MEFRA – 123/1 – 2011, p. 237-376.
Activités archéologiques
de l’École française de Rome
Chronique
Année 2010
294
Cumes
Chronique
métrique à l’échelle de Portus et proposer de caler l’ensemble des travaux actuels et futurs par rapport à un
seul niveau repère : le zéro marin biologique antique. À
Portus, nous avons la chance que ce niveau de faune
fixé ait été préservé. L’utiliser comme zéro de référence
permettrait de mieux relier tel ou tel type de structure à
son niveau marin contemporain. Enfin, avec un zéro
marin commun, l’ensemble des chantiers archéologiques de Portus pourraient désormais être facilement
comparables entre eux.
Jean-Philippe GOIRAN, Ferréol SALOMON, Évelyne
BUKOWIECKI et Giulia BOETTO
CUMES
Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR),
Soprintendenza archeologica di Napoli e Pompei
et Ministère des Affaires étrangères et européennes (Paris).
En 2010, les recherches sur des monuments funéraires de la nécropole de Cumes ont été poursuivies
grâce aux crédits octroyés par le Ministère des Affaires
étrangères et européennes. L’intervention a porté principalement sur trois zones :
tombeau D32. Originellement, il était posé verticalement et devait constituer la stèle. Il n’a pas été possible,
pour des raisons de sécurité, de dégager la face inférieure qu’on peut imaginer ornée d’une décoration
architecturale : Gabrici écrit que les stèles des sépultures
les plus riches de cette époque ont des «pretese architettoniche» et font leur apparition avec l’octroi du municipium à Cumes vers la fin du IIIe siècle. Elles sont
particulièrement nombreuses au IIe siècle (Gabribi 1913,
p. 731).
– un groupe de tombes à chambre des IIe et Ier siècles
avant J.-C. (D25 et D33) et de tombes à incinération
sous cippes de tuf de la même époque,
– le grand mausolée augustéo-tibérien A63 qui a
livré une inscription essentielle faisant référence à un
préteur de la ville de Cumes,
– le mausolée A68 d’époque tibéro-claudienne.
Les tombes à chambres de la zone D
et les cippes funéraires (fig. 74)
La zone fouillée en 2010 dans le secteur D est située
sur le bord est de l’axe routier D qui, sortant de la porte
nord, se dirigeait vers Capoue (fig. 75). La tombe la plus
ancienne qu’il a été possible de fouiller avant d’atteindre
le niveau de la nappe phréatique est la SP29050 qui
appartient à un type défini par E. Gabrici comme «a
parallelepidi con stele superiore» (Gabrici 1913, p. 731734). La sépulture comprend trois blocs de tuf jaune. Les
deux blocs inférieurs (0,43 m de hauteur par 0,83 de
largeur), posés sur un niveau situé à 3,50 m sous le sol
actuel, présentent un logement hémisphérique contenant une cruche en céramique commune qui contenait
les cendres du défunt et du mobilier en bronze (bracelet?) (fig. 76). Le bloc supérieur qui a une base de
0,83 × 0,39 m et une hauteur dépassant un mètre se
présente couché à l’horizontale, à cause de la construction, nettement postérieure de la façade arrière du grand
Fig. 74 – Cumes. Vue aérienne de la zone D de la nécropole
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
295
Fig. 75 – Cumes. Plan de la zone D de la nécropole.
D’une époque de peu postérieure est la tombe à
chambre D25 qui a été découverte éventrée (fig. 77). Ce
grand tombeau est constitué de blocs de tuf équarris,
assemblés sans liant. Ces blocs sont de dimensions
variables, allant de 0,35 à 1,12 m de longueur pour une
largeur constante de 0,44 à 0,45 m. La façade du monument, haute de 2,20 et large de 2,53 m, devait être
visible depuis la voie; elle était couverte d’un enduit
blanc peut-être décoré. L’intérieur présente un plan rectangulaire, la chambre étant couverte par une voûte en
berceau selon un schéma largement diffusé en Campanie (fig. 78). La chambre est occupée par deux lits
funéraires et une tombe en coffrage (sur le côté sud). Les
lits sont construits en dalles de tuf recouvertes d’une
fine couche d’enduit blanc. Sur le côté occidental, une
ouverture à sommet semi-circulaire est fermée par une
dalle de tuf. Cette porte mettait en communication la
chambre avec la voie, probablement par l’intermédiaire
d’un escalier, par la suite remblayé et recouvert par le
monument D32. Au-dessus des lits, au niveau des reins
de la voûte, court une corniche saillante en tuf dont la
moulure est très simple. Toutes les parois sont recouvertes d’un enduit blanc.
Le monument D25 correspond à la tombe fouillée et
décrite par le chanoine Andrea de Jorio dans son
volume Metodo per rinvenire e frugare i sepolcri degli antichi
publié en 1824. L’auteur le décrit comme un «sepolcro
misto» et raconte l’avoir fouillé en 1819 en présence de
296
Cumes
Chronique
Fig. 77 – Cumes. La tombe à chambre D25
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
postérieure à la D25 et aux SP29008 et SP29009, comme
le montrent à la fois la technique de construction (opus
incertum) et la stratigraphie. La porte du monument est
fermée par le mur d’enclos du monument D26 datable
du Ier ou du IIe siècle de notre ère. À l’extérieur, la partie
visible, haute de 0,80 m, est enduite d’une couche de
mortier blanc. La couverture, mesurant 3,70 m par
3,45 m, est assurée par une épaisse couche de mortier
Fig. 76 – Cumes. Vue de la sépulture SP 29050
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
l’empereur et de l’impératrice d’Autriche, du prince de
Salerno D. Leopoldo et de la suite royale. Il en fournit
un plan et une vue de l’intérieur (de Jorio 1824, p. 179).
Le mobilier trouvé à cette occasion est perdu et il n’a
subsisté après la fouille d’A. de Jorio que des fragments
d’unguentaria en céramique et des éléments en bronze
(d’une boîte en bois?). De Jorio mentionne parmi les
objets retrouvés un plat en verre «nell’interno del quale si
ammirava un paessaggio dipinto» (de Jorio 1824, p. 179).
Dans le courant de la première moitié du Ier siècle,
au sud de la tombe D25, deux sépultures à incinération
surmontées de cippes sont mises en place SP29008 et
SP29009. Elles se composent d’un cippe rectangulaire en
tuf portant une inscription et sous lequel se trouve
l’urne contenant les ossements du défunt. L’inscription
mentionne le nom et la filiation de la personne incinérée. La tombe SP29009, un peu en retrait, est dotée
d’un cippe mesurant 1,06 m de haut et 0,64 m de large,
portant un nom de famille bien connue à Cumes : Heia.
Vers le milieu du Ier siècle, prend place, au sud de
cette zone, la tombe à chambre D33 (fig. 79). Elle est
Fig. 78 – Cumes. Intérieur de la tombe à chambre D25
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
297
Fig. 79 – Cumes. La tombe à chambre D33
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
Fig. 81 – Cumes. Les tombes à incinération SP 29006 et 29007
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
de tuileau (20 cm env.) reposant sur une corniche saillante en blocs de tuf. Un orifice a été percé à son sommet
anciennement (0,82 × 0,44 m) lors de fouilles clandestines. L’intérieur de la chambre mesure 2,65 × 2,35 m; il
est recouvert par une voûte en berceau haute de
2,56 m. La voûte repose sur une corniche saillante
(fig. 80). Trois lits funéraires sont construits le long des
parois nord, est et sud. L’intérieur est revêtu d’enduit
blanc. Deux lits avaient été en partie détruits par des
fouilles clandestines. Seul le lit est, intact, présente un
mur périmétral en maçonnerie et l’intérieur est rem-
blayé avec de la terre et des pierres. Les faces de lits sont
recouvertes d’un enduit blanc et leur partie supérieure
d’un enduit rose. La porte, sur le côté ouest, est fermée
par un monolithe de tuf mesurant 1,53 × 0,57 m. Le
pavement est en mortier de tuileau, mesure 2,40 m de
long par 0,74 m de largeur entre les lits. Aucun objet
appartenant au mobilier funéraire n’a été trouvé.
À une phase de peu postérieure appartiennent deux
tombes à incinération voisines, les SP29006 et SP29007
dotées d’urnes en céramique commune et d’offrandes
d’unguentaria (fig. 81).
Le mausolée A63 (fig. 82)
Fig. 80 – Cumes. Intérieur de la tombe à chambre D33
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
La campagne de fouille visait à éclaircir plusieurs
points concernant l’histoire du monument funéraire
A63, en grande partie fouillé en 2006, mais dont tout le
secteur occidental était resté inexploré. C’est cette zone
qui a fait l’objet des investigations, principalement destinées à comprendre l’évolution du monument et des
structures voisines au cours de l’Antiquité. Le monument est construit sur des sédiments archéologiques
d’une profondeur certainement importante mais il a été
impossible de les fouiller du fait de l’affleurement de la
nappe phréatique. La connaissance de l’architecture du
monument a été précisée par le dégagement du sommet
de l’escalier d’accès à la chambre funéraire et de l’abside
du mur ouest de l’enclos en opus reticulatum. Désormais
on sait que le monument, malgré ses irrégularités, a été
construit d’un seul jet (Brun et alii 2009, p. 635-717).
Les autres structures appartiennent à des aménagements
soit extérieurs au monument A63, soit postérieurs à son
utilisation en tant que monument funéraire, les deux
cas étant parfois combinés. À l’issue de cette campagne,
l’évolution du monument peut être scandée en sept
états.
298
Cumes
Chronique
Fig. 82 – Cumes. Le mausolée A63, la voie domitienne et le mausolée A68 (cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
État 1 (fig. 83)
Au sud d’un axe qui contourne par le sud la lagune
de Licola, un grand monument funéraire est installé. Un
enclos (17,60 m de long sur 14,40 m de large) fait de
murs en opus reticulatum couronnés par une file de chaperons en tuf jaune délimite sur trois côtés l’enceinte de
l’édifice, tandis qu’en façade est édifié un mur de blocs
de tuf gris dont certains portent des décorations. Deux
exèdres de forme semi-circulaire ont été ménagées dans
les murs ouest et est de l’enclos (respectivement 3,40 m
et 3 m de diamètre). La façade a fait l’objet d’un programme décoratif élaboré comportant deux scholae (diamètre : 1,85 m) avec banquettes destinées à accueillir les
passants, et des sculptures exécutées en bas-relief,
conservées dans la partie occidentale. Elles représentent
une porte à deux battants et une sphinge assise, tenant
entre ses pattes antérieures un crâne.
Au centre du mur de façade, une fontaine est
implantée. Plusieurs vestiges sont encore conservés : un
tuyau en plomb, par endroits encore en place, et dont
l’empreinte a pu être suivie sur la partie interne nord-
ouest du mur de façade. L’ouverture du système d’arrivée d’eau dans la fontaine se trouvait sous une dalle de
tuf jaune. La fontaine était alimentée par un grand
réservoir construit contre le mur sud de l’enclos.
Approximativement au centre de l’enclos se trouve
le monument funéraire. Le mausolée comporte une
partie en élévation et une partie hypogée. L’élévation
consiste en un massif de maçonnerie mesurant 7,80 sur
5,70 m, plaqué d’un revêtement en grand appareil de
calcaire blanc et de marbre qui devait provoquer un
contraste saisissant avec la couleur gris-noir de la façade
de l’enclos. Du décor de l’élévation, nous ne savons
presque rien puisque presque tous les blocs de l’élévation ont été récupérés à l’époque byzantine pour en faire
de la chaux. Seul un bloc de marbre sculpté de frise
d’armes (casque, bouclier), découvert dans la couche de
destruction, devait lui appartenir. Sous le massif
maçonné, se trouve une chambre funéraire à laquelle on
accédait par un escalier situé dans la partie sud-ouest de
l’enclos. L’escalier menait à un vestibule qui permettait
d’accéder à la chambre, aujourd’hui noyée dans la
299
Fig. 83 – Cumes. Hypothèse de restitution du mausolée A63 (dessin S. Girardot, architecte DPLG).
nappe phréatique. Celle-ci était fermée par une porte en
bois qui était encore conservée sur une dizaine de centimètres de haut. Cette porte a été murée après la dernière utilisation de la chambre.
La chambre mesure 2,95 m de long sur 3,51 m de
large. Son sol est un béton de tuileau comportant des
incrustations de marbres colorés d’origines diverses. La
chambre, haute de 2,50 m, possède une voûte en plein
cintre dans laquelle deux puits de lumière cylindriques
sont percés (diamètre de 0,20 m). À l’intérieur de la
chambre, deux lits maçonnés ont été construits, sur les
côtés ouest et est de la pièce. Le lit ouest était vide et
seule une mince planche de bois a été découverte posée
sur le fond. Le lit oriental est lié à une banquette
maçonnée sur laquelle des objets appartenant ou offerts
au défunt ont été disposés : deux strigiles en bronze et un
vase à paroi fine assimilable à la forme Mayet IX. Un
corps a été placé sur un lit de sable recouvert d’une natte,
comme semblent l’indiquer les restes ligneux découverts
sous le corps et sous le balsamaire en verre (forme Scatozza Höricht 49) déposé sur son côté oriental.
Le reste du mobilier découvert dans la chambre
funéraire est composé d’une ampoule en verre transparent (forme Isings 6), d’un balsamaire en verre coloré
(forme Scatozza Höricht 49), d’un vase en bronze muni
d’une anse, d’une chaîne en bronze et enfin d’une ser-
rure, également en bronze, d’un coffret certainement
destiné à contenir des rouleaux de papyrus. La plupart
de ces objets avaient glissé de leur emplacement originel
pour se retrouver piégés entre la porte en bois de la
chambre et le mur de bouchage construit contre celle-ci,
mais il est probable qu’ils appartenaient tous à un même
lot disposé sur la banquette au sud du défunt inhumé.
Sur la paroi nord de la chambre, un banc en
maçonnerie a été édifié, dans lequel deux emplacements
ont été aménagés pour recevoir des vasques de marbre
blanc, de forme semi-cylindrique, pourvues d’amorces
de pieds, de même facture. Elles contenaient toutes
deux les restes d’un bûcher funéraire. Les analyses
anthropologiques pratiquées par Henri Duday indiquent
qu’il s’agit de deux individus distincts. Dans l’une
étaient disposés les restes d’une femme assez âgée
(signes d’arthrose cervicale modérée). L’autre contenait
les restes d’un jeune homme de corpulence robuste,
vraisemblablement âgé entre 16 et 25 ans.
Ces deux vasques sont des sortes de lènoi et il faut
probablement voir dans cette utilisation inhabituelle la
marque de bacchants qui auraient aussi projeté de se
faire enterrer dans une salle de banquet. En effet, les
trois banquettes forment un triclinium au centre duquel
se trouve une table cylindrique en maçonnerie.
L’inscription découverte cette année en remploi
300
Cumes
Chronique
dans la construction du puits de l’état 4 est probablement à rattacher au mausolée A63. Elle mesure 78 cm
de long sur 66 cm de large (fig. 84). L’inscription nous
apprend qu’un certain C(aius) Gavius Garra Cavonius,
nommé préteur de Cumes à l’âge de 16 ans, décédé
5 ans plus tard, a reçu, après senatus consulte de Cumes
et décret du municipe, des funérailles et une sépulture
publiques; l’inscription a été récemment présentée par
Mireille Cébeillac-Gervasoni («Publice, ex senatu consultu
municipiq(ue) iussu... : nouveau témoignage sur les pratiques du gouvernement municipal dans une inscription
inédite de Cumes») dans le cadre des XVIIe Rencontres
franco-italienne d’épigraphie du monde romain (Udine,
Italia, 14-16 octobre 2010).
Il est probable que ce texte donne le nom de la
famille propriétaire du mausolée A63. Même si une certaine prudence doit être conservée car la pierre inscrite,
en remploi, peut donc provenir d’un autre monument,
deux éléments plaident en faveur de son attribution à ce
monument.
L’une des vasques trouvée dans la chambre funéraire a livré les ossements brûlés d’un individu mâle
d’un âge compris entre 16 et 25 ans qui pourrait correspondre à C. Gavius Carra Cavonius.
L’inscription a été remployée dans un puits creusé
après que le monument ait été abandonné. Or nous
savons qu’il était abandonné en 95 de notre ère et partiellement détruit puisqu’un élément sculpté de la
façade a été trouvé dans le remblai de la voie domitienne et puisque ce même remblai, notamment les
accumulations d’amphores complètes, ennoie la partie
basse de la façade. Après l’abandon, l’enclos funéraire a
été divisé en deux parties inégales. La plus grande, à
l’est, a conservé une fonction funéraire : des tombes à
inhumations à bauletto y sont construites en remployant
des blocs de la façade. À la même époque, à l’ouest du
mur MR 63006, s’installe une officine artisanale qui utilise des bassins et un puits. Il paraît donc logique que
c’est en récupérant des blocs dans la façade ruinée que
les artisans ont utilisé l’inscription. Cette hypothèse a
pour corollaire que l’inscription en question était insérée
dans la façade en tuf gris et que, probablement, le mausolée lui-même était encore intact.
Les seuls éléments matériels datant le monument
funéraire sont le mobilier découvert dans la chambre
funéraire, et celui mis au jour dans les remblais. L’analyse des deux, encore en cours, indique une datation à la
fin du règne d’Auguste ou sous Tibère.
État 2
Les aménagements qui interviennent durant la
seconde phase sont probablement dus à un phénomène
naturel ayant impliqué un rehaussement général des
niveaux de circulation survenu quelques années après la
construction du monument. En relation avec celui-ci,
l’escalier d’accès à la chambre funéraire est lui aussi
rehaussé, par l’ajout d’une marche.
État 3
L’état 3 caractérise une série de travaux réalisés
pour l’aménagement de l’accès à la cité. La voie est
rehaussée et dotée d’un pavement en basalte par ordre
de Domitien. Devant l’enclos, la construction de la voie
Domitienne implique le remblaiement de la voie précédente – alors en terre battue – sur une forte épaisseur
(environ 1 m). Pour gagner en volume, de nombreuses
amphores entières sont disposées debout entre les piliers
installés devant la façade, tandis que d’autres sont jetées
dans le comblement. La partie supérieure du
comblement, remplie d’éclats de basalte, atteste que ce
remblai est effectué pour la construction de la voie.
La datation de la construction de la voie Domitienne
est assurée par un passage des Silves de Stace, qui permet
de situer les travaux durant la période 94-95 de notre
ère. Du côté du mobilier, la datation des céramiques
découvertes – sigillée sud-gauloise, amphores de la
péninsule Ibérique (Beltran II, Dressel 14) et de Crète –
confirme la datation flavienne de ces aménagements.
État 4 (fig. 85)
Fig. 84 – Cumes. Inscription funéraire de C. Gavius Garra Cavonius
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
L’état 4 correspond à des travaux de réaménagement de l’espace à l’intérieur et à l’extérieur de l’enclos
301
Fig. 85 – Cumes. Le puits et les bassins de l’état 4 du mausolée A63.
funéraire du mausolée A63. Les travaux réalisés pour la
construction de la voie Domitienne marquent également
la fin de l’utilisation de la chambre funéraire du mausolée MSL 63024. Des réaménagements sont réalisés
pour la création d’un espace artisanal à l’ouest tandis
que la partie orientale de l’enclos conserve une vocation
funéraire.
Dans la partie occidentale est construit un bassin en
béton de tuileau, alimenté en eau par un tuyau en
plomb relié à la citerne. À l’ouest du mur d’enclos, un
puits et plusieurs bassins en béton de tuileau sont aménagés, témoignant de la transformation de cette zone en
espace artisanal.
La zone orientale de l’enclos reste dédiée à un usage
funéraire. Trois tombes en bâtière sous massif de
maçonnerie sont aménagées. Des fragments de la façade
en tuf gris du monument ont été utilisés dans la
maçonnerie de ces sépultures. La spoliation du monument indique qu’à cette période, la famille propriétaire
de l’édifice original devait avoir disparu.
Les aménagements initiaux de l’état 4 sont datables
du début du IIe siècle de notre ère, en correspondance
ou peu après la construction de la voie Domitienne.
L’atelier a eu une durée de vie relativement longue,
jusqu’au IIIe siècle. En effet, le mobilier découvert dans
la couche d’utilisation du puits appartient à un répertoire daté du IIIe siècle. Dans le domaine funéraire, les
sépultures aménagées dans la partie orientale de l’enclos sont des constructions caractéristiques des IIe et
IIIe siècles.
État 5
L’état 5 correspond à la destruction de l’ensemble du
secteur par un séisme. Ce tremblement de terre a provoqué l’effondrement des toitures de l’aile ouest de l’enclos et de l’espace artisanal. Les murs des absides et des
bassins se sont tous affaissés vers l’ouest.
La datation de cette destruction peut être approximativement déterminée grâce à la découverte d’un lot
de 51 monnaies dans les niveaux de destruction causés
par le tremblement de terre. Ce trésor – qui nous fournit
un terminus post-quem – comportait des monnaies de Gallien et Claude II. Il est probable que ce lot a été enfoui
dans la couche de destruction. Ainsi on peut établir que
le tremblement de terre s’est produit antérieurement au
dernier quart du IIIe siècle.
État 6
Durant cette dernière phase d’occupation du secteur, la destination funéraire se perpétue dans la partie
orientale de l’enclos du monument A63. Trois sépultures
utilisent des amphores et trois autres sont creusées
contre le mur oriental de l’enclos funéraire dans le courant des IVe et Ve siècles.
302
Cumes
Chronique
État 7
Dans la partie occidentale de l’enclos originel, des
constructions d’époque tardive sont construites sur les
niveaux de destruction de la phase 5. L’identification du
type d’installation est difficile à établir car les niveaux
d’occupation étaient détruits car proches du niveau de la
surface actuelle, et seule la fondation de murs et une à
deux assises au maximum étaient conservées. L’appareil
des murs à petits blocs carrés, typique de la période
byzantine et l’altitude à laquelle ont été construits ces
murs, incite à les situer autour des VI-VIIe siècle de notre
ère. Il est possible que cette construction, peut-être à
usage agricole, soit en rapport avec le puits qui est
creusé à cette époque dans la chambre funéraire du
mausolée A49 de l’autre côté de la voie Domitienne.
L’abondant mobilier trouvé dans son comblement en
date l’utilisation du VIIe siècle.
Le mausolée A68 (fig. 86)
Face au monument A63 au nord de la voie et à
l’ouest du mausolée A49 se trouve un massif maçonné
qui n’avait pas été dégagé jusqu’à présent. Il appartient à
un monument funéraire à chambre hypogée plusieurs
fois pillée. De son architecture externe, seule une file de
grands blocs en calcaire est conservée en partie basse,
appartenant à la fondation (8,60 m de longueur par
0,90 m de largeur).
La chambre funéraire est un espace quadrangulaire
au sol en béton, doté d’une voûte en plein cintre, revêtu
d’enduit blanc et doté sur trois de ses côtés d’une
console pour la disposition d’objets (fig. 87). L’accès à la
chambre se faisait grâce à une porte disposée sur le côté
nord, encore en place. À l’intérieur de la chambre,
comblée jusqu’au sommet de pierres, sable, terre et
mobilier de toutes époques, a été découvert dans l’angle
Fig. 86 – Cumes. Le mausolée A68.
Fig. 87 – Cumes. Plan et coupe du mausolée A68
(dessin S. Girardot, architecte DPLG).
sud-est un sarcophage en marbre blanc au fond duquel
un coussin était ménagé dans la pierre (fig. 88). Le sarcophage était doté d’un couvercle dont ne subsiste que
l’empreinte dans le mur, tandis que le corps qui y était
déposé à été retrouvé éparpillé par les pilleurs en plusieurs endroits de la chambre.
Le mobilier découvert dans la chambre ne permet
aucunement d’établir une datation car il s’agit d’un lot
très hétérogène, qui s’est constitué suite aux divers pillages qu’a subis la chambre funéraire. Un sondage sous
le trottoir de la voie Domitienne et dans les niveaux de
voie antérieurs situés le long de la façade sud du monument a mis au jour les strates de construction de l’édifice
contenant des blocs de grand appareil seulement
dégrossis, abandonnés sur le chantier. Ils étaient
accompagnés d’une monnaie frappée sous Tibère et de
céramique sigillée italique qui donnent un terminus post
quem vers 15 de notre ère.
303
Fig. 88 – Cumes. Intérieur du mausolée A68 avec sarcophage
de marbre.
Cette nouvelle campagne a ainsi permis de progresser dans la compréhension des dynamiques de la
nécropole. Certes, la présence de la nappe phréatique a
empêché de fouiller en dessous du niveau des tombes du
IIe siècle avant J.-C., alors que la stratigraphie se poursuit encore sur plusieurs mètres recouvrant les tombes
des époques classique et archaïque et de l’âge du Fer.
Mais à partir de la période samnite, le fil de l’histoire est
continu. Au-dessus d’un niveau caractérisé par une
tombe à chambre du IVe siècle ornée de peintures,
prennent place, aux IIIe et IIe siècles avant notre ère, des
tombes à incinération dans des cippes de tuf anépigraphes mais parfois décorés de motifs architecturaux.
C’est à cette phase qu’appartient la tombe SP 29050
fouillée cette année. Lui succède la tombe à chambre
D25 déjà fouillée par le Chanoine de Jorio en 1819 mais
qu’il a été possible de nettoyer et de relever avec un
scanner tridimentionnel. Un demi-siècle après est édifié
la tombe à chambre D33 à laquelle sont accolées quatre
tombes sous cippes en tuf portant des épitaphes; elles
sont datables du milieu du Ier siècle avant notre ère.
Dans la seconde moitié du Ier siècle avant notre ère
et au début du Ier siècle de notre ère, la typologie des
tombes aristocratiques change : aux hypogées succèdent
les mausolées présentant des élévations importantes, tels
que le mausolée cylindrique A2, le mausolée surmonté
d’un édicule pour statues D34 et le mausolée A63. En
mode mineur, les tombes à cippes de la période précédente sont remplacées par de petits monuments à
fronton (Brun et Munzi 2009).
Au début de l’Empire, la voie est-ouest qui sort de la
porte médiane pour se diriger vers la mer se couvre progressivement de monuments parmi lesquels ceux qui
ont fait l’objet de recherches cette année, A63 et A68.
Leur succèdent des columbaria comme A8, D31, E39. La
voie est presque totalement bordée de mausolées lorsqu’on construit au-dessus d’elle la voie dallée (95 de
notre ère). À partir de ce moment, certains mausolées
sont désaffectés, et, dans le mausolée A63, toute la
partie ouest est détachée de la parcelle funéraire pour
construire un atelier qui semble fonctionner jusqu’au
milieu du IIIe siècle au moins. Entre temps, les mausolées A41 et A62 sont construits et décorés de peintures;
ils seront utilisés largement au cours des deux siècles
suivant pour installer des tombes en coffre ou sous tuiles
qui, par ailleurs, se répandent un peu partout dans la
nécropole jusqu’au VIe siècle.
Emmanuel BOTTE, Jean-Pierre BRUN, Laëtitia CAVASSA, Gianluca D’AVINO et
Nicola MELUZIIS, Priscilla MUNZI
[Avec la collaboration de Guilhem CHAPELIN. Anselme CORMIER, Milena COSTAGLIOLA, Serena D’ONOFRIO, Frédéric GIROT, Aline LACOMBE, Stéphanie LE BERRE,
Laure MÉTAIS, Ophélie VAUXION et de Sophie GIRARDOT (architecte)]
POMPÉI
Tannerie
Programme de recherches sur l’artisanat antique
La tannerie de l’insula 5 de la Regio I a fait l’objet d’une
ultime campagne de sondages destinés à clarifier certains
points au moment de la préparation de la publication
finale. Les sondages ont porté sur le puits situé à l’angle
Nord-Ouest du portique 8, sur la partie médiane de la zone
9, sur la partie Est de la zone 13 et sur la pièce 25 (fig. 89).
Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR), Soprintendenza archeologica di Napoli e Pompei, Ministère des
affaires étrangères et européennes et Agence nationale
de la recherche (projet Artifex)
304
Pompéi
Chronique
Fig. 90 – Pompéi, tannerie I 5. Vue de l’intérieur du puits au niveau
des tuiles mêlées aux lapilli de l’éruption de 79
(cliché E. Botte CJB-CNRS/EFR).
Fig. 89 – Pompéi, tannerie I 5. Vue aérienne avec localisation des
secteurs sondés en 2010 (cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
Puits situé à l’angle Nord-Ouest du portique 8
Sous le portique 8, un puits de plan rectangulaire
(1,70 × 1,40 m), creusé dans le basalte de la coulée bien
visible à l’amphithéâtre, avait été découvert en 2008
mais n’avait pu être fouillé du fait des travaux de restauration effectués par la Surintendance au cours de
l’année 2009. En 2010, il a été possible de reprendre les
travaux sur cette structure essentielle au fonctionnement de la tannerie, puisque le puits a été transformé en
noria pour alimenter les bassins de lavage et trempage
des peaux. Comme le puits avait été découvert bouché,
nous avions émis l’hypothèse (MEFRA 122, 1, 2010,
p. 272-273) que «le tremblement de terre de 62 ou 63
ap. J.-C. ayant entraîné une rupture de l’aqueduc, les
artisans ont dû trouver une solution pour augmenter le
débit du puits, ce qui explique l’aménagement de la
roue élévatrice. Peu de temps avant l’éruption du
Vésuve, le puits fut comblé, sans doute car on disposait à
nouveau dans l’atelier d’un apport d’eau suffisant
depuis l’extérieur». Les recherches de cette année ont
totalement démenti ce scénario. D’une part, l’étude du
mobilier archéologique trouvé dans les fondations du
bâti de la noria montre que sa construction intervient
nettement avant le tremblement de terre. D’autre part le
comblement du puits assure qu’il fonctionnait encore en
79. Le remplissage est formé de deux types de sédiments. De la surface à la profondeur de 6 m environ, le
puits est rempli d’un limon grisâtre très compact, stérile
mis à part quelques fragments de tuiles et le squelette
d’une belette (animal fouisseur). À partir de 6 m,
commence une couche de lapilli purs ou mélangés par
endroits de tuiles et de fragments de maçonnerie. La
couche de lapilli se poursuit jusqu’à la profondeur de
11,50 m qu’il ne nous a pas été possible de dépasser car
le niveau de la nappe phréatique était stabilisé, malgré
les pompages, à 9,50 m de profondeur (fig. 90). Ce remplissage indique que le puits et la noria étaient en fonction au moment de l’éruption. La pluie de lapilli n’a
toutefois pas suffi à le combler et il est resté un orifice en
forme d’entonnoir à la surface. Cet orifice s’est progressivement comblé de cendres lors des phases successives
de l’éruption. Au moment des dégagements de 1873, il
est vraisemblable que les ouvriers ont trouvé l’orifice du
puits car la partie supérieure du comblement (au-dessus
des colluvions) contenait des gravats dont des enduits
peints : leur présence ne peut s’expliquer que par un
remblaiement. Mais les rapports de l’époque n’en ont
pas tenu compte : le puits est décrit comme une cuve,
probablement parce que le bassin de recueil de l’eau,
aujourd’hui très endommagé, communiquait avec les
deux cuves alimentant les dolia installés dans les ateliers.
Les plans anciens, notamment ceux de Mau, ne sont pas
assez précis pour restituer la disposition exacte du système.
Zone 9
La partie méridionale de la cour de la tannerie a été
sondée en 2003 et en 2006. Lors de ces travaux, un
305
carré et bordée de murets a livré des ossements dont
l’assemblage est caractéristique des déchets de tannerie
(métatarses et métacarpes de moutons). Cette découverte indique que la tannerie dont les cuves ont été
mises au jour dans la partie nord de la zone 13 s’étendait
jusqu’au mur est avant qu’elle ne soit en partie détruite
par la carrière de basalte.
Pièce 25
Fig. 91 – Pompéi, tannerie I 5. Le rempart en pappamonte au fond du
sondage de la zone 9, vu du nord (cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
tronçon de mur en grand appareil de pappamonte
implanté dans des colluvions anciennes a été mis au jour
(fig. 91). Un nouveau sondage 9-2 a été effectué cette
année pour mieux étudier ce rempart et découvrir
d’éventuels éléments de datation. La stratigraphie
relevée dans cette zone ne diffère pas de celle des zones
voisines 9-1 et 9-3. Au plus profond, le mur en grand
appareil est posé sur les couches géologiques formées de
sable argileux jaune recouvert de colluvions de sable
noir. Comme dans le sondage 9-3, une tranchée de fondation a été mise en évidence du côté nord (amont) du
mur, mais elle ne contenait aucun matériel datable. Le
mur, en grande partie écroulé du côté est, présentait
encore une élévation de trois assises à l’ouest. Au-dessus
de ces niveaux, prennent place des remblais comblant,
après sa destruction, la grande citerne située dans la
partie centrale de la cour. Ces remblais sont surmontés
de sols qui sont recoupés au sud par une large tranchée
de fondation nécessitée par la reconstruction du mur
sud de la cour lors des travaux qui suivirent le tremblement de terre de 62 ou 63.
La pièce 25 n’avait pas été fouillée jusqu’à présent
pour raisons de sécurité, le mur est de la pièce risquant
de s’écrouler. À la suite des travaux de restauration
effectués en 2009, le mur a été consolidé et il a été possible de compléter la stratigraphie de cette zone. Dans
ses grandes lignes, elle confirme les observations faites
dans la pièce 22 située immédiatement au nord. Le substrat basaltique est entamé par une carrière dont le fond
n’a pu être atteint. Son comblement, fait de blocs de
rebut, d’éclats de taille et de colluvions, intervient dans
le courant du IVe siècle avant J.-C.
Dans la première moitié du IIIe siècle, la première
maison est construite. Au fil du temps, plusieurs sols de
terre sont formés avant que la pièce ne reçoive un esca-
Zone 13
La zone 13 couvre un vaste espace dans le tiers méridional de l’îlot. Primitivement occupé par des maisons,
puis par des ateliers de potiers et de tanneurs, il fut grandement détruit par une carrière qui, après le tremblement de terre, fut ouverte pour extraire des moellons de
basalte. La carrière, sondée en 2006, s’étend au centre
de l’espace, laissant un espace le long des murs périmétraux. Pour vérifier la présence de vestiges antérieurs
au tremblement de terre dans la partie orientale de la
zone, un sondage a été ouvert au pied du mur est. Il a
révélé la présence d’un mur de refend, vestige d’une
maison détruite et deux fosses. La fosse sud, de plan
Fig. 92 – Pompéi, tannerie I 5. La base d’escalier dans la pièce 25, vu
du sud. Le sol correspondant est coupé à l’ouest par la tranchée de
fondation du mur de façade reconstruit après le tremblement de terre
(cliché J.-P. Brun CJB-CNRS/EFR).
306
Pompéi, Pistrina
Chronique
lier qui permettait d’accéder à l’étage (fig. 92). Dans la
phase finale, après le tremblement de terre, le mur de
façade ouest de l’îlot est reconstruit, l’escalier détruit et
la porte mettant en communication les pièces 22-25
avec le reste de l’îlot est bouchée. Au cours de ces travaux, le niveau du sol est fortement exhaussé par l’apport d’un remblai contenant des gravats, notamment des
fragments d’enduits peints.
Après cette dernière campagne de fouille, le cadre
général de l’évolution de l’îlot est clair. Un premier état
est marqué par l’implantation d’un mur en grand appareil de pappamonte traversant l’îlot d’est en ouest. Étant
donné sa localisation, son mode de construction et les
vestiges de son élévation qui compte au moins trois
assises, il semble qu’il faille rattacher ce tronçon au rempart décelé vers l’amphithéâtre et sous la porte de
Nocera (De Caro 1985, p. 75-114). Les céramiques
datables mises au jour dans nos sondages au contact de
ce mur sont très rares, mais il semble qu’il faille fixer la
datation, au moins de ce tronçon, vers la fin du
VIe siècle-début du Ve siècle. Au cours du Ve siècle ou au
début du IVe siècle, une vaste carrière de basalte est
ouverte en arrière du rempart, en partant de l’axe routier qui devait se situer à l’emplacement de la future voie
de Stabies. C’est l’existence de cette carrière qui déter-
minera par la suite la différence d’altitude entre l’îlot I 1
et l’îlot I 5, ainsi, probablement que la présence de l’insolite ruelle qui les sépare. Le second état de l’îlot I 5 est
marqué par l’édification d’une première maison à
l’angle nord-ouest de l’îlot au cours de la première
moitié du IIIe siècle. Elle est suivie au cours des deux
siècles suivants par la construction d’au moins cinq
autres maisons. Ces dernières connaissent, au cours de
l’état 3 (Ier siècle avant J.-C.), des évolutions plus ou
moins bien connues selon l’état de préservation (trois
maisons en effet seront en grande partie détruites par
des carrières après le tremblement de terre de 62 ou 63
après J.-C.). Lors de l’état 4, dans la première moitié du
Ier siècle après J.-C., les maisons de cet îlot sont transformées en ateliers artisanaux : poterie et tanneries. À la
veille du tremblement de terre, deux tanneries déjà
importantes occupent presque tout l’îlot. Le tremblement de terre de 62 ou 63 provoque de graves dégâts
aux structures bâties, notamment aux façades, et offre
l’opportunité de regrouper les deux tanneries et d’en
créer une nouvelle, mieux organisée que les deux précédentes. En parallèle à la construction de cette grande
tannerie, une carrière de basalte est ouverte dans la
partie sud de l’îlot et des fosses d’extraction de sable sont
creusées à l’emplacement d’anciennes maisons dans la
partie est.
Emmanuel BOTTE, Jean-Pierre BRUN, Laëtitia CAVASSA, Guilhem CHAPELIN et Martine LEGUILLOUX
[Avec la collaboration de Lou de BARBARIN-PAQUET, Martina GRIECO, Aline LACOMBE, Bastien LEMAIRE, Dorothée NEYME, John-Marc PIFFETEAU, Julien PLUMEREAU et d’Ophélie VAUXION]
POMPÉI, PISTRINA
RECHERCHES SUR LES BOULANGERIES
DE L’ITALIE ROMAINE
École française de Rome, Centre Jean-Bérard
(USR 3133, CNRS-EFR), Soprintendenza speciale
per i beni archeologici di Napoli e Pompei, Ministère des Affaires étrangères (Paris) et Institut
européen d’histoire et des cultures de l’alimentation (Tours).
La troisième campagne du projet «Pistrina – Étude
des boulangeries de l’Italie romaine» s’est déroulée à
3. Les photos des boulangeries de Pompéi (fig. 95c, 97-100) ont
été réalisées par des membres de l’équipe, sur concession du
Ministero per i Beni e le attività culturali – Soprintendenza
Pompéi du 13 juin au 16 juillet 2010 3. Outre la continuité des études thématiques consacrées aux relevés
des boulangeries, aux recherches archéobotaniques et
à la compréhension des techniques de construction
des fours, trois des 36 espaces associés à la production du pain ont été l’objet de sondages cette année.
Études thématiques
Les résultats archéobotaniques (carpologie, anthracologie, palynologie et étude des phytolithes) obtenus
en 2010 sont dans la parfaite continuité de ceux de la
campagne précédente : dans les sols de circulation des
archeologica di Napoli e Pompei. Toute reproduction, par
quelque moyen que ce soit, reste interdite.