Livret-juridique-2018
Livret-juridique-2018
Livret-juridique-2018
Agressions sexuelles
Faire valoir vos droits
Edition 2018
0
Notes
1
Préface
2
Données statistiques
- 37% sont des conjoints vivant avec la victime au moment des faits,
- 36% sont des agresseurs connus ne faisant pas partie du ménage
de la victime,
- 17% des agresseurs vivent avec la victime sans être leur conjoint,
- 10% sont inconnus.
1
Enquête « Cadre de vie et sécurité » - INSEE - ONDRP – 2010-2015
3
Violences et viols conjugaux
2
Etude nationale sur les morts violentes au sein de couple, année 2014, Délégation aux
victimes, Ministère de l’Intérieur.
3
Lettre 8 « Violences faites aux femmes : principales données », Observatoire national des
violences faites aux femmes.
4
Sommaire
5
Les premières démarches
6
-
7
La consultation médicale
8
Si vous redoutez dans l’immédiat un examen médical et n’étiez pas
protégée par un moyen contraceptif au moment du viol, n’oubliez pas
de prendre une contraception d’urgence4 et de faire un test de
grossesse (à partir de 15 jours après le viol par examen sanguin, ou de
3 semaines avec un test urinaire).
Par ailleurs, le médecin pourra vous orienter vers une aide
psychologique adaptée aux conséquences post-traumatiques de la
violence sexuelle.
4
La contraception d’urgence et le test de grossesse sont délivrés sans ordonnance en
pharmacie ou dans un centre de planification familiale.
9
Même si vous n’avez pas porté plainte, ne négligez pas votre
santé, consultez un médecin.
10
Le dépôt de plainte
ü Le cheminement de la plainte
Afin que l’agresseur réponde de ses actes devant la justice et que vous
obteniez réparation, vous devez porter plainte.
En effet, les viols et agressions sexuelles sont des crimes ou des délits
graves. Ils ne relèvent pas seulement d’une « main courante ».
11
Toute personne accusée de crime ou de délit reste, jusqu’au
jugement, présumée innocente et a droit, de ce fait, à une défense.
Selon le moment de la procédure et la juridiction compétente,
l'agresseur ou mis en cause sera désigné par les termes de ‘mis en
examen’ (phase de l’instruction), ‘prévenu’ (procédure devant le
Tribunal correctionnel), ou ‘accusé’ (procédure devant la Cour
d’assises). Il sera toujours accompagné d'un avocat.
Lorsque vous portez plainte (à la police, à la gendarmerie
ou par lettre au Procureur de la République), vous informez
la justice et vous déclenchez une procédure, dans laquelle
vous avez le rôle de témoin.
12
Lors de votre déposition, autrement dit quand vous allez être écoutée
par un officier, vous pouvez demander à être entendue
dans un endroit calme et éventuellement par une femme
ou en présence d’une femme.
Si cela est nécessaire, vous pouvez demander de recourir à un
interprète pour la traduction de la plainte.
Il vous faudra faire le récit de tout ce qui s’est passé et qui a abouti à
l’agression.
Où ? Quand ? Comment ? Etiez-vous seule ou accompagnée ?
Qui a pu être témoin ?
Comment l’agresseur vous a contactée ? Vous a-t’il dit quelque
chose ? Quand avez-vous eu peur ?
Vous a-t’il menacée ? Brutalisée ? Qu’avez-vous craint ? Que
vouliez-vous faire ?
Des éléments indiquent-ils un piège prémédité : l’utilisation
éventuelle d’alcool, de drogues, la contrainte, vos réactions de
défense, la peur qui vous a paralysée, le viol, les sévices, les paroles
ou insultes.
Comment s’est terminée l’agression ? De quoi avez-vous peur
maintenant ? Qu’avez-vous fait après l’agression : vos craintes, vos
doutes, vos recherches pour trouver de l’aide, vos préoccupations.
13
Si l’agression est récente, les enquêteurs, avant de prendre votre
déposition, peuvent vous envoyer d’abord vers un médecin légiste
(cf. p8).
Pendant votre audition, il peut arriver que l’enquêteur ne reprenne
pas exactement les termes que vous avez employés. Vous pouvez
le lui faire rectifier.
Sachez que vous n’êtes pas obligée de répondre à des questions
concernant votre vie privée ou sexuelle, si elles sont sans rapport avec
les faits.
Avant de signer le procès-verbal, prenez le temps de le relire
attentivement afin de vérifier que le document décrit bien l’agression
et l’agresseur. N’hésitez pas éventuellement à faire compléter votre
déposition, même quelques jours ou quelques semaines plus tard,
pour y intégrer des faits qui vous sont revenus en mémoire.
Il est recommandé de demander une copie de votre plainte et de
noter le numéro de la plainte. Vous pouvez également demander les
coordonnées de l’officier qui vous a entendue, afin de pouvoir lui
apporter d’autres précisions ultérieurement. Après votre déposition,
notez ou enregistrez-en le contenu, afin d’en conserver la mémoire
pour le reste de la procédure.
Parler de l’agression à un proche, à une association ou à la
permanence « Viols - Femmes - Informations 0 800 05 95 95 »
peut vous aider à rassembler vos souvenirs.
14
Sachez que le Procureur pourra demander que vous soyez entendue
par les services de police ou de gendarmerie, pour une déposition plus
complète. Cela vous laissera le temps de vous y préparer.
Pour écrire votre lettre, vous pouvez vous faire aider par un avocat,
qui peut être pris en charge financièrement par l’aide juridictionnelle
(cf. p20)5. Il existe aussi des conseils juridiques gratuits auprès de
certaines mairies ou dans les bureaux ou associations d’aide aux
victimes de votre département.
5
Se renseigner auprès du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de votre lieu de résidence
ou en mairie.
6
Modèle en téléchargeant le Cerfa_11527-02 sur internet.
15
Accompagnez éventuellement votre lettre d’un certificat médical
et de tous les éléments de preuve que vous avez en votre possession
(témoignages directs ou indirects, lettres de l’agresseur, etc.). Gardez
les doubles de tous vos documents et l’accusé de réception.
16
Si vous avez déjà l’aide juridictionnelle (cf. p20), cette consignation
peut être prise en charge de la même manière.
17
Il est encore possible de se constituer partie civile en se présentant
personnellement le jour du procès, mais votre intérêt est de le faire
plus tôt.
Votre avocat, une association, ou le bureau d’aide aux victimes
sauront vous conseiller pour formuler votre demande
d’indemnisation.
Certaines associations de lutte contre les violences sexuelles
peuvent se constituer partie civile à vos côtés, pour soutenir votre
parole et renforcer votre demande de justice. Cette association
doit : être habilitée par ses statuts à se constituer partie civile auprès
de victimes d’agressions sexuelles, avoir plus de 5 ans d’existence
au moment des faits incriminés et avoir reçu votre autorisation.
Sans se porter partie civile, d’autres associations de soutien
ou d’aide aux victimes peuvent vous accompagner lors du procès,
pour vous soutenir et vous aider.
18
concernant l’agression, il pourra être placé en détention provisoire ou
laissé en liberté sous contrôle judiciaire.
Le contrôle judiciaire peut comporter plus de 12 mesures imposées au
mis en cause, comme par exemple l’interdiction d’approcher de votre
domicile ou lieu de travail, de se mettre en relation avec des membres
de votre famille, etc. Demandez les dispositions prises par le juge, et
signalez aux autorités tout manquement éventuel aux obligations du
contrôle judiciaire.
19
remboursement au condamné. Vous ne paierez pas les frais
d’expertise.
Certains contrats de mutuelle ou d’assurance incluent une protection
juridique, qui peut couvrir vos frais de justice. Renseignez-vous auprès
de ces organismes.
L’aide juridictionnelle
Si vos ressources sont insuffisantes, l’Aide Juridictionnelle (AJ) prend
en charge partiellement ou intégralement vos frais de justice : avocat,
consignation, expertises etc. Il faut pour cela remplir un dossier de
demande d’AJ (en mairie ou au bureau d’aide juridictionnelle du
Tribunal de grande instance). Pour le remplir, vous pouvez vous faire
aider par une association d’aide aux victimes ou par votre avocat.
L’aide juridictionnelle peut être accordée aux personnes de nationalité
française ou aux personnes étrangères en situation régulière en
France ou étrangères en situation irrégulière si vous êtes partie civile
ou « lorsque leur situation apparaît particulièrement digne d'intérêt
au regard de l'objet du litige ou des charges prévisibles du procès »7.
L’AJ est accordée sans conditions de ressources aux victimes
de viols, de torture ou d’actes de barbarie (de manière
générale pour les victimes de crimes).
Vous choisirez votre avocat sur la liste d’avocats acceptant l’aide
juridictionnelle établie par le Barreau du tribunal, à moins qu’un
avocat que vous connaissez accepte l’aide juridictionnelle.
Une avance d’indemnisation peut éventuellement vous être accordée.
Pour cela, vous devez présenter une requête devant la Commission
d’indemnisation des victimes d’infractions (cf. p32).
7
En vertu de l’article 3 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
20
Le déroulement de la procédure
ü L’enquête
Informé de votre plainte, le Procureur de la République ordonne une
enquête de police ou de gendarmerie. Dans ce cadre, vous allez être
convoquée, peut-être à plusieurs reprises, pour toutes les questions
destinées à clarifier les circonstances du viol.
Si l’agresseur vous était inconnu et que plusieurs suspects ont été
interpellés, on peut vous demander de l’identifier sur des
photographies ou derrière une glace sans tain. La recherche et
l’identification du mis en cause sont aujourd’hui facilitées de deux
façons :
- Les enquêteurs vont procéder à la comparaison informatique de
votre déposition avec celles d’autres victimes éventuelles du
même agresseur. On parle de recoupement de modes
opératoires. En effet, un agresseur opère souvent de la même
façon avec plusieurs victimes.
- Si les enquêteurs ont pu recueillir des empreintes génétiques ou
digitales de l’agresseur, ils vont pouvoir effectuer des
comparaisons de celles-ci avec des bases de données comme celle
des agresseurs sexuels déjà fichés.
Une fois que le mis en cause, connu ou inconnu, a été identifié, il est
interrogé par les enquêteurs, éventuellement dans le cadre de ce
qu’on appelle une « garde à vue ». Il peut y avoir perquisition à son
domicile ou son lieu de travail et saisie d’objets, placés sous scellés.
S’il nie les faits, on peut vous proposer une confrontation qui
permettra aux enquêteurs de confronter votre version des faits à celle
de l’agresseur. Vous pouvez indiquer que cette étape de l’enquête
vous est difficile : demandez aux enquêteurs comment ils procèdent,
faites part de vos craintes.
21
Si le mis en cause est placé en garde à vue ET que dans cette période
une confrontation avec vous est organisée, il a déjà droit d’être
assisté de son avocat. Dans ce cas seulement, vous aurez aussi le droit
à la présence de votre avocat dans cette phase de la procédure.
Dans tous les cas, la police ou la gendarmerie doit vous informer de
votre droit à vous constituer partie civile et à obtenir réparation du
préjudice subi, ainsi que de la possibilité d'être aidée par une
association locale d'aide aux victimes, dont les coordonnées doivent
vous être communiquées au moment où vous déposez votre plainte.
Vous avez le droit d’obtenir une copie de votre plainte.
Il est recommandé de conserver une copie de votre plainte dans vos
documents personnels et de noter le numéro de la plainte.
L'enquête est ensuite transmise au Procureur de la République ou à
son substitut. C'est ce magistrat qui va qualifier juridiquement les
agressions et décider ou non des poursuites.
22
Une instruction
En confiant votre affaire à un juge d'instruction qui vous convoquera
afin d'approfondir l'enquête. L’instruction est obligatoire pour les
viols, les agressions sexuelles avec circonstances aggravantes… En
principe, toutes les agressions avec contact physique font l’objet d’une
instruction.
Un renvoi direct au Tribunal correctionnel
S'il s'agit d'un délit (agression sexuelle autre que le viol), si le Procureur
estime que l'enquête de police ou de gendarmerie a fourni
suffisamment d'éléments pour poursuivre immédiatement le mis en
cause.
ü L'instruction
C'est une étape essentielle où le juge d'instruction recueille tous les
éléments nécessaires à la manifestation de la vérité, afin
qu'au moment du procès, le tribunal ou la cour juge en connaissance
de cause. Pendant l'instruction, il est recommandé d'être
accompagnée par un avocat.
Dans tous les cas, on doit vous informer de votre droit à vous
constituer partie civile, autant pour les demandes d’indemnisation
que pour l’accès au dossier d’instruction.
23
Durant l’instruction, le mis en examen peut être soit en liberté,
soit astreint à une ou plusieurs obligations de contrôle judiciaire,
soit en détention provisoire.
Le contrôle judiciaire peut prendre des formes variables : interdiction
au mis en cause de se rendre dans certains lieux ou d’entrer en contact
avec certaines personnes notamment la victime, obligation de se
soumettre à des mesures de soins, de fournir un cautionnement, etc.
La détention provisoire est ordonnée par le juge des libertés
et de la détention (JLD), pour conserver des preuves ou indices
matériels, empêcher la fuite, empêcher une pression sur les victimes
ou témoins, empêcher une concertation avec des complices,
prévenir une nouvelle agression, mettre fin à un trouble à l’ordre
public, éventuellement protéger la personne mise en examen.
Vous pourrez énoncer à nouveau devant lui tous les éléments qui
attestent votre non-consentement et qui doivent permettre de
démontrer que le mis en cause est l’agresseur : le chantage, les
menaces, les violences, vos mots ou gestes pour vous défendre, votre
peur, votre surprise et votre paralysie.
Si l’agresseur ou son entourage a fait pression sur vous pour que vous
ne portiez pas plainte ou que vous la retiriez, faites-en part au juge. Il
s’agit là d’une infraction pénale (cf. p45).
24
Le juge d’instruction peut aussi ordonner :
Une confrontation avec l’agresseur
La décision de vous constituer partie civile vous permet d’y être
accompagnée par un avocat. Vous serez ainsi en position d’égalité face
à l’agresseur qui, durant toute la procédure est assisté d’un avocat.
Sachez que, lors de la confrontation, c’est le juge d’instruction qui
pose les questions aux parties. C’est à lui que vous avez à répondre et
non directement à l’agresseur.
Une audition de témoins
Par exemple, les personnes auxquelles vous vous êtes confiée,
l’association de victimes à laquelle vous avez parlé ou autre lieu d’aide,
médecin, ou autres... qui peuvent confirmer votre version des faits et
les préjudices occasionnés.
Une reconstitution des faits, de façon exceptionnelle, avec transport
sur les lieux.
Une expertise psychiatrique ou psychologique
Le juge d’instruction demande à un psychiatre ou à un psychologue de
l’aider à apprécier les séquelles de l’agression et l’impact du
psychotraumatisme subi.
Cette expertise pourra servir à l’évaluation des préjudices
et à préparer votre demande de dommages et intérêts. Selon
les dossiers, il peut être préférable de la compléter par une autre
expertise plus précise après la condamnation de l’auteur.
Le juge ordonne également une expertise du prévenu pour évaluer
s’il présente des troubles mentaux, sa dangerosité et s’il est
responsable pénalement.
Une enquête de personnalité
Elle est effectuée par la police ou la gendarmerie, à la demande
du juge d’instruction, auprès de votre entourage. Cette enquête peut
permettre au juge de recueillir des informations de tiers
qui confirment le bouleversement qu’a suscité l’agression dans votre
25
vie ainsi que votre propre ressenti. Ces investigations permettront
au juge d’instruction de mieux appréhender le préjudice subi.
Une expertise médicale
Il est rare que le juge d’instruction ordonne cette expertise, car elle
a généralement été réalisée au moment de l’enquête préliminaire.
La phase d’instruction peut être longue. Toutefois, tous les six mois,
le juge d’instruction doit vous informer de l’avancement du dossier.
Si au bout d’un an (s’il s’agit d’une agression sexuelle autre que le viol)
ou de 18 mois (s’il s’agit d’un viol), le juge d’instruction n’a pas mis un
terme à son travail, vous êtes en droit de lui demander de clore
l’instruction. Toutefois, le juge peut décider de prolonger
l’information judiciaire, ce que vous pouvez contester devant
la chambre d’instruction qui tranchera (cf. p. 28), mais ce n’est pas
forcément votre intérêt. Vérifiez auprès de votre avocat.
Lorsqu’il estime l’instruction terminée, le juge d’instruction
peut :
Conclure à un non-lieu
Comme en matière de classement sans suite (cf. p22), cette décision
ne signifie pas que l’agression n’a pas existé, mais que le juge estime
qu’il n’a pas assez de pièces dans son dossier pour faire travailler un
tribunal.
Rendre une ordonnance d’irresponsabilité pénale
S’il estime que le mis en examen n’était pas, pour des raisons
psychiatriques (démence, psychose...), responsable de ses actes
au moment des faits. L’ordonnance précise qu’il existe des preuves
suffisantes que le mis en examen est bien l’auteur de l’agression
sexuelle. Pour l’agresseur, cela donne lieu à un traitement ou à un
internement psychiatrique et non à une sanction pénale. Pour la
victime, cela ouvre les droits à indemnisation du préjudice devant le
Tribunal correctionnel.
26
Vous pouvez faire appel d’une décision de non-lieu ou
d’irresponsabilité pénale devant la chambre d’instruction dans
un délai de 10 jours à compter de sa notification.
Transmettre le dossier au Tribunal correctionnel
S’il a pu rassembler suffisamment d’éléments qui indiquent que le mis
en examen est à l’origine des agressions sexuelles – autres que le viol
– que vous avez dénoncées. Dans ce cas, les actes dont vous avez été
victime seront qualifiés de délits et devront être jugés par un Tribunal
correctionnel.
27
La chambre de l’instruction
La chambre de l’instruction exerce un contrôle sur l’information
judiciaire menée par le juge d’instruction. Elle a les mêmes pouvoirs
de décision que celui-ci.
C’est la chambre de l’instruction qui examine vos requêtes
dans les situations où, en tant que partie civile, vous faites appel
des décisions du juge d’instruction (refus d’expertise ou de contre-
expertise, refus d’audition d’un témoin, correctionnalisation,
ordonnance de non-lieu ou d’irresponsabilité pénale, etc.).
ü Le procès
Le Tribunal correctionnel
C’est la juridiction chargée de juger les délits d’agressions sexuelles
autres que le viol, c’est-à-dire tous ceux sans pénétration sexuelle.
Il est composé de trois magistrats professionnels.
La Cour d’assises
C’est la juridiction habilitée à juger les crimes de viol. Elle est
constituée de trois magistrats professionnels et d’un jury populaire
(six citoyens et citoyennes tirés au sort, neuf en Cour d’assises statuant
en appel).
Le déroulement de l’audience
Si vous le souhaitez, vous pouvez en tant que partie civile demander
le huis clos, c’est-à-dire l’absence de public dans la salle d’audience
jusqu’à la fin des débats. Par public, il faut entendre la presse
et des inconnus, mais aussi votre famille, vos amis, les associations qui
vous soutiennent. Vous resterez toutefois accompagnée par votre
avocat. Vous pouvez aussi demander un huis clos partiel, c’est-à-dire
l’absence du public uniquement lorsque vous prendrez la parole.
28
Sachez que, devant la Cour d’assises, le huis clos est de droit quand
la victime, partie civile, le demande. Devant le Tribunal correctionnel,
le huis clos est soumis à l’appréciation du tribunal qui peut le refuser.
Le jugement ou arrêt
Un violeur jugé aux assises
Il risque jusqu’à des plafonds maximaux de 15 ans, 20 ans, 30 ans
de prison, voire la réclusion criminelle à perpétuité, suivant les
circonstances aggravantes.
Un agresseur sexuel jugé en correctionnelle
Il risque des peines maximales de 5 ans, 7 ans ou 10 ans de prison
suivant les circonstances aggravantes.
29
Un violeur ayant commis des atteintes sexuelles (sans violence,
contrainte, menace, ni surprise) encourt
- une peine maximale de 5 ans ou 10 ans d’emprisonnement selon
l’existence ou non de circonstances aggravantes, lorsqu’elle est
commise sur un mineur de 15 ans ou moins ;
- une peine maximale de 3 ans d’emprisonnement, lorsqu’elle est
commise sur un mineur de plus de 15 ans par un ascendant
ou une autre personne ayant sur la victime une autorité
ou abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions.
Dans la pratique, les peines prononcées sont souvent moindres.
Au Tribunal correctionnel
Le jugement n’est pas toujours immédiatement prononcé. Le tribunal
peut se prononcer sur la peine et l’indemnisation à une audience dite
de « délibéré », à laquelle vous serez alors convoquée quelques
semaines plus tard. Ou alors, le tribunal pourra juger en deux temps.
Il y aura alors une audience pour la condamnation pénale et une
audience dite « sur intérêts civils » pour statuer sur les dommages et
intérêts, éventuellement après une expertise pour évaluer les
préjudices.
30
En Cour d’assises
La décision est prononcée le dernier jour du procès, à l’issue
d’un délibéré qui peut durer plusieurs heures. Si le mis en cause ou
l’accusé est condamné, une audience civile (sans les juré.e.s) peut
suivre immédiatement pour fixer le montant des dommages et
intérêts demandés par la ou les parties civiles ou être renvoyée à une
date ultérieure, éventuellement après une expertise pour évaluer
les préjudices.
S’il subsiste un doute sur la matérialité des faits ou la culpabilité
de l’accusé, la Cour d’assises pourra alors prononcer son
acquittement. On dira qu’il a été « acquitté ». Tandis que devant le
Tribunal correctionnel, on dira qu’il a été « relaxé ». En effet,
« le doute profite toujours à l’accusé » est la formule imposée
lors d’une décision de justice.
L’ appel
« Faire appel » d’une décision en justice signifie demander le
réexamen du dossier par d’autres juges.
En cas d’acquittement de l’accusé (en Cour d’assises) ou de relaxe (au
Tribunal correctionnel), seul le ministère public a la possibilité
de faire appel.
Dans le cas d’une condamnation, l’accusé peut faire appel de la peine
et de l’indemnisation s’il les trouve excessives, alors que le ministère
public peut faire appel en tout état de cause.
En revanche, la victime, partie civile, ne peut faire appel que sur le
montant de l’indemnisation.
Le délai d’appel est de dix jours à compter du prononcé du
jugement. Le dossier sera alors examiné à nouveau par
d’autres juges à un second degré de juridiction : en chambre
correctionnelle de la Cour d’appel ou auprès de la Cour
d’assises statuant en appel.
31
Cassation
« Former un pourvoi en cassation » permet de demander à la Cour de
cassation de vérifier la bonne application du droit. La Cour
de cassation s’assure seulement du respect des principes de droits et
de la procédure. Cela ne permet pas de réexaminer les faits.
Attention, il y a des délais très courts à respecter pour former
un pourvoi en cassation. Il faut un avocat spécialisé pour effectuer
cette démarche (avocat au Conseil).
ü L’indemnisation
Si l’auteur du crime ou du délit a été condamné
Des dommages et intérêts vous ont été octroyés par le Tribunal
correctionnel ou la Cour d’assises, pour réparer votre préjudice
physique, matériel, moral, etc. Si le condamné ne paye pas les
dommages qui vous sont dus, vous pouvez saisir, par courrier simple,
la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) qui
se substituera temporairement au condamné pour vous indemniser.
Une CIVI siège auprès de chaque TGI.
Si l’agresseur n’a pas été identifié
Vous pouvez aussi saisir la Commission d’indemnisation des victimes
d’infractions (CIVI) et cela même sans condamnation pénale
afin d’être indemnisée des préjudices que vous avez subis du fait
de l’agression.
Vous avez trois ans à partir de la date de l’infraction ou un an
à compter de la décision définitive de justice pour saisir
la CIVI. La CIVI va alors saisir le Fonds de garantie (FGTI)8.
8
Consultez le site : www.fondsdegarantie.fr pour trouver la liste des documents à joindre.
32
A défaut d’accord amiable, une procédure contentieuse se met en
place et vous pouvez demander une provision, une expertise pour
évaluer vos préjudices et des dommages et intérêts.
L’indemnité réunit différents chefs de préjudice. Citons-en quelques-
uns :
- le DFP (déficit fonctionnel permanent) qui comprend les incapacités
fonctionnelles, les douleurs permanentes, la perte de qualité de vie,
le préjudice moral ou affectif…,
- les souffrances endurées qu’elles soient temporaires ou permanentes
(préjudice de la douleur physique et morale à titre temporaire),
- le préjudice sexuel (fonctionnel et psychologique),
- le préjudice d’agrément (incapacité à renouer avec des activités
antérieures, notamment sportives),
- le préjudice esthétique (suite à des violences physiques),
- le crédit thérapeutique (avance en vue d’une psychothérapie à
entreprendre),
- la « perte de chance » (par exemple lorsque l’agression vous a empêchée
d’accéder à un concours, une promotion, une opportunité de vie
difficiles à rattraper),
- le préjudice matériel ou patrimonial (perte de salaires, de chiffres
d’affaire, incapacité de travail temporaire ou durable, etc.).
Sachez qu’au civil comme au pénal, vous avez le droit de faire appel
de la décision de la CIVI, si vous la jugez contraire à votre intérêt.
33
Les démarches autres que la plainte
34
Vous voulez protéger d’autres victimes éventuelles du même
agresseur.
Vous pouvez écrire au Procureur de la République, lui décrire les faits
dont vous avez été victime et vos craintes pour d’autres personnes.
Votre témoignage permettra peut-être de prendre des mesures
de protection pour les mineurs ou personnes vulnérables encore
en contact avec l’agresseur. Si des plaintes sont en cours contre
cet agresseur, votre témoignage sera très utile aux victimes qui le
poursuivent en justice !
35
Le ou la mineur-e victime de viol
ou d’agressions sexuelles
ü Aider le ou la mineur-e
Dans une telle situation, un-e mineur-e a particulièrement besoin
d’aide, d’écoute et d’attention.
La victime mineure peut s’adresser elle-même :
- au commissariat de police, à la gendarmerie et demander
à être entendue par une « brigade des mineurs »,
- au juge des enfants, auprès du tribunal,
- à l’avocat d’enfants, auprès du tribunal,
- au Procureur de la République.
36
différence d'âge existant entre une victime mineure et l'auteur des
faits, et de l'autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette
victime.
En revanche, même sans contrainte démontrable, un majeur sans
liens familiaux qui a obtenu des actes sexuels d’un enfant de moins de
15 ans est passible de poursuites, qualifiées au minimum d’atteinte
sexuelle.
37
Le retrait de l’autorité parentale peut également être sollicité auprès
du tribunal de grande instance, en dehors de toute condamnation
pénale.
ü Le signalement
Un signalement judiciaire en cas d’urgence (si l’enfant est en danger),
doit être fait par téléphone au Procureur de la République du tribunal
de grande instance, avec confirmation le jour même par une lettre ou
une télécopie reprenant les termes exacts de l’enfant.
Le signalement déclenchera rapidement une enquête. Le Procureur
peut confier la protection de l’enfant au juge des enfants. Si
nécessaire, le juge des enfants nommera d’office un avocat ainsi qu’un
administrateur ad hoc pour l’enfant, qui seront chargés de défendre
ses intérêts à la place de ses parents.
38
Parquet des Mineurs
TGI de .........
Le ........., à .........
Un signalement administratif
Il doit être adressé aux services de l’aide sociale à l’enfance
du département, en cas de soupçons d’agressions sexuelles. Ce sont
ces services qui, après enquête, saisiront la justice s’il y a lieu
d’engager une action pénale.
De plus, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance
charge les Présidents des Conseils généraux du recueil, du traitement
et de l’évaluation des informations préoccupantes concernant les
enfants en danger ou en risque de danger. On entend par information
préoccupante tout élément d’information, y compris médical,
susceptible de laisser craindre qu’un enfant se trouve
en situation de danger ou de risque de danger. Chaque situation
doit faire l’objet d’une transmission à une Cellule départementale
de Recueil d’Information Préoccupante (CRIP) pour évaluation
et suites à donner.
39
ü La procédure judiciaire
L’enfant a droit à son propre avocat qui assurera sa défense et
l’accompagnera tout au long de la procédure. Vous pouvez vous
renseigner auprès du Barreau du tribunal de votre lieu de domicile qui
vous en désignera un spécialisé et gratuit.
Plusieurs mesures spécifiques ont été prises pour protéger la victime
mineure durant la procédure :
- Obligation d’un enregistrement audiovisuel ou sonore de
l’audition, pour éviter à la victime mineure d’avoir à répéter
à de multiples reprises le récit des agressions,
- Possibilité pour la victime mineure d’être accompagnée par un
tiers (un proche, un administrateur ad hoc, un psychologue, un
médecin ou toute autre personne investie d’un mandat du juge
des enfants) lors de son audition,
- Possibilité pour le Procureur de la République d’ordonner,
dès l’enquête préliminaire, une expertise médico-psychologique
de la victime mineure, destinée à apprécier la nature et
l’importance de son préjudice et à préciser la nature des soins et
du soutien thérapeutique dont elle doit pouvoir bénéficier.
119
Allô Enfance En Danger
24 H / 24 – 7 J /7
ou
0 800 05 95 95
« Viols - Femmes - Informations »
Appel gratuit et anonyme
Lundi au vendredi de 10 h à 19 h
40
Ce que dit la Loi
41
Les agressions sexuelles ne sont pas toutes listées dans le Code pénal.
Par exemple, les « attouchements », la masturbation imposée, le
cunnilingus imposé, la prise de photos ou l’exposition à la
pornographie, (pratiqués par l’agresseur sur sa victime ou bien qu’il ait
contraint celle-ci à les pratiquer sur lui) font partie d’un ensemble
d’agressions sexuelles au sens large.
42
Le fait pour un majeur de faire des propositions sexuelles à
un-e mineur-e de moins de 15 ans ou à une personne se présentant
comme telle en utilisant Internet ou un moyen de communication
électronique similaire (Article 227-22 du Code pénal).
Le proxénétisme qui est notamment le fait d’aider, d’encourager, de
tirer profit de la prostitution d’autrui (Article 225-5 du Code pénal).
Le recours à la prostitution de mineur.es ou de personnes
vulnérables (Article 225-12-1 du Code pénal).
Le bizutage se définit par le fait d’amener autrui, contre son gré
ou non, à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants,
notamment à connotation sexuelle, lors de manifestations ou de
réunions liées au milieu scolaire et socio-éducatif par exemple, mettre
en scène ou représenter un rapport sexuel, une fellation, un acte de
sodomie, etc. (Article 225-16-1 du Code pénal).
43
ü Diffusions d’images d’autrui à caractère sexuel
44
- par le conjoint, le concubin de la victime ou le partenaire lié
à la victime par un PACS (Pacte Civil de Solidarité),
- par la mise en contact de la victime avec l’auteur des faits grâce
à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination
d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunication
(Internet, Minitel…),
- avec un ou plusieurs autres viols commis sur d’autres victimes,
- commis en état d’ivresse ou sous l’emprise de produits
stupéfiants.
ü Les menaces
ü La prescription
Le délai de prescription est le délai pendant lequel une victime est
recevable à porter plainte et à engager des poursuites.
Dispositions pénales
La prescription en ce qui concerne les victimes majeures
Depuis la loi 2017-242 du 27 février 2017, les victimes majeures, pour
porter plainte, ont :
- Pour le viol qui est un crime : 20 ans, à compter de la date des faits.
- Pour les autres agressions sexuelles : 6 ans, à compter de la date
des faits.
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La prescription en ce qui concerne les victimes mineures
Pour les crimes :
Pour les faits commis depuis la loi du 10 mars 2004 (Loi n°2004-204
du 9 mars 2014), les victimes de crimes qui étaient mineures pourront
porter plainte jusqu’à 20 ans à compter de leur majorité (c’est-à-dire
jusqu’à la veille de leur 38 ans).
Pour les faits antérieurs à la loi du 10 mars 2004 (Loi n°2004-204
du 9 mars 2014), seules les victimes de crimes qui étaient mineures
à cette date et pour lesquelles les faits n’étaient pas déjà prescrits,
bénéficieront de cet allongement de délai.
En général, il s’agit des personnes qui n’avaient pas atteint leurs
28 ans avant la nouvelle loi. Mais, trois lois ayant précédé celle-ci,
certaines années charnières nécessitent des calculs bien
plus complexes.
Par exemple, pour les faits commis entre le 10 juillet 1979 et le 17 juin
1988, le délai de prescription était de 10 ans à compter de la majorité
de la victime uniquement si l’auteur était un ascendant
ou une personne ayant autorité. En l’absence de cette circonstance
aggravante particulière, le délai était de 10 ans à compter des faits,
sans considération de l’âge de la victime !
Il est conseillé, si vous êtes concernée par ces dates charnières,
de prendre l’avis d’un juriste d’une association
ou de la Maison de la justice et du droit de votre lieu
de résidence, ou d’un avocat pénaliste.
46
En cas de circonstances aggravantes (la victime avait moins de 15 ans
ou était déjà une personne vulnérable, l’agression a eu lieu
« en réunion », avec une arme, etc.), les victimes qui étaient mineures
pourront porter plainte jusqu’à la veille de leurs 38 ans.
Pour les faits antérieurs à la loi du 10 mars 2004 (Loi n°2004-204), les
victimes ont 10 ans à compter de leur majorité pour porter plainte à
condition que les faits ne soient pas prescrits au 10 mars 2004, c’est-
à-dire que la victime n’avait pas 21 ans à cette date.
Si la victime a 21 ans révolus après le 10 mars 2004 (Loi n°2004-204),
les faits ne semblent pas prescrits. Mais il faut prendre en compte
certaines lois antérieures se référant à la date des faits. Ainsi, sont
prescrits les faits commis entre le 10 juillet 1986 et le 17 juin 1995 de :
- 3 ans à compter de la majorité de la victime, si l’auteur
est un ascendant ou une personne ayant autorité. Sinon,
3 ans à compter des faits, si l’auteur est un tiers,
- 10 ans à compter de la majorité de la victime, si l’auteur
est un ascendant ou une personne ayant autorité ET s’il y a des
circonstances aggravantes.
9
Article 2226 du code civil (modifié par LOI n°2008-561 du 17 juin 2008).
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Liste des sigles
AJ Aide juridictionnelle
APJ Agent de police judiciaire
ASE Aide sociale à l’enfance
BAV Bureau d’aide aux victimes
CIDFF Centre d’information du droit des femmes et des
familles
CIVI Commission d’indemnisation des victimes
d’infractions
CP Code pénal
CRIP Cellule départementale de Recueil d’Informations
Préoccupantes
DFP Déficit fonctionnel permanent
FGTI Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme
et d’autres infractions
ITT Incapacité totale de travail
JAF Juge aux affaires familiales
JE Juge des enfants
JI Juge d’instruction
JLD Juge des libertés et de la détention
JuDéVi Juge délégué aux victimes
OPJ Officier de police judiciaire
PMI Protection maternelle et infantile
TGI Tribunal de grande instance
UMJ Urgences médico-judiciaires
48
Ne restez pas seule
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ü Mais aussi
50
« Viols - Femmes - Informations »
0 800 05 95 95
Appel gratuit et anonyme
en France, DOM compris
Du lundi au vendredi, de 10h à 19h
(et pour les DOM, aux heures de métropole)
Et de
La Force juridique de la
51