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Le Temps Et Le Bonheur

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LE TEMPS ET LE BONHEUR

INTRODUCTION
La vie humaine est animée par une recherche : celle du bonheur. Il existe des bonheurs
fugaces et des bonheurs plus durables. Les joies et les peines se mélangent dans
l’existence. Mais la vie a une durée limitée.
Dans ce laps de temps, quelle place prend le bonheur ? Si l’Homme sait qu’il est voué à
disparaitre, peut-il tout de même être heureux ? Une vie sans peine peut-elle être
comblée de bonheur ?
1) Le bonheur
Le bonheur vient du latin « bonus hora » qui signifie la bonne heure. Hora renvoie
également à l’augure, un signe favorable des dieux. Le bonheur est le fait d’atteindre
une satisfaction ou un plaisir total parfait. C’est le fait d’accéder à une perfection (un
achèvement).
La personne qui a du bonheur est heureuse. Les plaisirs, les réussites, les relations
fortes nous permettent d’être heureux. Tout cela permet de bons moments, des
bonheurs, mais pour combien de temps ?
2) Le temps
Il est difficile de donner une définition du temps satisfaisante. Il faut généralement
plutôt désigner ses caractéristiques. Le temps se divise en trois modalités : passé,
présent, avenir. Nous pouvons connaître des durées, c’est-à-dire des notions du temps
qui s’écoulent : seconde, minute, heure, journée, mois, année, siècle et vie (naissance-
mort). Nous pouvons également expérimenter une qualité de rapport au temps qui
passe :
- L’ennui : le temps est long/lent
- L’angoisse : la peur pour l’avenir
- Le manque et la nostalgie : le passé peut m’attrister
- « Il y a beaucoup à faire, je n’ai pas vu le temps passé » : la présence intense,
c’est l’inverse de l’ennui
Si le bonheur vise une satisfaction totale, le temps permet-il d’en faire véritablement
l’expérience ? On peut se demander : dans quelle mesure a-t-on le temps d’être
heureux ? Le bonheur peut-il être véritablement durable ?
I. Le véritable bonheur est au-delà des apparences
SAINT-AUGUSTIN
1) Le temps, une expérience trompeuse – Les Confessions
Rappelons que le temps se divise en trois modalités, mais que ces modalités n’ont pas
toutes la même importance.
Le passé, selon Saint-Augustin, comme son nom l’indique, est révolu. Il ne peut donc
pas être un lien de satisfaction. Le passé engendre le regret du bon temps, le remord
de ce qui n’a pas marché et la tristesse de ce qui nous manque.
L’avenir, quant à lui, n’est pas encore là, il vient, on l’attend. Mais pour Saint-Augustin,
cette attente est le lieu de l’angoisse, de la frustration, puisque nous n’avons aucune
prise sur l’avenir.
Par conséquent, le seul véritable temps est le présent. Mais vivre l’instant présent sans
penser au passé ni se soucier de l’avenir n’est possible qu’à condition de se tourner
vers Dieu.
2) Un bonheur spirituel – La vie heureuse
Pourquoi se tourner vers Dieu selon Saint-Augustin ? Parce qu’il est parfait. Saint-
Augustin nous dit que l’existence humaine est imparfaite. Lorsque nous utilisons notre
intelligence pour vivre sans Dieu, nous tombons dans la luxure, l’orgueil et la tentation
du pouvoir. Autrement dit, user de son esprit seulement pour soi-même n’est pas
satisfaisant pour Saint-Augustin.
L’esprit tend naturellement à rechercher des plaisirs et des joies fugaces et vaines. Les
amitiés ne durent pas, la richesse s’écoule, la nourriture se consomme, la vie humaine
s’achève à tout instant. Le seul qui demeure, c’est Dieu, car il est éternel, c’est-à-dire
hors du temps qui passe. Il est immuable.
Saint-Augustin nous invite donc à contempler Dieu (l’amour véritable) afin de connaître
ce qui est vrai et afin d’user de notre esprit pour des choses durables et des joies
parfaites : la fraternité, l’humilité, le partage, l’engagement au service des autres.

TRANSITION : Il ne faudrait se soucier que du présent tout en se tournant vers Dieu


pour être heureux durablement. La chose n’est pas si simple. Notre présent est
toujours lourd du passé et pris dans l’attente de l’avenir. De plus, si Dieu est une quête
possible du bonheur, pour autant, l’Homme peut être pris de désirs et d’envie pour
d’autre réalité présente dans son existence.
II. Le bonheur tend à faire souffrir dans un temps vain
1) Entre la souffrance et l’ennui – Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme
représentation

La vie humaine oscille sans cesse entre le désir et la souffrance, et l’ennui lié à
l’absence de désir.
Le désir est la sensation de manque de quelque chose ou de quelqu’un qui pousse le
sujet à vouloir le combler afin d’être heureux.
L’Homme, pour Schopenhauer, est tel un pendule oscillant entre la souffrance et
l’ennui. D’abord, il souffre de désir, de manque de ce qu’il n’a pas, de ce qu’il convoite.
Puis vient la joie d’avoir obtenu l’objet de son désir. Mais la joie est courte et laisse
ensuite la place à l’ennui. L’ennui est le fait de ne plus avoir de désir ni de quête pour
sa vie une fois que nos objectifs sont atteints. On sombre alors dans le regret du désir
perdu. Le schéma se répète.
Nous convoitons de nouveau pour ensuite nous ennuyer une fois le désir assouvi. Pour
quitter ce cercle sans fin, il faut renoncer au désir et à la quête d’un bonheur fugace
qui ne génère que souffrance et ennui. Il ne faudrait apprécier que le fait de ne rien
posséder et de ne rien attendre de la vie.
2) La misère du temps présent – Pascal, Les Pensées
Nous vivons dans le temps présent mais nous ne l‘apprécions jamais vraiment. Notre
présent est toujours rempli de souvenirs du passé (nostalgie, remord, regret) et de
l’attente de l’avenir (angoisse, désir, impatience, espérance). Pourquoi ne parvient-on
pas simplement à savourer le temps présent ? Selon Pascal, c’est parce que l’Homme
est un être qui ne supporte pas sa misère. La misère de l’Homme, pour Pascal, c’est sa
condition de vie (pauvreté, maladie, échec, mort, ennui, travail, les problèmes du
quotidien).
Citation de Pascal : « Misère de l’Homme sans Dieux »
Pour échapper à sa misère, l’Homme se divertit. Se divertir signifie se détourner,
regarder ailleurs. Personne ne veut regarder sa misère et l’assumer, c’est
insupportable. Ainsi, à chaque fois que l’Homme le peut, il cherche le divertissement
pour se rassurer et oublier sa condition misérable : le jeu, les spectacles, l’humour, la
morale, les engagements.

TRANSITION : Comment faire pour supporter les misères de notre condition ?


Comment accepter les frustrations liées aux plaisirs et bonheurs fugaces ? Cherchons
comment accepter que la vie ne soit pas aussi géniale que nous ne l’espérions ni aussi
misérable que nous pourrions le craindre.

III. Existence finie et temps infini


LEVINAS, Totalité et infini
1) Jouissance et désir de l’autre
Notre désir au fond se porte toujours sur un autre. Parfois, cet autre est une personne,
parfois, cet autre est un objet, mais c’est toujours autre chose que soi-même.
Personne ne se désire lui-même, on ne se suffit pas à soi-même.
La jouissance est le fait de ramener l’autre à soi pour être heureux (possession).
Exemple : Je peux jouir d’une amitié car elle me permet de ne pas être seul. Je peux
jouir de ce que je possède parce que cela me permet de faire des choses et de paraître
meilleur.
La jouissance nous recentre sur nous-même mais le désir est frustrant parce qu’il nous
fait toujours éprouver du manque. Lorsque je désire l’autre, être avec lui, je ne peux
jamais être parfaitement satisfait parce que je ne le possède pas. Je peux le posséder
pour un temps mais cela ne dure jamais.
Pour Levinas, nous devons dépasser le désir de jouissance pour désirer l’autre en tant
qu’autre. Cela signifie accepter de ne pas pouvoir sans cesse être satisfait, accepter
que l’autre nous échappe. Selon Levinas, le désir n’est pas ce que nous devons toujours
combler. Il faut accepter d’être heureux de désirer sans être totalement satisfaits.
2) Un temps fini
Notre vie ne dure pas, nous savons que nous mourrons un jour. Par conséquent, notre
durée de vie est finie, limitée. De ce fait, nous ne pouvons être pleinement satisfaits
de ce que nous vivons, faisons. Or, il existe un moyen de s’inscrire dans un temps
infini, c’est-à-dire dans un temps plus durable que notre seule existence, c’est de
transmettre. Levinas nous dit que le véritable n’est pas le temps individuel mais le
temps avec les autres. Par exemple, si j’ai des amis, je peux leur apporter de la joie,
ainsi, même si je suis amenée à disparaitre, j’ai la satisfaction de laisser quelque chose
à d’autre.
Exemples de transmission : l’héritage, un message, des souvenirs heureux.
Le vrai bonheur qui demeure, c’est celui qui se transmet à d’autres. Le temps véritable
est infini, continu. Après nous, il y aura d’autres personnes. Qu’est-ce que nous
désirons laisser au suivant ?

CONCLUSION
Nous constatons qu’il est difficile, voire impossible, d’avoir un bonheur parfait. Mais si
le bonheur consiste à n’avoir aucune peine ni aucune frustration, est-ce vraiment un
bonheur ? Une fois admis que la déception et la tristesse font partie de la vie, il nous
faut trouver comment préserver intérieurement la joie (même si elle est révolue).
Le temps passe, que choisissons-nous de garder du passé : les bons ou les mauvais
souvenirs ? Qu’attendons-nous de l’avenir ? Choisissons de préparer un bel avenir à
partager avec les autres. L’expression « prendre le temps » n’est pas absurde.

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