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“Connais-toi toi-même !
”, l’injonction célèbre inscrite sur le
temple de Delphes et, reprise par Socrate nous donne un défi en même temps qu’elle nous donne un précieux conseil. On conçoit tout l’intérêt qu’il pourrait y avoir à mieux se connaître : à prendre conscience de ses forces et de ses faiblesses, par exemple Emmanuel Kant aborde le concept de la conscience morale, qu’il définit comme un « tribunal intérieur ». Cette conscience morale, qui juge nos actions et nos pensées, soulève des questions profondes sur la nature de l’éthique et de la liberté individuelle. Le thème central de ce texte est donc la conscience morale comme instance de jugement interne et universelle. Kant explore ici la nature de la conscience morale et la manière dont elle s’impose à l’individu. Le problème sous-jacent est de comprendre comment la conscience morale exerce une autorité sur l’individu, alors même qu’elle est en quelque sorte, une partie de soi. Kant explore le conflit entre les désirs individuels et les impératifs moraux, l’importance de l’autonomie et de la raison dans l’éthique, et l’universalité de la loi morale. En cela, il propose une vision de l’être humain comme moralement responsable, capable de s’auto-juger en vertu d’une loi rationnelle partagée par tous. Afin d’établir cette thèse, Kant définit la conscience morale comme un tribunal intérieur propre à tout individu de la ligne 1à 5. Ensuite, il aborde la persistance de cette conscience, inévitable malgré les tentatives d'échappatoire de la ligne 5 à 9. Enfin, il décrit le caractère rationnel et impératif de la conscience, qui pousse l'individu à agir comme s'il recevait l’ordre d’une autorité supérieure de la ligne 10 à la fin du texte.
Kant décrit la conscience morale comme un "tribunal
intérieur" où les pensées de l'homme s'accusent ou se disculpent mutuellement. Ce tribunal est une métaphore puissante qui illustre le processus d'auto-évaluation et d'auto-jugement. Pour Kant, la conscience morale n'est pas une simple disposition subjective ou arbitraire, mais une structure intérieure qui fait partie intégrante de la nature humaine. C'est une sorte de juge intérieur qui observe et évalue nos actions et nos pensées en fonction d'une norme morale. Cette conception de la conscience comme tribunal intérieur reflète l'idée que la morale kantienne est fondée sur l'autonomie et la responsabilité personnelle. Selon Kant, chaque individu est capable de juger ses propres actions en se conformant à une loi morale universelle. Ce tribunal intérieur symbolise donc la capacité de l'individu à se référer à cette loi morale et à se soumettre à un jugement interne, indépendamment de tout jugement extérieur. Il ne s'agit pas d'une simple voix intérieure que l'on pourrait ignorer à loisir ; c'est une instance à la fois impérieuse et inéluctable. En opposition à Kant, Pour Sigmund Freud, la conscience morale correspond à ce qu’il appelle le Surmoi, qui est formé par l'intériorisation des interdits et des valeurs inculquées par les parents et la société. Dans cette perspective, la conscience morale n'est pas une disposition naturelle ou universelle, mais un produit de l'éducation et des normes sociales. Le Surmoi fonctionne également comme une instance jugeante, produisant des sentiments de culpabilité et de honte lorsque l’individu enfreint ces normes. Par exemple, une personne pourrait ressentir de la culpabilité pour des actions que sa culture ou sa famille lui ont appris à considérer comme mauvaises, même si elles ne le sont pas en soi. Cela montre que la conscience morale, pour Freud, est dépendante des normes extérieures et ne peut donc pas être considérée comme universelle. Kant utilise l’image du tribunal pour suggérer que la conscience morale n’est pas une simple intuition ou un ressenti passager. Elle est au contraire structurée, comme une véritable instance judiciaire interne, qui fonctionne de manière autonome. Le choix du terme « tribunal » indique que cette conscience morale suit un processus de jugement organisé : les pensées, comme des individus au tribunal, peuvent être accusées ou défendues. Ce tribunal est donc un lieu de confrontation, où des normes, semblables à des lois, sont appliquées. Dans ce tribunal intérieur, c’est l’individu lui-même qui assume le rôle de juge et d’accusé, un concept central de l'éthique kantienne. La conscience morale n’est pas dictée par des pressions sociales ou par des impératifs extérieurs ; elle relève d'une autonomie personnelle. Cette autonomie, qui est la capacité de se donner à soi-même des lois morales, signifie que l’individu est responsable de sa propre moralité, indépendamment des jugements ou récompenses externes. L’expression « ses pensées s’accusent ou se disculpent » souligne que la conscience morale implique une évaluation critique de soi-même. Ce processus d’auto-évaluation requiert de la part de l’individu un retour sur ses pensées et ses actions, où il examine s'il a respecté les lois morales universelles qu’il s’impose à lui-même. La capacité d’auto-accusation démontre l'existence d'un sens moral intrinsèque, où l’individu ne peut échapper à l’obligation de se juger selon des principes rationnels.
La phrase de Kant « Le sentiment d’un tribunal intérieur en
l’homme (…) correspond à la conscience morale » exprime donc l’idée que la moralité n’est pas une construction sociale ou subjective, mais une exigence inhérente à la nature rationnelle de l’homme. Ce tribunal intérieur incarne le devoir moral comme un impératif universel qui guide l’individu et le responsabilise, révélant ainsi une dimension profonde de la liberté morale chez l’homme.
Dans cette seconde partie, Kant décrit la conscience
morale comme un « juge intérieur » qui impose à l’homme une autorité morale quasi absolue. Ce juge est une instance qui, de l’intérieur, évalue et « observe » l’individu, inspirant à celui-ci un mélange de respect et de crainte. Ce respect n’est pas motivé par des récompenses ou punitions externes ; il est lié à la reconnaissance d’une loi morale inhérente et supérieure, une loi qui s’impose comme un impératif de devoir. La crainte ressentie n’est pas irrationnelle, mais une crainte « morale », qui témoigne de la grandeur et de la solennité de la loi morale en elle-même. Cette crainte respectueuse, chez Kant, est fondamentale : elle marque le poids des exigences morales qui dépassent les simples inclinations personnelles. L’individu ressent la puissance du devoir moral comme un rappel incessant de sa responsabilité à agir selon des principes universels, indépendamment de ses désirs ou intérêts. Kant insiste sur le caractère inévitable et inné de cette conscience morale, qu’il décrit comme « incorporée dans son être ». Contrairement à une construction sociale ou à un jugement que l’individu pourrait façonner selon sa volonté, la conscience morale fait partie de la structure rationnelle de l’homme. Elle est donc une caractéristique essentielle de son humanité. La conscience morale n’est pas une voix que l’on choisit d’écouter ou d’ignorer à loisir ; elle est une force qui émerge de la raison elle-même, et l’individu ne peut s’en détourner sans renoncer à sa propre nature rationnelle. Cette idée repose sur la notion d’autonomie morale : pour Kant, l’homme, en tant qu’être rationnel, se donne à lui- même la loi morale. Mais cette autonomie n’est pas une liberté de choisir ou non d’être moral ; c’est une loi intrinsèque à l’être humain, qui, même en tentant de l’oublier ou de la négliger, finit par ressurgir. Nietzsche, dans La généalogie de la morale, va plus loin en critiquant la notion même d’une conscience morale universelle. Selon lui, la conscience morale est le produit de l’histoire et des rapports de pouvoir. La culpabilité et la honte, qu’il nomme « mauvaise conscience », sont, d’après lui, des outils utilisés par les religions et les sociétés pour contrôler les individus. Pour Nietzsche, la conscience morale n’est pas une instance naturelle ou universelle, mais un mécanisme social qui vise à maintenir les individus dans un état de soumission aux valeurs dominantes. Par exemple, la culpabilité ressentie par une personne qui ne suit pas les normes religieuses démontre, selon Nietzsche, que la conscience morale est façonnée par des forces extérieures, et non par une loi intérieure.
Kant utilise ici des métaphores frappantes : la conscience
morale est comparée à une ombre qui suit l’individu et à une « voix terrible ». L’ombre symbolise son caractère inévitable et omniprésent. Même si l’homme essaie de s’échapper par des plaisirs ou des distractions, cette conscience revient toujours à lui. La « voix terrible » indique la force avec laquelle elle rappelle les obligations morales, même dans des moments d’évasion. Ces métaphores suggèrent l’idée d’une dualité en l’homme : une partie de lui peut chercher à fuir les responsabilités morales, mais la conscience morale, comme une partie plus profonde et plus authentique de son être, persiste et se fait entendre. En d’autres termes, la conscience morale est inaltérable et inébranlable, ancrée dans la raison humaine, et elle contraint l’individu à affronter ses actions en les jugeant. Kant mentionne que l’homme peut atteindre un état d’« extrême abjection », une situation où il négligerait volontairement cette voix intérieure et n’en ressentirait plus l’autorité. Cependant, même dans ce cas, il ne peut cesser d’entendre cette voix. La conscience morale reste, selon Kant, toujours présente, même si l’homme tente de l’ignorer ou de l’amoindrir. Ce passage révèle une conviction profonde : la moralité est indissociable de la nature humaine, et la voix de la conscience est une expression essentielle de l’autonomie de la raison humaine. L’homme peut sombrer dans l’immoralité, mais il ne peut totalement éviter la conscience du mal moral, car cette voix est la manifestation d’une rationalité autonome qui exige de l’individu qu’il s’accorde avec sa propre dignité morale.
Pour Kant, la conscience morale est donc un « juge
intérieur » incontournable, une force rationnelle et morale ancrée dans l’être humain. Elle représente un impératif intérieur qui dépasse les influences sociales ou les désirs individuels. Ce tribunal intérieur, source de respect mêlé de crainte, constitue une part indissociable de la raison humaine, symbolisant l’autonomie morale de l’individu et sa capacité à se juger selon des principes universels. La conscience morale incarne ainsi la voix de la raison pratique, qui rappelle à l’homme qu’il est tenu de se comporter conformément aux lois morales, même s’il peut parfois tenter de les éluder. Dans cette dernière partie, Kant aborde la nature paradoxale de la conscience morale. Il la qualifie de « disposition intellectuelle originaire », c’est-à-dire une inclination fondamentale de l’esprit humain, intimement liée à la notion de devoir. Kant explore ici la dimension contraignante de la conscience morale, qui, bien qu’intrinsèque à la raison de chaque individu, s’impose comme une autorité étrangère, presque extérieure, à laquelle il doit obéir.
Kant décrit la conscience comme une disposition
intellectuelle originaire, ce qui signifie qu’elle n’est ni une construction sociale ni un ensemble de règles imposées de l’extérieur. Cette conscience morale est innée, intégrée à la structure de la raison humaine. Elle ne dépend ni des expériences personnelles ni des normes culturelles ; elle est présente dès l’origine en tant qu’expression directe de la raison humaine. En appelant la conscience « originaire », Kant veut dire qu’elle est un fondement de la moralité elle-même, un guide interne qui informe l’individu de ce qu’il doit faire. Elle ne relève pas d'une simple intuition ou d'une sensibilité morale fluctuante : elle est une inclination naturelle de la raison humaine à se conformer au devoir moral.
Pour Kant, la conscience morale est la représentation du
devoir dans la raison humaine. Cela signifie qu’elle incarne les impératifs moraux auxquels l’homme doit se conformer, indépendamment de ses désirs ou intérêts personnels. La conscience n’est pas une force affective, elle est la représentation claire et contraignante de ce que la raison considère comme moralement juste. En d’autres termes, la conscience est l’expression même de la loi morale en nous, qui se manifeste sous forme d’impératifs, des exigences que la raison impose à l’individu. Cette conscience du devoir confère à la moralité un caractère absolu et universel. Elle rend l’homme conscient de ses obligations, lui permettant de se juger et de se diriger selon des principes universels et non pas selon des inclinations subjectives. Kant veut ici souligner que la conscience est le moyen par lequel l’individu prend connaissance de son devoir moral.
Un aspect paradoxal de cette conception de la conscience
est qu’elle amène l’individu à agir « comme sur l’ordre d’une autre personne », bien que ce ne soit que lui-même qu’il juge et dirige. Cet élément de l’analyse révèle une dualité dans l’expérience morale kantienne : la conscience morale est un produit de la raison de l’individu, mais elle s’impose à lui avec une force telle qu’elle prend l’apparence d’une autorité extérieure, une sorte de « voix supérieure » à laquelle il doit obéir. Cette dimension, à la fois interne et contraignante, montre que la conscience morale a une force impérative similaire à celle d’un ordre émanant d’une autre personne. Cela résulte du fait que la moralité est objective et universelle : bien que la loi morale soit édictée par la raison humaine, elle s’impose de manière impersonnelle, comme si elle provenait d’une autorité externe. En obéissant à cette loi, l’individu agit donc selon une rationalité autonome, mais cette autonomie ne se ressent pas comme une simple expression de soi ; elle prend l’apparence d’une soumission à une norme objective, comme si elle provenait d'une « autre personne ».
La phrase de Kant met en évidence la tension entre
autonomie (la capacité de se donner des lois à soi-même) et hétéronomie (l’obéissance à une autorité extérieure). Bien que l’homme soit l’auteur de ses propres lois morales, il éprouve en même temps une obligation qui semble extérieure, car ces lois sont universelles et ne dépendent pas de sa volonté personnelle. Kant démontre que l’homme, en tant qu’être rationnel, ne peut pas ignorer la conscience morale. En agissant selon cette voix interne, il obéit à une loi qui, bien qu’émanant de lui-même, transcende sa subjectivité et lui apparaît comme impérative. Cette dualité est caractéristique de l’éthique kantienne : l’autonomie morale conduit à une obligation ressentie comme venant d’une autorité supérieure, mais cette autorité n’est autre que la propre raison de l’individu.
Dans ce passage, Kant exprime donc la conception d’une
conscience morale qui, bien qu’intrinsèque et produit de la raison, impose ses impératifs avec une autorité telle qu’elle semble étrangère. La conscience morale est l’illustration de l’autonomie de la raison humaine, qui édicte des lois universelles auxquelles l’homme est tenu d’obéir comme à des ordres impératifs. Cette vision montre toute la complexité de la moralité kantienne, dans laquelle l’individu est à la fois l’auteur et le sujet de la loi morale, agissant librement tout en ressentant l’autorité de cette « autre personne » en lui-même.
En somme, ce texte de Kant dépeint une conception de la
conscience morale qui transcende l’individu : elle est à la fois la voix de la raison et l’expression d’une loi universelle qui structure la nature humaine et qui invite chaque être rationnel à se conformer à des principes moraux indépendants de ses intérêts personnels.