Revue de droit comparé du travail et de la
sécurité sociale
3 | 2017
Le travail dans l’économie informelle, un défi pour le
droit social
Autriche
Günther Löschnigg et Antonia Csuk
Édition électronique
URL : https://journals.openedition.org/rdctss/431
DOI : 10.4000/rdctss.431
ISSN : 2262-9815
Éditeur
Centre de droit comparé du travail et de la sécurité sociale
Édition imprimée
Date de publication : 1 septembre 2017
Pagination : 188-191
ISSN : 2117-4350
Référence électronique
Günther Löschnigg et Antonia Csuk, « Autriche », Revue de droit comparé du travail et de la sécurité
sociale [En ligne], 3 | 2017, mis en ligne le 01 novembre 2017, consulté le 04 décembre 2021. URL :
http://journals.openedition.org/rdctss/431 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdctss.431
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AUTRICHE
GÜNTHER LÖSCHNIGG ET ANTONIA CSUK
Université Karl-Franzens de Graz
I. LA
PROTECTION
DES
SALARIÉS
ÂGÉS
CONTRE
LE
LICENCIEMENT
1
BGBl I 37/2017.
Cf. Löschnigg, Arbeitsrecht12
2
(2015) Rz 8/076 ff; Trost in
Strasser/Jabornegg/Resch
(Hrsg), ArbVG (Losebl) § 105
Rz 276 ff; Runggaldier, Die
krankheitsbedingte Kündigung,
ZAS, 1982, 130 (134 ff).
EUROPE
Cf. § 105 Abs 3b S 1 ArbVG;
3
voir à ce propos par exemple
Tinhofer, Die Beendigung des
Dienstverhältnisses von älteren
Arbeitnehmern, ZAS, 2014, 131
(139).
Les dispositions légales relatives à la protection
contre le licenciement ne protègent pas seulement
le salarié du chômage, mais conduisent aussi, en
termes de politique du marché du travail, à retarder
la hausse du taux de chômage. En revanche, une
protection accrue contre le licenciement réduit les
chances de trouver un emploi et a des conséquences
négatives pour le marché du travail. Ce paradoxe,
conduit de nombreux pays européens à des
expérimentations et des réformes dans le domaine
de la protection contre le licenciement. Cela
concerne par exemple la protection des personnes
handicapées contre le licenciement, mais aussi et
surtout les personnes âgées.
En Autriche, plutôt que de commencer par
réduire la protection des jeunes salariés contre
le licenciement, on a jusqu’à présent préféré
4
BGBl I 125/2017.
réduire celle des salariés plus âgés. La base
5
ErläutRV 1613 BlgNR 25. GP 1.
juridique de ce changement repose sur un
amendement de la loi sur l’organisation du travail
(« Arbeitsverfassungsgesetz »1). En principe,
en Autriche, la protection générale contre le
licenciement est conçue de telle façon que
l’employeur puisse justifier un licenciement par
des motifs inhérents à la personne du salarié qui
affectent négativement les intérêts de l’entreprise (comme par exemple des maladies
de longue durée, une prestation de travail inférieure à la moyenne, des difficultés de
concentration) 2. Cependant, si ces raisons découlent de l’âge avancé d’un salarié travaillant
depuis de nombreuses années dans l’entreprise, elles ne doivent servir de justification du
licenciement que dans le cas où le maintien dans l’emploi porte gravement atteinte aux
intérêts de l’entreprise 3. En ce qui concerne les salariés âgés, il faut particulièrement
prendre en considération le fait d’une période d’emploi continue dans l’entreprise pendant
de nombreuses années et les difficultés de réinsertion professionnelle à cause de l’âge. À
l’avenir, cette protection spéciale contre le licenciement ne s’appliquera plus aux salariés
ayant atteint l’âge de 50 ans au moment de leur recrutement 4. Cette nouvelle règle ne
concerne que des salariés embauchés après le 30 juin 2017. La protection accrue contre le
licenciement subsiste pour ceux ayant été engagés avant cette date. Cependant, pour ceux
âgés de plus de 50 ans et cherchant du travail, les chances de réinsertion professionnelle
devraient augmenter grâce à cette mesure. Du point de vue du législateur 5, la réduction de
la protection des salariés âgés devrait également contribuer à la lutte contre le chômage
chez les personnes âgées.
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AUTRICHE
II. LA PRÉVENTION DU « FAUX TRAVAIL INDÉPENDANT »
En Autriche, les systèmes de sécurité sociale
sont organisés différemment selon les catégories
de travailleurs (salariés, travailleurs indépendants,
agriculteurs etc.). Le contournement de la relation
salarié-employeur et du droit de travail est
parallèlement accompagnée de l’évitement du droit
de la sécurité sociale.
6
BGBl I 125/2017.
7
Erläut RV 1613 BlgNR 25. GP 1.
La loi du 1er août 2017 relative aux régimes
de
sécurité
sociale
(SozialversicherungsZuordnungsgesetz 6) vise à enrayer les faux
classements dans le système de sécurité sociale et les
fausses qualifications de travailleurs indépendants,
c’est-à-dire
des
salariés
déclarés
comme
’indépendants (« Scheinselbstständigkeiten »). Cet
objectif devrait être atteint grâce à une collaboration
et un échange d’informations entre les institutions de
sécurité sociale et l’administration fiscale en cas de doute. Les enquêtes doivent être menées
d’une façon coordonnée par l’institution d’assurance maladie selon la loi sur la sécurité
sociale générale ASVG (« Allgemeines Sozialversicherungsgesetz » ; le système de sécurité
sociale pour les travailleurs dépendants/les salariés 7) ainsi que par la sécurité sociale
pour les travailleurs indépendants SVA (« Sozialversicherung der Selbstständigen ») et la
sécurité sociale pour les agriculteurs SVB (« Sozialversicherungsanstalt der Bauern »). Si
ces enquêtes révèlent unanimement qu’il s’agit, durant la période considérée, d’une activité
professionnelle indépendante, le régime de l’assurance obligatoire est maintenu, comme
prévu par la loi GSVG (« Gewerbliches Sozialversicherungsgesetz » ; la sécurité sociale pour
les travailleurs indépendants), ou par la loi BSVG (« Bauern Sozialversicherungsgesetz » ;
la sécurité sociale pour les agriculteurs). En revanche, si l’organisme d’assurance maladie
et l’employeur ou si les autres organismes d’assurance constatent unanimement que,
contrairement à l’assurance souscrite jusque-là, il ne s’agit pas d’une activité professionnelle
indépendante, mais d’une relation salarié-employeur, qui relève donc d’une assurance
obligatoire, un reclassement dans le système de sécurité sociale pour les salariés (ASVG)
doit être effectué. Dans ces cas-là, l’institution d’assurance maladie, selon la loi ASVG sur
la sécurité sociale générale, doit rendre une décision, si la personne assurée ou l’employeur
le demande.
À défaut d’un accord unanime sur le bien-fondé du choix de l’assurance, l’organisme
d’assurance maladie compétent selon la loi ASVG, doit rendre une décision sur l’assurance
obligatoire en vertu de cette même loi. Cette décision doit être notifiée à la personne assurée
ainsi qu’à l’employeur. Une voie de recours contre cette décision est ouverte.
RDCTSS - 2017/3
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Indépendamment de la révision par les
organes de la sécurité sociale et l’administration
fiscale, les personnes assurées et les employeurs/
commettants auront, à l’avenir, la possibilité
de déposer une demande de réexamen du
choix d’assurance. Les institutions d’assurance
maladie et l’administration fiscale seront, par
conséquent, liées par cette constatation.
8
Concernant le reclassement
et l’effet obligatoire cf. Neumann/
Taudes, Rechtssicherheit für
Selbständige? ASoK 2017, 282
(286 f).
Voir à ce propos Greifeneder/
Mayr, Ende des Pflegeregresses!
9
ÖZPR 2017, 93.
Cf. Neumayr/Pfeil, Der
Pflegeregress wird abgeschafft –
was heißt das? ÖZPR 2017, 119.
En cas d’un reclassement avec effet rétroactif
dans le cadre d’une révision, les cotisations
font ensuite l’objet d’une procédure de cession :
toutes les primes qui sont versées à l’institution
de sécurité sociale des travailleurs indépendants
doivent être transférées à celle en charge des
salariés 8.
10
III. L’INTERDICTION
DE RECOURS POUR COUVRIR LES
FRAIS DE SOINS
C’est à l’appui d’une large majorité que la loi
du 1er août 2017, BGBL I 125/2017, clôtura une
longue discussion sociopolitique. Cette loi, par
voie de deux dispositions constitutionnelles (§§
330a et 707a alinéa 2 ASVG), interdit de porter
atteinte au patrimoine des personnes admises
dans un établissement de soins. Les frais pour
les soins dans ces établissements doivent
principalement être payés sur les revenus de la personne à soigner (notamment par
ses rentes et pensions), les collectivités publiques étant tenues de prendre en charge
le reste des coûts. On ne peut désormais plus toucher au patrimoine personnel du
patient 9. Non seulement la fortune de la personne dépendante ne doit plus servir
à couvrir les frais de soins, mais l’utilisation de la fortune de ses proches parents,
héritiers et donataires est également exclue10. L’interdiction du recours à la fortune
personnelle pour couvrir les frais de soins (« Pflegeregress ») entrera en vigueur le
1er janvier 2018. À partir de ce moment-là, on ne pourra plus faire valoir ses droits à
l’indemnisation et les procédures pendantes devront être clôturées. Dans le cas où des
dispositions légales des États fédérés seraient en contradiction avec cette interdiction,
elles seront aussi abrogées le 1er janvier 2018.
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IV. L’EMBAUCHE DE SALARIÉS ÉTRANGERS
Le règlement instauré en 2011 relatif à l’immigration
de salariés qualifiés des États tiers selon certains
critères reposait sur les propositions des partenaires
sociaux et les expériences de pays d’immigration
traditionnels (notamment le Canada). L’admission à
l’emploi s’effectue sur décision administrative (la carte
« rouge-blanc-rouge » ; « Rot-Weiß-Rot-Karte »). Le
système permet un examen plus précis des critères
d’admission sur le marché du travail en comparaison
avec l’ancien règlement basé sur des quotas fixés par
l’État 11. Des critères très importants, en termes de
politique du marché du travail, sont la qualification,
l’expérience professionnelle, la connaissance des
langues et l’âge. La loi du 22 mai 2017 12 valorise
les critères de compétences linguistiques et les
expériences professionnelles. En outre, les titulaires
d’un diplôme de niveau licence, d’un doctorat ou d’un
PhD sont intégrés dans le système de la carte « rougeblanc-rouge ». La durée de validité de la carte est
généralement prolongée de 12 mois à 24 mois, pour
pouvoir contrôler sur une plus longue période si les
salariés admis sont réellement embauchés selon les
conditions d’admission spécifiées. Comme jusqu’à
présent, les titulaires d’une carte « rouge-blancrouge » auront droit de recevoir, à la suite de cette
première phase, une carte « rouge-blanc-rouge plus »
avec un accès illimité au marché du travail 13.
11
ErläutRV 1516 BlgNR 25. GP 1.
12
BGBl I 66/2017.
Concernant la nouvelle
réglementation en détail voir
Lindmayr,
Änderungen
von
AuslBG und ASVG - BGBl, ARD
6551/15/2017.
13
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