La longue amitié entre le libertaire et iconoclaste Octave Mirbeau, contempteur des mœurs politic... more La longue amitié entre le libertaire et iconoclaste Octave Mirbeau, contempteur des mœurs politiciennes et des institutions républicaines, dont il souhaite carrément l’effondrement, et Georges Clemenceau, qui a été l’une des plus éminentes incarnations des unes et le plus fervent défenseur des autres, n’a rien d’évident et ne manque pas de surprendre au premier abord. Entre l’anarchiste qui ne s’effrayait pas d’un Ravachol et voyait en lui « le coup de tonnerre auquel succède la joie du soleil et du ciel apaisés », et le futur « premier flic de France » et « Père la Victoire », n’y aurait-il pas un infranchissable abîme ? Et pourtant, indéniablement, cette amitié fut, et, solidement forgée pendant l’Affaire, elle dura une bonne quinzaine d’années.
Quoique héritier des Lumières et admiratif face aux progrès scientifiques et techniques, Mirbeau ... more Quoique héritier des Lumières et admiratif face aux progrès scientifiques et techniques, Mirbeau se méfie de la raison, est très critique à l'égard du scientisme et, écologiste avant la lettre, est épouvanté par la criminelle irresponsabilité des ingénieurs omnipotents, qui risquent de détruire la planète. Il ne croit pas non plus à la psychologie et se situe au contraire dans le droit fil de Dostoïevski, qui voit en l'homme un animal irrationnel, dominé par de multiples pulsions. Dans son œuvre narrative, qui illustre cette conception de l'homme et de la société, il met en œuvre divers moyens en vue de préserver la part d'inconnaissable qui échappe à notre compréhension.
Au premier abord il peut paraître incongru de rapprocher deux écrivains que sépare plus d'un sièc... more Au premier abord il peut paraître incongru de rapprocher deux écrivains que sépare plus d'un siècle et qui, dans des conditions historiques évidemment fort différentes, se sont confrontés à des genres bien distincts, l'un étant d'abord connu mondialement pour ses romans (L'Abbé Jules, Le Jardin des supplices, Le Journal d'un femme de chambre) et son théâtre (Les affaires sont les affaires), genres littéraires que Michel Onfray, philosophe de formation, n'a pas abordés. Il n'y a guère que la critique d'art qui leur soit commune, mais les artistes auxquels leurs noms restent attachés sont aussi bien différents et, bien évidemment, également distants d'un siècle. Et pourtant, au-delà de convergences superficielles-leurs initiales inversables, leur proximité géographique (OM et MO sont tous deux Ornais, mais ne sont pas nés du même côté de la barrière sociale), leur immense culture reposant sur une masse de livres ingurgités avec une frénésie de lecture, leur aisance matérielle acquise au moyen de leur plume féconde et au prix d'un énorme et harassant labeur continu pendant des décennies-, il n'est pas interdit de souligner entre eux une forme de continuité. Tous deux-et c'est peut-être là le lien majeur qui les unit-sont des libres penseurs, au sens habituel et restreint du mot comme au sens littéral et plus général : ils ne peuvent exercer leur pensée, forcément critique, qu'en toute liberté, refusant de se plier à la langue de bois et au politiquement correct, et réfractaires à tout embrigadement partidaire, fût-ce dans les mouvements de la gauche radicale dont ils sont les plus proches et dont ils partagent les valeurs et connaissent les ressorts. D'où le risque d'être attaqués, non seulement par les tenants du désordre établi et par l'establishment politique et culturel, ce qui est normal de la part de leurs cibles privilégiées, mais aussi par ceux-là mêmes dont ils sont proches et qui n'hésitent pas, à l'occasion, à les taxer commodément d'incohérence, ou à tenter de les rabaisser à grands coups d'étiquettes réductrices, quand elles ne sont pas carrément infamantes. Ainsi le nihilisme du dénouement des Mauvais bergers (1897) at -il été mal encaissé par le socialiste Jean Jaurès, qui le juge « effarant », et par l'anarchiste Jean Grave, pour qui il n'y aurait plus qu'à aller se jeter dans la Seine ; cependant que la décadence du judéo-christianisme prophétisée par Michel Onfray passe mal auprès de ceux qui, à gauche, ont besoin de continuer à croire au progrès indéfini. Il est tellement plus confortable de s'en tenir obstinément et aveuglément à ses propres convictions, sans chercher à les confronter à la complexité du réel… Dans des milieux intellectuels bien formatés et volontiers misonéistes, à gauche, hélas ! aussi bien qu'à droite, cette liberté de pensée ne saurait être bien vue : il y a des choses que l'on préfère ne pas voir ni savoir, pour préserver sa bonne conscience et ses bonnes digestions, et il est risqué de prétendre forcer « les aveugles volontaires » à « regarder Méduse en face », selon la forte expression de Mirbeau. Mais c'est justement cette courageuse liberté de pensée et d'expression qui fait d'OM et de MO, parrèsiastes héritiers des cyniques grecs de l'antiquité, des incarnations de la figure de l'intellectuel éthique : celui qui, à l'instar d'Albert Camus-qui constitue entre eux une manière de trait d'union-, n'obéit qu'à sa conscience, qui place l'éthique au poste de commande, et qui met sa notoriété, son entregent et sa plume au service de ses valeurs et de ses idéaux humanistes, au lieu de se servir lui-même, vulgairement et cyniquement, comme c'est trop souvent la règle chez les politiciens et les nantis. Une seconde convergence idéologique est l'athéisme sans concession et le matérialisme radical de nos deux auteurs, qui les amènent, sur la base de la connaissance de l'histoire comme sur celle de l'analyse du présent, à voir dans les religions en général, et dans le christianisme en particulier, non seulement des mystifications et un opium du peuple visant
"Octave Mirbeau et la Bretagne", L’Harmattan, février 2018, 2018
Épisode déterminant de notre histoire, l'affaire Dreyfus a joué un rôle marquant tout au long du ... more Épisode déterminant de notre histoire, l'affaire Dreyfus a joué un rôle marquant tout au long du vingtième siècle et a constitué, pour des générations de citoyens, notamment de gauche, une référence constante. Je présente ici synthétiquement la place et l'héritage de l'Affaire dans l'histoire récente de la France, j'analyse les obstacles à vaincre pour que l'anarchiste Octave Mirbeau s'engage dans le combat révisionniste, à la différence d'autres libertaires et socialistes, et rappelle les multiples formes de son engagement dreyfusiste, au premier chef ses articles de "L'Aurore", son appel à une alliance des intellectuels et des prolétaires, et le paiement, de sa poche, de l'énorme amende infligée à Émile Zola pour son « J'accuse ».
Composer avec la mort de Dieu : écriture et athéisme au 19e siècle, Presses de l'université Laval, Québec, 2014
Après avoir rappelé que Mirbeau était, non seulement un athée révolté par le tragique de la condi... more Après avoir rappelé que Mirbeau était, non seulement un athée révolté par le tragique de la condition humaine vouée à la loi du meurtre, mais aussi un anticlérical intransigeant et un antichrétien convaincu, je souligne le radicalisme de cette vision des choses. Car, non seulement Mirbeau pourfend les vieilles idéologies religieuses et les croyances tout juste bonnes pour les pensionnaires de Charenton, mais il tâche d'émanciper aussi les hommes d'autres formes d'idéalisme qu'il juge également dangereuses, par exemple l'utopisme révolutionnaire, la foi aveugle dans la Révolution ou dans le Progrès. Cet athéisme radical se traduit, dans l'engagement citoyen, par le refus de l'espoir et de la propagande mensongère, au profit d'une lucidité désespérée, et, dans l'écriture romanesque, par le choix de l'ambiguïté, par opposition à la littérature didactique ou à thèse, et par le refus du finalisme inhérent aux romans bien structurés, sur le modèle de Balzac et de Zola, où le romancier est comme Dieu au milieu de sa création.
Ce petit volume, consacré à un rapprochement entre deux écrivains engagés, regroupe deux études ... more Ce petit volume, consacré à un rapprochement entre deux écrivains engagés, regroupe deux études indépendantes : l’une, « Mirbeau et Camus : éthique et ambiguïté », est la version longue d’une communication au colloque de Lódz d’octobre 2005, "Cet irrésistible désir d’éduquer... Manipulation, endoctrinement, mystification" ; l’autre, « Mirbeau, Camus et la mort volontaire », une communication au colloque de Lorient de novembre 2000 sur "Les Représentations de la mort". Octave Mirbeau et Albert Camus ont en commun d’avoir mis l’éthique au poste de commande, dans leur engagement politique, et d’avoir adopté une esthétique à la fois classique, par l’adaptation de la forme et des règles aux objectifs de l’écrivain, et novatrice, par le recours à une pédagogie de choc, qui oblige les lecteurs à jeter sur les choses un regard neuf qui contribue à les émanciper intellectuellement. Refusant les œuvres didactiques, les œuvres à thèse et, à plus forte raison, les œuvres de propagande, ils ont fait de l’ambiguïté un principe de leur éthique en même temps que de leur esthétique. Ici le corpus réduit à deux œuvres théâtrales en forme de tragédies, "Les Mauvais bergers" et "Les Justes", et à deux romans, "Le Journal d’une femme de chambre" et "L’Étranger", pour montrer que, malgré leur révolte et leur engagement au service de la justice, les deux écrivains ont respecté leur devoir de vérité en ne craignant pas de « désespérer Billancourt » et en s’interdisant de faire de leurs personnages de simples porte-parole : Jean Roule et Kaliayev, comme Célestine et Meursault, constituent de simples exemples, et pas du tout des modèles à suivre, et leurs comportements aboutissent à des apories, que leurs créateurs se gardent bien de prétendre dépasser.
Analyse des quelques rares cas de personnages reparaissants dans les œuvres d'Octave Mirbeau (Lec... more Analyse des quelques rares cas de personnages reparaissants dans les œuvres d'Octave Mirbeau (Lechat, comtesse de La Verdurette, princesse Wedrowitch, Victor Flamant, Dr Triceps et Lerible),. Il n'est pas pour autant question pour le romancier de recourir au procédé balzacien qui implique un univers cohérent et une vérité accessible.
Ce volume rassemble les Actes du colloque Octave Mirbeau de Grenade (9 novembre2017), sur les tra... more Ce volume rassemble les Actes du colloque Octave Mirbeau de Grenade (9 novembre2017), sur les traductions d' "Octave Mirbeau en toutes langues". Ils sont complétés par diverses contributions de traducteurs de Mirbeau.
Bien que différente, chez Mirbeau, de celle que définira et pratiquera Doubrovsky, l’autofiction,... more Bien que différente, chez Mirbeau, de celle que définira et pratiquera Doubrovsky, l’autofiction, d’une part, est un moyen de dépasser les apories du naturalisme, et, d’autre part, contribue à ruiner toute autorité, y compris celle du romancier lui-même.
Octave Mirbeau a travaillé comme secrétaire particulier de l'ancien député bonapartiste Dugué de ... more Octave Mirbeau a travaillé comme secrétaire particulier de l'ancien député bonapartiste Dugué de la Fauconnerie et, à ce titre, a été amené à mettre en forme la propagande bonapartiste de son patron, notamment une brochure à succès, abondamment diffusée, "Les Calomnies contre l'Empire". Il évoquera par la suite cette période de prolétariat de la plume, assimilé à de la prostitution, dans un roman inachevé, "Un gentilhomme".
"Jean Marcellin" est un roman paru en 1885 sous le pseudonyme d'Albert Miroux, mais le nom de Mir... more "Jean Marcellin" est un roman paru en 1885 sous le pseudonyme d'Albert Miroux, mais le nom de Mirbeau apparaît curieusement dans le catalogue de la BN. Il semble bien qu'il s'agisse d'un roman nègre, comme tendent à le confirmer la thématique, proche de celle du "Calvaire", l'onomastique, les événements évoqués et le sous-titre. Tout se passe comme si "Jean Marcellin" constituait un galop d'essai préparatoire à la rédaction du "Calvaire".
Le schede mirbelliane raccolte in questo volume elettronico si
trovano, separatamente, sulla pagi... more Le schede mirbelliane raccolte in questo volume elettronico si trovano, separatamente, sulla pagina italiana del sito Internet della Société Octave Mirbeau e sono dunque accessibili direttamente online : http://www.mirbeau.org/it.html. Tutte le voci sulle opere di Octave Mirbeau erano state scritte per la Wikipedia italiana, dieci anni fa. C’erano anche otto voci dedicate ai personaggi di Mirbeau : Célestine, Clara, Isidore Lechat, Lucien, Jean Mintié, padre de Kern, ecc. Ma, ultimamente, una banda di wikipediani italiani, ignoranti ed ottusi, gelosi del loro esultante potere di destruzione del lavoro altrui, hanno cancellato le schede dei personaggi, hanno vandalizzato più volte le voci dedicate alle opere, e hanno cominciato a censurare e scuoiare la scheda dello scrittore… Intolerabile ed allucinante ! In queste condizioni, siccome non c’era più niente da aspettare da questi oscurantisti, né dalla Wikipedia italiana, diventata un’« enciclopedia buffa », dove gli specialisti sono disprezzati e alla merce di “responsabili” irresponsabili, ho deciso di recuperare e ripristinare le voci saccheggiate o cancellate.
Depuis que le djihadisme islamiste a ensanglanté le monde, et particulièrement la France, le déba... more Depuis que le djihadisme islamiste a ensanglanté le monde, et particulièrement la France, le débat sur la laïcité a repris de la virulence, 112 ans après la Loi de Séparation, et a profondément divisé le monde intellectuel en général et la gauche en particulier. Pour faire court, il y a ceux qui considèrent que l'Islam n'est pas en cause dans l'islamisme et qu'il convient, au nom d'une conception libérale de la laïcité, dite « ouverte », de tolérer des pratiques relevant d'une culture propre à des populations considérées comme opprimées et dont il faut bien entendre les revendications. Face à ce que certains qualifient oxymoriquement d'« islamo-gauchisme », les partisans d'une laïcité intransigeante se refusent à ces compromissions et voient dans l'Islam de populations insuffisamment acclimatées à la vie dans un pays laïque, libéré de l'emprise religieuse traditionnelle, un obstacle à l'intégration démocratique et à l'émancipation des esprits et, au premier chef, à celle des femmes. Le débat n'est pas nouveau, mais, à l'époque de Mirbeau, ce n'était pas l'Islam qui était au centre du débat, car il était inexistant en France, mais bien l'omnipotence de l'Église catholique romaine. Pour sa part, Mirbeau, qui était passé par les mains des jésuites, ces « pourrisseurs d'âmes 1 », quoique radicalement athée et matérialiste, en avait conservé une marque indélébile, qu'il appelle « l'empreinte 2 », et, pendant des décennies, il a dû mener bataille pour s'en libérer lui-même et contribuer à en libérer les autres, en commençant par les enfants innocents, pâte aisément malléable pour les « pétrisseurs d'âmes 3 ». Contre ce que Joseph Macé-Scaron appelle « l'horreur religieuse », il refuse donc de se contenter d'une simple séparation entre le sacré et le profane, entre le privé et le public, entre l'État et les religions : remontant des effets à la cause, il s'attaque aux religions elles-mêmes et prend, contre elles et contre le poison qu'elles distillent, la défense de tous les petits Sébastien Roch, Mozart potentiels qu'on assassine. Pour que le grand public finisse par prendre conscience de la gravité du danger que représentent les religions en général, et la catholique en particulier, il convient de leur arracher le masque de respectabilité qui camoufle tant bien que mal leurs turpitudes en tous genres, quand ce ne sont pas les crimes à grande échelle, qu'elles perpètrent, depuis des siècles, en toute impunité et en toute bonne conscience, puisque c'est toujours au nom de leur dieu – et, qui plus est, chez les chrétiens, au nom d'un « dieu d'amour » ! Même des laïques convaincus ne restent pas insensibles devant le prestige que leur confère l'histoire et disent respecter, chez les croyants, la dimension spirituelle que sont supposés refléter tant de chefs-d'oeuvre de l'art. Pour Mirbeau, au contraire, il n'y a rien de respectable dans le principe même des religions, qui reposent sur l'ignorance des masses et qui perpétuent leur emprise sur les âmes par une habile combinaison de terreur et d'espérance. Il n'est, certes, pas possible d'empêcher qui que ce soit de croire au Père Noël, à la virginité de Marie, à la transsubstantiation ou aux visions de Bernadette Soubirous, mais de telles fariboles ne méritent pour autant aucune forme de respect, et encore moins ceux qui les colportent et qui en font un juteux commerce. Mirbeau, le grand démystificateur, va donc s'employer, dans toute son oeuvre, à ruiner les mystifications religieuses en arrachant ce voile de respectabilité, afin de faire apparaître, aux yeux de tous, une réalité sordide et inavouable. C'est ainsi qu'il nous fait découvrir, au fil de ses récits, que l'Église catholique, malgré son apparat et ses multiples « grimaces » destinées à duper le bon peuple et à susciter crainte et respect, n'est, tout bien considéré, qu'une vulgaire association de malfaiteurs, avide de préserver par tous les moyens sa domination et sa richesse, et coupable de véritables crimes de lèse-humanité, mais 1 « Souvenirs », L'Aurore, 22 août 1898. 2 L'expression apparaît à deux reprises dans Sébastien Roch (Éditions du Boucher, 2003, p. 162 et p. 224). 3 « Pétrisseurs d'âmes », Le Journal, 16 février 1901.
La vandalisation dont ont été l'objet, sur la Wikipédia italienne, les notices sur Octave Mirbeau... more La vandalisation dont ont été l'objet, sur la Wikipédia italienne, les notices sur Octave Mirbeau et sur toutes ses œuvres, et la suppression de toutes les notices sur ses personnages, ne manquent pas d'interpeller dans une entreprise qui se présente comme une « encyclopédie libre » et qui prétend « libérer la culture ». Au-delà des mobiles liés à tout acte de vandalisme en général, par-delà les explications tenant à l'ignorance, à la bêtise et à l'arrogance de petits chefs jaloux de leurs petits pouvoirs, force est de poser le problème du fonctionnement même de Wikipédia, dont les vandales en question, administrateurs incontrôlés, constituent des ressorts essentiels, ce qui leur garantit l'impunité. Le problème fondamental de la Wikipédia italienne, qui risque de se rencontrer dans les autres langues, c'est que les spécialistes y sont a priori suspects d' « originalité » et d'absence de « neutralité » et n'ont donc pas droit de cité : seuls des gens sans compétences particulières, voire totalement ignorants des sujets traités, sont habilités... à copier ce qu'ils trouvent ailleurs !... C'est bien évidemment le contraire de ce que doit être une encyclopédie.
La longue amitié entre le libertaire et iconoclaste Octave Mirbeau, contempteur des mœurs politic... more La longue amitié entre le libertaire et iconoclaste Octave Mirbeau, contempteur des mœurs politiciennes et des institutions républicaines, dont il souhaite carrément l’effondrement, et Georges Clemenceau, qui a été l’une des plus éminentes incarnations des unes et le plus fervent défenseur des autres, n’a rien d’évident et ne manque pas de surprendre au premier abord. Entre l’anarchiste qui ne s’effrayait pas d’un Ravachol et voyait en lui « le coup de tonnerre auquel succède la joie du soleil et du ciel apaisés », et le futur « premier flic de France » et « Père la Victoire », n’y aurait-il pas un infranchissable abîme ? Et pourtant, indéniablement, cette amitié fut, et, solidement forgée pendant l’Affaire, elle dura une bonne quinzaine d’années.
Quoique héritier des Lumières et admiratif face aux progrès scientifiques et techniques, Mirbeau ... more Quoique héritier des Lumières et admiratif face aux progrès scientifiques et techniques, Mirbeau se méfie de la raison, est très critique à l'égard du scientisme et, écologiste avant la lettre, est épouvanté par la criminelle irresponsabilité des ingénieurs omnipotents, qui risquent de détruire la planète. Il ne croit pas non plus à la psychologie et se situe au contraire dans le droit fil de Dostoïevski, qui voit en l'homme un animal irrationnel, dominé par de multiples pulsions. Dans son œuvre narrative, qui illustre cette conception de l'homme et de la société, il met en œuvre divers moyens en vue de préserver la part d'inconnaissable qui échappe à notre compréhension.
Au premier abord il peut paraître incongru de rapprocher deux écrivains que sépare plus d'un sièc... more Au premier abord il peut paraître incongru de rapprocher deux écrivains que sépare plus d'un siècle et qui, dans des conditions historiques évidemment fort différentes, se sont confrontés à des genres bien distincts, l'un étant d'abord connu mondialement pour ses romans (L'Abbé Jules, Le Jardin des supplices, Le Journal d'un femme de chambre) et son théâtre (Les affaires sont les affaires), genres littéraires que Michel Onfray, philosophe de formation, n'a pas abordés. Il n'y a guère que la critique d'art qui leur soit commune, mais les artistes auxquels leurs noms restent attachés sont aussi bien différents et, bien évidemment, également distants d'un siècle. Et pourtant, au-delà de convergences superficielles-leurs initiales inversables, leur proximité géographique (OM et MO sont tous deux Ornais, mais ne sont pas nés du même côté de la barrière sociale), leur immense culture reposant sur une masse de livres ingurgités avec une frénésie de lecture, leur aisance matérielle acquise au moyen de leur plume féconde et au prix d'un énorme et harassant labeur continu pendant des décennies-, il n'est pas interdit de souligner entre eux une forme de continuité. Tous deux-et c'est peut-être là le lien majeur qui les unit-sont des libres penseurs, au sens habituel et restreint du mot comme au sens littéral et plus général : ils ne peuvent exercer leur pensée, forcément critique, qu'en toute liberté, refusant de se plier à la langue de bois et au politiquement correct, et réfractaires à tout embrigadement partidaire, fût-ce dans les mouvements de la gauche radicale dont ils sont les plus proches et dont ils partagent les valeurs et connaissent les ressorts. D'où le risque d'être attaqués, non seulement par les tenants du désordre établi et par l'establishment politique et culturel, ce qui est normal de la part de leurs cibles privilégiées, mais aussi par ceux-là mêmes dont ils sont proches et qui n'hésitent pas, à l'occasion, à les taxer commodément d'incohérence, ou à tenter de les rabaisser à grands coups d'étiquettes réductrices, quand elles ne sont pas carrément infamantes. Ainsi le nihilisme du dénouement des Mauvais bergers (1897) at -il été mal encaissé par le socialiste Jean Jaurès, qui le juge « effarant », et par l'anarchiste Jean Grave, pour qui il n'y aurait plus qu'à aller se jeter dans la Seine ; cependant que la décadence du judéo-christianisme prophétisée par Michel Onfray passe mal auprès de ceux qui, à gauche, ont besoin de continuer à croire au progrès indéfini. Il est tellement plus confortable de s'en tenir obstinément et aveuglément à ses propres convictions, sans chercher à les confronter à la complexité du réel… Dans des milieux intellectuels bien formatés et volontiers misonéistes, à gauche, hélas ! aussi bien qu'à droite, cette liberté de pensée ne saurait être bien vue : il y a des choses que l'on préfère ne pas voir ni savoir, pour préserver sa bonne conscience et ses bonnes digestions, et il est risqué de prétendre forcer « les aveugles volontaires » à « regarder Méduse en face », selon la forte expression de Mirbeau. Mais c'est justement cette courageuse liberté de pensée et d'expression qui fait d'OM et de MO, parrèsiastes héritiers des cyniques grecs de l'antiquité, des incarnations de la figure de l'intellectuel éthique : celui qui, à l'instar d'Albert Camus-qui constitue entre eux une manière de trait d'union-, n'obéit qu'à sa conscience, qui place l'éthique au poste de commande, et qui met sa notoriété, son entregent et sa plume au service de ses valeurs et de ses idéaux humanistes, au lieu de se servir lui-même, vulgairement et cyniquement, comme c'est trop souvent la règle chez les politiciens et les nantis. Une seconde convergence idéologique est l'athéisme sans concession et le matérialisme radical de nos deux auteurs, qui les amènent, sur la base de la connaissance de l'histoire comme sur celle de l'analyse du présent, à voir dans les religions en général, et dans le christianisme en particulier, non seulement des mystifications et un opium du peuple visant
"Octave Mirbeau et la Bretagne", L’Harmattan, février 2018, 2018
Épisode déterminant de notre histoire, l'affaire Dreyfus a joué un rôle marquant tout au long du ... more Épisode déterminant de notre histoire, l'affaire Dreyfus a joué un rôle marquant tout au long du vingtième siècle et a constitué, pour des générations de citoyens, notamment de gauche, une référence constante. Je présente ici synthétiquement la place et l'héritage de l'Affaire dans l'histoire récente de la France, j'analyse les obstacles à vaincre pour que l'anarchiste Octave Mirbeau s'engage dans le combat révisionniste, à la différence d'autres libertaires et socialistes, et rappelle les multiples formes de son engagement dreyfusiste, au premier chef ses articles de "L'Aurore", son appel à une alliance des intellectuels et des prolétaires, et le paiement, de sa poche, de l'énorme amende infligée à Émile Zola pour son « J'accuse ».
Composer avec la mort de Dieu : écriture et athéisme au 19e siècle, Presses de l'université Laval, Québec, 2014
Après avoir rappelé que Mirbeau était, non seulement un athée révolté par le tragique de la condi... more Après avoir rappelé que Mirbeau était, non seulement un athée révolté par le tragique de la condition humaine vouée à la loi du meurtre, mais aussi un anticlérical intransigeant et un antichrétien convaincu, je souligne le radicalisme de cette vision des choses. Car, non seulement Mirbeau pourfend les vieilles idéologies religieuses et les croyances tout juste bonnes pour les pensionnaires de Charenton, mais il tâche d'émanciper aussi les hommes d'autres formes d'idéalisme qu'il juge également dangereuses, par exemple l'utopisme révolutionnaire, la foi aveugle dans la Révolution ou dans le Progrès. Cet athéisme radical se traduit, dans l'engagement citoyen, par le refus de l'espoir et de la propagande mensongère, au profit d'une lucidité désespérée, et, dans l'écriture romanesque, par le choix de l'ambiguïté, par opposition à la littérature didactique ou à thèse, et par le refus du finalisme inhérent aux romans bien structurés, sur le modèle de Balzac et de Zola, où le romancier est comme Dieu au milieu de sa création.
Ce petit volume, consacré à un rapprochement entre deux écrivains engagés, regroupe deux études ... more Ce petit volume, consacré à un rapprochement entre deux écrivains engagés, regroupe deux études indépendantes : l’une, « Mirbeau et Camus : éthique et ambiguïté », est la version longue d’une communication au colloque de Lódz d’octobre 2005, "Cet irrésistible désir d’éduquer... Manipulation, endoctrinement, mystification" ; l’autre, « Mirbeau, Camus et la mort volontaire », une communication au colloque de Lorient de novembre 2000 sur "Les Représentations de la mort". Octave Mirbeau et Albert Camus ont en commun d’avoir mis l’éthique au poste de commande, dans leur engagement politique, et d’avoir adopté une esthétique à la fois classique, par l’adaptation de la forme et des règles aux objectifs de l’écrivain, et novatrice, par le recours à une pédagogie de choc, qui oblige les lecteurs à jeter sur les choses un regard neuf qui contribue à les émanciper intellectuellement. Refusant les œuvres didactiques, les œuvres à thèse et, à plus forte raison, les œuvres de propagande, ils ont fait de l’ambiguïté un principe de leur éthique en même temps que de leur esthétique. Ici le corpus réduit à deux œuvres théâtrales en forme de tragédies, "Les Mauvais bergers" et "Les Justes", et à deux romans, "Le Journal d’une femme de chambre" et "L’Étranger", pour montrer que, malgré leur révolte et leur engagement au service de la justice, les deux écrivains ont respecté leur devoir de vérité en ne craignant pas de « désespérer Billancourt » et en s’interdisant de faire de leurs personnages de simples porte-parole : Jean Roule et Kaliayev, comme Célestine et Meursault, constituent de simples exemples, et pas du tout des modèles à suivre, et leurs comportements aboutissent à des apories, que leurs créateurs se gardent bien de prétendre dépasser.
Analyse des quelques rares cas de personnages reparaissants dans les œuvres d'Octave Mirbeau (Lec... more Analyse des quelques rares cas de personnages reparaissants dans les œuvres d'Octave Mirbeau (Lechat, comtesse de La Verdurette, princesse Wedrowitch, Victor Flamant, Dr Triceps et Lerible),. Il n'est pas pour autant question pour le romancier de recourir au procédé balzacien qui implique un univers cohérent et une vérité accessible.
Ce volume rassemble les Actes du colloque Octave Mirbeau de Grenade (9 novembre2017), sur les tra... more Ce volume rassemble les Actes du colloque Octave Mirbeau de Grenade (9 novembre2017), sur les traductions d' "Octave Mirbeau en toutes langues". Ils sont complétés par diverses contributions de traducteurs de Mirbeau.
Bien que différente, chez Mirbeau, de celle que définira et pratiquera Doubrovsky, l’autofiction,... more Bien que différente, chez Mirbeau, de celle que définira et pratiquera Doubrovsky, l’autofiction, d’une part, est un moyen de dépasser les apories du naturalisme, et, d’autre part, contribue à ruiner toute autorité, y compris celle du romancier lui-même.
Octave Mirbeau a travaillé comme secrétaire particulier de l'ancien député bonapartiste Dugué de ... more Octave Mirbeau a travaillé comme secrétaire particulier de l'ancien député bonapartiste Dugué de la Fauconnerie et, à ce titre, a été amené à mettre en forme la propagande bonapartiste de son patron, notamment une brochure à succès, abondamment diffusée, "Les Calomnies contre l'Empire". Il évoquera par la suite cette période de prolétariat de la plume, assimilé à de la prostitution, dans un roman inachevé, "Un gentilhomme".
"Jean Marcellin" est un roman paru en 1885 sous le pseudonyme d'Albert Miroux, mais le nom de Mir... more "Jean Marcellin" est un roman paru en 1885 sous le pseudonyme d'Albert Miroux, mais le nom de Mirbeau apparaît curieusement dans le catalogue de la BN. Il semble bien qu'il s'agisse d'un roman nègre, comme tendent à le confirmer la thématique, proche de celle du "Calvaire", l'onomastique, les événements évoqués et le sous-titre. Tout se passe comme si "Jean Marcellin" constituait un galop d'essai préparatoire à la rédaction du "Calvaire".
Le schede mirbelliane raccolte in questo volume elettronico si
trovano, separatamente, sulla pagi... more Le schede mirbelliane raccolte in questo volume elettronico si trovano, separatamente, sulla pagina italiana del sito Internet della Société Octave Mirbeau e sono dunque accessibili direttamente online : http://www.mirbeau.org/it.html. Tutte le voci sulle opere di Octave Mirbeau erano state scritte per la Wikipedia italiana, dieci anni fa. C’erano anche otto voci dedicate ai personaggi di Mirbeau : Célestine, Clara, Isidore Lechat, Lucien, Jean Mintié, padre de Kern, ecc. Ma, ultimamente, una banda di wikipediani italiani, ignoranti ed ottusi, gelosi del loro esultante potere di destruzione del lavoro altrui, hanno cancellato le schede dei personaggi, hanno vandalizzato più volte le voci dedicate alle opere, e hanno cominciato a censurare e scuoiare la scheda dello scrittore… Intolerabile ed allucinante ! In queste condizioni, siccome non c’era più niente da aspettare da questi oscurantisti, né dalla Wikipedia italiana, diventata un’« enciclopedia buffa », dove gli specialisti sono disprezzati e alla merce di “responsabili” irresponsabili, ho deciso di recuperare e ripristinare le voci saccheggiate o cancellate.
Depuis que le djihadisme islamiste a ensanglanté le monde, et particulièrement la France, le déba... more Depuis que le djihadisme islamiste a ensanglanté le monde, et particulièrement la France, le débat sur la laïcité a repris de la virulence, 112 ans après la Loi de Séparation, et a profondément divisé le monde intellectuel en général et la gauche en particulier. Pour faire court, il y a ceux qui considèrent que l'Islam n'est pas en cause dans l'islamisme et qu'il convient, au nom d'une conception libérale de la laïcité, dite « ouverte », de tolérer des pratiques relevant d'une culture propre à des populations considérées comme opprimées et dont il faut bien entendre les revendications. Face à ce que certains qualifient oxymoriquement d'« islamo-gauchisme », les partisans d'une laïcité intransigeante se refusent à ces compromissions et voient dans l'Islam de populations insuffisamment acclimatées à la vie dans un pays laïque, libéré de l'emprise religieuse traditionnelle, un obstacle à l'intégration démocratique et à l'émancipation des esprits et, au premier chef, à celle des femmes. Le débat n'est pas nouveau, mais, à l'époque de Mirbeau, ce n'était pas l'Islam qui était au centre du débat, car il était inexistant en France, mais bien l'omnipotence de l'Église catholique romaine. Pour sa part, Mirbeau, qui était passé par les mains des jésuites, ces « pourrisseurs d'âmes 1 », quoique radicalement athée et matérialiste, en avait conservé une marque indélébile, qu'il appelle « l'empreinte 2 », et, pendant des décennies, il a dû mener bataille pour s'en libérer lui-même et contribuer à en libérer les autres, en commençant par les enfants innocents, pâte aisément malléable pour les « pétrisseurs d'âmes 3 ». Contre ce que Joseph Macé-Scaron appelle « l'horreur religieuse », il refuse donc de se contenter d'une simple séparation entre le sacré et le profane, entre le privé et le public, entre l'État et les religions : remontant des effets à la cause, il s'attaque aux religions elles-mêmes et prend, contre elles et contre le poison qu'elles distillent, la défense de tous les petits Sébastien Roch, Mozart potentiels qu'on assassine. Pour que le grand public finisse par prendre conscience de la gravité du danger que représentent les religions en général, et la catholique en particulier, il convient de leur arracher le masque de respectabilité qui camoufle tant bien que mal leurs turpitudes en tous genres, quand ce ne sont pas les crimes à grande échelle, qu'elles perpètrent, depuis des siècles, en toute impunité et en toute bonne conscience, puisque c'est toujours au nom de leur dieu – et, qui plus est, chez les chrétiens, au nom d'un « dieu d'amour » ! Même des laïques convaincus ne restent pas insensibles devant le prestige que leur confère l'histoire et disent respecter, chez les croyants, la dimension spirituelle que sont supposés refléter tant de chefs-d'oeuvre de l'art. Pour Mirbeau, au contraire, il n'y a rien de respectable dans le principe même des religions, qui reposent sur l'ignorance des masses et qui perpétuent leur emprise sur les âmes par une habile combinaison de terreur et d'espérance. Il n'est, certes, pas possible d'empêcher qui que ce soit de croire au Père Noël, à la virginité de Marie, à la transsubstantiation ou aux visions de Bernadette Soubirous, mais de telles fariboles ne méritent pour autant aucune forme de respect, et encore moins ceux qui les colportent et qui en font un juteux commerce. Mirbeau, le grand démystificateur, va donc s'employer, dans toute son oeuvre, à ruiner les mystifications religieuses en arrachant ce voile de respectabilité, afin de faire apparaître, aux yeux de tous, une réalité sordide et inavouable. C'est ainsi qu'il nous fait découvrir, au fil de ses récits, que l'Église catholique, malgré son apparat et ses multiples « grimaces » destinées à duper le bon peuple et à susciter crainte et respect, n'est, tout bien considéré, qu'une vulgaire association de malfaiteurs, avide de préserver par tous les moyens sa domination et sa richesse, et coupable de véritables crimes de lèse-humanité, mais 1 « Souvenirs », L'Aurore, 22 août 1898. 2 L'expression apparaît à deux reprises dans Sébastien Roch (Éditions du Boucher, 2003, p. 162 et p. 224). 3 « Pétrisseurs d'âmes », Le Journal, 16 février 1901.
La vandalisation dont ont été l'objet, sur la Wikipédia italienne, les notices sur Octave Mirbeau... more La vandalisation dont ont été l'objet, sur la Wikipédia italienne, les notices sur Octave Mirbeau et sur toutes ses œuvres, et la suppression de toutes les notices sur ses personnages, ne manquent pas d'interpeller dans une entreprise qui se présente comme une « encyclopédie libre » et qui prétend « libérer la culture ». Au-delà des mobiles liés à tout acte de vandalisme en général, par-delà les explications tenant à l'ignorance, à la bêtise et à l'arrogance de petits chefs jaloux de leurs petits pouvoirs, force est de poser le problème du fonctionnement même de Wikipédia, dont les vandales en question, administrateurs incontrôlés, constituent des ressorts essentiels, ce qui leur garantit l'impunité. Le problème fondamental de la Wikipédia italienne, qui risque de se rencontrer dans les autres langues, c'est que les spécialistes y sont a priori suspects d' « originalité » et d'absence de « neutralité » et n'ont donc pas droit de cité : seuls des gens sans compétences particulières, voire totalement ignorants des sujets traités, sont habilités... à copier ce qu'ils trouvent ailleurs !... C'est bien évidemment le contraire de ce que doit être une encyclopédie.
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Papers by Pierre Michel
Octave Mirbeau et Albert Camus ont en commun d’avoir mis l’éthique au poste de commande, dans leur engagement politique, et d’avoir adopté une esthétique à la fois classique, par l’adaptation de la forme et des règles aux objectifs de l’écrivain, et novatrice, par le recours à une pédagogie de choc, qui oblige les lecteurs à jeter sur les choses un regard neuf qui contribue à les émanciper intellectuellement. Refusant les œuvres didactiques, les œuvres à thèse et, à plus forte raison, les œuvres de propagande, ils ont fait de l’ambiguïté un principe de leur éthique en même temps que de leur esthétique. Ici le corpus réduit à deux œuvres théâtrales en forme de tragédies, "Les Mauvais bergers" et "Les Justes", et à deux romans, "Le Journal d’une femme de chambre" et "L’Étranger", pour montrer que, malgré leur révolte et leur engagement au service de la justice, les deux écrivains ont respecté leur devoir de vérité en ne craignant pas de « désespérer Billancourt » et en s’interdisant de faire de leurs personnages de simples porte-parole : Jean Roule et Kaliayev, comme Célestine et Meursault, constituent de simples exemples, et pas du tout des modèles à suivre, et leurs comportements aboutissent à des apories, que leurs créateurs se gardent bien de prétendre dépasser.
trovano, separatamente, sulla pagina italiana del sito Internet della
Société Octave Mirbeau e sono dunque accessibili direttamente
online : http://www.mirbeau.org/it.html.
Tutte le voci sulle opere di Octave Mirbeau erano state scritte
per la Wikipedia italiana, dieci anni fa. C’erano anche otto voci
dedicate ai personaggi di Mirbeau : Célestine, Clara, Isidore Lechat,
Lucien, Jean Mintié, padre de Kern, ecc. Ma, ultimamente, una banda
di wikipediani italiani, ignoranti ed ottusi, gelosi del loro esultante
potere di destruzione del lavoro altrui, hanno cancellato le schede dei
personaggi, hanno vandalizzato più volte le voci dedicate alle opere, e
hanno cominciato a censurare e scuoiare la scheda dello scrittore…
Intolerabile ed allucinante !
In queste condizioni, siccome non c’era più niente da aspettare
da questi oscurantisti, né dalla Wikipedia italiana, diventata
un’« enciclopedia buffa », dove gli specialisti sono disprezzati e alla
merce di “responsabili” irresponsabili, ho deciso di recuperare e
ripristinare le voci saccheggiate o cancellate.
Drafts by Pierre Michel
Octave Mirbeau et Albert Camus ont en commun d’avoir mis l’éthique au poste de commande, dans leur engagement politique, et d’avoir adopté une esthétique à la fois classique, par l’adaptation de la forme et des règles aux objectifs de l’écrivain, et novatrice, par le recours à une pédagogie de choc, qui oblige les lecteurs à jeter sur les choses un regard neuf qui contribue à les émanciper intellectuellement. Refusant les œuvres didactiques, les œuvres à thèse et, à plus forte raison, les œuvres de propagande, ils ont fait de l’ambiguïté un principe de leur éthique en même temps que de leur esthétique. Ici le corpus réduit à deux œuvres théâtrales en forme de tragédies, "Les Mauvais bergers" et "Les Justes", et à deux romans, "Le Journal d’une femme de chambre" et "L’Étranger", pour montrer que, malgré leur révolte et leur engagement au service de la justice, les deux écrivains ont respecté leur devoir de vérité en ne craignant pas de « désespérer Billancourt » et en s’interdisant de faire de leurs personnages de simples porte-parole : Jean Roule et Kaliayev, comme Célestine et Meursault, constituent de simples exemples, et pas du tout des modèles à suivre, et leurs comportements aboutissent à des apories, que leurs créateurs se gardent bien de prétendre dépasser.
trovano, separatamente, sulla pagina italiana del sito Internet della
Société Octave Mirbeau e sono dunque accessibili direttamente
online : http://www.mirbeau.org/it.html.
Tutte le voci sulle opere di Octave Mirbeau erano state scritte
per la Wikipedia italiana, dieci anni fa. C’erano anche otto voci
dedicate ai personaggi di Mirbeau : Célestine, Clara, Isidore Lechat,
Lucien, Jean Mintié, padre de Kern, ecc. Ma, ultimamente, una banda
di wikipediani italiani, ignoranti ed ottusi, gelosi del loro esultante
potere di destruzione del lavoro altrui, hanno cancellato le schede dei
personaggi, hanno vandalizzato più volte le voci dedicate alle opere, e
hanno cominciato a censurare e scuoiare la scheda dello scrittore…
Intolerabile ed allucinante !
In queste condizioni, siccome non c’era più niente da aspettare
da questi oscurantisti, né dalla Wikipedia italiana, diventata
un’« enciclopedia buffa », dove gli specialisti sono disprezzati e alla
merce di “responsabili” irresponsabili, ho deciso di recuperare e
ripristinare le voci saccheggiate o cancellate.