Il savait les communiquer en fonction du besoin
de manière à encourager et à transformer ceux qui les recevaient.

Le témoignage chrétien et une vision biblique et holistique du


monde
Méditez ces quelques mots : Bonne nouvelle, évangélisation et témoignage.
À présent, dans votre cahier, notez certaines idées qui vous sont passées par
la tête lorsque vous avez lu ces mots. À quelles activités renvoient-ils ?

La plupart d’entre nous définissent l’évangélisation comme « un moyen


de présenter oralement le message de la mort et de la résurrection de Dieu
et du salut offert à tous ceux qui se repentent ». En général, évangéliser
signifie demander à une personne
« Il n’est pas bon qui a entendu la bonne nouvelle si
elle désire se repentir de ses péchés
de lancer des et accepter Jésus-Christ comme
son Sauveur et Seigneur. Rendre
réponses, comme témoignage consiste le plus souvent
à témoigner de la puissance et de
on lancerait des l’œuvre de Dieu dans notre vie.

pierres, à la tête
D’après Romains 10.13–15, les
hommes ne pourront croire et ne
de ceux qui n’ont pourront accéder au salut à moins
d’avoir entendu la Parole de Dieu.
pas encore posé Il est également intéressant de
de question. » noter la signification initiale du
mot témoin. C’est en fait un dérivé
—Tillich du terme grec traduit en français
par martyr. Pour être un témoin

— 82 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

véritable du Royaume, le croyant doit s’impliquer de tout son cœur, de


toute son âme, de toute sa pensée et de toute sa force dans tout ce qu’il fait.
Souvent, nous pensons qu’évangéliser, c’est simplement partager quelques
paroles ou vérités qui méritent d’être connues et des doctrines qui ont
besoin d’être acceptées. Les paroles sont essentielles à l’évangélisation,
certes, mais le témoignage l’est encore plus. Cela revient à partager la
bonne nouvelle de l’Évangile par ma façon de vivre au quotidien : par
mes paroles et par mes œuvres accompagnées de signes et de prodiges.
Ma parole n’est pas mon seul témoignage ; ce dernier doit également être
conforté par ma façon de vivre, par la bienveillance dont je fais preuve, par
mon dévouement à l’égard des autres et par la puissance du Saint-Esprit
qui manifeste la présence et la puissance de Dieu à travers moi.

Nous devons avoir conscience du fait que notre témoignage est


constant. Mais rendre témoignage de quoi ? De quoi notre vie témoigne-
t-elle ? Ceux qui sont nourris, touchés et consolés font une expérience
tangible du Royaume de Dieu. Lorsque les enfants de Dieu rendent un tel
témoignage au sein de leurs communautés, la relation des hommes avec
Dieu est rétablie grâce au pardon des péchés et les relations des hommes
entre eux sont restaurées grâce à la rupture du joug de l’oppression qui
pesait sur eux.

La Bible nous dit d’être des témoins, et pas seulement d’agir en


tant que tels. Nous avons souvent tendance à dissocier le message de
l’Évangile de la vie du messager. Peut-être pensons-nous avoir rempli
notre devoir du fait que nous nous sommes acquittés de notre « message »
(prêcher), mais ce n’est pas ainsi que Jésus l’entendait. Le messager fait
partie intégrante du message de la bonne nouvelle. Lorsque les disciples
de Jean-Baptiste ont demandé à Jésus s’Il était véritablement le Messie,
ce dernier a répondu en disant : « Allez rapporter à Jean ce que vous
entendez et ce que vous voyez : les aveugles voient, les boiteux marchent,
les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et
la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres » (Matthieu 11.4–5). Jésus
rendait un témoignage holistique qui se manifestait à travers Ses paroles,
Ses œuvres et des signes.

Que vous commenciez à partager l’Évangile en accomplissant de bonnes


œuvres, en priant pour que Dieu vous accorde un signe puissant ou tout

— 83 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

simplement en le proclamant haut et


fort, le message de la bonne nouvelle
Œuvre
Parole Inten- se doit d’inclure les trois. Le message
Relation dance de l’Évangile que nous présentons
ne doit pas passer outre à la réalité
spirituelle de la vie éternelle ni aux
réalités physiques et actuelles de la
Signe pauvreté, du manque d’instruction, de
Apparte- la maladie, de l’oppression politique,
nance de l’exploitation et du désespoir.
Figure 5.5
Le but de Jésus était toujours
d’amener les hommes à intégrer le
Royaume de Dieu ; cependant, Sa façon de rendre témoignage fluctuait
selon les besoins des personnes auxquelles Il s’adressait. Il cherchait
toujours le Royaume de Dieu en premier, mais Il était aussi en mesure de
s’adapter à la situation des hommes. Le meilleur moyen pour le chrétien
de toucher celui qui a faim avec l’Évangile est de lui donner à manger.
Une personne possédée devra d’abord être délivrée de l’emprise de Satan
avant d’être amenée à comprendre les Écritures. Bon nombre de gens
sont curieux et aiment étudier et apprendre ; ceux-là acceptent l’Évangile
du Royaume par l’intermédiaire d’échanges oraux. Notre témoignage
n’aura de poids que s’il englobe chacun des trois aspects mentionnés
précédemment : la parole, l’œuvre et le signe.

En 1994, le Kenya fut fortement touché par la sécheresse. Mon mari,


Kévin, et moi aidions des missionnaires de longue date à collaborer
avec l’église locale de Loitoktok, au Kenya, par le moyen d’une action
de distribution de nourriture menée auprès des Maasaï. Nous sommes
allés par monts et par vaux pour pouvoir atteindre les bomas (nom des
maisons maasaï) et commencer à distribuer des céréales et de l’huile. Un
jour, après la prédication du pasteur national, un jeune garçon infirme
s’est approché pour que l’on prie pour lui. Kevin reçut en son cœur de
prier pour sa guérison et, avec le pasteur maasaï, ils se mirent tous deux
à lui imposer les mains et à prier pour lui. Plus tard, Kevin entendit dire
que le jeune enfant avait été guéri ! Le pasteur est resté en contact avec
la famille et a continué à partager la vérité et l’amour de Dieu avec elle ;
tous les membres de la famille ont fini par intégrer le Royaume de Dieu.

— 84 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Lorsque Dieu opère un miracle et transcende les lois physiques de la


nature, cela nous rappelle qu’Il est véritablement le Maître de la Création.
Comme nous l’avons vu dans l’histoire de Moïse et de Pharaon, les
disciples de Satan peuvent, eux aussi, être à l’origine d’événements
surnaturels (Exode 7.9–12). Toutefois, Dieu seul exerce un contrôle total
sur la nature, et le nom de Jésus l’emporte toujours sur la puissance de
Satan. Lorsque Jésus avait recours au surnaturel, Il le faisait toujours
dans le but de glorifier Dieu et pour le bien de Son peuple. Expérimenter
la puissance surnaturelle de Dieu peut également ouvrir la voie à une
meilleure compréhension de l’Évangile. Si l’on n’explique pas qui est à
l’origine du miracle, le témoignage est insuffisant.

La plupart du temps, lorsque nous pensons à l’évangélisation, nous


nous concentrons sur le côté gauche du triangle : rétablir la relation entre
Dieu et les hommes. Nous pensons souvent que les paroles suffisent pour
ramener les hommes dans une relation intime avec Dieu. S’il est vrai que,
sans la Parole, aucune œuvre ni aucun

« Ventre
signe n’ont véritablement de sens, il est
tout aussi vrai que répondre aux besoins
physiques des hommes peut les amener
à se réconcilier avec Dieu. Nous devons
affamé
en être conscients pour pouvoir bien
comprendre les tenants et les
n’a point
aboutissants du témoignage holistique. d’oreille. »
Certains prétendent que l’on peut
partager l’Évangile en apportant une
aide physique, et ce, sans toutefois annoncer le Royaume de Dieu.
Cependant, si nous n’expliquons jamais pourquoi nous aidons nos
prochains ou qui est à l’origine des miracles accomplis, les personnes
auprès desquelles nous exerçons notre ministère interpréteront mal nos
actions et rendront gloire à d’autres esprits ou attribueront chaque exploit
aux bienfaits de la science et de la technologie. C’est ce que nous a enseigné
l’anecdote du jeune Indien qui avait assisté à l’opération de sa tante.

Les chrétiens ont souvent du mal à combiner évangélisation et bonnes


œuvres. Il est important d’expliquer aux personnes dont nous avons la
charge que nous nous soucions d’elles parce que Christ S’est soucié de
nous en premier. Ce que nous faisons pour elles doit être extraordinaire

— 85 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

au point de les amener à se demander pourquoi nous nous sacrifions tant


pour elles. C’est à ce moment-là que nous devons donner à Dieu toute
la gloire. Lorsque nous expliquons nos actions, nous pouvons utiliser la
Parole de Dieu pour les orienter vers le Royaume de Dieu au lieu de les
laisser supposer que nous sommes nous-mêmes des êtres puissants. Luc
raconte l’histoire de Paul et de Barnabas à Lystre ; en voyant Paul guérir un
boiteux de naissance, les gens de la foule s’étaient écriés : « Les dieux sous
une forme humaine sont descendus vers nous » (Actes 14.8–15). Paul a dû
les reprendre et les orienter vers le Dieu vivant et vrai. S’il ne les avait pas
repris, les habitants de Lystre n’auraient jamais eu l’occasion d’être sauvés.

Pour nous, rendre témoignage de la bonne nouvelle du Royaume de


Dieu signifie prendre au sérieux la vision de rédemption de Dieu que
nous donne l’Écriture. C’est croire que les relations entre Dieu et les
hommes peuvent être rétablies à travers le pardon des péchés. C’est
également croire que les relations peuvent à nouveau être rétablies.
C’est croire que les êtres humains sont capables de prendre soin des
ressources de la terre de manière à ce que tous puissent en profiter.
La bonne nouvelle est holistique. Les hommes peuvent accepter leur
nouvelle identité en tant qu’enfants de Christ. Ils peuvent retrouver leur
dignité dès lors qu’ils réalisent qu’ils ont été créés à l’image de Dieu et
sont remplis du Saint-Esprit.

Un tel témoignage holistique s’est produit dans un cadre entièrement


musulman. Lorsque mon mari et moi étions missionnaires dans un
pays d’Afrique du nord, nous étions les seuls chrétiens dans une ville de
5 000 musulmans. À notre connaissance, il n’y avait aucune église, pas
même un croyant. Il ne nous était pas permis d’évangéliser en public.

Dieu nous a conduits à louer une maison qui avait été détruite lors
d’une guerre quatorze ans plus tôt. Au tout début, elle n’avait ni porte,
ni fenêtre, ni toit. Les habitants de la ville pensaient que cet endroit était
maudit, et ils avaient peur des mauvais esprits, les djinns, qui, d’après
eux, y avaient fait leur demeure du fait que les personnes qui y habitaient
précédemment étaient mortes pendant la guerre. Seul un arbre avait
survécu ; tout le reste avait péri sous le soleil brûlant. Mon mari et moi
avons marché autour de la propriété et de la maison en priant et en
chassant les mauvais esprits. Nous nous sommes mis à proclamer la

— 86 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Parole de Dieu et Ses promesses de vie abondante pour tous les habitants
de la région !

Nous avons planté des moringas qui ne tardèrent pas à pousser dans
une terre aride qui, jusqu’à présent, n’avait rien produit du tout. Les gens
des alentours avaient du mal à en croire leurs yeux. La sensation de mort
qui planait avait dès lors fait place à la vie ! Ils s’attendaient à ce que nous
rendions l’âme peut après notre emménagement dans la maison. Nos
enfants ont commencé à aller à l’école locale et se sont liés d’amitié avec
des enfants musulmans.

Après notre emménagement dans la maison, nous avons voulu nous


joindre aux habitants du coin et célébrer une tradition connue sous le
nom de Qari Duqa, une « prière pour une nouvelle maison ». Il s’agit
d’une tradition musulmane au cours de laquelle un passage du Coran est
lu et un mouton est offert en sacrifice, mais nous voulions « racheter »
cette coutume et nous en servir pour rendre témoignage. Conformément
à la coutume, mon mari a invité toutes les personnes importantes de la
région : le gouverneur, les chefs de l’armée, de la marine et de la police.
Nous avons également invité le proviseur de l’école de nos enfants, les
docteurs et les hommes d’affaires importants. Nous avons même invité
le cheikh et l’imam de la mosquée principale de la ville à se joindre
à nous pour dîner. Par respect pour leur coutume, nous n’avons pas
cuisiné le repas nous-mêmes ; nous avons fait appel à un restaurant
afin que nos invités soient à l’aise et n’aient pas peur de manger de la
nourriture contaminée.

Après le repas, nous avons organisé une petite cérémonie. Nous avons
lu le Psaume 127.1 : « Si l’Éternel ne bâtit la maison, ceux qui la bâtissent
travaillent en vain ; si l’Éternel ne garde la ville, celui qui la garde veille
en vain ». Ils nous avaient vus reconstruire la maison, alors nous voulions
qu’ils sachent que notre réussite venait de Dieu. Il était important pour
eux de savoir, dès le départ, que nous étions les disciples d’Isa al Masih
(Jésus, l’Oint) et que nos vies étaient centrées sur la Parole de Dieu. Dieu
seul nous avait aidés à redonner vie à la maison et au jardin.

Dans le pays, nous étions inscrits comme membres d’une ONG


(organisation non gouvernementale) internationale ; il est donc fort

— 87 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

probable qu’ils nous considéraient comme des infidèles qui ne savaient


rien de Dieu. Nous voulions qu’ils sachent que, bien que nous soyons là
pour répondre à leurs problèmes en matière d’eau, de santé, d’agriculture
et d’élevage, nous ne cherchions pas de réponse auprès de l’argent, de
la science ni de la technologie. Nous voulions qu’ils sachent que c’est
en Dieu, le Créateur, que nous recherchions la solution aux problèmes
de tous les jours. Nous voulions qu’ils sachent que nous croyions que la
Parole de Dieu pouvait répondre à leurs besoins. Nous avons partagé avec
eux Deutéronome 28, un passage dans lequel Dieu énonce clairement
les bénédictions qui découlent de l’obéissance et les malédictions qui
résultent de la désobéissance. Dieu dit que la famine et la maladie
affligent ceux qui ne L’adorent pas et qui n’obéissent pas à Sa Parole. Cela
les a fait cogiter ; en fait, ils ont même hoché la tête en signe d’accord.
La coutume voulait que l’imam lise le Coran lors d’une telle cérémonie,
mais les personnes présentes lui dirent qu’il n’avait pas besoin de le faire
puisque, après tout, nous avions déjà lu la Parole de Dieu.

Cela faisait maintenant plus de neuf mois qu’il n’avait pas plu dans la
région. Le prix d’une chèvre avait plus que doublé et, vu que la plupart
des habitants de la ville étaient bergers, ils avaient du mal à trouver de
bons pâturages pour leurs troupeaux. Les gens étaient plongés dans une
pauvreté extrême ; ils avaient grand besoin de pluie. Mon mari termina la
cérémonie par la prière ; il demanda à Dieu de bénir la ville et de donner
de la sagesse à ses dirigeants. Il demanda également à Dieu de bénir ses
habitants et de leur accorder la vie abondante. Puis, il ajouta : « Seigneur,
donne-nous de la pluie ! »

Le repas et la cérémonie ont pris fin ; nous avons fait nos adieux.
Tout le monde était ravi. Nous avons raccompagné nos invités jusqu’au
portail et nous avons continué à leur faire au revoir de la main tandis
qu’ils poursuivaient la route qui montait vers la colline. Nous n’oublierons
jamais l’expression qui s’est affichée sur leur visage lorsque, à cet instant
précis, les écluses des cieux se sont ouvertes et la pluie a commencé à
tomber ! Dieu a fait honneur à Sa Parole et a entendu les prières de Son
peuple, et a opéré ainsi un miracle et démontré Sa puissance. Ce jour-
là, notre témoignage a eu un impact holistique. Nous avons pu partager
un repas convivial, annoncer la vérité de la Parole de Dieu et demander
à Dieu de nous accorder un signe ; ce qu’Il a fait. Il a plu pendant trois

— 88 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

jours et, après cet événement, les gens du village ont donné à mon mari
le nom de rob ley, ce qui signifie « celui qui a la pluie ». Là encore, nous
avons dû les reprendre gentiment et les orienter vers Dieu, car Lui seul
contrôle la pluie ! Si nous voulons que les musulmans acceptent Jésus
comme Celui qui sauve et qui guérit, nous devons proclamer l’Évangile à
l’aide de nos paroles, de nos œuvres et des signes d’en haut !

Dans cette ville, nous avons eu à plusieurs reprises l’occasion de


rendre témoignage. Nous n’avons jamais pu prêcher dans une église ni
organiser une croisade d’évangélisation, et nous ne nous sommes jamais
tenus devant une foule, micro en main, mais nous avons toujours pu
rendre témoignage.

Chaque fois que nous entamions une opération de forage de puits ou


que nous réparions un réservoir, nous ne commencions pas d’emblée
par nous préoccuper du problème ou par sortir nos outils ou nos
machines. Nous commencions par rassembler les anciens du village et
par annoncer haut et fort que Dieu seul sait où se trouvent les eaux
souterraines. Parfois, nous pouvions même lire un passage de l’Écriture,
comme Psaume 89.9–12 : « Éternel, Dieu des armées ! Qui est comme toi
puissant, ô Éternel ?… C’est à toi qu’appartiennent les cieux et la terre, c’est
toi qui as fondé le monde et ce qu’il renferme ».

Nous avons démontré l’autorité de Christ dans notre vie en prouvant


bien qu’Il est le Maître de la terre, et ce, dès le début du projet. Dès
lors, les anciens nous considéraient comme des personnes saintes, et
pas simplement comme des laïques, et cela nous a permis de rendre
encore plus témoignage. Nous ne sortions nos outils et nos machines
qu’après avoir publiquement demandé à Dieu de nous aider à trouver de
l’eau. Lorsque nous trouvions l’eau ou quand nous finissions de réparer
un réservoir, Dieu recevait toute la gloire puisque, dès le début, nous
avions fait remarquer que toute la Création Lui appartenait. Nous avons
su tirer profit des dons qu’Il nous accordait en matière de technologie
et de connaissance scientifique ; mais, en fin de compte, tout le monde
savait que Dieu était la solution.

Tous les types de projet de développement se prêtent à un témoignage


holistique. Ce qu’il faut, c’est reconnaître les nombreuses occasions qui

— 89 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

s’offrent à nous au quotidien. En général, les mères enseignent leurs


enfants tandis qu’elles-mêmes vaquent à leurs occupations de jardinage,
de cuisine ou de nettoyage. Les mères sages en profitent également pour
enseigner la Parole de Dieu pendant ces activités de la même manière
que Jésus enseignait Ses disciples. Récemment, je me suis aidée d’un
passage de l’Écriture pour enseigner la signification du mot « citoyen »
à mon fils ; nous avons lu que « nous sommes citoyens des cieux »
(Philippiens 3.20). Ensuite, j’ai pu lui demander ce que voulait dire « être
citoyen des cieux ».

En utilisant une tradition locale qui voulait que l’on prie pour sa maison
peu après s’y être installé, nous avons réalisé que Dieu nous donnait
l’occasion de rendre témoignage. En sondant les Écritures à la recherche
d’une parole se rapportant à la construction de maisons, nous avons pu
annoncer la Parole de Dieu de manière efficace. Si nous avions attendu
de pouvoir évangéliser en public, il est fort probable que nous n’aurions
jamais pu partager la Parole de Dieu.

Un moment sacramentel
Ces occasions que Dieu nous donne, Bryant Myers les qualifie de
« moments sacramentels ». Un sacrement est tout simplement une
occasion qui se présente à nous lorsque « la nature invisible de Dieu se
manifeste à travers quelque chose de visible » (Myers, Walking with the
Poor [Marcher avec les pauvres]).

En repensant aux histoires que nous venons de voir, répondez aux


questions suivantes :

• En quoi la « prière de bénédiction de la maison » était-elle sacramentelle ?


• En quoi le « projet d’approvisionnement en eau » était-il sacramentel ?
• Qu’auraient pensé de nous les villageois si nous n’avions pas tout remis
entre les mains de Dieu au début du projet de développement ?
• Que s’est-il produit dans la vie des villageois grâce au fait que nous
avions pris le temps de consacrer notre travail à Dieu ?
• Quelle est la vision du monde qui a dû changer pour que ces
projets de développement puissent être considérés comme des
occasions divines de témoignage ?

— 90 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Ces histoires montrent bien la façon dont les chrétiens peuvent rendre
témoignage en parole, en œuvre et par des signes à travers leurs activités
quotidiennes. Cependant, nous devons croire que Dieu est Maître de
toute la création et que Sa Parole est encore et toujours adaptée à chaque
situation de la vie. Le but, c’est d’orienter les hommes vers Dieu et Son
Royaume tout en les aidant à mieux vivre.

Pour être un agent positif de changement et pouvoir susciter une


transformation véritable, le chrétien impliqué dans des projets de
développement doit considérer les « moments sacramentels » comme des
occasions d’évangéliser.

Dans Walking with the Poor, Bryant Myers présente les moments
sacramentels comme :

• Des occasions que Dieu nous donne d’analyser une action et d’en
discuter la signification.
• Des instants qui nous permettent d’expliquer l’implication active
de Dieu dans la vie de tous les jours.
• Des instants au cours desquels nos ŒUVRES deviennent une
occasion de PAROLE.
• Une occasion d’orienter les hommes vers Dieu.
• Des moments significatifs — l’occasion de changer la vision
du monde.

Par exemple, lors d’un projet de développement scientifique, nous


pouvons, par nos paroles, encourager les hommes à rendre gloire à Dieu
au lieu de vanter les mérites de la technologie ou du secours apporté.

Comment discerner ces moments sacramentels, ces instants au


cours desquels les chrétiens peuvent partager l’Évangile à travers leurs
activités quotidiennes ?

Voici quelques démarches à suivre :

1. Notez les étapes de chaque activité.


2. Analysez chaque étape et voyez si elle s’applique aux personnes
auxquelles elle est destinée.

— 91 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

3. Que signifie-t-elle pour vous ?


4. Quelle est son application biblique ?
5. Trouvez un moyen de démontrer la vérité biblique qui émerge
durant l’activité.

Imaginez, par exemple, que vous soyez impliqué dans un projet


de développement agricole au sein de votre communauté. Comment
pourriez-vous, pendant les moments passés dans les champs, encourager
les non-croyants à se tourner vers Dieu ? Cherchez dans la Bible des
passages qui parlent de la terre, des récoltes ou du thème de l’agriculture
ou de l’élevage. En ayant recours aux étapes mentionnées ci-dessus,
rédigez une histoire qui décrit comment, au cours de cette activité, vous
pourriez être un témoin holistique.

Observez la Figure 5.6. Les cercles représentent différents types de


projets de développement auxquels une église pourrait être associée :
projets générateurs de revenus pour financer un foyer pour enfants, aider
les habitants de la région à mieux prendre soin de leur bétail, enseigner
de nouvelles méthodes agricoles ou répondre aux besoins des personnes
atteintes du VIH et du SIDA. Le cercle du milieu représente le désir
d’évangélisation de l’église.

L’église a parfaitement mené à bien chacun des projets de


développement, et certains membres ont même mis sur pied des
organisations communautaires. L’évangélisation était certes considérée
comme l’une des activités principales, mais ils attendaient le dimanche
pour inviter la communauté à venir à l’église pour y entendre le message
de l’Évangile. Parfois, l’église essayait d’allier message spirituel et œuvre
de développement ; ainsi, les dirigeants organisaient une activité
d’évangélisation en même temps qu’une action de développement. Le
pasteur dirigeait la campagne d’évangélisation et annonçait la Parole de
Dieu aux personnes présentes. Les membres de la chorale de l’église
chantaient mais ne participaient pas à l’action de développement. Les
membres de l’église à la tête des différents projets ne se sentaient pas à
la hauteur de la tâche et avaient du mal à communiquer un message
spirituel aux gens présents lors des diverses activités. Ils attendaient que
les pasteurs prêchent. Ainsi, Dieu n’était jamais mentionné au cours des
sessions de formation agricole et d’éducation sur le VIH.

— 92 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Figure 5.6

La Figure 5.6 illustre cette approche. L’évangélisation était traitée


comme une activité indépendante des projets de développement ;
l’évangélisation était souvent reléguée au second plan par manque de
temps, de personnel qualifié ou tout simplement de moment propice à
une telle initiative.

La Figure 5.7 illustre une approche bien plus holistique du témoignage


pratiqué durant les projets de développement. Les activités du quotidien
placées sous l’autorité de Christ se prêtent davantage à l’évangélisation.
Nous devons constamment être à l’affut de ces occasions, de ces
moments sacramentels, que Dieu nous donne. Il est certain que la Parole
de Dieu doit être annoncée pour que les hommes puissent accepter
Christ ; mais pourquoi s’acharner à vouloir la présenter d’une certaine
façon uniquement et jugeons-nous nécessaire de la limiter au contexte
de la « prédication de l’Évangile » ? Si nous le voulons, nous pouvons
mener de front un travail d’évangélisation et des activités annexes ; pour
cela, nous devons justifier nos actions de manière à attirer les hommes
vers le Sauveur. Notre façon de percevoir l’évangélisation doit changer du
tout au tout ; nous devons prôner l’évangélisation dans tout ce que nous
faisons et pas simplement dans le cadre de l’évangélisation pure et dure.
Pour cela, et je le répète, il est important, sinon primordial, de savoir
identifier les moments sacramentels.

— 93 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Figure 5.7

Olivia Muchena a souligné à juste titre que « le ministère holistique


nous enjoint de vivre, de pratiquer et d’expérimenter notre foi dans le
domaine du développement. C’est redonner au sacré la place qui lui
revient au cœur de notre quotidien » (171).

Une vision biblique du monde et le Saint-Esprit


Ouvrez votre Bible et lisez les passages suivants qui se rapportent aux
dons du Saint-Esprit : Romains 12.6–8 ; 1 Corinthiens 12.7–11, 28–29 ;
Éphésiens 4.11.

Sur une feuille de papier, notez chacun des dons spirituels mentionnés
dans ces trois passages.

Dans l’Église, Dieu a accordé aux croyants, hommes et femmes, des


aptitudes et des dons différents de manière à ce que l’Église puisse mener
à bien l’œuvre du Royaume. Une analyse approfondie des dons du Saint-

— 94 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Esprit nous permettra de mieux comprendre les diverses dimensions de


l’œuvre du Royaume.

À côté de chaque don énuméré sur la feuille de papier, notez le type de


témoignage holistique qui s’y rapporte. Par exemple, le don d’enseigner
exige que l’on sache s’exprimer oralement. Les dons de puissance
(miracles de guérison ou parler en langues) sont des manifestations
surnaturelles et démontrent que Dieu est le Maître de la création. Ces
dons se rapportent donc au témoignage en tant que signe. D’autres dons,
comme faire preuve de miséricorde et aider son prochain, montrent
que nous aimons les hommes et que nous nous intéressons à eux et à
la création ; ces dons représentent l’aspect du témoignage centré sur
l’œuvre. Ils démontrent également qu’il est important de prendre soin
des ressources de Dieu utilisées pour soulager la souffrance des autres.
Certains décrivent ces aspects du témoignage comme étant porteurs de
vérité, d’amour et de puissance. Par conséquent, nous pouvons conclure
que l’œuvre du Royaume que Dieu a confiée à Ses enfants est de nature
holistique et implique paroles, œuvres et signes !

Étude de cas
Lisez Actes 6.1-7. Cette histoire nous donne un aperçu de la vie
quotidienne des membres de la première église chrétienne. Comme
dans toutes les églises, il y avait des personnes mécontentes. Les veuves
grecques et juives se chamaillaient au sujet de la distribution quotidienne
de nourriture.

Ce passage nous montre entre autres que les dirigeants de l’église


avaient à cœur de prendre soin des pauvres et des affamés. Personne
ne se posait de questions quant au bien-fondé de l’aide alimentaire
qu’apportait l’église aux déshérités ; tous les membres savaient que
c’était la bonne chose à faire, un point c’est tout. Deuxièmement, nous
constatons que la distribution quotidienne de nourriture avait dû être
déléguée ; les pasteurs et les enseignants de l’église ne pouvaient s’en
charger eux-mêmes. Il y avait dans l’église d’autres personnes dotées
de dons spirituels différents et plus aptes à répondre à ce besoin. Il
convient de noter que les personnes choisies pour gérer le programme
d’aide alimentaire étaient des personnes respectées, remplies de sagesse
et d’Esprit Saint. D’après les noms mentionnés dans l’histoire, nous

— 95 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

savons qu’il s’agissait de Juifs hellénisants choisis parmi les croyants et


les représentants de l’église. À leur nombre figurait Étienne, un homme
« plein de grâce et de puissance » (v. 8), qui avait accompli des prodiges
et de grands miracles. Les apôtres leur imposèrent les mains et prièrent
pour eux, puis ils les chargèrent d’accomplir leur tâche. Ce passage nous
donne un exemple de croyants pratiquant l’Évangile en parole, en œuvre
et par des signes grâce aux dons du Saint-Esprit afin que s’accomplisse
l’œuvre de l’église. Ne sommes-nous pas tenus d’en faire autant ?

— 96 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous avez terminé l’étude de ce chapitre, l’heure est venue
pour vous de répondre à des questions du genre « Comment peut-on s’assurer
que l’on ne rate pas les occasions que Dieu nous donne de rendre témoignage ? »
et « Comment peut-on faire d’une ‘tâche ordinaire’ un ‘sacrement’ ? »

1. Expliquez comment la vision du monde propre à une personne


peut influer sur sa façon de pratiquer son christianisme.

2. Que qualifie-t-on de témoignage holistique ?

3. Comment définiriez-vous l’expression « moment sacramentel » ?


Notez l’importance d’un tel moment.

4. Expliquez la relation qui existe entre les dons du Saint-Esprit,


l’évangélisation et le témoignage chrétien.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 97 —
C H A P I T R E 6

Comprendre les concepts clés


du développement

A
vant d’entamer un voyage, quel qu’il soit, il est important de
dresser un plan de route : point de départ, itinéraire et destination.
Nous venons de nous pencher sur l’action de développement de
l’église. Mais qu’est-ce que cela signifie au juste ? Les thèmes de l’aide et
du développement donnent lieu à plusieurs idées et attentes.

En tant que leader, il est important pour vous de comprendre en quoi


consiste le développement transformationnel tel que l’église locale doit
le pratiquer. Pour voir où vous vous situez à ce sujet, notez les mots Aide,
Développement et Projets sur une feuille de papier.

Après avoir lu chaque terme, écrivez le premier mot ou la première


idée qui vous vient à l’esprit le concernant. Ensuite, dites ce que vous
en pensez.

Le but de cet exercice est de vous aider à prendre conscience de vos


propres préjugés et sentiments personnels à propos de ces concepts. Si
votre expérience avec les projets de développement a été positive, vous
aurez tendance à réagir de façon positive ; peut-être voudrez-vous en

— 99 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

savoir davantage sur ce que votre église pourrait faire pour se rendre
utile. En revanche, si votre expérience a été négative, alors il est essentiel
pour vous d’être honnête et de réaliser que cette expérience peut influer
sur votre décision de refuser que votre église prenne part à des projets
de développement, bien que cela puisse s’avérer bénéfique pour la
communauté. Il est important, sinon primordial, pour vous de sonder
votre cœur pour savoir ce qu’il en est. Arrêtez-vous un instant et déposez
aux pieds du Seigneur tous les souvenirs et tous les sentiments qui
remontent à la surface ; puis, demandez-Lui de Se manifester clairement
à vous et de vous faire part de Sa vision pour votre église.

Le développement holistique
Comme nous l’avons mentionné précédemment dans ce cours, le
holisme est un système de pensée qui tient compte de l’ensemble et pas
simplement des éléments individuels qui le composent. Prenez comme
exemple une chaise ; elle se compose de plusieurs éléments : quatre
pieds, une assise et un dossier. Si vous n’avez qu’un pied de chaise, peut-
on dire que vous avez une chaise ? Pas du tout. Pour avoir une chaise,
tous les éléments doivent être présents. Si une des composantes de la
chaise est cassée, alors la chaise tout entière est cassée et on ne peut
s’y asseoir sans tomber. Dans le contexte biblique, adopter une pensée
holistique signifie que lorsque nous considérons une personne, nous
tenons compte de la personne tout entière, et pas uniquement d’une
seule partie. Quelles sont donc les parties qui composent la personne ?
Pour commencer, il y a le corps (l’aspect physique), puis la pensée
(l’aspect intellectuel) ; ensuite, il y a l’esprit (l’aspect spirituel) et enfin les
émotions (l’aspect relationnel ou affectif).

Développer une vision holistique du monde, c’est comprendre que


l’ensemble est bien plus important que la somme de tous les éléments
qui le composent. Prises séparément, les différentes composantes n’ont
aucun sens. Chacune d’elles est reliée aux autres et est interdépendante
des autres. Reprenons l’exemple de la chaise. Un pied de chaise est
utile, mais il ne sert à rien s’il n’est pas rattaché aux autres parties de la
chaise. L’assise de la chaise est importante, mais elle perd tout son sens
si elle n’est pas rattachée aux pieds de la chaise. Il en est de même des
hommes. Avez-vous déjà vu une âme toute seule déambuler dans les

— 100 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

rues ? Non ! Tout simplement parce que Dieu a créé l’homme pour qu’il
forme un tout, et chaque partie de l’être humain—corps, âme et esprit—
est intimement liée aux autres et dépend des autres.

Le développement holistique fait tout simplement référence aux activités


de développement qui touchent chaque aspect de la personne. Si, par
exemple, vous participez à un projet ayant trait à l’éducation, souvenez-
vous que bien que vous vous concentriez principalement sur l’intellect de
l’enfant, son corps, ses émotions et son esprit exercent une influence sur
sa capacité mentale. Par conséquent, quelle que soit l’activité, et quel que
soit l’objectif recherché, vous devez accorder une attention méticuleuse à
chaque aspect de la personne.

Quelle est la différence entre l’aide et le développement ?


Il était une fois deux amis qui s’étaient mis en route pour aller rendre
visite à une mamie malade. En cours de route, ils arrivèrent sur les
berges d’un fleuve en crue à cause des pluies torrentielles qui s’étaient
récemment abattues sur la région. Ils ont même cru voir un crocodile en
amont du fleuve. Ni l’un ni l’autre ne savaient nager ; alors, ils restèrent
là, pétrifiés, sur les rives du fleuve, se demandant comment ils allaient
pouvoir le traverser. Ils étaient sur le point d’abandonner lorsqu’un
étranger s’approcha d’eux. « Quel est donc votre problème, chers amis ? »,
leur demanda-t-il. « Nous n’avons aucun moyen de traverser ce fleuve, et
ma grand-mère est malade », répondit le plus jeune des deux hommes.
« Oh, je peux vous aider », renchérit l’étranger qui arriva à convaincre le
plus petit des deux de grimper sur son dos.

Il y avait de gros rochers en travers du fleuve qui permettaient


d’atteindre une petite île située au beau milieu du fleuve. L’étranger porta
l’homme qui était monté sur son dos jusqu’à la petite île en sautant
d’un rocher à l’autre. Épuisé par l’effort qu’il venait de fournir, l’étranger
déposa l’homme sur l’île et rebroussa chemin pour aller chercher l’autre
voyageur qui attendait de se faire porter à son tour. Mais l’étranger était
bien trop fatigué et ne pouvait pas le porter. « Je ne peux pas te porter,
mais viens ! Prends ma main et suis-moi ! », dit-il au deuxième homme.
« Oh, non ! », s’exclama ce dernier. « Je risque de tomber et de me faire
manger par le crocodile ! » « Allez, viens ! Je vais te montrer comment

— 101 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

faire ; du moment que tu me tiens, tu n’as rien à craindre » continua


l’étranger d’une voix rassurante. Enfin, l’ami décida d’essayer. Tout
tremblant, il s’empara de la main de l’étranger et lui emboîta le pas,
sautant d’un rocher à un autre. Une fois arrivés sur l’île, ils continuèrent
dans leur élan et parvinrent jusqu’à l’autre rive. Mais il se faisait tard, et
l’aimable étranger devait poursuivre sa route. À présent, les deux amis
étaient dans de beaux draps ! L’un d’eux avait traversé le fleuve, mais
l’autre était toujours sur l’île en plein milieu du fleuve ! Effrayé, ce dernier
appela son ami : « Au secours ! Au secours ! Viens me chercher et aide-
moi à traverser ! » Mais son ami avait une autre idée en tête. Il tourna
les talons et, sautant de rocher en rocher, il revint sur l’île, mais refusa
de porter son ami, comme ce dernier le lui demandait. Au lieu de cela,
il le persuada de le suivre sur les rochers, comme il l’avait lui-même fait
précédemment. Les deux amis finirent par traverser le fleuve sans l’aide
de personne.

Prenez votre cahier de notes et répondez aux questions suivantes


concernant l’histoire que vous venez de lire : (1) Pour ce qui est de
l’aimable étranger, que devait-il savoir faire pour pouvoir aider les deux
amis ? (2) Comment s’est senti celui qui s’est laissé porter ? (3) Comment
a-t-il réagi après avoir réalisé qu’il était coincé sur l’île ? (4) Valait-il mieux
pour lui d’être sur l’île ou aurait-il mieux valu qu’il reste sur la berge ?
(5) Au début, quelle a été la réaction de l’ami qui a été contraint de suivre
l’étranger en sautant de rocher en rocher ? (6) Qui l’a eu plus facile :
celui qui s’est fait porter ou celui qui a dû marcher ? (7) Qui s’en est sorti
le mieux en fin de compte ? (8) Qu’est-il arrivé à l’étranger à la fin de
l’histoire ? (9) Qui a fini par apprendre aux autres comment s’en sortir ?

Cette histoire illustre très bien les concepts de l’aide et du développement.

Divisez une feuille de papier en deux colonnes ; écrivez le mot aide


en haut de la première colonne, et le mot développement en haut de la
deuxième. D’après l’histoire que vous venez de lire, notez certaines idées
que vous avez pu glaner concernant l’aide et le développement.

L’homme qui s’est fait porter a bénéficié de l’aide de l’étranger, et


son problème immédiat a été résolu. Malheureusement, l’étranger s’est
fatigué et n’a pas pu aider l’autre ami de la même façon, c’est-à-dire

— 102 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

qu’il n’a pas pu le porter. Heureusement, l’étranger savait quelque chose


que ces hommes ignoraient et il était prêt à leur apprendre à utiliser ce
dont ils disposaient déjà (les rochers dans le fleuve) pour résoudre leur
problème. L’étranger a montré à l’un des deux amis comment traverser
le fleuve en utilisant les rochers. Ensuite, cet homme a pu se débrouiller
tout seul, même après le départ de l’étranger. C’est là le concept du
développement : aider les gens à s’aider eux-mêmes. Dès lors, l’un des
deux amis a pu transmettre son savoir à l’autre, et tous deux ont pu
continuer leur chemin et surmonter l’obstacle qui se dressait devant eux.
On peut donc supposer qu’au bout du compte les habitants du village ont
probablement appris à traverser le fleuve.

Le développement
Le concept du développement comporte de nombreuses dimensions et
définitions. Comme nous l’avons vu précédemment dans l’un des premiers
chapitres consacrés à la période postcoloniale, le « développement » mondial
était assimilé à l’idée de « croissance économique ». Nous avons également
vu que cette définition du « développement » était tombée en désuétude
car, malgré l’amélioration de la situation financière d’un pays, la majorité
de ses habitants vivaient toujours dans la pauvreté. Par conséquent, le
concept du développement « humain » a commencé à prévaloir sur le
« développement en tant que facteur de croissance économique ».

Le développement humain est beaucoup plus difficile à définir. En


effet, contrairement à l’aspect financier qui est quantifiable, il est bien
plus compliqué d’évaluer la croissance et le développement des hommes.

Il est relativement simple de regarder une ville et de dire : « ah oui,


cette ville a connu un essor ! Bien des progrès ont été réalisés dans
cet endroit ! » Sur quoi basez-vous une telle constatation ? Peut-être
remarquerez-vous que les rues de la ville ont été refaites, qu’un hôpital
bien équipé et propre et qu’un lycée ont été bâtis, et que l’alimentation
en eau de la ville est adaptée aux besoins. Et vous avez raison. La ville a
connu un développement économique enviable. Cependant, ce que vous
ne remarquerez peut-être pas, c’est le regard des gens. Ils ont l’air apeuré
et méfiant ; leur corps chétif et leurs vêtements usés semblent contraster
avec la richesse apparente de la ville. Qu’est-ce qui ne va pas ?

— 103 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Après vous être entretenu avec plusieurs habitants de la ville, vous


apprenez que le « développement » de la ville s’est produit aux dépens
du bien-être personnel de ses habitants. Le gouvernement du pays exige
que chaque personne « serve » son pays sans être rémunérée. De ce fait,
l’hôpital dispose d’un personnel compétent, certes, mais les docteurs et
les infirmières vivent dans une pauvreté extrême car le gouvernement ne
les rémunère pas suffisamment. Ils ont à peine de quoi acheter du lait et
du sucre pour leurs enfants. La peur règne, car si on les surprend en train
de se plaindre, ils risquent l’emprisonnement, voire la mort. Cette ville va
droit à la catastrophe car le progrès économique qui ne s’accompagne pas
de la croissance et du développement de l’être humain n’est qu’illusion.
Sans la force et le bien-être de l’homme, il finira par s’effondrer. Prenons
l’exemple d’un beau cadre de lit en bois ; malgré sa beauté et sa brillance
apparente, s’il est rongé par des termites à l’intérieur, il s’effondrera à la
moindre pression.

Comment pourrions-nous définir le concept du développement


humain ? Nous avons utilisé le terme transformation pour parler des
changements positifs que connaissent les gens, notamment dans le
cadre du changement holistique. Considérez attentivement la définition
suivante :

Le développement concerne des femmes et des hommes habilités


à introduire des changements positifs dans leurs existences ; il
concerne la croissance individuelle dans un cadre de réalisations
collectives ; il porte sur le processus et l’aboutissement d’une remise
en cause de la pauvreté, de l’oppression et de la discrimination ; il
passe par la réalisation du potentiel humain par le biais de la justice
économique et sociale. Avant tout, il est lié à la transformation des
vies individuelles et des sociétés. (www.oxfam.org)

Cette définition du développement couvre de nombreux domaines ;


toutefois, elle fait valoir une cible commune : les êtres humains. Des
êtres humains qui deviennent plus autonomes. Des êtres humains qui
jouissent d’une croissance personnelle. Des êtres humains qui œuvrent
de concert en vue de la réalisation d’un but commun. Des êtres
humains qui unissent leurs efforts dans l’espoir de réduire la pauvreté,
l’oppression et la discrimination. Des êtres humains qui surmontent

— 104 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

leur crise identitaire de manière à réaliser pleinement leur potentiel.


Des êtres humains qui prennent part au processus de transformation
individuelle et sociétale.

Nous faisons souvent l’erreur d’associer l’expression « projet de


développement » à une structure ou à un objet inanimé, tel un puits, un
jardin, une école ou une clinique. Si ces structures peuvent être indicatrices
d’un certain type de développement, elles ne nous disent cependant rien
concernant la croissance et le bien-être des êtres humains.

Figure 6.1

Chaque projet de développement doit cibler les hommes et non


pas les structures. Contrairement à la croissance et à la transformation
humaines, les bâtiments et les infrastructures ne sont pas des
indicateurs de réussite. Ce sont les hommes qui sont au cœur même
du développement véritable. Les programmes et les structures peuvent
faire partie du processus, mais le tout doit être centré sur l’homme. Les
êtres humains ne peuvent pas être développés ; leur développement ne
dépend que d’eux-mêmes. Un étranger peut bâtir une maison pour une
autre personne, mais il est absolument incapable de faire naître en elle
amour-propre et confiance en soi.

Lorsque nous comprenons que la croissance et la transformation


humaines sont des éléments indispensables du développement, alors
nous changeons notre manière de penser. Dès lors, notre objectif sera

— 105 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

d’opérer un changement dans la vie et dans les rapports des gens au


lieu de nous intéresser uniquement au côté financier ou à la construction
d’infrastructures. Lorsque les parties prenantes sont transformées,
encouragées et rendues autonomes, elles sont elles-mêmes en mesure de
susciter une croissance économique et la création de structures dont elles,
ainsi que leur communauté, pourront tirer profit. Chaque église et chaque
communauté peut et doit prendre part au développement humain.

Le concept du « développement » était depuis si longtemps associé


à la croissance économique nationale et à la contribution financière
internationale que bon nombre d’églises locales ne se sentaient pas à
la hauteur et, par conséquent, attendaient que les gouvernements et les
organismes d’aide se chargent du « développement » de leurs communautés.

Cependant, comme nous l’avons vu jusqu’ici dans notre étude du


développement transformationnel holistique, le but de chaque projet
doit être d’opérer une transformation dans la vie et dans les relations
des êtres humains. Ce type de transformation prend du temps et se
manifeste en grande partie à travers les activités quotidiennes. Nous
avons vu que, chaque jour, du lever du soleil jusqu’à son coucher, Dieu
nous donne des occasions d’amener les hommes à Lui et de remanier la
vision du monde des personnes que nous côtoyons. C’est pour cela qu’il
est préférable que les églises, qu’elles soient grandes ou petites, mettent
en place des projets de « développement » au sein de leur communauté.
Le projet doit être centré sur les êtres humains. Il se peut qu’il donne
lieu à la construction d’une infrastructure, mais il ne s’agit là que d’une
conséquence indirecte du projet et non pas de son objectif.

Il y avait à Nairobi un foyer pour anciens enfants des rues ; son objectif
était de transformer la vie de ces jeunes garçons. Tous ces enfants avaient
vécu la majeure partie de leur vie dans les rues, et certains étaient même
nés de parents sans-abri. Aucun d’entre eux ne savait lire ni écrire —
bien que certains soient âgés de 12 ans. Le but de chaque activité était de
transformer le cœur, la pensée, les émotions, les attitudes, les souvenirs
et l’avenir de ces garçons. Pour cela, il leur fallait non seulement suivre
des cours scolaires et des séances de psychothérapie, mais il était
également nécessaire de leur apprendre la discipline ; cela demandait un
personnel dévoué et l’achat de nourriture saine ainsi qu’un endroit où

— 106 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

dormir à l’abri des intempéries. Tout cela nécessitait des infrastructures


et des fonds. Or, le budget du foyer
était très serré. Les habitations
étaient des structures traditionnelles
Si vous rêvez
en bois avec les toilettes situées à
l’extérieur et des douches sans eau
de déplacer
chaude. Les garçons avaient de quoi les montagnes
s’habiller, mais leurs vêtements
n’étaient certes pas neufs ni de demain, il faut
marque. Aux repas étaient offerts des
produits alimentaires traditionnels, commencer
locaux et nutritifs, dont la plupart
provenaient des jardins entretenus par soulever de
dans l’enceinte de la propriété. À en
juger par les bâtiments, les maisons
petites pierres
et la nourriture, on aurait pu penser
que ce programme était voué à
aujourd’hui.
l’échec. Certains pensaient peut-être (Proverbe
que la présence de maisons plus
jolies, de mets plus raffinés ou mauritanien)
d’habits de marque était nécessaire
pour montrer que la vie des jeunes
garçons avait véritablement été transformée ; mais ils avaient tort.

Pour ce foyer, les êtres humains constituaient le cœur de cible de son


objectif de développement transformationnel. Il y avait grand besoin de
structures, certes, mais celles-ci ne venaient qu’au second plan. Si ce
n’avait pas été le cas, les maisons auraient été belles vues de l’extérieur,
mais les vies n’en auraient pas été transformées pour autant. Le
développement véritable devait avoir lieu à l’intérieur du foyer. Chacun
des enfants accueillis dans ce foyer pouvait témoigner du fait que sa vie
avait été changée. Tous ont reçu une éducation et plusieurs ont fini par
faire des études dans des universités prestigieuses. Tous ont également
bénéficié d’un témoignage holistique chaque jour de leur vie.

Le bien-être et la croissance des êtres humains doivent demeurer au cœur


de chacune des activités mises en œuvre pour que le développement puisse
véritablement être transformationnel.

— 107 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Ce principe permet de clarifier les définitions et les exemples utilisés


dans le cadre de notre étude du développement transformationnel.
Il arrive parfois que certaines actions soient associées à l’œuvre du
« développement » ; pourtant, bon nombre d’entre elles se rangent
uniquement dans la catégorie des ministères de relation d’aide. Il existe
plusieurs façons d’aider les gens, et ces actions sont toutes nécessaires,
mais à des moments différents. Malheureusement, parfois, elles sont
considérées à tort comme des activités de développement. Il est donc
utile de discuter de ces divers types de ministères de relation d’aide pour
savoir à quel moment il convient de les utiliser.

L’aide
Lorsqu’une catastrophe d’origine naturelle ou humaine survient
dans une région, la survie de la population dépend des actions d’aide
entreprises. Si personne n’intervient, la période de sécheresse, et la
famine qui s’ensuit, risquent fortement d’entraîner la mort d’une
multitude de gens. Lorsque la violence éclate et que les habitants sont
contraints de quitter leurs maisons, des abris d’urgence s’avéreront
nécessaires sans quoi ceux-ci mourront de froid. C’est ce type
d’actions de secours que nous qualifions d’aide (humanitaire). Nous
en avons un exemple dans l’histoire de l’étranger qui s’est proposé
de porter l’un des deux amis qui essayaient de traverser le fleuve.
Le fait d’être porté est en accord avec le concept de l’aide apportée
dans le contexte de l’humanitaire. Il s’agit de l’aide immédiate qui
est offerte aux victimes qui ne peuvent satisfaire à leurs besoins de
base quotidiens, tels la nourriture, l’eau ou un abri. Des bienfaiteurs
issus du monde entier soutiennent les secours d’aide humanitaire
de manière à ce que les victimes puissent bénéficier d’une aide
d’urgence gratuite. Nous partons du principe que les peuples touchés
par ces fléaux sont incapables de subvenir à leurs besoins pendant
quelque temps. Ces mêmes bienfaiteurs supposent également qu’en
l’espace de 6 à 9 mois les personnes concernées seront à même
de trouver une solution à leur problème. Les gouvernements ou les
organismes d’aide internationaux sont les principaux acteurs de ces
aides humanitaires car ce sont eux qui reçoivent des dons qu’ils se
chargent de répartir. Malheureusement, les personnes qui bénéficient
d’une aide gratuite pendant plus de six mois finissent par renoncer
à trouver par eux-mêmes des solutions à long terme à leurs propres

— 108 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

problèmes et, dès lors, leur survie ne dépend plus que d’organismes
externes. Des générations entières issues du monde entier sont
habituées à vivre aux crochets d’une aide humanitaire gratuite. À
l’heure actuelle, bon nombre sont des bénéficiaires passifs de tout ce
qui leur est versé. Certains ont oublié que les secours humanitaires
sont en fait des dons de bienfaiteurs et ont même commencé à les
considérer comme un droit et non comme un privilège. D’autres ont
fait des actions d’aide une affaire très lucrative en vendant les dons
destinés aux plus démunis. Malheureusement, il est très difficile de
changer l’état d’esprit de ces personnes qui se considèrent comme
des dépendants sans défense et de les convaincre qu’en faisant preuve
de créativité et en travaillant dur, elles peuvent réussir à surmonter
leurs problèmes. L’aide est absolument nécessaire, mais elle doit être
proposée de façon judicieuse, et ce, sur un laps de temps limité et en
adoptant une stratégie créative destinée à aider les gens à résoudre
leurs propres problèmes.

L’apport de capitaux ou le développement financé par le gouvernement


Les concepts de l’apport de capitaux ou du développement financé par
le gouvernement font référence à la construction de structures : routes,
écoles, puits, cliniques et hôpitaux, par exemple. Les habitants d’un
pays, une église ou une université verseront des impôts et payeront des
frais qui serviront à construire des bâtiments et à aménager le territoire.
Cela est nécessaire, mais ce n’est pas le type de développement que
visent la plupart des églises locales. Comme nous l’avons déjà vu, la
construction d’infrastructures n’est pas nécessairement révélatrice d’un
développement véritable. Si vous bâtissez une belle école et si vous vous
assurez que les enfants y viennent tous les jours, cela suffira-t-il pour
que s’opère un développement ? Et si les enfants y étaient maltraités et
faisaient l’objet de moqueries ? Et s’il leur fallait soudoyer le professeur, ou
avoir des relations sexuelles avec lui/elle, pour pouvoir passer l’examen ?
Peut-on qualifier cela de développement véritable ?

Les aumônes
Nous avons tous ressenti l’envie d’aider un mendiant dans la rue.
À un carrefour près de chez moi, il y a un cul-de-jatte assis à côté de
sa chaise roulante en train de faire la quête. Lorsque je m’arrête au
STOP, je lui donne souvent quelques pièces. C’est un don que je fais

— 109 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

en passant, quelque chose que j’ai sous la main à ce moment précis.


Je ne suis pas du tout obligée de lui donner quoi que ce soit, mais
j’éprouve de la compassion à l’égard d’un homme qui a du mal à
trouver du travail à cause de son handicap. L’aumône est une sorte
d’aide puisque c’est un don gratuit, mais l’aide (humanitaire) est une
action organisée qui est ventilée en plus grandes quantités pendant une
période déterminée et à des personnes bien particulières. L’aumône
est, généralement parlant, un don spontané versé en petites quantités
par des personnes compatissantes.

Pensez un moment aux personnes de la société qui ont véritablement


besoin qu’on leur fasse l’aumône ou qu’on les aide le restant de leur
vie. Très peu de personnes devraient être à charge d’autrui leur vie
durant. À leur nombre figurent les handicapés mentaux et physiques,
les veuves âgées, les malades chroniques et les jeunes orphelins qui,
eux, ont besoin que l’on prenne soin d’eux à long terme. Bon nombre
s’attendent à recevoir une aide gratuite et ont choisi de mendier dans
les rues au lieu de gagner honnêtement leur vie. Voici ce que dit l’apôtre
Paul à ce sujet : « nous vous exhortons, frères,… à mettre votre honneur
à vivre tranquilles, à vous occuper de vos propres affaires, et à travailler
de vos mains, comme nous vous l’avons recommandé, en sorte que vous
vous conduisiez honnêtement envers ceux du dehors, et que vous n’ayez
besoin de personne » (1 Thessaloniciens 4.10–12).

Certains pensent qu’il incombe aux membres les plus riches de la


société la responsabilité de prendre soin des pauvres. Il s’agit là d’un
précepte biblique, certes, mais quelle est donc la meilleure façon d’aider
les pauvres ? Une personne apte à travailler doit le faire au lieu de
mendier. En fait, si quelqu’un peut travailler, mais refuse de le faire,
nous pourrions dire que, d’une certaine façon, il ou elle s’approprie de
façon illicite les dons qui, d’ordinaire, devraient revenir aux indigents.
D’après Éphésiens 4.28, « que celui qui dérobait ne dérobe plus ; mais
plutôt qu’il travaille, en faisant de ses mains ce qui est bien, pour avoir
de quoi donner à celui qui est dans le besoin ». Nous devons encourager
la majorité des gens à trouver des moyens de se prendre en charge au
lieu d’accepter la charité. Les philanthropes doivent choisir d’aider les
membres de la société qui sont véritablement incapables de subvenir à
leurs propres besoins.

— 110 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Voici l’ordre que Paul donne à l’église : « Honore les veuves qui sont
véritablement veuves » (1 Timothée 5.3). Dans ce passage, il est évident
que les familles devaient prendre soin de leurs veuves et que, dans certains
cas, quelques veuves pouvaient également se prendre en charge. Il ajoute
ceci : « Si quelque fidèle, homme ou femme, a des veuves, qu’il les assiste,
et que l’Église n’en soit point chargée, afin qu’elle puisse assister celles qui
sont véritablement veuves » (5.16). En fait, Paul est très critique dans ce
passage. Les veuves sont dans le besoin, certes, mais même parmi cette
tranche défavorisée de la société, il fait remarquer que certaines jouissent
d’une certaine stabilité économique, que d’autres encore seront prises en
charge par leurs familles et que seulement quelques-unes d’entre elles
nécessiteront une aide à vie. Dans ce contexte, Paul fait également mention
des risques associés au fait de faire des dons à celles qui n’en avaient pas
besoin : « Avec cela, étant oisives, elles [les veuves autonomes] apprennent
à aller de maison en maison ; et non seulement elles sont oisives, mais
encore causeuses et intrigantes, disant ce qu’il ne faut pas dire » (v. 13).

Aider les pauvres est une tâche considérable et bien plus complexe
que ce que l’on pensait dans un premier temps. Tous ceux qui ont à cœur
d’aider les pauvres doivent vouloir avant tout mettre en œuvre des projets
de développement humain qui aboutiront à des vies transformées. C’est
pour cela que Jésus-Christ est venu mourir sur la croix. Et c’est l’objectif
de Son Église aujourd’hui.

Dans les chapitres suivants, nous expliquerons plus en détail ce type


de développement et nous proposerons un modèle de développement
qui, nous l’espérons, aidera les pasteurs à mettre en œuvre des projets
de développement humain à travers leur église respective.

Le développement humain
Pour arriver à mieux comprendre le concept du développement,
nous allons nous pencher de plus près sur certains des principes d’un
développement transformationnel véritable et durable. En gros, nous
pourrions dire que le développement revient à aider les gens à s’aider
eux-mêmes. Revenons à l’histoire des deux amis qui voulaient traverser
le fleuve. L’étranger s’est servi de ses connaissances et de compétences
acquises pour aider les amis à s’aider eux-mêmes. La prochaine fois que
les amis voudraient traverser le fleuve, ils sauraient comment faire sans

— 111 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

l’aide de l’étranger. Qui plus est, ils pourraient désormais partager leur
savoir-faire avec le reste du village. Qu’arriverait-il s’ils refusaient de faire
part de leurs connaissances aux autres habitants ? Il leur faudrait rester
près du fleuve le restant de leur vie et transporter leurs compatriotes
d’une rive à l’autre.

Le développement humain qui a pour but d’aider les hommes à s’aider


eux-mêmes est tout un processus. La croissance et le changement évoluent
lentement à travers les nombreuses et diverses expériences de la vie.
Les pasteurs et les églises peuvent aider leurs communautés à lancer des
activités qui permettront aux hommes non seulement de recouvrer leur
identité mais aussi d’effectuer des changements positifs dans leurs vies. Une
fois par mois, dans le cadre de l’école du dimanche, il serait bon d’instruire
et de sensibiliser les membres de l’église aux tenants et aux aboutissants
du VIH/SIDA d’une manière non-condamnatoire ; cela aiderait les gens à
s’aider eux-mêmes dans ce domaine-là. Cela permettrait également d’ouvrir
de nouvelles possibilités d’aider les personnes contaminées. Même les pays
dits « développés » sont en développement. Le développement doit être
constant, quel que soit l’aspect de la vie qu’il touche.

Le développement humain qui a pour but d’aider les hommes à s’aider eux-
mêmes est ancré dans la communauté. Cela signifie que chaque projet doit
être entrepris à l’initiative d’un groupe d’habitants de la communauté. Aux
yeux des étrangers, le village semble avoir besoin d’un puits ; mais les
habitants de la communauté, eux, pensent qu’il est bien plus important de
développer un système d’irrigation qui permettra d’acheminer l’eau du
fleuve jusqu’aux champs. Les projets ancrés dans la communauté s’efforcent
d’impliquer le plus de membres possible issus de tous les secteurs de la
communauté. Lorsqu’une église locale décide d’aider les personnes
atteintes du sida de sa paroisse, les activités entreprises pourraient être
proposées à l’ensemble de la communauté et non pas uniquement limitées
aux membres de l’église ; ainsi, cette dernière pourrait faire appel à
l’infirmière en chef d’une clinique du coin et inclure dans son programme
d’autres personnes malades du sida qui ne sont pas membres de l’église.

Le développement humain qui a pour but d’aider les hommes à s’aider


eux-mêmes est participatif et appartient à la communauté. Il semble évident
que les projets de développement soient menés à bien par les membres

— 112 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

de la communauté ; mais,
en réalité, il arrive souvent
« Les gens arrivent
que les ouvriers rémunérés à s’épanouir
du développement ou les
organismes d’aide soient lorsqu’ils participent
considérés par la communauté
comme responsables de la
de plein gré au
réalisation du projet. Même développement
lorsque des membres de la
population locale y participent, d’un nouveau
ils sont généralement engagés
pour s’acquitter de certaines projet et aux prises
tâches que l’organisme leur de décisions qui
confie. L’originalité du projet qui
appartient à la communauté s’ensuivent ; il n’y a
vient du fait que les membres
de la communauté eux-mêmes, aucun moyen pour
par opposition aux étrangers,
décident du problème qu’ils
eux de s’épanouir
veulent résoudre. Ils prennent lorsqu’ils sont
également les décisions
concernant les ressources rassemblés, tels des
nécessaires pour mener à bien
le projet, les campagnes de
animaux, et se voient
collecte de fonds à organiser, imposer de nouveaux
la façon dont le problème sera
résolu, qui seront les parties projets. De fait, le
prenantes et comment elles
seront récompensées. Dans le
développement
cadre d’un projet appartenant humain découle
à la communauté, il est
absolument crucial de donner uniquement de
aux personnes concernées le
pouvoir de prendre leurs propres l’action des hommes
décisions. Ceux qui prennent eux-mêmes. »
des décisions se sentent
davantage responsables de la —Julius Nyerere
réussite du projet dans lequel

— 113 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

ils sont impliqués. Une plus grande coopération au processus décisionnel


aboutira à une plus grande participation au projet et à une responsabilisation
plus importante de la communauté. En revanche, lorsque les membres de
la communauté sont embauchés pour travailler sur une partie d’un projet
sans avoir aucun pouvoir décisionnel, ils ne se sentent pas autant investis
dans sa réussite. Le paysage africain n’est que trop souvent parsemé de
projets de développement inachevés du fait que les personnes intéressées
ne se sentent pas du tout concernées par ce qui est entrepris.

Le développement humain qui a pour but d’aider les hommes à s’aider


eux-mêmes nécessite l’action. Le développement n’est pas le fruit de
l’indolence. Que nous entreprenions une action de développement de
l’enfant ou de développement spirituel, nous devrons travailler dur. Le
plus dur, c’est le processus de transformation intérieure qui doit s’opérer.
Pour pouvoir s’épanouir, les participants doivent prendre des décisions
et rester fidèles à leurs objectifs. Ceux qui ont besoin d’aide doivent
être prêts à s’impliquer dans l’action entreprise pour les aider. Ceux qui
offrent leur aide doivent exiger d’eux qu’ils ne soient pas des bénéficiaires
passifs ; au contraire, ils doivent les encourager à prendre leurs propres
décisions et à s’y tenir. Il se peut qu’une église offre des services de
conseil et de dépistage du VIH aux membres de la communauté, mais il
n’en demeure pas moins que ces derniers doivent décider d’eux-mêmes
de se faire tester, puis d’agir en conséquence selon les résultats obtenus.
Certains se plaignent du manque de pluie et des pertes de récoltes ; mais
il ne tient qu’à eux d’avoir recours aux récentes techniques agricoles
(« culture de conservation ») qui relèvent de la plantation, du désherbage
et de l’arrosage à partir d’un puits jusqu’à un lopin de terre prometteur
de bonnes récoltes. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une méthode agricole
traditionnelle et que cela comporte un certain risque, celui ou celle qui
veut progresser devra prendre les mesures nécessaires.

Le développement humain qui a pour but d’aider les hommes à s’aider


eux-mêmes est basé sur la recherche de la justice en identifiant la cause
profonde des problèmes. Si nous voulons réellement qu’un changement
s’opère, nous devons commencer par identifier la cause profonde de la
souffrance et de la pauvreté. Prenons l’exemple d’une femme de votre
église qui a constamment besoin d’argent pour répondre à ses besoins
de première nécessité. Au lieu de continuer à lui donner de l’argent, vous

— 114 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

décidez de l’aider à fonder une petite entreprise et à acquérir certaines


compétences de base en matière de gestion d’entreprise et de gestion
financière. Ce que vous ignorez cependant, c’est que cette femme perçoit
déjà un salaire chaque semaine. Le problème, c’est que son mari est
alcoolique et qu’il utilise tout son argent pour s’acheter de la bière ; par
conséquent, elle souffre, non pas parce qu’elle est incapable de gagner
de l’argent, mais tout simplement parce qu’il y a un problème dans son
couple. Pour que sa famille puisse s’épanouir, cette femme devra trouver
un moyen d’économiser son argent de manière à subvenir à ses propres
besoins. Il faudra également aider son mari à se libérer de l’esclavage
de l’alcool. Si elle se trouve en danger physique, il faudra l’aider à se
protéger. Pour pouvoir s’attaquer à la cause profonde des problèmes des
personnes que nous côtoyons, nous devons avant tout leur prêter une
oreille attentive. Nous devons les encourager à identifier elles-mêmes les
causes premières de leurs problèmes. Pour cela, il suffit simplement de
les interroger sur le « pourquoi » ou le « comment » de leur situation.

Nous venons d’étudier certains principes clés du développement


humain. Nous allons continuer de les analyser et nous allons voir
comment ils s’appliquent aux réalités de la vie quotidienne.

Le « développement humain » est également connu sous une autre


expression : le développement communautaire. C’est un processus à
travers lequel une communauté se trouve renforcée de manière à pouvoir
répondre à ses propres besoins de façon créative. Il s’agit d’un processus de
changement qui avance dans la bonne direction.

Cela signifie que nous devons croire que les membres de chaque
communauté, quelle qu’elle soit, sont capables de se mobiliser pour
améliorer leurs conditions de vie. Le but de bon nombre de projets
de développement est d’apporter un plus aux personnes auxquelles
ils sont destinés. Il s’ensuit que, à l’issue du projet, ces dernières ne
sont pas suffisamment investies dans le projet et ne ressentent pas
le besoin de poursuivre l’œuvre en cours. Au lieu de faire les choses
pour les autres, l’approche du développement transformationnel de la
communauté part du principe que les bénéficiaires du projet ont des
idées et des ressources mais que, pour quelques raisons que ce soit,
ils manquent de motivation et n’ont aucun espoir de changement. Le

— 115 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

pasteur ou le membre d’une église qui désire susciter un changement


durable au sein de sa communauté doit avoir confiance aux hommes et
les aider à décider de ce qu’ils peuvent faire pour eux-mêmes. Parfois,
la communauté a besoin d’espoir ou d’une nouvelle vision de ce que
l’avenir pourrait être ou encore d’un nouveau savoir-faire et de nouvelles
techniques. Nous pourrions dire que le développement consiste à aider la
communauté à se libérer des mensonges et des restrictions qui la tiennent
prisonnière. Ce que nous appelons développement transformationnel,
c’est le développement communautaire qui se veut chrétien et qui vise la
transformation spirituelle, physique, émotionnelle et mentale des êtres
humains. Pour pouvoir comprendre les principes fondamentaux et la
définition du développement transformationnel, nous devons avant tout
comprendre ce que signifie le mot transformation.

La transformation
Quelles sont les images qui vous viennent à l’esprit lorsque vous
pensez au mot transformation ? Il s’agit là d’un concept sur lequel la
Bible s’étend longuement. Quels sont les passages de l’Écriture que vous
connaissez bien et qui ont trait à la transformation ?

Paul encourage ainsi les croyants romains : « Ne vous conformez pas


au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de
l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce
qui est bon, agréable et parfait » (Romains 12.2).

Ce verset nous permet de comprendre le genre de changement qui


doit s’opérer dans la vie de tous les hommes. Tous les êtres humains sont
soumis aux habitudes de ce monde (version Bible en français courant),
c’est-à-dire à l’action du péché, de l’égoïsme, de l’idolâtrie et de la
cupidité à l’œuvre au sein des diverses cultures et visions du monde.
Seul Jésus-Christ peut rompre ces habitudes et opérer une véritable
transformation dans la vie des hommes en renouvelant leur intelligence.
Seule la vérité peut renouveler l’intelligence des êtres humains, et elle
nous est révélée dans la Bible. Lorsqu’une personne se soumet à la
transformation qu’entraîne la vérité de Dieu dans son esprit, cela laisse
entrevoir un avenir glorieux. Dieu a promis que les hommes pourraient
connaître Sa merveilleuse volonté pour leur vie personnelle et celle de

— 116 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

leurs communautés respectives. Dieu a fait part de Sa vision d’un avenir


meilleur pour Son peuple dans Ésaïe 41.17b–20 et Apocalypse 21.3–4 :

Moi, l’Éternel, je les exaucerai ; Moi, le Dieu d’Israël, je ne les


abandonnerai pas. Je ferai jaillir des fleuves sur les collines, et des
sources au milieu des vallées ; je changerai le désert en étang, et
la terre aride en courants d’eau ; je mettrai dans le désert le cèdre,
l’acacia, le myrte et l’olivier ; je mettrai dans les lieux stériles le
cyprès, l’orme et le buis, tous ensemble ; afin qu’ils voient, qu’ils
sachent, qu’ils observent et considèrent que la main de l’Éternel a
fait ces choses, que le Saint d’Israël en est l’auteur.

Et j’entendis du trône une forte voix qui disait : Voici le tabernacle


de Dieu avec les hommes ! Il habitera avec eux, et ils seront son
peuple, et Dieu lui-même sera avec eux. Il essuiera toute larme de
leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni
cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu.

Dieu désire que les hommes soient transformés, qu’ils se détournent


des habitudes pécheresses et destructrices du siècle présent et adoptent
les mœurs du modèle harmonieux et juste du Royaume de Dieu.

Selon ce qu’enseigne la Bible au sujet de la vie humaine, « être


transformé, c’est passer d’une vie contraire à la volonté de Dieu à une
existence dans laquelle les hommes peuvent jouir d’une plénitude de vie
en totale harmonie avec Dieu » (Transformation : la réponse de l’Église
aux besoins humains. Wheaton Consultation 1963).

Si nous voulons que la volonté parfaite de Dieu se réalise au sein de


la société et que Son amour envahisse nos communautés, toutes les
relations, qu’elles soient sociales, économiques ou spirituelles, doivent
subir une transformation.

Le développement humain n’est pas automatique. La transformation


exige des efforts de notre part ; qui plus est, nous avons un adversaire qui
nous met constamment des bâtons dans les roues. Pour que la transformation
humaine soit authentique, nous devons faire des choix. Nous devons décider
de tirer un trait sur les modèles de pensée et d’action qui portent atteinte à

— 117 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

la vie, et promouvoir tous ceux qui soutiennent l’abondance de vie. Nous


devons dire « non » à certaines choses. Pour pouvoir être transformés, nous
devons faire des choix différents.

Figure 6.2

Mais il n’est pas facile de changer. Au vu de l’histoire, Edward T. Hall


a affirmé que bon nombre de cultures sont semblables aux passagers
à bord d’une barque (Hall, 1983). La barque est propulsée vers l’avant,
mais le rameur est tourné vers l’arrière, toujours conscient de ce qui est
derrière lui. Il n’y a rien de mal à regarder en arrière, à se souvenir et à
apprendre de son passé ; mais si le regard est toujours fixé sur la peur
et la servitude du passé sans jamais envisager un avenir prometteur, il
sera alors difficile d’envisager un changement non seulement pour soi-
même, mais aussi pour le reste de la communauté. La transformation
ne pourra s’opérer que lorsque les pauvres envisageront un avenir
meilleur. Une partie du processus de transformation se réalisera dès
le moment où ces derniers feront part de leurs espoirs et de leurs

— 118 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

rêves, et se verront comme les instigateurs des changements qui,


d’après eux, s’imposent. Le changement naît d’une nouvelle façon de
voir les choses. Le changement, quel qu’il soit, donne lieu à une lutte
spirituelle du fait que la pauvreté en tous genres est la cause directe
des mensonges et que Satan est le père de ces mensonges. La vérité
nous affranchit, certes, mais comprendre et appliquer la vérité prendra
du temps.

Le développement transformationnel
Le développement transformationnel axé sur l’être humain fournit
au peuple de Dieu de multiples occasions de rehausser le contraste
qui existe entre les « habitudes [invétérées] de ce monde » et la vérité
biblique ; il donne aux hommes la meilleure vision possible de l’avenir.
Le développement évolue du laïque vers le transformationnel lorsque
les actions et les réactions des gens touchent à la vie tout entière et
opposent les mensonges de la culture à la vérité pertinente et congruente
de la Bible durant des activités de développement stratégiques. Les
personnes concernées ont dès lors l’occasion non seulement de résoudre
leurs problèmes physiques mais aussi de comprendre, d’accepter et
d’expérimenter les dimensions spirituelles de la vie que seul Christ est à
même d’offrir.

Bryant Myers a décrit le développement transformationnel comme


la transformation graduelle des individus et des communautés,
transformation qui les libère de l’esclavage (politique, social, physique,
mental, émotionnel et spirituel) pour les amener à expérimenter la
liberté et la vie en Christ, et ce, pour la gloire de Dieu. Le développement
transformationnel est un processus qui dure toute la vie. Il ne se termine
jamais. Son but est de donner aux hommes la vision d’une vie abondante,
de restaurer la vocation et l’identité bibliques, et de rétablir des relations
justes et équitables. Ces buts sont atteints au cours des activités visant à
améliorer la santé, l’instruction, les conditions sanitaires ou les moyens
de subsistance.

Pour qu’un projet de développement puisse être qualifié de


« transformationnel », certains principes doivent être appliqués de façon
intentionnelle durant toutes les phases du projet ; ils se déclinent ainsi :

— 119 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Le projet doit préserver la dignité des personnes concernées. Comme nous


l’avons dit précédemment, tous les êtres humains doivent être traités
avec dignité, où qu’ils soient, quelle que soit leur situation financière ou
leur santé. La dignité de l’homme vient uniquement du fait que ce dernier
est créé à l’image de Dieu. La dignité des personnes concernées doit
être préservée à travers l’ensemble du projet. Cela signifie qu’elles ont le
droit de faire part de leurs idées et de leurs préoccupations. Personne ne
doit en aucun cas être ridiculisé en public. Les représentants de chaque
groupe de personnes concernées par le projet doivent prendre part au
processus décisionnel. L’amabilité et la politesse doivent être de mise en
tout temps. Le parachèvement du projet n’est pas aussi important que le
bien-être et la croissance des parties prenantes du projet.

Le projet doit être motivé par l’amour. Les chrétiens sont appelés à
aimer leurs prochains comme ils s’aiment eux-mêmes, et c’est sur cette
base que les projets de développement transformationnel doivent être
bâtis. Cela signifie que, du moment où ils ont été appelés à aider les
autres, peu importe le fait qu’il y ait ou non suffisamment de ressources
pour le faire. Les évangélistes et les pasteurs sont appelés à prêcher.
Qu’ils aient ou non suffisamment d’argent pour répondre à leurs besoins,
cela n’invalide en rien l’appel qu’ils ont reçu. De même, les églises ont
été appelées à aimer les hommes et s’efforcent par conséquent d’alléger
leur souffrance. L’abondance ou le manque d’argent ou de ressources
ne doit nullement influer sur l’amour que les membres du peuple de
Dieu doivent dispenser à leurs prochains. Attendre de bénéficier d’une
grosse rentrée d’argent avant de commencer à aider les pauvres est
contraire à l’enseignement de la Parole de Dieu. Si nous attendons de
recevoir de l’argent pour essayer de soulager la souffrance physique des
autres, cela signifie donc que notre amour pour notre prochain dépend
des ressources financières et non de l’amour infini de Dieu. Chose
dangereuse, d’autant plus que les membres de la communauté que nous
essayons d’évangéliser risquent d’associer l’amour de Dieu à l’argent. Si
la source des dons venait à s’épuiser, peut-être en viendraient-ils à penser
que Dieu ne les aime plus. En revanche, s’ils savent que les membres des
églises se sacrifient pour pouvoir aider à financer le ministère auprès des
veuves et des orphelins de la communauté, qu’il y ait ou non un soutien
financier extérieur, ils feront véritablement l’expérience de l’amour
extraordinaire de Dieu à travers Son peuple.

— 120 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Le projet doit orienter les hommes vers Dieu. Quelle que soit l’activité
prévue au programme d’un projet de développement, les personnes
concernées doivent agir de manière à faire ressortir la vérité biblique
durant les activités du projet. Il est important de sonder les Écritures
afin d’y puiser des histoires et des vérités bibliques appropriées que
nous pourrons partager durant les sessions consacrées à la santé, à
l’agriculture, à l’assainissement ou à l’éducation. La Parole de Dieu
est puissante et adaptée à chaque situation. Il est essentiel de savoir
déceler les moments sacramentels au cours desquels nous pourrons
orienter les hommes vers Dieu. Chaque activité est une occasion
d’évangélisation si tant est que l’on sache la reconnaître en tant que
telle et en tirer profit.

Le projet doit être durable. Soutenir, c’est « empêcher de fléchir,


maintenir en position stable ». Le terme subsistance est un dérivé du
verbe soutenir par le fait qu’il se définit comme « ce qui maintient ou
soutient la vie : la subsistance de la vie ». Le mot subsistance renvoie à la
totalité de la vie, y compris la dimension spirituelle. Pour qu’une vie soit
maintenue, elle doit avoir de quoi « subsister ». Le terme durabilité renvoie
donc au fait de maintenir ce qui donne la vie (subsistance). Qu’est-ce qui
donne la vie dans une communauté et que doit-on faire pour entretenir
ces systèmes et ces moyens de subsistance vivifiants ?

Autrement dit, « le concept de durabilité est en relation directe avec le


fait de répondre aux besoins de la génération présente sans compromettre
la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ».
Lorsqu’une communauté s’épanouit et utilise les ressources mises à sa
disposition (par exemple, des arbres), il est important que ces ressources
soient renouvelées sans quoi le niveau de vie de la génération suivante
sera fortement diminué par rapport à celui de la génération précédente.
D’après Myers,

Pour que le développement soit durable au sein d’une communauté,


celle-ci doit pouvoir soutenir et entretenir le processus de
développement transformationnel qui lui permet de jouir de la
vie abondante que Dieu désire accorder à tous les êtres humains.
Pour cela, il est essentiel de s’intéresser aux aspects physiques,
mentaux, sociaux et spirituels de la communauté. (Myers, 129)

— 121 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Les meilleures pratiques


Le déroulement du développement communautaire dépend des
membres de chaque communauté, de leurs problèmes, de leur
environnement, de leur vision du monde et de leur volonté de
changement. Chaque communauté est unique ; chacune se développe
à sa façon. Cela dit, les experts qui ont étudié de près les dernières
tendances du développement ont identifié certaines méthodes et
stratégies caractéristiques d’un développement communautaire
efficace. Ces méthodes sont qualifiées de meilleures pratiques. Lesdits
experts reconnaissent que ces pratiques sont indispensables pour que
le processus de développement communautaire soit efficace et pour
promouvoir un changement durable. Le développement communautaire
se déroule selon une procédure acceptée. Chaque étape est nécessaire,
bien que son exécution puisse varier. Si une étape venait à manquer, le
projet en souffrirait.

Le processus du développement communautaire regroupe les


éléments suivants : le bilan communautaire, la planification, la mise en
œuvre et l’évaluation.

— 122 —
L’évangélisation, le témoignage et le développement transformationnel

Révision et application
Vous venez de terminer cette partie du cours ainsi que votre étude centrée
sur la compréhension des concepts clés du développement. Méditez les
questions suivantes qui vous aideront à appliquer les principes que vous
venez d’étudier :

1. Expliquez la signification de l’expression « développement


holistique ».

2. Établissez une comparaison et un contraste entre les termes aide


et développement.

3. Quelle est la signification du terme « transformation » dans le


contexte de l’œuvre du développement ?

4. Décrivez à votre façon les trois principes du développement


transformationnel.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 123 —
Troisième partie
Le processus de développement transformationnel
Chapitre 7 ����� Le bilan communautaire : commencer par
les faits ; le processus de développement
Chapitre 8 ����� La planification : savoir où l’on va
Chapitre 9 ����� La mise en œuvre : les caractéristiques
essentielles de l’agent du développement
transformationnel
C h a p i t r e 1 0 ����� L’évaluation : qu’a-t-on accompli ?
C H A P I T R E 7

Le bilan communautaire :
commencer par les faits

Le processus de développement

L
e développement communautaire est un processus cyclique. La
communauté est consciente des problèmes qui surviennent en
son sein. Si elle fait partie d’un programme de développement
communautaire mené de main de maître, elle prendra le temps
d’identifier clairement les problèmes, d’élaborer une solution claire, de
la mettre à exécution et de vérifier les progrès effectués dans le cadre
du projet à travers le suivi et l’évaluation ; elle sera également prête à
remanier le projet au vu des informations recueillies.

Avant de considérer chaque étape du processus de développement, il


est nécessaire de comprendre la signification du terme communauté tel
que nous l’entendons.

Étymologiquement parlant, le terme communauté se compose de


deux substantifs : commun et unité. Prenez quelques minutes et notez
les similitudes qui existent entre certains membres d’une même
communauté.

— 127 —
Le processus de développement transformationnel

Prise de La
conscience communauté
et bilan identifie les
communautaires problèmes et
les ressources

La Le processus de La
communauté communauté
apporte les développement élabore un
changements communautaire plan de
nécessaires résolution

La La
communauté communauté
effectue un met le plan à
Renforce- suivi et une exécution Renforce-
ment de la évaluation ment de la
capacité communauté

Figure 7.1 (adapté de « Quest for Excellence » —Dallas 2005)

Par exemple, les membres d’une communauté sont capables de


communiquer grâce à l’usage d’un langage commun et il est également
fort probable qu’ils soient soumis à un même leader. Ils partagent une
même vision du monde et ils se souviennent tous des bons comme des
mauvais moments par lesquels leur village est passé.

Il arrive parfois que l’on utilise le mot « communauté » pour parler


d’une tribu ou d’un groupe ethnique. Il est vrai que les membres d’une
tribu ont beaucoup de choses en commun. Mais il se peut également
qu’un membre de la tribu soit amené à grandir dans un milieu urbain ;
par conséquent, il aura nettement moins de choses en commun avec les
autres membres de la tribu qui, eux, ont grandi à la campagne. Autrement
dit, il n’est pas toujours exact de qualifier la tribu de communauté étant

— 128 —
Le processus de développement transformationnel

donné qu’il est possible que les membres de cette tribu ne vivent pas
tous au même endroit ou ne se connaissent pas tous. Nous pourrions
donc dire qu’une communauté est un groupe en expansion et en évolution
dont les membres vivent à proximité les uns des autres et se connaissent les
uns les autres. Leurs vies ont beaucoup de points communs, ce qui renforce
leur sentiment d’appartenance à la communauté.

Plus les membres d’un groupe auront de choses en commun, plus


leur sentiment d’appartenance à la communauté sera prononcé. Il est
facile de repérer une communauté dans un petit village ; mais qu’en
est-il dans une zone urbaine plus étendue ? Quelles sont les diverses
communautés qui cohabitent dans une ville ? Dans une ville, nous
avons souvent tendance à considérer les quartiers ou les groupes
religieux comme des communautés, et nous n’avons pas tort ; mais il
existe bien d’autres communautés : les groupes de femmes, les groupes
d’intérêts spéciaux, les enfants des rues, les personnes atteintes du sida
et autres groupes semblables. Chacun de ces groupes peut former une
communauté bien spécifique.

Revenez sur le diagramme précédent. Nous avons vu que, dans le


cadre du développement, la communauté doit tout d’abord prendre
conscience du problème à résoudre et s’efforcer de trouver une solution.
Pour pouvoir aller au cœur du problème, les membres de la communauté
doivent réaliser un bilan communautaire.

Le bilan communautaire
Dresser un bilan communautaire, c’est tout simplement apprendre à
connaître la communauté au sein de laquelle le projet de développement
transformationnel sera réalisé. Avant d’entamer un bilan communautaire,
les dirigeants de l’église ou les membres de l’équipe de développement
transformationnel doivent identifier la communauté auprès de laquelle
Dieu les a envoyés. Les besoins ne manquent pas autour de nous et les
communautés sont nombreuses. Il est important de prier Dieu pour
qu’Il nous indique la région ou la communauté au sein de laquelle Il
désire que nous exercions notre ministère. Par exemple, peut-être nous
appelle-t-Il à Le servir auprès des orphelins ou des enfants vulnérables,
des personnes atteintes du VIH/SIDA, des agriculteurs, des enfants ou des

— 129 —
Le processus de développement transformationnel

enfants des rues. Une fois le groupe cible identifié, des renseignements
complémentaires doivent être recueillis auprès de ses membres et
d’autres membres concernés de la communauté.

Nous trouvons un excellent exemple de bilan communautaire dans


Nombres 13.17–20. Lisez ce passage. Les Israélites étaient sur le point
de s’emparer du pays de Canaan lorsque Moïse réalisa qu’il avait besoin
d’en savoir plus sur la situation. Alors, sur l’ordre de Dieu, Il envoya des
espions pour inspecter les lieux. Quel type d’information Moïse a-t-il
demandé aux espions de rassembler ?

La collecte d’informations est essentielle à la réussite du projet. Si le


besoin que l’église s’efforce de combler n’est pas correctement identifié ni
compris, on risque non seulement de gaspiller du temps et des ressources,
mais aussi de s’attaquer aux symptômes du problème et non au problème
lui-même. Il est également important de recueillir des informations de
sources variées, et plus particulièrement du groupe cible lui-même.

Les spécialistes du développement communautaire ont identifié les


étapes les plus importantes pour arriver à bien connaître la collectivité
qui nous a été confiée. Le bilan communautaire comprend cinq étapes :
(1) dresser un profil communautaire, (2) identifier les principales parties
prenantes, (3) établir des relations, (4) évaluer les besoins et (5) identifier
les actifs et les ressources disponibles.

1re étape : Dresser un profil communautaire


Cela revient en quelque sorte à brosser un portrait de la communauté.
Les informations recueillies au cours de cette phase sont généralement
de nature objective et démographique, et ont trait à la population, à la
répartition entre les hommes et les femmes, à la situation de famille, à
la répartition des classes d’âge, aux conditions de vie, aux principales
activités économiques, au revenu moyen, à la disponibilité des services
de base, aux habitudes alimentaires, aux maladies courantes et à
l’aménagement physique de la communauté.

En dressant un tel profil, vous apprendrez à mieux connaître la


communauté et à comprendre la nature et la qualité de vie des membres
de la communauté au quotidien.

— 130 —
Le processus de développement transformationnel

Les informations que vous chercherez à obtenir dépendront de la


communauté ciblée. Par exemple, si vous comptez exercer au sein d’un
village en particulier, il vous faudra en savoir davantage sur ses habitants
et sur l’aménagement physique du village lui-même. Puisque, en ciblant
un village, vous ciblez en fait une zone géographique bien définie, il
peut s’avérer utile de faire le tour du village pour avoir une idée de la
façon dont il est agencé. Notez où se trouve le système d’alimentation
en eau et l’emplacement des bâtiments importants comme les écoles, le
dispensaire, les édifices gouvernementaux et les établissements religieux.

Si vous ciblez une communauté bien précise, comme les enfants des
rues par exemple, vous n’êtes donc pas limité à un endroit précis ; faites
cependant une petite enquête pour savoir où ils passent leur journée et
où ils dorment la nuit. Il serait également bien utile de vous informer
quant au pourquoi de leur situation : pourquoi vivent-ils dans les rues,
quelle est leur situation familiale, comment se nourrissent-ils et à quelle
structure de leadership répondent-ils au sein de leur groupe ?

Ces informations peuvent être glanées à partir de plusieurs sources.


Parfois, les bureaux du gouvernement local ou les organismes non
gouvernementaux (ONG) du coin peuvent se montrer utiles. Vous pouvez
également faire des recherches sur Internet. Marchez dans les rues,
observez les gens et soyez à leur écoute ; ces activités sont extrêmement
importantes. Probablement la meilleure chose que vous puissiez faire,
c’est de vous entretenir avec les personnes que vous rencontrez et écouter
attentivement ce qu’elles ont à vous dire au sujet de leur communauté et
de leur quotidien. Le fait d’être à l’écoute vous permettra d’obtenir des
informations tout en préservant leur dignité.

Peut-être votre équipe de développement transformationnel a-t-elle


décidé de cibler un problème de santé précis et non une communauté.
Qu’à cela ne tienne ! Rien ne vous empêche d’établir le bilan
communautaire d’un problème de santé. Si, par exemple, vous avez
choisi de traiter le problème du paludisme, il vous faudra en savoir le
plus possible sur cette terrible maladie : les moyens de transmission
et les mesures de prévention. Ensuite, choisissez une communauté au
sein de laquelle vous espérez promouvoir les mesures de prévention du
paludisme et les options de traitement. Qu’est-ce qui, au sein de cette

— 131 —
Le processus de développement transformationnel

communauté, contribue à la transmission du paludisme ? Quels sont les


membres de la communauté qui courent le plus de risques de contracter
le paludisme ?

Dans une ville africaine, le paludisme était la cause principale de


décès des enfants de moins de cinq ans. Il y avait, dans la ville, une
église qui, après avoir assisté à l’enterrement de tant d’enfants morts
du paludisme, avait décidé de lancer une campagne de prévention du
paludisme et de traitement efficace de cette maladie. Les dirigeants
choisirent la communauté où l’église se trouvait et entreprirent un bilan
communautaire. Ils posèrent des questions du genre : Combien d’enfants
âgés de moins de cinq ans vivent dans cette communauté ? De combien
de cliniques dispose-t-on ? Peut-on se procurer des moustiquaires ? Les
parents savent-ils reconnaître les signes et les symptômes du paludisme ?
Il est essentiel d’établir un profil de la communauté. Cela prendra peut-
être plusieurs jours et demandera beaucoup d’efforts, mais la réussite
du projet est directement liée au type d’informations collectées lors de
l’étape initiale du processus de développement communautaire. Bien
entendu, nous devons également prendre garde à la façon dont les
renseignements sont recueillis. Il arrive que les problèmes dont souffre
les membres du groupe cible les mettent mal à l’aise ; par conséquent,
les informations doivent être collectées avec déférence de manière à ne
pas les embarrasser ni les offenser. Souvenez-vous que les êtres humains
sont la cible du projet en cours. S’ils se sentent pris à partie dès le début,
ils ne retireront aucun bénéfice du projet.

2e étape : Identifier les principales parties prenantes


Les parties prenantes sont les personnes qui, dans la communauté,
peuvent exercer une influence soit positive soit négative sur le processus
de développement ou de changement. Ce sont des personnes influentes,
soit en bien, soit en mal. Au nombre des parties prenantes figurent
généralement les personnes les plus en vue comme les représentants du
gouvernement, le chef du village et les hommes d’affaires importants.

Parfois, les parties prenantes sont des personnes plus difficilement


identifiables. Le chef d’un village est reconnu en tant que tel en raison
de son titre, mais, en réalité, son autorité n’est pas du tout respectée.
Il arrive souvent qu’émergent des leaders naturels, des individus sans

— 132 —
Le processus de développement transformationnel

aucun titre ni poste officiel, mais qui sont respectés par la communauté
et influencent les décisions prises ; ceux-ci sont, eux aussi, considérés
comme des parties prenantes. En réalisant votre bilan communautaire
et en dialoguant avec les membres de la communauté, sachez identifier
les personnes d’influence, qu’elles aient un titre officiel ou non.
Essayez aussi de discerner les parties prenantes des sous-groupes de la
communauté. Bien que la population soit soumise à certains individus
d’influence, il peut également y avoir d’autres leaders et d’autres piliers
de la communauté au sein des sous-groupes. Par exemple, il se peut
qu’il y ait une meneuse parmi les femmes ou un caïd à la tête d’un gang
d’enfants des rues.

Pour en revenir au projet de prévention du paludisme, qui sont donc


les parties prenantes ? Quelles sont les personnes les plus affectées par
la maladie ? Dans l’exemple donné ci-dessus, il s’agissait des enfants de
moins de cinq ans. Qui prend les décisions concernant la santé de ces
enfants ? Qui sont les responsables de la prestation des soins de santé ?
Dans ce cas-là, les parties prenantes seraient donc les parents, et plus
particulièrement les mères qui sont parfois considérées comme étant
responsables de la santé des enfants. Il y a également d’autres parties
prenantes comme les pharmaciens, les professionnels de santé ou tout
autre membre de la communauté chargé de fournir des informations et
des conseils en matière de santé.

3e étape : Établir des relations


Une fois les parties prenantes de la communauté identifiées, il est
important d’établir des relations et de nouer des liens de confiance avec
elles. Nous traiterons ce thème plus amplement dans le prochain chapitre.
Il ne suffit pas de rendre visite aux quelques dirigeants de la communauté
que vous appréciez le plus et avec lesquels vous avez des affinités. Il y aura
toujours des parties prenantes qui nous mettront mal à l’aise, mais il n’en
demeure pas moins que nous avons besoin de leur soutien. Par exemple,
lorsque mon époux et moi avons voulu organiser la cérémonie de « prière
pour la maison » dans le village musulman où nous nous étions installés,
il nous a bien fallu inviter l’imam du coin. Peut-être cela a-t-il semblé
étrange, voire inacceptable, à certains de nos frères et sœurs chrétiens ;
mais, à cause de son influence considérable dans le village, nous avions
besoin que ce dirigeant religieux approuve notre présence et notre œuvre

— 133 —
Le processus de développement transformationnel

dans la région. Nous espérions également que la cérémonie puisse avoir


un impact sur lui. Pour un chrétien, chaque relation de confiance est une
occasion de rendre témoignage. Si nous avons peur d’établir des liens
étroits avec les membres d’autres confessions, voire d’autres religions,
nous risquons de rater de nombreuses occasions de rendre témoignage.
Dans le cadre du processus de développement communautaire, il est
nécessaire de mettre de côté les craintes et le qu’en dira-ton pour
pouvoir lier connaissance avec les personnes susceptibles d’influencer
le projet. Peut-être s’agira-t-il de personnes séropositives, de personnes
extrêmement pauvres ou même de pécheurs invétérés. En tant qu’Église,
nous devons devenir une lueur d’espoir alors même que nous cherchons
à nouer des relations de confiance avec les représentants de toutes les
couches de la société. Le processus se déroule comme suit : rencontrez
chacun d’eux, présentez-vous et entamez un dialogue concernant les
changements qui pourraient être effectués au sein de la communauté.
Établir de bonnes relations ne se fera pas du jour au lendemain, mais
c’est une étape essentielle de l’opération. C’est au travers de ces relations
que vous arriverez à obtenir le soutien et la motivation nécessaires à
la réalisation d’une œuvre de développement. La réussite ou l’échec
d’un projet repose souvent sur le désir de l’agent du développement de
prendre le temps de bâtir des relations.

4e étape : Évaluer les besoins


Durant l’évaluation des besoins, le groupe chargé du développement
transformationnel et les membres de la communauté devront identifier
les besoins de la communauté, les problèmes qui se posent et les
changements qui s’imposent.

Si le profil communautaire est objectif, l’évaluation des besoins, quant


à elle, a tendance à être plus subjective étant donné qu’elle est basée
sur les opinions et les sentiments des membres de la communauté.
La participation des membres de la communauté est essentielle au bon
déroulement de la phase d’évaluation des besoins. Vous avez peut-être une
idée des problèmes ou des besoins de la communauté, mais le but ici
est de permettre aux membres de la communauté de faire part de leurs
besoins tels qu’ils les ressentent et en utilisant leurs propres mots. Parfois
nos impératifs et les leurs sont deux choses totalement différentes.
Les membres de la communauté doivent avoir l’impression que leurs

— 134 —
Le processus de développement transformationnel

besoins exprimés sont pris en compte et qu’ils sont satisfaits. On


s’investit davantage dans les actions destinées à résoudre les problèmes
que l’on considère comme étant importants que dans celles qui nous
sont imposées et qui ont trait à des problèmes considérés comme
étant secondaires. Les projets qui naissent des idées des membres de
la communauté locale, et non de celles des étrangers, ont un plus grand
impact.

Le but de l’évaluation des besoins est de permettre aux membres de la


communauté d’exprimer leurs sentiments concernant les besoins de leur
communauté. Ce qui compte, c’est leur opinion. Il est important que les
représentants de chaque secteur de la communauté, y compris celui des
marginaux, puissent participer. Si vous ne vous intéressez qu’aux responsables
du gouvernement ou aux leaders attitrés, vous n’aurez certainement pas une
vue précise de la totalité des besoins de la communauté.

5e étape : Identifier les actifs et les ressources disponibles


Si l’évaluation des besoins a trait aux besoins, aux problèmes ou aux
défis que doit surmonter une communauté, la phase d’identification
des actifs et des ressources met en évidence les points positifs de la
communauté ainsi que la façon dont la communauté et ses membres
peuvent contribuer au processus de développement.

Souvent, lorsque nous faisons référence aux actifs et aux ressources,


nous pensons qu’il s’agit uniquement d’une histoire d’argent, mais
il existe plusieurs autres ressources qui n’ont rien à voir avec le côté
financier. Les ressources humaines sont de loin les ressources les plus
importantes, notamment dans le contexte de l’église locale. Si vous voulez
que votre église prenne une part active au ministère holistique, elle doit
en premier lieu considérer les dons et les compétences des croyants qui
la composent.

Vous devez également tenir compte des dons et des talents des membres
de la communauté. Cela fait partie du processus de rétablissement de
la mauvaise estime de soi que les pauvres ont d’eux-mêmes et de leur
vocation. La communauté doit réaliser que, quel que soit son niveau
de pauvreté, Dieu lui a donné des capacités et des talents précis pour
la gloire de Son nom. Il est important d’encourager les membres de la

— 135 —
Le processus de développement transformationnel

communauté à se livrer à une introspection lorsqu’ils se prêtent à une


identification des ressources. Chacun a quelque chose à offrir ; c’est un
cadeau que Dieu offre à la communauté.

C’est une autre raison pour laquelle la participation de la communauté


est si importante. Lorsque les membres de la communauté voient que leur
opinion compte et que les problèmes qu’ils estiment comme prioritaires
sont abordés, ils sont plus enclins à mettre la main à la pâte.

Il convient également d’encourager les membres de la communauté à


considérer d’autres types de ressources. Chaque communauté dispose de
ressources physiques, dont les sources d’eau, les terrains, les bâtiments
et les espaces verts. Au nombre des ressources communautaires figurent,
entre autres, les services ou les organismes, tels les organismes non
gouvernementaux, les programmes communautaires ou tout autre
programme mis en place par une église dans le but d’offrir des services
particuliers. Il s’avérera également utile de se tenir au courant des services
déjà proposés dans la région, notamment au moment de la priorisation
des besoins à satisfaire.

En Afrique de l’Ouest, il y avait une église qui voulait mettre sur pied
un centre de conseil et de dépistage volontaire du SIDA. Cependant, après
s’être informés quant à la disponibilité des ressources déjà en place,
les membres de la communauté ont appris qu’il existait déjà plusieurs
centres de dépistage dans la région. Alors, au lieu d’investir du temps et
de l’énergie dans un projet déjà en cours, ils ont choisi de répondre à un
besoin différent.

D’un autre côté, si une communauté offre des services exploitables,


ces derniers pourront être utilisés au moment du choix du problème à
traiter. Les membres d’une église venaient juste d’être initiés au concept
du ministère holistique et voulaient coûte que coûte être actifs au sein de
leur communauté afin de pouvoir aborder un problème qui les touchait de
près. La tuberculose faisait de nombreuses victimes dans la région. En fait,
le taux élevé de tuberculose avait conduit un organisme d’aide à monter
un centre médical spécialement consacré au dépistage et au traitement
de la tuberculose ; les services offerts y étaient gratuits ! Au cours du bilan
communautaire et de la phase d’identification des ressources, l’église

— 136 —
Le processus de développement transformationnel

apprit l’existence de ce centre médical et décida de l’utiliser dans le cadre


de ses activités. Les membres de l’église décidèrent de s’attaquer au
problème de la tuberculose en éduquant la communauté quant aux signes
et aux symptômes de la maladie et en l’informant de la présence d’un
centre médical en son sein. Ils réalisèrent des affiches d’informations sur
la tuberculose et en profitèrent pour promouvoir le centre de traitement ;
ces affiches furent placardées sur la place du marché et dans les principaux
lieux de rassemblement. Ils louèrent également un porte-voix et, deux fois
par semaine, diffusaient des informations sur la tuberculose et sur le lieu
où les gens devaient se rendre pour se faire dépister et traiter. Le personnel
du centre médical était ravi des efforts déployés par les membres de
l’église ; grâce à eux, plusieurs nouveaux cas de tuberculose ont pu être
diagnostiqués et traités avec succès.

Si le côté financier ne doit en aucun cas être l’objectif principal du


processus d’identification des actifs et des ressources disponibles, on
ne peut toutefois pas l’ignorer. Il est vrai que l’on a tendance à croire
que l’apport de fonds extérieurs est essentiel au bon déroulement des
projets de développement, mais ce n’est pas toujours le cas. En fait,
un financement extérieur excessif, quelle qu’en soit la source, peut
réprimer l’initiative locale et créer un esprit de dépendance. Si le projet
est réalisé au profit de la communauté et traite un problème identifié
par la communauté, la participation communautaire est donc bien plus
importante que l’apport de ressources extérieures.

Il y avait au sein d’une église africaine un groupe qui avait à cœur


d’aider les victimes du VIH/SIDA. Les membres de ce groupe voulaient
plus particulièrement toucher les enfants qui avaient perdu leurs parents
morts du sida. Ils réalisèrent bien vite que ce type de ministère nécessitait
un soutien financier considérable pour couvrir les frais médicaux et
scolaires des jeunes orphelins. Au lieu de faire appel à des sources de
financement extérieures, ils contactèrent directement l’église nationale.
Ils proposèrent que chaque église des Assemblées de Dieu du pays verse
l’équivalent d’un dollar par mois à ce ministère, une contribution plus
que raisonnable pour toutes les églises, même les plus petites ; à noter
que, au total, le montant perçu s’élevait à environ 2 000 dollars par an.
C’est ainsi qu’en faisant preuve de créativité, un problème financier a pu
être résolu à l’aide des seules ressources des églises locales.

— 137 —
Le processus de développement transformationnel

Enfin, il convient également de mentionner un autre type de ressources


souvent négligé : la vie et la culture de la communauté elle-même. Quel
que soit le niveau de pauvreté, le fait que la communauté existe et
fonctionne bien rend témoignage de la miséricorde et de la grâce de
Dieu à son égard et de la mise en place de stratégies et de techniques
de survie. Encouragez les membres de la communauté à sonder leur
histoire, leurs traditions et leur culture ! Comment la communauté s’est-
elle formée et comment a-t-elle survécu ? Ce genre de questions peut
servir à introduire l’idée que Dieu a toujours été présent parmi eux et les
a aidés à surmonter les moments difficiles. Il leur a donné certains dons
et particularités qui les ont aidés à survivre. Si l’évaluation des besoins
insiste essentiellement sur ce qui manque ou ce qui ne fonctionne pas au
sein de la communauté, l’identification des actifs, quant à elle, encourage
les membres de la communauté à considérer ce qui fonctionne, ce qui
a été efficace et ce qui pourrait en découler dans l’avenir. Consultez
un large panel de membres de la communauté et posez-leur les
questions suivantes : (1) Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans votre
communauté ? (2) Quel est le « point culminant » de l’histoire de votre
communauté ? (3) Qu’est-ce que vous voulez que votre communauté
puisse transmettre aux générations futures ? (4) Quelle image de votre
communauté espérez-vous promouvoir ? et (5) Quelles sont les traditions
auxquelles vous accordez le plus de valeur ?

À l’issue de la phase d’identification des actifs et des ressources


disponibles, dressez la liste de vos constatations. Gardez cette liste à
portée de main pour rappeler aux membres de la communauté qu’ils ont
déjà à leur actif de nombreux éléments susceptibles de les aider sur la
voie du développement transformationnel.

— 138 —
Le processus de développement transformationnel

Révision et application
Vous êtes arrivé au terme de l’étude du « bilan communautaire » ; à
présent, nous allons voir comment le savoir acquis peut s’appliquer à votre
situation. Par exemple, quels sont les avantages du bilan communautaire
comparé à une approche plus informelle ?

1. Donnez une définition du terme « communauté ». Expliquez en


quoi la communauté et la tribu peuvent différer l’une de l’autre.

2. Citez chacune des cinq étapes du « bilan communautaire » et


décrivez la manière dont vous pourriez les réaliser dans votre
communauté.

3. Quelle est la ressource la plus importante de n’importe quelle


communauté ? Justifiez votre réponse.

4. Expliquez pourquoi la participation des membres de la


communauté est si importante.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 139 —
C H A P I T R E 8

La planification :
savoir où l’on va

« Faire l’impasse sur la préparation, c’est se préparer


à se retrouver dans l’impasse. »

P
lanifier, c’est s’organiser de façon à atteindre les buts
recherchés. Les quatre phases du processus de planification se
déclinent ainsi : (1) former une équipe, (2) prioriser et définir
les objectifs et les buts, (3) fixer des objectifs et des buts précis et
(4) établir un plan d’action.

Former une équipe


Bien que la participation communautaire à grande échelle soit d’une
importance cruciale, et ce, quel que soit le projet de développement
transformationnel entrepris, il est tout à fait irréaliste de vouloir
impliquer chaque membre de la communauté dans chaque étape du
projet. Il est donc nécessaire de former une équipe d’individus triés sur
le volet qui seront chargés de représenter la communauté et de relayer
les informations concernant le projet à la communauté.

— 141 —
Le processus de développement transformationnel

Lors de la formation de ce groupe dit « central », pensez aux personnes


qui, lors du processus de réalisation du bilan communautaire, ont su se
démarquer de par leur passion et leur motivation exceptionnelles. Ce sont
ces personnes qui fort probablement n’hésiteront pas à investir temps, et
peut-être même ressources, afin d’aider au développement communautaire.

Permettez à ces leaders et participants naturels d’émerger et faites


également en sorte d’inclure les représentants des différents sous-
groupes de la communauté. Le processus de bilan communautaire et
d’identification des parties prenantes vous a permis d’identifier les divers
groupes de la communauté comme, par exemple, les groupements de
femmes, d’hommes, d’adolescents, d’orphelins, d’hommes/de femmes
d’affaires, de veuves, etc. Il est très important que chaque groupe soit
représenté au sein de l’équipe centrale, si possible. Dans le cas contraire,
vous risquez de vous retrouver avec une élite chargée de prendre toutes
les décisions pour les autres sans tenir compte de l’avis de qui que ce
soit d’autre. Ceci entraînera une absence d’appropriation collective, et la
charge du projet incombera uniquement à une minorité de personnes.
Souvenez-vous que la participation est synonyme de pouvoir. Il est
important que chacun ait le sentiment de pouvoir représenter son groupe.

Prioriser et définir les objectifs et les buts


Revenez sur les informations recueillies lors de l’évaluation des
besoins. Bien que seule l’équipe centrale soit amenée à prendre des
décisions concernant les questions prioritaires, encouragez les membres
de la communauté à participer le plus possible. Permettez-leur d’exprimer
leurs opinions quant aux décisions prises. Vous pouvez vous faire une idée
des besoins les plus urgents, certes, mais sachez que les pensées et les
opinions des membres de la communauté priment avant tout. Ils doivent
savoir qu’ils ont leur mot à dire, sans quoi le projet ne les intéressera
pas. La communauté aura à cœur de résoudre un problème qu’elle a elle-
même identifié et ses membres réaliseront qu’il est important pour eux
de collaborer pour arriver à une solution viable.

À ce niveau-là, la prise de décision par les membres de l’équipe peut


s’avérer difficile. Souvenez-vous que la participation est synonyme de
pouvoir et que le pouvoir peut être source de discorde. Il se peut qu’il y

— 142 —
Le processus de développement transformationnel

ait parmi les membres de la communauté des conflits de loyauté, des


conflits interpersonnels, des intentions cachées et des conflits d’intérêts.
Assurez-vous de n’exclure personne. Refusez de donner du poids à l’idée
selon laquelle les personnes sans éducation n’ont rien à apporter. Posez
la question : « Qui profite du manque de participation ? » Bryant Myers
fait remarquer que « encourager la participation est probablement l’enjeu
le plus important de la transformation » (149). La participation permet à
chacun de comprendre le pourquoi des choses et de réaliser que, dans
une certaine mesure, son avenir ne dépend que de lui/elle.

Bien que les membres de la communauté aient le dernier mot quant


au choix des besoins prioritaires, il y a cependant certaines choses que
vous pouvez faire pour les aider. Si c’est la première fois que les membres
de la communauté participent à un projet de développement, ils risquent
peut-être de voir un peu trop grand et de s’attaquer à un problème trop
compliqué et trop coûteux, ne réalisant pas qu’ils n’ont eux-mêmes
pas encore acquis les compétences, les ressources ou le soutien général
de la communauté pour ce faire. Il est important que les membres
d’une communauté qui passent pour la première fois par ce processus
choisissent un besoin relativement facile à satisfaire. La réussite est source
de motivation. Une fois que la communauté a connu la réussite à des
niveaux moindres, il est plus facile pour elle de s’assurer le soutien et la
motivation de ses membres et d’aborder un problème plus compliqué
et de plus grande envergure. Sachez que si une communauté s’attaque
d’emblée à un problème complexe et échoue, ses membres risquent
de se décourager et d’abandonner le projet tout entier. La communauté
doit pouvoir mettre en œuvre le projet et assurer sa survie ; il est donc
d’autant plus important non seulement de choisir un projet réalisable,
mais aussi d’avoir recours au plus grand nombre de ressources locales
possibles.

Au cours de la phase de priorisation des besoins, aidez les membres


de la communauté à identifier les causes premières du besoin et à
s’attaquer à elles. Ne perdez pas de vue le fait que le projet est centré sur
le développement humain et non pas uniquement sur les résultats finals.

Une école biblique avait sollicité nos services à cause d’une terrible
épidémie de boutons qui s’était déclarée sur le campus. En fait, la

— 143 —
Le processus de développement transformationnel

situation était grave au point que l’école avait dû fermer ses portes durant
toute une semaine pendant que les élèves et leur famille se remettaient
de leurs déboires physiques. Les responsables de l’administration de
l’école pensaient que ce qu’il leur fallait avant tout, c’était remplir les
étagères de l’infirmerie de médicaments ; ils étaient convaincus qu’avec
les bons médicaments, ils pourraient enrayer l’épidémie avant qu’elle
ne devienne incontrôlable. Une infirmière fut envoyée en éclaireur
pour évaluer la situation. Au cours de sa visite, elle constata qu’il n’y
avait aucune installation sanitaire sur le campus. Or, il y avait des
excréments humains éparpillés sur le sol un peu partout ; il y en avait
même à proximité d’une source d’eau. Elle convoqua une réunion et
expliqua que leur problème était dû à un manque d’hygiène et non à un
manque de médicaments préventifs. Elle expliqua à quel point il était
important pour eux de s’équiper de latrines dont elle vanta l’utilité, tant
pour les adultes que pour les élèves. Ces derniers se mirent à rire et à
dire que l’infirmière, qui n’était pas de la région, ne comprenait rien
à leur culture. C’était leur façon de faire les choses et ils n’allaient pas
se laisser influencer par des étrangers. L’infirmière ouvrit sa Bible et se
mit à lire un passage qui disait que Dieu avait ordonné aux Israélites
de sortir du camp, de creuser un trou et d’enterrer leurs excréments.
Les élèves furent abasourdis par ce qu’ils venaient d’apprendre. Jamais
ils ne se seraient doutés que leur manque d’hygiène non seulement les
exposait à la maladie, mais aussi allait à l’encontre des instructions de
Dieu. L’infirmière, quant à elle, respecta les principes du développement
transformationnel en cherchant la cause première du problème et en
n’oubliant pas de faire valoir l’aspect spirituel du problème.

Il peut également arriver que la communauté choisisse d’insister


sur un problème que vous, en tant qu’agent du développement
transformationnel, ne considérez pas comme étant prioritaire. Dans ce
cas-là, ce sont les opinions et les choix de la communauté qui comptent.
Si les membres de la communauté pensent que le projet a été identifié
et choisi à leur place, ils n’éprouveront pas le besoin d’y apporter une
solution ; ainsi, il n’y aura aucune participation communautaire et donc
aucune soutenabilité à long terme.

Un travailleur de la santé communautaire engagé dans un programme


d’église avait remarqué que sa zone d’affectation comptait de nombreux

— 144 —
Le processus de développement transformationnel

cas de VIH/SIDA ; pourtant, l’église avec laquelle il collaborait était


quasi muette sur la question. De ce fait, il voulait l’aider à mettre sur
pied une action destinée à répondre au problème qui, d’après lui, se
posait, y compris un programme d’éducation et de ministère abordant
le problème du VIH. Cependant, à chaque fois qu’il s’entretenait avec les
dirigeants de l’église et qu’il leur demandait de citer les cinq problèmes
de santé qui affectaient le plus leurs églises, la question du VIH et du sida
n’était jamais abordée. Au lieu de cela, les dirigeants de l’église désiraient
qu’il traite les problèmes de santé de base qui touchaient principalement
les femmes et les enfants. Bien qu’il y ait de nombreux problèmes de
santé touchant les femmes et les enfants, il y avait déjà dans la région
plusieurs autres organismes d’aide, mais personne n’avait encore abordé
le problème du VIH ni celui du SIDA. Le travailleur humanitaire, quant
à lui, savait qu’il ne pouvait obliger les dirigeants de l’église à partager
son opinion. Il devait respecter leur désir quant au choix du principal
problème de santé à traiter.

Il décida de rendre visite aux diverses églises au sein desquelles il


organisa des séminaires sur le thème de la santé des femmes et des
enfants. Le VIH ayant trait à la santé, il ne manqua pas de l’inclure
au programme des séminaires à l’issue desquels deux choses se
produisirent. Pour commencer, les dirigeants de l’église virent qu’il était
prêt à aborder les problèmes qu’ils avaient eux-mêmes identifiés comme
étant prioritaires. Cela permit de créer une atmosphère de confiance
entre lui et les dirigeants qui, dès lors, étaient prêts à prêter une oreille
plus attentive à ses préoccupations concernant le VIH/SIDA. Ensuite,
grâce à l’instruction sur le VIH/SIDA qu’il avait pu intégrer au programme
dispensé lors de ses séminaires pédagogiques, les diverses églises ont
petit à petit été sensibilisées au problème et ont fini par reconnaître le VIH
comme l’un de leurs principaux problèmes de santé. Dès ce moment-là,
le travailleur de la santé était libre d’aborder le problème du VIH/SIDA
en collaboration avec les églises locales, et ce, à la demande expresse de
leurs dirigeants.

Lors de la phase de priorisation des problèmes identifiés par les


membres de l’équipe centrale, efforcez-vous de donner la parole à tous.
Nous avons déjà vu que la participation est synonyme de pouvoir ;
qui plus est, il arrive souvent que le choix des différents membres de

— 145 —
Le processus de développement transformationnel

l’église soit motivé par des raisons qui leur sont propres. Vous pourriez
avoir recours à un vote. Par exemple, si l’évaluation des besoins a fait
ressortir sept problèmes cardinaux, notez-les sur une feuille de papier
ou au tableau. Ensuite, permettez à chaque membre, et peut-être même
à d’autres membres de la communauté, selon le cas, de s’exprimer au
moyen d’un vote. Une par une, chaque personne pourra s’approcher du
tableau et faire une croix à côté du problème qui, d’après elle, a besoin
d’être abordé en priorité dans la communauté. Cela fait, choisissez les
deux ou trois problèmes qui ont reçu le plus de voix. Puis, votez encore
sur les quelques problèmes restants. Continuez jusqu’à ce qu’il ne reste
plus qu’un seul problème. Cela permet à un plus large éventail de la
communauté de s’exprimer quant au problème qui lui paraît le plus
important ; chaque voix a le même poids.

Fixer des objectifs et des buts précis


Dès que l’équipe a priorisé les besoins, les membres doivent décider
de ce qu’ils veulent accomplir. Pour cela, ils doivent fixer des buts et
des objectifs. Les buts et les objectifs sont parfois difficiles à définir,
mais ils sont extrêmement importants car vous aurez besoin de vous y
référer pour voir si vous avez accompli ce que vous vous étiez proposé
de faire. Souvenez-vous qu’il est facile d’identifier les problèmes, mais
qu’il est bien plus difficile de trouver des solutions acceptables. Une fois
le problème identifié, quelle est donc la prochaine démarche à suivre ?

Les buts
Dans l’ensemble, les buts sont des énoncés assez généraux concernant
ce que vous espérez accomplir au final. Ils représentent un impact à long
terme ou le changement que vous espérez réaliser.

Prenons un exemple précédemment cité : celui de l’école biblique qui


ne possédait aucune installation sanitaire. À l’issue d’un dialogue et d’une
analyse, les élèves ont pris conscience que ce qu’il leur fallait avant tout
sur le campus, c’était des toilettes. Le but suivant formule clairement la
solution recherchée : Chaque famille vivant sur le campus de l’école biblique
devra avoir accès à des latrines et sera tenue d’en faire usage. Il s’agit là
d’un énoncé assez général qui indique clairement ce que vous comptez
réaliser d’ici la fin du projet. Notez que ce but comporte deux parties.

— 146 —
Le processus de développement transformationnel

La présence de latrines garantit-elle un changement de comportement ?


Pas du tout. L’installation de W.-C. n’entraînera pas nécessairement le
changement désiré ; les latrines doivent également être utilisées.

Les objectifs
Les objectifs sont des mesures spécifiques et immédiates prises pour
atteindre le but fixé. Un bon objectif se compose de cinq caractéristiques
qui forment l’acronyme SMART :

S – Spécifique
M – Mesurable
A – Acceptable
R – Réaliste
T – Temporellement défini. Il doit avoir un début et une fin.

Selon le but fixé, une personne peut avoir plusieurs objectifs pour un
seul but. Nous avons noté que le but du projet de création de latrines sur
le campus de l’école biblique était le suivant : Chaque famille vivant sur le
campus de l’école biblique devra avoir accès à des latrines et sera tenue d’en
faire usage. Les objectifs de ce but pourraient se décliner ainsi :

• Les premières latrines seront construites sur le campus au cours


des trois prochains mois.
• Chaque famille sera responsable de la construction de ses propres
latrines au cours des neuf mois suivants.
• À la fin d’une période de douze mois, chaque famille installée sur
le campus de l’école biblique aura ses propres latrines.

Les objectifs ci-dessus combinent les cinq caractéristiques SMART.


Chaque objectif indique précisément ce qui doit être fait. Chaque objectif
est mesurable : l’action a-t-elle été réalisée ou non ? Chacun d’eux est
acceptable et réaliste : il est fort probable que des latrines pourront être
construites en l’espace de trois mois. Chaque objectif est également
temporellement défini : la réalisation de chaque action est associée à un
laps de temps bien défini.

Notez que les trois objectifs proposés ne traitent qu’une partie du but :
celle qui a trait à la construction de latrines. Puisque la réussite de ce

— 147 —
Le processus de développement transformationnel

projet de développement ne dépend pas uniquement de la construction


de lieux d’aisance, il est également nécessaire de rédiger d’autres objectifs
concernant l’utilisation de telles installations sanitaires. Par exemple, notez
les objectifs suivants qui se rapportent à l’autre versant du but fixé :

• Une conférence offerte à tous les élèves sur les bienfaits de


l’utilisation des lieux d’aisance sera organisée la deuxième semaine
de février.
• Chaque responsable de dortoir devra, une fois par semaine, faire
un compte rendu sur l’utilisation des latrines aux responsables
de l’administration.
• Une inspection des lieux sera réalisée chaque semaine pour s’assurer
de l’absence d’excréments dans l’enceinte de l’école.

Souvenez-vous que le développement et la croissance des élèves priment


avant tout. En les aidant à développer des modes de vie plus sains, nous
les aidons à mener une vie plus abondante. En leur témoignant du respect
et en respectant leur dignité tout au long du processus d’instruction et de
suivi, nous contribuons au développement de leur amour-propre.

Notez qu’un problème peut être résolu de plusieurs façons. Il est


probable que l’église locale ne puisse pas régler tous les problèmes étant
donné qu’elle manque de ressources et peut-être même d’un moyen de
se faire entendre, tant sur le plan politique que civique. Il n’en demeure
pas moins qu’elle est à même de résoudre la plupart des problèmes, et
ce, à un niveau ou à un autre. Par exemple, si les membres du comité
de développement ont identifié le paludisme comme un problème à
traiter en priorité, que pourriez-vous donc faire ? Vous pourriez établir
des objectifs centrés sur l’approvisionnement en médicaments ou encore
sur la construction et l’administration d’un centre médical. Ce sont des
buts et des objectifs ambitieux qui exigent un financement continu.
Malheureusement, il est peu probable que votre église puisse mobiliser de
telles ressources financières ; en revanche, il est possible de s’attaquer au
paludisme au moyen de l’instruction. Nombreux sont ceux qui ignorent
encore le mode de transmission du paludisme (par le moustique) et à quel
moment de la journée le risque de transmission de la maladie est le plus
important (par les moustiques qui piquent le soir). Votre église pourrait
peut-être éduquer la communauté quant au mode de transmission et de

— 148 —
Le processus de développement transformationnel

prévention du paludisme, aux signes et aux symptômes, et à l’accessibilité


à des centres de dépistage et de traitement. Si, lorsque nous pensons au
« développement », nous envisageons souvent des actions à grande échelle
et bien plus compliquées, ces méthodes sont tout aussi importantes.

Il est également important de rédiger des buts et des objectifs


spirituels. Souvenez-vous que ce que nous voulons avant tout, c’est
que nos communautés soient transformées ; pour cela, nous devons
toucher chaque aspect de l’être humain, que ce soit sur le plan affectif,
relationnel, physique et spirituel. Dans l’exemple précédent portant sur
le paludisme, quels buts ou objectifs spirituels auriez-vous pu fixer ?
Vous auriez pu stipuler quelque chose comme Une fois par semaine, et
ce, pendant six semaines, les membres du comité feront du porte-à-porte au
sein de la communauté afin de sensibiliser les ménages aux tenants et aux
aboutissants du paludisme. L’équipe terminera chaque visite en mentionnant
que Dieu désire que nous soyons en bonne santé, tant sur le plan physique
que spirituel.

La réalisation des buts et des objectifs nécessite souvent un changement


de comportement de la part des membres de la communauté. En fonction
du comportement à changer et de la mentalité de la communauté, cela
peut constituer un immense obstacle au développement. Pour réussir
à induire un changement de comportement, il est souvent essentiel de
se prêter à une analyse poussée des membres de la communauté ou du
public-cible. Quels types de comportement adoptent-ils ? Que doivent-ils
changer dans leur comportement pour pouvoir accéder à l’abondance
de vie que Dieu donne ? Que pensent-ils du changement proposé ?
Pour convaincre les gens de changer leurs habitudes ou de modifier un
comportement adopté de longue date, il est essentiel de les persuader
des bienfaits qu’ils en retireront. Comment l’équipe de développement
transformationnel doit-elle s’y prendre pour présenter le changement de
comportement de manière à ce que la communauté l’approuve ?

On raconte que les membres du comité de développement


transformationnel d’une église voulaient aider les femmes de leur église
et de la communauté environnante. En raison de la vision culturelle
stéréotypée des femmes, nombre d’entre elles n’avaient que peu
d’instruction et ne pouvaient ni lire ni écrire. Après s’être entretenus

— 149 —
Le processus de développement transformationnel

avec ces femmes dans le but de les aider à identifier leurs besoins
prioritaires, la décision fut prise de leur proposer des cours de lecture
et d’écriture. Ces cours suscitèrent beaucoup d’enthousiasme au tout
début ; mais, quelque temps plus tard, un problème apparut clairement.
Les femmes n’assistaient pas régulièrement aux cours et, lorsqu’elles y
venaient, il était évident qu’elles n’avaient pas fait leurs devoirs. Dans la
mesure où ces femmes avaient elles-mêmes pris la décision d’apprendre
à lire et à écrire, les membres du comité avaient du mal à comprendre
leur manque d’intérêt soudain ; ils organisèrent une réunion avec elles
pour savoir ce qui avait changé. Ils apprirent que, malgré leur désir
profond d’apprendre à lire et à écrire, leurs maris ne partageaient pas
leur enthousiasme. Ces derniers ne voyaient pas pourquoi leurs épouses
avaient besoin de savoir lire et écrire. Qui plus est, ils pensaient que
ces cours les accapareraient au point qu’elles négligeraient leurs autres
responsabilités. Ils n’appréciaient guère non plus que les enfants soient
laissés seuls à la maison pendant que les femmes étaient en cours ; c’est
pourquoi ils leur interdisaient d’assister aux cours. Et les fois où elles s’y
rendaient, quand elles rentraient chez elles, elles étaient dissuadées de
pratiquer ce qu’elles avaient appris en cours.

Si les femmes étaient déjà la cible des efforts de développement


déployés, les membres du comité réalisèrent qu’il leur fallait également
trouver un moyen de convaincre les maris de l’intérêt des cours
dispensés. Il ne suffisait pas de leur dire que « les femmes avaient droit à
l’éducation », surtout étant donné la mentalité déjà prévalente à l’égard
des femmes. Il fallait persuader les maris qu’il était avantageux pour eux
d’avoir une femme capable de lire et d’écrire. Ils devaient également être
amenés à se rendre compte que les cours ne venaient en rien perturber
la vie familiale. Comment les femmes et les membres de l’équipe de
développement transformationnel allaient-ils pouvoir présenter leur
cause de manière à convaincre les hommes d’autoriser leurs épouses à
assister aux cours ?

L’équipe convoqua les maris dans l’espoir d’arriver à mieux les


comprendre et de trouver des arguments susceptibles non seulement de
les convaincre d’autoriser leurs femmes à assister aux cours, mais aussi
de vouloir avoir une épouse qui sache lire et écrire. Au bout du compte,
deux éléments finirent par faire surface : l’aspect économique et la garde

— 150 —
Le processus de développement transformationnel

des enfants. Les membres de l’équipe expliquèrent aux hommes que


les femmes qui savent lire et écrire ont davantage de compétences et
sont donc plus aptes au travail. Elles sont également plus efficaces dans
le commerce étant donné qu’elles peuvent utiliser leurs compétences
lorsque besoin est et sont plus sûres d’elles. Bref, avoir une femme
qui sait lire et écrire est un avantage pour toute la famille sur le plan
financier. Les membres de l’équipe remarquèrent également que les
maris n’appréciaient guère que les enfants soient laissés seuls chez eux
et qu’il n’y ait personne pour prendre soin d’eux ; alors le groupe de
jeunes de l’église organisa un programme de garderie pendant les heures
de cours. Avant de venir en cours, les femmes n’avaient qu’à déposer
leurs enfants à la garderie de l’église. Cela permettrait de réduire les
tensions chez elles.

Le plan d’action
Un plan d’action est une description circonstanciée des activités qui
doivent être menées dans le but de réaliser les buts et les objectifs déjà
définis. Il brosse un tableau détaillé de l’action et de ses bénéficiaires,
de l’endroit et du moment où elle sera réalisée, et des personnes
responsables. Pour que le plan d’action soit efficace, une date de fin
d’exécution de la tâche doit être attribuée à chaque activité.

Le plan d’action est la « feuille de route » que vous devrez suivre pour
atteindre la destination souhaitée. Plus il est détaillé, plus il sera efficace.

Par exemple, le premier objectif du projet de construction de latrines


était le suivant : Les premières latrines seront construites sur le campus
au cours des trois prochains mois. Le plan d’action de cet objectif devra
comprendre une liste détaillée du matériel nécessaire et des différentes
tâches à effectuer, le nom des personnes associées à chaque activité et le
délai de réalisation de chaque tâche. Par exemple :

• Joseph ira s’informer auprès de propriétaires de latrines du modèle


à utiliser et de la profondeur de la fosse à creuser. Ce modèle sera
disponible dans un délai de deux semaines.
• Marie répartira les étudiants de première année en groupes et
elle les chargera de l’excavation de la fosse. Chaque élève devra

— 151 —
Le processus de développement transformationnel

apporter sa propre pelle ou tout autre outil pouvant être utilisé


pour creuser. L’excavation ne prendra pas plus de trois semaines.
• Thomas chargera les étudiants de deuxième année de ramasser
des branches et des morceaux bois qui serviront de lattes qui
seront disposées autour du trou. Une fois l’excavation terminée,
ces élèves arrangeront les lattes comme il faut ; cela ne devra pas
prendre plus d’une semaine après la fin de l’excavation.
• Louise, quant à elle, chargera les étudiants de troisième année de
se procurer la boue et les branchages nécessaires pour construire
des murs autour du lieu d’aisance. La construction des murs devra
durer trois semaines après la fin de l’excavation.

Pour pouvoir visualiser le plan d’action, il est utile de dresser un


tableau. C’est souvent ce que nous appelons la phase de planification des
étapes ; il s’agit là d’un outil essentiel. Les étapes ci-dessus pourraient se
présenter de la façon suivante :

Plan d’action pour le projet de construction de latrines : le 20 mai 2005


Tâche à effectuer Personne(s) Date butoir Coût Matériel nécessaire
chargée(s) de
la tâche
Obtenir un Joseph Le 3 juin Frais de Du papier et un
bon modèle de transport stylo
latrine
Répartir les Marie Le 27 mai Un cahier
étudiants de
première année
dans les groupes
chargés de
l’excavation
Début de Les étudiants Le samedi Argent Chaque élève
l’excavation de première 10 juin pour les devra apporter sa
année boissons propre pelle ou
tout autre outil
utile pour creuser.
Sodas pour les
ouvriers
Inspection des Joseph Le lundi
fosses 12 juin
Organiser en Thomas Le 3 juin Un cahier
groupes les
étudiants de
deuxième année

— 152 —
Le processus de développement transformationnel

Ramasser des Les étudiants Le samedi Argent Des brouettes ou


morceaux de de deuxième 10 juin pour les des charrettes
bois année boissons
Disposer les Les étudiants Le samedi Argent Du ciment
morceaux de de deuxième 17 juin pour le
bois en lattes année ciment
sur les latrines
creusées
Inspection des Joseph Le lundi
fosses 19 juin
Organiser les Louise Le 3 juin Un cahier
étudiants de
deuxième année
Rassembler Les étudiants Le samedi Des brouettes ou
la boue et les de troisième 10 juin des charrettes
branchages année
Début de la Les étudiants Le samedi Argent De l’eau
construction des de troisième 17 juin pour les Sodas pour les
murs autour des année boissons ouvriers
latrines
Inspection des L’infirmière Le samedi
latrines et les 24 juin
responsables
de l’école
Célébration Toute l’école Le 3 Argent Un micro pour
d’une vie saine septembre pour la les discours, des
nourriture tables, des chaises,
et les etc.
boissons
Figure 8.1

Vous remarquerez que l’inspection est mentionnée à trois reprises


dans notre plan d’action. Cela fait partie d’un processus important
appelé le suivi, étape que nous aborderons plus en détail ci-dessous ;
quoi qu’il en soit, il est très important d’inclure des étapes de vérification
de l’avancement des travaux. Notez la différence qui existe entre les
inspections réalisées au cours du projet et celle effectuée à la fin.
Pendant le déroulement du projet, Joseph n’a fait que vérifier que les
latrines étaient construites conformément au modèle choisi. En cas de
problème, il aurait été plus facile de le résoudre immédiatement, et ce,
avant la fin du projet, afin d’éviter de commettre des erreurs coûteuses.
À l’issue du projet, l’infirmière et les responsables de l’école ont
effectué une dernière évaluation. Ils ont pris le temps non seulement
d’inspecter les latrines, mais aussi d’interroger les étudiants quant aux

— 153 —
Le processus de développement transformationnel

expériences qu’ils avaient faites durant le projet. Ils voulaient savoir ce


qu’ils pensaient de cette expérience et ce qu’ils avaient appris au cours
de la réalisation du projet ; ils en ont également profité pour collecter
des informations qui pourraient éventuellement faciliter la réalisation
d’un projet similaire ailleurs. Une fête de célébration avait été organisée
avant même le commencement des travaux afin de donner à chacun
une perspective réjouissante. Les festivités prévues au programme ont
fait naître l’espoir que l’épidémie de boutons appartenait au passé et
qu’elle ne se reproduirait plus.

Bien qu’il incombe à l’équipe centrale de dresser un plan d’action,


la communauté, associée à l’équipe, doit prendre part aux activités du
projet. Être membre d’une équipe ne signifie pas que l’on n’a rien à faire ;
au contraire, cela signifie que nous sommes responsables de la stratégie
et de l’organisation du projet. Les meilleurs des leaders (et les membres
d’équipe SONT des leaders) sont ceux qui font preuve de dynamisme et
n’ont pas peur de mettre la main à la pâte !

Après avoir rédigé un plan d’action, posez-vous les questions suivantes :

• Le plan comprend-il une dimension spirituelle ?


• La charge de travail a-t-elle été répartie uniformément entre les
membres de l’église et ceux de la communauté ?
• Les buts et les objectifs seront-ils atteints si toutes les phases du
plan d’action sont réalisées ?

Le suivi
Le suivi se rapporte au processus continu et régulier de surveillance
des activités d’un programme au moyen de diverses méthodes, telles la
tenue des registres et la réalisation d’évaluations régulières, que ce soit
oralement ou par écrit.

Le suivi doit être effectué en continu tout au long du projet. Il


répond à plusieurs objectifs. Pour commencer, il fournit un cadre de
responsabilisation quant à l’utilisation des ressources. Ensuite, il permet
de s’assurer que le projet est en bonne voie de réalisation conformément
aux stipulations du plan d’action et de l’horaire fixé. Et, lorsqu’il est

— 154 —
Le processus de développement transformationnel

accompagné de documents justificatifs, il présente un historique du projet,


ce qui peut s’avérer utile, notamment durant la période d’évaluation et
pour ceux qui désirent mettre en œuvre un projet similaire.

Dans l’ensemble, le suivi du projet doit porter sur la performance et sur


le processus. Le suivi des performances permet d’évaluer si les ressources
sont utilisées conformément au budget déposé et si le projet respecte les
délais fixés. La meilleure façon de voir si le projet est en bonne voie de
réalisation et atteint les buts et les objectifs énoncés dans le plan d’action
est de comparer les informations recueillies sur le terrain aux données
compilées dans le plan d’action.

Plusieurs méthodes et formulaires peuvent être utilisés pour recueillir


des informations sur le projet. À leur nombre figurent :

• Des inspections in situ


• Des rapports oraux informels
• Des examens officiels réguliers avec divers membres du personnel
• Des réunions d’informations concernant le budget et les mises à
jour budgétaires
• Des comptes rendus d’activité ou des rapports sur l’avancement
des travaux
• Des audits financiers, selon les besoins (Cheyne, 101)

Il convient également d’effectuer un suivi de la performance des


membres du personnel impliqués dans le projet. À savoir, cependant,
que plusieurs facteurs entrent en ligne de compte. S’il s’agit de
membres bénévoles de l’église qui investissent temps, talents et
argent pour pouvoir aider, les systèmes de suivi rigoureux doivent être
quelque peu modifiés. Dans le cas de bénévoles, le meilleur moyen
d’éviter des problèmes, c’est de leur dispenser une formation adaptée
avant d’entamer le projet. Le niveau de formation des bénévoles
est directement lié à leur degré d’efficacité sur le terrain. Ce type
de suivi peut en inquiéter plus d’un qui n’apprécient guère que
leurs faiblesses soient exposées au grand jour. Cela peut également
refroidir leur enthousiasme et les pousser à abandonner le projet. Les
encouragements et les éloges doivent primer sur les réprimandes et
les reproches.

— 155 —
Le processus de développement transformationnel

Les employés rémunérés, quant à eux, ont davantage de possibilités


de développement professionnel ; leurs fonctions sont généralement bien
définies et sont soumises à un suivi régulier de la part de leurs supérieurs.
Là encore, il est toujours important de se rappeler que nous avons affaire
à des êtres humains faillibles qui apprendront de leurs erreurs et de leurs
échecs si tant est que ces derniers soient évoqués de façon convenable.

Il est également important de réaliser un suivi du processus des


activités de développement transformationnel. Sachant que les êtres
humains sont la cible principale du projet de développement, il est
important de rassembler des informations relatives aux changements
ayant trait aux sentiments, aux croyances, aux pensées et aux attitudes
des gens résultant des activités de développement mises en œuvre. Il est
également important de tenir compte de la façon dont ils ont vécu les
activités du projet.

Lors d’une formation à un nouveau procédé culturel, comment les


participants ont-ils été traités ? Leurs méthodes traditionnelles ont-elles
été validées ou discréditées ? Leur dignité a-t-elle été préservée durant le
processus d’apprentissage ou ont-ils été humiliés en présence de leurs
collègues ? Ont-ils pu participer aux prises de décisions et aux diverses
phases importantes du projet, ainsi qu’aux activités pratiques ? Quelles
sont les nouvelles relations qui se sont forgées durant le projet ? Est-ce
que d’anciennes relations ont été changées ou rétablies ? A-t-on rendu un
témoignage holistique durant les activités du projet ? A-t-on su identifier
les moments sacramentels ?

Toutes ces questions ont trait au processus de développement.


Le suivi du processus est extrêmement important car il contribue au
perfectionnement des parties prenantes. À l’issue du projet, il se peut
que la performance des personnes concernées ait été excellente, mais
qu’elles aient été blessées dans leur amour-propre à cause de la façon
dont elles ont été traitées durant le projet.

Il est souvent conseillé aux personnes impliquées dans le projet de


développement de consigner par écrit l’histoire d’un des bénéficiaires
dudit projet. Ces témoignages tendent à mettre en évidence l’impact de
ce dernier sur la vie des gens. Le but ultime des projets de développement

— 156 —
Le processus de développement transformationnel

transformationnel est la transformation des vies et des relations. Chaque


fois que les membres de l’équipe de développement se rencontrent pour
discuter du projet, il serait bien que quelqu’un partage un témoignage
qu’il ou elle a entendu cette semaine-là. Cela encouragera les bénévoles
à persévérer et glorifiera Dieu.

Pour qu’un projet puisse être qualifié de transformationnel, les


principes du développement transformationnel doivent être sciemment
intégrés aux activités du projet. Ils doivent également faire l’objet d’un
suivi. Par exemple, si l’amour est censé motiver le développement
transformationnel, comment les participants expérimenteront-ils l’amour
de Dieu ? Entendent-ils parler de l’amour de Dieu ? Sont-ils témoins de
l’amour de Dieu manifesté à travers la vie des membres du personnel ?
Les projets de développement transformationnel doivent être durables.
Un suivi bien conçu permettra de mettre en évidence les parties du
projet qui ne pourront être entretenues du fait qu’elles nécessitent bien
plus que ce que la communauté peut apporter. Il est important de rédiger
un bon plan d’action car celui-ci laisse souvent paraître les activités qui
s’avéreront trop coûteuses ou exigeront trop de temps de la part des
bénévoles.

Sachant qu’aucun projet ne se déroule jamais vraiment comme prévu,


une certaine marge de manœuvre s’impose. Le plan initial doit être
modifié dès que de nouvelles informations sont recueillies. La régularité
du suivi permet à l’équipe d’accéder à des informations actualisées et
donc d’apporter les modifications nécessaires.

Parfois, la responsabilité du suivi peut être confiée à un seul membre


de l’équipe. Le choix de la personne doit être mûrement réfléchi du fait
que cette responsabilité ne doit nullement être considérée comme une
position de pouvoir ; cette personne est simplement chargée de vérifier
et de documenter les diverses activités du projet. Le suivi peut également
être géré par les responsables des diverses parties du projet qui peuvent
documenter les ressources utilisées et rédiger un compte rendu des
opérations propres à leur mandat au sein du projet.

— 157 —
Le processus de développement transformationnel

Révision et application
Vous venez de terminer l’étude de « la planification : savoir où l’on va »
au cours de laquelle vous vous êtes penché sur certains des bienfaits de la
planification systématique mise en œuvre dans le cadre du processus de
développement transformationnel. À présent, considérez attentivement les
questions suivantes avant d’y répondre.

1. Citez les quatre phases du processus de planification et dites


comment vous les mettriez en place dans votre communauté.

2. D’après vous, à quelles catégories de personnes doit-on faire appel


lors de la formation de l’équipe centrale de planification ?

3. Expliquez la différence qui existe entre les buts et les objectifs.

4. En quoi consiste un objectif SMART ?

5. À quelles questions le plan d’action se doit-il de répondre ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 158 —
C H A P I T R E 9

La mise en œuvre :
l’action et son impact

C
’est là la phase d’exécution des travaux. Vos buts, vos objectifs
et le plan d’action détaillé vous aideront à savoir exactement où
et comment commencer. Sachez simplement que vous pouvez
toujours revenir en arrière, à savoir que ce n’est pas parce que vous
avez terminé une phase du processus de développement que vous ne
pouvez pas y revenir. Au contraire, le processus dans lequel vous vous
êtes embarqué a l’avantage d’être flexible ; il nécessite souvent des
remaniements et une réorganisation. Si, après avoir entamé une tâche,
vous rencontrez des problèmes d’emblée, peut-être vous faudra-t-il revenir
à la phase de planification et revoir vos buts et vos objectifs ou bien
ajuster votre plan d’action. Ou, si vous débutez un projet au sein d’une
communauté et constatez qu’il vous manque certaines informations,
vous aurez besoin de revenir à la phase du bilan communautaire, non
pas pour recommencer à zéro, mais pour réévaluer le plan et y ajouter
les informations jugées pertinentes.

— 159 —
Le processus de développement transformationnel

Les caractéristiques de l’ouvrier du développement


transformationnel

La personnalité et les attitudes des membres de l’équipe de


développement transformationnel sont un facteur décisif de la réussite
de n’importe quel projet. Voici une histoire qui vient illustrer ce concept :

Le singe et le poisson
Des pluies torrentielles et des vents
violents avaient contraint un singe
à se réfugier au sommet d’un arbre
sur une île. Depuis cet abri sûr, il
attendait patiemment que les eaux en
furie reprennent leur cours normal.
Soudain, il aperçut un poisson
qui nageait à contre-courant. Il lui
semblait que le poisson avait du mal
à s’en sortir et avait besoin d’aide. Figure 9.1
Gentil comme il était, le singe décida d’aller aider le poisson.

Une branche pendait au-dessus de


l’endroit où le poisson semblait
lutter contre les eaux agitées. Au
péril de sa vie, le singe s’aventura
jusqu’au bout de la branche,
étendit son bras et arracha le
poisson des eaux dangereuses qui
Figure 9.2 étaient sur le point de l’engloutir.
Après être revenu en lieu sûr, le singe posa soigneusement le
poisson sur le sol. Pendant quelques instants, le poisson se mit à
sauter d’excitation tellement il était heureux, puis il s’arrêta net,
épuisé par ce qu’il venait de vivre. Le singe éprouva une joie et une
satisfaction indicibles. Il avait réussi à aider une autre créature.
(Adapté de l’œuvre d’Elmer, 14)

Cette histoire peut vous sembler étrange. Cependant, elle montre que
nos bonnes intentions peuvent parfois porter préjudice aux autres, et
ce, malgré nous. Lorsque nous décidons de faire quelque chose qui nous

— 160 —
Le processus de développement transformationnel

semble bien, nous devons considérer tous les angles et nous assurer que
les résultats obtenus correspondent à nos intentions premières.

Comment se fait-il que le singe en sache si peu sur le poisson ?


Comment pouvait-il penser qu’il aidait le poisson alors qu’il lui faisait
du mal ? Cette petite histoire nous aide à mieux comprendre certains
des défis et des occasions qui se présentent aux membres de l’équipe
lorsqu’ils essaient d’aider leurs prochains.

Par exemple, certaines personnes bien intentionnées venant de


pays occidentaux envoient des vêtements usagés à l’étranger. Ils sont
heureux d’avoir pu venir en aide aux plus défavorisés. Cependant, il
arrive parfois que les populations locales ne puissent pas utiliser ces
vêtements considérés comme indécents aux yeux de leur culture et peut-
être même tabous. Certains habits, comme les shorts, les talons hauts ou
les maillots de bain, sont non seulement peu pratiques dans certaines
régions d’Afrique, mais peuvent aussi choquer plus d’une personne. Les
donneurs occidentaux sont animés de bonnes intentions et peuvent,
certes, se féliciter de leurs « bonnes actions », mais il n’en demeure
pas moins que ces dernières n’aboutissent pas à grand-chose. En fait,
certains pourraient même les qualifier de nuisibles à leur société.

Revenez sur l’histoire du singe et du poisson, et répondez aux


questions suivantes :

• À votre avis, pourquoi le singe a-t-il essayé « d’aider » le poisson ?


• Que présumait le singe à propos du poisson ?
• Que pensait le poisson de l’aide qu’il avait reçue ?
• Comment le singe pourrait-il s’y prendre la prochaine fois ?

Beaucoup de gens veulent aider les pauvres, les perdus, les nécessiteux
et les opprimés. Nombre d’entre nous peuvent, à leur insu, agir comme
le singe. Ce dernier s’était montré généreux et voulait apporter son aide ;
mais, sans le vouloir, il a fini par tuer le poisson pour la simple raison qu’il
ignorait tout de la « culture » du poisson. Nous pensons trop souvent que les
autres sont comme nous. Nous partons du principe qu’ils ont les mêmes
buts, les mêmes ambitions, les mêmes valeurs et les mêmes besoins que
nous. Ces axiomes-là sont dangereux car, en cas d’erreur, nous risquons

— 161 —
Le processus de développement transformationnel

de nuire à une personne ou à une communauté, peu importe que notre


désir le plus cher soit de les aider. Examinez attentivement l’illustration
suivante :

Les femmes d’un village d’Afrique de l’Ouest devaient faire un long


trajet à pied pour se procurer de l’eau, et ce, plusieurs fois par
jour. Voyant cela, des travailleurs humanitaires de passage dans la
région décidèrent qu’il serait avantageux de creuser, au cœur du
village, un puits auquel tous les habitants pourraient avoir accès ;
cela permettrait d’améliorer leur qualité de vie, notamment celle
des femmes. Sans entreprendre la démarche visant à apprendre à
connaître les membres de la communauté, à tenir compte de leurs
idées et à leur permettre de donner leur avis quant aux besoins
qu’ils jugeaient eux-mêmes prioritaires, l’organisme humanitaire
dressa ses propres plans et entreprit de forer un puits dans le village.
Lorsqu’ils regardaient le puits qui trônait au beau milieu du village, les
travailleurs humanitaires étaient fiers de ce qu’ils avaient accompli.
Un mois plus tard, ils revinrent sur les lieux pour évaluer l’utilité
du puits et documenter à quel point sa présence avait contribué à
l’amélioration du niveau de vie des habitants du village.

À leur grand étonnement, pratiquement personne n’utilisait le puits.


Les femmes continuaient d’aller puiser de l’eau loin de chez elles.
Finalement les travailleurs humanitaires décidèrent d’interroger
les membres de la communauté pour voir ce qu’ils avaient à dire.
Ils convoquèrent une réunion et demandèrent pourquoi personne
n’utilisait le puits. Le chef du village se leva et leur apprit que le
puits se trouvait dans une partie sacrée du village où leurs ancêtres
étaient enterrés. Pour les gens du village, boire de cette eau, c’était
boire leurs ancêtres. Les représentants de l’organisme humanitaire
proposèrent de déplacer le puits. C’est alors qu’une femme prit la
parole. Pour les femmes, les trajets à pied jusqu’à la source n’étaient
nullement contraignants. En fait, ces allers-retours étaient pour elles
des moments passés à socialiser, des moments passés avec leurs
amies, sans enfant ni mari. Ce puits au milieu du village, elles n’en
voulaient pas car cela voulait dire qu’elles ne pourraient plus sortir
avec leurs amies. Ce qu’elles voudraient bien, en revanche, ce serait
des récipients mieux adaptés pour transporter l’eau. Elles aimaient

— 162 —
Le processus de développement transformationnel

aller chercher l’eau, mais elles ne voulaient pas le faire aussi souvent
dans la journée. Si elles pouvaient se procurer de plus grands
récipients pourvus de couvercles, cela leur permettrait de transporter
davantage d’eau d’un seul coup et d’éviter que des dépôts de terre
viennent la polluer.

Cet exemple montre ce qui arrive lorsque des étrangers présument


que leur vision du monde est universelle. Les travailleurs humanitaires
auraient pu économiser beaucoup de temps et d’argent si, en premier
lieu, ils avaient pris la peine de consulter les habitants du village.

En tant que chrétiens et agents du développement transformationnel,


nous voulons que les communautés fassent l’expérience de l’amour de
Jésus, soient transformées par Sa grâce et œuvrent à Son service ; pour
cela, il est important de comprendre la vision du monde et la culture des
populations des communautés que nous servons. Il arrive que la vision du
monde des membres de l’église diffère de celle des personnes en dehors
de l’église, qu’elles soient ou non issues d’une même culture. Les chrétiens
doivent prendre le temps de comprendre les croyances, les valeurs et les
aspirations des inconvertis qu’ils veulent véritablement aider.

Nous avons déjà vu que Dieu nous commande d’aider notre prochain.
Les chrétiens doivent toujours être prêts à aimer et à aider leurs
prochains, certes, mais ils doivent également s’assurer que l’aide qu’ils
apportent est efficace. Chaque église locale est susceptible d’être un
agent positif de changement au sein de sa communauté. En tant qu’église,
il est important de s’interroger sur le type de changement que notre
église désire opérer au sein de la communauté. Nous ne voulons pas
être comme le singe qui voulait aider mais, ne sachant pas vraiment
quoi faire, avait mal fait.

Outre la sensibilité aux questions culturelles, chaque pasteur et chaque


église désireux(se) d’exercer une influence positive sur sa communauté
devra s’efforcer d’acquérir diverses compétences. Il s’agit là d’outils de
travail importants. Chaque ouvrier doit se munir d’outils pour pouvoir
faire son travail comme il faut. De même, chaque pasteur doit également
disposer de compétences diverses qui lui permettront d’être un serviteur
efficace au service de l’Évangile.

— 163 —
Le processus de développement transformationnel

Au nombre de ces outils figurent les dons spirituels que Dieu donne et
l’appel qu’Il lance : la capacité de lire, de comprendre et d’expliquer la
Parole de Dieu aux autres et l’onction du Saint-Esprit qui lui permet de
vivre dans la sainteté.

Outre les dons spirituels, certains outils pratiques peuvent également


aider un ministre de l’Évangile à faire face à plusieurs types de personnes et
de problèmes. Par exemple, le pasteur spécialisé dans la relation d’aide peut
apporter une aide précieuse dans les moments de détresse. Les membres
d’une église qui désirent offrir des soins à domicile aux victimes du VIH/
SIDA auront davantage de succès s’ils savent en quoi consiste la maladie
et comment aider les victimes. Chaque fois que les membres d’une église
veulent avoir un impact positif sur la communauté locale, il est utile pour eux
d’acquérir certaines compétences qui les aideront à atteindre leur objectif de
manière à susciter une transformation dans la vie des gens.

Le changement et son processus


Les gens ne changent pas du jour au lendemain ; cela prend du temps,
notamment si le changement s’opère de l’intérieur. Lorsqu’une église
désire contribuer à la transformation de l’esprit et du comportement
des gens, elle ne doit pas perdre de vue que cela prendra du temps.
Le changement et la transformation sont des processus et non des
évènements ponctuels. Si les hommes peuvent être pardonnés de leurs
péchés par le sang de Jésus et remplis du Saint-Esprit, il n’en demeure pas
moins que la transformation de certaines de leurs anciennes croyances,
valeurs et actions (vision du monde) prendra du temps. Le développement
transformationnel de la communauté peut inciter les membres de l’église
et de la communauté à mettre en œuvre des projets à petite échelle.
Ces projets donneront aux membres de l’église l’opportunité de changer
la vision du monde des personnes qu’ils côtoient et de contribuer à la
transformation de leur mode de pensée et de leur comportement.

Premièrement, les chrétiens qui désirent être des agents de


changement positif doivent avoir une vision du Royaume de Dieu et de
l’œuvre à laquelle ce dernier les a appelés. Il est absolument essentiel
de comprendre la vision de rédemption de Dieu et l’espoir qu’Il fait
naître dans la vie des hommes. Il est également nécessaire de connaître

— 164 —
Le processus de développement transformationnel

l’amour de Christ et d’en avoir fait l’expérience pour pouvoir aider nos
prochains avec amour.

Deuxièmement, les chrétiens doivent comprendre que le récit biblique,


de la Genèse à l’Apocalypse, englobe et interprète tous les autres récits
apparus au sein des diverses cultures. Nous devons demander à Dieu
de nous aider à avoir une juste vision biblique du monde. Nous avons
également besoin de sonder l’intégralité des Écritures afin de comprendre
la totalité de la bonne nouvelle offerte à tous les hommes.

Lorsque nous entamons notre ministère auprès des membres d’une


communauté — que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de l’église —
nous devons obéir au commandement que Jacques nous donne dans son
épître : « Ainsi, que tout homme soit prompt à écouter, lent à parler, lent
à se mettre en colère » (1.19).

Troisièmement, les agents de changement doivent étudier le langage,


les valeurs et le système de fonctionnement propres à la communauté
ciblée. Par exemple, les enfants des rues parlent, agissent et s’organisent
d’une certaine façon qui diffère considérablement de celle des membres
de l’église. Quel changement les membres d’une communauté particulière
peuvent-ils apporter ? Par exemple, si vous vouliez introduire de nouvelles
techniques agricoles, qui devrait approuver le projet en premier ? Qui sont
les dirigeants et comment prennent-ils leurs décisions ? Nous devons
tenir compte des questions liées à la culture et à la vision du monde si
nous voulons avoir un impact positif.

Quatrièmement, l’agent de changement, quel qu’il soit, se doit


d’adopter certaines attitudes lorsque son but est d’influer sur la
communauté. Êtes-vous en contact avec une autre communauté qui
diffère considérablement de la vôtre ? Quelles sont les choses auxquelles
vous auriez du mal à vous adapter ? Quel impact pourriez-vous avoir ?

Avant tout, sachez qui vous êtes. Lorsque vous connaissez les pratiques,
les valeurs et les croyances de votre propre communauté, il est bien plus
facile d’arriver à cerner celles des autres. La plupart du temps, nous
portons un jugement négatif sur les personnes dont le comportement
diffère du nôtre. Par exemple, dans une culture, il est tout à fait normal de

— 165 —
Le processus de développement transformationnel

Figure 9.3

regarder les gens dans les yeux quand on leur parle ; dans une autre, cela
traduit un manque de politesse. Si, dans une culture, il est de tradition
de bénir les jeunes en leur crachant dans les mains, dans une autre, une
même action dénote une profonde aversion.

Des attitudes déterminantes


Tous les pasteurs et les membres d’église qui désirent apporter des
changements positifs au sein de leur communauté doivent manifester
certaines attitudes essentielles :

Maintenez de bons rapports avec les autres : soyez aimable et soyez


prêt à prêter main-forte à ceux qui sont dans le besoin. Accueillez à bras
ouverts même les plus antipathiques. Ne perdez pas de vue que Dieu est
le Créateur de tous les êtres humains et qu’Il les a créés à Son image.
L’Écriture nous dit que l’amour que nous manifestons à l’égard de notre
prochain est une expression manifeste de notre amour intime pour Dieu.
Lorsqu’on Lui a demandé quel était le plus grand commandement, Jésus
a répondu en disant : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur,
de toute ton âme, et de toute ta pensée. C’est le premier et le plus grand
commandement. Et voici le second, qui lui est semblable : Tu aimeras ton

— 166 —
Le processus de développement transformationnel

prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépendent toute la


loi et les prophètes » (Matthieu 22.37–40).

Soyez patient. Tout changement, quel qu’il soit, prend du temps. Nous
devons permettre aux autres d’avancer à leur rythme. La patience est
également essentielle au bon déroulement à long terme de toute initiative
de développement échelonnée, disons sur une cinquantaine d’années.
Nous ne serons probablement présents que pendant cinq à dix ans, mais
le processus de transformation perdurera au sein de la communauté.

Apprenez avant de faire. Il est généralement plus facile de faire quelque


chose à la place de quelqu’un d’autre. Néanmoins, cela ne lui apprend pas
à se responsabiliser ni à se débrouiller tout seul. Les parents réalisent bien
vite qu’en faisant pour leurs enfants ce que ces derniers peuvent faire pour
eux-mêmes, ils ne font qu’entretenir un comportement irresponsable et
paresseux chez eux. Dans le cadre du développement, il est tout aussi
important pour le pasteur ou pour les membres de l’église qui désire(nt)
voir un changement s’opérer au sein de leurs communautés d’apprendre
à aider les autres au lieu de tout faire pour eux. Bien entendu, cela ne
veut pas dire que l’église doit regarder en spectateur ce qui se passe
autour d’elle. Au contraire, le pasteur et le reste de l’assemblée doivent
œuvrer aux côtés du reste de la communauté dans le but de mener à bien
les projets qu’ils ont décidé d’entreprendre ensemble.

Réalisez que la transformation est le partage de tous. Lorsque notre


culture et notre vision du monde sont confrontées à celles d’un autre,
nous avons l’un et l’autre la possibilité de changer. La transformation est
d’autant plus importante lorsque nous nous laissons envahir par la Parole
vivante et vraie de Dieu. À noter cependant que le but n’est pas que l’un
ressemble à l’autre, mais que chacun devienne ce que Dieu désire qu’il
soit au sein même de sa culture.

Les églises peuvent en venir à penser que l’objectif visé est le même
pour tous ; mais cela est faux. Nous pouvons nous encourager les uns
les autres à être plus avenants et à chercher toujours plus à ressembler à
Christ en nous appuyant sur l’enseignement de l’Écriture au sein même
de notre propre culture.

— 167 —
Le processus de développement transformationnel

Dans son œuvre Cross-Cultural Connections [Les relations


interculturelles], Duane Elmer identifie trois attitudes déterminantes que
doit adopter celui ou celle qui désire susciter un changement.

Pour commencer, il est nécessaire de faire preuve de disponibilité et


d’une grande ouverture d’esprit, c’est-à-dire soyez de bonne compagnie et
accueillant, et mettez les gens à l’aise de par votre langage corporel, votre
façon de parler et le ton de votre voix. Quels sont les comportements qui,
au sein de votre culture, communiquent amabilité et facilité d’approche ?
Dans la plupart des cultures, un sourire est un signe de bienvenue et
d’acceptation. N’importe qui, quelle que soit sa culture, arrive à discerner
lorsqu’une personne désire ne pas être importunée ou, au contraire,
souhaite engager la conversation et nouer des liens d’amitié. L’impact
des pasteurs et des membres d’église qui demeurent ouverts à tous les
membres de la communauté, quels qu’ils soient, sera bien plus positif
que celui de ceux qui adoptent une attitude condamnatoire à l’égard de
leurs prochains. La motivation naît de l’encouragement et de l’amour
et non du jugement et de la condamnation. La personne ou l’église qui
demeure ouverte et abordable peut devenir un agent de changement
positif et « réussir dans son entreprise ».

L’amabilité est un concept étroitement lié à une autre attitude on ne


peut plus importante : l’acceptation. Romains 15.7 dit ceci : « Accueillez-
vous donc les uns les autres, comme Christ vous a accueillis, pour la gloire
de Dieu ». L’acceptation est « la capacité d’inspirer valeur, considération,
estime et respect aux autres. C’est la capacité d’aider les autres à se
sentir importants, appréciés et estimés » (Elmer, 94).

L’acceptation pousse une personne à l’action. Accepter, ce n’est pas


simplement ignorer ou tolérer les personnes différentes de nous. C’est
un verbe qui sous-entend une action et qui signifie choisir délibérément
de traiter une personne avec respect et égard. Pour réussir à induire une
transformation, nous devons apprendre à accepter (choisir délibérément
d’accorder de la valeur) les membres de nos communautés qui sont
pauvres, souillons, sans instruction, débauchés, faibles ou malades. Dès
l’instant où nous nous mettrons à les accepter comme Christ nous a
acceptés, ils seront captivés par l’amour de Christ manifeste dans nos vies
et écouterons attentivement ce que nous avons à dire. Malheureusement,

— 168 —
Le processus de développement transformationnel

les églises sont parfois des endroits où les malades, les pauvres et les
pécheurs se sentent de trop. Ce n’est vraiment pas le type d’endroit que
Jésus aimerait trouver dans notre communauté s’Il y venait à l’improviste.
Matthieu 9.12–13 rapporte les paroles de Jésus à ce propos : « Ce ne
sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les
malades… Car je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs ».
Le pasteur et les membres d’une église doivent demander au Seigneur de
les aider à être ouverts, approchables et accueillants afin que leur église
puisse être le lieu accueillant que Christ désire qu’elle soit et puisse avoir
un impact considérable sur la vie des gens.

Toutes ces qualités permettront à l’équipe de développement


transformationnel de nouer des liens de confiance avec les membres
de la communauté. Duane Elmer fait remarquer que « rien d’important
ne se produira entre les personnes à moins qu’elles n’aient au préalable
tissé des liens de confiance étroits » (98). En tant que peuple de Dieu, les
chrétiens ont une bonne nouvelle à annoncer, la meilleure nouvelle que
le monde ait jamais reçue. Cependant, les peuples ne l’accepteront que
dans la mesure où ils font confiance au messager. Chaque église locale a
la possibilité d’être l’organe le plus important de changement positif au
sein de la communauté tout entière ! Le gouvernement fera sa part et
développera l’infrastructure de la communauté, certes, mais il ne prendra
généralement pas le temps de nouer des relations de confiance avec ses
membres ; par conséquent, sa capacité à induire un changement durable
dans la vie des gens est restreinte. Réfléchissez un instant aux membres
de la communauté considérés comme des personnes de confiance.
Pensez à l’influence qu’elles ont. Pour ma part, je pense souvent aux
mères et aux grands-mères qui sont des membres de la communauté qui
inspirent la confiance. Ce sont également elles qui sont les plus ouvertes
et les plus tolérantes. Elles sont perçues comme des personnes voulant le
bien de la communauté. On croit souvent qu’elles ont la science infuse en
termes de santé et de guérison. Grâce aux relations de confiance qu’elles
ont pu développer au sein de la communauté, elles peuvent exercer une
influence considérable, en bien ou en mal, sur les croyances, les valeurs
et les comportements de plusieurs de ses membres.

À présent, songez à une église que vous connaissez bien. Comment


cette église s’y est-elle prise pour tisser des liens de confiance avec les

— 169 —
Le processus de développement transformationnel

membres de sa communauté ? En quoi cela a-t-il influé sur sa capacité à


influencer et à induire un changement positif au sein de la communauté ?
Que pourrait-elle améliorer pour être plus ouverte, approchable et
accueillante à l’égard de tous les membres de la société et pour leur
inspirer confiance ?

Compétences interculturelles
Les compétences en matière de communication interculturelle sont un
autre outil de l’arsenal des agents d’un changement positif. Les projets
de développement transformationnel permettent souvent aux chrétiens
d’accéder à des communautés qui, autrement, resteraient fermées à
l’Évangile. Quels types de compétences interculturelles un pasteur, un
missionnaire ou une équipe de développement doit-il/elle acquérir pour
réussir à susciter un changement positif dans la vie des gens ?

Lorsque nous nous installons dans un autre endroit et rencontrons


des personnes dont les mœurs et coutumes sont différentes des nôtres,
nous ne pouvons faire autrement que de tirer certaines conclusions
nous concernant et concernant les autres. C’est ce moment qui
déterminera la réussite ou l’échec d’un missionnaire ou d’un pasteur
dans le cadre d’un milieu interculturel ! Lorsque nous faisons face à un
nouveau comportement, nous interprétons instantanément l’action en
fonction de ce que nous savons du monde jusqu’à ce jour. Ce que nous
savons, nous le considérons comme « normal » ; ce qui est nouveau,
nous le taxons d’« anormal » ou d’étrange. Dans la plupart des cas,
tout comportement inhabituel est considéré de façon négative. En
tant qu’agents interculturels de changement, il est très important de
suspendre temporairement tout jugement et de poser des questions
avant de juger négativement une personne qui adopte un comportement
différent. Il est primordial de chercher à savoir pourquoi elle agit de la
sorte. Souvenez-vous que, selon la culture, un même comportement
peut avoir différentes significations. Dans une culture, cracher sur une
personne est un signe de mépris et de déshonneur. Dans une autre,
c’est un signe de bénédiction. Les agents interculturels de changement
doivent comprendre la signification de chaque action avant de la juger.
Certains comportements sont universellement reconnus comme étant
bons ou mauvais. Quant à d’autres, ils ne sont ni bons, ni mauvais au dire
de la Bible ; ils sont tout simplement différents. Souvent, les personnes

— 170 —
Le processus de développement transformationnel

les moins exposées à d’autres cultures tendent à considérer la plupart


des comportements inhabituels comme étant soit bons, soit mauvais, et
sont bien moins tolérantes à l’égard des comportements qui sont tout
bonnement différents.

BON DIFFÉRENT MAUVAIS


Figure 9.4 (Elmer, 23)

Lorsque nous sommes témoins de comportements différents, notre


première réaction est généralement de supposer qu’ils sont mauvais ; mais
en apprenant à mieux connaître ces personnes et à mieux comprendre
leur culture, nous découvrons souvent que leur comportement, que nous
avions qualifié de mauvais, n’était en fait que différent. Pour vous, le
comportement est mauvais parce que, dans votre culture, la signification
de ce comportement a une mauvaise connotation. Mais dans la culture
de la personne qui le pratique, ce même comportement a une autre
signification ; ainsi, après vous être rendu compte de sa signification
dans le nouveau contexte, vous pourrez, vous aussi, ne pas le considérer
comme étant mauvais, mais tout simplement différent. Nous devons
également réaliser que nous sommes la cible du jugement des membres
des communautés dans lesquelles nous nous trouvons. Eux aussi
pensent probablement que nous agissons mal lorsque nous adoptons
des comportements différents des leurs.

Nous pourrions citer comme exemple les différences qui existent en


termes de tenue vestimentaire. Aux yeux des populations musulmanes,
il est inacceptable que la tête d’une femme ne soit pas couverte en
public. Le Coran enseigne que les femmes doivent couvrir leur chevelure.
Pour les chrétiens du monde entier, il ne s’agit pas d’un précepte
biblique ou obligatoire, et la plupart des femmes chrétiennes vivent,
travaillent, prient et vont à l’église la tête découverte. Le missionnaire
ou les membres d’une équipe de développement transformationnel qui
exerce(nt) leur/son ministère au sein d’une communauté musulmane
doit/doivent tenir compte du fait que, selon la vision musulmane
du monde, une femme non voilée est une femme qui pèche. Si le
missionnaire ne considère le port du voile que comme une simple
différence culturelle, le musulman, quant à lui, juge l’absence du voile

— 171 —
Le processus de développement transformationnel

comme un « mauvais » comportement. Le pasteur ou le missionnaire


a donc un choix à faire. Si une missionnaire désire faciliter la
transformation au sein de la communauté et être un agent positif de
changement, que pourrait-elle faire pour s’adapter de manière à nouer
des relations de confiance ? Est-il acceptable pour des chrétiennes de
porter le voile (et des jupes longues) pour éviter que les autres femmes
de la communauté ne portent un jugement négatif à leur encontre ?

Le pasteur ou le missionnaire doit demander à Dieu de lui révéler


la signification du comportement de chacun aux yeux des membres de
la communauté et vice-versa. Lorsque ces comportements se rangent
dans la catégorie du « différent », c’est-à-dire dans la zone de flou, le
missionnaire doit s’adapter et changer de manière à mieux s’intégrer
dans la communauté. Cela montrera aux membres de cette dernière que
le missionnaire les accepte et désire instaurer un climat de confiance, et
ouvrira la porte à l’annonce du message de l’Évangile.

Conclusion
Pour devenir des agents positifs de changement au sein d’une
communauté, il est essentiel de faire preuve de réflexion et
d’intentionnalité. Parfois, nos intentions sont bonnes : nous voulons
simplement aider les autres ; mais les résultats de nos efforts ne sont pas
toujours aussi bons que ce que nous avions escompté. De ce fait, nous
finissons par nuire à quelqu’un, tout comme nous l’avons vu dans l’histoire
du singe et du poisson. Les pasteurs, les équipes de développement
transformationnel et les missionnaires doivent adopter des attitudes
déterminantes comme l’amabilité, la facilité d’approche et l’acceptation
des membres de la communauté, des attitudes qui leur permettront de
tisser des relations de confiance. Les agents d’un changement positif
doivent également acquérir des compétences interculturelles qui les
aideront à dégager la signification de chaque comportement afin de
savoir ce qui est bon, mauvais ou tout simplement différent au sein d’une
culture particulière. Enfin, les pasteurs impliqués dans le développement
transformationnel doivent également acquérir des compétences de
base et s’informer du processus de développement transformationnel
à mettre en œuvre au sein de la communauté. Sachant que le but du
développement transformationnel est de faciliter un changement positif

— 172 —
Le processus de développement transformationnel

dans la vie de la communauté, il est indispensable que les membres


de l’église participent aux activités de développement transformationnel
afin qu’un changement s’opère dans leur vie en premier et afin qu’ils
puissent apprendre à devenir des facilitateurs efficaces du changement
au sein de leurs communautés respectives.

— 173 —
Le processus de développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous avez terminé votre étude de « la mise en œuvre :
l’action et son impact », le moment est venu pour vous de répondre à des
questions du genre : « Comment est-il possible à une personne d’avoir de
bonnes intentions envers les autres et en même temps de leur nuire, pensant
bien faire ? » À présent, répondrez aux questions suivantes qui vous aideront
à appliquer ce que vous venez juste d’étudier.

1. Expliquez le concept des « bonnes intentions » en vous appuyant


sur l’histoire du singe et du poisson.

2. Quelles sont les caractéristiques importantes de l’agent du


développement transformationnel ?

3. Quelles sont les attitudes que doit adopter l’agent du développement


transformationnel ?

4. Que signifie le fait de « faciliter » la transformation au sein d’une


communauté ?

5. Quelles compétences interculturelles un missionnaire impliqué


dans le développement transformationnel doit-il acquérir ? À quoi
lui servent-elles ?

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 174 —
C H A P I T R E 1 0

L’évaluation :
qu’avons-nous accompli ?

Il est dur d’aller de l’avant


lorsque l’on ne sait même pas où l’on est.
—Auteur inconnu

É
valuer, c’est estimer ou mesurer la valeur d’une chose. Dans le
cadre d’un programme de développement transformationnel,
l’évaluation est un moyen d’analyser les activités, les ressources
humaines, les ressources matérielles, les informations, les faits et
les chiffres d’un programme de manière à évaluer ses progrès et son
efficacité. Les évaluations tiennent compte du rapport coût-efficacité,
mettent en évidence les changements qui s’imposent et contribuent à
l’amélioration des futurs plans d’action.

L’évaluation est un outil efficace d’apprentissage car il permet


d’identifier tant les réussites que les échecs. Les informations collectées lors
d’une évaluation pourront être utilisées pour améliorer les programmes
à venir. Dans une autre partie de ce cours, nous avons déjà abordé le
concept des « meilleures pratiques » et nous avons vu que ces principes
ont été développés à partir des évaluations d’autres programmes. Ces

— 175 —
Le processus de développement transformationnel

évaluations permettront aux directeurs de projet d’éviter de commettre


des erreurs et leur donneront davantage de chances de réussir. Les
évaluations impartiales d’autres personnes peuvent nous être utiles.

Pour les chrétiens, l’évaluation a trait au concept de l’intendance


étant donné que les disciples de Christ sont appelés à être de bons
intendants des ressources que Dieu leur a confiées. L’évaluation nous
aide à déterminer si les ressources ont été utilisées de la manière la plus
efficace possible.

L’évaluation est plus facile à mener si, dès le départ, vos buts et
vos objectifs sont bien formulés puisqu’ils constituent la cible de
votre évaluation.

L’évaluation nous permet de/d’ :

• déterminer l’envergure de l’impact désiré.


• déterminer si les buts et les objectifs ont été/sont atteints.
• déterminer si le programme se déroule comme prévu.
• affecter et de réaffecter les ressources de manière plus efficace pour
s’assurer que nous sommes de bons intendants des ressources de Dieu.
• identifier les points forts et les points faibles du programme.
• mesurer les progrès et d’améliorer l’efficacité du programme.
• effectuer une planification stratégique.
• concevoir et de mettre en œuvre de nouveaux programmes à
partir des leçons tirées.

Le processus d’évaluation
Les évaluations doivent mesurer à la fois quantité et qualité. Il est
souvent plus facile de comprendre et d’évaluer la quantité que la qualité
du fait que la quantité a trait aux chiffres et aux mesures. Par exemple,
combien de latrines a-t-on fait construire ? Combien d’enfants ont été
vaccinés ? Combien de séminaires de prévention et de lutte contre le sida
a-t-on organisé ?

À savoir cependant que les programmes sont bien plus qu’une série
de chiffres, et que d’autres facteurs doivent être pris en considération

— 176 —
Le processus de développement transformationnel

au moment de déterminer leur efficacité. Il est important d’évaluer


les changements de comportement et l’impact du programme sur la
communauté lorsque nous cherchons à voir si un changement positif
a eu lieu. Par exemple, bien qu’il soit encourageant de constater une
augmentation du nombre de latrines sur le campus de l’école biblique,
nous ne savons cependant pas si ces installations sanitaires ont eu
un impact sur la santé de la communauté. Nous devons également
tenir compte des questions concernant les attitudes et la qualité de
vie. L’attitude des gens à l’égard des latrines a-t-elle changé ? Les
latrines sont-elles utilisées ? Les étudiants de l’école biblique sont-ils en
meilleure santé ?

Il existe trois types d’évaluation : (1) l’évaluation des résultats obtenus,


(2) l’évaluation de l’impact et (3) l’évaluation du processus.

Évaluation des résultats obtenus


Comme son nom l’indique,
cette évaluation se rapporte aux
Les évaluations
résultats obtenus. Elle permet se doivent, elles
de répondre à la question : « La
communauté a-t-elle accompli aussi, d’être
ce qu’elle s’était mis en tête
d’accomplir ? » Ce type d’évaluation « holistiques »
est étroitement lié aux buts et aux
objectifs fixés durant la phase de — elles doivent
planification. Ont-ils été atteints ?
tenir compte du
Souvenez-vous que réussir,
ce n’est pas nécessairement
programme tout
accomplir 100 % du but fixé. Si entier et de toutes
le but de l’école biblique était de
construire neuf latrines d’ici la fin les personnes
de l’année, peut-on dire qu’elle
a échoué si seulement sept ont concernées.
été bâties ? Absolument pas ! Les
membres de la communauté ont
construit sept latrines, et ils peuvent en être fiers. Il leur faut juste revenir
à la phase de planification et fixer de nouveaux buts, de nouveaux

— 177 —
Le processus de développement transformationnel

objectifs et un nouveau plan d’action qui leur permettront de terminer la


construction des deux latrines restantes.

Évaluation de l’impact
Ce n’est pas parce que vous avez réalisé un objectif que vous avez
nécessairement atteint un but ni eu un impact sur la communauté. L’évaluation
de l’impact a trait au changement principal que la communauté désirait
effectuer. Quel impact le projet a-t-il eu sur la communauté ? Quelle
empreinte le projet a-t-il laissée sur la vie de la communauté ? Après tout,
il y a bien neuf nouvelles latrines qui témoignent d’un formidable travail
d’équipe et de gros efforts ; mais ces latrines ont-elles eu un impact
sur la communauté ? Les latrines ont été construites pour répondre à
un manque d’hygiène qui était à l’origine des problèmes de santé des
étudiants. Par conséquent, ce que la communauté recherche en premier,
c’est une diminution des problèmes de santé causés par un manque
de conditions d’hygiène. L’évaluation de l’impact peut également cibler
l’aspect social et spirituel. La vie sociale des membres de la communauté
s’est-elle améliorée ? Le projet a-t-il aidé les membres de la communauté
à améliorer un domaine spirituel de leur vie et à faire preuve d’une
plus grande maturité sur le plan spirituel ? Sur quels processus sociaux,
spirituels et relationnels le projet a-t-il influé ?

La collecte de ce type d’information prendra davantage de temps


et nécessitera davantage d’efforts. L’équipe de développement
devra souvent procéder à des entretiens individuels, distribuer des
questionnaires concernant les activités personnelles des membres de la
communauté ou encore revenir sur certaines phases du processus de
bilan communautaire.

Évaluer les résultats obtenus, c’est un peu comme lancer un appel


à la fin d’un culte pour voir combien de personnes ont accepté Christ
dans leur vie. L’évaluation de l’impact permet de déterminer si, six mois
plus tard, ces mêmes personnes continuent toujours de servir Dieu, sont
devenues des disciples et œuvrent en vue de l’avancement du Royaume.

Évaluation du processus
L’évaluation du processus a trait à l’efficacité des stratégies et du plan
d’action choisis. Elle répond aux questions : « Un plan d’action ou une

— 178 —
Le processus de développement transformationnel

méthode différent(e) aurait-il/elle entraîné des résultats différents, voire


meilleurs ? » et « A-t-on fait les choses comme il faut ? »

La période d’évaluation
La période et la fréquence des évaluations dépendent des objectifs
et des délais impartis. Si vos objectifs s’étalent sur une longue période
— par exemple, un an — il serait probablement bien de réaliser une
évaluation en cours de route, disons, à mi-chemin, afin de voir si vous
êtes dans les temps. Si vous comptez atteindre vos objectifs en l’espace
de quelques mois seulement, l’évaluation peut attendre la fin du projet.
Quoi qu’il en soit, une évaluation complète doit être effectuée à la fin
du projet.

Les personnes chargées de l’évaluation


Les évaluations sont soit participatives, soit non-participatives. On
parle d’évaluation participative lorsque les membres de la communauté
et l’équipe de développement transformationnel procèdent eux-mêmes à
l’évaluation du projet et du processus. Ce type d’évaluation offre plusieurs
avantages. Il encourage la participation de la communauté et permet à
ses membres de tirer des leçons de leurs succès et de leurs échecs. En
outre, elle favorise un dialogue franc et honnête entre les membres de la
communauté et ceux de l’équipe de développement. Tous les membres
de l’équipe et la communauté sont invités à participer à cette évaluation ;
par conséquent, davantage d’opinions seront formulées, renforçant ainsi
la crédibilité du processus d’évaluation. Durant le processus d’évaluation,
posez les questions suivantes :

• Avons-nous dressé un profil exact et exhaustif de la communauté ?


• A-t-on choisi des buts appropriés ?
• A-t-on fixé des objectifs SMART et ces derniers s’attachaient-ils à
résoudre de vrais problèmes ?
• Avons-nous pris les bonnes décisions quant aux actions à
entreprendre et les avons-nous menées à terme ?
• Quelle(s) leçon(s) peut-on en tirer ?
• Que pourrions-nous changer ?
• Que pourrions-nous dire aux autres ?

— 179 —
Le processus de développement transformationnel

L’évaluation participative présente un inconvénient cependant, à savoir


que l’équipe et les membres de la communauté, qui se sont donnés corps et
âme au projet, ont parfois du mal à faire preuve d’honnêteté et d’objectivité
lors de l’évaluation. Ils tendent à privilégier le côté positif et à fermer les
yeux sur les points faibles ou sur les défauts, et fournissent des excuses au
lieu d’apporter des suggestions utiles qui permettraient d’améliorer le projet.

L’évaluation est non-participative lorsqu’elle est menée par une personne


ou une équipe indépendante, généralement compétente en la matière.
L’avantage de ce type d’évaluation est qu’une personne indépendante n’a
aucun parti pris à l’égard du projet et est plus susceptible de donner une
opinion honnête et impartiale. Les membres de la communauté peuvent
également se sentir plus libres de partager leurs pensées négatives concernant
le projet avec un étranger qu’avec une autre personne de la communauté.

Conclusion
Le bilan communautaire se rapporte à la recherche. La planification
concerne l’analyse critique et la réflexion. La mise en œuvre, quant à elle,
a trait à l’action, et l’évaluation à l’analyse.

Nous ne devons pas supposer que :

• Les projets de développement seront tous les mêmes.


• Toutes les sociétés définissent les besoins fondamentaux de
l’homme et la qualité de vie de la même façon.
• Répondre au besoin le plus urgent et le plus évident garantit un certain
niveau de satisfaction de la part des membres de la communauté.
• L’acceptation d’un programme par les dirigeants d’une communauté
est le reflet de l’engagement du reste de la communauté et de son
opinion à l’égard du programme ou du projet.
• Ce qui a fonctionné la première année continuera de fonctionner
dans l’avenir.

Souvenez-vous que :

• La transformation est le but ultime du projet. Les plans de


développement les mieux formulés peuvent souvent échouer à

— 180 —
Le processus de développement transformationnel

cause de la cupidité, des jeux de pouvoir ou tout simplement de


l’indolence des êtres humains. La transformation véritable exige de
passer d’une vie purement physique et matérielle à une plénitude
physique et spirituelle. Pour pouvoir porter des fruits, l’approche
transformationnelle doit être centrée sur l’homme et non sur le
programme ou le projet ; elle doit également réaliser à quel point
il est important d’être libéré de toute forme d’asservissement
susceptible d’empêcher l’homme de mener une vie harmonieuse.
• Les êtres humains sont plus importants que les projets. Les
membres de la communauté ciblée doivent s’impliquer dès
le début, y compris lors du processus de planification. Au final,
ce sont eux qui auront la charge de mettre en œuvre le projet/
programme selon ce qui aura été planifié au préalable. Il est bien
plus facile d’aider les personnes qui sont dans le besoin que de les
aider à résoudre les problèmes à la base dudit besoin.
• L’apprentissage est bien plus significatif lorsqu’il s’inscrit dans
le contexte du vécu. Les membres de la communauté ciblée
doivent pouvoir identifier les aspects du projet qui s’adressent à
leurs besoins propres. Le dynamisme avec lequel les membres de la
communauté s’adonneront au projet est proportionnel à leur degré
de participation lors de la phase de planification du projet et aux
avantages qu’ils pourront en retirer.
• Les membres de la communauté sont conscients de leurs
problèmes et sont davantage au fait des solutions à apporter que
des étrangers. Une grande partie de ce qu’ils savent et font repose
sur plusieurs siècles de traditions et d’expériences culturelles.
Tenez compte de ces dernières.
• Le développement concerne les êtres humains et les cultures.
S’il est important pour nous de comprendre et d’œuvrer dans les
limites du contexte de la culture locale, le but de notre projet de
développement est d’opérer une transformation non seulement
physique et morale, mais aussi spirituelle, au sein de la culture.

— 181 —
Le processus de développement transformationnel

Révision et application
Vous venez juste de terminer l’étude du processus d’évaluation. À présent,
voyez comment vous pourriez appliquer ce que vous venez d’apprendre à
votre propre sphère d’activité. Que pourriez-vous répondre à la personne
qui dit que « l’évaluation n’a rien à voir avec le spirituel, alors autant s’en
remettre à Dieu ».

1. Quelle est la signification du terme « évaluation » ? Quel est l’autre


mot que les chrétiens pourraient utiliser pour décrire l’évaluation ?

2. Établissez une comparaison et un contraste entre les trois types


d’évaluation.

3. À quel moment doit-on procéder aux évaluations, et pourquoi ?

4. Identifiez les personnes chargées de l’évaluation.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 182 —
Quatrième partie
Les activités de développement transformationnel
C h a p i t r e 1 1 ����� L’église en action : développer une action
de lutte contre le VIH/SIDA ; que peut faire
l’église ? ; le processus de développement
et l’action de lutte contre le VIH ; le bilan
communautaire ; la planification ; la mise
en œuvre ; l’évaluation
C h a p i t r e 1 2 ����� Kit pédagogique de base sur le VIH/SIDA ;
les origines du VIH/SIDA ; qu’est-ce que
le VIH/SIDA ? ; comment contracte-t-on le
VIH/SIDA ? ; les modes de prévention de
la transmission du VIH ; les dégâts du VIH
dans le corps ; les symptômes du VIH et le
dépistage ; la fenêtre sérologique
C H A P I T R E 1 1

L’église en action :
mener une action de lutte
contre le VIH/SIDA

L’attitude de Christ

L
e VIH/SIDA est un problème qui affecte chaque ville, chaque
communauté et chaque église en Afrique subsaharienne. Il s’agit là
d’un exemple éloquent d’une maladie holistique. La séropositivité,
ou le fait d’être atteint du SIDA, n’est pas uniquement un problème
physique. Pensez aux autres problèmes qu’elle entraîne et à ceux qui
en pâtissent. Notez les difficultés que doivent surmonter les personnes
atteintes du VIH/SIDA. Vous avez, par exemple, les problèmes physiques,
la gêne, la honte, la culpabilité, l’exclusion par les membres de la
famille et les amis, la crainte de partager leur situation avec les autres et
l’incapacité de travailler qui, à son tour, pourrait conduire à l’incapacité
à subvenir à leurs besoins essentiels et à payer leurs frais médicaux.
Votre énumération concerne-t-elle uniquement l’aspect physique de
l’homme ? Probablement pas ; elle a également trait aux émotions, à la
capacité de survie et aux relations de l’être humain avec Dieu, sa famille
et sa communauté.

— 185 —
Les activités de développement transformationnel

Si vous êtes pasteur ou dirigeant laïque dans votre église, considérez


les questions suivantes :

• Votre église offre-t-elle un programme d’éducation sur le VIH ?


• Est-ce que les églises de votre région essaient d’atteindre les
personnes atteintes du VIH/SIDA ?
• Généralement parlant, les personnes malades du SIDA font-elles
l’objet de critiques et sont-elles montrées du doigt ?
• Les chrétiens de la région croient-ils que Dieu a envoyé le VIH pour
punir les pécheurs et que, par conséquent, les personnes infectées
n’ont que ce qu’elles méritent ?
• Que ressentez-vous personnellement à l’égard du VIH/SIDA et des
personnes qui en souffrent ?

Avant d’entamer notre ministère, nous devons sonder notre cœur


et déterminer en toute honnêteté quels sont nos sentiments à l’égard
des personnes ciblées. Que notre ministère s’adresse à des peuples
ethniques, aux enfants des rues, aux veuves ou aux personnes atteintes
du VIH/SIDA, nos attitudes doivent refléter celles de Christ et non celles
des membres de notre famille et de notre communauté.

Puisque la Bible nous enseigne que Dieu punit le péché, bon nombre de
chrétiens sont convaincus que le VIH est un châtiment divin pour le péché ;
il convient cependant de noter que la Bible ne dit pas qu’à certains péchés
correspondent des châtiments bien définis. Quoi qu’il en soit, chaque
comportement, qu’il soit pécheur ou non, entraîne des conséquences
naturelles. Si je ne regarde pas des deux côtés avant de traverser la rue, il est
possible que je me fasse percuter par une voiture. C’est là une conséquence
naturelle de ma négligence. Les relations sexuelles, qu’elles soient immorales
ou non, peuvent avoir des conséquences : tomber enceinte, créer une intimité
émotionnelle ou contracter une infection sexuellement transmissible,
comme le VIH. Il est vrai que, dans la majorité des cas, la transmission du
VIH a lieu par le contact sexuel, ce qui signifie qu’à un moment ou à un autre
il se peut qu’une relation immorale ait eu lieu. Il arrive cependant que des
personnes innocentes contractent cette terrible maladie :

• Un mari ou une femme fidèle peut devenir séropositif/séropositive


à cause de l’infidélité de son/sa conjoint(e).

— 186 —
Les activités de développement transformationnel

• Une personne peut être infectée par une transfusion sanguine ou


par du matériel médical insuffisamment stérilisé.
• Les nourrissons peuvent être infectés par leur mère et naître
séropositifs.

À noter que, dans certains cas, le VIH touche les innocents et épargne
ceux qui vivent dans l’immoralité. Dieu punit le péché, certes, mais nous
ne devons pas perdre de vue que le péché, quel qu’il soit (immoralité
sexuelle, arrogance, amour de l’argent, propension au mensonge), nous
sépare de Lui et nous rend coupable à Ses yeux.

Le problème du VIH d’aujourd’hui est similaire au problème de la


lèpre qui sévissait à l’époque de Christ. La plupart des gens ne savaient
rien de la lèpre, ni comment elle se transmettait. Ils fuyaient les lépreux,
et on pensait généralement que la condition de ces derniers était une
conséquence directe de leur péché. Les lépreux étaient marginalisés et
contraints à vivre isolés, à l’écart des communautés ; mais Jésus, Lui,
avait compassion des lépreux. Il ne les craignait point. Il a répondu à
leurs besoins ; Il voulait les sauver,
les guérir et rétablir leurs relations
avec leurs familles et leurs
Le problème du
communautés. Il a agi de façon
transformationnelle et holistique
VIH d’aujourd’hui
dans Ses rapports avec eux. est similaire
Forts de ce constat, nous devons au problème
sérieusement nous demander « si
Jésus était présent en chair et en de la lèpre
os aujourd’hui, comment agirait-Il
à l’égard des personnes atteintes qui sévissait à
du VIH/SIDA ? Notre action est-elle
conforme à la Sienne ? »
l’époque de
Prenez le temps de considérer
Christ.
attentivement votre attitude et
votre réaction à l’égard des personnes atteintes du VIH/SIDA. Demandez
à Dieu de déverser en vous Son amour et Sa compassion pour ceux
qui souffrent.

— 187 —
Les activités de développement transformationnel

Que peut faire l’église ?


Les églises et les personnes impliquées se sentent souvent dépassées rien
qu’à l’idée d’entamer un ministère auprès des personnes atteintes du VIH/
SIDA. Les pasteurs affirment souvent ne pas avoir suffisamment de fonds
pour s’engager dans un tel ministère. Mais prenez le temps de réfléchir à
ce dont ont besoin les personnes affectées par le VIH ou celles malades
du SIDA. Notez ces besoins sur un morceau de papier. Peut-être avez-vous
mentionné des choses comme la compassion, le salut, les soins médicaux,
l’acceptation, la prière, la nourriture et l’amitié. Consultez une fois de plus
votre liste et entourez les besoins qui n’ont que peu ou rien à voir avec
le côté financier. Par exemple, dans la liste ci-dessus, sur les huit besoins
mentionnés, seuls deux d’entre eux nécessitent un apport conséquent
de ressources financières : les

L’église doit soins médicaux et la nourriture. En


consignant ces besoins par écrit,
s’autoévaluer, elle vous pourrez constater que la plupart
d’entre eux n’ont aucun rapport
et ses ressources, avec les finances. Les membres de
l’église ne doivent pas s’attendre à
et faire ce qu’elle pouvoir répondre à chaque besoin.
L’église doit s’autoévaluer, elle et
peut, même si ses ressources, et faire ce qu’elle
peut, même si tout ce qu’elle peut
tout ce qu’elle faire c’est prier pour les personnes

peut faire c’est


atteintes de la maladie et les
encourager à persévérer. L’église
prier pour les peut permettre à un groupe de
soutien de se réunir dans l’une de
personnes ses salles où les personnes atteintes
du VIH/SIDA peuvent se rassembler
atteintes de la et se soutenir mutuellement.

maladie et les Certaines églises disent ne pas


être en contact avec les séropositifs.
encourager à Peut-être cela est-il dû au fait
qu’aucun de leurs membres n’est
persévérer. séropositif ou bien que les membres
séropositifs choisissent de ne pas

— 188 —
Les activités de développement transformationnel

se faire connaître. Quoi qu’il en soit, l’église peut s’employer à éduquer


ses membres et la communauté environnante quant aux réalités du VIH.

L’éducation sur le VIH peut se présenter de plusieurs façons. Une église


peut y consacrer une dizaine de minutes un dimanche par mois et, à
chaque fois, traiter un aspect différent du VIH. Cela permet d’aborder
rapidement le sujet sans pour autant monopoliser tout un culte. Certaines
églises, quant à elles, choisissent de consacrer une ou deux prédication(s)
par an au thème du VIH. Elles présentent des pièces de théâtre, traitent
des méthodes de transmission et de prévention, et encouragent leurs
membres à connaître leur statut sérologique en passant un test de
dépistage du VIH. L’éducation sur le VIH peut également avoir lieu lors des
rassemblements des divers groupes. Par exemple, intervenez auprès du
groupe des femmes, de celui des hommes, des jeunes, de la chorale, etc.

Quels que soient la méthode et le degré d’engagement de votre église,


le ministère consacré au VIH/SIDA est une occasion formidable de parler
aux autres de l’amour de Christ et de les amener au salut.

Parfois, les églises qui désirent mettre en place un programme


d’éducation ou une action de ministère sur le VIH ne savent pas par où
commencer étant donné qu’aucun des membres de l’église ne pense en
savoir suffisamment sur le VIH ou ne sait comment l’aborder d’un point
de vue pédagogique. Dans quasiment toutes les grandes villes se trouvent
aujourd’hui un certain nombre d’organismes non gouvernementaux
qui offrent des services de formation sur le VIH, souvent gratuitement.
Informez-vous quant aux activités entreprises dans votre ville ou votre
région et renseignez-vous au sujet des personnes impliquées dans l’action
de lutte contre le VIH/SIDA et des programmes qu’elles offrent. Vous
pourrez parfois obtenir ce type de renseignements auprès de l’hôpital
ou de la clinique du coin. Plusieurs organismes missionnaires peuvent
également avoir quelqu’un sur place travaillant déjà dans ce domaine.
Demandez-leur de vous mettre en contact avec la personne en charge
d’un programme chrétien.

Il y avait en Afrique de l’Ouest une église qui voulait mettre en place


un programme d’éducation sur le VIH. Ce n’était qu’une petite église très
pauvre. Elle était située dans l’un des quartiers les plus peuplés et les plus

— 189 —
Les activités de développement transformationnel

pauvres de la ville. En fait, l’église était littéralement construite juste à


côté d’un grand dépôt d’ordures. Les membres de l’église n’avaient que
très peu de ressources à leur disposition, mais le pasteur avait réellement
à cœur de s’investir dans ce ministère. Pour autant qu’il sache, il n’y
avait aucun séropositif parmi ses membres, mais il était convaincu
qu’il était de sa responsabilité d’instruire les membres de son église. Il
envoya certains d’entre eux assister à un séminaire de sensibilisation
au VIH dont il avait entendu parler par un groupe de missionnaires qui
travaillaient dans sa ville. Ils ne tardèrent pas à aborder le thème du VIH
lors des cours de l’école du dimanche. L’éducation sur le VIH se poursuivit
au fil des mois, et les membres de l’église prirent conscience que le
pasteur et les dirigeants de l’église étaient sensibles à la situation des
personnes atteintes du SIDA. Une par une, les personnes séropositives de
l’assemblée allèrent voir le pasteur pour lui faire part de leur situation. Le
pasteur demanda aux membres du comité d’éducation sur le VIH de tirer
parti d’autres programmes de formation offerts dans la région et dont il
avait pris connaissance ; peu de temps après, ces derniers commencèrent
à faire des visites à domicile afin d’offrir un soutien moral, spirituel et
social aux personnes atteintes du VIH. Ils n’avaient pas les moyens de
couvrir les frais médicaux des personnes malades, mais ils pouvaient
certes les aimer et les encourager, et prier pour elles.

Il y avait dans l’église un jeune couple dont le bébé était très


malade ; après analyses, ils apprirent que l’enfant était atteint du sida.
Les parents firent un test de dépistage et apprirent qu’ils étaient tous
les deux séropositifs. Le bébé mourut dans l’année et la mère tomba
gravement malade quelque temps plus tard. Les membres du comité
VIH rendirent souvent visite au couple pour prier avec eux et les assurer
de leur soutien. La femme/mère mourut peu de temps après. Dans cette
région de l’Afrique, la coutume veut que la famille du/de la défunt(e)
ramène le corps au village natal afin de l’y enterrer. Les membres de la
famille de cette jeune femme savaient qu’elle était décédée du SIDA, ce
qui était pour eux un sujet de grande honte. Craignant les avanies des
membres de l’église et des voisins, ils avaient peur d’aller récupérer son
corps. Ils décidèrent donc d’aller le chercher en plein milieu de la nuit.
Ils espéraient s’esquiver avant le lever du soleil afin d’éviter tout contact
avec les autres. Mais les membres du comité VIH, qui étaient avec le mari
depuis la mort de son épouse, voulaient attendre l’arrivée de la famille.

— 190 —
Les activités de développement transformationnel

L’église avait collecté une petite offrande et, lorsque les membres de la
famille arrivèrent au beau milieu de la nuit, un repas les attendait ; on
leur remit également une petite somme d’argent pour les aider à régler
les frais d’obsèques. Avant que la famille ne reparte, les membres de
l’église l’entourèrent et prièrent pour elle ; ils lui annoncèrent la bonne
nouvelle de l’amour de Dieu pour chacun d’eux, y compris leur sœur
défunte, et ce, malgré le fait qu’elle soit morte du SIDA. Les membres
de la famille furent stupéfaits d’un tel accueil. Au lieu d’être calomniés,
ils se sentirent aimés, ils furent rassasiés, on pria pour eux et on les aida
financièrement. Ils venaient d’un village où l’on ne croyait pas en Jésus,
mais, de retour chez eux avec le corps de leur sœur, ils parlèrent, à tous
ceux qui voulaient bien l’entendre, de cette petite église située à côté
d’une décharge publique et de l’amour de Jésus qu’elle avait manifesté
à leur égard.

Le processus de développement et l’action de lutte contre le VIH


Pour qu’une église puisse mettre en place un programme efficace
d’éducation sur le VIH, il lui faudra suivre les phases du processus de
développement, phases que nous allons considérer étape par étape en
vue de la planification d’un programme éducatif.

Le bilan communautaire
La première phase consiste à dresser un bilan communautaire.
Souvenez-vous que cette phase comprend cinq étapes : réaliser un
bilan communautaire, identifier les principales parties prenantes,
établir des relations, évaluer les besoins et identifier les actifs et les
ressources disponibles.

Songez à la communauté au sein de laquelle vous comptez mettre en


place un programme d’éducation sur le VIH ; disons qu’il s’agit de votre
église. Bien que vous soyez peut-être le pasteur de l’église et connaissiez
assez bien vos membres, il est possible que vous vous aperceviez qu’ils
ont des lacunes en termes de connaissances sur le VIH. Réévaluez les
membres de votre église et considérez la répartition des âges et le ratio
homme/femme. Quelle est leur attitude à l’égard du VIH/SIDA ? Si, à ce
stade du bilan, il ne convient probablement pas de s’enquérir de leur
statut sérologique, vous pouvez cependant vous entretenir avec eux au
sujet de leurs expériences avec le VIH/SIDA. Connaissent-ils une personne

— 191 —
Les activités de développement transformationnel

qui est séropositive ? Ont-ils déjà eu à prendre soin d’une personne


atteinte du SIDA ? Sont-ils au fait des divers moyens de transmission du
VIH ? Vous en aurez toujours qui n’ont jamais eu aucun contact direct
avec une personne séropositive ; mais, dans l’ensemble, quasiment
tout le monde a entendu parler du VIH/SIDA et s’est forgé ses propres
idées ou ses propres opinions concernant sa manifestation ainsi que
ses modes de transmission et de prévention. Peut-être constaterez-vous
que les suppositions ou les perceptions de certains membres de l’église
concernant le VIH sont erronées. Tenez compte de ces éléments car ils font
partie du processus de profilage communautaire lorsque vous recueillez
des informations sur votre église et sur sa base de connaissances sur
le VIH/SIDA.

Qui sont les principales parties prenantes dans votre église ? Bien
entendu, vous avez les dirigeants laïques, les diacres et les anciens ;
mais qui d’autre peut avoir un impact sur les décisions prises au sein
de l’église et sur les attitudes de ses membres à l’égard des personnes
atteintes du VIH/SIDA ? Les leaders des femmes, y compris les leaders
naturels qui semblent émerger du sein des groupes de jeunes, doivent,
eux aussi, être considérés comme des parties prenantes. Il se peut qu’un
membre d’une église travaille pour un organisme non gouvernemental
et ait bénéficié d’une formation particulière sur le VIH/SIDA. Peut-être
un des fidèles de l’église a-t-il dû prendre soin d’un membre de sa
famille qui, depuis, est décédé du SIDA. Ces personnes sont des parties
prenantes importantes dans ce domaine particulier étant donné ce
qu’elles ont vécu.

En tant que pasteur, peut-être pensez-vous déjà bien connaître ces


personnes ; sachez cependant que votre relation atteindra une autre
dimension lorsque vous les rassemblerez pour discuter avec elles de la
possibilité de mettre en œuvre un ministère sur le VIH au sein de l’église.

Sollicitez l’aide des parties prenantes, voire du reste de la communauté


de l’église, et efforcez-vous d’identifier les besoins de l’église en termes
d’éducation sur le VIH. D’après les membres de l’église, quels sont les
besoins ? Quels sont les groupes qui, au sein de l’église, doivent être tout
particulièrement ciblés par les cours d’éducation sur le VIH ? Quels sont
les aspects du VIH qui suscitent le plus d’intérêt ?

— 192 —
Les activités de développement transformationnel

Enfin, demandez aux membres de l’assemblée de vous aider à


considérer les ressources de votre église susceptibles d’être utilisées lors
du projet d’éducation sur le VIH, c’est-à-dire les ressources humaines
et financières, les infrastructures et le temps qui pourrait lui être alloué.
Disposez-vous d’un projecteur de film et d’un écran ? Trouve-t-on dans
la région une organisation humanitaire qui offre ce type de formation ?
Est-il possible de se procurer des informations sur le VIH en version
papier ? Y a-t-il dans votre église un groupe de personnes douées pour
l’art dramatique et capables de mettre sur pied des pièces de théâtre
et de les interpréter ? Peut-être y a-t-il dans l’église un professionnel de
santé ou un membre ayant déjà suivi une formation sur le VIH ; dans ce
cas-là, ces personnes doivent être considérées comme des ressources.
Lors de l’évaluation des ressources, il est important de réfléchir à celles
qui pourront être utilisées dans le cadre du ministère choisi ; de ce fait,
quelles sont les ressources qui pourraient vous être utiles dans le projet
d’éducation sur le VIH/SIDA ?

La planification
La prochaine étape du processus de développement consiste en la
planification. Souvenez-vous que la planification comporte elle-même
plusieurs étapes qui se déclinent ainsi : former une équipe, prioriser et
définir les objectifs et les buts, fixer des objectifs et des buts précis, et
établir un plan d’action.

Former une équipe de ministère VIH. Celle-ci doit être constituée


de personnes bénévoles qui désirent ardemment s’investir dans ce
ministère. Elle doit compter au moins trois personnes. Si possible,
efforcez-vous de trouver des personnes issues de milieux différents et
aux compétences variées. Il est important que l’équipe de ministère VIH
comprenne tant d’hommes que de femmes, ainsi qu’un représentant
du groupe de jeunes. Les membres de l’équipe n’ont pas besoin d’être
cultivés, mais ils doivent être prêts à servir.

Une fois les membres de l’équipe en place, retrouvez-vous avec eux et


établissez un ordre de priorité des buts et des objectifs choisis pour le projet
d’éducation sur le VIH. L’un des besoins les plus urgents sera probablement
de chercher des programmes de formation adaptés et réputés pour
les membres de l’équipe. Comme il a été souligné précédemment, la

— 193 —
Les activités de développement transformationnel

plupart des régions d’Afrique bénéficient des programmes de formation


de bon nombre d’organisations humanitaires. La quasi-totalité des pays
africains ont un programme national de lutte contre le VIH/SIDA, et ces
programmes offrent souvent des sessions de formation. Contactez les
professionnels de santé ou les groupes missionnaires de la région pour
voir s’ils peuvent vous aider à former votre propre équipe. Prudence
toutefois : l’infection au VIH est entourée d’anecdotes et d’idées fausses
qui, malheureusement, sont parfois colportées par les professionnels de
santé locaux. Ce n’est pas parce qu’une personne a un titre important
qu’elle est systématiquement experte sur la question du VIH et du SIDA.
Vérifiez bien que les personnes chargées de la formation ont elles-mêmes
suivi une formation reconnue.

Votre but pourrait être formulé de la façon suivante : « Tous


les membres de l’équipe VIH devront connaître tous les faits et
informations de base concernant le VIH/SIDA ». Un des objectifs de ce
but pourrait être le suivant : « Tous les membres de l’équipe devront
assister à un séminaire de formation sur le VIH/SIDA au cours des six
prochains mois ».

Ensuite, vous avez besoin d’un plan d’action. Demandez à un membre


de l’équipe de faire des recherches sur les diverses possibilités de
formation dans la région. Si les membres de l’équipe ne peuvent pas tous
s’y rendre, faites en sorte qu’un ou deux puissent y assister et chargez-
le(s) de la formation du reste du groupe à son/leur retour.

Votre prochain but pourrait être de lancer un programme d’éducation


sur le VIH dans l’église. Vous pourriez le formuler ainsi : « Nous
organiserons des sessions régulières d’éducation sur le VIH dans notre
église ». Les objectifs de ce but peuvent varier. Désirez-vous proposer de
courtes séances de formation répétées à raison d’une dizaine de minutes
par mois ? Ou préféreriez-vous offrir des séminaires de formation d’une
plus grande durée, et ce, une ou deux fois par an ? Peut-être que, pour
votre église, vous ne pensez pas qu’il soit approprié de traiter la question
du VIH au sein d’un grand groupe de populations mixtes : hommes,
femmes et enfants d’âges divers. Votre but pourrait donc être de cibler
les divers groupes de votre église une fois par an. L’éducation sur le VIH
dispensée en milieu ecclésial ne sera pas systématiquement la même

— 194 —
Les activités de développement transformationnel

partout. Chaque église et chaque assemblée est différente. Trouvez le


modèle qui convient le mieux, à vous et à votre église.

Le but « Nous organiserons des sessions régulières d’éducation sur le VIH


dans notre église » pourrait viser les objectifs suivants :

• Chaque année, l’équipe sera chargée de prêcher sur le VIH le


dernier dimanche du mois de juin et le dernier dimanche du mois
de novembre pendant l’heure du culte.
Pour ce type d’objectif, les étapes du plan d’action pourraient être ainsi
définies : charger certains membres de l’équipe de la responsabilité
d’enseigner en juin et les autres en novembre. Quels sont les aspects
du VIH qui seront soulignés ? Ont-ils besoin d’un tableau noir ou d’un
rétroprojecteur ? Qui devra se procurer ce matériel ?
• Tous les premiers dimanches de chaque mois, une dizaine de minutes
seront consacrées à l’éducation sur le VIH avant la prédication.
Pour ce type d’objectif, les étapes du plan d’action pourraient être
ainsi définies : dresser une liste de thèmes à traiter concernant le
VIH et répartir ces thèmes sur plusieurs mois, à raison d’un thème
par mois. Qui sera chargé de l’enseignement ? De quel matériel les
enseignants auront-ils besoin ?
• Une fois par an, chaque groupe identifié au sein de l’église
consacrera une de ses rencontres à l’éducation sur le VIH/SIDA.
Pour ce type d’objectif, les étapes du plan d’action pourraient être
ainsi définies : faire la liste des divers groupes présents au sein
de l’église. Affecter à chaque groupe un membre de l’équipe qui
sera chargé de l’enseignement. Fixer la date à laquelle la séance
d’éducation sur le VIH aura lieu pour chaque groupe. Quelles sont les
informations que le groupe doit connaître en priorité ? Par exemple,
vous pourriez également dispenser un enseignement sommaire sur
le VIH aux enfants. Faites attention à ne pas trop entrer dans les
détails en ce qui concerne la transmission par voie sexuelle ; mais
on peut certainement leur apprendre qu’il ne faut pas toucher le
sang d’une autre personne.

La mise en œuvre
Ensuite vient la mise en œuvre, c’est-à-dire la réalisation du projet.
Si vos buts sont bien formulés, si vous avez pris le temps de fixer des

— 195 —
Les activités de développement transformationnel

objectifs SMART et de dresser un plan d’action détaillé, alors votre


programme d’éducation sur le VIH est tout tracé devant vous.

L’évaluation
L’évaluation est la dernière phase du processus de développement.
Décidez de ce que vous comptez évaluer et à quel moment. Choisissez
également la personne qui se chargera de l’évaluation. Évaluez le
programme auquel vous avez participé. Comment vos méthodes ont-
elles été perçues par l’église ? Cela vous a-t-il coûté plus cher que
prévu ? L’horaire était-il adapté au format pédagogique utilisé ? Pourriez-
vous intégrer d’autres méthodes pédagogiques qui permettraient
de communiquer votre message de façon plus efficace, comme des
témoignages personnels, des pièces de théâtre ou la projection d’un
film ? Avez-vous accompli ce que vous aviez projeté de faire ? Si vous
aviez pour objectif d’organiser deux séminaires d’éducation sur le VIH
par an dans votre église, à la fin de l’année, posez-vous les questions
suivantes : « A-t-on réussi ? Si non, pourquoi ? Avons-nous vu trop grand ?
Était-il trop ambitieux de vouloir organiser deux séminaires, notamment
au vu de l’inexpérience de notre équipe fraîchement constituée ? Les
membres de l’équipe ne se sentent-ils toujours pas à la hauteur de la
tâche ? Si c’est le cas, nécessitent-ils une formation supplémentaire ? »

Lors de l’évaluation de votre programme d’éducation sur le VIH,


n’oubliez pas d’évaluer les changements des membres de votre église
en termes d’attitudes et de connaissances au sujet du VIH. Cela est
extrêmement important. Si vous enseignez mais que personne ne
comprend ce que vous dites et qu’aucun changement de comportement
ne survient, alors vous n’avez pas atteint votre but. Il est facile d’enseigner
les bases du VIH. Cependant, il est bien plus difficile de déceler un
changement dans les attitudes des gens à l’égard de la maladie et dans
leur façon d’appréhender le virus, ainsi que ses modes de transmission
et de prévention. Ce sont des aspects bien plus difficiles à évaluer. Pour
savoir ce que les membres de la communauté ont appris sur le VIH, il
sera souvent nécessaire d’avoir recours à des entretiens individuels ou
d’organiser des dialogues de groupe. Comparez leurs réponses et leurs
attitudes à celles observées lors de la phase du bilan communautaire.
Certaines équipes choisissent de faire passer un examen oral ou écrit
aux personnes sur le point d’intégrer le programme d’éducation sur le

— 196 —
Les activités de développement transformationnel

VIH. Les réponses sont sauvegardées et conservées. Ensuite, à la fin de


l’année, ces mêmes personnes sont appelées à repasser l’examen pour
voir si leurs réponses ont changé.

— 197 —
Les activités de développement transformationnel

Révision et application
Vous venez de terminer votre étude centrée sur la mise en place d’une
action de lutte contre le VIH/SIDA au sein de l’église. Une fois de plus,
appliquez ce que vous avez appris à votre propre situation.

1. Comparez les actions d’aide mises en œuvre par des organismes


laïques d’aide humanitaire à celles menées dans le cadre de
programmes de développement transformationnel, tels ceux
décrits dans ce cours.

2. Dites à quel point il est important de calquer son attitude sur celle
de Christ lorsque l’on s’implique dans l’œuvre humanitaire auprès
des victimes du VIH/SIDA.

3. Expliquez pourquoi il est important pour les églises de s’impliquer


dans le travail humanitaire comme, par exemple, prendre soin des
victimes du VIH/SIDA et de leurs familles.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 198 —
C H A P I T R E 1 2

Kit pédagogique de base


sur le VIH/SIDA

L
es histoires et les rumeurs concernant le VIH/SIDA abondent. Des
informations erronées sont transmises à travers ces histoires quant
à l’origine du VIH, ses modes de transmission, ses méthodes de
prévention et les « remèdes » offerts aux personnes séropositives. On
trouve facilement des témoignages personnels sur les traitements et les
remèdes du VIH/SIDA. On raconte souvent l’histoire d’un « ami » ou d’un
« voisin » atteint du VIH ou du SIDA. Pourtant, il est souvent très difficile
de trouver la personne dont parle l’histoire. Pour pouvoir instruire l’église
et les personnes atteintes du VIH/SIDA, nous devons faire preuve de
sagesse et de bon sens. Ce n’est pas parce qu’une personne prétend avoir
été guérie que cela est véritablement le cas. Cela ne signifie pas non plus
que le remède utilisé a provoqué le changement en question. À l’heure
actuelle, bon nombre de docteurs, de savants et de chercheurs mènent
des travaux de recherches intensives destinés à prouver ou à réfuter ces
conclusions. Il est tout à fait possible de disposer d’informations concrètes
sur ce qui fonctionne le mieux pour aider les personnes séropositives. En
tant que chrétiens, nous devons nous assurer que ce que nous enseignons
est correct. Nous ne voulons nullement contribuer à la divulgation de
fausses informations et à l’entretien de vaines superstitions.

— 199 —
Les activités de développement transformationnel

En tant que Au chapitre 4, nous avons


discuté de la vision du monde. Une
chrétiens, nous vision biblique du monde est non
seulement basée sur la révélation
devons nous divine, mais aussi reconnaît
l’importance des faits scientifiques.
assurer que Dieu est le Dieu de toutes choses,
et c’est également Lui qui a créé
ce que nous notre corps. Il est omniscient,
c’est-à-dire qu’Il sait tout. Il sait
enseignons est comment fonctionne notre corps

correct. Nous ne et Il sait aussi comment la maladie


nous affecte. Il sait tout sur tout
voulons nullement et Il nous donne l’intelligence de
découvrir les principes qu’Il a choisi
contribuer à de nous révéler. Dieu a permis au
monde scientifique de comprendre
la divulgation bien des choses sur le VIH, choses
qui peuvent être prouvées et ont
de fausses été prouvées maintes et maintes
fois dans le monde entier. Nous
informations devons nous assurer que lorsque

et à l’entretien
nous parlons du VIH/SIDA aux
autres, nous communiquons des
de vaines informations vérifiées et exactes.

superstitions. Luc 17 retrace l’épisode de la


guérison des dix lépreux. Jésus
savait qu’ils étaient guéris, mais Il
leur a quand même dit d’aller se montrer aux sacrificateurs (v. 14). À
cette époque-là, il incombait au sacrificateur d’inspecter une personne
pour voir si elle était vraiment guérie en examinant lui-même les lésions
lépreuses. À l’heure actuelle, cela équivaudrait à aller chez un docteur
pour qu’il confirme qu’une personne n’est plus malade. Si une personne
prétend avoir été guérie dans son corps par Dieu ou par toute autre sorte
d’intervention miraculeuse, cela a besoin d’être confirmé par le corps
médical. Dieu est suffisamment puissant non seulement pour guérir
mais aussi pour apporter la preuve de cette guérison d’une manière si

— 200 —
Les activités de développement transformationnel

convaincante que même la communauté scientifique ne peut dénier le


fait que quelque chose d’inhabituel, voire miraculeux, s’est produit.

La bonne nouvelle est qu’il est possible d’obtenir des informations


concrètes, solides et exactes sur le VIH/SIDA. Le VIH est apparu sur la
scène mondiale en 1981 et a fait plusieurs millions de victimes au fil
des ans. Depuis la découverte de ce virus mortel, les communautés
médicales et scientifiques se sont immédiatement mises à étudier ses
caractéristiques. Aujourd’hui, nous disposons d’informations sur le VIH
publiées par plusieurs organismes de santé de bonne réputation. Bon
nombre de ces organismes sont connus de par le monde et comprennent
des chercheurs hautement qualifiés issus du monde entier. Ils utilisent
des techniques exemplaires de recherche et d’étude pour pouvoir obtenir
des résultats fondés sur des preuves scientifiques. Le monde scientifique
utilise des normes et des méthodes reconnues dans le monde entier
comme étant les moyens les plus exacts de trouver et de prouver que les
informations obtenues sont correctes.

Il est important de savoir que ces informations existent et de comparer


toute nouvelle donnée à l’aune des publications de ces organismes réputés
et mondialement connus. Lorsque l’on parle du VIH/SIDA, il arrive souvent
que différents groupes ou individus se vantent d’avoir trouvé une cure, un
traitement ou un mode de prévention miracle. Il y avait, dans une ville
d’Afrique occidentale, une pharmacie dont l’enseigne affichait : « dernier
remède chinois contre le VIH ». Combien de personnes en proie au
désespoir ont dû dépenser le peu d’argent qu’elles avaient dans l’espoir
que cette « cure » fonctionnerait ? Ce n’est pas parce qu’une personne
est affublée d’un titre qui laisse supposer un certain niveau d’éducation
que les informations qu’elle apporte sont exactes. Plusieurs « docteurs »
racontent des histoires à dormir debout concernant les origines du VIH, le
traitement antipaludique et comment soigner une morsure de serpent, par
exemple. Si les histoires colportées par des professionnels de santé locaux
ne coïncident pas avec les normes internationales d’informations et de
pratiques, nous devons alors veiller à les confronter aux faits déjà prouvés.

Le but de ce chapitre est de vous fournir des informations de


base concernant le VIH/SIDA afin que vous puissiez commencer à
communiquer des informations exactes au sein de l’église. Vous pouvez

— 201 —
Les activités de développement transformationnel

le consulter lorsque vous dispensez un cours d’éducation sur le VIH dans


vos églises et vos communautés respectives. Si vous entrez en contact
avec des informations contraires à ces faits, faites une enquête. À la fin
de ce chapitre figure une liste de ressources d’informations sur le VIH
régulièrement mises à jour et reconnues comme étant exactes et issues
de sources réputées. Il est important de toujours vérifier la validité des
données avancées.

Les origines du VIH


Les gens veulent généralement savoir d’où vient le VIH. Ses origines
ont donné lieu à bien des théories et à bien des histoires. Voici ce que
nous savons être vrai à l’heure actuelle.

Au début des années 80, des docteurs américains ont constaté


l’apparition de certaines maladies inhabituelles et rares chez les
homosexuels. Le nombre de personnes affectées par ces maladies
(rarement vues auparavant) et le fait qu’elles étaient uniquement limitées
aux homosexuels ont poussé les docteurs à penser que quelque chose
de nouveau et de contagieux était en train d’émerger. Après de longues
analyses, les docteurs américains et français découvrirent, à peu près au
même moment, un virus jusqu’à présent inconnu dans le sang de tous
ceux qui manifestaient ces symptômes. Ce virus a fini par être appelé le
VIH, virus de l’immunodéficience humaine.

Depuis sa découverte, il y a 25 ans de cela, plusieurs études ont


été réalisées pour essayer de retracer les origines du VIH. Il est
généralement reconnu que le VIH actuel est en fait un dérivé d’un
autre virus appelé le VIS (virus de l’immunodéficience simienne) du
fait de leurs similarités et de leurs liens génétiques. Le VIS infectait
principalement certains singes d’Afrique occidentale et d’Afrique
centrale. En étudiant d’anciens échantillons de sang et en les comparant
au VIS prélevé de ces singes, nous savons aujourd’hui que le VIH date
de bien avant le début des années 80. Il n’avait tout simplement pas
été identifié par les chercheurs et les savants jusqu’à cette période-
là. Des prélèvements venant du Zaïre, aujourd’hui la République
démocratique du Congo, effectués vers la fin des années 50 et le début
des années 60, ont subi d’autres analyses à l’issue desquelles le VIH a

— 202 —
Les activités de développement transformationnel

été décelé. Que s’est-il donc passé ? La théorie généralement acceptée


est que, à un moment donné, le sang d’un singe infecté par le VIS est
entré en contact avec le système sanguin d’un groupe de chasseurs.
Le virus a changé, ou muté, de manière à s’adapter à l’hôte humain et
s’est transformé en VIH.

Beaucoup se demandent : si le VIH date de si longtemps, pourquoi


n’a-t-il été découvert qu’en 1981 ? Lorsqu’une personne meurt du sida
(le syndrome des maladies causé par le VIH), elle présente souvent
des symptômes de maladies déjà connues. C’est pour cette raison
qu’aucun soupçon n’a été éveillé. Mais, avec la recrudescence des
voyages internationaux durant les années 70 et 80, le VIH a commencé
à faire de plus en plus de victimes dans le monde entier, y compris
dans certains des pays développés qui avaient des techniques de
diagnostic avancées. C’est donc à ce moment-là que ces décès ont
éveillé l’attention des docteurs, que des tests ont été faits et que le VIH
a été identifié.

Qu’est-ce que le VIH/SIDA ?


Le terme VIH signifie :

V ������ Virus—un microbe qui détruit des cellules dans le corps humain.
I �������Immunodéficience—la capacité du corps à lutter contre
d’autres maladies est affectée.
H ������Humaine—le virus infecte le corps humain.

Le sigle SIDA signifie :

S ������Syndrome—un groupe de symptômes qui décrit une maladie


particulière.
I �������Immuno—qui a trait au système immunitaire, c’est-à-dire la
façon dont le corps lutte contre les maladies.
D ������Déficience—le système immunitaire perd de son efficacité.
A ������Acquise—la maladie est transmise d’un être humain à un autre.

Le VIH est le nom du virus lui-même ; le SIDA est le nom de la maladie


causée par le virus. Le VIH est le virus à l’origine du SIDA.

— 203 —
Les activités de développement transformationnel

Comment contracte-t-on le VIH?

Le VIH est présent principalement dans trois liquides organiques : le


sang, le lait maternel et les sécrétions sexuelles. Bien qu’il soit également
présent dans d’autres liquides corporels, il y est en petite quantité et n’est
pas contagieux à très faible concentration. Le VIH peut être transmis
d’une personne à une autre de trois façons ; les voici :

1. La transmission par voie sanguine


2. La transmission par voie sexuelle
3. La transmission mère-enfant

À présent, nous allons nous intéresser à chacune d’elles.

La transmission par voie sanguine


La transmission par voie sanguine du VIH a lieu lorsque du sang infecté
entre dans le système d’une autre personne. Cela peut se produire lors de
procédures chirurgicales, de transfusions et de prélèvements sanguins,
par exemple. Ce qu’il est important de savoir, c’est que le sang infecté
doit pénétrer le système d’une autre personne pour pouvoir causer une
infection. Le seul fait de toucher du sang infecté ne vous infectera pas.
Dieu nous a donné des barrières de protection efficaces contre la maladie.
La peau en est une. Chaque jour, notre peau empêche un grand nombre
de bactéries, de virus et autres agents nocifs d’intégrer notre corps. Le
VIH ne peut pénétrer la peau à moins d’avoir de l’aide, c’est-à-dire qu’il
doit trouver un point d’entrée. Si une personne avec une plaie ou une
entaille sur la main entre en contact avec du sang séropositif, celle-ci
est exposée à un risque d’infection parce que sa plaie ouverte constitue
un point de pénétration. Une aiguille qui a touché du sang infecté et est
utilisée immédiatement après avec une autre personne peut constituer
un point d’entrée puisque l’aiguille traverse la peau et entre dans le
système sanguin de cette dernière.

Il est important de noter que le VIH ne survivra que peu de temps à


l’extérieur du corps humain ; il doit être à l’intérieur d’un sang « vivant ». Le
VIH ne peut subsister à l’intérieur d’un sang desséché. À savoir cependant
que l’espérance de vie du VIH est également soumise à plusieurs variables,
telles la densité du sang, la température et autres conditions. Tout cela

— 204 —
Les activités de développement transformationnel

pour dire que, dans la mesure du possible, il faut à tout prix éviter d’entrer
en contact direct avec le sang d’une autre personne.

La transmission par voie sexuelle


On trouve une très forte concentration de VIH dans les sécrétions
sexuelles des hommes et des femmes. En Afrique subsaharienne, les
transmissions hétérosexuelles représentent environ 85 % de toutes les
infections au VIH. Une femme séropositive peut infecter un homme et
un homme séropositif peut infecter une femme.

Comme pour la transmission par voie sanguine, il doit y avoir un point


d’entrée pour que les sécrétions sexuelles infectées puissent transmettre
la maladie. Précédemment, nous avons vu que la peau constitue une
barrière efficace pour empêcher l’infection au VIH. Il en va de même
pour les muqueuses que l’on trouve dans la bouche, le nez, les yeux,
l’estomac et les organes génitaux. Pour que le VIH soit transmis, il doit y
avoir déchirures au niveau des muqueuses. Il est cependant assez courant
que, pendant les relations sexuelles, des déchirures microscopiques aient
lieu. Celles-ci sont rarement visibles et passent inaperçues. Il est donc
difficile de prédire la transmission par voie sexuelle ; c’est pour cela qu’il
est très risqué d’avoir des relations sexuelles non protégées avec une
personne séropositive.

La transmission mère-enfant
Une mère séropositive peut transmettre le virus à son enfant au cours
de trois périodes bien déterminées :

Pendant la grossesse. L’enfant à naître peut contracter le VIH pendant


la grossesse étant donné que le fœtus et la mère partagent le même
système de circulation sanguine. Le placenta sert de filtre qui, en général,
empêche le virus d’atteindre le bébé. Toutefois, la condition et l’efficacité
du placenta, et donc le risque d’infection de l’enfant à naître, sont soumis
à divers facteurs, dont la santé de la mère, son état nutritionnel et sa
charge virale. Sans intervention, environ 5 à 10 % des grossesses se
solderont par la naissance d’un enfant séropositif.

Pendant l’accouchement. L’enfant est également à risque durant


l’accouchement étant donné qu’il y a beaucoup d’échanges de fluides

— 205 —
Les activités de développement transformationnel

organiques entre la mère et l’enfant. En effet, la peau du nouveau-né peut


subir des blessures microscopiques durant l’accouchement, donnant
ainsi au VIH un point d’entrée.

Pendant l’allaitement. Comme nous l’avons indiqué précédemment,


le VIH se trouve en forte concentration dans le lait maternel. Les
mères séropositives courent le risque d’infecter leurs nouveau-nés lors
de l’allaitement.

Les modes de prévention de la transmission du VIH


Après avoir étudié les trois méthodes de transmission du VIH, autant
continuer sur notre lancée et regarder aux modes de prévention de la
transmission du virus via ces méthodes.

La prévention de la transmission du VIH par voie sanguine


Comme nous l’avons dit précédemment, le VIH vit dans le sang,
et si ce sang entre en contact avec le système d’une autre personne,
cette dernière est exposée au risque d’infection au VIH. Pour empêcher
la transmission par voie sanguine, il faut avant tout éviter d’entrer en
contact avec du sang infecté. Toute procédure, qu’elle soit médicale ou
traditionnelle, qui nécessite d’inciser ou de percer, ou bien d’injecter
quelque chose dans une partie du corps à l’aide d’un objet tranchant doit
être pratiquée avec des instruments correctement stérilisés. Lorsqu’une
personne doit subir une procédure chirurgicale ou recevoir une injection,
il est vivement conseillé de se rendre à la pharmacie à l’avance et d’y
acheter ses propres aiguilles. Assurez-vous bien que les centres médicaux
suivent des procédures de stérilisation adéquates si les instruments
doivent être réutilisés.

Les transfusions sanguines présentent également un risque d’infection


au VIH. À l’heure actuelle, la plupart des banques de sang reconnues
par le gouvernement ont recours à des techniques de dépistage pour
s’assurer que les réserves de sang ne sont pas contaminées. En cas de
besoin d’une transfusion sanguine, assurez-vous que le sang utilisé vient
de l’une de ces banques.

— 206 —
Les activités de développement transformationnel

En général, le meilleur moyen de prévenir la transmission du VIH par


voie sanguine est d’éviter tout contact avec le sang. Portez des gants, ou
enveloppez vos mains d’un sac plastique s’il le faut, afin de les protéger
au cas où vous soyez appelé à aider une personne victime d’un accident
ou à porter secours à une personne blessée. Demandez à votre docteur,
ou à votre clinique, de vous montrer leurs techniques de stérilisation de
leurs instruments. Il est préférable de penser à ces choses à l’avance. Au
moment de l’urgence, c’est parfois trop tard !

La prévention de la transmission du VIH par voie sexuelle


Le VIH est présent dans les sécrétions sexuelles des hommes
et des femmes séropositifs/séropositives. La meilleure méthode
de transmission par voie sexuelle consiste à obéir au plan de Dieu
concernant la sexualité, à savoir l’abstinence avant le mariage et la
fidélité mutuelle après le mariage.

Au sein de l’Église, les discussions sur l’utilisation des préservatifs


prêtent souvent à controverse. Pour les besoins de ce cours, nous
choisissons de ne pas nous prononcer sur la question ; au contraire, nous
nous attacherons à citer les faits. Les préservatifs se sont avérés très
efficaces pour réduire le risque de transmission du VIH lorsqu’ils sont
utilisés systématiquement et correctement. Cela signifie qu’un nouveau
préservatif doit être utilisé pour chaque nouvel acte sexuel. Si l’abstinence
et la fidélité sont à 100 % efficaces pour la prévention de la transmission
du VIH par voie sexuelle, les préservatifs, quant à eux, sont efficaces à
95 %, si tant est qu’ils soient utilisés correctement et systématiquement.

La prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant


Pour empêcher qu’une mère séropositive infecte son enfant, nous
allons revenir sur les trois périodes les plus propices à la transmission du
VIH de la mère à l’enfant.

Pendant la grossesse. Toutes les femmes doivent connaître leur statut


sérologique avant de tomber enceinte. Cela leur permet de décider si oui
ou non elles sont prêtes à mettre au monde un enfant qui pourrait être
séropositif.

— 207 —
Les activités de développement transformationnel

Comme nous l’avons vu précédemment, le VIH vit dans le sang et, durant
la grossesse, le fœtus et la mère partagent le même système de circulation
sanguine. Toutefois, le placenta sert de filtre et est censé empêcher la
transmission du VIH. L’efficacité du placenta dépend de la santé de la mère
et de sa charge virale (quantité de VIH dans le sang de la mère). À ce stade,
pour éviter que l’enfant à naître soit infecté, il faut s’assurer que la mère
demeure en bonne santé pendant sa grossesse. Il est important pour une
femme enceinte de manger sainement et d’éviter de contracter le paludisme,
mais ça l’est encore plus dans le cadre des femmes enceintes séropositives.

Il est important pour une femme de connaître son statut sérologique.


Trouver un spécialiste du VIH et de la grossesse lui permettra de bénéficier
des soins et des conseils nécessaires à la diminution du risque de
transmission du VIH. Elle peut faire des analyses de sang et, si une certaine
quantité de virus, ou une certaine déficience du système immunitaire, est
décelée, alors le docteur peut lui prescrire des médicaments qui l’aideront
à relancer son système immunitaire et à inhiber le virus. Cela réduira
considérablement les chances de transmission du VIH de la mère à l’enfant.

Pendant l’accouchement. Pour réduire le risque de transmission du


VIH pendant l’accouchement, la mère doit accoucher dans un centre
d’accouchement certifié et capable de répondre aux besoins d’une mère
séropositive. Des médicaments doivent être administrés à la mère dès la
première phase de l’accouchement et également au bébé immédiatement
après sa naissance afin de l’aider à lutter contre l’infection au VIH. Le
processus de naissance peut être contrôlé de manière à minimiser le
plus possible l’échange de fluides organiques et les plaies pour la mère
et l’enfant, et par conséquent réduire le risque de transmission du VIH.

Pendant l’allaitement. Bien que le VIH soit actif au sein du lait maternel,
il n’en demeure pas moins qu’une mère peut allaiter son nourrisson sans
l’infecter. Comme nous l’avons dit précédemment, Dieu nous a donné
plusieurs barrières qui nous aident à nous protéger contre la maladie.
Une de ces barrières est la paroi interne de la bouche et de l’estomac. Il
est impossible pour le VIH de pénétrer cette membrane ; il doit y avoir un
point d’entrée. Alors, bien qu’il y ait un risque d’infection, il est possible
pour une mère séropositive d’allaiter son enfant sans l’infecter.

— 208 —
Les activités de développement transformationnel

Il est évident qu’il serait préférable de ne pas allaiter du tout, mais, dans
bon nombre de pays en voie de développement, cela n’est pas possible
en raison du manque de qualité du lait en poudre, du prix de ce lait et du
danger qu’il y a à mélanger le lait en poudre avec de l’eau insalubre. Voici
donc les recommandations les plus récentes de l’Organisation mondiale
de la santé pour les mères séropositives :

• Soyez au fait de votre statut sérologique et consultez


régulièrement votre docteur. Si la quantité de virus atteint un
certain niveau dans votre système, vous pouvez prendre des
médicaments qui vous aideront à contrôler le virus et donc à
réduire le risque de transmission.
• Allaitez votre bébé exclusivement pendant 6 mois, c’est-à-dire
que le nourrisson n’est nourri qu’au lait maternel ; aucune autre
nourriture liquide ou solide. Les nouveau-nés ont un système
digestif immature. Lorsqu’ils reçoivent une alimentation mixte (lait
maternel et autre nourriture liquide ou solide), la paroi muqueuse
de leur estomac peut s’irriter. Cette irritation peut constituer un
point d’entrée du VIH dans le corps du bébé ; c’est pour cela qu’il
est vivement conseillé de nourrir l’enfant au lait maternel pendant
les premiers 6 mois de son existence.
• Dès l’âge de 6 mois, une alimentation mixte peut être introduite.
À cet âge-là, le système digestif de l’enfant a eu le temps de se
développer et peut davantage supporter une alimentation mixte.
Continuez de mélanger d’autres liquides et solides au lait maternel
jusqu’à ce que l’enfant soit suffisamment âgé pour boire du lait de
vache (aux alentours de 12 à 15 mois).

Ces directives ne garantissent pas que l’enfant ne sera pas infecté,


mais elles réduisent considérablement le risque de transmission du VIH
de la mère à l’enfant.

Les dégâts du VIH dans le corps


Le VIH attaque le système immunitaire du corps et le rend inefficace.
Pour arriver à mieux comprendre ce concept, j’ai besoin de vous en dire
davantage sur le système immunitaire.

— 209 —
Les activités de développement transformationnel

Lorsqu’Il nous a créés, Dieu a intégré dans notre corps un système


remarquable qui nous permet de rester en bonne santé : le système
immunitaire. Ce système se compose de cellules qui se trouvent dans
notre sang et que l’on appelle lymphocytes. Chacune de ces cellules a
une fonction bien précise, à savoir qu’elles réagissent lorsqu’une
maladie nous menace. Les lymphocytes sont organisés selon une
hiérarchie ; à leur tête se trouvent donc les cellules CD4. Il existe
plusieurs « groupes » de lymphocytes dans le sang et chaque groupe a
un « chef ». La tâche de la cellule CD4 est de tirer la sonnette d’alarme
lorsque des bactéries, des virus ou tout autre élément potentiellement
dangereux entre dans le corps. Lorsque le « chef » sonne l’alarme, ses
troupes de lymphocytes se ruent sur le microbe envahisseur et
commencent à fabriquer des armes pour pouvoir lutter contre lui.
Chaque maladie est associée à une arme qui lui est propre. Ces armes
portent le nom d’« anticorps ». Pour pouvoir produire des anticorps face
à une maladie particulière, cette dernière doit en premier lieu pénétrer
dans le corps humain. Par exemple, quiconque a vécu en Afrique
possède probablement les anticorps nécessaires pour lutter contre le
paludisme, et ce, parce que les personnes qui vivent en Afrique sont
constamment en contact avec les moustiques porteurs de la maladie.
En raison d’un tel contact, nos corps ont fabriqué des armes qui nous
aident à lutter contre le paludisme. Par contre, si un résident d’Europe
du Nord venait à voyager dans d’autres parties du globe, son sang ne
contiendrait aucun anticorps de la sorte, et ce, parce que cette personne
n’est jamais entré en contact avec le paludisme ; par conséquent, le
système immunitaire de cette personne n’a jamais pu produire des
armes susceptibles de lutter contre cette maladie.

Lorsque le VIH entre dans le corps, le système immunitaire commence


immédiatement à fabriquer ces armes, ou anticorps, pour lutter contre
lui. Mais le VIH est très intelligent. Il cible les cellules « chefs » du
système immunitaire, les cellules CD4. Il s’introduit à l’intérieur de ces
cellules et en prend le contrôle. Dès que les cellules CD4 tombent sous
le contrôle du VIH, lorsque des microbes nocifs entrent dans le corps,
ce groupe particulier de cellules ne réagit plus car leur « chef » n’est
plus aux commandes. Le virus finit par se reproduire et par introduire
un autre virus dans une autre cellule CD4. Le même processus se
reproduit et, petit à petit, chaque groupe de cellules guerrières est

— 210 —
Les activités de développement transformationnel

rendu inefficace par la destruction


de leur cellule « chef », la CD4. Au Lorsqu’Il nous
fur et à mesure que les groupes
de cellules guerrières du système a créés, Dieu
immunitaire sont
inefficaces, le corps devient
rendues
a intégré dans
de moins en moins capable de
lutter contre les maladies. Les
notre corps
microbes qui, d’ordinaire, seraient un système
incapables de rendre quelqu’un
malade peuvent désormais remarquable qui
s’introduire dans le corps sans
résistance aucune. nous permet de
Comprendre l’action du rester en bonne
santé : le système
VIH sur le corps nous permet
de comprendre pourquoi
certaines personnes peuvent être
séropositives des années durant
immunitaire.
sans avoir de symptômes. Le virus,
qui s’est immiscé subrepticement dans leur corps, les ronge de l’intérieur
en s’attaquant aux nombreux groupes de cellules guerrières ; pendant
ce temps, ces personnes sont contagieuses à leur insu. Cela peut durer
plusieurs années, et ce, jusqu’à ce que le virus se multiplie et envahisse
suffisamment de cellules CD4 et que la capacité du corps à lutter contre les
maladies soit fortement amoindrie.

Les symptômes du VIH et le dépistage


L’infection du VIH peut présenter plusieurs signes et symptômes, dont
les suivants :

• Diarrhée chronique incurable


• Poussée de fièvre chronique
• Perte de poids
• Tuberculose
• Furoncles
• Aphtes

— 211 —
Les activités de développement transformationnel

À noter toutefois que ces symptômes ne veulent pas dire


systématiquement qu’une personne est séropositive. Plusieurs autres
maladies peuvent produire ces mêmes symptômes. Le seul moyen de
savoir ce qu’il en est véritablement est de faire un test de dépistage du
VIH. Beaucoup de gens appréhendent un tel test. Ils préfèrent vivre dans
l’ignorance plutôt que de faire face à leur séropositivité. Sachez cependant
qu’il est préférable de se faire tester, et ce, pour les raisons suivantes :

• Effacez les doutes. Peut-être que vous n’êtes pas séropositif, alors
pourquoi vivre avec la crainte de l’être. Soyez-en certain !
• Il existe plusieurs types de traitements destinés à prolonger
considérablement la vie des personnes séropositives. Certaines
personnes sont séropositives depuis plus de 10 ans et ne
manifestent toujours aucun signe de maladies liées au sida tout
simplement parce qu’elles ont appris à prendre soin d’elles et
suivent des traitements capables de ralentir l’avancée du virus ;
pour pouvoir suivre de tels traitement, il est essentiel de connaître
son statut sérologique.
• Une femme doit connaître son statut sérologique avant de tomber
enceinte. Si elle est séropositive, elle doit se renseigner avant de
décider de tomber enceinte ou non. Chez les femmes séropositives,
la grossesse peut accélérer la propagation du virus et donc affecter
leur santé. Comme nous l’avons dit précédemment, elle risque
également d’infecter son enfant. Toutefois, une femme peut faire
plusieurs choses pour rester en bonne santé et réduire les risques
de transmission du VIH à son bébé. Là encore, il lui faut connaître
son statut sérologique.
• Vous pouvez protéger votre partenaire. Savoir que vous êtes
séropositif/séropositive vous donnera l’opportunité d’en savoir
plus sur le VIH/SIDA et sur les méthodes de protection de votre
santé et de la santé de votre partenaire.

La fenêtre sérologique
Plus tôt, lorsque nous avons abordé le thème du système immunitaire,
nous avons dit que lorsque le VIH pénètre dans le corps, le système
immunitaire commence immédiatement à fabriquer des armes
pour lutter contre le virus. Ces armes, nous leur avons donné le nom

— 212 —
Les activités de développement transformationnel

d’anticorps. Bien qu’il existe un test de dépistage du virus lui-même,


il est rarement utilisé car il coûte cher et nécessite un équipement de
laboratoire haut de gamme. La plupart des tests de dépistage du VIH
s’attachent à détecter les anticorps anti-VIH. Souvenez-vous que si le
virus ne s’est pas introduit dans le corps, alors il ne peut pas y avoir
d’anticorps contre ce virus. Cependant, il faut attendre que le corps
produise suffisamment d’anticorps pour pouvoir être détectés par le test
de dépistage ; cela prend un certain temps après l’infection initiale. C’est
ce que nous appelons la « fenêtre sérologique ».

La fenêtre sérologique correspond à une période de six à douze semaines


au cours de laquelle les tests d’une personne séropositive donnent des
résultats négatifs car son corps n’a pas produit suffisamment d’anticorps
pour être détectés par le test de dépistage. Le risque de transmission du virus
est considérable durant cette période. Le sang d’une personne nouvellement
infectée contient une forte concentration du virus, ce qui augmente le risque
d’infection via les trois méthodes de transmission discutées précédemment.
Pourtant, son test de dépistage est négatif car son taux d’anticorps n’est pas
suffisamment élevé pour pouvoir être détecté. Cela peut être très dangereux !

Prenons l’exemple de « Jean ». « Jean » est allé en voyage d’affaires


et a eu des relations sexuelles non protégées avec une prostituée. Trois
semaines plus tard, il allume la télé et tombe sur un reportage sur le VIH,
ses modes de transmission, les facteurs de risques et l’importance du
dépistage. Jean se souvient de sa rencontre avec la prostituée et réalise
qu’il est peut-être infecté ; alors, le lendemain, il se rend au centre de
dépistage du coin et se fait tester. Il est soulagé lorsqu’il apprend que les
résultats de son test sont négatifs.

Les résultats du test de Jean pourraient être « faussement négatifs » car


il se situe toujours dans la fenêtre sérologique. Cela fait seulement trois
semaines qu’il a eu des relations sexuelles qui l’ont exposé au risque
d’infection au VIH et son corps n’a pas encore eu le temps de produire
un nombre suffisant d’anticorps pour pouvoir être détectés par le test de
dépistage. Par conséquent, les résultats sont négatifs bien que, en réalité,
Jean puisse être séropositif sans le savoir. S’il a eu d’autres relations
sexuelles entre-temps, il est possible qu’il ait lui-même exposé une autre
personne au virus.

— 213 —
Les activités de développement transformationnel

Il est souvent recommandé à une personne dont les résultats de


test sont négatifs d’éviter tout comportement à risque susceptible
d’augmenter les risques de transmission du VIH et de refaire un autre
test trois mois plus tard. Si le deuxième test est négatif, alors la personne
est généralement considérée comme étant séronégative.

Conclusion
Le VIH/SIDA est quelque chose de terrifiant. Bon nombre sont morts
du sida et plusieurs millions sont séropositifs. Toutefois, il y a plusieurs
choses à faire pour se protéger du VIH ou, si nous sommes déjà infectés,
protéger notre santé. L’église est bien

Il y a plusieurs
placée pour avoir un impact sur la crise
causée par le VIH. Souvent, les églises et
choses à leurs membres ne savent pas comment
réagir face aux personnes séropositives
faire pour sachant que la transmission du virus
par voie sexuelle constitue une grande
se protéger partie des cas d’infection par le VIH. Il
est facile de présumer que toutes les
du VIH ou, si personnes séropositives ont « péché ».
Pourtant, nous devons nous souvenir de
nous sommes deux choses :

déjà infectés, Premièrement, bon nombre de

protéger notre personnes séropositives n’ont commis


aucun péché sexuel. Parfois, il peut
santé. s’agir d’un enfant qui a été infecté par
sa mère ou d’un(e) époux(se) fidèle
infecté par son/sa partenaire infidèle. Ou
encore, la personne malade peut avoir été infectée lors d’une transfusion
sanguine. Nous ne devons nullement présumer que toutes les personnes
séropositives ont péché et qu’elles méritent ce qu’elles reçoivent.

Deuxièmement, même si une personne a commis un péché sexuel


qui lui a valu d’être infectée par le VIH, quelle serait l’attitude de Jésus à
l’égard d’une telle personne ? Le Nouveau Testament regorge d’histoires
qui montrent que Jésus a tendu la main aux pécheurs : aux collecteurs

— 214 —
Les activités de développement transformationnel

d’impôts, aux adultères et aux fornicateurs, par exemple. Il voulait les


ramener à Lui et leur offrir pardon et salut. Nous avons tous péché dans
notre vie. La Bible ne nous dit pas qu’un péché est meilleur qu’un autre
et elle ne nous enseigne pas non plus que le péché sexuel est pire que
le mensonge, le vol, l’appât du gain ou l’orgueil. Pécher, c’est pécher, un
point c’est tout. Qu’il mène à de graves conséquences ou non, le péché
est une abomination aux yeux de Dieu. « Car tous ont péché et sont privés
de la gloire de Dieu » (Romains 3.23). Jésus nous commande d’aimer, de
pardonner et d’aider ceux qui sont dans le besoin. Le VIH/SIDA offre à
l’Église le cadre idéal à l’accomplissement de cette tâche !

Au nombre des ressources d’informations exactes et mises à jour sur


le VIH figurent :

• Le programme national de lutte contre le VIH de votre pays.


Pratiquement chaque pays africain est engagé dans un programme
gouvernemental de lutte contre le VIH qui insiste sur l’éducation et
peut-être aussi sur certaines options de traitement. La plupart de
ces programmes, sinon tous, ont été mis en place par le Programme
commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA. Leur création a exigé
une formation poussée et un grand investissement de temps, et ils
peuvent être une bonne ressource d’informations et de services.
• ONUSIDA – le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/
SIDA. Il est possible de se procurer des informations auprès du
bureau de l’ONUSIDA présent dans plusieurs grandes villes. Si
ce n’est pas le cas, visitez le site Web de l’ONUSIDA en tapant
www.unaids.org. Informations disponibles en plusieurs langues.
• Cry Africa – Un représentant de Cry Africa est affecté à chaque
région d’Afrique. Contactez un missionnaire des Assemblées de
Dieu locales ou le bureau de votre église nationale pour savoir qui
est le représentant et obtenir ses coordonnées. Ces représentants
peuvent être de bonnes ressources d’informations et de formation.
Cry Africa a également un site Internet qui fournit des informations
mises à jour et fiables sur le VIH ainsi que des liens vers d’autres
sources et des lectures recommandées. Consultez ce site en tapant
www.cryafricanetwork.org.
• L’Organisation mondiale de la santé : http://www.who.int/hiv/
Informations disponibles en plusieurs langues.

— 215 —
Les activités de développement transformationnel

• Centres pour le contrôle et la prévention des maladies : http://


www.cdc.gov/hiv/topics/basic/. En anglais uniquement.
• Tearfund : www.tearfund.org. Disponible en plusieurs langues.

— 216 —
Les activités de développement transformationnel

Révision et application
Maintenant que vous venez de terminer votre étude du « Kit pédagogique
de base sur le VIH/SIDA », répondez aux questions suivantes qui vous
aideront à appliquer certains principes étudiés dans ce cours.

1. Quelles histoires et quels mythes sur le VIH/SIDA sont les plus


prévalents dans votre communauté ? Expliquez en quoi ces histoires
diffèrent des informations sur le VIH enseignées dans ce chapitre.

2. Quelles sont les trois méthodes de transmission du VIH les


plus courantes ?

3. Expliquez la façon dont le VIH affecte le système immunitaire


du corps.

4. Passez en revue les informations présentées dans ce chapitre


et dressez un plan préliminaire que vous pourriez utiliser pour
dispenser un enseignement sur le VIH aux jeunes de votre école
du dimanche.

Soyez prêt à débattre ces questions et toutes les observations ou autres


questions soulevées par votre professeur durant le cours.

— 217 —
Glossaire
communauté groupe en expansion et en évolution dont les
membres vivent à proximité les uns des autres et
se connaissent les uns les autres. Leurs vies ont
beaucoup de points communs, ce qui renforce leur
sentiment d’appartenance à la communauté
holisme biblique façon de reconnaître la seigneurie de Christ sur
chaque aspect de la vie
holistique/holisme tiré du grec holos, qui signifie « entier » ou
« complet » ; c’est venir en aide à la personne tout
entière en la touchant sur le plan spirituel, physique,
émotionnel et mental
missio Dei la mission de Dieu ; tout ce que Dieu fait pour
communiquer Son plan de salut et tout ce que
l’Église est appelée à faire
mission tout ce que le peuple de Dieu, l’Église, est appelé à
être et à faire dans le monde
missions action d’être envoyé dans des lieux où Christ n’a
pas encore été annoncé afin d’amener de nouvelles
âmes à la foi et de regrouper ces nouveaux croyants
en de nouvelles assemblées
shalom terme hébreu qui signifie « plénitude » ou « complétude »
stratégies de survie « combinaison d’activités agricoles, médicales,
religieuses, pédagogiques, commerciales, de
construction et domestiques qui contribuent au
bien-être de l’homme au sein d’une culture en
particulier ;… [elles] reflètent les principes auxquels
adhère une communauté ;… [ces activités] ont une
formation spirituelle » (Moreau, 966)
transformation action de passer d’une vie contraire à la volonté de Dieu
à une existence dans laquelle les hommes peuvent jouir
d’une plénitude de vie en totale harmonie avec Dieu

— 219 —
Appendice
Les peuples récalcitrants : Étude de cas de Hayyu
de Miriam Smith
Hayyu est un endroit isolé de la côte nord-est de l’Afrique. Ses
bâtiments blanchis à la chaux s’élancent vers le ciel, scintillant sous le
soleil du désert et projetant leur reflet sur la mer qui vient baigner les
portes de la ville.

La grande mosquée est également la plus ancienne, et les hommes de


Hayyu ne ratent jamais l’appel à la prière du soir. Rassemblés à l’intérieur,
ils écoutent l’imam qui psalmodie la salat en arabe et ensuite leur fait
part de ses réflexions en langue vernaculaire. Son message est clair :
les parents ne doivent pas autoriser leurs filles à porter des vêtements
inappropriés, les riches doivent donner aux pauvres et chacun doit
prendre garde à ne pas se laisser corrompre par le monde des infidèles
dont les charmes sont si souvent vantés à la télévision par satellite.

Au point du jour, le sol de la mosquée est couvert de tapis de prière et


de gens endormis. À midi, les pauvres et les sans-abris vont prendre leur
repas à la mosquée. Un long bâtiment est rattaché à la mosquée ; c’est
la madrasa locale, c’est-à-dire l’école coranique pour les jeunes enfants.

Entre 1991 et 1994, deux groupes ethniques engagés dans une


guerre civile ont laissé de profondes blessures, et un sentiment de haine
demeure entre ces deux factions. Hayyu était un champ de bataille et la
base de l’opposition. L’opposition a été anéantie. Les bâtiments de Hayyu
ont subi des dommages importants ; les dommages émotionnels et
psychologiques sont pires encore. Les habitants de la ville ont fui pendant
la bataille, et bon nombre d’entre eux ne sont jamais revenus. Plusieurs
enfants en âge scolaire sont restés sans éducation.

Il est traditionnel de mâcher du khat (mirraa), drogue toxicomanogène


et également passe-temps national favori des hommes. Ces derniers
l’achètent vers 13 heures et la consomment jusqu’à 1 heure du matin le
jour suivant, assis sur des tapis à bavarder entre eux.

— 221 —
Appendice

Vers la fin des années 1800, Hayyu est devenu un axe commercial
important qui allait de l’Éthiopie vers l’ouest. Sur cet axe commercial se
trafiquaient des esclaves et des armes. Ce passé suscite du mépris et du
racisme envers les autres peuples d’Afrique.

Les pêcheurs vivent des fruits de la mer qui abondent. Il n’y a que peu
de touristes pour admirer l’océan. Les habitants ont généralement peur
de la mer et, sauf pour quelques enfants qui s’aventurent sur les récifs à
marée basse pour se nourrir de conques et de palourdes, les habitants de
la ville ne s’aventurent pas dans le monde sous-marin.

La ville est quasi déserte car la plupart des autochtones sont des
bergers nomades qui gardent des chèvres, des moutons, du bétail et
des chameaux, et se déplacent constamment à la recherche d’eau et de
nourriture pour leurs troupeaux. Les terres sont désertes et incultivables.
Souvent, ces personnes campent pendant plusieurs mois à un seul endroit,
qui peut se trouver à plus de cinq kilomètres d’une source d’eau fraîche.
À l’aide d’ânes, les femmes sont chargées d’aller chercher plusieurs litres
d’eau qui leur permettront de tenir pendant plusieurs jours. Des services
de santé sont disponibles en ville, mais les gens des campagnes meurent
avant de pouvoir atteindre la ville. Le gouvernement a construit des
écoles, mais vu que les indigènes sont principalement nomades, il est
rare qu’ils se trouvent à proximité d’une école. Par conséquent, beaucoup
d’enfants ne peuvent intégrer de système éducatif formel.

Les femmes et les enfants vivent dans la peur constante des mauvais
esprits et du mauvais œil. Tout ce que les gens savent de l’église et du
christianisme, ils l’ont vu à la télévision ou ils l’ont entendu à la radio ou à la
mosquée. Tous les Occidentaux sont considérés comme étant chrétiens ;
leur seul contact avec le témoignage chrétien vient des programmes de
télévision ou des familles de militaires venant d’Occident. Ces gens n’ont
jamais vu d’église ou de rassemblement de croyants véritables et ils n’ont
jamais entendu de prédication. Seuls les dirigeants religieux islamiques
font autorité en matière de questions religieuses. La mosquée est le seul
endroit où la population peut recevoir un enseignement religieux.

À présent, nous allons évaluer cette étude de cas en nous appuyant


sur certaines des questions mentionnées dans ce livre.

— 222 —
Appendice

1. Que feriez-vous dans ce village pour que le message de la


rédemption selon Dieu puisse y être apporté ?
2. Comment pourriez-vous vous y prendre ?
3. D’après vous, comment les habitants du village réagiront-ils ?
4. À quels problèmes vous attendez-vous à être confrontés ?

— 223 —
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