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Rapport - Microbiologie Industrielle

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Rapport de

microbiologie
industrielle

Les ferments : source d'innovation

Rédigé par : Chaimae SERBI, Maha RAHOUTI, Ilayda GOKTAS, Yousra TABTI et
Ikram ABBAOUI
Parcours : M2 Génie alimentaire
Encadrante : Mme Nadia OULAHAL
Année universitaire : 2023-2024
Introduction

L'histoire des aliments fermentés se décompose en trois périodes d'importance variable. Tout
d'abord, une phase entièrement empirique s'étendant sur environ 10 000 ans, suivie par près de
130 ans de caractérisation microbiologique et biochimique des aliments fermentés à partir des
découvertes de Pasteur en 1865. Cette période a vu se développer l'industrialisation de leur
production ainsi qu'une préoccupation croissante pour l'hygiène et la sécurité alimentaire. Le
troisième temps émerge dans les années 1990, marqué par l'avènement des approches
moléculaires basées sur l'ADN et l'ARN des matrices alimentaires ou des souches isolées. En
seulement 25 ans, ces avancées ont entraîné des progrès spectaculaires dans le domaine.

L’innovation représente alors un défi majeur pour les entreprises agroalimentaires, nécessitant
une adaptation constante aux évolutions des habitudes de consommation. Dans ce contexte,
face aux défis climatiques et réglementaires actuels, l'un des axes stratégiques d'innovation
réside dans la recherche de solutions durables pour les produits et les emballages, répondant
aux attentes des consommateurs.

La fermentation est un procédée ancestral de préservation des aliments (avec le salage et le


séchage), offre une solution durable et économique pour conserver les aliments, sans recours à
la chaîne du froid. Applicable à petite et grande échelle dans de nombreux pays, la fermentation
contribue significativement à la sécurité alimentaire mondiale. Fondée sur l'activité de
microorganismes qui entravent le développement de bactéries pathogènes, la fermentation offre
l'avantage de se passer d'additifs dans les aliments tout en générant de nouvelles propriétés
sensorielles et nutritionnelles, répondant ainsi à la recherche actuelle de naturalité.

En effet, ce mode de conservation bénéficie d'une popularité croissante auprès d'une population
soucieuse de durabilité et de produits plus naturels, moins industrialisés et dépourvus d'additifs.
Aussi, d’un engouement particulier parmi une population à la recherche d'authenticité, étant
donné que les produits fermentés génèrent de nouvelles propriétés sensorielles et
nutritionnelles, en raison de la présence de microorganismes vivants et de nutriments
spécifiques. Ainsi, les aliments fermentés se positionnent à la croisée de la santé, de la durabilité
et de l'innovation, occupant une place stratégique dans les tendances alimentaires émergentes
entre santé, durabilité et innovation.

Les aliments fermentés, en tant que produits sains, durables et dotés d'un potentiel inexploité,
pourraient jouer un rôle de premier plan dans l'alimentation future. Cela pourrait notamment

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répondre à la demande croissante des tendances de végétalisation et de lutte contre le gaspillage
alimentaire dans les régimes occidentaux.

1. Qu’est-ce qu’un ferment ?

Le terme « ferment » dans le Larousse désigne un « agent microbien produisant la fermentation


d’une substance ». Ce ferment peut donc être soit naturellement présent dans la matière
première soit ajouté. Il est utilisé de manière générale pour décrire un micro-organisme qui
induit une fermentation et peut être utilisé pour inoculer certains substrats en vue de les
transformer, que ce soit à des fins alimentaires ou industrielles.

Le terme "ferment soluble" désigne une enzyme produite par les micro-organismes
responsables de la fermentation et constituant sa véritable raison d'être, puisqu'elle peut induire
la fermentation même en l'absence d'agents vivants.

D’un point de vue biochimique, la fermentation se définit comme « un processus générant de


l’ATP dans lequel les composés organiques agissent à la fois en tant que donneurs et accepteurs
d’électrons ».
La fermentation est une « réaction biochimique qui a lieu sous l’action de microorganismes »
(INRA). Les experts ont retenu une définition plus large pour décrire les aliments et les boissons
fermentés : « Aliments obtenus suite à la croissance désirée de microbes et de conversions
enzymatiques de matières premières alimentaires ». Ainsi, la simple présence d'enzymes,
qu'elles soient endogènes ou exogènes, dans les matières premières n'est pas suffisante pour
qualifier un aliment de fermenté. Pour illustrer, les produits considérés comme fermentés sont
ceux où les microorganismes utilisés pour la fermentation sont présents, qu'ils soient vivants
(comme la plupart des fromages et des yaourts, le kéfir, etc.) ou morts (comme le pain au levain,
les produits fermentés puis pasteurisés, la plupart des vins et des spiritueux, etc.).

2. Types de fermentation

Nous distinguons différents types de fermentation :

 Fermentation propionique :

L'acide propionique (ou propanoïque) et l'acide éthanoïque sont responsables de la flaveur des
fromages à pâte cuite et le gaz carbonique responsable de l'ouverture de ces fromages (Comté,
Gruyère et Emmental) par des bactéries propioniques (genre Propionibacterium).

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 Fermentation butyrique :

L'acide butyrique est responsable de l'odeur putride et du goût piquant de certains fromages à
pâte cuite.

Cette fermentation a lieu sous l'effet des bactéries Clostridium butyricum.

 Fermentation lactique :

Il se forme d’acide lactique à partir du glucose.

L'acide lactique ayant comme formule semi-développée :

La fermentation malolactique est un cas particulier, l'acide lactique se formant au détriment de


l'acide malique qui donne à un vin par exemple une acidité souvent non souhaitée. Les bactéries
utilisées sont du genre Oenococcus.

 Fermentation alcoolique :

Il se forme de l'éthanol à partir du glucose pour fabrication des boissons alcoolisées par
Saccharomyces cerevisiae, Candida utilis.

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 Fermentation acétique : Il se forme de l'acide éthanoïque à partir de l'éthanol. Par
exemple pour la production de vinaigre de vin par "acétobacter".

3. Les aliments fermentés

Aujourd’hui, plus de 5000 aliments fermentés sont répertoriés dans le monde, et parmi eux des
fleurons de créativité et de cultures locales (pain, fromages, salaisons, végétaux fermentés, vin,
bière…).

Figure 1 : Principales classes de produits fermentés, matières premières utilisées, microorganismes réalisant la
fermentation, ainsi que lieu majeur de production et de consommation.

AB : autres bactéries ; B Ac : Bactéries acétiques ; BL : bactéries lactiques ; CF : champignons filamenteux ; Lev : levures.
Amorçage : ajout de microorganismes pour démarrer le processus de fermentation ; repiquage : utilisation des

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microorganismes issus de fermentations précédentes de la même matière première ; spontané : fermentation à partir des
microorganismes présents dans la matière première.

4. Les bienfaits des ferments sur la santé

Les aliments fermentés sont riches en probiotiques, essentiels pour maintenir une flore
intestinale saine et renforcer le système immunitaire. La qualité des probiotiques dépend du
type d'aliment fermenté et de la présence de prébiotiques. Ces aliments améliorent la digestion
grâce aux enzymes produites pendant la fermentation, bénéficiant particulièrement à ceux ayant
des sensibilités alimentaires. De plus, la fermentation accroît la disponibilité des nutriments,
incluant vitamines B, acides aminés et minéraux, grâce à la présence de levain. Les bienfaits ne
se limitent pas aux aspects physiques, car certaines souches probiotiques favorisent une
meilleure humeur et atténuent les effets du stress. L'inclusion régulière d'aliments fermentés
dans l'alimentation semble également liée à une réduction du risque de maladie cardiaque, en
raison de modifications positives de la pression artérielle et du profil lipidique. Ces aliments
renforcent également la fonction immunitaire, réduisant ainsi le risque d'infections. Enfin, les
composés bioactifs anti-inflammatoires produits pendant la fermentation contribuent à atténuer
l'inflammation globale dans le corps, faisant des aliments fermentés un choix avisé pour
promouvoir la santé globale.

Un nouveau projet de recherche participative, appelé Le French Gut, a été lancé en septembre
2022 pour explorer les liens entre la consommation d'aliments fermentés, le microbiote et la
santé. Ce projet vise à analyser le microbiote des Français en tenant compte de leurs habitudes
alimentaires. Il implique la collecte de 100 000 échantillons de selles d'adultes vivant en France,
accompagnés d'un questionnaire portant sur leur santé et leur alimentation.

5. France leader R&D sur le marché de la fermentation

Les ferments sont omniprésents dans notre quotidien, influençant jusqu'à 40% de notre
alimentation à travers des produits tels que le fromage, le pain, le yaourt et bien d'autres. En
France, un secteur agroalimentaire florissant représentait en 2021 un chiffre d'affaires de 198
milliards d'euros, offrant plus de 450 000 emplois et contribuant positivement à la balance
commerciale. Forte d'une tradition de R&D dans le domaine de la fermentation, la France a su
passer de la connaissance empirique à la maîtrise industrielle des procédés fermentaires, comme
en témoignent les travaux de Louis Pasteur sur la pasteurisation.

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Le programme Ferments du Futur vise à renforcer ces liens et à stimuler la collaboration entre
38 organismes pour développer des projets de R&D. En 2023, six projets de recherche financés
par Ferments du Futur ont été sélectionnés, avec des résultats partagés entre tous les membres.
Parallèlement, des discussions sont engagées entre l'équipe opérationnelle de Ferments du Futur
et des entreprises pour définir des projets d'innovation confidentiels. Ce programme favorise la
coopération et la compétition, permettant aux entreprises de travailler ensemble sur des
innovations techniquement ou économiquement.

6. Yaourts d’origine non animal

En raison de la demande croissante d'alternatives au lait, liée à des besoins à la fois sanitaires
et éthiques, les produits de type yaourt à base de plantes ont été largement explorés ces dernières
années. Plusieurs études ont été menées afin d’avoir des produits fermentés ne contenant pas
de lait d’origine animale mais qui ont les mêmes valeurs en termes de texture, nutrition et
surtout des milieux favorables pour les bactéries lactiques.

Figure 2 : Le contenu des produits fermentés non laitier et leurs effets sur la santé humain

Le yaourt traditionnel est obtenu à partir du lait de vache par un processus impliquant la
fermentation : les deux bactéries lactiques employés sont le Streptococcus thermophilus et
Lactobacillus delbrueckii subsp. Bulgaricus. Le lait est fermenté jusqu’à atteindre un pH
inférieur à 4,5 et une densité de bactéries lactiques de 8 log10 (CFU/g).
Cela fait déjà plusieurs années que l'industrie essaie de concevoir des produits fermentés
d’origine végétale en employant des texturants, des hydrocolloïdes ou d'autres additifs car il

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est difficile de s’approcher du yaourt traditionnel en termes de texture. Le processus
traditionnel passe par la formation d’un réseau de protéines au cours de la fermentation, ce qui
donne la texture crémeuse d’un yaourt. Lorsqu’on emploi des végétaux au lieu du lait
animalier, souvent la quantité des protéines n’est pas suffisante pour former un réseau stable
au cours du temps, donc la plupart des produits ‘yogurt-like’ contiennent des additifs. Un
autre inconvénient de ces produits à part le coût de production et la nécessité d’employer les
additifs, sont les molécules qu’on appelle les facteurs antinutritionnels : ce sont des molécules
qui empêchent l'absorption des macromolécules intéressants pour notre corps et qui attirent
également les propriétés sensorielles.
L’une des meilleures pistes d’innovation reste la fermentation parce que non seulement
l’utilisation des bactéries lactiques permet de se rapprocher de la texture et aussi permet d’avoir
le goût acide du yaourt classique, mais aussi permet de réduire l’effet des molécules
antinutritionnelles.
Voici un schéma combinant les différents processus (traitements thermiques, fermentation,
traitement enzymatique) utilisés aujourd’hui dans l’industrie des produits ‘yaourt-like’:

Figure 3 : Processus utilisés dans l'industrie des produits "Yaourt-Like"

Les deux souches traditionnelles de bactéries lactiques ont été testées avec des sources végétales
mais les résultats n’ont pas été satisfaisants. Ces souches sont employées pour la fermentation

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des yaourts classiques car le contenu nutritionnel du lait d’origine animale donne une matrice
très adaptée pour une activité optimale de ces bactéries souches de bactéries lactiques. La
solution passe par trouver et tester différentes souches de bactéries lactiques qui sont plus
adaptées aux matrices végétales, qui contiennent significativement moins de protéines par
rapport au lait d’origine animale.
La faible teneur en protéines et la différence de propriétés de coagulation des protéines
signifient qu'il peut être difficile d'obtenir une consistance similaire dans les yaourts à base de
plantes par rapport aux yaourts laitiers sans l'ajout d'agents épaississants, en particulier à faible
pH, ce qui affecte l'image "clean-label" de ces produits. L'utilisation de bactéries lactiques
(LAB) produisant des exopolysaccharides est un moyen d'obtenir une texture similaire.
Ces dernières années, plusieurs entreprises se sont lancées dans le défi. Elles ont commercialisé
des yaourts à base des végétaux obtenus par la fermentation ou des ‘starters’ qui contiennent
un mélange de différentes souches de bactéries lactiques :

 Coconut CULT
La startup américaine The Coconut Cult produit des aliments probiotiques non laitiers. Elle
utilise des ingrédients biologiques, notamment de la crème de coco, de la viande de coco et du
cacao, ainsi qu'un mélange personnalisé de probiotiques pour créer ses yaourts. Le processus
de fermentation en batch permet d'obtenir 800 milliards de probiotiques actifs par litre,
comprenant différentes souches : L. Lactis, S. Thermophilus, L. Salivarius, L. Acidophilus, L.
Helveticus, L. Plantarum, L. Gasseri, L. Brevis, L. Casei, L. Fermentum, L. Reuteri, L.
Rhamnosus, B. Longum, B. Infantis, B. Breve, B. Bifidum.

 REVOLUTION FERMENTATION

Cette entreprise vend différents mélanges de souches de LAB pour la production de yaourts
sans lait (Lactococcus Lactis subsp. Lactis, Lactococcus Lactis subsp. Cremoris, Lactococcus
lactis subsp. lactis biovar. diacetylactis, Leuconostoc mesenteroides ssp. mesenteroides). Ce
ferment pour yaourt non laitier vous permet de fabriquer du yaourt à partir de lait végétal.
Chaque sachet permet de produire plus de 6 litres de yaourt végétalien.
Le yaourt produit est doux, légèrement acidulé et a une texture lisse et ferme. Il peut être
fabriqué à partir de plusieurs types de boissons végétales, comme le lait de soja, le lait de coco
ou le lait de pois. Ce yaourt végétalien est fabriqué à une température plus basse que les yaourts
traditionnels. Ce type de culture de départ non laitière est appelé mésophile. Il est donc possible

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de faire du yaourt végétal sans yaourtière. Le yaourt végétalien maison ainsi obtenu se conserve
2 à 3 semaines au réfrigérateur. La fabrication de votre propre yaourt végétalien à partir d'un
ferment de yaourt végétalien peut être résumée en 3 étapes simples :
• Verser le contenu d'une capsule dans 1 à 2 litres de lait végétal.
• Incuber entre 25 et 35°C (77-95°F) pendant 5 à 9 heures.
• Réfrigérer.

 Trois ingrédients : des bactéries, de soja et des drêches de brasserie


Aujourd'hui, une équipe de recherche dirigée par un chercheur principal de l'Institut national de
l'alimentation de l'Université de Denmark a découvert un moyen de fabriquer des yaourts à base
de plantes avec le moins d'ingrédients possible. Les chercheurs ont cherché à remplacer les
cultures starter développées pour être utilisées dans les aliments par des bactéries du règne
végétal, arguant du fait que ces bactéries sont optimisées pour décomposer le sucre dans la
matière végétale. Les chercheurs ont parcouru les champs et les forêts à la recherche
d'échantillons de différentes matières végétales et, une fois de retour au laboratoire, ils ont
cherché des bactéries lactiques qui pourraient servir de culture de départ dans une utilisation à
base de plantes.

7. Colorants naturels obtenus grâce à la fermentation

La couleur possède d'énormes potentiels de marché dans les secteurs alimentaire, agricole,
cosmétique, textile et pharmaceutique. Cependant, les applications industrielles non contrôlées
des colorants synthétiques peuvent avoir comme conséquence de sérieux risques pour la santé
humaine et une source de pollution pour l’environnement. De ce fait, il existe un intérêt mondial
pour le développement de procédés de production de pigments à partir de sources naturelles
notamment, les plantes et les micro-organismes.

Les pigments naturels autorisés accessibles provenant de plantes présentent de nombreux


inconvénients tels que l'instabilité à la lumière, à la chaleur ou à un pH défavorable, la faible
solubilité dans l'eau et sont, souvent, indisponibles toute l'année.

Toutefois, les pigments produits par fermentation microbienne constituent une alternative aux
pigments synthétiques potentiellement toxiques. A titre comparatif, « la fabrication de 1 kg de
colorant d'origine pétrochimique nécessite environ 100 kg de résidus pétrolifères, 10 kg

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d'acides forts et 1000 litres d'eau. La technologie de fermentation permet de produire ce
même kilogramme avec 200 litres d'eau, sans pétrole ni produit chimique ».

Ils ont l’avantage de l’abondance, la sécurité d'utilisation, la facilité et la rapidité de la


croissance du microorganisme producteur sur un milieu de culture économique, la
biodégradabilité, l'indépendance vis-à-vis des conditions météorologiques et géographiques,
l'absence de risque de contamination de l'eau et de l'environnement, un rendement contrôlable
et prévisible et la production des couleurs de différentes teintes.

 Production de pigments rouges naturels par Monascus purpureus dans le système


de fermentation immergé utilisant un hydrolysat de déchets de brasserie, la drêche
de brasserie (BSG)

Monascus est un champignon xérophile qui pousse dans une grande variété de substrats
naturels, notamment le riz et d'autres céréales. Le genre Monascus est divisé en trois espèces :
purpureus, ruber et pilosus, qui sont principalement isolées des aliments orientaux. La
caractéristique la plus importante de ce genre est leur capacité à synthétiser des pigments à
partir de chromophores polycétides et d'acides β-céto par estérification.

La fermentation immergée est un processus biotechnologique où la croissance microbienne et


la production de composés d'intérêt se déroulent dans un milieu liquide. Contrairement à la
fermentation en milieu solide, où les microorganismes se développent à la surface d'un substrat
solide.

Dans la fermentation immergée, les microorganismes sont cultivés dans des bioréacteurs ou des
cuves de fermentation spécialement conçues. Ces bioréacteurs permettent de contrôler et
d'optimiser divers paramètres tels que la température, le pH, l'agitation, la concentration en
oxygène, et la composition du milieu de culture.

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Figure 4 : Processus de production des pigments

Les drêches de brasserie ont été lavées pour éliminer l'amidon résiduel et séchées. Le substrat
a ensuite été broyé avec un broyeur à marteaux à échelle pilote pour augmenter la surface pour
une meilleure hydrolyse acide et stocké dans des bocaux hermétiques jusqu'à son utilisation.

Après le surnageant a été récupéré par centrifugation et utilisé comme milieu de fermentation à
base de drêches de brasserie.

Dans ce milieu nutritif, les champignons se développent et engendrent la synthèse de pigments,


notamment la production d'un pigment rouge (rubropunctamine) et un pigment orange
(monascorubrine). Après un certain laps de temps, les champignons sont séparés des pigments
par filtration. Par la suite, les pigments sont purifiés en les séparant des résidus présents dans le
milieu de culture.

La production des pigments Monascus par fermentation présente un intérêt considérable en


raison de ses multiples avantages pour la santé et de sa polyvalence dans divers domaines
d'application. Les recherches visant à développer ce domaine sont essentielles pour exploiter
pleinement le potentiel de production de pigments par les microorganismes. Ces études ouvrent
la voie à de nouvelles applications dans des secteurs tels que l'industrie alimentaire, la
pharmacologie, la cosmétique et d'autres industries connexes.

En investissant dans la recherche et le développement de cette technologie, nous pourrons non


seulement diversifier notre approvisionnement en colorants naturels, mais aussi répondre aux
besoins croissants des consommateurs pour des produits sûrs, durables et bénéfiques pour la
santé.

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8. Les Ferments du Futur :

Ferments du Futur représente un partenariat d'envergure entre le secteur public et privé. On y


compte pour le moment 6 établissements d’enseignement supérieur et de recherche, 7 unités de
recherche spécialisées dans la microbiologie, les procédés de transformation alimentaire et la
science des données, ayant pour objectif de catalyser la recherche et l'innovation dans le
domaine des ferments, des aliments fermentés et de la biopréservation, dans le dessein de
promouvoir une alimentation durable et bénéfique pour la santé.

Initié par l'INRAE (Institut National de Recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et


l'Environnement) et l'ANIA (Association Nationale des Industries Alimentaires) en décembre
2022, le Grand Défi "Ferments du Futur" s'inscrit dans le cadre de France 2030, une stratégie
d'investissement de l'État visant à renforcer la compétitivité des secteurs industriels français les
plus stratégiques. Ce programme de recherche-innovation réunit une coalition dynamique de
partenaires, comprenant une diversité d'acteurs publics et privés, tous engagés à lever les
obstacles scientifiques et technologiques qui freinent l'innovation dans le domaine des ferments
alimentaires.

Doté d'un financement substantiel de 48,3 millions d'euros sur une période de 10 ans, dans le
cadre de France 2030, Ferments du Futur se dote ainsi de moyens considérables pour
développer des capacités de recherche et d'innovation inégalées. Cette allocation financière
permet de mettre en place des infrastructures interconnectées, combinant l'excellence de la
recherche et de l'innovation dans le domaine de la fermentation.

En réunissant des expertises variées et en favorisant la collaboration entre les différents acteurs
de la recherche et de l'industrie, Ferments du Futur vise à ouvrir de nouvelles voies dans le
domaine de l'alimentation durable, tout en contribuant à l'émergence de solutions novatrices
pour répondre aux défis actuels et futurs en matière d'alimentation et de santé.

Le Grand défi Ferments du Futur s'inscrit dans une démarche ambitieuse de rassembler des
acteurs majeurs de la recherche et de l'industrie alimentaire, dans le but de comprendre en
profondeur les mécanismes de la fermentation alimentaire. Cette compréhension approfondie
est cruciale pour répondre aux défis actuels et futurs liés à la santé publique, aux impacts du
dérèglement climatique sur notre système alimentaire et aux attentes évolutives des
consommateurs.

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Au cœur de cet objectif, Ferments du Futur vise à dynamiser l'innovation en développant de
nouveaux aliments fermentés, en mettant l'accent sur la diversification des sources végétales
telles que les céréales, les légumineuses, les fruits et les légumes. Ces nouveaux produits sont
conçus pour répondre à une double exigence : végétaliser notre alimentation et renforcer sa
durabilité.

9. Végétalisation de notre alimentation

La fermentation végétale est un processus biologique naturel dans lequel des micro-organismes,
tels que des bactéries, des levures ou des moisissures, décomposent les glucides présents dans
les aliments d'origine végétale en divers produits chimiques, tels que des acides organiques, des
gaz ou de l'alcool. Ce processus se déroule en l'absence d'oxygène et est souvent utilisé dans la
transformation des aliments pour améliorer leur saveur, leur texture, leur conservation et leur
valeur nutritionnelle. La fermentation végétale est largement utilisée dans la production de
produits alimentaires tels que le pain au levain, le yaourt, la choucroute, le miso et le vin, entre
autres.

Espèces présentes dans les fermentations végétales :

• Une très grande diversité des écosystèmes selon la nature de la matière première
(bactéries seules ou associées à des levures ou à des champignons)
• Prédominance des bactéries lactiques et plus particulièrement lactobacilles
hétérofermentaires (associées pour certaines spécialités fermentées à des bactéries
acétiques)
• Au sein des bactéries lactiques des genres-espèces : Lactobacillus (L. plantarum),
Pediococcus, Leuconostoc, etc. presque systématiquement présents ➔ espèces
ubiquitaire ‘’nomades’’
 Fermenter des légumineuses :

Les légumineuses, telles que les pois, les lentilles, le soja, sont des acteurs clés tant dans les
champs que dans nos assiettes. Leur capacité à fixer l'azote du sol en fait des cultures
avantageuses qui réduisent la nécessité d'utiliser des engrais azotés, contribuant ainsi à la
préservation de l'environnement. En outre, ces légumineuses sont d'excellentes sources de
protéines, offrant une alternative précieuse aux protéines animales dont la consommation doit
être réduite.

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Cependant, malgré leurs nombreux avantages, les légumineuses ne sont pas toujours bien
perçues par les consommateurs en raison de leur goût parfois amer et de leurs notes terreuses.
Pourtant, il existe un moyen de transformer cette perception : la fermentation.

La fermentation offre un levier prometteur pour améliorer les qualités sensorielles des
légumineuses. Ce processus permet de développer des saveurs complexes, d'atténuer
l'amertume et de réduire les notes terreuses, rendant ainsi les légumineuses plus attrayantes et
savoureuses pour les consommateurs. Parmi les protéines végétales, les pois offrent de
nombreux avantages tant d’un point de vue environnemental que pour ses propriétés
fonctionnelles en tant qu’ingrédient protéique en alimentation humaine (propriétés gélifiantes
ou moussantes par exemple). Avec un marché mondial en croissance de plus 13%, les protéines
de pois sont en France, la légumineuse la plus cultivée. L’idée est lancée. Les scientifiques ont
alors montré qu’il était possible d’utiliser des bactéries lactiques pour fermenter un mélange de
lait et de protéines de pois. Sur les 55 souches testées dans 160 associations, 11 associations
composées de 5 à 9 souches ont été retenues. Les écosystèmes choisis ont la particularité de
masquer le goût et la couleur « verte » caractéristique du pois et d’apporter différentes textures
allant de la crème dessert à une pâte plus ferme.

En utilisant la fermentation comme outil de transformation, les légumineuses peuvent devenir


des ingrédients incontournables dans une alimentation équilibrée et durable.

 Les fromages végétaux :

Au cours des dernières années, les modes alimentaires de type végétarien, végétalien et
flexitarien se sont passablement développés en raison d’une plus grande attention des
consommateurs-trices aux aspects écologiques, nutritionnels, éthiques et culturels ainsi que
l'amenuisement des ressources et au le changement climatique. Pour répondre à leurs besoins,
les producteurs de denrées alimentaires se sont lancés dans l’innovation de produits afin de
fournir des alternatives aux aliments d’origine animale.

Dans ce cadre, les fromages traditionnels, obtenus grâce au lait, sont bannis. Les producteurs
l'ont bien compris. Confrontés à la double injonction de proposer un produit différent du
fromage originel tout en réunissant des saveurs qui en rappellent leur goût, ils doivent s'appuyer
sur la science pour optimiser les résultats.

 Les nouveaux affineurs :

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La startup "Les Nouveaux Affineurs" est une entreprise française spécialisée dans la production
de fromages végétaux affinés. Fondée en 2017 par Anne Guth et Matthieu Pirès, cette entreprise
s'est rapidement imposée comme un acteur majeur dans le domaine des alternatives végétales
aux produits laitiers.

La particularité des produits de "Les Nouveaux Affineurs" réside dans le processus d'affinage
qu'ils appliquent à leurs fromages végétaux. Inspirés par les techniques traditionnelles
d'affinage des fromages laitiers, ils ont développé des méthodes de fermentation et d'affinage
spécifiques pour donner à leurs fromages végétaux des saveurs complexes et authentiques.

Le projet a été incubé au Food’Inn Lab d’AgroParisTech début 2017 et il contribue en grande
partie aujourd’hui aux objectifs du projet "Ferments du Futur" afin d’accélérer le
développement de nouvelles technologies et de nouveaux produits ainsi que les produits déjà
existants.

Processus de fabrication :

La méthode utilisée par "Les Nouveaux Affineurs" pour produire des fromages fermentés
végétaux implique plusieurs étapes clés, similaires à celles utilisées dans la fabrication de
fromages traditionnels, mais adaptées aux ingrédients d'origine végétale.

1. Préparation des ingrédients : Les Nouveaux Affineurs utilisent des ingrédients de


haute qualité, notamment des noix de cajou bio décortiquées mécaniquement et du soja
bio garanti sans OGM, 100% français.

2. Mélange des ingrédients : Les noix de cajou et le soja sont mélangés avec de l'eau et
éventuellement quelques aromates bio, selon la recette spécifique du fromage végétal
en cours de fabrication. Ce mélange forme la base de la pâte à fromage végétal.

3. Fermentation : Une fois mélangés, les ingrédients sont inoculés avec des ferments
végétaux, généralement le « Lactobacillus Acidophilus » c’est un ferment qui a été
cultivé sur une souche végétale. Ces ferments vont initier le processus de fermentation.

4. Moulage et affinage : Après la fermentation, la pâte à fromage est moulée dans la forme
souhaitée pour le fromage végétal. Ensuite, les fromages sont affinés pendant une
période spécifique, généralement de plusieurs semaines à plusieurs mois, dans des
conditions contrôlées. Pendant cette période, les fromages développent des arômes et
des saveurs complexes, ainsi qu'une texture caractéristique.

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5. Conditionnement : Une fois affinés, les fromages végétaux sont emballés et prêts à
être distribués aux consommateurs.

En utilisant ce processus, Les Nouveaux Affineurs parviennent à produire des fromages


végétaux fermentés de haute qualité, offrant une alternative délicieuse et respectueuse de
l'environnement aux fromages traditionnels à base de lait animal.

Les PROPRIÉTÉS NUTRITIONNELLES et les avantages d'un fromage végétal :

Les fromages végétaux offrent plusieurs avantages nutritionnels, notamment l'absence de


lactose, une faible teneur en matières grasses, une richesse en protéines végétales, une
abondance en nutriments essentiels provenant d'ingrédients comme les noix de cajou, les
graines et le soja, l'absence de cholestérol et une réduction des graisses saturées par rapport aux
fromages traditionnels à base de lait animal. Ces caractéristiques en font une option attrayante
pour ceux qui cherchent à diversifier leur alimentation, réduire leur consommation de produits
laitiers d'origine animale ou répondre à des besoins nutritionnels spécifiques, tout en offrant
une alternative délicieuse et adaptée à différents régimes alimentaires et modes de vie.

Fromage végétal

Figure 5 : Analyse comparative des valeurs nutritionnelles : lait de brebis vs lait végétal

10.Valorisation des coproduits d’origine végétale par fermentation solide

D'ici 2050, selon les estimations de l'ONU, la population mondiale devrait augmenter de 16%.
Pour satisfaire les besoins alimentaires croissants, la production alimentaire devra augmenter
de 70%. Cependant, de manière paradoxale, notre système alimentaire actuel génère chaque
année un gaspillage alimentaire colossal, atteignant 1,3 milliard de tonnes à l'échelle mondiale.
Ces pertes alimentaires représentent un coût annuel estimé à 1 000 milliards de dollars
américains (USD). Ce gaspillage implique également une utilisation inutile des ressources
naturelles telles que l'eau, l'énergie et la surface de terre utilisées pour produire ou transformer
les aliments, entraînant ainsi une émission annuelle d'environ 4,4 gigatonnes de gaz à effet de

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serre évitables. La perte et le gaspillage alimentaires constituent des problèmes d'ampleur
mondiale.

L'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) estime qu'environ un tiers de la


production végétale est perdue, du processus de culture jusqu'au stade de la vente au détail. Ce
gaspillage représente une ressource inexploitée pour le développement d'aliments innovants,
avec 32% encore consommables. Cela souligne les lacunes de notre système alimentaire actuel
en termes d'efficacité.

En France, les coproduits agroalimentaires sont largement sous-utilisés dans l'alimentation


humaine, avec seulement 60% de leur volume utilisé pour l'alimentation animale. Le potentiel
de cette ressource reste largement inexploité, soulignant la nécessité d'agir pour en tirer parti
pleinement. La fermentation solide, notamment, pourrait être un levier efficace pour une
meilleure valorisation des coproduits agroalimentaires.

La fermentation solide, qui consiste en la fermentation sur un substrat solide, est un processus
où des micro-organismes se multiplient dans un environnement contenant peu ou pas du tout
d'eau libre. Le substrat utilisé pour la fermentation agit comme une source de nutriments pour
les micro-organismes en croissance.

En pratique, la fermentation solide peut être réalisée en transformant des coproduits solides tels
que le son de blé, la pulpe de betterave, le tourteau de colza, le marc de pomme, la drêche de
brasserie, etc., à l'aide de champignons bénéfiques. Ces parties des végétaux sont reconnues
pour être les plus riches en nutriments, notamment en fibres, minéraux et vitamines. Cependant,
ces coproduits sont souvent associés à une acidité trop importante, une teneur élevée en sucre
et une faible digestibilité, limitant ainsi significativement leur valeur nutritionnelle et leur
utilisation dans les industries agroalimentaires.

La fermentation solide permet d'enrichir les coproduits sur le plan nutritionnel, parfois même
en les rendant aptes à la consommation alimentaire. Elle peut diminuer leur contenu en fibres
difficilement digestibles, accroître leur teneur en protéines, éliminer des composés indésirables
comme la lignine, ou encore améliorer leurs caractéristiques sensorielles.

La fermentation en milieu liquide est principalement adaptée aux micro-organismes


unicellulaires tels que les bactéries et les levures, tandis que la fermentation en milieu solide est
plus favorable aux organismes mycéliens. Les contraintes de cisaillement dues à l'agitation
nécessaire dans les milieux liquides rendent la culture de nombreuses souches mycéliennes

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difficile, bien que certaines aient été avec succès adaptées à ce type de culture. En revanche, la
fermentation en milieu solide ne nécessite pas d'oxygénation car le mycélium est en contact
direct avec l'air. C'est pourquoi cette méthode est principalement utilisée dans les productions
fongiques. Les premières applications non alimentaires de cette fermentation ont été pour la
production d'enzymes, notamment celles qui hydrolysent les polymères végétaux, car ces
polymères sont peu solubles en milieu liquide. En milieu solide, le substrat lui-même agit
comme inducteur, permettant d'obtenir des réacteurs plus compacts pour des niveaux de
production équivalents. De plus, la productivité des souches en milieu solide est beaucoup plus
élevée par rapport au volume des réacteurs par rapport à la fermentation liquide. De plus, les
fermentations en milieu solide génèrent moins d'effluents et nécessitent moins d'eau à traiter,
simplifiant la récupération des produits. Pour toutes ces raisons, les champignons filamenteux
(et supérieurs) demeurent le groupe de micro-organismes le plus utilisé en fermentation en
milieu solide, avec des applications très variées, en raison de leurs propriétés physiologiques,
enzymologiques et biochimiques qui les rendent bien adaptés à ce type de culture, proche de
leur habitat naturel.

Mais dans quelles conditions génère-t-elle des bénéfices environnementaux ?

Les scientifiques de l'unité INRAE Sécurité et qualité des produits d'origine végétale (SQPOV)
à Avignon ont étudié cette question dans le cadre du projet européen Demeter (Use of dietary
fibre from pomaces of second class vegetables as food ingredient). En collaboration avec une
légumerie, ils ont exploré la fermentation des coproduits de fruits et légumes pour les valoriser
et réduire le gaspillage. Ils se sont penchés sur la possibilité de stabiliser des produits
susceptibles de se détériorer rapidement en fermentant, par exemple, des épluchures de légumes
riches en microconstituants essentiels tels que les vitamines, les minéraux et les antioxydants.

Les scientifiques ont utilisé une méthode d'évaluation environnementale appelée Analyse de
Cycle de Vie (ACV), qui évalue les impacts environnementaux d'un produit ou d'un service sur
toute sa durée de vie, pour étudier six coproduits provenant de différentes industries de
transformation en France métropolitaine : tourteau de colza, coproduits de meunerie, pulpe de
pomme, drêches de maïs, pulpe de betterave sucrière, tourteau d'olive. Ces sous-produits ont
été sélectionnés sur la base de leur importance en termes de potentiel de ressources pour la
France et pour disposer d'un panel représentatif de leur composition initiale, de leur
digestibilité, de leur humidité et de leur utilisation actuelle. Ils ont comparé l'impact
environnemental de la valorisation de ces coproduits par fermentation solide à d'autres

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méthodes telles que leur utilisation directe dans l'alimentation animale ou leur transformation
en énergie.

Les résultats varient en fonction des coproduits et de leurs utilisations :

• La valorisation par fermentation solide pour l'alimentation humaine entraîne une


réduction significative des émissions de gaz à effet de serre et permet la préservation
des terres arables et des ressources en eau douce.
• Pour l'alimentation animale après fermentation solide, les bénéfices environnementaux
sont limités en raison des besoins énergétiques importants qui surpassent les avantages
nutritionnels. L'inclusion directe des coproduits dans les rations animales est une
meilleure option pour réduire les effets du changement climatique.
• Pour les coproduits à faible valeur nutritionnelle, la valorisation énergétique par
production de biogaz par digestion anaérobie s'avère être la meilleure option.

Ces résultats mettent en lumière les avantages et les inconvénients des nouvelles techniques de
valorisation de la biomasse, notamment celles visant à développer de nouveaux aliments et
ingrédients. Dans un contexte où de nouvelles utilisations des bioressources émergent,
l'adoption de méthodes d'ACV standardisées et adaptées aux nouvelles filières de valorisation
faciliterait leur intégration dans le processus décisionnel.

 Green spot :

La start-up Green Spot, fondée en France en 2018 par Ninna Granucci, se distingue par son
offre d'ingrédients entièrement naturels issus de l'économie circulaire. Grâce à la fermentation,
Green Spot transforme les coproduits végétaux tels que les épluchures de pomme en farines
riches en protéines, en fibres, en vitamines, en minéraux et en antioxydants naturels, sans gluten
et à faible teneur en calories.

Pour son développement, Green Spot a bénéficié d'une année d'accueil dans les laboratoires de
TWB (Toulouse White Biotechnology) à INRAE, profitant ainsi des équipements de pointe
pour la fermentation. La collaboration avec TWB se poursuit, Green Spot étant également
membre de leur consortium.

Le processus de production de Green Spot se déroule en trois étapes :

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1. Collecte : Green Spot collabore avec des industriels pour collecter les parties des
végétaux qu'ils n’utilisent pas, telles que les drêches de brasseries et le marc des
industries du jus et du vin.
2. Fermentation : les ferments sans OGM sont ajoutés au substrat, permettant une pré-
digestion des fibres, une amélioration des protéines, une consommation des sucres et
autres facteurs anti-nutritionnels, ainsi que l'introduction de nouveaux arômes.
3. Séchage : Après l'étape de fermentation, le produit est séché pour obtenir un concentré
de nutriments.

La gamme Ferment'Up de Green Spot comprend plusieurs produits :

• Ferment'Up Tomate : produit à partir de marc de tomate, naturellement concentré en


fibres fermentées et apportant un goût umami. Il peut être utilisé comme texturant clean
label dans les produits de boulangerie et les sauces à base de tomates.
• Ferment'Up Céréales : produit à partir de drêches de brasserie, offrant un équilibre de
protéines complètes et de fibres solubles et insolubles. Il présente des notes de cacao
qui se marient bien avec les recettes chocolatées.
• Ferment'Up Pomme : issu des coproduits de pommes, ce produit offre une faible teneur
en sucre et une haute qualité en fibres, avec un goût subtil de fruits. Il peut être utilisé
dans les compotes de pommes et les produits de boulangerie.

Ces ingrédients offrent de nombreuses possibilités d'applications dans l'industrie alimentaire et


des boissons, telles que les barres énergétiques, les biscuits salés, les muffins, les sauces, les
recettes chocolatées, les analogues à la viande, etc.

Conclusion

Les enjeux des ferments sont nombreux et variés. Ces microorganismes jouent un rôle essentiel
dans la conservation des aliments, contribuant ainsi à réduire le gaspillage alimentaire. De plus,
ils améliorent la qualité sensorielle des produits, influençant texture, saveur et arôme pour
répondre aux attentes des consommateurs. Sur le plan nutritionnel, certains ferments, tels que
les probiotiques, offrent des avantages pour la santé, renforçant le système immunitaire et
améliorant la digestibilité des aliments. L'innovation et la diversification des produits
alimentaires sont également des enjeux majeurs, avec les ferments permettant la création de
nouvelles gammes de produits. Du point de vue de la durabilité, l'utilisation de ferments peut
contribuer à des pratiques plus respectueuses de l'environnement en réduisant l'emploi d'additifs

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chimiques. Cependant, la complexité des processus de fermentation, les normes réglementaires
strictes et la nécessité d'une expertise technique représentent des défis importants pour
l'industrie agroalimentaire. En résumé, les enjeux des ferments englobent des aspects
économiques, nutritionnels, environnementaux et réglementaires, reflétant ainsi leur
importance dans la fabrication alimentaire contemporaine.

Ressources bibliographiques

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Pratiques en Nutrition : santé et alimentation, 2021, 17 (68), pp.8-12.
https://hal.science/hal-03455468/document
• Le potentiel insoupçonné des aliments fermentés. Tiré à part de la revue d’INRAE #3
(décembre 2022).
https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/RESSOURCES%233_TAP_ALIMENTS_F
ERMENTES_V4.pdf
• Marie-Claire Frédéric, Ni cru ni cuit. Histoire et civilisation de l'aliment fermenté, Paris,
Tallandier, coll. « Texto », 2023, 400 p.
• Sandor Ellix Katz, The Art of Fermentation : An In-Depth Exploration of Essential
Concepts and Processes from around the World, Chelsea Green Publishing, 2012, 528
p.
• Selim Silbir, Yekta Goksungu. Natural Red Pigment Production by Monascus
Purpureus in Submerged Fermentation Systems Using a Food Industry Waste: Brewer's
Spent Grain (2019). https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31083556/
• Duchiron F., Legin-Copinet E. (2019). Fermentation en milieu solide (FMS). Journal de
Techniques de l’Ingénieur, Paris. Réf. BIO620. https://www.techniques-
ingenieur.fr/base-documentaire/procedes-chimie-bio-agro-th2/concepts-equipements-
et-biosecurite-42164210/fermentation-en-milieu-solide-fms-bio620/
• Javourez U., Rosero Delgado E.A., Hamelin L. et al. (2022) Upgrading agrifood co-
products via solid fermentation yields environmental benefits under specific conditions
only. Nat Food. https://doi.org/10.1038/s43016-022-00621-9

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